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L'INTÉRÊT GÉNÉRAL
El Mehdi Lamrani
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Résumé :
A partir d’une réflexion sur le rôle de la normalisation et en mettant en exergue les
rapports de force qui la sous-tendent, nous faisons la description des enjeux de
pouvoir de la comptabilité. Nous soulignons ensuite le rôle de la recherche
comptable dans la promotion d’une comptabilité politique, en posant ainsi le
problème de l’interaction entre politique et droit comptable.
Cet article montre que la dimension politique est au cœur de la production de
l’information comptable et de sa normalisation. Son ambition est de contribuer au
débat sur la portée des valeurs que véhiculent non pas les données comptables
arithmétiques, mais les normes comptables internationales.
Conçues uniquement pour répondre aux besoins d’information des apporteurs de
capitaux, ces dernières véhiculent une représentation comptable de l’entreprise
prônée par le capitalisme financier.
Abstract:
By magnifying the role of standardization and highlighting the balance of powers
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Une première version de cet article a été présentée au colloque annuel 2012 de l’Association pour la
Recherche Interdisciplinaire sur le Management des Organisations (ARIMHE) et a été acceptée au
congrès annuel 2013 de l’Association Francophone de Comptabilité (AFC). L’auteur remercie les
réviseurs anonymes, de ces deux manifestations et ceux de la revue VSE pour leurs remarques et
conseils.
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INTRODUCTION
TRAITE DE COMPTABILITE POLITIQUE
« J’avoue que je ne suis pas enchanté de l’idéal de vie que nous présentent ceux qui croient
que l’état normal de l’homme est de lutter sans fin pour se tirer d’affaire, que cette mêlée où
l’on foule aux pieds, où l’on se coudoie, où l’on s’écrase, où l’on se marche sur les talons et
qui est le type de la société actuelle, soit la destinée la plus désirable pour l’humanité. »
John Stuart Mill (1848).
7
Si la réponse judiciaire reste, pour chacune des affaires, essentiellement nationale, leurs causes
apparaissent éventuellement imputables à la matière comptable et à son traitement, de plus en plus
normalisé au plan mondial.
8
Schoun et al., (2012).
9
« C’est-à-dire l’art du commandement social, l’activité valorisée et valorisante dont l’unique dessein
est le Bien commun ». (Dieu, 2008, p. 5).
10
La politique représente pour Aristote la recherche des fins les plus hautes de l'homme qui, en tant
qu'animal politique, ne peut accéder à son humanité véritable que dans le cadre de la cité, dont la fin
n'est pas seulement de pouvoir vivre ensemble - savoir satisfaire ses besoins et s'entendre - mais
surtout de bien vivre, d'avoir une vie heureuse, c'est-à-dire vertueuse.
11
« L’idée même de science a suscité de vastes et complexes polémiques. Un accord assez général se
dégage cependant pour reconnaitre à la science quatre caractères : elle est un discours portant sur le
réel, contrôlable intersubjectivement, inachevé et donc révisable » (Denquin, 1992, p. 13).
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12
L’économie politique est selon l’expression d’Alfred Marshall, « une étude de l’humanité dans les
affaires ordinaires de la vie » (Barre et Teulon. 1997, p. 5).
13
« Les auteurs contemporains définissent l’économie politique comme étant : la science sociale qui
étudie les comportements humains devant des moyens rares sollicités par des fins multiples »
(Jacquemin et al., 2001, p. 3).
14
Au sens de « champ social d’intérêts collectifs contradictoires ou d’aspirations collectives
antagonistes que régule un pouvoir détenteur de coercition légitime » (Braud, 2011, p. 7).
15
Concept défini, en référence aux travaux de Bourdieu, par Frankel et Hojberg (2007, p. 8), comme
des « systèmes de relations structurés par des rapports de force entre des acteurs politiques et des
institutions ».
16
Par régulation comptable, nous entendons, à l’instar de Colasse (2005, p. 28), « le processus de
production, de mise en œuvre et de contrôle de l’application des normes comptables ; ce processus
peut se développer dans des espaces géopolitiques plus ou moins étendus et plus ou moins organisés,
à l’échelle d’un pays, d’un ensemble de pays ou du monde entier ».
17
« La politique comme l’art de gouverner les hommes vivant en société ». (Braud, 2011, p. 6).
18
« Comptabilité politique » non pas au sens de « comptabilité publique ». Pour nous : est politique ce
qui relève de l’intérêt général et de la fonction politique. Cette fonction peut être assumée non
seulement par les États, mais aussi par toute organisation dont la composition et le fonctionnement
garantissent a priori qu’elle œuvre pour l’intérêt général et non pour un intérêt particulier.
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19
L’ONG Global Transparency Initiative affirme, en ce sens, que le droit de « chercher, de recevoir et
de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées » - en tant que droit humain
fondamental énoncé par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme des Nations
Unies (DUDH) - s’applique à la question des informations financières détenues par les entités publiques
et privées.
20
Voir les travaux des auteurs de l’ouvrage « Comptabilité, Société, Politique, Mélanges en l'honneur
de Bernard Colasse », et de l’ouvrage « Comptabilité, Contrôle et Société, Mélanges en l'honneur du
Professeur Alain Burlaud ».
21
Colasse (2012, p. 3).
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tant que science sociale, n’est plus simplement une science de gestion, mais
également une science politique.
En effet, « si une science sociale détermine sa prise de vue sur le monde, il n’en
reste pas moins que ses frontières avec les disciplines voisines sont malaisées à
tracer dans la mesure où l’objet de son étude reste la totalité humaine, complexe et
diverse. Chacune des sciences sociales organise sa propre causalité, mais
rencontre vite la stérilité si elle cultive un splendide isolement. Cependant, chacun
risque d’affaiblir son analyse si elle ne sait pas limiter son objet et se garder des
empiétements sur d’autres domaines. » (Barre et Teulon, 1997, p. 5).
Il convient ainsi de proposer une ou plusieurs définitions de la comptabilité,
éclairée par son appartenance aux sciences sociales.
22
Bonnebouche et Grenier (2004).
23
Larousse pratique, dictionnaire du français au quotidien, Éditions Larousse, 2003.
24
Fourastié (1948).
25
L’article 120-1 du Plan Comptable Général 1999.
26
Selon Chantiri-Chaudemanche et al. (2012, p. 143), c’est « un texte émis par un organisme de
normalisation ayant une certaine autorité et proposant un traitement comptable sur un thème précis ».
Par ailleurs, la notion de norme comptable est d’acception plus large que la notion de règle.
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En effet, il revient aux sciences sociales d’étudier non seulement les conflits sous-
jacents et les contradictions qui caractérisent les nombreux problèmes comptables,
mais aussi de mettre à jour les potentiels organisationnels et sociaux de la
comptabilité.
Le droit comptable est une discipline relativement nouvelle, en pleine évolution, qui
cependant rassemble des éléments anciens, nés des exigences de rendre compte
et de garder trace des transactions, et ce, dès les premiers échanges. Puis, en
raison du développement industriel et de la nécessité du crédit, il a fallu élaborer et
rassembler un corps de techniques comptables. Mais, à mesure qu’une technique
progresse, elle appelle, pour ordonner sa fonction sociale, des règles juridiques.
C’est ainsi que s’est formé le droit comptable, en tant que discipline à part entière.
27
Lassègue (1996, p. 16).
28
Voir Richard (2005).
29
Proudhon (1846, 159).
30
Les chercheurs à l’origine de ce renouveau d’intérêt sont parfois étrangers au champ de la
comptabilité (Argyris, Hofstede, Callon, Fligstein ou encore Granovetter).
VSE : VIE & SCIENCES DE L’ENTREPRISE 83
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Le droit comptable est la branche du droit privé qui régit les comptables et la
comptabilité. A cet égard, « le rattachement au droit privé, entendu comme
l’ensemble des lois gouvernant les rapports entre les citoyens est indiscutable »
(Lauzainghein et al., 2004). De fait, en réglant les missions comme les
responsabilités des professionnels de la comptabilité, en posant les conditions de
la valeur probatoire des comptes, comme de leur diffusion au bénéfice des
associés, des tiers ou des salariés, le droit comptable participe, sans conteste, du
droit privé. Mais ce serait une erreur de croire au caractère exclusif de son
rattachement. A l’intérieur du droit comptable, il y a de nombreuses plages de droit
public. C’est le cas, par exemple, des dispositions régissant l’Ordre des Experts
Comptables ou la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes, du droit
pénal comptable, ainsi que des relations qu’entretiennent le droit fiscal et le droit
comptable. Néanmoins, la tonalité générale est privatiste, et la plupart des règles
du droit comptable sont issues du droit civil ou du droit commercial, de sorte que
certains auteurs en font l’un des rameaux du droit des entreprises.
et mis en œuvre par des professionnels dans le plus strict respect des
textes. » (Burlaud, 2012, p. 219).
2. DE LA POLITIQUE EN COMPTABILITE ET DE LA
COMPTABILITE EN POLITIQUE
« Non seulement les chiffres gouvernent le monde mais encore
montrent-ils comment il est gouverné. »
Goethe.
Notre postulat de départ est que, dans notre société, l’équilibre entre le droit et
l’économie se déplace au profit de cette dernière. Nous observerons ainsi
comment la comptabilité, que l’on a pu définir comme l’algèbre du droit, se
transforme peu à peu pour devenir une algèbre de l’économie.
31
Légitimer l’action des dirigeants de l’entreprise et le bien-fondé du système du marché, en fournissant
des critères d’évaluation de leur réussite et en les protégeant de la contestation. La possibilité de
modifier les indicateurs qui ne rempliraient plus leur fonction est toujours offerte (référence à la gestion
du résultat).
32
La comptabilité est influencée par le social autant qu’elle l’influence en retour (Hopwood, 1983). Par
conséquent, le contexte organisationnel n’est donc pas le seul contexte pertinent pour comprendre et
analyser la comptabilité.
33
Richard (2010, p. 3).
34
Qui calculent le résultat des propriétaires privés.
35
Qui montrent le résultat de la bureaucratie étatique.
36
Qui montrent le résultat du collectif de l’entreprise sous la forme d’une valeur ajoutée.
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Depuis une trentaine d’années, des courants de plus en plus forts exigent une
harmonisation internationale des conventions et des systèmes comptables, mais
en quelques années, on est passé de cette exigence à celle d’une véritable
normalisation internationale37.
La normalisation comptable consiste à édicter des méthodes, des conventions38,
des règles et des principes communs qui sont censés s’imposer à toutes les
entités économiques. Non seulement elle doit offrir une certaine rationalité
apportant des gages de sérieux et de rigueur aux évaluations, mais elle doit fournir
aussi aux auditeurs légaux (commissaires aux comptes) les bases à partir
desquelles ils pourront fonder leur jugement sur la qualité de l’information
comptable délivrée aux tiers.
Autant dire que la normalisation est le pilier de tout le système comptable, en ce
sens qu’elle codifie le processus de production comptable, les mécanismes de
contrôle et de vérification, ainsi que les références sur lesquelles s’appuieront
ensuite les utilisateurs de l’information pour prendre leurs décisions.
37
Les investisseurs internationaux voulant comparer avec un maximum de fiabilité les chiffres
comptables publiés par les entreprises, quel que soit leur pays d’origine ou d’exercice de leurs activités.
38
À propos de cette notion, voir Gomez et Jones (2000).
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Par ailleurs, la régulation comptable repose sur le socle bicéphale d’une légitimité
tant technique que politique. En mettant l’accent sur une analyse des institutions,
des acteurs privés et publics en présence, et de leur interrelation, nous
examinerons cette question sous l’angle de l’articulation de l’expertise et du
politique, telle qu’elle se manifeste au sein des instances de normalisation
nationales et internationales (2.1.1). Ensuite, nous soulignerons l’importance de la
recherche comptable dans « l’alimentation » du processus de normalisation (2.1.2).
La recherche comptable, en tant que recherche publique, est perçue comme une
boîte à outils pouvant favoriser la prise en compte de l’intérêt général et un
gisement en mesure de faire de l’information comptable et financière un bien
commun39.
39
Colasse (2005) a utilisé le terme de « bien collectif » défini comme « un bien que tout un chacun peut
se procurer et qui peut être « consommé » simultanément par plusieurs utilisateurs ; en raison de ces
caractéristiques, la production et l’échange d’un tel bien échappent aux lois du marché et doivent être
par conséquent régulés ». Colasse (2005), fait aussi référence à la définition de Lévêque (2004, p. 27),
pour qui « un bien est collectif quand il possède la double propriété de non-excluabilité et de non-
rivalité. ».
Burlaud (2012, p. 227) considère qu’il y a bien « rivalité entre les catégories d’utilisateurs qui ont des
besoins différents, mais officiellement il n’y a pas d’exclusion possible puisque l’information est
publique ».
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Tout en donnant l’illusion41 que les diverses parties prenantes peuvent participer à
l’élaboration des normes, dans les faits, le due process réserve cette élaboration
aux parties42 qui disposent d’importantes ressources financières et intellectuelles
requises pour une participation efficace. En ce sens, cette procédure n’est pas
démocratique. Elle est certes transparente, mais elle ne garantit pas une
participation équilibrée de toutes les parties prenantes43 (Le Manh-Bena, 2009).
Pour Burlaud et Colasse (2010, p. 160), le due process est « la voie formelle et
officielle du lobbying qui accompagne l’élaboration des normes comptables », or
par ailleurs, « le lobbying emprunte également d’autres voies, moins visibles que
celle-ci ».
Au demeurant, ouvrir le débat sur les normes internationales et leur cadre
conceptuel paraît aujourd’hui bien difficile, bien que beaucoup d’observateurs
estiment que la rigidité de l’IASB va conduire à des situations de blocage. Colasse
(2011a, 2011c) reproche à l’IASB de rechercher des solutions techniques à des
problèmes politiques. Il en appelle donc à un retour du politique dans la
normalisation comptable internationale (Burlaud et Colasse, 2010).
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40
Capron et Chiapello (2005).
41
Luthardt et Zimmermann (2009).
42
Colasse et Pochet (2008) mettent en avant le poids certain donné aux experts et notamment aux
grands cabinets d’audit.
43
Raffournier (2011, p. 169) considère que « cette procédure permet, au moins théoriquement, de
placer les groupes de pression à égalité et d’assurer une certaine transparence aux débats ».
44
Villepelet (2009).
45
Voir l’article de Hoarau (2010).
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Selon Bessire (2010, p. 61) « aucune science ne peut se détacher du politique, les
sciences de gestion ne font pas exception à cette règle. En intégrant la dimension
politique dans notre réflexion, nous encastrons délibérément le chercheur dans la
Cité. La recherche n’est pas neutre et prétendre le contraire, c’est déjà adopter en
soi une certaine position politique. ». En effet, la légitimité du normalisateur et le
rôle de l’État en tant que partie prenante dominante font l’objet d’un vif débat46 au
sein de la communauté académique en sciences comptables.
Invités à mener des analyses sur les besoins réels des utilisateurs des comptes,
les chercheurs en comptabilité financière sont conviés47, notamment à travers des
appels48 à contribution de l’ANC49, à être davantage associés aux consultations
lancées par l’IASB et ainsi à participer aux débats européens et internationaux.
46
Voir Pigé (2012).
47
Haas (2012).
48
Site institutionnel de l’Autorité des Normes Comptables : http://www.anc.gouv.fr/
49
Pour un compte rendu des projets de l’ANC, voir Obert (2012).
50
L’expression « théorie comptable » comporte plusieurs sens. On peut en effet distinguer plusieurs
catégories de théories comptables (voir Colasse, 2009 ; Nikitin et Ragaigne, 2012).
51
Le courant « critique » considère que les marchés financiers représentent le pouvoir dominant. La
comptabilité est alors un instrument au service du capitalisme, construit par les dominants pour
défendre leurs intérêts et conforter leur domination. Dans cette perspective, des courants de recherche
alternatifs ont été proposés par Baxter et Chua (2003).
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Cependant, cette théorie dite « des parties prenantes », beaucoup plus complexe,
n’a pas l’opérationnalité normative qu’ont, au moins en apparence, la théorie de
l’agence ou la théorie des marchés efficients (Burlaud et Colasse, 2010).
À défaut d’un outillage théorique, selon Colasse (2011c), les théories « politiques »
de la comptabilité expliquent les raisons qui amènent les comptables à faire de la
politique.
52
Au sens large.
53
Terme utilisé par Power (1999) et Berland et al. (2009).
54
Bacot (2012) et Saulnier (2012).
92 VSE : VIE & SCIENCES DE L’ENTREPRISE
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« Mais l’objectivité n’est pas la neutralité. L’effort de compréhension n’a de sens que s’il
risque d’éclairer une prise de parti. Je prendrai donc parti pour finir. »
A. Camus, 1958.
55
Jubé (2011).
56
Au sens de neutralité, absence d’intention.
57
Dans cette optique, Madelin et Peyrelevade (2012) évoquent une rigueur de gauche et une rigueur de
droite.
58
Les enjeux « politiques » des normes comptables internationales sont généralement examinés dans
le sens étymologique du mot « politique ». Ce dernier « qualifie ce qui concerne le gouvernement des
hommes, la chose politique » Burlaud et Colasse (2010, p. 173).
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59
Le 4 juillet 2003, dans un courrier adressé au président de la Commission européenne, Jacques
Chirac s’alarmait de ce que « certaines normes comptables en cours d’adoption dans l’Union
européenne risquaient de conduire à une financiarisation accrue de notre économie et à des méthodes
de direction privilégiant trop le court terme ». Il s’agissait en l’occurrence déjà des normes relatives aux
instruments financiers, les IAS 39 et 3 (remplacée par l’IFRS 7).
60
15 novembre.
61
2 avril.
62
Burlaud et Colasse (2010) sont, à notre connaissance, les premiers à utiliser cette expression.
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CONCLUSION :
LES SCIENCES COMPTABLES, SCIENCES DE GESTION, SONT DES
SCIENCES POLITIQUES
Avec plus de quatre mille ans d’histoire, la comptabilité est sans doute l’une des
disciplines les plus anciennes. Si elle reste toujours bien vivante, c’est parce
qu’elle s’est adaptée à son environnement et continue d’y jouer un rôle social
indispensable. La comptabilité, si elle veut servir l’intérêt général, doit fournir des
repères sûrs pour les décisions économiques. Elle n’est donc pas une pure
technique, loin s’en faut. Elle véhicule une certaine vision de l’entreprise, ce qui la
place au cœur des rapports économiques et sociaux entre l’entreprise et les
diverses parties prenantes (Chiapello 2005). C’est en cela qu’elle est politique et
c’est pour cette raison que sa normalisation exige une légitimité adéquate qui ne
peut être strictement procédurale ou substantielle.
Par ailleurs, comme nous l’avons développé, le débat concernant les fondements
théoriques et idéologiques de la normalisation comptable internationale est riche
d’enjeux multiples et invite l’enseignant-chercheur à se situer par rapport à eux. En
effet, selon la façon dont on tranche ce débat, on donne des orientations
différentes à l’enseignement et à la recherche comptables (Colasse, 2011c).
63
Colasse (1987, p. 42), « la normalisation comptable, du point de vue de ses institutions et de son
fonctionnement, relève davantage d’une recherche de nature sociologique ou sociopolitique que d’une
recherche purement comptable ».
64
Brasseur (2011, p. 2).
65
Voir Richard (2012).
66
Schoun et al., (2012).
67
A propos de l’éthique et du management.
VSE : VIE & SCIENCES DE L’ENTREPRISE 95
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