Prise en Charge Des Épicondylites Latérales
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Mise au point
i n f o a r t i c l e r é s u m é
Historique de l’article : L’épicondylite est la cause de douleur latérale du coude la plus fréquente. Également appelée « tennis
Reçu le 4 juillet 2019 elbow », elle apparaît en réalité très souvent dans un contexte de maladie professionnelle. Cette patho-
Accepté le 2 septembre 2019 logie représente ainsi un enjeu majeur de santé publique. Dans cette mise au point, nous revenons sur
les notions physiopathologiques impliquées dans l’apparition de ces épicondylites. Nous décrivons les
Mots clés : moyens qui permettent d’établir son diagnostic et d’éliminer les autres causes de douleurs latérales du
Épicondylite latérale coude. Les différents moyens médicaux et chirurgicaux disponibles y sont enfin largement discutés.
Tennis elbow
© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Coude
Revue de littérature
Traitement
1. De quoi parle-t-on ? prélèvements réalisés lors des prises en charges chirurgicales de ces
épicondylites [5]. S’il est possible d’observer une réaction inflam-
L’épicondylite latérale (EL) est plus souvent connue sous le nom matoire transitoire au début de l’évolution de la maladie (stade
de « tennis elbow ». Cette pathologie concerne en effet 50 % des 1), l’évolution vers la chronicité des symptômes s’associe à une
joueurs de tennis. Elle se manifeste en particulier chez les débutants hyperplasie angiofibroblastique correspondant à une hypercellu-
utilisant le revers à une main. Pour autant, seuls 10 % des épicondy- larité, une hyperplasie vasculaire et une déstructuration des fibres
lites latérales concerne des joueurs de tennis [1]. Cette pathologie de collagène (stade 2). L’épicondylite latérale peut être qualifiée de
est un problème de santé publique puisque qu’elle est particuliè- tendinose plutôt que de tendinite. Selon les cas, l’évolution de cette
rement fréquente chez les travailleurs manuels. Ainsi, 10,5 % des tendinose peut ensuite se faire vers l’apparition de lésions partielles
travailleurs manuels présenteraient des douleurs latérales au coude voire complètes des tendons (stade 3) puis en dernier recours vers
et 2,4 % un diagnostic avéré d’épicondylite latérale [2]. Les tra- l’apparition d’une fibrose ou de calcifications (stade 4).
vaux manuels de force, les tâches répétitives ainsi que les gestes de Lorsque l’on cherche à préciser la topographie des lésions ten-
précision sont particulièrement concernés [3]. Il existe également dineuses, la plupart des publications nous amènent à penser que
une composante dégénérative. Van Leuwen et al. ont ainsi analysé la genèse de cette pathologie semble provenir du tendon exten-
369 IRM en dehors de toute suspicion clinique d’EL [4]. Ils retrou- seur radial court du carpe (ECRB). Les contraintes sur ce tendon
vaient alors des signes d’EL sur l’imagerie pour 5,7 % des patients sont, en effet, particulièrement importantes en comparaison des
entre 18 et 30 ans. Au-delà de 70 ans, ils retrouvaient des images autres tendons épicondyliens lors de la pratique du tennis, et plus
similaires chez 16 % des patients. Cela laisse ainsi penser qu’il s’agit particulièrement lors du revers [6]. Certaines constations anato-
en réalité plus d’une usure tendineuse que d’une réelle réaction miques montrent que le tendon de l’ECRB est davantage soumis
inflammatoire. Kraushaar et Nirschl ont, par ailleurs, analysé des aux contraintes. Ainsi, Nimura et al., après avoir réalisé un tra-
vail sur 23 pièces anatomiques, nous montrent que ce tendon se
situe directement au contact de la capsule articulaire en regard de
l’interligne condylo-radial [7]. Il serait alors directement soumis
DOI de l’article original : https://doi.org/10.1016/j.otsr.2019.09.004. aux contraintes de l’articulation. Ces mêmes auteurs nous rap-
夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence française de cet article, mais celle
pellent que l’ECRB est tendineux à ce niveau contrairement aux
de l’article original paru dans Orthopaedics &Traumatology: Surgery & Research, en
autres épicondyliens qui sont musculaires. Ils supposent ainsi que
utilisant le DOI ci-dessus.
∗ Auteur correspondant. son potentiel de cicatrisation serait moins important. Ando et al.
Adresse e-mail : [email protected] (Y. Carlier). partagent cette théorie d’une plus grande fragilité de ce tendon [8].
https://doi.org/10.1016/j.rcot.2019.09.005
1877-0517/© 2019 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
S46 H. Lenoir et al. / Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 105 (2019) S45–S51
En mesurant la surface d’insertion sur l’épicondyle, ils observent bien que plus chère [17]. Elle met en évidence un hypersignal T2 au
que cette dernière est 13 fois moins importante que l’extenseur niveau de l’enthèse des tendons épicondyliens. Parfois, cet hypersi-
radial long du carpe (ECRL). Enfin, Bunata et al., sur des constata- gnal peut s’étendre aux parties molles adjacentes, témoignant alors
tions plus dynamiques, nous apprennent que la face profonde de d’un œdème périlésionnel. Elle évalue également la présence et
l’ECRB frotte sur le bord latéral du capitellum lors des mouvements l’importance d’une éventuelle lésion fissuraire [18]. Elle apporte
de flexion/extension [9]. Dans le même temps, l’ECRL augmenterait pour certains une aide au choix d’une indication chirurgicale [19].
ces contraintes en appuyant directement sur l’ECRB. À l’inverse, pour d’autres auteurs, la sévérité des lésions ne per-
Plus récemment, certaines études mettent en avant que l’EL met pourtant pas de prédire la sévérité de la symptomatologie
pourrait être une manifestation d’instabilité du coude. D’un point [20]. Cet examen permet d’évaluer d’éventuelles lésions associées :
de vue anatomique, Ando et al. rappellent l’étonnante proximité de les plicae synoviales étaient par exemple retrouvées dans tous les
l’ECRB et du plan ligamentaire latéral [8]. Une étude IRM menée cas dans l’étude de Kniesel et al. [11]. Une évaluation du plan
sur 24 patients, ayant pour but de rechercher les lésions asso- ligamentaire collatéral latéral doit également être systématique
ciées en cas d’EL, retrouve des lésions significatives plus fréquentes [10–12].
du faisceau ulnaire du plan ligamentaire externe en cas de signes La fréquence du diagnostic d’EL ne doit pas faire oublier
de gravité de l’EL [10]. Kniesel et al. ont de leur côté recher- les autres causes de douleurs latérales du coude. L’absence de
ché systématiquement des signes d’instabilité lors de l’exploration douleur à la mise en tension de l’ECRB à l’examen clinique
arthroscopique au cours du traitement chirurgical de 40 patients ainsi que l’absence de lésion sur l’échographie ou l’IRM doit
atteints d’EL [11]. Ils ont constaté une décoaptation de plus de 3 mm remettre en cause le diagnostic d’EL. Il conviendra d’éliminer
d’au moins un compartiment du coude dans 13 cas. Cette laxité une arthrose condylo-radiale, une ostéochondrite disséquante, la
était de plus de 6 mm pour 2 autres cas. Arrigoni et al. ont défini présence de corps étrangers, une inflammation de l’anconé, un
3 signes de laxité arthroscopique [12] : un tiroir antéro-postérieur, rhumatisme inflammatoire ou encore un syndrome du tunnel
une découverture de la tête radiale par le ligament annulaire et un radial. Parfois, les symptômes peuvent également se confondre
ligament collatéral radial atone. Au moins un de ces signes est pré- avec une pathologie plus régionale. L’ensemble du membre supé-
sent chez 48,6 % de leurs 35 patients opérés pour épicondylite. Ils rieur doit être examiné avec une attention particulière pour
émettent alors l’hypothèse qu’il existe une surcharge de l’ECRB en l’épaule. Le rachis cervical doit également être soigneusement éva-
tant que stabilisateur dynamique en cas de faillite des stabilisateurs lué [14].
statiques.
Ces mécanismes physiopathologiques ne doivent pas faire
oublier les facteurs de prédisposition d’EL. Il semblerait que le statut
social ait un impact sur la survenue de cette pathologie puisqu’un 3. Faut-il traiter les épicondylites latérales ? Quid de
faible niveau de vie semble être un facteur de risque [2,3]. Pour Aben l’évolution naturelle ?
et al., il existerait également un profil de personnalité à risque : les
personnes moins sociales, moins au contact de leurs collègues au La plupart des épicondylites latérales régressent spontanément
travail, plus perfectionnistes, plus anxieuses et moins autonomes sans traitement avec un délai variant de 1 à 2 ans [3,21]. Les
seraient ainsi plus exposées [13]. publications comparant un traitement, quel qu’il soit, à l’évolution
naturelle, sont particulièrement rares. Il est ainsi difficile d’établir
si les traitements que l’on propose à l’heure actuelle sont efficaces
2. Le diagnostic et ses pièges ou s’ils ne font qu’accompagner une pathologie dont l’évolution est
spontanément favorable. Smidt et al. ont publié une étude prospec-
Le diagnostic est évoqué devant la présence de douleurs du ver- tive randomisée incluant 3 groupes de patients [22]. Ils comparent
sant latéral du coude irradiant souvent vers la partie distale de ainsi des patients traités par infiltration de cortiocostéroïdes, des
l’avant-bras. Le patient se plaint fréquemment d’une diminution de patients pour lesquels des soins de rééducation ont été réalisé et
sa force de préhension le gênant pour ses activités sportives mais des patients « wait and see » pour lesquels aucun traitement par-
également pour les gestes du quotidien. Cliniquement, une dou- ticulier n’était mis en route en dehors d’antalgiques simples et
leur élective à la palpation de l’épicondyle latéral est quasiment d’anti-inflammatoires non stéroïdiens à la demande. À un an de
constamment retrouvée. Une douleur des masses musculaires épi- recul, les résultats du traitement rééducatif sont à peine supérieurs
condyliennes juste en aval de ce point est fréquente. Une douleur à au traitement « wait and see ». Les auteurs recommandent de ne
l’extension contrariée du poignet est recherchée. Le test de Thom- pas intervenir en dehors des patients souhaitant un résultat rapide.
sen cherche à reproduire la douleur en réalisant une extension du Quelques années plus tard, Bisset et al. ont publié un article dont
poignet contre résistance en appuyant à la face dorsale du 3e méta- l’étude avait un protocole similaire à celui de Smidt et al. À un an,
carpien. Pour cela, le patient est placé en antépulsion de l’épaule ils ne retrouvent pas de supériorité des groupes traités par infiltra-
à 60◦ , le coude en extension et en pronation et le poignet à 30◦ tion ou par kinésithérapie sur le groupe évoluant sans traitement
d’extension [14]. Le « Chair test », décrit par Gardner, reproduit éga- particulier [23].
lement la douleur en demandant au patient de porter une chaise, Plus récemment, une méta-analyse comparant le traitement
la main en pronation [15]. médical et l’absence de traitement a été rapporté par Sayegh et al.
Des radiographies du coude de face et de profil sont systéma- [24]. Pour ces auteurs, il n’y a pas de bénéfice démontré du trai-
tiquement réalisées. Elles seront le plus souvent normales. Elles tement médical. On reprochera néanmoins à cette dernière étude
permettent de dépister un diagnostic différentiel. Parfois, elles per- de mélanger l’ensemble des traitements médicaux dans leur ana-
mettront de mettre en évidence des calcifications sur le trajet des lyse, effaçant ainsi les éventuelles différences de résultat pouvant
tendons épicondyliens. L’échographie est l’examen de référence à exister entre les traitements médicaux eux-mêmes.
demander en première intention. Sa normalité permettra d’exclure L’ensemble de ces études permet au final de conclure qu’un
le diagnostic [16]. Selon les cas, elle mettra en évidence un épais- grand nombre d’épicondylites latérales peuvent évoluer favorable-
sissement ou, à l’inverse, un amincissement du tendon, des lésions ment de manière spontanée. La plus grande prudence doit être de
fissuraires ou des calcifications. Le doppler en mode puissance rigueur avant la mise en route d’un traitement, quel qu’il soit. Des
recherchera une néovascularisation (hyperhémie). L’IRM est plus études mieux ciblées sur certains traitements médicaux incluant
reproductible et moins opérateur dépendant que l’échographie des groupes témoins sont à ce jour indispensables.
H. Lenoir et al. / Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 105 (2019) S45–S51 S47
4. Les bases de la physiothérapie récemment, Olaussen et al. retrouvent également de moins bons
résultats à 26 semaines chez des patients ayant eu une infiltration
Il est classique de proposer un traitement rééducatif comme de corticoïdes en comparaison à un groupe de patient ayant eu une
traitement de première intention des EL. Les programmes injection placebo de sérum salé isotonique et un groupe de patient
d’étirement font partis des exercices les plus souvent réalisés. Les contrôle [42]. Pour d’autres auteurs, ces infiltrations de corticoïdes
données de la littérature sont pourtant pauvres à ce sujet. Bisset seraient un facteur de risque d’échec du traitement médical [43].
et al., lors de leur revue de la littérature avec méta-analyse, ne Degen et al. retrouvent de leur côté que la réalisation de plus de
parviennent pas à donner de recommandations sur leur utilisation 3 infiltrations de corticoïdes est le facteur de risque d’échec le plus
[25]. À l’inverse, il semblerait que les méthodes de mobilisation important en cas de traitement chirurgical [44]. Si l’on compare
apportent un bénéfice qu’il s’agisse de mobilisation avec mouve- ces infiltrations de corticoïdes aux infiltrations de PRP, on constate
ments, de manipulation de type Mill ou de mobilisations régionales également que les meilleurs résultats initiaux observés pour les
[26]. Le travail de renforcement excentrique des épicondyliens corticoïdes s’inversent avec le temps au profit des PRP [45–49].
semble également bénéfique. Cullinane et al. recommandent dans Les résultats des injections de PRP sont aujourd’hui en cours
leur revue de la littérature ce type de rééducation sur la base de d’évaluation. Les résultats ne sont pas unanimes selon les études.
2 études jugées de bonne qualité dans lesquelles les patients ayant Ainsi, Murray et al., en retenant 6 articles lors de la réalisation
bénéficié de cette prise en charge avaient un meilleur résultats d’une revue de la littérature, plaident en faveur de leur utilisa-
que ceux n’ayant pas réalisé ce renforcement [27]. Les massages tion [50]. Ces 6 articles ont également été retenus dans la revue
transverses profonds font partis de la plupart des protocoles de de la littérature de De Vos et al. [51] qui avaient également inclus
rééducation en cas d’EL. La revue de la littérature de Brosseau et al. un septième article [52]. De façon surprenante, leurs conclusions
n’a pourtant pas permis de démontrer leurs bénéfices [28]. sont complètement opposées à celles de Murray et al. ! Depuis ces
Bien qu’elles occupent une part croissante dans de nombreux revues de littérature, Lim et al. ont montré dans une étude pros-
cabinets de rééducation, la plupart des équipements utilisant des pective randomisée incluant 156 patients que la réalisation d’une
moyens physiques pour rééduquer les patients atteints d’EL n’ont infiltration de PRP apportait de meilleurs résultats sur la douleur
pas fait la preuve de leur efficacité. Ainsi, il n’est à ce jour pas et le MEPS (Mayo Elbow Performance Score) que la réalisation d’un
possible de conclure que les ondes de choc, le laser, la stimu- traitement basé sur un protocole de rééducation [53]. On repro-
lation électrique de basse fréquence, les ultrasons ou encore les chera néanmoins aux auteurs de ne pas préciser la nature de ce
champs électromagnétiques pulsés puissent avoir un effet théra- protocole. Parallèlement, il a été évoqué que l’aiguille en soit pou-
peutique [25,29,30]. À l’inverse, il paraît difficile d’être affirmatif vait avoir un effet thérapeutique en dehors de la nature du produit
sur leur inefficacité puisque les doses ainsi que les fréquences qui était injectée. Ainsi, Uygur et al. ont montré que les techniques
d’utilisation ne sont pas univoques selon les protocoles utilisés. de « Dry needling » consistant à piquer par une aiguille la zone
Parmi ces moyens physiques, seuls les lasers à basse dose [31,32] et douloureuse de l’épicondyle permettait d’améliorer les résultats à
à haute dose [33,34] semblent montrer une efficacité dans la prise 6 mois de recul en comparaison d’un groupe de patient n’ayant pas
en charge des EL. reçu ce traitement [54]. L’influx vasculaire et la réponse cicatricielle
Les données de la littérature concernant l’usage d’orthèses sont permettrait d’expliquer l’amélioration clinique observée chez ces
pauvres voire absentes. Aucune efficacité n’a été démontrée concer- patients. Au final, seule l’étude de Mishra et al. permet de réelle-
nant les orthèses de poignet, d’avant-bras ou encore les bracelets ment évaluer l’effet thérapeutique des PRP puisqu’ils ont comparé
de contention des épicondyliens. Les rares études publiées ne rap- dans une étude multicentrique randomisée incluant 230 patients
portent le plus souvent qu’une simple comparaison de ces attelles l’effet d’une injection de PRP avec la réalisation d’une simple ponc-
entre elles sans que l’on puisse savoir si elles ont un intérêt par tion sans injection [55]. À 24 semaines de l’inclusion, les douleurs
rapport à un groupe témoin [35–37]. Quelques études prospec- étaient alors moins importantes dans le groupe de patients ayant
tives randomisées ont en revanche été récemment publiées pour reçu des PRP.
évaluer le taping. [38–40]. Ces publications souffrent pourtant de Parallèlement à l’essor des PRP, les infiltrations de sang auto-
problèmes méthodologiques et de faibles nombres de cas inclus. logue ont également vu le jour pour le traitement de ces EL.
Elles n’évaluent pas les résultats à moyen et surtout à long terme. Bien que les publications soient moins nombreuses à ce sujet, on
Les résultats rapportés par les différents auteurs sont divergents. retiendra qu’à moyen et long terme, les études montrent que ces
Comme le rappellent Tang et al. dans leur revue de la littérature, injections sont plus efficaces que les corticoïdes et semblent équi-
l’acupuncture semblerait apporter quelques effets positifs dans la valentes aux PRP [56–59]. L’utilisation de la toxine botulinique
prise en charge des EL [41]. Pour autant, les niveaux de preuve doit en revanche probablement être abandonnée dans cette indica-
sont faibles et il paraît difficile de conclure sur leur intérêt avec tion puisque ses effets controversés semblent être de courte durée
les données dont nous disposons à ce jour. et s’accompagnent quasi systématiquement d’une faiblesse invali-
dante des tendons extenseurs [60–62].
consistant à réséquer le tissu fibreux dégénératif [63]. Kroslak et 7. Quel traitement chirurgical proposer ?
Murrell ont montré que la réalisation d’un simple abord chirurgi-
cal sans réaliser cette étape de résection pouvait donner les mêmes L’intervention de Boyd et Mac Léod [80], consistant à exciser la
résultats [64]. partie proximale du ligament annulaire et à libérer l’enthèse des
La méta-analyse de Buchbinder et al. ne permettait d’établir épicondyliens, fut la première technique à être largement diffusée.
aucune conclusion sur l’efficacité du traitement chirurgical sur Elle a progressivement laissé sa place à l’intervention de Nirschl et
la douleur [65]. Les auteurs rappelaient que les études retenues Pettrone consistant à réséquer le tissu fibreux dégénératif au niveau
étaient très hétérogènes avec de petits échantillons et qu’elles de l’enthèse des épicondyliens [63]. La décortication réalisée pen-
étaient toutes à haut risque de biais. dant cette chirurgie a peu à peu été mise de côté, car elle ne semble
Il n’y a pas eu à notre connaissance de publications comparant pas améliorer les résultats et augmenterait les douleurs postopé-
ces traitements chirurgicaux à l’évolution naturelle. Peu de publi- ratoires [81]. Parmi les techniques à ciel ouvert, la dénervation est
cations comparent le traitement chirurgical au traitement médical. une alternative moins connue mais semblant apporter des résul-
Ford et al. n’ont pas trouvé de différence en comparant rétros- tats encourageants [82]. Les microténotomies par radiofréquence
pectivement cette procédure de Nirschl et la mise en place d’un ont été présentées comme une alternative facile à réaliser. Elles
traitement par PRP [66]. Plus récemment, Karaduman et al. font une semblent donner des résultats équivalents aux techniques conven-
comparaison similaire et retrouvent de meilleurs résultats avec les tionnelles à ciel ouvert [83–85] et aux techniques arthroscopiques
infiltrations de PRP [67]. Dans une étude prospective randomisée [86].
comparant le traitement arthroscopique et les infiltrations de PRP, Baker a été le premier à présenter des résultats intéressants en
Merolla et al. retrouvent à 2 ans de recul des résultats plus encou- utilisant l’arthroscopie [87]. Les publications se sont ensuite mul-
rageant sur la force, la douleur et les scores fonctionnels pour le tipliées pour vanter ses mérites [72,79,88].
traitement chirurgical [68]. Parallèlement, le développement de la voie du mini-invasif s’est
Il ne semble donc pas possible à l’heure actuelle d’établir si le faite également au travers de techniques percutanées [74].
traitement chirurgical est en mesure de supplanter le traitement Naturellement, certains auteurs ont essayé de comparer ces
médical. En pratique, la détermination de facteurs de risque d’échec techniques pour déterminer le traitement le plus approprié. Ainsi,
du traitement médical pourrait apporter une aide dans le choix de Kim et al. ont comparé rétrospectivement le traitement à ciel ouvert
la décision opératoire. Ainsi, Knutsen et al. ont montré que l’âge, de 34 patients avec un traitement arthroscopique réalisé dans un
l’obésité, le tabagisme, la notion d’une sinistralité professionnelle, groupe de taille identique [89]. À un an de recul, ils retrouvent une
l’association avec un syndrome du tunnel radial, les antécédents meilleure force de préhension ainsi qu’une douleur moins impor-
d’injections de corticoïdes, de port d’attelle, les antécédents de chi- tante pour les patients traités en chirurgie à ciel ouvert. De la même
rurgies orthopédiques ainsi que l’usage de psychotropes étaient des manière, Kwon et al. ne retrouvent qu’une légère différence signi-
facteurs de risque d’échec du traitement médical [69]. Parmi ces ficative en faveur du ciel ouvert en ce qui concerne la douleur lors
facteurs de risque, il semblerait que l’âge, l’obésité, le tabagisme travaux de force [75]. Cette étude rétrospective incluant 59 cas
et les antécédents d’injection de corticoïdes soient aussi des fac- revus à plus de 2 ans de recul ne retrouvait en revanche aucune dif-
teurs de risque d’échec du traitement chirurgical [44]. Ainsi, il paraît férence concernant le quick DASH, la douleur au repos et à l’effort
difficile de sélectionner des « bons » candidats à la chirurgie. et la force de serrage sans douleur. À l’inverse, toujours dans une
Les complications postopératoires doivent également être étude rétrospective, Solhheinm et al. retrouvent un meilleur score
connues avant d’envisager un traitement chirurgical. Elles pour- de Quick-DASH pour leur 225 cas de traitement arthroscopique en
raient, en effet, paraître inacceptables si le résultat fonctionnel comparaison aux 80 cas traités à ciel ouvert [90]. Ils concluent néan-
d’une telle procédure ne peut être garanti. Pomerantz a réalisé à moins que les 2 techniques donnent de bons résultats. Peart et al.
ce sujet une revue de la littérature incluant au total 3436 cas [70]. ne retrouvent pas de différence de résultats entre ces 2 techniques
Le taux de complications y est de 3,3 %. Le risque serait plus impor- à l’exception d’un retour au travail plus précoce en cas de traite-
tant en cas de chirurgie à ciel ouvert (4,3 %) suivi des techniques ment arthroscopique [91]. Szabo et al. ont ajouté les traitements
percutanées (1,9 %) et arthroscopiques (1,1 %). percutanés au traitement arthroscopique et à ciel ouvert dans leur
Au final, l’intérêt du traitement chirurgical n’est pas clairement évaluation [92]. Les résultats sont comparables pour ces 3 traite-
établi à ce jour. En pratique, il est pourtant souvent difficile de ne ments concernant la douleur et le score de Andrews et Carson.
rien proposer à des patients en attente d’une solution, d’autant plus Othman présente une étude prospective comparant 14 cas trai-
que les publications prônant les bénéfices de diverses techniques tés par arthroscopie et 19 cas traités en percutané [76]. Les résultats
opératoires ne manquent pas [63,71–76]. semblent meilleurs pour le traitement arthroscopique pour le
Pour nos organismes payeurs, il pourra être proposé en cas DASH, la douleur et la satisfaction. Pour autant, aucune différence
d’échec complet du traitement médical évoluant depuis plus d’un significative ne semble apparaître. Dunkow et al. présentent une
an [77]. En réalité, les auteurs traitant de ce sujet évoquent plutôt étude prospective randomisée comparant le percutané et traite-
une limite de 6 mois après l’apparition des premiers symptômes ment à ciel ouvert : la récupération y était significativement plus
[63,71,78]. En pratique, cela concernerait entre 4 et 7,2 % des rapide et la reprise du travail se faisait 3 semaines plus tôt si le
patients [63,71]. Toute la difficulté de cette indication repose sur traitement percutané avait été réalisé [93]. Une reprise précoce
le fait d’éviter d’opérer à tort certains patients. À l’inverse, il des activités professionnelles à 3 mois est retrouvée par Carlier
faut également éviter que le patient ne « s’enferme » dans une et al. après traitement percutané sous échographie associé à une
maladie chronique couteuse qui peut avoir des conséquences socio- injection de PRP [94].
professionnelles désastreuses. Dans tous les cas, il sera fondamental Pierce et al. ont enfin réalisé une revue de la littérature incluant
que le patient ait connaissance de l’ensemble de ces aspects. La plu- un total de 848 cas traités à ciel ouvert, 578 traités sous arthro-
part des EL évoluant spontanément de manière favorable [3,21,22], scopie et 178 traités en percutané [95]. Les traitements percutanés
le traitement chirurgical a pour principal objectif de réduire la donnaient de moins bons résultats concernant le DASH alors que
durée des symptômes d’une pathologie dont on ne connaît pas le le traitement à ciel ouvert était associé à des douleurs plus impor-
profil évolutif pour un patient donné. Le bénéfice après traitement tantes. La satisfaction était en revanche comparable quel que soit le
chirurgical ne sera pas immédiat : une amélioration significative traitement utilisé. Le taux de complications était également simi-
des douleurs peut être attendue à partie de 3 mois après la chirurgie laire entre les groupes bien qu’il y ait eu plus d’infection pour les
[79]. chirurgies à ciel ouvert.
H. Lenoir et al. / Revue de chirurgie orthopédique et traumatologique 105 (2019) S45–S51 S49
Au final, aucun traitement chirurgical ne semble à ce jour réelle- with possible implications regarding the etiology of lateral epicondylitis. J Hand
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repose sur la réalisation d’une rééducation adaptée dans laquelle [12] Arrigoni P, Cucchi D, D’Ambrosi R, Butt U, Safran MR, Denard P, et al. Intra-
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un travail de renforcement des épicondyliens doit être réalisé. Un Knee Surg Sports Traumatol Arthrosc 2017;25:2255–63.
travail complémentaire de mobilisation, de stretching et de mas- [13] Aben A, De Wilde L, Hollevoet N, Henriquez C, Vandeweerdt M, Ponnet K,
sages transverses profonds peut y être associé. Les ondes de choc, le et al. Tennis elbow: associated psychological factors. J Shoulder Elbow Surg
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laser, la stimulation électrique de basse fréquence, les ultrasons ou
[14] Brummel J, Baker 3rd CL, Hopkins R, Baker Jr CL. Epicondylitis: lateral. Sports
encore les champs électromagnétiques pulsés n’ont pas démontré Med Arthrosc Rev 2014;22:e1–6.
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Le patient devra être informé de l’évolution naturelle de cette associations of MR imaging and clinical assessments with treatment options
pathologie qui rentre habituellement dans l’ordre en 1 à 2 ans. in patients receiving conservative and arthroscopic managements. Eur Radiol
Le traitement chirurgical sera envisagé chez un patient en échec 2018;28:972–81.
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