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Halluciner : Percevoir ce qui ne peut être pensé

2013, HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe)

Halluciner : Percevoir ce qui ne peut être pensé Guy Gimenez To cite this version: Guy Gimenez. Halluciner : Percevoir ce qui ne peut être pensé . Santé Mentale, Acte Presse, 2013, Hallucinations et soin, pp. 30-37. ฀hal-01385472฀ HAL Id: hal-01385472 https://hal-amu.archives-ouvertes.fr/hal-01385472 Submitted on 21 Oct 2016 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of scientific research documents, whether they are published or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Halluciner : Percevoir ce qui ne peut être pensé L’absence d’un modèle conséquent en psychopathologie d’inspiration psychanalytique conduit l’auteur à en proposer un autour de la notion de « travail de l’hallucination ». Si ce travail transforme des pensées intolérables en perception, le travail thérapeutique, lui, consiste en une transformation élaborative : celle d’une pensée qui n’avait pu se construire auparavant. Illustration avec la prise en charge de Georges. L’HALLUCINATION Hétérogénéité et pluralité du phénomène hallucinatoire L’hallucination est un phénomène pluriel, d’une grande diversité. On peut différencier quatre grandes origines aux hallucinations : organique (causées par des affections cérébrales ou des lésions d’un organe sensoriel), induite par le contexte, (état modifié de conscience, état d’endormissement, isolation sensorielle), toxique (dues à une intoxication ou à des substances hallucinogènes), liée à des troubles, des pathologies psychiques ou des expériences traumatiques. Quelques mots d’étymologie Le mot hallucinatio, appartenant au vocabulaire latin, signifie « erreur », « égarement », « bévue », « méprise » et « abus » (Lanteri-Laura, 1991, 3-4 ; 13) et serait lui-même dérivé du grec aluo , « avoir l’esprit égaré ». Le verbe lui correspondant, hallucinari, signifie « se méprendre », « se tromper », Guy GIMENEZ Professeur en psychopathologie clinique, Directeur du laboratoire LPCLS (Laboratoire de Psychopathologie Clinique Langage et Subjectivité). « divaguer » mais aussi « tromper » ; hallucinator veut dire « qui commet des bévues », « qui divague », et hallucita « moucheron qui se brûle à la lumière » et « celui qui prend la nuit pour le jour » (Lanteri-Laura, 1991, 13). Hallucinatio a également été rapproché de ad lucem, comme pour souligner sa fonction d’illumination (Ey, 1973, 80-81). s’y sont intéressés, d’un point de vue nosographique et sémiologique. LA PERCEPTION COMME MODÈLE DU PHÉNOMÈNE HALLUCINATOIRE ? Dans mes recherches (Gimenez, Guimont, Pedinielli, 2003), j’ai présenté une étude critique de l’évolution du concept d’hallucination dans la littérature psychiatrique classique. Pluralité des études sur les hallucinations Si les formes d’hallucination sont multiples, les approches aussi. En plus de l’approche sémiologique et nosographique, l’hallucination est l’objet de recherches en psychopathologie dans des approches cognitive (voir texte J. Favrod page 38), phénoménologique (voir texte du Pr Jean Naudin, page 84), neurochimique et neuro-cognitive, et psychanalytique. Je me centrerai dans ce texte sur cette dernière approche que j’ai étudiée en explicitant de façon critique cinq modèles du fonctionnement hallucinatoire, puis j’ai élaboré un modèle dynamique de celui-ci. L’absence du terme « hallucination » dans le Vocabulaire de la psychanalyse (Laplanche et Pontalis, 1967) reflète un fait historique : ce concept (comme, dans une large mesure, celui de délire) a été peu investi par les psychanalystes, bien qu’il ait été largement étudié par Freud. Les psychiatres, eux, beaucoup plus confrontés aux patients psychotiques, Hallucination et perception ’ approche psychiatrique, sémiologique, L appréhende l’hal ul ci na tion en comparaison à une perception. C’est cette analogie hallucination-perception qui fonde l’histoire du concept d’hallucination. Les auteurs centrent leurs définitions sur le vécu hallucinatoire des patients qui les décrivent en termes perceptifs : ils localisent les voix dans l’espace, en précisent le timbre, décrivent leurs visions, indiquent les odeurs de leurs hallucinations olfactives… Le patient doit pouvoir attester d’une expérience sensible (je vois, j’entends, je sens) par sa référence aux attributs de la sensorialité, et soutenir l’objectivité et la réalité de celle-ci (Ey, 1973, 4445). Quand l’hallucination se déroule pendant les entretiens, le clinicien observe une situation dans laquelle tout se passe comme si le patient avait une perception dont le substrat lui échapperait. Le patient peut même repérer que le clinicien, lui, ne perçoit pas l’hallucination ; d’autres fois, il pense que la perception est partagée. Perception sans objet L’hallucination est, à partir d’Esquirol (1838), définie comme « perception sans objet ». Dans l’approche psychiatrique, elle sera alors toujours comparée à une perception (Lanteri-Laura, 1991, 13). Comme l’hallucination ne peut être réduite à une perception, la comparaison hallucination/perception amène les auteurs à décrire l’hallucination de façon négative : par l’absence de percept ou d’objet. Les définitions du DSM IV (1994) reprennent ces critères : « Perception sensorielle qui a le sens d’accomplissement de la réalité d’une perception […] qui se produit en dehors de la stimulation externe d’un organe sensoriel. » Perception sans objet à percevoir Dans son Traité des hallucinations, H. Ey (1973) critique et complète la définition classique : l’hallucination devient alors une « perception sans objet à percevoir ». Par ce complément, Ey souhaite mettre l’accent, non plus sur le contenu de la perception, mais sur le processus hallucinatoire : « la déformation, et même l’inversion de l’acte perceptif » (1973, 52). Il précise qu’en ajoutant « à percevoir » il souhaite « souligner que l’hallucina- tion consiste à percevoir un objet qui ne doit pas être perçu » (1973, 47). Limites des définitions J’ai souligné dans mes travaux la dimension paradoxale de ces définitions : elles témoignent d’une difficulté à laquelle le clinicien et l’observateur sont confrontés : maintenir en tension deux points de vue sur l’expérience hallucinatoire, sans les différencier ni les articuler, celui du patient (qui la vit comme une perception) et celui du clinicien (pour lequel il n’y a aucun objet à percevoir) (1). Je rejoins ici W.R. Bion (1965, 156), pour qui le terme d’hallucination est lié au décalage entre deux points de vue ou deux vertex différents et simultanés : celui du patient et celui du clinicien. Mais quel sens cela a-t-il de parler de perception qui n’aurait pas d’objet, même si on précise « à percevoir » : sauf à dire que l’objet est bien interne. La formule de H. Ey (1973) pourrait alors être complétée ainsi : « perception sans objet externe à percevoir ». L’ajout du qualificatif « externe » insiste sur le fait qu’il y a bien un objet mais que celui-ci est intrapsychique, et de ce fait ne peut être véritablement perçu par le clinicien. Critères de classifications des hallucinations. Dans la logique de l’analogie hallucination-perception, les hallucinations ont été classées à partir de trois critères : la conviction (Esquirol), l’esthésie (Baillarger, Falret) et le degré de destructuration de la psyché (Ey). À partir de ces critères, on distingue généralement les hallucinations psychiques considérées par le patient comme qualitativement différentes de la perception et les hallucinations psychosensorielles, qui, elles, sont marquées par leur aspect esthésique et leur origine appréhendée comme extérieure au sujet, ce que Guiraud (1950) nomme xénopathie. Dans une démarche organodynamique, H. Ey (1973, 97) a proposé une classification « structurale », en rapport avec le fonctionnement psychique et le « degré de désorganisation » de la psyché. Avec Ey (1973), l’hallucination devient l’effet d’un bouleversement structural de l’être conscient (1973, 94-95). Il différencie alors les éidolies (de eidos : image), des « véritables » hallucinations qu’il nomme « hallucinations délirantes » (Ey, 1973, 27). Les « hallucinations délirantes » sont, pour Ey, les vraies hallucinations, appréhendées par les patients comme de véritables perceptions. Elles sont une expression du fonctionnement délirant du sujet, effet « de la destructuration de l’être conscient ». Nous rejoignons H. Ey (1973, 46) quand il propose de nommer hallucinations (les véritables hallucinations, c’est-à-dire les psychosensorielles) les phénomènes qui articulent les caractéristiques suivantes : – la sensorialité de l’expérience vécue (ce qui nous permet de faire le diagnostic différentiel avec l’image mentale), – la conviction de sa non-subjectivité (diagnostic différentiel avec les anomalies sensorielles, les éidolies), – l’absence d’objet réel (diagnostic différentiel avec l’illusion au sens où celleci se définit comme une simple erreur à propos d’un objet réel). DES HALLUCINATIONS HORS PATHOLOGIE ? Mais toutes les hallucinations ne sont pas pathologiques. J’appréhende ainsi l’hallucination, comme un mécanisme non pathologique en soi : ce serait l’impossibilité d’intégrer cette expérience qui lui donnerait sa dimension pathologique. Freud avait repéré cela en distinguant les visions et les hallucinations dans les situations extrêmes, quasi-traumatiques. Ne pourrait-on pas dire que ce n’est pas l’hallucination qui est en elle-même pathologique, mais la façon dont la psyché peut la traiter, l’intégrer, lui donner du sens ? En 1891, dans sa Contribution à la conception des aphasies, S. Freud illustre la situation d’émergence de l’hallucination face à une situation appréhendée comme traumatique, par une expérience personnelle d’hallucination à la fois auditive et visuelle constituée d’images sonores et kinesthésiques, face à un danger qui l’exposait à la mort. « Je me rappelle que par deux fois je me suis vu en danger de mort, dont la perception chaque fois se produisit de façon tout à fait soudaine. Dans les deux cas, j’ai pensé : ”Cette fois, c’en est fait de moi”, et pendant que je continuais à parler ainsi intérieurement, uniquement avec des images sonores tout à fait distinctes et des mouvements de lèvres à peine perceptibles, j’entendis ces mots en plein danger, comme si on me les criait dans l’oreille, et je les voyais en même temps comme imprimés sur une feuille voltigeant dans l’air » (Freud, 1891, 112). Remarquons qu’ici, dans le mécanisme de figuration, l’image sensorielle ne se substitue pas à la pensée intolérable. La pensée existe, mais est doublée par l’image appréhendée comme une perception. La figuration semble ici soustendue par l’intensité de la tension de l’expérience appréhendée de façon quasitraumatique. Certaines hallucinations observées chez les mystiques ou dans des états modifiés de conscience font partie de cette catégorie. Elles apparaissent également dans certains contextes groupaux comme les groupes nommés « dos à dos ». Il s’agit de dispositifs exploratoires dans lesquels on place des individus dans un groupe en cercle tournés vers l’extérieur, de façon que personne n’ait de vis à vis. On constate que la régression produite par le groupe, articulée à l’absence de regard, provoque des phénomènes hallucinatoires. D. W. Winnicott fera un pas de plus, en défendant l’idée de la dimension non pathologique en soi des hallucinations : « Peut-être sai- sirions-nous mieux le problème si nous nous souvenons que les hallucinations sont des phénomènes oniriques ayant pénétré dans la vie éveillée et que le fait d’halluciner n’est pas plus une maladie en soi que ne l’est le fait correspondant, à savoir quand les données diurnes et le souvenir d’événements réels franchissent une barrière pour entrer dans le sommeil et participer à la formation des rêves » (Winnicott, 1971, 94). POUR UNE APPROCHE PSYCHOPATHOLOGIQUE Je différencie cinq modèles (ou ébauches de modèles) de l’hallucination dans une perspective psychanalytique : la reviviscence d’une perception antérieure par décharge, la projection d’une sensation corporelle, le retour sous forme perceptive d’une représentation rejetée, l’hallucination comme défense et reconstruction, et l’hallucination comme un rêve. J’ai indiqué les apports et les limites de chacun de ces modèles, et j’ai constitué un modèle intégratif de l’hallucination prenant en compte ce que j’observais dans mon expérience de suivi au long cours de sujets souffrant d’hallucinations. Ma recherche et ma réflexion sont issues de la rencontre (de longues années en psychiatrie puis en privé) avec des patients souffrants d’hallucinations, vécues comme intrusives, persécutives, douloureuses, et rendant la relation avec les autres difficile. Les patients sont alors enfermés dans une grande solitude et une immense détresse. Ma pratique clinique emprunte son cadre théorique à la psychanalyse. Elle en constitue un aménagement de la technique et du dispositif lié à la pathologie des patients psychotiques reçus en thérapie. Un modèle de l’hallucination et du fonctionnement psychotique Saisir l’émergence, l’évolution et le contenu des hallucinations dans le cadre de psychothérapies de patients psychotiques, nécessite un modèle rendant compte : – des conditions d’émergence des hallucinations, – des mécanismes sous-jacents à leur construction, – des traces psychiques à partir desquelles les hallucinations se constituent, – des différents types d’hallucinations, – et éventuellement de leur évolution dans la dynamique d’une psychothérapie. L’absence d’un modèle conséquent en psychopathologie d’inspiration psychanalytique, rendant compte des différents aspects du fonctionnement hallucinatoire, m’a amené à étudier de façon critique les ébauches de modèles les plus pertinents, en indiquant leurs apports et leurs limites. Puis j’ai construit un modèle intégrant ces apports et répondant à mes attentes théoriques et cliniques. J’ai ainsi élaboré un modèle de l’hallucination psychotique autour de la notion centrale de « travail de l’hallucination » : ensemble de transformations effectuées sur une représentation ou un scénario intolérable, que le sujet ne peut pas élaborer, et qui sera appréhendé « comme une perception ». Il s’agit d’un modèle du fonctionnement psychotique (ou de la part psychotique de la personnalité), rendant compte de la construction de l’hallucination et des mécanismes qui la sous-tendent. Dans cette perspective, ce qui est perçu (ou plutôt appréhendé « comme une perception ») est la transformation d’expériences affectives et émotionnelles non symbolisées : l’hallucination est la figuration d’un impensé. Ce qui n’est pas pensé, parce qu’encore impensable, est figuré et perçu. Si le travail de l’hallucination transforme des pensées intolérables en perceptions, le travail thérapeutique lui, consiste en une transformation élaborative : celle de l’hallucination en une pensée qui n’avait pu se construire auparavant. Cette constitution est rendue possible dans la dynamique de la relation avec le clinicien : elle est une co-construction. J’ai étudié les conditions favorisant un tel travail d’élaboration dans les psychothérapies de patients psychotiques : spécificité du cadre, de la position psychique du clinicien, des modalités d’interventions, de la gestion de la dynamique relationnelle. Cela m’a amené à traiter de la question du transfert psychotique, à décrire ses différents temps, les mécanismes qui y sont en jeu, et les effets qu’ils peuvent produire chez le clinicien (réactions contretransférentielles). Ces recherches rendent compte des étapes possibles d’élaboration des hallucinations dans la relation clinique : l’intégration du clinicien dans l’hallucination et la possible utilisation, par les deux interlocuteurs de l’hallucination comme médiateur relationnel. LE CAS DE GEORGES Je présenterai maintenant le cas de Georges, qui a toujours eu un imaginaire riche. Petit, il se sent devenir le héros de livres de science-fiction ou fantastiques, comme Tolkien, Stephen King, et Philip K. Dick, et de types donjons et dragons. Puis il commence à écrire des histoires irréalistes, habitées de personnages surnaturels, elfes, tröls, nains, démons, magiciens… À l’adolescence, il crée, de façon très minutieuse, des univers fantastiques, élaborant des plans, construisant des décors soigneusement peints, écrivant des scénarios très construits. « Comme un ongle incarné » Puis, juste après la naissance de sa fille, il se sent englouti dans l’univers imaginaire qu’il avait rêvé et qui se met à devenir autonome… Il se retrouve brusquement précipité, dans la vie quotidienne, dans un monde délirant et hallucinatoire rempli des personnages sur lesquels il écrivait. Un minotaure entre dans sa maison. Un démon et un sorcier barbu le surveillent, le menacent, et le font agir. Des personnages de donjons et dragons l’entourent. Il devient lui-même un loupgarou dangereux… La nuit, on dessine sur son ventre, on grave des plans sur son buste et il en garde des stigmates au petit matin. Ses meubles portent aussi la marque gravée de ces dessins, schémas, plans, symboles kabbalistiques. l’empêche de voir la télévision, lui tire les cheveux… et lui demande de le considérer comme un frère jumeau. Questionnements préliminaires Premier rendez-vous Georges a 30 ans, de stature imposante, aux cheveux roux et longs. Il s’est séparé récemment de sa compagne, et est père d’une petite fille de 2 ans. Lors de notre premier rendez-vous, j’apprends que, plusieurs fois par jours, il essaie de lutter vainement contre ses hallucinations. Cellesci causent actuellement de grands préjudices dans sa vie familiale et professionnelle. Il a décidé de quitter sa famille après une hallucination où il se voyait en train de noyer sa fille dans son bain. Lors des premiers entretiens, il évoque de très nombreuses hallucinations. On le coud au matelas, on le transperce dans la journée avec des épées des lances, des couteaux. Une femme nue s’approche et lui fait l’amour, lui plante ses ongles devenus des griffes dans son dos, et lui traverse la cage thoracique jusqu’aux poumons. Une créature maléfique lui déchire le ventre avec de grosses griffes, courtes, faisant un grand trou terrifiant, laissant sortir l’estomac… La présence d’autrui n’empêche pas ces manifestations hallucinatoires : à son travail, devant ses collègues, on lui fait claquer des élastiques sur les joues, ou encore l’obscurité totale s’abat dans son bureau, et il entend des mâchoires d’une orque claquer près de ses oreilles… Quand il veut sortir de la pièce pour fuir ces attaques, on lui fait des croche-pieds, et il tombe dans le couloir. Le double Georges a aussi des hallucinations de transformations de son propre corps, dans le miroir. Quand il se regarde, il voit, terrifié, un être inquiétant avec les dents pointues, les ongles longs et crochus, les yeux exorbités (il le nommera le démon). Parfois, il perçoit un barbu, un sorcier, derrière ou à côté de lui. Quand il se rase, il a l’impression que l’image dans le miroir ne bouge pas exactement comme lui, mais décalée dans le temps. Quelquefois, quand il parle, son reflet ne bouge pas les lèvres, à d’autres moments, ce même reflet dans le miroir a les yeux fermés alors qu’il se regarde. Il voit aussi des doubles de lui-même (autoscopie) ; alors qu’il est sur son fauteuil, dans sa salle à manger, il se voit assis à côté de lui-même. Son double Lors des premiers entretiens, je suis ainsi surpris par les très nombreuses hallucinations de Georges et en même temps par sa capacité à les évoquer, à en parler, à les décrire avec une juste distance, apparemment de façon non interprétative, non délirante. Ce qui est très rare pour les hallucinations psychosensorielles ayant une grande esthésie, une grande qualité d’image, comme les décrit Georges, et pour lesquelles les patients essaient, habituellement, de donner, après-coup, du sens de façon délirante. Je repère l’aspect très scénarisé des hallucinations, qui peuvent faire penser à un monde onirique ou à des scénarios de films de science-fiction ou de jeux de rôles : la femme avec ses ongles coupants, le corps transpercé par des armes blanches, les créatures maléfiques, le démon, les petits soldats, les cafards, le double dans le miroir… L’hallucinatoire Après trois entretiens préliminaires, et devant ma difficulté sur le statut de ses productions hallucinatoires, je décide de considérer celles-ci comme faisant partie de « l’hallucinatoire », comme le nomment César et Sarah Bottela (1968) : phénomènes qui vont de la simple rêverie à l’hallucination psychotique. Ceci sans me préoccuper du registre psychique auxquelles ces hallucinations renvoient. Alors que nous échangeons sur le début de ses hallucinations, Georges évoque une période de surmenage très intense. Les mois qui ont suivi la naissance de sa fille, il travaille la journée et étudie ses cours du soir la nuit, tout en ne dormant que 3-4 heures. Il change de maison et fait des travaux le week-end. Il est surmené, stressé, anxieux. C’est alors qu’il voit des créatures étranges entrer chez lui : c’est sa première hallucination. Après une tentative de suicide où il tente de se jeter du haut d’un pont, il est hospitalisé. Je le reçois un mois plus tard, à sa demande, en cabinet. L’exemple du minotaure Lors du second entretien, Georges évoque une hallucination qu’il vient d’avoir quelques jours auparavant. Un minotaure lui est apparu. Il me dit, me scrutant de son regard : « Un minotaure, ça n’existe pas… » Puis il précise «… Quand je l’ai vu entrer dans ma salle à manger, je me suis dit ça dans ma tête : “un minotaure, ça n’existe pas”. » Le minotaure lui a alors répondu, tout en s’approchant de lui : « Comment ça, je n’existe pas? »… Il l’a transpercé avec une lance et Georges se vidait de son sang. À cette évocation, son visage traduit une grande douleur et une grande détresse. Au bout d’un moment, la lance a disparu progressivement ainsi que le sang et Georges s’est rendu compte qu’il s’agissait donc d’une hallucination… Nous repérons ici sa capacité à critiquer son vécu hallucinatoire, aprèscoup. Georges reconnaît que ces hallucinations viennent de lui : nous repérons donc une faible xénopathie (phénomène ressenti comme étant provoqué par une action extérieure) en dehors du moment hallucinatoire ; le mouvement projectif qui permet habituellement d’appréhender la pensée impensable audedans comme venant du dehors, semble être rapidement mis en échec par l’épreuve de la réalité. Nous repérons également, lors de l’hallucination, une altération du jugement d’existence (je perçois bien un objet) et du jugement de réalité (ce que je perçois existe dans la réalité extérieure), mais une reprise du jugement de réalité s’effectue très vite après l’expérience hallucinatoire. J’essaie d’explorer, avec lui, le contenu hallucinatoire, en lui proposant d’associer à partir du personnage du minotaure. Il me parle alors de son investissement des mythes, des contes, des légendes, et de ses croyances religieuses qui ont une place importante dans sa vie. Je fais l’hypothèse que cet investissement culturel lui sert de « magasin des accessoires », comme le dit Freud (1901) à propos des restes diurnes pour le rêve, et fournit des figurations à ses hallucinations. Il me parle alors de son activité imaginaire intense, de ses lectures, de son écriture créative, de la création de personnages et de scénarios pour les jeux de rôles qui avaient toujours pour lui une texture extrêmement réaliste et peuplent alors son univers. Mais quand je suis arrivé au travail, mon patron m’a demandé pourquoi ma chemise blanche était pleine de sang. Je suis rentré chez moi et il y avait aussi du sang sur mes draps… là j’ai eu l’impression de devenir fou… J’ai besoin de votre aide. » Georges me dit combien il est Hallucination et douleur au ventre Je l’invite également à associer sur la lance, le ventre, sur ce qu’il a senti dans son corps, et ce qu’il retrouve de ces sensations en en parlant. Je comprendrai plus tard à quel point cette partie du corps, le ventre, est si souvent mise à contribution dans ses nombreuses hallucinations. Il relie alors les douleurs hallucinatoires au ventre à d’autres douleurs analogues ressenties trois ans auparavant, période pendant laquelle il a frôlé la mort, lors d’une hospitalisation en urgence pour une péritonite et une pancréatite, suivies de complications, de caillots dans la vésicule biliaire, d’un foyer infectieux au foie et d’une septicémie. Les douleurs étaient, me dit-il, les plus fortes éprouvées dans sa vie. Après cet épisode somatique difficile, commence ce qu’il appelle sa « dépression » qui va durer trois ans pour s’arrêter un peu après la naissance de sa fille, son surmenage et le début de ses hallucinations. Georges m’explique, quelques entretiens plus tard, que sa plus grande inquiétude est de ne pas savoir quand il hallucine, même s’il y parvient, de façon critique, après-coup. Il me raconte une hallucination qui l’a beaucoup troublé. Un matin, après une nuit agitée, il se réveille avec du sang sur la poitrine et le ventre. Il me dit : « Il y avait une forte odeur de sang Alliance de travail : apprivoiser la part étrangère qui remplissait l’appartement. Il y avait aussi du sang dans la salle à manger. Je me suis demandé ce que j’avais bien pu faire pendant la nuit. J’avais très peur. Je me suis douché et j’ai nettoyé le sol. J’ai rangé la serpillière et l’eau rouge de sang dans un sceau dans le placard. Le soir, après le travail, le sceau et la serpillière étaient propres. J’ai compris que j’avais eu une hallucination. Le lendemain matin, j’avais à nouveau du sang sur mon ventre, avec en plus des scarifications. J’ai décidé de ne pas me doucher, pour lutter contre l’idée de l’hallucination. inquiet de se mettre ainsi en danger ainsi que ceux qu’il aime. Il se rend aussi compte que ses stratégies pour repérer les moments hallucinatoires sont de moins en moins efficaces. Georges me raconte sa lutte difficile contre les hallucinations. Je lui dis que je sens que dans ce mouvement de lutte avec ses hallucinations, il les alimente et leur donne force et énergie. Il est surpris et reconnaît qu’en effet, plus il lutte, plus elles sont présentes, denses, et fortes. Je lui parle de ses hallucinations comme d’une part de lui, qu’il ne connaît pas très bien et qu’il repère au-dehors, étrangère. Je lui dis que je crois qu’il est possible que cette partie de lui ait quelque chose à lui apprendre et qu’il peut, peut-être en faire une alliée. Et j’essaie de traduire, à partir du film très émouvant L’Homme qui murmurait à l’oreille des chevaux (2), comment, quelquefois, quand on lutte contre certaines parties de soi, c’est comme avec un cheval indompté, qui cabre, lutte en miroir contre nous parce qu’il est terrifié. Je lui dis que nous pourrions, peut-être, prendre du temps pour apprendre à apprivoiser cette part de lui, et à la regarder différemment, de moins en moins comme un étranger. Il semble ému par cette perspective. Alors qu’il me demande comment faire, nous mettons en place une alliance de travail et je lui propose quatre axes. – Observer le lien qu’il met en place avec ses hallucinations et tenter de travailler à partir de ce double mouvement que je repère en lui : la plainte inquiète et la fascination dépendante. Je l’invite à être le plus conscient et le plus présent possible, à lui-même et aux hallucinations aux moments où elles se produisent sans lutter contre elles (pour les exclure) ni en les attirant à lui en en étant fasciné… – Repérer, ensemble, les signes avantcoureurs des hallucinations. Quelques séances plus tard, il me parlera d’une confusion légère dans la tête qu’il repère systématiquement pendant quelques secondes, juste avant d’halluciner. Ce qui lui permettra d’être un peu moins pris de cours par ses expériences hallucinatoires et les repérer. – Apprendre à observer, comme de l’extérieur, ce qui lui arrive, ce qu’il pense, ressent, vit, voit, hallucine, un peu comme on regarderait un rêve qui serait plus fort qu’un rêve et qui continuerait par moments dans la journée. Ceci lui permettra de développer une position « méta », à côté, au dessus, d’observateur, décalé par rapport à ses hallucinations. – Chercher, ensemble, les signes qui pourraient lui permettre de distinguer hallucination et perception, en développant son attention à leur égard. Quelque temps après, il remarquera que la plupart des hallucinations sont bien plus réelles que la réalité. Cette hyperesthésie deviendra ainsi, pour lui, un indicateur qui l’aidera vraiment à différencier hallucination et perception. Recherche d’espace sans hallucination Nous chercherons également, ensemble, les situations dans lesquelles les hallucinations sont moins présentes, voire inexistantes : quand il chuchote (ou prie à voix basse), quand on lui touche ou masse le dos. Quand on lui parle calmement, de façon accompagnante, et quand son amie lui masse le dos, ou se place derrière lui en position de chaise, les hallucinations diminuent puis s’arrêtent, et il se calme : comment ne pas penser ici à l’objet d’arrière-plan décrit par Grotstein (1981), ou à la fonction soutenante du holding maternel, peut-être trop peu intégrée par Georges et en partie défaillante dans certaines circonstances. Je me rendrai compte que de nombreuses hallucinations, qui semblent n’avoir aucun lien entre elles, renvoient à des vécus corporels centrés sur les enveloppes et leurs intrusions, leur vidage et l’attaque du dedans du corps. Elles pourraient s’énoncer sous la forme : « Un corps est trans- percé », « Une partie du corps est envahie », « Un corps étranger entre dans un intérieur », « Le sang s’écoule hors de son enveloppe », « Un corps se vide », « Une enveloppe est percée, envahie, intrusée ». · Le rapprochement de la mort Nous repérons ici l’expression des traces corporelles archaïques, pré-symboliques, signifiants formels décrits par Didier Anzieu (1987) (contenants formels de Tobbie Nathan), renvoyant à ce que Freud a décrit comme les traces motrices et les images motrices. Ces signifiants formels de vidage et d’intrusion d’enveloppe, sont dans les associations de Georges, toujours directement ou indirectement liées aux expériences somatiques douloureuses alors qu’il a frôlé la mort. Il parlera avec beaucoup d’émotion des sensations corporelles archaïques en partie scénarisées concernant ses nombreuses opérations (en tout une trentaine) : on a introduit des caméras dans son abdomen lors de la péritonite, on a soulevé une côte, on a retourné le foie pour nettoyer le foyer infectieux, il a beaucoup saigné… On l’a ré-opéré, il devait mourir, il s’est senti mourir, il se vidait de son sang… Il fera, progressivement, des liens avec le fait que, quand les voix lui parlent, il sent, dans le même temps, une douleur au ventre : ce qui me fera penser que des hallucinations sont construites par réactivation des traces traumatiques liées à ce lieu du corps. C’est également au niveau de l’estomac qu’il ressent et localise ses angoisses toujours présentes quand il hallucine ; c’est encore à ce lieu du corps qu’il trouve le sang et les scarifications le matin. La pensée insupportable concernant la mort, et relayée par la douleur et les images du corps meurtri, souffrant, déchiré par la douleur, chez un sujet fragile, semble venir ici envahir le vide dépressif qui a suivi sa maladie somatique. Nous faisons l’hypothèse que cette période somatique douloureuse a réactivé des scénarios archaïques d’intrusion et de vidage renvoyant à des expériences plus précoces. « J’ai l’impression que tout se passe comme si vous surveilliez quelqu’un ou quelque chose derrière vous, et, en même temps, vous hésitez à m’en parler. » Puis Georges reprend : « Il me demande de ne plus vous parler. » La transférentialisation des hallucinations « Je suis là pour vous protéger, dans mon bureau, mais aussi de plus en plus dehors, parce que vous emmenez de ces entretiens ce dont vous avez besoin pour vous protéger progressivement vous-même. » Rapidement, dans la thérapie, ses récits sont ponctués d’hallucinations au cours des entretiens : c’est le second temps du suivi. Je suis alors très rapidement intégré dans les scénarios hallucinatoires. C’est ce que j’appelle la « transférentialisation des hallucinations » (Gimenez, 2010), mouvement par lequel une formation narcissique (l’hallucination) devient une formation relationnelle intersubjective, intégrant le clinicien. Il s’agit d’un moment essentiel dans la psychothérapie dans lequel le thérapeute, investi comme double narcissique, est intégré dans la boucle autoérotique hallucinatoire. Lors du huitième entretien, il hésite à parler, tend l’oreille, donne des coups d’œil derrière lui, et me dit : Plutôt que de le questionner sur l’origine de la voix, je préfère le relancer sur ce que cela implique dans notre relation (c’est-à-dire au niveau transférentiel) : « Vous entendez qu’on vous dit cela. Ne plus me parler. Comment faire alors ? – Il me dit que vous voulez le faire partir. Je poursuis dans la même démarche en disant : « C’est une peur, une grande inquiétude, je ne souhaite pas que vous perdiez vos hallucinations, ni cet être du dedans qui vous parle au-dehors, je souhaite seulement vous accompagner là où vous me demander à juste titre de vous accompagner : dans un lieu paisible où vous serez plus serein avec vousmême, un lieu où des parts de vous seront intégrées et ne vous obligeront plus à lutter contre elles. » Je le sens ému, et un peu soulagé. Quelques entretiens plus tard, juste avant la fin de la séance, je le sens inquiet : il m’explique que le démon est là, devant la porte. Je l’invite à me traduire ce qu’il entend. Georges répond : « Il me dit que vous arrivez à me protéger dans les entretiens, dans votre bureau, mais dès que je vais sortir, il va s’occuper de moi. Il me dit “Tu verras dehors… quand Gimenez ne sera pas là”. » Je repère, à côté de l’aspect persécutif, la dimension de la protection et donc des prémices de sa capacité à se servir, par identification, de ma fonction pare-excitative. Je lui réponds : Dépersonnalisation Après quelques séances, Georges me fait part de ses expériences de dépersonnalisation : il devient la nuit lycanthrope, un tigre-hyène et fait partie de la grande famille des Versipellis (ceux qui changent de peau). Il me dit que certaines nuits, il se trouve au milieu des bois, nu, loin de chez lui, ne sachant pas exactement ce qui s’est passé. Et le matin, il trouve des objets étrangers dans la maison, des traces, des scarifications sur son ventre et sur ses meubles, qu’il ne s’explique pas. J’ai par moments, une impression de « trop » : trop d’hallucinations, trop d’expériences, trop de figurations scénarisées proches des mondes de sciencefiction, et de ce qu’il écrivait. Et pourtant ce trop a toujours cohabité pour moi avec une sensation forte et insistante de sentiment d’une profonde souffrance, non simulée, non jouée, non mimée. Diminution et disparition des hallucinations Au cours de la prise en charge, les hallucinations diminuent progressivement jusqu’à disparaître, un an et quatre mois après le début du suivi. Demeurent, malgré tout, ses idées de transformations en tigre-hyène et son idée d’appartenir à la communauté des « Versipellis ». Commence alors une période dépressive difficile. Georges est face à un vide infini, intolérable, qu’il trouvera encore plus douloureux que les hallucinations. Nous commençons alors à travailler sur ce moment dépressif se substituant légitimement aux hallucinations douloureuses perdues. Mais cette période dépressive fera, trois mois plus tard, place à une période de douleur extrêmement vive au niveau du ventre et du bas du dos (je repère qu’il s’agit à la fois des parties du corps dans lesquelles il avait ressenti des douleurs aiguës quand il a frôlé la mort et de l’endroit concerné par les hallucinations). Deux mois après le début de ces douleurs aiguës, il suspend le suivi avec moi et se centre sur sa souffrance somatique et sur des explorations médicales poussées, qui n’ont trouvé aucun substrat organique à ses symptômes aigus persistants. Lors de ces deux périodes, dépressives et de douleurs aiguës, la « croyance » délirante aux « Versipellis » n’a pas cédé, même si les expériences de transformations ne se produisent plus. Transférentialisation du délire Après un peu moins d’un an de silence, Georges me recontacte en me disant qu’il a appris des choses qui le contrarient et le surprennent, mais comme il aime que les choses soient claires, il souhaite qu’on se rencontre : il sait maintenant que j’ai aidé d’autres « Versipellis » avant lui, (m’explique-t-il) et que c’est peut-être bien parce que je suis moi-même un « Versipellis » que j’ai pu ainsi le comprendre et l’aider. Je replace son mouvement interprétatif dans la dynamique transférentielle : le noyau résistant au travail clinique se transférentialise et je suis intégré dans cette part de lui qui restait inaccessible. Pendant l’année écoulée, il n’a pas eu qu’une hallucination, quelques semaines auparavant, lors du décès de son père : il a vu une farandole de jeunes filles autour du cercueil, accompagnant ainsi son immense peine. Ce patient n’avait alors plus d’hallucinations. Le monde fantastique créé pendant son enfance et son adolescence, peuplé de créatures maléfiques et surnaturelles, et qu’il avait externalisé, rendu autonome, et étranger, avait perdu sa texture, son réalisme, sa qualité d’image et sa présence envahissante. Ce qui s’était violemment déversé au dehors par retournement et excorporation, avait enfin retrouvé sa place au-dedans de lui. Et il s’était re-trouvé, même si le monde lui paraissait tellement fade… Il ne lui restait plus qu’un noyau resté intouché et protégé de croyance délirante et non envahissant, gardé relativement secret et intime : son identité fragile de « Versipellis » qu’il pensait retrouver transférentiellement chez son thérapeute. C’est ce que nous pourrons travailler dans la suite de la psychothérapie. Le cas clinique présenté dans cet article reprend un extrait de l’ouvrage L’Archaique, création et psychanalyse, A. Brun et B. Chouvier (dir.) Armand Colin, 2013. Avec nos sincères remerciements à l’éditeur pour cette collaboration. 1– Les tentatives pour appréhender l’hallucination à partir de la perception, condensent en effet, et mettent en tension, le point de vue du patient (« perception ») et celui du clinicien (« sans objet ») (Esquirol, 1838, Faret, 1864) ou « sans objet à percevoir » (Ey, 1973). 2– L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, film de Robert Redford (1998). Profondément marquée par un accident qui a coûté la vie à sa meilleure amie et causé d’irréparables lésions à son cheval, Grace, une jeune fille de 14 ans, vit repliée sur elle-même renonçant à lutter contre l’infirmité. Sa mère, Annie, refuse de s’avouer vaincue. Fermement décidée à sauver à la fois sa fille et l’animal, dont les destins sont liés, elle se lance à la recherche d’un dompteur de chevaux capable de guérir l’animal de sa peur, spécialiste du dressage par la douceur… BIBLIOGRAPHIE – Anzieu, D., (1987). Les signifiants formels et le MoiPeau. In Anzieu D., Houzel D., et coll. Les enveloppes psychiques. Paris : Dunod, 1-22. – Bion, W.R., (1965). Transformations. Paris : Presses Universitaires de France, 1982. – Botella, C., Botella, S., (1989). La problématique de la régression formelle de la pensée et de l’hallucinatoire. Revue Française de Psychanalyse, Colloque S.P.P. Unesco du 14 et 15 janvier 1989, 63-90. – Ey, H., (1973). Traité des hallucinations, 1. 2. Paris : Masson et Cie. – Freud, S., (1891). Contribution à la conception des aphasies. Paris : Presses Universitaires de France, 1983. – Freud, S., (1900). L’interprétation des rêves. Paris : Presses Universitaires de France, 1967. – Gimenez, G., (2010). Halluciner, percevoir l’impensé. Bruxelles : de Boeck. – Gimenez, G., (2011). De l’hallucination à la création chez une patiente schizophrène. In Chouvier, B & al. Les enjeux psychopathologiques de l’acte créateur, de Boeck, p.181-199. – Gimenez, G., Guimont, M., & Pedinielli, J.L. (2004). 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Après une étude critique de l’évolution du concept d’hallucination dans la littérature psychiatrique classique, l’auteur montre que l’hallucination peut être interprétée comme la perception d’un impensé. Il présente son propre modèle, élaboré à partir de sa pratique clinique. Ce modèle rend compte des conditions d’émergence des hallucinations, des mécanismes sous-jacents à leur construction, des traces psychiques à partir desquelles elles se constituent, des différents types d’hallucinations. Mots-clés : Archaïque – Cadre psychanalytique – Cas clinique – Depersonnalisation – Etymologie – Hallucination – Heautoscopie – Holding – Nosologie – Perception – Physiopathologie – Sémiologie – Transfert.