Rakovski Interview Berliner Boersen 1924

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La politique russe 

: Une
interview de M. Rakovski
Christian Rakovsky

Source : « Bulletin quotidien de presse étrangère » n° 2591 ; 29 février 1924, p.3. Notes MIA.

Le représentant à Londres des Républiques soviétiques, M. Rakovski, a été interviewé à son


passage à Berlin par un collaborateur du journal russe « Nakanouné », interview que reproduit
le « Berliner Boersen-Courier ».

M . Rakovski confirme la composition de la prochaine conférence russo-anglaise1, il dit qu’il n'


y a pas encore de candidatures officielles pour les postes d’ambassadeur à Londres et à
Moscou. Il est probable que les ambassadeurs seront nommés avant l’ouverture de la
conférence.

Quant au caractère de la reconnaissance du gouvernement russe par l’Angleterre, il déclare :

— La reconnaissance par l’Angleterre est une reconnaissance complète, sans réserve.

« Sans doute, les relations ne sont pas encore tout à fait normales ni amicales. Mais comme ce but est celui
des deux parties, nous ferons tout pour réaliser le programme du deuxième Congrès de l’Union des Soviets,
et le gouvernement des Soviets s’attachera avant tout à consolider les relations avec l’Angleterre.

« Il s’agira d’écarter tous les obstacles s’opposant à une collaboration économique. Un crédit en argent et
en marchandises aux Soviets favoriserait nos relations commerciales.

« On a prétendu que la Russie avait changé d’attitude à l’égard de la Société des nations. Nous n’avons pas
fait de déclarations nouvelles. Nos idées à ce sujet sont connues. A Gênes 2, nous avions déjà fait connaître
notre projet d’une Société des nations. Bien que nous n’appartenions pas à la Société des nations, nous ne
refusons pas de participer aux propositions qui tendent à réduire les armements. Avant comme après,
nous sommes pour la réduction des armements, également sur mer, mais à la condition que, pour chaque
État, elle soit proportionnelle au territoire et à la protection nécessaire de ses frontières. Nous sommes
prêts à réduire énergiquement nos armements, mais seulement à condition que ce principe soit
obligatoire pour tous les États. »

— Quelle influence peut avoir la reconnaissance par l’Angleterre sur les relations de la Russie et de
l’Allemagne ?
1
La Conférence de Londres s’est tenue du 4 avril au 4 août 1924. Après l’arrivée au pouvoir du premier gouvernement
travailliste britannique (janvier 1924) et la reconnaissance de jure de l’URSS par la Grande-Bretagne (février 1924), il
s’agissait de parvenir à un traité anglo-soviétique sur la question des dettes tsaristes et d’un prêt en faveur de l’URSS. Un
traité fut finalement signé le 8 août mais ne fut jamais ratifiée à cause du scandale de la « Lettre de Zinoviev », un faux
document qui précipita la chute du cabinet travailliste de MacDonald en octobre 1924.
2
La « Conférence économique et financière internationale » de Gênes s’est tenue du 10 avril au 19 mai 1922. Cette
conférence était destinée à résoudre les questions de la reconstruction économique et du système commercial et financier
international mis à mal par la Première guerre mondiale. Les puissances impérialistes voulurent en vain imposer à la
Russie soviétique le payement de toutes les dettes tsaristes et le retour des entreprises nationalisées à leurs propriétaires
étrangers.

1
— La reconnaissance et l’importance politique, toujours plus grande, de l’Union des Soviets, ne peuvent
que renforcer nos relations amicales avec l’Allemagne. La presse allemande a peu parlé de notre
reconnaissance par l’Angleterre, et on a pu conclure que l’amitié des peuples allemand et russe était
insuffisamment appréciée. Cette conclusion serait une erreur.

« Le traité de Rapallo3 n’a pas perdu et ne perdra pas son importance, d’autant qu’il n’est pas une cause,
mais un effet de notre amitié pour l’Allemagne. »

Sur la question des rapports entre la Russie et la France après le départ de M. Skobelev et des autorités
soviétiques de Paris pour Londres, M. Rakovski répond :

— Il ne faut pas du tout conclure du fait de ce départ que nous ignorons, d’une façon quelconque,
l’importance énorme qu’il y a à établir des relations normales avec la République française et le peuple
français. La situation résultant de la guerre rend vaines les combinaisons internationales existant avant
la guerre, mais la tâche essentielle de l’Union des Soviets est d’avoir des relations amicales avec tous les
peuples, y compris la France. »

BERLINER BOERSEN-COURIER.
26.2, matin.

3
Traité conclu le 16 avril 1922 entre le gouvernement soviétique et l’Allemagne à Rapallo (Italie), en marge de la
Conférence de Gênes. Le traité prévoyait le rétablissement des rapports diplomatiques entre les deux pays et la
renonciation réciproque aux indemnités de guerre.

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