Chiaetal OPDE
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LE DIAGNOSTIC TERRITORIAL ?
UN OUTIL POUR DECIDER ENSEMBLE !
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Colloque OPDE 2010 INRA Montpellier « Aide à la décision et gouvernance »
1. INTRODUCTION
Dans cette communication nous nous proposons de présenter et interroger la philosophie et les
modalités de l’opération diagnostic territorial en tant qu’outil de l’action publique (Jeannot 2003) en
appui à un projet territorial. Dans le contexte du développement durable et concerté des territoires,
nous étudierons les opérations de diagnostic territorial en les considérant comme un outil pour décider
ensemble au sens où elles permettent de (re)définir le territoire, d’élaborer des projets, de définir les
priorités, d’établir des stratégies…Nous entendons outil ici, dans le sens développé par l’école
française de sciences de gestion (Berry, Moisdon, Hatchuel, David…) comme toute formalisation qui
permet d’assurer les trois fonctions de la gestion à savoir la prévision, la décision et le contrôle. Par
ailleurs dans le cas du développement durable elle permet également d’explorer des mondes
possibles dans une logique de prospective. On analysera notamment le diagnostic, développé par le
Pays Corbière Minervois dans le cadre de la mise en œuvre d’un nouveau dispositif d’aménagement
mis en place par la région Languedoc Roussillon, à savoir les Opérations Concertées d’Aménagement
et de Gestion de l’Espace Rural (OCAGER) pour aider les pays, les parcs naturels régionaux, et les
agglomérations à réfléchir leur territoire
Présentation du plan
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A bien des titres le diagnostic constitue un outil et s’avère être une phase centrale pour l’ingénierie
territoriale. En effet, la mise en œuvre des politiques publiques territorialisées passe par la notion de
projet de territoire qui, au-delà de ses spécificités liées à sa dimension territoriale d’abord, puis
concertée ensuite, emprunte largement sa philosophie à la logique de projet, caractéristiques des
politiques publiques. Le projet, peut selon Turner et Miller (2003, cité par Billé, 2009) être assimilé à
une « organisation temporaire » (Turner et Müller, 2003) et peut être défini comme un : « effort dans
lequel des ressources humaines, matérielles et financières sont organisées de manière nouvelle pour
entreprendre un type de travail particulier, aux spécifications données, dans le cadre de contraintes de
coût et de temps, de façon à apporter un changement avantageux défini par des objectifs quantitatifs
et qualitatifs » (Turner, 1993). Ainsi le champ de l’ingénierie de projet (Bridier et Michaïloff 1982 ;
Garrabé, 1994) met en avant la notion de cycle du projet, et par extension, de cycle des politiques
publiques, qui voient se succéder plusieurs phases traditionnelles à savoir l’indentification, l’étude de
faisabilité, la mise en œuvre et le suivi évaluation. Cette organisation en séquences répond à un souci
de rationalisation de l’action publique où les décisions s’appuient sur un diagnostic de l’existant
souvent organisé autour de l’identification des forces et des faiblesses. Ces approches, très anglo-
saxonnes à l’origine ont été largement introduites par les organisations internationales, et notamment
dans le cas de la France par les programmes européens qui mettent la notion de projet, qu’il soit
sectoriel ou territorial, au cœur de ses procédures de financement, depuis les projets structurels
relevant du FEDER à ceux plus organisationnels des programmes d’interventions communautaires
(PIC) tels que les programmes Leader. Il s’agit d’approches économiques à l’origine et qui ne
s’appliquent que partiellement à la mise en œuvre des politiques publiques pour lesquelles les
politistes (Muller 2000) et/ou les sociologues tels Callon et al. (2001) mettent d’avantage l’accent sur
le caractère de construit social des politiques publiques avec une partition en phases moins nette. On
peut cependant distinguer, des phases de genèse ou de formulation de la politique qui recouvrent la
problématisation et la mise sur agenda et qui débouchent sur la construction d’un cadre normatif,
suivie d’une période de fonctionnement du système d’intervention.
Il ne s’agit pas ici de revenir en détail sur les très nombreux travaux qui proposent des méthodologies
ou protocoles pour la réalisation des diagnostics territoriaux. Soulignons que la prégnance de la
dimension spatiale dans les diagnostics de territoire conduit de nombreux travaux à mettre en exergue
des méthodes ou des produits relevant de formes de représentations spatialisées. Ainsi par exemple
Lardon (2007 p 174) propose un itinéraire méthodologique pour le diagnostic de territoire qui « articule
différentes méthodes de traitement des informations et de mobilisation des acteurs autour de la
production de représentations spatiales, pour construire progressivement une vision partagée et
stratégique du territoire». On pourrait lister un très grand nombre d’approches relevant de démarches
quantitatives et/ou qualitatives selon qu’elles relèvent de l’analyse de données statistiques ou qu’elles
font intervenir les connaissances des acteurs, mobilisées à travers divers méthodes d’animation, de
consultation voire de concertation. L’évolution de ces méthodes, d’abord plutôt quantitatives, comme
par exemple les produits spécifiques élaborés par l’INSEE en accompagnement de la mise en place
des chartes intercommunales dans les années quatre-vingt, puis très largement structurées par des
outils innovants d’intégration de l’information -tels que les systèmes d’information géographique-, puis
de partage de l’information et de mobilisation des connaissances locales à travers des focus-groups
ou des jeux de rôle par exemple, correspond à la prise en compte du caractère d’abord intégré puis
concerté des politiques. Le caractère intégré et transversal du développement durable va en effet
d’abord se traduire par des outils facilitant la prise en compte d’une diversité de dimensions,
notamment les aspects environnementaux ou patrimoniaux qui relèvent du registre non marchands
mais avec un processus de décision qui reste dans une logique d’optimisation d’un objectif décidé par
certains types d’acteurs. Le caractère concerté va ensuite porter sur le mode de définition des
objectifs qui deviennent alors des compromis collectivement élaborés pour lesquels il s’agit d’étudier
des dimensions relevant plutôt de questions d’équité ou de représentativité au niveau de la
composition et du fonctionnement du collectif où les objectifs sont discutés. Face à ce nouveau type
de politiques publiques, le champ de l’ingénierie territoriale, de concert avec celui de l’évaluation
économique (Rey-Valette et Mathé, 2009), jusqu’alors circonscrit à des questions plutôt
opérationnelles d’efficacité de la mise en œuvre des politiques et des projets est ainsi étendu en
amont à la définition des objectifs. Ainsi l’étude des types de métiers caractéristiques de l’ingénierie
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territoriale montre l’existence de deux grands pôles de compétences axées sur une logique
gestionnaire avec une légitimité technique ou sur une logique participative avec des métiers de
médiateur et d’acteur d’interface ayant un rôle d’animation (Seguin-Callois et al., 2009).
L’évaluation des diagnostics territoriaux par rapport à la prise en compte du développement durable
(ETD, 2004-a) montre l’insuffisance de leur caractère transversal et multi niveaux. Ils sont encore
largement la juxtaposition de diagnostics sectoriels, qui appréhendent peu les interactions
urbain/rural, l’analyse des risques (hormis l’inondation), les réseaux d’acteurs ainsi que les aspects
relevant de la gouvernance, de l’information et de la formation. On note par ailleurs que ces
diagnostics territoriaux sont très souvent externalisés à des bureaux d’études, comme en témoigne
par exemple l’analyse des agendas 21 locaux qui montre que 70% des collectivités déclarent avoir eu
recours à un bureau d’étude, principalement au moment du diagnostic avec 76% des diagnostics qui
sont effectués par des bureaux d’étude (Observatoire National, 2009). Or, face à ce constat les
multiples guides et outils de diagnostic produits par l’ingénierie territoriale pour la mise en œuvre du
développement durable par les collectivités territoriales (RAREE, 1998 ; Rouxel et Rist, 2000 ;
CERDD, 2001 ; ETD et al. 2002 et 2005 ; ARPE Midi Pyrénées 2007, CGDD, 2009) mettent au
contraire l’accent sur l’importance du pilotage ainsi que sur la question de la participation en vue de la
co-construction du projet. On observe une rupture importante dès lors que l’on admet comme le
soulignent Rouxel et Rist (2000) que «l’important n’est pas de tout savoir» et que la multiplication et la
superposition des diagnostics, n’est pas une bonne façon d’appréhender la transversalité. Au
contraire le constat de l’existence de multiples diagnostic et plus généralement de l’abondance de
l’information disponible et souvent distribuée entre divers observatoires conduit à orienter les efforts
vers les questions de partage et de mutualisation qui impliquent des compétences spécifiques
(Debarbieux et Lardon, 2003). Il convient aussi de s’inscrire dans une logique d’évaluation continue
permettant l’actualisation régulière d’un diagnostic transversal et partagé de façon à institutionnaliser
l’évaluation et contribuer au caractère procédural et adaptatif du développement durable. Par ailleurs
la prise en compte croissante des aspects sociaux et institutionnels, conduit à des diagnostics souvent
à dire d’expert qui s’appuient sur des évaluations participatives et multicritères.
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Parmi les OCAGER mises en place (voir le nombre), on peut étudier plus en détail celle du Pays
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Corbières Minervois, qui est un des terrains d’étude du projet Gouv.Innov visant à appréhender les
innovations organisationnelles en matière de gouvernance territoriale. Le Pays Corbières Minervois
qui recouvre le périmètre de 6 communautés de communes est caractéristique des zones rurales
confrontées aux mutations de l’agriculture et aux enjeux de la périurbanisation. Avec 70% de la SAU
consacré à la viticulture et un vaste espace en appellation Corbières et Minervois, il est actuellement
fortement impacté par la crise viticole et des voies de diversification sont recherchées dans le bois,
l’élevage, les énergies renouvelables et le tourisme, de façon à éviter une emprise croissante de la
périurbanisation. Pour partie, lieu d’un projet Leader exemplaire et ancien (projet Pays Cathare), ce
territoire bénéficie d’une tradition de développement local et d’une importante dynamique de
participation des acteurs. L’enjeu avec la mise en œuvre de l’Ocager était dans un contexte de crise
viticole de mettre en œuvre des outils de gestion concertée de l’espace rural de façon à renforcer la
cohérence des actions d’aménagement et notamment de penser de nouvelles stratégies de
développement de l’agriculture en réponse à cette crise de façon à préserver l’activité agricole
fortement identitaire pour ce territoire et, à travers des filières d’agriculture durable, intervenir en
faveur de la conservation du paysage et de la qualité de l’environnement. Le caractère concerté du
processus d’OCAGER devait par ailleurs éviter les tensions entre les agriculteurs et les autres acteurs
du monde rural à propos du devenir des terres concernées par l’arrachage des vignes.
La mise en œuvre de l’OCAGER supposait donc en premier lieu de réaliser un diagnostic du territoire,
action qui a été confiée à un consortium de deux bureaux d’études. Il s’agissait de caractériser les
espaces agricoles et les milieux naturels de façon à élaborer un plan d’actions par terroirs pour
accompagner les dynamiques foncières. Le diagnostic devait en outre déboucher sur la constitution
d’un S.I.G. à l’échelle du pays. Cette phase de diagnostic de territoire et d’identification des enjeux a
mobilisé un grand nombre de partenaires (institutionnels, socioprofessionnels, associatifs,…) et
d’acteurs individuels à travers la mise en place d’enquêtes, de focus-group et de dispositifs propres au
suivi de l’étude (comité de pilotage et comité technique). Dans le cadre du projet Gouv.Innov plusieurs
chercheurs (dont deux qui étaient membres du comité de pilotage de l’étude diagnostic), a été
amenée à suivre et à accompagner le déroulement de cette phase de diagnostic. L’analyse des
contraintes et de l’apport de ce diagnostic ainsi que des jeux d’acteurs autour de sa réalisation,
permet ainsi de revenir sur l’utilité et les modalités des diagnostics territoriaux, les outils mobilisés, les
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Projet Gouv.Innov financée par le programme PSDR de l’INRA et la Région Languedoc
Roussillon.
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procédures et in fine les besoins à la fois quant à l’identification des acteurs mais aussi quant au
pilotage de l’action et à terme à ses conditions d’appropriation et aux modalités de transfert des
connaissances acquises –au sens large dépassant le domaine strict de l’information pouvant être
intégrée dans un observatoire. Il s’agit de s’interroger lorsque le diagnostic est externalisé à des
bureaux d’études ou à des experts divers, y compris universitaires, sur les formes d’interactions et de
partenariats entre les « consultants » et les agents de développement et plus généralement sur les
outils et la capacité d’institutionnaliser le diagnostic dans des dispositifs pérennes. En effet, il s’avère
que le plus souvent c’est la logique instrumentale de l’outil qui s’impose et qui conduit à des
diagnostics descriptifs qui se rajoutent à des diagnostics déjà existants sans vraiment apporter la plus
value organisationnelle que l’on pourrait attendre en relation avec la condition d’amélioration continue
prônée par le développement durable. En effet, au-delà de cet exemple du diagnostic de l’OCAGER
du pays Corbières Minervois, il s’agit de discuter ici plus généralement de la place et des modalités
des diagnostics territoriaux dans les politiques publiques territorialisées. Compte tenu du champ
d’analyse propre au séminaire OPDE, il s’agira notamment d’étudier en quoi ces outils structurent non
seulement le comportement des acteurs mais aussi comment ils interfèrent ou sont dépendants des
rapports de pouvoir, des conflits et qu’elle est leur capacité à mobiliser les acteurs.
Difficulté socio-cognitives
La difficulté de mobiliser les agriculteurs « traditionnels » (reprendre l’analyse des réseaux
des participants au diagnostic faites par éva)
La difficulté de mobiliser les élus (généraliser)
Les interactions difficiles avec les structures existantes (chambre d’agriculture)
Relais avec le conseil de développement
Manque de moyens
L’éclatement de l’information (mémoire eva)
Le diagnostic comme source ponctuelle de financement d’animation face et au manque de
moyen en interne
Difficultés de pilotage
Le décalage avec l’évolution des enjeux et la moindre importance de l’ocager
Le pilotage des consultants
Le pilotage des interactions pays /ocager et le besoin d’une approche dynamique ancrée dans
l’histoire institutionnelle du pays
4. ?
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
Bridier M., Michaïlof S., 1980. Guide Pratique d’Analyse de Projets. Economica, 264 p.
Callon M., Lascoumes P., Barthe Y., 2001. Agir dans un monde incertain. Essai sur la démocratie
technique. Seuil Ed., Coll. La couleur des idées, Paris, 358 p.
ETD 2004. La prise en compte du développement durable dans les projets de territoire. Les notes de
l’Observatoire. Entreprises Territoires et Développement, 18 p. (disponible sur le site
www.projetdeterritoire.com)
Garrabé M., 1994. Ingénierie de l'évaluation économique. Ellipses Ed. Paris, 255 p.
Muller P., 2000. Les politiques publiques. PUF ED. Paris, coll. Que sais-je ? 126 p.
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Colloque OPDE 2010 INRA Montpellier « Aide à la décision et gouvernance »
Turner, J.R., 1993. The handbook of project based management. McGraw-Hill, London.
Turner, J.R., Müller, R. 2003. "On the nature of the project as a temporary organization". International
Journal of Project Management, n°21, pp. 1-8.