Progression Nationale Bac 2020

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MINISTERE DE L’EDUCATION NATIONALE REPUBLIQUE GABONAISE

CHARGE DE LA FORMATION CIVIQUE Union Travail Justice


INSPECTION GENERALE DES SERVICES
INSTITUT PEDAGOGIQUE NATIONAL
DEPARTEMENTS DE PHILOSOPHIE

PROGRESSIONS NATIONALES DE PHILOSOPHIE


Pour la période du 20/07 au 14/08 2020
ECRIT ET ORAL

SOMMAIRE :

I. L’Ecrit
1. L’Enseignement Général
2. L’Enseignement Technique
II. L’Oral
1. Séries A1 et A2
2. Série B
3. Séries CD SI

Annexes (Leçons et exercices)

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 1/50


Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 2/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 3/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 4/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 5/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 6/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 7/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 8/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 9/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 10/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 11/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 12/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 13/50
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 14/50
N.B : Les textes et les questions retenus pour l’oral font partie des exercices
accompagnant les leçons. Leur préparation est donc comprise dans les Travaux dirigés.

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ANNEXES
LEÇONS ET EXERCICES

LEÇONS 1 : Le Travail

LEÇONS 2 : L’Art

LEÇONS3 : Le Développement. Le Progrès

LEÇONS 4 : La Religion

LEÇONS 5 : La Tradition

LEÇONS 6 : Autrui

LEÇONS 7 : L’Ethnie. La Nation

LEÇONS 8 : Les Passons

LEÇONS 9 : L’Etat. La Liberté

LEÇONS 10 : La Violence

LEÇONS 11 : La Technique

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 16/50


Leçon 1 : LE TRAVAIL
Le travail est une activité réfléchie par laquelle l’homme transforme la nature et lui-même. Il
dérive du latin « Tripalium », instrument de torture destiné à ferrer les chevaux. Par-là, il
renvoie à l’idée de peine, de souffrance voire d’assujettissement. Or, le travail, en tant que
moyen par lequel l’homme soumet les forces de l’univers et s’adapte à la nature, peut aussi
être perçu comme une activité libératrice. Partant de cette double signification, le travail est-il
asservissement ou moyen d’autonomisation des hommes ?

I- Le Travail comme asservissement


1- Le Travail : un châtiment divin
De prime abord, le travail n’apparaît pas comme un loisir, un divertissement pour l’homme.
Bien au contraire, il est un châtiment, une punition infligée à l’homme par Dieu. En effet,
selon la tradition judéo-chrétienne, le travail est la conséquence du péché originel.
Lorsqu’Adam et Eve ont désobéi, en goûtant au fruit défendu, Dieu condamna l’homme au
travail :« C’est à la sueur de ton visage que tu mangeras le pain… » (Gen.3 :19). Autrement
dit, c’est avec beaucoup de peine, au prix du labeur que l’homme doit subsister. Le travail est
alors frappé du sceau de la fatalité, et travailler devient un destin pour l’être humain.

2- Le travail comme misère


Contrairement au travail de l’artisan qui épanouit l’homme par le fait qu’il est maître de son
activité, le travail ouvrier n’apporte que misère au travailleur. Car, le fruit de son labeur est la
propriété du capitaliste, propriétaire des moyens de production. Ainsi, K. Marx parle de
l’exploitation de l’homme par l’homme pour dénoncer cette marchandisation du travailleur
par le capitaliste. Il le dit clairement dans le Capital : « La force de travail est, dans notre
société capitaliste actuelle, une marchandise comme toutes les autres ». Et mal payé, le
travail salarié déprave l’homme, l’expose à la misère et l’asservit à la nécessité.

Quoi que le travail soit perçu comme punition divine et assujettissement, ne peut-il pas aussi
être le moyen par lequel l’homme se libère et se définit dans la société ?

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II- Le Travail comme moyen d’autonomisation
1- Le travail comme libération
Les progrès observés au sein de la société dans la quasi-totalité des domaines sont le fruit du
travail. Par ce canal, l’homme a appris à libérer son génie pour le mettre au service de son être
et de la communauté. Au lieu de n’être que souffrance et assujettissement, le travail est le
moyen par lequel l’homme acquiert son autonomie vis-à-vis de la nature et de la société. En
effet, l’homme n’est plus totalement soumis au rythme de la nature, il n’attend plus que celle-
ci le nourrisse à travers des fruits saisonniers, des plantes et autres bienfaits naturels. Par le
travail, l’homme pourvoie à sa subsistance en toutes saisons. Dans la dialectique du maître et
de l’esclave, Hegel montre que par le travail, l’esclave, au contact de la nature conquiert sa
liberté et devient finalement le maître de la nature et de son maître.

2- Le travail comme moyen d’accomplissement de soi


Si le travail est le moyen par lequel l’homme se libère, il est également ce par quoi il s’affirme
dans la société s’autonomise. Toutes choses qui suscitent le respect de la part de ses
semblables. Tout de nos jours, en effet, semble lié au travail. Le poste ou la fonction occupée
nous élève et nous fait accéder à certains privilèges. Le travail nous permet de satisfaire nos
besoins, de réaliser nos rêves, d’être considéré, d’atteindre le bonheur. C’est pour exprimer
cet accomplissement de l’homme par le travail que Voltaire affirme que « le travail éloigne de
nous trois grands maux : l’ennui, le vice et le besoin ». Ainsi, le travail s’avère indispensable
à l’homme.

L’étude de la notion du travail nous a permis de voir d’une part, que le travail est souffrance,
punition divine et assujettissement. D'autre part, qu’il constitue le moyen par lequel l’homme
se libère et s’affirme dans son milieu. Mais quoi qu’on dise, le travail est le propre de
l’homme. La satisfaction de ses besoins, la réalisation de son confort et le devenir des sociétés
humaines sont subordonnés au travail. Au lieu d’être une option, travailler est une nécessité
pour l’homme.

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EXERCICES D’APPLICATION.

Sujet 1 : L’homme peut-il se passer du travail ?

Sujet 2 : « Le travail divise les hommes». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique de ce texte en procédant à son étude ordonnée.

L’homme est le seul animal qui soit voué au travail. La question de savoir si le ciel ne se
serait pas montré beaucoup plus bienveillant à notre égard, en nous offrant toutes choses déjà
préparées, de telle sorte que nous n’aurions plus besoin de travailler, cette question doit
certainement être résolue négativement, car il faut à l’homme des occupations, même de
celles qui supposent une certaine contrainte. Il est tout aussi faux de s’imaginer que, si Adam
et Eve étaient restés dans le paradis, ils n’eussent fait autre chose que demeurer assis
ensemble, chanter des chants pastoraux et contempler la beauté de la nature. L’oisiveté eût
fait leur tourment tout aussi bien que celui des autres hommes. Il faut que l’homme soit
occupé de telle sorte que, tout rempli du but qu’il a devant ses yeux, il ne se sente pas lui-
même, et le meilleur repos pour lui est celui qui suit le travail.

KANT

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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Leçon 2 : L’ART

Du latin « ars », talent ou savoir-faire, l’art se définit davantage comme une activité humaine
qui vise un idéal de beauté. Le beau désigne ici ce qui est agréable aux sens. C’est ce qui plaît
souvent sans concept. Pourtant, la catégorie esthétique le beau va de pair avec la catégorie
logique le vrai et la catégorie éthique le bien. L’art pour l’art n’existe pas. Aussi, l’œuvre d’art
ne serait-elle exclusivement que la production du beau ou pourrait-elle viser autre chose ?

I. L’ART OU LA RECHERCHE DU BEAU

Avec la publication de Aesthetica en 1750 par Baumgarten, l’art s’entend désormais comme
une activité humaine spécifique dont toute l’essence est l’expression du Beau. Ce que
l’homme cherche et recherche à travers ses productions artistiques, c’est « ce qui plaît
simplement » pour emprunter les mots de Kant (Critique de la faculté de juger). Il s’agit
précisément de ce qui se donne à voir comme Beau, sans que cela ne soit nécessairement une
opération de l’esprit. Par exemple, tout le monde s’accorde à dire que « La rose est belle ». Il
y a du Beau et il sait se montrer. Une œuvre d’art devient « une belle représentation d’une
chose et non la représentation d’une belle chose » soutient Kant (Critique de la faculté de
juger). La beauté d’un être ou d’une chose est un plaisir gratuit : « une finalité sans fin ».

Mais, si pour Kant est « beau ce qui plaît simplement à l’homme sans concept et de
manière universelle » (Critique de la faculté de juger), nous sommes tout de même en droit
de nous demander en quoi le masque tsogho Moweï par exemple serait Beau ? Car selon
Robbins, dans African art in americans collection, « L’art africain évoque souvent des
masques féroces et des fétiches ». En clair, il est loin de l’idéal de beauté inscrit dans les
canons occidentaux. Ici, le Beau transcende largement le sens traditionnel de « ce qui plaît
simplement ». On aurait dit, pour reprendre Hegel : « Le sensible est spiritualisé, puisque
l’esprit y apparaît sous une forme sensible » (Esthétique). Le Beau est cette obscurité qui
ne transparaît pas tout de suite dans ce qui apparaît. La beauté d’une œuvre d’art réside alors,
non plus dans ce qui se donne à voir, mais dans ce qui se dérobe : « Est beau ce qui sert »
écrit Senghor (Liberté I).

Finalement, si le Beau se confond à l’utilité, c’est que l’art vise autre chose que la simple
exaltation de la beauté. De quoi l’activité artistique peut-elle encore témoigner ?

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II. L’ART COMME LANGAGE PARTICULIER

L’art va au-delà de la simple fonction esthétique. Il y a en tout chef d’œuvre, ce que Boulez,
dans Penser la musique aujourd’hui. Le nouvel espace sonore, a nommé « potentiel
d’inconnu ». À travers leurs œuvres, les artistes arrivent à faire passer des messages
hautement bénéfiques pour la société. C’est souvent l’occasion d’extérioriser leurs pensées,
d’exprimer leurs sentiments intimes, de se libérer de leurs convictions profondes. Il peut
s’agir de la joie, la douleur, l’amertume ou la mélancolie. Probablement, pour emprunter les
mots de Freud, dans Ma vie et la psychanalyse, nous sommes face à des « satisfactions
imaginaires de désirs inconscients ». Ce qui est possible de retrouver dans les chansons, la
poésie, les tableaux ou les sculptures. Par exemple, Toulouse Lautrec représentait toujours
dans ses tableaux des chevaux vigoureux, aux antipodes de son état physique, pour traduire sa
force morale.

Au-delà des sentiments personnels, l’art peut également évoquer un engagement social,
politique et épistémologique. L’artiste est régulièrement appelé à se soustraire de la neutralité
pour s’engager dans diverses causes du moment. C’est ce en quoi l’affirmation de Kandinsky
trouve toute sa pertinence : « Toute œuvre d’art est l’enfant de son temps » (Du spirituel
dans l’art, et dans la peinture en particulier). L’art engagé doit se substituer à l’art pour l’art.
L’artiste doit, par ses œuvres, contribuer à l’amélioration de la condition humaine de son
époque. Il doit, à sa manière, participer aux débats concernant les problèmes qui se posent à
son ère culturelle ; dénoncer certains faits quand cela devient nécessaire. C’est dans ce sillage
là que s’inscrit d’ailleurs la Littérature négro-africaine avec le mouvement de la Négritude.
La poésie senghorienne par exemple devient ainsi un outil de revendication au service de
l’identité noire, en exaltant un attachement à sa culture nègre contre le racisme blanc.

En définitive, il convient de retenir que la finalité première de l’art est la recherche du Beau.
Une œuvre d’art est d’abord désintéressée. Elle ne vise rien en particulier sinon que plaire,
attirer les regards ou susciter ce que l’on nomme « émotion esthétique ». Elle est à la base
débarrassée de tout intérêt pratique. Sauf que, si le beau reste la préoccupation fondamentale
de l’art, l’artiste est un créateur. Il n’invente pas pour rien. Il rend sensible ce qui se soustrait
au regard et apparaît autrement. Tout objet d’art est un message qu’il convient toujours de
décrypter. Mieux, c’est un pont entre les vivants et les morts.

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SUJETS DE RÉFLEXION

Sujet 1 : Le mauvais goût existe-t-il ?

Sujet 2 : « L’art ne reproduit pas le visible, il rend visible ». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée

L’art n’apporte plus aux besoins spirituels cette satisfaction que des époques et des nations du
passé y ont cherchée et n’ont trouvée qu’en lui (…) Le degré qu’atteint le développement de
la réflexion dans notre vie actuelle fait que nous avons besoin, du point de vue tant de la
volonté que du jugement, de retenir des perspectives universelles et de soumettre le particulier
à leur régulation, de sorte que les formes, lois, devoirs, droits et maximes universels valent
comme principes déterminants et gouvernent presque tout. Mais en ce qui concerne l’intérêt et
la production artistiques, nous exigeons en général plutôt une vie où l’universel ne soit pas
présent comme loi ou comme maxime, mais agisse de concert avec le cœur et la sensation en
ne faisant qu’un avec eux (…) C’est pourquoi notre époque, en raison de sa condition
générale, n’est pas propice à l’art.

Hegel

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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Leçon 3 : Le Développement. Le Progrès

Du latin progressus, l’action d’avancer, le progrès suggère l’idée d’un changement graduel
qui se fait par amélioration. Il implique le développement comme ensemble des
transformations des connaissances, des structures et des capacités. Aussi, au même titre que le
progrès, le développement constitue le mouvement d’un moins vers un plus. C’est le fait de
progresser ou d’évoluer. Or, il y a dans toute évolution les germes même de son involution.
Avancer, ce n'est pas toujours tendre vers le meilleur. Certains progrès sont source de misère.
Dans cette optique, tout progrès implique-t-il nécessairement un développement?

I. De l’uniformisation du progrès et du développement

A priori, il est difficile de dissocier radicalement le progrès du développement, entendu


comme changement graduel qui va du moins bon au meilleur.

Les notions de progrès et de développement sont consubstantiellement liées. De part et


d’autre transparaît l’idée d’un changement graduel qui suppose une amélioration qualitative et
quantitative. Dans ce sens, le développement peut être perçu comme une résultante du
progrès. Dans son Cours de sociologie positive, Auguste Compte déclare : « le progrès est le
développement de l’ordre ». Dit autrement, tout progrès conduit nécessairement à une
évolution positive des stades de l’humanité. Par exemple, en passant de la machine à vapeur
au train à grande vitesse (TGV), on peut, à juste titre, parler indistinctement de progrès et de
développement sur le plan des transports.

De plus, le développement signifie littéralement l’action de développer, de déployer,


d’accroître. Il est généralement issu du progrès. Tous deux étant une conséquence directe de
la science et de la technique. Mieux, si le progrès engendre le développement, celui-ci
confirme à son tour le progrès. D’ailleurs, un pays est dit développé lorsqu’il affiche un
progrès visible sur tous les plans et dans tous les domaines de la vie sociale. On comprend
aisément les propos de Georges Bernard Shaw lorsqu’il affirme : « Le progrès est
impossible sans changement ». Le progrès et le développement sont le recto et le verso
d’une feuille de papier.

Toutefois, au-delà du caractère indistinct des deux notions, tout progrès aboutit-il au
développement ?

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II. Progrès et développement en question

En réalité, tout progrès ne conduit pas nécessairement au développement.

A la différence du développement qui est souvent positif, le progrès peut être négatif. Le
progrès technique par exemple ne s’accompagne pas toujours du développement moral et
environnemental. Simone Weil le dit : « Plus le niveau de la technique est élevé, plus les
avantages que peuvent apporter des progrès nouveaux diminuent par rapport aux
inconvénients » (Oppression et Liberté). Autrement dit, qualifier de progrès la
transformation graduelle d’une chose ou d’un état de la réalité, ne préjuge pas du sens positif
de la transformation évoquée. C’est le cas des progrès de la pandémie de la Covid-19 au
Gabon pour évoquer la catastrophe sanitaire qui se traduit par plus de trois mille cas de
contaminations.

Par ailleurs, les risques du progrès dans tous les domaines font peser des lourdes menaces sur
le développement durable de l’humanité. Les conséquences des nouvelles technologies sur la
vie sont redoutables. Dans son ouvrage La technique ou l’enjeu du siècle, Jacques Ellul
insiste sur l’aspect négatif du progrès. Pour lui, le progrès technique a produit un monde qui
nie l’homme et la morale. Il est source de déperdition pour l’humanité. Ce qui justifiait déjà
l’amertume de Rousseau dans son Discours sur les sciences et les Arts :« la dépravation est
réelle et nos âmes se sont corrompues à mesure que nos sciences et nos arts se sont
avancés vers la perfection ». En un mot, l’usage du progrès par l’homme est à redouter.

Conclusion

Au terme de notre réflexion, retenons que sans être totalement assimilées, progrès et
développement sont liées. Ils désignent à la base l’action de tendre vers le meilleur.
Cependant, si le progrès est censé libérer l’homme, il a désormais pris une allure démesurée.
Le développement durable de l’humanité est à l’épreuve. Une réorientation du progrès
s’impose. Il faut prendre en compte la dignité humaine et les valeurs morales. C’est à cette
seule fin que le progrès et le développement pourraient conduire au bonheur de l’homme.

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Sujets de réflexion :

Sujet 1 : Faut-il réduire le progrès aux progrès ?

Sujet 2 : « Le développement est un business n’œuvrant pas au progrès de l’humanité ».


Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée

Tandis que l’humanité a fait des progrès constants dans la conquête de la nature et est en droit
d’en attendre de plus grand encore, elle ne peut prétendre à un progrès égal dans la régulation
des affaires humaines et il est, vraisemblable qu’à toutes les époques comme aujourd’hui, bien
des hommes se sont demandés si cette partie des acquisitions de la civilisation mériterait
vraiment d’être défendue. On pourrait croire qu’une régulation nouvelle des relations
humaines serait possible laquelle renonçant à la contrainte et à la répression des instincts,
tarirait les sources du mécontentement qu’inspire la civilisation, de sorte que les hommes,
n’étant plus troublés par des conflits internes, pourraient se donner entièrement à l’acquisition
des ressources naturelles et à la jouissance de celle-ci. Ce serait l’âge d’or, mais il est douteux
qu’un état pareil soit réalisable.

Freud

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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Leçon 4 : La Religion

Du latin religare, c’est-à-dire « lier », la religion désigne un ensemble de croyance et de rites


au moyen desquels les hommes vénèrent Dieu ou un être considéré comme sacré. Elle est
fondée sur la FOI qui est une adhésion, une confiance ferme en une divinité. Aujourd’hui,
La religion apparaît être la source des tensions et des critiques les plus vives. Pourtant, en
dépit de ces controverses, elle ne cesse de se répandre sous diverses formes dans nos sociétés,
au point de susciter la question de sa raison d’être. Dans ce cas, la religion est-elle, pour les
hommes, une nécessité ou une illusion ?

I. La religion : une nécessité pour les hommes.


A. La religion comme réponse aux angoisses existentielles.
La religion entretient l’âme humaine comme une sorte de thérapie à ses inquiétudes de tous
ordres. En effet, l’homme en proie aux soucis de l’existence ne trouve son salut que par
l’expérience religieuse dans laquelle il trouve du repos et la possibilité de compter sur un être
supérieur à lui et sur qui il peut espérer. En cela, David HUME affirme : « tout homme sent, en
quelque façon, la vérité de la religion dans son propre cœur. (…) Quelle ressource aurions-
nous au milieu des maux innombrables de la vie, si la religion ne nous fournissait quelques
moyens expiatoires et ne calmait ces terreurs qui nous troublent et nous tourmentent sans
cesse ? »La vérité de la religion s’impose donc à la conscience humaine qui éprouve la
nécessité de Dieu comme réponse aux angoisses multiples qui la torturent.

B. La religion comme garantie du lien social.

La religion fonde et maintient l’organisation sociale. En effet, elle participe activement à


l’équilibre de la société. Car, elle remplit une fonction sociale d’intégration, de cohésion, de
solidarité de la collectivité. Elle assure la formation morale des individus en leur donnant des
préceptes, en leur dictant des prescriptions, des interdits et des valeurs nécessaires au vivre
ensemble. Et à travers ces préceptes, la religion régule les rapports sociaux et pose les limites
de l’action humaine. Ainsi, dans les sociétés africaines, notamment au Gabon, on voit
comment le mwiri ou le ndjobi, par exemple, veillent à l’équilibre social. C’est sans nul doute
pourquoi Rousseau écrit que : « sitôt que les hommes vivent en société, il leur faut une
religion qui les y maintienne ». Par la formation morale, notamment aux valeurs de justice,

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de pardon, de tolérance, d’amour, etc., la religion permet aux hommes de découvrir le sens de
leur humanité et de vivre ensemble, en confiance.

Il faut reconnaître que la religion comble l’individu en proie à ses angoisses et consolide le
lien social. Toutefois, n’est-elle pas une solution trompeuse ?

II. La religion est souvent perçue comme une solution illusoire


A. La religion comme consolation trompeuse

L’être humain, aux prises avec les angoisses et les vicissitudes de la vie, a recours aux
pratiques religieuses pour être apaisé. La religion semble consoler donc les hommes de leur
misère, en leur faisant espérer un au-delà meilleur. Mais, cette espérance est mise en cause car
elle ne guérirait pas la misère, elle la masquerait simplement comme une drogue qui endort le
malade. C’est ce point de vue que soutient Karl MARX quand il dit que la religion est
« l’opium du peuple ». La croyance en Dieu serait alors une consolation trompeuse, parfois
employée à des fins d’exploitation des masses populaires par les dominants.

B. Le fanatisme religieux comme croyance illusoire.

La pratique religieuse se manifeste parfois sous la forme du fanatisme, de l’intégrisme, du


terrorisme. Le fanatisme est ici une passion aveugle qui pousse à des excès en faveur d’une
religion. Ce phénomène, qui s’accompagne de violence et sous-tend des conflits
interreligieux, est une illusion, une erreur sur la nature et la vocation de la religion. Or, la
religion induit une haute dimension éthique : elle prône la crainte de Dieu et le respect de la
personne humaine, sans quoi elle serait un culte superstitieux ou du fétichisme. La véritable
religion est tolérante. Le fanatisme haineux qui sous-entend l’intolérance à l’égard d’autrui,
dénote le manque de confiance en Dieu, le profond désarroi, le non respect de la dignité
humain. C’est l’utilisation de la religion comme idéologie. Voltaire affirme qu’ «on entend
aujourd’hui par fanatisme une folie religieuse, sombre et cruelle. ». Ainsi, lorsque la religion
vire au fanatisme, elle fait sombrer le croyant dans l’illusion.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 27/50


En définitive, répondant au problème de sa nature nécessaire ou illusoire, retenons que la
religion est une nécessité pour l’homme en ce qu’elle est une réponse à ses angoisses et
concourt à la consolidation du vivre ensemble. Cependant, elle est parfois appréhendée
comme une réponse trompeuse qui donne quelque fois lieu au fanatisme, expression d’une
instrumentalisation de la croyance en Dieu. Pour notre part, nous considérons que la religion
reste une dimension indépassable de l’existence humaine, absolument indispensable pour son
vécu spirituel et social. Et sa pratique doit être éclairée de sagesse afin de préserver
l’humanité de toute barbarie.

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Sujets de réflexion.

Sujet 1 : Peut-on se passer de la religion ?

Sujet 2 : « Si Dieu n’existait pas, tout serait permis ». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude


ordonnée.

Il n’existe qu’une religion (vraie) ; mais il peut exister beaucoup de formes de croyances. - On
peut ajouter que dans les diverses Eglises qui se séparaient les unes des autres à cause de la
diversité de leur genre de croyances, on peut néanmoins rencontrer une seule et même vraie
religion. Il convient donc mieux (et c’est aussi le plus usité) de dire : cet homme est de telle
ou telle confession (juive, musulmane, chrétienne, catholique, luthérienne) que, il appartient à
telle ou telle religion. Ce dernier terme même ne devrait pas équitablement s’employer quand
on s’adresse au grand public (dans les catéchismes et les sermons) ; car pour lui, il est trop
savant et inintelligible ; aussi bien dans les langues modernes n’offrent point de terme qui soit
équivalent à cette expression. Par ce terme l’homme du peuple entend toujours sa foi d’église
qui lui tombe sous les sens, tandis que la religion se cache intérieurement et dépend
d’intention morales ; à la plupart des gens on fait trop d’honneur en disant d’eux : ils
professent telle ou telle religion ; car ils n’en connaissent et n’en demandent aucune ; la foi
d’église statutaire, c’est tout ce qu’ils entendent par ce terme. C’est pourquoi les prétendues
querelles religieuses qui ont souvent ébranlé le monde en l’arrosant de sang, n’ont jamais été
autre chose que des disputes sur la croyance d’église et l’homme opprimé ne se plaignait pas
en réalité parce qu’on l’empêchait de rester attaché à sa religion (ce que ne peut aucune
puissance extérieure) mais parce qu’on ne lui permettait pas de pratiquer publiquement la foi
d’église.

Kant.

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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Leçon 5 : La Tradition
Du latin traditio, tradere, faire passer à un autre, remettre à, la tradition est l’ensemble de
pratiques, de connaissances et de valeurs propres à une communauté humaine transmis de
génération en génération. C’est un héritage du passé qui, a priori, semblerait dépassé au
regard de la modernité. Pourtant, il ne saurait y avoir de présent sans recours au passé, au sens
où la construction effective du présent doit s’articuler autour de son rapport au passé. Dans ce
cas, l’exigence de modernité nécessite-t-elle le rejet de la tradition ? La valorisation de la
tradition n’est-elle pas indispensable à la vitalité des sociétés actuelles ?

I. Les raisons d’un rejet de la tradition.


1. La faiblesse de la tradition face aux exigences actuelles.
Penser la tradition comme faible face aux exigences actuelles d’émancipation et de
développement, c’est reconnaître qu’elle n’a pas force de proposition et d’innovation. Une
telle idée est légitime dans la mesure où la tradition ne peut pas rivaliser avec la culture
moderne en termes de participation à la construction de nos sociétés modernes. Elle se
présente comme une force d’inertie fondée sur des valeurs intangibles. En ce sens, la tradition,
considérée comme sacrée, est réfractaire au changement. Nous pouvons observer que le
recours au fétichisme et aux croyances ancestrales, encore prononcé dans les sociétés
africaines, semble constituer une résistance face au désir de liberté et de progrès qu’impose la
modernité. L’on peut alors comprendre pourquoi Nietzsche, dans Considérations inactuelles,
affirme que la tradition est un danger envers la modernité : « le danger est que toute chose
ancienne et passée (…), finit par être couverte d’un voile uniforme de vulnérabilité, tandis
que (…) ce qui est nouveau et entrain de naître se trouve rejeté et attaqué ». Par conséquent,
l’émancipation passe par la négation de la tradition.

2. Les valeurs sont construites en fonction du temps.


De plus, l’exigence d’adaptation nous montre certaines de nos traditions ont fait leur temps,
sont dépassées et s n’ont plus la capacité d’assumer notre rapport au monde actuel. Les
valeurs d’hier l’ont été en fonction des préoccupations d’hier et celles d’aujourd’hui sont
dictées par les conditions d’existence actuelles. Certaines coutumes, qui étaient valables dans
les sociétés d’hier, sont devenues contestables et rétrogrades. C’est le cas du mariage forcé, de
l’excision, de l’esclavage, etc. Les sociétés d’aujourd’hui, plus ouvertes, se construisent
d’avantage sur l’esprit d’innovation, contre le traditionalisme. Toutes choses qui mènent
souvent au conflit de générations, entre les anciens, plus conservateurs, et ceux qui sont
tournés vers la modernité. C’est tout le sens de la querelle des anciens et des modernes
qu’évoque Seydou Badian KOUYATE, dans Sous l’orage, en posant la nécessité de s’adapter
aux valeurs de son temps.

Certes, il y a des raisons de rejeter la tradition. Cependant, faut-il complètement l’ignorer ?

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II. Pour une valorisation de la tradition.
1. La tradition est un support pour la modernité.
Cette considération se justifie en raison, par le fait que chaque chose a besoin d’une fondation,
c’est-à-dire ce sur quoi elle doit reposer. Dans cet esprit, on ne peut pas envisager un
développement qui s’appuie sur rien : la modernité ne naît pas ex-nihilo, elle a besoin de la
tradition pour se construire. La vie présente a besoin du passé pour s’édifier et entrevoir
l’avenir. En ce sens, Ebénezer Njoh Mouele, dans De la médiocrité à l’excellence, pense que
« Toute modernité suppose une tradition sur laquelle elle doit s’adosser (…) Du passé au
présent, il faut un fil conducteur. »Ainsi, la tradition est un support indispensable à la
modernité.

2. La tradition est à penser comme l’âme d’un peuple.


La tradition fonde l’identité d’un peuple. C’est-à-dire ce qui depuis les origines s’est
constituée et a fait de nous ce que nous sommes et que nous léguons à ceux qui viennent après
nous afin d’assurer la pérennité de notre être au monde. Elle fait donc partie intégrante de
nous-mêmes, elle nous façonne et forge notre être. S’en défaire ou prétendre le faire apparaît
comme une auto amputation. En cela E.Njoh Mouele, dans De la médiocrité à l’excellence,
dit : « il serait désastreux pour un peuple comme pour une personne individuelle de vivre
strictement dans le plus complet oubli du passé ».Nous pouvons donc dire que la tradition,
en tant que fondement de l’identité d’un peuple, mérite d’être valorisée.

Au terme de notre analyse, nous avons montré d’une part qu’il y a des raisons qui fondent le
rejet de la tradition, notamment sa faiblesse face aux exigences actuelles et le fait que la
tradition est fonction du temps. D’autre part, nous avons souligné le fait qu’il serait légitime
de valoriser la tradition car elle constitue non seulement un support pour la modernité, mais
également l’âme d’un peuple. Pour notre part, le présent ne peut être construit sans un rapport
fécond au passé.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 31/50


Sujets de réflexion
Sujet 1 : Peut-on parler de tradition indépassable ?
Sujet 2 : « Il faut veiller à préserver les traditions ».Expliquez et discutez.
Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude
ordonnée.
Le passé subsiste dans le présent en ceci que notre situation présente résulte du passé. Ce que
nous sommes en propre, notre essence, provient de notre passé. Là réside le fondement du fait
que le passé constitue une dimension inéluctable de tout ce qui peut être entrepris dans le
présent. Par-là, il devient la base de tout projet en ce qui constitue précisément le problème à
résoudre, le donné à révolutionner. En outre, c’est seulement avec les moyens que fournit le
présent que l’on peut révolutionner le présent. Par exemple, le processus d’appropriation du
secret de l’autre et la destruction de tout ce qui en nous s’y oppose, nous ne pouvons le mener
à bien qu’en prenant appui sur nous, c’est-à-dire, sur nos ressources humaines, tirées du fond
le plus précieux de notre être, savoir, de notre provenance historique.

Towa.
NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise..

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 32/50


Leçon 6 : Autrui
Du latin alter, « l’autre, celui qui n’est pas le même ». Autrui désigne l’autre c’est-à-dire un
autre qui n’est pas une chose, mais une conscience, un égo. Ce qui fait de lui est un alter égo,
autrement dit, un autre moi. A priori, cette présence constitue un problème pour mon être-au-
monde parce qu’elle m’est hostile et se présente comme un adversaire. Pourtant, il reste tout
de même qu’autrui peut être essentiel pour mon être, ma survie et même mon bonheur Dans
ce cas, quelles regard/jugement peut-on avoir de l’autre ? Est-il nuisible à ma vie, ou bien au
contraire il m’est indispensable ?

I. Autrui : un problème pour mon être-au-monde.


A. L’origine des problèmes.
S’il est convenu en général de relever qu’une existence autarcique, à l’exemple de celle de
Robinson Crusoé est envisageable, celle-ci n’est pas cependant désirable du fait de la
précarité dans laquelle elle met l’individu. Toutefois, la notion de problème vue comme
obstacle, désaccord ou malentendu ne se justifie que par la présence de l’autre. Sans l’autre il
ne peut y avoir la jalousie, l’hypocrisie et autres Tout compte fait, autrui se positionne dans
ma vie comme la source des maux qui me rongent. Ainsi, J.P. Sartre, a eu raison en affirmant
dans Huis Clos que, « l’enfer c’est les autres », stigmatisant ainsi le rôle négatif d’autrui face
à notre existence

B. Autrui à l’épreuve du sentiment de la honte.


L’autre me prive de mon intimité. Sa présence menace mon être au point où elle devient
gênante et violente. Cette violation se donne à voir dans le sentiment de la honte. Si nous
étions seuls au-monde, la honte ne signifierait absolument rien. On n’en ferait même pas
l’expérience. C’est par et à travers autrui que nous nous découvrons honteux et que nous
nourrissons par voie de conséquence toutes sortes de complexes. C’est pour cela que Jean
Paul Sartre dans L’Être et le Néant affirme que « la honte dans sa structure première est
honte devant quelqu’un. ». Or c’est cette honte qui est parfois à l’origine de nos mauvais
agissements comme le fait de ne pas demander pardon, ou le refus d’exercer certains métiers
dits honteux, sans l’être.

Cette peinture négative d’autrui épuise-t-elle l’idée qu’on devrait se faire de lui? Autrui n’est-
il pas aussi nécessaire à notre existence ?

II. Autrui : une nécessité pour mon existence.


A. L’homme n’est rien sans son prochain.
La pensée d’une possible existence sans l’autre peut être envisagée certes, mais elle reste
difficilement réalisable. En effet, autrui apparaît comme une nécessité pour mon existence.
Autrement dit, il est celui sans qui je ne puis exister. Cela est fondé en raison dans la mesure
où on ne vient au monde qu’à partir d’autrui (le père et la mère). Bien plus, il est l’aide qui me
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 33/50
permet de supporter l’existence. C’est pourquoi Seydou Badian affirme que « L’homme n’est
rien sans les hommes, Il vient dans leur main et s’en va dans leur main ».Sous l’orage. Cela
montre à suffisance la nécessité de l’autre dans notre vie.

B. Autrui le médiateur entre moi et moi-même.


L’autre apparaît comme mon miroir et une aide importante à la construction de ma
personnalité. C’est celui à qui je me réfère dans le but de me comprendre : il devient le
médiateur indispensable entre le moi et la connaissance de moi. C’est la condition du vrai. Je
me réfère à lui pour savoir ce que je suis et ce que je peux être. C’est la raison pour laquelle
Jean Paul Sartre écrit dans L’existentialisme est un humanisme que « L’autre est
indispensable à mon existence, aussi bien d’ailleurs qu’à la connaissance que j’ai de moi ».Il
est donc difficile d’envisager une existence sans autrui.

Finalement autrui est donc d’une part une source de problèmes pour notre être. C’est l’auteur
des conflits et de la violation de mon intimité. D’autre part, il peut s’avérer socialement
indispensable. C’est lui qui m’aide à supporter l’existence, c’est mon miroir. Pour notre part
autrui n’est pas qu’un figurant mais une présence essentielle et nécessaire.

Sujets de réflexion.

Sujet 1 : Peut-on se passer de l’autre?

Sujet 2 : « Nous sommes seuls, sans excuses » Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte en procédant à son étude ordonnée.

Apprendre à se connaître est très difficile (…) et un très grand plaisir en même temps (quel
plaisir !) : mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes :
ce qui le prouve, ce sont les reproches que nous adressons à d’autres, sans nous rendre compte
que nous commettons les mêmes erreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d’entre
nous, par l’indulgence et (…) qui nous empêchent de juger correctement. Par conséquent, à la
façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons apprendre à nous connaître,
c’est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu’un
ami est un autre soi-même. Concluons : la connaissance de soi est un plaisir qui n’est pas
possible sans la présence de quelqu’un d’autre qui soit notre ami ; l’homme qui se suffit à soi-
même aurait donc besoin d’amitié pour apprendre à se connaître soi-même.

Aristote

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 34/50


Leçon 7 : L’Ethnie. La Nation
Du grec « Ethnickos », le terme ethnie renvoie à la race, l’origine, le peuple. C’est un groupe
humain possédant un héritage socioculturel commun. En clair, l’ethnie désigne un groupe
culturel et biologique, ayant en commun les us et coutumes, les rites, les traditions, l’histoire
et parlant une même langue. Le terme nation quant à lui, vient du latin « Nascio », qui signifie
naître ou, « Natio » qui désigne les petits d’une même patrie, d’un même « père ». La nation
laisse ainsi entrevoir l’idée d’un groupe humain ayant une origine commune. C’est un
ensemble d’individus vivant sur un même territoire et lié par la conscience d’une histoire,
d’une culture, de la tradition, parfois d’une langue et surtout d’une entité politique communes.
Si ces deux notions semblent intimement liées, le constat fait dans certains Etats, est que l’on
parle de plus en plus des nations au détriment des ethnies comme si les deux notions
s’excluaient mutuellement. A croire que dans une nation les ethnies n’ont plus leurs places.
Se pose alors l’interrogation suivante : l’édification d’une nation conduit-elle à la suppression
systématique des ethnies ? La diversité ethnique n’est-elle pas un atout pour construire une
nation ?

I- Les ethnies comme obstacle à l’édification d’une nation


La pluralité ethnique au sein d’un pays nation peut mettre en péril le vivre ensemble et
l’édification de la nation, à cause du tribalisme et de l’ethnocentrisme. La logique de la
pensée allemande, ne distingue pas rigoureusement ces deux notions. Pour la philosophie
allemande, l’ethnie et la nation renvoient simplement à la race. Le philosophe Johann
Gottlieb Fichte au XIXème siècle montre que les membres d’une nation doivent avoir en
commun des caractéristiques telles que la langue, la religion, la culture, l’histoire, et même les
origines ethniques communes. Ils doivent donc appartenir à la même ethnie. Or, sous l’angle
français, notamment avec Ernest Renan, cette vision semble réductionniste. Il ne faut pas
confondre la nation et l’ethnie. La nation est en réalité la volonté d’un « vivre-ensemble » des
enfants d’un même pays, quelques soient leurs origines culturelles. Elle doit de ce fait
découler d’un acte d’autodétermination animé par la conscience politique conçue comme une
vision politique à laquelle on adhère, et qui constitue le cadre de référence privilégié dans
lequel des décisions les plus significatives, les choix les plus décisifs s’opèrent. C’est
justement ici le nœud de notre préoccupation, celle de la difficulté de la cohésion des
différences culturelles. Comment en Afrique par exemple, les Etats peuvent-ils parvenir à
une fédération de toutes les ethnies pour parvenir à une nation durable sans discrimination ?
En effet, toute la difficulté réside dans la pluralité ethnique. S’il faut ériger une langue
commune, une religion, etc., quels critères objectifs devraient être mis en jeu pour y
parvenir ? En l’absence des tels critères, ces Etats courent ainsi le risque de tomber dans
l’exclusion et la stigmatisation interethniques que provoque l’ethnocentrisme.
L’ethnocentrisme est cette tendance à ériger l’ethnie ou la culture dont on est issu comme
modèle de référence, et à juger l’autre, le différent, à l’aune de ses propres référents culturels.
C’est en ce sens que l’anthropologue, Claude Lévi-Strauss, dans L’ethnocentrisme ou le
paradoxe du relativisme culturel, écrit : « L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du
groupe linguistique, parfois même du village ». Comme quoi, à cause du tribalisme, la

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 35/50


pluralité des ethnies et des communautés peut rendre difficile la cohabitation pacifique et
fragiliser l’édifice de la nation.

De plus, un autre écueil qui fait des ethnies un obstacle à l’édification de la nation, c’est
l’instrumentalisation du fait ethnique par le politique. Toutes choses qui sont souvent
source du repli identitaire. L’instrumentalisation et l’exacerbation du fait ethnique sont,
dans les sociétés africaines actuelles, l’œuvre de politiciens qui, en mal de popularité,
recherchent des assises et des bases électoralistes, incapables d’asseoir et respecter les
principes démocratiques : l’ethnie devient alors un fond de commerce électoraliste. Vu ainsi,
l’ethnisme est un comportement anti démocratique qui pose un problème moral, d’équité ou
de justice sociale, car il conduit à la discrimination, au repli identitaire. Le repli identitaire
est l’attitude qui consiste, dans une situation de crise notamment, à se retourner vers les
«siens », sa famille ou sa communauté, pour y trouver refuge, protection et affection. Les
leaders politiques exploitent cette fibre affective de l’ethnisme pour asseoir leur puissance
hégémonique. En cela le tribalisme ruine les efforts de construction de l’unité nationale. Car,
comme l’a affirmé Boutros Boutros-Ghali: «Si chacun des groupes ethniques, religieux ou
linguistiques prétendait au statut d'Etat, la fragmentation n'aurait plus de limite et la paix, la
sécurité et le progrès économique pour tous deviendrait toujours plus difficile à assurer.»
(Extrait de l’Agenda pour la paix, 1992). Nous pouvons le constater dans l’histoire du 3e
Reich, la propension à l’exaltation de la germanité a fait l’objet d’une exploitation
idéologique qui a mené au génocide ou à l’holocauste juif, à la Shoa. De même,
l’instrumentalisation le l’ethnisme au Rwanda a conduit au génocide tutsi.

La diversité ethnique s’accompagne parfois de certains vices tels que l’ethnocentrisme, le


tribalisme, la xénophobie, le repli identitaire, etc. Ces vices font des ethnies un obstacle à la
construction de la nation. Cependant, les ethnies ne sont-elles pas une richesse pour les
nations ?

II- L’ethnie comme atout à la cohésion et à la consolidation d’une nation


Les enfants d’un même pays peuvent bien vivre ensemble, dans une cohabitation
pacifique s’ils ont la volonté de construire une nation solidaire. Il est difficile, voire
impossible d’observer dans le monde un Etat sans ethnies ou communautés. La cohabitation
de ces ethnies peut conduire à l’édification d’une nation, c’est-à-dire à un peuple uni, fort et
indivisible. Un peuple qui conduira des hommes et des femmes à un dépassement de tout
particularisme au nom de l’intérêt commun. C’est pourquoi il faut préciser, que la nation est
un idéal, car elle ne relève pas de l’être, mais du vouloir être. Pour Ernest Renan, dans
Qu’est-ce que la nation ?, « Une nation est une âme, un principe spirituel (…), c’est
l’aboutissement d’un long passé d’efforts, de sacrifices et de dévouements ; avoir des gloires
communes dans le passé, une volonté commune dans le présent, avoir fait des grandes choses
ensemble, vouloir en faire encore, voilà les questions essentielles pour être un peuple ». Ici,
nous comprenons que pour parvenir à une nation, il faut une volonté de dépassement de soi,
une rupture avec l’égoïsme en vue de l’intégration nationale. C’est un défi politique qui
permet aux peuples de réaliser ce projet sans cesse à consolider Il convient pour cela
d’élaborer un projet politique fort qui prend en compte tous les citoyens, sans distinction
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 36/50
ethnique ou de sexe. Partir sur le fait que nous appartenons à un même territoire et qu’il nous
revient ensemble de le transformer de sorte que chacun y trouve son bonheur. Le
développement de l’Etat dépend de toutes les forces vives des peuples qui le composent. Des
discours ou slogans de rassemblement doivent être élaborés, comme ce fut le cas au Gabon
avec « Gabon d’abord » ou « Unité Nationale » dont la finalité est d’inviter les uns et les
autres à transcender leur appartenance ethnique pour privilégier la nation. Dans un tel
contexte, chaque ethnie est appelée à faire valoir son savoir et son savoir-faire. C’est ce
brassage qui conduira à la mise en place d’une confiance mutuelle, de l’acceptation de l’autre
dans sa différence, d’un partage des compétences, d’une culture et d’un désir du vivre-
ensemble.

Dans le même sens, la cohabitation ethnie/nation est possible car l’identité des peuples et
des nations se construit au fil des expériences vécues. Le fait ethnique est fondateur d’une
identité inéluctable. Seulement, considérer l’identité comme une substance fixe, achevée,
reviendrait à en faire un donné figé, résolument tourné vers le passé. Ce passéisme
«archaïsant » contraste avec la vocation de l’humain au changement permanent. L’homme,
disait Sartre, n’est pas une essence a priori, c’est un être de projet, un être toujours en projet,
un projet d’être, une liberté en situation ; l’homme n’est que ce qu’il se fait : «l’existence
précède l’essence ». L’identité est donc toujours à (re)construire et rien ne condamnerait
l’humain à se figer et à ressasser un passé dont il serait irrémédiablement nostalgique. Alain
Finkielkraut note, dans cet esprit, qu’«Il y a en l’homme un pouvoir de rupture : il peut
s’arracher à son contexte, s’évader de la sphère nationale, parler, penser et créer sans
témoigner aussitôt de la totalité dont il émane ». Vue ainsi, l’environnement sociétal, de façon
générale, impacte sur le vécu, sur l’être social de chaque individu. En ce sens, l’identité se
façonne progressivement avec les autres, parmi les autres, grâce aux expériences partagées : à
l’école, au travail, dans la vie de tous les jours, dans les joies comme dans les peines, par le
partage d’une langue commune, par l’interculturalité, etc. Et lors de tous ces instants de vie
partagée, la donne ethnique n’est pas primordiale. D’autres repères cimentent nos relations.
Toutes choses qui créent une affectivité nouvelle sur la base de laquelle le vivre ensemble
s’enracine. Par conséquent, une autre expérience partagée, une autre vision de l’avenir
peuvent légitimement fonder une nation, au-delà des référents ethniques. Par conséquent, les
communautés doivent transcender les réflex identitaires afin de s’accepter, ce d’autant plus
qu’elles doivent faire face à des défis plus grands comme celui de la mondialisation. C’est
peut-être en ce sens qu’Ebénézer Njoh-Mouelle dit : « En vue de l’organisation du mieux-être
de l’homme, le cadre du clan et de la tribu est aujourd’hui dépassé ».

En somme, Ethnie et Nation sont deux notions intimement liées. Si l’ethnie constitue d’une
part un obstacle à l’édification d’une nation à cause du la promotion ou la valorisation d’une
ethnie au détriment des autres, entraînant ainsi l’exclusion, la marginalisation ou le tribalisme,
d’autre part elle joue un rôle fondamental dans la construction d’une nation à travers son
savoir, son savoir-faire et savoir-être. L’ethnie est une richesse pour la nation. Reste alors à la
puissance institutionnelle, à l’Etat d’instaurer les conditions d’une nation pérenne ouverte sur
le monde et respectueuses de ses racines multiculturelles. C’est dans cet esprit que l’Etat
réaliserait la coexistence pacifique entre ethnies et nation supra-ethnique.
Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 37/50
EXERCICES D’APPLICATION

Sujet 1 : L’appartenance à une ethnie doit-elle conduire à l’acceptation des valeurs issues de
ce groupe ?

Sujet 2 : « Je suis ce que mon ethnie a fait de moi ». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée.

L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village ;
à tel point qu’un grand nombre de population dites primitives se désignent elles-mêmes d’un
nom qui signifie les « hommes (ou parfois - dirons-nous avec plus de discrétion – les « bons »
les « excellents » les « complets », implique ainsi que les autres tribus, groupes ou villages ne
participent pas des vertus ou même de la nature humaine, mais qu’ils seront tout au plus
composé de « mauvais », de « méchants », de « singes de terre » ou « d’œufs de pou ». On va
souvent jusqu’à priver l’étranger de ce dernier degré de réalité en en faisant un « fantôme »
ou une « apparition ». Ainsi se réalise une curieuse situation où deux interlocuteurs se
donnent cruellement la réplique. Dans les grandes Antilles, quelques années après la
découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquêtes
pour rechercher si les indigènes avaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à
immerger des blancs prisonniers, afin de vérifier, par une surveillance surveillée, si leur
cadavre était ou non sujet à la putréfaction (…). En refusant l’humanité à ceux qui
apparaissent comme les plus « sauvages » ou « barbares » de ses représentants, on ne fait que
leur emprunter une de leurs attitudes typiques. Le barbare, c’est d’abord l’homme qui croit à
la barbarie.

C. L. STRAUSS.

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 38/50


Leçon 8 : Les Passions
Du latin « pati », « supporter », « endurer », la passion semble suggérer un état subi par le
sujet. Elle désigne un attachement durable à une chose ou à un être. C’est le développement
monstrueux d’un sentiment au détriment des autres. Le passionné nourrit des chimères en
faisant une sorte de fixation sur l’objet désiré, oubliant parfois ses propres limites. Comme
telle, la passion est vue sous l’angle d’une déstabilisation de l’équilibre du sujet. Pourtant, ce
fait d’être préoccupé par une seule idée, loin d’être toujours un torrent dévastateur, peut
féconder le progrès. Éduquée, la passion conduit l’homme à des grandes choses. Elle lui
procure la force nécessaire de braver l’interdit, explorer des horizons nouveaux. Aussi, les
passions sont-elles, en toutes occasions, un mal ? Ne constituent-elles pas une source
incontestable pour l’avancement du monde ?

I. LE REJET DE LA PASSION
De par sa nature excessive, la passion apparait d’emblée comme mal. En effet, elle est un
sentiment devenu tyrannique, exclusif. Elle devient ainsi une sorte de polarisation du
psychisme sur un seul objet au détriment du reste. Dans ce sens, le passionné est aveuglé par
l’objet de sa passion. A ses yeux, une seule chose compte tandis que tout le reste est dévalué.
Dans cette optique, la passion fausse l’exercice normal du jugement. Comprise ainsi, elle
apparaît s’apparente à une malédiction. Elle est tellement nocive que « les sages de tous les
temps ont déconseillé cette voie avec tant d’insistance » pour reprendre Freud dans Malaise
de la civilisation. Chez les stoïciens par exemple, il faut s’en défier si l’on veut atteindre la
sereine impassibilité qui conduit au bonheur. L’homme doit par conséquent apprendre à se
détourner des passions s’il veut être heureux.
De plus, la passion est une affection de l’âme. Son état implique à la fois un enrichissement et
un dessèchement de l’affectivité. Au point où l’objet de la passion devient la source des
émotions les plus vives. Elle apparait alors comme une véritable maladie qui trouble l’âme et
réduit l’homme à l’esclavage. On comprend donc Kant lorsqu’il écrit : « la passion est une
maladie qui exècre toute médication » (Anthropologie du point de vue pragmatique). Elle
est si incurable qu’il ne faudrait même pas y penser. La passion obnubile l’intelligence et
annihile son pouvoir. Le passionné apprécie faussement la situation. Il commence d’abord par
conclure et raisonne ensuite seulement afin de se justifier. C’est ce que Ribot appelait « la
logique passionnelle », une forme de paralogisme c’est-à-dire un faux raisonnement. Dans
sa subjectivité, le passionné aperçoit le monde entier à travers son délire. Il ne raisonne plus.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 39/50


On conclut que les passions défient la raison. Mais, cela suffit-il largement pour discréditer
les passions ?

II. LA VALORISATION DES PASSIONS


Certes, la passion engendre la mal assurance et le danger. Toutefois, elle demeure cette force
vitale dont l’homme a besoin pour se réaliser. Loin d’être toujours force destructrice, la
passion est cette énergie qui conduit l’homme au surpassement. Elle est ce par quoi la vie
prend un sens nouveau. Aussi, elle rompt avec la monotonie de la vie quotidienne, donne du
prix à l’existence, soulève l’âme et lui inspire de vastes projets. Dans cette perspective, on ne
peut que donner raison à Nietzsche : « Attaquer les passions à la racine, c’est attaquer la
vie à la racine » (Crépuscule des idoles).Pour lui, on ne saurait vivre et ruiner les passions.
C’est par elles que nous sommes. Ce sont elles qui nous font réellement exister, au-delà d’une
simple présence au monde. Le dynamisme qu’elles incarnent permet à l’homme de se
mouvoir et d’affronter la vie telle quelle. Ce sont les faibles qui fuient le danger et cherchent
un appui dans Dieu et dans la religion.
Par ailleurs, les passions sont sources de progrès et de développement. Elles sont cette énergie
puissante en nous. Elles nous fournissent les mobiles les plus puissants de nos œuvres. Vues
sous cet angle, elles conduisent l’homme à faire l’histoire et à marquer d’une empreinte
indélébile son temps et son existence. C’est ce qui ressort de cette citation de Hegel devenue
célèbre : « Rien de grand ne s’est accompli dans le monde sans passion »(La Raison dans
l’histoire). Aucune réalisation humaine efficiente et efficace n’a été rendue possible en faisant
abstraction de la présence de la déraison dans la raison. La passion réveille les élans les plus
profonds de notre être. Elle n’est pas en soi mauvaise. Elle le devient. C’est dans ce sens qu’il
faut comprendre Hume lorsqu’il écrit : « Ce n’est pas la passion qui est déraisonnable,
c’est le jugement » (Traité de la nature humaine). C’est ce que nous disons d’elle qui la
rend malheureuse et non le contraire.

Les passions, dans ce qu’elles sont fondamentalement à savoir une souffrance, ne sauraient
être appréciées au cœur de l’humanité. Car, l’âme se retrouve à chaque fois troublée au point
de manquer d’Ataraxie. Idem pour le corps qui n’incarne plus l’Aponie. La pensée devient
complètement engluée dans une absence presque totale de tact. Elle ne sait plus juger
objectivement. Une femme médiocre, par exemple, paraîtra sublime voire divine à celui qui
en est passionnément amoureux. Le bon sens est atrophié. C’est peut-être pour cette raison
que Fourrier affirme : « la passion conduit (…) l’homme à sa perte » (Le Nouveau monde
industriel et sociétaire). Une mort lente et progressive, mais certaine. Cependant, on ne peut

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 40/50


pas passionnément nier les bienfaits de la passion. Elle revêt une dimension subjective de la
personne qui amène les hommes à la réussite. La vie n’a de sens, que parce que la passion est,
pour emprunter l’expression de Hegel, « le moteur de l’Histoire ». C’est ce qui met le
monde en marche.

SUJETS DE RÉFLEXION

Sujet 1 :Faut-il renoncer aux passions ?

Sujet 2 :« La plus grande jouissance dans la vie consiste à vivre dangereusement ». Expliquez
et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée

Quoi qu’en disent les moralistes, l’entendement humain doit beaucoup aux passions, qui, d’un
commun aveu, lui doivent beaucoup aussi. C’est par leur activité que notre raison se
perfectionne ; nous ne cherchons à connaître que parce que nous désirons jouir ; et il n’est pas
possible de concevoir pourquoi celui qui n’aurait ni désirs ni craintes se donnerait la peine de
raisonner. Les passions, à leur tour, tirent leur origine de nos besoins et leur progrès de nos
connaissances. Car on ne peut désirer ou craindre les choses que sur les idées qu’on en peut
avoir, ou par la simple impulsion de la nature ; et l’homme sauvage, privé de toute sorte de
lumière, n’éprouve que les passions de cette dernière espèce. Ses désirs ne passent pas ses
besoins physiques, les seuls qu’il connaisse dans l’univers sont la nourriture, une femelle et le
repos ; les seuls maux qu’il craigne sont la douleur et la faim.

Rousseau

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

Progression Nationale de Philosophie Baccalauréat 2020 41/50


Leçon 9 : L’Etat. La Liberté.
L’Etat désigne un ensemble d’institutions qui organisent une société sur un territoire donné.
La notion de liberté, quoique polysémique, renvoie surtout à l’obéissance à la loi. L’État se
donne alors pour mission essentielle : promouvoir la liberté du citoyen. Sauf que la liberté
suggère aussi l’idée d’une absence totale de contrainte. Elle désigne à l’origine la situation
d’un homme qui n’est pas esclave et qui agit indépendamment de toute obligation extérieure à
sa volonté. Finalement, l’Etat est-il garant ou plutôt un obstacle à l’expression de la liberté des
individus ?

I. L’État : un instrument au service de la liberté


Fondamentalement, l’Etat apparaît comme le garant de la liberté politique et morale.

En tant qu’« animal politique » au sens où l’entend Aristote, l’homme ne saurait se prévaloir
d’une liberté illimitée ou d’une quelconque indépendance. Ainsi, en lieu et place de la liberté
naturelle (où chacun fait ce qu’il veut), l’Etat crée la liberté civile étroitement liée à
l’obéissance aux lois. Rousseau le souligne avec pertinence : « Il n’y a pas de liberté sans
loi » (Du contrat social). Dans un Etat démocratique par exemple, où à travers la loi
s’exprime la volonté générale, l’obéissance ne menace pas la liberté. Bien au contraire, c’est
en obéissant aux lois établies par l’Etat que nous exprimons notre liberté.

De plus, la liberté fait partie intégrante des biens que défend un Etat de droit. Dans cette
perspective, elle est une condition sine qua non au fonctionnement d’un Etat juste et
équitable. L’une des missions régaliennes d’un Etat est d’ailleurs de s’appliquer à sauvegarder
la liberté. Spinoza l’a compris mieux que nous : « La fin de l’Etat est en réalité la liberté »
(Éthique). Autrement dit, l’Etat favorise l’expression de la liberté sans laquelle il serait
difficile d’envisager toute forme d’épanouissement. En clair, la liberté qui s’accompagne de
responsabilité et d’autonomie reste une émanation de l’Etat.

Mais, si l’Etat est garant de la liberté politique et morale, ne peut-il pas aussi constituer l’être
qui la limite, parfois ?

II. L’Etat comme une éventuelle entrave à l’expression de la liberté


Dans une certaine mesure, l’Etat peut être une entrave à l’expression de la liberté.

A priori, il est possible de soutenir que la présence de l’Etat ruine toute possibilité d’une
liberté absolue chez l’homme. En effet, dans ses traditionnelles missions, pour sauvegarder la
paix et l’ordre social, l’Etat s’accorde moins à la liberté naturelle et à la licence. À ce sujet,
Bakounine est catégorique : « l’Etat est un vaste cimetière où viennent s’enterrer les
libertés individuelles » (Étatisme et anarchie).En d’autres termes, l’Etat ne permet pas
toujours aux individus d’agir selon leur propre volonté. Par exemple, en dépit de la légitimité
du droit de grève reconnu, l’État se réserve aussi le droit de s’y opposer au moyen de la force.

En outre, l’Etat se donne souvent à voir tel un instrument d’assujettissement et de limitation


des libertés individuelles. Dans cette optique, les forces dites de l’ordre (Police, Armée, etc…)
incarnent cette violence d’Etat dont la vocation serait d’assigner des bornes aux libertés
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fondamentales des citoyens. D’où, semble-t-il, la pertinence des propos de Max Stirner :« le
but de l’Etat est de borner, lier, subordonner puis assujettir l’individu » (L’Unique et la
propriété). En clair, le rôle de l’Etat serait de fixer de façon impérative les normes de la vie
publique auxquelles tous les citoyens doivent s’astreindre qu’ils le veuillent ou non.

En somme, retenons que si la liberté désigne à la base l’action de faire tout ce que l’on veut ;
une telle liberté ne protège personne. Elle ouvre la voie à l’anarchie et à l’insécurité. C’est
pourquoi l’Etat s’oppose à la licence et à la liberté naturelle en inculquant la liberté civile,
plus responsable. Une liberté authentique se décline toujours en obéissance à la loi. Car,
comme l’affirme Montesquieu : « la liberté est le droit de faire tout ce que les lois
permettent » (De l’esprit des lois). En un mot, l’Etat ne constitue pas véritablement une
entrave à la liberté humaine. À l’opposé, il faut plutôt y voir le garant des libertés
fondamentales.

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Sujets de réflexion :
Sujet 1 :Être libre, est-ce faire tout ce que l’on veut ?
Sujet 2 :« Le but de l’Etat est de borner, lier, subordonner puis assujettir l’individu ».
Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée

1) Rien ne paraît plus surprenant à ceux qui observent les affaires humaines d’un œil
philosophique que la facilité avec laquelle le plus grand nombre est gouverné par le petit, et la
soumission tacite avec laquelle les hommes sacrifient leurs propres sentiments et leurs propres
passions à celles de leurs chefs. Si on cherche comment de tels prodiges s’accomplissent, on
trouve que puisque la force est toujours du côté des gouvernés, les gouvernants ne peuvent
s’appuyer sur rien d’autre que l’opinion. C’est donc sur l’opinion seule que se fonde le
gouvernement. Une telle maxime s’applique tant aux gouvernements les plus despotiques et
les plus militaires qu’aux gouvernements les plus libres et les plus populaires. Le plus sultan
égyptien ou l’empereur romain peut certes traiter ses inoffensifs sujets comme des bêtes
féroces, contre leurs sentiments et leurs inclinations : l’un doit néanmoins avoir mené ses
mameluks1, l’autre sa garde prétorienne2, comme des hommes, c’est-à-dire par leur opinion.

Hume

2) La liberté, en effet, ne saurait être un luxe, un couronnement pour l’action de l’homme ;


elle est tout entière dans l’action qu’elle inspire, engagée dans une histoire à rebondissements
multiples. La vouloir rassemblée à un moment quelconque, c’est vouloir identiquement la fin
de l’histoire mais aussi la fin de cette même liberté. Il n’y a pas de liberté qu’on puisse gagner
définitivement, et la vraie liberté, selon nous, n’est pas à escompter à un terminus quelconque,
la vraie liberté s’éprouve et se prouve dans l’action libératrice, concrète. Et l’on passe d’une
action libératrice à une autre action libératrice, indéfiniment, sans qu’on puisse prétendre, à
aucun moment, avoir résolu toutes les aliénations ni satisfait à toutes nos aspirations qui sont
toujours des incitations à créer, toutes les insatisfactions provenant des besoins et idéaux non
comblés. En un sens donc, Spinoza a raison de présenter la liberté comme une conquête ;
mais, parce que l’histoire et le devoir sont évacués de son système, cette conquête est chez lui
entièrement assumée par la raison, intellectuellement, sans le moindre impact direct sur
l’empirie ; ayant posé que l’ordre et la connexion des idées correspondent à l’ordre et à la
connexion des choses, il en déduit aisément qu’il n’est pas nécessaire d’agir sur les choses
pour se les soumettre car il suffit de bien ordonner les idées pour parvenir au même résultat.
Ce que nous estimons insuffisant pour notre part.

Njoh Mouelle

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

1
Soldats esclaves des égyptiennes et gardes du sultan.
2
Garde personnelle des empereurs romains
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Leçon 10 : La Violence
Le terme violence vient du latin « vis » qui veut dire force. Elle désigne le fait de soumettre
quelqu’un ou un groupe de personnes, de s’attaquer à son intégrité, d’exercer une pression
contre sa volonté, par le recours à la force. Elle apparait alors comme nocive et présente dans
la quasi-totalité des domaines de la vie humaine de façon physique ou verbale. Toutefois,
l’expérience humaine en société nous montre que sans la violence aucune organisation,
aucune discipline n’est possible. L’homme doit parfois être violenté pour obéir Elle est de ce
fait utile aux hommes. Au regard de cette réalité ambivalente, il nous revient de nous
interroger sur la légitimité de son usage. En d’autres termes, dans quelles mesures doit-on
user de la violence ? Aussi, dans une société organisée, doit-on toujours légitimer certaines
violences?

I- Conditions de légitimité de l’usage de la violence

Si pour une certaine conception de la philosophie la violence est innée en l’homme parce
qu’il naît méchant, violent, égoïste, il faut néanmoins noter que dans les sociétés modernes,
l’homme n’est pas en droit d’user de la celle-ci comme bon lui semble. En effet, l’une des
raisons d’être de l’Etat, est la sécurité des citoyens. Il s’agit de les sécuriser contre les
violences faites par certains citoyens sur d’autres. Ainsi, par le biais des lois, l’Etat contraint
les individus à retenir leurs forces, leurs agressivités et autres tendances de domination pour
éviter toute peine ou sanction. Car en l’absence de la loi, les hommes sont totalement livrés à
la violence. Thomas Hobbes, dans le Léviathan, décrit ce climat en termes de « guerre de tous
contre tous ». Et le seul moyen pour mettre fin à cette violence naturelle généralisée, c’est
l’instauration de l’autorité de l’Etat par le strict respect de la loi. L’Etat peut donc, dans
certaines conditions, user de la violence pour le bien commun. Ce qui revient directement à
dire que seul l’Etat, en tant qu’autorité politique, a le droit d’user de la violence. Il utilise ainsi
la loi qui apparaît elle-même comme une forme de violence qui s’exerce sur les individus,
mais une violence dite légitime, parce qu’elle garantit la sécurité des hommes et des biens.
Aussi, l’Etat est en droit de se servir des forces de l’ordre (l’armée) pour restaurer la paix, la
tranquillité au sein de la société en cas de troubles ou perturbations majeurs causés par un
individu ou un groupe d’individus. De façon claire, lors d’une manifestation si les citoyens
troublent l’ordre public (exemple: barrer les routes, casser des infrastructures ou porter
atteinte à la dignité des autres citoyens…), l’Etat peut/doit riposter par la force. Ici, il s’agit
de la violence On peut donc considérer cette violence comme étant légitime.

Sur le plan religieux, la violence est nécessaire au croyant s’il veut évoluer
spirituellement. En effet, considérée comme une de violence physique, la pratique consistant à
se priver de nourriture est courante dans plusieurs religions. Elle est appelée jeûne ou carême.
Elle consiste à subir, à résister, à faire souffrir le corps en se privant volontairement
d’aliments. C’est une violence exercée sur soi dont la finalité est la paix de l’âme, l’élévation,
la maitrise de soi. En se mortifiant le corps volontairement, cette pratique apparait donc
comme une solution aux perturbations que peut avoir un individu dans son existence. Cette
forme de violence sur soi peut aider à régler certains dérèglements psychologiques dont

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souffrent certains et préserver la société de certains vices. De ce fait, elle est salutaire et
bénéfique, d’où sa nécessité et sa légitimité pour le croyant.

. L’usage de la force par l’autorité est considéré comme légitime parce que l’homme, pris
individuellement, est considéré comme un être méchant. Ainsi, dans son livre, Le Prince,
Nicolas Machiavel montre que l’homme est naturellement égoïste, versatile et incapable de
bonté. Chaque individu poursuit son intérêt au point où la stabilité de la société se trouvera
menacée. La violence devient dans ces conditions tout à fait légitime pour restaurer l’ordre et
faire taire les menaces sociales. Le prince doit faire usage de la force s’il veut maintenir la
paix et se pérenniser au pouvoir. Il affirme que : « La violence politique est nécessaire car les
hommes sont méchants ». De ce fait, la torture, le crime, l’emprisonnement, la pendaison
servent d’exemples à ceux qui voudraient ébranler l’ordre établi. La violence est donc un
moyen légitime et nécessaire au prince.

Si, dans les sociétés organisées et à travers la religion, la violence est justifiée et légitime,
il n’en demeure pas moins qu’on observe parfois des abus, des violences intolérables et à
proscrire.

II. La condamnation de certaines violences

Dans les sociétés organisées où l’individu a des droits et des devoirs, la violence ne
saurait être érigée en norme. Chaque citoyen a le devoir de taire ses penchants bestiaux et tout
ce qui relève de l’instinct animal, pour s’arrimer au projet civilisationnel commun où règnent
la sécurité et la paix. Exercer la violence serait donc ici manifester sa nature animale. C’est
pour cela qu’il faut punir, réprimer les violents qui tentent de troubler l’ordre établi, pour le
bien commun. C’est en ce sens que Ernest Renan affirme : « ce qui est désordre, violence,
attentat au droit d’autrui, doit être réprimé sans pitié ». (Sartre « la violence, sous quelque
forme qu’elle se manifeste, est un échec ») En effet, l’homme étant condamné à vivre avec ses
semblables se doit de bannir ses comportements violents pour sa propre sécurité et celle des
autres. Ainsi, parce qu’il faut préserver la paix civile, la violence n’est pas à encourager dans
l’état social.

Le combat contre la violence a, dans l’histoire, été symbolisé par le mouvement de la non-
violence. Il s’est agi de privilégier d’autres valeurs comme la tolérance, la bienveillance et
l’amour du prochain au détriment de la violence. Aucune violence n’est ici justifiable.
L’humain étant fait de valeurs nobles et humanistes, il n’est plus question de recourir à la
violence pour régler un quelconque problème. C’est en ce sens qu’il faut entendre le mot de
GHANDI, lorsqu’il affirme « la non-violence est la loi de notre espèce comme la violence est
la loi de la brute». (Gandhi : « l’humanité court à sa perte si le monde n’adopte pas la non-
violence » La violence n’est donc pas une solution. Bien au contraire, elle détruit l’homme et
de ce fait est condamnable.

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La notion de la violence nous a permis réfléchir sur les conditions de son usage légitime. Pour
cela, nous avons vu d’une part que dans une société organisée, comme dans le cadre religieux
la violence pouvait s’avérer légitime. D’autre part, nous avons examiné certaines violences et
montré qu’elles ne contribuaient nullement à l’équilibre individuel et collectif, et de ce fait,
elles étaient condamnables. Il faut dire que la violence n’est pas en soi bonne ou mauvaise.
Cela dépend des finalités poursuivies : si elles sont nobles, la violence sera aussi noble, si
elles sont par contre mesquines, il faudra alors la condamner.

EXERCICES D’APPLICATION

Sujet 1 : Doit-on combattre la force par la force ?

Sujet 2 : « La violence est injuste d’où qu’elle vienne ». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée.

C’est pourquoi toutes les conséquences d’un temps de guerre où chacun est l’ennemi
de chacun, se retrouvent aussi en un temps où les hommes vivent sans autre sécurité que celle
dont les munissent leur propre force ou leur propre ingéniosité. Dans un tel état, il n’y a pas
de place pour une activité industrieuse, parce que le fruit n’en pas assuré : et conséquemment
il ne s’y trouve ni agriculture, ni navigation, ni usage des richesses qui peuvent être importées
par mer ; pas de constructions commodes ; pas d’appareils capables de mouvoir et d’enlever
les choses qui pour ce faire exigent beaucoup de force ; pas de connaissance de la face de la
terre ; pas de computation1 du temps ; pas d’arts ; pas de lettres ; pas de société ; et ce qui est
le pire de tout, la crainte et le risque continuels d’une mort violente ; la vie de l’homme est
alors solitaire ; besogneuse, pénible, quasi animale, et brève.

Thomas HOBBES

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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Leçon 11 : La Technique
Du grec tekhnè, la technique désigne l'ensemble des règles qu'il faut suivre pour parvenir à
réaliser un objet donné. Elle se définit, au sens moderne, comme l’application des
connaissances scientifiques en vue de produire des moyens et des instruments artificiels, utiles
à l’homme. Dans ce sens, elle serait perçue comme un outil indispensable au progrès de
l’homme et de la société. Pourtant, le progrès technique ne va pas sans préjudices tant sur le
plan moral qu’environnemental. Dès lors, faut-il considérer la technique comme un atout au
développement ou plutôt comme un facteur d’aliénation de l’humanité ?

I. La technique : un atout majeur au service développement de


l’humanité
A priori, la technique reste un atout majeur au service du développement de l’humanité.

Fortement associée à la science dont elle est l’application intelligente, la technique fournit à
l’homme de puissants moyens d’agir sur la nature. Elle le libère de manière indéniable de
l’emprise étouffante de cette dernière. Le recours à la technique donne en effet à l’homme la
connaissance et la capacité nécessaires pour se rendre, selon les mots de Descartes, « comme
maître et possesseur de la nature »(Discours de la méthode). Il s’amorce ainsi, pour
l’humanité, un développement prodigieux. Les niveaux d’industrialisation et d’essor
économique des pays dits développés sont un témoignage patent. Ils illustrent parfaitement le
caractère bénéfique de la technique.

En fait, la technique présente un grand avantage pour l’homme. Elle facilite son travail et le
rend plus efficace. En effet, l’avènement du progrès technique a entrainé une transformation
radicale non seulement des méthodes de travail, mais aussi des moyens de production. Dans
cette perspective, considérant le progrès technique à la fois comme un beau risque et une
aventure, Louis de Broglie écrit : « Qu’importe ses vaines craintes (…) Nous devons
courir le risque, puisque le risque est la condition de tout succès » (Physique et
Microphysique).Autrement dit, le progrès technique constitue une belle aventure à laquelle
l’humanité ne peut plus de défaire. C’est le cas du Taylorisme et du Fordisme qui ont
considérablement révolutionné le monde du travail au XVIIIè Siècle.

Mais, au-delà de son caractère bénéfique pour le développement, le progrès technique ne


constitue-t-il pas aussi une menace pour l’humanité ?

II. La technique : un possible facteur d’aliénation de l’homme


En un certain sens, la technique apparaît de plus en plus comme un facteur d’aliénation.

En lieu et place de l’optimisme et de l’espoir suscités à l’origine, la technique engendre de nos


jours un degré de scepticisme justifié. Autant le progrès technoscientifique dépossède
l’homme de son autonomie, autant il le réduit à un automate. À ce propos, Heidegger
soutient : « Quand nous considérons la technique comme quelque chose de neutre, c'est
alors que nous lui sommes livrés de la pire façon : car cette conception [...] nous rend
complètement aveugles en face de l'essence de la technique » (La Question de la
technique).Au sens heideggérien, la technique apparait comme un outil d’asservissement dont
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on devrait se méfier. D’ailleurs, Karl Marx dans le Capital voit dans la technique une forme
de déchéance spirituelle tout comme un instrument de domination de la minorité des
propriétaires des machines sur la majorité de leurs congénères.

De plus, l’humanité vit désormais sous la menace des méfaits du progrès technique :
déséquilibre écologique avec la destruction de la couche d’ozone ; armement nucléaire prêt à
décimer toute la planète ; manipulations génétiques qui transforment dangereusement
l’essence de l’homme. Les effets pernicieux sont multiples. Simone Weil le dit : « Plus le
niveau de la technique est élevé, plus les avantages que peuvent apporter des progrès
nouveaux diminuent par rapport aux inconvénients » (Oppression et Liberté). Dans la
même veine, préoccupé par cette aliénation de l’homme par la technique, Ivan Illich appelait
à « dé-outiller » la société. En s’équipant d’instruments de plus en plus sophistiqués dont le
mécanisme lui échappe, l’homme perd de sa dignité.

En définitive, retenons que le monde d’aujourd’hui est un milieu entièrement influencé et


impacté par le progrès technique. Il est difficile de s’en défaire. La technique contribue
largement au développement de l’humanité. Mais, une maîtrise incontrôlée de la puissance
technique constitue un réel danger au regard des dégâts environnementaux, sanitaires et
culturels qu’il engendre. Nous devons donc revoir notre rapport à la technique afin de pouvoir
dire avec Hans Jonas que :

« Agis de façon que les effets de ton action soient compatibles avec la permanence d’une
vie authentiquement humaine sur terre » (Le principe responsabilité).

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Sujets de réflexion :
Sujet 1 :Faut-il redouter les machines ?

Sujet 2 :« Ce n’est pas la technique qui résoudra les problèmes de la technique mais l’action
morale et politique ». Expliquez et discutez.

Sujet 3 : Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée

J’appelle technique ce genre ce genre de pensée qui s’exerce sur l’action même et instruit par
de continuels essais et tâtonnement. Comme on voit qu’un homme même ignorant à force
d’user d’un mécanisme, de le toucher et pratiquer de toutes manières et dans toutes les
conditions, finit par le reconnaître d’une certaine manière, et tout à fait autrement que celui
qui s’est d’abord instruit par la science ; et la grande différence entre ces deux hommes, c’est
que le technicien ne distingue point l’essentiel de l’accidentel ; tout est égal pour lui, et il n’y
a que le succès qui compte. Ainsi un paysan peut se moquer d’un agronome ; non que le
paysan sache ou soupçonne pourquoi l’engrais chimique, ou le nouvel assolement, ou un
labourage plus profond n’ont point donné ce que l’on attendait ; seulement, par une longue
pratique, il a réglé toutes les actions de culture sur des petite différences qu’il ne connaît
point, mais dont pourtant il tient compte, et que l’agronome ne peut même soupçonner. Quel
est donc le propre de cette pensée technicienne ? C’est qu’elle essaie avec les mains au lieu de
chercher par la réflexion.

Alain

NB : La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise.

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