RG2992019

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KF/BZDS/AH

REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE


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COUR D’APPEL DE COMMERCE
D’ABIDJAN AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU JEUDI
--------------- 13 JUIN 2019
RG N° 299/2019
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ARRÊT CONTRADICTOIRE
Du 13 /06/2019 La Cour d’Appel de Commerce d’Abidjan, en son audience
--------- publique ordinaire du jeudi treize juin de l’an deux mil dix-
1ÈRE CHAMBRE neuf tenue au siège de ladite Cour, à laquelle siégeaient :
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Affaire
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Docteur KOMOIN François, Premier Président de la Cour
d’Appel de Commerce d’Abidjan ;
La Société d’Investissement en
Restauration dites SIRES Madame ASSI Eunice épouse AYIE et Messieurs
(SCPA SAKHO-YAPOBI-FOFANA& Associés)
JEANSON Jean-Claude, SILUE Daoda, et AJAMI
Contre Nabil, Conseillers à la Cour, Membres ;

Monsieur KIN PIERRE Stanislas Avec l’assistance de Maître MOSSOH N’koh Martin,
Greffier ;
--------------
ARRÊT
------------ A rendu l’arrêt dont la teneur suit dans la cause ;
Contradictoire
--------- ENTRE :

Déclare recevables les appels principal et


La Société d’ Investissement en Restauration dites
incident interjetés par la Société
d’Investissement en Restauration dite SIRES société à responsabilité limitée, au capital de
SIRES et Monsieur KIN PIERRE 2.500.000 F CFA, dont le siège social est sis à Abidjan Plateau
STANISLAS contre le jugement RG 13 Avenue Joseph Anom, 04 BP 659 Abidjan 04 agissant aux
N°292/2014 du 10 avril 2014 rendu par le poursuites et diligences de son représentant légal, Madame
Tribunal de Commerce d'Abidjan ;
Solange USHER, demeurant es qualité audit siège social;
Dit l’appel incident de Monsieur KIN
Pierre Stanislas mal fondé ; Appelante représentée et concluant par son conseils, la
L’en déboute ;
SCPA SAKHO-YAPOBI-FOFANA& Associés, avocat au
barreau de Côte d’Ivoire, y demeurant, 118, rue PITOT Cocody
Dit l’appel principal de la Société Danga, 08 BP 1933 Abidjan 08, Téléphone : (225)
d'Investissement en Restauration dite
22.48.37.57/22.44.91.84, télécopie : 22 44 91 83, e-mail :
SIRES bien fondée ;
[email protected]
Infirme la décision entreprise en toutes
ses dispositions ; D’UNE PART ;
Statuant de nouveau
ET ;
Rejette le moyen tiré de la prescription de
l’action ;
Monsieur KIN PIERRE Stanislas, né le 02 avril 1939 en
Déclare la demande en paiement de France, de nationalité ivoirienne, restaurateur, domicilié à
dommages et intérêts pour révocation Abidjan Port bouet, Téléphone portable : 07.95.20.94, en son

1
illégale de Monsieur KIN Pierre Stanislas domicile, où étant et parlant
mal fondée ;

L’en déboute ; Intimé représenté et concluant par leur conseil, SCPA BEDI
& GNIMAVO, avocats à la Cour d’Appel d’Abidjan y
Condamne Monsieur KIN Pierre Stanislas demeurant, Cocody deux plateau 7ème Tranche ,non loin de la
aux dépens de l’instance ;
pharmacie 7ème Tranche , après la Boulangerie Paris Baguette,
immeuble à carreaux marrons, 1er étage, 01 BP 4252 Abidjan
01, Tel. : (225) 22.52.47.64, Fax. : 22.42.23.72 ;

D’AUTRE PART ;

Sans que les présentes qualités puissent nuire ni préjudicier


en quoi que ce soit aux droits et intérêts respectifs des parties
en cause, mais au contraire et sous les plus expresses réserves
des faits et de droit ;

En son audience publique ordinaire, le tribunal de commerce


d’Abidjan statuant contradictoirement en la cause a rendu le
10 avril 2019 un jugement N° RG 292/2014 qui a :

- rejeté l’exception d’incompétence et de prescription


soulevée par la société SIRES ;

- déclaré recevable et partiellement fondé Monsieur


PIERRE KIN Stanislas en son action ;

- constaté la non-conciliation des parties ;

- condamné la société SIRES à lui payer la somme de


cinquante millions (50.000.000) à titre de
dommages-intérêts ;

Par exploit du 23 avril 2019 de Maître M’BAI KOUASSI Deni,


huissier de justice à Touba, la société d’Investissement en
restauration dite SIRES a interjeté appel du jugement
susénoncé et a par le même exploit assigné à l’audience du 02
mai 2019 pour s’entendre :

- déclarer recevable et bien fondé l’appel interjeté la


société SIRES pour être intervenu dans les forme et
délai ;

- en conséquence, infirmer le jugement querellé en


toutes ses dispositions ;

2
Enrôlé donc sous le N° RG 299/2019 du rôle général du greffe
de la Cour, l’affaire a été appelée à l’audience du 02 mai 2019
puis renvoyée au 09 mai 2019 pour l’intimé et au 16 mai 2019
pour l’appelante ;

A l’audience du 16 mai 2019, la cause a été délibéré pour


décision être rendue le 13 juin 2019 ;

Advenue cette audience, la Cour a vidé son délibéré en


rendant l’arrêt suivant :

LA COUR

Vu les pièces du dossier ;

Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS


DES PARTIES

Par exploit en date du 23 avril 2019, la Société


d'Investissement en Restauration dite SIRES a interjeté appel
contre le jugement RG N°292/2014 du 10 avril 2014 rendu
par le Tribunal de Commerce d'Abidjan, signifié le 22 mars
2019, dont le dispositif est le suivant :

« Statuant publiquement, contradictoirement et en premier


ressort ;

Rejette l'exception d'incompétence et de prescription


soulevées par la société SIRES ;

Reçoit Monsieur Pierre KIN Stanislas en son action ;

Constate la non-conciliation des parties ;

L'y dit partiellement fondé ;

Condamne la société SIRES à lui payer la somme de


cinquante millions (50.000.000) de francs CFA à titre de
dommages et intérêts ;

Le déboute du surplus de sa demande ;

3
Condamne la société SIRES aux dépens» ;

Elle expose au soutien de son appel que Monsieur KIN Pierre


Stanislas avait reçu mandat, courant 2001, poux gérer les
restaurants lui appartenant en raison du départ sur les Etats
Unis d’Amérique de sa gérante associée et représentante
légale ;

Toutefois, indique-t-elle, la période de gestion de celui-ci sera


caractérisée par des actes de mauvaise gestion, en
l'occurrence une comptabilité parallèle qui a favorisé l'abus de
biens sociaux par ce dernier, le non-paiement des charges
sociales et fiscales ainsi que des factures des fournisseurs qu’il
a accumulées ;

Que toutes les tentatives de la gérante associée pour avoir le


point de la gestion de monsieur KIN sont restées vaines ;
celui-ci ayant conscience de la gravité de ses actes ne se
présentant plus dans les locaux de la société, mais choisi
plutôt de saisir le Tribunal du Commerce d'Abidjan, environ
dix années plus tard, d'une action en paiement de dommages
intérêts ;

Elle sollicite l’infirmation de la décision entreprise pour


défaut de base légale, pour contrariété des motifs, en ce qu’il a
fait droit à la demande du sieur KIN Pierre au motif qu’il avait
été illégalement révoqué de ses fonctions de gérant, mais a
soutenu, de façon assez curieuse, que ce dernier n’avait pas
été révoqué au sens du droit des sociétés commerciales ;

Qu’en outre, pour rejeter l’exception d'irrecevabilité qu'elle


avait soulevée pour cause de prescription de l'action, les
premiers juges avaient décidé que le délai de prescription de
cinq ans en la matière n'avait pas couru, étant donné que la
révocation de monsieur KIN PIERRE n’avait pas été
effective ; les deux motifs sus évoqués étant contradictoires et
équivalant à un défaut de motifs ;

Elle sollicite en outre l’infirmation du jugement pour


prescription de l’action, motif pris de ce que pour rejeter
l’irrecevabilité tirée de la prescription, le premier juge qui
admet l’application de la prescription quinquennale en
l’espèce, prétend toutefois dans le jugement entrepris qu'il n’y
aurait pas eu de révocation en la cause ;

Or, si tant est que ce juge, dans les énonciations suivantes du


jugement entrepris, prend comme pièce déterminante le
procès-verbal de constat d'interdiction d'accès aux lieux de
travail daté du 04 septembre 2003 à 14 heures, alors cette
4
pièce devrait servir pour déterminer le moment de la
cessation de fonction ; de sorte que c'est à tort qu’il a rejeté
l'exception d'irrecevabilité de l'action pour cause de
prescription ;

Sur évocation, elle excipe au principal de la prescription de


l’action, motif pris de ce que les sommes réclamées par
Monsieur KIN Pierre sont consécutives à la gestion de la
SIRES au cours de la période allant de 2001 à 2003 ; de sorte
que cette action tombe sous le coup de l'article 18 de l'acte
uniforme relatif au droit commercial général qui fixe la
prescription en matière commerciale à cinq ans ;

Subsidiairement, elle fait valoir que Monsieur KIN Pierre


Stanislas réclame le paiement de diverses sommes d'argent,
notamment à titre de dommages et intérêts, alors que sa
révocation était justifiée par sa gestion calamiteuse qui a
contribué à l’augmentation de ses dettes ;

Pour s'en convaincre, déclare-t-elle, il suffit de se référer au


procès-verbal de constat et d'audition dressé le 4 septembre
2003, ainsi qu'aux nombreux redressements fiscaux dont elle
a fait l'objet, consécutivement à sa période de gestion ;

En réplique, Monsieur KIN PIERRE STANISLAS expose que


suivant jugement contradictoire N° 292-2014 du 10 avril 2014
le Tribunal de commerce a condamné la SIRES à lui payer à la
somme de cinquante millions de francs CFA (50.000.000
F.CFA) à titre de dommages et intérêts ;

Que ce jugement a fait l'objet de signification le 11 août 2014


et d’un certificat de non appel ni opposition délivré par le
Greffe du Tribunal de commerce ;

Il soutient que l'appelante ayant interjeté appel le 11


décembre 2014, la Cour d'Appel d’Abidjan, suivant arrêt
contradictoire N° 09 en date du 15 Janvier 2015, déclarait
irrecevable son appel pour cause de forclusion ;

Qu’il s’ensuit que la Cour d'Appel du Commerce étant une


juridiction de même degré que la Cour d'Appel d'Abidjan ne
saurait connaitre de cette procédure, qui par ailleurs est
revêtue de l'autorité de la chose jugée ; de sorte qu’elle doit
décliner sa compétence ;

Il souligne que suite aux différentes décisions, il s'est engagé


dans la voie de l'exécution, lorsque l'appelante a saisi le juge
de l'exécution du Tribunal de commerce par voie de référé aux

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fins d'annulation des actes d'exécution entrepris ;

Il fait observer que par la saisine d'une juridiction de même


degré, l'appelante tente d'abuser la cour de céans et
l’empêcher de mener sa procédure à son terme ;

Il soutient que les agissements de l'appelante lui font perdre


beaucoup de temps, de sorte qu’il sollicite sa condamnation à
lui payer la somme de dix millions de francs CFA (10.000.000
F.CFA) pour les dommages qu'il subit ;

Qu'au surplus, l'appelante démontre qu’elle fait du dilatoire


en changeant au gré des appels interjetés de représentant
légal ;

Dans ses écritures ultérieures, l’appelante fait valoir que le


jugement n° RG 292/2014 rendu le 10 avril 2014 par le
Tribunal de Commerce d'Abidjan a été signifié par acte
d'huissier daté du 11 août 2014 ;

Que toutefois, la Cour d'Appel d'Abidjan qu’elle avait saisie a


déclaré son recours irrecevable comme tardif, en tenant
compte de l'exploit de signification du 11 août 2014 ;

Elle fait valoir que par arrêt n°088/2018, la Cour d'Appel de


Commerce déclarait nul de de nul effet l’exploit de
signification du 11 août 2014 ; de ce fait, selon elle, tous les
actes subséquents à cette signification sont nuls et de nul effet
et le jugement susdit est censé n'avoir jamais été signifié ;

Elle soutient que Monsieur KIN PIERRE STANILAS a


également pris acte de la décision de la Cour d'Appel
Commerce puisqu’il lui a signifié ledit jugement par exploit
daté du 22 mars 2019 ;

Que dès lors, c'est tout naturellement qu’elle a interjeté appel


de ce jugement par exploit daté du 23 avril 2019 ;

Elle allègue que l’intimé se méprend lorsqu’il déclare que la


Cour d’appel d’Abidjan ayant déjà statué en la cause, celle de
céans ne pourrait statuer à nouveau dans la même cause entre
les parties ;

Qu’en effet, la Cour d'Appel d'Abidjan n'a pas statué au fond,


mais simplement sur une question de recevabilité de l'appel,
basée sur l'exploit de signification du 11 août 2014 ; or, il est
constant que cet exploit a été déclaré nul et de nul effet ; de
sorte que ce fait nouveau permet à la Cour céans de statuer
valablement sur l'appel interjeté ;

6
Elle relève concernant la condamnation au paiement de
dommages et intérêts pour procédure abusive que l’intimé qui
prétend avoir subi du fait de sa comparution devant les
tribunaux, a lui-même initié l’action devant le Tribunal contre
laquelle elle ne fait que se défendre ;

Dans ses écritures ultérieures l’intimé fait observer que l'arrêt


N° 88/2018 du 08/11/ 2018 de la Cour d'Appel de Commerce
est la conséquence de l'appel de l'ordonnance N° 1314/2018
du 17 mai 2018 rendue par le juge de l'exécution du Tribunal
de Commerce d'Abidjan ; de sorte que la cour s'est comportée
comme une cour de l'exécution en rendant cet arrêt ;

Il soutient que la Cour d'Appel d'Abidjan a déclaré irrecevable


l'action de la société SIRES pour forclusion à juste raison, la
signification du jugement contradictoire RG N° 292/2014
rendu le 14/04/2014 par le Tribunal de Commerce d'Abidjan
ayant été faite le 11 août 2014, la SIRES avait un mois à
compter de cette date pour relever appel, soit le 10 septembre
2014 au plus tard ;

Que dès lors, l’appel du jugement effectué le 11 décembre


2014, soit quatre mois après la signification du jugement, est
intervenu hors délai ;

Que l'irrecevabilité d'une action met fin à la procédure ;

Elle indique que la SIRES ne peut invoquer l'existence d'un


fait nouveau pour une seconde fois faire appel du jugement
contradictoire RG N° 292/2014 rendu le 14/04/2014 par le
Tribunal de commerce d'Abidjan devant une juridiction de
même degré ; ledit jugement étant revêtu de l'autorité de la
chose jugée ;

Que l'article 59 al 1 du titre VI du code de procédure civile,


commerciale et administrative dit clairement que jusqu'à la
mise en place des cours d'appel de commerce, les cours
d'appel de droit commun connaissent des appels des
jugements des tribunaux de commerce ; de sorte que la cour
d'appel de céans devra se déclarer incompétente à connaître
une affaire qui a fait l'objet de décision de la cour d'appel
d'Abidjan ;

Elle soutient que la société SIRES abuse de son droit de se


défendre et que pour ne pas se faire complice de ces
agissements, la cour devra la condamner au paiement de la
somme de dix millions de francs CFA (10.000.000 F.CFA)
pour procédure abusive ;

7
SUR CE

En la forme

Sur le caractère de la décision

Considérant que l’intimé a conclu ; qu’il y a lieu de statuer


contradictoirement à son égard ;

Sur la recevabilité de l’appel principal

Considérant que l’intimé excipe de l’incompétence de la cour


de céans motif pris de ce que la Cour d'Appel d’Abidjan,
suivant arrêt contradictoire N° 09 en date du 15 janvier 2015,
a rendu une décision d’irrecevabilité pour cause de
forclusion concernant le jugement entrepris ;

Que pour sa part, l’appelante fait valoir que l'exploit de


signification du 11 août 2014 sur lequel s’était fondé la Cour
d'Appel d’Abidjan ayant été déclaré nul et de nul effet, ce fait
nouveau permet à la cour de céans de statuer valablement sur
l'appel interjeté ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1351 du code civil


« l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a
fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la
même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que
la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles
et contre elles en la même qualité » ;

Qu’il résulte de l’analyse de ce texte que l’autorité de la chose


jugée est le caractère attaché à toute décision de justice
tranchant une contestation ; de sorte que lorsque la même
question litigieuse oppose les mêmes parties en la même
qualité et procède de la même cause que la précédente, elle est
irrecevable ;

Que toutefois, il est fait échec à cette autorité de la chose jugée


lorsque la demande est fondée sur une cause différente de
celle qui a donné lieu au jugement ou lorsque des événements
postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement
reconnue en justice ; de sorte que la demande nouvelle est
alors présentée comme ayant une cause différente pour
justifier la mise à l’écart de la chose précédemment jugée ;

8
Considérant qu’en l’espèce, la Cour d'Appel d’Abidjan, suivant
arrêt contradictoire N° 09 en date du 15 janvier 2015, a
déclaré l’appel interjeté par la SIRES contre le jugement
entrepris irrecevable ;

Que ladite cour a statué ainsi, motif pris de ce que l’appel


ayant été interjeté le 11 décembre 2014, soit plus d’un mois à
compter de la signification effectuée le 11 aout 2014,
l’appelante était forclose ;

Que l’arrêt n°088/2018 rendu le 08/11/2018 par la Cour


d'Appel de Commerce de céans ayant déclaré nul l’exploit de
signification du 11 août 2014, la SIRES a de nouveau interjeté
appel contre ledit jugement ;

Considérant qu’il ressort de l’analyse de ces deux appels qu’ils


opposent les mêmes parties agissant en la même qualité,
qu’ils ont tous deux pour objet l’infirmation du jugement
entrepris en ce qu’il a condamné la SIRES au paiement de
dommages et intérêts ;

Qu’il est toutefois constant que le fondement juridique du


premier appel ayant été rétroactivement anéanti, cette
circonstance nouvelle, postérieure, qui modifie la situation
antérieurement reconnue en justice constitue un fait juridique
nouveau privant cette dernière décision de l'autorité de la
chose jugée à l'égard de la présente instance d'appel ;

Que l'argument de l’intimé selon lequel la décision ayant


annulé l’exploit de signification est une ordonnance du juge
de l'exécution du Tribunal de Commerce d'Abidjan de sorte
que la cour s'est comportée comme une cour de l'exécution en
rendant cet arrêt est indifférent, car le juge de l’exécution est
un juge du fond dont la décision a autorité de la chose jugée
au principal ;

Qu’il convient dès lors de rejeter ce moyen comme étant


inopérant et recevoir l’appel interjeté par la SIRES pour être
intervenu dans les formes et délais prévus par la loi ;

Sur la recevabilité de l’appel incident

Considérant que l’appel incident a été introduit


conformément aux formes et délais de la loi ; qu’il y a lieu de
le recevoir ;

Au fond

9
Sur le moyen tiré de la contrariété des motifs

Considérant que l’appelante sollicite l’infirmation de la


décision entreprise pour défaut de base légale et contrariété
de motifs d’une part, en ce qu’il a fait droit à la demande de
Monsieur KIN Pierre au motif qu’il avait été illégalement
révoqué de ses fonctions de gérant, tout en soutenant d’autre
part, que ce dernier n’avait pas été révoqué au sens du droit
des sociétés commerciales ; et que par ailleurs le délai de
prescription de cinq ans prévu en matière commerciale n'avait
pas couru, car sa révocation n’avait pas été effective ;

Considérant qu’aux termes de l’article 142 -4 du code de


procédure civile, commerciale et administrative « tout
jugement doit contenir :

•les motifs, en fait et en droit, précédés d'un résumé des


prétentions des parties » ;

Qu’il résulte de l’analyse de cette disposition que le juge doit


expliquer clairement les raisons de fait et de droit qui le
conduisent à se déterminer relativement aux moyens
invoqués par les parties ;

Qu’ainsi, dès lors que dans une même décision, il énonce des
motifs contradictoires, cela équivaut à un défaut de motifs ;
partant, sa décision encourt annulation ;

Considérant qu’en l’espèce il résulte de la décision entreprise


que le tribunal a estimé d’une part, sur la légitimité de la
révocation de monsieur KIN PIERRE pour faute de gestion
qu’ « une telle argumentation ne peut cependant prévaloir
que s’il s’agit bien d'une révocation au sens du droit des
sociétés commerciales » car « les pièces du dossier établissent
plutôt que celui-ci a été empêché physiquement d’exercer ses
fonctions, l’accès à la société lui ayant été interdit. Il s’agit
d’une voie de fait qui appelle réparation » et d’autre part, sur
la demande en réparation de celui-ci que « le demandeur
sollicite ensuite le paiement de la somme de cent vingt-
quatre millions sept cent dix mille trois cent soixante
(124.710.360) francs CFA à titre de dommages-intérêts pour
révocation illégale. Cette demande, dont le principe a été ci-
dessus admis, est cependant excessive dans son quantum ; le
tribunal trouve dans les pièces du dossier des éléments
suffisants pour fixer la réparation due au demandeur à la
somme de cinquante millions (50.000.000) de francs CFA au
paiement de laquelle il condamne la défenderesse » ;

Qu’il s’infère de ces motifs que le tribunal s’est manifestement


10
contredit en décidant d’une part, qu’il n’y avait pas eu en
l’espèce de révocation, mais plutôt une voie de fait, et d’autre
part, en condamnant la SIRES au paiement de dommages et
intérêts au titre d’une révocation illégale ;

Qu’il convient dès lors d’annuler la décision entreprise et


statuer à nouveau sur les points du litige opposant les parties ;

Sur le moyen tiré de la prescription

Considérant que l’appelante excipe de la prescription de


l’action, motif pris de ce que les sommes réclamées par
Monsieur KIN Pierre sont relatives à la gestion qu’il a
effectuée de la société au cours de la période allant de 2001 à
2003 ; de sorte que cette action tombe sous le coup de
l'article 18 de l'acte uniforme relatif au droit commercial
général qui fixe la prescription en matière commerciale à
cinq ans ;

Considérant qu’aux termes de l’ancien article 18 de l’acte


uniforme relatif au droit commercial général « les obligations
nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants, ou
entre commerçants et non commerçants, se prescrivent par
cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus
courtes » ;

Considérant par ailleurs qu’il ressort de l’article 326 de l’acte


uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et
groupement d’intérêt économique que « le ou les gérants
statutaires ou non sont révocables par décision des associés
représentant plus de la moitié des parts sociales. Toute
délibération prise en violation du présent alinéa est nulle.

Si la révocation est décidée sans juste motif, elle peut donner


lieu à dommages et intérêts.

En outre, le gérant est révocable par la juridiction


compétente, dans le ressort de laquelle est situé le siège
social, pour juste motif, à la demande de tout associé » ;

Qu’il résulte de l’analyse de cette disposition que la révocation


d’un gérant d’une société à responsabilité limitée obéit à des
conditions fixées par la loi ; qu’elle doit, notamment
intervenir pour juste motif par les associés représentant plus
de 50% du capital ou par la juridiction compétente ;

11
Considérant qu’en l’espèce, il ne ressort pas des pièces
produites que les associés de la société SIRES ont tenu une
assemblée générale au cours de laquelle ils ont décidé de la
révocation de l’intimé, ni que celle-ci ait été décidée par le
tribunal à la demande de tout associé ;

Que dès lors, c’est à juste titre que le tribunal a déclaré que le
procès-verbal d’interdiction d’accès aux lieux de travail établi
à l’initiative de l’intimé le 04 septembre 2003, ne pouvait être
pris au sens du droit des sociétés commerciales comme un
acte de révocation, mais plutôt comme constatant une voie de
fait, celui-ci ayant été empêché physiquement d’exercer ses
fonctions, l’accès à la société lui ayant été interdit ; de sorte
qu’il ne pouvait servir de point de départ à la prescription
quinquennale en matière commerciale, qui ne trouve pas lieu
à application en l’espèce;

Qu’il convient dès lors de rejeter ce moyen comme étant


inopérant ;

Sur la demande en paiement de dommages et


intérêts pour révocation illégale

Considérant que l’appelante sollicite l’infirmation de la


décision l’ayant condamnée au paiement de la somme de
50.000.000 FCFA ;

Considérant qu’il ressort de l’espèce que l’intimé a sollicité en


première instance la condamnation de l’appelante au
paiement de la somme de cent vingt-quatre millions sept cent
dix mille trois cent soixante (124.710.360) francs CFA à titre
de dommages-intérêts pour révocation illégale ;

Considérant toutefois qu’il a été sus jugé que l’intimé n’avait


pas fait l’objet de révocation, mais qu’il avait plutôt été
victime d’une voie de fait ;

Qu’ainsi, sa demande en paiement de dommages et intérêts


fondée sur une révocation illégale ne peut donner lieu à
réparation en l’espèce ;

Qu’il convient de rejeter cette demande ;

Sur la demande en paiement de dommages et


intérêts pour procédure abusive

Considérant que l’intimé sollicite la condamnation de


l’appelante au paiement de la somme de dix millions de francs
CFA (10.000.000 F.CFA) pour les dommages qu'il subit du
fait des procédures récurrentes intentées contre lui par celle-
12
ci ;

Que l’’appelante s’y oppose en arguant qu’elle ne fait que se


défendre à l’action initiée par celui-ci ;

Considérant que le droit d’agir en justice afin de défendre ses


intérêts est un droit primordial, qui toutefois trouve sa limite
lorsque le plaideur dans son exercice commet une faute ou un
abus ;

Considérant qu’en l’espèce, l’appelante a attrait l’intimé


devant la cour de céans pour défendre à l’action que celui-ci a
initiée à son encontre ;

Que l’appelant incident qui prétend que ledit appel est abusif,
ne fait pas la preuve de l’intention de l’appelante de lui nuire,
ni la preuve du préjudice qu’il allègue ; alors surtout que
l’appel de la SIRES a été favorablement accueilli ;

Qu’il convient dès lors de rejeter cette demande comme mal


fondée ;

Sur les dépens

Considérant que l’intimé succombe ; qu’il y a lieu de le


condamner aux dépens de l’instance ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier


ressort ;

Déclare recevables les appels principal et incident interjetés


par la Société d’Investissement en Restauration dite SIRES et
Monsieur KIN PIERRE STANISLAS contre le jugement RG
N°292/2014 du 10 avril 2014 rendu par le Tribunal de
Commerce d'Abidjan ;

Dit l’appel incident de Monsieur KIN Pierre Stanislas mal


fondé ;

L’en déboute ;

Dit l’appel principal de la Société d'Investissement en


Restauration dite SIRES bien fondée ;

13
Infirme la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau

Rejette le moyen tiré de la prescription de l’action ;

Déclare la demande en paiement de dommages et intérêts


pour révocation illégale de Monsieur KIN Pierre Stanislas
mal fondée ;

L’en déboute ;

Condamne Monsieur KIN Pierre Stanislas aux dépens de


l’instance ;

Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jours, mois et an


que dessus.

ET ONT SIGNÉ LE PREMIER PRÉSIDENT ET LE


GREFFIER./.

14

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