Petits essais en forme de notules

Malraux définit le lecteur par vocation comme celui qui jouit de «la faculté d'éprouver comme présents les chefs-d'oeuvre du passé»...



Je souscris à cette définition et m'attacherai à présenter ici quelques réflexions au fil de mes lectures qui suivent rarement l'actualité littéraire, pour le plaisir de partager découvertes ou, éventuellement, récriminations... . Quoique, la vie étant bien courte, il vaut mieux, dans la mesure du possible, écarter le désagréable lorsque cela, comme il arrive trop rarement, est en notre pouvoir et vouloir.






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vendredi 7 juin 2013

Photo de la semaine (54) : rouge ou bleu?



Non, me direz-vous : plutôt ROSE et bleu.  

Comme vous commencez à le savoir, j'ai une fâcheuse tendance à l'esprit de contradiction, et cela ne semble pas se résorber avec l'âge bien au contraire.  De toute manière, je n'aime pas le rose : enfant, j'étais d'un blond qui avoisinait le blanc. J'avais l'air de quoi dans les teintes pastel? D'une trépassée oui! Et, comme le petit Jésus m'a punie très jeune parce que j'ai toujours dit que je préférerais avoir les cheveux blancs plutôt que bruns, j'ai effectivement blanchi très tôt, à vrai dire l'année où mes parents ont eu la bonne idée de disparaître tous les deux à six mois d'intervalle alors que j'avais la mi-trentaine. Bon. 

Mais revenons-en à nos couleurs. Pastoureau nous expliquerait sans doute d'où vient ce couple de convention qui sert encore à préparer les chambres des futurs bébés lorsqu'on ne choisit pas tout simplement le jaune pour être sûr de ne pas se tromper.

Ne trouvez-vous pas, cependant, que ROUGE et bleu, c'est une lutte ou une complémentarité qui est plus d'égal à égal?

Toujours est-il que, cette semaine, à défaut de pouvoir faire un petit tour photographique à l'extérieur, car la pluie qui vous accable depuis des semaines nous a envoyé sa petite sœur avec de la froidure en prime, j'ai décidé de revenir un instant sur l'exposition consacrée au Pérou qui se termine dans une semaine pour laisser place à la grande exposition estivale sur les créations de verre de Chiuly dont je vous ai récemment montré une première manifestation. 

Je ne vous parlerai pas très longuement de l'exposition en elle-même. Je suis allée voir pour suivre les conseils de Michelaise qui dit qu'il faut élargir ses horizons même si l'on ne se sent pas d'affinités avec les sujets ou les artistes présentés, mais j'ai la tête dure et les arts précolombiens ne m'attirent guère d'autant que je suis tombée sur un vase qui présentait un Inca sacrifiant un chien! Du coup, je me suis précipitée vers la sortie. Des humains, passe encore, mais pas des chiens!

Or, la dernière salle m'a retenue, car on y présentait des peintures relevant de ce courant que je venais de découvrir dans l'ouvrage que Le Clézio a consacré à Diego et Frida : l'indigénisme. Il s'agit d'un mouvement politique et artistique tendant à revaloriser la culture indienne effacée ou mutilée par les conquêtes espagnoles.  Je me suis d'ailleurs fait la réflexion que je n'avais jamais entendu parler de quelque chose de similaire au Québec, mais il faudra que je creuse la question pour vous en reparler.

Julia Manuela Codesido Estenòs


Julia Codesido
L'oeuvre  que j'ai retenue, les trois chefs indiens, est d'une peintre péruvienne se nommant Julia Codesido (1892-1979) et date de 1950. Ce rouge qui donne préséance aux vêtements des trois chefs plutôt qu'à leur physionomie m'a aspirée. Il m'a d'ailleurs fallu un petit moment avant de comprendre que ces trois taches de couleur vive étaient des ponchos servant à recouvrir trois corps pour le moins grêles...En cherchant quelques informations au sujet de cette artiste j'ai constaté, une fois de plus, à quel point nos frontières culturelles sont en définitive plutôt étroites, car l'essentiel de la documentation sur le Web est en espagnol.  Comme c'est une langue que j'ai eu le plaisir d'étudier pendant quelques années, voici un résumé des infos colligées.

Cette jeune femme provient d'un milieu aisé, son père étant consul, ce qui lui a fourni l'occasion de séjourner en Europe  alors qu'elle était  à la fin de l'adolescence, période où les émotions ressenties atteignent un paroxysme qui ne sera plus qu'occasionnel par la suite.  Elle eut donc l'occasion de visiter plusieurs musées en France, en Angleterre, en Suisse et en Espagne et de sentir l'agitation artistique qui animait cette période de l'avant-guerre nommée la Belle époque à laquelle le Musée de la civilisation de Québec consacre d'ailleurs une exposition que j'ai hâte de visiter cet été. 

À son retour au Pérou, elle s'inscrivit à l'école des Beaux-Arts de Lima où elle fut également, par la suite,  professeur de peinture et de dessin. Je ne m'aventure pas à vous donner des dates, car il existe des erreurs manifestes dans l'article de Wikipédia qui sont relayées par d'autres sites que j'ai consultés. Je me contenterai donc de vous souligner l'importance de José Sabogal, autre peintre représenté à l'exposition, qui fut l'un de ses maîtres.  Si je vais un jour au Pérou ou, plus modestement, si je trouve quelque chose de plus étoffé à la bibliothèque, je vous apporterai ce complément d'information. Les ouvrages, plutôt européo-centrés que je possède comme le dictionnaire de la peinture de Laclotte et Cuzin chez Larousse ou L'Aventure de l'art (XXe siècle) de Ferrier ne mentionnent ni Codesido ni Sabogal pourtant considéré comme le chef de file du mouvement indigéniste péruvien. 

L'audioguide téléchargeable qui accompagne l'exposition met l'accent sur l'aspect résolument moderne de cette oeuvre qui appartient à la dernière période de production de l'artiste après son passage au Mexique en 1935 où elle fit notamment la connaissance de Rivera et d'Orozco. 

Je vous laisse sur une oeuvre antérieure, mais la préparation de ce billet m'a donné envie de faire un nouveau saut au Musée. Peut-être essaierai-je donc demain de me glisser entre quelques gouttes de pluie pour compléter mes connaissances...


Les chandelles, 1931



Je suis peut-être un peu volubile pour parler encore de «photo de la semaine», mais vous pouvez tout de même retrouver les autres participants chez Amartia qui ne m'en voudra pas...






samedi 25 février 2012

Petit questionnaire d'AnnaLivia (1)

Moi qui parlais du questionnaire de Proust la semaine dernière...

Vous connaissez toutes le principe du tag sur les blogs.  Je l'ai, personnellement, découvert récemment.

Mon petit côté, mon grand côté rebelle devrais-je dire, s'oppose un tantinet à ce genre de chose.  Par contre, par déformation professionnelle, il m'est difficile de ne pas répondre à une question posée.  Je couperai donc la poire en deux et répondrai à l'invite d'AnnaLivia, mais sans relayer cette invitation à onze autres personnes.  J'espère que tu  ne m'en voudras pas.  Si d'aventure quelqu'un a envie de poursuivre cette chaîne, qu'il soit le bienvenu...


Mon tableau préféré :

Est-il possible de répondre à pareille question? il faudrait préciser le Musée, la ville, le genre aussi.  Sans compter le fait qu'ayant vu la plupart des tableaux sous forme de reproduction, puis-je avoir une idée juste de ce que j'aimerai au moment où je verrai l'original et ne dirai-je pas, comme le narrateur devant madame de Guermantes : «C'est cela? ce n'est que cela madame de Guermantes?» la particularité du travail de l'imagination, chez lui, l'amenant toutefois à se recomposer presque aussitôt une image mentale pour mieux dénier la réalité qu'il a sous les yeux, le tout s'appuyant, dans le cas précité, sur un simple sourire anonyme de la duchesse dans l'église de Combray.

Mais cela ne résout pas mon problème.  Disons que je choisirai un tableau auquel je vais toujours rendre visite lorsque je vais au Musée des Beaux-Arts de Montréal : le tableau d'Emmanuel de Witte.



Je commencerai, la semaine prochaine, une série sur les oeuvres du Musée des Beaux-Arts de Montréal, la grève estudiantine me permettant enfin d'avoir accès aux archives qui sont rarement ouvertes.  Il faudra toutefois un certain temps avant que je ne vous parle de ce peintre hollandais, car j'entends débuter par les tableaux d'artistes canadiens, moins bien représentés, me semble-t-il, dans les bases de données et dans les billets de nos spécialistes en peinture : Alba, Nathanaëlle et Tilia.

Disons, pour le moment, que le calme de cette scène, le jeu de lumière à la Vermeer, mais venant de la direction opposée à celle que l'on retrouve chez le peintre du petit pan de mur jaune, et la perspective qui nous invite à entrer pour écouter la joueuse d'épinette sont autant d'éléments de réjouissance pour l'oeil dans cette oeuvre qui s'intitule justement Intérieur avec une femme jouant de l'épinette.

Votre poète préféré :

Chère AnnaLivia, tu connais mon goût des méandres et des digressions pour les avoir subis en classe pendant toute une session.  Tu vois, je crois que j'aurai de la difficulté à répondre à cette question.  J'ai un handicap face à la poésie... Un peu comme les oeuvres pour piano qu'il me faut mémoriser pour vraiment les apprécier, je n'aime que les poèmes que je peux apprendre par coeur, ce qui réduit un tantinet mes lectures et découvertes dans le domaine, tu en conviendras.  Je pourrais contourner la difficulté en te disant que j'opterai plutôt pour un romancier qu'il ne me semble pas avoir besoin de nommer, mais je cesserai, pour une seconde, d'être mauvaise élève et je te dirai que, du côté québécois à tout le moins, je reviens souvent à quelques textes de St-Denys-Garneau et en particulier à celui-ci : 

Je ne suis pas bien du tout assis sur cette chaise
Et mon pire malaise est un fauteuil où l'on reste
Immanquablement je m'endors et j'y meurs.

Mais laissez-moi traverser le torrent sur les roches
Par bonds quitter cette chose pour celle-là
Je trouve l'équilibre impondérable entre les deux
C'est là sans appui que je me repose.

Certes, ce n'est pas l'économie des vers de Racine, tellement beaux dans leur sobriété. Ou la fulgurance d'un vers de René Char qui suffit à peupler une journée... il y a cependant, dans l'oeuvre de St-Denys-Garneau un mal-être qui fait écho à celui de sa génération de créateurs canadiens-français et, pour cela, je m'y retrouve.

Votre livre préféré : 

Je ne voudrais pas être redondante en citant à nouveau Proust.  J'hésite donc entre deux oeuvres : Les Thibault de Roger Martin du Gard et L'Ultime Alliance de Pierre Billon.



On ne se lasse pas de la lecture de Proust, pour mille et une raisons. J'en sélectionnerai une, la plus évidente peut-être : la richesse de l'expression.

Dans le cas de Martin du Gard et de Billon, ce sont surtout de superbes raconteurs d'histoires.  Ici, pas d'effets de toge, si je puis dire, le style disparaît devant le récit qu'on ne peut plus lâcher.

Une gourmandise qui vous fait plaisir : 

Je surprendrai Françoise à laquelle je rappelle, de temps en temps, mon végétarisme naissant, mais pas AnnaLivia qui m'a déjà invitée pour ce festin cannibale : une fois par an, je mange un vrai tartare de boeuf avec des frites! Je suis une adepte du cru, mais ce sont le plus souvent les poissons qui ont ma faveur, mais le tartare...MIAM!!!

Une ville où vous aimeriez vivre : 

J'espère que je ne serai pas bannie pour toujours et à jamais par mes copinautes comme dit Michelaise, mais j’avoue que, bien que je me languisse de Paris et que les vacances italiennes sont toujours bienvenues, j'élirai probablement plus volontiers domicile, parmi les villes que je connais s'entend, à New York!  Pour Central Park, pour la richesse des musées et pour la folie de cette ville survivante devenue plus aimable après septembre 2001.



Je prendrai encore une autre liberté avec les règles du jeu en vous revenant à un autre moment pour la suite... Sans rancune, AnnaLivia!

Bonne semaine!

P.S. Ma déformation pédagogique me souffle qu'il aurait peut-être été intéressant de savoir si qui est représenté sur la dernière mosaïque : 

sur la ligne du haut : l'Empire State Building pendant les vacances de Noël; Central Station; un détail du Balzac de Rodin; une des petites silhouettes ornant la station de métro Prince Street;

sur la ligne du bas : ma pomme devant Times Square; un détail d'une toile de Bruegel; le détail d'une des fresques du Chrysler Building; le portrait de Gertrude Stein par Picasso et, juste au-dessus, un détail d'une toile de Klimt. 






lundi 9 janvier 2012

Un grand merci, Anne!

  Anne   m'a fait le plaisir d'attribuer cette mention amicale à mon blog : je l'en remercie beaucoup et suis touchée par ce qu'elle dit de mes «petits essais» qui sont partis dans toutes les directions ces derniers temps...

Vous connaissez probablement la plupart des blogs que je fréquente.  Ils sont peu nombreux, car j'applique à mes explorations un principe que j'essaie de respecter dans mon existence afin de dompter une curiosité insatiable qui finissait par réduire comme peau de chagrin les heures déjà parcimonieuses consacrées au sommeil : «Qui veut trop embrasser, mal étreint!» 

Par contre, lorsque j'aime, c'est généralement fidèlement et pour longtemps.  Voici donc les blogs découverts au cours de ma première année dans le monde de la blogosphère auxquels je reviens avec constance :

1) Les merveilles de Danielle :  qui ne connaît pas les histoires de Danielle? Elles valent le détour, qu'il s'agisse de ses explorations à travers Paris ou de ses rencontres lorsqu'elle s'aventure un peu plus loin, parfois jusqu'aux confins de l'Asie. La sensibilité et la délicatesse qui avoisinent souvent l'humour apportent leur dose de bonne humeur hebdomadaire.

2) Les échos de mon grenier : Tilia, de son côté, nous fait partager son immense passion et sa curiosité pour la peinture.  Avec générosité, elle nous ouvre les portes de son grenier et ne ménage pas ses efforts pour creuser les sujets originaux qu'elle choisit d'aborder.  Je la remercie aussi chaleureusement pour les conseils dans le domaine du langage HTML.  Mon «professeur» est d'une grande patience et explique toujours avec clarté!

3) Autour du puits :  l'amie Françoise  me fait déambuler dans Paris grâce à ses très belles photographies.  Et que dire de son récent séjour sicilien! Pour moi qui suis un peu cloîtrée ces dernières années, ces billets constituent de fort beaux tapis magiques!  Enfin, à défaut d'être une grande cuisinière, je me réjouis à la lecture des descriptions de petits plats qu'elle mijote très certainement avec amour pour famille et amis.

J'aurais pu ajouter, en réalité, chacun des blogs que j'ai appris à connaître au fil des jours ou des suggestions.  Comme mes lectrices en connaissent déjà plusieurs, je terminerai en mentionnant deux blogs que je côtoie surtout pour leur iconographie. 

4) About New York : ce blog présente la vie de cette mégapole américaine que j'ai particulièrement appréciée au cours de mes deux séjours les plus récents.

5) Little brown pen :  Paris est probablement la ville la plus photographiée au monde.  Nicole, l'auteur de ce blog, a donc trouvé un angle un peu particulier : photographier de petits détails de la vie parisienne et les regrouper par couleur, ce qui a d'ailleurs donné naissance à un livre qui est sur le point d'être publié. Très sympathique!

Danielle, Tilia et Françoise, vous pourrez ou non poursuivre, selon votre bon vouloir!

lundi 21 novembre 2011

Appel à tous!

En janvier prochain, je donnerai à nouveau le cours consacré à la littérature française du XXe siècle.  Je garde Combray comme oeuvre inaugurale et j'enchaînerai probablement avec l'Antigone d'Anouilh à laquelle j'ai très envie de joindre, cette session, l'étude de Médée du même auteur, car notre petite société a été marquée, l'été dernier, par le procès d'un chirurgien qui a assassiné ses deux enfants après sa rupture avec leur mère.  Je n'aime pas beaucoup le sordide, mais il me semble approprié de réfléchir avec des filles et des grands garçons de dix-huit ou dix-neuf ans, à ce que veut dire l'engagement et à cette violence qui n'est jamais bien loin au fond de la nature humaine.


Par contre, pour la troisième oeuvre, je voudrais varier un peu.  J'étudie, depuis un bon moment déjà, La Virevolte, à mon sens, le meilleur roman de Nancy Huston, qui plaît beaucoup aux élèves.  J'aimerais toutefois, cette session, remplacer le Huston par une oeuvre qui me permettrait de parler de peinture.  J'ai songé à La bulle de Tiepolo, mais c'est peut-être un peu bref.  La jeune fille à la perle est une oeuvre traduite et il me faut expressément un roman écrit par un auteur français du XXe ou du XXIe siècle. 


Est-ce que quelqu'un aurait lu quelque chose qui répondrait à ces critères et qui serait susceptible d'intéresser des étudiants qui ont l'âge mentionné plus haut?  Optimalement, j'aimerais une oeuvre me permettant de parler de toutes sortes de détails techniques au sujet de la peinture tout en évoquant un courant particulier... Oui, je sais, je pourrais l'écrire, mais, pour janvier, c'est un peu juste ;0)


J'attends vos suggestions et, si nous ne trouvons pas, nous pourrons toujours faire un roman à plusieurs voix!


Bonne semaine!


Détail de la Fresque des Québécois (Basse-Ville de Québec)