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Article publié le 3 juillet 2015
PUBLIÉ DANS LE MAGAZINE
de Rocco Marseglia
Le 17 juin dernier, le Comité pour la vérité sur la dette publique grecque a
rendu publics les premiers résultats de ses analyses. Un rapport met en lumière
que même avant l’intervention de la Troïka, l’augmentation de la dette n’était pas
due à une dépense publique excessive (restée plus faible que celle des autres pays
européens) mais au paiement de taux d’intérêt extrêmement élevés.
Le Comité démontre également que les premiers accords visaient surtout à
permettre aux banques de réduire leur exposition aux titres publics grecs et qu’au
lieu de se révéler bénefiques pour la Grèce, la plupart des fonds prêtés au pays
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(/babeliens/12551/cafebabel-it.html)
étaient directement transférés aux institutions financières. Tout cela explique
pourquoi ces mêmes créanciers qui s’étaient empressés de voler au secours de la
Grèce lors des crises précédentes, sont désormais prêts à abandonner le pays à
son sort.
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(/babeliens/12949/roccomarseglia.html)
Deux touristes au Louvre | (cc) Brett Davis/Flickr (https://www.flickr.com/photos/brettdavis/2751372923/)
View profile (/babeliens/4434/cecilevergnat.html)
En plus de la dette de la Grèce - de nature essentiellement financière - une autre
dette, immatérielle celle-ci, s’ajoute : tous les pays européens l’ont contractée
envers Athènes.
Nous aurions tort de croire que notre dette réside dans les idées de démocratie,
philosophie, mathématiques, médecine, physique, ou dans le théâtre et
l’historiographie, dans l’architecture et la rhétorique, dans la mythologie et les
innombrables autres secteurs de la culture, que nous définissons avec des mots
d’origine grecque. Nous nous complaisons de leur étymologie classique. Mais ces
concepts désignent des réalités historiques et culturelles qui remontent à
l’antiquité et souvent très différentes de celles d’aujourd’hui : c’est un piège de
vouloir voir en eux de simples ancêtres de nos idées ou –pire – les considérer
comme étant des catégories universelles dont les anciens Grecs auraient été les
découvreurs.
Notre dette est de nature différente : l'Antiquité grecque, reprise et constamment
réélaborée, la manière d'interpréter et de concevoir l'Antiquité ont été un moyen
puissant par lequel les peuples européens ont pu réfléchir sur eux-mêmes. C’est
par exemple avec la redécouverte des textes anciens qu’est apparu l’Humanisme,
le premier grand mouvement culturel international et européen. L’art ancien a été
le modèle de prédilection pour la Renaissance italienne, et le néoclassicisme de
Winckelmann, puis la Grèce ancienne a également inspiré le théâtre
élisabéthain, le Classicisme français, le Romantisme allemand, la philosophie
antique et moderne, la psychanalyse… Tellement d’idées différentes de l’Antiquité
qui ont permis à l’Europe de se penser elle-même, de se définir et de canaliser ses
énergies créatives. Le palais du Reichstag – où le Parlement allemand pourrait
être appelé à se prononcer sur un nouveau plan d’aides à la Grèce – renvoie aux
modèles architecturaux grecs !
L’enjeu de la crise grecque est donc beaucoup plus vaste. Athènes a refusé de
souscrire aux conditions dictées par les créanciers, conditions qui n’ont jusqu’à
présent fait que contribuer à réduire le PIB et augmenter la dette publique (en
aggravant davantage le rapport dette/PIB). Mais pas seulement. Elles ont aussi
donné lieu à des changements dramatiques dans la société et ont provoqué une
crise humanitaire insoutenable. Pour tous les citoyens européens, ce refus doit
être une opportunité et un défi : nous sommes appelés à renouer avec les racines
humanistes de l’Europe, en replaçant l’homme au centre contre les dérives de
l’économie néolibérale.
Alors que les marchés continuent de brûler plus que le montant intégral de la
dette grecque, nous sommes amenés à répondre de toute urgence à une grande
interrogation politique : quel modèle pour l’Europe ? C’est justement l’antiquité
qui nous offre encore une fois les outils pour nous repenser. Nous évoquons, dans
une perspective de comparaison d’ordre différent, deux épisodes de l’histoire
grecque.
La Vénus de Milo. | (cc) Pepius/Flickr
(https://www.flickr.com/photos/pepabelarra/492991628/in/photostream/)
Au lendemain des guerres médiques, Périclès, l’homme politique qui a le plus
incarné la démocratie athénienne du Vème siècle av J-C, impose à la Ligue de
Delos sa politique impérialiste. Obligés de verser annuellement un impôt qui
alimente les caisses athéniennes, les alliés ne peuvent pas quitter la ligue, tout en
se transformant progressivement en véritable sujets. Sans suggérer de
parallèlismes historiques, la comparaison doit nous rappeler, qu’au sein même de
l’Union européenne, la politique des créanciers de la Grèce est de fait une
politique de néocolonialisme économique et financier. S’agit-il vraiment de la
seule possibilité à laquelle la Grèce doit inévitablement se plier ?
Autre époque, autre histoire : Solon, considéré par les anciens grecs comme le
père fondateur de la démocratie, a fait précéder sa réforme constitutionnelle
d’une procédure connue sous le nom de seisàchtheia, ou la « secousse des
poids » avec lesquels le législateur libérait les paysans de la dépendance
économique vis-à-vis des propriétaires, empêchait l’esclavage pour retard de
paiement et abolissait les dettes (comme les fruits qui tombent de l’arbre
lorsqu’on le secoue, en le libérant de ces poids). Cette mesure a permis de
relancer l’économie et a posé les bases pour les réformes démocratiques
successives. Retrouver aujourd’hui, en Europe, le sens de l’expression
démocratique des peuples ne peut que passer par la « secousse du poids »
écrasant de la finance qui alourdit une partie de l’économie.
« Ti drasô ?, Que dois-je faire ? ». Telle est la question que se posent les héros
de tragédies face aux choix impossibles. Les dix millions de Grecs appelés à voter
au référendum de dimanche prochain se poseront la même question. Nous, les
autres européens avons le devoir difficile et impérieux de soutenir le peuple grec,
comme Chrysothémis avec sa sœur Électre : « Drasô, je le ferai : ce qui est
juste ne doit pas être objet de débat, il faut au contraire s'exécuter au plus vite ».
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