Chap 1
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Sanni H. Yaya
André P. Kengne
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2 Le défi de la prévention des maladies cardiovasculaires et ses perspectives en Afrique
cours aux leurs qui sont victimes des MNT (WHO/ISH, 2003 ; WHO 2011a ;
WHO 2011b). Une analyse des coûts du traitement médicamenteux de l’hy-
pertension artérielle montre que les pays africains ne peuvent se permettre les
traitements classiques en vigueur dans les pays à revenu élevé. Cette situation
s’explique par le fait que les pays africains sont pris de court par la vague de
l’hypertension et des MNT, et qu’ils disposent de ce fait de peu ou pas de
ressources à consacrer à l’hypertension, dans le contexte des autres priorités
de santé concurrentes (Mbanya et al., 1998 ; Union Africaine, 2013).
Le poids financier de l’hypertension en 2001 aux États-Unis par exemple
s’est élevé à 76,6 milliards de dollars lorsqu’on considère à la fois les coûts
directs (médicaments et soins) et indirects (invalidités, arrêts de travail et perte
de productivité) de la maladie selon la CDC (Centers for Disease Control and
Prevention). Le faible pouvoir d’achat des populations africaines et le coût
élevé du traitement de l’hypertension (la prise en charge de la maladie peut
durer toute la vie) viennent une fois encore rappeler l’urgence d’investir dans
les systèmes de santé en Afrique. Il s’agit là d’une opportunité pour faire
progresser le développement, contribuer à sauver des millions de vies et
prévenir les handicaps à vie, et rapprocher les pays de la réalisation des
Objectifs du millénaire pour le développement (OMD).
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), sur les 57 millions de
décès survenus dans le monde en 2008, 63 % (soit 36 millions) avaient pour
origine les maladies non transmissibles (OMS, 2012). Les projections indi-
quent que le nombre annuel de décès attribuable aux maladies cardiovascu-
laires par exemple devrait passer de 17 millions en 2008 à 25 millions en
2030. Les MNT résultent de l’effet conjugué de plusieurs facteurs de risque
dont les principaux sont bien connus. Les facteurs de risque comportemen-
taux, tels que le tabagisme, l’inactivité physique, la mauvaise alimentation et
l’usage abusif de l’alcool, rendent compte d’environ 80 % des cardiopathies
coronariennes et des maladies cérébrovasculaires (WHO, 2009). Malheureu-
sement, l’ampleur de ces maladies est mal connue de la communauté et du
personnel de santé. En Afrique, l’accent est encore beaucoup trop mis sur les
maladies infectieuses. Pourtant, ces tueurs silencieux que sont le diabète, l’hy-
pertension et les MNT en général méritent une attention plus soutenue. Dans
plusieurs pays africains, près de la moitié de la population adulte souffre
d’hypertension (WHO, 2009 ; Chobanian et al., 2003 ; Addo et al., 2007).
Méconnue ou mal soignée, l’hypertension artérielle peut causer de graves
dommages aux artères du cerveau, du cœur et des reins devenant ainsi une
source de complications graves, notamment l’accident vasculaire cérébral,
l’infarctus du myocarde ou crise cardiaque, l’insuffisance cardiaque et l’insuf-
fisance rénale. Ces complications aboutissent dans bien des cas à des décès ou
Introduction générale : L’hypertension artérielle en Afrique 3
1. Les études suggèrent que la grande majorité des personnes souffrant d’hypertension
artérielle aura besoin de polymédication (au moins deux médicaments) afin de parvenir à
contrôler la tension artérielle.
2. Étude STEPS menée entre 2003 et 2009. Il existe également un manuel STEPS qui
consiste en une présentation générale et un guide pour les pays souhaitant mener à bien
l’approche STEPwise pour la surveillance des facteurs de risque des maladies chroniques.
4 Le défi de la prévention des maladies cardiovasculaires et ses perspectives en Afrique
Il inclut à la fois une information générale et une aide technique plus détaillée qui
peuvent être utilisées pour la planification et mise en place de STEPS, la formation, la
collecte de données, la saisie des données, l’analyse des données et rapport.
3. Seedat, Y.K. (2000). Hypertension in developing nations in sub-Saharan Africa. J Hum
Hypertens, 14, 739-747.
Introduction générale : L’hypertension artérielle en Afrique 5
que les barrières tenaces qui entravent le contrôle de la maladie. Nous faisons
également le point sur la recherche thérapeutique dans la lutte contre l’hyper-
tension en Afrique, dans un contexte de pluralisme médical dont les diffé-
rentes composantes font l’objet d’un grand pragmatisme de la part des
patients qui suivent des itinéraires thérapeutiques balisés aussi bien par l’hô-
pital que par le guérisseur. Enfin, l’ouvrage se termine par l’examen des stra-
tégies de communication susceptibles d’aider à réduire la prévalence de la
maladie. La sensibilisation sera plus efficace si les différents groupes s’intéres-
sant au problème que représente l’hypertension artérielle s’unissent pour faire
passer les mêmes messages et pour appeler à une action commune. En parlant
d’une seule voix pour dire haut et fort qu’une action globale et intégrée peut
mettre un terme à cette épidémie, les parties engagées dans la sensibilisation
peuvent provoquer un réel changement.
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