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MAE – CAAE

Pierre-Yves ARDOY, maître de conférences en droit privé, UPPA

MAE – CAAE FORCO / FI COURS DE DROIT COMMERCIAL 2012-2013 Pierre-Yves ARDOY, maître de conférences en droit privé, UPPA PROPOS INTRODUCTIFS Le droit commercial est une branche du droit privé relative aux règles applicables aux relations commerciales. On le rattache au droit des affaires, plus vaste, qui réglemente l’activité et les rapports des entreprises, des industriels, des commerçants, dans l’exercice de leur activité professionnelle. Le droit des affaires regroupe un grand nombre de disciplines dont : - Le droit commercial : relatif aux règles générales des affaires (commerçants, actes de commerce, fonds de commerce, bail commercial…) - Le droit des sociétés : relatif à la forme sociale des entreprises (formation, fonctionnement, dissolution des sociétés) - Le droit des entreprises en difficultés ou droit des procédures collectives : procédures d’alerte, de sauvegarde, de redressement et de liquidation judiciaire. - Le droit cambiaire : relatif aux effets de commerce (lettre de change, billet à ordre…) - Le droit bancaire - Le droit financier, - Le droit de la concurrence - Le droit de la propriété industrielle - Etc… Ces différentes disciplines sont soit regroupées dans le Code de commerce (droit commercial, droit des sociétés, droit des entreprises en difficulté, droit de la concurrence…), soit font l’objet de Codes spécifiques (Code monétaire et financier, Code de la propriété intellectuelle, etc…). Il ne faut pas non plus négliger les règles du droit civil qui sont applicables dans bien des 1 situations (par exemple le droit commun des contrats, le droit des sûretés, les contrats spéciaux…). On peut dire que le droit des affaires est le droit qui organise et structure l’entreprise ellemême, mais aussi les rapports entre l’entreprise et son environnement socio-économique. Le droit commercial est un droit spécifique car il veut répondre aux exigences spécifiques de la vie des affaires : - Exigence de rapidité : Le droit commercial a pour but de faciliter la conclusion et l’exécution des opérations commerciales. Pour atteindre ce but, certaines règles viennent simplifier les rapports commerciaux (liberté de preuve des actes de commerce par exemple). - Exigence de sécurité : la rapidité des transactions ne doit pas se faire au détriment de la sécurité de ces transactions. Celles-ci ne peuvent se développer que si elles ne risquent pas d’être facilement contestées. Pour satisfaire cette exigence de sécurité, le droit commercial a développé des théories originales comme par exemple la théorie de l’apparence (qui protège celui qui, de bonne foi, s’est fié à la qualité annoncée d’une personne ou à l’apparence d’un document. Le droit cambiaire s’est ainsi construit sur cette exigence et il est seulement tenu compte de la signature apposée sur une lettre de change). Toujours pour satisfaire cette exigence de sécurité, le droit impose de nombreuses règles de publicité pour l’exercice de l’activité commerciale ainsi que pour certains actes (cession de fonds de commerce, modification des statuts d’une société…) - Exigence de crédit : Toute entreprise a besoin de crédit, qu’il soit fourni par un banquier (qui va accorder un prêt) ou par un fournisseur (qui va par exemple accorder des délais de paiement). Beaucoup d’institutions propres à la vie des affaires ont pour objet de favoriser l’octroi de crédit (par exemple l’escompte d’effet de commerce, les cessions de créances professionnelles, les différentes sûretés spécifiquement commerciales comme le nantissement de fonds de commerce…) Le cours de droit commercial se divisera en deux parties : la première sera consacrée aux acteurs de la vie des affaires (p.3), la seconde sera consacrée aux moyens de l’activité commerciale ou, du moins, à certains d’entre eux (p.38). Un plan général du cours se trouve à la fin, page 59. 2 PARTIE I: LES ACTEURS DE LA VIE DES AFFAIRES Les acteurs de la vie des affaires peuvent être des personnes physiques ou des personnes morales (sociétés). On parle également d'entreprise, mais l'entreprise n'ayant pas la personnalité morale, elle n'est pas un acteur à proprement parler. Elle est plutôt un ensemble de biens et de contrats organisés autour d'une activité pour développer celle-ci. Le principal acteur de la vie des affaires est le commerçant. Il peut d'ailleurs être une personne physique (entrepreneur individuel) ou une personne morale (société commerciale). Mais les commerçants ne sont pas les seuls acteurs: d'autres professionnels exercent leur activité dans des conditions proches (artisans, auto-entrepreneurs, agriculteurs), et des institutions viennent réguler ou animer la vie des affaires. On étudiera d'abord le commerçant (chapitre I) puis les autres acteurs (chapitre II, non traité). 3 CHAPITRE I – LE COMMERCANT Définition: le commerçant est celui qui accomplit des actes de commerce à titre de profession habituelle. Cette définition suppose de se pencher sur la notion d'acte de commerce. Nous étudierons tout d'abord les règles générales – le régime général du commerçant – (Section I), avant d'étudier le commerçant selon son mode d'organisation (entrepreneur individuel personne physique, ou société commerciale), - la personne du commerçant (Section II). Section I – Le régime général du commerçant L'article L.121-1 du Code de commerce pose que: « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ». Aucun critère n'est énoncé. Ainsi, l'inscription au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS) ne fait que présumer la qualité de commerçant jusqu'à la preuve contraire. Inversement, la personne répondant à la définition de l'article L.121-1 mais non inscrite au RCS pourra se voir appliquer les règles du droit commercial. Trois points sont à étudier: La notion de commerçant (§1) Les conditions requises pour exercer une activité commerciale (§2) Les obligations du commerçant (§3) 4 §1- La notion de commerçant Pour qu'une personne puisse être qualifiée de commerçant, elle doit faire des actes de commerce (A), le faire à titre de profession habituelle (B), et exercer cette profession de manière indépendante (C). A- L'accomplissement d'actes de commerce Le code de commerce donne un rôle important à la notion d'acte de commerce puisque la notion de commerçant se définit par rapport à celle-ci. Les articles L.110-1 et L.110-2 du Code de commerce donnent une liste d'actes de commerce. Toutefois, ces textes ne suffisent pas. Au cas par cas, la jurisprudence a dû énoncer des solutions. La doctrine a tenté de dégager des critères de l'acte de commerce (spéculation, circulation des richesses, entreprise) sans qu'aucun critère ne se soit avéré satisfaisant. On peut apprécier la notion d'acte de commerce soit de manière objective (l'activité ellemême) soit de manière subjective (c'est-à-dire du point de vue de celui qui réalise l’acte). - Approche objective de l’acte de commerce: On s’intéresse à l’objet de l’action, à l’opération économique dont l’acte est la traduction juridique, mais on ne s’intéresse pas du tout à la personne qui va effectuer cet acte. Par exemple l’achat de marchandises pour revendre avec ou sans transformation, les opérations de banque... - Approche subjective de l’acte de commerce: On considère selon cette vision, qu’un acte de commerce est l’acte accompli par un commerçant dans l’exercice de sa profession. C’est l’acte d’une entreprise commerciale. On s’intéresse au contexte et à la personne. Ce critère « subjectif » permet de déterminer le rattachement d’un acte à une entreprise commerciale. Autrement dit si une entreprise commerciale fait un acte il sera présumé être un acte de commerce, c'est-à-dire être accompli pour les besoins de l’entreprise. Ce sera donc à celui qui prétend que l’acte ait été accompli à des fins non professionnelles d’en rapporter la preuve. NB: Par « acte » on entend « acte juridique », c'est -à-dire une manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit. Il s'agit en premier lieu des contrats. Mais la notion d'acte de commerce peut parfois s'étendre aux « faits juridiques » (c'est-à-dire des événements volontaires ou non auxquels la loi va attacher des effets de droit mais sans que ces effets aient été recherchés par les personnes: par exemple la concurrence déloyale). 5 Les principaux actes de commerce accomplis par les commerçants sont les actes de commerce par nature (1). Quelques actes sont commerciaux quelle que soit la personne qui les réalise: ce sont les actes de commerce par la forme (2). La théorie de l'accessoire permet en outre d'étendre le domaine des actes de commerce à des actes non commerciaux mais qui sont accessoires à une activité commerciale ou à des actes de commerce (3). Enfin, il existe un cas où un acte est commercial pour une partie et civil pour l'autre: ce sont les actes mixtes (4). 1- Les actes de commerce par nature (ou en raison de leur objet) L'acte de commerce par nature est commercial en raison de son objet, c'est-à-dire que l'activité réalisée à travers ce type d'actes est qualifiée de commerciale en elle-même. En principe, la qualification d'acte de commerce par nature est réservée à des actes accomplis en entreprise, c'est-à-dire accomplis professionnellement par un commerçant. Un acte de commerce par nature peut toutefois avoir un caractère civil s'il est effectué par un professionnel non commerçant (civil) dans l'exercice de sa profession. L'acte sera alors civil par accessoire. En outre, un acte de commerce effectué par un non-commerçant de manière isolée n'est pas commercial. Il le deviendra toutefois si l'acte est répété. Le contentieux des actes de commerce par nature relève des tribunaux de commerce, même s'il est effectué par un non-commerçant. L'article L.110-1 du Code de commerce donne une liste des actes de commerce par nature. Cette liste montre qu'il s'agit des principales activités de la vie des affaires. Il est possible de regrouper les actes de commerce selon les activités. a) Les Activités de Distribution: L’achat pour revendre. La notion d’achat est tout mode d’acquisition à titre onéreux. Sont concernés le contrat de vente ou contrat d’échange (sont exclues les donations). L’exigence de revente est essentiel pour que l’on ait affaire à un acte de commerce il faut l’intention de revente au moment de l’achat. Exemple: achat de marchandises pour les revendre au détail. Les activités de production ne sont pas des activités commerciales (activités agricoles ; élevage, pêche, culture et vente des produits issus de cette activité sont des activités civiles). L’extraction et la vente des produits d’une carrière sont des activités civiles (mais pas les mines). La production intellectuelle est toujours une activité civile (auteurs, artistes, inventeurs et aussi les 6 membre de profession libérale) b) Les activités des intermédiaires du commerce. La notion d’intermédiaire a une acception très large car elle englobe tout ceux qui concourent à la distribution. Plus précisément sera un intermédiaire celui qui, en échange d’une rémunération va aider les vendeurs et les acheteurs dans la conclusion de leurs opérations. Exemple 1: les mandataires ou agents commerciaux. Le mandataire est celui qui passe un acte juridique(qui conclue un contrat) au nom et pour le compte d’autrui. Il représente le donneur d’ordre(le mandant) dont il ne dissimule pas l’identité. Lorsque le mandataire est un professionnel indépendant qui a pour fonction habituelle de représenter les commerçants dans leurs affaires on l’appelle alors agent commercial. Exemple 2: les courtiers, mettent en rapport des personnes qui ne se connaissent pas et qui désirent contracter. b) Les activités industrielles Il s'agit des « entreprise de manufacture » au sens de l'article L110-1). Ce sont les entreprise de transformation des matières premières mais également les activités de construction, d’assemblage, de réparation. L’idée derrière l’activité industrielle c’est la transformation de matériel au sens large qui inclut l’amélioration ou la remise en état d’une chose mobilière ou immobilière. c) Les activités de services (le secteur tertiaire) Trois activités précises sont citées par l'article L.110-1: la location de meubles, l'entreprise de transports, l’entreprise de fournitures, d’agences, bureau d’affaires, spectacle public. D’une manière générale, toutes les activités de services sont des activités commerciales à deux exclusions près: la location d’immeubles et les professions libérales. d) Les Activités Financières D’une manière générale, quand il est question du commerce de l’argent, l’activité financière est une activité commerciale. Rentrent dans cette catégorie:   les activités financières les opérations de banque telles que définies à l'article L.311-1 du Code monétaire et financier: « Les opérations de banque comprennent la réception de fonds du public, les opérations de crédit, ainsi que les services bancaires de paiement. »  les opérations de bourses qu’il s’agisse des bourses de valeurs (actions, valeurs 7 mobilières) ou des bourses sur les marchandises (matières premières)  les opérations d’assurances. 2- Les actes de commerce par la forme Ce sont les actes qui sont commerciaux quelle que soit la personne qui les réalise, qu'ils soient faits professionnellement par un commerçant ou qu'ils soient faits isolément par un noncommerçant. Dans tous les cas ils seront soumis au droit commercial. Ces actes sont peu nombreux: a) La lettre de change C'est un ordre donné par un créancier (que l'on appelle le tireur) à son débiteur (le tiré) de payer une certaine somme d'argent à une certaine date à un tiers (le bénéficiaire). Toute personne qui signe une lettre de change se soumet aux règles du droit commercial et à la compétence des tribunaux de commerce, même si elle n'est pas commerçante. Cette solution ne vaut pas pour les autres moyens de paiement (notamment le chèque): pour ceux-ci, le signataire ne s'oblige commercialement que s'il signe pour les besoins de son commerce. b) Les sociétés commerciales La loi considère que la plupart des formes commerciales de sociétés donnent le caractère commercial à la société qui se constitue sous l'une de ces formes, même si son activité est civile. Les sociétés commerciales seront décrites plus loin lorsque l'on étudiera la personne du commerçant. 3- Les actes de commerce par accessoire La théorie de l'accessoire permet d'unifier le régime juridique applicable à certaines opérations. Un principe général énonce en effet que l'accessoire suit le sort du principal. En application de cette théorie, un acte en principe civil va devenir commercial s'il est accompli par un commerçant ou s'il se rattache à une activité commerciale. Cela permet d'étendre le champ de la commercialité. Ainsi tous les actes effectués par un commerçant pour les besoins de son commerce seront qualifiés d'actes de commerce. Il y aura présomption de commercialité. 8 Par exemple, s'il s'agit d'un contrat, il faudra qu'il ait été conclu pour les besoins du commerce (par exemple le commerçant qui fait poser un système d'alarme dans ses locaux ou qui s'équipe en informatique pour la gestion de son commerce). En outre la théorie de l'accessoire s'applique également aux obligations délictuelles comme par exemple l'action en concurrence déloyale. 4- Les actes mixtes L'acte mixte est un acte qui est commercial pour une partie et civil pour l'autre. Tous les actes de commerce par nature ou par accessoire peuvent ainsi être des actes mixtes. Exemple d'acte mixte: Une personne non commerçante propriétaire d'un local va louer ce local à un commerçant qui va y exercer son activité commerciale. L'acte sera civil pour le bailleur, commercial pour le locataire. La difficulté concernant l'acte mixte est de savoir quelles sont les règles de droit applicables: va-t-on appliquer les règles du droit commercial ou les règles du droit civil? Principe: La jurisprudence applique les règles de droit de manière distributive: en principe le droit commercial s'applique à la partie qui est commerçante et le droit civil s'applique à la partie qui ne l'est pas. Ce principe joue en matière de preuve: pour prouver un contrat, le commerçant sera soumis aux règles du droit civil (articles 1341 et suivants du Code civil: preuve écrite pour tout acte supérieur à 1500 €), alors que le civil bénéficiera des règles du droit commercial (article L.110-3 du Code de commerce: preuve libre). Exemple: lecture de l'arrêt rendu par la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation le 2 mai 2001 (voir ci-après). Le cocontractant civil a cependant toujours le choix: il peut se soumettre aux règles du droit commercial si c'est son intérêt. Exceptions: Le principe connaît d'importantes exceptions. Tout d'abord les règles de compétence territoriales et les clauses compromissoires sont nulles dans les actes mixtes (voir plus loin pour ces notions). Ensuite le régime particulier de l'acte mixte s'efface dès lors que le droit de la consommation a vocation à s'appliquer. 9 Cour de cassation, chambre civile 1 Audience publique du mercredi 2 mai 2001 REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Attendu que Mlle X..., venant d'acquérir un fonds de commerce pour l'exploiter, a signé le 20 juin 1984, en faveur de M. Y..., alors son concubin, une reconnaissance de dette de 440 000 francs qui indiquait que cette somme était prêtée pour l'acquisition du fonds ; qu'en 1995, celui-ci a assigné en remboursement Mlle X..., qui s'est opposée à la demande en contestant avoir reçu la somme litigieuse ; Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu l'article 109 du Code de commerce devenu l'article L. 110-3 dudit Code ; Attendu que l'article 1326 du Code civil ne s'applique pas lorsqu'il s'agit à l'égard de commerçants de prouver des actes de commerce, lesquels, conformément à l'article L. 110-3 du Code de commerce peuvent se prouver par tous moyens, à moins qu'il n'en soit autrement décidé par la loi ; Attendu que pour débouter M. Y... de sa demande, l'arrêt attaqué retient, après avoir relevé que les règles du droit commercial étaient applicables à l'égard de Mlle X... et que l'acte était revêtu de sa signature, que ce titre, irrégulier au regard de l'article 1326 du Code civil, n'avait aucune force probante ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Sur la deuxième branche : Vu l'article 1315, alinéa 1er, du Code civil ; Attendu, qu'à l'appui de sa décision, la cour d'appel a retenu également que M. Y..., qui ne justifiait ni du versement des fonds, ni de leur origine, n'établissait pas la cause de l'obligation dont il réclamait l'exécution ; Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé le texte susvisé ; Et sur la troisième branche : Vu l'article 1341 du Code civil ; Attendu que dans un acte mixte, les règles de preuve du droit civil s'appliquent envers la partie pour laquelle il est de caractère civil ; Attendu que la cour d'appel ayant fait ressortir que l'acte n'avait pas un caractère commercial à l'égard de M. Y..., instructeur pilote, en relevant qu'aucune société de fait ne s'était créée entre lui et Mlle X..., a admis que le non-versement des fonds prétendument prêtés pouvait se déduire de ce que celle-ci établissait par une déclaration fiscale et par des attestations que le fonds du commerce avait été acheté avec des fonds d'une autre provenance ; Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. Y... de sa demande en paiement fondée sur la reconnaissance de dette du 20 juin 1984, l'arrêt rendu le 5 octobre 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes. 10 B- L'exercice à titre de profession habituelle Le commerçant est celui qui exerce une activité à titre professionnel et de manière habituelle. Les actes de commerce doivent tout d'abord être accomplis dans le cadre d'une profession. Cela signifie que celui qui fait des actes de commerces doit en tirer ses revenus. Il faut donc une activité présentant une continuité suffisante pour permettre d'en retirer les moyens ou une partie des moyens nécessaires à l'existence (par exemple Cass. Com. 1er octobre 1997, RTD Com. 1998 p.131). Cette activité doit être réelle. Peu importe qu'elle soit clandestine ou même illicite. Il y aura acquisition de la notion d’habitude dès lors qu’il y aura répétition de ces actes. Autrement dit un acte isolé ou le même acte fait de manière épisodique ne sont pas suffisants pour caractériser l’habitude. Il y a une véritable exigence de continuité d’exploitation. Il n'est pas nécessaire toutefois que la profession commerciale soit exclusive ou principale, le cumul avec une autre profession est possible, excepté dans les cas d'incompatibilité (cf. infra). C- L'exercice à titre indépendant C'est une condition ajoutée par la jurisprudence. Ne sera commerçant que celui qui agira de manière indépendante et personnelle. Pour être commerçant il faut une totale autonomie dans l’exercice du commerce. Le critère est celui du pouvoir de s’engager juridiquement sur son patrimoine personnel. Le salarié ou le mandataire ne peuvent donc pas être, selon ce critère, considérés comme des commerçants. Le salarié ne fait pas de commerce de manière indépendante (puisqu'il est subordonné à son employeur). Le mandataire est lié par le contrat mandat (contrat par lequel agit au nom et pour le compte d’un donneur d’ordre -mandant-, et tant qu’il reste dans la limite de sa mission, il ne s’engage jamais personnellement). Sont donc commerçants en raison de leur activité ceux qui font des actes de commerce à titre de profession habituelle mais à condition qu’ils le fassent à titre personnel et indépendant. Les commerçants sont donc ceux qui accomplissent des actes de commerce de manière habituelle, dans un cadre professionnel, et de manière indépendante. 11 §2- Les conditions requises pour exercer une activité commerciale Le droit commercial est dominé par le principe de la liberté du commerce et de l'industrie proclamé par le décret d'Allarde des 2 et 17 mars 1791. Le Conseil constitutionnel a reconnu une valeur constitutionnelle à ce principe dans une décision du 16 janvier 1982. On déduit du décret d'Allarde le principe de la liberté d'entreprendre. Malgré ce principe de liberté, le droit prévoit toutefois certaines conditions et exceptions. Le droit français réserve ainsi la possibilité de devenir commerçant aux personnes qui remplissent certaines conditions (A) et apporte des restrictions concernant certaines activités qui sont interdites ou soumises à conditions (B). A- Les conditions tenant aux personnes Toutes les personnes ne peuvent pas exercer une activité commerciale. Il faut en effet tenir compte des restrictions diverses. 1- Le principe de l'interdiction pour les personnes incapables protégées Les incapacités ont pour but de protéger les mineurs et les personnes dont les facultés mentales sont altérées. L'exercice d'une activité commerciale est en effet dangereux pour le patrimoine des personnes et doit donc être réservé aux personnes juridiquement capables. Les incapables sont les mineurs (a) et les majeurs protégés (b). a) Les mineurs La loi du 5 juillet 1974 a fixé la majorité à 18 ans et a permis l'émancipation à partir de 16 ans. Si en principe le mineur émancipé peut faire tous les actes de la vie civile, l'article L. 121-1 du code de commerce disposait jusqu'à la loi du 15 juin 2010 que le mineur, même émancipé, ne pouvait pas être commerçant. Dorénavant, le texte dispose que: « Le mineur émancipé peut être commerçant sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d'émancipation et du président du tribunal de grande instance s'il formule cette demande après avoir été émancipé. » 12 Sanction: le mineur pourra se prévaloir de son incapacité pour éviter l'ouverture d'une procédure collective ou la compétence du tribunal de commerce. Il pourra même demander la nullité de l'acte accompli, à condition de prouver qu'il a été victime d'une lésion (c'est-à-dire un déséquilibre économique objectivement constaté entre les prestations au contrat). b) Les majeurs protégés La loi distingue quatre régimes de protection du plus lourd au plus léger: la tutelle, la curatelle, la sauvegarde de justice, le mandat de protection future (il s'agit simplement pour un personne de désigner un représentant dans l'hypothèse future qu'elle sera placée sous un régime de protection). Plus le régime de protection est lourd, mois l'incapable peut accomplir un acte de commerce. On prend en compte un deuxième paramètre, celui de la gravité de l'acte. Les actes sont classés en trois catégories:    les actes conservatoires les actes d'administration les actes de disposition Le décret d'application de la loi du 5 mars 2007 ayant modifié le droit des incapacités fournit une liste de ces actes. Les plus graves sont les actes de disposition car ce sont ceux qui font sortir un ou plusieurs biens du patrimoine de la personne. La tutelle. Elle est ouverte lorsque l'intéressé a un besoin continu de protection. Lorsqu'elle est ouverte, on applique les mêmes règles qu'en cas de tutelle d'un mineur (article 495 du Code civil). Il en découle que le commerce ne pourra pas être exercé par la personne placée sous tutelle. Si par exemple le commerçant est placé sous tutelle à la suite d'une dégradation de ses facultés mentales, il ne pourra plus exercer son activité. Son fonds de commerce devra donc être cédé ou apporté en société ou encore donné en location-gérance. La curatelle. Elle peut être ouverte à l'égard de personnes qui, sans être hors d'état d'agir, ont besoin d'être conseillées ou contrôlées dans les actes de la vie civile ou à l'égard de personnes dont la prodigalité, l'intempérance ou l'oisiveté les expose à tomber dans le besoin ou compromet l'exécution de leurs obligations familiales. L'idée générale est que la personne sous curatelle devra obtenir l'assistance du curateur pour les actes de disposition. En théorie l'activité commerciale peut être continuée, mais elle présente des difficultés pratiques car, concrètement, il faudra l'assistance permanente du curateur. Le juge pourrait autoriser, sous certaines conditions, la continuation du commerce (art. 511 du Code civil), mais il s'agit alors de protéger les tiers par une mesure de publication au registre du commerce et des sociétés de la mesure de curatelle. 13 La sauvegarde de justice. C'est une mesure provisoire de protection qui peut intervenir notamment en cas d'internement ou de procédure de désignation d'un tuteur ou d'un curateur. L'intéressé conserve l'exercice de ses droits ou peut confier la gestion de ses biens à un mandataire. Toutefois, les actes qu'il fait peuvent être rescindés (annulés) en cas de lésion ou réduits en cas d'excès en fonction de son patrimoine, de la bonne ou mauvaise foi du cocontractant, de l'utilité de l'acte. La personne sous sauvegarde de justice peut donc continuer une activité commerciale. 2- Le commerçant étranger L’exercice par les étrangers d’une activité commerciale en France est limité. Une faveur est cependant accordée aux étrangers ressortissants d’un état membre de l’Union européenne. L’article L.122-1 du Code de commerce dispose ainsi : Un étranger qui exerce sur le territoire français, sans y résider, une profession commerciale, industrielle ou artisanale, dans des conditions rendant nécessaire son inscription ou sa mention au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, doit en faire la déclaration au préfet du département dans lequel il envisage d'exercer pour la première fois son activité dans des conditions définies par décret. Les ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, des autres Etats parties à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse sont dispensés de l'obligation de déclaration prévue au premier alinéa. 3- Les incompatibilités Certaines professions ou fonctions sont déclarées incompatibles avec l’exercice du commerce parce qu’elles supposent soit un sens de l’intérêt général, soit une impartialité, soit même un désintéressement qui s’accommoderait mal avec l’esprit de spéculation et de lucre du commerce. C’est le cas : - des fonctionnaires, magistrats et militaires - des officiers publics et ministériels : notaires, huissiers, commissaires-priseurs… - des avocats - de la plupart des professions organisées en ordre : experts-comptables, architectes… 14 La personne qui méconnaît une telle incompatibilité (par exemple un notaire ou un magistrat qui fait des opérations de commerce) sera considérée comme commerçante et pourra être mise en faillite. Elle encourt surtout des sanctions professionnelles telles que la révocation, la destitution ou encore la radiation de l’ordre professionnel auquel elle appartient. 4- Les déchéances La loi interdit à certaines personnes de faire le commerce lorsque leur défaut de moralité est déjà établi à la suite de condamnations pénales ou de faillite. Certains délits peuvent ainsi justifier la fermeture d’un fonds de commerce et l’interdiction de l’exercice de la profession commerciale. Ce sera le cas pour les délits économiques. Sont frappées d’une incapacité de faire le commerce : - Les personnes qui ont été condamnées pour crime à une peine d’emprisonnement sans sursis au moins - Les personnes qui ont été condamnées à au moins 3 mois de prison sans sursis pour les délits à caractère économique et financier - Les officiers ministériels destitués (par exemple notaire, huissier). Ces personnes ne peuvent exercer le commerce que ce soit directement ou indirectement, que ce soit pour leur propre compte ou pour le compte d’autrui. Il leur est également interdit d’entreprendre l’exercice d’une profession, de diriger, d’administrer ou de contrôler une entreprise (art. 131-27 du Code pénal). Cette incapacité est limitée à 10 ans à compter de la décision de condamnation devenue définitive. B- Les conditions tenant aux activités Si le principe réside dans la liberté du commerce et de l’industrie, certaines activités peuvent être interdites, ou soumises à certaines contraintes en raison d’exigences diverses tenant au respect de l’ordre public. 1- Les activités interdites 15 Certaines activités sont tout d’abord interdites. Les buts sont divers : - Activités interdites dans un but d’hygiène, de morale, de police : interdiction de la fabrication de l’absinthe, de jouets dangereux, interdiction des maisons de tolérance, du commerce de la drogue… - Activités interdites en raison d’un monopole fiscal, économique ou de police de l’Etat et des collectivités publiques : tabacs, allumettes, poudres et alcools, émission des billets de banque et de la monnaie…. 2- Les activités soumises à autorisation Certaines activités supposent la délivrance d’une autorisation par l’autorité publique pour être exercées. Ces autorisations sont délivrées après la vérification d’un certain nombre de conditions de compétence, de sécurité ou de moralité. C’est le cas, par exemple, pour l’exploitation des débits de boissons, pour la fabrication d’armes, pour l’exploitation de laboratoires d’analyses médicales, des pharmacies, des agences de voyage, des entreprises de spectacle… 3- Les activités soumises à conditions Pour certaines activités, il faut une déclaration à la préfecture ou à la mairie (par exemple pour les entreprises de presse ou de travail temporaire), ou la possession d’une carte professionnelle (courtiers en vins, mareyeurs), ou l’inscription à un ordre professionnel (pharmaciens), ou encore il faut observer certaines exigences techniques relatives aux installations et relatives à la sécurité et à la salubrité (produits alimentaires, poissonneries…). Dans certains cas il faut même justifier de garanties financières pour le paiement des impôts et des cotisations de sécurité sociale (marchands forains, loi du 3 janvier 1969). 4- Les activités soumises à une exigence de qualification Enfin, la loi du 5 juillet 1996 subordonne l’exercice de certaines activités à des exigences de qualification professionnelle. L’article 16-I de cette loi vise les activités suivantes : - Entretien et réparation des véhicules et des machines - Construction, entretien et réparation des bâtiments - Mise en place, entretien et réparation des réseaux et des équipements utilisant les fluides ainsi que les des matériels et équipements destinés à l’alimentation en gaz, au 16 chauffage des immeubles et aux installations électriques - Le ramonage - Les soins esthétiques à la personne autres que médicaux et paramédicaux - La réalisation de prothèses dentaires - La préparation ou la fabrication de produits frais de boulangerie, pâtisserie, boucherie, charcuterie et poissonnerie ainsi que la préparation ou la fabrication de glaces alimentaires et artisanales - Activité de maréchal-ferrant. §3 –Les obligations du commerçant La qualité de commerçant créé des obligations car l’activité commerciale peut être source de fraudes (à l’égard de l’administration ou à l’égard des tiers). Plusieurs obligations pèsent ainsi sur le commerçant : - Il doit établir une facture lorsqu’il contracte avec un professionnel (art. L.441-3 du Code de commerce) - Il doit utiliser un compte bancaire et il doit effectuer un certain nombre de règlements par chèque ou virement - En cas de cessation des paiements, il doit déposer son bilan, ce qui déclenchera l’ouverture d’une procédure collective - Il doit s’inscrire au RCS et tenir une comptabilité. Nous étudierons plus spécifiquement ces deux dernières obligations qui sont également les plus importantes. A- L’inscription au Registre du Commerce et des sociétés (RCS) Le RCS est nécessaire pour la publicité commerciale. Il permet aux tiers d’être tenus informés relativement aux commerçants. Il permet également un certain contrôle de l’activité commerciale. Le RCS a été créé en 1919 et depuis son importance n’a cessé de croître : initialement réservé aux commerçants, il concerne également aujourd’hui les sociétés civiles et commerciales. 17 1- L’organisation du RCS a) tenue du registre Il existe un registre local et un registre national. Le registre local est tenu par le greffier du Tribunal de commerce (ou le greffier du TGI statuant commercialement s’il n’y a pas de tribunal de commerce). Ce registre comprend un fichier alphabétique des personnes immatriculées, des dossiers individuels et, pour les personnes morales, un dossier où figurent un certain nombre de pièces dont le dépôt est obligatoire (statuts, actes de nomination des dirigeants). Le registre national est tenu par l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) et centralise en un second original les informations des registres locaux. b) Les inscriptions au registre - Personnes devant être immatriculées : les personnes physiques ayant la qualité de commerçant, les sociétés et les groupements d’intérêt économique (GIE) ayant leur siège dans un département français et jouissant de la personnalité morale, les sociétés ayant leur siège en dehors d’un département français et qui ont un établissement dans l’un des départements français, les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC)… Une seule personne ne peut faire l’objet que d’une seule immatriculation à titre principal. Il faudra toutefois prendre des immatriculations secondaires faisant référence à l’immatriculation principale pour les fonds de commerce et établissements secondaires. - Procédure : La demande d’immatriculation est faite par l’intéressé ou son représentant. Le déposant doit faire un certain nombre de déclarations concernant sa personne (nom, statut matrimonial (célibataire, marié), jusqu’à une ordonnance du 6 mai 2005, il fallait déclarer le régime matrimonial, etc…), concernant l’établissement (enseigne, nature de l’activité, indications relatives au fonds de commerce, etc…), concernant les locaux occupés. L’art. L.123-10 du Code de commerce autorise les personnes physiques à déclarer l’adresse de leur local d’habitation et les autorise à y exercer leur activité dès lors qu’aucune disposition législative ou contractuelle ne s’y oppose). Le décret du 1er février 2005 autorise les immatriculations par la voie de l’Internet. La demande d’immatriculation doit être transmise par un centre de formalité des entreprises (CFE). Les CFE ont été créés en 1981. Ils ont pour mission de faciliter les rapports entre les entreprises et les administrations de l’Etat. Ils permettent de souscrire en un lieu unique et au moyen d’un seul document les diverses déclarations administratives auxquelles les entreprises sont tenues lors de leur création, de la modification de leur situation ou de la cessation de leur activité. 18 Dans les 5 jours du dépôt de la demande, le greffier doit immatriculer le commerçant si le dossier est conforme aux obligations légales. Cette immatriculation consiste en un numéro mentionné sur le dossier conservé au greffe et sur le dossier conservé au registre national. Ce numéro se compose : 1° de l’indication « RCS », 2° du nom de la commune du siège du Tribunal où est tenu le registre, 3° de la lettre « A » s’il s’agit d’une personne physique, de la lettre « B » s’il s’agit d’une société commerciale, de la lettre « C » s’il s’agit d’un GIE, de la lettre « D » s’il s’agit d’une personne morale non commerçante autre qu’un GIE (c’est-à-dire une société civile), 4° du numéro d’identité qui est le numéro national d’identification des entreprises délivré par l’INSEE (numéro SIREN, à 9 chiffres). Ex : pour un commerçant personne physique demandant son immatriculation au Tribunal de commerce de Pau, le numéro sera de ce type : RCS Pau – A – 781 362 911. Le RCS doit être actualisé en permanence. Des inscriptions modificatives peuvent être demandées pour rectifier ou compléter des énonciations du registre. Les modifications intéressent soit l’état et la capacité du commerçant, soit l’exercice de l’activité commerciale. - Sanctions : Les obligations relatives au RCS sont impératives. Une personne non inscrite ne pourra pas se prévaloir de sa qualité de commerçant vis-à-vis des tiers. Des sanctions pénales sont prévues en cas d’omission de s’immatriculer ou en cas de déclarations frauduleuses. L’intéressé s’expose ainsi à des amendes, des peines correctionnelles et à l’interdiction d’exercer le commerce (la peine dépend à chaque fois de la règle violée). 2- Les effets attachés à l’inscription au RCS L’inscription au RCS n’est pas constitutive de droits. L’immatriculation d’une personne physique emporte simple présomption de la qualité de commerçant : il est présumé être commerçant. Cette présomption est simple : elle peut être combattue par la preuve contraire. Les sociétés acquièrent la personnalité morale à compter de leur immatriculation au RCS. En matière de vente de fonds de commerce ou de location-gérance1, le commerçant ne peut opposer la cessation de son activité pour se soustraire aux actions en responsabilité dont il est l’objet du fait des obligations contractées par son successeur dans l’exploitation du fonds qu’à partir du jour où a été publiée l’information de cette cessation au RCS. Enfin, les commerçants ne peuvent opposer aux tiers leurs activités ou changements de 1 Pour ces notions, cf. Partie II du cours. 19 situation qu’à partir du moment où ils ont été publiés. B- La tenue des livres de commerce et la comptabilité La comptabilité est un moyen d’information, de gestion et de contrôle, que ce soit au profit des personnes intéressées à la marche de l’entreprise ou que ce soit au profit des services de l’Etat. Les principes applicables sont énoncés aux articles L.123-12 et suivants du Code de commerce. Le commerçant doit tenir certains documents comptables (livres comptables, comptes annuels) et la tenue de la comptabilité elle-même est soumise à des règles précises. §4- Les règles applicables aux actes passés par le commerçant Le principal avantage tenant à la qualité de commerçant est le droit d’être jugé par ses pairs (i.e. tribunaux de commerce). Le particularisme du droit commercial s’estompe toutefois de plus en plus, le commerçant étant de plus en plus un contractant professionnel comme un autre. De ce fait, il profite des règles de plus en plus nombreuses applicables à toutes les entreprises. Deux règles ne s’appliquent toutefois qu’entre commerçants : la liberté de preuve et la solidarité. A- Le principe de la liberté de la preuve La preuve est libre entre commerçants (cf. art. L.110-3 du Code de commerce). Pour faciliter la rapidité des transactions, le commerçant a toujours été dispensé de se préconstituer une preuve par écrit. Les commerçants peuvent donc prouver par tout moyen : à partir de la comptabilité, de tout écrit ou témoignage. Pour la question de la preuve en matière d’acte mixte, cf. supra. B- Le principe de la solidarité en matière commerciale En vertu d’un simple usage, la solidarité se présume en matière commerciale alors qu’elle doit être expressément stipulée en matière civile. Dès lors, le créancier peut poursuivre. 20 La solidarité est attachée à la conclusion d’un acte de commerce. Il importe donc peu que les parties aient la qualité de commerçants. Mais cette règle est sévère : une caution non commerçante sera ainsi tenue solidairement avec le débiteur principal si le cautionnement a un caractère commercial. Il semblerait que la jurisprudence s’oriente vers une nouvelle lecture de la solidarité en exigeant, pour son application, que les codébiteurs soient tous deux commerçants ou, à tout le moins, professionnels. Section II – La personne du commerçant La notion d’entreprise est une notion centrale de la vie des affaires. Elle ne reçoit toutefois pas de définition juridique uniforme et immédiatement utilisable. On peut dégager deux traits fondamentaux qui caractérisent ce qu’est une entreprise : - L’entreprise est tout d’abord une activité de production, de transformation ou de distribution de biens ou de services. L’existence et la conduite de cette activité suppose un certain nombre de moyens : des moyens humains, des moyens matériels, des financements, des contrats (de fourniture, d’approvisionnement, de franchise, de concession…), des moyens d’organisation (l’entreprise suppose toujours une structure juridique et un processus de prise de décision, cette structure pouvant aller de l’entreprise individuelle à la grande société de capitaux)… - L’entreprise est un centre d’intérêts. La création et le fonctionnement de l’entreprise font naître de multiples intérêts : intérêts du chef d’entreprise, du personnel, des créanciers de l’entreprise, des dirigeants, des apporteurs de capitaux… L’entreprise peut ainsi être vue comme étant une activité et un centre d’intérêts. Il ne faut surtout pas confondre l’entreprise et la société, cette dernière étant une notion juridique bien délimitée (art. 1832 du Code civil). L’activité commerciale peut être exercée de diverses manières : tout d’abord le commerçant peut choisir la forme individuelle et s’exposer lui-même en tant que personne physique (§1). Il peut, à l’inverse, opter pour la création d’une société (§2). 21 §1- Le commerçant personne physique A- Le risque professionnel Traditionnellement, lorsque l’on exerce une activité commerciale sous la forme de l’entreprise individuelle, on engage l’ensemble de ses biens personnels en vertu de la théorie de l’unicité du patrimoine. Selon cette théorie, une seule personne ne peut être titulaire que d’un seul patrimoine, et l’ensemble des biens du patrimoine répond de l’ensemble des dettes de cette personne. Cette situation peut être dangereuse et elle peut être vécue comme étant un frein à l’exercice de l’activité sous forme individuelle. Si par exemple un commerçant fait des dettes à l’occasion de son activité professionnelle (par exemple il accumule les impayés auprès de ses fournisseurs), par application des articles 2284 et 2285 du code civil, il est responsable sur l’ensemble de ses biens, même s’il s’agit de bien personnels, non affectés à son activité professionnelle (maison, meubles meublants, etc…). Il s’expose ainsi à une saisie de biens personnels par ses créanciers qui se payeront sur le prix de vente de ces biens en justice. B- La limitation du risque professionnel Afin de limiter ce risque patrimonial, la loi a proposé plusieurs solutions (dont la création d’une société, cf. infra). Ces solutions sont la déclaration d’insaisissabilité et l’instauration du régime de l’Entrepreneur Individuel à Responsabilité Limitée (E.I.R.L.). 1- La déclaration d’insaisissabilité La loi du 1er août 2003 (loi pour l'initiative économique) permet à tout entrepreneur personne physique, commerçant ou non, de procéder à une déclaration d'insaisissabilité de sa résidence principale, insaisissabilité opposable aux créanciers postérieurs (art. L.526-1 al. 1er C.com). La loi du 4 août 2008 (Loi de modernisation de l’économie) a étendu cette possibilité aux autres immeubles de l’entrepreneur, à condition toutefois qu’ils ne soient pas affectés à son activité professionnelle. L’article L521-6 du code de commerce vise toute « personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante ». Sont ainsi concrètement concernés, les commerçants, les professions 22 libérales, les artisans, les agriculteurs. Les biens concernés sont les droits sur l’immeuble où l’entrepreneur a sa résidence principale ainsi que les biens fonciers bâtis ou non bâtis non affectés à l’usage professionnel. Lorsque l’immeuble est à usage mixte professionnel et d’habitation, comme c’est souvent le cas pour les professions libérales, la partie non affectée à un usage professionnel ne peut faire l’objet de la déclaration que si elle est désignée dans un état descriptif de division. La déclaration, reçue par notaire sous peine de nullité et publiée au bureau des hypothèques, contient la description détaillée des biens et l’indication de leur caractère propre, commun ou indivis. Cette déclaration n’a d’effet qu’à l’égard des créanciers dont les droits naissent à l’occasion de l’activité professionnelle du déclarant et postérieurement à la publication (au bureau des hypothèques). 2- L’E.I.R.L. Créé par la loi du 15 juin 2010, l’E.I.R.L. est un régime juridique qui permet à une personne de créer un patrimoine d’affectation directement consacré à son activité professionnelle (art. L.5266 et suivants du Code de commerce). Ce régime est ouvert à tout entrepreneur, car bien que figurant dans le Code de commerce, il ne concerne pas exclusivement que les commerçants. En revanche il est strictement réservé aux personnes physiques (les sociétés et associations ne peuvent pas opter pour le régime de l’EIRL). Article L526-6 du Code de commerce : Tout entrepreneur individuel peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel, sans création d'une personne morale. Ce patrimoine est composé de l'ensemble des biens, droits, obligations ou sûretés dont l'entrepreneur individuel est titulaire, nécessaires à l'exercice de son activité professionnelle. Il peut comprendre également les biens, droits, obligations ou sûretés dont l'entrepreneur individuel est titulaire, utilisés pour l'exercice de son activité professionnelle et qu'il décide d'y affecter. Un même bien, droit, obligation ou sûreté ne peut entrer dans la composition que d'un seul patrimoine affecté. (…) La personne qui opte pour le régime de l’EIRL se trouve alors à la tête de deux patrimoines : un patrimoine affecté à son activité professionnelle et un patrimoine non affecté ou patrimoine 23 personnel. Les droits des créanciers sont réduits : - Les créanciers dont la créance est née à l’occasion de l’activité professionnelle n’ont des droits que sur les biens garnissant le patrimoine affecté à l’activité professionnelle - Les autres créanciers n’ont des droits que sur le patrimoine non affecté (ou patrimoine personnel). Dans certains cas la loi prévoit toutefois des droits plus étendus pour les créanciers de sorte qu’il n’y a pas d’étanchéité parfaite entre les deux patrimoines. Cette absence d’étanchéité peut conduire à penser que l’EIRL ne remet pas en cause la théorie unitaire du patrimoine puisque, dans un but de protection des créanciers (en cas de fraude notamment), ceux-ci conservent des droits sur l’ensemble des biens de l’entrepreneur. §2- Les sociétés commerciales Rappel : les sociétés commerciales sont des actes de commerce par la forme. Cela signifie que dès que l’on opte pour la création d’une société commerciale, et alors même que son activité serait non commerciale, elle relèvera de la compétence des tribunaux de commerce et se verra appliquer les règles du droit commercial. Avant de décrire rapidement les différentes sociétés commerciales (B), il est nécessaire d’aborder la notion de société (A). A- La notion de société L’article 1832 du Code civil définit la société : La société est instituée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter. Elle peut être instituée, dans les cas prévus par la loi, par l'acte de volonté d'une seule personne. Les associés s'engagent à contribuer aux pertes. 24 La société est donc un contrat particulier (1) qui donne naissance à une personne morale (2). 1- La société est un contrat particulier Comme tout contrat, le contrat de société doit respecter certaines conditions de formation prévues aux articles 1101 et suivants du Code civil. Mais le contrat de société doit également respecter des exigences particulières. Le contrat de société suppose ainsi quatre conditions spécifiques :  - Des statuts - Des apports - La participation des associés aux bénéfices et leur contribution aux pertes - L’affectio societatis. Les Statuts Tout d’abord l’article 1835 du Code civil exige que ce contrat soit rédigé par écrit. Cet écrit constitue les statuts de la société. Il est indispensable à l’immatriculation de celle-ci afin qu’elle acquière la personnalité morale.  Les apports Ensuite, les associés doivent convenir d’affecter des biens ou leur industrie à une entreprise commune. C’est ce que l’on appelle les apports. On ne peut pas avoir la qualité d’associé si l’on ne fait aucun apport à la société. La réunion des apports constitue le capital social qui est divisé en parts sociales ou en actions selon le type de société. Les parts déterminent les droits politiques des associés au sein de la société (droit de participer aux assemblées générales et droit de vote) et déterminent également la hauteur de leurs droits financiers (droits aux dividendes) et de leurs obligations (surtout dans les sociétés où la responsabilité financière des associés est limitée à leur apport). La répartition des droits et obligations est en principe égalitaire, c’est-à-dire proportionnelle au nombre de parts détenues. Ainsi, par exemple, dans une S.A.R.L., l’associé qui détient 60% des parts a droit à 60% des bénéfices et est responsable des dettes à hauteur de 60%. Les statuts peuvent toutefois prévoir une répartition inégalitaire (par exemple une S.A.R.L. avec deux associés détenant respectivement 60% et 40% du capital, mais dont les statuts prévoient qu’ils recevront chacun 50% des bénéfices et contribueront chacun pour moitié aux dettes). 25 Les apports peuvent être faits en numéraire (on apporte une somme d’argent), en nature (on apporte un bien, comme par exemple un fonds de commerce ou des biens d’équipement), ou en industrie (on apporte son travail, sa compétence). L’apport en industrie n’est pas pris en compte pour la détermination du capital social (en raison des difficultés d’évaluation), mais l’apporteur est un véritable associé (il recevra un nombre de parts sociales égal à celui des autres apporteurs qui aura le moins apporté, sauf si les statuts en décident autrement). Les apports en industrie sont autorisés dans toutes les sociétés commerciales sauf dans les SA et pour les associés commanditaires des sociétés en commandite par actions (cf. infra).  La participation aux bénéfices / économies et la contribution aux pertes En outre, les associés doivent s’engager à participer aux bénéfices ou aux économies et à contribuer aux pertes de la société. - Participer aux bénéfices ou aux économies : Cette exigence permet de distinguer les sociétés d’autres institutions voisines comme les associations Loi 1901. La frontière est traditionnellement définie ainsi : un groupement qui poursuit une activité désintéressée est nécessairement une association et, inversement, tout groupement qui a pour but de procurer un bénéfice à ses membres est une société. - Contribuer aux pertes : si la société fait de mauvaises affaires, l’associé risque de perdre son apport. Cette exigence de retirer un bénéfice et de contribuer aux pertes entraîne l’interdiction de certaines clauses ou de certains accords entre associés. Le principe de la liberté contractuelle suppose que les statuts peuvent prévoir une répartition inégalitaire des profits (par exemple un associé détient 25% des parts mais qu’il a droit à 50% des bénéfices). En revanche, l’article 1844-1 du Code civil interdit strictement les clauses léonines. Il s’agit de clauses des statuts ou de conventions extrastatutaires par lesquels un associé se voit conférer la totalité des revenus ou la totalité des pertes ou, au contraire, se voit exclu de la totalité des revenus ou de la totalité des pertes. Toute clause léonine est réputée non écrite (c’est-à-dire que c’est comme si elle n’existait pas).  L’affectio societatis Enfin, il est traditionnellement exigé que tous les associés aient l’intention de travailler ensemble sur un pied d’égalité au succès de l’activité de la société. Cette exigence n’est posée par aucun texte, mais elle a été dégagée par la doctrine et reçoit de nombreuses applications en jurisprudence. Elle est traditionnellement désignée par l’expression latine « affectio societatis ». L’affectio societatis varie d’une société à l’autre. Il est important pour qualifier des groupements 26 qui n’ont pas la personnalité morale mais qui n’en sont pas moins des sociétés (cf. infra) : si cette exigence n’est pas remplie, le groupement ne pourra pas être qualifié de société. 2- La société est un contrat ayant vocation à donner naissance à une personne morale La société n’est pas un contrat comme les autres. Les associés ont pour but de créer une nouvelle personne juridique qui va avoir un patrimoine propre, distinct de celui des associés, et qui va évoluer de manière autonome. La personnalité juridique d’une société s’acquiert dès son immatriculation au RCS. Tant qu’une société n’est pas immatriculée, elle n’a pas la personnalité morale. On peut alors se trouver dans deux situations : - Soit les associés n’ont pas l’intention d’immatriculer la société, et alors on est en présence d’une société sans personnalité morale  Soit les associés ont l’intention de l’immatriculer, dans ce cas la société est en formation. Les sociétés sans personnalité morale Il y en a deux sortes : - La société en participation : Il existe un contrat entre les associés (rédigé voire même sous forme orale). A l’égard des tiers, chaque associé s’engage personnellement. Dans leurs rapports entre eux, on applique le contrat. - La société créée de fait : c’est une société « morte-née », découverte seulement pour être liquidée. Dans cette hypothèse, les « associés » n’avaient même pas conscience d’être en société. Cette technique est utilisée pour liquider les effets patrimoniaux d’un concubinage, mais la Cour de cassation est rigoureuse car elle exige la preuve séparée de chaque élément du contrat de société (apports, participation, affectio societatis).  La société en formation Lorsqu’une société est en formation, il est nécessaire de faire certains actes pour son compte avant qu’elle ne soit immatriculée. Il sera par exemple nécessaire de conclure un bail pour installer les locaux de la société ou encore d’acheter du matériel. La difficulté est qu’elle ne peut pas encore faire les actes en son nom puisqu’elle ne dispose pas de la personnalité morale. Le droit prévoit 27 alors un système pour que les actes conclus pour le compte d’une société en formation soient repris par elle dès son immatriculation. Concrètement c’est un associé fondateur de la société ou un mandataire qui conclura ces actes, et il devra toujours préciser sur l’acte qu’il est conclu pour le compte d’une société en formation (dans un but d’information du cocontractant). Il y a trois modalités de reprise : - Si l’acte est conclu pour la société en formation avant la signature des statuts, il sera annexé aux statuts et il sera automatiquement repris par la société dès son immatriculation. - Si l’acte est conclu après la signature des statuts et avant l’immatriculation, la reprise de cet acte par la société à son immatriculation sera automatique à condition que l’acte a été conclu en vertu d’un mandat donné par les associés fondateurs de conclure ce contrat. - Si l’acte a été conclu avant l’immatriculation mais qu’il n’a été ni annexé aux statuts, ni conclu en vertu d’un mandat, il est toujours possible que la société le reprenne à son compte. La reprise ne saurait être automatique dans ce cas et il faudra une délibération de l’Assemblée Générale des associés de la société constituée pour que l’acte soit valablement repris. Si les différences conditions sont remplies, la société sera réputée avoir conclu l’acte dès l’origine. Si l’acte ne peut être repris par la société, c’est en principe celui qui l’a conclu qui est engagé personnellement. B- Les différentes formes de sociétés commerciales Les sociétés commerciales sont régies par les articles 1832 et suivants du Code civil qui en constituent le droit commun ainsi que par les dispositions spécifiques à chaque forme de société commerciale figurant dans le Code de commerce. Il existe par ailleurs des sociétés civiles entièrement régies par le Code civil (par exemple les SCI, sociétés civiles immobilières, ou les SCP, sociétés civiles professionnelles). Article L210-1 du Code de commerce : Le caractère commercial d'une société est déterminé par sa forme ou par son objet. Sont commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés par actions. 28 Article L210-2 du Code de commerce : La forme, la durée qui ne peut excéder quatre-vingt-dix-neuf ans, la dénomination sociale, le siège social, l'objet social et le montant du capital social sont déterminés par les statuts de la société. Une loi du 31 décembre 1990 a par ailleurs institué les sociétés d'exercice libéral (SEL) qui sont des formes sociales créées pour permettre aux membres des professions libérales d’exercer leur activité sous forme de sociétés commerciales. Il ne s’agit pas de nouvelles structures juridiques mais plutôt de nouvelles possibilités d’exercice d’une activité libérale à travers des structures juridiques existantes. Existent ainsi :     La SELARL : société d’exercice libéral à responsabilité limitée ; La SELAFA : société d’exercice libéral à forme anonyme ; La SELAS : société d’exercice libéral par actions simplifiée ; La SELCA ou SELACA: société d’exercice libéral en commandite par actions Les Sociétés d’Exercice Libéral sont soumises à toutes les dispositions relatives aux sociétés commerciales, sauf dispositions particulières prévues par la loi du 31 décembre 1990. En outre, la réglementation relative à chaque profession prévoit des spécificités propres à chaque activité. On classe les sociétés commerciales selon leurs caractéristiques, selon qu’il s’agisse de sociétés de personnes, de sociétés de capitaux ou de sociétés de forme hybride. 1- Les sociétés de personnes Dans les sociétés de personnes, les associés se réunissent en considération de la personne de chacun des associés. Elles se caractérisent par le fait que la personnalité morale ne fait pas écran entre les créanciers de la société et les associés qui restent personnellement tenus du passif de la société. Il existe deux sociétés de personnes : la société en nom collectif et la société en commandite simple.  La société en nom collectif (SNC) Elle est régie par les articles L.221-1 et suivants du Code de commerce. L’article L.221-1 dispose : « Les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant et répondent 29 indéfiniment et solidairement des dettes sociales ». La SNC a deux caractéristiques : - Tous les associés sont commerçants, qu’ils le fussent déjà avant la constitution de la société ou qu’ils le soient devenus en devenant associés. Il faut donc la capacité commerciale pour être associé de SNC. En outre, ils sont indéfiniment et solidairement tenus du passif social à côté de la société elle-même. L’article L.221-1 alinéa 2 prévoit cependant que « les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu'après avoir vainement mis en demeure la société par acte extrajudiciaire ». - Les associés sont unis par des liens étroits. En principe le décès ou l’incapacité de l’un des associés entraîne la fin de la société, sauf clause de continuation. Les parts sociales ne peuvent être librement cédées et l’entrée d’un nouvel associé suppose l’accord unanime des associés. L’organisation de la SNC est très souple car la loi est peu contraignante et laisse une grande liberté dans la rédaction des statuts. L’article L.221-3 prévoit en effet que « tous les associés sont gérants, sauf stipulation contraire des statuts qui peuvent désigner un ou plusieurs gérants, associés ou non, ou en prévoir la désignation par un acte ultérieur ». Le nombre minimum d’associés et de 2. En matière fiscale, les SNC sont par défaut soumises à l’impôt sur le revenu (plus exactement les associés y sont soumis au titre de la SNC, ce que l'on appelle la transparence fiscale) mais il est possible de choisir une imposition sur les sociétés (Impôts sur les sociétés, IS, au taux de 33,33%). Une fois opté pour l’IS, ce choix est alors irrévocable.  La société en commandite simple (SCS) Elle est régie par les articles L.222-1 et suivants du Code de commerce. L’article L.222-1 dispose que « les associés commandités ont le statut des associés en nom collectif. Les associés commanditaires répondent des dettes sociales seulement à concurrence de leur apport ». C’est donc une forme de société où l’on trouve deux types d’associés, et il faut au moins deux associés : un commandité et un commanditaire : - Associé Commandité : même régime juridique que l’associé en nom collectif. Seuls les commandités ont un pouvoir de gestion dans la société. - Associé Commanditaire : n’importe qui peut être associé tant qu’il ne s’agit pas d’un incapable majeur ou mineur ou frappé d’interdiction (régime des incompatibilités). La 30 capacité civile ici suffit à l'instar des sociétés à responsabilité limitée. Les commanditaires n’engagent pas leur patrimoine personnel (contrairement aux commandités) et ne sont responsables du passif de la société qu’à hauteur de leur apport. Les commanditaires ne peuvent seulement que faire des apports en numéraire ou en nature, l’apport en industrie leur est interdit. S’ils font un apport en numéraire, celui-ci devra être intégralement libéré (c’est-à-dire versé à la société). Ce sont des bailleurs de fonds et ils ne peuvent faire aucun acte de gestion externe, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas le pouvoir de représenter la société à l’égard des tiers. Si un commanditaire le fait malgré tout, la sanction est très lourde puisqu’il devient solidairement et indéfiniment tenu des dettes qui résulteront de sa gestion. Si son intervention est habituelle, il pourra même être condamné à l’ensemble des dettes sociales. 2- Les sociétés de capitaux Les sociétés de capitaux se constituent en fonction du capital social, c’est-à-dire de la somme d’argent qui est mise à disposition de la société. La personnalité des associés joue un rôle secondaire. Les associés sont tenus des dettes de la société que dans la limite du montant de leur apport. Il y a trois types de sociétés de capitaux : la Société Anonyme (S.A.), la Société par Actions Simplifiée (S.A.S.), et la Société européenne (S.E.). Le capital de ces sociétés est divisé en actions, ce qui signifie qu’elles sont en principe librement cessibles à des tiers à la société qui peuvent devenir actionnaires sans avoir à subir l’agrément des autres associés.  La société anonyme (SA) C’est le type même de société de capitaux. Elle est régie par les articles L.225-1 et suivants du Code de commerce. Elle est définie par l’article L.225-1 comme étant « la société dont le capital est divisé en actions et qui est constituée entre des associés qui ne supportent les pertes qu’à concurrence de leurs apports ». Les associés prennent le nom d’actionnaires et leur nombre est au minimum de 7 (art. L.225-1). En outre il faut un capital minimum de 37000 euros. La société est organisée selon l’un des deux modèles prévus par la loi : 31 - Modèle traditionnel : La SA est administrée par un organe collégial appelé conseil d’administration représenté par son président. Le conseil d’administration est constitué au minimum de trois et au maximum de dix huit administrateurs choisis obligatoirement parmi les actionnaires (art. L.225-17 du Code de commerce). La direction générale de la société est assumée soit par le président du conseil d’administration, soit par une autre personne physique nommée par le conseil d’administration. Le directeur général est chargé d'assister le président du conseil d’administration. Il n'est pas nécessaire qu'il soit actionnaire et il a vocation à représenter la société à l'égard des tiers. - Nouveau modèle : la société est gérée par un directoire lui-même contrôlé par un conseil de surveillance. Ce nouveau modèle est directement inspiré du droit allemand. Le directoire est l'organe chargé de la gestion de la société. Il est composé de un à cinq directeurs (exceptionnellement sept, notamment si la société est cotée en bourse), obligatoirement des personnes physiques, actionnaires ou non de la société. Si le capital est supérieur à 150 000 €, le minimum est de un membre (art. L. 225-58 al. 2 du Code de commerce). Le conseil de surveillance a avant tout un rôle de contrôle du directoire et veille à la bonne gestion de la société. Il doit se réunir au moins tous les trois mois. Il fait aussi des observations sur les agissements du directoire. C'est le conseil de surveillance qui nomme et révoque les membres du directoire et son président. Le Conseil de surveillance est élu par l’assemblée générale pour une durée de 3 ou 6 ans, et il compte entre 3 et 18 membres. Ils élisent eux-mêmes leur président. Il faut être une personne physique, être majeur, ne pas être frappé d’incompatibilité, et il faut être impérativement actionnaire. Fiscalement, les S.A. sont soumises à l’impôt sur les sociétés (IS).  La société par action simplifiée (SAS) C’est une société qui s’apparente à la SA. Le capital est divisé en actions et les actionnaires supportent les pertes à hauteur de leurs apports. La SAS est régie par les articles L.227-1 et suivants du Code de commerce. L’organisation de la société est aménagée très librement, l’article L.227-5 précisant que « les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée ». La loi exige seulement que la SAS soit représentée par un président à l’égard des tiers. La SAS peut être instituée par toute personne physique ou morale, et elle peut même être constituée d’un seul associé (S.A.S. Unipersonnelle ou SASU). En outre, c’est aux statuts qu’il revient de fixer le capital social, ce qui signifie que la loi 32 n’exige pas de capital minimum. La SAS demeure cependant une société fermée puisqu’on peut prévoir dans les statuts que les actions seront inaliénables pendant 10 ans, ce qui assure une grande stabilité aux dirigeants. L’allègement des contraintes, et notamment le fait que le fonctionnement interne de la SAS est essentiellement défini par les statuts, c’est-à-dire par la volonté de ses associés, et non pas par la loi, fait de la SAS un instrument de gestion privilégié par les grands groupes, notamment multinationaux, ainsi que par les PME et les holdings. La principale caractéristique de la SAS est qu'elle permet de dissocier le capital du pouvoir (tout en préservant certaines caractéristiques de la SA) : en résumé, un associé peut disposer de prérogatives indépendantes de sa part de capital. Fiscalement, la SAS est soumise à l’IS.  La société européenne ou societas europaea (SE) Il s’agit d’une société qui peut exercer ses activités dans tous les États membres de l'Union européenne sous une forme juridique unique et commune à tous ces États, définie par le droit communautaire. Après plusieurs dizaines d'années de discussions, l'Union européenne a formellement adopté un règlement établissant le statut de la société européenne (Règlement (CE) n° 2157/2001 du Conseil, du 8 octobre 2001) et une directive concernant la participation des travailleurs des sociétés européennes (Directive n° 2001/86/CE du Conseil, du 8 octobre 2001). Cette réglementation permet aux entreprises de réduire leurs coûts administratifs et leur offre une structure juridique adaptée au marché intérieur, en évitant les contraintes juridiques et pratiques qui résultent de la multiplicité des ordres juridiques nationaux. Le statut de société européenne est officiellement entré en vigueur le 8 octobre 2004. En France, c'est la loi Breton n° 2005-842 du 26 juillet 2005 qui a transposé dans le droit national les dispositions de la directive (articles L. 229-1 et suivants du Code de commerce). La S.E. ressemble à biens des égards à la S.A. : capital minimum divisé en actions, modes d’organisation prévus par la loi (soit à conseil d’administration, soit à directoire et conseil de surveillance). Caractéristiques que la S.E. : - Le capital social est au minimum de 120 000 €. - Le siège social de la société européenne doit correspondre au lieu où se trouve son administration centrale, c’est-à-dire à son siège réel. - Elle a la possibilité de transférer son siège facilement d'un pays européen à un autre. 33 - La société européenne peut être constituée par un associé unique. 3- Les formes mixtes Les formes mixtes ou hybrides empruntent des caractéristiques aux sociétés de personnes et aux sociétés de capitaux. Il y en a deux : la SARL et la SCA.  La Société à Responsabilité Limitée (S.A.R.L.) Elle est régie par les articles L.223-1 et suivants du Code de commerce. L’article L.223-1 dispose que « La société à responsabilité limitée est instituée par une ou plusieurs personnes qui ne supportent les pertes qu’à concurrence de leurs apports ». Les associés de la SARL ne sont donc pas tenus sur leur patrimoine propre des dettes de la société. C’est la raison pour laquelle ils n’ont pas à avoir la qualité de commerçant. La loi n’exige aucun capital minimum (l’article L.223-2 du Code de commerce dispose que le capital est fixé par les statuts). Il est donc très facile de créer une SARL ; Un autre avantage réside dans la souplesse d’organisation de la société, la principale exigence étant que le gérant soit une personne physique. Tout associé peut sortir de la société s’il le veut : la cession des parts sociales est libre entre les associés. En revanche, l’entrée d’un nouvel associé dans la société est soumis à l’approbation des autres associés, mais en cas de refus, la loi prévoit que la société elle-même ou les autres associés devront racheter les parts de celui qui désire partir. La S.A.R.L. peut être constituée d’un seul associé : on parlera dans ce cas d’E.U.R.L. (entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée). Attention : ne pas confondre l’EURL avec l’EIRL étudiée plus haut.  La Société en Commandite par Actions (S.C.A.) Une société en commandite par actions ou SCA est une société hybride régie par les articles L.226-1 et suivants du Code de commerce. Comme dans la SCS, on distingue deux types d'associés : - Les associés commanditaires qui sont les actionnaires de la société, et ne sont 34 responsables des dettes qu'à concurrence de leur participation au capital. Les actions sont nominatives. L'assemblée des commanditaires suit les mêmes règles que dans une société anonyme (SA). Il faut au minimum 3 commanditaires (art. L.226-1). - Les associés commandités qui ont le statut de commerçants, et sont nommés par les commanditaires. Ils sont indéfiniment et solidairement responsables des dettes sur leurs biens propres. Ils peuvent être également commanditaires. L'assemblée des commandités suit les mêmes règles que dans une société en nom collectif (SNC). Il faut au minimum un commandité (art. L.226-1). La société est administrée par des gérants nommés par les commandités avec l'accord des commanditaires. Ils sont contrôlés par un conseil de surveillance composé de commanditaires. Le nombre minimum d’associés est de 4 : au moins un commandité et au moins 3 commanditaires (art. L.226-1 du Code de commerce). La S.C.A. combine les avantages de la S.A. et des sociétés de personnes : elle confère une grande stabilité aux commandités car les parts de commandite ne peuvent être cédées qu’avec le consentement de tous les autres commandités et, en principe, de tous les commanditaires. Cette forme de société se rencontre toutefois rarement en pratique (quelques sociétés et groupes célèbres sont toutefois organisés sous cette forme : le Groupe Lagardère, Euro Disney, Michelin, PayPal Europe). 35 CHAPITRE II – LES AUTRES ACTEURS Section I – Les professionnels non commerçants §1- Les artisans §2- Les agriculteurs §3- Le conjoint du commerçant §4- Les auto-entrepreneurs Section II – Les institutions administratives et organismes professionnels §1- Les institutions administratives favorisant l'activité commerciale §2- Les Chambres de commerce et d'industrie Section III– Le particularisme de la justice commerciale (le règlement des litiges) §1- Les Tribunaux de commerce 1- Organisation 36 2- Compétence 3- Procédure §2- L'arbitrage 1- Saisine d'un tribunal arbitral 2- Composition et compétence du tribunal arbitral 3- La sentence arbitrale 37 PARTIE II: LES MOYENS DE L’ACTIVITE COMMERCIALE Qu'il soit entrepreneur individuel ou structuré sous forme de société, le commerçant a besoin d'un certain nombre de moyens pour exercer son activité. Le moyen principal est un bien: il s'agit du fonds de commerce (Chapitre I). Mais le commerçant dispose d'autres moyens, contractuels ceux-là: les contrats de distribution (Chapitre II). CHAPITRE I- LE FONDS DE COMMERCE Le fonds de commerce est l'outil principal pour réaliser l’activité commerciale. Autour de lui s’organisent d’autres moyens: les contrats de distribution, le bail commercial, la propriété industrielle. C’est un outil indispensable au commerçant quel qu'il soit, afin qu’il réalise son activité économique. La loi ne donne pas de définition du fonds de commerce. On déduit cependant ces éléments des exigences posées en matière de vente (articles L.141-1 et suivants du Code de commerce issus des lois du 1è mars 1909 et du 29 juin 1935) et de nantissement du fond de commerce (gage - garantie de paiement - sûreté réelle sans dépossession; Articles L.142-1 à L.1425 du Code de commerce issus d'une loi du 17 mars 1909). Voyons la nature et les éléments du fonds de commerce (Section 1) avant d'étudier plus les opérations portant sur le fonds de commerce (Section 2) puis, in fine, le bail commercial, élément souvent fondamental de l'exploitation du fonds et qui confère à celui-ci une certaine stabilité (Section 3). 38 Section I - Nature et éléments du fonds de commerce Avant des voir les éléments constitutifs du fonds de commerce (§2) il est nécessaire de mieux cerner sa nature (§1). §1- La Nature du fonds de commerce A- La notion de fonds de commerce Le fonds de commerce est l’ensemble des biens meubles qu’un commerçant va assembler et organiser pour conquérir une clientèle. Il va distinguer au sein du patrimoine du commerçant un ensemble de biens affecté à l’exercice de sa profession. Le fonds de commerce n’est pas doté d’une autonomie juridique au sein de ce patrimoine (cf théorie du patrimoine français: 1 patrimoine = 1 personne): le fonds de commerce n'est qu'un bien parmi ceux qui composent le patrimoine de son propriétaire. Le fonds de commerce est un bien incorporel. La grande originalité du fonds de commerce c’est de ne regrouper que les éléments mobiliers de l’entreprise. Les immeubles ne font donc pas partie du fonds de commerce. La notion de fonds de commerce est commune à l’ensemble des industriels et commerçants qu’il s’agisse de personnes physiques ou morales. Le fonds de commerce est un élément nécessaire à toute exploitation industrielle ou commerciale. Définition: Le fonds de commerce, bien incorporel, est une universalité regroupant l’ensemble des biens meubles qu’un entrepreneur organise et associe en vue de développer son activité économique. Ce développement passe par la conquête d’une clientèle. B- Distinction du fonds de commerce et des notions voisines  Distinction du fonds de commerce et de l'entreprise: L’entreprise est une organisation et un centre de divers intérêt. L’entreprise c’est la réunion de plusieurs personnes aux intérêts divers, mais aussi la réunion de biens et de capitaux (Cf. introduction du cours). Le fonds de commerce est 39 l’élément central de l’entreprise, élément nécessaire sans lequel il n’y a pas d’entreprise. Il est un moyen de réaliser l'activité de l'entreprise.  Distinction du fonds de commerce et de la société: La société est une personne morale (dispose de la personnalité juridique une fois immatriculée au RCS) tandis que le fonds de commerce est un ensemble de biens. Le Fonds de commerce est un élément du patrimoine de la société.  Distinction du fonds de commerce et de la succursale: La succursale se caractérise par une autonomie de gestion et l’absence de personnalité juridique. Une succursale peut disposer d’installations permanentes et doit être dirigé par une personne ayant le pouvoir de traiter avec les tiers et d’engager la société. La succursale n’est jamais qu’une modalité d’exploitation de l’activité de l’entreprise, mais bien souvent, en raison de son autonomie de gestion, elle dispose d’une clientèle propre et va donc constituer un fonds de commerce distinct au sein de l’ensemble de l’entreprise. §2- Les éléments du fonds de commerce. Le fonds de commerce est un bien incorporel. En tant que tel, il peut faire l'objet d'un contrat (vente, donation, etc...) et se transmet à cause de mort. Mais le fonds de commerce se compose d'un certain nombre d'éléments qui sont nécessaires à son existence et à son développement. On distingue le plus souvent les éléments corporels (1) des éléments incorporels (2). A- Les éléments corporels du fonds de commerce Les éléments corporels du fonds de commerce sont souvent secondaires voir facultatifs du fonds de commerce. On y trouve:  Le matériel: Machines, outils, équipements qui peuvent servir à l’exploitation du fonds, dans certains cas ils peuvent être absolument nécessaire dans d’autres car ils sont secondaire ou inexistant( ex : commerce de distribution ou de ventes).  Les marchandises (stocks): leur importance dépend de l’entreprise exploitée. 40 B- Les éléments incorporels du fonds de commerce Ils sont assez nombreux:  La clientèle. Elle est composée de l’ensemble de personnes qui entrent en relation avec l’entreprise. Elle est l’élément essentiel du fonds de commerce (Cf. infra).  Le droit au bail. On est dans l’hypothèse où un commerçant exerce son activité dans un local loué à cette fin. Il existe un régime juridique spécifique concernant le bail commercial, très protecteur du commerçant. Ce droit au bail confère au commerçant locataire un droit de renouvellement de son bail à défaut duquel le propriétaire doit lui verser une indemnité d’éviction. Régime intéressant pour l’exploitant car il assure la stabilité du fonds de commerce. Le contrat de bail commercial peut être codé à un autre commerçant. Le bail commercial est un élément intéressant mais facultatif du fonds de commerce car celui-ci peut exister sans bail commercial.  Les éléments d’individualisation du fonds de commerce: - Le nom commercial: Il individualise le commerçant, c’est le nom sous lequel l’entreprise exerce son activité. On parle de dénomination ou raison sociale si l’entreprise est une société. Le nom commercial peut être transmis avec le fonds de commerce ou à titre isolé. - L’enseigne commerciale: Elle désigne non pas l’entreprise mais son établissement géographique, soit sa localisation. Son régime juridique est le même que le nom commercial. - Les droits de propriété industrielle: Ce sont les brevets, les marques (marques de fabrique, de service et les dessins et modèles -créations esthétiques à vocation utilitaire-). Ils forment l’activité industrielle de l’entreprise et les titulaires d’un brevet, d’une marque etc… disposent d’un monopole d’exploitation sur l’objet protégé (place prééminente sur le marché) - Les autorisations d’exploitation: Certaines activités commerciales nécessitent une autorisation administrative pour leur exercice. (Débit de boissons=>licence 4 ; transport ; pharmacie). Certaines autorisations ont un caractère personnel comme l’autorisation d’exploiter une pharmacie. Elles sont soumises à certaines conditions de capacité et en principe puisqu’elles sont personnelles, elles ne peuvent pas être cédées. En revanche d’autres autorisations ne sont pas personnelles (licence débit de boisson) et celles-ci sont cessibles. 41 §3- Le rôle particulier de la clientèle La clientèle peut être définie comme étant un ensemble de personnes qui entretiennent des rapports d’affaires, d’intérêts ou sollicitant des services plus ou moins suivis d’un individu se livrant à une activité professionnelle quelconque (composée d’une multitude de personnes ou d’une seule personne ; consommateurs ou commerçants). Il convient de distinguer la clientèle de la notion voisine d’achalandage. La clientèle est constituée des relations d’affaires régulières alors que l’achalandage est constitué de relation occasionnelles (le chaland est une personne de passage qui n'a pas vocation à revenir chez le commerçant). La clientèle est l’élément essentiel du fonds de commerce alors que l’achalandage non. C’est une solution absolument constante qui permet d’affirmer que sans clientèle il ne saurait exister de fonds de commerce. Mais à côté de cela, la clientèle est également le but de l’exploitation. Le commerçant va chercher à accroître la valeur de son fonds par la conquête de nouveaux clients. La clientèle génère un fonds de commerce (A) et réciproquement, le fonds de commerce crée de la clientèle (B). A- La clientèle: élément générateur du fond de commerce La clientèle est ce qui créé le fonds de commerce: elle se compose de personnes en relations d'affaires suivies avec le fonds de commerce. Elle est donc l'élément générateur du fonds de commerce; elle en est l'élément essentiel. 1- La clientèle est l’élément essentiel du fonds de commerce: un fonds de commerce ne saurait exister sans clientèle. C’est une solution constante en jurisprudence. La clientèle doit être certaine: une clientèle virtuelle ou potentielle ne suffit pas à établir l’existence d’un fond de commerce. 2- Les conséquences attachées au caractère essentiel de la clientèle. Il résulte du caractère essentiel de la clientèle plusieurs conséquences fondamentales:  Toute opération portant sur une clientèle porte nécessairement sur le fond de commerce:  La cession de fonds de commerce. Il ne peut y avoir ventes du fond de commerce que si la clientèle est comprise dans la cession. A titre d’exemple la Cour de Cassation a considéré que la cession distincte d’un mobilier d’une licence de débit de boisson ne comportant aucun élément relatif à la clientèle n’est pas une vente de fonds de commerce.  Le nantissement de fonds de commerce: il n’est efficace que s’il inclut la clientèle 42 dans son assiette.  Le droit au bail: l'existence d’une clientèle va permettre de caractériser un fond de commerce et donc va permettre à son titulaire d’exercer son droit au bail.  La réciproque est vraie: si une opération ne porte pas sur la clientèle elle ne porte pas sur le fonds de commerce.  Un fonds de commerce ne survit pas à la disparition de la clientèle. B- Le fonds de commerce élément générateur de clientèle. Par ailleurs, la clientèle est également une valeur qu’il s’agit d’accroître. En effet, le fonds de commerce ne verra sa valeur augmenter que si la clientèle augmente elle-même. Mais lorsqu'on l'analyse sous l'angle de la valeur, on dépersonnalise la clientèle: elle n'est plus un alors un simple élément du fond de commerce mais elle devient le but de l’activité économique. 1- La clientèle valeur: La clientèle devient une unité de mesure de la valeur du fonds de commerce. Elle est réduite à un volume d’affaires. C'est une approche beaucoup plus économique. On s’aperçoit selon cette analyse que : selon que l’on mesure la valeur du fonds en fonction des résultats d’exploitation ou en fonction des éléments constitutifs du fonds de commerce, la clientèle sera un paramètre prédominant de cette évaluation. On va accorder ici plus d’importance aux éléments d’attraits de la clientèle et aux éléments de fixation de la clientèle (Marque, nom commercial ; l’importance du local ou est exploité l’affaire, d’où l’importance du bail commercial). Lorsque sera vendu un fonds de commerce, en plus de la clientèle devront alors être compris dans la vente les éléments d’attraits de la clientèle. 2- La question de l’attribution de la clientèle: Se pose souvent la question de savoir qui va être propriétaire de cette valeur (VRP, locataire gérant, clientèle dans le contrat de franchise) :  Attribution et répartition de la clientèle valeur. Elle ne pose pas de difficultés quand le propriétaire du fonds est également l’exploitant. Les deux cas où peuvent se poser des problèmes: quand une personne autre que le propriétaire du fonds de commerce exploite celui-ci (locationgérance) ou lorsqu'une personne autre que l'exploitant du fonds de commerce contribue à l'accroissement de la valeur de celui-ci en conquérant davantage de clientèle. La clientèle conquise par un tiers (au profit de l’exploitant du fonds de commerce) comme le VRP (Voyageur représentant placier, cf. art. L.7311-3 du Code du Travail). Le VRP est salarié de 43 l’entreprise, le système attribue au VRP la part qui lui revient dans la plus value qu’a pris la clientèle. La clientèle appartiendra au propriétaire du fonds de commerce. L’article L.7313-13 du Code du travail (ancien article L.751-9) accorde au VRP une indemnité de clientèle: « En cas de rupture du contrat de travail à durée indéterminée par l'employeur, en l'absence de faute grave, le voyageur, représentant ou placier a droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui » (alinéa 1er). La clientèle conquise par le locataire gérant. Dans cette hypothèse, le propriétaire et l’exploitant du fonds ne sont pas les mêmes personnes. La location-gérance est un contrat par lequel le propriétaire d'un fonds de commerce confie l'exploitation de celui-ci à un locataire-gérant en échange du paiement d’une redevance (cf. infra). Le locataire gérant va exploiter le fonds de commerce sans avoir de droits dessus. Il a donc une situation peu enviable. Section II- Les opérations portant sur le fonds de commerce Puisque le fonds de commerce est un bien incorporel, on peut faire sur lui toutes les opérations que l'on peut faire sur tout type de bien incorporel: on peut vendre, donner, nantir ou louer un fonds de commerce. Nous verrons ici la cession de fonds de commerce (§1), la location du fonds de commerce, ou location-gérance (§2) puis enfin le nantissement de fonds de commerce (§3). §1- La cession de fonds de commerce La loi applicable à la vente de fonds de commerce est la loi du 17 mars 1909, complétée par la loi du 29 juin 1935, codifiée dans le Code de Commerce aux articles L.141-1 à L.141-22. La cession de fonds de commerce n'est pas un contrat de vente "standard". Cette loi est extrêmement formaliste dans un souci de protection des créanciers du vendeur de fonds de commerce, ainsi que de l'acheteur. L'élément essentiel de la vente de fonds de commerce porte sur la clientèle commerciale. En 44 effet, la valeur d'un fonds de commerce est représentée par son chiffre d'affaire, qui reflète l'impact économique de la fréquentation du commerce par la clientèle. En fonction des secteurs d'activités, il existe des barèmes, mis en place par l'administration fiscale, qui permettent de déterminer quel est le prix raisonnable auquel doit être vendu le fonds de commerce. Néanmoins, tous les éléments permettant d'attirer la clientèle doivent être cédés : le bail commercial, les éléments de décoration, le numéro de téléphone... (Cf. supra). Voyons rapidement les conditions relatives aux parties à l'acte (A) et les mentions que doit obligatoirement contenir l'acte de vente pour être valable (B). A- Les conditions relatives aux parties à l'acte Du point de vue des parties, le vendeur est tenu de posséder le fonds de commerce lors de la vente et doit avoir la qualité de commerçant. En effet, la vente d'un fonds de commerce est un acte de commerce. En parallèle, l'acquéreur doit avoir la capacité commerciale car c'est le premier acte de commerce de sa future activité. Il n'a pas besoin d'être déjà immatriculé au Registre du Commerce et des Sociétés. Il suffit qu'il ait la capacité d'exercer une activité commerciale (pas d'interdiction pénale d'exercer une profession commerciale). B- Les mentions obligatoires devant figurer dans l'acte de cession Le contrat est soumis aux mentions obligatoires de l'article L.141-1 du Code de Commerce qui énoncent que doivent apparaître, dans le contrat de cession : 1. Le nom du précédent vendeur, la date et la nature de son acte d'acquisition et le prix de cette acquisition pour les éléments corporels, les marchandises et le matériel. 2. L'état des privilèges et nantissement grevant le fonds 3. Le chiffre d'affaire qu'il a réalisé au cours des trois dernières années d'exploitation, ou depuis son acquisition s'il ne l'a pas exploité depuis plus de trois ans. 4. Les bénéfices commerciaux réalisés pendant le même temps. 5. Le bail, sa date, sa durée, le nom et l'adresse du bailleur et du cédant, s'il y a lieu. 45 A ces mentions, il faut ajouter la ventilation du prix , c'est à dire "des prix distincts sont établis pour les éléments incorporels du fonds, le matériel et les marchandises." La liste des mentions obligatoires est limitative. On ne peut donc pas sanctionner une vente qui les énoncerait, mais qui omettrait une autre information. Si il y a une omission en dehors de ces énonciations obligatoires et qu'elle est de nature à influencer le consentement de l'acquéreur, on pourra utiliser les recours de droit commun (vice du consentement). Les sanctions pour l'inobservation de ces mentions obligatoires est la nullité relative, qui peut être demandé par l'acquéreur seul, pendant un délai d'un an à compter de la vente. Il faut toutefois que cette omission ait entraîné une mauvaise information de l'acquéreur et lui ait causé un préjudice. L'inexactitude des mentions obligatoires entraîne la garantie du vendeur, soit une diminution du prix ou la résolution de la vente. Le vendeur est tenu de respecter une clause de non-concurrence qui tient lieu de la garantie d'éviction qu'il doit à l'acquéreur. La garantie légale n'étant pas assez précise, elle est souvent complétée par des clauses conventionnelles de non-concurrence. §2- La location-gérance du fonds de commerce La location-gérance est définie par l'article L.144-1 du Code de commerce. Selon ce texte, il s'agit de « tout contrat ou convention par lequel le propriétaire ou l'exploitant d'un fonds de commerce ou d'un établissement artisanal en concède totalement ou partiellement la location à un gérant qui l'exploite à ses risques et périls ». La location-gérance est également dénommée gérance libre. Elle joue un rôle important dans certains types de circuits de distribution. Afin d'alléger les coûts de la distribution tout en ayant la maîtrise des opérations commerciales en aval, certains producteurs ont concentré et raccourci les circuits de distribution en éliminant les intermédiaires, leur permettant ainsi d'entrer directement en contact avec le consommateur. Cette intégration totale des circuits se réalise souvent en maintenant le point de vente. Le producteur a alors recours, soit à la formule du contrat de travail, soit à celle de la location-gérance, plus commode car cette technique permet une décentralisation de la gestion. Voyons la situation du propriétaire du fonds (A) puis celle du locataire-gérant (B). 46 A- Le bailleur (propriétaire) du fonds de commerce Le bailleur dispose de droits mais se voit également imposer des obligations. 1- Les droits du bailleur Le propriétaire du fonds de commerce conserve la faculté de le vendre à un tiers ou de l'apporter en société. La vente ou l'apport en société ne constitue pas une cause de résiliation du contrat, pour le gérant. Il peut toutefois être stipulé qu'en cas d'aliénation du fonds par son propriétaire, le contrat de location-gérance sera résilié de plein droit. Cette clause est parfaitement valable. Dans ce cas, le locataire-gérant aura droit à une indemnité, sauf à ce qu'il en ait été prévu autrement dans le contrat. Le propriétaire du fonds peut également le donner en nantissement. Le bailleur a surtout le droit d'exiger, d'une manière générale, le paiement du prix de la location du fonds au gérant, ainsi que l'application de toutes les autres conditions de la convention. 2- Les obligations du bailleur L'obligation essentielle du bailleur est de permettre l'exploitation du fonds par le locatairegérant. Dans cette perspective, il doit délivrer le fonds, le maintenir en état d'exploitation afin de permettre au gérant la jouissance paisible du fonds. Ces obligations, identiques à celles de tout loueur, peuvent être aménagées par les parties, jusqu'à être éventuellement supprimées, à condition toutefois de maintenir l'essentiel du contrat. B- Le locataire-gérant du fonds de commerce 1- Les droits du locataire-gérant Par le contrat de location-gérance, le bailleur confère au gérant le droit d'exploiter le fonds de commerce pour son compte, à ses risques et périls. Le gérant recueillera les bénéfices de l'exploitation, ou devra, selon le cas, en supporter les pertes. Sauf convention contraire, le gérant peut exploiter toutes les branches du fonds. Le gérant peut utiliser tous les moyens compris dans la location, et peut en exiger la délivrance. Il peut également actionner en garantie le bailleur puisque 47 le gérant a droit à une jouissance paisible et utile du fonds loué. Le gérant peut disposer des éléments du fonds qui lui appartiennent comme les marchandises, ainsi que les éléments nouveaux qu'il aura ajoutés pour les besoins de l'exploitation du fonds et qui sont sa propriété. Ces éléments peuvent être repris en fin de bail s'ils existent encore au moment de la restitution du fonds. Mais n'étant pas propriétaire du fonds de commerce, le locataire ne peut céder le fonds ni le donner en nantissement, car il faut être propriétaire. 2- Les obligations du locataire-gérant  Obligation d'exploiter le fonds de commerce loué Le locataire-gérant exploite à ses risques et périls : c'est la caractéristique de la gérance libre. C'est également une obligation pour le gérant qui doit exploiter le fonds. Le défaut d'exploitation entraînerait la disparition de la clientèle ainsi que la diminution de la valeur du fonds, ce qui causerait un préjudice pour le propriétaire. Le gérant doit également conserver un stock de marchandises suffisant pour permettre une exploitation normale et donner satisfaction à la clientèle. Il doit prendre soin du matériel confié par le bailleur et éventuellement renouveler le matériel usé. Enfin, il doit utiliser des brevets afin d'éviter leur déchéance pour défaut d'exploitation. Le locataire doit exploiter sans interruption car il risquerait de porter gravement atteinte aux droits des bailleurs. Le locataire-gérant ne doit pas porter atteinte au fonds qu'il exploite en détournant la clientèle au profit d'une autre entreprise dont il est propriétaire. Cette interdiction ne concerne pas le gérant qui se livrerait à une activité voisine ou différente mais dépendante de celle du fonds loué, ce qui pourrait être le cas lorsqu'à côté d'un commerce de gros, le gérant exploite un commerce de détail faisant l'objet du fonds loué. Il faut seulement qu'il ne s'adresse pas à la même clientèle. Le locataire ne peut changer la destination du fonds, c'est-à-dire qu'il ne peut changer modifier la nature du commerce exploité. Cette solution est incontestée car la valeur du fonds de commerce résulte de sa clientèle qui dépend de la nature même de l'activité exercée dans le fonds. Tout changement dans l'exploitation entraîne une perte de l'ancienne clientèle et une création aléatoire d'une nouvelle clientèle. Par conséquent le locataire risque de ne pas pouvoir effectuer la restitution d'un fonds prospère. De plus, le propriétaire peut ne pas posséder les aptitudes nécessaires pour continuer, à l'issue de la location-gérance, l'exploitation de la nouvelle activité du 48 commerce. Il semble que cette modification doive être refusée au locataire, même en l'absence de dommage consécutif pour le propriétaire du fonds. Le locataire ne peut pas non plus adjoindre au fonds primitif une activité nouvelle. En effet, une extension d'activité constitue une modification de l'activité initiale, possibilité interdite au locataire-gérant car elle entraîne un changement dans la destination donnée au fonds de commerce loué. Le non-respect de cette interdiction entraîne la suppression de l'activité nouvelle. En revanche, le gérant peut procéder à une extension des moyens de production et des locaux utilisés. Ainsi, le gérant qui installe un matériel nouveau peut avoir besoin de louer de nouveaux locaux. Il le peut à condition de continuer à entretenir les premiers locaux, conformément aux clauses du contrat de location-gérance, le bail des locaux étant consenti au propriétaire du fonds. Le gérant peut également adjoindre au fonds loué une activité accessoire de celle faisant l'objet de l'exploitation louée.  Obligation de payer les redevances au bailleur Le locataire-gérant doit payer le loyer convenu qui porte le nom de redevance. Son existence est une condition essentielle du contrat de location-gérance. Elle peut être constituée par une somme fixe, un pourcentage sur les bénéfices ou sur le chiffre d'affaires, voire sur les deux cumulativement. Lorsque le montant de la redevance est constitué par un pourcentage sur le chiffre d'affaires ou les bénéfices, le locataire-gérant doit communiquer sa comptabilité au bailleur qui ne dispose que d'un droit de regard, sans pouvoir s'immiscer dans la gestion elle-même du fonds.  Obligation de restituer le fonds de commerce au bailleur en fin de contrat. La restitution porte sur tous les éléments qui ont fait partie de la location, et parmi eux, le bail commercial. De ce fait, si le gérant libre déplaçait le fonds au cours de la location-gérance, en abandonnant les anciens locaux pour en occuper de nouveaux, cela entraînerait la perte de l'un des éléments du fonds loué : le bail du local. Peu importe que ce bail soit remplacé par un bail portant sur des locaux équivalents, le propriétaire du fonds a droit à la restitution des éléments mêmes qui ont fait partie de la location du fonds. Le locataire-gérant ne peut imposer au bailleur cette subrogation car en changeant la nature de la clientèle entraîne également un changement de fonds. Cette dernière constitue le plus essentiel des éléments du fonds, et sans laquelle aucun fonds ne peut exister. Le gérant ne doit donc pas déplacer le fonds, car à ce déplacement peut correspondre un changement de clientèle, ce qui pourra empêcher l'exécution de l'obligation de restitution du fonds 49 même qui a été loué. Dans le cas où la clientèle du fonds est locale, le déplacement du fonds sera par conséquent interdit au gérant, car cela aboutirait à solliciter une clientèle nouvelle. Pour les entreprises dont l'importance et la réputation sont telles que leur rayon de clientèle est très étendu, voire national, un transfert de siège sera sans influence sur leur clientèle. Ainsi, qu'une société comme Citroën ait ses usines à Paris, Lyon ou Strasbourg est sans influence sur la clientèle. §3- Le nantissement de fonds de commerce Le nantissement est une sûreté réelle, c'est-à-dire une garantie de paiement offerte à un créancier et portant sur une chose. Le nantissement est défini comme un contrat par lequel un débiteur remet un bien incorporel à son créancier pour garantir sa dette. Par exemple un commerçant demande un prêt de somme d'argent à sa banque pour financer l'achat de matériel. Pour garantir le remboursement de ce prêt, la banque lui demandera de nantir son fonds de commerce. Puisque le fonds de commerce a une valeur, il peut être utile au commerçant de se servir de cette valeur pour se procurer du crédit en constituant sur son fonds de commerce, un nantissement mais, en droit commun, le gage nécessite le dessaisissement du débiteur. Or, le commerçant qui veut constituer un nantissement sur son fonds, ne peut pas se dessaisir de ce fonds. S'il cherche à emprunter des capitaux, c'est précisément pour pouvoir exploiter son fonds. Ce sont les articles L.142-1 et suivants du Code de commerce qui régissent le nantissement du fonds de commerce. L'inscription du nantissement au greffe du Tribunal de commerce doit intervenir dans la quinzaine de l'acte, à peine de nullité, afin que les autres créanciers du commerçant soient avertis du nantissement (inscription par le greffier sur un registre spécial). Le commerçant qui a donné son fonds en nantissement, en conserve l'administration et la disposition. Il doit maintenir le fonds en activité et s'abstenir de tout acte de nature à en diminuer la valeur. Le créancier nanti a un droit de préférence et un droit de suite:  Droit de préférence: en vertu du droit de préférence, le créancier nanti lorsque le débiteur ne le rembourse pas à l'échéance, peut faire vendre le fonds aux enchères et se payer sur le prix par préférence aux autres créanciers chirographaires du commerçant. Cependant, il est primé par le vendeur du fonds non payé. Entre créanciers, le rang est déterminé par la date des inscriptions. Le créancier nanti ne peut pas demander au tribunal d'ordonner que le fonds de commerce lui soit attribué à titre de gage. La loi de 1909 lui interdit cette possibilité. 50  Droit de suite: permet au créancier, d'exercer son droit, même entre les mains de celui qui a acquis le fonds du débiteur. En pratique, celui qui achète un fonds grevé d'inscriptions, peut libérer ce fonds des inscriptions selon la procédure dite de purge. Il offre de payer son prix aux créanciers inscrits. Ces créanciers ont le droit de faire la surenchère du sixième sur le prix des éléments incorporels du fonds, et provoquer la mise aux enchères publiques du fonds, s'il estiment que le prix offert est inférieur à la valeur réelle du fonds. Le sixième est calculé sur le prix des éléments incorporels. SECTION III- Le Bail commercial Le bail commercial est un contrat qui porte sur des locaux affectés à l’exploitation d’un fonds de commerce appartenant au locataire. Il est régi par un décret du 30 septembre 1953 maintenant intégré dans le Code de commerce aux articles L.145-1 et suivants. Le statut des baux commerciaux est subordonné à l'exploitation par le locataire d'un fonds de commerce lui appartenant (Cour de Cassation, 3ème chambre civile 16 juin 2004, AJDI 2004 n° 885). Les locaux doivent être utilisés pour l’usage et l’activité indiqués au bail. L'activité exercée dans les lieux doit être commerciale, industrielle ou artisanale. Le locataire n’a pas la possibilité de les modifier sans l’accord du propriétaire à moins d’une procédure de déspécialisation. La durée du contrat de bail est fixée à 9 ans au minimum. Le locataire peut cependant donner son congé à l’expiration d’une période de trois ans en respectant un délai de préavis de 6 mois, uniquement par un acte d’huissier. Le locataire bénéficie aussi d’un droit au renouvellement de son bail. Le propriétaire est libre de refuser le renouvellement s’il le souhaite. Mais pour cela, il doit ou justifier d’un motif légitime, ou payer une indemnité d’éviction. C’est ce droit au renouvellement qui évoque la "propriété commerciale" détenue par le locataire. De plus, il faut noter que le loyer est fixé au commencement du bail et se trouve plafonné lors de son renouvellement. Cette règle peut cependant être détournée sous certaines conditions. L'article L 145-2 du Code de Commerce contient un certain nombre de situations où le statut des baux commerciaux est rendu applicable. Ce sont les extensions légales. Les extensions conventionnelles sont admises par la Cour de Cassation depuis un arrêt du 6 juillet 1982 (Civ. 3 Bull. Civ. III n° 167) à condition qu'il y ait une manifestation sans équivoque de la volonté des parties de se placer sous ce régime et que ce ne soit pas pour échapper aux dispositions d'un autre 51 régime d'ordre public. ATTENTION: Il ne faut pas confondre la location-gérance – qui porte sur le fonds de commerce – et le bail commercial qui porte sur le local, l'immeuble dans lequel est exploité le fonds. Par exemple Monsieur Homer Simpson est propriétaire d'un fonds de commerce de pâtisserie. Il exploite ce fonds dans un local appartenant à Monsieur Ned Flanders qui lui a consenti un bail commercial. Mais Homer ne veut pas continuer de travailler. Il conclue alors une location-gérance avec Apu Nahasapemapetilon. Apu exploitera le fonds de commerce pour le compte d'Homer (contrat de location-gérance) dans le local loué auprès de Ned (contrat de bail commercial). REMARQUE : Le cas du franchisé. La jurisprudence s'est longtemps fondée sur l'absence de gestion indépendante et de clientèle propre pour refuser le bénéfice du statut. Le juge va procéder à un examen des modalités de gestion et des obligations respectives du franchiseur et du franchisé. Cependant, la jurisprudence sur les franchises a évolué. Il n'est désormais plus question de " clientèle partagée " entre le franchiseur et le franchisé. L'arrêt Trévisan de la Cour de cassation du 27 mars 2002 a consacré le principe d'une clientèle propre au franchisé, car c'est lui qui " assume le risque d'une telle entreprise ". Le franchisé peut donc valablement signer un bail commercial. La jurisprudence utilise les critères d'autonomie de gestion pour déterminer s'il y a lieu à application du statut des baux commerciaux:  Stand de vente de crêpes sur la terrasse couverte d'un café : [Cass, 3ème Civ. 1er octobre 2003] - il n'y a pas autonomie de gestion, le statut n'est pas applicable.  Commerce intégré dans un hôtel : [Cass, 3ème Civ. 19 janvier 2005] - le locataire doit apporter la preuve de l'existence d'une clientèle propre. 52 CHAPITRE II – LES CONTRATS DE DISTRIBUTION Pour organiser la distribution de ses produits ou de ses services, un commerçant peut compter sur son propre travail ainsi que sur celui de ses salariés. Mais dès lors que son activité prend de l'ampleur, le commerçant dispose d'autres solutions pour se créer un réseau de distribution et ainsi accroitre sa clientèle. Il y a ainsi deux types principaux de contrats de distribution: la franchise commerciale ou franchisage (§1) et le contrat de concession commerciale (§2). §1- Le contrat de franchise commerciale ou franchisage La franchise ou franchisage est un système de commercialisation de produits et/ou de services et/ou de technologies, basé sur une collaboration étroite et continue entre des entreprises juridiquement et financièrement distinctes et indépendantes, le franchiseur et ses franchisés, dans lequel le franchiseur accorde à ses franchisés le droit, et impose l’obligation d’exploiter une entreprise en conformité avec le concept du franchiseur. Le droit ainsi concédé autorise et oblige le franchisé, en échange d’une contribution financière directe ou indirecte, à utiliser l’enseigne et/ou la marque de produits et/ou de services, et autres droits de propriété intellectuelle, soutenu par l’apport continu d’assistance commerciale et/ou technique, dans le cadre et pour la durée d’un contrat de franchise écrit, conclu entre les parties à cet effet. Voyons la réglementation de la franchise (A) avant de voir les droits et obligations pesant sur chaque partie au contrat de franchise (B). A- La réglementation applicable à la franchise. La franchise est le contrat par lequel un "franchiseur" transfère, d'une part, à un tiers indépendant, le franchisé, son savoir-faire, charge à ce dernier d'en faire un usage conforme, d'autre part, transfère d'un droit d'usage des signes de ralliement inhérent (notamment la marque ou l'enseigne), et s'engage en contrepartie de ces transferts de droit d'usage, à une assistance technique 53 et commerciale pendant toute la durée du contrat. Il n’existe pas à proprement parler de « droit de la franchise ». Ce système de distribution est régi par le droit des contrats, le droit commercial, le droit de la concurrence, le droit de la distribution, le droit des marques, etc... Différentes interventions législatives ont toutefois apporté un cadre juridique au contrat de franchise. En premier lieu les contrats de franchise ont fait l'objet d'une législation communautaire par un règlement du 30 novembre 1988 (4087/88/CE).Ce texte fait suite à l'arrêt de la Cour de Justice des Communautées Européennes du 28 janvier 1986 dit arrêt Pronuptia (arrêt fondateur au bénéfice duquel la CJCE, a examiné la compatibilité du contrat de franchise avec l'article 81 du Traité de Rome). En second lieu, pour faire face à certaines dérives constatées au cours des années 70 - 80, la loi Doubin a été adopté. Elle ne vise pas spécifiquement les contrats de franchise, mais ses conditions d'application sont larges et nombres de réseaux de distribution ou de service y sont soumis. La loi Doubin a été codifiée à l'article L.330-3 du Code de commerce. L'objet de la loi est d'imposer une information précontractuelle pesant sur toute personne qui met à la disposition d'un autre un nom commercial, une marque ou une enseigne en exigeant de cette dernière un engagement d'exclusivité ou de quasi-exclusivité. Il doit fournir, 20 jours avant toute signature de contrat conclu dans l'intérêt commun des parties ou remise d'argent, une information précontractuelle concernant l'entreprise (dénomination, références bancaires, comptes sociaux...) et ses dirigeants, le réseau de distribution (nombres de points de vente, localisation, nombre de relations ayant pris fin dans les derniers douze mois...), le marché (local et national), les prévisions de développement et le contrat. B- Les droits et obligations des parties à un contrat de franchise. 1- Les droits et obligations du franchiseur Le franchiseur est l’initiateur d’un « réseau de franchise » constitué du franchiseur et des franchisés et dont il a vocation à assurer la pérennité. Le franchiseur devra :  avoir mis au point et exploité avec succès un concept pendant une période raisonnable et dans au moins une unité pilote avant le lancement du réseau ; 54  être titulaire des droits sur les signes de ralliement de la clientèle : enseigne, marques et autres signes distinctifs ;  apporter à ses franchisés une formation initiale et leur apporter continuellement une assistance commerciale et/ou technique pendant toute la durée du contrat. 2- Les droits et obligations du franchisé Le franchisé devra :  Consacrer ses meilleurs efforts au développement du réseau de franchise et au maintien de son identité commune et de sa réputation ;  fournir au franchiseur les données opérationnelles vérifiables afin de faciliter la détermination des performances et les états financiers requis pour la direction d’une gestion efficace. Le franchisé autorisera ainsi le franchiseur et/ou ses délégués à avoir accès à ses locaux et à sa comptabilité à des heures raisonnables ;  ne pas divulguer à des tiers le savoir-faire fourni par le franchiseur ni pendant, ni après la fin du contrat (clause de secret + clause de non concurrence). La question de l'attribution d’un fonds de commerce en propre dans le cadre d’un contrat de franchise. La franchise consiste dans l’utilisation par le franchisé du savoir faire du franchiseur et de certains éléments de ralliement de la clientèle en échange du paiement d’une redevance (cf. infra). Il s’agit d’une situation de dépendance économique du franchisé vis-à-vis du franchiseur (par ex. les enseignes « Subway » et « Cuisines Schmitt » fonctionnent sous forme de franchises). Pour avoir une clientèle en propre, la jurisprudence exige une exploitation autonome. Il faudra donc que le franchisé prouve qu’il a une clientèle liée à son activité personnelle et indépendamment de l’attrait de cette clientèle par la marque du franchiseur, ou des références fournies par le franchisé. Si on arrive à attribuer une clientèle en propre au franchisé, on aboutit à une dissociation des clientèles. Si tel est le cas, on aboutit à la répartition suivante: le franchiseur a un fonds de commerce et des clients en propre, les franchisés. Le franchisé lui, va disposer d’un fonds de commerce différent et donc d’une clientèle différente fondée sur sa créativité, sur son activité personnelle et sur les risques pris pour l’exploitation de l’activité. 55 §2- Le contrat de concession Le contrat de concession est « une convention liant le fournisseur à un nombre limité de commerçants auxquels il réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines obligations » (Circulaire Fontanet du 30 mars 1960). Le contrat de concession va lier un fabriquant à un revendeur dans le cadre d'un réseau de distribution. Le fournisseur, ou concédant, distribue ses produits en exclusivité au concessionnaire. Celui-ci est un commerçant indépendant qui va acheter les biens du fabriquant pour les revendre. Voyons les caractéristiques du contrat de concession (A) avant d'étudier la fin de ce contrat (B). A- Les caractéristiques du contrat de concession Le contrat de concession a trois caractéristiques:  Contrat impliquant une activité d’achat et de vente. Le concessionnaire agit en son propre nom et pour son compte personnel en achetant les produits du fournisseur qu'il revend à sa clientèle.  Exclusivité de fourniture. L’exclusivité de fourniture, également appelé exclusivité territoriale, repose sur le concédant. Celui-ci doit approvisionner exclusivement le concessionnaire avec ces produits dans le secteur géographique qui a été attribué au revendeur (Conseil de la concurrence, 2 juillet 1998). Il appartient au fournisseur de faire respecter l'exclusivité qu'il a concédée (Com. 20 février 2007). Le secteur géographique du vendeur doit être défini précisément dans le contrat de concession. Il s’agit d’une zone d’exclusivité territoriale, les concurrents ne peuvent pas intervenir sur le territoire des autres membres du réseau (Com 26 janvier 1999). Cependant cette interdiction doit être modérée car elle ne peut faire obstacle au droit de la concurrence. L’exclusivité de clientèle se limite pour les différents revendeurs, à l’interdiction de faire de la prospection hors de son secteur. Mais, ils conservent la possibilité d’accepter les commandes émanent de clients hors secteur qui se présentent spontanément.  Exclusivité d’approvisionnement. L’exclusivité d’approvisionnement incombe au concessionnaire. Il s’engage a n’acheter certains produits qu’a un seul fournisseur, le concédant. De ce fait, il ne peut pas vendre des produits similaires au sein de son 56 commerce. Le concédant acquiert une garantie de vente de sa marchandise et, le concessionnaire, est garanti sur l’approvisionnement des marchandises. L'exclusivité d'approvisionnement est typique des contrats de distribution d’essence ou, les contrats des fabricants de bière avec les débits de boisson. La plus part des contrats de concession sont d’exclusivité réciproque de fourniture et d'approvisionnement. Cependant, la jurisprudence admet les contrats de concession exclusive ainsi que ceux de concession sans exclusivité d’approvisionnement (Com 25 janvier 2000). Le contrat de concession intervient le plus souvent dans la commercialisation de biens de consommation durable comme, les produits de marque. La distribution automobile ainsi que la distribution des produits de luxe se fait ainsi par le biais de contrats de concession. La nature particulière de ces biens demandent une aptitude professionnelle pour répondre aux exigences de la clientèle. C’est dans ce but que le fabriquant va effectuer le choix des revendeurs. Le concédant a la possibilité de fixer des exigences pour la vente de ces produits comme pour le prix auquel ils seront vendus. Il peut en effet établir des tarifs de vente au détail, il s’agit de maxima ne pouvant être dépassés par le concessionnaire. Cependant pour que le contrat soit valable, le revendeur dispose de la possibilité de diminuer le prix, notamment dans le cas de rabais à certains clients. Cette liberté de modification des prix est essentielle car à défaut, le contrat ne serai pas valable en raison de l’interdiction des prix imposés faîte par le droit de la concurrence. Le concessionnaire achetant pour revendre, le prix ne peut être fixé par le concédant : il s'agit là d'une différence majeure avec le contrat d'agent commercial ou de commissionnaire Bien que le concessionnaire achète les marchandises du concédant, sa rémunération est souvent fixée sous la forme d'une commission. Sinon elle résulte de la marge qu'il fait sur la revente. B- La fin du contrat de concession 1- La rupture du contrat de concession Le concessionnaire n'a pas de droit au renouvellement d'un contrat à durée déterminée lors de l'expiration à l'arrivée du terme prévu. Le concédant peut avoir un comportement fautif au terme du contrat , par exemple, en faisant croire au concessionnaire qu’il va renouveler le contrat et en lui 57 faisant faire des investissements. Dans ces cas, le concessionnaire pourra obtenir réparation du préjudice. La preuve de l’abus incombe au concessionnaire. Le concédant doit respecter ses engagements jusqu'à la fin du contrat, notamment les dispositions contractuelles prévoyant le préavis. La rupture du contrat à durée indéterminée peut intervenir avant l’arrivée du terme dans certains cas. Il faut qu’elle soit justifiée par exemple si le concessionnaire a fait des investissements après que le concédant lui ait fourni de faux renseignements sur la situation financière de l’entreprise ou si le concédant invoque l’insuffisance de trésorerie et le montant excessif des dettes du concessionnaire à son encontre. Une autre cause de rupture peut être trouvée dans le cas où le revendeur ne respecte pas les quotas de vente ou d’achats imposés dans le contrat. Il a été jugé que le concédant était en droit de rompre le contrat à tout moment, indépendamment de l'échec de la reprise de la concession, et en l'absence d'une constatation que le concédant avait fait croire au concessionnaire que le contrat serait poursuivi pour l'inciter à procéder à des investissements (Com. 5 octobre 2004). Le contrat de concession peut avoir prévu des clauses de tacite reconduction ou de renégociation du contrat. Si un des contractant souhaite ne pas renouveler le contrat à son terme, il doit prévenir l’autre partie suffisamment tôt. 2- Les effets de la rupture La rupture du contrat met fin aux relations commerciales entre les cocontractants. Le concessionnaire ne peux plus commercialiser ni les produits ni la marque du fournisseur. Il est mis en dehors du réseau de distribution. Il a l’obligation de restituer le matériel qui a pu lui être prêté par le concédant. Il doit en outre respecter toutes les clauses prévues dans le contrat de concession comme notamment les clauses de non concurrence. Le concessionnaire a également l’obligation de restituer l’enseigne et les signes descriptifs du concédant. A défaut, leur utilisation peut être considéré comme étant constitutive de contrefaçon. Par ailleurs, le concédant peut être tenu de reprendre tout le stock restant au revendeur, si cela a été prévu dans une clause du contrat de concession. Dans les cas où le contrat ne prévoit pas une telle clause, le concédant n’a pas d'obligation de racheter la marchandise. 58 Partie I: Les acteurs de la vie des affaires CHAPITRE I – Le commerçant Section I – Le régime général du commerçant §1- La notion de commerçant A- L'accomplissement d'actes de commerce 1- Les actes de commerce par nature (ou en raison de leur objet) 2- Les actes de commerce par la forme 3- Les actes de commerce par accessoire 4- Les actes mixtes B- L'exercice à titre de profession habituelle C- L'exercice à titre indépendant §2- Les conditions requises pour exercer une activité commerciale A- Les conditions tenant aux personnes 1- Le principe de l'interdiction pour les personnes protégées a) Les mineurs b) Les majeurs protégés 2- Le principe se spécialité des personnes morales 3- Le commerçant étranger 4- Les incompatibilités 5- Les déchéances B- Les conditions tenant aux activités 1- Les activités interdites 2- Les activités soumises à autorisation 3- Les activités soumises à conditions 4- Les activités soumises à une exigence de qualification §3- Les obligations du commerçant A- L'inscription au RCS 1- Le RCS 2- Les effets de l'inscription au RCS 3- La publicité des informations permettant l'identification de l'entreprise B- La tenue des livres de commerce et la comptabilité 1- Les principes gouvernant la comptabilité des commerçants 2- L'allègement des obligations comptables au profit de certains commerçants §4- Les règles applicables aux actes passés par le commerçant A- Le principe de la liberté de la preuve B- Le principe de la solidarité en matière commerciale Section II – La personne du commerçant §1- Le commerçant personne physique A- Les formes de l'activité individuelle B- La limitation des risques professionnels §2- Les sociétés commerciales A- La notion de société B- Les différentes formes de sociétés commerciales 59 CHAPITRE II – Les autres acteurs (non traité) Section I – Les professionnels non commerçants §1- Les artisans §2- Les agriculteurs §3- Le conjoint du commerçant §4- Les auto-entrepreneurs Section II – Les institutions administratives et organismes professionnels §1- Les institutions administratives favorisant l'activité commerciale §2- Les Chambres de commerce et d'industrie Section III– Le particularisme de la justice commerciale (le règlement des litiges) §1- Les Tribunaux de commerce 1- Organisation 2- Compétence 3- Procédure §2- L'arbitrage 1- Saisine d'un tribunal arbitral 2- Composition et compétence du tribunal arbitral 3- La sentence arbitrale Partie II: Les moyens de l'activité commerciale CHAPITRE I – Le fonds de commerce Section I – Nature et éléments du fonds de commerce §1- La nature du fonds de commerce A- La notion de fonds de commerce B- La distinction du fonds de commerce et des notions voisines §2- Les éléments du fonds de commerce A- Les éléments corporels B- Les éléments incorporels §3- Le rôle particulier de la clientèle A- La clientèle, élément générateur du fonds de commerce 1- La clientèle, élément essentiel du fonds de commerce 2- Les conséquences attachées au caractère essentiel de la clientèle B- Le fonds de commerce, élément générateur de clientèle 1- La clientèle-valeur 2- L'attribution de la clientèle-valeur Section II - Les opérations portant sur le fonds de commerce §1- La cession de fonds de commerce A- Les conditions tenant aux parties à l'acte de cession B- Les mentions obligatoires devant figurer dans l'acte de cession 60 §2- La location-gérance A- Le bailleur (propriétaire) du fonds de commerce 1- Les droits du bailleur 2- Les obligations du bailleur B- Le locataire-gérant du fonds de commerce 1- Les droits du locataire-gérant 2- Les obligations du locataire-gérant  Obligation d'exploiter le fonds de commerce loué  Obligation de payer les redevances  Obligation de restituer le fonds de commerce au bailleur à la fin du contrat §3- Le nantissement de fonds de commerce Section III –Le Bail commercial CHAPITRE II – Les contrats de distribution §1- Le contrat de franchise commerciale ou franchisage A- La réglementation applicable à la franchise B- Les droits et obligations des parties à un contrat de franchise 1- Les droits et obligations du franchiseur 2- Les droits et obligations du franchisé §2- Le contrat de concession A- Les caractéristiques du contrat de concession B- La fin du contrat de concession 1- La rupture du contrat de concession 2- Les conséquences de la rupture du contrat de concession Fin du Cours 61