Progression Nationale Bac 2020
Progression Nationale Bac 2020
Progression Nationale Bac 2020
SOMMAIRE :
I. L’Ecrit
1. L’Enseignement Général
2. L’Enseignement Technique
II. L’Oral
1. Séries A1 et A2
2. Série B
3. Séries CD SI
LEÇONS 1 : Le Travail
LEÇONS 2 : L’Art
LEÇONS 4 : La Religion
LEÇONS 5 : La Tradition
LEÇONS 6 : Autrui
LEÇONS 10 : La Violence
LEÇONS 11 : La Technique
Quoi que le travail soit perçu comme punition divine et assujettissement, ne peut-il pas aussi
être le moyen par lequel l’homme se libère et se définit dans la société ?
L’étude de la notion du travail nous a permis de voir d’une part, que le travail est souffrance,
punition divine et assujettissement. D'autre part, qu’il constitue le moyen par lequel l’homme
se libère et s’affirme dans son milieu. Mais quoi qu’on dise, le travail est le propre de
l’homme. La satisfaction de ses besoins, la réalisation de son confort et le devenir des sociétés
humaines sont subordonnés au travail. Au lieu d’être une option, travailler est une nécessité
pour l’homme.
L’homme est le seul animal qui soit voué au travail. La question de savoir si le ciel ne se
serait pas montré beaucoup plus bienveillant à notre égard, en nous offrant toutes choses déjà
préparées, de telle sorte que nous n’aurions plus besoin de travailler, cette question doit
certainement être résolue négativement, car il faut à l’homme des occupations, même de
celles qui supposent une certaine contrainte. Il est tout aussi faux de s’imaginer que, si Adam
et Eve étaient restés dans le paradis, ils n’eussent fait autre chose que demeurer assis
ensemble, chanter des chants pastoraux et contempler la beauté de la nature. L’oisiveté eût
fait leur tourment tout aussi bien que celui des autres hommes. Il faut que l’homme soit
occupé de telle sorte que, tout rempli du but qu’il a devant ses yeux, il ne se sente pas lui-
même, et le meilleur repos pour lui est celui qui suit le travail.
KANT
Du latin « ars », talent ou savoir-faire, l’art se définit davantage comme une activité humaine
qui vise un idéal de beauté. Le beau désigne ici ce qui est agréable aux sens. C’est ce qui plaît
souvent sans concept. Pourtant, la catégorie esthétique le beau va de pair avec la catégorie
logique le vrai et la catégorie éthique le bien. L’art pour l’art n’existe pas. Aussi, l’œuvre d’art
ne serait-elle exclusivement que la production du beau ou pourrait-elle viser autre chose ?
Avec la publication de Aesthetica en 1750 par Baumgarten, l’art s’entend désormais comme
une activité humaine spécifique dont toute l’essence est l’expression du Beau. Ce que
l’homme cherche et recherche à travers ses productions artistiques, c’est « ce qui plaît
simplement » pour emprunter les mots de Kant (Critique de la faculté de juger). Il s’agit
précisément de ce qui se donne à voir comme Beau, sans que cela ne soit nécessairement une
opération de l’esprit. Par exemple, tout le monde s’accorde à dire que « La rose est belle ». Il
y a du Beau et il sait se montrer. Une œuvre d’art devient « une belle représentation d’une
chose et non la représentation d’une belle chose » soutient Kant (Critique de la faculté de
juger). La beauté d’un être ou d’une chose est un plaisir gratuit : « une finalité sans fin ».
Mais, si pour Kant est « beau ce qui plaît simplement à l’homme sans concept et de
manière universelle » (Critique de la faculté de juger), nous sommes tout de même en droit
de nous demander en quoi le masque tsogho Moweï par exemple serait Beau ? Car selon
Robbins, dans African art in americans collection, « L’art africain évoque souvent des
masques féroces et des fétiches ». En clair, il est loin de l’idéal de beauté inscrit dans les
canons occidentaux. Ici, le Beau transcende largement le sens traditionnel de « ce qui plaît
simplement ». On aurait dit, pour reprendre Hegel : « Le sensible est spiritualisé, puisque
l’esprit y apparaît sous une forme sensible » (Esthétique). Le Beau est cette obscurité qui
ne transparaît pas tout de suite dans ce qui apparaît. La beauté d’une œuvre d’art réside alors,
non plus dans ce qui se donne à voir, mais dans ce qui se dérobe : « Est beau ce qui sert »
écrit Senghor (Liberté I).
Finalement, si le Beau se confond à l’utilité, c’est que l’art vise autre chose que la simple
exaltation de la beauté. De quoi l’activité artistique peut-elle encore témoigner ?
L’art va au-delà de la simple fonction esthétique. Il y a en tout chef d’œuvre, ce que Boulez,
dans Penser la musique aujourd’hui. Le nouvel espace sonore, a nommé « potentiel
d’inconnu ». À travers leurs œuvres, les artistes arrivent à faire passer des messages
hautement bénéfiques pour la société. C’est souvent l’occasion d’extérioriser leurs pensées,
d’exprimer leurs sentiments intimes, de se libérer de leurs convictions profondes. Il peut
s’agir de la joie, la douleur, l’amertume ou la mélancolie. Probablement, pour emprunter les
mots de Freud, dans Ma vie et la psychanalyse, nous sommes face à des « satisfactions
imaginaires de désirs inconscients ». Ce qui est possible de retrouver dans les chansons, la
poésie, les tableaux ou les sculptures. Par exemple, Toulouse Lautrec représentait toujours
dans ses tableaux des chevaux vigoureux, aux antipodes de son état physique, pour traduire sa
force morale.
Au-delà des sentiments personnels, l’art peut également évoquer un engagement social,
politique et épistémologique. L’artiste est régulièrement appelé à se soustraire de la neutralité
pour s’engager dans diverses causes du moment. C’est ce en quoi l’affirmation de Kandinsky
trouve toute sa pertinence : « Toute œuvre d’art est l’enfant de son temps » (Du spirituel
dans l’art, et dans la peinture en particulier). L’art engagé doit se substituer à l’art pour l’art.
L’artiste doit, par ses œuvres, contribuer à l’amélioration de la condition humaine de son
époque. Il doit, à sa manière, participer aux débats concernant les problèmes qui se posent à
son ère culturelle ; dénoncer certains faits quand cela devient nécessaire. C’est dans ce sillage
là que s’inscrit d’ailleurs la Littérature négro-africaine avec le mouvement de la Négritude.
La poésie senghorienne par exemple devient ainsi un outil de revendication au service de
l’identité noire, en exaltant un attachement à sa culture nègre contre le racisme blanc.
En définitive, il convient de retenir que la finalité première de l’art est la recherche du Beau.
Une œuvre d’art est d’abord désintéressée. Elle ne vise rien en particulier sinon que plaire,
attirer les regards ou susciter ce que l’on nomme « émotion esthétique ». Elle est à la base
débarrassée de tout intérêt pratique. Sauf que, si le beau reste la préoccupation fondamentale
de l’art, l’artiste est un créateur. Il n’invente pas pour rien. Il rend sensible ce qui se soustrait
au regard et apparaît autrement. Tout objet d’art est un message qu’il convient toujours de
décrypter. Mieux, c’est un pont entre les vivants et les morts.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée
L’art n’apporte plus aux besoins spirituels cette satisfaction que des époques et des nations du
passé y ont cherchée et n’ont trouvée qu’en lui (…) Le degré qu’atteint le développement de
la réflexion dans notre vie actuelle fait que nous avons besoin, du point de vue tant de la
volonté que du jugement, de retenir des perspectives universelles et de soumettre le particulier
à leur régulation, de sorte que les formes, lois, devoirs, droits et maximes universels valent
comme principes déterminants et gouvernent presque tout. Mais en ce qui concerne l’intérêt et
la production artistiques, nous exigeons en général plutôt une vie où l’universel ne soit pas
présent comme loi ou comme maxime, mais agisse de concert avec le cœur et la sensation en
ne faisant qu’un avec eux (…) C’est pourquoi notre époque, en raison de sa condition
générale, n’est pas propice à l’art.
Hegel
Du latin progressus, l’action d’avancer, le progrès suggère l’idée d’un changement graduel
qui se fait par amélioration. Il implique le développement comme ensemble des
transformations des connaissances, des structures et des capacités. Aussi, au même titre que le
progrès, le développement constitue le mouvement d’un moins vers un plus. C’est le fait de
progresser ou d’évoluer. Or, il y a dans toute évolution les germes même de son involution.
Avancer, ce n'est pas toujours tendre vers le meilleur. Certains progrès sont source de misère.
Dans cette optique, tout progrès implique-t-il nécessairement un développement?
Toutefois, au-delà du caractère indistinct des deux notions, tout progrès aboutit-il au
développement ?
A la différence du développement qui est souvent positif, le progrès peut être négatif. Le
progrès technique par exemple ne s’accompagne pas toujours du développement moral et
environnemental. Simone Weil le dit : « Plus le niveau de la technique est élevé, plus les
avantages que peuvent apporter des progrès nouveaux diminuent par rapport aux
inconvénients » (Oppression et Liberté). Autrement dit, qualifier de progrès la
transformation graduelle d’une chose ou d’un état de la réalité, ne préjuge pas du sens positif
de la transformation évoquée. C’est le cas des progrès de la pandémie de la Covid-19 au
Gabon pour évoquer la catastrophe sanitaire qui se traduit par plus de trois mille cas de
contaminations.
Par ailleurs, les risques du progrès dans tous les domaines font peser des lourdes menaces sur
le développement durable de l’humanité. Les conséquences des nouvelles technologies sur la
vie sont redoutables. Dans son ouvrage La technique ou l’enjeu du siècle, Jacques Ellul
insiste sur l’aspect négatif du progrès. Pour lui, le progrès technique a produit un monde qui
nie l’homme et la morale. Il est source de déperdition pour l’humanité. Ce qui justifiait déjà
l’amertume de Rousseau dans son Discours sur les sciences et les Arts :« la dépravation est
réelle et nos âmes se sont corrompues à mesure que nos sciences et nos arts se sont
avancés vers la perfection ». En un mot, l’usage du progrès par l’homme est à redouter.
Conclusion
Au terme de notre réflexion, retenons que sans être totalement assimilées, progrès et
développement sont liées. Ils désignent à la base l’action de tendre vers le meilleur.
Cependant, si le progrès est censé libérer l’homme, il a désormais pris une allure démesurée.
Le développement durable de l’humanité est à l’épreuve. Une réorientation du progrès
s’impose. Il faut prendre en compte la dignité humaine et les valeurs morales. C’est à cette
seule fin que le progrès et le développement pourraient conduire au bonheur de l’homme.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée
Tandis que l’humanité a fait des progrès constants dans la conquête de la nature et est en droit
d’en attendre de plus grand encore, elle ne peut prétendre à un progrès égal dans la régulation
des affaires humaines et il est, vraisemblable qu’à toutes les époques comme aujourd’hui, bien
des hommes se sont demandés si cette partie des acquisitions de la civilisation mériterait
vraiment d’être défendue. On pourrait croire qu’une régulation nouvelle des relations
humaines serait possible laquelle renonçant à la contrainte et à la répression des instincts,
tarirait les sources du mécontentement qu’inspire la civilisation, de sorte que les hommes,
n’étant plus troublés par des conflits internes, pourraient se donner entièrement à l’acquisition
des ressources naturelles et à la jouissance de celle-ci. Ce serait l’âge d’or, mais il est douteux
qu’un état pareil soit réalisable.
Freud
Il faut reconnaître que la religion comble l’individu en proie à ses angoisses et consolide le
lien social. Toutefois, n’est-elle pas une solution trompeuse ?
L’être humain, aux prises avec les angoisses et les vicissitudes de la vie, a recours aux
pratiques religieuses pour être apaisé. La religion semble consoler donc les hommes de leur
misère, en leur faisant espérer un au-delà meilleur. Mais, cette espérance est mise en cause car
elle ne guérirait pas la misère, elle la masquerait simplement comme une drogue qui endort le
malade. C’est ce point de vue que soutient Karl MARX quand il dit que la religion est
« l’opium du peuple ». La croyance en Dieu serait alors une consolation trompeuse, parfois
employée à des fins d’exploitation des masses populaires par les dominants.
Il n’existe qu’une religion (vraie) ; mais il peut exister beaucoup de formes de croyances. - On
peut ajouter que dans les diverses Eglises qui se séparaient les unes des autres à cause de la
diversité de leur genre de croyances, on peut néanmoins rencontrer une seule et même vraie
religion. Il convient donc mieux (et c’est aussi le plus usité) de dire : cet homme est de telle
ou telle confession (juive, musulmane, chrétienne, catholique, luthérienne) que, il appartient à
telle ou telle religion. Ce dernier terme même ne devrait pas équitablement s’employer quand
on s’adresse au grand public (dans les catéchismes et les sermons) ; car pour lui, il est trop
savant et inintelligible ; aussi bien dans les langues modernes n’offrent point de terme qui soit
équivalent à cette expression. Par ce terme l’homme du peuple entend toujours sa foi d’église
qui lui tombe sous les sens, tandis que la religion se cache intérieurement et dépend
d’intention morales ; à la plupart des gens on fait trop d’honneur en disant d’eux : ils
professent telle ou telle religion ; car ils n’en connaissent et n’en demandent aucune ; la foi
d’église statutaire, c’est tout ce qu’ils entendent par ce terme. C’est pourquoi les prétendues
querelles religieuses qui ont souvent ébranlé le monde en l’arrosant de sang, n’ont jamais été
autre chose que des disputes sur la croyance d’église et l’homme opprimé ne se plaignait pas
en réalité parce qu’on l’empêchait de rester attaché à sa religion (ce que ne peut aucune
puissance extérieure) mais parce qu’on ne lui permettait pas de pratiquer publiquement la foi
d’église.
Kant.
Au terme de notre analyse, nous avons montré d’une part qu’il y a des raisons qui fondent le
rejet de la tradition, notamment sa faiblesse face aux exigences actuelles et le fait que la
tradition est fonction du temps. D’autre part, nous avons souligné le fait qu’il serait légitime
de valoriser la tradition car elle constitue non seulement un support pour la modernité, mais
également l’âme d’un peuple. Pour notre part, le présent ne peut être construit sans un rapport
fécond au passé.
Towa.
NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise..
Cette peinture négative d’autrui épuise-t-elle l’idée qu’on devrait se faire de lui? Autrui n’est-
il pas aussi nécessaire à notre existence ?
Finalement autrui est donc d’une part une source de problèmes pour notre être. C’est l’auteur
des conflits et de la violation de mon intimité. D’autre part, il peut s’avérer socialement
indispensable. C’est lui qui m’aide à supporter l’existence, c’est mon miroir. Pour notre part
autrui n’est pas qu’un figurant mais une présence essentielle et nécessaire.
Sujets de réflexion.
Apprendre à se connaître est très difficile (…) et un très grand plaisir en même temps (quel
plaisir !) : mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes :
ce qui le prouve, ce sont les reproches que nous adressons à d’autres, sans nous rendre compte
que nous commettons les mêmes erreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d’entre
nous, par l’indulgence et (…) qui nous empêchent de juger correctement. Par conséquent, à la
façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons apprendre à nous connaître,
c’est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu’un
ami est un autre soi-même. Concluons : la connaissance de soi est un plaisir qui n’est pas
possible sans la présence de quelqu’un d’autre qui soit notre ami ; l’homme qui se suffit à soi-
même aurait donc besoin d’amitié pour apprendre à se connaître soi-même.
Aristote
De plus, un autre écueil qui fait des ethnies un obstacle à l’édification de la nation, c’est
l’instrumentalisation du fait ethnique par le politique. Toutes choses qui sont souvent
source du repli identitaire. L’instrumentalisation et l’exacerbation du fait ethnique sont,
dans les sociétés africaines actuelles, l’œuvre de politiciens qui, en mal de popularité,
recherchent des assises et des bases électoralistes, incapables d’asseoir et respecter les
principes démocratiques : l’ethnie devient alors un fond de commerce électoraliste. Vu ainsi,
l’ethnisme est un comportement anti démocratique qui pose un problème moral, d’équité ou
de justice sociale, car il conduit à la discrimination, au repli identitaire. Le repli identitaire
est l’attitude qui consiste, dans une situation de crise notamment, à se retourner vers les
«siens », sa famille ou sa communauté, pour y trouver refuge, protection et affection. Les
leaders politiques exploitent cette fibre affective de l’ethnisme pour asseoir leur puissance
hégémonique. En cela le tribalisme ruine les efforts de construction de l’unité nationale. Car,
comme l’a affirmé Boutros Boutros-Ghali: «Si chacun des groupes ethniques, religieux ou
linguistiques prétendait au statut d'Etat, la fragmentation n'aurait plus de limite et la paix, la
sécurité et le progrès économique pour tous deviendrait toujours plus difficile à assurer.»
(Extrait de l’Agenda pour la paix, 1992). Nous pouvons le constater dans l’histoire du 3e
Reich, la propension à l’exaltation de la germanité a fait l’objet d’une exploitation
idéologique qui a mené au génocide ou à l’holocauste juif, à la Shoa. De même,
l’instrumentalisation le l’ethnisme au Rwanda a conduit au génocide tutsi.
Dans le même sens, la cohabitation ethnie/nation est possible car l’identité des peuples et
des nations se construit au fil des expériences vécues. Le fait ethnique est fondateur d’une
identité inéluctable. Seulement, considérer l’identité comme une substance fixe, achevée,
reviendrait à en faire un donné figé, résolument tourné vers le passé. Ce passéisme
«archaïsant » contraste avec la vocation de l’humain au changement permanent. L’homme,
disait Sartre, n’est pas une essence a priori, c’est un être de projet, un être toujours en projet,
un projet d’être, une liberté en situation ; l’homme n’est que ce qu’il se fait : «l’existence
précède l’essence ». L’identité est donc toujours à (re)construire et rien ne condamnerait
l’humain à se figer et à ressasser un passé dont il serait irrémédiablement nostalgique. Alain
Finkielkraut note, dans cet esprit, qu’«Il y a en l’homme un pouvoir de rupture : il peut
s’arracher à son contexte, s’évader de la sphère nationale, parler, penser et créer sans
témoigner aussitôt de la totalité dont il émane ». Vue ainsi, l’environnement sociétal, de façon
générale, impacte sur le vécu, sur l’être social de chaque individu. En ce sens, l’identité se
façonne progressivement avec les autres, parmi les autres, grâce aux expériences partagées : à
l’école, au travail, dans la vie de tous les jours, dans les joies comme dans les peines, par le
partage d’une langue commune, par l’interculturalité, etc. Et lors de tous ces instants de vie
partagée, la donne ethnique n’est pas primordiale. D’autres repères cimentent nos relations.
Toutes choses qui créent une affectivité nouvelle sur la base de laquelle le vivre ensemble
s’enracine. Par conséquent, une autre expérience partagée, une autre vision de l’avenir
peuvent légitimement fonder une nation, au-delà des référents ethniques. Par conséquent, les
communautés doivent transcender les réflex identitaires afin de s’accepter, ce d’autant plus
qu’elles doivent faire face à des défis plus grands comme celui de la mondialisation. C’est
peut-être en ce sens qu’Ebénézer Njoh-Mouelle dit : « En vue de l’organisation du mieux-être
de l’homme, le cadre du clan et de la tribu est aujourd’hui dépassé ».
En somme, Ethnie et Nation sont deux notions intimement liées. Si l’ethnie constitue d’une
part un obstacle à l’édification d’une nation à cause du la promotion ou la valorisation d’une
ethnie au détriment des autres, entraînant ainsi l’exclusion, la marginalisation ou le tribalisme,
d’autre part elle joue un rôle fondamental dans la construction d’une nation à travers son
savoir, son savoir-faire et savoir-être. L’ethnie est une richesse pour la nation. Reste alors à la
puissance institutionnelle, à l’Etat d’instaurer les conditions d’une nation pérenne ouverte sur
le monde et respectueuses de ses racines multiculturelles. C’est dans cet esprit que l’Etat
réaliserait la coexistence pacifique entre ethnies et nation supra-ethnique.
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 37/50
EXERCICES D’APPLICATION
Sujet 1 : L’appartenance à une ethnie doit-elle conduire à l’acceptation des valeurs issues de
ce groupe ?
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée.
L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village ;
à tel point qu’un grand nombre de population dites primitives se désignent elles-mêmes d’un
nom qui signifie les « hommes (ou parfois - dirons-nous avec plus de discrétion – les « bons »
les « excellents » les « complets », implique ainsi que les autres tribus, groupes ou villages ne
participent pas des vertus ou même de la nature humaine, mais qu’ils seront tout au plus
composé de « mauvais », de « méchants », de « singes de terre » ou « d’œufs de pou ». On va
souvent jusqu’à priver l’étranger de ce dernier degré de réalité en en faisant un « fantôme »
ou une « apparition ». Ainsi se réalise une curieuse situation où deux interlocuteurs se
donnent cruellement la réplique. Dans les grandes Antilles, quelques années après la
découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquêtes
pour rechercher si les indigènes avaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à
immerger des blancs prisonniers, afin de vérifier, par une surveillance surveillée, si leur
cadavre était ou non sujet à la putréfaction (…). En refusant l’humanité à ceux qui
apparaissent comme les plus « sauvages » ou « barbares » de ses représentants, on ne fait que
leur emprunter une de leurs attitudes typiques. Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à
la barbarie.
C. L. STRAUSS.
I. LE REJET DE LA PASSION
De par sa nature excessive, la passion apparait d’emblée comme mal. En effet, elle est un
sentiment devenu tyrannique, exclusif. Elle devient ainsi une sorte de polarisation du
psychisme sur un seul objet au détriment du reste. Dans ce sens, le passionné est aveuglé par
l’objet de sa passion. A ses yeux, une seule chose compte tandis que tout le reste est dévalué.
Dans cette optique, la passion fausse l’exercice normal du jugement. Comprise ainsi, elle
apparaît s’apparente à une malédiction. Elle est tellement nocive que « les sages de tous les
temps ont déconseillé cette voie avec tant d’insistance » pour reprendre Freud dans Malaise
de la civilisation. Chez les stoïciens par exemple, il faut s’en défier si l’on veut atteindre la
sereine impassibilité qui conduit au bonheur. L’homme doit par conséquent apprendre à se
détourner des passions s’il veut être heureux.
De plus, la passion est une affection de l’âme. Son état implique à la fois un enrichissement et
un dessèchement de l’affectivité. Au point où l’objet de la passion devient la source des
émotions les plus vives. Elle apparait alors comme une véritable maladie qui trouble l’âme et
réduit l’homme à l’esclavage. On comprend donc Kant lorsqu’il écrit : « la passion est une
maladie qui exècre toute médication » (Anthropologie du point de vue pragmatique). Elle
est si incurable qu’il ne faudrait même pas y penser. La passion obnubile l’intelligence et
annihile son pouvoir. Le passionné apprécie faussement la situation. Il commence d’abord par
conclure et raisonne ensuite seulement afin de se justifier. C’est ce que Ribot appelait « la
logique passionnelle », une forme de paralogisme c’est-à-dire un faux raisonnement. Dans
sa subjectivité, le passionné aperçoit le monde entier à travers son délire. Il ne raisonne plus.
Les passions, dans ce qu’elles sont fondamentalement à savoir une souffrance, ne sauraient
être appréciées au cœur de l’humanité. Car, l’âme se retrouve à chaque fois troublée au point
de manquer d’Ataraxie. Idem pour le corps qui n’incarne plus l’Aponie. La pensée devient
complètement engluée dans une absence presque totale de tact. Elle ne sait plus juger
objectivement. Une femme médiocre, par exemple, paraîtra sublime voire divine à celui qui
en est passionnément amoureux. Le bon sens est atrophié. C’est peut-être pour cette raison
que Fourrier affirme : « la passion conduit (…) l’homme à sa perte » (Le Nouveau monde
industriel et sociétaire). Une mort lente et progressive, mais certaine. Cependant, on ne peut
SUJETS DE RÉFLEXION
Sujet 2 :« La plus grande jouissance dans la vie consiste à vivre dangereusement ». Expliquez
et discutez.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée
Quoi qu’en disent les moralistes, l’entendement humain doit beaucoup aux passions, qui, d’un
commun aveu, lui doivent beaucoup aussi. C’est par leur activité que notre raison se
perfectionne ; nous ne cherchons à connaître que parce que nous désirons jouir ; et il n’est pas
possible de concevoir pourquoi celui qui n’aurait ni désirs ni craintes se donnerait la peine de
raisonner. Les passions, à leur tour, tirent leur origine de nos besoins et leur progrès de nos
connaissances. Car on ne peut désirer ou craindre les choses que sur les idées qu’on en peut
avoir, ou par la simple impulsion de la nature ; et l’homme sauvage, privé de toute sorte de
lumière, n’éprouve que les passions de cette dernière espèce. Ses désirs ne passent pas ses
besoins physiques, les seuls qu’il connaisse dans l’univers sont la nourriture, une femelle et le
repos ; les seuls maux qu’il craigne sont la douleur et la faim.
Rousseau
En tant qu’« animal politique » au sens où l’entend Aristote, l’homme ne saurait se prévaloir
d’une liberté illimitée ou d’une quelconque indépendance. Ainsi, en lieu et place de la liberté
naturelle (où chacun fait ce qu’il veut), l’Etat crée la liberté civile étroitement liée à
l’obéissance aux lois. Rousseau le souligne avec pertinence : « Il n’y a pas de liberté sans
loi » (Du contrat social). Dans un Etat démocratique par exemple, où à travers la loi
s’exprime la volonté générale, l’obéissance ne menace pas la liberté. Bien au contraire, c’est
en obéissant aux lois établies par l’Etat que nous exprimons notre liberté.
De plus, la liberté fait partie intégrante des biens que défend un Etat de droit. Dans cette
perspective, elle est une condition sine qua non au fonctionnement d’un Etat juste et
équitable. L’une des missions régaliennes d’un Etat est d’ailleurs de s’appliquer à sauvegarder
la liberté. Spinoza l’a compris mieux que nous : « La fin de l’Etat est en réalité la liberté »
(Éthique). Autrement dit, l’Etat favorise l’expression de la liberté sans laquelle il serait
difficile d’envisager toute forme d’épanouissement. En clair, la liberté qui s’accompagne de
responsabilité et d’autonomie reste une émanation de l’Etat.
Mais, si l’Etat est garant de la liberté politique et morale, ne peut-il pas aussi constituer l’être
qui la limite, parfois ?
A priori, il est possible de soutenir que la présence de l’Etat ruine toute possibilité d’une
liberté absolue chez l’homme. En effet, dans ses traditionnelles missions, pour sauvegarder la
paix et l’ordre social, l’Etat s’accorde moins à la liberté naturelle et à la licence. À ce sujet,
Bakounine est catégorique : « l’Etat est un vaste cimetière où viennent s’enterrer les
libertés individuelles » (Étatisme et anarchie).En d’autres termes, l’Etat ne permet pas
toujours aux individus d’agir selon leur propre volonté. Par exemple, en dépit de la légitimité
du droit de grève reconnu, l’État se réserve aussi le droit de s’y opposer au moyen de la force.
En somme, retenons que si la liberté désigne à la base l’action de faire tout ce que l’on veut ;
une telle liberté ne protège personne. Elle ouvre la voie à l’anarchie et à l’insécurité. C’est
pourquoi l’Etat s’oppose à la licence et à la liberté naturelle en inculquant la liberté civile,
plus responsable. Une liberté authentique se décline toujours en obéissance à la loi. Car,
comme l’affirme Montesquieu : « la liberté est le droit de faire tout ce que les lois
permettent » (De l’esprit des lois). En un mot, l’Etat ne constitue pas véritablement une
entrave à la liberté humaine. À l’opposé, il faut plutôt y voir le garant des libertés
fondamentales.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée
1) Rien ne paraît plus surprenant à ceux qui observent les affaires humaines d’un œil
philosophique que la facilité avec laquelle le plus grand nombre est gouverné par le petit, et la
soumission tacite avec laquelle les hommes sacrifient leurs propres sentiments et leurs propres
passions à celles de leurs chefs. Si on cherche comment de tels prodiges s’accomplissent, on
trouve que puisque la force est toujours du côté des gouvernés, les gouvernants ne peuvent
s’appuyer sur rien d’autre que l’opinion. C’est donc sur l’opinion seule que se fonde le
gouvernement. Une telle maxime s’applique tant aux gouvernements les plus despotiques et
les plus militaires qu’aux gouvernements les plus libres et les plus populaires. Le plus sultan
égyptien ou l’empereur romain peut certes traiter ses inoffensifs sujets comme des bêtes
féroces, contre leurs sentiments et leurs inclinations : l’un doit néanmoins avoir mené ses
mameluks1, l’autre sa garde prétorienne2, comme des hommes, c’est-à-dire par leur opinion.
Hume
Njoh Mouelle
1
Soldats esclaves des égyptiennes et gardes du sultan.
2
Garde personnelle des empereurs romains
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 44/50
Leçon 10 : La Violence
Le terme violence vient du latin « vis » qui veut dire force. Elle désigne le fait de soumettre
quelqu’un ou un groupe de personnes, de s’attaquer à son intégrité, d’exercer une pression
contre sa volonté, par le recours à la force. Elle apparait alors comme nocive et présente dans
la quasi-totalité des domaines de la vie humaine de façon physique ou verbale. Toutefois,
l’expérience humaine en société nous montre que sans la violence aucune organisation,
aucune discipline n’est possible. L’homme doit parfois être violenté pour obéir Elle est de ce
fait utile aux hommes. Au regard de cette réalité ambivalente, il nous revient de nous
interroger sur la légitimité de son usage. En d’autres termes, dans quelles mesures doit-on
user de la violence ? Aussi, dans une société organisée, doit-on toujours légitimer certaines
violences?
Si pour une certaine conception de la philosophie la violence est innée en l’homme parce
qu’il naît méchant, violent, égoïste, il faut néanmoins noter que dans les sociétés modernes,
l’homme n’est pas en droit d’user de la celle-ci comme bon lui semble. En effet, l’une des
raisons d’être de l’Etat, est la sécurité des citoyens. Il s’agit de les sécuriser contre les
violences faites par certains citoyens sur d’autres. Ainsi, par le biais des lois, l’Etat contraint
les individus à retenir leurs forces, leurs agressivités et autres tendances de domination pour
éviter toute peine ou sanction. Car en l’absence de la loi, les hommes sont totalement livrés à
la violence. Thomas Hobbes, dans le Léviathan, décrit ce climat en termes de « guerre de tous
contre tous ». Et le seul moyen pour mettre fin à cette violence naturelle généralisée, c’est
l’instauration de l’autorité de l’Etat par le strict respect de la loi. L’Etat peut donc, dans
certaines conditions, user de la violence pour le bien commun. Ce qui revient directement à
dire que seul l’Etat, en tant qu’autorité politique, a le droit d’user de la violence. Il utilise ainsi
la loi qui apparaît elle-même comme une forme de violence qui s’exerce sur les individus,
mais une violence dite légitime, parce qu’elle garantit la sécurité des hommes et des biens.
Aussi, l’Etat est en droit de se servir des forces de l’ordre (l’armée) pour restaurer la paix, la
tranquillité au sein de la société en cas de troubles ou perturbations majeurs causés par un
individu ou un groupe d’individus. De façon claire, lors d’une manifestation si les citoyens
troublent l’ordre public (exemple: barrer les routes, casser des infrastructures ou porter
atteinte à la dignité des autres citoyens…), l’Etat peut/doit riposter par la force. Ici, il s’agit
de la violence On peut donc considérer cette violence comme étant légitime.
Sur le plan religieux, la violence est nécessaire au croyant s’il veut évoluer
spirituellement. En effet, considérée comme une de violence physique, la pratique consistant à
se priver de nourriture est courante dans plusieurs religions. Elle est appelée jeûne ou carême.
Elle consiste à subir, à résister, à faire souffrir le corps en se privant volontairement
d’aliments. C’est une violence exercée sur soi dont la finalité est la paix de l’âme, l’élévation,
la maitrise de soi. En se mortifiant le corps volontairement, cette pratique apparait donc
comme une solution aux perturbations que peut avoir un individu dans son existence. Cette
forme de violence sur soi peut aider à régler certains dérèglements psychologiques dont
. L’usage de la force par l’autorité est considéré comme légitime parce que l’homme, pris
individuellement, est considéré comme un être méchant. Ainsi, dans son livre, Le Prince,
Nicolas Machiavel montre que l’homme est naturellement égoïste, versatile et incapable de
bonté. Chaque individu poursuit son intérêt au point où la stabilité de la société se trouvera
menacée. La violence devient dans ces conditions tout à fait légitime pour restaurer l’ordre et
faire taire les menaces sociales. Le prince doit faire usage de la force s’il veut maintenir la
paix et se pérenniser au pouvoir. Il affirme que : « La violence politique est nécessaire car les
hommes sont méchants ». De ce fait, la torture, le crime, l’emprisonnement, la pendaison
servent d’exemples à ceux qui voudraient ébranler l’ordre établi. La violence est donc un
moyen légitime et nécessaire au prince.
Si, dans les sociétés organisées et à travers la religion, la violence est justifiée et légitime,
il n’en demeure pas moins qu’on observe parfois des abus, des violences intolérables et à
proscrire.
Dans les sociétés organisées où l’individu a des droits et des devoirs, la violence ne
saurait être érigée en norme. Chaque citoyen a le devoir de taire ses penchants bestiaux et tout
ce qui relève de l’instinct animal, pour s’arrimer au projet civilisationnel commun où règnent
la sécurité et la paix. Exercer la violence serait donc ici manifester sa nature animale. C’est
pour cela qu’il faut punir, réprimer les violents qui tentent de troubler l’ordre établi, pour le
bien commun. C’est en ce sens que Ernest Renan affirme : « ce qui est désordre, violence,
attentat au droit d’autrui, doit être réprimé sans pitié ». (Sartre « la violence, sous quelque
forme qu’elle se manifeste, est un échec ») En effet, l’homme étant condamné à vivre avec ses
semblables se doit de bannir ses comportements violents pour sa propre sécurité et celle des
autres. Ainsi, parce qu’il faut préserver la paix civile, la violence n’est pas à encourager dans
l’état social.
Le combat contre la violence a, dans l’histoire, été symbolisé par le mouvement de la non-
violence. Il s’est agi de privilégier d’autres valeurs comme la tolérance, la bienveillance et
l’amour du prochain au détriment de la violence. Aucune violence n’est ici justifiable.
L’humain étant fait de valeurs nobles et humanistes, il n’est plus question de recourir à la
violence pour régler un quelconque problème. C’est en ce sens qu’il faut entendre le mot de
GHANDI, lorsqu’il affirme « la non-violence est la loi de notre espèce comme la violence est
la loi de la brute». (Gandhi : « l’humanité court à sa perte si le monde n’adopte pas la non-
violence » La violence n’est donc pas une solution. Bien au contraire, elle détruit l’homme et
de ce fait est condamnable.
EXERCICES D’APPLICATION
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée.
C’est pourquoi toutes les conséquences d’un temps de guerre où chacun est l’ennemi
de chacun, se retrouvent aussi en un temps où les hommes vivent sans autre sécurité que celle
dont les munissent leur propre force ou leur propre ingéniosité. Dans un tel état, il n’y a pas
de place pour une activité industrieuse, parce que le fruit n’en pas assuré : et conséquemment
il ne s’y trouve ni agriculture, ni navigation, ni usage des richesses qui peuvent être importées
par mer ; pas de constructions commodes ; pas d’appareils capables de mouvoir et d’enlever
les choses qui pour ce faire exigent beaucoup de force ; pas de connaissance de la face de la
terre ; pas de computation1 du temps ; pas d’arts ; pas de lettres ; pas de société ; et ce qui est
le pire de tout, la crainte et le risque continuels d’une mort violente ; la vie de l’homme est
alors solitaire ; besogneuse, pénible, quasi animale, et brève.
Thomas HOBBES
Fortement associée à la science dont elle est l’application intelligente, la technique fournit à
l’homme de puissants moyens d’agir sur la nature. Elle le libère de manière indéniable de
l’emprise étouffante de cette dernière. Le recours à la technique donne en effet à l’homme la
connaissance et la capacité nécessaires pour se rendre, selon les mots de Descartes, « comme
maître et possesseur de la nature »(Discours de la méthode). Il s’amorce ainsi, pour
l’humanité, un développement prodigieux. Les niveaux d’industrialisation et d’essor
économique des pays dits développés sont un témoignage patent. Ils illustrent parfaitement le
caractère bénéfique de la technique.
En fait, la technique présente un grand avantage pour l’homme. Elle facilite son travail et le
rend plus efficace. En effet, l’avènement du progrès technique a entrainé une transformation
radicale non seulement des méthodes de travail, mais aussi des moyens de production. Dans
cette perspective, considérant le progrès technique à la fois comme un beau risque et une
aventure, Louis de Broglie écrit : « Qu’importe ses vaines craintes (…) Nous devons
courir le risque, puisque le risque est la condition de tout succès » (Physique et
Microphysique).Autrement dit, le progrès technique constitue une belle aventure à laquelle
l’humanité ne peut plus de défaire. C’est le cas du Taylorisme et du Fordisme qui ont
considérablement révolutionné le monde du travail au XVIIIè Siècle.
De plus, l’humanité vit désormais sous la menace des méfaits du progrès technique :
déséquilibre écologique avec la destruction de la couche d’ozone ; armement nucléaire prêt à
décimer toute la planète ; manipulations génétiques qui transforment dangereusement
l’essence de l’homme. Les effets pernicieux sont multiples. Simone Weil le dit : « Plus le
niveau de la technique est élevé, plus les avantages que peuvent apporter des progrès
nouveaux diminuent par rapport aux inconvénients » (Oppression et Liberté). Dans la
même veine, préoccupé par cette aliénation de l’homme par la technique, Ivan Illich appelait
à « dé-outiller » la société. En s’équipant d’instruments de plus en plus sophistiqués dont le
mécanisme lui échappe, l’homme perd de sa dignité.
« Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une
vie authentiquement humaine sur terre » (Le principe responsabilité).
Sujet 2 :« Ce n’est pas la technique qui résoudra les problèmes de la technique mais l’action
morale et politique ». Expliquez et discutez.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée
J’appelle technique ce genre ce genre de pensée qui s’exerce sur l’action même et instruit par
de continuels essais et tâtonnement. Comme on voit qu’un homme même ignorant à force
d’user d’un mécanisme, de le toucher et pratiquer de toutes manières et dans toutes les
conditions, finit par le reconnaître d’une certaine manière, et tout à fait autrement que celui
qui s’est d’abord instruit par la science ; et la grande différence entre ces deux hommes, c’est
que le technicien ne distingue point l’essentiel de l’accidentel ; tout est égal pour lui, et il n’y
a que le succès qui compte. Ainsi un paysan peut se moquer d’un agronome ; non que le
paysan sache ou soupçonne pourquoi l’engrais chimique, ou le nouvel assolement, ou un
labourage plus profond n’ont point donné ce que l’on attendait ; seulement, par une longue
pratique, il a réglé toutes les actions de culture sur des petite différences qu’il ne connaît
point, mais dont pourtant il tient compte, et que l’agronome ne peut même soupçonner. Quel
est donc le propre de cette pensée technicienne ? C’est qu’elle essaie avec les mains au lieu de
chercher par la réflexion.
Alain