Technè
La science au service de l’histoire de l’art et de la
préservation des biens culturels
43 | 2016
Une Europe de la recherche en sciences du patrimoine
D’AGLAE à New AGLAE
From AGLAE to new AGLAE
Claire Pacheco, Quentin Lemasson, Brice Moignard, Laurent Pichon, Marie
Radepont et Didier Gourier
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/techne/689
DOI : 10.4000/techne.689
ISSN : 2534-5168
Éditeur
C2RMF
Édition imprimée
Date de publication : 1 août 2016
Pagination : 63-69
ISBN : 978-2-7118-6338-9
ISSN : 1254-7867
Référence électronique
Claire Pacheco, Quentin Lemasson, Brice Moignard, Laurent Pichon, Marie Radepont et Didier Gourier,
« D’AGLAE à New AGLAE », Technè [En ligne], 43 | 2016, mis en ligne le 19 décembre 2019, consulté le
23 juillet 2020. URL : http://journals.openedition.org/techne/689 ; DOI : https://doi.org/10.4000/
techne.689
La revue Technè. La science au service de l’histoire de l’art et de la préservation des biens culturels est
mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation
Commerciale - Pas de Modification 4.0 International.
TE C H N È n° 43, 2016
Claire Pacheco
Quentin Lemasson
Brice Moignard
Laurent Pichon
Marie Radepont
Didier Gourier
Une Europe de la recherche en sciences du patrimoine
D’AGLAE à New AGLAE
From AGLAE to new AGLAE
Abstract. The development of the instrument and the
methodologies of ion beam analysis applied to Cultural Heritage
issues is a major interest of the AGLAE team. The New AGLAE
project aims at providing an automated beamline available night
and day as well as a new PIXE, PIGE, RBS and IBIL detection
system enabling systematic chemical imaging on several cm².
Keywords. New AGLAE, multi-detector, systematic chemical
imaging.
Depuis son installation en 1988 dans les sous-sols du Palais
du Louvre, l’Accélérateur Grand Louvre d’Analyse Élémentaire
(AGLAE) a fait l’objet de développements instrumentaux et
méthodologiques continus afi n d’en améliorer les performances pour l’étude d’objets du patrimoine aux problématiques, spécificités et contraintes particulières (voir article de
J.-C. Dran dans ce volume). Lauréat d’un appel d’offre
Equipex, le projet New AGLAE s’inscrit pleinement dans cette
dynamique. En effet, les demandes d’accès au faisceau
d’AGLAE se font de plus en plus nombreuses, ce qui a motivé
le premier volet du projet, à savoir l’automatisation de la ligne
afi n de pouvoir travailler également la nuit. De plus, si la
plupart des matériaux essentiellement inorganiques (métaux,
pierres, céramiques, verres…) peuvent être étudiés directement sans aucune préparation et ce de façon non-invasive,
certains matériaux fragiles comme, typiquement, les couches
picturales composées d’un pigment inorganique et d’un liant
organique, peuvent être modifiées de façon irréversible par
le faisceau incident. C’est la raison pour laquelle la conception
et le développement d’un multi-détecteur capable de générer
une image chimique systématique font l’objet du second axe
du projet New AGLAE.
Automatisation de la ligne de faisceau
L’automatisation de la ligne de faisceau permet d’augmenter
le temps de faisceau disponible et de gagner en efficacité en
termes de réglage quotidien. À l’automatisation s’ajoute donc,
en pré-requis, la stabilisation du faisceau. Cette double tâche
a fait l’objet d’un appel d’offres remporté par la société Thalès.
Les travaux sont prévus en 2017 et impliqueront l’inaccessibilité d’AGLAE aux équipes de recherche pendant plusieurs
mois.
À terme, ces travaux imposants rendront possible aux
utilisateurs l’accès à AGLAE 24h/24, et ce, 5 jours sur 7. La
journée restera consacrée aux œuvres et la nuit permettra
l’analyse automatisée de séries d’échantillons ou des cartographies nécessitant des acquisitions longues.
Développement d’un multi-détecteur
PIXE (Particle Induced X-ray Emission)
L’une des préoccupations majeures est de générer le moins
de modifications du matériau sous l’incidence des particules.
Si certains matériaux sont bien connus pour n’avoir aucune
Claire Pacheco, ingénieur de recherche, chef du groupe AGLAE+, département Recherche, C2RMF, FR 3506 New AGLAE CNRS/Ministère de la
Culture et de la Communication ; responsable de FIXLAB dans le cadre du projet CHARISMA de 2012 à 2014 (
[email protected]).
Quentin Lemasson (
[email protected]), Brice Moignard (
[email protected]) et Laurent Pichon (laurent.
[email protected]), ingénieurs d’étude, AGLAE, département Recherche, C2RMF, FR 3506 New AGLAE CNRS/Ministère de la Culture
et de la Communication. Marie Radepont, post-doctorante, C2RMF et CRCC (projet de recherche CORDOBA – Labex Patrima) (marie.
[email protected]). Didier Gourier, professeur à l’École de Chimie ParisTech, directeur de la fédération de recherche FR 3506
New AGLAE CNRS/Ministère de la Culture et de la Communication (
[email protected]).
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II. Le développement instrumental et méthodologique
Résumé. Le développement de l’instrument et des méthodes
d’analyse par faisceau d’ions appliquées aux problématiques
patrimoniales est au cœur de l’activité de l’équipe AGLAE.
Le projet New AGLAE a pour objectif de mettre à disposition des
chercheurs une ligne de faisceau automatisée et en fonctionnement
jour et nuit, ainsi qu’un nouveau système de détection PIXE,
PIGE, RBS et IBIL capable d’effectuer de l’imagerie chimique
systématique sur plusieurs centimètres carrés.
Mots-clés. New AGLAE, multi-détecteur, imagerie chimique
systématique.
Une Europe de la recherche en sciences du patrimoine
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TE C H N È n° 43, 2016
réaction visible pendant l’analyse (céramiques, pierres,
métaux…), d’autres, comme les verres, peuvent parfois être
marqués localement, le phénomène s’avérant souvent réversible
à la lumière. D’autres matériaux, comme le blanc de plomb,
sont notoirement instables sous le faisceau1. Dans le but de
diminuer le nombre de particules incidentes susceptibles de
modifier le matériau cible, un multi-détecteur, représenté en
figure 1, a été conçu et réalisé par l’équipe AGLAE2. La possibilité d’additionner les spectres des quatre détecteurs de
haute énergie peut présenter plusieurs intérêts pour l’utilisateur.
En effet, dans le cas d’étude d’un matériau fragile, une information peut être enregistrée à un niveau exploitable avant que
le matériau ne soit modifié de façon irréversible. Si le matériau
est peu sensible au faisceau, la multiplication du nombre de
détecteurs peut permettre d’augmenter la statistique et les
limites de détection. En corollaire, le temps d’analyse peut
être diminué pour atteindre le même niveau d’information
obtenu avec l’ancien système de détection. Le nombre d’échantillons étudiés en une journée peut donc être augmenté, ce
qui est un réel bénéfice pour les études portant sur des séries
d’échantillons nécessitant un nombre de points suffisamment
conséquent pour pouvoir réaliser des analyses statistiques
représentatives comme les études de provenance.
Avec les fi ltres ad hoc, les détecteurs de haute énergie
peuvent être utilisés indépendamment ou également regroupés
par 2, 3 ou 4, permettant de mettre en exergue certains éléments dont les limites de détection ne sont pas suffisantes
pour un seul détecteur. Par exemple, dans un alliage à base
de cuivre, un filtre de 200 µm d’aluminium sur un détecteur
combiné à un filtre de 25 µm de cobalt sur un autre permettent
d’obtenir d’une part la composition élémentaire de la matrice
1
6
1
et d’autre part les éléments traces lourds. Les éléments légers
sont détectés au moyen du détecteur de basse énergie sous
flux d’hélium.
L’utilisation du PIXE pour effectuer une recherche de
provenance est l’une des applications récurrentes de l’analyse
par faisceau d’ions à AGLAE. Dans le cadre de CHARISMA,
la campagne de mesures CALLAÏS, souscrite par S. Dominguez
Bella de l’université de Cadix en Espagne, avait pour objectif
d’identifier la source géologique d’objets néolithiques en
variscite issus de sites archéologiques datant du Ve au IIIe millénaire avant notre ère dans les régions de Barcelone, Huelva
et Zamora. Des matériaux géologiques de référence ont également été analysés afin d’enrichir la base de données existante. Cette campagne, qui s’intégrait dans un projet de
recherche plus vaste, a permis de démontrer que les objets
n’avaient pas été façonnés à partir de matière première issue
des gisements géographiquement les plus proches, certains
étant distants de plusieurs centaines de kilomètres3.
RBS (Rutherford Backscattering Spectroscopy)
Le système actuel permet d’utiliser ensemble ou séparément
deux détecteurs RBS. Le premier est un détecteur annulaire
situé dans la ligne de faisceau à un angle de diffusion égal à
170°, tel qu’il a été conçu antérieurement pour l’étude des
patines volontaires des alliages à base de cuivre de l’époque
romaine4. Si nécessaire, un détecteur RBS annexe peut se
substituer à un détecteur PIXE à un angle de diffusion de
130°, permettant de s’affranchir du signal de la fenêtre d’extraction (pour mesurer l’azote par exemple).
7
5
2
1
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4
1
Fig. 1. Extrémité de la ligne
de faisceau extrait d’AGLAE
arborant le nouveau multidétecteur composé de
1 : quatre détecteurs PIXE
de haute énergie ;
2 : un détecteur PIXE
de basse énergie ;
3 : une fibre optique
permettant la collecte
du signal d’IBIL ;
4 : un détecteur de dose ;
5 : un détecteur gamma ;
6 : un détecteur RBS
annulaire, situé dans
la ligne et invisible sur
la photo ;
7 : une caméra permettant
de visualiser la zone
d’analyse avec précision.
C. Pacheco, Q. Lemasson, B. Moignard, L. Pichon, M. Radepont, D. Gourier
IBIL (Ion Beam Induced Luminescence)
L’un des effets de l’interaction particules-matière peut être
l’émission d’un rayonnement électromagnétique dans le
domaine du visible. On parle alors d’ionoluminescence ou
IBIL (Ion Beam Induced Luminescence)5. Ce phénomène,
sensible à l’environnement chimique des atomes concernés,
peut apporter, combiné au PIXE, des informations sur la
spéciation (degré d’oxydation, environnement) de certains
éléments6. En effet, des phases spécifiques peuvent être identifiées grâce à cette technique. Par exemple, le rutile et l’anatase présentent le même spectre PIXE mais des spectres d’IBIL
bien caractéristiques. Des ultra-traces, indétectables au PIXE
car leurs limites de détection sont inférieures au ppm, peuvent
également être mises en évidence par IBIL et s’avérer révélatrices d’une provenance (par exemple, le manganèse dans la
calcite ou l’apatite, ou bien les terres rares dans les zircons).
Enfin, les modifications de matériau induites par le faisceau
d’ions peuvent être mises en évidence par cette méthode. En
effet, l’intensité du signal d’ionoluminescence diminue avec
le temps d’analyse et la forme du spectre évolue en fonction
des défauts créés par l’interaction entre les ions et la matrice7.
Sur AGLAE, un système de détection d’IBIL a été intégré
au multi-détecteur8. Il est constitué d’une fibre optique qui
collecte le signal à un angle de 45° par rapport à l’axe du
faisceau. Celle-ci est choisie en fonction du domaine spectral
d’intérêt (UV-visible ou visible-proche IR) et transporte le
signal jusqu’au spectromètre Ocean Optics QE 65000. Les
spectres sont enregistrés pour chaque point analysé simultanément avec les spectres PIXE correspondants. L’une des
premières applications de l’IBIL à AGLAE a été l’étude du
lapis-lazuli du trésor égyptien de Tôd9. La combinaison PIXEIBIL a permis non seulement d’identifier la provenance du
lapis-lazuli en Afghanistan, mais également de déterminer
que les produits d’altération sont principalement issus de
l’oxydation de la pyrite FeS2.
Imagerie systématique
Jusqu’à présent, les analyses sur AGLAE s’effectuaient point
par point. Plusieurs points d’analyse étaient alors nécessaires
pour pouvoir faire une moyenne et obtenir un résultat représentatif. La cartographie était également possible en translatant l’objet en X et Y devant le faisceau focalisé sur une
cinquantaine de µm de diamètre10.
L’équipe AGLAE a adapté un système d’acquisition multiparamétrique fonctionnant en List Mode, signifiant que pour
chaque événement enregistré (photon X ou gamma, particule
rétrodiffusée…), la position {X, Y} du faisceau sur la cible est
simultanément enregistrée, rendant ainsi l’imagerie chimique
systématique accessible.
D’AGLAE à New AGLAE
Un nouveau système de balayage du faisceau
Le faisceau est dorénavant défléchi verticalement au moyen
de bobines magnétiques situées dans la ligne. À une certaine
vitesse, la marque ponctuelle du faisceau n’est plus visible et
l’on obtient un « pinceau » vertical d’une dimension maximale
de 500 µm. Afin de couvrir la zone d’intérêt, l’objet est mécaniquement déplacé horizontalement. Au bout de la ligne
balayée, la cible effectue un saut mécanique vertical équivalent
à la hauteur du pinceau, puis le balayage horizontal reprend
en sens inverse. Cette combinaison de balayages magnétique
et mécanique permet de couvrir une zone sur toute la longueur
de débattement mécanique du chevalet d’AGLAE, à savoir
20 x 20 cm² avec une résolution maximale de 6 x 3 µm², ce
qui est particulièrement adapté aux objets du patrimoine
dont les zones d’intérêt peuvent atteindre quelques centimètres
carrés.
Deux types de balayages sont opérationnels. Le premier,
rapide, ne permet pas d’effectuer des traitements quantitatifs
des cartographies obtenues, la dose n’étant pas identique
pour chaque pixel. Ce mode de balayage permet de localiser
quasi instantanément des zones qui peuvent faire l’objet strict
de l’étude ou, à l’inverse, dont il faut s’affranchir car elles
fausseraient les mesures. L’autre mode de balayage, moins
rapide, permet de fi xer une valeur de dose par colonne, la
hauteur de celle-ci étant celle du pinceau. L’objet n’est déplacé
mécaniquement qu’au moment où cette valeur est atteinte,
en dépit des fluctuations du faisceau inhérentes à la machine
elle-même. Ce mode de balayage assure une dose homogène
sur tous les pixels, rendant possible le traitement quantitatif
de la cartographie.
Extraction et traitement quantitatif des données
Les données générées sont extraites en format EDF (pour
ESRF Data Format), permettant ainsi une manipulation aisée
par les outils en accès libre tels que PyMCA 11 ou les logiciels
« maison » de traitement et/ou de visualisation des données,
développés par l’équipe AGLAE pour ses besoins spécifiques.
Au moment de l’extraction, la résolution peut être diminuée,
augmentant ainsi la statistique par pixel.
Le logiciel AGLAEMap (fig. 2) permet de rapidement
sélectionner et visualiser des données enregistrées par chaque
détecteur sur une même zone (PIXE, PIGE, RBS ou IBIL).
Le spectre somme correspondant s’affiche sous cette dernière.
L’utilisateur peut sélectionner un pic du spectre, la répartition
spatiale de l’élément correspondant se met alors automatiquement à jour. Si seule une zone spécifique fait l’objet de
l’étude, l’utilisateur peut sélectionner les pixels de cette zone
et enregistrer les données de chaque détecteur pour cette
zone. Le traitement de données s’effectue alors comme pour
une analyse ponctuelle.
Le schéma en figure 3 illustre les différentes étapes pour
l’obtention d’une cartographie quantitative à partir des données brutes. En effet, chaque famille de données (PIXE, PIGE,
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Une Europe de la recherche en sciences du patrimoine
a
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b
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Fig. 2. Exemple de traitement de données réalisables par le logiciel AGLAEMap. a) Sur le spectre PIXE de la zone analysée, un pic est
sélectionné. La cartographie se met alors à jour et révèle la répartition spatiale de l’élément choisi. Ici, 3 éléments ont été choisis l’un après
l’autre (K, Fe et Pb). b) Sur la cartographie, une zone d’intérêt est sélectionnée (en gris sur l’image). Les données enregistrées par chaque
détecteur sur cette zone-là uniquement peuvent être traitées comme des analyses ponctuelles.
RBS ou IBIL) doit être traitée par un outil conçu et développé
par l’équipe AGLAE qui fait appel à un moteur de calcul
spécifique. Les données PIXE sont ainsi traitées par le logiciel
maison TR AUPIXE12 qui fait appel au moteur de calcul
GUPIXWin13 . L’image quantitative est reconstruite par
DataImaging, comme illustré en figures 4 et 5 par deux
exemples. Une campagne de mesures a été initiée par J. Van
Bennekom du Rijsksmuseum à Amsterdam sur une plaque
en argent du XVI e siècle. Celle-ci est située sous le centre de
table connu sous le nom de MerkelscheTafelaufsatz, signé de
l’orfèvre Wenzel Jamnitzer. La plaque porte des traces de
gravure qui a été volontairement effacée. Aucune technique
(photographie en incidence rasante, radiographie, cartographie en XRF) n’a permis de lire le texte. La cartographie
PIXE sur AGLAE a donné la possibilité non seulement d’identifier certaines lettres, mais également de valider certaines
hypothèses quant au mode de gravure à l’eau-forte et la technique utilisée pour supprimer l’inscription (burin et/ou
papier abrasif)14. L’imagerie systématique sur AGLAE ouvre
de nouveaux champs d’application aux analyses par faisceau
d’ions appliquées au patrimoine. Le second exemple est
illustré par l’étude d’un vitrail de la cathédrale de Chartres
datant du XII e -XIII e siècle, étude effectuée par C. Loisel du
LRMH. Ici, l’une des questions posées concernait la recette
du lavis utilisé pour les carnations et les cheveux : s’agissait-il
de grisaille diluée ou avait-il été réalisé à partir de silicate de
plomb ? L’image permet, d’un coup d’œil, de localiser le
Fig. 3. Étapes et outils nécessaires à l’obtention de cartographies
quantitatives à partir de données brutes. Les outils qui font appel
aux moteurs de calcul (GUPIXWin pour le PIXE et Data Furnace
pour le RBS) et permettant de reconstruire les images à partir
des données traitées ont été développés par l’équipe AGLAE.
D’AGLAE à New AGLAE
C. Pacheco, Q. Lemasson, B. Moignard, L. Pichon, M. Radepont, D. Gourier
67
Ca
Fe
Pb
RBS – Signal du Pb
Fig. 4. Cartographie de 6 x 3 cm² réalisée sur un vitrail de la cathédrale de Chartres du XII e -XIII e siècles (© C. Loisel – LRMH). Reconstruction
de l’image chimique quantitative des éléments Ca, Fe et Pb par DataImaging après traitement des données par le moteur GUPIXWin.
La cartographie RBS révèle la répartition spatiale du plomb en surface et sur quelques dizaines de µm de profondeur.
plomb à la fois dans le lavis et la grisaille, mais dans cette
dernière le fer uniquement, validant la seconde hypothèse.
L’image obtenue à partir des données RBS brutes représente
la répartition spatiale du plomb en surface et à quelques
dizaines de micromètres de profondeur. Cette image se superpose à celle du plomb obtenue en PIXE, mais d’autres motifs
apparaissent. Pour comprendre et interpréter cette image,
chaque spectre contenu dans chaque pixel doit être traité.
Pour atteindre cet objectif, l’équipe AGLAE a choisi le moteur
de calcul DataFurnace, développé par l’université de Surrey15.
Afin de mettre au point la méthodologie, un modèle simple
a été choisi dans le cadre du programme de recherche
CORDOBA (voir l’article de L. Robinet et al. dans ce volume) :
une feuille d’argent déposée sur une lame de verre dont une
partie a été volontairement repliée. Une cartographie RBS
est réalisée avec des particules alpha de 3 MeV et un détecteur
à un angle de diffusion de 130°. D’après les caractéristiques
données par le fabricant, la feuille d’argent a une épaisseur
de 220 nm, ce qui est confirmé par la mesure ponctuelle de
l’épaisseur par RBS : 220 ± 50 nm pour la feuille simple et
410 ± 50 nm pour la double. La reconstruction par DataImaging
de l’épaisseur de la feuille d’argent sur la zone analysée montre
bien la zone où la feuille est double et les mesures en adéquation avec les valeurs précédentes. Ceci permet de valider la
a
b
Fig. 5. Cartographie de la raie Ka du cuivre obtenue sur le spectre
somme PIXE de haute énergie ; a) le contour d’une lettre
se distingue ; b) il s’agit de la lettre Q.
Une Europe de la recherche en sciences du patrimoine
méthodologie et ouvre de réelles perspectives quant à l’imagerie RBS couplée aux autres techniques.
Quant aux spectres IBIL et PIGE, si les premiers peuvent
être traités par l’algorithme NNMA (Non-Negative Matrix
Approximation)16 inclus dans le logiciel PyMCA, la méthodologie et l’outil sont à concevoir et à développer pour le
PIGE. L’équipe AGLAE s’attellera à cette tâche dès l’acquisition
de nouveaux détecteurs gamma planifiée après l’installation
de la nouvelle ligne de faisceau en 2017, réalisée en collaboration avec Thalès.
Conclusion et perspectives
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L’équipe AGLAE conçoit et développe l’instrument et les
méthodes d’analyse par faisceau d’ions dans le but d’en repousser les limites actuelles pour les applications patrimoniales.
Les projets menés dans le cadre de CHARISMA ont mis en
avant la demande de développement de l’IBIL et ont également
permis d’effectuer des études originales où l’imagerie était
indispensable. Le multi-détecteur est opérationnel et a servi
dans de nombreuses études du programme CHARISMA. Un
outil de cartographie des données quantitatives RBS est en
cours de développement par l’équipe AGLAE et devrait être
prochainement opérationnel.
La prochaine grande étape aura lieu en 2017, avec l’installation de la nouvelle ligne de faisceau New AGLAE, plus
stable et automatisée, réalisée avec Thalès. Par la suite, de
nouveaux détecteurs gamma viendront enrichir le multidétecteur ; le traitement des cartographies PIGE, ainsi que
TE C H N È n° 43, 2016
le couplage total PIXE-PIGE, seront au centre des préoccupations de l’équipe AGLAE pour 2017-2018, l’objectif final
étant de tendre vers le « Total IBA »17 qui prend en compte
les données PIXE et PIGE au cours du traitement des données
RBS.
L’installation New AGLAE accueillera de nouveaux utilisateurs français et, dans le cadre du programme IPERION
CH (H2020), des chercheurs européens. Ce même programme
permet également des activités de recherche conjointes.
D’abord, AGLAE est engagée, au côté d’IPANEMA et de
BNC-Wigner, dans une tâche consistant à concevoir et développer un porte-objet/échantillon dynamique qui, lors d’une
cartographie, positionne la cible de façon à ce que, à chaque
point, la zone analysée soit à la bonne distance et perpendiculaire au faisceau. Puis, en collaboration avec ATOMKI-HAS,
les modifications des matériaux induites par faisceau d’ions
seront un centre d’intérêt majeur qui permettra d’établir les
conditions expérimentales optimales pour diminuer les
risques, rendant ainsi possible l’étude de matériaux
fragiles.
Remerciements
L’équipe AGLAE souhaite remercier Claudine Loisel du
LRMH, Julien Colaux de l’Ion Beam Centre de l’université
de Surrey, Dominique Jousse et l’équipe de Thalès. Le projet
New AGLAE a été lauréat du programme « Equipex – investissements d’avenir » de l’Agence Nationale de la Recherche
(ANR-10-EQPX-22) et a également bénéficié du soutien financier de la Ville de Paris et de Rennes Métropole.
Notes
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2015.
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d’identifier la patine comme étant
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