[Traduction et adaptation française Jérôme Alain Lapasset] 22 juin 2020
Unité Socio-Cognition, C.H. Le Vinatier, BRON
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[Traduction et adaptation française Jérôme Alain Lapasset] 22 juin 2020
Les raisons de cette traduction partielle.
Jérôme Alain Lapasset
Psychomotricien D.E. Unité Socio-Cognition, C.H. le Vinatier, Bron
Les neurosciences de l'éducation occupent un terrain extrêmement polémique
dans les sociétés occidentales. Portées au nues par les uns, décriées par les autres, elles
génèrent un enthousiasme quelque peu outrancier chez ses partisans et hommes ou
femmes politiques actuels d’un côté et de l’autre une inquiétude ou un rejet de la part de
certains enseignants, qui se sentent remis en cause dans leur professionnalisme, ou les
instigateurs d’un complotisme souvent représentant d’un populisme en quête de
pouvoir... C'est aussi le résultat de mouvements de balancier médiatiques qui
correspondent à des prises de positions affectives radicales, l’écart entre une science
responsable et consciente de ses limites et l’imaginaire alimenté par les vulgarisations de
bas niveau, peut-être également le fruit du règne de la médiocratie que dénonce le
philosophe Québécois Alain Deneault.
Nous proposons ici une traduction du chapitre introductif de l’ouvrage sous la
direction de Michael S. C. Thomas, Denis Mareschal et Iroise Dumontheil « Educational
Neuroscience ». Ce premier chapitre de Michael S. C. Thomas et Daniel Ansari pose la
question de : « Pourquoi les neurosciences sont-elles pertinentes pour l’enseignement ? »
Ils y répondent de façon claire, compréhensible malgré la complexité de ce vaste
champ d’une importance sociétale et humaine cruciale. Ce faisant, ils posent également
les limites quant au crédit dont elles peuvent bénéficier en ce domaine, précisent les
bases BIO-PSYCHO (cognition, émotion et affect)-SOCIALES nécessaires à un dialogue
commun qui ne peut qu’être fructueux pour les trois parties : les neurosciences,
l’éducation, les enfants et leur famille. Certes, le livre va à l’encontre de bien des
croyances ainsi que de la doxa qui voudrait que le développement soit un processus
tellement naturel et par voie de conséquence facile, que l’accumulation de savoirs serait
nécessairement meilleure que le savoir être trop souvent, revendiqué comme une
apparence ou un droit plutôt que comme une réalité authentiquement pensée et réfléchie
(métacognitive) ou une conquête et le savoir-faire en toute conscience.
Le cadre une fois posé, les auteurs présentent un survol général des chapitres qui
constituent l’ouvrage réunissant de nombreux collaborateurs et nous donnent les
moyens de comprendre et de stimuler la dynamique de perspectives nouvelles dans le
monde de l’éducation….
De quoi nourrir l’esprit (critique) de chacun.
Bonne lecture !
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[Traduction et adaptation française Jérôme Alain Lapasset] 22 juin 2020
Neurosciences de l’éducation,
Développement sur la durée de la vie
Sous la direction de
Michael S. C. Thomas, Denis Mareschal, Iroise Dumontheil
Thomas, M. S. C., Mareschal D., Dumontheil, I., (Eds.), (2020). Educational Neuroscience,
NEW YORK : Routledge, First Published, 570 pages.
Pages de
l’original
Textes
Neurosciences de l’éducation
Le champ des neurosciences de l’éducation a recourt à de nouveaux éclaircissements sur les
mécanismes neuronaux de l’apprentissage pour améliorer les pratiques d’enseignement et
leurs résultats. Premier volume à rassembler les toutes dernières connaissances sur le
développement des neurosciences de l’éducation à partir d’une perspective sur la vie entière,
ce texte important offre un état de l’art, les résultats de recherches qui font autorité en
neurosciences de l’éducation avant de fournir des recommandations basées sur des données
probantes pour la pratique en classe.
Thomas, Mareschal, Dumontheil et l’équipe d’experts internationaux, rassemblés dans ce
volume, explorent en profondeur quatre thèmes principaux tout au long du livre. Le premier
thème porte sur les différences individuelles, ou ce qui fait que les enfants réussissent mieux
ou moins bien en classe. Le second thème aborde la nature des différences individuelles à
différents niveaux de développement, depuis les premières années jusqu’à l’âge adulte. Le
troisième thème se penche sur l’augmentation cognitive, résumant la recherche qui a exploré
les activités susceptibles d’apporter des bénéfices généraux à la cognition. Le quatrième
thème enfin considère la traduction des données de la recherche au cœur même des pratiques
en classe, discute les questions éthiques plus larges que les neurosciences de l’éducation
soulèvent, et ce que les enseignants ont besoin de savoir au sujet des neurosciences pour
améliorer leur pratique quotidienne. Les thèmes spécifiques explorés comprennent les
perspectives neuropsychologiques sur les disparités socioéconomiques dans les
accomplissements éducatifs, les difficultés de lecture, les habiletés phonologiques, les
fonctions exécutives, et le développement émotionnel.
Michael S. C. Thomas a obtenu son PhD à l’Université d’Oxford et l’a complété avec
un post-doctorat à l’UCL Institute of Child Health. Ses recherches en neuroscience cognitive
du développement se centrent sur les origines de la variabilité cognitive, y compris les
troubles développementaux.
Denis Mareschal est directeur du Centre for Brain and Cognitive Development1,
Université de Londres au Royaume-Uni (UK). Il a largement publié sur tous les aspects de
l’apprentissage et du développement au cours de l’enfance et de la petite enfance, et il a reçu
le Prix Marr (Cognitive Science Society2, USA), celui du jeune chercheur (International
Society on Infant Studies3, USA), et le prix Margaret Donaldson (British Psychological
Society4, UK).
1
Centre du développement cognitif et cérébal, (NdT).
Société des Sciences Cognitives, (NdT).
3
Société Internationale des Études Pédiatriques, (NdT).
2
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Iroise Dumontheil a obtenu son PhD à l’Université de Paris VI et effectué son post
doctorat dans des laboratoires à Londres et à Stockholm. Elle s’est vue décerner la médaille
Spearman (British Psychological Society, UK) et le prix Elizabeth Warrington. (British
Neuropsychological Society5, UK). Sa recherche porte sur le développement typique du
cerveau, de la cognition et du comportement lors de l’adolescence, et sur les applications de
ces découvertes dans l’éducation.
Pour la traduction française
4
5
Société Britannique de Psychologie, (NdT).
Société Britannique de Neuropsychologie, (NdT).
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Sommaire
Contributeurs
Introduction
3
1 Neurosciences de l’éducation
Pourquoi les neurosciences sont-elles pertinentes pour
l’enseignement ?
Michael S. C. Thomas and Daniel Ansari
Les neurosciences de l’éducation sont un champ en émergence dont l’objectif est de
traduire de nouveaux éclairages, recueillis à partir de l’étude des mécanismes
neuraux qui sous-tendent l’apprentissage, au sein même d’applications pratiques en
classe pour améliorer les résultats de l’enseignement. Le champ s’est ouvert dans les
années 1990, la fameuse « décennie du cerveau » (Jones & Mendell, 1999) lorsque
les avancées technologiques en imagerie cérébrale ont encouragé à des progrès dans
la compréhension scientifique de comment le cerveau étaye l’esprit et ses
dispositions à apprendre. Le champ renvoie aussi à « esprit, cerveau et éducation » et
à « neuroéducation », et comprend aujourd’hui un éventail de sociétés savantes, de
centres de recherche, des conférences et des journaux spécialisés. Il se range sous la
bannière plus large des « Sciences des apprentissages ».
Alors que les neurosciences de l’éducation se fondent sur l’intuition que les
nouvelles découvertes sur les mécanismes neuronaux de l’apprentissage pourraient
être utiles aux enseignants dans la classe, elles ne se veulent pas réductionnistes
elles ne prétendent pas que les explications du niveau cérébral sont les meilleures,
ni qu’il faille réduire la nature intrinsèque de l’éducation à une entreprise culturelle
et sociétale. La contribution des neurosciences de l’éducation procède d’une
intention beaucoup plus modeste : une compréhension des mécanismes de
l’apprentissage pourrait aider à améliorer nombre de résultats de celui-ci.
Nous croyons que les diverses contributions contenues dans ce volume le
montrent, les neurosciences de l’éducation présentent un grand potentiel pour
propulser des progrès dans les pratiques éducatives ou d’enseignement. Cependant,
le contexte culturel habituel présente des défis à relever. Les enseignants sont
souvent enthousiastes vis-à-vis de techniques qui sont établies « sur le cerveau »,
mais certaines de ces techniques sont défendues, préconisées, par des entreprises où
les neurosciences ne sont que de l'habillage d’un produit commercial, et les
techniques ne sont pas étayées par des données scientifiques (Simons et al., 2016).
Au cœur d’une compréhension du public de la façon dont fonctionne le cerveau des
mythes se sont fait jour (e.g., que nous n’utilisons que 10 % de notre cerveau, ou que
certains enfants apprennent avec leur cerveau gauche alors que d’autres apprennent
avec le droiti). Ces « neuromythes » ont fréquemment conduit à des pratiques en
classe, une nouvelle fois dénuées d’un étayage scientifique (e.g., les styles
d’apprentissage visuel-auditif-kinesthésique ; Pashler, McDaniel, Rohrer, & Bjork,
2009). En outre, tandis que les bâtisseurs de politiques éducatives se sont révélés
désireux d’éclairer leurs décisions à l’aide des données probantes issues des
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neurosciences (e.g., Thomas, 2017; Willetts, 2018), les chercheurs doivent veiller à
s’assurer que les recommandations n’outrepassent pas le niveau habituel de
compréhension scientifique (Bruer, 1999). De plus, bien qu’il soit important
d’éduquer le public sur les neuromythes ou les approches éducatives inefficientes,
on devrait également reconnaître qu’en dépit des traductions de connaissances, des
méthodes sans effets pourraient bien se voir utilisées.
Ce volume présente les recherches les plus récentes en neurosciences de
l’éducation. Au travers des dix-sept chapitres, il existe quatre domaines d’intérêt
principaux. Le premier porte sur les différences individuelles : qu’est-ce qui fait que
les enfants réussissent mieux ou moins bien en classe ? Remarquez qu'il s'agit là
d'une question légèrement différente du casse-tête théorique de l'acquisition de
compétences pertinentes à l'éducation. Il s’agit de la distinction entre demander, dire,
ce qui rend les élèves meilleurs ou pires en mathématiques, par rapport à la question
de savoir comment les humains peuvent apprendre quelque chose comme les
mathématiques. Le second centre d’intérêt considère cette question aux différentes
étapes du développement— depuis les premières années, en passant par la moyenne
enfance et l’adolescence, et à l’âge adulte. Chaque tranche d’âge peut poser des défis
différents aux enseignants et offre diverses opportunités de modifier les approches.
Notre prise en compte des différences individuelles considère leurs origines
respectives dans les causes génétiques et environnementales (les dernières se
centrent en particulier sur la contribution du statu socioéconomique). Les chapitres
qui suivent abordent les différences individuelles en termes de capacités spécifiques
à une discipline, comprenant l’alphabétisation-lecture, la numération-calcul, les
sciences, et ensuite en termes de capacités disciplinaires générales, englobant
fonctions exécutives, développement social et développement émotionnel.
Le troisième centre d’intérêt du livre, que représente un ensemble de six chapitres,
considère l’augmentation cognitive, en résumant les recherches qui ont exploré les
activités susceptibles d’apporter des bénéfices généraux à la cognition. Celles-ci
englobent les jeux vidéo d’action, l’entraiment à la pleine conscience, le rôle du
sommeil dans l’apprentissage, les exercices en aérobie, l’apprentissage d’une
seconde langue, et celui d’un instrument de musique. Ces chapitres évaluent quelles
sont parmi ces activités celles qui ont, le cas échéant, démontré engendrer des
bénéfices généralisés qui s’étendent à la réussite scolaire.
Le quatrième point de centration du livre porte sur la traduction des résultats de
recherche dans la pratique en classe, et les questions éthiques plus larges que
soulèvent les neurosciences de l’éducation. Adoptant la perspective des enseignants,
l’un de nos contributeurs argumente :
Nous sommes des professionnels, et la compréhension de
l’apprentissage et de ses implications sur notre enseignement
devraient être à la base de notre pratique. Tout juste comme
nous nous attendrions des médecins qu’ils comprennent
comment fonctionne le corps et se tiennent à jour des nouvelles
techniques, par exemple dans le traitement du cancer, les
enseignants doivent comprendre comment l’apprentissage se
met en place.
(Bell & Darlington, Chapitre 19)
Pourtant que doivent exactement savoir des neurosciences les enseignants qui
changera réellement leur pratique quotidienne —par exemple, comment planifier une
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leçon ? Ont-ils besoin de savoir comment fonctionne un scanner cérébral ? Que font
les neurotransmetteurs ? Comment le cerveau consolide-t-il les souvenirs ? C’est ce
à quoi la section finale de ce livre cherche à répondre.
Comment fonctionnent les neurosciences de l’éducation ?
5
Les neurosciences interagissent avec l’éducation suivant deux voies, illustrées dans
la Figure 1.1. Elles peuvent interagirent indirectement via la psychologie ; les
données probantes issues des neurosciences sont utilisées pour faire avancer la
théorie psychologique.
Figure 1.1 Deux voies bidirectionnelles liant les neurosciences et l’éducation
Source: Reproduit avec la permission de Thomas et al., 2019.
6
Suivant cette perspective, en tant que discipline isolée, la psychologie produit des
théories de l’apprentissage qui sont aussi non contraintes, en spéculant sur comment
les systèmes cognitifs pourraient fonctionner plutôt qu’en se focalisant sur comment
marche le système cognitif existant compte tenu des contraintes liées à sa production
en temps réel via la fonction cérébrale (Thomas, Ansari et Knowland, 2019).
Neurosciences et éducation peuvent également interagir directement, en vertu du fait
que le cerveau est un organe biologique et par conséquent qu’il est sujet aux
contraintes métaboliques. Les facteurs tels que réserve énergétique, nutrition,
réponse aux hormones du stress et à la pollution environnementale, peuvent
influencer potentiellement le fonctionnement du cerveau, y compris lorsqu’il
apprend. Ainsi, tandis que les neurosciences de l’éducation placent généralement la
psychologie en son centre, la recherche sur l’impact des facteurs non psychologiques
sur les résultats d’enseignement, tels que la capacité aérobie, le régime alimentaire,
et la qualité de l’air, relèvent également de sa compétence. Nous pouvons envisager
la voie directe en termes de «santé cérébrale» - placer l’organe dans l’état optimal
pour maximiser l’apprentissage de l’individu lorsqu’il entre en classe.
Même si les neurosciences de l’éducation peuvent fournir des éclaircissements sur
les mécanismes de l’apprentissage, il conviendrait de reconnaître que l’apprentissage
n’est qu’une partie de l’éducation. Nous devons considérer les accomplissements
scolaires en fonction des contraintes de niches qui englobent l’individu, la classe,
l’école, la famille et la société. Par exemple l’effet des conditions à domicile exerce
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une influence bien plus puissante sur les résultats scolaires que ce qu’il se passe à
l’école, suggérant que les pratiques scolaires ne sont pas toujours le facteur limitant
des performances.
Figure 1.2 : Facteurs proximaux et facteurs distaux qui soutiennent et contraignent les
changements de résultat d’un apprentissage, suivant les influences stratifiées
sur le changement comportemental tels que proposent Michie, van Stralen, and
West (2011), et les relations interactives entre un individu et son
environnement selon Bronfenbrenner (1992).
La flèche blanche reflète les influences bidirectionnelles entre les couches.
Source: Reproduit avec l’autorisation de Thomas et al., 2019.
Légende :
Learning Outcomes = Pronostics de l’apprentissage
Facteurs gouvernementaux
National curriculum = Programme national ; Education policy = Politique de
l’éducation ; Education Budget = Budget de l’éducation ;
Facteurs sociétal et familial
Technology = Technologie ; Cultural influences = Influences culturelles ; Socioeconomic
status = statut socioéconomique ;
Facteurs scolaires
School policy = Politique scolaire ; Classroom environment = Environnement de la
classe ; Teaching materials = Matériel d’enseignement ;
Facteurs de l’enfant
Motivation & attention = Motivation & attention ; Nutrition = Nutrition ; Ability =
Aptitude ; Health = Santé.
5
6
La figure 1.2 emprunte la théorie des systèmes écologiques de Bronfenbrenner
(Bronfenbrenner, 1992) pour identifier de nombreux facteurs de niche qui
contraignent les accomplissements éducatifs. Elle place les résultats de
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l’apprentissage au cœur de l’éducation, mais illustre la gamme des autres facteurs
internes à l’enfant, sociétaux, institutionnels et gouvernementaux qui
composent un tableau plus large. Dans la continuité de la perspective de
Bronfenbrenner, les facteurs qui influencent l’état final de l’apprentissage d’un
enfant opèrent à des degrés de proximité très largement différents avec le processus
d’apprentissage ; nous devrions les considérer comme relevant d’un système
interactif et interconnecté. L’impact potentiel des neurosciences de l’éducation est
d’améliorer le pronostic éducatif en changeant les facteurs les plus proches des
résultats d'apprentissage comme la Figure 1.2 le montre : aptitude, motivation &
attention, santé et nutrition. Cependant, sa portée pour le faire dépend de la gamme
des obstacles au changement qui peuvent se rencontrer au-delà de l'apprentissage luimême.
La mission des neurosciences de l’éducation est difficile
7
Une part du défi propre aux neurosciences de l’éducation est qu’il est difficile de
traduire des connaissances issues des sciences de base en applications pratiques,
même pour une discipline mature telle que la psychologie. Roediger (2013) a
observé qu’en dépit d’une centaine d’années de données probantes en psychologie
de l’apprentissage et de la mémoire, des techniques sont encore utilisées bien qu’un
corpus de preuves ait montré leur inefficacité (e.g., surligner / souligner du texte
pour en faciliter la mémorisation) alors que d’autres, ayant démontré leur efficacité,
ne l'ont pas été en classe (e.g., l'apprentissage par le biais de tests) (voir Dunlosky,
Rawson, Marsh, Nathan et Willingham, 2013). Il n'est pas simple de traduire une
compréhension de la façon dont se produit l'apprentissage dans le cerveau en
moyens d'améliorer son pronostic par l'entremise d’instructions. Une telle traduction
nécessite un investissement dans des structures et des mécanismes qui peuvent la
faciliter.
Un deuxième défi est le fait que, même si «l’apprentissage» peut sembler une
construction unitaire quelque chose qui, pouvons-nous l’espérer, se produit en
classe ou à travers l’étude sa réalisation dans le cerveau est hautement complexe.
En tant que produit de l’évolution, le cerveau humain présente un certain nombre de
priorités. Sa première est de maintenir les mouvements moteurs en intégrant
l’information perceptive. Sa seconde consiste en la poursuite des objectifs de base
inscrits dans sa structure même au sein des systèmes qui sous-tendent les émotions,
dans ce que l’on pourrait appeler le système des huit Fs (fear [peur/Frayeur], fight
[combat/aFfrontement],
flight
[Fuite],
freeze
[Figement],
feed
[alimentation/Fringale], fun [amusement, Futilité, Frivolité), frolic [batiFolage], and
forty-winksii [quarante clignements/Flasher des yeux]6. En tant que cerveau de
primate social, sa troisième priorité porte sur autrui, qu'il s'agisse de parents, de
frères et sœurs, de compagnons, d'amis ou d'ennemis. Il dédie de nombreux système
au traitement de l’identité, des actions, des émotions et de l’intention des autres
personnes. Sa quatrième priorité seulement la quatrième est la cognition de haut
niveau, le type de connaissances et les habiletés de raisonnement qui sont les cibles
de l’éducation. Il y a beaucoup de choses, par conséquent, qui pourraient entraver
6
Les auteurs ont cherché des synonymes pour établir un moyen mnémotechnique (les 8 Fs) pour caractériser le
système des émotions impliquées ; en français, la tâche n’est pas simple non plus, mes propositions ne sont
qu’approximatives ; [NdT].
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l’apprentissage.
Figure 1.3 Schéma de huit systèmes neuronaux pour l’apprentissage, dont l’interaction
produit le phénomène de «l’apprentissage» en classe (du Centre for Educational
Neuroscience Resource www.howthebrainworks.science). Voir le chapitre 2 de ce
volume pour un aperçu des régions et réseaux cérébraux réels.
Légende :
Cerveau Social Imitation
Cerveau Linguistique Instruction
Control Strategies = Stratégies de contrôle
Reward system = Système de la récompense
Snapshot memory = mémoire d’instantanés
7
L'apprentissage lui-même résulte de l'interaction de peut-être huit systèmes neuronaux
différents (Thomas et al., 2019iii). La figure 1.3 (voir le chapitre 2 de ce volume pour un
aperçu des régions cérébrales et des réseaux fonctionnels réels) schématise ces derniers. Les
huit systèmes sont :
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1. Un système de mémorisation de moments individuels, qui produit une mémoire
épisodique ou autobiographique. L'hippocampe et les structures qui l'entourent en
assure la maintenance. Ce système peut modifier ses connexions très rapidement
pour enregistrer des instantanés.
2. Un système d'apprentissage de concepts. Le cerveau apprend les associations entre
les informations perceptuelles et les réponses motrices, en repérant des patrons
spatiaux et temporels complexes. Cela se produit dans le cortex, où les changements
dans les connexions prennent quelques secondes, minutes et heures.
3. Un système de conditionnement classique. Certaines associations sont inconscientes
et impliquent les structures émotionnelles (limbiques) plus à l'intérieur du cerveau.
Ce sont des associations entre le stimulus et la réponse, comme lorsqu'un aliment
particulier vous a rendu malade et vous en a écarté par la suite. Ces associations
peuvent se former en quelques secondes ou minutes.
4. Un système de contrôle. Le cerveau apprend à contrôler les systèmes à contenu
spécifiques dans le cortex postérieur afin qu'ils soient activés dans les contextes
appropriés. Ce système apprend les stratégies et quand les appliquer. Le contrôle
implique le cortex préfrontal, qui interagit également avec les structures limbiques
pour intégrer la planification à l'émotion.
5. Un système pour apprendre comment obtenir des récompenses. Ce système
détermine ce que nous devons faire pour obtenir ce que nous voulons, faire en sorte
que de belles choses se produisent et éviter que ce n’en soient de mauvaises. Il
fonctionne en quelques secondes et minutes. Le système est ancré profondément
dans le cerveau (la zone tegmentale ventrale du mésencéphale). Les neurones y
libèrent un neurotransmetteur appelé dopamine qui suit la présence ou l'absence de
récompenses et à son tour ce système influence le fonctionnement d'autres systèmes.
6. Un système d'apprentissage procédural pour des activités d'apprentissage que nous
effectuons fréquemment et souvent inconsciemment, comme d’attacher des lacets,
lire ou conduire une voiture. Ces compétences automatiques peuvent prendre des
dizaines ou des centaines d'heures de pratique. Les structures impliquées sont le
cervelet et les circuits en boucle de l’extérieur-à-l’intérieur qui relient le cortex à
travers les noyaux gris centraux au thalamus et retour.
7. Le système d'apprentissage social. Le cerveau peut profiter de ses circuits étendus
pour percevoir, comprendre et imiter d'autres personnes, de sorte que les
compétences peuvent être acquises simplement en regardant faire les autres.
8. Le système linguistique. Le cerveau peut tirer avantage de ses vastes circuits pour
recourir au langage et construire de nouveaux concepts et plans, de façon à pouvoir
apprendre par instruction des compétences.
9
En plus de ces multiples systèmes, un principe plus vaste opère : rendre tous les processus
automatiques, de sorte qu’ils surviennent rapidement, en douceur et sans qu’ils fassent appel
à un effort cognitif ou même à l’attention consciente. Plus on utilise de connaissances /
habiletés, plus elles deviennent automatiques. Avec des compétences automatisées, il y a
une implication croissante des noyaux gris centraux et des structures cérébelleuses avec une
moindre implication du cortex préfrontal. En revanche, moins on a recourt aux compétences
ou aux connaissances, plus elles sont susceptibles d'être perdues. L'oubli se produit à un
rythme différent dans différents systèmes d'apprentissage : par exemple, les connaissances
factuelles s'effritent plus rapidement que les habiletés motrices, comme faire du vélo.
Tous ces systèmes fonctionnent de manière intégrée. Ils réagissent différemment au fil du
temps et préfèrent différents régimes d’entraînement. Des facteurs tels que les états
motivationnels er émotionnels peuvent de façon différentielle les moduler. Devant cette
complexité, comprendre les implications de cette constellation de mécanismes sous le terme
«apprentissage», tel qu’il est interprété par les éducateurs, représente un énorme défi.
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Les neurosciences de l’éducation sont toujours controversées
10
Les neurosciences de l'éducation restent controversées dans certains milieux. Certains
chercheurs estiment que les données des neurosciences sont tout simplement trop éloignées
de la salle de classe pour avoir une valeur éducative, et que les approches qui se concentrent
plus ouvertement sur le comportement, comme la psychologie, sont plus appropriées (e.g.,
Bowers, 2016). D’autres ressentent comme surestimées les affirmations que l’on peut
utiliser les données neuroscientifiques pour diagnostiquer les troubles du développement ou
prédire les résultats individuels, et que ces méthodes ne sont actuellement ni pratiques ni
viables au quotidien (e.g., Bishop, 2014). Encore récemment, de nombreux débats sur ces
questions furent animés dans des revues de psychologie de premier plan (e.g., une critique
de Bowers, 2016, et une réponse de Howard-Jones et al., 2016, dans Psychological Review;
ou une critique de Dougherty et Robey, 2018 et une réponse de Thomas, 2019, dans Current
Directions in Psychological Science).
Les neurosciences de l’éducation constituent un domaine naissant, et il peut en effet y
avoir des critiques légitimes. Par exemple, ces neurosciences doivent se résumer à bien
davantage qu'un simple ré-étiquetage de phénomènes déjà bien connus de la psychologie
comportementale avec les noms des structures cérébrales comme le ré-étiquetage de
«fonctions exécutives» par «cortex préfrontal», ou «mémoire épisodique» avec
«hippocampe». Les neurosciences de l’éducation doivent faire progresser la théorie
psychologique et indiquer les moyens d'améliorer la santé du cerveau.
Bishop (2014) a raison d'affirmer que les méthodes des neurosciences sont encore limitées
dans leur sensibilité et leur spécificité en tant qu'outils de dépistage ou de diagnostic des
déficits. Elles ne peuvent que compléter les marqueurs de risque comportementaux et
sociaux plus traditionnels. Cependant, on pourrait disposer de certaines mesures
neuroscientifiques plus précoces, telles que les mesures électroencéphalographiques
infantiles du traitement auditif pour prédire le risque de dyslexie ultérieure (Guttorm,
Leppänen, Hämäläinen, Eklund et Lyytinen, 2009); ou, dans le futur, disposer de mesures
ADN dès la naissance pour prédire de possibles résultats scolaires (Plomin, 2018). Une
disponibilité précoce augmente les opportunités d'intervention ou tout simplement d’un suivi
plus ciblé des marqueurs de risque traditionnels dans l’accompagnement des progrès de
chaque enfant.
Enfin, les neurosciences de l’éducation doivent améliorer la qualité du dialogue entre les
enseignants, les psychologues et les éducateurs pour garantir que la discussion soit
véritablement bidirectionnelle, par exemple, en Co-concevant des études avec les
enseignants pour améliorer la pertinence de la recherche et augmenter les chances
d’amélioration des pratiques en classe. Il est impératif que le dialogue porte autant sur les
enseignants qui stimulent les orientations de la recherche et réfléchissent à la façon dont les
nouvelles découvertes peuvent être utiles en classe que sur les chercheurs qui communiquent
les résultats de leurs études en neurosciences cognitives.
Il y a aussi des critiques distrayantes mais fallacieuses. La première est que pour contribuer
à l'éducation, les connaissances en neurosciences doivent être flambant neuves et
révolutionnaires (sinon la réplique est : «Mais nous le savions déjà!»). Bien qu'il puisse
exister des théories folkloriques préexistantes sur, disons, l'importance du sommeil (« ma
vieille grand-mère a toujours dit qu'une bonne nuit de sommeil était bonne pour vous ! »),
cela ne compromet en rien la contribution possible que les neurosciences du sommeil
peuvent apporter à travers, par exemple, son étude des effets de consolidation sur
l'apprentissage lors des interactions entre les structures hippocampiques et corticales (voir
Sharman, Illingworth & Harvey, ce volume). Les neurosciences peuvent nous dire non
seulement que le sommeil est bon, mais combien de sommeil est nécessaire (e.g., Wild,
Nichols, Battista, Stojanoski et Owen, 2018). Même lorsque les effets comportementaux
sont déjà connus, on peut les améliorer en comprenant les mécanismes à des niveaux de
description inférieurs.
Une autre critique fallacieuse est que les explications en neurosciences sont dangereuses
parce qu'elles ont un « pouvoir d’attraction séduisant » (Weisberg, Keil, Goodstein, Rawson
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et Gray, 2008) ; c'est-à-dire qu'elles rendent les psychologues et les enseignants plus enclins
à croire que de nouvelles propositions de techniques d'enseignement sont indépendantes des
preuves à l'appui. Bien que cela puisse (malheureusement) être vrai, lorsque les
neurosciences sont utilisées uniquement comme habillage de façade, il s'agit d'un effet de
cadrage contextuel, et non d'une réflexion sur les progrès de la discipline des neurosciences
de l’éducation elles-mêmes (Farah et Hook, 2013; Scurich et Shniderman, 2014 ).
Un survol des chapitres
11
Voici comment se structure le volume. A l’intention de ceux qui ouvrent ce livre sans être
familiers avec les neurosciences, le chapitre qui suit de Dumontheil et Mareschal introduit
aux concepts clefs et aux méthodes des neurosciences l’anatomie générale et le
fonctionnement du cerveau, comment il se modifie au cours du développement, les
principales régions auxquelles se réfèrent les chapitres subséquents, ainsi que les méthodes
d’imagerie cérébrale de pointe telle que l’imagerie par résonnance magnétique cérébrale ou
l’électrophysiologie. C’est l’endroit où vous familiariser avec la terminologie clef et avec ce
que signifient les abréviations IRM et EEG.
La section 1 comprend deux chapitres sur les facteurs génétiques et environnementaux,
abordant les contributions génétiques et environnementales aux différences individuelles
dans les résultats scolaires. Dans le chapitre 3, Donati et Meaburn expliquent comment on a
appliqué de plus en plus les méthodes génétiques aux capacités académiques. Le centre
d’intérêt porte ici sur la mise en lumière que toutes les différences entre enfants et adultes ne
sont pas d’origine environnementale. L’accomplissement scolaire, l’intelligence, et les
dimensions de la personnalité possèdent dans une certaine mesure une composante familiale
comme le révèle la traditionnelle méthode en génétique du comportement chez les
jumeaux qui fait apparaître l’héritabilité de ces traits. Les découvertes capitales en génétique
moléculaire permettent désormais de mesurer les variations réelles de l'ADN entre les
individus et comment celles-ci sont corrélées aux variations des habiletés de haut niveau
telles que la lecture ou les mathématiques. Donati et Meaburn discutent de la façon d’utiliser
dans l'éducation les résultats de ces études d'association à l'échelle du génome, en établissant
par exemple des pronostics éducatifs via des scores de risque polygénique à partir de l'ADN.
Ils déclarent notamment que les pronostics génétiques ne sont pas inévitables (les effets
génétiques peuvent changer d’ampleur dans différents environnements) et que «les gènes
pour l’éducation n’existent tout simplement pas» (p. 70) !
Dans le chapitre 4, Hackman and Kraemer considèrent le côté formation culturelle de
l’équation, et comment les facteurs d’environnement contribuent aux différences
individuelles d’accomplissement éducatif. L’une des mesures les plus prédictives et les plus
aisément disponibles est le statut socioéconomique (SSE) de la famille dans laquelle l’enfant
est élevé. Hackman and Kraemer passent en revue les recherches en cours sur les effets du
SSE sur le cerveau et le développement cognitif. Ils concluent que «bon nombre des mêmes
aspects de performances neurocognitives associés au SSE sont également prédictifs des
résultats scolaires» (p. 99). Bien qu’il s’agisse de facteurs au niveau de l’individu, Hackman
et Kraemer soulignent comment les résultats obtenus pointent le rôle central des facteurs
sociaux et systémiques dans l’éducation. Cependant, le SSE est un intermédiaire à de
multiples voies causales potentielles de l’influence environnementale, et le chapitre
décortique soigneusement comment les effets du SSE pourraient agir sur les résultats de
l’éducation —soulignant que même si leur impact est mesurable dans le cerveau, les effets
du SSE ne sont en aucune façon immuables ou déterministes.
La section 2, Capacités spécifiques à une discipline, examine la contribution des
neurosciences de l’éducation à la compréhension des capacités pertinentes à des disciplines
particulières. Il s’agit notamment de l’alphabétisation-lecture, la numération-calcul et des
sciences. Les chapitres 5 et 6 se penchent sur la lecture. Dans le chapitre 5, Tong et
McBride-Chang proposent un large aperçu de l'évolution de la lecture dans le cerveau
étant donné que la lecture, invention culturelle récente, implique nécessairement de
réaffecter, pour façonner un système dédié à l'alphabétisation, d'autres systèmes neuronaux
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assignés à la reconnaissance d'objets, au langage oral et à la signification. Tong and
McBride-Chang montrent comment on a utilisé différentes méthodes d’imagerie du cerveau
pour mettre à jour ces voies cérébrales. Ils montrent comment structure et fonction diffèrent
toutes deux à la fois en cas de dyslexie, et comment le langage (et la rédaction) que les
enfants apprennent modifient les voies cérébrales, tel que dans une comparaison de l’anglais
et du chinois. En particulier, des mesures de l’activité électrique cérébrale chez le nourrisson
en réponse à des stimuli auditifs peuvent prédire les compétences langagière et
d’alphabétisation-lecture huit ans plus tard ; ceci révèle l’origine précoce des différences en
habiletés de lecture.
Au chapitre 6, Goswami approfondit une compétence sous-jacente au langage et à
l'alphabétisation, une compétence particulièrement impliquée dans la dyslexie: la
phonologie. Comprendre les mécanismes cérébraux qui sous-tendent cette compétence
pointe une possible voie inattendue de remédiation de la dyslexie : s’entraîner à jouer des
tambour de bongo et réciter de la poésie. Comment cela se peut-il ? L’apprentissage précoce
de la phonologie chez l’enfant au travers d’un environnement domestique ou
préscolaire implique de construire une hiérarchie de l’information linguistique disponible
dans le flux de la parole. Une grande partie des informations clefs concerne le rythme. On
peut explorer le traitement du rythme par le cerveau à travers la tendance du système auditif
à entraîner son activité aux différents rythmes présents dans le langage. Les neurones
déchargent en fait suivant des rythmes différents! Dans la dyslexie, il semble qu’il existe un
problème de détection non pas seulement des mots mais de la phrase entière, compromettant
la capacité ultérieure de l’enfant à faire correspondre la phonologie avec la forme écrite du
langage. Goswami soutient que des interventions qui se centrent sur des activités métriques
du langage, telles que les comptines et la musique rythmique, peuvent aider la construction
cérébrale de la phonologie appropriée pour préparer l'acquisition de la lecture. Étant donné
que ces activités conviennent au préscolaire, elles permettent une intervention précoce pour
les enfants qui sont signalés comme étant à risque de développer des problèmes
d'alphabétisation.
Au chapitre 7, de Smeth se centre sur les mathématiques et se demande pourquoi les
apprendre est si aisé pour certains et plus dur pour d’autres. De Smedt considère les vertus et
les inconvénients de comprendre au niveau biologique des compétences enseignées à l'école.
Les mathématiques impliquent l'intégration cérébrale de nombreux mécanismes différents,
et les problèmes mathématiques supposent souvent de nombreuses étapes. Ceci rend difficile
d’étudier les habiletés mathématiques par des méthodes habituelles d’imagerie cérébrale, qui
soit moyennent ensemble l'activité sur plusieurs secondes, soit la décortiquent à la
milliseconde. De Smedt se concentre sur le développement arithmétique additionner,
soustraire, multiplier et diviser des nombres entiers. Ici, il s'avère que l’on peut appliquer
différentes stratégies pour résoudre un même problème, et celles dont disposent les enfants
dépendent de la façon de les leur enseigner, ainsi que des préférences individuelles. Il
apparaît souvent que la stratégie, et non le type de problème (par exemple, l'arithmétique à
un chiffre ou à plusieurs chiffres), module les régions du cerveau qui sont corrélées à la
pratique de l'arithmétique. Mais il y a aussi un changement de nature développemental par
exemple, le cortex temporo-pariétal permet la récupération des faits chez l'adulte
(conceptuel) mais est plus hippocampique (épisodique) chez l'enfant. De Smedt examine s'il
existe des compétences de base particulières qui servent de facteurs contraignants à
l'apprentissage de l'arithmétique. Il conclut que le traitement de la grandeur symbolique
(c'est-à-dire comprendre comment les symboles numériques, tels que les chiffres arabes,
représentent des quantités / ensembles d'objets numériques), est important pour
l'arithmétique comme la conscience phonologique l’est pour la lecture » (p. 176).
Au chapitre 8, Tolmie et Dündar-Coecke examinent l'enseignement des sciences et le
développement tout au long de la vie des compétences conceptuelles qui sous-tendent les
connaissances scientifiques, dès les premières années, la moyenne-enfance et la fin de
l'enfance, l'adolescence et jusqu'à l'âge adulte. Ils notent que dans l'enfance, la connaissance
perceptive de la façon dont le monde physique se comporte semble distincte de la
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connaissance conceptuelle: « au moment où ils ont atteint l'âge de 11 ans, les enfants
montrent une conscience perceptive aiguë des variables qui affectent véritablement les
résultats, même si cela se confond avec de fausses croyances au sujet d'autres facteurs »
(chapitre 8, p. 197). Ils soutiennent que de parler en classe de sciences est crucial, car le
langage constitue la clef pour combler l'écart entre compréhension perceptive et
conceptuelle les idées mécanistes provoquées par le langage attirent l'attention sur les
propriétés perceptuelles pertinentes pour comprendre le fonctionnement des systèmes
physiques. Cependant, des concepts élaborés émergent à des rythmes différents dans
différents domaines (par exemple, cristallisation opposée à sublimation), selon l'étendue et la
nature des entrées environnementales. L'adolescence est marquée par l'ajout de détails, la
mise en relation des connaissances et la connexion aux procédures et applications. À l'âge
adulte, il existe de multiples systèmes de connaissances, utilisés de manière flexible, mais
l'expertise est désormais plus importante que l'âge. Notamment, il est toujours possible de
séparer les habiletés de prédiction et d'explication Tolmie et Dündar-Coecke ont décrit
une étude chez des étudiants de premier cycle, portant sur la trajectoire des objets en
rotation ; cette dernière a révélé que la corrélation entre la prédiction et l'explication était
proche de zéro. L'implication est que les compétences et les connaissances scientifiques sont
dissociées, et qu’un aspect clef de l'apprentissage des sciences est l'intégration des
connaissances et leur application correct.
La Section 3, Capacités Générales aux Disciplines, se concentre sur les différences
individuelles de compétences pouvant affecter les performances de toutes les disciplines.
Dans le chapitre 9, Peters explore les fonctions exécutives et leur évolution au cours de
l'enfance et de l'adolescence. Elle prend en considération les composantes principales du
contrôle cognitif, comprenant la mémoire de travail, l’inhibition et la flexibilité, et jusqu’à
quel point on peut entraîner ces habiletés. Peters fait valoir que les substrats cérébraux qui
sous-tendent les fonctions exécutives prennent beaucoup de temps pour parvenir à maturité,
ce qui explique les faibles compétences des jeunes enfants en matière de fonctions
exécutives. Surtout, elle met en exergue que les salles de classe et les programmes
d'éducation ne sont actuellement pas tous adaptés au niveau de développement neuronal et
aux compétences du fonctionnement exécutif que les enfants possèdent à cet âge. À
l'adolescence, en revanche, ces dernières sont bien plus avancées, mais les changements
pubertaires ont un impact sur la prise de décision concernant la prise de risques, en
particulier dans un contexte social, avec en association des effets néfastes sur la santé.
Cependant, Peters identifie également des opportunités à l’adolescence, y compris la
sensibilité accrue des systèmes de la récompense au retour d’information (feedback) et aux
environnements sociaux. Les années d’adolescence peuvent être une fenêtre d'opportunités
d'apprentissage, mais aussi une période où les différences individuelles sont exacerbées car
le contexte affectif et social influence davantage le cerveau.
Au chapitre 10, Immordino-Yang et Gottleib se focalisent sur les émotions. Ils abordent la
question du pourquoi l’apprentissage est-il un processus aussi dépendant des émotions, et
qu’est-ce que cela signifie pour les enseignants et les établissements scolaires. Ils
répondent :
capacités des élèves à reconnaître, comprendre et gérer leurs émotions; pour
développer ; construire et maintenir un sentiment d'intérêt et de curiosité; persister
malgré les défis et l'incertitude ; embrasser de nouvelles expériences; imaginer des
futurs alternatifs pour eux-mêmes et leurs communautés; et éprouver leur résolution. . .
tous ces éléments influencent puissamment la réussite personnelle et scolaire.
(p. 242)
En dépit du rôle clef des émotions dans l’apprentissage et en effet le récent
gouvernement US se focalise sur l'apprentissage social des émotions Immordino-Yang et
Gottleib soutiennent que les enseignants interprètent souvent mal le message ; par exemple,
que de se centrer sur les émotions en classe est un luxe si on en a le temps, ou consiste
simplement à s’assurer que les élèves « s’amusent ». Ils avancent que l’émotion est une clef
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de l’apprentissage mais qu’il est nécessaire qu’elle soit congruente avec ce que l’on apprend,
sinon elle va interférer avec la réalisation final dudit apprentissage (comme c’est le cas avec
l’anxiété vis-à-vis des mathématiques, par exemple). Immordino-Yang et Gottleib
expliquent comment les systèmes cérébraux dévolues aux sensations viscérales (y compris
l’insula) sont cooptés pour les expériences émotionnelles, mais que les « sensations du
ventre » reflètent l’étendue de l’apprentissage plutôt que de naïves intuitions. Même lorsque
les gens éprouvent une émotion complexe comme l'admiration, cela semble toujours
impliquer l'activation de l'insula ! Enfin, les auteurs prennent en considération les
différences interculturelles, en particulier la façon dont les individus rapportent des
sentiments d'émotivité en réponse à une activation par ailleurs équivalente des systèmes
sensoriels du corps dans le cerveau.
La section 4, Principales méthodes d’augmentation cognitive, contient six chapitres qui
évaluent diverses formes d’augmentation cognitive. Sur l’ensemble, entraîner la cognition
produit ce qu'on appelle un « quasi-transfert » (near transfer) des gains sur la tâche que
l’on entraîne, des gains plus faibles à des tâches similaires, mais peu ou pas d'amélioration
sur des tâches très différentes, appelées transfert distant (far transfer) (e.g., Sala et al.,
2019). Cependant, les chercheurs continuent leur quête de données probantes en faveur de
techniques qui bénéficieraient de façon générale à la cognition. Cette section rassemble de
façon unique en un seul endroit les évaluations de plusieurs de ces approches, comprenant
les jeux vidéo d’action, l’entraiment à la pleine conscience, le rôle du sommeil dans
l’apprentissage, les exercices en aérobie, l’apprentissage d’une seconde langue, et celui d’un
instrument de musique, que l’on affirmé, à un moment ou à un autre, produire des bénéfices
généraux à la cognition ou améliorer les pronostics éducatifs.
Il faut rester prudent en ce domaine : de nombreux chercheurs expriment des réserves
quant à la véritable notion « d’augmentation cognitive », à la fois dans l’objectif que cela
implique et la nécessité de mesures des aspects de l’éducation qui ne sont pas aisément
quantifiables (Cigman & Davis, 2009). Par exemple, Cigman (2009, p. 174) fait valoir que :
le programme d'amélioration ne consiste pas simplement à améliorer les performances
des enfants. Il s'agit de les amener à se sentir mieux plus motivés, plus confiants, plus
heureux et à l'idée que de se sentir bien mène ainsi à réussir à l'école et dans la vie en
général.
Mais Cigman remarque qu’« il n’y a rien d’évident à ce que l’on puisse identifier des
sentiments particuliers comme inconditionnellement bons, de sorte que davantage est
nécessairement meilleur » (p. 174). Néanmoins, dans la mesure où l’on peut mesurer les
capacités cognitives, nous pouvons dire que l’enseignement en tant que tout agit comme un
exhausteur cognitif, avec une méta-analyse qui montre un gain approximatif de un à cinq
points de QI pour chaque année supplémentaire d’enseignement suivi (Ritchie & TuckerDrob, 2018).
15
Au chapitre 11, Altarelli, Green and Bavelier considèrent l’impact d’une pratique
soutenue des jeux vidéo d’action informatisés sur la cognition. Ces jeux présentent des
tempos élevés et sont prenants, impliquant des réponses motrices instantanées à des scènes
visuelles à évolution véloce. Certains adolescents et jeunes adultes y consacrent beaucoup de
temps, et il s’avère que l’on a trouvé que les jeux avaient la capacité de puissamment altérer
le cerveau et le comportement. Des méta-analyses révèlent des effets inégaux sur la
cognition, qui influencent principalement l’attention du haut vers le bas (top-down), la
cognition spatiale et l’attention visuelle. Altarelli et ses collègues révèlent les propriétés
clefs que doivent présenter ces jeux pour être efficace : Rythme enlevé pour forcer à la prise
de décision sous contraintes de temps, pression pour diviser l’attention et superviser de
multiples sources d’information, une exigence de basculer souplement entre des états
d’attention divisé et d’attention focalisée, calibrage adaptatif des difficultés (ni trop facile, ni
trop dur), et variabilité et richesse des expériences. Du fait du caractère si attrayant des jeux
vidéo d’action, des éducateurs ont ambitionné d’exploiter ces propriétés à des fins
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éducatives de «gamifier» l’enseignement. Cependant, Altarelli et ses collègues font le
commentaire que la plupart de jeux éducatifs se focalisent sur les contenus sans parvenir à
capturer les mécanismes du jeu déclencheurs de l’engagement. Ils remarquent également
qu'il existe encore peu de données probantes sur les effets cognitifs des jeux vidéo d'action
chez les plus jeunes enfants (où il existe également le risque d’un contenu inapproprié pour
l'âge, tel que de la violence). Pourtant, il demeure des résultats intrigants, tels que la
possibilité que le jeu vidéo d'action puisse améliorer les compétences en lecture de certains
enfants dyslexiques.
Au chapitre 12, Semenov, Kennedy et Zelazo considèrent l’entraînement à la pleine
conscience chez l’enfant et l’adolescent, et son impact potentiel sur les habiletés du
fonctionnement exécutif en classe. La méditation est souvent liée à la pratique religieuse,
plus remarquablement au Bouddhisme, mais on a plus récemment exploré cette méthode
séculaire pour accroître la santé et le bien-être. Comme le dit Ven. Ajahn Sumedho, au sein
du Bouddhisme « tous les enseignements visent à encourager et à diriger notre attention, à
explorer et examiner l’expérience du moment présent. Pour ce faire, vous avez besoin d’être
pleinement éveillé. Vous devez faire attention à la vie telle qu'elle se produit » (Panahong
Green, 2001, p. 8). Semenov et ses collègues envisagent le rôle de l’entraînement à la pleine
conscience pour améliorer à la fois les aspects chauds (régulation des émotions) et froids
(contrôle cognitif) des fonctions exécutives telles que l'attention. Ils mettent en lumière sa
potentialité d’amélioration de la régulation interne en prévenant que les influences
ascendantes bottom-up (telles que les réponses émotionnelles) l'emportent et interférent avec
les objectifs et l'attention. Alors que l’entraînement ne produit généralement qu’un quasi
transfert, Semenov et col. avancent que l’entraînement à la pleine conscience présente la
potentialité d’un transfert distant parce qu’il soutient la métacognition par la réflexion : la
conscience métacognitive des compétences et de leur champ d'application peut être un
vecteur de transfert lointain. Les neurosciences de l’entraînement à la pleine conscience
principalement chez l’adulte pointent l’importance du cortex cingulaire antérieur
(CCA), un système cérébrale qui supervise les performances actuelles par rapport aux
objectifs. En particulier, les études signalent que le CCA est plus actif lorsque des méditant
experts pratiquent la pleine conscience, mais qu’il l’est moins que chez des non-méditant
lors d’une cognition régulière ce qui suggère que le filtrage des distractions puisse
s’automatiser avec la pratique. Dans un contexte éducatif, Semenov, Kennedy et Zelazo
considèrent les bénéfices potentiels de la pleine conscience non seulement pour les enfants
mais aussi pour les maîtres ; ce pourrait être utile dans le cadre d’un travail stressant.
Dans le chapitre 13, Sharman, Illingworth et Harvey se penchent sur les neurosciences du
sommeil et leur relation aux pronostics éducatifs. Ils passent en revue comment le sommeil
fonctionne dans le cerveau comment l’activité électrique cérébrale révèlent les cycles du
sommeil et comment le sommeil est lié aux cycles circadiens. Une attention particulière
est portée au changement de rythme circadien d’environ trois heures à l’adolescence, avec
des jeunes qui restent éveillés plus tard dans la nuit et se réveillent plus tardivement le
matin. Pour l’heure, la cause de ce changement demeure inconnue. Mais la combinaison
d’une heure de couché plus tardive avec l’heure fixe de départ au collège se traduit par une
moindre quantité de sommeil pour les adolescents. Le sommeil est associé au
fonctionnement psychosocial et à la régulation comportementale / émotionnelle ; de telles
réductions de sommeil peuvent influencer le bien-être des étudiants, leur capacité à
s'entendre avec leurs pairs et leurs enseignants, et leur comportement dans l’établissement
scolaire (bien que l’on ait pas encore clarifié le sens de la causalité). Les adolescents
peuvent non seulement se sentir plus « fatigués et émotifs », mais la cognition peut en être
affectée et ainsi la qualité des apprentissages de même. Sharman et collaborateurs
considèrent le rôle du sommeil dans les processus cérébraux de mémorisation et
d’apprentissage, avec ses cycles de répétition, de consolidation, de réorganisation et
d’intégration des souvenirs. Ils notent que l’efficacité du sommeil peut se montrer plus
importante que la durée les enfants ont besoin de bien dormir ! Les auteurs évaluent alors
les possibilités parallèles de modification des heures de début d’enseignement pour mieux
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coïncider aux rythmes circadiens de l’adolescent, ou d’éducation au sommeil,
d’amélioration de la compréhension des comportements qui incitent à un bon sommeil (tels
que d’éviter l’usage de média à écran aux alentours du couché, voir e.g., Mireku et al., 2019)
pour maximiser l’efficience du sommeil.
Au chapitre 14, Wheatley, Wassenaar and Johansen-Berg se penchent sur les bénéfices
possibles de l’exercice en aérobie pour améliorer les pronostics éducatifs. Il semble évident
que l'exercice est bon pour tous, en cette période de préoccupations autour de l'obésité.
Mais, ici, l’objet d’intérêt porte moins sur les bénéfices dans le domaine de la santé et
davantage sur les effets potentiels sur la cognition, en particulier sur les habiletés des
fonctions exécutives telles que l’attention. Wheatley et collaborateurs examinent
soigneusement les études transversales, en évaluant si ceux qui entreprennent plus
d’exercices en aérobie obtiennent de meilleurs résultats éducatifs, et ensuite les études
d’intervention, ou on cible l’amélioration des niveaux existants de forme physique.
L’histoire devient complexe : l’exercice engendre-t-il des améliorations immédiates,
« aiguës » de sorte que, disons, les enfants obtiennent de meilleures performances en classe
de mathématiques après un cours d’EPS (éducation physique et sportive) ? Ou est-ce que le
maintien d’un meilleur état de forme physique durable engendre des améliorations
«chroniques» ? Y a-t-il des améliorations à apporter à la capacité cardiovasculaire ou de
meilleurs habiletés motrices (e.g., meilleure souplesse, équilibre et vitesse) ? Quels sont les
mécanismes cérébraux qui sous-tendent les progrès observés ? Les études sur l’animal
pointent l’implication d’une meilleure connectivité cérébrale, la croissance de nouveaux
vaisseaux sanguins, l’expression plus prononcée de « facteurs de croissance » chimiques,
tels que le facteur neurotrophique dérivé du cerveau (BDNF7), et même la genèse de
nouveaux neurones dans l’hippocampe. Quel est le meilleur type d’exercice ? Une activité
physique de modérée à vigoureuse (APMV8) semble remporté les faveurs. Certains
suggèrent que l'activité d’entretien physique aérobie pourrait être plus efficace pour les
années de primaires que pour les adolescents, et les rendements pourraient se révéler
décroissants pour les enfants déjà en forme. « Au bout du compte », Wheatley et ses
collègues concluent que, « l'activité physique peut améliorer les fonctions exécutives des
jeunes » (p. 376), avant d’en venir à considérer les modalités pratiques d'intégration de celleci dans la journée scolaire ; activité qui devrait être pris en charge (il s'avère que les
enseignants spécialisés en éducation physique ne sont pas nécessaires !).
Au chapitre 15 on en vient à considérer les bénéfices (et les désavantages) cognitifs
possibles du bilinguisme et du multilinguisme. Phelps and Filippi abordent cette question à
la fois pour les enfants et sur la durée de la vie également étant donné l’évidence
suggestive que l’apprentissage d’une seconde langue pourrait représenter un facteur
protecteur contre le déclin cognitif associé à l’âge. La recherche sur bilinguisme et cognition
ressemble aux montagnes russes dans la première moitié du vingtième siècle, on
considérait que le bilinguisme avait un effet négatif sur le QI, dans la seconde on le pensait
accroitre la cognition. Cette conclusion est à présent contestée ; en même temps, dans le
secteur éducatif (au moins au Royaume-Uni) on conçoit l’Anglais en tant que Langue
Supplémentaire (ALS9) comme un facteur de risque d’un pronostic médiocre avec les élèves
en besoin de soutien. Le tableau est flou par manque d’affectation aléatoire aux conditions.
Puisque il n’est pas décidé au hasard qui sera monolingue et qui sera bilingue, il peut y avoir
des différences systématiques entre ces groupes qui dépendent de facteurs historiques et
culturels par exemple, dans certaines régions ou certains pays des groupes bilingues
peuvent présenter un SSE plus élevé (ou plus bas) que des groupes monolingues ; comme
nous l’avons vu, le SSE s’associe lui-même à des différences en cognition. Phelps et Filippi
passent au crible les éléments de preuves comportementales et cérébrales: il y a des données
probantes plus solides que le bilinguisme soit bénéfique au plan attentionnel dans le
traitement du langage, alors que l’évidence est plus mitigée quant au fait que les exigences
7
Pour « Brain Derived Neurotropic Factor » (NdT).
Dans l’original : (MVPA) = Moderate to vigorous physical activity (NdT).
9
Dans l’original : (EAL) = English as an Additional Language (NdT).
8
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de contrôle de deux systèmes linguistiques apportent des bénéficies généraux à la cognition.
Une partie du problème est que les bilingues présentent une telle variabilité dans leurs
capacités et leurs expériences, et que des bénéfices plus larges peuvent ne faire surface que
chez les enfants et les populations vieillissantes, plutôt que chez les jeunes adultes dont les
compétences cognitives sont à leur plus fort. Cette diversité incite Phelps et Filippi à
soutenir que le temps est venu d’un nouveau cadre conceptuel théorique. Leurs messages les
plus puissants sont qu’il n’y a aucune preuve en faveur d’une « surcharge mentale » pour les
enfants qui apprennent deux langues (même pour ceux avec un trouble du spectre de
l’autisme ou un trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité) en fait, le
contact culturel plus large inhérent aux deux langues offre de plus grandes opportunités de
soutien. Et que le profile ALS n’est pas atypique il ne relève pas d’un trouble
développemental du langage et les enseignants devraient abandonner les connotations
négatives associées au statut ALS .
Dans le chapitre 16, dernier de la section augmentation cognitive, Schellenberg examine
si l’entraînement musical peut élever les niveaux de QI. Il se demande si une telle formation
présente des conséquences systématiques qui s’étendent au-delà de la capacité et des
connaissances en musique à des aptitudes cognitives non musicales. Une fois de plus, un
manque fréquent de répartition aléatoire aux conditions pose des problèmes. Schellenberg
observe que des enfants qui prennent des cours de musique appartiennent à un groupe choisi,
et qu’il n’est pas réaliste d’affecter aléatoirement des enfants à un groupe d’enseignement
musical dans le cadre une étude d’intervention, puisque il est nécessaire de s’engager à
pratiquer en dehors de la classe pour progresser. Schellenberg conçoit les déclarations
positives en faveur de l’entraînement musical face à ces défis expérimentaux comme une
« sorte d’environnementalisme radical » (p. 414) : une focalisation sur la plasticité cérébrale
a conduit les chercheurs et les éducateurs à ignorer les différences individuelles
préexistantes entre les enfants qui font et ceux qui n’entreprennent pas de formation
musicale ; cela a encouragé une tendance à interpréter des corrélations obtenues comme des
preuves de causalité. Ce en quoi, il considère les neuroscientifiques de l’éducation comme
particulièrement coupables. Depuis qu’ils étudient le cerveau un mécanisme il est bien
trop facile à ces chercheurs de voir la preuve de l’existence de corrélations comme une
relation de causalité. Mais Schellenberg met en exergue que des facteurs communs peuvent
faire que des enfants persévèrent à s’entraîner musicalement et aient des QIs supérieurs : Par
exemple, des familles soutenantes de classe moyenne, ou des différences génétiques
d’intelligence et de bonne volonté pour maintenir la pratique. Schellenberg passe en revue
les données probantes et trouve peu de soutien convainquant en faveur d’améliorations de la
cognition à la suite de l’entraînement musical. Cependant, il existe des résultats intrigants,
tels la possibilité d’améliorations dans le traitement du discours et de lecture chez les
dyslexiques une hypothèse que nous avons vue mise en avant par Goswami (voir le
chapitre 6). À la fin du chapitre, nous bouclons la boucle sur les réserves concernant le
programme d'amélioration cognitive. Pourquoi faudrait-il que l’objectif soit d’atteindre des
améliorations mesurables du QI ?, se demande Schellenberg. La formation musicale
améliore les habiletés musicales, la musique promeut les liens sociaux, « écouter de la
musique nous permet souvent de nous sentir mieux, et faire de la musique nous fait souvent
nous sentir bien ensemble. N’est-ce pas suffisant ? » (p. 432).
La section 5, À l’intérieur de la classe, pénètre dans la salle de cours. Jusqu'à ce moment
du volume, les enseignants pourraient légitimement dire: «cette recherche est très
intéressante, mais. . . comment l’utiliser en classe? » Dans le chapitre 17, Howard-Jones,
Ioannou, Bailey, Prior, Jay et Yau tentent de répondre à cette question. Ils se concentrent sur
la qualité de l'enseignement, soulignant que l’«on a estimé qu’un enseignant au top des 16 %
d’efficacité les plus élevés produit, comparé à un enseignant moyen, des élèves dont le
niveau de réussite se situe entre +0,2 et +0,3 écart-type vers la fin de l’année scolaire (p.
443) ». Cependant, ils soutiennent qu'un bon enseignement ne consiste pas simplement à
appliquer les meilleures pratiques, mais à savoir comment et quand appliquer chacune
d’elles. Ils argumentent que les sciences de l’esprit et du cerveau enrichissent l’éducation en
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informant sur les processus par lesquelles les enseignants réfléchissent et développent une
compréhension de leur propre pratique. L’objectif de ces auteurs est de sélectionner des
concepts scientifiques centraux qui aideront à cette réflexion et de démontrer leur relation
avec les pratiques pédagogiques établies. Howard-Jones et ses collègues s'appuient sur trois
catégories clés du processus d'apprentissage: (1) l'engagement dans l'apprentissage, (2) la
construction de nouvelles connaissances et (3) la consolidation de l'apprentissage,
caractérisés en termes de systèmes cérébraux clefs impliqués. Ces concepts sont ensuite
systématiquement mis en relation avec les « principes d’enseignement » en usage et aux
« principes d’émotion et d’apprentissage » au sein même de l’éducation. Les auteurs
enracinent ce cycle sur des exemples tels que consignes en classe et émotions des
enseignants, guidage de la pratique des élèves et révision quotidienne. Surtout, l'utilité pour
les enseignants de ces concepts est testée en route lors d’un cours de troisième cycle, en
phase de développement dans la propre université des auteurs, qui leur est destiné.
Au chapitre 18, Knowland s'attaque aux problèmes éthiques soulevés par la recherche en
neurosciences de l’éducation dans la classe, étant donné que la cible de ses interventions est
généralement l’enfant. Au sein des neurosciences et de la psychologie, le curseur éthique
s’établie plus haut en ce qui concerne l’investigation chez ce dernier. Pourtant, on pourrait
soutenir que l’éducation dans son ensemble concerne les figures d’autorité qui changent le
cerveau des enfants. Les problèmes sont potentiellement d’ordre émotif. Par exemple, dans
le contexte du temps d'écran laissé à disposition des jeunes, Sigman (2019) a plaidé pour le
principe de précaution : jusqu’à ce que nous connaissions le plein impact du temps d’écran
sur la santé et le développement infantiles, les professionnels de la santé devraient se
rabattre du côté de la prudence et recommander des limites basses. Ignorer l’approche
prudente des professionnels de la santé infantile, dit Sigman, «promeut une image
orgueilleuse des chercheurs en psychologie et en « technologie éducative » sachant mieux
que les nombreux professionnels de la santé pédiatrique et publique ce qui conviendrait le
mieux pour protéger la santé des enfants» (p. 926). Knowland prend un exemple
hypothétique mais austère pour considérer la question de l'amélioration cognitive. Si nous
savions que la neuromodulation était efficace pour améliorer la cognition (e.g., via des
psychostimulants, tels que le Ritalin utilisé pour traiter le trouble d'hyperactivité avec déficit
de l'attention; ou via la stimulation électrique transcrânienne du cerveau), devrions-nous
l'utiliser sur des enfants ? N'avons-nous pas le devoir d'améliorer les pronostics scolaires des
enfants ? Par souci d’équité, ne devrions-nous pas alors cibler ces interventions sur les
moins favorisés de la société, pour uniformiser les règles du jeu ? Qu'en est-il des effets
secondaires possibles? Qu'en est-il du fait que ce genre d'interventions fonctionne pour
certains enfants mais pas pour d'autres ? À quel âge devons-nous intervenir devons-nous
utiliser la neuromodulation chez les nourrissons, puisque leur cerveau est plus plastique ?
Ou peut-être que les années préscolaires ne devraient pas du tout être du ressort des
neurosciences de l’éducation ? Les problèmes ici sont complexes, tout comme nos
intuitions. Dans une étude explorant les attitudes des adultes, toute amélioration
pharmacologique visant à améliorer les efforts académiques, l'emploi et les relations
personnelles a été jugée moralement inacceptable mais les participants ont jugé une
hypothétique «pilule futée» pour améliorer l'intelligence comme étant plus moralement
mauvais que de prendre une «pilule de motivation» qui améliorerait la capacité d'un individu
à travailler dur. Les systèmes cérébraux ciblés par ces pilules hypothétiques ont altéré le
jugement des gens sur leur valeur morale !
Le chapitre 19 présente la vision des enseignants qui pratiquent en classe. Bell et
Darlington donnent leur avis sur tous les chapitres précédents. Ils considèrent pourquoi les
enseignants devraient essayer de comprendre l’apprentissage en premier lieu : « la première
raison de comprendre l’apprentissage et l’enseignement », disent Bell et Darlington, « est
que nous sommes des professionnels; les personnes responsables d’une part importante de
l’éducation des enfants. . . [nous] devons nous tenir au courant des nouvelles données
probantes sur les moyens d'améliorer pour tous les élèves l'expérience d'apprendre » (p.
500). Ils nous font part de la façon par laquelle une compréhension de l'apprentissage
pourrait mieux éclairer la pratique, en abordant l'environnement et le contexte de
Unité Socio-Cognition, C.H. Le Vinatier, BRON
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[Traduction et adaptation française Jérôme Alain Lapasset] 22 juin 2020
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l'apprentissage, le processus d'apprentissage, ainsi que le bien-être émotionnel et la santé
mentale. Selon une perspective sur la durée de vie, ils disent que « chaque milieu et chaque
tranche d'âge nécessitent des approches fondées sur des principes et des preuves solides…
comprendre les changements développementaux qui se produisent tout au long de la vie a
potentiellement des implications différentes pour chaque enseignant à chaque étape de
l’éducation » (p. 498). Ils embrassent les trois catégories de processus d’apprentissage de
Howard-Jones et de ses collègues : engager, construire et consolider, mais mettent
également l’accent sur une quatrième, l’application et le transfert de l’apprentissage. Bien
que le patron général de quasi-transfert n'augure rien de bon d’une application automatique
de l'apprentissage à de nouvelles situations, les auteurs soulignent la potentialité de
développer des compétences métacognitives parallèlement aux connaissances et habiletés
spécifiques à un domaine. Ils identifient un rôle pour les enseignants de modélisation des
compétences de transfert. Ils cherchent à identifier des activités concrètes en classe qui
saisiraient (ici et maintenant) les quatre catégories d'apprentissage. Et finalement, ils
identifient une demi-douzaine de caractéristiques d’apprentissage et dressent une liste de
questions pour guider les enseignants dans leur réflexion sur la pratique.
Dans le chapitre conclusif, chapitre 20, les coordonnateurs extraient les quatre thèmes
principaux de ce volume, et se penchent sur le futur des neurosciences de l’éducation. Ils
abordent en particulier deux questions.
Quelle est la valeur ajoutée des neurosciences ?
Une partie du débat autour du champ des neurosciences de l’éducation est la valeur ajoutée
des neurosciences elles-mêmes ? Le comportement n’est-il pas la caractéristique la plus
importante de l’éducation, autrement dit, les apprentissages réalisés de l’enfant ? Comment
la compréhension des mécanismes du cerveau peut-elle aider ? Qu’ajoutent de plus les
neurosciences que la psychologie ? Nous avons demandé à tous les auteurs qui contribuent à
cet ouvrage de prendre en considération cette question en fin de chapitre.
Quelle est l’implication concrète de la recherche dans la classe ?
Étant donné que les neurosciences de l’éducation représentent un champ intrinsèquement
translationnel, le deuxième défi posé aux différents auteurs était d’identifier les implications
concrètes de la recherche et les opportunités de traduction en classe.
Jusqu’à quel point les auteurs ont bien répondu à ces deux questions est un bon indicateur
des progrès actuels dans le domaine des neurosciences de l’éducation.
Notes
i
www.educationalneuroscience.org.uk/resources/neuromyth-or-neurofact/ (NdA)
Forty-winks = sommeil. Il s’avère qu’il y a peu de synonymes commençant par F pour commencer à
dormir ! [NdA].
iii
www.howthebrainworks.science [NdA].
ii
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Références
i
www.educationalneuroscience.org.uk/resources/neuromyth-or-neurofact/ (NdA)
Forty-winks = sommeil. Il s’avère qu’il y a peu de synonymes commençant par F pour commencer à dormir !
[NdA].
iii
www.howthebrainworks.science [NdA].
ii
Unité Socio-Cognition, C.H. Le Vinatier, BRON
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