1re 08 Cours Sortir de La Guerre 2020-07
1re 08 Cours Sortir de La Guerre 2020-07
1re 08 Cours Sortir de La Guerre 2020-07
2020-2021
1
Introduction
Rappel de la méthode de la « réponse à une question problématisée » : il faut commencer par analyser
le sujet en définissant les notions, puis établir des limites chronologiques et spatiales, ce qui permet de
formuler une problématique et de proposer un plan de réponse.
→ http://librecours.eu.free.fr/spip/spip.php?article440 (fiche de méthode)
Le sujet est : « sortir de la guerre : la tentative de construction d’un ordre des nations démocratiques.
Ce chapitre vise à étudier les différentes manières dont les belligérants sont sortis de la guerre et la difficile
construction de la paix. »
Pour répondre à ce sujet, on peut structurer les arguments en deux parties, d’une part l’ordre et d’autre
part le désordre :
Première partie : négocier la paix
Armistice et démobilisations : on pose les armes
Conférence de Paris : on négocie entre gagnants
Pertes et réparations : on fait payer les perdants
Deuxième partie : les conflits de l’après-guerre
En Europe orientale : implosion de l’Empire russe
Au Proche-Orient : dépeçage et
Révoltes et répressions : une période très agitée
2
A. Négocier la paix
1. Armistices et démobilisations
Le premier armistice a lieu dès la fin 1917, à la demande de la Russie. Le 8 novembre 1917 (le
26 octobre selon le calendrier julien)1, lendemain de la révolution à Pétrograd2, le Congrès des Soviets vote
la paix immédiate (c’est son premier décret), puis le gouvernement russe ordonne la démobilisation à partir
du 10.
Le premier armistice est signé à Brest-Litovsk le 4 décembre 1917 (le 21 novembre) entre la Russie et
l’Allemagne, puis le 5 décembre avec tous les empires centraux, entrant en vigueur le 15 décembre pour
deux mois.
Le deuxième armistice est celui de Focșani le 9 décembre 1917 entre la Roumanie et l’Allemagne.
En conséquence des défaites de l’Entente sur le front de l’Est, l’Allemagne obtient la signature de deux
traités de paix à son avantage, l’un le 3 mars 1918 encore à Brest-Litovsk (la Russie y perd la Finlande, les
pays Baltes, la Pologne, la Biélorussie, l’Ukraine et l’Arménie occidentale), l’autre le 7 mai 1918 à Bucarest
(la Roumanie y perd la Dobroudja et la ligne des crêtes des Carpates).
À l’automne 1918, les gouvernements des empires centraux, se reconnaissant vaincus, demandent
chacun leur tour un cessez-le-feu aux Alliés.
Cinq conventions d’armistice furent successivement signées :
• à Salonique (aujourd’hui Thessalonique), le 29 septembre 1918, entre Andreï Liaptchev (ministre des
Finances bulgare) et le général Louis Franchet D’Espèrey (commandant l’armée française d’Orient) ;
• à Moudros (en rade de l’île de Lemnos, près des Dardanelles), le 31 octobre 1918, entre Rauf Orbay
(ministre de la Marine ottoman) et l’amiral Somerset Gough-Calthorpe (commandant de la Mediterranean
Fleet britannique) ;
• à la villa Giusti (à Mandria, au sud-ouest de Padoue), le 3 novembre 1918, entre le général Viktor Weber
von Webenau (de l’Armée austro-hongroise) et le général Pietro Badoglio (de l’Armée italienne) ;
• à Compiègne (en forêt, dans la clairière de Rethondes), le 11 novembre 1918, entre Matthias Erzberger
(secrétaire d’État allemand) et le maréchal Ferdinand Foch (commandant des forces alliées sur le front
Ouest) ;
• à Belgrade, le 13 novembre 1918, entre Béla Linder (ministre de la Guerre hongrois) 3 et le voïvode
Živojin Mišić (chef d’état-major serbe).
Mais un armistice n’est pas encore la paix, ce n’est qu’une trêve : les États belligérants sont toujours
officiellement en guerre, seuls les combats sont suspendus, en attendant un traité de paix.
Les conditions des différents armistices, assez draconiennes, garantissent aux vainqueurs que les
vaincus ne repartent pas au combat.
Selon les clauses de l’armistice du 11 novembre, l’Armée allemande doit abandonner 5 000 canons (soit
le tiers de son artillerie), 2 500 mitrailleuses, 3 000 Minenwerfer (mortiers de tranchée), 1 700 avions de
combat, 5 000 locomotives, 150 000 wagons et 5 000 camions ; la Marine allemande doit livrer dix
cuirassiers (sur ses 19 dreadnoughts), six croiseurs de bataille (tous), huit croiseurs légers, 50 destroyers,
tous les sous-marins.
Les prisonniers alliés doivent être tous libérés, les biens séquestrés restitués, sans contre-partie.
1 La Russie passe du calendrier julien au grégorien le 31 janvier 1918, avec treize jours de différence.
2 Saint-Pétersbourg ayant un nom allemand, elle est renommé Pétrograd en 1914, puis Léningrad en 1924.
3 La Hongrie change de gouvernement le 31 octobre 1918 (la révolution des Asters) avec le ministre-président Mihály Károlyi.
Son armée étant en pleine démobilisation, elle se fait attaquer à partir du 5 novembre par les Serbes, du 8 par les
Tchécoslovaques, du 10 par l’Armée française d’Orient et du 13 par les Roumains. → https://www.loc.gov/law/help/us-
treaties/bevans/m-ust000002-0020.pdf
3
Les troupes allemandes doivent évacuer sous
quinze jours les territoires occupés, y compris à
l’Est (le traité de Brest-Litovsk est abrogé). Puis ils
doivent faire de même pour toute la rive gauche
du Rhin, suivies de près par les troupes alliées qui
se mettent en marche à partir du 17 novembre
1918.
Fin novembre, les Français réoccupent
l’Alsace-Lorraine ; début décembre, 20 divisions
françaises, dix britanniques, huit étasuniennes et
deux belges entrent en Rhénanie ; mi-décembre,
trois têtes de pont sont occupées sur la rive droite
(la britannique à Cologne, celle américaine à
Coblence et celle française à Mayence). Ces
troupes d’occupation sont entretenues aux frais de Défilé dans Strasbourg du 47 RI (de Saint-Malo, 4 armée
e e
Cet armistice est temporaire, pour 36 jours4. Il est renouvelé le 13 décembre 1918, puis le 16 janvier et
enfin le 16 février 1919 à Trêves (avec de nouvelles exigences : livraison de matériels agricoles et la tête de
pont de Kehl)5.
L’article 26 de l’armistice prévoit le maintien du blocus commercial naval allié (mis en place en
novembre 1914 pour les ports des empires centraux, puis en mars 1915 pour la contrebande via les ports
neutres).
Tous les États belligérants démobilisent, les plus rapides étant les vaincus, tout particulièrement la
Russie et l’Autriche-Hongrie, dont les soldats désertent en masse. Les commandes d’armement et
d’équipement auprès des industriels sont rapidement annulées.
La France démobilise plus tardivement, par classe d’âge successives, en commençant le 1 er décembre
1918 par les plus vieux (la classe 1887), tandis que les jeunes bleus (la classe 1917) ne peuvent rentrer chez
eux qu’à partir de septembre 1919 ; les derniers mobilisés (classes 1918 et 1919) restent sous les drapeau,
avec libération au printemps 1920 et 19216.
Chacun des cinq millions de militaires français démobilisés reçoit un fascicule farci de conseils 7, des
tickets de pain, des vêtements civils (le « complet Abrami »8 : un pardessus, un veston, un pantalon et une
casquette), une paire de brodequins et il peut garder son casque.
Presque toutes les unités impropres à la guerre de mouvement (notamment l’artillerie de tranchée et
l’artillerie lourde sur voie ferrée) sont dissoutes, puis c’est au tour des unités composées de réservistes et
de territoriaux. L’Armée voit donc ses effectifs fondre, regroupant progressivement les militaires
professionnels et les nouveaux conscrits dans les unités d’active. Les entrepôts sont pleins de munitions
(notamment dix millions de coups de 75 mm) et d’armes (parfois stockées à l’air libre).
Seules sont maintenues opérationnelles les unités déployées en Rhénanie (l’armée du Rhin), dans les
Balkans (l’armée française d’Orient) et dans les colonies.
900 000 Français sont encore sous les drapeaux le 1er juillet 1920 (soit plus qu’avant-guerre).
4 → https://fr.wikisource.org/wiki/Convention_d%E2%80%99armistice_du_11_novembre_1918
5 → https://mjp.univ-perp.fr/traites/1918armistice.htm
6 → https://combattant14-18.pagesperso-orange.fr/Pasapas/E302LoisSynthese.html
7 Guide-manuel du démobilisé, mettant au courant de la législation fiscale, Paris, V.-F. Lefebvre, 1919, 80 pages.
Memento du démobilisé, Paris, H. Charles-Lavauzelle, 1919, 112 pages.
8 Léon Abrami est en 1919 le sous-secrétaire d’État de l’Administration de la guerre. Un « sous-secrétariat d’État pour la
Démobilisation » est créé en décembre, confié à Louis Deschamps.
4
2. Conférence de Paris
Les conflits se terminent habituellement par des traités internationaux, les vainqueurs imposants leurs
conditions aux vaincus. Dans le cas de la Grande Guerre, le nombre important de belligérants nécessite
qu’ils s’accordent d’abord entre eux.
La « conférence de la paix » est organisée à Paris, au Quai d’Orsay (dans le salon de l’Horloge de
l’hôtel du ministère des Affaires étrangères, au n° 37 du quai) ; 68 hommes y siègent, représentant
30 États10. L’anglais est utilisée comme langue de travail.
Elle est présidée par l’hôte français, en la personne du président Raymond Poincaré (pour la session
inaugurale) puis du président du Conseil Georges Clemenceau, avec à sa droite la délégation étasunienne
dirigée par le président Woodrow Wilson11 et à gauche celle britannique menée par le premier ministre
David Lloyd George. Siègent avec eux les représentants de l’Italie, de la Belgique, du Brésil, de Cuba, de
la Grèce, d’Haïti, du Pérou, du Portugal, de la Serbie, de la Tchécoslovaquie, de l’Uruguay, du Canada, de
l’Australie, de l’Afrique du Sud, de la Nouvelle-Zélande, d’Inde, du Japon, de la Bolivie, de la Chine, de
l’Équateur, du Guatemala, du Hedjaz (en Arabie), du Liberia, de Panama, de la Pologne et de la Roumanie.
La séance d’ouverture de la conférence se déroule le 18 janvier 1919, date choisie par les Français pour
coïncider avec l’anniversaire de la proclamation du Reich allemand en 1871 à Versailles (elle-même pour
fêter la proclamation du royaume de Prusse en 1701).
Pour fonctionner avec un peu d’efficacité, un
Conseil supérieur des Alliés est formé avec dix
membres, composé du chef d’État ou de
gouvernement de cinq États (États-Unis, France,
Italie, Japon et Royaume-Uni) ainsi que son ministre
des Affaires étrangères. À partir de la mi-mars 1919,
ce conseil est remplacé par des réunions entre
quatre hommes : Woodrow Wilson, David Lloyd
George, Georges Clemenceau et Vittorio Emanuele
Orlando (le premier ministre italien).
9 Henri Mordacq, Le Ministère Clemenceau : journal d’un témoin, Paris, Plon, 1930, tome 3.
10 → https://www.ctevans.net/Versailles/Documents/Whos%20Who.pdf
11 Wilson est le premier président des États-Unis en exercice à traverser l’Atlantique. Il a fait annoncer sa venue dès le
18 novembre, embarque le 4 décembre 1918 et arrive le 13 à Brest à bord du paquebot George-Washington, escorté par dix
cuirassés. Il est accueilli triomphalement à Paris le 14, puis visite Londres et Rome. Pendant la durée de la conférence, le
président est logé dans l’hôtel du prince Murat (28 rue de Monceau, détruit depuis).
5
La délégation des États-Unis a la particularité de ne rien exiger pour eux, comme affirmé dans le
discours des Quatorze points12 de Wilson du 8 janvier 1918, accepté avec des réserves par les alliés comme
« programme de la paix du monde ». Wilson porte le principe de l’autodétermination des peuples13 et
d’une Société des nations (SDN). Il est vu comme un arbitre.
Pour les Français, les buts sont la récupération de l’Alsace-Lorraine, le versement de lourdes
indemnités et une sécurité garantie vis-à-vis de l’Allemagne (occupation ou annexion de la Rhénanie et
démilitarisation de l’Allemagne).
Pour les Britanniques, il faut récupérer la flotte allemande (alors prisonnière à Scapa Flow), partager
les colonies allemandes et maintenir l’équilibre entre les puissances européennes.
Pour les Italiens, il faut appliquer l’accord de Londres qu’ils ont signé avec les Franco-Britanniques le
26 avril 1915 leur promettant toute la côte dalmate.
Pour les Japonais, être reconnus comme des égaux des Européens et annexer les colonies allemandes
du Pacifique.
Les vainqueurs ayant des exigences contradictoires entre eux, ils doivent négocier des concessions en
fonction de leurs rapports de force. La France utilise les colonies comme monnaie d’échange, accepte le
principe de la SDN, obtient que l’Allemagne soit désarmée, qu’il n’y ai pas de plébiscite pour son annexion
de l’Alsace-Lorraine (les « provinces recouvrées »), mais n’arrache le 7 avril 1919 qu’une occupation
temporaire de la Rhénanie (en échange d’une alliance militaire avec le Royaume-Uni et les États-Unis). Les
indemnités de réparations restent à négocier.
Le Japon reçoit les colonies allemandes du Pacifique au nord de l’Équateur, y compris le Shandong (en
Chine) ; sa proposition de mettre l’égalité raciale comme principe de la SDN essuie un refus le 11 avril.
L’Italie obtient le Sud-Tyrol, l’Istrie, Trieste et l’Albanie, mais les autres lui refusent le 14 avril la
Dalmatie, remise aux Serbo-Croates : Orlando claque donc la porte de la conférence le 23 avril.
Le Royaume-Uni et ses Dominions gagnent la majorité des colonies allemandes, la flotte allemande se
saborde le 21 juin (ce qui évite le partage des cuirassés avec les alliés) et ils empêchent la mise sous
protectorat de la Rhénanie et l’annexion de la Sarre14.
Les négociations furent marquées par d’autres problèmes : le 19 février 1919, Clemenceau est blessé
par trois balles tirées par l’anarchiste Émile Cottin ; de la mi-février au 13 mars Wilson fait un aller-retour
aux États-Unis ; du 3 au 5 avril, le président est malade de la grippe espagnole.
Le premier des cinq traités de paix multilatéraux imposés à chacun des vaincus concerne l’Allemagne.
Le 28 avril 1919, la délégation allemande est installée à Versailles (hôtel des Réservoirs) sans participer à la
conférence. Le 7 mai (anniversaire du Lusitania), elle reçoit les termes du traité dans le hall du Grand
Trianon ; elle essaye de négocier, mais son gouvernement est forcé d’accepter le 23 juin sous la menace
d’une invasion par les troupes alliées.
Le traité de Versailles est signé le 28 juin 1919, jour anniversaire de l’assassinat de Sarajevo, dans la
galerie des Glaces du château de Versailles (où fut proclamé l’Empire allemand en 1871). Le traité
commence par la charte de la Société des nations. L’Allemagne perd un huitième de son territoire 15 ainsi
que toutes ses colonies ; elle doit payer des réparations, elle perd tous ses brevets (tel que l’aspirine) ; son
armée est limitée à 100 000 hommes, la conscription, l’artillerie lourde, les chars et l’aéronautique militaire
lui sont interdits, la rive gauche démilitarisée.
Les puissances alliées et associées mettent en accusation publique Guillaume II de Hohenzollern, ex-empereur
d’Allemagne, pour offense suprême contre la morale internationale et l’autorité sacrée des traités.
Un tribunal spécial sera constitué pour juger l’accusé en lui assurant les garanties essentielles du droit de
défense. Il sera composé de cinq juges, nommés par chacune des cinq puissances suivantes, savoir : les États-Unis
d’Amérique, la Grande-Bretagne, la France, l’Italie et le Japon.
Article 227 du traité de Versailles. → https://fr.wikisource.org/wiki/Traité_de_Versailles_1919
12 → https://wwi.lib.byu.edu/index.php/President_Wilson%27s_Fourteen_Points
13 Mais Wilson refuse de prendre en compte les demandes des délégations algériennes, égyptiennes, panafricaines, indiennes,
vietnamiennes, chinoises ou coréennes. Le Congrès panafricain se tient du 19 au 21 février 1919 au Grand Hôtel de Paris (à
côté de l’Opéra), réunissant 27 délégations venant d’Afrique, des Antilles et des États-Unis, où la ségrégation bat son plein.
14 Lloyd George dit, concernant le résultats des négociations : Not badly, considering I was between Jesus Christ and Napoleon.
15 Cf. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:German_losses_after_WWI.svg
6
Le traité de Versailles est ratifié par l’Allemagne dès le
7 juillet 1919, par la France le 13 octobre (Clemenceau dut
se justifier de ses concessions devant la Chambre), par le
Royaume-Uni le 15 octobre, par l’Italie le 18 octobre, par
le Japon le 30 octobre, mais le Sénat des États-Unis refusa
les 19 novembre 1919 et 10 mars 1920 (ainsi que le projet
d’alliance militaire avec la France et le Royaume-Uni).
Un autre traité de Versailles est signé le même jour
avec la Pologne sur la protection de ses minorités 16.
L’Assemblée générale de la SDN est inaugurée à
Londres en janvier 1920, puis déménage à Genève.
Concernant la Bulgarie, le traité de Neuilly est signé le 27 novembre 1919 dans la mairie de Neuilly-
sur-Seine, les États voisins grignotant le territoire bulgare : la Thrace occidentale devient grecque, la
Dobroudja roumaine, quatre districts deviennent serbes (ainsi que toute la Macédoine prise en 1915).
Concernant la Hongrie, le traité de Trianon est signé le 4 juin 1920 au Grand Trianon, soldant les
territoires hongrois de l’ancien empire : la Slovaquie et la Ruthénie à la Tchécoslovaquie, la Croatie et la
Bosnie au royaume des Serbes, Croates et Slovènes, la Transylvanie et le Banat à la Roumanie.
Ce texte est complété par le traité de Paris le 9 décembre 1919 avec la Roumanie sur ses minorités 18.
Concernant l’État ottoman, le traité de Sèvres est signé le 10 août 1920, faisant perdre au calife les
provinces arabes (Jordanie, Palestine, Liban, Syrie et Irak) qui passent sous mandat français ou britannique,
l’Arménie et le Kurdistan deviennent indépendants, Smyrne (aujourd’hui Izmir) et l’Ionie sont offertes aux
Grecs, Antalya aux Italiens et la Cilicie aux Français, tandis que les rives des Dardanelles et du Bosphore
sont démilitarisées. Le même jour, un traité avec la Grèce protège les minorités 19. Le traité de Sèvres, pas
ratifié par la république de Turquie, est remplacé par le traité de Lausanne du 24 juillet 1923.
Aucun de ces traités ayant été ratifié par le Sénat des États-Unis, le nouveau gouvernement (Warren G.
Harding remplaçant Wilson à partir du 4 mars 1921) déclare unilatéralement la paix 20 le 2 juillet 1921, puis
signe des accords bilatéraux (Establishment of friendly relations) : traités de Vienne le 24 août 1921, de
Berlin du 25 août et de Budapest le 29 août21.
Pour la France, la cessation officielle des hostilités a lieu le 24 octobre 1919, date utilisée comme limite
pour les pensions22.
16 → https://mjp.univ-perp.fr/traites/1919pologne.htm
17 → https://mjp.univ-perp.fr/traites/1919tcheco.htm ; https://mjp.univ-perp.fr/traites/1919yougo.htm
18 → https://mjp.univ-perp.fr/traites/1919roumanie.htm
19 → https://mjp.univ-perp.fr/traites/1923lausanne3.htm
20 La Knox–Porter Resolution : JOINT RESOLUTION Terminating the state of war between the Imperial German Government and
the United States of America and between the Imperial and Royal Austro-Hungarian Government and the United States of
America. July 2, 1921. → https://govtrackus.s3.amazonaws.com/legislink/pdf/stat/42/STATUTE-42-Pg105a.pdf
21 Le traité de Vienne est ratifié le 8 novembre 1921 → https://books.google.fr/books?id=yLqOAAAAMAAJ&pg=PA215 ; le
traité de Berlin le 11 novembre 1921 → https://books.google.fr/books?id=i0Q6AQAAIAAJ&pg=PA145 ; le traité de Budapest
du 29 août 1921 est ratifié le 17 décembre 1921. → https://books.google.fr/books?id=i0Q6AQAAIAAJ&pg=PA982
22 « Loi du 23 octobre 1919 sur la cessation des hostilités : date fixée à celle de la promulgation de la présente loi au Journal
officiel », publiée au JORF du 24 octobre 1919 page 11790.
7
3. Pertes et réparations
La fin des opérations militaires permet de faire le bilan des pertes humaines et matérielles. Pour
l’ensemble des belligérants, il y aurait un total de 20 millions de morts (sans compter les civils africains
et asiatiques) ; rien que les militaires eurent 9,7 millions de morts et 21 millions de blessés. Les pays les
plus touchés sont l’État ottoman (4,2 millions de civils morts, par famine, épidémies et massacres) et
l’Empire russe (1,8 million de militaires tués et une surmortalité des civils estimée à 1,5 million,
notamment en Pologne).
Le bilan humain est alourdi par la pandémie de « grippe espagnole », qui touche les camps de
l’Armée des États-Unis23 au printemps 1918, puis arrive en Europe lors de l’été. La vague de mortalité est
en septembre-octobre pour l’Amérique du Nord et en octobre-novembre pour l’Europe occidentale ; une
seconde vague frappe l’Europe de février à mai 1919. Pendant l’automne 1918, le rapport entre les soldats
morts de la grippe et ceux au combat est de un pour dix parmi les soldats britanniques, un pour six parmi
les soldats français, un pour un pour les soldats américains ; les Allemands ont arrêté de compter pendant
l’été 1918, avec une estimation de 1,8 million de militaires infectés 24. L’Afrique, l’Asie et l’Océanie furent
rapidement touchée, les derniers foyers disparaissant en 1920. Les estimations vont de 17 à 50 millions de
morts, dont de 12 à 17 rien que pour l’Inde.
Statue de l’empereur Guillaume, placé en 1911 au centre Monument aux morts, placé en 1936 au centre de la
de la Kaiserplatz (place impériale) à Straßburg, entre le place de la République à Strasbourg, entre le palais du
Kaiserpalast et la Kaiser-Wilhelms-Universität. Rhin et le palais universitaire.
→ https://commons.wikimedia.org/ → https://commons.wikimedia.org/
Les cinq traités prévoient que les vaincus aient à payer des indemnités de réparation, sans en fixer le
montant, confiant la tâche à une commission (article 233 du traité de Versailles). En attendant, est exigé en
acompte pour les années 1919 et 1920 le versement de 20 milliards de marks-or30 (article 235) en or et en
marchandises : des dizaines de milliers de têtes de bétail, ainsi que des millions de tonnes de charbon et de
produits chimiques.
La Commission interalliée des réparations se met au travail, estimant le coût total des pertes
humaines et matériels par bombardements, combats, mauvais traitements, travail forcé, emprisonnements,
saisis, sur les militaires comme sur les civils, y compris les pensions, causées par les empires centraux
envers le Luxembourg, la Belgique, la France, le Royaume-Uni, le Japon, l’Italie et les États-Unis.
Le 5 mai 1921, la Commission fixe les indemnités : 132 milliards de marks-or. La majorité doit être payé
par l’Allemagne, le seul pays estimé solvable parmi les vaincus.
Les vainqueurs exigent le versement des réparations, car en plus de leurs pertes, ils sont très
lourdement endettés, notamment le Royaume-Uni (4,6 milliards de dollars) et la France (4 milliards) auprès
des États-Unis. Si ces derniers refusent la réduction des dettes interalliées, ils acceptent leur étalement sur
62 ans avec un faible intérêt à 3 % (World War Foreign Debts Commission Act, le 9 février 1922).
Tous les navires marchands allemands sont livrés, une importante partie des exportations allemandes
est considérée comme versement en nature, les droits de douane sont ponctionnés et l’État allemand
s’endetta encore davantage (notamment pour indemniser les industriels pour la perte de leurs usines en
Alsace-Moselle).
30 Le mark, la monnaie allemande, a une valeur fixe exprimée en or (un Goldmark = 0,35842 g) de 1873 à 1914, avec des taux de
change stables sur la période (un franc = 0,81 M ; un dollar = 4,19 M ; une livre sterling = 20,43 M). La convertibilité en or
étant suspendue en août 1914, l’émission monétaire entraîne une inflation et des taux de change flottants ; les pièces en or et
argent ne circulent plus (retirées par la Reichsbank ou thésaurisées par la population), remplacées par des billets
(Papiermark). Le stock d’or allemand étant vide en 1919 et l’État surendetté, le mark connaît une hyperinflation à partir du
début de 1922, atteignant en novembre 1923 le cours de 4,2 milliards de marks pour un dollar. Le 30 août 1924, le mark est
remplacé par le reichsmark (RM), au taux de mille milliards de mark pour un reichsmark.
9
Dans un contexte assez révolutionnaire et
d’hyperinflation, l’Allemagne fait un défaut de
paiement, arrêtant de livrer charbon et bois au titre de
réparations en décembre 1922.
En réaction, les troupes françaises et belges
occupent la Ruhr du 11 janvier 1923 au 25 août 1925,
réquisitionnant la production des mines de charbon et
des usines.
Tout est remis en cause par la crise économique déclenchée à New York en octobre 1929, frappant
l’Europe à partir de 1931.
Le 20 juin 1931, le président des États-Unis Herbert C. Hoover propose la suspension pour un an des
remboursements des dettes et réparations intergouvernementales ; en juillet, le chancelier allemand
Heinrich Brüning demande l’annulation des versements. En juin 1932, la conférence de Lausanne
entérine la fin des réparations, avec un ultime paiement de trois milliards de marks.
La question des réparations allemandes et des dettes interalliées est de nouveau à l’ordre du jour après
la Seconde Guerre mondiale.
Si aucun montant n’est exigé par les principaux vainqueurs vis-à-vis de l’Allemagne, le pillage est
systématique dans les zones d’occupation soviétique et française (allant jusqu’au démontage des usines et
des rails) et les prisonniers allemands sont utilisés comme main d’œuvre gratuite (notamment pour le
déminage des plages).
Le traité de paix de Paris du 10 février 1947 prévoit tout de même le versement de réparations de
l’Italie envers la Yougoslavie, la Grèce et l’Union soviétique ; la Finlande, la Hongrie et la Roumanie durent
faire de même avec l’Union soviétique ; la Bulgarie envers la Yougoslavie et la Grèce.
L’attitude des États-Unis fut très différente, après les premiers mois de prises de guerre, notamment
technologiques (operation Paperclip) : il est plutôt question d’aider l’Allemagne à se nourrir et se
reconstruire, avec d’abord les prêts du Government Aid and Relief in Occupied Areas (GARIOA) de 1946 à
1950, puis ceux de l’European Recovery Program (l’ERP, surnommé le plan Marshall) de 1948 à 1951.
Quant aux remboursements allemands (16 milliards de marks de réparation impayés datant de 1921,
ainsi que l’emprunt Dawes, le GARIOA et l’ERP), l’accord du 27 février 1953 (London Agreement on
German External Debts) repousse le remboursement à la réunification. Dans la pratique, les
remboursements ont été échelonnés jusqu’en octobre 2010.
Pour les victimes du génocides des juifs, l’accord de Luxembourg entre Israël et la RFA le 10 septembre
1952 a porté sur le versement de trois milliards de deutschmark sur 40 ans (soit de 1953 à 1993).
31 John Maynard Keynes, The economic consequences of the peace, Londres, Macmilan and c°, 1919.
10
B. Les conflits de l’après-guerre
L’heure est au retour à la paix pour les États d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord, par la
démobilisation de la majorité des forces belligérants, la démilitarisation de l’Allemagne et la limitation de
l’armement navale (conférence navale de Washington du 12 novembre 1921 au 6 février 1922).
Mais si les combats sur les principaux fronts de la Première Guerre mondiale s’éteignent, des conflits
naissent aussitôt ailleurs, entre les nouveaux acteurs qui viennent d’apparaître sur les débris des anciens
empires multinationaux que sont l’Empire russe, l’État ottoman et l’Empire austro-hongrois.
La guerre s’éternise donc après les armistices : plus de 31 000 militaires français sont encore tués,
blessés ou gravement malades dans le seul mois de décembre 191832.
Ivan Aleksievitch Vladimirov, Gardes rouges pillant un Ivan Aleksievitch Vladimirov, Réquisition de farine dans
caviste, 1919, aquarelle. un village près de Pskov, 1922, aquarelle.
→ https://digitalcollections.hoover.org/objects/59126 → https://digitalcollections.hoover.org/objects/59129
La guerre civile russe oppose principalement les « Rouges » (les Russes révolutionnaires) aux
« Blancs » (les Russes conservateurs), mais pas seulement. Les populations civiles furent victimes de
violences extrêmes, le « communisme de guerre » voisinant avec la « terreur blanche ».
Pour se défendre, la République soviétique de Russie ne dispose plus de l’Armée russe, qui s’est
dissoute par désertions massives. Elle est remplacée à partir de janvier 1918 par l’Armée rouge des
ouvriers et paysans, qui affronte jusqu’en juin 1923 les armées blanches (dirigées par d’anciens officiers
tsaristes concurrents : l’amiral Alexandre Vassilievitch Koltchak, les généraux Lavr Gueorguievitch
Kornilov, Anton Ivanovitch Dénikine, Piotr Nikolaïevitch Wrangel, etc.), les armées vertes (composées de
paysans révoltés) et les anarchistes (notamment l’Armée noire, la Makhnovchtchina).
32 Michel Goya, Les Vainqueurs : comment la France a gagné la Grande Guerre, Paris, Tallandier, 2018, p. 276.
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En parallèle, la guerre civile concerne aussi les autres États nés de la défaite russe de 1917, d’où :
• la guerre civile finlandaise (du 27 janvier au 15 mai 1918), avec la victoire des Finlandais blancs sur les
rouges ;
• la guerre d’indépendance de l’Estonie (du 28 novembre 1918 au 2 février 1920), les nationalistes estoniens
gagnant avec l’aide d’une escadre britannique et de volontaires finlandais, contre d’une part l’Armée rouge
et d’autre part des corps francs allemands et la Landwehr germano-balte ;
• la guerre d’indépendance de la Lettonie (du 5 décembre 1918 au 11 août 1920), les nationalistes lettons
repoussant d’une part les tirailleurs lettons de l’Armée rouge, d’autre part les Germano-Baltes et les corps
francs allemands ;
• les guerres d’indépendance lituaniennes, les nationalistes lituaniens, épaulés par des corps francs
allemands, chassant d’abord l’Armée rouge (de décembre 1918 à août 1919), puis les Russes blancs (de juin
à décembre 1919), et enfin les Polonais (guerre polono-lituanienne, d’août au 29 novembre 1920) ;
• la guerre ukraino-soviétique (du 8 novembre 1917 au 17 novembre 1921), l’Armée rouge finissant par
écraser les nationalistes ukrainiens, qui se double de la guerre polono-ukrainienne (du 1 er novembre 1918
au 18 juillet 1919) en Galice ;
• les guerres entre Caucasiens, essentiellement de la guérilla entre miliciens, avec la guerre arméno-azéri
(du 30 mars 1918 au 28 novembre 1920) et la guerre arméno-géorgienne (du 7 au 31 décembre 1918).
Les deux camps bénéficient des interventions étrangères, les Rouges étant un peu aidés par les
troupes allemandes pendant l’été et l’automne 1918, les Blancs beaucoup plus par les troupes alliées
(tchèques, britanniques, grecques, japonaises, françaises, étasuniennes, canadiennes, etc.), qui débarquent
en 1919 à Mourmansk, Arkhangelsk, Tallinn, Odessa, Kherson, Sébastopol, Novorossiïsk, Batoumi, Bakou
et Vladivostok, fournissant un soutien naval.
En conséquence des défaites des Blancs, les ports
russes sont évacués par les troupes alliés en 1920, les
dizaines de milliers de réfugiés russes blancs arrivèrent
à Constantinople, Marseille, Paris et Berlin.
Les Franco-Britanniques fournirent alors leur
soutien aux États européens voisins, notamment la
Pologne et la Roumanie, utilisées comme « cordon
sanitaire » face à la « peste rouge ».
Pour l’Armée rouge, il s’agit non seulement de
reconquérir les territoires perdus de l’ancien Empire
russe, mais aussi d’exporter la révolution. D’où la Ivan Aleksievitch Vladimirov, Бегство буржуазии из
guerre soviéto-polonaise (du 14 février 1919 au Новороссийска в 1920 году [La fuite de la bourgeoisie de
18 octobre 1920), où les troupes polonaises du général Novorossiïsk en 1920], 1926, huile sur toile exposée au
Józef Piłsudski, affronte l’Armée rouge commandée par musée national d’histoire contemporaine à Moscou.
les généraux Mikhaïl Nikolaïevitch Toukhatchevski et → https://commons.wikimedia.org/
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Semion Mikhaïlovitch Boudienny .
Les victoires polonaises ont pour conséquence le traité de Riga, signé le 18 mars 1921, la Pologne y
gagnant l’Ouest de la Biélorussie (Ruthénie noire, Podlachie et Polésie) et le Nord-Ouest de l’Ukraine
(Volhynie et Galicie).
33 Piłsudski était aidé par la mission militaire française (400 officiers servant de conseillers, dont le capitaine Charles de
Gaulle), tandis que Boudienny avait comme commissaire politique Iossif Vissarionovitch Djougachvili (Staline).
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2. Éclatement de l’État ottoman
À l’appel de quatre généraux dont Mustafa Kemal (par la circulaire d’Amasya, Amasya Genelgesi,
envoyée le 22 juin 1919), les autorités provinciales turques voulant s’opposer à l’occupation étrangère
comme au gouvernement du calife (resté à Constantinople) envoient des représentants qui se réunissent en
congrès à Sivas (en Cappadoce) du 4 au 11 septembre 1919, s’organisant en un seul mouvement turc,
l’« Association de défense des droits de l’Anatolie et de la Roumélie ».
La guerre civile éclate à partir d’avril 1920 entre l’Armée califale ( قوا انضباطيّه: Kuva-yi Inzibatiye) et
l’Armée nationale ( قواي ملّيه: Kuva-yi Milliye), qui obéit à Mustafa Kemal, installé à Angora (Ankara). La
Chambre des députés ottomane étant fermée en mars 1920 par les occupants franco-britanniques, Kemal
fait procéder à des élections, permettant d’inaugurer la Grande Assemblée nationale de Turquie le 23 avril
1920 à Ankara, présidée par Kemal.
Le traité de Sèvres, signé par les représentants du calife, fait passer ce dernier pour un traître : son
armée se délite rapidement par désertion, disparaissant en septembre 1920.
La guerre s’engage ensuite contre les forces occupant chacune un bout de l’Anatolie : c’est pour les
Turcs la « guerre de libération » (Kurtuluş Savaşı).
En Anatolie du Sud-Est (Cilicie et Kurdistan), les troupes françaises et leurs alliés arméniens occupent
les villes depuis décembre 1918. De janvier à avril 1920, des insurrections turques les chassent d’Antep
(renommée Gaziantep, « Antep la victorieuse »), Maras (Kahramanmaraş, « Maras l’héroïque ») et Édesse
(Şanlıurfa, « Urfa la glorieuse »). Du point de vue français, cette guerre franco-turque s’appelle la
« campagne de Cilicie », qui se termine par leur retraite, la paix étant signée à Londres le 9 mars 1921, puis
à Ankara le 20 octobre 1921. Mersin, Adana, Ceyhan et Tarsus sont évacués en janvier 1922.
En Anatolie occidentale (les anciennes Ionie, Carie et Lydie), les troupes grecques occupent Smyrne
(Izmir) depuis le 15 mai 1919. Leur offensive vers l’Anatolie centrale est repoussée à 80 km d’Ankara lors
de la bataille de la Sakarya en septembre 1921, leur retraite se terminant le 9 septembre 1922 par la prise de
Smyrne (et l’incendie des quartiers grecs et arméniens). Cette guerre gréco-turque se solde par
l’armistice de Moudanya le 11 octobre 1922.
En Anatolie orientale (l’Arménie occidentale), la guerre arméno-turque à partir de septembre 1920
permet à la Turquie de conquérir la ville de Kars, se terminant par le traité d’Alexandropol (Gyumri) le
2 décembre 1920. L’Arménie étant devenue soviétique, le traité de Kars le 13 octobre 1921 fixe la frontière
entre la Turquie et l’URSS. Mieux, l’URSS fournit à la Turquie une aide sous formes d’or et d’armes.
34 → https://commons.wikimedia.org/wiki/File:SevresOttoman1927.JPG
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Mustafa Kemal, commandant en chef de l’Armée turque, reçoit de l’Assemblée en septembre 1921 le
rang de maréchal et le titre de Gazi (le « triomphateur », titre qui a été porté par le sultan Osman, le
fondateur de la dynastie ottomane) pour ses victoires.
La paix avec les Alliés, notamment les Grecs, est négociée à Lausanne à partir du 21 novembre 1922.
Les représentants grecs et turcs signent une convention d’échange de populations le 30 janvier 1923,
1,5 million d’orthodoxes grecs d’Istanbul, d’Ionie, de Cappadoce et du Pont étant échangés contre
500 000 musulmans d’Épire, de Macédoine et de Thrace. Cette politique de nettoyage ethnique complète les
massacres et déportations des chrétiens arméniens et assyro-chaldéens de Cilicie.
Le traité de Lausanne est finalement signé le 24 juillet 1923, annulant le traité de Sèvres et fixant les
frontières turques. Constantinople est évacuée par les dernières troupes britanniques le 23 septembre 1923,
remplacées par celles turques le 6 octobre.
En Hongrie, un autre grand perdant de la Première Guerre mondiale, la défaite est sanctionnée par le
coup d’État socialiste du 31 octobre 1918 (la « révolution des Asters », du nom d’une fleur) qui change le
gouvernement à Budapest, d’où la proclamation de la république le 16 novembre 1918.
Dans d’autres territoires, une partie de la population se révolte pour obtenir son indépendance.
En Irlande, pour les indépendantistes des Irish Volunteers, la Première Guerre mondiale avait été un
contexte favorable pour l’insurrection de Pâques 1916 à Dublin (24 au 30 avril 1916), qui proclama la
République irlandaise, mais fut écrasée par l’Armée britannique.
La sortie du conflit fut suivit de la guerre d’indépendance irlandaise, du 21 janvier 1919 (assassinat
de deux policiers près de Tipperary) jusqu’au 11 juillet 1921, marquée par la guérilla menée par l’IRA (Irish
Republican Army). Finalement, des négociations se terminèrent par la signature du traité de Londres le 6
décembre 1921 : l’Ulster, alors majoritairement protestante, restait britannique, tandis que le reste de l’île
formait l’État libre d’Irlande, un dominion conservant le roi George V comme souverain. L’IRA étant
farouchement républicaine, cela entraîne la guerre civile irlandaise du 28 juin 1922 au 24 mai 1923 entre
partisans du traité et les républicains.
Au Maroc, la conquête française (appelée « pacification ») se poursuit jusqu’en 1934 dans le Rif et le
Haut-Atlas.
En Syrie, la proclamation du royaume arabe de Syrie le 8 mars déclenche la guerre franco-syrienne,
qui se termine le 24 juillet 1920 par la prise de Damas par les troupes coloniales françaises.
En Albanie, la prise de contrôle par les Italiens est marquée par la « guerre de Vlora » de juin au
2 août 1920. Ces différentes insurrections sont durement réprimées.
En Irak, la domination britannique est tout aussi peu appréciée, d’où la révolte irakienne de mai à
octobre 1920, puis la guérilla kurde (par le « roi du Kurdistan » Mahmud Barzanji) de mai 1919 jusqu’à
juillet 1924.
En Égypte, le refus britannique d’autoriser une délégation à rejoindre la conférence de Paris (d’où le
nom du parti Wafd) dégénère en « révolution égyptienne » de mars à juillet 1919.
Par contre en Afghanistan, les Britanniques cèdent rapidement lors de la troisième guerre anglo-
afghane, du 6 mai au 8 août 1919, rendant à l’émirat son indépendance.
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