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Analyse du discours Master Sciences du Langage ENS Bouzaréha

Analyse du discours Master Sciences du Langage ENS Bouzaréha

Séminaire : Discours et argumentation : Master II : sciences du langage Enseignant : Mme CHAIBI Année universitaire : 2020-2021 Synthèse des deux cours en présentiel Chapitre n°1 : discours Introduction : La grammaire qui a fait l’objet d’étude formelle, négligeait la situation d’énonciation ainsi que la fonction communicative. Pour remédier à cela, plusieurs chercheurs ont penché sur l’utilisation du langage en contexte (approche fonctionnelle) ce qui a donné naissance à l’approche dite analyse du discours qui considère que « la structure du langage est radicalement conditionnée par le fait qu'il est mobilisé par des énonciations singulières et produit un certain effet à l'intérieur d'un certain contexte »( Maingueneau, 1997). Ainsi dit, les phénomènes langagiers ne sont pas évoqués seulement selon leur aspect morphosyntaxique, l’activité énonciative est prise en compte. C'est-à-dire que l’analyse du discours correspond à l’usage des structures linguistiques en situation de communication interindividuelle. I. Définition de l’analyse du discours : l’appellation vient de Zellig Harris1 ( 1952) qui a proposé dans un article traitant les méthodes d’analyse de l’énoncé en continuité avec la linguistique descriptive. Il explique qu’ :« On peut envisager l’analyse du discours à partir de deux types de problèmes qui, en fait, sont liés. Le premier concerne le prolongement de la linguistique descriptive au-delà des limites d’une seule phrase à la fois. Le second concerne les rapports entre la “culture” et la langue (c'est-à-dire entre le comportement non-verbal et le comportement verbal) » (1952/1969 : 9). Les origines de l’analyse du discours (désormais AD) se situent dans la 1 Il a publié un article qu’il a intitulé « discourse analysis » dans la revue language (vol28-p130), sa traduction en français est apparue en 1962. convergence de plusieurs domaines de recherche. Elle est « aux marges des disciplines » (Guilhaumou, 2005). Plusieurs courants d’analyse du discours sont apparus dans les années 1960 : 1. « École française d’analyse du discours » dirigée par Dubois se focalise sur l’analyse des « phénomènes langagiers dans leurs contextes sociohistoriques. » (Bonnafous et Temmar 2007) . Cette analyse porte sur l’organisation du récit, du contenu, étude des liens entre texte et histoire –Archive-, se centre sur l’idéologie (Marx, Althusser) dans le discours politique pour mettre en évidence les particularités de formations discursives (le discours communiste, socialiste, etc.)et de l’inconscient (Freud, Lacan). 2 .Le courant anglo-saxon : dit aussi la philosophie analytique d’Austin (la théorie des actes de langage) ainsi que la sociolinguistique interactionnelle, l’ethnographie de la communication, la pragmatique, l’analyse conversationnelle et la théorie variationniste. 3. L’école allemande avec la théorie de l’agir communicationnel de Hebermas et Heidegger, 4. L’analyse du discours critique, analyse du discours interprétative de Bonnafous et Temmar), etc. Définition  AD « un certain mode d’appréhension du langage : ce dernier n’y est pas considéré comme une structure arbitraire mais comme l’activité des sujets inscrits dans les contextes déterminés » (Maingueneau, 1996 :10)  Analyse du discours est une discipline aux frontières floues et aux sources d’inspiration multiples. Elle propose selon (Krieg-Planque, 2007) de travailler les discours dans la pluridisciplinarité : « Pour qu'une analyse du discours soit une discipline qui contribue réellement à une meilleure compréhension des phénomènes psychologiques et sociaux de la communication, il faut qu'elle dispose d'une théorie de l'action et de la situation de communication, d'une théorie des stratégies de discours en s'appuyant sur les acquis de la rhétorique, d'une théorie des genres du discours et d'une théorie des imaginaires sociaux en s'appuyant sur des données de la sociologie, de la psychologie sociale et de l'anthropologie sociale ( Charaudeau, 2007 : 75-76). C’est pourquoi elle est une notion difficile à délimiter vu la diversité de ses acceptions qui se trouvent aux marges de plusieurs disciplines  L’AD est la construction d’un savoir autour d’un objet en perpétuelle évolution, que l’on adapte à ses visées théoriques : Harris a déterminé le sens du discours par rapport à la phrase/ Bakhtine, par rapport à l’énoncé/ Benveniste, par rapport à l’énonciation /Adam par rapport au texte ]  AD décrit l’organisation structurelle des échanges (la production verbale) au sein de leurs conditions sociales de production (leur contexte d’émergence), et leur fonctionnement en situation, et par l’établissement de la relation entre le texte et le contexte qui assure la négociation de la compréhension2 :« Tout discours ne prend son sens et n’obtient son efficacité que dans un espace social dont les règles varient selon les cultures et les époques » (Amossy :2000)  AD inscrit le sujet parlant dans son acte d’énonciation qui est porteur de sa subjectivité.  AD appréhende le langage là où il fait sens partant du fait que « la forme linguistique n’est pas un habillage du sens, elle en est à la fois la condition et le lieu de production. Ce qui est dit tient fondamentalement au comment c’est dit »3. L’objectif est de formuler les règles d’interprétation et d’enchainement dites « lois du discours »  AD est la rencontre entre le linguistique et l’extralinguistique d’où la richesse de son cadre méthodologique constitué des outils de la linguistique et les connaissances apportées par les domaines voisins Quelques définitions de la notion du discours : A -la « grammaire de texte », considère le discours comme une succession de phrases et s’intéresse à leur cohérence discursive. B-« on appellera discours un ensemble d’énoncés en tant qu’ils relèvent de la même formation discursive [….]un ensemble de règles anonymes, historiques toujours La compréhension porte sur la façon de construire le sens et la signification d’un message et sur le résultat de cette construction. 3 C.DETRIC, P.SIBLOT, B.VERINE, Termes et concepts pour l’analyse du discours, Champion, Paris,2001,p26. 2 déterminées dans le temps et l’espace qui sont définies à une époque donnée, et pour une aire sociale, économique, géographique ou linguistique donnée, les conditions d’exercice de la fonction énonciative » (Foucault, 1969 : 153-154). Dans ce cas, le discours « désigne l’ensemble des textes considérés en relation avec leurs conditions historiques (sociales, idéologiques) de production » (Sarfati 1997/2007 : 16). C- Béal : « le terme discours renvoie aux manifestations concrètes du langage, et implique donc une prise en considération du locuteur, du référent et de la situation de communication » (2001 : 168-169). D- « il n’y a de discours que contextualisé » (Maingueneau, 1998 : 41) : E- « en soi est activité. Discourir, c’est accomplir des actes langagiers qui modifient les états du monde parce qu’ils déterminent la relation entre les interactants » (Berger,) F- « apparaît comme lieu de construction de l’intersubjectivité comprise comme ce qui se situe ’entre les sujets’ et qui permet (ou ne permet pas) leur rencontre […]/c’est une unité naturelle du fonctionnement du langage (salazar Ovrig,1999) g- « un objet concret, produit dans une situation déterminée sous l’effet d’un réseau complexe de déterminations extralinguistiques (sociales, idéologiques) « (Fuch, 1985 :22) h- « ce qui relie les circonstances dans lesquelles on parle ou écrit à ce qui est dit » (Charaudeau, 1993 :39) II. Les caractéristiques du discours : Selon Maingueneau (1991) le discours porte les caractéristiques suivantes : (1) une variante de la parole saussurienne, (2) une unité de dimension supérieure à la phrase, (organisation transphrastique) (3) un énoncé considéré dans sa dimension interactive, (il est orienté par le visée locuteur= une forme d’action sur l’interlocuteur) et est pris dans un interdiscours (4) il renvoie à la conversation comme type fondamental de l’énonciation, (5) il est opposé à la langue comme système virtuel car il renvoie aux différents usages qu’on fait des unités linguistiques, (6) il désigne un système de contraintes (les normes) qui régissent un ensemble illimité d’énoncés à partir d’un certain positionnement idéologique ou social :« tout acte d’énonciation ne peut se poser sans justifier d’une manière ou d’une autre son droit à se présenter tel qu’il se présente » (Maingueneau, 1998 : 38) (7) En France essentiellement, on oppose énoncé et discours. Ainsi, l’énoncé procède d’une étude du texte en langue et le discours conditions de production du texte. procède d’une étude linguistique des