AFD 2018 Mécanisation Agricole Et Politiques Publiques
AFD 2018 Mécanisation Agricole Et Politiques Publiques
AFD 2018 Mécanisation Agricole Et Politiques Publiques
Division ARB
Rédactrice : Valérie Danto Avril – Mai 2018
Contact : Claude Torre, [email protected]
INTRODUCTION
L’agriculture est le secteur économique le plus important dans la plupart des pays du Sud et a donc un rôle
fondamental dans leur processus de développement. Dans de nombreux pays, elle représente au moins 40% du
produit intérieur brut (PIB) et 80% de l’emploi. Par ailleurs, la croissance démographique, notamment urbaine,
entraine des besoins importants en produits alimentaires et la demande alimentaire mondiale devrait doubler ces
50 prochaines années (Bottinger et al, 2013). Ceci permet d’accroître les débouchés pour le secteur agricole alors
que les exploitations familiales sont considérées comme les plus à même de satisfaire les besoins alimentaires des
pays en développement. Mais le fort degré d’ouverture de nombreux pays africains met en compétition des
produits importés peu chers qui pèsent sur les prix des produits locaux (y compris par substitution) limitant
ainsi les revenus des producteurs et de leurs salariés. C’est pourquoi les campagnes sont touchées par un fort
exode, en particulier des jeunes, vers les villes ou les pays voisins, pour des raisons culturelles, la recherche de
nouvelles opportunités d’emploi ou du fait de la pénibilité du travail agricole et des salaires plus élevés dans les
villes. Cet exode provoque des pénuries de main d’œuvre pour les travaux agricoles. Les arbitrages qui
s’effectuent entre le recours à une main d’œuvre bon marché mais mal rémunérée et l’achat d’équipements
agricoles sont alors souvent modifiés. En se plaçant sur la trajectoire classique (« Lewis model1» - Dorin et al,
2013 ; Gollin, 2014), son évolution par tri sélectif ou « treadmill2 » et dans un monde relativement ouvert aux
échanges qui met en compétition des économies très différentes, la mécanisation agricole, en améliorant la
productivité du travail, permet en partie de répondre à ces différents enjeux (voir Figure 1).
Elle permet également, si elle est bien gérée, d’exploiter de plus grandes unités agricoles, d’augmenter les
bénéfices et les salaires, et donc in fine, d’accroître les investissements. Si l’on observe généralement une
diminution des travailleurs agricoles avec la mécanisation, de nouvelles opportunités d’emplois non agricoles
apparaissent, notamment dans le domaine de la vente et l’entretien de machines (Brüntrup, 2017). Ainsi, dans les
pays en développement et dans les années 1960/70, certains chercheurs redoutaient que la mécanisation accentue
un sous-emploi rural. Aujourd’hui, dans de nombreux pays africains, ce débat n’est plus d’actualité avec une
certaine désertion des campagnes par les jeunes et la réallocation de cette main d’œuvre vers les secteurs
secondaire et tertiaire, le plus souvent urbains. Par ailleurs, par la réduction de la pénibilité des tâches, une image
moderne et de meilleurs revenus, la mécanisation ouvre de nouvelles opportunités de services dans les zones
rurales, même si elle réduit le nombre d’emplois agricoles, et libère du temps pour d’autres activités génératrices
de revenu. Elle permet une rapidité d’intervention aux périodes critiques des itinéraires techniques (semis,
désherbage, traitements éventuels, récolte), mais aussi d’améliorer la qualité des produits finaux (post-récolte), de
mieux les conserver et de réduire les pertes de produits agricoles. C’est surtout un facteur de préservation de la
compétitivité d’un pays dans un environnement commercial concurrentiel. Enfin, le développement de la
1
Le modèle de Lewis représente la trajectoire de croissance des pays avec un transfert de ressources de l’agriculture vers
l’industrie. Plus le secteur agricole d’un pays se développe, plus le nombre d’actifs agricoles diminue au profit de
l’industrie et les productivités du travail agricole et non agricole convergent. En Asie, plusieurs pays se dirigent vers un
« Lewis Trap » : les écarts de productivité augmentent. En Afrique, les écarts diminuent mais la population active agricole
est en hausse (Dorin et al, 2013) et en ASS l’industrialisation n’est jusqu’à présent pas suffisante pour absorber le surplus
de main d’œuvre agricole. Il existe toutefois des incertitudes sur la pertinence du modèle de Lewis dans tous les cas de
figure, mais cette hypothèse reste dominante, aujourd’hui, dans les modes de pensée de nombreux décideurs.
2
Le treadmill technologique apparait lorsqu’un petit nombre de fermiers adopte une nouvelle technologie. Leurs coûts de
production diminuent, ils obtiennent un profit supérieur aux autres fermiers. Puis, tout le monde adopte la technologie, la
production augmente, le prix de vente diminue et les profits également. S’ensuit une course à l’innovation où seuls les
fermiers les plus compétitifs restent sur le marché. https://en.wikipedia.org/wiki/Technology_treadmill
2
mécanisation peut permettre de faire davantage de place à l’agro-industrie afin d’ajouter de la valeur à la
production agricole, développer la commercialisation des produits et peut-être ainsi améliorer les revenus des
agriculteurs (FAO & ONUDI, 2008). Tout cela semble concourir à l’amélioration de la croissance et du bien-être
des populations des pays en développement. On observe d’ailleurs une forte corrélation entre la croissance
économique et le niveau de mécanisation dans le monde (Havard, 2016).
Figure 1 : L'accroissement de la productivité du travail (exemple de la culture céréalière de 1950 à 2000)
Suite à la révolution verte, la mécanisation s’est fortement développée en Asie et Amérique Latine et a été un
facteur clé de la croissance du secteur agricole (Side, 2013). Mais en Afrique, elle accuse un certain retard
dans la plupart des pays. Ainsi, en Afrique Sub-saharienne (ASS), 65% de l’énergie pour la préparation du sol
est fournie par les hommes, 25% par les animaux et 10% par les moteurs (contre 40% en Asie du Sud et 50%
en Amérique Latine et Caraïbes par les moteurs) (FAO, 2006). Pourtant, plusieurs programmes
gouvernementaux ont apporté leur soutien à la mécanisation de l’agriculture entre les années 1960 et 1990,
mais ils se sont pour la plupart soldés par un échec dans le cadre d’un interventionnisme coûteux et peu
efficient quand il s’agissait de distribuer des tracteurs peu adaptés à la demande à des particuliers choisis en
ASS. Certains Etats africains ont favorisé la mise en place de partenariats publics privés qui leur ont coûté
cher et qui n’ont pas permis d’atteindre les résultats escomptés (voir partie 2.1.). Le processus de mécanisation
est freiné par la faiblesse des investissements (équipements, aménagements, infrastructures, formation,
recherche, etc.), le manque de personnels qualifiés (tractoristes, mécaniciens, artisans, etc.), le déficit
d’équipements adaptés et l’importation de matériel de qualité variable (Bordet, 1997 ; Side et Havard, 2015).
Les petits exploitants ont peu d’épargne pour investir dans les équipements, souffrent d’un manque d’accès
aux financements bancaires et d’un accès limité au marché. Le secteur privé est peu développé dans le
domaine de la mécanisation. Il est souvent tributaire des aides de l’Etat et l’accès au financement est réduit par
3
le manque de garanties. Enfin, les politiques étatiques sont insuffisantes ou ne s’appuient pas sur la demande
réelle des agriculteurs.
La mécanisation agricole pose également certaines questions en termes d’égalité homme-femme dans l’accès aux
équipements, mais aussi de protection de l’environnement, car elle est à l’origine de perturbations des sols, de
demande en énergie et en ressources naturelles. L’augmentation de la taille des exploitations, facteur déterminant
de la hausse de la production agricole et de la baisse des coûts à l’hectare, est freinée par les enjeux fonciers.
Dans plusieurs pays d’Asie, la productivité du travail stagne du fait d’un manque d’accès à la propriété foncière
et des limites du « Lewis model » pour des raisons démographiques. Il est donc nécessaire que les pouvoirs
publics aient une vision globale pour un développement durable de la mécanisation agricole en prenant en
compte l’aménagement du territoire et les sujets rural/urbain, la fertilité des terres, la disponibilité du foncier,
l’amélioration de la qualité du travail, les aspects démographiques et économiques, et ses effets sur l’emploi
(Havard et Gaudard, 2018 ; Dorin et al, 2013). En outre, si l’on parle aujourd’hui de développement durable de la
mécanisation (ou de mécanisation durable) ; dans les années 90, il était davantage question de mécanisation dans
les stratégies durables de développement rural (Bordet, 1997), ce qui prenait moins en compte tous les enjeux
autour de la mécanisation agricole. Ainsi, la mécanisation durable prend en considération les aspects
technologiques, économiques, sociaux, environnementaux et culturels en contribuant au développement durable
du secteur agroalimentaire dans l’objectif d’augmenter la production et ainsi renforcer la sécurité alimentaire3.
A partir de ces constats, ce papier vise à questionner et apporter des éléments de réponse sur le rôle des pouvoirs
publics dans la mise en place d’une stratégie durable de mécanisation destinée à favoriser la sécurité alimentaire.
Il propose des pistes de réflexion sur les tâches dédiées à l’Etat et les politiques qu’il pourrait mettre en œuvre
afin d’améliorer l’accès à la mécanisation pour tous. Toutefois, il faut garder à l’esprit qu’il n’existe pas un
unique modèle de mécanisation. Chaque pays doit établir sa propre stratégie nationale de mécanisation agricole
en fonction de différentes caractéristiques qui varient selon les pays et même parfois à l’intérieur des pays : les
conditions agro-écologiques, socio-économiques, démographiques, politiques, les types de productions,
foncières, l’accès au financement, les politiques agricoles etc. Le rapport se concentre principalement sur
l’Afrique, et en particulier sur l’Afrique sub-Saharienne, au vu du retard relatif de la région sur le sujet.
Selon Pingali et al (1987), la mécanisation agricole recouvre l’emploi des outils et des machines pour la mise
en valeur des terres, la production, le transport et les techniques post-récoltes, en faisant appel à l’énergie
humaine ou animale ou à celle des moteurs (motorisation) 4. Elle s’étend aussi aux services liés à la
mécanisation (financement, fabrication, distribution, réparation et entretien des équipements, formation,
conseil et recherche), ainsi qu’aux politiques ayant des effets sur l’équipement agricole.
Dans l'histoire de la mécanisation (Carillon, 1986), l'industrialisation au XIXème siècle a permis le
développement de machines agricoles de plus en plus complexes en Europe, avec la traction animale tout
d’abord, puis le tracteur à vapeur au début du XXème siècle, le moteur thermique, les pneumatiques et des
3
http://www.fao.org/sustainable-agricultural-mechanization/overview/whatissustainablemechanization/fr/
4
Il existe souvent une confusion entre mécanisation et motorisation. Pourtant, cette dernière n’englobe que les équipements à
moteur, alors que la mécanisation est un terme bien plus large comme l’indique sa définition. Ainsi, des programmes mis en
place par les gouvernements étaient bien souvent seulement des programmes d’équipements et non de mécanisation, et
n’ont donc pas pu s’inscrire dans la durabilité par manque de mesures d’accompagnement.
4
machines de plus en plus sophistiquées. Depuis une trentaine d'années, les améliorations portent sur la
précision et l'automatisation avec les progrès techniques (numériques, automatismes), etc.
En Afrique, la traction animale s’est développée sous la période coloniale, avec la volonté d’accroître la
production dans les zones cotonnières, arachidières et rizicoles (Side, 2013). Les Etats se sont directement
impliqués avec la fourniture de subventions et de crédits pour l’achat du matériel et des animaux, et la mise en
place de services associés (assistance vétérinaire, services de dressage, appui à la formation et à l’installation des
forgerons et artisans du fer, etc.). Les animaux de traits sont principalement utilisés pour labourer, butter, herser
et pour le transport (Houssou, 2013), mais aussi pour les semis et la récolte de l’arachide au Sénégal. Leur
utilisation est cependant limitée dans les zones tropicales touchées par la trypanosomiase, provoquée par la
mouche tsé-tsé (Diao et al, 2012). Ainsi, la traction animale a contribué à augmenter la productivité du travail, à
étendre les superficies cultivées dans les zones où cela était possible, à améliorer la maîtrise des adventices et à
stimuler les synergies entre élevage et agriculture (Side, 2013). L’intégration agriculture-élevage (traction
animale, alimentation des animaux et fertilisation des cultures) gagnerait toutefois à être mieux diffusée, en
particulier pour maintenir et améliorer la fertilité des sols (grâce à la fumure organique). La traction animale était
également fortement développée en Asie mais est aujourd’hui en cours de régression au profit de la motorisation.
En parallèle, des programmes d’accès aux tracteurs furent développés, mais la plupart ont échoué, notamment du
fait de problèmes de gestion, d’un manque d’infrastructures et de soutien financier du gouvernement, d’absence
d’incitations et d’économies d’échelle (Mrema et al 2008). Ces programmes ont ensuite été arrêtés suite à
l’accroissement du déficit des Etats et la mise en place des plans d’ajustement structurels du FMI à partir des
années 1980. L’Afrique accuse donc un certain retard en termes de mécanisation par rapport aux autres régions
en développement. Ainsi, Mrema et al soulignent qu’en 1961, l’Afrique Sub-saharienne possédait plus de
tracteurs en service (172 000) que les pays d’Asie et du Proche Orient. Mais en 2000, l’Inde, la Chine et le Brésil
ont respectivement 6.9, 4.4 et 3.7 fois plus de tracteurs que toute l’ASS5 (où 70% des tracteurs sont concentrés en
Afrique du Sud et au Nigéria).
Cependant, les pays africains connaissent un regain d’intérêt pour la mécanisation aujourd’hui, même si les
effectifs de tracteurs restent stables depuis 1990 (environ 530 000 unités, Havard et Side, 2013). Ceci est
notamment lié la crise alimentaire de 2008 et la prise de conscience des gouvernements de la nécessité de
réinvestir dans la production agricole avec un accent sur la motorisation (Side, 2013). Mais c’est surtout avec
l’arrivée de fournisseurs de technologies indiens, chinois ou brésiliens depuis les années 2000, dont les machines
sont plus adaptées, généralement réparables localement, moins chères que les engins européens (et souvent
subventionnées à l’export). Ces pays émergents interviennent également par des dons matériels aux pays
africains (tracteurs, motopompes etc.) qui permettent de les expérimenter et de déterminer les mieux adaptés au
climat et aux sols des différentes régions (Tassé, 2010). De nombreux programmes d’appui à la mécanisation en
ASS sont caractérisés par un rôle prépondérant des gouvernements, avec une offre d’équipements et de services
agricoles réduite, concentrée et inadaptée, et une absence d’actions d’accompagnement (formation, appui-
conseil). De plus, ces programmes ne s’appuient généralement pas sur une analyse approfondie des besoins des
agriculteurs afin d’aboutir à une demande solvable (Side, 2013). Quand les emplois de machines sont
inappropriés aux conditions agro-pédo-climatologiques, ils peuvent entrainer une dégradation du sol accrue en
l’absence de mesures conservatoires (Havard, 2016).
5
En 2000, l’ASS possède 3,3 tracteurs pour 10 000 habitants, contre 7,8 pour la Chine, 19,9 pour l’Inde et 45,5 pour le
Brésil (Banque Mondiale)
5
Les résultats de la mécanisation sont donc très prometteurs en Asie et Amérique Latine (en hausse notamment
pour le pompage et la post-récolte (Adekunle, 2015)), mais sont mitigés en Afrique, qui est ainsi la principale
région à cibler pour des stratégies de développement de la mécanisation. Moins de 5 % et souvent, moins de 1%
des exploitations agricoles d’Afrique de l’Ouest possèdent des tracteurs (Havard et Side, 2013). Les motoculteurs
sont très répandus en Asie mais restent peu adoptés en Afrique par manque d’installations d’irrigation qui
faciliteraient leur passage (Diao et al, 2017). Les niveaux de mécanisation varient beaucoup selon les régions, les
systèmes de culture, mais au niveau des opérations agricoles ce sont surtout les travaux pénibles et exigeants en
énergie (travail du sol, pompage, transport et transformation) qui sont mécanisés. L’emploi de moteurs sur des
machines utilisées à poste fixe, ou portées à dos d'hommes, est relativement développé en ASS pour les
opérations comme le pompage de l'eau, les traitements phytosanitaires, la récolte, le battage et la transformation
des produits agricoles. En particulier, dans le cadre de programme d'allégement des travaux des femmes, il y a eu
beaucoup d'actions depuis plus de 40 ans mais uniquement sur les activités de premières transformation
(décorticage, mouture des céréales et des légumineuses, pressage, séchage, lavage) et plus récemment, des
programmes de seconde transformation (produits transformés). Peu de programmes ont été à destination des
femmes pour la mécanisation des travaux agricoles, pourtant très pénibles. Par ailleurs, plusieurs gouvernements
de pays africains ont encouragé l’utilisation de tracteurs à 4 roues alors que des plus petits engins, comme des
motoculteurs, pourraient être plus adaptés au contexte local, car les exploitations agricoles sont généralement
petites et ne nécessitent pas l’action de tracteurs à 4 roues. La puissance moyenne des tracteurs est comprise entre
60 et 80 chevaux au Ghana, et plus de 100 chevaux en Ethiopie et au Kenya, tandis que les petits tracteurs les
plus populaires dans les pays asiatiques vont de 20 à 40 chevaux (World Bank, 2014 dans Diao et al, 2017). Ces
gros tracteurs ne sont pourtant pas forcément les plus efficients pour la plupart des pays africains. Il est
nécessaire d’adapter l’utilisation des machines au contexte, aux capacités et aux besoins de chaque situation (voir
la « technologie appropriée » ci-dessous). Enfin, l’utilisation de la traction animale continue de se développer
dans les zones favorables, notamment dans un contexte de prix élevés du pétrole qui provoque beaucoup
d’incertitudes sur le prix que devront supporter les propriétaires d’engins motorisés. Dans certaines zones
cotonnières (Mali, Sénégal, Bénin etc.), jusqu’à 80% des exploitations possèdent des attelages. La mécanisation
agricole doit donc être consolidée et diversifiée en y intégrant les aspects de durabilité face aux changements
climatiques (Agriculture de conservation, agroforesterie etc.), l’évolution des systèmes de production et la
viabilité économique pour l’ensemble des acteurs du secteur (Side, 2013).
Dans les années 60/70, des chercheurs ont développé le concept de technologie appropriée (ou intermédiaire) pour
répondre à ces enjeux. Selon le North American Lake Management Society, elle représente l’« application des
connaissances scientifiques et de la technologie modernes pour se conformer aux conditions et pratiques
économiques, d’infrastructures, sociales et culturelles existantes localement ». Elle renvoie au choix de technologies
et applications à petite échelle, décentralisées, économes en énergie, respectueuses de l’environnement et
localement contrôlées. Ceci rejoint la pensée de Max Ringelman (1908), toujours d’actualité : « On doit éviter au
moins pour les choses courantes, une importation brutale de matériels ou de procédés qui, n’étant pas placés dans
des conditions appropriées, réussissent mal tout en dépensant inutilement du temps, de l’activité et de l’argent ».
L’idée est d’augmenter l’autonomie des locaux et leur capacité productive, de contrôler l’exode rural en utilisant un
maximum de main d’œuvre et de fournir une alternative au transfert de hautes technologies des pays industrialisés
vers les PED (Marques Dos Santos, 1976). Le concept, qui se rapproche de la notion d’innovation frugale6, est aussi
un bon compromis pour ceux qui accusent la mécanisation de supprimer des emplois agricoles.
6
https://fr.wikipedia.org/wiki/Innovation_frugale
6
Tableau 1 : Typologie non-exhaustive des agroéquipements disponibles en fonction des opérations et du
niveau de technicité de la mécanisation agricole.
Type d’opération Outils primaires Outils intermédiaires Outils perfectionnés
Préparation Manuel : Daba, houe, Motoculteur (périmètres irrigués) : charrue, Tracteur à 4 roues, herse rotative,
du sol TA : araire, charrue en bois, roues cages, fraise, planche à niveler, herse alternative, cultivateur,
soc métallique en culture tracteur à 2 roues, charrue (disques, strip-till (AC), décompacteur
attelée, cultivateur à dents, versoirs) ; pulvériseur, cultivateurs à dents, rotatif, sous soleur, bêche
coutrier (dent travail en sec), chisel, cultivateur rotatif, vibroculteur, herse roulante, outils auto-animés
rouleau
Epandage Manuel : fumure organique, Tracteur : Tracteur : épandeur à fumier à
engrais minéraux épandeur à fumier, à lisier (enfouissement) lisier (précision)
TA : Charrette transport Distributeur d’engrais Distributeur d’engrais (précision)
fumure organique
Semis, Manuel : bâton fouisseur Semoirs mécaniques et pneumatiques en Semoir de semis direct sur
repiquage, Manuel/TA : semoirs, lignes et monograines, repiqueuse de riz, couvert végétal pour tracteur,
plantation repiqueuse riz planteuse d’igname ou de pommes de terre planteuse de pommes de terre
(à distributeur manuel rotatif) automatique
Sarclage, Manuel : Daba, houe Houe rotative, herse étrille, sarcleuse, Houe rotative, bineuse et
binage TA : Sarcleur, butteur bineuse sarcleuse autoguidées (capteurs),
Robots
Désherbage Manuel : Pulvérisateur porté à dos d’homme Pulvérisateur pour tracteur,
chimique (entrainement manuel, motorisé), autoporté, avion
Pulvérisateur ULV Pulvérisation localisée sur outils
Motorisation : pulvérisateur de désherbage mécanique
Buttage Manuel : Daba, Houe Butteurs à socs, à disques Butteurs autoguidés
TA : Butteur à soc
Récolte Manuelle : Faucille, faux, Céréales : Faucheuse lieuse (motoculteur, Céréales, légumineuses :
couteau tracteur), Moissonneuse-batteuse
TA : Souleveuse arachide, Fourrages : faucheuses, faneuses, Fourrages : Ensileuse,
faucheuse céréale, presse endaineuse (TA, motoculteur, tracteur) enrubanneuse, roundballer,
manuelle fourrage, paille Pomme de terre et betterave : arracheuse presse
Egrenage, Mortier et pilon, Egreneuse et batteuse mécanique à moteur Batteuse et égreneuse motorisées
battage Egreneuse manuelle Roues tracteurs sur épis mil
Batteuse à pédale (riz)
Dépiquage avec animaux
Etuvage Marmites Fûts Usine d’étuvage
Séchage Bâche, natte, aire bétonnée Crib à maïs, séchoir solaire Séchoir à air chaud
Stockage et Grenier en matière d'origine Magasin à palettes Silos
conservation végétale ou argile Silos
Première Mortier et pilon, Moulin et Décortiqueur et moulins à moteur. Rizerie et Minoterie
transformation décortiqueur manuels Minirizerie, Rizerie et Minoterie
Transport Bicyclette Motoculteur, Tracteur : remorque, pelle, Matériel de transport de plus
TA : bats, charrette, traineau fourche grandes capacités
Chargeur automoteur, Tricycle motorisé
Elevage Bâti et contention Traite mécanique Robotisation traite
traditionnelle, charrette pour Matériels motorisés simples pour Automatisation de la distribution
7
collecte, distribution manutention des fourrages (fourches des aliments concentrés en
fourrages et épandage fumier tracteurs, remorques) et déjections animales stabulation
et déjections animales (Pelles et fourches sur tracteur, épandeur à Matériels de manutention des
fumier, pompe sur tonne à lisier)7 fourrages et des déjections
animales de plus grande
puissance
Irrigation Exhaure manuelle, irrigation Système californien d’irrigation à basse Système d’irrigation sous
gravitaire, pompe à pédale, pression, système d’irrigation par énergie pression, enrouleur, pompe
tuyau pour goutte à goutte, solaire, motopompes individuelles (diesel et immergée,
jarres, exhaure à traction électrique)… Automatisation pompage,
animale irrigation
Légende : TA. Traction animale ; ULV : Ultra Low volume
Dans la littérature, les critères et ratios pour appréhender les niveaux de mécanisation sont parfois très
différents selon les pays ou les régions. Il existe un certain nombre de méthodes et d'outils de calcul et de
mesures pour apprécier la situation de la mécanisation agricole :
- Le niveau de mécanisation (pourcentage d'exploitations équipées en animaux de trait ou de
producteurs possédant un tracteur, etc). Cette manière de calculer les niveaux de mécanisation est
souvent compliquée à interpréter, et cela complexifie les objectifs visés par les gouvernements en
matière de mécanisation puisqu'ils s'expriment selon des niveaux de mécanisation différents et
insuffisamment clairs (à l'exemple des calculs de la FAO en 2006 pour comparer le travail du sol
manuel, motorisé et animal selon les régions du monde). De plus, la mécanisation ne consiste pas
seulement à la fourniture de tracteurs ou d'animaux de trait, elle comprend tous les services et
politiques publiques à mettre en place en parallèle.
- Le taux de mécanisation (ratio de tracteurs par ha, de chevaux par ha etc.) permet des comparaisons
entre pays d'une manière générale mais est en fait peu comparable puisque les pays n'ont pas les
mêmes systèmes de production, de culture etc.
- Le taux d'équipement (nombre d'exploitations équipées de tel équipement par exemple) permet de
distinguer les différents équipements possédés par les exploitations agricoles, et d’analyser quelles
opérations agricoles sont mécanisées. Ainsi, les programmes d'équipement s'appuient sur des critères
spécifiques pour sélectionner les exploitations pouvant avoir accès aux tracteurs, à l'exemple du projet
UNPCB au Burkina Faso (2014). Dans le cadre de ce projet, 300 tracteurs ont été répartis entre des
producteurs de coton selon deux critères : la taille de l'exploitation et les références du producteur au
sein de son groupement de producteurs de coton (date d'adhésion, capacités financières etc.). Mais les
taux d'équipements ne permettent pas de savoir combien d'exploitations ont accès à tel ou tel
équipement dans une zone, une région, un pays.
- Enfin, des normes ont été élaborées dans certaines situations en fonction des types de mécanisation
(exemple : une charrue asine est utilisée par un âne pour travailler 3 ou 4 ha). Ces normes doivent être
utilisées pour orienter les programmes de mécanisation dans un contexte donné, ce qui est difficile
puisqu'elles n’indiquent pas si une exploitation est suffisamment équipée ou non.
7
En Europe, la mécanisation de la manutention, du chargement, du transport et de l’épandage du fumier et des lisiers a
favorisé le développement de leur utilisation au champ.
8
Il est important de réfléchir à des critères plus précis, plus complets, pouvant mieux orienter les décideurs dans
leurs actions en direction de la mécanisation. Pour mieux comprendre la situation de mécanisation des
exploitations agricoles, on peut aussi utiliser les trajectoires de mécanisation comme celle de Rijk. Ainsi, selon
Side et Havard (2014), pour les exploitations agricoles, plusieurs éléments déterminent les types de
mécanisation à adopter et leur développement : aménagements des parcelles, superficies cultivées, type de
cultures, demande de produits agricoles, offre et coût de la main d'œuvre, volume et coût des capitaux
disponibles, et coût d'exploitation des machines. Les choix retenus combinent souvent l'utilisation de divers
types (manuel, traction animale, motorisation), et niveaux de mécanisation. Ainsi Rijk (1989) montre que le
développement de la mécanisation dans les exploitations ne dépend pas seulement des équipements, mais aussi
de l’adaptation des systèmes de culture et de production aux équipements. Il a défini sept niveaux de
développement de la mécanisation agricole (tant sur logique historique que factuel), à savoir :
1) la substitution de l’énergie humaine par l’énergie mécanique pour les opérations à poste fixe
(décorticage du paddy, broyage des grains, pompage de l’eau, battage des grains),
2) la substitution de l’énergie humaine par l’énergie mécanique pour les opérations à poste mobile (travail
du sol),
3) la substitution du contrôle humain pour les opérations agricoles à haute intensité de savoir-faire
(moissonneuse),
4) l’adaptation des systèmes de culture aux machines (monoculture, semis en ligne, interligne cons- tant),
5) l’adaptation du système de production aux machines (spécialisation des exploitations agricoles, déclin
des spéculations difficilement mécanisables, remembrement et aménagement foncier),
6) l’adaptation des plantes (ou des animaux) aux équipements (la résistance à la verse et au battage des
céréales, la résistance aux meurtrissures de pommes de terre et des tomates en récolte mécanisée,
sensibilité des vaches à la traite mécanique) et
7) l'automatisation de la production agricole (alimentation automatisée des volailles, des systèmes
automatisés d'irrigation par gicleurs activés par l'humidité du sol, rationnement automatisé et informatisé
des aliments concentrés pour les vaches laitières individuelles en fonction de leur production de lait).
Ces stades sont caractérisés par un coût élevé et une complexité croissante des types d’équipements requis de la
substitution d’énergie à poste fixe à l’automatisation. Aujourd’hui, en Afrique de l’Ouest et du Centre, les
énergies animale et mécanique sont utilisées essentiellement en substitution de l’énergie humaine pour le travail
du sol et les opérations post-récolte (battage et transformation) sur des parcelles le plus souvent non aménagées et
partiellement essouchées, ainsi que pour le transport (niveaux de développement 1 et 2 de Rijk). Dans les zones
où la traction animale est bien développée et où les parcelles sont suffisamment essouchées, de nombreux
agriculteurs ont commencé à adapter leur organisation du travail et leurs systèmes de culture (monoculture, semis
en ligne, etc.) pour faciliter la mécanisation d’opérations spécifiques (niveau de développement 4 de Rijk). Les
autres opérations sont souvent manuelles. Généralement, l’utilisation actuelle de la mécanisation en Afrique
permet l’extension des superficies, mais ses effets sur les rendements sont négligeables (Side et Havard, 2014).
La propriété individuelle des machines et outils est le mode de gestion et d’utilisation des équipements
généralement préféré par les exploitants mais il requiert un investissement important qui n’est pas à la portée
de tous, notamment des petits producteurs. Ils peuvent alors s’organiser afin d’acheter collectivement un
équipement. Pour cela, ils peuvent se regrouper en groupements d’utilisation du matériel comme au Sénégal,
ou en coopératives d’utilisation du matériel agricole (CUMA), comme au Benin depuis 1997, au Mali depuis
2001, au Tchad (GUMAC) depuis 1986, et à Madagascar depuis 2011 (Side, 2013). Au Cameroun, les
planteurs sont invités à se constituer en Groupe d’initiative commune (GIC) pour avoir de plus grandes
parcelles cultivables afin de pouvoir bénéficier, par exemple, de tracteurs (Tassé, 2010). Les CUMA
permettent de partager les frais d’achat de matériels (charrue, tracteur…) mais leur coordination pour utiliser
8
Dans le cas des sociétés cotonnières en Afrique de l’Ouest, elles ont également formé et équipé des mécaniciens
agricoles pour leurs expériences de motorisation intermédiaire avec le tracteur Bouyer dans les années 1980/1990.
9
Ce programme « Techno Economic Approach for Africa-India Movement » (en français : Mouvement d’approche technico-
économique pour l’Afrique et l’Inde) a été mis en place en mars 2004 entre l’Inde et 9 pays d’ASS pour renforcer la
coopération économique, technologique et scientifique entre les pays membres.
10
le matériel en commun nécessite un certain niveau d’organisation collective et de cohésion pour fixer les
conditions et répartir les plages d’utilisation du matériel, gérer les charges de maintenance et fonctionnement,
d’investissement etc. (Side, 2013). Si ce modèle permet théoriquement l’autonomisation des agriculteurs, la
faible professionnalisation de ces organisations le rend en réalité peu efficace aujourd’hui dans les pays les
moins avancés (PMA).
En dehors de la possession individuelle ou collective de matériels, les exploitants peuvent faire appel à des
services de location. Ainsi, un agriculteur peut acheter une machine ou un animal de trait et le louer à des
voisins pour rentabiliser plus rapidement son achat. Mais le plus souvent, ce sont des grands exploitants qui
louent à des plus petits à un prix, et surtout à une période que ces derniers ne maîtrisent pas toujours ; ces
grands exploitants effectuant les prestations quand le travail est terminé chez eux. Un autre moyen de louer un
matériel est de faire appel à des fournisseurs de services de location. Ceci permet aux agriculteurs d’accéder
à différentes machines plus facilement et de ne pas supporter les frais d’entretien. Cependant, ils sont aussi
dépendants des prix fixés par les loueurs et de leurs disponibilités alors que les périodes d’opérations agricoles
sont souvent limitées dans le temps par les conditions climatiques. Certains exploitants constituent alors des
groupements pour s’adresser collectivement aux prestataires de services et réduire les coûts de transaction,
améliorer l’accès aux services et accroître leur pouvoir de négociation. En Chine, ces services ont été
développés avec succès pour les opérations de précision (plantation, désherbage etc.), et les fournisseurs
traversent le pays en groupe en fonction des calendriers agricoles, fournis par le gouvernement, ce qui leur
permet de louer les équipements sur une période plus longue. Au Ghana, l’Etat a souhaité développer ce genre
de services, avec des organisations comme les AMSEC10 (Agricultural Mechanisation Service Enterprise
Centres). Il leur a vendu des machines importées de pays émergents à prix fortement subventionnés, mais
l’offre n’était malheureusement pas adaptée à la demande locale et les AMSEC se sont avérées non rentables.
Récemment, le gouvernement a amélioré le processus d’importation et de distribution des machines en
accordant une plus grande attention à la multi-fonctionnalité des équipements et en rendant la sélection des
acheteurs de matériel subventionné plus concurrentielle. Si ces améliorations sont encourageantes, il est trop
tôt pour en connaitre les résultats (Diao et al, 2017). Mais des entreprises comme les AMSEC sont encore peu
développées en Afrique et seraient profitables à un stade plus avancé de la mécanisation en utilisant des
machines plus spécialisées comme en Chine (Diao et al, 2012). Il faut également des infrastructures comme
des routes pour développer ce type d’entreprises, et des agences locales seraient nécessaires pour connecter les
clients et les fournisseurs de services (Diao et al, 2017).
Quel que soit le modèle de propriété ou de location, une utilisation polyvalente des équipements doit être
encouragée afin de rendre l’investissement plus rentable, par exemple avec l’ajout d’outils supplémentaires sur
une machine ou avec l’utilisation non agricole d’un équipement, pour le transport par exemple. Au Ghana, en
plus du travail du sol, et du transport, des moissonneuses et planteuses sont attachées aux tracteurs importés du
Brésil. En Asie, le multi-usage a permis d’avoir des profits plus élevés. Au Bangladesh, suite à la suppression
des restrictions aux importations, les motoculteurs ont immédiatement été utilisés pour alimenter les puits
tubulaires peu profonds pour l'irrigation en plus du labour et du transport (Biggs et Justice, 2015 dans Diao et al,
2017). Mais les opportunités de multi-usage restent limitées dans les pays en développement car ils manquent
d’informations et de formation pour adapter les matériaux.
10 AMSEC (Centres d’Entreprise de Mécanisation Agricole, depuis 2007) : Importations de machines par le gouvernement
(avec prêts concessionnels de l’Inde et la Chine, achats orientés) puis vendu aux AMSEC à des prix subventionnés.
http://mofa.gov.gh/site/?p=10003
11
Enfin, le choix du modèle de gestion ou d’utilisation des équipements agricoles doit être fait au cas par cas en
fonction du contexte local. D’après Side (2013), ce choix est le fruit d’un équilibre entre l’offre, la demande et
les conditions d’accès physique et économique à la mécanisation agricole et est appelé à évoluer dans le temps
en fonction de l’évolution des exploitations agricoles, des capacités des organisations de producteurs et du
dynamisme du marché des équipements agricoles.
3. Quels financements pour la mécanisation ?
Le financement est le facteur limitant majeur de la mécanisation, en particulier en ASS, constituée en grande
majorité de petites exploitations pratiquant une agriculture de subsistance. Selon Side (2013), plusieurs
modalités sont à prendre en compte lorsque l’on souhaite financer la mécanisation : le type de besoins
(intrants, équipements, main d’œuvre etc.), les acteurs (producteurs, groupement villageois, groupement ou
coopératives de producteurs etc.), les mécanismes à retenir (crédits, subventions, dons etc.) et les canaux de
financement (privé, public, ONG, etc.). En plus des financements pour les utilisateurs, les acteurs chargés de
l’entretien et des réparations ont aussi besoin de financement pour équiper leur atelier, pour les périodes où il y
a moins de travail, etc. Afin d’accroître les investissements en mécanisation, des produits financiers adaptés
doivent être proposés aux exploitants ou aux fournisseurs de service. L’Etat peut ainsi proposer des
subventions, mais le modèle du Ghana avec les AMSEC nous a montré que les subventions seules sur les
produits importés ne sont pas toujours efficaces dans une démarche planificatrice mobilisant des opérateurs
choisis, sans tenir compte de la demande, avec une offre restreinte de machines et des processus de sélection
des bénéficiaires, pas toujours transparents. Les subventions directes plus générales, souvent en lien avec du
crédit, semblent plus efficaces car elles soutiennent la demande sans trop orienter les achats vers des types de
matériels prédéfinis. Celles-ci peuvent ensuite être supprimées suite au développement du marché national.
Les petits exploitants ont également des difficultés à accéder aux prêts car les banques n’ont pas de garanties
et estiment le risque élevé, leur revenu étant souvent lié aux prix, très instables, des produits agricoles.
Souvent les institutions financières n’ont pas de produit moyen terme pour l’achat de ces matériels : les taux
d’intérêt sont élevés et les échéances courtes. Celles-ci doivent alors améliorer leurs connaissances du monde
rural afin de proposer des produits financiers plus adaptés. Par exemple, elles pourraient proposer du crédit-
bail aux investisseurs : la banque reste propriétaire du matériel jusqu’à ce que l’investisseur ait remboursé le
coût de l’équipement et le taux d’intérêt associé. Elles peuvent aussi développer des services de transfert
d’argent efficaces pour faciliter les échanges entre agriculteurs et fournisseurs de services (Ströh de Martinez
et al, 2016).
Dès lors, afin d’améliorer l’accès des agriculteurs aux prêts, le rôle de l’Etat est de fournir des garanties aux
banques commerciales ou de développement. En Inde, grâce au soutien gouvernemental aux institutions
financières (IF), les banques nationales peuvent fournir des prêts à plus long terme pour que le secteur privé
investisse dans le développement agricole. L’Etat peut aussi instaurer des contraintes règlementaires afin
d’orienter une partie des ressources collectées par les institutions financières vers le financement de
l’agriculture. Il peut aussi encourager des bonifications d'intérêts et toute autre politique pour réduire le risque
d’investissement des banques (Diao et al, 2012).
En termes de fiscalité, le modèle bangladais nous a montré l’intérêt de lever les barrières à l’échange (droits
de douane, quotas etc.) afin de permettre au secteur privé de se développer et aux particuliers d’acquérir des
machines d’origine étrangère plus abordables. Toutefois, il faut faire attention à ce que cela ne pénalise pas la
fabrication locale de matériels qui a recourt à des matières premières importées qui ne bénéficieraient pas des
12
mêmes avantages fiscaux. L’Etat peut aussi baisser les taxes sur l’achat d’équipements agricoles mais en étant
certain que cette perte de recettes fiscales pour le gouvernement sera bien compensée par des gains de
productivité du travail pour les agriculteurs. Il peut accepter des prêts concessionnels des pays étrangers mais
il doit s’assurer, quand ils sont liés, que les pays donateurs prennent en compte les besoins, les conditions de
fonctionnement et d’accès des utilisateurs aux technologies promues (Diao et al, 2017).
4. Production locale ou importations ?
Il faut distinguer les outils manuels, les matériels de culture attelée, et de transformation des produits des
matériels de motorisation agricole. Les outils manuels, les matériels de culture attelée et de battage et
transformation des produits (décortiqueurs et moulins à céréales et pour les légumineuses (arachide), presses à
huile, concasseur de noix de palmes, etc.) sont fabriqués, excepté le moteur thermique ou électrique sur les
matériels de transformation, par des artisans et des petites entreprises. La majorité des usines de fabrication
des matériels de traction animale installées dans les années 60-70 en Afrique de l’Ouest, ont fermé avec l’arrêt
des programmes de diffusion des matériels agricoles subventionnés dans les années 80. Il en reste quelques-
unes (SISMAR au Sénégal) qui ont réussi à diversifier leurs fabrications (table/banc pour les écoles,
charpentes métalliques, citernes, etc.). Ces artisans et petites entreprises sont confrontés à des contraintes
fortes face aux matériels et produits importés : électricité chère et aléatoire, fiscalité souvent élevée sur la
matière première entrant dans la fabrication (fer, pièces, etc.), accès difficile au crédit, etc.
En ce qui concerne la motorisation agricole, des pays comme l’Inde, la Chine ou le Brésil ont très vite
commencé à produire leurs propres équipements. Le secteur privé s’est développé et l’Inde est aujourd’hui le
premier producteur de tracteurs au monde. Les pays africains s’approvisionnent la plupart du temps auprès de
ces pays émergents, qui fournissent aujourd’hui des machines plus adaptées, réparables localement, disposant
de pièces détachées et moins chères que les équipements européens11 (Havard, 2016). Le secteur privé de pays
africains importe aussi certaines machines mais ne bénéficie pas toujours des subventions. Il importe
également des machines de seconde main, qui rencontrent un certain succès mais non pas une longue durée de
vie du fait du manque de compétences locales et de pièces de rechanges pour les réparer (Diao et al, 2012).
Par ailleurs, certains pays émergents installent des usines de montage en Afrique, ce qui permet d’utiliser la main
d’œuvre locale, de fournir les pièces de rechange et d’être plus proche des clients. Ainsi, dans le cadre du
programme TEAM 9, des usines d’assemblage de tracteurs Mahindra et accessoires ont été inaugurées au Mali
(Mali Tracteur SA) et au Tchad en 2009, et au Bénin (Bénin Tracteur) en 2015. Il s’agit d’un partenariat avec la
même firme indienne (Angélique International Limited12). Des usines d’assemblage de tracteurs Mahindra
existent aussi au Ghana13 et au Nigéria, et de tracteurs Sonalinka au Cameroun. Mais les usines d’assemblage
existantes dans ces pays tournent souvent au ralenti et ne sont pas utilisées de façon optimale. Certains
équipements sont déjà produits en Afrique par des artisans ou des industriels, et il est généralement dans
l’intérêt des pays d’arriver à terme à produire leurs propres machines pour répondre aux besoins spécifiques
des agriculteurs en utilisant des produits et main d’œuvre locaux. Cela réduit la dépendance vis-vis de lignes
d’approvisionnement longues et coûteuses soumises aux aléas des taux de change et risquées en termes de
fourniture de pièces de rechange et de service (Kienzle et al, 2013). Cependant, il faut que la demande locale
11
Les entreprises de pays émergents continuent même à fabriquer des anciens modèles de tracteurs européens à plus bas
coûts. L’entreprise TAFE en Inde fabrique ainsi des anciens modèles Massey Fergusson.
12
http://www.angelique-india.com/fr/aareaOfSpecialization/?subsector=manufacturingplants
13
http://www.jeuneafrique.com/10944/economie/mahindra-creuse-son-sillon-en-afrique/
13
soit suffisante, que les producteurs aient accès aux matières premières pour la production, et que des normes et
certifications soient instaurées pour garantir la qualité des produits. Il faut aussi que cette fabrication locale
soit justifiée économiquement face à des importations à bas prix des pays émergents comme l’Inde.
Aujourd’hui, il n’y a pas de réflexion au sein des espaces économiques régionaux d’Afrique de l’Ouest et du
Centre (UEMOA, CEDEAO, CEMAC etc.) sur l’implantation d’usines de matériels agricoles, alors qu’une
réflexion sur la production locale d’équipements à cette échelle est nécessaire au vu de la faiblesse du marché de
mécanisation agricole.
La mécanisation agricole ne consiste pas seulement à rendre accessible les machines, outils et animaux aux
agriculteurs. Cela nécessite aussi la mise en place par le gouvernement d’un certain nombre de services qui
permettront la création d’un environnement favorable au développement de la mécanisation.
Tout d’abord, un élément essentiel de la mécanisation est le service après-vente (réparation, entretien, pièces de
rechange appropriées, Diao et al, 2012). L’Etat doit s’assurer que le secteur privé disposera facilement et
rapidement de pièces détachées à un prix abordable, ce qui n’est pas toujours le cas pour le matériel importé.
La normalisation des pièces de rechange a amélioré la situation dans certains pays, ce qui a facilité
l'interchangeabilité entre les outils provenant de différents fabricants et la réparation locale (de nombreux
alliages ne sont pas réparables par les artisans locaux). Par ailleurs, l’Etat doit garantir la présence
d’infrastructures suffisantes (routes, irrigation, électricité, marchés etc.) afin d’améliorer l’accès aux terrains
et aux marchés et de soutenir le développement de la mécanisation. L’irrigation est un élément important lié à
la mécanisation puisqu’elle favorise les sauts technologiques et permet d’augmenter les rendements de la
plupart des cultures de 100 à 400% (Fatunbi et Odogola, 2018). L’agriculture africaine souffre tout
particulièrement d’un manque d’investissements dans l’irrigation par rapport à d’autres régions du
monde puisque seules 5% des terres arables sont irriguées contre environ 40% en Inde et 30% en moyenne
pour le reste du monde (FAO & ONUDI, 2008). La promotion des systèmes d'irrigation mécanisés à petite
échelle permettrait d’améliorer la productivité agricole. Dans l’ensemble, il est attendu que le pourcentage de
terres irriguées augmente fortement dans le monde ces prochaines années. En termes de mécanisation, cela
ouvrirait un débouché important pour les pompes, les moteurs diesel, les tracteurs, les motoculteurs et les
matériels de récolte, battage et transformation. Cette opportunité de mécanisation est un défi pour l’industrie
locale africaine (Fatunbi et Odogola, 2018).
En ce qui concerne la formation, elle reste encore insuffisante dans de nombreux pays à tous les niveaux :
propriétaires, conducteurs, techniciens, ingénieurs, réparateurs, etc. Ceci entraine des choix inappropriés et un
accompagnement inadapté se traduisant par une mauvaise utilisation du matériel (Side, 2013). Il est nécessaire
de développer l’offre de formations et de qualifications pour l’utilisation, l’entretien et la réparation des
équipements, matériels ou d’animaux de trait (exploitants ou fournisseurs de services), ainsi que pour la
fabrication d’équipements et pièces de rechange (forgerons et artisans). A Madagascar par exemple, le Centre
de formation et d’application du machinisme agricole (Cfama) propose des formations pour la conception et la
production de petites machines agricoles (sarcleuses, semoirs, vanneuses, batteuses)14. Des formations
devraient aussi être organisées sur la gestion technique et financière d’une exploitation, afin d’inciter les
agriculteurs propriétaires à rentabiliser leur investissement. En effet, si l’on veut améliorer la production
alimentaire sur le long terme, il est important que les producteurs puissent opérer sur des superficies agricoles
14
http://www.newsmada.com/2016/03/03/mecanisation-agricole-vers-une-vulgarisation-des-machines/
14
plus importantes. Cela doit d’ailleurs être rendu possible par le développement de l’accès au foncier pour les
agriculteurs. Par ailleurs, la mise en place de structures permanentes d’appui et de conseil aux organisations
professionnelles d’agriculteurs, d’artisans, d’entrepreneurs, etc. est essentielle pour les accompagner dans
leurs démarches (Side, 2013). Enfin, des conseils particuliers doivent aussi être assurés pour le développement
des filières et des chaines agro-alimentaires, afin de mieux valoriser les produits agricoles et d’apporter de la
valeur ajoutée.
Le gouvernement joue aussi un rôle important dans la production de connaissances et sa diffusion. Il peut
aider à produire de l’information sur les calendriers des cultures, les technologies disponibles (et identifier les
vendeurs potentiels si les équipements ne sont pas accessibles facilement), leur prix, leurs conditions
d’utilisation, leur rentabilité, les modalités d’accès. Il doit ainsi développer des moyens de fournir davantage
de données techniques et économiques aux agriculteurs et aux fournisseurs de services associés à la
mécanisation (et notamment les institutions financières) et vulgariser les informations pour qu’elles soient
compréhensibles par tous. Le gouvernement doit aussi promouvoir la recherche développement (R&D) dans
le domaine de la mécanisation agricole, afin de développer de nouvelles machines, des équipements pour la
culture attelée, ou des outils multifonctionnels adaptés au contexte local. La R&D doit aussi se concentrer sur
l’étude des données agro-pédo-climatologiques, nécessaires au choix d’une mécanisation adaptée, car les
connaissances sur les types de sols sont souvent indisponibles et peu de pays africains disposent de cartes
pédologiques récentes (Diao et al, 2017). Enfin, la R&D doit permettre des innovations techniques pour une
mécanisation plus durable, notamment en Agriculture de conservation. Par ailleurs, dans beaucoup de pays
d’ASS, les programmes d’enseignements sont des cours de machinisme agricole et ne prennent pas en compte
les aspects économiques, sociaux et environnementaux qu’il est pourtant indispensable d’appréhender pour
développer durablement la mécanisation. Il faut aussi inclure l’apprentissage de la gestion de biens collectifs et de
la gestion rentable des exploitations et développer des filières métier spécialisées (tractoristes, mécaniciens,
forgerons, techniciens et ingénieurs en mécanisation agricole, etc.) dans les écoles et universités. Ainsi, dans la ville
de Diama au Sénégal, un projet financé en partie par l’AFD a permis d’ouvrir un centre de formation
professionnelle aux métiers du machinisme agricole avec des formations de techniciens en maintenance, de
conducteurs d’engins agricoles, de spécialistes en irrigation etc15.
Enfin, des réseaux doivent être mis en place au niveau régional et international, à l’instar du Regional Network
for Agricultural Machinery (RNAM) en Asie pour échanger sur les bonnes pratiques, de l’information sur les
technologies et pour entretenir un réseau de recherche mondiale (Kienzle et al, 2013). Des réseaux existaient
en Afrique dans les années 1980/1990 comme le ROATA (Réseau Ouest-Africain de la Traction Animale) et
l’ATNESA (Animal Traction Network for Eastern and Southern Africa) sur la traction animale ; ou le NAMA
(Network for Agricultural Mechanization in Africa) sur la mécanisation et l’ACEMA (Association euro-
africaine des Centres d’Etude du Machinisme Agricole. Mais ils ont disparu depuis et nécessiteraient d’être
réactivés en encourageant notamment les activités des réseaux nationaux aujourd’hui peu dynamiques (comme
le CENEEMA au Cameroun ou le CEEMA au Mali), et la collaboration entre ces réseaux (Bordet, 1997).
Un exemple de réussite d’un projet de mécanisation agricole prenant en compte ces mesures d’accompagnement
est celui de l’Office du Niger au Mali dans les années 1980. Dans le cadre du projet ARPON, un modèle
néerlandais de batteuses (Votex ricefan) a été introduit localement auprès des coopératives (il s’agissait de
dotations/subventions et non pas de crédit d’équipement). La réussite de cette expérience est due à plusieurs
15
https://www.ndarinfo.com/Saint-Louis-le-centre-de-formation-aux-metiers-du-machinisme-agricole-de-DIAMA-s-ouvre-
en-2017_a17133.html
15
facteurs : les batteuses ont été introduites progressivement à petite échelle, les paysans ont été formés à
l’entretien des batteuses, un atelier d’assemblage a été mis en place pour produire les machines localement (les
éléments de la batteuse étaient importés en kit et assemblés sur place) et des artisans ont été formés à leur
maintenance. Enfin, la filière d’approvisionnement en pièces détachées a également été appuyée et les coopératives
ont été incitées à mettre en place un fonds d’amortissement et d’entretien pour la maintenance des batteuses
(Heijboer, 1990). Plus récemment, fin 2017 au Burkina, le ministère de l’Agriculture et des Aménagements
Hydrauliques a subventionné en partie la fourniture de 500 tracteurs, 100 motoculteurs et 750 motopompes à des
agriculteurs burkinabés. Mais ce projet n’est pas seulement de la distribution de matériels puisqu’il s’appuie sur la
demande des agriculteurs et propose un « service après-vente » (formation des acquéreurs et des tractoristes avant
toute livraison, disponibilité des pièces de rechange et assistance par une équipe mobile de dépannage)16.
1. Enjeux environnementaux
La mécanisation, que ce soit la traction animale ou la motorisation, favorise l’essouchage des parcelles,
l’abattage des arbres, le labour et rend les sols plus sensibles ce qui accélère un processus d’érosion des terres.
Dans beaucoup de pays en développement, la révolution verte a aussi aggravé la salinisation des terres irriguées,
la sur-extraction des eaux souterraines, le renforcement de la résistance aux ravageurs et la réduction de la
biodiversité. Le manque d’actions préventives en parallèle de la mécanisation peut s’accompagner à long terme
d’une baisse de la fertilité des sols agricoles, ce qui aura des effets négatifs sur la production et le revenu des
producteurs. Une stratégie de mécanisation agricole ne peut donc pas se déconnecter d’une politique
d’aménagement des terres, de conservation des sols et de préservation des ressources. L’agriculture de
conservation (AC) propose de répondre à ces enjeux avec un ensemble de pratiques permettant une
intensification durable de la production agricole (profits accrus, productivité améliorée et durable et sécurité
alimentaire) (Kienzle et al, 2013). Elle se caractérise par trois principes : la limitation de la perturbation
mécanique du sol, le maintien d’une couverture organique permanente, et la multiplication des rotations et des
associations de cultures (FAO, 2005). Les pratiques de l’AC incluent donc le semis direct, la réduction du labour,
la combinaison de cultures associées, la limitation de l’usage de pesticides, des techniques anti-érosion (cordons
pierreux, bandes enherbées, plantations d’arbres) (Havard et Gaudard, 2018) et la culture sous couvert végétal
pour protéger la terre. Elles nécessitent le développement de matériel spécialisé. Au Bénin par exemple, l’AFD
finance le projet TAZCO (Transition agro écologique en zone cotonnière), dont l’objectif est de tester et adapter
des pratiques innovantes du monde entier avec travail minimum ou sans travail du sol à l’aide de tracteurs, de
motoculteurs et de la traction animale afin de répondre à la baisse de fertilité, et à la dégradation des sols dans les
zones cotonnières. Mais l’AC n’est pas seulement intensive en moyens, elle l’est également en technologies et
processus. Il est donc difficile pour des petits exploitants d’envisager de mettre en place directement des mesures
de l’AC. Cela nécessite un certain niveau de développement préalable. Au Brésil, la destruction des sols par le
système de production conventionnel a incité le pays à développer des équipements pour les techniques d’AC.
Les matériels existants ont d’abord été adaptés, puis suite à la hausse de la demande les industriels ont développé
des équipements spécifiques (notamment les semoirs pour le semis direct), aujourd’hui exportés à travers le
monde. L’AC engendre également un saut organisationnel qui nécessite de développer des itinéraires techniques
et des assolements particuliers.
16
http://malijet.co/afrique/agriculture-les-producteurs-burkinabe-recoivent-cinq-cent-500-tracteurs-toguna-tropic-agro-
chem-de-la-part-des-autorites
16
Ainsi, les sols tropicaux étant très fragiles, l’AC est un moyen efficace pour les protéger tout en continuant à
exploiter la terre. Pour favoriser son adoption, l’Etat doit s’employer à développer la formation et l’éducation
des agriculteurs à ces pratiques. Il doit également investir dans la recherche afin de collecter des données sur
les caractéristiques des sols et proposer des bonnes pratiques pour chaque type de sol. Enfin, il peut envisager
des paiements pour services environnementaux pour les agriculteurs mettant en place ces mesures. En
Tanzanie, dans le cadre d’un projet de la FAO, des paiements pour services environnementaux ont été
instaurés pour les pratiques d’agriculture en semis direct. Dans une perspective de long terme, afin de mieux
protéger les sols, une politique de remembrement au niveau des villages peut aussi être considérée, tout en
prenant en considération les problèmes liés à la disparition de haies, notamment pour la biodiversité. Dans ce
sens, on peut aussi promouvoir une approche conciliant la place de l’arbre dans les champs à l’instar de
l’agroforesterie. Les mesures de conservation permettent souvent de limiter les consommations d’énergies, et
notamment du pétrole, alors que le prix du baril augmente et les ressources pétrolières s’épuisent. Dans ce
sens, une réflexion est également à engager sur la valorisation de la biomasse, des combustibles de
remplacement et le développement du lien entre agriculture et élevage (Havard et Side, 2013).
Un autre enjeu mais qui n’a pas encore trouvé de réponse aisée aujourd’hui est l’alternative aux herbicides
comme le glyphosate utilisé dans les systèmes sous couvert végétal. Le glyphosate est classé comme
« cancérigène probable » par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Le retour à des instruments
mécaniques pour lutter contre les adventices serait coûteux en énergie. Le développement récent des technologies
agricoles de précision et de nouveaux traitements (vapeur d’eau) pourraient réduire les impacts négatifs sur
l’environnement (Bottinger et al, 2013).
2. Accès des femmes à la mécanisation
Dans les PED, 45% de la main d’œuvre est féminine, et même 60% dans certaines parties de l’Afrique (Sims
et al, 2016). On observe une féminisation de l’agriculture avec la migration des hommes vers les villes ou à
l’étranger, notamment en Asie du Sud. Elles effectuent souvent les tâches intensives en main d’œuvre, comme
le désherbage, la récolte et la transformation, le petit élevage, le transport du bois, de l’eau et des récoltes vers
les marchés et travaillent sur des filières spécifiques comme le karité, le maraîchage etc. Comme plus de 90%
des opérations de transformation et d'ajout de valeur sont traditionnellement effectuées par des femmes,
l'utilisation de ces équipements est essentielle car elle entraine une baisse de la pénibilité de leur travail
(Fatunbi et Odogola, 2018). Cela se traduit également par un gain de temps pouvant être dédié à des activités
plus rémunératrices (Tassé, 2010). Elles en tirent également un gain financier plus important, puisque par
rapport aux produits cultivés manuellement (le mil moulu à la pierre, le riz, le maïs ou le manioc broyés à la
pilonne à la main, etc.), les machines produisent en général des produits de haute qualité à forte demande
(Fatunbi et Odogola, 2018). De même, des études indiquent que si l’accès des femmes aux ressources
productives était égal à celui des hommes, les rendements agricoles augmenteraient de 20 à 30% (FAO, 2011).
Depuis plusieurs décennies, des programmes sont destinés spécifiquement aux femmes en ASS. Dans les
années 70-90, il s’agissait des programmes d’allègement des travaux des femmes qui étaient ciblés
essentiellement sur la transformation des produits (décorticage, mouture, pressage). De nombreux
groupements féminins ont été créés et équipés de moulins, décortiqueurs, presses à moteurs, à l’instar du
programme d’installation de moulins villageois dans les années 80 dans plusieurs pays d’ASS (Altarelli H. V.,
1986). Des progrès importants de mécanisation ont été réalisés sur ces activités. Mais ce sont surtout les
prestations par des privés qui se sont développées, et l’électrification progressive des zones rurales a accéléré
le processus. Aujourd’hui, ces programmes portent davantage sur les unités multifonctionnelles, comme les
17
plateformes du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) au Burkina Faso17, qui
associent divers outils : moulins, décortiqueuses, alternateurs, chargeurs de batterie, pompes, postes de
soudure, machines de menuiserie et permettent la distribution d’eau et d’électricité, ce qui libère les femmes
de corvées laborieuses. Ces programmes ne dépendaient pas des Ministères de l’Agriculture, mais des
Ministères de la promotion féminine (et autre dénomination) ce qui empêchait de les intégrer à une véritable
stratégie de développement agricole. Par ailleurs, l’accès des femmes à la mécanisation des travaux agricoles
reste très limité. Elle est souvent freinée par un manque d’information, d’éducation et d’accès aux services
financiers (Kienzle et al, 2013). Les hommes ont tendance à vouloir s’approprier le matériel, et sont
majoritairement bénéficiaires des projets d’équipements (sauf pour la transformation des produits) en tant que
chefs d’exploitations. Dans certains pays, les conventions sociales limitent la mobilité des femmes en dehors
du foyer ou du village pour négocier l’achat des machines et les femmes n’acceptent elles-mêmes pas toujours
l’utilisation des équipements ou d’animal de trait pour réduire la pénibilité de leurs tâches, car elles pensent
que cela leur créera du travail supplémentaire. Par ailleurs, la plupart des machines agricoles ne sont pas
ergonomiques pour les femmes mais des innovations sont prometteuses, à l’instar du travail de l’organisation
CIMMYT18 qui cherche à développer du matériel conçu spécifiquement pour les femmes (mini-motoculteurs
et épandeurs de semences etc.). Des projets les ciblent dorénavant plus spécifiquement pour les travaux
agricoles, à l’image du programme 100 000 charrues au Burkina où la moitié des charrues étaient dédiée aux
femmes ; ou du don de tracteurs indiens à un groupement collectif de femmes au Cameroun en 2006 (Tassé,
2010). Ainsi, les projets de mécanisation qui ciblent les femmes doivent tout particulièrement prendre en
compte l’aspect culturel et la séparation des tâches et des filières selon les genres au sein des communautés à
l’image des projets de mécanisation des travaux de maraîchage et de transformation pour les femmes qui ont
connu de forts progrès depuis une cinquantaine d’années. Ainsi, en 2015, le programme d’urgence au
développement communautaire (PUDC) du PNUD a permis à un groupement de femmes du Sénégal d’avoir
accès à 9 moulins à mil, 9 décortiqueuses à mil et une batteuse19.
Afin d’établir leurs besoins et objectifs en matière de mécanisation, les Etats doivent très tôt mettre en place une
Stratégie nationale de Mécanisation Agricole (SMA). Cette stratégie de long terme doit en particulier viser à
atteindre la sécurité alimentaire (Bordet et al, 1997) tout en répondant à trois objectifs : la croissance
économique, l’équité sociale (notamment les questions de genre) et la conservation de l’environnement. Elle doit
être intégrée dans la stratégie de développement agricole du pays, elle-même intégrée dans la politique nationale
de développement. Elle repose sur un diagnostic identifiant clairement les besoins en mécanisation sur toute la
chaîne d’approvisionnement. Celui-ci servira de base à la formulation de la stratégie et d’un plan d’action qui
pourra ensuite être mis en œuvre (Kienzle et al, 2013). Dans le cadre d’une démarche participative, la SMA doit
être établie avec toutes les parties prenantes : les agriculteurs, le secteur privé (banques, fournisseurs de machines
et de services de location, services de réparation et de maintenance, organismes de formation), le secteur public
en intégrant les différents ministères concernés par le sujet (Agriculture, Economie, Finance, Education etc.) et
des experts sur différentes thématiques. Cette démarche participative doit ensuite se poursuivre au-travers d’un
Comité National de la Mécanisation Agricole (CNMA) chargé de réfléchir aux mesures, actions et programmes
17
http://www.undp.org/content/undp/fr/home/presscenter/articles/2010/04/12/la-plateforme-multi-fonctionnelle-allge-
les-fardeaux-de-la-femme.html
18
CIMMYT : Centre international d'amélioration du maïs et du blé
19
http://www.seneweb.com/news/Politique/des-equipements-post-recoltes-pour-soula_n_169160.html
18
sur la mécanisation agricole (Adekunle, 2015). Par ailleurs, un des problèmes des stratégies de mécanisation en
Afrique est qu’elles ont souvent été pensées par des agronomes alors que différents corps de métiers devraient
contribuer à leur élaboration. La SMA doit tout particulièrement comporter des mécanismes d’incitations publics
pour l’accès aux financements (subventions, crédit-bail, garanties etc.) et aux technologies appropriées (fiscalité,
aide à l’installation de fournisseurs, usines de montage, etc.), un accompagnement des utilisateurs et des services
associés (formation, conseil, appui à l’organisation, information technico-économique) et des capacités
nationales de recherche-développement permettant à terme la production locale de technologies. Dans le contexte
de l'agriculture familiale, la SMA doit particulièrement cibler les petits exploitants (Ratolojanahary, 2016).
Une stratégie intéressante serait de concentrer d’abord la stratégie sur des filières organisées, des cultures
profitables et stratégiques avec un bon retour sur investissement et un marché prêt à absorber l’offre
supplémentaire de production alimentaire (Fonteh, 2010). Cela pourrait s’envisager dans le cadre d’un commerce
régional où chaque pays axe sa stratégie sur quelques cultures. Ainsi au Mali, la mécanisation s’est développée
rapidement grâce à l’existence d’une filière intégrée pour le coton, dans le cadre d’un monopole régional piloté
par la Compagnie malienne pour le développement du textile (CMDT). Envisager le développement de la
mécanisation sur toute une chaîne de valeur pourrait permettre de mieux identifier les goulots d’étranglement qui
font qu’à un niveau de la chaîne la production ne peut être absorbée, et de les résoudre.
De façon plus globale, Il est aussi important de prendre en compte le développement du secteur agro-industriel
dans la SMA, afin d’ajouter de la valeur à la production et ouvrir la voie à la commercialisation de
l’agriculture (FAO & ONUDI, 2008). Cette approche serait favorable dans beaucoup de pays africains car il
existe encore des disponibilités foncières ce qui n’est pas le cas de tous les continents. Pour les petits
exploitants agricoles, la mécanisation peut signifier un meilleur accès aux chaînes de production d’intrants
ainsi que l’intégration aux systèmes alimentaires modernes et, par conséquent, une augmentation des revenus,
des débouchés commerciaux multiples et renouvelables et un accroissement de la valeur ajoutée (Sims et al,
2016). Avec la croissance des systèmes alimentaires, cela contribuera également à accroître la sécurité
alimentaire des ménages (Adekunle, 2015). De même, la croissance urbaine constitue un marché naturel pour
les productions locales. La mécanisation agricole va donc devenir une voie intéressante pour relier les
agriculteurs à ces marchés.
CONCLUSION
La mécanisation est un élément essentiel pour le développement agricole et contribue à atteindre la sécurité
alimentaire. Elle entraine des gains de productivité importants qui permettent une hausse des revenus et une
amélioration des conditions de vie. En Asie et en Amérique Latine, la mécanisation est sur la bonne voie. Les
pays émergents comme l’Inde, le Brésil et la Chine deviennent des acteurs importants sur les marchés
mondiaux des machines agricoles et dans le futur, de forts progrès sont attendus pour atteindre des niveaux
élevés de mécanisation (Bottinger, 2013). En Afrique, la traction animale s’est développée significativement,
20
notamment dans les zones cotonnières, arachidières et rizicoles, mais la motorisation reste peu répandue (Side,
2013). Les programmes de mécanisation se sont pour l’instant soldés par des échecs, du fait d’un fort
interventionnisme des Etats et d’une approche très top-down, insuffisamment basée sur les besoins des
agriculteurs. Mais les perspectives de mécanisations demeurent importantes aujourd’hui sur le continent,
notamment du fait d’un nouvel engouement suite à la crise alimentaire de 2007/2008. Elles doivent prendre en
compte les changements rapides du contexte socio-économique et porter sur l’augmentation du niveau de
mécanisation de l’agriculture et l’amélioration de la qualité du travail mécanisé dans l’optique d’un
développement durable de la mécanisation (Side, 2013). Dans ce contexte, le rôle des Etats est déterminant,
notamment pour le financement de la mécanisation. Ils doivent établir une stratégie nationale de mécanisation
agricole et définir les politiques publiques nécessaires au développement d’un environnement favorable. Cela
doit être fait en concertation avec tous les acteurs impliqués (agriculteur, secteur financier, producteurs,
instituts de formation etc.) dans une démarche participative et en s’appuyant sur la demande des agriculteurs et
l’offre qui pourrait y répondre. Le secteur privé doit prendre le leadership de la mécanisation, et l’Etat doit
intervenir en soutien, pour les actions de formation, d’éducation, de R&D, d’accès aux financements, de
règlementation, d’infrastructures etc., et garantir un marché concurrentiel et accessible à tous. En Asie, dans
les endroits où la mécanisation s’est développée avec succès, ce n’est pas grâce à l’implication directe des
gouvernements dans l’offre de service de mécanisation mais par des soutiens indirects à la mise en place de
ces services par des privés en réponse à la demande économique. Enfin, la mécanisation agricole exige une
approche globale et fondée sur les chaînes de valeur allant au-delà de la simple production, et nécessite d’être
envisagée dans une perspective agro-industrielle afin d’ajouter de la valeur à la production et d’améliorer les
revenus des agriculteurs. Les pays peuvent aussi s’appuyer sur la hausse de la demande urbaine qui représente
une forte opportunité pour la production agricole.
Développer l’accès à la mécanisation demande une autre démarche sociétale, cognitive, économique,
collective, environnementale. Il faut garder à l’esprit qu’il n’y a pas de réponse parfaite à apporter en termes
de stratégies, les mesures doivent être adaptées au contexte de chaque pays. Selon Pearson (1998, cité par
Oluwole, 2018), la source d'énergie qui répondra aux besoins énergétiques des petits exploitants sera plutôt
une combinaison de technologies d'outils à main, de traction animale et de tracteurs à deux roues en fonction
de l’environnement politique, économique et social. Aujourd’hui, il y a également trois éléments clés à
prendre en compte : améliorer l’accès au foncier, développer l’accès des femmes à la mécanisation de la
production et parier sur une agriculture durable et respectueuse de l’environnement. Si l'Afrique doit
intensifier et mécaniser son agriculture à grande échelle, elle doit le faire avec soin et en accord avec les
principes d'intensification durable de la production. A l’avenir, une réponse pourrait aussi être de développer
les agritech (technologies de l’agriculture), comme avec l’agriculture de précision (pulvérisateurs connectés à
des systèmes GPS, mini-stations météo, drones, robots, etc.), et le numérique (recueil de données, outils d’aide
à la décision avec des systèmes d’information connectés pour l’analyse de risques météo ou sanitaires etc.).
L’équipement des campagnes est donc un enjeu majeur pour les prochaines décennies pour satisfaire les
besoins croissants de production, de conservation et de transformation des produits agricoles nécessaires à la
sécurité alimentaire d’une population en augmentation, tout en assurant la préservation du milieu (Side, 2013).
Il est essentiel de continuer à travailler autour de cette problématique pour faire prendre conscience de l’intérêt
de la mécanisation dans le développement des pays et continuer à améliorer son accès aux petites exploitations
agricoles familiales.
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