Extraits de Copies

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Extraits de copies rédigées par des élèves en dissertation sur table.

Sujet : A-t-on raison de rendre justice soi-même ?

Copie n° 1. Extrait allant de la mise en situation jusqu’à la formulation de problématique :

Les tentatives d’assassinat à l’encontre des dictateurs offrent une mise en situation adéquate à la
question posée. Par exemple, Hitler a subi plusieurs tentatives d’attentat à sa personne. Bien que
toutes déjouées, on parle bien de la volonté de rendre justice de la part de ses opposants qui ont
effectué une action dont la réussite aurait changé le cours de l’Histoire. En effet, Hitler ayant commis,
ou du moins, commandité, des atrocités, à l’encontre de personnes innocentes, sa mort semblait le
moyen ultime de rendre justice. En effet, la justice entendue comme organisme étatique étant
détenue par la personne à juger, la justice comme vertu morale ne pouvait pas être rendue. Donc,
dans ce cas précis, la nécessité de rendre justice soi-même pour respecter la morale, mais aussi pour
sauver des vies potentiellement menacées semble aller de soi. Ici, la majorité des gens, voire tout le
monde, estime que cette décision de rendre justice soi-même est entièrement juste et légitime.

Dans cette question, le terme le plus important est la notion de justice. On peut être amené à la penser
comme droit positif, c’est-à-dire comme l’ensemble des lois établies dans un Etat précis, à une période
de l’Histoire définie. Mais cette définition semble inadaptée à la question posée. On envisagerait plutôt
la justice comme une morale, c’est-à-dire ce qui est, pour chaque situation, la décision la plus juste
dans l’absolu et qui respecte les principes moraux communément établis. Ensuite, le principe d’avoir
raison, lorsqu’on le prend mot pour mot, évoque sur une décision ou une idée, un avis qui aurait été
développé en faisant exclusivement l’usage de la raison et plus précisément du calcul rationnel. On
peut dire que cet avis est entièrement légitime de part sa justesse. D’autre part, si on prend
l’expression d’un point de vue plus moderne et en le considérant dans la question posée, on pourrait
dire qu’avoir raison signifie prendre une décision qui soit la meilleure pour nous, qui mènerait à notre
bien, à notre sécurité, mais pas forcément au bien des autres. On aurait donc raison dans notre
situation, mais pas forcément dans l’absolu. La notion de volonté quant à elle, nous donne à réfléchir
sur son origine. En effet, lorsqu’on pense à la volonté, il nous vient à l’esprit le désir provenant des
passions que l’on éprouve. Pour lier ce terme à celui d’avoir raison, on peut dire que ce terme est plus
de l’ordre de la pulsion et que la pulsion n’est pas nécessairement morale, voire pas forcément
bénéfique pour nous. De l’autre côté, on a la volonté découlant exclusivement de la raison et donc
d’un calcul rationnel et rigoureux. Cette origine de la volonté, plus pure et plus rare, serait
hypothétiquement la meilleure des décisions, peu importe le sujet. Enfin, on pense à étudier le
détenteur de cette volonté en réfléchissant sur la notion de « soi-même ». Le premier élément nous
venant à l’esprit est la volonté d’un individu propre, d’une personne réelle qui choisirait de rendre
justice. Moins évident, on peut imaginer la volonté d’une personne fictive comme l’Etat. On parlerait
alors de la justice comme système, qui existe déjà, et on questionnerait sa légitimité.

Grâce à la définition des différents termes s’articulant ensemble, on voit l’apparition de différentes
tensions. La première qui transparaît est la contradiction entre notre volonté pouvant découler
entièrement des passions qu’un individu éprouve et l’objet de la volonté qui est de rendre justice
comme vertu morale. En effet, cette dernière doit provenir essentiellement du calcul rationnel. Une
des autres tensions se trouve dans le terme « soi-même ». Il pourrait signifier deux éléments
différents : l’individu réel, donc le citoyen, ou alors, le groupe d’individus qui ne formerait qu’un dans
une personne fictive comme l’Etat. On peut aussi mentionner la tension évidente entre les deux
significations de la justice ; la vertu morale qui est l’idéal et le droit positif qui représente les lois
établies dans la réalité. Dans cette volonté de justice rendue, le bien et les avantages de l’individu
doivent-ils primer sur la stabilité du vivre-ensemble ou inversement ?

Dans cette copie, le candidat parvient à entrer dans la singularité du sujet dès la mise en situation. Le
choix effectué pour la mise en situation n’est pas original, mais il donne lieu à une exposition du propos
qui cible déjà le cœur du sujet. Par la suite, la phase des définitions montre une rigueur et un souci
d’approfondissement dans l’analyse, en plus de la réutilisation attendue des éléments du cours. La
réadaptation des connaissances au nouveau sujet a été réussie, dans la mesure où la notion de justice
avait été abordée, cette année, de manière transversale, à travers des textes, au sein d’une grande
séquence où la problématisation portait centralement sur la politique et non sur la justice directement.
Les connaissances du cours font l’objet d’une appropriation très bien maîtrisée, approfondie et
réfléchie. L’effort pour attribuer un sens aux termes que l’on comprend intuitivement est remarquable.

Sujet : De quoi est faite notre connaissance du réel ?

Copie n°2. Extrait présentant l’ensemble d’une partie dans le développement.

Notre connaissance du réel ne repose pas que sur l’expérience mais aussi sur la raison. L’expérience
amène une connaissance par les sensations perçues par un sujet. Mais c’est alors un savoir individuel,
puisque les impressions reçues rencontrent le réel à un instant précis et dans un espace déterminé. De
plus, l’expérience n’explique pas le réel et ne permet pas d’en comprendre les mécanismes. Elle répond
au « comment » mais pas au « pourquoi ». On sait que tel médicament a tel effet sur telle pathologie,
mais on ne comprend pas la relation de cause à effet. Seul le médecin qui possède la théorie de son
art pourra l’expliquer. L’expérience peut aussi être trompeuse. En accordant spontanément notre
confiance aux sens, on risque d’être pris au piège de nos illusions perceptives et de confondre ce qui
nous apparaît avec ce qui est réellement.

Par exemple, dans l’illusion d’optique de Müller-Lyer où deux segments sont disposés avec, à
l’extrémité, des flèches dans des sens contraires, ce qui nous apparaît est une différence de longueur.
Pourtant, en prenant une règle, on se rendra compte qu’ils sont bien identiques. Ainsi, cela montre
que pour accéder au réel, il faut aller au-delà des apparences, en faisant usage de la raison. Notre
connaissance du réel repose aussi sur la raison. C’est la raison qui permet notamment de réaliser des
démonstrations, c’est-à-dire des raisonnements où s’enchaînent logiquement toutes les propositions.
Les démonstrations permettent d’établir des vérités, notamment en mathématiques. La raison
permettrait alors une meilleure connaissance du réel que l’expérience.

Descartes, dans la seconde Méditation, étudie le cas du morceau de cire. En sortant de la ruche, il est
dur, froid, a une certaine odeur et une certaine couleur. En l’approchant d’une source de chaleur, il
devient liquide, chaud, change de couleur et perd son odeur. En dépit de ces changements, on sait que
c’est le même morceau de cire. Une même chose peut donc revêtir des apparences sensibles et
variables. Nos sens, notre sensibilité ne nous amènent que les déterminations accidentelles des objets.
Or, connaître quelque chose, c’est saisir des déterminations, indépendamment des changements, c’est
saisir des déterminations nécessaires. Or, seul l’entendement, faculté de connaître et de penser
quelque chose, qui s’approche de la raison rapporte ce qu’il y a d’essentiel dans l’objet. Descartes
explique que c’est donc par la raison qu’on peut trouver la vérité. Cependant, si tout le monde a la
raison de manière égale, il y a des usages différents de cette dernière. Descartes, dans son Discours
sur la Méthode, montre la nécessité pour l’être humain, d’être doté d’une méthode, pour reconstruire
les fondements solides de la connaissance. Sa méthode comporte quatre règles : règle de l’évidence,
de l’analyse, de l’ordre et du dénombrement. En suivant cette méthode, on parviendra à une
connaissance certaine du réel.

Notre connaissance du réel est donc aussi composée par la raison, qui nous permet d’aller au-delà des
apparences. Cependant, que notre connaissance du réel soit faite par la raison ou l’expérience, peut-
on connaitre avec certitude le réel ? Une connaissance absolue de la réalité est-elle possible ?

L’intérêt de cet extrait réside dans la clarté de l’argumentation du candidat, ainsi que dans la minutie
avec laquelle il effectue chaque étape méthodologique au sein d’une partie, avec en plus, une
exploitation de Descartes qui se rapporte à deux œuvres différentes, et toutes deux mentionnées en
restant rigoureusement dans le cœur du sujet. Les connaissances sont solides et l’exposition du propos
est structurée. Le tout est d ‘excellente qualité, malgré la brièveté de la transition.

Sujet : La politique peut-elle se passer de morale ?

Copie n°3. Extrait allant de la phase des définitions jusqu’à l’étape de l’annonce de plan.

Dans le sujet, le verbe « pouvoir » est employé et est à différencier de « devoir ». On se demande ici,
si un élément A (la politique) est envisageable sans une condition B (la morale). On distingue tout de
même un présupposé : la morale serait condition nécessaire de la politique ; si la politique ne peut se
passer de morale, alors la morale est condition nécessaire de la politique. La morale se rapporte aux
mœurs. On dit d’un être humain qu’il est moral s’il agit par pur respect de la loi morale, c’est-à-dire s’il
agit par devoir, s’il veut le devoir, à opposer au fait d’agir simplement conformément au devoir. Dans
la morale réside le principe de volonté bonne en soi, la volonté du devoir, qui ne considère pas l’action
du point de vue de ses conséquences (impératif hypothétique) mais plutôt, elle la considère pour elle-
même (impératif catégorique). Agir moralement, c’est agir selon la représentation par la raison, de la
loi morale, d’une loi qui peut prétendre s’élever au rang de l’universalité. D’autre part, « politique »
signifie étymologiquement « affaires de la cité », on a ici l’idée d’une pluralité, d’un concept impliquant
l’homme dans une dimension collective. On peut aussi considérer la politique, du point de vue de ceux
qui l’exercent, comme une course au pouvoir. On ne peut pas envisager la politique sans ses acteurs,
ni sans l’Homme, ni sans les rapports humains. La politique désigne la gestion des rapports humains,
par l’utilisation, en outre, du pouvoir. Finalement, la fin de la politique est le bonheur de l’Homme dans
une dimension collective. On remarque ici une tension : pourquoi la politique devrait-elle avoir recours
à la morale, si sa fin ; le bonheur collectif, et la morale semblent être deux fins distinctes, et peut-être
même incompatibles ? De plus, la politique allant de pair avec l’être humain, comment pourrait-elle
être conditionnée par la morale alors que ses acteurs sont soumis à leurs passions, et plus précisément
à l’égoïsme ? La problématique est donc la suivante : en quoi la morale pourrait-elle être une condition
nécessaire de la politique, alors que la fin de la politique ne semble pas être la morale et que la nature
des acteurs de la politique semble aller à l’encontre de la morale ? Tout d’abord, nous verrons que la
morale et la politique du point de vue de sa fin semblent ne pas se rejoindre. Ensuite, nous verrons
dans quelle mesure l’Homme fait obstacle à la morale comme critère du politique.

Cet extrait se distingue par la rigueur du raisonnement dans l’analyse du sujet. Le candidat se montre
particulièrement efficace pour effectuer le travail de problématisation. Son analyse fait intervenir les
connaissances du cours dans ses points les plus techniques et il montre une aptitude indéniable pour
saisir les éléments les plus pertinents sur un contenu de cours au volume très important, pour les
adapter au nouveau sujet ; le DST a été fait en février. La notion de morale et la notion de politique
ont été abordées séparément dans deux séquences différentes.

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