Art Numérique

Définir l'art numérique, c'est simple comme parler de "cinéma numérique". L'usage est exemplaire dans la caricature : le plus souvent, le critique évoque le cinéma numérique à propos de films qui substituent le support numérique au support chimique. Il est rarement fait mention de spécificités d'une écriture numérique sinon pour prendre en compte l'économie propre à un type d'équipement, à sa facilité d'utilisation et à sa légèreté, telles qu'on les aurait pointé au temps de la nouvelle vague.

Il semble nécessaire de redéfinir (encore et encore) la peinture, aujourdʼhui, et cela dans sa multiplicité. Cʼest bien ce que ce colloque a tenté de questionner : questionner les lieux de la peinture… Sa multiplicité et non pas son « essence », comme a pu le rappeler très justement Germain Roesz lors des débats. Mais comment construire cette définition multiple en évitant de dire « tout est peinture » ? La peinture est bien « morte » en tant que médium « pur » : et ce depuis longtemps, le premier collage au début du XXe siècle. La peinture en tant que technique « pure » nʼexiste pas, elle est un leurre, une vision. Il nʼest pas utile dʼy « revenir ». Mais la peinture est désormais, au moins depuis la Nature morte à la chaise cannée de Picasso en 1912, « associée » à bien dʼautres techniques, métiers, objets, matériaux… Donc que vive cette « peinture impure », et subtilement, sans se contenter de la facilité du « tout est dans tout », « tout fait peinture ». Et la « sculpture » existe-t-elle davantage ? Depuis lʼassemblage cubiste, depuis le Merz de Schwitters 1 , on sait bien que la sculpture nʼest plus uniquement le modelage, ni la taille dans un bloc de matière « noble » (marbre, bois…). Ou bien pourrait-on dire, la peinture (comme la sculpture) ce nʼest plus seulement cela, et nʼest presque plus cela. Donc, mon idée est de défendre que la « peinture-peinture » (la définition exclusive de Greenberg 2 …) est bien morte, et cela depuis bien longtemps. La peinture est un espace de multiplicité : mais tout et nʼimporte quoi devient-il « peinture » et le veut-il dʼailleurs ? Et qui se revendique de la « peinture » aujourdʼhui ? Ce que je cherche à formuler dans ce bref texte, cʼest un point de vue sur la peinture qui est plutôt un jeu de références à la peinture, plutôt quʼune définition technique en termes de médium. Cʼest une manière de tenter de formuler les caractéristiques dʼun art qui se réfère à la peinture (et qui parfois en est même effectivement élaboré sur une toile avec du pigment lié par une résine et appliquée au pinceau…). Dʼailleurs ce que lʼon appelle aujourdʼhui « peinture » ne le fait-on pas en utilisant un mot du passé ? Dʼun temps où les techniques étaient scindées, normées, établies par une tradition et 1 Schwitters avait élaboré tout un système dʼéquivalences entre collage et peinture : le collage est bien pour lui quelque chose de lʼordre de la peinture : pictural. Kurt Schwitters, Merz, écrits choisis et présentés par Marc Dachy, voir le texte « Art abstrait », p. 267, et surtout le texte « La peinture Merz » (1919), p. 45 : « Dans la peinture Merz, le couvercle dʼune caisse, une carte à jouer, une coupure de journal deviennent surface, une ficelle, un coup de pinceau ou un trait au crayon deviennent ligne, le treillis devient retouche, un papier dʼemballage, glacis, la ouate, douceur. » 2 Il semble y avoir dʼailleurs un curieux écart entre ce que Greenberg défend comme étant la « peinture pure » et ce quʼil défend comme étant la « nouvelle sculpture ». Greenberg reconnaît lui-même dans son article sur David Smith en 1956 que la sculpture abstraite des années 1950 procède de la sculpture constructiviste, « avec ses allures de machines », Art et culture, traduction Ann Hindry, Paris, Macula, 1988, p. 222. Mais aussi dans son texte « La nouvelle sculpture » de 1948-1958, ibid., p. 154 : « La nouvelle sculpture tend à abandonner la pierre, le bronze et lʼargile au profit de matériaux industriels tels que fer, acier, alliages, verre, plastiques, celluloïds, etc., quʼil faut travailler avec des outils de forgeron, de soudeur, voire de menuisier. » Ce paradoxe voudrait que la « peinture à lʼaméricaine » ne se limite quʼaux effets de son propre médium, médium classique, alors que la « nouvelle sculpture » doit abandonner les matériaux classiques pour se tourner vers ceux de lʼindustrie, ou de lʼarchitecture (poutrelles dʼacier typiques des années 50-60). Cette sculpture en devient presque figurative, au minimum elle évoque lʼarchitecture, le mobilier, la machine. Donc quelque chose de bien extérieur au médium…

Thèse soutenue en Sorbonne par l'artiste Maurice Benayoun, en 2008 qui inclut la totalité du blog qui en fait la substance. Jury: Pr. Anne-Marie Duguet, Pr. Jean da Silva, Pr. Derrick de Kerckhove, Pr. Hubertus von Amelunxen et M. Louis Bec.
L'intégralité de la soutenance peut être vue en ligne: https://youtu.be/_VNhlJ2fkR8
(The English version is publishhed under the title: "The Dump, 207 Hypotheses for Committing Art" / "The Dump 207 hypothèse pour un passage à l'acte", Fyp Edition, 2011)

Introduction
Le processus de création comprend une face cachée par nature : c’est
l’ensemble de ce qui est écarté par l’artiste dans le choix et la
conception de l’ouvrage à réaliser.
Le projet de cette recherche appliquée est de mettre en oeuvre ce
processus d’élaboration et de sélection, donnant ainsi à voir et à lire ce
qui constitue le faisceau de motivations, de déterminations et
d’hésitations dans le passage à l’acte artistique ; à la fois en deçà et en
amont de l’art, là où la chose se discute encore, de façon quasi
impudique, à voix haute. Le discours accompagne et précède la mise
en oeuvre pour devenir ici, à l’usure, l’objet réalisé, construit de mots qui
n’en finissent plus d’épuiser les possibles de l’action, de réaliser dans
l’écrit le processus de conception.
Le procédé inclut son auto-analyse, sa remise en cause perpétuelle, à
l’image du réel qui, ne semblant jamais se satisfaire de son dernier
énoncé, le reformule quotidiennement.
La recherche s’inscrit dans la durée et dans l’itération. Régulièrement
une nouvelle page énonce un nouveau projet. La forme épistolaire du
blog s’imposait comme une commodité, elle devient un outil méthodique
et fécond, particulièrement adapté à son sujet. the-dump.net
(littéralement : la "la-décharge.réseau") devient l’espace-temps
d’inscription de la recherche et de la création.
Passée la période de consolidation des règles, le mode d’action du
Dump ne supporte plus aucune exception : toute addition inclut une
proposition : projet de création, pratique ou théorique.
C’est aussi un projet singulier de thèse d’arts plastiques qui ne
deviendrait théorisation de la pratique qu’en faisant de la mise en
oeuvre de la théorie l’acte même de la création.

Copier-coller, technologie et image de seconde main chez Wool, Oehlen et quelques autres 1 Stéphane Mroczkowski Contribution à la journée d'étude « la reproductibilité permanente » Stéphane Mroczkowski Artiste, maître de conférences en arts visuels Université de Strasbourg/IUFM d'Alsace

"L’art vidéo, c’est aujourd’hui une discipline artistique indépendante qui n’a pas l’ambition de rivaliser avec le film. Elle couvre plutôt l’espace que le film n’atteint pas pour des raisons temporelles, techniques ou autres. L’art vidéo peut se faire même avec un portable, une webcam ou encore avec des photos. Le contenu et la forme y sont étroitement liés et leur traitement est tout entre les mains de l’auteur. Celuici est donc lui-même acteur, réalisateur, directeur photo et monteur et son identité est souvent bien concentrée. Le paradoxe, c’est qu’il est souvent condamné par les cinéastes pour ces mêmes raisons."
Boris Vaitovič (1976) est artiste polyvalent. Il se consacre à la peinture, à l'art graphique, à l’art vidéo, à la photographie, aux nouveaux médias et à la musique underground. Il est diplômé de la Faculté des Arts de Košice (l’atelier de Rudolf Sikora), où il travaille comme pédagogue depuis 2005.

In: ENTER+ / Le manuel créatif de la littérature et de l‘art slovaque contemporains, Dive Buki, Košice (Slovakia) 2011, ISSN 1338-1946, pp. 4-9 (traduction: Marianna Marcinková, Olivier Léric)