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Les flux financiers et économiques de la biodiversité

2018, Les finances et lacunes d'évaluation de la biodiversité

En adoptant, en 1992, la Convention sur la diversité biologique (CDB), la communauté internationale a endossé les objectifs de conservation de la biodiversité, de son utilisation durable et du partage équitable des avantages qui découlent de l’utilisation des ressources génétiques comme un enjeu de gouvernance mondiale. La diversité biologique joue un rôle essentiel dans le bon fonctionnement des écosystèmes qui est lui-même indispensable au bien-être humain. Malgré son importance fondamentale, reconnue par l’adoption de la CDB au Sommet de la Terre de Rio de Janeiro, la biodiversité continue de s’appauvrir. Reconnaissant le besoin urgent d’agir, l’Assemblée générale des Nations unies a déclaré la période 2011-2020 « Décennie des Nations unies pour la biodiversité ». Les Parties à la Convention ont adopté en 2010 un Plan stratégique pour la biodiversité 2011-2020 comprenant vingt objectifs ambitieux (dits objectifs d’Aichi), qui constitue un « cadre flexible pour la mise en œuvre cohérente d’objectifs nationaux et régionaux ». Consacré au financement du plan stratégique, le dernier objectif s’inscrit dans une Stratégie de mobilisation de(s) ressources dont le chiffrage avait été précisé en octobre 2014, à l’occasion de la prochaine conférence des parties (COP 12) tenue à Pyongchang en Corée du Sud. A partir du constat de l’insuffisance des seules ressources de l’aide publique au développement (APD) pour la réalisation à l’horizon 2015 des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD, 2000) – au rang desquels figure la diminution du taux de perte de biodiversité (objectif 7) – la notion de financements innovants par les budgets nationaux a émergée comme sources ou leviers de mobilisation de ressources complémentaires. Le Maroc s’est engagé dans la voix de l’actualisation de sa stratégie de la biodiversité et l’élaboration d’un Plan d’action et la mobilisation des ressources pour remplir ses engagements internationaux en tant que Partie à la Convention biodiversité. Concernant l’intervention de l’économiste, outre la sensibilisation à la valeur de la biodiversité (rapport I) et son intégration dans les systèmes de planification, de comptabilité et de suivi (Rapport II) sont ciblés dans ce rapport III l’évaluation économique de la biodiversité les mécanismes de mobilisation de financement (Les marchés verts, les régimes d’incitations et de subvention, la (sur) compensation). 1. Objet et objectifs de l’étude Ce dernier et troisième rapport est consacré au plan de mobilisation des ressources pour le financement de la stratégie et des activités du plan d’action national de la biodiversité 2011 - 2020. L’étude interviendra au niveau des buts D et E de la stratégie nationale pour répondre aux objectifs D4 relatif à la mobilisation des ressources financières et E1 relatif à améliorer l’évaluation des valeurs économiques. Les données financières pour la période 2006-2010 ont servi à l’établissement d’une valeur de référence (baseline) et les données financières enregistrées après 2010 concernant les besoins et les perspectives de financement à 2020 ont servi à élaborer la note de communication de la CDB formant cadre de suivre des progrès du pays et ce conformément aux indicateurs adoptés dans la décision X/3.

Royaume du Maroc Ministère Délégué Auprès du Ministre de l’Energie, des Mines, de l’Eau et de l’Environnement Chargé de l’Environnement Projet « Planification nationale en matière de diversité biologique en appui à la mise en œuvre du plan stratégique 2011 – 2020 de la Convention sur la Diversité Biologique (NBSAP) » Fait par : Mohammed BAJEDDI Expert international en Economie et finance de l'Environnement 30 Août 2015 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 « Le contenu de la présente publication relève de la seule responsabilité du contractant et ne peut en aucun cas être considéré comme reflétant l’avis du FEM / PNUD / MEMEE». Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Logo de la Conférence mondiale sur la biodiversité de Nagoya “ Parce que les comptes nationaux sont fondés sur des transactions financières, ils ne comptent pour rien la Nature, à qui nous ne devons rien en termes de paiements mais à qui nous devons tout en termes de moyens d’existence.” Bertrand de Jouvenel – Arcadie, 1968 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 TABLE DES MATIERES PREAMBULE iv RESUME EXECUTIF vi I. Contexte 1 II. Objet et objectifs de l’étude 3 III. Approche méthodologique 5 IV. Définition, concept et domaine de la biodiversité 7 V. Contexte spécifique au financement de la SPANB et Défis V.1 Pourquoi une évaluation économique et monétaire ?.......................................................................................10 V.2 Les principes de base de l’évaluation.........................................................................................................................10 V.3 L’intérêt d’une approche financière............................................................................................................................10 V.4 Extrême complexité pour la mesure de la valeur de la biodiversité..........................................................11 V.5 Deux cent trente six indicateurs de suivi de la biodiversité...........................................................................11 V.6 Quinze indicateurs financiers de suivi de la biodiversité ................................................................................12 V.7 Défis extrêmes pour l’estimation des indicateurs et 10 de l’intégration de la biodiversité dans la comptabilité nationale au Maroc .........................................................13 V.8 Des priorités claires d’investissement pour la protection de la biodiversité........................................13 V.9 Des lacunes apparaîtront inévitablement dans l’estimation du financement de la protection de la biodiversité .........................................................................................................................................................................14 V.10 Des efforts visibles pour la gouvernance des statistiques environnementales au Maroc ..............15 V.11 Multiplicité des parties prenantes actives dans le domaine de la biodiversité....................................15 V.12 Existence d’une organisation au niveau du MEMEE pour la collecte des données économiques et financières...........................................................................................................................................................................17 V.13 Initiatives nationales d’intégration des informations environnementales dans le système de comptabilité nationale. ......................................................................................................................................................18 VI. Démarche d’estimation des dépenses de la protection de la biodiversité au Maroc. VI.1. Absence d’obligations nationales qu’internationales de la tenue de la comptabilité 20 environnementale ................................................................................................................................................................20 VI.2. Vers l’élaboration d’un cadre de la comptabilité de la biodiversité au Maroc......................................21 VI.3. Les comptes de la comptabilité de la biodiversité...............................................................................................24 VI.3.1. Les populations des espèces et les risques extinction ......................................................................................24 VI.3.2. Les écosystèmes terrestres. ............................................................................................................................................25 VI.3.3. Écosystèmes des eaux intérieures / continentales. ............................................................................................25 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 VI.3.4. Les écosystèmes marins et côtiers. .............................................................................................................................26 VI.3.5. La diversité génétique ........................................................................................................................................................26 VI.3.5.1. Les ressources zoogénétiques 27 VI.3.5.2. Les ressources génétiques forestières (HCEFLCD) 27 VI.3.5.3. Ressources phytogénétiques 28 VI.3.5.4. La richesse des ressources ichtyogénétiques 29 VI.3.6. Les pressions actuelles sur la biodiversité et les réponses ............................................................................29 VII. L’évaluation des flux financiers de la biodiversité au Maroc. 30 VII.1. Caractéristiques et mécanismes de l’APD ................................................................................................................30 VII.2. L’APD globale Octroyée au Maroc de 2006 - 2010 ..............................................................................................34 VII.3. L’évaluation des flux internationaux de financement de la biodiversité 2006 - 10...........................36 VII.4. L’évaluation des ressources financières nationales de la biodiversité 2006 - 2010. ........................42 VII.4.1 Evolution du financement national de la biodiversité au Maroc 2006 - 2010 42 VII.4.2 Récapitulatif des budgets nationaux à tous les niveaux 56 VIII. Lacunes de l’évaluation du financement de la protection de la biodiversité 57 VIII.1. Les mesures de l’UICN pour la conservation de la nature. VIII.2. Mesures de la Commission Européenne pour combler les lacunes et intégrer la biodiversité dans les politiques publiques VIII.3. 59 60 Mesures adoptées par la Suisse pour le contrôle national de l’attente des objectifs de la biodiversité et l’identification des lacunes 61 VIII.4. 62 IX. Mesures pour l’évaluation du financement de la protection de la biodiversité au Maroc Conclusions générales 64 ANNEXES Annexe 1: 15 indicateurs financiers de suivi de l’application de la stratégie de mobilisation des ressources de la Convention DB................................................................................................................... 66 Annexe 2: Entités / départements concernés et leur rôle potentiel et justification de l’implication dans le domaine de la biodiversité ...................................................................................................... 68 Annexe 3 : Note sur les ressources humaines et les organes gestion de la biodiversité au MEMEE ............. 71 Annexe 4 : Le budget global des départements sectoriels actifs dans le domaine de la biodiversité (2006 2010) ..................................................................................................................................... 76 Annexe 5 : Estimation des dépenses de la biodiversité par sous secteur (2006 - 2010) ............................... 77 Annexe 6 : Liste de présence à l’atelier relatif à l’étude des finances de la biodiversité ............................... 78 Annexe 7 : Liste de la bibliographie ........................................................................................................... 81 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 TABLEAUX Tableau 1: Liste minimale de partenaires impliqués.................................................................................... 16 Tableau 2: La situation des espèces animales et végétales au Maroc (1997) ................................................ 24 Tableau 3 : Structure et gouvernance du FEM ............................................................................................ 33 FIGURES Figure 1: Approche méthodologique .......................................................................................................... 5 Figure 2: Schéma du développement durable ............................................................................................. 7 Figure 3: Ecosystèmes et services : modèle conceptuel .............................................................................. 8 Figure 4: Les niveaux des interactions de la biodiversité ............................................................................ 9 Figure 5: Les interactions entre les 3 niveaux de base de la biodiversité ................................................... 12 Figure 6: Les flux financiers de la biodiversité ......................................................................................... 12 Figure 7 Zones clés pour l’investissement prioritaire dans la biodiversité au Maroc................................. 14 Figure 8: Les six membres du comité de pilotage de l’étude de la comptabilité environnementale ............ 16 Figure 9: Les place de la biodiversité dans l’organigramme du département de l’environnement .............. 17 Figure 10: La matrice de la comptabilité de la biodivesité au Maroc « Dépenses de protection » .............. 22 Figure 11: Processus de collecte et de traitement de l’information pour le suivi des indicateurs financiers de la biodiversité. ................................................................................................................... 23 Figure 12 : Catégories de flux financiers internationaux de l’APD à la biodiversité au Maroc 2006-10 ..... 38 Figure 13 : Chiffres clés de l’APD dans le secteur de la biodiversité au Maroc 2006 – 2010 .................... 42 Figure 14 : Les secteurs concernés par les dépenses de protection de la biodiversité au Maroc 2006 - 2010 .............................................................................................................................................. 43 Figure 15 : Répartition des dépenses brutes de l'Etat dans les secteurs en relation avec la biodiversité 2006 2010 ....................................................................................................................................... 44 Figure 16 : Les variations annuelles des dépenses de la biodiversité par secteur (2006-2010) ................... 45 Figure 17 :Répartition des dépenses brutes de l'Etat dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 ........ 46 Figure 18 :Les dépenses du secteur agricole dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010.................... 46 Figure 19 :Les dépenses du secteur de la pêche maritime dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 47 Figure 20 :Les dépenses du secteur de l’environnement dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 .. 48 Figure 21 :Les dépenses du secteur des eaux et forêts dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 ..... 49 Figure 22: Les surfaces forestières dédiées à la conservation de la diversité biologique dans les pays méditerranéens. ...................................................................................................................... 51 Figure 23: Les surfaces forestières situées dans les aires protégées dans les pays méditerranéens. ............ 51 Figure 24: La densité des feux de forêt dans la région méditerranéenne 2006-2010. ................................. 52 Figure 25 :Les feux de forêt dans la région méditerranéenne 2006-2010................................................... 52 Figure 26 :Les dépenses du secteur R & D dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 ...................... 53 Figure 27: Sources de financement national disponibles pour la diversité biologique 2006 à 2010 ............ 56 Figure 28 : Chiffres clés de l’APD dans le secteur de la biodiversité au Maroc 2006 – 2010 .................... 56 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 GRAPHIQUES Graphique 1: APD octroyée au Maroc de 2006 à 2010 - Banque mondiale ............................................... 34 Graphique 2: APD octroyée au Maroc par secteur de 2006 à 2010 ........................................................... 35 Graphique 3: APD octroyée à la biodiversité au Maroc de 2006 à 2010.................................................... 36 Graphique 4: Flux financiers internationaux de financement de la biodiversité au Maroc de 2006-10 ....... 37 Graphique 5 : Les Top ten des donneurs de l’APD pour la biodiversité au Maroc 2006 – 2010................. 38 Graphique 6 : L’apport de soutien financier du GEF au Maroc 2006 – 2010............................................. 40 Graphique 7 : Importance de l’APD à la biodiversité par rapport à 10 secteurs au Maroc 2006 – 2010 ..... 41 Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 LISTE DES ABBREVIATIONS AEA Comptes des émissions atmosphériques AFD Agence française de développement APD Aide publique au développement BAD Banque africaine de développement BEI Banque européenne d'investissement BERD Banque européenne pour la reconstruction et le développement BID Banque interaméricaine de développement BIRD Banque internationale de reconstruction et de développement CAD Comité d'aide au développement CAD Comité d'aide au développement CC Changement climatique CDB Convention de la diversité biologique CGEM Confédération Générale des Entreprises du Maroc CSS Coopération sud-sud CTB Coopération technique belge DB Diversité biologique DRPE Direction de la Recherche et la Planification de l'Eau DRPE Direction de la Recherche et la Planification de l'Eau ESEA European Strategy for Environmental Accounting de l'UE ETEA Comptes relatifs aux taxes environnementales EW-MFA Comptes de flux de matières à l’échelle de l’économie FAO Organisation des nations unies pour l'agriculture et l'alimentation FED Fonds européen de développement FEM Fonds pour l'environnement mondial FFEM Fonds français de l'environnement mondial GAVI Alliance mondiale pour les vaccins et la vaccination GEF Global environment facility GFATM Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme GIZ Agence allemande de coopération international HCEFLCD Haut commissariat des eaux et forêts et la lutte contre la désertification HCP Haut commissariat au plan HCP Haut Commissariat au Plan HCR Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés IDA Association internationale de développement IG Identification géographique INRA Institut national de la recherche agronomique i Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 INRH Institut national des ressources halieutiques MAPM Ministère de l'agriculture et la pêche maritime MEMEE Ministre de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement MI Ministère de l'intérieur NBSAP Stratégies et Plan d’Action Nationaux pour la Biodiversité OCDE Organisation de Coopération et de Développement Économiques OFEV Office fédéral de l’environnement (Suisse) ONEE Office nationale de l'eau et l'électricité ONG Organisation non gouvernementale ONU Organisation des nations unies PAC Politique agricole commune PAM Programme alimentaire PANE Plan d’Action National pour l’Environnement PIB Produit intérieur brut PNRC Plan National de lutte contre le Réchauffement Climatique PNUD Programme des nations unies pour le développement PNUE Programme des Nations unies pour l'environnement PTRC Plans Territoriaux de lutte contre le Réchauffement Climatique SSN Système Statistique national TdR Termes de référence UE Union Européenne UE Union européenne UICN Union internationale pour la conservation de la nature UNICEF Fonds des Nations unies pour l’enfance USD Dollar américain WAVES Wealth Accounting and the Valuation of Ecosystem Services ii Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 TAUX DE CONVERSION 1 USD = 9.75319 Dirham marocain 1 dirham = 0.103969 USD Date du 20 août 2015 REMERCIEMENTS L'expert adresse ses vifs remerciements au Chef de service de la conservation de la biodiversité Mr Mostafa Madbouhi et à Mr le coordinateur du projet et son assistante pour leur accueil, leur disponibilité et leur aimable coopération tout au long de cette mission. Les remerciements vont également à toutes les parties prenantes du MEMEE, des institutions nationales et de la coopération internationale pour leur contribution et participation à l’atelier de démarrage, et surtout pour les informations utiles, déterminantes et indispensables fournies. iii Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 PREAMBULE Lors de la Conférence des Parties en 2010 à Nagoya, un nouveau Plan Stratégique 2011-20 de la CDB a été adopté et qui se fixait pour objectif que à l'aune 2015 les Stratégies et Plan d’Action Nationaux pour la Biodiversité (NBSAP) soient actualisés. Ayant ratifié la CDB en 1995, le Maroc a adhéré à cette action d'actualisation de sa stratégie en se conformant aux orientations données aux pays concernant i) la biodiversité et les services éco systémiques ; ii) les aires protégées terrestres et marines ; iii) l’eau, la santé et les moyens de subsistance et iv) la résilience des écosystèmes au changement climatique. Le travail initié pour l'actualisation du plan stratégique 2011-2020 de la Convention sur la diversité biologique (CDB/projet NBSAP) bénéficie de l'apport du FEM et s'appuie sur les réalisations du Maroc en matière de production de rapports sur la diversité biologique, d’une part, et l’établissement de cadres nationaux de planification sectorielle intégrant les obligations du Maroc vis-à-vis de la CDB. Ce projet contribue, également, à l’atteinte des objectifs nationaux en matière de la protection et de la valorisation de la biodiversité conformément aux dispositions de la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable. La mission d’une durée de huit semaines1 a été entamée le 24 mars par Monsieur Mohammed Bajeddi, Expert international en économie de l’environnement par la remise d'une note de cadrage méthodologique pour relater tous les aspects de la problématique, recadrer et éventuellement harmoniser les termes de référence pour une compréhension partagée par l'expert, l'équipe du projet, et présenter un calendrier détaillé de la mission en général et des réunions / ateliers à tenir avec les partenaires institutionnels et des parties prenantes. La mission a procédé aussi à une analyse de toute la documentation et rapports disponibles en relation avec la thématique de l'étude, a rencontré les partenaires institutionnels impliqués en étroite collaboration avec le service de la conservation de la biodiversité et le Coordinateur du projet. Par la suite, un atelier a été organisé avec les parties prenantes concernées par la question de la biodiversité : institutions nationales, internationales, bailleurs de fonds et privés. L’objectif de cet atelier était de i) informer sur l’objet et l’objectif de l’étude ; ii) présenter la démarche pratique pour la collecte des données statistiques financières ; iii) expliquer le mode d’utilisation du cadre d’insertion des données statistiques et iv) la mise en place des modalités pratiques de suivi et d’assistance pour la réalisation du travail de collecte des données spécifiques aux secteurs. Le travail de l’expert devra déboucher sur la préparation de trois rapports : Rapport I : Ce premier rapport qui est entièrement consacré au « financement existant de la protection de la biodiversité ». Rapport II : Le deuxième rapport va traiter de la problématique « d’intégration de la biodiversité dans les politiques, plans et pratiques de développement, dans les cadres de comptabilité nationale ». Rapport III : Un dernier et troisième rapport sera consacré aux indicateurs de suivi de l’application de la stratégie de mobilisation des ressources de la Convention qui va servir pour l’actualisation du rapport sur la NBSAP. 1 La durée totale de l’intervention de l’expert est de 8 semaines pour réaliser trois études dont ce premier rapport I. iv Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Le présent rapport « Rapport I » livre les principales informations pratiques sur le financement de la biodiversité. Par ailleurs, malgré son caractère stratégique, et l’importance des résultats attendus pour la mise en place du Plan stratégique pour la biodiversité, la mission a rencontré des limites qui sont surtout dues à i) la multiplication des acteurs institutionnels, privés et de la coopération internationale et ii) le fait que toutes les données financières nécessaires pour l’étude dépendent en grande partie de l'apport des parties prenantes. C’est pourquoi, la mission a essayé de les impliquer dès le début à travers un atelier. Aussi, compte tenu du temps imparti à la réalisation de ce travail, malgré que les informations utilisées sont extraites des documents administratifs officiels, la mission était dépourvue de moyens pour les trier et analyser en profondeur afin de répondre entièrement aux exigences des TdR. v Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 RESUME EXECUTIF Le Maroc a ratifié les trois conventions issues du processus de la Conférence de Rio en 1992 et qui portent sur les thèmes de changement climatique, de la biodiversité et de la lutte contre la désertification. Cette adhésion traduit la volonté du gouvernement marocain de s'inscrire dans le cadre légal des nouvelles perspectives de coopération internationale que ces nouveaux instruments juridiques offrent au pays pour faire face aux graves menaces qui planent sur la biodiversité. Dans la mouvance que connaît la question de l'environnement à l'échelle planétaire et les dispositions concertées impliquant tous les acteurs concernés et les Etats à se conformer à un certain mode de conduite, la question de la diversité biologique se trouve au centre des préoccupations des pays depuis l’adoption de la Convention sur la diversité biologique lors su Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. Les objectifs de la CDB sont i) la conservation de la diversité biologique, ii) l'utilisation durable de ses éléments et iii) le partage juste et équitable des avantages découlant de 1'exploitation des ressources génétiques, notamment grâce à un accès satisfaisant aux ressources génétiques et à un transfert approprié des techniques pertinentes, compte tenu de tous les droits sur ces ressources et aux techniques, et grâce à un financement adéquat. A cet effet, un nouveau Plan Stratégique 2011-20 de la CDB a été adopté lors de la Conférence des Parties en 2010 à Nagoya, et qui se fixait pour objectif que à l'aune 2015 les Stratégies et Plan d’Action Nationaux pour la Biodiversité (NBSAP) soient actualisés. Ayant ratifié la CDB en 1995, le Maroc a adhéré à cette action d'actualisation de sa stratégie en se conformant aux orientations données aux pays concernant i) la biodiversité et les services écosystémiques ; ii) les aires protégées terrestres et marines ; iii) l’eau, la santé et les moyens de subsistance et iv) la résilience des écosystèmes au changement climatique. A ce sujet, il faut rappeler les efforts consentis par le Maroc pour l'établissement de deux versions antérieures de la Stratégie et du Plan d’Action Nationaux pour la Biodiversité (NBSAP) en 2000 et 2004. Le travail initié pour l'actualisation du plan stratégique 2011-2020 de la Convention sur la diversité biologique (CDB/projet NBSAP) bénéficie de l'apport du FEM et s'appuie sur les réalisations du Maroc en matière de production de rapports sur la diversité biologique, et les cadres nationaux de planification sectorielle intégrant les obligations du Maroc vis-à-vis de la CDB. Ce projet contribuera, également, à l’atteinte des objectifs nationaux en matière de la protection et de la valorisation de la biodiversité conformément aux dispositions de la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable. Objet et objectifs de l’étude Le travail demandé consiste à effectuer les tâches spécifiques liées à : 1. Explorer les possibilités d'intégration de la biodiversité dans les politiques, plans et pratiques de développement, dans les cadres de comptabilité nationale et dans les plans et stratégies sectorielles (la Composante 2) ; 2. Contribuer à l'analyse des conditions de financement durable pour la mise en œuvre du SPANB, définir les financements existant pour la biodiversité avec leurs sources, et établir les besoins et lacunes en finances (la Composante 3) Les résultats de ce travail seront donc consignés dans trois rapports dont ce premier rapport qui est entièrement consacré au « financement existant de la protection de la biodiversité et les lacunes ». Méthodologie L'approche méthodologique globale s'appuie sur trois éléments (outils / instruments) pour la réalisation de l’étude : i) l'analyse de la documentation disponible, ii) l'organisation de réunions d'entretien et un atelier avec les parties prenantes, iii) la compilation et l'analyse de l'information. vi Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Mai 2015 Août/2015 Sept/2015 Planification Documentation Atelier/de/ collecte/ information Rapport/ I/ provisoire validation/ du/ rapport/ I •Exploitation/ documents/ MEMEE/et/ bibliographie/ internationale •Approche/ méthodologique/ et/planification •Organisation/ d'un/atelier/ national/avec/ les/parties/ prenantes •Remise/du/ rapport/sur/ l’économie,/ finance/et/les/ lacunes Fin/Sept/2015 •Validation/ avec/les/ parties/ prenantes Rapport(I(:(Financement( de(protection(de(la(DB(au( Maroc Avril/2015 MarsDAvr 2015 Les limites de l’étude Une large documentation bibliographique sur la question de l’économie et la finance de l’environnement, en général, et la biodiversité, en particulier reconnaissent l’existence de problèmes insurmontables pour l’évaluation des agrégats économiques et comptes financiers. Déjà la nature de l’évaluation / estimation monétaire se heurte à la richesse et la variabilité du concept allant d’une simple évaluation des dépenses pour la protection de la biodiversité jusqu’à l’extrême estimation de la valeur de la biodiversité. Entre les deux limites, on trouve des concepts d’évaluation du coût de dégradation de l’environnement y compris la biodiversité, l’analyse coût/bénéfice de l’action et/ou l’inaction, etc. La principale difficulté pour l’établissement du référentiel de niveau financier de la protection de la biodiversité au Maroc durant la période 2006 à 2010 réside dans l’absence de système national informatisé de gestion intégrée des dépenses (GID) publiques avant 2010. Ce système a été conçu et déployé à partir du 1er janvier 2010. Il simplifie les procédures en consacrant le principe de la saisie unique, le renforcement des capacités de contrôle interne et la mutualisation de l’information budgétaire. Ce qui montre les difficultés certaines pour trouver les dépenses publiques couvrant la période 2006-10 avec les détails nécessaires pour identifier les finances publiques relatives à la biodiversité. Définition, concept et domaine de la biodiversité La définition au sens large, la biodiversité, ou diversité biologique, désigne la variété et la variabilité du monde vivant sous toutes ses formes. Elle est définie plus précisément dans l'article 2 de la convention sur la diversité biologique comme la « variabilité des organismes vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie ; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes ». La biodiversité ne se limite donc pas à la somme des espèces, mais représente l'ensemble des interactions entre les êtres vivants, ainsi qu'avec leur environnement physico-chimique, sur plusieurs niveaux : Figure 1 : Les niveaux des interactions de la biodiversité Niveaux(des( interactions Coût'de' protection'de' l’environnement Coût'de' protection' de'la' Biodiversité Ecosystèmes' terrestres Ecosystèmes'marins' et'côtiers Ecosystèmes' intérieures'/' continentales Diversité'génétique Indicateurs(financiers(de(suivie(de( l’état(de(la(protection(de(la( biodiversité Espèces'et' risques' d’extinction Pressions'et' réponses vii Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Extrême complexité pour la mesure de la valeur de la biodiversité A l’échelle mondiale il est formellement connu qu’il n’existe aucune mesure universelle de la biodiversité et les différentes manières de l'estimer sont sujettes à débat. Mesurer l'ensemble de la biodiversité d'un système donné étant une tâche quasiment irréalisable, des indicateurs de la biodiversité sont utilisés afin d'en obtenir une estimation. Cela implique qu’une estimation objective de la valeur (valeur ne doit pas être confondue avec prix ou coût) de la diversité spécifique de la biodiversité est basée surtout sur des éléments qualitatifs d’aide à la décision. De ce fait, l’estimation financière ou les indicateurs financiers de suivi de la biodiversité sont basés sur la mise en œuvre des politiques de protection de la biodiversité (différente de la valeur de l’écosystème) pour connaître l’efficacité des actions menées (coût, nature et source). La réalisation concrète et le succès des comptes environnementaux pilotes sont facilités par l'adoption d'une démarche pragmatique. Certaines données, bien qu'incomplètes ou peu détaillées, sont déjà disponibles au niveau des parties prenantes. Cette étude est destinée en réalité à les réunir sans prétendre que les chiffres sont complets et de qualité supérieure. Démarche d’estimation des dépenses de la protection de la biodiversité au Maroc Jusqu’à présent, les données rassemblées dans le domaine de la comptabilité environnementale le sont sur une base volontaire de la part des pays. Cependant, peu de pays, notamment ceux de l’UE, ont complètement adopté un cadre codifié comptable en mettant en place des priorités qui s’articulent autour des comptes des dépenses de protection de l'environnement et des comptes de flux de produits. La comptabilité nationale marocaine est multidimensionnelle et large pouvant abriter toutes les statistiques de nature monétaire dans des agrégats structurés en chapitres, comptes et sous comptes. Dans cette architecture de la conception de la comptabilité nationale il y’a la place pour insérer / marquer des comptes de la comptabilité environnementale, en général, et la comptabilité de la biodiversité en particulier. L'objectif premier des comptes monétaires de l’environnement, qui est d’ailleurs le même pour les comptes de la biodiversité, est de répertorier les dépenses de protection et les recettes liées à la biodiversité. Tant le secteur public que le privé (industries et ménages) sont concernés par ce genre de comptes. Les composantes pratiques correspondent à des comptes de la comptabilité nationale qui sont imbriqués dans le domaine de l’environnement dans sa globalité. Pour estimer les dépenses de protection / produits de la biodiversité il est nécessaire d’identifier les « comptes » et « sous comptes monétaires » de protection de la biodiversité pour chacun des « Chapitres » écosystémiques. Une matrice est élaborée dans le cadre de cette étude pour assumer cette fonction durant la période 2011-2020. L’évaluation des flux financiers de la biodiversité au Maroc Evaluation des flux financiers internationaux annuels de financement de la biodiversité D’après la FAO, l’APD octroyée à la biodiversité au Maroc de 2006 à 2010 s’élève à 5,05 millions USD ; soit 1,81 millions USD par an d'APD nette. Ce montant d’APD représente environ 0,02% du PIB du Maroc, dont la majeure partie (près de 98,55%) est obtenue par le biais de la coopération bilatérale. Graphique 1 : APD octroyée à la biodiversité au Maroc 2006 - 2010 Le financement de la biodiversité au Maroc est irrégulier variant de 0,03 million USD en 2007 à 2,66 millions USD en 2008. Cette variation contrastée d’une année à l’autre montre principalement les difficultés de trouver des ressources de financement stables et régulières. L’analyse des flux financiers internationaux de l’APD montre que le secteur public international contribue fortement au financement de la biodiversité au Maroc avec plus de 44,95%. L’APD directe provient surtout de l’aide bilatérale qui est fortement liée aux orientations stratégiques des pays donateurs. En revanche Evolution annuelle de l'APD à la biodiversité au Maroc (Engagements USD Million) 2,66 1,43 Source : FAO 0,55 0,38 0,03 2006 2007 2008 2009 2010 viii Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 l’aide multilatérale est très limitée, elle représente 1,45% de l’APD globale dédiée à la biodiversité et environ 9% de l’APD directe. Les aides allouées par le PNUE et les organismes de recherche sont très limitées. Figure 2 : Catégories de flux financiers internationaux de l’APD à la biodiversité au Maroc 2006-10 Résultats de l’APD présentés selon le modèle de la CDB Evolution du financement national de la biodiversité au Maroc 2006 - 2010 Sur la base des finances publiques et d’hypothèses, les dépenses de protection de la biodiversité au Maroc ont été estimées pour la période 2006 - 2010 à 12.059.417.377 dh (1.236.863.321 USD) ; soit 2.411.883.475 dh par an (247.372.664 USD). Ce montant correspond à 0,35% du PIB. Figure 3 : Les variations annuelles des dépenses de la biodiversité par secteur (2006-2010) 7.000.000.000 6.000.000.000 5.000.000.000 4.000.000.000 3.000.000.000 2.000.000.000 1.000.000.000 2.006 2.007 MAPM 2.008 MEMEE 2.009 2.010 HCEFLCD Source : Notre estimation. A l’exception des années 2008 et 2009 qui coïncident avec le démarrage effectif du Plan Maroc Vert et du programme d’arboriculture fruitière (PAF – MCA – MCC) caractérisé par des plantations massives et la mobilisation des ressources en eau pour l’irrigation, le département de l’environnement a été durant les autres années (3 sur 5) le leadership des dépenses destinées à la biodiversité avec en moyenne 33% des dépenses nationales. Compte tenu de l’intensité et du volume des dépenses en 2008 et 2009, le département de l’agriculture se place en 2ème position en assurant 26% des dépenses nationales de la biodiversité. ix Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Figure 4 : Répartition des dépenses brutes de l'Etat dans le domaine de la biodiversité 2006 – 2010 Source : Notre estimation. En outre, l’effort soutenu de mise en convergence des différentes politiques sectorielles se poursuit afin d’assurer leur réalisation dans les meilleures conditions de rentabilité socio-économique et dans le respect absolu des principes de base du développement durable, notamment le respect de l’environnement et de la biodiversité. Figure 5 : Sources de financement national disponibles pour la diversité biologique 2006 à 2010 Le financement de la biodiversité au Maroc est une affaire de l’Etat qui apporte la quasi majorité des fonds. La contribution du secteur privé et de la société civile est loin d’atteindre des seuils significatifs. Ce financement s’effectue globalement par les niveaux décentralisés des secteurs concernés avec la perspective de prendre plus d’importance dès la mise en œuvre effective de la politique de régionalisation. Figure 6 : Chiffres clé du financement national dans le secteur de la biodiversité au Maroc 2006 – 2010 x Economie et finance de la Biodiversité au Maroc 2006 – 2010 Les lacunes de l’évaluation du financement de la protection de la biodiversité Dès l’entame de cette étude, il était clair que des lacunes apparaîtront inévitablement dans les données, que les observatoires pourront alors identifier, classer et hiérarchiser en termes d'enjeux pour tenter de les combler dans l’avenir. Les lacunes sont de plusieurs natures et couvrent plusieurs aspects de la biodiversité et les combler nécessite un travail à long terme. Le Maroc, est reconnue comme un haut lieu mondial de biodiversité, tant dans le milieu terrestre que dans le milieu marin, et cela parce qu'elle est soumise à un changement anthropique rapide. Toutefois, les évaluations réalisées sont rares et de portée limitée en raison de l’existence de lacunes importantes due en particulier au manque de connaissances sur l’état des espèces. La problématique de financement de la biodiversité ne peut être rapprochée actuellement qu’en se basant sur les dépenses de protection et les constats visuels qui laissent conclure que les rivières et les zones humides sont parmi l’écosystème menacé. Effectivement si la finalité de combler les lacunes dans la connaissance est d’anticiper les pertes pour préserver la biodiversité, il faut toujours garder à l’esprit qu’il ne sert à rien de savoir sans agir, et qu’il ne sert à rien non plus d’agir sans savoir. Nos connaissances sur la biodiversité au Maroc sont très limitées, mais elles suffisent pourtant dans nombre de domaines pour agir. Les plus grosses lacunes concernent la répartition et les exigences d’habitat des espèces et sont surtout encore plus marquées dans le domaine de la diversité génétique. L’évaluation de l’effort financier nécessaire pour initier des actions plus efficaces pour la diminution des pertes en biodiversité serait plus intéressante si on dispose d’abord de connaissances suffisantes et pertinentes et puis faut-il que le transfert de connaissances se fasse jusqu’au niveau de la pratique. Pour avoir le document entier de l’étude contacter l’auteur : [email protected] xi