Antidiabétiques REL 2017
Antidiabétiques REL 2017
Antidiabétiques REL 2017
Ce cours est destiné aux étudiants de deuxième cycle des études médicales (DCEM2) à la Faculté
de Médecine de Tunis.
INTRODUCTION
Le Diabète est une maladie métabolique dont les conséquences organiques sont liées à un défaut
d'utilisation des glucides par les cellules.
Ce défaut peut s'expliquer par deux mécanismes :
- Insulinopénie : diminution ou absence de sécrétion d'insuline,
- Insulinorésistance : résistance tissulaire à l’action de l'insuline (problème des récepteurs).
Schématiquement on distingue 4 types de diabète :
* Diabète type I : diabète insulinodépendant (DID) avec une carence quasiabsolue en
insuline secondaire à une destruction sélective des cellules béta des ilots de Langerhans. Il
s'agit en général de patients dont la maladie s'est révélée à un âge inférieur à 40 ans et qui
présentent un poids réduit ou normal. Ce diabète type I est également appelé diabète
juvénile ou diabète maigre. Il expose davantage au risque de coma acidocétosique.
* Diabète de type II : diabète non insulinodépendant (DNID) caractérisé par une résistance
tissulaire à l’action de l’insuline associée à une déficience relative en l'insuline . Ce diabète
type II apparaît surtout après l'âge de 40 ans, chez les personnes en général obèses. C'est le
diabète de la maturité ou diabète gras.
* Diabète de type III : diabète secondaire à des maladies non pancréatiques ou d’origine
médicamenteuse.
* Diabète de type IV : diabète gestationnel, défini comme toute anomalie des taux de la
glycémie durant la grossesse.
Quelque soit le type de diabète, les règles hygièno-diététiques et l’activité sportive adaptée
occupent une place importante dans la prise en charge de ces patients.
OBJECTIFS EDUCATIONNELS SPECIFIQUES
1. Décrire les différentes étapes de la biosynthèse, stockage, libération et dégradation de l’insuline
2. Décrire les effets pharmacodynamiques de l’insuline.
3. Indiquer les principales caractéristiques pharmacocinétiques de l’insuline et des analogues de
l’insuline.
4. Indiquer les facteurs favorisant l’apparition des effets indésirables de l’insuline et les mesures
permettant de les éviter.
5. Expliquer les règles d’utilisation pratique de l’insuline.
6. Décrire les effets pharmacodynamiques des sulfamides hypoglycémiants.
7. Expliquer le rapport entre les caractéristiques pharmacocinétiques des sulfamides
hypoglycémiants et certains de leurs effets indésirables ou de leurs contre-indications.
8. Citer les effets indésirables et les contre-indications des sulfamides hypoglycémiants.
9. Expliquer le mode d’action antidiabétique des biguanides.
10. Citer les principales caractéristiques pharmacocinétiques de la metformine.
11. Indiquer les effets indésirables et les contre-indications de la metformine.
12. Schématiser la stratégie d’utilisation des antidiabétiques oraux.
DOCUMENT DE BASE
1. L'INSULINE :
1.1. HISTORIQUE :
En 1921, le professeur roumain Nicolas Paulesco mène des expériences sur un chien rendu
diabétique. Il démontre que l’injection intra-veineuse d’un extrait pancréatique provoque une
diminution de l’hyperglycémie et parfois même une hypoglycémie.
Les extraits les plus efficaces sont finalement obtenus au cours de l'été 1921 à Toronto
par Frederick Grant Banting avec l'aide de Charles Best un étudiant en médecine et de J. B.
Collip, un chimiste, dans le laboratoire de James Richard MacLeod.
L’insuline ainsi obtenue est utilisée pour la première fois comme médicament hypoglycémiant
en 1923. La même année, Banting et MacLeod reçoivent le Prix Nobel de physiologie et de
médecine pour leurs travaux
La découverte de l’insuline a révolutionné le traitement du diabète.
Il a toutefois fallu attendre 1955 pour que le biochimiste anglais Frédérick Sanger décrive la
structure chimique de cette protéine. Frederick Sanger a reçu le Prix Nobel de Chimie en 1958
pour cette découverte.
La synthèse chimique de l’insuline a été réalisée pour la première fois en 1965.
La production de l’insuline humaine par biosynthèse ou par hémi- synthèse a été introduite en
1980.
En 2000, apparition de nouvelles insulines « les analogues » : les analogues rapides et les
analogues lents.
1.2. STRUCTURE CHIMIQUE :
L’insuline est une protéine de petite taille ayant un poids moléculaire de 5800 Da.
L'insuline est constituée de 2 chaînes A et B qui comportent respectivement 21 et 30 acides
aminés reliés par 2 ponts disulfures (figure 1). Il existe des différences structurales des deux
chaînes de l’insuline en fonction de l’espèce. L’insuline du porc diffère par un seul acide aminé
alors que l’insuline de bœuf diffère par deux acides aminés.
L’insuline est synthétisée par les cellules béta qui constituent 75% des ilots de Langerhans. Elle
est synthétisée sous forme d’une chaine unique polypeptidique : la préproinsuline qui se
transforme en proinsuline biologiquement inactive. Ce précurseur de structure polypeptidique
donne naissance à l'insuline active après détachement d'un fragment : le peptide C (peptide de
connexion) et de 4 acides aminés.
L’insuline est stockée ensuite dans des granules à l’intérieur des cellules bêta sous forme de
cristaux formés de 2 atomes de Zinc et de 6 molécules d’insulines (héxamère).
L’insuline ainsi que le peptide C sont libérés, en quantité équimolaire, dans la circulation générale
par exocytose dans la veine pancréatico-duodénale qui la conduit directement au foie, où presque
de 50% de la quantité d’insuline est détruite. Le reste de l’insuline se distribue dans l’ensemble de
l’organisme.
L’insuline est libérée à un taux basal faible et continu et à un taux élevé sous l’effet de différents
stimuli essentiellement le glucose, mais aussi d’autres sucres tel que le mannose, certains acides
aminés (leucine, arginine), les acides gras et les corps cétoniques.
Le système nerveux autonome intervient dans la régulation de la sécrétion d'insuline. Le système
sympathique inhibe la sécrétion d'insuline par les récepteurs alpha et l'augmente par les
récepteurs bêta. Le système parasympathique stimule la sécrétion d'insuline par les récepteurs
muscariniques.
La dégradation de l’insuline se produit essentiellement au niveau du foie, du rein et du muscle :
- L’insuline endogène : 60% par le foie et 40% par le rein
- L’insuline exogène administrée par voie sous cutanée : le rapport est inversé, 40% par le foie
et 60% par le rein.
1.5. PHARMACODYNAMIE :
1.6. PHARMACOCINETIQUE :
L’insuline n’est administrée que par voie parentérale : voie sous-cutanée, voie intramusculaire et
voie intraveineuse.
L’insuline circulante est faiblement liée aux alpha et bêta-globulines. Elle est dégradée par
plusieurs organes notamment le foie, le rein, le muscle. Son élimination est rénale.
L’insuline ne passe pas la barrière placentaire mais sa destruction est accrue par le placenta.
Dans la circulation générale, l’insuline ordinaire a une demi-vie courte de 5 à 6 min, mais la demi-
vie terminale des insulines et des analogues commercialisés est beaucoup plus longue et variable
de 4 heures à plus que 24 heures. Cette demi-vie terminale est déterminée par la vitesse de
résorption de l’insuline à partir de son site d’injection.
Cette vitesse de résorption conditionne :
- le délai d’action
- le pic d’action
- la demi-vie terminale
Ainsi, par voie sous cutanée, l’insuline ordinaire a un délai d’action de 20 à 30 min, le maximum
d’effet est obtenu en 2 à 3 heures et l’effet hypoglycémiant peut se prolonger jusqu’à 8 heures.
Pour obtenir un profil pharmacocinétique le plus proche de la sécrétion physiologique de l’insuline
plusieurs autres insulines à délais d’action et durées d’action plus longues ou plus courtes ont été
mises au point par :
- modification du pH,
- adjonction de la protamine : insuline NPH (Neutral Protamine Hagedorn) à action intermédiaire,
- adjonction du Zinc : insuline lente et ultra-lente,
- modification de la structure chimique de l’insuline humaine : insuline analogue (rapide ou lente).
Les insulines commercialisées (insuline humaine ou analogues de l’insuline) ont la même
concentration de 100 UI/mL et ce quelque soit le conditionnement (flacon, stylos, cartouches).
L’insuline glargine et détémir sont utilisées pour remplacer l’insuline basale qui représente les 2/3
de la quantité totale d’insuline sécrétée chez un sujet normal.
L’insuline glargine est administrée en une seule fois par jour et l’insuline détemir est administrée
en 2 fois par jour pour couvrir les 24 heures.
d. Les insulines mixtes :
Les insulines intermédiaires nécessitent plusieurs heures pour atteindre des taux thérapeutiques
adéquats, ainsi leur utilisation en cas de DID nécessite des suppléments d’insuline rapide.
Des préparations prémélangées sont disponibles (insulines biphasiques) :
- Mixtard® HM 30 : composée de 30 % d’insuline ordinaire et 70 % d’insuline NPH
Afin de remédier aux problèmes de stabilité que posent ces préparations prémélangées à base
d’insuline humaine, des préparations à base d’analogues d’insulines (plus stables) ont été mises
au point :
- NovoMix ® 30 : composée de 30 % insuline Asparte / 70 % Neutral Protamine Asparte
- NovoMix ® 50 : composée de 50 % insuline Asparte / 50 % Neutral Protamine Asparte
- Humalog® Mix 50 : composée de 50 % insuline Lispro / 50 % Neutral Protamine Lispro
- Humalog® Mix 25 : composée de 25 % insuline Lispro / 75 % Neutral Protamine Lispro
Les insulines mixtes à bases d’analogues présentent un délai d’action plus rapide que l’insuline
humaine biphasique et doivent généralement être administrées immédiatement avant ou peu
après un repas.
Analogue lent
Lantus® Insuline glargine 1 heure Etalé sur 24 h 22 à 26 heures
Levemir ® Insuline détémir 45 à 90 min Etalé sur 24 heures
18 à 22 h
(1) insuline non commercialisée en Tunisie
1.7. EFFETS INDESIRABLES :
a. L'hypoglycémie :
C'est le risque majeur de l'insulinothérapie, qui peut traduire :
- une erreur de dosage consécutive à un changement de seringue ou d'insuline,
- des apports alimentaires insuffisants,
- un exercice musculaire accru. Par exemple lors du retour à la vie active après une
période d'hospitalisation,
- un problème de résorption irrégulière.
- l'apparition d'une insuffisance hépatique ou rénale.
L'association de certains médicaments potentialise l'hypoglycémie. Il en est ainsi de l'aspirine à
forte dose, des bêtabloquants, des inhibiteurs de l'enzyme de conversion.
Le risque étant le coma hypoglycémique avec ses complications cardio-vasculaires et
neurologiques, il faut bien informer le patient des signes fonctionnels de l'hypoglycémie qui
sont :
. la fatigue musculaire,
. les sueurs profuses,
. la faim impérieuse,
. la tachycardie, les palpitations, les tremblements,
. les troubles psychiques.
L'ingestion de quelques morceaux de sucre, fait rapidement régresser ces signes.
Il faut noter que ces signes peuvent être masqués quand on utilise des bêtabloquants.
b. La résistance à l'insuline :
Il y a résistance à l'insuline quand les doses nécessaires deviennent trop élevées : autour de 150 à
200 U/j.
Elle est le fait des malades obèses dont les récepteurs à l'insuline sont en nombre limité (le
problème des anticorps anti-insuline animale étant écarté par l’utilisation d’insuline humaine).
c. Allergie à l'insuline :
Elle peut être locale et passagère ou généralisée et durable. Elle était le fait de contaminants
antigéniques des insulines animales qu’on avait essayé d’éliminer par des techniques de
purification (insulines monopic qui sont des insulines cristallisées et chromatographiées sur gel ;
insulines monocomposées qui sont purifiées sur tamis moléculaires et chromatographiées sur
résines échangeuses d'ions, ces dernières comportent encore moins de résidus que les
précédentes).
Actuellement l’utilisation d’insulines humaines ont réduit considérablement les accidents
allergiques. Il s’agit le plus souvent de réaction allergique locale.
d. Les lipodystrophies :
Il s'agit soit de nodules lipomateux hypertrophiques recouverts de peau épaissie, irréversibles soit
de dépressions atrophiques avec peau amincie adhérant au plan aponévrotique.
Ces lésions inesthétiques peuvent contribuer à la résistance au traitement par modification de la
résorption de l'insuline.
On évitera leur apparition en variant régulièrement les sites d'injection sous-cutanée.
e. Modification de l’accommodation :
Une vision floue peut survenir au début du traitement d'une hyperglycémie. Elle résulte d'une
modification de l'équilibre osmotique par retour de la glycémie à la normale. Au bout de quelque
jours le cristallin s'adapte aux nouvelles conditions osmotiques.
f. L'hypokaliémie :
En cas de traitement d'un coma acidocétosique, il faut surveiller de près la kaliémie.
1.8. INDICATIONS :
Le traitement substitutif par l'insuline chez le diabétique insulinodépendant est quotidien et dure
toute la vie.
Il doit assurer une glycémie à jeun d’1 g/l et une glycémie postprandiale qui ne doit pas dépasser
1,30 g/l, 1 heure après le repas.
Il faut observer certaines règles :
- utiliser des seringues toujours du même calibre en général correspondant à un dosage de
100 U/ml,
- l'asepsie doit être stricte,
- l'injection sous-cutanée doit être profonde et perpendiculaire à la surface de la peau, et
chaque fois elle doit être faite au niveau d'un site différent.
- la conservation de l'insuline doit se faire à +4°C (réfrigérateur).
2.1.2. PHARMACODYNAMIE :
Les biguanides n'ont pas d'action sur l'insulino-sécrétion mais ils n'agissent qu'en présence
d'insuline endogène.
Leur action antidiabétique s'explique par :
* la réduction de la production hépatique de glucose par inhibition de la néoglucogenèse et
de la glycogénolyse,
* l'augmentation de l'utilisation périphérique du glucose (amélioration de la pénétration
cellulaire du glucose et accélération de la glycolyse en particulier au niveau du foie et du
muscle),
* la réduction de l'absorption intestinale du glucose
Ce mécanisme d’action pourrait expliquer les avantages de la metformine par rapport aux
sulfamides hypoglycémiants :
- elle diminue la résistance à l’insuline
- la metformine ne stimule pas la sécrétion de l’insuline et par conséquent n’induit pas des
hypoglycémies
- la metformine est anorexigène, ce qui est intéressant chez le diabétique obèse.
2.1.3. PHARMACOCINETIQUE :
La biodisponibilité de la metformine est de 50%. Cela peut être expliqué par un mécanisme de
résorption intestinale saturable.
Elle n'est pratiquement pas liée aux protéines plasmatiques (uniquement 10%). Sa demi-vie est
courte (2 à 4 heures). Son élimination est urinaire et rapide sans biotransformation préalable. Elle
franchit le placenta.
Puisque la metformine est non liée aux protéines plasmatiques et non métabolisée par le foie, elle
ne pose pas de problème d’interactions médicamenteuses.
2.1.5. INDICATION :
La metformine est actuellement le médicament de première intention dans le traitement du
diabète non insulino-dépendant avec insulino résistance.
C'est par le radical R2 qu'on diminue l'activité antibactérienne et qu'on augmente l'activité
hypoglycémiante.
Il existe une grande différence dans la puissance de l'effet hypoglycémiant et dans la sécurité
entre les sulfamides.
2.2.2. PHARMACODYNAMIE :
2.2.3. PHARMACOCINETIQUE :
Les sulfamides sont bien résorbés per os. Ils ont une forte liaison aux protéines plasmatiques
entre 80 et 98%. Mais ils sont déplacés de leur liaison par les sulfamides antibactériens et par
d’autres médicaments notamment les AINS.
Leur demi-vie varie en fonction des molécules et de l'état de la fonction hépatique.
Dans tous les cas la posologie doit être progressive et adaptée à des contrôles de la glycémie.
Leur élimination est exclusivement rénale (sauf pour la gliquidone). Les sulfamides
hypoglycémiants passent la barrière placentaire.
2.2.4. EFFETS INDESIRABLES :
Deux principaux effets indésirables sont en rapport direct avec le mode d’action des sulfamides
hypoglycémiants :
- le risque hypoglycémique. Il s’observe avec tous les sulfamides hypoglycémiants. Toutefois il est
important avec les molécules de le 1 ère génération à durée d’action particulièrement longue qui ne
sont plus utilisés.
Le risque hypoglycémique est nettement majoré par certains facteurs de risque : l’âge avancé, la
dénutrition, l’insuffisance rénale et les interactions médicamenteuses comme le montre le tableau
suivant :
2.2.5. INDICATION :
- Le diabète insulino-dépendant,
- le diabète déséquilibré avec acidocétose,
- La grossesse et l’allaitement,
- L'insuffisance rénale (sauf pour la gliquidone),
- L'insuffisance hépatique,
- l’allergie aux sulfamides
- la grossesse
- l’allaitement (risque d’hypoglycémie chez le nourrisson)
2.3.4. GLIPTINES :
Sitagliptine Januvia , vidagliptine Galvus , saxagliptine Onglyza : ils inhibent la dipeptidyl
peptidase-4 (IDPP-4), enzyme qui inactive le GLP-1. Ainsi, l’inhibition de la DPP-4 entraine une
augmentation de la concentration de GLP-1 qui provoque une augmentation de la sécrétion de
l’insuline et une diminution de la sécrétion de glucagon.
Ils sont utilisés en association avec la metformine ou les sulfamides hypoglycémiants.