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lundi 3 juin 2024

Tout sert !

Y aurait-il la moindre parcelle de vivant qui n’ait son utilité ?

J’ai beau scruter : dans le monde végétal, tout sert. Le plus visible est la chaîne alimentaire. Mais pas seulement. Le végétal contient des principes actifs pour soigner les animaux et les humains. Il constitue la base de la pharmacopée. Il régule le climat. En se nourrissant du minéral terrestre et de la lumière céleste, il montre subtilement l’amour inconditionnel : recevoir-donner.


Le minéral qui nourrit le végétal est indissociable de la chaîne du vivant. Chaque atome, dans sa spécificité, s’unit à un autre pour constituer le socle de la vie terrestre visible. Par exemple le carbone aux multiples affinités ou la combinaison hydrogène-oxygène pour son environnement gazeux.

Y aurait-il le moindre insecte, le moindre animal qui n’ait son utilité ? Même si je connais peu d’animaux parmi leur immense diversité, je sais que chaque espèce possède un instinct dominant qui lui est propre, et lui donne une façon unique d’exister. Et nous sommes la sommation du monde animal. Nous leur devons la base de ce qui constitue notre personnalité.

Avec un petit truc en plus : la parole. Tout a son utilité. Et l’homme n’aurait pas d’utilité ?

Au sommet de l’évolution, le petit dernier arrivé sur terre n’aurait pas sa place active dans la chaîne du vivant ?


L’être le plus complexe de la création a, comme les autres, son utilité. Bien sûr, son originalité, c’est qu’il doit trouver sa propre utilité. Elle est forcement singulière car chaque être humain est singulier.

Mais la famille humaine a reçu et sait la nature de son service, à la suite des règnes qui nous ont précédés. Être comme le minéral, croître comme le végétal, instinctivement ensemble comme l’animal, en le sachant par sa personnalité, son rôle : donner de l’amour. 

Mettre de la paix là où il y a la guerre, de l’ordre là où le désordre gouverne, mettre de la douceur où la haine domine.

Donner de l’amour, selon sa propre forme, voilà l’utilité dévolue à chacun.

Christian Rœsch

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mardi 16 avril 2024

L'autre peut me nourrir...

 


Il est extrêmement rare de rencontrer quelqu’un, qu’on voie beaucoup de monde ou qu’on soit ce qu’on appelle un solitaire. La plupart des gens rendent très difficile de les rencontrer parce qu’ils ne sont pas vraiment dans leur parole ou parce qu’ils sont sans âme. Je fais toujours à l’autre le crédit de la nouveauté incroyable de son existence, mais ce crédit va s’user si l’autre a gâché cette merveille-là pour devenir comme tout le monde. Comment parler avec personne ? C’est impossible.

Parfois le désir de partager est si fort que je vais quand même tenter ma chance mais souvent en vain. Les opinions ne m’intéressent pas. Ce qui me touche, c’est quand l’autre met tout le poids de sa vie dans la balance des mots et que sa pensée s’appuie sur ça. Pour ma part, j’ai parfois l’impression d’être totalement incapable d’aimer, et en même temps d’aimer plus que personne. Je vois très peu de monde, mais je peux être indéfiniment avec l’autre quand il est là. Quand je suis né, on m’a proposé le menu du monde, et il n’y avait rien de comestible. Mais quand l’autre est vraiment avec moi, je peux manger : je bois une gorgée d’air, je mange une cuillerée de lumière.

~ Christian Bobin

La lumière du monde 

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mardi 19 mars 2024

Communication autoritaire

 


Quid du nouvel outil « vocal » beaucoup utilisé par la jeune génération ?

Le fait de parler à l’autre oralement supposait jusqu’à présent au moins un « maintenant », un présent en commun (pas forcément un « ici » depuis que le téléphone existe). La conversation nécessitait une forme de synchronisation. Or le vocal est un mode de communication orale sans synchronisation, c’est la première fois que cela apparaît dans l’histoire de l’humanité.

C’est un changement anthropologique ?

Bien sûr. Aujourd’hui, le message est antérieur à l’acte de communication. Quelqu’un est seul ; il détient une information ; il la délivre ; la seule chose importante, c’est de s’assurer que l’autre l’a bien reçue. À l’inverse, dans les dialogues de Platon, on crée des vérités par l’échange et le dialogue. Il n’y a pas de message préexistant. Socrate dit : je sais que je ne sais pas. Le questionnement, l’échange nous conduisent quelque part. On vit un voyage à deux vers le message.

Dans notre paradigme actuel, le message est antérieur à la rencontre. C’est quand même moins intéressant ! La rencontre ne va pas me faire changer ni m’amener à penser, créer, ressentir des sentiments nouveaux. On ne se laisse plus bousculer par la rencontre : je veux juste que les autres entendent ce que j’ai à dire et qu’ils l’acceptent. Dans l’acte de communication, il y a désormais une forme d’autoritarisme.

Alexandre Lacroix, directeur de la revue Philosophie magazine

source : La Vie magazine

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samedi 13 janvier 2024

Parler aux enfants

 "Je condamne l’ignorance qui règne en ce moment dans les démocraties aussi bien que dans les régimes totalitaires. Cette ignorance est si forte, souvent si totale, qu’on la dirait voulue par le système, sinon par le régime. J’ai souvent réfléchi à ce que pourrait être l’éducation de l’enfant.


Je pense qu’il faudrait des études de base, très simples, où l’enfant apprendrait qu’il existe au sein de l’univers, sur une planète dont il devra plus tard ménager les ressources, qu’il dépend de l’air, de l’eau, de tous les êtres vivants, et que la moindre erreur ou la moindre violence risque de tout détruire.

Il apprendrait que les hommes se sont entretués dans des guerres qui n’ont jamais fait que produire d’autres guerres, et que chaque pays arrange son histoire, mensongèrement, de façon à flatter son orgueil.

On lui apprendrait assez du passé pour qu’il se sente relié aux hommes qui l’ont précédé, pour qu’il les admire là où ils méritent de l’être, sans s’en faire des idoles, non plus que du présent ou d’un hypothétique avenir.

On essaierait de le familiariser à la fois avec les livres et les choses ; il saurait le nom des plantes, il connaîtrait les animaux sans se livrer aux hideuses vivisections imposées aux enfants et aux très jeunes adolescents sous prétexte de biologie. ; il apprendrait à donner les premiers soins aux blessés ; son éducation sexuelle comprendrait la présence à un accouchement, son éducation mentale la vue des grands malades et des morts.

On lui donnerait aussi les simples notions de morale sans laquelle la vie en société est impossible, instruction que les écoles élémentaires et moyennes n’osent plus donner dans ce pays.

En matière de religion, on ne lui imposerait aucune pratique ou aucun dogme, mais on lui dirait quelque chose de toutes les grandes religions du monde, et surtout de celle du pays où il se trouve, pour éveiller en lui le respect et détruire d’avance certains odieux préjugés.

On lui apprendrait à aimer le travail quand le travail est utile, et à ne pas se laisser prendre à l’imposture publicitaire, en commençant par celle qui lui vante des friandises plus ou moins frelatées, en lui préparant des caries et des diabètes futurs.

Il y a certainement un moyen de parler aux enfants de choses véritablement importantes plus tôt qu’on ne le fait."

Marguerite Yourcenar, "Les yeux ouverts."


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dimanche 28 mai 2023

Parole portée

 

Quand l'homme oublie qu'il est porteur de la parole, il ne parle plus. C'est bien en effet ce qu'il se passe. La plupart des gens ne parlent pas, ils répètent, ce n'est pas tout à fait la même chose.

Quand l'homme ne parle plus, il est parlé.

Jacques Lacan / Le mythe individuel du névrosé


Phoenix : dans la pensée taoïste, le phoenix est lié au Feu et à la parole authentique et transformatrice.

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dimanche 26 mars 2023

Ne me laissez pas avec lui : il va me parler !

Source : La vie

 La parole n’est pas toujours apaisante. Jacques Arènes analyse comment elle est parfois instrument d’emprise ou d’abus. Ceux qui sont pleins d’eux-mêmes fuient alors de toute façon une parole vraie…


« Ne me laissez pas avec lui : il va me parler ! » : en voilà une exclamation étrange, tirée de la pièce Oncle Vania, de Tchekhov, actuellement jouée au théâtre de l’Odéon à Paris. Elle sort de la bouche d’un des protagonistes, Sérébriakov, un personnage d’un narcissisme épouvantable fuyant le discours de son beau-fils Vania, qui lui reproche fort justement, entre autres, d’avoir perdu sa vie à son service.

J’évoquais, la semaine dernière, la dimension bénéfique des paroles de paix. Evidemment, il ne faut pas croire que les paroles soient toujours apaisantes… Il arrive même que l’on fuie certaines conversations, de peur qu’elles ne nous assomment, et nous entraînent en une forme d’angoisse. La parole est donc parfois loin d’être rassurante, bien au contraire. Elle ne fait alors qu’attiser le ressentiment, voire la haine. Un autre personnage de cette pièce l’affirme : « ce sont ni les brigands ni les incendies qui détruisent le monde, mais la haine, l'hostilité, les petites intrigues... ».

Examiner de plus près les « abus de parole »

Il faut reconnaître que la parole est une arme redoutable. Elle n’est pas seulement outil de communication, utile évidemment en ce but, mais elle constitue surtout un espace fondamental d’échange affectif, heureux ou malheureux. Et peut donc se mettre au service de l’influence ou de l’emprise. « Les petites intrigues » paraissent anodines, mais atteignent quelquefois, telles des missiles, une très longue portée. Elles dévaluent la parole en tant que porteuse de réconfort. Elles la pervertissent même. L’échange humain ne constitue plus alors un espace de mutualité, et devient curieusement inconfortable, voire menaçant.

Dans le contexte des abus, abondamment commentés aujourd’hui à propose de l’Eglise, il est d’abord évident de se focaliser sur la dimension sexuelle desdits abus. On a cependant tort de ne pas examiner de plus près les « abus de parole ». Chez les frères Philippe notamment, qui sont au cœur de l’actualité en raison des deux rapports, publiés récemment, concernant l’Arche (et Jean Vanier) et leurs agissements au sein de l’Ordre des dominicains, et de quelques congrégations, « l’abus de parole » me paraît essentiel. Il suscite et enveloppe l’ensemble de leurs agissements. De nombreuses personnes, hommes et femmes, se laissent prendre, à des degrés divers par cet abus, c’est-à-dire par cette manière d’utiliser la parole au service de l’intrigue, de la puissance personnelle, de l’emprise ou d’une séduction sans empathie.


Celui qui ne sait pas écouter ne saura pas non plus parler

Autant il est nécessaire de faire et de disséminer la paix avec nos mots et nos paroles, autant il faut aussi se méfier des filets emprisonnants de la parole quand elle se veut persuasive ou envoutante, et quand elle ne se met plus au diapason de la croissance de l’autre. Ce qui est vrai pour la parole l’est d’ailleurs aussi pour l’écoute. Celui qui ne sait pas écouter, c’est-à-dire qui ne sait pas se libérer de lui-même quand il écoute, ne saura pas non plus parler, en tous cas pas dans une perspective d’échange et de mutualité. Quand on est plein de soi-même, quand on est encombré par ses propres intrigues, il est impossible de s’ouvrir à une autre manière de penser, à sa singularité, à son côté déstabilisant. Il devient chimérique de réellement échanger.

Vania avait pourtant des choses importantes à lui dire, à cet égoïste de Sérébriakov. Mais ce denier ne peut pas écouter. Et il ne veut pas entendre une parole inconfortable pour lui. Parce qu’il est rempli de lui-même, et parce qu’il ne souhaite pas changer…

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dimanche 21 août 2022

Poème du monde...


 "Cette petite parole que je sens en moi me parler depuis toujours. Cette voix secrète qui ne parle pas avec les mots de tous les jours, silencieuse comme le vol d'un papillon qui nous relie au mystère ineffable du monde. Cette part de liberté en nous, comme une enfance retrouvée, au-delà de l'état d'enfance, de la nostalgie. Ce don de l'émerveillement, cette source, cette origine retrouvée qui séjournent en nous depuis l'aube des temps. Cette espèce de tristesse, sans raison, tranquille, au milieu d'une joie limpide, qui, enfant déjà, nous reposait de tout, tel un grand lac calme où le temps se repose. Cette musique muette que chacun porte en soi, comme un écho du chant du monde. Ce murmure incessant en moi, en nous, que j'appelle la poésie, ou plutôt le Poème du Monde, peut-être est-ce la même chose que ce qu'on appelle le sentiment du religieux ou du sacré ?"


Marie Botturi
Les semailles du vent
Artiste Grazia Battezzato

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lundi 9 mai 2022

Pensées corporelles


 "La pensée se manifeste par une parole, la parole se traduit par un acte, l'acte devient une habitude, et l'habitude se solidifie en un caractère. Alors, observe avec soin la pensée et ses méandres, et laisse-la jaillir de l'amour. Né du souci de tous les êtres...

De même que l'ombre suit le corps, tel on pense, tel on devient."

Bouddha. - (Via Matthieu Ricard )


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dimanche 25 avril 2021

Nous sommes des vivants qui parlent

 méditer sur ce qui fait l'essentiel de notre humanité : écouter et recevoir une parole.

Nous ne savons jamais de qui viendra la parole qui fécondera notre vie, et qui nous sauvera, à l'heure de l'épreuve. Abraham le savait, lui qui, au pied du chêne de Mamré, a fait hospitalité aux anges, écoutant cette annonce surprenante d'un enfant à venir, gardant respectueusement leur parole.

À sa suite, j'aime ouvrir ma maison, et mes oreilles. Suivre la tradition africaine de la maison ouverte qui demande que, dans chaque village de la savane, le gîte et le couvert soient offerts à l'étranger de passage, en échange de sa parole. Une manière de partager la connaissance et la sagesse de tout chemin de vie.


La plus belle maison ouverte est, selon moi, notre maison commune. Dès que le printemps revient, je gagne le parc où j'ai l'habitude de me promener, pour écouter ce chant de la terre. Je m'y assois, pieds nus dans l'herbe, dos contre le cerisier du Japon que j'ai adopté comme banc de méditation. J'aime tant voir cet arbre se donner à la lumière, en se mettant en feuilles et en fleurs.

Il me fait contempler la tendresse virginale du vert de ses feuilles, comme la pudeur du rose de ses fleurs. La sève qui monte à ses branches est comme une larme qui monte à ses yeux, une parole qui monte à ses lèvres.

J'écoute par toute ma peau

Au pied de cet arbre, je me fais toute écoute. J'écoute, attentive, ce verger de cerisiers en fleurs, y voyant plus qu'une maison ouverte et commune : un jardin de la Parole. Le vent souffle légèrement, les oiseaux chantent et se font entendre autour de moi, dans le plein silence des voix humaines.


Je me revêts de la douceur de cette enveloppe sonore, comme pour m'y purifier de la cacophonie de la ville. Pas de bruits chaotiques, mais des filets d'eau, chantants et mélodieux, devenant rivières et fleuves, se jetant dans la mer de mon oreille, résonnant dans l'abysse de mes profondeurs.

Quand j'écoute ainsi, je n'écoute pas que de mes deux oreilles, mais par toute ma peau. Au jardin d'Éden, il est dit qu'Adam et Ève étaient, comme deux nouveau-nés, tout de peau. Tympan sonore au creux de leurs oreilles, cette peau était comme un tambour. Par lui, ils entraient en résonance, et en intimité profonde, avec toutes les formes de vie, dans l'univers visible et invisible.

Se laissant toucher et caresser par le vivant, ils pouvaient nommer l'essence de toutes les créatures. Chantres et poètes, ils fructifiaient le don de la parole qu'ils avaient reçu : celui de la parole « essentielle ».

Des vivants qui parlent


Je sais, moi qui prends la parole dans des livres, et qui donne la parole dans des ateliers, que ce don de la parole « essentielle », fondée sur une communion avec le vivant, est ce qui est le plus blessé en nous. Le serpent s'est glissé entre les herbes, et il a détourné notre peau et nos oreilles du chant de la terre.

Il a capturé notre attention pour nous faire vivre sous l'emprise de ses ondes, où toute parole professée se trouve, bien souvent, déformée et critiquée. Où toute parole professée se trouve blasphémée. Une vraie attaque virale et un ravage plus grand que la pandémie que nous traversons.

Pourtant, ce don de la parole « essentielle » est notre vocation à tous. Nous sommes appelés à être « des vivants qui parlent », à extraire un élixir de vie de tous les événements de notre chemin, à faire sur eux la lumière en laissant monter à nos lèvres une parole personnelle de sagesse.

Les disciples le savaient, eux qui avaient ouvert l'oreille de leur cœur à la voix du Bon Pasteur : « Seigneur, vers qui irions-nous ? Tu as les paroles de la vie éternelle. » Si le serpent a mordu, le Christ a restauré le don premier fait à Adam : celui de la parole de vie, celui de la parole qui féconde et qui guérit.

Charlotte Jousseaume est écrivaine. Elle anime des ateliers d'écriture et a publié Le silence est ma joie (Albin Michel), Quatuor mystique et Et le miroir brûla (Cerf).


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vendredi 16 avril 2021

Secret de famille

 Il est toujours impressionnant, lorsque je reçois des personnes, de voir comment les expériences vécues dans l'enfance sont minimisées et de voir également que les secrets pourrissent peu à peu les racines de l'arbre généalogique. J'ai apprécié l'approche de Philippe Grimbert.



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Extrait du magazine de la santé




dimanche 22 novembre 2020

Comment traverser l'épreuve de l'inceste ?

 


1. Libérer la parole

Il est d'une urgence vitale pour les victimes, mais aussi pour les proches, de parler, de sortir du secret, de lever le tabou. Jésus nous pousse à oser mettre des mots sur les maux car « la vérité vous rendra libres » (Jean 8, 32). Ce n'est pas un choix, mais un devoir pour nous tous, même si, évidemment, de telles paroles peuvent provoquer des tsunamis.

2. Se faire accompagner

Une victime d'agression ne peut pas s'en sortir seule. Le rôle de l'entourage, des proches, est primordial. L'accompagnement psychologique également. Si je n'avais pas entrepris une thérapie à partir de 2009, j'aurais sans doute sombré. Tout le défi est de trouver le bon thérapeute, formé au traitement des violences sexuelles.

3. Prier pour l'agresseur

J'ai entendu une parole forte un jour : « Il n'est pas en notre pouvoir de ne plus sentir et d'oublier l'offense, mais le coeur qui s'offre à l'Esprit saint retourne la blessure en compassion transformant l'offense en intercession. » Quand j'ai commencé à prier pour mes parents, pour leur conversion, j'ai fait un grand pas sur le chemin du pardon, et donc de ma libération intérieure. Car l'incapacité à libérer la bénédiction retient la guérison. J'ai pleinement conscience que certaines victimes ne souhaitent pas emprunter cette voie ou n'y parviennent pas. Le pardon est un long chemin.

4. Pardonner

Le pardon, ce n'est pas l'oubli. Le pardon ne supprime pas la nécessité de la justice. Il faut dénoncer le mal pour se considérer comme victime et pour aider l'agresseur à corriger sa faute. J'ai fini par comprendre que le vrai pardon, c'est accepter que mes cicatrices, et la souffrance qui en découle, ne disparaîtront jamais, mais qu'elles peuvent se transformer en quelque chose de beau. Pour moi, le vrai pardon est un fruit de la foi. Sans Dieu, je n'aurais jamais pu pardonner à mes parents, ni d'ailleurs à moi-même - la culpabilité aurait continué à me ronger.

Mathilde Désanges


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lundi 3 août 2020

Retour... vers soi.


Quelques phrases pour la semaine :

A se demander régulièrement...

permet d'éclairer les souffrances du présent...

Ressentez plus, vous penserez moins...
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mardi 26 mai 2020

En ce corps par Ma Anandamayi

Petite fille, ma grand-mère m'appelait "La Distraite".
Un jour, elle me demande d'aller laver un pot et ajoute en manière d'avertissement :
Amène seulement le pot cassé... et tu verras !!
Je vais à la fontaine. Là, alors que je parlais à un arbre, le pot me tombe des mains et se brise avant que je m'en aperçoive. Je ramasse scrupuleusement chaque fragment et retourne à la maison.
Ma grand-mère me dit :
Mais qu'est-ce que tu me rapportes ?
Tu m'as dit de ramener le pot cassé. Le voilà.
Ma grand-mère, loin de se mettre en colère, eut du mal à réprimer son rire.
Il fut un temps où si quelqu'un s'inclinait devant moi, je ne pouvais faire autrement que de m'incliner jusqu'à ses pieds.
Ce pouvait être dans mon dos et de très loin, si quelqu'un s'inclinait, même si je n'avais rien vu, ma tête d'elle-même s'inclinait. Maintenant, je laisse chacun faire, sans plus.
En fait, c'est à Dieu même que vous adressez votre hommage.
Vous pouvez m'apprécier ou non. Mais moi, je ne peux absolument pas me passer de vous ! (elle éclate de rire)
Pendant longtemps je n'ai rien mangé.
La nourriture ne m'évoquait rien.
C'est en voyant un jour un chien engloutir une bolée de riz que je me suis réalimentée.
Ma main ne sait pas me donner à manger. On m'a souvent demandé pourquoi. On mange pour préserver sa vie. Je n'ai pas le moindre élan pour préserver ma vie. J'ai essayé quelques jours de manger "toute seule", mais je porte la nourriture à la bouche "des autres". Ayant vu cela, ils ont préféré m'alimenter !
Le sanskrit bien sûr, mais aussi tous les autres langages me sont une fois ou l'autre venus aux lèvres. Je communiquais ainsi avec les saints des contrées lointaines, dans leur propre langage.
Ce n'est pas nécessaire de passer par les lettres et les mots pour comprendre un langage. Quels que soient les gens qui m'environnent, leurs pensées captent mon attention, et leur langage émerge directement en moi.
Une chienne ne me quittait plus. Elle écoutait les chants, sa tête posée sur mes genoux. Quand j'intervenais pour dire quelque chose, elle se couchait à mes pieds et écoutait. Parfois elle bondissait et japait pendant les chants. C'était sa façon de danser et de chanter. Quand elle avait sa tête sur mes genoux, elle attendait la fin des chants pour se redresser, prête à recevoir avec tous ceux assemblés sa part d'offrande. Un jour elle accoucha. Elle ne manqua pas les chants du soir et revint vers ses petits aussitôt après. Il en fut ainsi tout le temps de mon séjour. Un chevreau vint se joindre à elle. Le soir, pendant les chants, j'avais sur un genou la tête de la chienne ; sur l'autre genou, la tête du chevreau...
Si vous considérez que je sais tout, cela rend toute communication impossible entre vous et moi. Si je sais tout, que puis-je vous demander ?
Les questions anodines, laissez-moi vous les poser, même si je connais la réponse !
Je suis une vagabonde qui ne tient pas en place dites-vous... Vous considérez que je vais deci delà parce que vous êtes vous-même soumis au va-et-vient. En réalité, je suis à la même place. Je ne fais que me déplacer chez moi. Quand vous êtes chez vous, restez-vous tout le temps dans un fauteuil ? Vous aussi, vous allez d'une pièce à l'autre. Je ne fais rien de plus. Je suis chez moi. Nulle part ailleurs.
Qui a le pouvoir de venir à moi, à moins que je ne l'attire ?
Je ne vous réponds pas. Cela vient à ma bouche. La réponse est "à vous" comme vos questions sont "à vous".
Je suis votre enfant.
Vous m'offrez de l'eau fraîche. Je la bois.
Vous me donnez de l'eau sale, je la filtre pour vous.
Je ne dis jamais, je reviendrai vous voir, ou je ne reviendrai pas...
Je dis : "je suis dans ce corps." Si vous me ramenez, je reviens.
De nombreuses âmes - pas seulement les plus pures... - viennent à moi. Je les rencontre, chacune selon son mode de compréhension.
Je suis l'univers jusqu'à la moindre poussière, au moindre insecte.
Vous me demandez si vous êtes proches de moi, alors que je vis en totalité.
Vous, mais aussi ceux qui ne m'ont jamais vue, ceux qui n'ont jamais entendu parler de moi, traversent ma vision quand ils sont dans le besoin. Alors je fais le nécessaire.
J'insiste :
Prenez contre votre poitrine cette enfant. Vous trouvez plus commode de l'appeler MERE. Vous la tenez ainsi à distance respectueuse. Une mère est une femme âgée. Vous ne serrez pas contre vous avec toute votre ferveur une femme âgée, n'est-ce pas ? Ma prière est que vous me regardiez comme votre fille et me teniez de toutes vos forces embrassée.
Jamais je n'insiste pour qu'on écoute ou suive mes conseils. "Ce corps" prononce ce que vous lui faites dire. Certains trouvent dans ces mots l'élan qu'ils cherchent. D'autres ne trouvent rien car ils ne cherchent pas vraiment.
Si je vous demande de ne pas trop vous préoccuper de savoir qui est "ce corps", ce n'est pas tant pour que vous imaginiez qu'il est tellement supérieur ! Vous pouvez l'envoyer au Diable ou le traiter si vous préférez comme l'idiot du village... (rires)
Parfois un robinet soupire à fendre l'âme. Hier dans la cour c'était le cas. j'étais convulsée de rire à l'entendre. Je dois avoir un écrou déserré dans la tête ! Il n'y avait pas de quoi rire... Cela traverse "ce corps" sans raison. Tout peut m'arracher un rire. Alors les tentatives de me ramener au calme ne font que jeter de l'huile sur le feu.
Il est venu ici sous tant de formes pour s'offrir à cette mendiante (elle se montre elle-même).
A tous, cette mendiante demande une seule chose : méditez sur Dieu. Il s'est manifesté comme le monde entier. Il est tout entier le carnaval de cet UN.
Pour moi, Il y a un seul maître-son résonnant dans tout l'univers.
Je considère toutes les mains comme les miennes. En réalité je mange toujours de ma propre main.
Ce corps n'est qu'une poupée. Vous voulez jouer avec elle... elle joue.
Ce corps est toujours dans le même état, non changeant. Votre disposition vous fait considérer une phase de son comportement comme ordinaire ou extraordinaire.
Une personne demanda :
Ma, quelle sorte de rêves avez-vous ?
Elle répondit :
Dormir n'est possible qu'au stade de l'ignorance. Quand il n'y a pas d'ignorance, il n'y a pas de sommeil. Comment pourrait-il y avoir des rêves ? Mais si vous dites que tout est rêve alors c'est autre chose !
Y a-t-il une différence essentielle entre moi-même et vous-même ?
Seulement parce qu'Il est existe un JE et un VOUS.
Réellement, dans ce corps, rien n'existe qui soit de l'ordre du désir et du manque.
Une graine a-t-elle le désir de faire un arbre ? Un arbre a-t-il le désir de nous abriter dans la fraîcheur de son ombre ?
Des émotions surgissent dans ce corps selon vos besoins.
Chaque question n'obtient pas toujours sa réponse. Vous n'êtes pas toujours capables de me faire donner une solution absolue. Peut-être que cela ne servirait à rien qu'il en soit autrement.
Je n'agis pas, comme vous le faites, poussée par ma volonté. Cela arrive comme cela arrive de tout temps.
Quand l'écorce de l'arbre fut entamée, ce corps reçut la blessure et ressentit la souffrance.
Laissons cela. Si l'on évoquait plus longtemps de tels événements en sa présence, ce corps se raidirait probablement.
Ici, n'est-ce pas... Tout ce qui devait arriver est arrivé. Tout ce qui était désiré par vous tous, pour votre bénéfice, est accompli.
Savez-vous ce qu'il en est de ce corps ?
Tous les "noeuds" internes sont défaits. C'est pourquoi quand une maladie l'attaque, elle l'investit totalement. Tout est dénoué, jusqu'à la racine de chaque cheveu. Aussi les maladies peuvent venir sans entrave. Mais quand le remède vient, il se répand tout aussi facilement.
Ici... (Elle se montre elle-même) Rien qui soit de l'ordre de donner, prendre et même servir... Sur votre plan, vous avez peut-être cette impression !
Je n'ai pas la place de me retourner. On ne peut aller nulle part où Il ne soit.
Ce corps est une marionnette - il joue ce que vous lui faites jouer.
Ce corps répond aussi au cri fervent de ceux qui ne l'ont jamais rencontré.
Quel que soit le Nom sous lequel vous voulez chercher Dieu, cette enfant vous souhaite la bienvenue du fond du cÏur.
Je ne fais ni ne dis rien avec un motif ou par effort de volonté. Ce sont vos pensées ou désirs qui font dire ou faire des choses à ce corps pour votre bénéfice.
Je vois souvent ce qui va arriver dans le futur, mais souvent aussi les mots ne viennent pas.
Je n'ai aucun besoin de faire ou dire quoi que ce soit. Il n'y a jamais eu aucun besoin. Il n'y en a pas maintenant. Il n'y en aura pas non plus dans le futur.
Ce que vous voyiez manifesté en moi dans le passé, ce que vous voyez maintenant, ce que vous verrez dans le futur, est pour le bien de tous.
Si vous cherchez ce qu'il y a de particulier en ma personne, je dois vous dire que le monde entier est ma personne...
Ma volonté serait irrésistible si je l'exprimais !
Qui est ANANDAMOYI ?
Qui est "envahi de joie" ?
Lui dans toutes les formes, éternellement intronisé au cœur de tout être. En vérité, Il demeure partout. Ayant vu Cela, atteint Cela, tout est vu, tout est atteint. Ce qui signifie : être sans peur, sûr, libre de tout conflit, immuable, impérissable.
"Ce corps" ne fait venir personne à lui, n'écarte personne, il ne parle à personne, ne prend la nourriture de personne.
Qui suis-je ?
On peut dire qui l'on est si l'on a une perception de soi-même.
Je n'ai en rien cette perception.
Alors je suis ce que vous voulez que je sois.
Ma Anandamayi