Nantissement Du Fonds de Commerce
Nantissement Du Fonds de Commerce
Nantissement Du Fonds de Commerce
DU FONDS DE COMMERCE
Etant donné que le fonds de commerce est un bien distinct des éléments qui le composent, on
peut alors imaginer une sûreté basée sur cet ensemble, garantissant ainsi le crédit à long et
moyen terme consenti à l’entreprise ou au commerçant.
Généralement, le fonds de commerce a une valeur marchande considérable qui peut constituer
un gage sérieux, et donc un élément de crédit pour son propriétaire commerçant.
Le nantissement du fonds de commerce est un contrat par lequel le fonds se trouve affecté à la
garantie de remboursement des dettes contractées par le commerçant pour le besoin de son
commerce.
Autrement dit, c’est l’acte qui met en gage le fonds de commerce, à titre de sûreté, pour garantir
le remboursement de crédit aux créanciers nantis.
La définition est presque identique à celle du gage avec la seule différence que le gage porte sur
des biens corporels, tandis que le nantissement concerne des biens meubles incorporels.
En matière mobilière, le gage implique la remise de la chose gagée au créancier, ce qui aura pour
conséquence de priver le commerçant de l’exploitation de son fonds de commerce.
Pour y remédier, le législateur a prévu que le nantissement du fonds de commerce peut être
réalisé sans que le commerçant ne soit dépossédé de son fonds de commerce.
Grâce donc à cette forme de sûreté, le propriétaire du fonds peut se procurer un crédit tout en
poursuivant l’exploitation, garanti par la valeur de son fonds. Le commerçant demeure de ce fait
à la tête de son fonds et l’exploite librement.
Le nantissement du fonds se présente donc comme une forme de gage sans dépossession dans
la mesure où le propriétaire poursuit son activité comme objectif premier l’acquittement de la
dette.
Il existe plusieurs formes de nantissement, dont le nantissement conventionnel et le
nantissement judiciaire du fonds de commerce, le nantissement du matériel et de l’outillage, ou
encore le nantissement du fonds de commerce virtuel.
LE NANTISSEMENT CONVENTIONNEL
Le nantissement du fonds de commerce est régi par les dispositions des articles 106 et suivants
de la loi n°15-95 formant code de commerce.
Il est le résultat d’un accord entre le prêteur et le commerçant emprunteur.
« Sont seuls susceptibles d’être compris dans le nantissement les éléments énumérés à
l’article 80 à l’exclusion des marchandises. » Article 107 du code de commerce.
Ainsi, peuvent être compris dans le nantissement du fonds de commerce, tous les biens
nécessaires à l'exploitation du fonds tels que le nom commercial, l’enseigne, le droit au bail, le
mobilier commercial, le matériel et l'outillage, les brevets d'invention, les licences, les marques
de fabrique, de commerce et de service, dessins et modèles industriels et, généralement, tous
droits de propriété industrielle, littéraire ou artistique qui y sont attachés, en plus de la
clientèle, et de l'achalandage.
« Si l’acte qui le constitue ne désigne pas expressément les éléments compris dans le
nantissement, celui-ci comprendra alors le nom commercial, l’enseigne, le droit au bail, la
clientèle et l’achalandage. » Article 107 du code de commerce.
Ces éléments incorporels essentiels ordinaires sont donc nantis de plein droit sans qu’il soit
nécessaire de le préciser dans l’acte.
Le nantissement peut également comprendre les succursales du fonds de commerce.
Une succursale est un établissement secondaire, jouissant d'une certaine autonomie, dans lequel
se traitent des opérations commerciales avec la clientèle. Elle constitue un fonds de commerce
distinct du fond principal et peut être nantie isolément.
Le nantissement du fonds principal ne s'étend pas, de plein droit, aux succursales. Pour être
comprise dans le nantissement, la succursale doit être désignée, dans l'acte constitutif, avec
indication de son adresse.
Des modifications ultérieures peuvent parvenir.
Si le fonds s’agrandit d’un élément nouveau. C’est le cas lorsque l’entrepreneur qui était
propriétaire des locaux lors de la signature de l’acte devient locataire ce qui fait apparaître
un droit au bail. S’il était déjà prévu que les éléments futurs feront partie du
nantissement, alors tel sera le cas.
Si la modification porte sur le contenu d’un élément. C’est le cas lorsque le matériel
d’origine est remplacé par un autre. Le nantissement frappe alors l’élément dans son
nouveau contenu comme il le frappait dans l’ancien.
Il arrive aussi qu’un élément disparaisse complètement par la suite. La loi accorde dans
cette hypothèse une certaine précaution aux créanciers inscrits.
*Les marchandises
Elles sont expressément exclues par l’article 107 du code de commerce, suivant le fait qu’elles
sont prévues pour la vente. Les intégrer dans la garantie risque de mettre en péril les intérêts
de l’entreprise dans la mesure où elles revêtent un caractère d’instabilité, vu qu’elles sont
destinées à la vente.
Les marchandises ont été exclues de l’assiette du nantissement pour maintenir un actif libre au
débiteur et lui laisser une possibilité de crédit auprès de ses fournisseurs.
Ces derniers sont ainsi sûrs que leurs fournitures ne tomberont pas sous le coup d’une sûreté
prise par un autre créancier.
Les marchandises constituent un capital qui est appelé à circuler et qui est réservé au crédit à
court terme.
Cette explication permet de comprendre la différence entre l’assiette du privilège du vendeur,
qui inclut les marchandises et l’assiette du nantissement qui les exclut.
*Les créances et contrats
Ils peuvent toutefois faire partie du nantissement si les intéressés décident de les inclure par voie
contractuelle. Ils seront régis alors par les règles de droit commun.
*Les livres de commerce et la correspondance
Ils ne font pas partie du fonds en principe. L’article 22 de la loi n°9-88 relative aux obligations
comptables des commerçants stipule que les documents comptables et les pièces justificatives
sont conservés pendant dix (10) ans.
*Le mobilier personnel de l’habitation du débiteur
L’article 80 du code de commerce cite parmi les éléments du fonds le mobilier commercial
uniquement et non personnel.
*L’immeuble où le fonds de commerce est exploité
Il est soumis au droit foncier. Les droits qui le concernent doivent obligatoirement être inscrits
sur le livre foncier pour qu’ils puissent produire valablement leurs effets.
Si l’exploitant du fonds est en même temps le propriétaire de l’immeuble, deux sûretés réelles
différentes doivent être prévues pour l’obtention d’un crédit. Celle relative à l’immeuble qui est
en réalité une hypothèque immobilière, ainsi que celle concernant le fonds de commerce qui est
un nantissement soumis au code de commerce.
En outre, puisque le nantissement ne peut porter que sur des biens qui sont la propriété du
débiteur, les biens loués par celui-ci, y compris en application d’un contrat de crédit-bail, ne
peuvent être nantis.
3. Conditions de forme et de publicité
Seul le propriétaire du fonds peut nantir celui-ci en garantie. Le constituant doit être propriétaire
du fonds de commerce et avoir la capacité de l’aliéner. Cette condition interdit notamment au
locataire-gérant de consentir un nantissement sur le fonds qu’il exploite, puisqu’il n’en est pas le
propriétaire.
Le nantissement du fonds de commerce suppose une créance valable. Si celle-ci est frappée de
nullité ou fictive, si elle est éteinte pour une cause quelconque, le nantissement est lui-même
nul. Mais peu importe que la créance soit antérieure ou postérieure à la sûreté, ou qu’elle soit
éventuelle ou conditionnelle.
Le contrat de nantissement doit être constaté par écrit authentique ou sous seing privé, dont le
contenu est librement déterminé par les parties.
L’écrit est considéré comme une condition de validité de l’acte et non à titre de simple preuve.
L’acte du nantissement doit être publié selon les mêmes modalités que la vente du fonds.
« Après enregistrement, l’acte doit être déposé, dans les quinze (15) jours, au secrétariat-
greffe du tribunal dans le ressort duquel est exploité le fonds ou le principal établissement du
fonds si le nantissement comprend des succursales.
Un extrait de cet acte est inscrit au registre du commerce, qui contient la date de l'acte, nom,
prénom et domicile du propriétaire du fonds et du créancier, l'indication des succursales et du
siège des succursales qui peuvent être comprises dans le nantissement. »
Article 83 du code de commerce.
Pour l’essentiel, il s’agit d’informer les tiers – ceux qui contracteront avec le propriétaire du fonds
nanti – que ce fonds est affecté prioritairement à la garantie d’autres créances que les leurs.
B- LES EFFETS DU NANTISSEMENT
Comme toute autre opération juridique, le nantissement du fonds de commerce produit certains
effets.
Le nantissement du fonds de commerce peut être considéré comme une sûreté peu intéressante.
En effet, le créancier est exposé à la mauvaise foi de son débiteur, qui peut aisément réduire la
valeur du bien grevé ou encore par sa mauvaise gestion.
En outre, lorsque la réalisation du nantissement est nécessaire, c’est-à-dire en cas de non-
paiement, le fonds s’est généralement déjà déprécié.
Si le fonds de commerce était prospère, le débiteur serait en mesure de payer sa dette.
*L’exigibilité anticipée des créances
Sous crainte de ne jamais être remboursé, les créanciers chirographaires peuvent saisir la
juridiction compétente afin de rendre leurs créances immédiatement exigibles si le risque couru
est vraiment réel.
Cette prérogative accordée aux créanciers antérieurs devient encore plus préjudiciable pour le
commerçant, elle risque indiscutablement de gêner les activités de ce dernier et la garantie du
créancier nanti.
Pour ce, le tribunal saisi n’est pas obligé d’en reconnaître automatiquement le bien fondé. Il
s’assure d’abord de l’existence et de la validité de la créance qui justifie la demande. Il s’attache
ensuite à vérifier le risque prétendu par le demandeur et à en apprécier l’importance.
C’est seulement quand il est convaincu du caractère raisonnable de la crainte du demandeur
qu’il condamne le commerçant à lui payer son dû, en décidant l’exigibilité immédiate visée par
l’avant dernier alinéa de l’article 111 du code de commerce.
*La résiliation du bail
Il s’agit d’un autre risque important encouru par le créancier privilégié sur le fonds de commerce.
Le droit au bail représente un élément très important du fonds de commerce. Il arrive que le
propriétaire de l’immeuble dans lequel est exploité le fonds désire mettre fin au contrat de
location qui l’engage à l’égard du commerçant. Il agit normalement dans ce but lorsque le
locataire ne respecte pas ses obligations de paiement du loyer.
« Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l’immeuble dans lequel est exploité un
fonds de commerce grevé d’inscriptions, doit notifier sa demande aux créanciers
antérieurement inscrits au domicile élu par eux dans leurs inscriptions.
Le jugement ne peut intervenir que trente (30) jours après la notification.
La résiliation amiable de bail ne devient définitive que trente (30) jours après la date de la
notification qui en a été faite aux créanciers inscrits au domicile élu. »
Article 112 du code de commerce.
A défaut de notification, les créanciers peuvent agir en dommages et intérêts contre le bailleur
et faire tierce opposition contre la décision ordonnant la résiliation du bail.
2. Effets à l’égard du propriétaire du fonds nanti
Dans le cadre d’un nantissement conventionnel, le créancier ayant inscrit un nantissement sur
un fonds de commerce en garantie d’une dette qu’a le propriétaire du fonds envers lui, appelé «
créancier nanti », « créancier inscrit » ou encore « créancier gagiste », peut se prévaloir de
certains droits.
*Droit de préférence
Il s’agit d’un droit au profit du créancier nanti qui lui permet de se faire payer sur le prix du fonds
avant les créanciers bénéficiaires d’un nantissement postérieur.
« Le rang des créanciers gagistes entre eux est déterminé par la date de leur inscription au
registre de commerce. » Article 110 du code de commerce.
En cas de concours de plusieurs créanciers nantis donc, leur rang entre eux se détermine par la
date d’inscription de leur nantissement, ceux l’ayant inscrit en premier étant payés avant les
autres.
Pour que les droits des créanciers soient opposables, l’inscription doit être antérieure au
jugement déclaratif de la faillite ou de la liquidation.
Néanmoins, le privilège du revendeur, tout comme celui du trésor public, du bailleur d’immeuble,
des créanciers ayant un droit de gage sur le matériel du fonds, et des frais de justice priment sur
celui du créancier nanti.
Le droit de préférence est indivisible. La totalité du prix du fonds de commerce grevé garantit la
totalité de la créance, contrairement à celui du revendeur du fonds de commerce qui exerce son
privilège distinctement sur les prix respectifs du matériel, des marchandises et des éléments
incorporels.
*Droit de suite
Il s’agit d’un droit qui permet au créancier nanti de suivre le fonds en quelques mains qu’il se
trouve, peu importe qu’il soit entre les mains du débiteur, du propriétaire de l’immeuble, d’un
acquéreur ou d’un sous-acquéreur du débiteur.
Le tiers acquéreur est en mesure de prendre les devants en s’acquittant du montant total de la
créance principale garantie par l’inscription.
Il est en mesure de faire usage de la procédure de purge en payant les créanciers nantis et ne
verser au vendeur que le reliquat du prix.
*Droit à l’information
Animé par le souci de garantir les droits du créancier nanti, la loi prévoit qu'il doit être informé
des évènements et opérations affectant le fonds de commerce et qui sont susceptibles de
compromettre sa valeur économique qui constitue la garantie de paiement de la créance.
La loi reconnait au créancier le droit d'agir afin de se prémunir contre les aléas susceptibles de
porter atteinte à ses intérêts en s'opposant à la dépréciation du fonds de commerce. Il s’agit
d’un droit qui s’applique sur toutes opérations susceptibles de menacer le recouvrement de sa
créance.
Le débiteur souhaitant déplacer son fonds de commerce doit aviser le créancier gagiste quinze
(15) jours au moins à l'avance, de son intention de déplacer le fonds et du nouveau siège qu'il
entend lui donner. Si le débiteur défaille dans cette obligation, le créancier gagiste est en plein
droit d’exiger le paiement immédiat de sa créance. Article 111 du code de commerce.
Le créancier nanti averti de la volonté de son débiteur de déplacer son fonds de commerce, peut
s’y opposer, s’il est établi que ce déplacement a pour effet de déprécier la valeur du fonds, et
réclamer par la suite le paiement immédiat de sa créance.
Si aucune opposition n’est faite, le créancier gagiste doit faire mentionner en marge de
l'inscription existante, le nouveau siège du fonds et, si le fonds a été transféré dans un autre
ressort, faire reporter à sa date l'inscription primitive avec l'indication du nouveau siège sur le
registre du tribunal de ce ressort.
En cas d'omission, le créancier peut être déchu de son privilège s'il est établi que par sa
négligence, il a causé un préjudice aux tiers induits en erreur sur la condition juridique du fonds
de commerce.
*La vente forcée du fonds en nantissement
Le créancier gagiste a le droit de faire ordonner la vente du fonds de commerce qui constitue
son gage. Il peut se prévaloir de ce droit huit (8) jours après sommation de payer, faite au
débiteur et au tiers détenteur, s'il y a lieu, demeurée infructueuse. La demande est portée devant
le tribunal dans le ressort duquel est exploité ledit fonds. Article 114 du code de commerce.
Le nantissement du fonds de commerce ne confère pas au créancier un droit de rétention.
Le créancier ne dispose en aucun cas du droit de se faire attribuer le fonds de commerce, mais
devra en provoquer la vente pour se faire payer.
« Le nantissement d'un fonds de commerce ne donne pas au créancier gagiste le droit de se
faire attribuer le fonds en paiement et jusqu'à due concurrence. » L’article 106 du code de commerce.
*La surenchère du dixième
Si les créanciers nantis ne sont pas satisfaits par l’offre du prix, ils sont en mesure d’intervenir
pour protéger leurs créances.
« Tout créancier inscrit sur un fonds de commerce peut requérir la mise aux enchères
publiques en offrant de porter le prix principal, non compris le matériel et les marchandises, à
un dixième (1/10) en sus et de donner caution pour le paiement des prix et des charges, ou de
justifier d’une solvabilité suffisante. » Article 123 du code de commerce.
Le créancier qui se déclare surenchérisseur doit offrir un prix au moins égal à celui déjà proposé
par un précédent acquéreur majoré de 10% sur la valeur des éléments incorporels.
LE NANTISSEMENT JUDICIAIRE
Tout créancier justifiant d’une créance qui paraît fondée en son principe et de circonstances
susceptibles d’en menacer le recouvrement peut demander au juge de l’autoriser à prendre une
inscription sur le fonds de commerce de son débiteur.
Il s’agit d’une mesure conservatoire demandée par un créancier qui cherche à assurer sa créance.
Elle permet de garantir les créanciers contre l’insolvabilité du commerçant débiteur.
Les créanciers chirographaires peuvent sous crainte de ne jamais être remboursé saisir la
juridiction compétente, afin de rendre leurs créances immédiatement exigibles si le risque couru
est vraiment réel.
Le juge apprécie les différents éléments de la situation.