History

RÉSUMÉS
L’auteur de L’antifascisme en France, de la marche sur Rome aux manifestations anti-Le Pen du 1er mai 2002 s’interroge ici sur ce qui constitue une des composantes majeures de l’identité des gauches françaises. Le parti choisi a été d’étudier l’antifascisme par le bas et d’évaluer sa capacité à rassembler, d’en étudier le contenu et la généalogie. Cette étude s’est appuyée principalement sur la consultation du fonds 517-1 de l’Internationale, des fonds des Archives départementales, du fonds de la Ligue des droits de l’Homme conservés à la BDIC. Pour l’entre-deux-guerres et la relation entre le mouvement communiste et l’antifascisme, deux moments sont distingués : le premier antifascisme, de 1921 à 1926, proto-histoire de l’antifascisme ; le second antifascisme, à partir de février 1934, dans lequel le parti communiste développa une stratégie originale, qui le mit progressivement en position de force dans le mouvement antifascite. En effet, à ses débuts, en février 1934, ses mots d’ordre « fermés », sectaires, l’isolaient. Mais, très rapidement, avant même le pacte d’unité d’action de juin 1934, il rééquilibra le rapport de force en sa faveur.
Ce résultat s’explique par le rôle central du comité Amsterdam-Pleyel, lié au parti communiste, mais qui acquit une liberté d’action importante et qui, ainsi, fournit un langage, un cadre d’action dans lequel se reconnaissaient les composantes du mouvement antifasciste, initialement éloignées du parti communiste. Il s’agit, avant tout, des innombrables comités qui se multiplièrent après le 12 février 1934 et dont les mots d’ordre reflétaient l’inspiration à la fois républicaine et de défense du mouvement ouvrier (« rouges-bleus », pour reprendre la terminologie de Gilles Vergnon). Ainsi, le Parti communiste, par sa plasticité, sa capacité à mettre sur le même plan les nouvelles pratiques militantes, le républicanisme, la perspective révolutionnaire joua désormais les premiers rôles dans le mouvement antifasciste, sans cependant l’instrumentaliser entièrement.

... Irréductiblement associé aux défilés du Front populaire, le geste l'est aussi pour ses adversaires de ... la main tournée en avant, l'avant-bras tendu » accompagné du cri Rotfront ![14] [14 ... Heartfield crée aussi en 1927 le logo du Rot-Front-Kämpferbund (RFB), un poing fermé dans ...

... 8 Mai, lancement de l'Année du patrimoine) traduisant sa conception des choses[36] [36] Patrick Garcia, «Valéry Giscard d'Estaing, la modernité ... Voir Laurence de Cock, Fanny Madeline, Nicolas Offenstadt et Sophie Wahnich, Comment Nicolas Sarkozy écrit l'histoire de France ...

L es usages de l'histoire dans l'espace public, ou plutôt les usages politiques du passé ne sont pas un phénomène récent. Si l'on s'en tient au seul XX e siècle français, les « usagers politiques » du passé (gouvernements, formations politiques, intellectuels, mouvements sociaux) ont mobilisé à de multiples reprises des figures (Jeanne d'Arc, Jean Jaurès, le général de Gaulle...) ou des périodes saillantes de l'histoire nationale, à des fins de légitimation de leur propre action: songeons ainsi aux usages de la Révolution française par le Front Gilles Vergnon, maître de conférences (HDR) en histoire contemporaine à l'Institut d'études politiques de Lyon (1) Une première version de ce texte a été présentée le 7 février 2012, au cours d'une séance (« Regards sur la Deuxième Guerre mondiale ») du séminaire d'Anne Herzog et Nicolas Offenstadt « La Grande guerre aujourd'hui », à la DPMA (Direction du patrimoine, de la mémoire et des archives) du ministère de la Défense. Plusieurs éléments avaient été présentés auparavant dans des réunions du réseau Memorha, qui réunit chercheurs et professionnels des musées en région Rhône-Alpes, www.reseaumemorha.org. Nous remercions tous ceux qui ont participé à ces réflexions, et nous ont aidé à formuler ces hypothèses. Les usages de la Résistance dans le débat public au XXI e siècle : un mythe de substitution ? 1 par Gilles Vergnon Ce que les références à la Résistance et au programme du CNR dans le débat public au cours des 10 dernières années nous apprennent sur l'absence d'horizon dans notre société.

L es usages de l'histoire dans l'espace public, ou plutôt les usages politiques du passé ne sont pas un phénomène récent. Si l'on s'en tient au seul XX e siècle français, les « usagers politiques » du passé (gouvernements, formations politiques, intellectuels, mouvements sociaux) ont mobilisé à de multiples reprises des figures (Jeanne d'Arc, Jean Jaurès, le général de Gaulle...) ou des périodes saillantes de l'histoire nationale, à des fins de légitimation de leur propre action: songeons ainsi aux usages de la Révolution française par le Front Gilles Vergnon, maître de conférences (HDR) en histoire contemporaine à l'Institut d'études politiques de Lyon (1) Une première version de ce texte a été présentée le 7 février 2012, au cours d'une séance (« Regards sur la Deuxième Guerre mondiale ») du séminaire d'Anne Herzog et Nicolas Offenstadt « La Grande guerre aujourd'hui », à la DPMA (Direction du patrimoine, de la mémoire et des archives) du ministère de la Défense. Plusieurs éléments avaient été présentés auparavant dans des réunions du réseau Memorha, qui réunit chercheurs et professionnels des musées en région Rhône-Alpes, www.reseaumemorha.org. Nous remercions tous ceux qui ont participé à ces réflexions, et nous ont aidé à formuler ces hypothèses. Les usages de la Résistance dans le débat public au XXI e siècle : un mythe de substitution ? 1 par Gilles Vergnon Ce que les références à la Résistance et au programme du CNR dans le débat public au cours des 10 dernières années nous apprennent sur l'absence d'horizon dans notre société.

Le débarquement du 6 juin 1944 mobilise massivement les maquis en France, qui sortent d'une « semi-clandestinité » pour s'affirmer publiquement sur des portions du territoire où ils créent de véritables « zones libérées » pendant plusieurs semaines. leur mobilisation, en décalage avec le calendrier des alliés les expose le plus souvent à de lourdes représailles mais leur permet d'affirmer leur autorité sur des territoires

L a séquence 1983-1988 est décisive dans la mutation du Front national. Groupuscule artisanal incapable de présenter un candidat en 1981, il devient une formation visible dans l'espace public, dotée d'une première cohorte d'élus tant dans les collectivités locales qu'au Parlement européen. La plupart des observateurs font débuter cette ascension à l'élection municipale de mars 1983, catastrophique pour les gauches de gouvernement, quand Jean-Marie Le Pen obtient 11,26 % des suffrages exprimés dans le XX e secteur de Paris, tandis que la liste commune du RPR René-Jean Fontanille et du frontiste Jean-Pierre Stirbois à Dreux obtient 31 % des voix au premier tour, avant d'échouer de quelques voix au second. Le 24 avril 1988, Jean-Marie Le Pen obtient 14,38 % des voix au premier tour de l'élection présidentielle, se plaçant en quatrième François Mitterrand et les socialistes ont été accusés d'avoir cherché à instrumentaliser le Front national dans les années 80 pour se maintenir au pouvoir. Cet article montre que le retour aux archives ne confirme pas cette thèse. Mais partageaient-ils une même analyse de la montée du FN et de la manière de la contrer ?

Le 6 février 1934 dans La Galère, d'André Chamson: une parabole antifasciste. (…) A partir d'un certain degré de violence, les événements envahissent tout… Comme les choses vont vite ! Avant-hier soir… oui c'était bien avant-hier soir… je ne sais plus…je me suis endormi en pensant que les révolutions n'avaient jamais rien eu de commun avec la vie réelle des hommes. C'était ma pensée de toujours… c'était une pensée absurde. Dans une ville comme celle-là, les événements viennent vous chercher à domicile. Ma femme est folle d'angoisse quand j'ai cinq minutes de retard. Mes collègues ne me serrent plus la main parce qu'ils me soupçonnent de ne pas penser exactement comme eux. Mon voisin vient crier au secours chez moi, au milieu de la nuit. Ma fille pleure en revenant de l'école. Je ne vois que des choses ignobles, des gens ignobles. La guerre est ouverte dans la rue, à la maison, au bureau, à l'école… ce sont des trucs comme les grandes pestes du moyen âge… Nul n'est à l'abri de la contagion… 1. On ne lit plus beaucoup André Chamson aujourd'hui 2. D'une oeuvre abondante, organisée en « suites» thématiques 3 , ne subsistent guère que ses romans « régionalistes», enracinés dans ses Cévennes natales, exaltant camisards, galériens révoltés ou « gardians» camarguais.

L'affaire est entendue. On sait que, selon la célèbre formule de Léon Blum, maintes fois citée, le socialisme en 1945 est « maître de l'heure », encore que cette formule frappante, saisissante dans sa concision et qui donne le titre d'une brochure aussitôt imprimée, conclut en fait un long discours de congrès sur la révision des statuts de la SFIO et la bataille électorale en France, qui n'aborde pas du tout le contexte européen : « C'est le socialisme qui est maître de l'heure ; c'est le socialisme qui sera un jour maître de la terre ; vous le sentez bien par la forme même des résistances qu'il rencontre… le socialisme est maître de l'heure. Je n'ai pour ma part qu'un voeu à former et vous n'avez qu'un devoir à remplir, c'est que le parti socialiste soit digne du socialisme » 1 . Mais il faut ajouter que Blum s'est exprimé à plusieurs reprises en des termes analogues. Ainsi, le 20 mai 1945, devant les secrétaires de fédérations de la SFIO, il affirme que « le socialisme est au point de conjonction, au point de coïncidence, de tous les grands courants qui traversent aujourd'hui non seulement la France, mais l'Europe et l'univers tout entier » 2 . Et s'interroge : « Qui est-ce qui ne se dit pas socialiste ? Qui est-ce qui ne se réclame pas du socialisme ? Le mot socialisme est entré dans le vocabulaire de tous les partis. Il y a des moments où l'on pouvait imaginer que tout le monde, en France, était devenu socialiste, sauf nous, peut-être. » Il réitère en octobre 1945, jugeant cette fois -citant le philosophe catholique Jean Lacroixque « l'idée socialiste porte désormais la grande espérance du monde », qu'elle est devenue une « table d'orientation, une étoile polaire » 3 . De tels jugements, reproduits en brochures diffusées à des milliers d'exemplaires, se retrouvent chez d'autres acteurs de l'époque. Ernest Labrousse, militant socialiste et déjà historien confirmé, écrit ainsi en 1946, dans un article de la Revue socialiste sur « La montée du socialisme 1 Léon Blum, Le Socialisme maître de l'heure, Discours prononcé au 37e congrès national du Parti socialiste SFIO,11-15 Août 1945, Éditions de la liberté, 1945, 16 p. Le texte est reproduit dans L'OEuvre de Léon Blum. VIII. 1945-1947, Albin Michel, 1958. Dans cette édition, où il est le plus fréquemment cité, il est sorti de son contexte propagandiste, qui mettait en exergue la formule finale, et renforçait évidemment l'impact sur les militants et les observateurs. 2 Léon Blum, Les devoirs et les tâches du socialisme, discours prononcé par Léon Blum à la conférence des secrétaires des fédérations socialistes, Paris le le 20 mai 1945, Editions de la liberté, 1945, 16 p. Voir également L'Oeuvre, op.cit, p. 8-9. 3 Le Populaire, 19 octobre 1945, ibidem, p. 112-113.

In Laurent Jalabert et Stéphane Le Bras (dir.), La Résistance dans le Sud-Ouest au regard d'autres espaces européens, Pau, Cairn, 2016, p. 171-182. L'historien ou le simple curieux ne peuvent que constater l'évident décalage entre l'importance historique de certains maquis en 1943-1944, et leur devenir mémoriel contrasté depuis la guerre. Ainsi, la concentration des maquis d'Auvergne au mont Mouchet, au printemps 1944, n'a pas laissé de vraies traces mémorielles à l'échelle nationale: tel n'est pas le cas du maquis du Vercors qui eu, après la guerre, un destin mémoriel à la hauteur, voire au-delà de son importance historique.

Dans un contexte de désynchronisation entre les échecs électoraux répétés des PS d'Europe du Nord, et, à l'inverse d'une poussée électorale continue en Europe du Sud, le PS de François Mitterrand va tenter de nouer des rapports différenciés et hiérarchisés avec ses "partis frères" à l'échelle européenne.
Cette contribution est parue dans le volume coordonné par N. Castagnez et G. Morin, "Le Parti socialiste d 'Epinay au Panthéon", Presses universitaires de Rennes, 2015.

Le 24 avril 1937 à Lyon, vers 18h30, Paul Gignoux, âgé de neuf ans (il est né le 11 juin 1928) est mortellement blessé rue Hénon, dans le quartier de la Croix-Rousse, par les jets de pierre d'une douzaine d'autres enfants aux cris de "cagot", "fasciste" "la fille". L'affaire, qui occupe toute la presse locale et nationale, permet de revenir à nouveaux frais sur la question de la violence politique en France dans les années du front populaire.

2014, année sans pareille? Retour sur une double commémoration 1. L'année 2014 a été marquée en France par une double commémoration: le centenaire du début de la Première guerre mondiale et le 70 e anniversaire des débarquements alliés suivis de la libération de l'essentiel du territoire national.  Mais ces deux anniversaires n'ont eu ni le même poids ni le même sens. Le premier qui ouvrait «le plus grand cycle commémoratif depuis organisé en France depuis le bicentenaire de la Révolution  » commémorait un événement mondial, qui intéressa jusqu'en Chine ou aux antipodes. Le second célèbre un événement français scandé par la libération progressive du territoire, ce qui n'est, à l'exception de la Belgique, pas le cas d'autres pays européens: l'Italie reste coupée en deux par la «Ligne gothique» et la « fête de la Libération » le 25 avril, correspond à la libération des grandes villes du nord du pays (Gênes, Milan, Turin…) en 1945; quant à la Pologne, on y dit souvent que la « vraie» libération commence en 1989…

In Europe, mai-août 2019, Dix-septième ouvrage de Jean Prévost, son premier essai à caractère historique, voire sa première «oeuvre de longue haleine", L'Histoire de France depuis la guerre est publiée en juin 1932 aux Editions Rieder, dans la collection «Europe» . Jamais réédité, à la différence de son essai sur les Plaisirs des Sports ou de ses chroniques dans Pamphlet, il n'a guère été commenté par les biographes et essayistes qui sont depuis quelques décennies revenus sur son oeuvre.

In Bruno Benoit (dir.) Edouard Herriot en quatre portraits, Presses universitaires du Septentrion, 2020, p. 181-192. Le 30 mars 1957, a! Lyon, lors des fune% railles nationales d'Edouard Herriot, en pre% sence du pre% sident de la Re% publique Rene% Coty, le pre% sident du Conseil et secre% taire ge% ne% ral de la SFIO, Guy Mollet prononce son e% loge fune! bre. Il salue les « robustes e% lans» qui l'ont «si souvent associe% dans l'action publique aux disciples de Jaure! s», et e% nume! re les diffe% rents e% pisodes ou! ils ont converge% , au premier chef le cartel des gauches de 1924, «contrat de justice sociale que le gouvernement d'Edouard Herriot allait, avec le ferme soutien du parti socialiste, proposer au pays». Il salue aussi, en pleine Guerre froide, l'action diplomatique d'Herriot, dont son insistance a! acquitter les dettes de guerres aux Etats-Unis, cause de sa chute en 1932 1 . Dans sa pe% roraison, s'adressant a! sa veuve, Blanche Rebatel, Guy Mollet s'exclame: « Madame, notre dialogue avec Edouard Herriot n'aura point de terme». Pourtant l'historien, toujours mauvais esprit, ne peut que le constater: ce dialogue ne semble pas inclure le Front populaire, jamais mentionne% par l'orateur… Dans la me> me ligne% e, Augustin Laurent, maire de Lille et figure de la SFIO salue un leader «un demi-sie! cle au service de la nation», rappelant qu'Herriot pre% sida la Chambre «de mai 1936 a! juin 1940 », mais, ajoute -t-il, « son opposition au fascisme qui s 'e% tait de% ja! manifeste% e au moment de Munich, l'ame! ne a! se retirer avec sa femme dans sa proprie% te% de Brotel a! Lyon» 2 . C'est peu, et c 'est tout… Quant au Bulletin des Amis de Léon Blum, qui rappelle opportune% ment qu'Edouard Herriot, membre du comite% d'honneur de

La mémoire collective, nous dit Henry Rousso, c’est « le présent du passé» ou « le souvenir vivace d’acteurs ou d’événements remarquables d’un passé proche ou lointain » . Or, s’il est bien un « événement remarquable» du XXe siècle, à l’échelle nationale et même mondiale, c’est bien l’écrasante défaite militaire française de mai-juin 1940, qui abat en six semaines une armée réputée et un régime apparemment solide, et ouvre la route au IIIe Reich pour la suite de son projet impérial. Si la séquence a fait l’objet de nombreux travaux historiques de qualité depuis des décennies , les modalités de configuration de sa mémoire, de son « souvenir vivace», sont plus délicates à établir.

M la maudite ou Lacombe Lucienne ?  L'article publié dans un volume collectif (N.Castagnez, F. Cépède, F.Conord, P. Goetschel, G.Vergnon dir.) s'attache au parcours d'une figure significative de la collaboration au féminin, dont on a souvent fait une lecture outrageusement "sexuée"