Droit Des Affaires C RAJA-ROQUE
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Elle est généralement stipulée lorsqu’il existe un transfert de clientèle ou un intérêt à protéger.
Elle peut, en outre, venir organiser une obligation de non-concurrence dite « de plein droit »
prévue par un texte et/ou compléter une « clause d’exclusivité » pendant ou au terme du contrat
(clause de non-concurrence post-contractuelle).
Ces clauses sont soumises à des conditions de validité et leur non-respect conduit à la mise en
œuvre des règles de responsabilité contractuelle.
Parmi les comportements visés par le droit de la concurrence, les pratiques anticoncurrentielles
(§I) et les opérations de concentrations (§II) sont susceptibles d’affecter la concurrence sur le
marché.
Il existe deux catégories de pratiques anticoncurrentielles qu’il convient d’exposer (A) avant
d’expliquer le régime qui leur est applicable (B).
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Caroline RAJA-ROQUE – Droit des affaires L2 AES -2019-2020
Selon l’article L. 420-1 du Code de commerce, une entente est une « action concertée,
convention, entente expresse ou tacite ou coalition » entre entreprises. L’article 101 TFUE, de
manière proche, vise les « accord entre entreprises, (…) décisions d’associations d’entreprises,
(…) pratiques concertées ».
Ces textes énoncent les éléments constitutifs d’une entente : des entreprises, d’une part, un
accord de volontés, d’autre part.
Ø Des entreprises
Les textes relatifs aux ententes supposent la démonstration d’une action concertée par plusieurs
entreprises.
Celles-ci doivent agir de manière indépendante/autonome = elles doivent donc être capables de
définir leur propre stratégie commerciale, financière et technique et de s’affranchir du contrôle
hiérarchique de la société dont elles dépendent.
Cette exigence exclut donc du champ d’application de ces textes la filiale à 100% ou le
représentant de l’entreprise, comme par exemple un mandataire.
La création d’une filiale commune, en revanche, peut être considérée comme une entente car
elle suppose un accord entre entreprises indépendantes.
Ø Un accord de volontés
Il peut ainsi exister différentes formes d’ententes, car la notion, exigeant simplement la preuve
d’un concours de volontés, est large :
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Tout comme en ce qui concerne les ententes, le droit interne et le droit communautaire de la
concurrence adoptent une approche semblable de l’abus de position dominante, sans toutefois
en livrer une véritable définition (Art. L. 420-2 al. 1 du Code de commerce et 102 TFUE).
Il en ressort qu’est prohibée l’exploitation abusive par une entreprise de sa « position
dominante » sur un marché.
La jurisprudence, essentiellement communautaire, est venue préciser le contenu de cette notion.
L’entreprise qui bénéficie de cette situation de puissance peut être amenée à en abuser.
Ces abus peuvent consister, notamment, en refus de vente ou en ventes liées.
L’abus de position dominante est constitué lorsque sont les éléments suivants :
Remarque : la domination en elle-même n’est pas sanctionnée, seul l’abus de celle-ci donnera
lieu à sanction. Toutefois, une entreprise dominante a une responsabilité particulière car elle
peut être sanctionnée lorsqu’elle se livre à des comportements que d’autres entreprise non
dominantes pourront mettre en œuvre sans être sanctionnées.
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CJCE, 13 février 1979, Hoffman- La Roche : Rec. CJCE, p. 461. La Cour définit la position dominante comme
« une situation de puissance économique détenue par une entreprise qui lui donne le pouvoir de faire obstacle au
maintien d’une concurrence effective sur le marché en cause en lui fournissant la possibilité de comportements
indépendants dans une mesure appréciable vis-à-vis de ses concurrents, de ses clients et, finalement, des
consommateurs ».
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Le texte ajoute que ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, ou
en pratiques discriminatoires (ou restrictives de concurrence telles que visées à l’article L.
442-6, I, du même code = par ex. : tenter d’obtenir des avantages ne correspondant à aucun
service commercial, soumettre le cocontractant à des obligations créant un déséquilibre, etc.).
éléments constitutifs :
Avant une réforme de 2001 (loi NRE), le texte prévoyait en outre l’obligation de démontrer que
l’état de dépendance économique constituait un abus contre l’entreprise « qui ne dispose pas de
solution équivalente ». Bien que supprimée par la loi, cette condition continue d’être exigée par
les autorités de concurrence et les juridictions.
B – Le régime de prohibition
La prohibition de ces pratiques repose sur un constat : l’atteinte portée au marché (1).
Une fois cette atteinte prouvée, la pratique sera sanctionnée (2).
Les ententes et les abus de domination ne seront sanctionnés qu’en cas d’atteinte portée au
marché.
La restriction concurrentielle doncdoit être prouvée et fait l’objet d’une analyse au cas par cas.
Or, dans la mesure où ce sont les conditions de fonctionnement de la concurrence sur un marché
qui sont affectées, il faut nécessairement en délimiter l’étendue.
2
Cons. Conc., déc. n° 89-D-16 du 2 mai 1989 : revue lamy, n° 361.
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La délimitation de l’espace affecté, que l’on désigne sous l’appellation de « marché pertinent »
ou « en cause » ou « concerné » permet, en effet, de démontrer les effets réels de la pratique
sur la concurrence. Cette étape repose sur la démonstration de la preuve que ce marché existe,
c'est-à-dire qu’il existe un lieu, un endroit abstrait, sur lequel les produits et/ou les services
proposés sont substituables, c'est-à-dire interchangeables aux yeux du consommateur, et ce sur
un espace géographique donné. Ce n’est qu’une fois le « marché pertinent » déterminé, qu’il
devient alors possible de démontrer que la pratique y cause véritablement une atteinte.
La preuve de l’effet anticoncurrentiel de l’entente peut être rapportée par tous moyens
(documents, par ex., ou faisceau d’indices graves, précis et concordants lesquels, une fois
réunis, présument la constitution de la pratique). La charge de la preuve incombe à celui qui se
prétend victime de l’atteinte, où encore à l’autorité de concurrence lorsqu’elle se saisit d’office
de difficultés concurrentielles constatées sur un marché.
Des sanctions civiles peuvent ensuite être encourues, telles que la nullité de l’engagement à
l’origine de la pratique (art. L. 420-3 C. Com./ 101 § 2 TFUE) ; alors même qu’une partie
ignorait son caractère anticoncurrentiel ; ou la condamnation au paiement de dommages-
intérêts sur le fondement de l’article 1240 C. civ.
Des sanctions pénales, enfin : pour la personne physique ayant pris part frauduleusement à une
pratique, l’article L. 420-6 du Code de commerce prévoit une condamnation à quatre ans
d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Le tribunal peut également ordonner la
publication du jugement.
Toutefois, dans certains cas, les pratiques, alors même qu’elles créent une atteinte à la
concurrence, ne seront pas sanctionnées. En effet, elle peuvent être exemptées dans
certaines conditions.
En dépit du caractère nuisible des ententes, droit communautaire et droit interne prévoient ainsi
qu’elles peuvent faire l’objet :
- soit d’une exemption dite « individuelle », lorsqu’elles produisent un progrès
économique (C. com., art. L. 420-4. - TFUE, art. 101, § 3 – Le progrès économique
désigne la création de gains d’efficacité économique, tels que l’amélioration des
circuits de production, l’innovation ou encore la création d’emplois) ou qu’elles
résultent de l’application d’un texte législatif ou d’un texte réglementaire pris pour son
application (C. com., art. L. 420-4, 1°)
- soit d’une exemption prévue par un « règlement d’exemption », c’est-à-dire d’un texte
spécifique régissant certains accords présumés inoffensifs pour le fonctionnement de la
concurrence.
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Pour les abus de domination, l’articulation des textes communautaires et internes est moins
aisée.
- En droit interne, la règle de l’exemption individuelle est commune à l’appréciation des
restrictions de concurrence s’inférant des ententes et des abus de position.
- Le droit communautaire, en revanche, ne prévoit pas d’exemption des pratiques
abusives. Toutefois, dans sa pratique décisionnelle, la Commission reconnaît qu’un
comportement abusif d’éviction peut être justifié par des considérations objectives ou
par la démonstration qu’il produit des gains d’efficacité substantiels qui l’emportent sur
ses effets anticoncurrentiels.
L’adoption de programmes de conformité est ainsi recommandée pour tout type d’entreprise
et dans tous les secteurs d’activité.
Pour cela, il s’agit de prendre des mesures concrètes permettant de détecter de possibles
manquements au droit de la concurrence, d’y mettre fin et d’en prévenir la réitération.
Ils convient, pour l’entreprise, de s’organiser autour de grands axes qui doivent être formalisés
dans une documentation actualisée et accessible à tous.
• Axe 1 : l’engagement clair, ferme et public des organes de direction à respecter les
règles de concurrence et à soutenir le programme de conformité de l’entreprise
Il faut donc rappeler dans le document que le respect des règles de concurrence est une
obligation légale et un élément de la responsabilité économique de l’entreprise et que
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l’entreprise s’engage à mettre en œuvre toute mesure destinée à prévenir tout manquement à
ces règles et à les traiter.
Les textes communautaire et interne encadrent le rapprochement des entreprises (Rt 139/2004
du 20 janvier 2004 et art. L. 430-1 et s. c. com.) : en effet, ces stratégies de regroupement
peuvent avoir un effet néfaste pour le marché du fait de l’augmentation de la taille des
entreprises concernées et de leur pouvoir de marché.
Afin d’éviter l’altération des structures des marchés, le droit de la concurrence, de manière
préventive, régule ces rapprochements au travers d’un contrôle des opérations de concentration.
Quel est le champ d’application du contrôle ?
Selon quelles modalités est-il mis en œuvre ?
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La notion de fusion est d’abord juridique et vise la fusion dite « acquisition » (plusieurs
entreprises fusionnent pour n’en former qu’une) ou la fusion dite « absorption » (une entreprise
disparaît et transmet son patrimoine à une autre). Cette notion est aussi économique et renvoie
à la fusion de fait, c’est-à-dire la création d’une unité économique (combinaison d’activités
d’entreprises antérieurement indépendantes qui aboutit à la création d’un seul et même
ensemble économique (direction économique en commun unique et permanente)).
La prise de contrôle désigne la possibilité qu’a une entreprise d’exercer une influence
déterminante sur l’activité d’une autre, peu importe les modalités de cette prise de contrôle
(c’est le cas, par ex., lorsque l’entreprise détient la majorité ou une part prépondérante du capital
d’une autre entreprise, ou lorsqu’elle détient des droits etc.).
L’entreprise commune (ou joint venture) : il s’agit d’une entreprise commune dite de plein
exercice, c'est-à-dire qui exerce de manière durable les fonctions d’une entité économique
autonome.
Une « opération de concentration » ne fera l’objet d’un contrôle dans le but de préserver
l’existence de la concurrence que lorsqu’elle franchit certains seuils calculés en Chiffre
d’Affaires (c'est-à-dire le montant des ventes du dernier exercice, dont on déduit certains impôts
et taxes).
Au-delà de ces seuils, en effet, les parties à l’opération seront tenues de saisir l’autorité interne
(Autorité de la concurrence) ou communautaire (Commission européenne) de marché afin
d’obtenir une autorisation. Il s’agira, ainsi, de « notifier » l’opération.
C’est à cette occasion que l’autorité saisie vérifiera la compatibilité de l’opération avec les
exigences concurrentielles. Si les seuils ne sont pas franchis, l’opération ne nécessitera pas de
notification.
Les seuils diffèrent, en raison de la différence des marchés visés, selon qu’il s’agit d’une
opération de dimension communautaire ou de dimension interne.
• En droit communautaire, pour que l’opération soit contrôlable, les textes prévoient que
le chiffre d’affaires total mondial hors taxes de toutes les entreprises parties à l’opération
doit être d’au moins 5 milliards d’euros.
Par ailleurs, le chiffre d’affaires de deux au moins de ces entreprises doit être de 250
millions d’euros dans l’ensemble de l’UE.
En revanche, si l’entreprise réalise plus des 2/3 de son chiffre d’affaires dans un état
membre, l’opération n’est plus de dimension communautaire.
Lorsque ces seuils sont franchis, l’opération doit être notifiée à la Commission
européenne par l’entreprise qui joue le rôle d’acquéreur, et ce au plus tard avant la
réalisation de l’opération. La Commission, qui a 25 jours pour se prononcer, peut alors
: soit considérer que l’opération relève du droit interne, soit rendre une décision
d’incompatibilité (atteinte à la concurrence) et demander à ce que les entreprises la
rendent compatible, soit, enfin, considérer qu’il y a doute quant à sa compatibilité avec
la concurrence et engager alors une procédure d’examen approfondi. Si la concentration
a lieu alors qu’elle a été déclarée incompatible, la Commission peut exiger la dissolution
de la concentration et infliger une amende aux entreprises défaillantes.
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