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LIBÉRALISATION ET PAUVRETÉ :
LE CAS DES PRODUCTEURS DE CACAO DE LA CÔTE-D'IVOIRE
MÉMOIRE
PRÉSENTÉ
COMME EXIGENCE PARTIELLE
PAR
MARS 2008
UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL
Service des bibliothèques
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commercialiser ou non ce travail dont [il] possède un exemplaire.»
DÉDICACE
CHAPITRE l
CONCEPT DE PAUVRETÉ 4
1.1 Interprétation de la pauvreté selon le PNUD .4
1.1.1 Pauvreté et bien-être 6
1.1.2 Pauvreté monétaire, revenu et consommation 7
1.1.3 Pauvreté et besoins essentiels 8
1.1.4 Pauvreté humaine 8
1.2 Interprétation de la pauvreté selon la Banque Mondiale 9
1.3 Interprétation de la pauvreté selon Destremau et Salama 10
1.4 Interprétation de la pauvreté selon Sen 12
1.5 Les causes de la pauvreté 14
1.6 Les indicateurs de mesure et seuils de pauvreté 17
CHAPITRE II
CONCEPT DE LIBÉRALISATION 21
2.1 Les fondements de la libéralisation 21
2.2 Approches théoriques libéralisation et pauvreté 23
2.3 Lien positif entre la libéralisation et la pauvreté 24
2.4 Lien négatif entre la libéralisation et la pauvreté 29
2.5 Le cadre conceptuel 34
2.6 Les hypothèses 37
v
CHAPITRE III
DÉMARCHE MÉTHODOLOGIE 39
3.1 Choix de l'étude de cas, du terrain et du secteur 39
3.2 Méthode de collecte de données .42
3.3 Échantillonnage 45
CHAPITRE IV
CHAMP D'APPLICATION 47
4.1 Le secteur agricole en Côte-d'Ivoire 47
4.2 Historique de la culture du cacao en Côte-d'Ivoire .49
4.3 Les différents intervenants de la filière cacao en Côte-d'Ivoire 50
4.4 La période pré libéralisation: 1960 à 1998 52
4.5 Le début de la libéralisation: 1998 à 1999 55
4.6 La période de libéralisation totale: 1999 à 2007 57
4.7 Les mécanismes de la formation des prix du cacao 59
4.7.1 À partir de l'offre et de la demande mondiales 59
4.7.2 À partir des coûts des intermédiaires 60
4.7.3 À partir du marché à terme 60
CHAPITRE V
CONSÉQUENCES DE LA LIBÉRALISATION 61
5.1 L'évolution des prix et des revenus du cacao 61
5.2 L'évolution de la pauvreté chez les producteurs de cacao 67
5.3 Impact de la libéralisation sur l'éducation 68
5.4 Impact de la libéralisation sur la santé 70
5.5 Les nouvelles réalités du producteur 71
Vi
CHAPITRE VI
ANALYSE DES RÉSULTATS DE L'ENQUÊTE 79
6.1 Description de l'échantillon 79
6.1.1 Profil de l'échantillon 80
6.1.2 Analyse de fréquence de l'échantillon 80
6.1.3 Les analyses croisées 89
6.2 Test des hypothèses 90
6.3 Discussion des résultats 106
6.4 Récapitulation des résultats 110
CONCLUSION 111
Les limites dues au terrain et aux statistiques 113
Reco1ll1llandations 114
APPENDICE A
QUESTIONNAIRE 117
APPENDICEB
UNE SÉLECTION DES SOURCES DE DONNÉES SECONDAIRES 124
BIBLIOGRAPHIE 125
LISTE DES FIGURES
Figure Page
Tableau Page
6.11 Situation des producteurs de cacao par rapport à celle des autres 88
La crise économique des années 1980 combinée à la chute persistante des cours des
principales matières premières a plongé la Côte-d'Ivoire dans une crise socio-économique
sans précédent. Pour y faire face, la Côte-d'Ivoire a, sous la houlette des institutions
financières internationales particulièrement le Fonds monétaire international (FMI) et la
Banque Mondiale (BM), procédé à des ajustements visant à libéraliser différents secteurs de
l'économie notamment le cacao. Ces ajustements visaient à accroître la transparence du
système, à baisser les coûts de commercialisation et à assurer l'équilibre financier annuel de
la filière. Cependant, force est de constater que la déréglementation des échanges agricoles,
soutenue par les grandes organisations internationales, a eu des effets différents sur les pays
d'implantation. Certains auteurs soulignent ses conséquences bénéfiques, d'autres montrent,
au contraire, ses impacts négatifs sur les niveaux de pauvreté dans les pays du tiers monde.
Dans cette étude nous nous interrogeons sur la libéralisation commerciale et ses
incidences sur la pauvreté des producteurs de cacao. Le but de ce mémoire consiste donc à
vérifier si les promesses théoriques faites par les institutions internationales concernant
l'amélioration du niveau de vie de ces producteurs ont été réalisées.
Il ressort des analyses qualitatives que depuis la libéralisation instaurée en 1999, les
producteurs de cacao sont confrontés à de nombreuses difficultés; nous remarquons une
baisse importante de leurs revenus due aux redevances, aux prélèvements et à la fiscalité.
Nous dénotons également de graves lacunes de gestion et de transparence au sein de la filière.
En ce qui concerne les résultats empiriques, le croisement de nos différentes variables
explicatives nous a permis de conclure que la grande majorité des producteurs interviewés
lors de notre enquête perçoivent s'être davantage appauvris après la libéralisation. La
synthèse des analyses quantitatives nous permet d'affumer cependant que l'appauvrissement
des producteurs est causé d'une part par la libéralisation et d'autre part par des facteurs
externes tels que les maladies des plants, le vieillissement des vergers et les taxes
outrancières.
Depuis le début des années 1980s, les pays en voie de développement ont été
incités à entreprendre d'importantes réformes commerciales dans le cadre des programmes
d'ajustement structurel, afin de les rendre plus compétitifs sur les marchés internationaux. La
raison qui a motivé ce choix était que la libéralisation serait bénéfique pour ces pays. Ainsi,
sous les pressions exercées par les bailleurs de fonds internationaux, les gouvernements des
pays en voie de développement ont consenti à réduire leurs moyens de contrôle sur les
marchés locaux. À cet effet, les filières agricoles de ces pays ont connu d'importantes
transformations qui ont abouti à la disparition de toutes les structures permettant de
réglementer la production et la vente de leurs marchandises.
Ces politiques commerciales à ]' égard des pays en voie de développement ont fait
l'objet de plusieurs débats. En effet, des études dont celles de Battino, de Gogoua, de la
Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED), de la
Banque Mondiale, et du Fonds monétaire international se sont penchées sur les conséquences
de la libéralisation du secteur agricole.
Dans ce sens, (Battino, 2005, p.II) soutient que: « à cause des politiques du FMI,
des pays de rUnion Européenne et des États-Unis d'Amérique, on a vu disparaître, les
accords internationaux sur le café, le sucre, le cacao et d'autres produits. On a assisté au
démantèlement ou à la dévitalisation des organismes centralisés de vente de ces produits tels
que, pour n'en citer que quelques-uns, l'Institut Brésilien du Café, les Caisses de stabilisation
du Cameroun et de Côte-d'Ivoire, qui veillaient pendant toute l'année à la commercialisation
graduelle de leurs récoltes, tout en laissant pleine liberté aux opérateurs privés. »
À la lecture des rapports de ces spécialistes, nous constatons que deux thèses s'affrontent.
L'une considérant la libéralisation comme une nécessité pour aider au développement des
pays et des habitants les plus pauvres, l'autre estimant que la libéralisation ne ferait
qu'augmenter les disparités économiques et détériorer les conditions de vie des plus démunis.
Notre sujet d'étude implique des questions sous-jacentes auxqueJIes nous tenterons
de répondre: quel est J'impact de la libéralisation sur le niveau de vie des producteurs?
Ensuite, peut-on associer la pauvreté uniquement à un revenu faible?
Le plan de l'étude se présente comme suit: d'abord, nous présenterons dans les
chapitres un et deux une revue de littérature des concepts de pauvreté et de libéralisation.
Cela nous permettra de construire notre cadre conceptuel qui relie les variables pertinentes
entre elles. Ensuite, à travers le chapitre trois nous exposerons notre démarche
méthodologique.
- - - - - - - - - - - - -
Dans un quatrième chapitre, nous nous attacherons à dégager l'importance du cacao pour ce
pays ainsi que les opportunités qu'il représente. Dans le cinquième chapitre, nous exposerons
les effets de la libéralisation sur le monde paysan. Enfin dans le dernier chapitre, nous
analyserons les résultats de notre étude et tirerons la conclusion et les recommandations.
CHAPITRE 1
CONCEPT DE PAUVRETÉ
La pauvreté n'est jamais définie par elle-même, mais en fonction d'autres concepts,
comme ceux de la croissance, de l'exclusion ou encore de l'équité. Néanmoins, il est
nécessaire d'opter pour une définition claire du concept de pauvreté, en tenant compte du
paradigme de développement défini par le PNUD, à savoir le Développement Humilin
Durable.
5
Dans son rapport intitulé Vaincre la pauvreté humaine, le PNUD (2000a) définit
trois types de pauvreté, !'« extrême pauvreté», la «pauvreté générale» et la «pauvreté
humaine». Ainsi, une personne vit dans la pauvreté extrême si elle ne dispose pas des
revenus nécessaires pour satisfaire ses besoins alimentaires essentiels habituellement définis
sur la base de besoins caloriques minimaux.
6
Une personne vit dans la pauvreté générale si elle ne dispose pas de revenus
suffisants pour satisfaire ses besoins essentiels non alimentaires tels que l'habillement,
l'énergie et le logement. La pauvreté humaine quant à elle, est présentée comme l'absence
des capacités humaines de base: analphabétisme, malnutrition, longévité réduite, mauvaise
santé maternelle, maladie pouvant être évitée. Le PNUD évoque également dans ce rapport la
pauvreté monétaire sans en donner une définition précise. Cependant, un examen des
définitions permet d'affirmer que la pauvreté monétaire englobe la pauvreté extrême
(pauvreté absolue) et la pauvreté générale (pauvreté relative).
Par ailleurs, le PNUD cité par Destremau et Salama soutient que la pauvreté
possède une multiplicité de visages, et va bien au-delà d'une insuffisance de revenu. Ce
rapport affirme que:
Pour la Banque Mondiale (l990), la pauvreté pose problème en tant que facteur
d'instabilité sociopolitique et est un frein à l'efficacité économique. Le présupposé est que le
marché, lorsque les conditions sont réunies pour son fonctionnement optimal, tend à résorber
la pauvreté dès lors qu'une dynamique de croissance est assurée. Les États devraient
essentiellement améliorer le capital humain des pauvres employables, afin de leur permettre
de s'intégrer dans l'économie en tant que travailleurs, et ainsi bénéficier de la croissance. En
se basant sur ce point de vue libéral et marchand, le principal indicateur de pauvreté est
nécessairement le revenu en tant que capacité à consommer des biens. (Matériels ou non
matériels.)
Toutefois, un autre rapport sur le développement de la Banque Mondiale (2000)
produit une autre définition du terme pauvreté. Le concept de la pauvreté est fondé ici sur le
manque d'opportunité, la vulnérabilité et l'impuissance. Le manque d'opportunité inclut le
concept traditionnel de revenu et de consommation, mais en plus, il inclut le manque de biens
clés indispensables pour obtenir des nécessités de base. Ces biens sont de plusieurs types.
10
En premier, nous avons les actifs humains (les capacités pour un travail de base, les
compétences et une bonne santé). Ensuite les biens naturels (la terre et le bétail) et physiques
(accéder à des infrastructures, à un logement, à des routes, à l'irrigation). Et enfin des actifs
sociaux (un réseau de personnes pouvant être contactées en cas de besoin).
Selon Destremau et Salama (2002) deux catégories d'agents interviennent dans les
débats sur la pauvreté: Les institutions internationales (Banque Mondiale, PNUD,
CNUCED ... ) et les États avec leurs administrations. Néanmoins, ces auteurs estiment qu'il
en existe une multiplicité souvent institutionnalisées: églises et établissements religieux,
associations de tous genres, partis, syndicats et mouvements sociaux, bienfaiteurs collectifs
ou individuels, chercheurs. Chacun ayant sa motivation et ses représentations de ce qu'est la
pauvreté.
Mais, les églises et associations caritatives, à l'exception de certains courants, telle
la théologie de la libération citée par Destremau et Salama (2002) définissent la pauvreté
comme un problème moral.
Il
Caractérisés par un certain nombre d'attributs dénotant leur dénuement, les individus et les
familles pauvres doivent en avoir l'aspect et l'attitude. Ils doivent être humbles, méritants,
manifester leur conformité avec les critères moraux en demandant de raide. Ils ne doivent
pas remettre en cause l'ordre social, ni mettre la faute sur les riches.
Aussi, Destremau et Salama (2002) font découvrir que dans les pays démocratiques
et industrialisés, la pauvreté est définie comme élant la difficulté d'accès à des biens et
ressources, évaluée de façon relative au niveau moyen de bien-être de la société, et non en
relation avec un niveau de survie minimal ou un panier déterminé de biens.
Par ailleurs, Destremau et Salama (2002), mentionnent que les nécessités de base
insatisfaites ou besoins essentiels non satisfaits forment la base d'une méthode d'évaluation
de la pauvreté, qui compare la situation de chaque ménage, en ce qui concerne un ensemble
de besoins spécifiques, avec une série de normes exprimant pour chacun de ces besoins le
plancher en-dessous duquel il est considéré comme non satisfait. Les ménages dont un ou
plusieurs besoins essentiels ne sont pas satisfaits sont considérés comme pauvres, de même
que tous leurs membres.
Salama et Valier affirment que:
Amartya Sen (1999) mentionne que la pauvreté, initialement basée sur le seul
critère monétaire, a été progressivement élargie pour intégrer différents concepts tels que la
pénurie des capacités ou capabilities (oppoI1unités d'accès à l'éducation et à la santé par
exemple), la vulnérabilité, l'exclusion, la dignité.
Sen suggère une définition de la pauvreté qui découle sur un concept de pauvreté
absolue en tant que privation des ressources minimales nécessaires au libre exercice de droits
humains inaliénables: se nourrir et se soigner, soi et ses enfants, choisir son métier en
fonction de ses capacités, participer à la vie de la société, avoir de l'estime pour soi. Les
travaux de Sen affirme que:
L'important est que les individus soient libres de choisir le mode de vie qu'ils ont de
bonnes raisons d'apprécier. Ce qu'il s'agit de distribuer de façon équitable, ce ne sont pas
seulement les biens matériels, mais surtout les (capabilities) permettant de développer
des modes de fonctionnement (functionings) humains fondamentaux pour promouvoir
une vie digne et sensée. (Sen, 1999, p.l)
Dans la mesure où la liste des droits humains est extensive, la pauvreté présente un
caractère « multidimensionnel ».
La pauvreté serait donc définie non pas comme un manque vis-à-vis des besoins
fondamentaux en divers biens, mais en termes de défaut de réalisation de certains
fonctionnements de base et de l'acquisition des capacités correspondantes. (Sen, 1992). Cette
approche ci-dessus développée par Sen a clarifié la conception du phénomène de pauvreté.
Pour lui, la pauvreté ce n'est pas seulement une affaire de revenus, c'est aussi et surtout
l'impossibilité de faire ce que l'on souhaite.
Nous retiendrons du tableau 1.1 que la notion de pauvreté doit dépasser les aspects
uniquement de revenu. Ceci nous conduira plus loin dans notre étude à considérer l'impact de
la pauvreté sur la santé et l'éducation.
Tableau 1.1
Les critères de définitions de la pauvreté
Nous pouvons affirmer grâce aux différentes défmitions de pauvreté suggérées par
les auteurs qu'il est extrêmement difficile d'être unanime sur la définition de celle-ci.
Partant de ce fait, nous reconnaissons le caractère relatif de ce concept. La Banque
Mondiale met en évidence le manque d' opportunité, l'insécurité, la vulnérabilité,
l'impuissance. Le PNUD traite de pauvreté extrême, générale et de pauvreté humaine.
Destremau et Salama abordent des nécessités de base insatisfaites, Sen traite de la
pauvreté comme étant la pénurie de capacités.
14
En somme, nous pouvons dire qu'il existe ceI1ains points communs mais nous constatons
qu'il y a aussi des différences dans toutes les définitions suggérées par les auteurs. Il
devient donc difficile de donner une définition générale et universelle de la pauvreté,
compte tenu de la relativité du phénomène. Ainsi donc, après avoir défini ce concept, il
devient nécessaire de mettre en évidence ces causes.
Les causes de la pauvreté sont variées mais nous avons choisi de considérer les
causes de trois (3) auteurs que nous jugeons appropriées et peI1inentes. La Banque Mondiale,
Kankwenda, Legros et Ouédraogo, Africites. Le tableau suivant donne ces différentes causes.
Tableau 1.2
Les causes de la pauvreté
Ces chocs négatifs affectent les activités productives du pauvre. Enfin, l'incapacité de
s'assurer contre les risques ou le manque de mécanismes pour faire face aux chocs quand ils
se produisent. Selon la Banque Mondiale (2000), les causes de la pauvreté dépendent non
seulement des caractéristiques du pauvre dans chaque pays mais aussi de leur interaction avec
de nombreux éléments de la politique publique. Les chocs provoqués par la libéralisation du
corrunerce constituent un des nombreux chocs auxquels font face les familles pauvres.
Par là, l'inégalité d'accès aux servIces essentiels (santé primaire, éducation de base, eau
potable) et aux opportunités économiques qui recouvrent le micro financement et l'accès « au
marché» ou simplement de politiques de non discrimination envers les groupes les plus
pauvres. Les programmes d'aide jouent essentiellement sur cette cause de pauvreté.
De plus, Africites (2006) soutient que les causes de la pauvreté affectent les
populations différemment selon les régions et se situent à plusieurs niveaux (économique,
démographique, socio culturel)
Les causes économiques se manifestent à travers des politiques publiques
inadaptées, l'insuffisance du processus de planification et l'inefficacité de la dépense
publique. Au niveau du monde rural, la baisse de l'encadrement, de la distribution des
semences, des engrais et le relâchement des investissements sociaux provoquent une chute de
la productivité agricole et de la paupérisation paysanne. La dégradation des infrastructures de
base accentue l'enclavement des régions et les disparités locales.
La situation démographique constitue une pression sur les ressources. En effet, un
fort taux de croissance démographique supérieur au taux de croissance économique entraîne
une morbidité et une mortalité. Celles-ci sont accentuées par une dégradation de l'état
sanitaire de la population avec le retour de maladies telles la fièvre jaune, le choléra, la
rougeole qui ont contribué à aggraver la pauvreté des populations.
Au niveau socio culturel, le poids de la famille élargie et la pression du clan, du
village voire de la région conduisent à un parasitisme social, une absence d'initiative et
constituent un frein à l'épanouissement individuel et communautaire. La dislocation du tissu
social et familial, la dégradation des mœurs sont des éléments aggravant la pauvreté sociale.
Les causes de la pauvreté suggérées par les auteurs sont diverses. Cela démontre le
caractère complexe du phénomène. Dans la section qui suit, nous tenterons de définir des
indicateurs de pauvreté sachant quïl en existe plusieurs.
17
Tableau 1.3
Différents indicateurs de mesure de pauvreté
Nous constatons que les indicateurs de mesure de la pauvreté présentés par la CNUCED sont
divers. Ils prennent non seulement en compte l'indicateur usuel qui est la consommation mais
aussi d'autres indicateurs notamment les indicateurs composites et discrets.
Angeles Soliz, (1999) préconise de travailler sur un seul type de données qui serait
censé indiquer à lui seul le niveau de bien-être du sujet. Pour l'auteur, il existe deux mesures
qui pourraient remplir cette tâche de façon acceptable: le revenu et les dépenses de
consommation. Ce type de données est une étude unidimensionnelle de la pauvreté.
Un seuil de pauvreté doit être fixé pour départager les ménages en pauvres et non pauvres.
Larivière et Martin (1997) soutiennent que dans la littérature, on retrouve quatre approches
différentes pour déteillÙner un seuil de pauvreté qui peut être un seuil biologique, un seuil
normatif, un seuil relatif et un seuil mixte. Le tableau suivant présente ces différentes
approches permettant de déterminer le seuil de pauvreté.
Tableau lA
Détermination du seuil de pauvreté
Dans ce chapitre relatif à la pauvreté, nous avons présenté la littérature qui traite des
interprétations, des causes et des indicateurs de mesure de la pauvTeté. Au terme de cette
section, nous retenons que la pauvreté est un concept très complexe et qu'il faut éviter de
généraliser sa définition, ses causes et les indicateurs pour la mesurer. Celte section a
présenté le premier concept clé de notre étude. Nous poursuivrons dans le chapitre suivant
avec le deuxième concept de notre étude, la libéralisation.
CHAPITRE II
CONCEPT DE LIBÉRALISATION
Les préceptes libéraux qui sont la base des plans d'ajustement structurel des années
1980 et des programmes de lutte contre la pauvreté des années 1990 sont résumés selon
Salama en dix points, qui fondent le consensus de Washington. Salama affirme que ces dix
points sont les suivants:
(l) Une discipline fiscale; (2) une réorientation des dépenses publiques visant à améliorer
les dépenses d'infrastructure, de santé, d'éducation, centrés sur les besoins de base et ce
au détriment, d'une intervention de l'État dans le secteur économique; (3) une réforme
de la fiscalité à partir d'un élargissement de l'assiette fiscale et une baisse du taux
d'imposition; (4) la libéralisation des taux d'intérêt avec l'abandon des taux préférentiels
afin d'éliminer la «répression financière» et d'améliorer grâce à une hausse des taux
d'intérêt la sélection des investissements; (5) un taux de change compétitif sans qu'il soit
clairement indiqué si ceux-ci devaient être fixes ou flexibles; (6) la libéralisation du
commerce extérieur grâce à la baisse drastique des droits de douane, la fin des
contingentements et l'abandon des autorisations administratives; (7) la libéralisation des
investissements étrangers directs; (8) la privatisation des entreprises publiques; (9)
l'abandon des réglementations dont J'objectif était d'instituer des barrières; (l0) les
droits de propriété. (Salama, 1999, p.64)
22
L'option de la Banque Mondiale était une libéralisation intégrale qui comportait les
conditiolU1alités suivantes; (1) le désengagement de l'État des activités commerciales
pour ne conserver que le rôle de régulation; (2) la suppression des ventes à terme au
profit des ventes spot; (3) la libéralisation du traitement phytosanitaire et concession du
contrôle qualité au secteur privé; (4) la suppression du barème différentiel. ;(5)
suppression des prélèvements de stabilisation; (6) Suppression du prix garanti au profit
d'un prix fluctuant au gré du marché. (Banzio, 2003, p. 32)
En conclusion de celte section, nous pouvons dire que la libéralisation commerciale a été
motivée par plusieurs raisons.
23
Toutes ces raisons invoquées par les institutions internationales avaient un dénominateur
commun, la libre concurrence. Ainsi, la libéralisation commerciale déclenche une
restructuration économique qui profite à certains et fait du tort à d'autres. (Dawson, 2001).
Dans les sections subséquentes, nous nous interrogerons donc sur l'incidence effective de la
libéralisation commerciale sur la pauvreté. Cependant, nous nous limiterons aux relations
possibles pouvant exister entre la libéralisation et la pauvreté.
En premier lieu, la perception activiste qui conçoit la pauvreté comme sous culture,
isolant un monde ayant ses propres lois et ses propres blocages. D'où l'explication activiste
usuelle; la pauvreté est un phénomène collectif socio-économique, transmis de génération en
génération, de mises à l'écart de la croissance et de l'exclusion.
Enfin, la perception agressive de la pauvreté qui est vue comme un état d'esprit
passif et dépendant d'individus et de familles qui se laissent aller.
Dans leur volonté d'aider les pauvres, les États modernes ont créé une masse d'irresponsables
soucieux de vivre le moins mal possible aux crochets de la collectivité.
Les réformes feront reculer la pauvreté dans les zones rurales des pays en voie de
développement, parce que ces pays bénéficient globalement d'un solide avantage
comparatif dans le secteur agricole, qui représente pour eux une source importante de
revenus. De même, la libéralisation des activités à valeur ajoutée est indispensable à
l'expansion des possibilités d'emploi et de revenus au-delà de l'exploitation agricole.
(BM, 2005, p.29)
25
De plus, Matusz et Tarr (1999) cité par le FMI (2001) soutiennent que les
avantages de la libéralisation du corrunerce peuvent être plus de dix fois supérieures à son
coût. À cela, Dollar (2001) ajoute que les pays qui ont ouvert leurs économies au cours des
dernières années, notamment l'Inde, le Vietnam et l'Ouganda, ont ernegistré une croissance
plus rapide et une réduction plus prononcée de la pauvreté que ceux qui n'ont pas adopté
cette réforme.
Les plans d'actions proposés en vertu des postulats de l'approche libérale, ont
souvent été la base des décisions ayant trait aux programmes d'ajustements structurels, et ont
convaincu plusieurs pays de j'Afrique subsaharienne à libéraliser leur commerce. Ainsi, le
Nigeria et le Cameroun, ont relevé les prix à la production, libéralisé la commercialisation et
exécuté d'autres réformes: privatisation, dérégulation.
26
Dans leur étude Winters et al., (2004) présentent une revue de littérature des effets
de la libéralisation commerciale sur la pauvreté. Ils abordent le sujet en quatre grandes
parties: la croissance économique et la stabilité, le comportement des marchés et des
ménages, les salaires et le chômage et finalement le gouvernement. Les auteurs font le
rapprochement entre l'ouverture économique et la croissance pour ensuite souligner le lien
entre la croissance et la pauvreté. Les réponses sont souvent ambivalentes, mais malgré le
manque d'appuis économétriques, les auteurs proposent que les expériences et les évidences
semblent tout de même appuyer la thèse que l'ouverture amène la croissance et que celle-ci
diminue la pauvreté.
Et d'autre part du coté de la production par une réaffectation productivement plus efficace
des facteurs de production libérés mais aussi par une diminution du coût de reproduction de
la force de travail.
Selon le même organisme, contrairement à la stabilisation des prix promise par les
tenants de la libéralisation du secteur, c'est à une dramatique diminution des revenus des
paysans à laquelle l'on a assisté: de l'ordre de 3% par an (en prix réel) selon les travaux de la
CNUCED pour les produits alimentaires pour la seule décennie 1990-2000.
Dans le même esprit, le Comité International de planification des organisations non
gouvernementales (ONG)/organisations de la société civile (OSC) soutient que:
Dans son rapport intitulé Les pays les moins avancés la CNUCED (2004)
examine la relation entre commerce international et pauvreté dans les PMA, avant de
conclure que le commerce international n'a pas tenu ses promesses en matière de
réduction de la pauvreté dans ces pays. Les raisons sont multiples: insuffisance des
performances commerciales, faiblesse des interactions entre commerce et croissance
économique par rapport aux pays en développement plus avancés, et tendance de
l'expansion des exportations dans les pays très pauvres à être associée à une forme de
croissance économique qui favorise l'exclusion.
31
Les détracteurs du libre échange soutiennent que ce modèle «néoclassique» est imparfait
et ne tient pas suffisamment compte des imperfections du marché et des rapports de force
inéquitables qui régissent le processus de négociation commerciale au niveau
multilatéral. Ils estiment que la libéralisation du commerce compromet la sécurité
alimentaire, car elle ne profite qu'aux grands exploitants agricoles à vocation
exportatrice, favorise des mesures d'incitation d'échelle et une concentration à fins
dimensionnelles, marginalise les petits exploitants et contribue au chômage et à la
pauvreté. [... l.La libéralisation du commerce ne garantit nullement que chacun en
recueillera des bénéfices, même à long terme, alléguant qu'en réalité ce sont les membres
les plus pauvres et les plus vulnérables de la société qui souffrent le plus des
dérèglements du marché découlant du processus de réforme. (SOFA, 2üü5b, p. 1)
Tant que la libéralisation ne porte pas le taux consolidé en dessous du taux appliqué, elle ne
se traduit pas dans les faits par une réduction du niveau de protection. La seconde raison est
que les pays en développement sont traités comme un groupe homogène, ce qui n'est
évidemment pas le cas. En premier lieu, les pays en développement ont des structures
productives et des spécialisations commerciales diverses. Or les niveaux de protection et
d'intervention sont extrêmement hétérogènes d'un produit à j'autre. Une libéralisation
agricole n'affecterait donc pas tous les pays en développement de la même façon: l'impact
sur la croissance des exportations du Brésil, grand exportateur de viande, de sucre, et de
céréales, produits très protégés dans le monde enlier, serait très différenl de celui que
connaîtrait le Cameroun par exemple, dont les exportations sont constituées en grande partie
de cacao et de café, qui sont des produits très peu protégés.
Selon la CNUCED (2004) les pays les moins avancés n'ont pas profité des
demières dix années de la libéralisation du commerce agricole. Ce point de vue est partagé
par les membres de coordination SUD (2005) qui constatent, de par leur engagement avec
leurs partenaires dans des actions locales, que les paysans de toutes les régions du monde
sont en difficulté et que dans des régions entières, ils touchent le fond de la pauvreté. Les
déséquilibres qui s'observent et les prix qui se pratiquent sur ces marchés mondiaux
contribuent à détruire les économies agricoles, qui ne peuvent s'en protéger, et à plonger les
paysanneries d.ans des crises profondes. Parallèlement à l'ouverture de leurs marchés, les
pays du Sud sont encouragés à exporter davantage afin de dégager des ressources
supplémentaires mises au service de leur développement. Une situation qui a engendré une
baisse des cours mondiaux d'autant que les systèmes permettant de réguler l'offre ont été
supprimés: de nombreux rapports de l'organisation des nations unies pour l'alimentation et
l'agriculture, FAO (1999) et de la CNUCED (2002) mettent en lumière la baisse des prix
agricoles, et la poursuite de cette baisse depuis la mise en place des politiques de
libéralisation de la production et des échanges agricoles.
33
Berthelot (2002) prétend que la libéralisation agricole est une catastrophe pour les
pays en développement. Les bienfaits annoncés du libre échange agricole ne reposent sur
aucun fondement sérieux. Pour l'auteur, le libre-échange actuel n'est rien d'autre que le
protectionnisme des puissants. Dans un second rapport, Berthelot affirme que:
La libéralisation croissante des échanges agricoles a été une calamité pour les exploitants
familiaux du monde entier car, contrairement au discours dominant, les produits agricoles
ne sont pas des marchandises comme les autres et les marchés agricoles ne s'autorégulent
pas d'eux-mêmes. Face à une demande alimentaire stable à court terme, la production
agricole fluctue selon les aléas climatiques, donc aussi les prix et revenus agricoles ainsi
que les prix à la consommation. (Berthelot, 2004, p.69)
Les opinions diffèrent en ce qui concerne les liens de causalité entre la libéralisation
commerciale el la pauvreté, d'aucuns souliennent qu'elle est porteuse de bienfaits pour les
défavorisés parce qu'elle diminue la pauvreté, d'autres pensent le contraire.
34
Nous constatons que les positions sont divergentes et soutenues par des arguments valables.
Les effets réels de la libéralisation sur la pauvreté restent énigmatiques. Ainsi, pour répondre
à notre problème de recherche qui consiste à démontrer l'impact de la libéralisation
commerciale sur la pauvreté nous entreprendrons une recherche empirique.
Dans ce chapitre, nous allons construire notre propre modèle, relatif à celte
recherche en se basant sur la revue de littérature que nous avons présentée précédemment.
Notre modèle a pour rôle de relier les différentes variables qui expliquent notre
objet de recherche. Dans le cas de la libéralisation du cacao, nous tentons de comprendre
l'impact de ce phénomène en Côte-d'Ivoire dès son implantation et de son incidence sur les
niveaux de pauvreté.
Dans leur analyse des relations entre la libéralisation des échanges et la pauvreté,
Winters, McCulloch et McKay (2004) identifient un certain nombre de voies importantes au
travers desquelles les réformes en matière de politique commerciale pourraient avoir un
impact sur la pauvreté. Cette étude démontre l'impact de la libéralisation commerciale sur la
pauvreté. Ces auteurs distinguent trois canaux de transmission possibles de J'impact de la
libéralisation sur la pauvreté. En premier, l'impact de J'ouverture passe par les ménages et les
marchés. Ensuite, il y a l'impact de l'ouverture sur l'évolution des salaires et de l'emploi.
Enfin, le dernier type d'impact passe par les recettes et les dépenses publiques.
Nous avons décidé de construire notre propre modèle. À l'intérieur de celui-ci, nous
rajouterons des variables propres à notre thématique. Ainsi donc, nous transformerons les
modèles en modifiant certains de ses composantes. Nous pouvons le schématiser de la façon
suivante:
36
LIBÉRALISATION PAUVRETÉ
COMMERCIALE +/
• Privatisation
• Revenus,
• Déréglementation
• Éducation,
• Désengagement
• Santé,
de l'État
• Logement
• Dissolution de la
Caistab Emploi & • Vulnérabilité.
Revenus
• Endettement
À contrario, la libéralisation commerciale peut avoir des effets négatifs sur les
principaux acteurs. Ceci signifie qu'elle peut engendrer une faiblesse des revenus et de la
consommation et rendre les populations (producteurs) vulnérables; La pauvreté engendre des
privations profondes, une vulnérabilité et une impuissance. Cette vulnérabilité se traduit par
une insécurité alimentaire, l'absence d'accès aux services de base (éducation, santé,
électricité, eau, logement, etc),
37
Mace et Pétry (2000) définissent une hypothèse comme une réponse anticipée que
le chercheur formule à sa question spécifique de recherche. Manhein et Rich (1981) la
décrivent comme un énoncé déclaratif précisant une relation anticipée et plausible entre les
phénomènes observés ou imaginés.
Dans cette section, nous définirons, ce que nous entendons par le phénomène de
libéralisation du marché du cacao, qui se traduit en Côte-d'Ivoire par la privatisation, la
déréglementation, le désengagement de l'État, la suppression de la Caistab. En second lieu,
nous allons définir notre variable dépendante qui est la pauvreté en termes de manque de
revenus comme nous en avons fait cas dans la problématique.
Dans notre recherche, nous devons vérifier si les promesses théoriques qui ont été faites par
les pros-libéralisation, notamment l'accroissement des revenus des producteurs suite à la
suppression de la Caistab en Côte-d'Ivoire se sont réalisées dans le cas des producteurs.
38
Nos hypothèses de travail s'articulent toutes autour des effets directs positifs ou négatifs du
phénomène de libéralisation sur les producteurs de cacao.
Ainsi donc, nous avons retenu les trois hypothèses principales, que nous définissons de façon
plus pointue pour mieux pouvoir vérifier leur application sur le terrain. Il est utile de rappeler
que la libéralisation de la filière cacao a été implantée en 1999, et que notre terrain porte
principalement sur la péliode de 1999 à 2007.
-Hl: La majorité des producteurs de cacao sont plus pauvres après qu'avant la libéralisation.
a : Les sources de la modification des revenus sont reliées au statut des producteurs après
la libéralisation.
b: Le statut des producteurs après la libéralisation est relié aux raisons de la pauvreté des
producteurs.
c : Les investissements des producteurs après la libéralisation sont liés au statut des
producteurs.
-H2: Le niveau d'endettement est une cause de la faible volonté des producteurs d'investir
dans leurs exploitations après la libéralisation.
a: Le niveau d'endettement des producteurs de cacao est lié aux coûts de santé et
d'éducation après la libéralisation.
b : Le niveau d'endettement des producteurs de cacao est relié au coût des semences qui
s'est amplifié après la libéralisation.
-H3: La pauvreté des producteurs de cacao est la cause de la réduction de la surface
cultivable de la période après la libéralisation.
a : La quantité d'espace cultivé est liée au recrutement de nouveaux manœuvres après la
libéral isation.
b: La quantité d'espace cultivé est liée aux sources de la modification de revenu des
producteurs après la libéralisation.
Le lecteur trouvera le détail des tableaux et des analyses statistiques pertinents à chacune de
ces hypothèses à la section 6.2, intitulée « Test des hypothèses ». Les sections 6.3 et 6.4 pour
leur part, interprètent et synthétisent les résultats obtenus.
CHAPITTRE III
DÉMARCHE MÉTHODOLOGIE
Pour valider nos hypothèses, il faut un terrain empirique, nous devons donc isoler
un territoire, un secteur et déterminer comment étudier le phénomène à observer. Compte
tenu de la complexité du phénomène à étudier, il nous faudra le décrire dans toutes ses
sphères, ceci nécessitera de prendre un cas d'espèces et de l'analyser.
Avant de recourir à une étude de cas, nous nous sommes intéressés aux définitions
de certains auteurs. Woodside et al., (2003) cité par Gagnon (2005) soutiennent que l'étude
de cas est appropriée pour la description, J'explication, la prédiction et le contrôle de
processus inhérents à divers phénomènes, que ces derniers soient individuels, de groupe ou
d'une organisation. En outre, Bullock (1986) cité par Gagnon (2005) affirme que l'étude de
cas permet d'observer et d'analyser des phénomènes comme un tout intact et intégré. Selon
Roy (2003) l'étude de cas est une approche empirique qui consiste à enquêter sur un
phénomène, un évènement, un groupe ou un ensemble d'individus sélectionnés de façon non
aléatoire afin d'en tirer une description précise et une interprétation qui dépasse ses bornes.
Stoecker (1991) par contre, définit de façon provisoire, J'étude de cas comme une approche
méthodologique qui consiste à étudier une personne, une communauté, une organisation ou
une société individuelle. Comme le suggère son nom, l'étude de cas se penche sur une unité
particulière quelconque.
Par contre, Yin (2003, p.13) définit l'étude de cas comme étant: « une
investigation empirique qui enquête sur des phénomènes contemporains dans son contexte de
vie réel, surtout quand les limites entre les phénomènes et le contexte ne sont pas clairement
évidentes. »
40
Pour mener notre étude de cas, il nous a fallu identifier un territoire précis et choisir un type
de commerce ayant été affecté par une action significative de ljbéralisation. Les deux
prochains paragraphes nous fournissent des informations relatives sur nos choix.
Notre étude sera alors réalisée sur la Côte-d'Ivoire. Plusieurs raisons ont déterminé le choix
de la Côte-d"Ivoire conune lieu d'étude. L "une des raisons qui a motivé ce choix vient d"une
part, de ce que la Côte-d'Ivoire a été très affectée par une action de déréglementation sous
l'égide du FMI et de la Banque Mondiale, et d"autre part, parce que la Côte-d'Ivoire est l'un
des pays les plus prospères d'Afrique. En effet, troisième puissance économique de l'Afrique
sub-saharienne, derrière l'Afrique du Sud et le Nigeria, la Côte-d'Ivoire est un pôle
économique d'importance au sein de l'Afrique de l'ouest. Le pays représente quelque 60 %
du PŒ l'Union économique et monétaire ouest africaine, précise la Mission économique de
l'ambassade de France et constitue le centre des activités commerciales en Afrique
occidentale dont la pal1 de commerce extérieur dans son PŒ est de 90%.
41
Par le biais d'un questionnaire auto administré auprès des producteurs, nous
pourrons vérifier les hypothèses avancées et fournir des éléments de réponse sur l'impact réel
de la libéralisation sur les niveaux de pauvreté.
Quant aux données secondaires, nous avons choisi d'utiliser des données
statistiques déjà accumulées tant par les organismes nationaux que par des agences
internationales, parce qu'elles sont disponibles. De plus, les bases méthodologiques des
données officielles et leurs limites significatives sont habituellement faciles à déterminer, ces
organismes devant souvent eux-mêmes définir leurs méthodologies et les limites qui leurs
sont inhérentes.
44
Par ailleurs, une recherche documentaire a été effectuée pour offrir une perspective
complémentaire et décrire la situation de la façon la plus précise. Selon Yin (2003) une étude
documentaire est utile pour corroborer les données obtenues par d'autres sources et trouver
des pistes de recherche qui méritent d'être explorées au cours de l'étude.
Certaines informations publiées nous ont été nécessaires pour faciliter la définition
de notre problématique de recherche. Ces informations se présentent sous diverses formes:
des articles et des volumes spécialisés, des rapports d'organismes sans but lucratif, ouvrages
d'auteurs. Ces données vont nous permettre de constater ce qui s'est réellement produit en
Côte-d'Ivoire notamment chez les producteurs suite à l'implantation de la libéralisation du
cacao.
Notre but dans cette étude est de recueillir les informations qualitatives et
quantitatives tester le modèle construit, appuyer les hypothèses sur la connaissance des faits
et les supporter de façon positive ou négative. Notre plus grande difficulté dans ce travail sera
de former les modèles d'analyse en prenant som de bien identifier les liens de causalité
possibles entre une variable explicative et une autre, et d'éliminer les variables qui
risqueraient de diminuer ces liens.
Dans le paragraphe suivant, nous allons présenter les différents points relatifs à
l'échantillonnage, de même que l'échantillonnage choisi.
3.3 Échantillonnage
Par ailleurs en novembre 2000, 60 délégués des producteurs ont été élus à la suite
d'élections départementales et régionales avec à leur tête un bureau national composé de 10
membres.
Notre questionnaire a donc été présenté aux 60 délégués des producteurs d'abord parce
que par le biais de l'association, nous étions en mesure de rejoindre plusieurs répondants
ensuite à cause du fait que les délégués régionaux sont aussi des producteurs qui connaissent
parfaitement les réalités de ceux-ci et représentent leurs intérêts auprès des pouvoirs publics
et des exportateurs.
46
Les autres raisons ayant motivées notre choix pour les délégués des producteurs sont
respectivement; le temps imparti pour la collecte de données et la fiabilité des réponses. Nos
répondants provenaient des régions de l'est, du sud, du centre et du nord du pays.
Toutefois, aux fins de notre étude, seuls 35 des 60 producteurs ont répondu à notre
questionnaire, compte tenu de leur illettrisme et de la préférence pour certains de taire toute
information concernant leur situation. Ces producteurs forment notre échantillon.
La pluviométrie moyerme oscille entre 1000 et 2000 mm par an avec deux saisons des pluies
d'inégale durée d'avril à juillet et d'octobre à novembre. Du fait de sa situation géographique,
le climat est subéquatorial très humide au sud. La Côte-d'Ivoire est constituée en majeure
partie d'un ancien plateau granitique au relief assez plat. L'unique zone montagneuse est celle
de l'ouest qui a pour capitale, la ville de Man. Le sud qui fait face à la mer (océan atlantique),
est fonné majoritairement de côte basse bordée de lagunes partiellement navigables. Le
secteur rural dans sa diversité (agriculture vivrière, agriculture de rente) occupe une place
importante dans la vie de la zone humide. Le cacao cependant représente le pilier de
l'économie agricole et concerne un grand nombre de planteurs.
Elle s'est développée après la première guerre mondiale, et la production est passée
de 2300 tonnes par an en 1922 à 55 000 tonnes par an en 1939 et depuis bientôt une vingtaine
d'années, la Côte-d'Ivoire occupe le premier rang mondial dans l'exportation du cacao avec
une production annuelle d'environ 1.200.000 tonnes par an et une superficie de 2 mill ions
d' hectares.
Le BNETD (2003b) affirme que la main-d'œuvre utilisée dans les plantations est
essentiellement familiale. Selon les résultats de ce rapport, 87% des travailleurs rencontrés
dans les plantations travaillent dans un cadre familiale contre 13% provenant de la main
d'œuvre extérieure (métayers, salariés)
L'IFCC (1979) stipule que l'essor rapide de la production est assuré par
l'augmentation des surfaces plantées chaque année sur défriche forestière. Le mode de culture
est de type extensif et comporte deux principaux systèmes d'aménagement liés aux
recommandations de la recherche et au savoir faire des agriculteurs: le système avec des
arbres d'ombrage se décrit comme étant un ombrage provisoire ou définitif afin de diminuer
l'éclairement sur les cacaoyers. Le système de conduite en plein soleil avec abattage
systématique de la forêt, consiste à planter les cacaoyers sous des arbres existants après avoir
coupé le sous bois et éliminé certains arbres considérés nuisibles. Le cacao ivoirien est en
totalité produit dans la moitié sud du pays.
50
CEPRASS (2002) explique que la Côte-d'Ivoire est limitée dans sa partie nord par
l'axe allant de la région du Moyen-Comoé (Abengourou) à la région des montagnes (Man) et
dans sa partie sud par le littoral. Au niveau administratif, la zone de production cacaoyère
couvre douze (12) régions administratives et trente-trois (33) départements. La Côte-d'Ivoire
compte 16.5 millions d'habitants dont une importante partie soit (60%) vit en zone rurale. La
forte concentration de la population dans la zone forestière située dans la moitié sud du pays
est liée à l'expansion de la culture du cacao. Les régions forestières qui ont depuis toujours
constitué le poumon économique du pays, ont attiré un nombre important de population en
provenance des zones ivoiriennes de savane et des États voisins. D'après le même auteur, la
culture du cacao est très peu mécanisée et extrêmement captatrice de main-d'œuvre.
L'essentiel de la main-d'œuvre dans les plantations de cacaoyers est constitué de travailleurs
saisonniers qui, à partir d'autres régions de la Côte-d'Ivoire ou de pays limitrophes, migrent
vers les régions productrices de la moitié sud du pays.
Tableau 4.1
Intervenants Description
Producteurs • Petits planleurs.
• Consacrés à la culture du cacao.
• Détenant 620000 plantations.
Coopératives • Organisation de producteurs.
• 340 agréées et 140.000 adhérents.
• Collecte et commercialise les produits des
adhérents.
• Fournir des produits phytosanitaires aux
adhérents.
Pisteurs • Sillonnent les villages pour regrouper le plus
de produits.
• Travaillent pour divers acheteurs.
• Maîtrisent les zones de production
Manutentionnaires des centres de collecte • Charge et décharge les camions de
ramassage provenant des villages.
Acheteurs • Personnes agrées par "ARCC, effectuant les
achats de cacao.
• Travaillant pour divers exportateurs
Transpol1eurs • Personnes intervenant dans le transport des
plantations au centre de collecte
Exportateurs • Personnes achetant ou pré tinançant les
produits auprès des acheteurs, des
coopératives, des producteurs individuels.
Banquiers • Mettent de 1" argent à disposition des
exportateurs pour 1" achat des produits.
• Financent les coopératives et certains
acheteurs.
Assureurs • Assurent le produit au plan intérieur, au plan
de 1" assurance maritime el au moment du
transport du port d' Abidjan.
Tiers détenteur • Alleste l'existence du stock en sa possession.
• Émet la It:ttn:: de tierce détention.
Etat • Intervient dans la filière à travers la direction
de la promotion rurale et des offres
publiques d·achat.
Négociants • Pré vend le produit de base (fève de cacao)
ou les produits semi-tinis (poudre de cacao).
Usiniers • Opérateurs ou propriétaires d'usine de
conditionnement du produit pour
I·exportation.
Structures chargées du contrôle qualité • Analyser le produit à exporter et émettre une
allestation certifiant sa qualité.
Structures chargées du contrôle phytosanitaire • Désinsectiser le produit avant son
embarquement.
52
Intervenants Description
Acconier • Prend en charge les lots de produits du
magasin au point de livraison contractuel.
Affréteur • Personne se réservant r usage du navire.
Armateur • Personne fournissant au navire le matériel,
les vivres les combustibles, le capitaine,
l'équipa a e, etc.
Consignataire • Représentant des récePtionnaires du navire.
Transitaire • Mandataire commerciale agissant soit pour
Je compte du chargeur à l'embarquement soit
pour le compte du réceptionnaire au
débarquement.
Chargeur • Responsable de la charge du navire à
l'embarquement.
BCC • Encadrement, suivi des opérations d'achat et
d'exportation.
FRC • Contrôle: la situation Jinancière des
exportateurs, lïnformation relative aux
violations par les exportateurs de leurs
engagements contractuels.
FDPCC • Financer les activités des producteurs des
tilières.
FGCCC • Assure la garantie des tinancements
bancaires octroyés aux coopératives.
Araujo et Chambas (2001) soutiennent que l'ensemble des coûts et des marges de
commercialisation depuis le prix d'achat bord champ au producteur jusqu'au prix garanti à
l'exportateur étaient fixés dans un barème. Selon eux, la Caisse percevait un prélèvement
variable égal à la différence entre le prix de réalisation à l'exportation et le coût de revient;
Coût, Assurance, Fret fixé dans le barème. Dans le système stabilisé, Banzio (2003) explique
également que le barème des coûts intermédiaires appelé différentiel, établissait les différents
coûts d'approche depuis le bord champ jusqu'au port de destination. Le barème était
dénommé différentiel, car on pouvait déterminer les coûts intermédiaires en différence selon
certaines étapes; du bord champ au magasin du centre de collecte des produits, du centre de
collecte à l'usine de conditionnement, de l'usine de conditionnement à la valeur loco
magasin, de la valeur loco-magasin à la valeur quai. Ainsi, sous la stabilisation, le prix bord
champ et Je barème des coûts étaient connus à l'avance.
Acheteur étranger
1
CAISTAB
1 1
Union de coopérative/
Transformateurs privé
transformateurs 1 1
1 Producteur
1
Une première série de réformes a lieu: La Caisse ne doit plus intervenir, au moms
officiellement, dans la campagne agricole; son conseil d'administration a été ouvert aux
planteurs; le système des quotas d'exportation est supprimé. Ces réformes sont toutefois de
faible portée et ne touchent pas à l'essentiel: les pouvoirs publics continuent à fixer les prix
au producteur, à délivrer les agréments. La Caisse garde l'essentiel du contrôle de la
commercialisation et de la distribution des bénéfices.
Hugon (1989) ajoute que les principales mesures d'ajustement portent sur
l'ouverture au marché, la libéralisation interne, la baisse et la restructuration des dépenses. En
ce qui concerne la mesure relative à l'ouverture du marché mondial, l'auteur mentionne
qu'elle repose sur les principes libéraux des avantages comparatifs, de la libre circulation des
facteurs, des taux de change d'équilibre. Quant aux principales réformes institutionnelles
visant à retrouver les « lois du marché », elles ont trait à la libéralisation du commerce, à la
réduction du rôle de l'État et au recours à la privatisation. La dérégulation doit conduire au
démantèlement des protections, des subventions et des organismes de stabilisation.
57
Dans le contexte libéralisé Banzio (2003) affirme que les opérateurs doivent
négocier librement les coûts et prendre en charge, eux même, la gestion des différents risques
supportés pendant la commercialisation de leurs produits.
Après plusieurs réformes infructueuses, la Caisse de stabilisation et de soutien des prix des
productions agricoles a été dissoute en 2000 et le gouvernement a prévu la création de
plusieurs structures à savoir: l'autorité de régulation du café et du cacao, le 10 octobre 2000,
la bourse du café et du cacao en août 2001, Le fonds de régulation et de contrôle du café
cacao, le 24 octobre 2001, le Fonds de développement des productions café et cacao, le 28
Août 2001. Voir la figure 4.2 ci après exposant la structure de la filière cacao après
libéralisation.
58
Acheteur étranger
1 1
BCC
Transfonnateurs f--
Union de Exportateur Transfonnateurs
f-- f-
coopérative privé privés
~/
Coopérative ou Société
prima ire/Transfonnateurs Négociant
Producteur
1 1
Dans la figure 4.2 nous constatons que l'ancienne Caistab a été remplacée par la BCC qui est
chargé de la commercialisation, des opérations d'achat (collecte) et de vente (exportation).
59
Cet organe est aidé dans ses tâches par d'autres structures de gestion à savoir, l'ARCC, le
FRC, le FDPCC. La capacité de transformation s'est essentiellement étendue au secteur
privé. Cependant on dénombre 340 coopératives agréées avec 140.000 adhérents.
Dans son ouvrage Banzio (2003) explique que la détermination des prix du cacao
au niveau du marché se fait suivant trois (3) voies: La première détermination du prix se fait
à partir de l'offre et de la demande; la seconde à partir des coûts des intermédiaires et la
troisième à partir du marché à terme.
Aussi, CRIO (2004) mentionne que jusqu'au début des années 80, la progression
de la production répondait à une demande soutenue et croissante. Mais si la demande est
restée importante, la production a explosé en raison du doublement de la production
Ivoirienne et de l'anivée sur le marché de nouveaux producteurs (Malaisie, Indonésie)
suivant en cela les préceptes du FMI: développer les cultures d'exportation pour faire rentrer
les devises. Les stocks mondiaux ont donc explosé et la baisse des prix touche les
producteurs.
Banzio (2003) fait remarquer que dans un cadre stabilisé, par agrégation des coûts
des intermédiaires et du prix bord champ aux producteurs, on peut obtenir le niveau des cours
mondiaux surtout quand il s'agit d'une part importante de la production mondiale (40%).
Dans un cadre libéralisé, le fait de fixer un prix minimum en dessous duquel le producteur ne
doit pas céder son produit, peut influencer les cours mondiaux.
Le marché à terme est défini par Banzio (2003) comme étant une institution
financière où l'on échange des contrats de vente ou d'achat. Ces contrats font rarement
l'objet de livraisons physiques. Les cours du cacao varient et pour chaque échéance (mars,
mai, juillet, septembre, décembre); Cette variation, minute par minute, est fonction de
l'intérêt qui se porte sur la matière en question à l'achat ou à la vente. Les critères de
variation du cours se définissent comme suit; la production: les aléas des récoltes, le rythme
de sortie des pOltS, les frais de stockage, la position de spéculateurs.
Dans le chapitre suivant, nous procéderons à une analyse de l'impact des changements opérés
des suites de la libéralisation sur la vie des producteurs.
CHAPITRE V
CONSÉQUENCES DE LA LIBÉRALISATION
Dans cette section nous portons une attention particulière sur le prix payé aux
producteurs durant la période étudiée; ce prix est un élément déterminant de leur revenu et
de leur capacité à satisfaire leurs besoins de consommation courante. Le prix payé au
producteur a été établi en tenant compte de plusieurs facteurs: (cours international du cacao,
taux de change, prélèvements d'État).
L'analyse du tableau 5.1 montre que le prix payé aux producteurs de cacao de 1994
à 2006, révèle que lors de la campagne 2000-200 l, le prix au producteur est similaire à celui
qui était en vigueur en 1995 et 1996. On remarque une augmentation en 2001 (473 FCFA/kg)
qui s'est poursuivie lors des campagnes 2002 et 2003. Ce niveau historiquement élevé
pourrait avoir été stimulé par l'envolée des cours du cacao, entretenue par les incertitudes
liées à la crise politique en Côte-d'Ivoire.
62
Ces incertitudes sur le climat en Côte-d'Ivoire conjuguées aux craintes d'un regam de
violence ont favorisé cette hausse des cours.
Battino quant à lui (2006) attribue l'augmentation du prix du cacao de 2002 et 2003
à la croissance des coûts résultants des dangers encourus entre les lieux de production et les
ports situés dans le sud du pays: possibilités d'exactions, sommations plus ou moins brutales
de payer des « droits de passage ». La valeur de la production commercialisée a cependant
continué sa progression ·pour atteindre respectivement (1264,7 et 1351,5 milliers de tonnes).
Au cours de l'année suivante 2004, le prix d'achat aux producteurs a chuté drastiquement
mais la production est restée soutenue.
Dans le rapport du BNETD (2006), il est stipulé que le prix moyen au producteur
lors de la campagne 2005 est de 336 fCf A/kg et de 298 fCfA/kg lors de la campagne
précédente. Soit une hausse de 12,7%.Cette hausse s'explique par la légère montée des cours
sur les marchés mondiaux.
Dans un rapport Araujo et Chambas (2001) affirment que dans le système de prix
stabilisés, le revenu futur des producteurs pouvait être facilement évalué, et sa variabilité
essentiellement due aux aléas climatiques était suffisamment faible. Ainsi, en l'absence de
système de crédit permettant au producteur de lisser son revenu, le risque de revenu se
répercute sur sa consommation. Autrement dit, l'instabilité de revenu engendre une instabilité
de la consommation. Toujours selon les auteurs cités, on constate une réduction de certaines
dépenses courantes de consommation, dont les dépenses scolaires et de santé.
Produclion commercialisée R71,61 R83,2 1254,5 1119,1 1201,1 1306,0 1401,1 1212,4 1264,7 1351,5 1407,2 1327,2 1386,9
(milliers de tonnes)
Prix aux producteurs 240 315 315 430 430 350 315 473 605 688 350 298 336
(CFA/KG)
Sources: Institut national de la statistique de Côte d'Ivoire (INS, 2004) et le Ministère de l'agriculture de Côte-d'Ivoire (2001)
800
600
.~ 400
Co
200
o 1 1 1
~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~. ~
~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~
années
Notre graphique peut donc être subdivisé en trois pal1ies : durant les années 1994 à
1999, les prix se maintiennent au même niveau avec le système de stabilisation. Dans cette
même période, la progression des prix est considérée comme étant linéaire. Nous supposons
qu'avec le système stabilisé les prix conservaient un équilibre. À partir de 1999, il y a une
rupture par1iculière et on voit se créer deux courbes différentes; celle de 2000 à 2003 et celle
de 2003 à 2006. Dans la période de 2000 à 2003, on observe une montée relativement
importante des prix qui pourrait être due aux spéculations quant à la crise politique en Côte
d'Ivoire. Et enfin, les années 2004, 2005, 2006 sont marquées par une descente fulgurante
des prix payés aux producteurs. Cette situation peut avoir été causé selon les experts du
Centre National de Recherche Agronomique par la recrudescence des attaques parasitaires et
de maladies entre autres le Swollen shoot et la pourriture brune.
Tableau 5.2.
Années 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
iln il83 1254 1119 1201 1306 1401 1212 1265 1351 1407 1327 1387
Production
annuelle
(milliers)
(2)
240 315 315 430 430 350 315 473 605 688 350 298 . 336
Prix aux
producteurs
(CFA/KG)
Revenu 2092i10 2nl45 395010 481170 516430 457100 441315 573276 765325 929488 492450 395446 466032
Brut (fcfa)
(milliers)
Sources: Institut national de la statistique de Côte-d'Ivoire (lNS, 2004) et le Ministère de l'agr'iculture de Côte-d'Ivoire (2001)
66
1000000
...
CIl
:3
1-
800000
.0 600000
CIl
:3
l::
Q)
400000
>
Q)
1
200000
0
~ ~~ ~<o ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~
"Q) "Q) "Q) "Q) ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~
Années
Figure 5.2: Revenu brut des produdeurs de cacao avant et après la libéralisation
producteurs, les quantités sur le marché se sont maintenues voir le tableau 5.2 .Durant les
années suivantes 200 l, 2002, 2003, les producteurs connaissent une remontée de leur revenu.
Cette hausse est due aux incertitudes liées à la situation de crise politique en Côte-d'Ivoire.
Ces incertitudes sur le climat en Côte-d'Ivoire ont favorisé une hausse des cours. Au cours
des années 2003, 2004, 2005, 2006 on remarque une chute vertigineuse des revenus des
producteurs. Cela pourrait avoir des implications sur les capacités d'investissement dans les
exploitations de cacao.
D'après l'observation de nos graphiques sur le revenu brut des producteurs dans le secteur
cacao en Côte-d'Ivoire, on dénote au cours de certaines années une hausse des revenus en
valeur nominale. Mais les années 2004, 2005,2006 sont caractérisées par une forte baisse des
revenus des producteurs en termes réels. En fail, nous remarquons que l'évolution du revenu
suit fidèlement celle des prix payés aux producteurs.
Tableau 5.3
En conclusion nous pouvons dire que même si la répartition de la population entre milieux
urbains et ruraux est relativement équitable en Côte-d'Ivoire, la pauvreté est beaucoup plus
accentuée en milieu rural qu'en milieu urbain. Le taux de pauvreté en milieu rural selon la
BM (2006b) est environ le double de celui du mil ieu urbain, soit un rapport de ] ,8% en 1998
et 2,0 en 2002.
Diallo (2001) affirme que les raisons de la déscolarisation résident dans la crise
économique qui a limité la capacité d'intervention de l'État, entraînant une dégradation du
système éducatif se traduisant par une baisse du taux de scolarisation. Péluchon (2007)
soutient par contre que la cause du déclin du taux de scolarisation réside dans les Plans
d'Ajustement structurel qui ont entraîné une dégradation des services de l'enseignement. En
effet, la réduction des budgets dédiés à l'éducation a provoqué la dégradation des
établissements scolaires, ne permettant plus d'accueillir les élèves dans des conditions
décentes.
69
Diallo (2001) ajoute dans un document de travail qu'en Côte-d'Ivoire, les enfants
des zones urbaines ont plus de chance d'être scolarisés que ceux des campagnes où il existe
très peu d'infrastructures scolaires. Il soutient également que de la pauvreté découle la
difficulté pour les défavorisés à investir dans le capital humain de leurs enfants, difficulté
surtout financière. L'auteur affirme que l'éducation est coûteuse, en raison tant de ses coûts
directs, qu'indirects. Les coûts directs comprennent les frais de scolarité, les livres, les
uniformes et la distance entre le domicile et l'école .Les coûts indirects de l'éducation sont le
renoncement au revenu de l'enfant lorsque ce dernier va à l'école.
Jusque là, nous avions abordé l'impact de la baisse du revenu des producteurs sur l'éducation
(taux de scolarisation). Nous étudierons maintenant les effets de cette diminution de revenu
des producteurs sur la santé.
Une étude de l'OCDE soumise par Morrisson (2002), conclut qu'en Côte-d'Ivoire,
plus les familles sont pauvres, plus les facteurs responsables des pathologies sont nombreux.
L'auteur ajoute que les familles classées en dessous du seuil de pauvreté absolue n'ont pas les
moyens d'assurer une alimentation équilibrée (qui est coûteuse) des conditions correctes
d'habitat, d'hygiène ni de payer les soins et les médicaments. Dans des études globales
Chossudovsky (1998) par contre soutient que:
Les réformes du FMI et de la BM démantèlent de manière brutale les secteurs sociaux des
pays en voie de développement. [... ]. Dans le secteur de la santé, c'est l'effondrement
des soins corporatifs et préventifs: l'équipement médical fait défaut, les conditions de
travail sont insatisfaisantes, le personnel est mal payé. (Chossudovsky, 1998, p.3)
En ce qui concerne les soins de santé proprement dits, Péluchon (2007), dans une
étude sur la Côte-d'Ivoire, tire des conclusions similaires à celles de Chossudovsky (1998) et
soutient qu'on assiste lors de la mise en place des mesures d'ajustement structurel à une
réduction des dépenses de santé ou à une disparition complète des budgets alloués à
l'entretien des infrastructures, à l'achat de gros matériel, mais aussi à l'achat du matériel pour
les soins courants. Les médicaments subissent le même sort, les difficultés d'achat étant liées
entre autres aux restrictions budgétaires
Au terme de ce paragraphe en nous référant aux conclusions des auteurs, nous pouvons
soutenir que la libéralisation a eu des incidences sur les capacités des producteurs à répondre
efficacement aux besoins primaires de leurs familles.
Dans cette partie, nous parlerons des effets directs du retrait de l'État de la
production cacaoyère ivoirienne.
À cet effet, Gauze (2006), ex ministre ivoirien des matières premières, affirme que
le désengagement de l'État ivoirien du secteur de la production, de la gestion et de la
commercialisation des filières agricoles a connu une accentuation marquée par la
ibéralisation de la filière cacao en 1999.
1
72
faible performance de ces structures. En effet, tandis que leur nombre a pratiquement triplé en
moins de cinq ans (300 en 2000 et plus de 1000 en 2006), leur part de collecte n'a connu
affirme que: « La libéralisation de la filière café cacao imposée par le FMI et la Banque
mondiale à la Côte-d'Ivoire n'a pas donné satisfaction [... ] la réforme au niveau de la filière a
Gogoua (2003) quant à lui affinne que non seulement les programmes d'ajustement
ont abouti à un endettement accru, mais ils ont en autre entraîné une baisse des revenus des
effectuées par l'ex Caistab) et une hausse des prix. (Augmentation des prix des produits
phytosanitaires)
évaluer plusieurs possibilités pour avoir part au profit. Bednik (2006) estime que pour la
FCFA (152 millions d'euros) pour la Côte-d'Ivoire. En effet, les planteurs ivoiriens,
désespérés de ne pas être en mesure de se confronter aux nouvelles politiques, bradent leur
cacao à vil prix aux pays voisins tels le Ghana, le Burkina-Faso, la Guinée pour échapper aux
prélèvements élevés dont ils ne voient pas les fruits de la redistribution, sans se préoccuper de
la qualité du produit.
300000 tonnes de fèves s'évaporeraient chaque année via les frontières du pays.
74
Tableau 5.4
Certains prélèvements de l'État ont été ajoutés en plus du Droits unique de sortie,
avec l'implantation de la libéralisation. Ce sont notamment les droits d'enregistrements. De
plus, il y a eu l'instauration des redevances (redevance de l'ARCC, redevance de la BCC,
redevance de la FDPCCC, redevance de la FRC, redevance sacherie, réserve de prudence)
pour le fonctionnement des différentes structures de gestion, d'encadrement et de
financement de la filière. Ces redevances ont fait monter le total des prélèvements. (Gogoua,
2003)
Nous analyserons le tableau 5.5 proposé par Banzio (2003) sur les prélèvements
opérés pour le compte de l'État et pour les structures de gestion de la filière.
Banzio affirme que: « les différents prélèvements affectent les revenus des
planteurs et par conséquent leur marge bénéficiaire. On note par exemple que pour les deux
campagnes stabilisées (97-98 et 98-99), le montant des prélèvements étaient respectivement
de 47,22 FCFA au kilogramme et 45,85 FCFA/kg. Pendant les deux campagnes (2001-2002
et 2002-2003) le montant des prélèvements est passé de 108,69 FCFA le kilogranune à
134,67 FCFA Je kilogramme, puis, depuis le 26 avril 2003, il est passé à 80,67 FCFA/kg;
Ceci démontre Je caractère excessif des prélèvements qu'opèrent les différentes structures
depuis l'année 2001. » (Banzio, 2003, p.l15-116)
77
Tableau 5.5
Période
97-98 98-99 99-00 00-01 01-02 02-03
1-10-02 26-04
CACAO
03
DELTA 44,7 43,35 5,3 5,3 0 0 0
BCC 7,23 4,90 4,90
ARCC 2,96 2,77 2,77
FRC 0 3 3
TOT AL REDEVANCES 44,7 43,35 5,3 5,3 10,19 10,67 10,67
SACHERlE 2,5 2,5 2,5 2,5 3,5 5 5
FOPCC 35 55 50
RESERVES DE 60 64 15
PRUDENCES
TOTAL 2,5 2,5 2,5 2,5 98,5 124 70
PRÉLEVEM ENTS
TOTAL REDEV. + 47,2 45,85 7,8 7,8 108,69 134,67 80,67
PREL.
DUS 150 150 150 180 180 220 220
TOTAL 197,2 195,85 157,8 187,8 288,69 354,67 300,67
DUS+REDEVANCES.
+PRELEVEM ENTS
~ ~
Impossibilité de Absence de Absence de
satisfaire les coûts de contrôle contrôle
subsistance
• Éducation
• Santé
~
• Nourriture Manque Diminution de
• Logement d'information l'utilisation
• Electricité
/
Manque
~ Pas d'expérience
d'éducation d'affaire
Pauvreté
(Élevée)
Le revenu brut du producteur dans cette nouvelle réalité dépend du prix de vente élevé du
cacao auquel on doit soustraire le prix élevé des intrants, des produits phytosanitaires. Donc
le revenu du producteur a diminué. En ce qui concerne le prix de vente, si nous nous basons
sur les affirmations des auteurs mentioooés dans l'analyse des doooées, nous constatons une
désorganisation de la filière, donc une absence de contrôle des prix. Les producteurs se
retrouvent à la merci des intermédiaires et des exportateurs à cause de leur manque
d'éducation, d'information et d'expérience en affaire ce qui contribue à augmenter la
pauvreté. Aussi, la pauvreté augmente car le revenu net est insuffisant pour combler ses frais
de subsistance (santé, éducation, nourriture, logement, électricité).
CHAPITRE VI
Dans cette partie nous exposerons les différents résultats obtenus à la suite de notre
enquête. En effet, la libéralisation commerciale a eu des effets différents sur les acteurs
impliqués dans ce processus. Notre objectif, en ce qui concerne la démarche terrain en Côte
d'Ivoire, consiste à recueillir en 2007 auprès des producteurs de cacao des informations sur
ce qui s'est réellement produit au niveau de leur condition de vie à la suite de l'instauration
de cette réforme. Nous procéderons dans un premier temps, par une description de
l'échantillonnage, par la suite par des tests bivariés. Et de ce qui en découle nous vérifierons
nos hypothèses de recherche.
Le profil de notre échantillon est déterminé en fonction de J'espace cultivé entre après la
libéralisation, du recrutement de nouveaux manœuvres entre après la libéralisation, de l'accès
des producteurs de cacao aux infrastructures de base, de leur revenu annuel de 2006-2007, du
statut des producteurs de cacao après la libéralisation, de l'investissement de modernisation
des plantations après la libéralisation, de la capacité à répondre aux besoins familiaux, des
sources de la modification de revenus après la libéralisation, des raisons de la pauvreté, du
coût des semences après la libéralisation, de la situation des producteurs de cacao par rapport
à celle des autres producteurs, les anné.es d'expérience des producteurs de cacao.
L'analyse univariée des variables mesurées à ]' aide d'échelles non métriques se
fera à partir de distribution de fréquences suivantes.
Tableau 6.1
Espace cultivé après la libéralisation
Pour la variable « espace cultivé », le tableau 6.1 démontre qu'au sein de notre
échantillon 37,1% des producteurs de cacao ont dû réduire leur superficie cultivable.
81
51,4% des producteurs n'ont pas modifié leur espace cultivable. Et seulement un nombre
limité Il,4% des producteurs de cacao ont été en mesure d'augmenter leurs exploitations
après la libéralisation. Agkpo (2000) affirme que plus le producteur perçoit un revenu
agricole important, plus sa propension à accroître sa production est grande. À travers notre
tableau nous constatons que les producteurs n'ont pas beaucoup investi dans leurs
exploitations après la libéralisation.
Tableau 6.2
Recrutement de nouveaux manœuvres après la libéralisation
Tableau 6.3
Accès des familles des producteurs aux infrastructures de base
D'après le tableau 6.3, 85,7% des familles des producteurs de cacao ont accès à
J"éducation et au centre de santé. En revanche, 2,9% des familles n'ont aucun accès aux
infrastructmes. Pour la majorité donc de nos producteurs de cacao, l'accès pour leurs enfants
à récole et aux centres de santé ne constitue pas une difficulté.
Le rapport du BNETD (2003b) nous a permis de constater que les problèmes d'accès à
l'éducation ou à la santé dans les milieux agricoles sont beaucoup plus liés aux facteurs
culturels ainsi qu'aux stratégies économiques des ménages de producteurs qu'aux contraintes
d'accès à celle-ci. Ainsi, les producteurs de cacao ont presque tous accès aux infrastructures
de base mais cette accessibilité ne signifie en rien qu'ils ont la capacité matérieUe de s'en
offrir le coût. Nous vérifierons cette dernière assertion dans J'analyse bivariée.
83
Tableau 6.4
Revenu annuel des producteurs de cacao de 2006-2007
Le tableau 6.4 montre que la majorité des producteurs de cacao 82,9%, ont un
revenu annuel inférieur à 5 millions de FCF A. Seulement 17,1 % des producteurs de cacao
ont un revenu annuel de plus de 5 millions de FCF A. Les données quantitatives obtenues
dans la revue de littérature au chapitre cinq sur le revenu annuel des producteurs de cacao
auprès de l'INS sont beaucoup plus élevées que celles que nous avons obtenues sur le terrain.
Tableau 6.5
Statut des producteurs après la libéralisation
Tableau 6.6
Investissement de modernisation des plantations après la libéralisation
Dans le tableau 6.6 nous remarquons que 45,7% des producteurs onl pu investir
dans l'amélioration de leurs exploitations après la libéralisation. Cependant, 54,3 % des
producteurs de cacao n'ont pas pu moderniser leurs plantations. Pour Araujo el Chambas
(2001) une des principales conséquences de la libéralisation est l'instabilité des prix. De celte
instabilité il en résulte un changement du comportement des producteurs de cacao qui
investissent moins dans leurs plantations. Selon Agkpo (2000) le revenu du producteur lui
permet de faire face à un ensemble de dépenses nécessaires pour j'adoption d'une nouvelle
technologie. Ainsi, plus le revenu du producteur est important, plus il est à l'aise pour adopter
la modernisation.
85
Tableau 6.7
Capacité des producteurs à répondre aux besoins familiaux
Dans le tableau 6.7, nous remarquons que 91,4% des producteurs ne peuvent pas
répondre aux besoins de leur farrillle. Selon Araujo et Chambas affirment que: « la faiblesse
des prix des fèves sur le marché mondial, oblige les producteurs de cacao à s'endetter, ils
doivent donc emprunter pour répondre aux besoins essentiels et aux urgences médicales de
leurs familles ». (Araujo et Chambas, 2001, P 42)
Tableau 6.8
Sources de la modification du revenu des producteurs après la libéralisation
Tableau 6.9
Les raisons de la pauvreté des producteurs après la libéralisation
Dans notre revue de littérature, plusieurs auteurs ont mentionné que la libéralisation
commerciale était la seule cause de la pauvreté. Cependant, les données obtenues par notre
enquête terrain diffèrent de ces affirmations. Dans notre cas précis, nous constatons une
situation plus complexe. Il y a une certaine proportion attribuée à la libéralisation. Toutefois
bien d'autres facteurs sont responsables de la pauvreté des producteurs de cacao en Côte
d'Ivoire.
6.1.2.11 La situation des producteurs de cacao par rapport à celle des autres producteurs
Tableau 6.11
La situation des producteurs de cacao par rapport celle des autres producteurs
Tableau 6.12
Années d'expérience des producteurs de cacao
Le tableau 6.12 démontre que 82,9% de nos répondants ont plus de 8 alUlées
d'expérience en tant que producteur de cacao. Cette variable est importante car elle nous
permet de constater que les producteurs de cacao de notre échantillon ont pour la plupart
COlUlU la période avant libéralisation et après libéralisation.
Dans la section suivante, nous avons choisi comme méthode d'analyse associative,
les tableaux croisés ou de contingence car cette technique d'analyse permet d'étudier la
relation qui existe entre deux variables discrètes. Astous (1995).
Dans la section qui suit, nous allons confronter notre cadre conceptuel à la réalité: à
partir des infonnations que nous avons collectées à l'aide du questionnaire auprès de notre
échantillonnage, nous allons tester ces hypothèses.
Nous allons tester les hypothèses que nous avons élaborées dans le chapitre méthodologique
pour pouvoir valider notre cadre conceptuel et le confronter à la réalité.
Hl: La majorité des producteurs de cacao sont plus pauvres après qu'avant la
libéralisation.
La première hypothèse Hl déclare que la majorité des producteurs de cacao sont plus pauvres
après qu'avant la libéralisation. La revue de littérature nous a pennis de recenser plusieurs
variables susceptibles d'expliquer la condition des producteurs de cacao après libéralisation.
Pour mieux tester notre hypothèse de base Hl, nous avons donc décidé de la scinder en trois
caractéristiques, ce sont donc ces trois éléments que nous vérifierons.
a : Les sources de la modification des revenus sont reliées au statut des producteurs après la
libéralisation.
b : Le statut des producteurs après la libéralisalion est relié aux raisons de la pauvreté des
producteurs.
c: Les investissements des producteurs après la libéralisation sont liés au statut des
producteurs.
a : Relation entre les sour"ces de la modification des I"evenus et le statut des pl"oducteurs
après la libéralisation
L "élément a atteste que les sources de la modification des revenus sont reliées au
statut des producteurs après la libéralisation. Nous interprétons notre hypothèse à l'aide du
tableau 6.13 suivant.
91
6.2.1 Les sources de la modification du revenu des producteurs et le statut des producteurs
après la libéralisation
Tableau 6.13
Analyse croisée
Les sources de la modification du revenu des producteurs et le statut des producteurs
après libéralisation
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de Pearson 12,301 3 0,006
Dans le cadre de notre étude, pour l'analyse de nos tableaux, compte tenu de la petite taille de
notre échantillon, nous utiliserons une marge d'erreur de lO%.
92
Nous recourons d'abord aux tableaux croisés, étant donné que les sources de la
modification des revenus et le statut des producteurs après la libéralisation sont deux
variables discrètes. Ensuite nous déterminerons s'il existe une relation d'interdépendance ou
non entre ces deux variables.
Ainsi, le tableau 6.13 nous démontre que 100% des producteurs de cacao
s'estimant plus pauvres, considèrent respectivement que les maladies et le vieillissement du
verger font partie des causes de la modification de leur revenu après la libéralisation.
Toutefois, pour 77,8% ce sont les taxes d'État et pour 38,5% c'est la libéralisation. Il est
probable qu'il existe effectivement des liens entre la libéralisation, les maladies, le
vieillissement du verger et les taxes d'État. En effet, la libéralisation a modifié la capacité des
producteurs à investir dans l'entretien de leur verger.
Tableau 6.14
Analyse croisée
Le statut des producteurs après libéralisation et les raisons de la pauvreté
Raisons de la pauvreté
Le statut des producteurs après
libéralisation Total
Libéralisation Autres
Effectif 5 20 25
Plus pauvres % des raisons de
38,5% 90,9% 71,4%
la pauvreté
Aucun Effectif 8 2 10
changement % des raisons de
61,5% 9,1% 28,6%
la pauvreté
Total Effectif 13 22 35
% des raisons de
100% 100% 100%
la pauvreté
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de Pearson 11,014 1 0,001
Nous constatons que pour l'ensemble des réponses, il y a une majorité des
producteurs qui se perçoivent plus pauvres après la libéralisation. Le tableau 6.14 nous
indique que 90,9% des producteurs de cacao ayant le statut de pauvre considèrent que les
raisons de la pauvreté sont autres que la libéralisation. Comme mentionné précédemment
dans le commentaire du tableau 6.9, les autres raisons de la pauvreté sont: l'inflation, les
maladies des plants, la guerre, la faible pluviométrie.
94
Nous détenninerons à l'aide du test de khi carré s'il existe un lien entre ces deux
variables discrètes. Le test d'hypothèse s'écrit de la façon suivante:
Ho= Le statut des producteurs après libéralisation et les raisons de la pauvreté sont liés.
H I = Le statut des producteurs après libéralisation et les raisons de la pauvreté ne sont pas liés.
Les résultats du Khi carré montrent que X20= 11,014 et que p (X20) =0,00 l.Avec un
seuil de signification Œ= 10%, P (X20) < 0,1 on rejette donc Ho.
Nous confirmons donc qu'il existe une association significative entre le statut des
producteurs et les raisons de la pauvreté. On rejette Ho. ce qui veut dire qu'il existe une
interdépendance entre les deux variables. Au niveau de l'intensité de la relation, l'observation
du V de cramer nous indique 0,56, ce qui correspond à une relation d'interdépendance forte
entre le statut des producteurs et les raisons de la pauvreté. b est confirmé.
c : Relation entre les investissements des producteurs après libéralisation et le statut des
producteurs.
Nous tenterons d'établir une relation entre ces deux variables. Les résultats du tableau croisé
6.14 confirme l" assertion selon laquelle les investissements des producteurs après la
libéralisation sont liés au statut des producteurs.
95
6.2.3 Les investissements des producteurs après la libéralisation et le statut des producteurs
Tableau 6.15
Analyse croisée
Les investissements des producteurs après la libéralisation et le statut des producteurs
Aucune Effectif 17 2 19
modernisation %du
68,0% 20,0% 54,3%
statut
Total Effectif 25 10 35
%du
100,0% 100,0% 100,0%
statut
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux
6,632 1 0,010
de Pearson
À travers ce tableau croisé, nous estimons que 80% des producteurs de cacao qui ont eu un
statut stable après la libéralisation sont ceux qui se sont le plus dotés en mécanisation.
Notre hypothèse Hl affirme que la majorité des producteurs sont plus pauvres maintenant
qu'avant la libéralisation. Cette assertion est confinnée à travers la vérification de nos
éléments a, b, c précédents. Le pourcentage de producteurs de cacao se considérant pauvres
est d'environ 80%. Fort de ces informations nous estimons que notre hypothèse Hl est
acceptée.
H2: Le niveau d'endettement est une cause de la faible volonté des producteurs
d'investir dans leurs exploitations après la libéralisation
Nous avons procédé de la même façon avec notre deuxième hypothèse en la divisant en deux
caractéristiques:
a: Le niveau d'endettement des producteurs de cacao est lié aux coûts de santé et d'éducation
après la libéralisation.
97
b: Le niveau d'endettement des producteurs de cacao est relié au coût des semences qui s'est
amplifié après la libéralisation.
Ces éléments, nous permettrons de démontrer par des tableaux croisés que la situation
économique des producteurs de cacao influence positivement ou négativement sa capacité à
acquérir de nouveaux équipements.
a : Relation entre le niveau d'endettement des producteurs de cacao et les coûts de santé
et d'éducation après la libéralisation.
L'élément a mentiorme que le niveau d'endettement des producteurs de cacao est lié
aux coûts de santé et d'éducation après la libéralisation. Nous commenterons notre hypothèse
à partir du tableau croisé suivant.
6.2.4 Le niveau d'endettement des producteurs de cacao est lié aux coûts de santé et
d'éducation après la libéralisation.
Tableau 6.16
Analyse croisée
Le niveau d'endettement et les coûts d'éducation et de santé après la libéralisation
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de
0,002 1 0,968
Pearson
Nous remarquons dans notre tableau que 54,3% producteurs de cacao ont un
nIveau d'endettement élevé. Toutefois, la distribution des pourcentages varie selon qu'il
s'agit des producteurs qui considèrent que les coûts de santé et d'éducation ont diminué ou
ont augmenté.
Les pourcentages sont respectivement parmi ceux qui considèrent que les coûts de la santé et
d'éducation ont diminué (53,8% affirment que leur niveau d'endettement a augmenté, 46,2%
pensent que l'endettement est resté au même niveau) et parmi ceux qui estiment que les coûts
de la santé et d'éducation ont augmenté (54,5% des producteurs de cacao jugent que leur
niveau d'endettement a augmenté et 45,5 % des producteurs de cacao affirment que leur
niveau d'endettement est demeuré stable.). En nous référant à notre tableau 6.16, nous
considérons a priori que les producteurs de cacao perçoivent que leur niveau d'endettement
après la libéralisation s'est accru, En ce qui concerne les coûts des soins de santé et
d'éducation, il y a une légère égalité de pourcentage entre les producteurs de cacao qui
pensent que les coûts de santé et d'éducation ont augmenté et ceux qui pensent qu'ils sont
restés identiques.
Les tests de khi carré nous permettront de mieux spécifier l'existence de liens possibles.
Les résultats du Khi carré montrent que X2o= 0,002 et que p (X2o) =0,968.Avec un
seuil de signification u=lO%, p (X2o) > 0,1 on ne rejette donc pas Ho.
On peut donc affirmer qu'il n'existe pas de relation d'association significative entre le niveau
d'endettement et les coûts de santé et d'éducation après la libéralisation. On ne rejette pas Ho.
ce qui veut dire qu'il n'y a pas d'interdépendance entre les deux variables.a est donc rejeté
b : Relation entre Je niveau d'endettement des producteurs de cacao et les coûts des
semences après la libéralisation.
Augmenté
% du niveau
21,1%
°
,0% 78,.9% 100,0%
d'endettement
% des coûts des
50,0% ,0% 57,7% 54,3%
semences
Effectif 8 1 26 35
% du niveau
Total d'endettement 22,9% 2,9% 74,3% 100,0%
entre
% des coûts de
100,0% 100,0% 100,0% 100,0%
semences
100
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de
1,368 2 0,505
Pearson
Dans Je tableau 6.17, nous observons que les producteurs de cacao qui considèrent
que le coût des semences a augmenté trouvent aussi que leur niveau d'endettement a
augmenté après la libéralisation. Aussi 100% des producteurs de cacao qui trouvent que le
coût de semences sont restés inchangés affichent un niveau d'endettement stable.
Les tests de khi carré nous indiqueront les liens d'appartenance entre ces variables.
Le rejet des éléments a et b expliquerait que ['endettement des producteurs de cacao après la
libéralisation. En revanche l'incapacité des producteurs à investir n'est pas causée par les
coûts à la hausse des coûts de santé, d'éducation et de semences. Nous rejetons donc notre
hypothèse de base H2.
101
Notre hypothèse H2 qui révèle que le niveau d'endettement est une cause de la faible volonté
des producteurs d'investir dans leurs exploitations n'est pas plausible et vérifiable.
b: La quantité d'espace cultivé est liée aux sources de la modification de revenu des
producteurs après la libéralisation.
après la libéralisation.
L'élément a soutient que 'la quantité d'espace cultivé est liée au recrutement de
nouveaux manœuvres après la libéralisation. Le tableau croisé 6.18 nous permettra
d'interpréter notre élément a.
102
6.2.7 La quantité d'espace cultivé est liée au recrutement de nouveaux manœuvres après la
libéralisation
Tableau 6.18
Analyse croisée
La quantité d'espace cultivé et recrutement de nouveaux manœuvres après la
libéralisation.
Recrutement de
nouveaux manœuvres
Quantité d'espace cultivé après la libéralisation Total
Oui Non
Moins Effectif 1 12 13
d'espace % de la quantité
7,7% 92,3% 100,0%
d'espace cultivé
% du recrutement
nouveaux 10,0% 48,0% 37,1%
manœuvres
Effectif 9 13 22
Inchangée ou % de la quantité
40,9% 59,1% 100,0%
Plus espace d'espace cultivé
% du recrutement
nouveaux
90,0% 52,0% 62,9%
manœuvres
Total Effectif 10 25 35
% de la quantité
28,6% 71,4% 100,0%
d'espace cultivé
% du recrutement
nouveaux 100,0% 100,0% 100,0%
manœuvres
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de
4,418 1 0,036
Pearson
103
Dans le tableau nous constatons que 92,3% des producteurs de cacao qui n'ont pas
recruté de nouveaux manœuvres sont également ceux qui n'ont pas agrandi leur superficie de
cultures.
Les tests de khi carré nous permettront d'indiquer effectivement s'il y a un lien entre ces
variables.Le test d 'hypothèse de ce cas précis s' éClit de la façon suivante:
H o= La quantité d'espace cultivé et recrutement de nouveaux manœuvres après la
libéralisation sont indépendants.
H 1= La quantité d'espace cultivé et recrutement de nouveaux manœuvres après la
libéralisation ne sont pas indépendants.
Les résultats du Khi carré montrent que X2o= 4,418 et que p (X2o) =0,036.Avec un
seuil de signification u=IO%, p (X2o) < 0,1 on rejette Ho. On peut donc certifier qu'il existe
une relation d'association significative entre la quantité d'espace cultivé et le recrutement de
nouveaux manœuvres après la libéralisation. On rejette Ho ce qui veut dire qu'il y a une
interdépendance entre les deux variables. a est donc confirmé
b : Relation la quantité d'espace cultivé est liée aux sources de la modification de revenu
des producteurs après la libéralisation
L'élément b soutient que la quantité d'espace cultivé est liée aux sources de la
modification de revenu des producteurs après la libéralisation. Nous allons observer notre
hypothèse à partir du tableau croisé 6.19.
104
6.2.8 La quantité d'espace cultivé est liée aux sources de la modification de revenu des
producteurs après la libéralisation
Tableau 6.19
Analyse croisée
La quantité d'espace cultivé et les sources de la modification de revenu des producteurs
après la libéralisation
Total Effectif 7 6 13 9 35
% la quantité
d'espace 20,0% 17,1% 37,1% 25,7% 100,0%
cultivé
% de la cause
dela 100,0% 100,0% 100,0% 100,0% 100,0%
modification
105
Signification asymptotique
Valeur dl (bilatérale)
Khi-deux de
7,136 3 0,068
Pearson
Dans le tableau croisé ci-dessus, nous remarquons que les producteurs de cacao qui
ont moins d'espace cultivable attribuent la cause de la modification de revenu à la
libéralisation. La libéralisation est donc pour certains producteurs de cacao une des causes de
la modification de leur revenu. C'est sans doute la raison pour laquelle, les producteurs
réduisent leur surface cultivable.
Les tests de khi carré nous permettront d'indiquer effectivement s'il y a un lien entre ces
variables.Le test d'hypothèse de ce cas précis s'écrit de la façon suivante:
H o= La quantité d'espace cultivé et les sources de la modification de revenu des producteurs
après la libéralisation sont indépendantes.
H,= La quantité d'espace cultivé et les sources de la modification de revenu des producteurs
après la libéralisation ne sont pas indépendantes.
Les résultats du Khi carré montrent que X2o= 7,136 et que p (X2o) =0,ü68.Avec un
seuil de signification a=lO%, p (X2o) < 0,1 on rejette Ho. On peut donc affirmer qu'il existe
une relation d'association significative entre la quantité d'espace cultivé et les sources de la
modification de revenu des producteurs après la libéralisation. On rejette Ho. ce qui veut dire
qu'il ya une interdépendance entre les deux variables. b est donc confirmé.
D'après la revue de littérature, nous avons pu identifier des hypothèses capables de nous
pennettre de mieux comprendre le phénomène de la libéralisation du cacao et son incidence
sur les producteurs. Et dans ce chapitre, nous avons testé nos hypothèses pour valider notre
modèle construit qui consistait à appréhender les liens possibles entre la libéralisation
commerciale et la pauvreté des producteurs.
Nous avons analysé la relation entre les variables; les sources de la modification des revenus
après la libéralisation et le statut des producteurs après la libéralisation, le statut des
producteurs après la libéralisation et les raisons de la pauvreté des producteurs, les
investissements après la libéralisation et le statut des producteurs après la libéralisation.
Nos analyses des résultats ont confirmé dans l'élément a, l'existence d'une relation
significative entre les sources de la modification des revenus et le statut des producteurs après
la libéralisation. Ainsi, selon ces variables, le statut des producteurs est influencé par la
modification à la baisse de ses revenus, c'est-à-dire que les producteurs s'aperçoivent que les
maladies qui attaquent les plants, la libéralisation qui n'a pas tenu compte de la maturité des
acteurs, les taxes d'État outrancières sont des ponctions sur leur revenu. De plus, la
détérioration de la qualité fait baisser les rendements des producteurs. Avant 1999, le contrôle
qualité se faisait en amont. Aujourd'hui, il se fait en aval à l'exportation. Nous remarquons
donc que la situation du producteur se dégrade à plus d'un titre.
En outre, le manque d'entretien phytosanitaire des plants, le non traitement des plantations, la
pluviométrie, J'inflation et la guelTe sont des facteurs connexes à la pauvreté des producteurs.
En d'autres termes, ces facteurs entravent leur capacité de produire davantage de fèves de
cacao qui est leur principale source de revenu. Il ressort des enquêtes que la pauvreté des
producteurs est due d'une part à la libéralisation et d'autre part à des causes extérieures.
Nos analyses des résultats ont confirmé dans l'élément c, les investissements et le
statut des producteurs après la libéralisation. Le test d'hypothèse de l'élément c a confirmé
l'existence d'une relation positive entre la variable dépendante des investissements de
modernisation et le statut des producteurs après la libéral isation. Nous avons remarqué que
les producteurs pour la plupart sont pauvres et qu'ils n'ont apporté aucun changement à leur
plantation.
2. Le niveau d'endettement est une cause de la faible volonté des producteurs d'investir
dans leurs plantations après la libéralisation
Par ailleurs, dans notre revue de littérature au chapitre cinq, nous avons énuméré
des auteurs qui affirmaient que la libéralisation a une incidence sur la santé et l'éducation.
Nous avons jugé donc important d'avoir une hypothèse qui prenait en compte les variables
dépendantes de santé et d'éducation. Après les résultats obtenus du tableau croisé 6.16 nous
concluons qu'il n'existe pas de lien entre le niveau d'endettement après la libéralisation et les
coûts de santé et d'éducation après la libéralisation.
En outre, selon les dires de spécialistes interviewés pour le pré-test notamment, Mr Agkpo
Jean Luc; coordonnateur de projet de l'observatoire de la filière café cacao, celui-ci affirme
qu'historiquement, lorsqu'on parle du ménage au sens strict du cacao. La capacité d'épargne
des producteurs a toujours été mise en cause. Cette situation provient du fait que le
producteur de cacao travaille quatre mois dans l'année tandis que les autres mois servent à
J'entretien des plants en vue de la récolte prochaine. La faculté de planifier n'existant pas
dans le milieu paysan, le producteur dépense l'essentiel de son revenu en ne pensant pas aux
charges éventuelles auxquelles il devra faire face. Il est donc obligé de s'endetter pour ses
besoins essentiels.
Selon des auteurs tels Araujo et Chambas, la faiblesse des pnx des fèves, oblige les
producteurs de cacao à s'endetter.
En ce qui concerne notre hypothèse H3, la pauvreté des producteurs est la cause de la
réduction de la surface cultivable après la libéralisation. Nous avons confirmé nos éléments, a
et b donc notre hypothèse H3.
Notre hypothèse est plausible car nous avons avec l'hypothèse Hl tenté d'expliquer la
perception de pauvreté des producteurs de cacao. En considérant que les producteurs de cacao
sont pauvres il est logique d'affirmer qu'ils ne soient pas capables d'investir dans
J'intensification de leur surface cultivable.
Les producteurs de cacao disposant d'une main-d'œuvre abondante donc d'un capital
suffisant seraient plus motivés à étendre leur superficie que les producteurs « pauvres» en
main-d'œuvre; cette idée est soutenue par Agkpo (2000).
110
Tableau 6.20
Récapitulation des résultats
Annoncée comme une mesure qui allait sortir les planteurs de la misère, la
libéralisation de la filière cacao a plongé ses acteurs dans une situation délicate. Le prix
d'achat garanti au producteur a été supprimé et de nouvelles structures d'encadrement et de
régulation ont remplacé la caisse de stabilisation qui organisait la commercialisation du
cacao. Avec cette nouvelle réforme, les producteurs ne profitent guère des fluctuations des
prix sur le marché mondial parce qu'ils sont contraints de vendre leurs produits au moment
même des récoltes. Ils ne disposent pas de moyens de stockage pour profiter des lois de
l'offre et de la demande. Finalement tous les gains vont aux intermédiaires et aux négociants.
Les producteurs n'ont donc aucun contrôle sur le prix de vente. En outre, ces prix de vente
trop élevé réduisent les populations rurales à la pauvreté parce qu'ils ne peuvent être absorbés
par les coûts de production.
112
Comme nous l'avons constaté dans notre étude, la condition des producteurs de cacao
s'est à plusieurs égards fortement dégradée aux cours des années .Néamnoins, nous sommes
conscients du fait que des siluations de ce genre sont la conséquence d'un ensemble de causes
nolamment la mauvaise pluviométrie, l'inflalion, les attaques parasilaires, le vieillissement
des vergers, les prélèvements d'État excessifs. Ainsi, il est arbitraire d'en attribuer toule la
responsabilité aux seules réformes commerciales instaurées en Côle-d'Ivoire. Cependant,
dans une certaine proportion la libéralisation est en partie responsable de celle précarisalion
des conditions de vie des producteurs.
113
Bien que toutes les mesures aient été prises pour assurer la validité de notre démarche
d'étude, il existe tout de même des limites au processus encouru. D'abord en ce qui concerne
l'échantillon, une limite a été soulevée. L'échantillon est restreint et s'est adressé à un type de
producteurs en particulier, malgré les efforts fournis pour obtenir un plus grand nombre de
répondant.
La méthode de cueillette de données, elle aussi comporte des biais, due à la mauvaise
compréhension de certaines questions. De plus, le questionnaire ne permet pas l'émergence
de J'inattendu, de la nouveauté. Les questions fermées peuvent avoir une influence sur les
répondants, car elles peuvent suggérer des réponses que ceux-ci n'auraient pas données
spontanément. Le questionnaire a également des biais à cause de la variabilité des réponses
données à la même question par différentes personnes en situation identique. En outre, le
questionnaire est irrévocable, une fois que les questionnaires sont distribués, on ne peut plus
faire des changements. En plus, il est impossible de vérifier l'exactitude des réponses
données par les répondants. Enfin, l'analyse du questionnaire exige des compétences en
statistique et l'absence de la subjectivité pour obtenir de bons résultats.
Un obstacle auquel nous avons dû faire face réside dans l'élaboration et la construction
des questions pour notre enquête. Les questions telles que formulées dans notre questionnaire
n'ont pas permis d'obtenir tous les résultats 8tlendus. Cette situation nous a permis de réaliser
qu'une meilleure connaissance de l'outil statistique avant la conceptualisation de nos
questions aurait favorisé une plus grande précision des questions posées.
Enfin, une autre difficulté à laquelle nous avons été confrontés faire face dans
l'élaboration de notre étude est l'absence de données disponibles. Par exemple dans un
secteur précis comme celui de l'éducation, sur une période de temps, les données ne sont pas
à jour. De plus, même lorsque les données existent leur fiabilité est régulièrement mise en
doute puisqu'il n'est pas rare que deux sources différentes se contredisent.
114
Ces problèmes nous conduisent à nuancer le choix et l'organisation des dormées. Ainsi,
les résultats de notre étude souffrent de certaines incertitudes, à cause de la fragilité et de
l'absence des dormées sur lesquelles ils sont basés.
Malgré ces limites, notre étude fournit plusieurs pistes pour des recherches futures.
Premièrement, il serait intéressant de mesurer le poids des facteurs causant la pauvreté chez
les producteurs afin de savoir lesquels auraient le plus grand impact sur la diminution du
revenu de ceux ci. Deuxièmement, il serait pertinent de savoir si l'ensemble des facteurs qui
ont joué sur la pauvreté des producteurs dans cette étude pouvaient être également validés
dans des études subséquentes dans d'autres pays ayant vécu une situation semblable. Des
éludes plus poussées devraient être menées dans ce sens.
Recommandations
Il faudrait redéfinir les rôles et les missions de chaque stlllcture afin de corriger les
problèmes de chevauchements et de conflits de compétence et de personnes qui
minent la filière et la fragilise.
Il faudrait fusionner le FRC et la BCC dans une même stlllcture, il s'agirait de
rendre cohérente, statutairement et légalement, la chaîne des décisions pour une plus
grande efficacité de leur exécution.
Il faudrait imposer à tous, le respect de la déontologie, et éviter la politisation de la
fiJière.
Envisager J'organisation d'élections transparentes pour le renouvellement des
organes dirigeantes des principales organisations des producteurs.
Il devrait avoir un audit au niveau de toutes les sltuctures de gestion mises en place
LIBÉRALISATION ET PAUVRETÉ:
LE CAS DES PRODUCTEURS DE CACAO DE LA CÔTE-D'IVOIRE
QUESTIONNAIRE
1 1
. ..... - ....
• Autres
1 J
... . ..
Remarques
1 1
118
Moins de 8 ans D
Plus de 8 ans D
Oui D
Non D
3. Quel est votre revenu annuel en 2006-2007 ?
Moins de 8 enfants D
8 enfants et plus D
119
Manœuvres D
Parents D
Autres D
Oui D
Non D
9. Vos familles ont-elles accès aux infrastructures ci dessous:
Écoles D
Centre de santé D
Aucun accès D
Écoles et centre de santé D
vente â la coopérative D
Vente â coopérative et à usine de transformation D
Oui D
Non D
12. Après la libéralisation avez-vous fait des investissements pour moderniser vos
plantations?
Pompes motorisées D
Aucune modernisation D
13. Est-ce que la quantité d'espace cultivée au cours des dernières années a connu les
modifications suivantes?
Plus d'espaces D
Moins d-espaces D
Inchangée D
14. Est-ce qu'après la libéralisation les revenus des producteurs ont subi des
modifications?
Augmenté D
Diminué D
Stable D
15. À quoi est attribuée l'augmentation des revenus des producteurs? _
)6. À quoi sont attribuées les sources de la modification des revenus des producteurs?
121
Maladies D
Vieillissement du verger D
Libéralisation D
Taxes d'État D
17. Quelles sont les raisons de la pauvreté des producteurs après la libéralisation?
Libéralisation D
Autres facteurs D
18. L'augmentation ou la diminution de revenu était de combien à chaque année? - - -
19. Est-ce qu'après la libéralisation vos coûts de semences, engrais, mam d'œuvre,
charges sociales, taxes ont-ils subi des changements?
Augmenté D
Diminué D
Stable D
20. Qu'elles sont les causes de l'augmentation des coûts ? _
122
22. Est-ce que votre niveau d'endettement a subi des changements après la libéralisation
en tenant compte de l'inflation?
Augmenté D
Diminué D
Identique D
23. Est-ce que vos capacités a répondre aux besoins de votre famille avant 1999 dans les
domaines suivants; se nourrir, se soigner se vêtir, scolariser vos enfants sont plus
élevés ou moins élevés qu'après la libéralisation?
Plus élevés D
Moins élevés D
24. Est-ce que après la libéralisation les coûts pour les soins de santé, d'alimentation, et
d'éducation en telme réel ont:
Augmenté D
Diminué D
inchangé D
25. Depuis la disparition de la caisse de stabilisation, quel est votre statut en tant que
producteur après la libéralisation?
Plus riches D
Plus pauvres D
Aucun changement D
123
26. Est-ce gue la situation des producteurs de cacao s'est améliorée ou détériorée si on
compare leur situation il celle des producteurs qui cultivent d'autres produits
agricoles?
Amélioration D
Détérioration D
SOURCES SECONDAIRES
Rapports de recherche
Rapports publication
Gouvernements
Institut national de statistique de Côte-d'Ivoire
HEC(www.hec.ca/biblio)
UQAM (www.bibliothèques.uqam.ca)
Quotidiens, journaux et magazines
Google (www.google.ca)
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