Suffixes, Larousse

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67. Suffixes nominaux.

-able : adjectifs à partir de substantifs et — beaucoup plus fréquemment —


de verbes : vérité, véritable; manger, mangeable; dénombrer, dénombrable.
Les adjectifs formés avec ce suffixe (comme avec le suffixe -ible) sont sou­
vent omis par les dictionnaires : c'est qu’ils sont fréquemment sentis comme
des formes verbales, au même titre que les participes.
-ade : substantifs à partir de verbes ou de substantifs : glisser, glissade;
colonne, colonnade; (fam.) : rigoler, rigolade; marrer, marrade.
-âge : substantifs à partir de substantifs et — surtout — de verbes :
pays, paysage; accrocher, accrochage; polir, polissage.
Ce suffixe semble aujourd’hui perdre de sa productivité, et se limite à la
formation de substantifs désignant des opérations concrètes.
-aille : substantifs à partir de verbes et de substantifs : trouver, trouvaille;
manger, mangeaille; pierre, pierraille.
-aire : adjectifs et substantifs à partir de substantifs : milliard, milliardaire;
lune, lunaire.
-al : adjectifs à partir de substantifs ou d’adjectifs : caricature, caricatural;
gouvernement, gouvernemental; commun, communal.
-ance : substantifs à partir de verbes : obliger, obligeance.
-+ard ; substantifs et adjectifs, de sens souvent péjoratif, à partir de verbes,
de substantifs et d’adjectifs : grogner, grognard; montagne, montagnard;
moto, motard; riche, richard.
-at : substantifs à partir de substantifs : protecteur, protectorat; gouver­
neur, gouvernorat.
-âtre : adjectifs à partir d’adjectifs : rouge, rougeâtre.
-aud et -aut : adjectifs et substantifs à partir d’adjectifs et de substantifs :
noir, noiraud; rust(r)e, rustaud.
-bus : substantifs désignant des véhicules de transport en commun : auto­
bus, trolleybus, électrobus, bibliobus, etc.
Ce suffixe est étymologiquement la syllabe finale du substantif omnibus,
datif pluriel du latin omnis, tout.
-ée : substantifs à partir de verbes et, surtout, de substantifs : cuiller,
cuillerée.
+el (et -iel) : adjectifs à partir de substantifs : carence, carentiel; concept,
conceptuel; direction, directionnel; etc.
-°ence (et -escence) : substantifs sur adjectifs : adhérent, adhérence;
turgescent, turgescence.
Ce suffixe tend à se spécialiser dans la formation des mots techniques de
sens inchoatif.
-°erie : substantifs à partir de verbes, de substantifs et d’adjectifs : ciment,
cimenterie; cajoler, cajolerie.

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Le suffixe -erie a servi à former des noms désignant des industries artisa­ Suffixe assez peu productif dans la langue d'aujourd'hui, en dehors des
nales : amidonnerie, damasquinerle, éperonnerie, ficellerie, etc. La dispari­ vocabulaires techniques.
tion de ces industries a entraîné l'affaiblissement du suffixe. -ment, -ement : substantifs à partir de verbes : blanchir, blanchiment; ache­
-esque : adjectifs à partir de substantifs et de noms propres : clown, ver, achèvement; raidir, raidissement.
clownesque; funambule, funambulesque; Molière, moliéresque; Courteline, De même que -âge, -ment perd de sa productivité ; il se spécialise dans
courtelinesque. la formation de termes abstraits : ainsi barrement (d'un chèque) s’oppose à
Dans la plupart des cas, ce suffixe est limité au domaine de la fantaisie, barrage (sur une route, une rivière, etc.).
de l'originalité et de la démesure. -°oir (et -oire) : substantifs à partir de verbes ou de substantifs : arroser,
-et, -ette et -elet, -elette : substantifs et adjectifs à partir de substantifs, arrosoir; rôtir, rôtissoire.
d'adjectifs et de verbes : maison, maisonnette; sonner, sonnette; côte, côte­ -ure : substantifs à partir de verbes et de substantifs : ciseler, ciselure;
lette . V, cheveu, chevelure.
-eur : substantifs à partir d'adjectifs : blanc, blancheur. -tion (et -ation, -ification, -isation, -ition, -sion, -xion, -son) : substantifs
à partir de verbes et de substantifs : bifurquer, bifurcation; titulaire, titula­
-+eur, -euse et -ateur, -trice : substantifs à partir de verbes et de substan­
risation; dent, dentition, etc.
tifs : attendrir, attendrisseur; perforer, perforateur, perforatrice.
Le suffixe ancien -son (guérison, fenaison, pâmoison) tend à disparaître.
■°eux : adjectifs à partir de verbes et de substantifs : boiter, boiteux; Les autres sont, à des degrés divers, productifs, mais fournissent des formations
paresse, paresseux.
assez instables.
-°ible : adjectifs à partir de verbes et de substantifs : élire, éligïble. A cette liste, il convient d’ajouter les désinences de participes -ant (et -sant),
-ien : adjectifs et substantifs à partir de substantifs et de noms propres : -é, -i et -u : en effet, ces formations ont tendance, dans la langue d’aujour­
musique, musicien; Baudelaire, baudelairien; Mars, martien. d’hui, à prendre une existence indépendante de celle du verbe dont elles sont
issues : arrivant, anarchisant, fréquenté, méconnu, etc.
-ier, ière : substantifs et adjectifs à partir de verbes, de substantifs et
Enfin, la dérivation inverse permet de former des substantifs à partir de
d'adjectifs : chaudron, chaudronnier; saison, saisonnier; lait, laitier.
verbes qu’elle prive de leur marque (on parle alors de d é v e r b a u x ou de
-°if : adjectifs à partir de verbes et de substantifs : exploser, explosif; p o s t v e r b a u x : galpper, galop; rechercher, recherche; casser, casse), ou,
compétition, compétitif. beaucoup plus rarement, à partir de substantifs : médecine, médecin.
Ce suffixe se limite aujourd’hui à la formation de certains vocabulaires
techniques ■: linguistique (factitif), économie (revendicatif, dépréciatif). 68. Suffixes verbaux.
-in : adjectifs à partir de verbes, de substantifs et d'adjectifs : cheval, che- \
-+er (et -iser, ifier, spécialisés dans la formation de dérivés techniques) :
valin; plaisant, plaisantin.
ces suffixes servent à former des verbes à partir de substantifs et d’adjectifs :
-ique : adjectifs à partir de substantifs ou de noms propres : méthode, béton, bétonner; fourrage, fourrager; fraise, fraiser; bavard, bavarder; libéral,
méthodique; Marot, marotique. libéraliser; code, codifier.
-°ise : substantifs à partir d'adjectifs : débrouillard, débrouillardise. Le suffixe -er s’associe souvent avec des suffixes expressifs de sens divers,
-+isme : substantifs à partir de noms propres, de substantifs et d'adjectifs : et constitue avec eux les suffixes complexes -ailler (rimailler), -Hier (mor­
Lénine, léninisme; réforme, réformisme; chauvin, chauvinisme. diller), -ouiller (chatouiller), -asser (finasser), -elër (bosseler), -eter et -oter
(voleter, vivoter), -onner (chantonner), -oyer (coudoyer), etç.
-+iste : substantifs et adjectifs à partir de noms propres, de substantifs et
d'adjectifs : Lénine, léniniste; réforme, réformiste; immoral, immoraliste. -ir : ce suffixe a servi récemment à former les verbes atterrir, amerrir et
alunir. En dehors de ce secteur lexical (où il peut trouver des développements
Il est fréquent de constater l'apparition simultanée d'un dérivé en -isme
inattendus : avénusir s’est déjà [1962] employé), il semble être aujourd’hui
(désignant la doctrine ou l'attitude) et d'un dérivé en -iste (désignant le
improductif. Mais on le trouve en abondance, par exemple, dans les verbes
partisan de la doctrine).
formés à partir d’adjectifs de couleur : blanc, blanchir; noir, noircir; roux,
-ité : substantifs à partir d'adjectifs : sonore, sonorité. roussir, etc.

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69. Suffixe adverbial. 72. La dérivation impropre.
Le seul suffixe vivant est le suffixe -ment, qui sert à former des adverbes
Ce procédé consiste à transférer un mot de sa classe grammaticale d'origine
à partir d'adjectifs qualificatifs (riche, richement; petit, petitement; puissant,
dans une autre classe. On constate les transferts suivants :
puissamment), mais aussi à partir du substantif (diable, diablement), et même
— nom propre -> substantif (voir § 245);
à partir d'un adverbe dépourvu de marque : quasi, quasiment (il est vrai
que les puristes condamnent ce dernier). — substantif adjectif (voir § 244);
— substantif -> interjection : diable;
— pronoiïi substantif : le moi, le je, le ça, un petit rien, etc.;
70. La préfixation. —- adjectif substantif : le beau, le rouge et le noir;
La préfixation n'a jamais pour résultat de faire changer un mot de classe — adjectif -» adverbe : parler haut;
grammaticale. On se contentera d'énumérer les préfixes les plus productifs de — adjectif *-> interjection : bon!;
la langue d'aujourd'hui, en éliminant ceux d'entre eux qui n'apparaissent que -— verbe (à l'infinitif) substantif : le boire, le manger. Ce moyen de dérivation
dans les lexiques techniques; on éliminera aussi les éléments qui, tels moins, n'est plus vivant, sauf dans les langages spécialisés.
plus, sur, etc., existent ailleurs que dans des dérivés : — verbe (au participe) -» adjectif (ou substantif) : un être charmant, un
a- (et af-, al-, at-, etc.) : mer, amerrir; tiède attiédir. inconnu;
— adverbe -» adjectif : un homme très bien;
archi-, extra-, hyper- (en opposition avec hypo-), per-, super-, ultra
— adverbe ou préposition substantif : le bien, le pour et le contre.
(en opposition avec infra). Formation d'intensifs sur des adjectifs et même
H i s t o r i q u e . -— L’histoire de la langue présente de nombreux exemples d’autres transferts,
des substantifs : fou, archifou ; millionnaire, archimillionnaire ; fin, extra-fin;
dont certains sont encore possibles dans la langue d’aujourd’hui : participes et adjectifs
fort, extra-fort (substantif) ; critique, hypercritique; balai, hyper-balai (publi­ devenus prépositions {pendant, durant, sauf, excepté, vu, attendu, etc.), substantifs devenus
cité); tension, hypertension (opposé à hypotension) ; fin, superfin; carburant, pronoms nominaux (personne, rien), ou bien outils de négation (pas, point), verbes deve­
supercarburant (sübstantivation fréquente du préfixe avec le sens du dérivé : nus interjections ou présentatifs (vive les vacances, voilà une triste histoire), etc.
du super) ; royaliste, ultraroyaliste ; colonialiste, ultracolonialiste (dans l'un et
l'autre câs : des ultras); ultraviolet opposé à infrarouge. (V. aussi le chapitre 73. L Jabréviation.
des degrés de l'adjectif.)
Un procédé fort productif dans un secteur limité de la langue est constitué
dé- (dés-) 2 bloquer, débloquer; honneur, déshonneur. par l'abréviation : Sôciété Nationale des Chemins de fer Français est abrégé
en- (ent») : cadrer, encadrer. en S. N. C. F. fesenseefl; Confédération Générale du Travail (dé même que
mi- : nuit, minuit; août, mi-août. Compagnie Générale Transatlantique), en C. G. T. (voir § 65). La tendance,
in- (im-) : sens «dans» : filtrer, (s'infiltrer; sens négatif : élézant, aujourd'hui, semble être à rendre immédiatement prononçables les abrévia­
inélégant. tions : un Comité Parisien adopte le sigle Copar plutôt que les initiales C. P.,
plus rebelles à la dérivation.
pré : histoire, préhistoire.
re- (r-j ré-, res-) : prendre, reprendre; entrer, rentrer; ajuster, réajuster
qui se substitue (à rajuster). 74. La composition.
Un grand nombre de dérivés en r e - prennent la place des mots simples : accourcir, La composition se distingue de la dérivation sur le point suivant : les élé­
apetisser, etc., disparaissent devant raccourcir, rapetisser; dans l’usage familier, rentrer se ments qui sont unis par le procédé de la composition ont chacun une existence
substitue à entrer. indépendante dans le lexique, alors que les a f f i x e s (préfixes et suffixes)
ne se manifestent que dans les mots dérivés : les deux éléments du composé
71. Les parasynthétiques. chou-fleur existent séparément, alors que -iste (dans fleuriste) et re- (dans
refleurir) ne peuvent pas s’utiliser seuls.
On donne ce nom aux mots qui sont formés à la fois par préfixation et
pat suffixation. Ce sont surtout des verbes : herbe, désherber; beau, embellir; On reconnaît le mot composé d'après la règle suivante : il est impossible
mais on trouve aussi quelques substantifs : branche, embranchement. Ces de déterminer séparément l'un ou l'autre des éléments qui le constituent;
parasynthétiques peuvent, à leur tour, servir de base à de nouvelles formations ainsi, on peut parler d'une bonne pomme de terre (la qualification porte sur
préfixales ou suffixales : redésherber, désherbement, etc. l'ensemble), mais non d'une * pomme jaune de terre ni d'une* pomme de
bonne terre.
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anthropopithèque leur ordre est inversé. Il s’agit d’un mode de formation
On classe les composés d’après la nature grammaticale des éléments qui les particulier, où les éléments, d’origine latine et surtout grecque, ne se mani­
constituent.
festent qu’en union les uns avec les autres.
A . Su b s t a n t i f s .
Toutefois, il est fréquent que cette formation spéciale prenne les aspects
— Substantif + substantif : voiture-restaurant; timbre-poste; pomme de de la dérivation : bi-, centi- (d’origine latine), di-, hecto-, télé-, dys- (d’origine
terre; station-service. grecque) fonctionnent exactement comme des préfixes ; -eide, -fère, -vore (d’ori­
On voit que les différentes fonctions qui sont réalisées dans le groupe gine latine), -crate, -logie, -scope, -tomie (d’origine grecque) se comportent
substantival (voir § 109) se retrouvent dans ces composés. comme des suffixes.
— Substantif + adjectif : pied-noir; Enfin, certains de ces éléments peuvent prendre une existence autonome
— adverbe ou préposition + substantif : contre-amiral, avant-propos ; dans le lexique : l’élément algie est enregistré comme mot par les dictionnaires
— verbe -f substantif : abat-jour, chasse-neige, réveille-matin, rheurt-de- d’aujourd’hui. Les mots qu’il permet de constituer sont donc tout proches des
faim, boit-sans-soif ; composés.
— verbe -f verbe : laissez-passer; On trouvera des tableaux de ces éléments grecs et latins dans la gamme
— • verbe + adverbe : passe-partout; des dictionnaires Larousse.
-----propositions figées : un sot-Vy-laisse, le quen-dira-t-on.
B. A d j e c t i f s . 76. Cas limites.
— Adjectif + adjectif : sourd-muet, aigre-doux; Les définitions qui ont été utilisées ici pour opposer d é r i v a t i o n , c o m p o ­
— adverbe ou préposition -f adjectif : contre-révolutionnaire, avant- et f o r m a t io n des m o t s t e c h n iq u e s rendent compte de la plupart des
s it io n
coureur;
faits. Cependant, on a déjà pu remarquer au passage (voir particulièrement
— propositions figées : comme il faut.
§ 62 [l’élément -bail], 70 [critère de définition du préfixe], 74 [verbes compo­
C. V e r b e s . sés] et 75) que quelques faits sont à la limite des divers procédés : il est
— Les verbes présentent le cas particulier d’être rarement sentis comme des évident, par exemple, que le préfixe super-, l’élément de composition sur­
composés par ceux qui parlent : en effet, ou bien les deux éléments ne peuvent et même l’adverbe très fonctionnent exactement de la même façon dans
être distingués que par l’historien de la langue (saupoudrer : «poudrer de superfin, surfin et très fin (très-fin jusqu’à l’édition de 1878 du Dictionnaire
sel »), ou bien ils semblent constituer un groupe verbal normalement analy­ de l’Académie). De même, les éléments clef ou fleuve présentent, dans
sable : avoir peur, prendre la fuite. Il convient alors d’appliquer la règle pro­ des formations telles que problème clef, mot clef, discours-fleuve, roman-
posée au début de ce paragraphe : on ne peut dire* avoir terrible peur, ni fleuve, etc., les caractères formels et sémantiques des suffixes, bien qu’ils aient
*prendre son manteau et la fuite; il s’agit donc de verbes composés. une existence autonome (mais fort différente) dans le lexique.
D. Pour la même raison, on doit considérer comme des mots composés les
(tout à coup, petit à petit, sur-le-champ, etc.), p r é ­
l o c u t io n s a d v e r b i a l e s
p o s i t i v e s (à cause de, grâce à, au-dessus de, etc.) ou c o n j o n c t iv e s (à mesure
que, à supposer que, etc.).
R em arqu e. — Il n’existe pas de conjonctions de coordination composées : des locutions
telles que en revanche, en conséquence présentent les caractères syntaxiques des
adverbes, puisqu’elles peuvent occuper diverses places dans la proposition.

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75 La formation des mots techniques.
Examinons le mot pithécanthrope : aucun des éléments qui le constituent
n’a une existence à part dans le lexique. On ne peut donc parler ni de compo­
sition ni de dérivation; il serait d’ailleurs fort difficile de considérer pithéc-
comme un préfixé et -anthrope comme un suffixe, puisque dans le synonyme
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