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lundi 30 septembre 2024

Des oiseaux plein la voix


Je n'ai pas bien compris
ce que m'a dit la bergeronette
venue se poser
doucement sur la fenêtre,
je n'ai pas retenu les notes
de son chant minuscule
mais je suis sûr qu'elle et moi
parlons la même
langue-monde.
Jean-Christophe Ribeyre - Des oiseaux plein la voix
Dessins : Cécile A. Holdban
Éditions L'Ail des ours


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lundi 27 novembre 2023

Un éloge des lettres


Je vous propose un éloge des Lettres. Pourquoi donc avons-nous perdu l'habitude de jouer avec elles ? 

Au commencement était le Verbe… Nous connaissons le surgissement de cette phrase initiale dans l’Evangile de Jean, le plus ésotérique. Il s’agit là du Verbe doté d’une majuscule, désignant la parole divine qui crée en énonçant, l’acte de conscience primordial, vierge du discours, qui donne consistance au monde. 

Quelle est l'essence de ce Verbe, sinon la vibration première? Certains mandalas bouddhistes ou hindous nous présentent en leur centre la syllabe primitive d’où tout rayonne, le AUM fondamental d’où émerge toute création. 

Cette primauté accordée au son, dans les traditions spirituelles, n’est pas seulement un reflet des pouvoirs du langage, ni uniquement le signe d’un impact bénéfique sur le corps et l’esprit ou le système nerveux – chant, mantras, poésie ancienne (lyrique, au sens premier du terme). Il est ici surtout  question de ce qui constitue la forme primitive, la plus frêle, la plus insaisissable possible après le silence, la plus proche de celui-ci entendu comme écoute profonde, attention pleine et entière à ce qui peut advenir. 

Fondamentalement, le son primitif révèle la veille dont chacun de nous est capable lorsqu’il fait taire ses pensées inutiles, les phrases où nous nous enfermons comme en une toile d’araignée et qui nous exilent loin, très loin du monde réel. Même les mots peuvent nous emprisonner. Ils qualifient, ils affirment...


Le petit enfant, lui, échappe aux mots. Il les balbutie, les déforme, en fait des ballons de baudruche ou de la pâte à modeler. Il s’attache à leur fragment le plus infime, la lettre. Il aime les abécédaires colorés, imagés. Bien après les fabuleux enlumineurs du Moyen Age, plusieurs poètes du 19e siècle ont cherché, eux aussi, à revenir aux lettres, leur prêtant couleurs et formes fantaisistes, de Hugo à Rimbaud, en passant par Emile Blémont, moins illustre, auteur d’un bel « Alphabet symbolique » que j’ai la chance de posséder.

La lettre vibre, oui, elle permet au sens de trembler, de s’esquisser à peine sans se fixer. Elle donne une impulsion au mot, lorsqu’elle est placée à sa tête, à sa place d’initiale. Elle nous oblige à revenir à l’instant, celui où l’on émet le son, celui où l’on trace des lignes en effleurant le grain du papier. Dans les poèmes, le mot s’organise autour de ses lettres comme s’il s’agissait de graines fécondes. La lettre le réinscrit dans l’acte même de son apparition. Elle le préserve de toute sclérose, de toute clôture. 

Jouer avec les lettres n'est donc pas anodin, loin s'en faut : cela nous permet de revenir aux faits et à la précision sonore ou gestuelle du présent. Nous réapprenons à prendre les choses « à la lettre » - la lettre vive, puisque une « lettre morte » prive un texte de son sens. Nous rendons ainsi à nos paroles leurs lettres de noblesse,  leur profonde vitalité, leur fraîcheur primordiale.   

Sabine Dewulf



Sources :  L'Oracle alphamythique - Sabine Dewulf et Antoine Charlet. Illustrations de Marie Dewulf. Livre d'heures de Charles d'Angoulême (15e siècle). Emile Blémont, L'Alphabet symbolique illustré par Auguste Hiolle






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mardi 22 février 2022

Le langage du corps

 

Pas un geste ! Notre façon de nous asseoir, de nous tenir debout ou de marcher dans la rue en dit long sur notre état d'esprit. Imaginez que votre corps soit suspendu dans le temps comme une sculpture, quel message vous enverrait-il ! Chacune de nos attitudes expression raconte l'histoire de notre personnalité et de notre état. Chaque posture que nous adoptons est un hymne à nos émotions.

La pseudo science qui étudie le langage du corps nous enseigne que le corps ne ment pas. Mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas cacher les sensations physiques désagréables que nous ressentons. Par exemple si on souffre d'une migraine, on peut assister à une réunion sans grimacer de douleur à chaque fois que quelqu'un parle. Mais si on se sent nerveux, si on s'ennuie ou si on est émotionnellement mal à l'aise, des attitudes caractéristique de notre tension (comme tapotait nerveusement sur la table, se ronger les ongles ou jouer avec ses cheveux) commencent à envoyer des messages que notre tact et notre diplomatie nous empêchent de formuler ouvertement.

Chaque attitude adoptée à un sens précis. Tapoter sur la table est un moyen de se retenir d'agir ouvertement, ce qui permet par exemple, de ne pas quitter une pièce lorsqu'on s'ennuie. On se ronge les ongles pour détourner ses instincts destructeurs. Lorsque l'on se sent puni ou quand on a besoin de réconfort, on peut jouer avec ses cheveux : c'est un comportement typique de l'enfance, qui est une période caractérisée par un niveau de responsabilité minimal.

Il faut donc écouter les messages que notre corps envoie pour supprimer nos manies et en perdre l'habitude. La première étape pour se libérer de ses habitudes n'est pas, comme le prétend la croyance populaire, d'appliquer de la moutarde sur les doigts pour éviter de se ronger les ongles, mais de prendre conscience des circonstances qui déclenche notre malaise. Nous devons apprendre à devenir notre propre spectateur. Dès que l'on commence à  rechercher la protection de notre « couverture sécurisante », c'est que l'on est en face d'une des nombreuses situations à l'origine de notre anxiété.

S'ouvre alors la voie de la connaissance de soi, c'est-à-dire le processus qui permet de découvrir, une à une, les origines enfouies de nos tensions.

On peut, par exemple, après une rencontre qui nous a laissés mal à l'aise, visionner une vidéo imaginaire en nous mettant à la place d'une des personnes présentes (ce sont la plupart du temps les autres qui sont à l'origine de nos tensions). Quelle image de nous aurait eu ce témoin ? Nos premières  suppositions sont souvent les bonnes, même si nous hésitons à en reconnaître la validité.

Identifier la cause réelle de nos tensions apporte une explication logique au problème. On peut donc ensuite essayer d'en déraciner l'origine et d'en évacuer les symptômes. A cours terme, des techniques comme le relâchement musculaire, le massage et le yoga, peuvent s'avérer utiles pour atteindre une sérénité physique qui nous aidera à affronter les prochaines période d'anxiété. Une fois le corps détendu, nous sommes mieux équipé pour partir à la découverte de notre propre intériorité qui nous apportera le calme durable.

Mike George

Extrait de « La Relaxation »

mardi 28 avril 2015

Envie de parler ?


« Tant que le langage vous est nécessaire pour communiquer avec autrui, employez-le, mais très parcimonieusement. 

Ecoutez ce que les gens vous disent et ne répondez que lorsque c’est nécessaire, par quelques mots, à dose homéopathique. Vous savez bien que là où les médicaments allopathiques, à fortes doses, restent sans effet, quelques gouttes minuscules produisent parfois des effets miraculeux ! 

Les gens ne parlent que pour faire étalage de leur supériorité, de leur érudition et de leur habileté dans la discussion. Mais l’action est plus puissante que les mots. La valeur d’un homme ne se mesure pas au volume ou à la force des arguments qu’il peut présenter. 

Argumentez en vous-même, dans l’introspection, et maîtrisez vos passions ; alors vous constaterez bientôt que l’envie de parler a presque disparu. » 

 Mâ Ananda Moyî (1896-1982)

jeudi 26 septembre 2013

Des poètes en temps de détresse par Michel Séonnet

Regardant tout ce monde aller et venir place Saint-­Sulpice, à Paris, à l’occasion du marché de la Poésie, me revenait la vieille question du poète allemand Friedrich Hölderlin : « Pourquoi des poètes en temps de détresse ? » Oui : à quoi bon des poètes dans le brouhaha des informations quotidiennes qui se succèdent et s’effacent l’une l’autre sans que l’on ait eu le temps d’en prendre vraiment la mesure ? Que vaut un poème face aux unes des journaux, à la vie difficile, aux violences subies, chômage, séparations ? Que vaut un poème au royaume des valeurs boursières ?

La semaine précédente, dans un autre de ces hauts lieux de la poésie, à Coaraze, près de Nice, j’avais animé une rencontre avec le poète marocain Mohammed Bennis. Dans son recueil Lieu païen, qu’il vient de publier (L’Amourier), il écrit :

Les poètes peuvent-ils exister
sans une fraternité qui les réchauffe
le long des sentiers perdus
Que peuvent-ils protéger
sinon la sève du chant

Il s’en était expliqué en disant qu’au-delà de toute recherche de beauté ou de sens, le poème est le lieu où la langue joue sa propre survie. Partout, la langue est bafouée, ramenée à la portion congrue d’un vocabulaire limité, d’expressions banalisées facilement commercialisables. Le poème est le lieu où la langue résiste. Il est tout à la fois un conservatoire de langue et un laboratoire d’inventions, de propositions. De la même manière que les recherches les plus pointues dans les sciences physiques mettent en évidence des éléments qui serviront à la vie commune dans 30 ou 50 ans, de même le poète, aussi discret qu’il soit, quel que soit le peu de cas qu’en font les médias, concocte les modulations d’une langue qui conditionnent la vie future de notre langue commune.

L’homme et la langue, c’est tout un. La Bible regorge de paroles qui mettent en avant la force de la parole dite. L’univers est né d’un poème, suggèrent certains sages du judaïsme. C’est en tout cas ce que je crois entendre à la lecture du magnifique psaume 17, où les mystères de la Création sont intimement liés à la magie des mots qui le disent.

À la liste de bonnes intentions que nous nous formulons au fil de l’année, il conviendrait, je crois, d’ajouter celle de lire régulièrement un poème. À chaque fois, nous en reviendrons plus riches d’un peu de langue, nous ­en serons un peu plus humains.

Michel Séonnet
http://petitspointscardinaux.net/
(source : La Vie)


vendredi 27 janvier 2012

Du langage des singes...

au langage des signes...
ou la tentative d'élever un singe comme un enfant...