Syllabus Sociologie de La Sante
Syllabus Sociologie de La Sante
Syllabus Sociologie de La Sante
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4- Procédures/Modalités d’évaluation
Il est proposé d’utiliser les modalités suivantes :
- Un INTRA : devoir sur table sous forme de question à choix multiples (QCM);
- Un FINAL : devoir sur table sous forme de questions de cours ou de dissertation.
Conclusion générale
Introduction générale
Très souvent, l’organisation des études en sociologie dans les premières années
universitaires sépare les cours théoriques sociologique et les cours de méthode. Les
étudiants suivent donc deux chemins parallèles de formation. Sur le premier, ils
découvrent les grands auteurs, les écoles, les méthodes et les notions qui jalonnent
l’histoire de la sociologie. Ils croisent notamment Emile Durkheim, fondateur de la
sociologie savante en France, Max Weber, Karl Marx. Le long du second chemin, les
étapes se nomment questionnaire, entretien, observation et enquête de terrain : les
étudiants apprennent des techniques et découvrent les démarches d’analyse des
données de l’enquête.
Toutefois, le croisement de ces deux chemins n’est pas réellement prévu dans
l’organisation des enseignements et donc il pose un véritable problème. C’est un peu
comme si les futurs architectes et ingénieurs du bâtiment apprenaient les théories
physiques les plus générales d’une part et des recettes pour faire du béton d’autre
part, sans apprendre à penser les deux ensembles. En l’absence d’articulation, cet
enseignement de sociologie laisse souvent les étudiants devant des questions qui
peuvent être paralysantes : comment se sert-on de Weber, Marx ou Durkheim
lorsqu’on doit réaliser une enquête, quantitative ou qualitative, sur tel ou tel
problème social contemporain ? Est-ce que la sociologie est condamnée à être
tiraillée entre des théories et des recueils de données strictement empiriques ?
Quand, seul ou en groupe, un novice dans la discipline doit réaliser une étude,
comment opère-t-il pour choisir entre une perspective fonctionnaliste, une
orientation structuraliste, entre une sociologie dite holiste et une sociologie dite
individualiste ? Comment articule-t-on les cadres théoriques et les concepts
sociologiques avec les démarches empiriques ?
Ce cours de sociologie (de la santé) rompt avec la distinction entre théorie et empirie,
distinction qui conduit surtout à reproduire une hiérarchie ancienne entre la théorie
et l’empirie ou la méthode, c’est-à-dire entre la noblesse de la pensée et la petitesse
des opérations matérielles. Ce module propose d’apprendre progressivement à
réaliser l’union de ces deux dimensions différentes que sont la théorie et l’empirie ; à
mêler une démarche d’enquête de terrain avec un travail de conceptualisation et
d’abstraction théorique exigeant en écoutant celles et ceux qui racontent comment ils
tentent d’y parvenir dans leurs propres recherches, comment ils mettent en œuvre
cette sociologie d’enquête hybride.
La sociologie peut être définie comme la science qui étudie tous les phénomènes qui
se passent à l’intérieur de la société, pour peu que ceux-ci se présentent avec une
certaine généralité, quelque intérêt social. Dit ainsi, l’on peut croire que tous les
événements humains peuvent être appelés sociaux. Chaque individu mange, dort,
boit, raisonne et la société a tout intérêt à ce que ces fonctions s’exercent
régulièrement. Si donc ces faits étaient sociaux, la sociologie n’aurait pas d’objet qui
lui est propre, et son domaine se confondrait avec celui de la biologie et de la
psychologie.
Mais, en réalité, il faut bien comprendre que dans la société un groupe déterminé de
phénomènes qui se distinguent par des caractères tranchés de ceux qu’étudient les
autres sciences de la nature. Comte a montré et expliqué que l’objet de la sociologie
est un domaine que l’on ne peut explorer en le réduisant à des particularités
structurelles, biologiques ou, pour s’exprimer comme lui, physiologiques.
Non seulement ces types de conduite ou de pensée sont, extérieurs à l’individu, mais
ils sont doués d’une puissance impérative et coercitive en vertu de laquelle ils
s’imposent à lui, qu’il le veuille ou non. Sans doute, quand on s’y conforme de son
plein gré, cette coercition ne se fait pas ou se fait peut sentir, étant inutile. Mais elle
n’en est pas moins un caractère intrinsèque de ces faits, et la preuve, c’est qu’elle
s’affirme dès que l’on tente de résister. Si on essaie de violer les règles du droit, elles
réagissent contre moi de manière à empêcher l’acte s’il en est encore temps, ou
l’annuler et à le rétablir sous sa forme normale s’il est accompli et réparable, ou à me
le faire expier s’il ne peut être réparé autrement.
Voilà donc un ordre de faits qui présentent des caractères très spéciaux : ils
consistent en des manières d’agir, de penser et de sentir, extérieures à l’individu, et
qui sont douées de pouvoir de coercition en vertu duquel ils s’imposent à lui. Par
suite, ils ne sauraient se confondre avec les phénomènes organiques, puis qu’ils
consistent en représentations et en actions ; ni avec les phénomènes psychiques,
lesquels n’ont d’existence que dans la conscience individuelle et par elle. Il constitue
donc une espèce nouvelle et c’est à eux que doit être donnée et réservée la
qualification de sociaux. Elle leur convient, car il est clair que, n’ayant pas l’individu
pour substrat, ils ne peuvent en avoir d’autre que la société, soit la société politique
dans son intégralité, soit quelqu’un des groupes partiels qu’elle renferme, confessions
religieuses, écoles politiques, littéraires, corporations professionnelles, etc. D’autre
part, c’est à eux seuls qu’elle convient ; car le mot de social n’a de sens défini qu’à
condition de désigner uniquement des phénomènes qui ne rentrent dans aucune des
catégories de faits déjà constituées et dénommées. Ils sont donc du domaine propre
de la sociologie.
Avant toute chose, la première règle et la plus fondamentale est de considérer les
faits sociaux comme des choses.
Mais cette définition initiale énonce comme une chose ce qui n’est qu’une vue de
l’esprit. Elle se présente, en effet, comme l’expression d’un fait immédiatement
visible et que l’observation suffit à constater, puisqu’elle est formulée dès le début de
la science comme un axiome.
Les phénomènes sociaux sont des choses et doivent être traités comme des choses.
Pour démontrer cette proposition, il n’est pas nécessaire de philosopher sur leur
nature, de discuter les analogies qu’ils présentent avec les phénomènes des règnes
inférieurs. Il suffit de constater qu’ils sont l’unique datum offert au sociologue. Est
chose, en effet, tout ce qui est donné, tout ce qui s’offre ou, plutôt, s’impose à
l’observation. Traiter les phénomènes comme des choses, c’est les traiter en qualité
de data qui constituent le point de départ de la science. Les phénomènes sociaux
présentent incontestablement ce caractère.
Cette question est d’autant plus importante que l’on se pose la question de l’objet de
la sociologie. La sociologie ne se définit pas par une part de la réalité dont elle devrait
faire l’analyse, les autres sciences se partageant le gâteau du réel. Par exemple, la
sociologie peut étudier le rapport de l’enfant à son père ainsi que la psychanalyse, le
chômage aussi bien que l’économie. Si deux disciplines peuvent étudier le même
segment de la réalité, c’est donc que la différence se situe ailleurs. Elle joue dans le
regard que le savant porte sur le réel, ou selon une analogie chère à Pierre Bourdieu
ou à Jean-Claude Passeron, elle est fonction des « lunettes » qu’il prend. Il doit opter
premièrement pour des verres sociologiques, et deuxièmement choisir, à l’intérieur
de ce rayon disciplinaire, telles ou telles lunettes sociologiques différenciées selon
une orientation théorique, selon une école de pensée.
La sociologie n’est pas une science descriptive. Elle peut utiliser la statistique et
produire des données statistiques, mais n’a pas pour objectif la comptabilité des faits
sociaux. A la différence de la démographie, la sociologie de la famille, par exemple,
ne compte pas le nombre de mariage. Elle cherche à repérer les facteurs sociaux qui
conduisent certaines personnes à se marier et à comprendre les raisons que ces
personnes donnent pour expliquer leur choix d’avoir noué ce type de lien officiel. Il
en sera de même pour « l’entrée » dans le chômage, dans le musée, dans un stade,
dans telle maladie. La sociologie privilégie soit les facteurs objectifs, soit les raisons
subjectives qui mènent l’individu à pratiquer, à s’arrêter de pratiquer. La sociologie
peut être définie comme une science du sens, objectif _ les déterminants sociaux _ et
subjectif _ les raisons, les justifications que donnent les groupes et les individus _ les
conduites.
Une enquête, c’est (ou cela devrait être) toujours ce qui sépare le fait d’illustrer une
idée avec quelques bons exemples et le fait de rendre compte d’une idée en la
mettant à l’épreuve du réel au moyen d’une vérification systématique. Ou pour
l’exprimer autrement selon Jean-Claude Passeron, « c’est toujours ce qui sépare la
manipulation d’informations discontinues du traitement méthodique d’un corpus
d’informations contextualisées ».
Que signifient pour nous la santé et la maladie ! Que sont-elles pour un membre de
notre société ? Par l’expérience personnelle de chacun, mais aussi à travers
l’information qui circule dans la société, modelés par ses valeurs, leur image se
structure : être malade, être en bonne santé, c’est semble-t-il, d’abord et seulement,
une expérience individuelle qui ne peut se partager. Pourtant, nous savons que
l’incommunicabilité est déjà rapport aux autres ; on est malade ou bien portant pour
soi, mais aussi pour la société et en fonction de la société. Quel est la définition de
maladie ? Chez l'homme, la maladie est définie comme étant une altération de l'état
de santé se manifestant par un ensemble de signes et de symptômes perceptibles
directement ou non, correspondant à des troubles généraux ou localisés,
fonctionnels ou lésionnels, dus à des causes internes ou externes et comportant une
évolution.
Or en français, les termes « maladie » et « malade » sont utilisés de façon indistincte
pour signifier « avoir une maladie » qui signifie que c’est un état reconnu par un
médecin, « être malade » c’est-à-dire se sentir mal donc ressentir des symptômes
d’une affection ou d’une lésion visible ou non, « être un malade » qui renvoie à être
reconnu comme tel par l'entourage ou la société.
Ainsi, la maladie d’abord vécue, subie sans intermédiaire, est aussi apprise : l’enfant,
pensons-nous, ne comprend pas ce qu’est la maladie et ce qu’elle va signifier dans sa
vie ; il doit apprendre à insérer son expérience dans un réseau d’explications et de
règles sociales _ le jeu du malade et du docteur, en particulier, semble avoir ce rôle.
L’adulte lui-même apprend de la société à être malade ; cet apprentissage débute avec
le nom donné par le médecin à la maladie, puis viennent les prescriptions qui sont
des règles d’actions, la rencontre avec les institutions : l’hôpital, la sécurité sociale.
Pour le malade, comme pour le médecin, pour l’assuré social en face de
l’administration, des rôles se différencient et des normes de conduites s’imposent : au
regard de la société, le malade n’est pas équivalent au bien portant. La
sociologie permet également de comparer l'organisation professionnelle de la
profession infirmière dans plusieurs pays : elle est beaucoup plus puissante au
Royaume-Uni que dans le reste de l’Union européenne, observe Benjamin Derbez.
Les sociologues considèrent que la santé est un espace politique, dans lequel
s'expriment des rapports de pouvoir à propos des solutions à apporter aux maladies.
C'est cette dimension sociale et politique des phénomènes sanitaires que la sociologie
analyse.
Qu’est-ce que la santé ? D’ailleurs, une des nombreuses définitions de la santé que
proposent les manuels de soins infirmiers ou d’éducation à la santé est celle de
l’homme conçu comme un être bio-psycho-social. Ainsi, la santé est à considérer
comme une norme définie par la société. Il est donc question de pouvoir, d’autorité,
d’(in)égalités et de distribution. Cette norme qu’est la santé est évolutive et fait
évoluer la société dans laquelle elle s’inscrit. La sociologie permet donc, et entre
autres, de distinguer la maladie de la santé, la santé de l’institution hospitalière,
l’institution hospitalière de l’activité médicale, etc.
Puis sont apparus les patients aliénés et passifs devant la technique et le savoir du
médecin. Enfin, aujourd’hui, mais ce n’est pas fini, prennent leur place dans le
système les groupes de malades chroniques capables de prendre en charge leur
traitement … C’est l’histoire du malade. Elle montre et démontre que l’expérience de
la maladie et le personnage du malade, le rôle de malade sont socialement construits
et historiquement situés. Être malade, c’est un statut social !
Hospitalisme ! L’hôpital est aussi, et il l’a toujours été, une entreprise de socialisation.
L’hôpital a une fonction sociale, une fonction de contrôle social. En outre,
l’institution hospitalière est devenue une entreprise y compris au sens industriel du
terme. Ensuite, l’hôpital s’est doté de nouvelles missions. Ces aspects fournissent à la
sociologie de nombreux objets d’étude. L’hôpital est d’un point de vue sociologique
un bouillon de cultures ou de logiques de métiers, le plus souvent vécues ou
pressenties comme contradictoires, pour ne pas dire conflictuelles. C’est « un champ
de bataille » s’exclame Vega, l’ethnologue. L’institution est complexe, au moins sur
un point la dualité des lignes d’autorité. M. Crozier s’y est intéressé à l’hôpital en
dépassant le point de vue de Mintzberg, en dépassant ce modèle de bureaucratie
professionnelle, en y adjoignant la notion de stratégies.
En résumé, l’hôpital, et les métiers qui s’y organisent, restent à l’image de la société
qu’elle prétend soigner ! Professionnalisme ! Métier ou profession, le médecin, ce «
mandarin » de l’hôpital, lui-même cœur de notre dispositif sanitaire socialement
financé, qui est-il ? Comment devient-on médecin ? D’étudier les déviances, Talcott
Parsons propose deux idéals-types : contrôleur social ou entrepreneur moral. La
médecine est une science normative et, d’ailleurs, de plus en plus normée. N’est-elle
pas présente, omniprésente et parfois omnipotente, jusque dans les tribunaux ?
Corporatisme ! La mise en perspective par l’histoire a mené l’analyse de la profession
de soignant, en général, et d’infirmière en particulier. L’évolution de son rôle ou de
ses missions est mise en lien avec le développement sanitaire, culturel et
technologique de nos sociétés. L’interprétation est double car elle s’appuie sur la
division sexuelle du travail, instituant un double régime de domination
subordination. Le parallèle ou plus exactement, des convergences s’inscrivent entre
la mutation professionnelle, et pourtant para-médicale, de l’infirmière-soignante et
l’image sociale de la femme. L’histoire se répète !
Conclusion générale
En résumé, les caractères de cette méthode sont les suivants. D’abord, elle est
indépendante de toute philosophie. Parce que la sociologie est née des grandes
doctrines philosophiques, elle a gardé l’habitude de s’appuyer sur quelque système
dont elle se trouve ainsi solidaire. C’est ainsi qu’elle a été successivement positiviste,
évolutionniste, spiritualiste, alors qu’elle doit se contenter d’être la sociologie tout
courte.