Dumodele

Télécharger au format pdf ou txt
Télécharger au format pdf ou txt
Vous êtes sur la page 1sur 21

Du modele à la nature : l'exemple de la côte Togolaise

Item Type Other

Authors Rossi, G.; Baritse, L.; Blivi, A.B.

Download date 04/06/2024 08:27:31

Link to Item http://hdl.handle.net/1834/1228


I'U MODELE A LA NATURE :
L'EXEMPLE DE LA COTE TOGOLAISE

G. ROSSI, L. BARITSE, A. BLIVI]

Résumé

La côte togolaisc, bas:e et sablcusc, souinise à unc violente érosion par suite d'une série
d'erreurs d'aménagements, a fait l'objet cn 1987-1988 d'importants travaux destinés à protéger
sur 15 km la ville d'Ankh0 et l'usine d e phosphates d e Kpémé, principale industrie d u pays.
La préparation de ces travaiix d c protcctiori, rcndus indispensables par la gravité des enjeux
économiques et sociaux, a nécessité dcs étudcs hydrologiques et sédimentologiques très
détaillées, ainsi que la construction et I'cxploitation par un burcau d'étude spécialisé d e deux
importants modèles physiques (32 x 20 m) dcstinés à optimiser le dispositif d e protection et à
déterminer l'évolution du trait de côte sur unc période d e 25 ans.

Un suivi régulier de I'évolutiori hydrosédimcntaire d u littoral togolais étant réalisé


par l'Université d u Bénin depuis 1985, il est possible, aujourd'hui, de faire une première
comparaison entre les résultats d e la n~odélisationet l'évolution constatée en milieu naturel
sur une période de quatre ans. Cettc comparaison fait apparaître une bonne correspondance
d'ensemble entre les prévisinns d u modèle et l'évolution en nature du tracé d u littoral à
l'échelle d u système de protcction. Cependant, dans le détail de l'évolution secteur par
secteur, se manifestent d e sc~~isiblcs divergcnccs dans le comportenient sédinientologique des
casiers et, surtout, des scctciirs à l'aval - dérivc des zones protégées.

.Ces divcrgenccs sor: probablcmcnt liecs à la relative imprécision quantitative des


paramètres hydrosédimenteircs obscrvés cri nature et, surtout, au fait que la modélisation
rcposc sur l'utilisation dc situations moyenries tant du point de vue scdii~?cntologique(débit
sédimcntairc) qu'hydrologique (cycle d c houlc) qui ne reprcscntcnt pas la complexité d'une
annee ou d'une courte scric d'annfcs aux coiiditions aléatoires. Entin, il cst probable que la
réductiori aux différentes échclles nc puisse pas traduire toutes les f'incsscs d'une évolution
coniplexc.

--
l G. ROSSI : Professeur à I'Uiiivcrsité d e Bordc'iux III
t L. BARITSE : Assistant à 1 Jiiivcrsité d u Bénin, ancicri chcf d u Projct Erosiori côtièrc au Togo
A. BLIVI : Assistant à I'Uriivcrsité du Bénin. Chef du Projet Erosion côtièrc au Togo
F R O M A MODEL T O REAL LIFE
T H E TOGOLESE C O A S T AS A N EXAMPLE

G. ROSSI, L. BARITSE, A. BLIVI2

Abs tract

T h e low and sandy togolese coast, has ulidcrgorie a viole~it erosion action, due to a
series of developing errors. 111 the years 1987-88, it was the subject of imporfnnt protectiori
wc~rks,aimed at protccting, d o n g 15 knis, the t c ~ w ~ofi Aneho and the phosphate works of
Kpémé, the mai11 industri(il activity of the coiiiifry.

T h e preparation of fhese works, niade vital b y the ivzportance of the social arid
econoniic stakes involved, required v c r y dctnilcd hydrologie and sedinicnfologic studies,
along wiih the elabora bi4ildi:lg and cxploifafiori by n rcsearch co~isultaticy,of t w o iniportant
physical nrodels (32 x 20 H I ) aimcd at optiniizing the profecfioti plari, arrd n f defiriing the
euolufiori of the coastal profile over a 25 ycnvs pcriod.

T h e hydroseditneritary evolutiori of the togolcse roast havilig bceri followed through


by the University of Benin, sirice 1985, i f is now possible lo rriake a first cotnparison b e t w e ~ n
the rcsults of this niodcl, and the real evoliifion thnt hns taken place i n rcril life within a
four ycars pcriod.

This comparisori shows a good global corres~~oridctlce betwceti the prcvisions of built iri
rnodel and the real lifc evollitioll of the coastal j~rofile within the protection plat1 scope.

Nevertheless, a detciilcd s t u d y of f h c eiiioliifion nrea b y area shows f h a f rather


naiiccd.de differetices cnn be perceived i n the sedi~rieirfologicbehavioidr of the colnpariments,
ririri abo.ne riIl, of the arcns in the d o w n s t r e ~ ~ nrivif/
i of Ilir /~rc~lcc/cti
ZO~IPS.

T h o s e differe~ices ore probably l i ~ i k c d tu the relatively inrprccise q u a r i f i f a t i v e


hydrosedimentary obserzied i n real life. T h c y ure proliubly due above all, to the fact that the
building of the r)iodcl relies on the use of data correspondirig f o rnediurn situntio?is as far as
scdirnentology is concer~icd (sediiiicntnry disctinvgc), ntid as hydrology is co?icerned (swcll
cyclc), which do not rcj7rcsoit the rcal coniylcxify of one ycar, or of a short scrics of yctlrs,
fhe cc~riditionsof which arc itnpredictible.

Morecrver, it is likcly that the rcduction to the differcrit scalcs cnnliof renlly express
nI1 the defails of a cor~iplcxevolution.

G. ROSSI : Professeur à I'Univcrsit6 d c Bordeaux I I I


t L. BARITSE : Assistant à l'Uiiivcrsit6 d u Bfnin, ancien chcf d u Projet Erosion côtiiire au Togo
A. BLIVI : Assistant à I'Univcrsiti. du Béiiiii - Clief du Projet Erosioii côtière au Togo
La côte togolaise est soumise depuis une vingtaine d'années à une
violente érosion, qui est la conséquence d'une série d'aménagements
conçus sans prise en compte de leur impact possible sur l'environnement.
En particulier le port de Lomé, bloquant en totalité l'important transit
littoral Ouest-Est (1,2 millions m 3 / a n en moyenne) a déclenché
progressivement sur plus de 40 km un recul de la plage qui a atteint jusqu'à
40 m/an, menaçant toute une série d'infrastructures et surtout l'usine de
concentration de phosphates de Kpémé et la ville d'Aného.

La violence de cette érosion et l'importance des sites menacés ont


rendu nécessaire la mise en place d'un important programme de protection.
Réalisé en deux phases, il comporte à Kpémé une batterie de 10 épis d e
longueur variable et à Aného un brise-lames accompagné de 6 épis. Le
système complètemen; réalisé protège , en tout, 15 km de littoral. La
première phase (brise-lames et I I épis) a dû être réalisée très rapicement de
mai 1987 à mars 1988, parallèlement aux essais sur modèles. La seconde sera
mise en chantier en 1993.

L'ensemble des données de ce problème, complexe, a été exposé en


détail par ailleurs (Rossi 1988, 1989, 1990) et nous n'en rappelerons ici que
l'essentiel. Parmi les études qui ont été menées à cette occasion, deux
modèles sédimentologiques ont été réalisés en 1988 à Grenoble par la
Sogreah. Le but était d'optimiser le système de protection et aussi d e
déterminer l'évolutiori de la côte à échéance de vingt cinq' ans.
Parallèlement, l'Uni\rersité d u Bénin effectuant un s ~ i i v irégulier d u
comportement sédimentaire d u trait de côte, il est intéressant, trois ans
après, de faire un premier point sur l'évolution en milieu nature! et de la
comparer aux résultats cies modèles.

1 - UNE COTE BASSE ET SABLEUSE LONGEE


PAR UNE PUISSANTE DERIVE LITTORALE

Sur près de 400 km, du pôle d'apport de la Volta, au Ghana, à celui d u


Niger, au Nigéria, une série de cordons littoraux W-E ont, depuis 5 000 ans,
régularisé une côte qui était échancrée de profondes rias lors d u maximum
transgressif flandrien. L'altitude de ces cordons ne dépasse pratiquement pas
5 m au-dessus de l'actuel zéro hydrograpliiclue. Généralesent associés à des
beach-rocks, ils séparent la mer d'un système de 1agur.e~plus a u moins
étendues, parfois colina tées (fig. 1).

1 - Les paramètres liydrologiques

La direction et 11. régime de l'agitation sont liés à ceux des vents. Ils
font apparaître deux s?isons : l'une de houles de faible hauteur (0.1 - 0,5 m)
de octobre-novembre A mai-juin ; l'autre où, durant l'été, les hauteurs
atteignent et dépassent 2 n~ (fig. 2). Les directions de la houle sont très
constantes et montrent une prédomiiiance des directions S et SSII' en .hiver
et SSW à SW durant l'été ; il existe donc une nette corrélation hauteur-
direction. Sa période est comprise entre 10 s et 15 s aLVecune fréquence
maximale autour de 11 - 12 S. Les mers de vent ont des périodes de l'ordre
de4sà6s.

A la côte, l'obliquité de la houle au déferlement varie entre 4" et 9",


avec une valeur moyenne autour de 6" - 7".

Il existe, par ailleurs, d e nombreuses zones d e concentration


d'orthogonales d e houle. C'est, en particulier, la présence d e telles
concentrations autour d u wharf d'embarquement des phosphates de Kpémé
et face à la partie centrale de la ville d'Aného qui nous a conduit, en 1984, à
proposer la protection de ces zones.

2 - Les sédiments et leur transport

La distribution des sédiments le long d u littoral fait apparaître deux


7.ories distinctes. De l'cmboucliure de la Volta a u x environs de Lomé, on
distingue deux bandes de granulométrie différente :
I - sur l'estran, les sables sont moyens à grossiers avec des diamPtres
médians compris entre 0,4 et 1 mm ;
- à partir des fonds de - 4 m et jusqu'à la limite de nos prélèvements
(- 16 m), les sédiiiîents sont très fins, les diamètres médians décroissent
jusqu'à - 8 m où, très groupés, ils se situent entre 0,08 et 0,125 mm, puis,
vers le large, ils redeviennent u n peu plus grossiers (d. 50 = 0,16 / 0,2 mm).

11 semble que cette répartition, typique de la bordure d u delta, soit liée


à un talus d'accrétion sableux reposant sur des fonds sablo-limoneux. En
avant de ce talus, se place une zone de dépôt concomittant de particules
fines initialement mélangées aux sables. Cette interprétation paraît
confirmée par les profils batliymétriques qui montrent le talus sableux à
pente de 10 - 12" se raccordant vers - 8 - 10 111 avec un angle net à des fonds à
pente très faible de l'ordre de 0,2 à 0,3 %.

De Lomé au Nigéria, la distribution des sédiments est, globalement,


homogène :

- sur l'estran et dans la zone de déferlement, les diametres médians


des sables, bien triés, varient entre 0,4 et 1 min, avec une médiane voisine
de 0,6 min. Cependant, on remarque une nette augmentation des diamètres
médians vers I'est à partir de l'enibouchure d u Morio.

- sur les fonds jusqu'à - 11 - 12 m, il s'agit de sables fins, bien classés,


dont les dianiètres inédiaiis sorit compris entre 0,2 et 0,3 nimm. Là encore, à
I'est d e l'eil-ibouchui~e d u Mono, les diamètres médians varient
brutalement, passant à 0,5 - 0,6 mm, certains écha~~tillons étant constitués de
sables très grossiers mêlos à des graviers.

- au-delà des fonds de 12 m, on trouve des sables moyens à grossiers


dont les diamètres médians, compris entre 0,4 et 1,s mm, varient de façon
importante d'un échantillon à l'autre sans que l'on puisse identifier une
répartition longitudinale ou transversale logique.
Les calculs effectués par le L.C.H.F. (1984) et l'observation des profils
bathymétriques montrent que la limite extrême d'action de la houle doit se
situer vers - 10 - I l m. Dans ces conditions, compte tenu de la taille des
sables par fonds supérieurs à 12 m, ces dépôts peuvent être considérés
comme fossiles, ou d u moins, subfossiles, si l'on tient compte des variations
post-nouakchotiennes d u niveau de la mer.

Par suite de l'obliquité de la houle par rapport à la direction de la côte,


une puissante dérive littorale longe les plages de cette partie du golfe d u
Bénin. La capacité de transport a été calculée par NEDECO (1975), par
LACKNER (1983) et par le L.C.H.F. (1984). Tous ces calculs ne reposent
malheureusement pas sur des campagnes suivies de mesures en nature, ce
qui en limite la précision. On estime, cependant, que la capacité de transport
est comprise entre 1 et 1,5 million de m3/an, ce qui est énorme et explique
l'ampleur et la brutalité des réactions morpho-sédimentaires observées dès
que l'on modifie l'équilibre dynamique existant.

Les calculs montrent que la quasi-totalité d u transit s'effectue entre


+ 2 m et - 2 m avec un maximum autour d e + 0,30 m ; 75 % de ces
mouvements sédimentaires se faisant entre + 0,80 et - 0,50 m autrement dit
dans le déferlement.

3 - Le beach-rock

Le beach-rock est apparu en 1970-71, à la faveur de l'érosion, à l'est d u


port de Lomé. En 1980, il affleurait sur 8 km de longueur à l'est de la contre-
jetée d u port, et l'on remarquait que le trait de côte se stabilisait à une
distance de 30 à 60 mètres en arrière d u banc de grès.

Parallèlement, le maximum de vitesse d'érosion progressait vers l'est


en exhumant, au fur et à mesure, le beach-rock des sables d u cordon littoral.
Ainsi, en 1984, au début de nos travaux, il affleurait sur la quasi-totalité de la
côte togolaise.

L'interprétation dynamique de cette évolution semble être que le


beach-rock, en dispersant sur sa surface l'énergie d u déferlement, ralentit, et
peut même bloquer, les transferts sédimentaires dans le profil. Ceci
contribue à stabiliser le trait de côte et donc, sous certaines conditions, à
protéger le littoral. Mais l'arrêt d u recul d u trait de côte signifie aussi l'arrêt
de la fourniture de sables à la dérive et, au fur et à mesure, l'accroissement
progressif du déficit sédimentaire en direction de l'est. C'est ce phénomène
qui a pu faire penser à une "vague d'érosion" se déplaçant d'ouest en est le
long d u littoral togolais. Cette interprétation a été confirmée
expérimentalement grâce à deux modèles sédimentologiques.
II - LES RESULTATS DES MODELISATIONS,
COMPARAISON AVEC LA NATURE

Deux modeles de la côte togolaise ont été construits successiveme~it


afin d e ne pas trop réduire les échelles spatiales, l'uii pour le site de Kpémé,
l'autre pour celui d'Aného, dans urie cuve d e 32 m X 20 m, les fonds
couvrant une superficie d e 340 m2. Ils reproduisent à l'échelle, la
topographie levée sur le terrain.

Les éclielles d e similitude ont été les suivantes :

DESIGNATION I'ROTOTYPE MODELE

Marnage iiioycn vives Caux 1,10 III 1,0 cm

Dur& d'iine rnarCe 12 h 25 mri 26,05 m n

Houle :
hauteur 0,5 à 3 n~ 0,45 à 2,73 cm
période 10 à 14 s 0,95 à 1,33 s

'Transit littoral iiioycii aiiriucl 1 200 000 n13 121 litres

Temps ~Cditneiitologiqiie 1 an 200 mi

Après réglage, ils rcprociuisaieiit convenablenient les pl-iénomènes


observés en iiature, à savoir, pour celui de Kyénié, le remplissage des épis
déjà construits et polir celui d'Aiiklio, la sédimeiitatioii à l'ouest d u brise-
lanies (fig. 3 et 4).

Pour l'eiise~iible des essais, une loi d e décroissance du transit


sédiiiieiitaire dans le temps a été établie à partir des observations en nature
sur l'iiiflueiice d u beach-rock et des modèles sédinieiitologiques réalisés
pour tester les coiiditioiis d e son efficacité. Eri effet, la stabilisation
progressive d'une portion toiijours plus longue d u trait de côte sous
l'influence d u beacli-rock va avoir pour effet d'entraîrier Urie sous-
saturatioii croissatite de la dérive en directioii de I'est.

Les résultats d u calcul établis en 1988 montrent que le transit maximal


(1,2 Mm3) est encore assuré pour deux années environ. Sa décroissance est
très rapide puisqu'au bout d e cinq ans, il a diminué d e moitié et atteint
500 000 in3/an au bout de 25 ans.
La répartition en classe de périodes de cycle annuel de houles utilisé
sur le modèle respecte sensiblement celui observé en nature. Les différents
éléments du cycle sont indiqués en figure 5.

Sur ces modèles, ont été réalisés des essais courts (4 ans) destinés à
l'optimisation d u système de protection et un essai long (25 ans) portant sur
l'évolution d u trait de côte.

-
1 Pour le site de Kpémé

Le modèle fait apparaître les résultats suivants au bout de 4 ans :

- dans un premier temps, les épis se remplissent en un an. L'avancée


d u trait de côte est comprise entre 15 et 45 m (ligne + 1,40 m IGN, niveau
moyen des eaux).

- à l'intérieur d u système de protection, on remarque entre les épis un


basculement d u trait de côte. Insensible à l'est (épis K 9 - K IO), plus à l'ouest,
il est de 4 à 6".

- à l'est d u dernier épi du système (K IO), on note un recul de 40 m à


150 m de l'ouvrage, de 30 m à 2 100 rn et de 5 m à 3 000 m.

En nature, le remplissage a été sensiblement différent. La partie ouest


d u système jusqu'à l'épi K 8 s'est remplie en deux ans, par contre, les casiers
est entre K 8 et K 10 n'ont été saturés qu'en décembre 90, soit un peu plus de
trois ans après leur construction.

De la même façon, le basculement d u trait de côte lié à l'apparition de


la sous-saturation ne se manifeste que très ponctuellement à l'ouest dans le
casier K 7.

A l'est d u dernier ouvrage (K IO), le recul (dans un premier temps) a


atteint 50 m à 150 - 20f' m de l'ou~rrageun an après sa mise en place. Mais
un réengraissement de 25 - 30 m s'est manifesté depuis. A 2 000 m de l'épi,
le recul est de 25 - 30 m et reste d u même ordre à 3 000 m ; il devient
négligeable à 4 500 m (fig. 6).

Par rapport au modèle, il semble donc que l'on observe une plus
grande lenteur de l'évolution séclix~~entologiq~~e
à l'intérieur d u système de
protection.

A l'est du dernier ouvrage, si la localisation d u recul maximal est


correcte, de même que l'évolution d u recul à 2 100 m 'de l'épi, des
différences sensibles affectent la quantification des autres phénomènes. Le
réengraissement derrière l'épi, persistant sur 700 m de long, n'a pas été
'prévu. L'érosion à 3 000 rn de l'épi fortement sous évaluée. Ces deux
derniers phénomènes étant probablement liés, une part significative d u
transit sortant du systèrne de Kpémé se déposant immédiatement derrière le
dernier épi, ce qui paraît, effectivement, contraire à la logique.
2 - Pour le site dlAného, les résultats des essais montrent au bout d e 4
ails :
-un recul gétiéralisé d'uiie dizaine d e ni2ltres d u trait d e côte dans
tous les casiers sauf à l'extrémité est (A3 - A4), qui reste stable. Ce recul
s'accompagne d'uii léger basculement ;
- le mince cordon littoral qui ferinc la lagiiiie s'ouvre iiaturelleilieiit
pendant les cinq premières années lorsque le niveau d e la crue est supérieur
ou égal à -t 3,50 m, cette ouverture étant facilitée par les tempêtes ;
- à l'est d u dernier épi, en direction de la frontière d u Bénin, le recul
est d e l'ordre d e 20 ml décroissant régulièrement jusqu'à 10 m à 2 000 m d e
l'épi.

En nature, le recul généralisé et sa décroissance vers l'est sont


également observables. Il est même plus important que prévu puisqu'il
dépasse 20 in à l]ouest du dispositif pour devenir nori significatif entre A 3 -
A 4. La tendance au basculemei~tse manifeste discrètement.

La loi d'ouverture d e la lagune a été respectée. Elle a eu lieu en 1991,


en période d e fortes houles lorsque le niveau d e la crue lagunaire a dépassé
+ 3,20 m. La forme d e l'embotichure, l'évolution dynamique des flèches et
le mode d e fermeture sont conformes.

Par contre, le recul à l'est d u dernier ouvrage a été très fortement


sous-estimé. 11 a atteint au maximum 100 m, à 250 m d e l'épi, et décroît
assez régulièrement. Il est encore d e 60 m à 2 000 rn d e l'ouvrage et d e 50 m
à 2 700 ml à la frontière d u Béiiiii (fig. 7).

Ce dernier point constitue la distorsion la plus importante observée


p u i s q ~ i eces chiffres n'auraient d û être atteints qu'au bout d e 17 à 18 ans
d'évolutio~iavec un transit littoral à la frontière estimé alors à 900 000 m3 /
an.

I I 1 - DE LA NATURE AU MODELE : LES CAUSES POSSIBLES DES


VIFFERENCES OBSERVEES

Lorsque l'on analyse les divergences entre l'évolution constatée sur


les modèles et celle observée en nature, on remarque qu'elles concernent
principaleiiient le recul d u trait d e côte ? l'aval - dérive des syst&ines de
6
protection et, principalement, celui d'Ahé o où le débit sédimentaire paraît
avoir été assez largement surestimé. Secondairement, on peut également
reinarquer q u e la vitesse d e remplissage des épis d e Kpémé a, elle, été
surestimée.

Ides causes d e ces écarts peuvent être multiples. Dans ce cas, la


surestimation d u transit littoral peut avoir deux catégories principales d e
raisons.
En premier lieu, le débit sédimentaire injecté à l'entrée d u modele de
Kpémé a été évalué à partir d'une estimation de la décroissance d u transit
en provenance de l'ouest dans le temps. Cette estimation est fondée
essentiellement sur les résultats des deux modPles physiques réalisés pour
tester les conditions d'efficacité d u beach-rock, ce qui peut être une première
cause d'incertitudes. En fait, on ne sait pas, faute de pouvoir le mesurer,
quelle est, actuellement, la valeur d u transit pour les différentes situations
hydrologiques caractéristiques.

Cette estimation d u transit injecté à l'entrée d u modele repose donc


sur un certain nombre d'hypoth&seset sur une estimation de l'érosion de la
côte à l'amont - dérive de Kpémé lors d'un cycle annuel de houle "moyen",
c'est-à-dire correspondant à des situations théoriques de forte occurrence,
mais pas forcément représentatives d'une courte succession naturelle
d'années aux conditions hydrologiques aléatoires. Par contre, il est possible
qu'à long terme, la succession de situations annuelles singulières tende à se
rapprocher d u cycle hydrologique "moyen" défini pour les essais. Dans ce
cas, on devrait voir les distorsions de résultats s'atténuer.

En second lieu, la même remarque peut être faite pour les cycles
annuels de houle utilisés pour les deux modèles, d'autant que les années
hydrologiques 1989 et 90 n'ont pas été des années "moyennes".

Au-delà de ce problème, peut-être fondamental, d'autres raisons


peuvent intervenir.

Le réglage d'un modele repose sur la reproduction analogique de


phénomènes en nature et sur le modèle. Sa fiabilité repose donc sur le
nombre, la qualité et la durée des observations. Dans ce cas, le réglage a été
effectué essentiellement sur le remplissage des épis et du brise-lames et de
quelques éléments secondaires comme la localisation des concentrations
d'orthogonales de houle ou la forme de la flèche de l'embouchure de la
lagune. Ces observations sont précises, mais elles portent sur une durée très
courte (moins d'un an). On peut donc se demander si les éléments
disponibles pour le réglage offrent une garantie totale de fiabilité. Il est,
certes, souvent difficile de disposer de nombreux éléments sur une longue
période, mais il n'est pas douteux que la précision des résultats en est
affectée.

Enfin, il convient d e ne pas oublier qu'une modélisation repose, par


principe, sur une schématisation et des réductions d'échelles. Il serait
illusoire de vouloir traduire à travers cette représentation et cette
interprétation de phénomènes naturels, la grande complexité de l'évolution
hydro-sédimentaire de détail d'un littoral, fut-il comme celui d u Togo, un
véritable cas d'école.
CONCLUSION

Au total, les deux modeles sédimentologiques construits pour prévoir


l'évolution d e la côte togolaise se révèlent fiables pour ce qui est des
schémas généraux d'évolution. Cependant, sur une première courte période
d'observation (4 ans), la quantification des phénomènes se révèle dans le
détail inexacte. En particulier, l'érosion à l'aval - dérive d u systhme d e
protection d e la côte a éié beaucoup plus important que prévu.

Bien entendu, cela ne remet pas en question la fiabilité des modèles


sédirnentologiques, q u i restent, e n a t t e n d a n t q u e les m o d è l e s
mathématiques tridimensionnels soient parfaitement opérationnels, un
des inoyeris les plus sûrs d'évaluation d e l'évolution liydro-sédimentaire
d'un littoral, mais montre les contraintes et les limites d e leur exploitation.

Le suivi d u littoral togolais se poursuivant, il sera particulièrement


intéressant d e procéder à des évaluations périodiques.
ORIENTATION BIBLIOGRAPHIQUE

ANTOINE, P. ; ROSSI G. (1987).- L'impact des barrages sur


l'environnement : l'exemple d e Nangbéto (Togo - Bénin).- Comm. Congrès
Trop. Paris. In : Eau et aménagement dans les régions inter-tropicales.
Talence, CEGET, pp. 3 - 19 (Espaces tropicaux, no 2).

BIJKER, E.W. ; RADU T. (1981).- Sur l'application de l'analogie entre


l'équation de la chaleur et celle développée par Pelnard - Considère à l'étude
d'un littoral et à la recherche d e solutions de protection. In : XIXe Congr.
Ass. Hydraulic Res., New-Delhi, pp. 195-202.

BLIVI, A. (1985).- Contribution à l'étude des formations littorales d u


Togo. Lomé, Université d u Bénin (Mémoire de Maîtrise).

CHENG, K. LY (1985).- The role of the Akossombo dam on the Volta


river in causing coastal erosion in central and eastern Ghana. Mar. Geol., 37,
pp. 323-332.

EINSELE, G. ; ERN, D. ; SCHWARTZ, U. (1977).- Variations d u


niveau de la mer sur la plateforme continentale et la côte mauritanienne
vers la fin de la glaciation d u Würm et à l'Holocène. Bull. A S E Q U A
(Dakar), 51 pp. 35-48.

GERMAIN, P. (1975).- Contribution à la connaissance du Quaternaire


récent d u littoral dahoméen.- Bull. A S E Q U A (Dakar), 44-45, pp. 33-45.

GUILCHER, A. (1954).- La région côtière du bas-Dahomey occidental


(Afrique de l'Ouest).- Bull. IFAN, XXI, sér. B (3-4), pp. 357-424.

GUILCHER, A. (1978).- Observations comparatives sur un complexe


littoral de la côte atlantique africaine.- Norois (Brest), 100 : pp 551-556.

HOUESSOU, A. ; LACKNER et al. (1983).- Etude de l'ensablement du


port de Lomé. Rapport d'étude.- Bremen, Lomé, Ministère d e
ltEquipement.

LANG, J. ; PARADIS, G. (1984).- Le quaternaire margino-littoral


béninois (Afrique de l'ouest).- Synthèse des datations au Carbone 14. In :
Palaeocology of Africa. (Rotterdam), vol. 16, pp. 65-76.

LCHF (1956).- M i s s i o ~ d'étude en nature pour l'implantation d u


mharf de Kpémé. Rapport.- Lomé, Compagnie Togolaise des Mines d u
Bénin.

LCHF (1985).- Protection du littoral dans les zones de Kpémé et


Aného. Rapport d'étude.- Lomé, Ministère d u Plan.

LCHF (1986).- Etude d u littoral à l'ouest de Lomé. Rapport d'étude.-


Lomé, Ministere d u Plan.
NEDECO (1975).- Erosiori littorale sur la côte togolaise. R a p p o r t
d'étude.- Mi~iisteredes Travaux Publics, Lomé.

NEDECO (1978).- Erosion littorale sur la côte fogolaise. R a p p o r t


d'étude.- MinistPre des Travaux Publics, Lomé.

PARADIS, G. (1977).- Observations sur l'Holocène récent d u Sud


Bénin. Bull. ASEQUA (Dakar), 51, pp. 49-73.

IZADU, T. ; MOOK, I i . (1983).- Short teriii beacli-profile fluctuatioii


forecast of the West African toast.- In : Iritcrnnt. Coizf. ori Canstal und Port
Engil~ceririg in Develoyirig Cotr~itries,Coloinbo, p p 26-42.

ROSS1, G . (1988).- Uii cxeiiiple cle protcctioii iiaturelle coiilre I'érosioii


littoral : le grès d e plage.- Rcu. Géoiii. Dylz. (Paris), XXXVII, 1 .

ROSSI, G. (1989).- L'érosion d u littoral dans le golfe d u Bénin : un


exemple d e perturùatioii d'uii équilibre horpliodyiiarnique. Zeitsclirift für
Geomorphologie, (Berlil-1, Slultgart), N.F. Supp1.- Bd 73.

ROSSI, G. (1990).- Erosion d u littoral et acteurs sociaux : l'exeli~pled u


Togo. 131rll:Ass. Geogr. Fçnis. (Paris), 68 (3),1991, pp. 225-233.

SITARZ, J.A. (1963).- Cotes nfl,icniilcs. Etiade de profils d'équilibre des


plages. Travaux d u Ceriire d ' I t u d e s et d e Recherclies Océanograpl-iiques,
Paris.

SLANSKY, M. ( 1 962).- Coli tribut iorz ri i'éflidc géologiyirc du bassilz


sci'dill~ciitaire côtier dm Dnlioiiiey c f di1 Togo. Mem. B.R.G.M. 11, 270 p.,
Paris.

TASTET, J.P. (1975).- ],es forniations sédiinentaires quaterriaires à


actricllcs d u lilloral du 'Togo et cic la 12.1'. d u 136iiiii.- Bull. AI'CQ (Paris), 50,
pp. 155-167.

U~iiucl.çiféd u I'rojcf é r o s i o ~ il i t f o ~ f l l aei l 7'ocyo. Rapport


U k i i i ~ l ( 1984).-
d'étude et proyositioi-is d'aii-iéiiageii-ient,80 p. et annexes, Lomé.
NN WA.
NW " ,:

WSW

Fig. 2 - Direction d'attaque et hauteur des vagues


Avancée du trait de cote (m)

Fig. 3 - Avancée d u trait de côte à l'ouest d u brise lames


Source : ÇOGREAH
Avancée du trait de côte im)

En nature
Sur modèle
Epi 8
7
6

Fig. 4 - Evolutio~ides eiigraissenients sur les


faces amont des épis lors de leur remplissage
Recul (mi
A

300 -

200 -

1 ............... a 150 m de l'épi 10


- )
s u r modèle
l _--- - a 3000
m
2100
.. ., ,. ,,
., .. ,. .. .,
en nature

Fis. 6 - Recul de la côte à l'est du systeine de protectioii


de KPEME, sur modèle et en nature
Recul (rn)

300 t

200 -

. \
\
---
100,

/
I
- '--. 25 ans

‘------I 1 20 ans
(nature
4 ans
30- .............
-
*.....
..- ,,'>,
** i *.15 ans
10 ans
20-
10 -
* O - O - - . . -

..-.. ..,>.--' ..-..-..-. . - ' 5 ans


O
l I I I w
500 1000 1500 2000
Distance a l'épi A4 en rn

Fig. 7 - Evolution d u trait de côte à l'est d u système de protection


dtAneho, en nature et sur modèle

Vous aimerez peut-être aussi