Aperçu Historique Sur Le Reformisme Musulman
Aperçu Historique Sur Le Reformisme Musulman
Aperçu Historique Sur Le Reformisme Musulman
Introduction
Cette mise en présence brutale avec l'Occident suscitera diverses réactions intellectuelles et
politiques qui marqueront profondément le monde musulman. Les penseurs musulmans vont
opérer une analyse des causes du retard de leurs sociétés. Dans cette perspective, la dimension
religieuse et la question identitaire et culturelle prendront certes le pas sur l'examen de
conscience, c'est-à-dire sur la critique sans complaisance, des facteurs endogènes de la crise,
mais certains penseurs vont poser, en toute liberté, des questions fondamentales qui vont agiter
les esprits, les sociétés et les institutions jusqu'à nos jours.
En arabe moderne le terme işlāh recouvre l’idée générale de réforme. Dans la littérature
islamique contemporaine, il désigne plus particulièrement le réformisme tel qu’il apparaît à
travers l’enseignement de Jamāl al-din al-Afġānī et de Muhammad ‘Abduh, et chez les
nombreux auteurs musulmans qui s’inspirent de ces deux réformistes et, comme eux, se
réclament du réformisme.
La notion d’işlah, si répandue dans la culture islamique moderne, tient également une
bonne place dans le vocabulaire du Coran où le champ sémantique de la racine Ş.L.H est très
large. Parmi les dérivés de cette racine dans l’usage coranique, on relèvera :
le substantif muşlih, pluriel muşlihūn : ceux qui font œuvre pie, qui prêchent la
paix et la concorde, qui ont le souci du perfectionnement moral de leur prochain
et se préoccupent de rendre les hommes meilleurs.
C’est ainsi que se définissent les réformistes musulmans modernes, qui revendiquent
avec honneur le titre de muşlihūn auquel la révélation confère un certain prestige. Les
réformistes musulmans se réclament du prophète Muhammad, considéré comme le réformateur
par excellence.
La situation de l’islam dans le monde moderne devient l’un des principaux sujets des
dissertations réformistes. Depuis la conférence de Renan sur l’islamisme et la science
(Sorbonne 29 mars 1883) et la controverse qui s’ensuivit, entre lui et al-Afġānī, l’un des grandes
préoccupations des réformistes sera de réfuter la thèse selon laquelle l’islam serait contraire à
l’esprit scientifique, et qu’il pourrait, de ce fait, être tenu pour la cause première de la régression
culturelle des peuples musulmans.
1
- Parmi les versets qui vont dans ce sens, nous pouvons citer le verset 114 de la sourate IV, les femmes, qui
dit :« Il n’y a rien de bon dans la plus grande partie de leur conversation secrète, sauf si l’un d’eux ordonne une
charité, une bonne action ou une conciliation (’aw işlāhin ) entre les gens»
2
-Cf. Coran sourate VII, verset 142.
Les perspectives modernistes du mouvement réformiste
Partant de ce principe coranique: « Dieu ne change pas la condition d'un peuple tant que celui-
ci ne change pas ce qui est en lui-même » (Coran :12:12) les échecs historiques du monde
musulman sont interprétés comme un avertissement, sinon comme un châtiment divin. Ce
verset qui est constamment cité par les réformistes implique, selon ces derniers, que l’ordre
tracé par Dieu se fonde sur des rapports de causes à effets, et le choix de la voie appartient à
l’homme en tant qu’être responsable. Le problème est donc de savoir comment la communauté
réintègrera à nouveau l’histoire.
Les penseurs réformistes s'attacheront à réfuter l'idée que l'islam serait foncièrement
incompatible avec l'esprit scientifique. L'islam combat l'ignorance et les préjugés et préconise
la connaissance rationnelle du monde. L'islam dont le contenu révélé est transparent à la raison
et qui pousse explicitement l'homme à faire usage de sa raison pour connaître le monde et
améliorer sa vie, l'islam est par conséquent, le meilleur stimulant pour les sciences, et
l'élargissement des connaissances.
De façon unanime, chacun proclame qu'on ne saurait tenir l'islam pour responsable de la longue
stagnation et de l'apparente décadence du monde musulman.
Les propositions générales avancées par les réformistes furent multiples: débarrasser la
pratique religieuse des superstitions et des cadres désuets accumulés au cours des siècles,
distinguer l'essentiel du secondaire afin de ne conserver que les dogmes réellement
fondamentaux, retourner, par la libre réflexion, aux sources du Coran et de la tradition
prophétique.3 Les réformistes n'ont pas hésité de réclamer la permission de l'effort personnel
(al-ijtihād) et le rejet de l'imitation des anciens (al-taqlīd).
CONCLUSION:
3
- Cf. Marcel A. Boisard, L'Humanisme de l'islam, Albin Michel, Paris, 1979, p. 282-283