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Discours de soutenance de la thèse - 11 juillet 2014.

Texte de soutenance de la thèse 11 juillet 2014 Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres du jury, Aujourd’hui, j’ai l’honneur de soutenir devant vous ma thèse de doctorat intitulée « Militants de l’autrement. Sociologie politique de l’engagement et des carrières militantes chez Les Verts et Europe Écologie‐Les Verts ». Mon intérêt pour les questions relatives à l’engagement et aux institutions politiques, n’est pas récent. Laissées en suspend après mon mémoire de DEA, elles ont refait surface alors je militais depuis quelques années chez Les Verts. Engagée depuis 2002, j’avais déjà pu confronter l’état des connaissances sur ce parti à mon expérience pratique, et les travaux existants, le plus souvent anciens et très largement influencés par les approches organisationnelles et fonctionnelles des partis politiques, m’avaient laissée perplexe. Très préoccupés de souligner l’écart qui existe entre la volonté affichée de « faire de la politique autrement » et les pratiques des militants, ou au contraire très prompts à croire sur parole les discours institutionnels, ces travaux donnaient des Verts, une image à la fois confuse et paradoxale. À les lire, on ne savait plus si le parti se composait de militants sympathiques et idéalistes mais sans épaisseur politique, ou d’arrivistes prompts à abandonner toute radicalité idéologique pour récupérer quelques postes. On ne savait pas plus si la structuration de l’organisation verte restait inachevée, ou si elle était, au contraire, déjà parfaitement adaptée aux règles qui régissent la compétition politique. Ayant pu constater in situ que les militants verts entretenaient une pluralité et une diversité de liens avec leur parti et avec les institutions politiques, et que l’organisation qu’ils avaient construit, et qui les avait construit en retour, n’avait rien d’irrationnel ou d’anomique, j’ai entrepris de rendre compte autrement de ce que signifie « être vert ». 1 Bien loin de vouloir procéder à cette occasion à une forme de réhabilitation de ce militantisme avec lequel je savais moi‐même prendre mes distances, je me suis laissée guidée, par le plus saillant de mes constats militants — celui de la dureté, si ce n’est de l’ingratitude, du militantisme vert — et par l’intuition qu’en conséquence, seul quelque chose d’ancien et de profond devait expliquer que les militants, pour peu qu’ils passent le cap de la première année chez Les Verts, tiennent finalement pour très longtemps à leur militantisme, et presque coute que coute. Il ne s’agissait ainsi pas seulement de saisir ce que signifie « être vert », mais également de découvrir comment on pouvait le devenir, et ce qui permettait, à certains plutôt qu’à d’autres, de le rester. C’est donc à partir du triptyque « Devenir vert, être vert et rester vert » que j’ai conduis ce travail doctoral. M’intéressant aux conditions sociales, historiques et biographiques de possibilité de l’engagement et de son maintien, et aux effets de l’appartenance aux Verts sur les carrières militantes et politiques, j’ai fais des choix : ‐ j’ai arbitrairement considéré la possession d’une carte d’adhérent à jour de cotisation, comme marque d’appartenance partisane. Je ne voulais pas avoir à me demander qui devait être considéré comme vert et qui ne le devait pas, dispensant ainsi de mon bureau des brevets de « vertitude ». Ce choix ne m’a pas coûté. Parce que ma présence longue dans le parti me permettait de côtoyer des « ex » et des « futurs » encartés, et parce que je savais que mon travail m’obligerait à rendre compte de la sorte de « zone grise » qui entoure spatialement et temporellement le parti, et par laquelle transitent les militants qui y entrent et qui en sortent. ‐ J’ai aussi choisi de ne pas me perdre dans l’histoire de l’écologie politique, mainte fois comptée sans que ses contours apparaissent autrement que de manière floue. Je me suis concentrée sur la part partisane de cette histoire, pour en souligner les logiques proprement politiques. Cet autre choix ne m’a pas plus coûté que le premier. Je savais que les récits des militants seraient emplis de leurs faits d’armes, de leurs engagements mouvementistes, associatifs, et syndicaux, et que je pourrais, à travers leurs biographies, retracer l’histoire des 2 évènements qui avaient pu compter, et cartographier les espaces et les milieux militants qui jouxtent, et parfois interpénètrent, l’organisation partisane. ‐ J’ai également décidé de ne pas faire, en tant que telle, une sociologie de l’oligarchie verte. Sans compter qu’elle avait déjà été faite, pour les dirigeants écologistes et verts les plus anciens à tout le moins, il m’intéressait plus de comprendre comment l’on pouvait devenir dirigeant que de réaliser une prosopographie de ceux qui l’étaient devenus. Je me méfiais par ailleurs d’interroger celles et ceux qui sont justement les plus aptes à reconstruire, à mythifier leur relation au parti. Ces entretiens ne se sont en fait pas avérés nécessaires, puisque mon immersion dans le terrain m’a permis de voir beaucoup de trajectoires partisanes se composer sous mes yeux. Je n’ai par exemple pas demandé à Cécile Duflot pourquoi elle avait adhéré aux Verts, ou comment elle était devenue secrétaire nationale, puisque je l’ai ai vue entrer et vivre dans le parti, passer de telle fonction à telle autre, et reconstruire les motifs de son engagement au fil de sa carrière. ‐ Enfin, puisque j’étais déjà dans le parti, me demandant souvent s’il ne vaudrait pas mieux en sortir, j’ai transformé mes états d’âme militants en position d’observation. Je me suis postée à l’endroit d’où il me semble que, d’une manière générale, on voit le mieux, c’est‐à‐dire, à la limite, à la frontière. Tournant dans un premier temps le dos au parti, j’ai vu arriver les futurs adhérents depuis les mondes sociaux dans lesquels ils avaient grandi et, souvent, déjà milité. Puis tournant le dos aux mondes extra partisans, je me suis concentrée sur ce qu’il se passait, pour ces adhérents, une fois qu’ils avaient franchi le seuil du parti, sans avoir omis de suspendre le temps au moment de la prise de carte, pour me concentrer sur le point de contact entre individu et parti que cet acte symbolise. Et c’est ainsi que j’ai, en quelque sorte marché, suivant les contours de ce que l’on appelle Les Verts, faisant de temps en temps, des bonds plus profonds, pour observer de plus près des groupes locaux, des commissions, des évènements ; et en d’autres temps, des bonds en dehors, pour rendre compte des campagnes électorales, ou du travail des élus dans les institutions politiques. 3 C’est parce que j’ai opté pour cette position sur le fil, que j’ai trouvé tant à puiser dans la sociologie à la fois dispositionnelle et processuelle de l’engagement d’une part, et d’autre part, dans la sociologie interactionniste. Utiliser ensemble les concepts d’habitus, de carrière et d’institution m’a ainsi permis d’échapper aux apories normatives des travaux précédents et de formuler, à partir de ma connaissance du terrain, mes propres hypothèses. Militante de base en 2002, collaboratrice d’une vice‐présidente de conseil régional à partir de 2003, experte sur des groupes thématiques et formatrice pour le compte du parti dès 2006, et enfin, à partir de 2008, élue municipale et communautaire, et présidente de groupe, j’ai occupé presque tous les rôles partisans disponibles. J’ai de ce fait, pu observer le parti sous tous les angles, et l’éprouver de tous les points de vue. Cela m’a pris du temps. Douze ans d’immersion, quatre ans d’enquête formelle. J’ai suivi pendant plusieurs années la trajectoire de soixante‐deux militants, dans le même temps que je vivais quotidiennement avec de nombreux autres. Voyageant dans plusieurs régions, j’ai comparé des dizaines de groupes locaux. J’ai participé à plusieurs commissions thématiques et groupes de travail, contribué à la rédaction de plusieurs programmes, conduit de nombreuses campagnes, dont la dernière, comme tête de liste. Assistant à tous les grands événements du parti et accédant directement ou par informateurs interposés à ses coulisses, j’ai rédigé dix carnets de terrain, dans lesquels sont consignés mes observations, et mes analyses « à chaud ». Pour réaliser cette thèse, j’ai ainsi utilisé l’ensemble des méthodes qui s’offrent aux sociologues de l’engagement et du militantisme : ‐ souhaitant comprendre qui étaient ces militants, d’où ils venaient, quelle était leur histoire, ce qui les avaient conduit à s’engager chez Les Verts, aux moments spécifiques de leur vie et de celle du parti auxquels ils l’avaient fait, j’ai puisé dans les récits de vie, les longs entretiens semi directifs, les discussions à bâtons rompus, les archives et les photos de famille ; je voulais, par le biographique, saisir au plus près les traces des socialisations primaire et secondaire de mes enquêtés, voir sous mes yeux se reformer leur habitus, se 4 réactualiser leurs dispositions à l’engagement. Et c’est en fouillant méticuleusement leur passé, sur plusieurs générations, réanimant le souvenir de tel oncle curé, ou convoquant celui d’une mère déportée, que j’ai découvert en quoi les militants verts se ressemblent : les mêmes conditions de vie, les mêmes espoirs, la même empathie pour les minorités en lutte, la même quête d’un idéal, la même croyance dans l’utilité de prendre le risque de s’engager. J’ai compris que c’est au nom de cela, et en raison de leur capacité respective à vivre des vies d’ascèse et de lutte que les catholiques, sortis ou non de l’institution religieuse, et les soixante‐huitards, de première et de deuxième génération, qui forment le parti, peuvent se côtoyer. ‐ Les récits des militants anonymes, et le recours aux sources de presse et aux archives officielles du parti, que je suis la seule à ce jour à avoir commencé à dépouiller, m’ont également permis de faire des Verts, une histoire par le bas, palliant ainsi le caractère volatil, lacunaire, et parfois contradictoire des documents militants auxquels j’avais accès. Triangulant toutes les informations, j’ai pu rompre avec un ensemble de lieux communs largement diffusés, tant dans les récits officiels et médiatisés, que dans les mémoires reconstruites des figures du parti. J’ai pu définir trois trajectoires types d’entrée au parti, « altruistes », « spécialistes » et « insoumis ». Elles sont autant de manières d’actualiser des dispositions à l’engagement chez Les Verts, plutôt qu’ailleurs, existent depuis la fondation du parti en 1984, et perdurent quelles que soient les évolutions des espaces sociaux, politiques et partisans. ‐ Utilisant toute la palette méthodologique de l’ethnographe et du sociologue, j’ai surtout affronté les délicatesses d’une situation d’enquête à bien égards inédite. Travailler sur le parti politique dans lequel on est engagé en tant que militant, dont on est également salariée, et surtout élue, ne relève en effet ni de l’évidence, ni de la banalité. Engagée sur et dans le terrain j’ai, durant l’enquête, adopté plusieurs positions et stratégies, endossé plusieurs rôles, joué sur plusieurs registres : militante anonyme, élue identifiée, observatrice déclarée ou incognito. J’ai construit mon objet de recherche, conduit mon enquête et 5 interpréter mes données en faisant de l’autoanalyse, de la réflexivité et de la connaissance par corps, des impératifs méthodologiques. J’ai ainsi procédé, en deux phases, à une autoanalyse formelle, et déconstruis au fil de mes réflexions les catégories de pensée et les pratiques qu’une socialisation partisane ancienne m’avait permis d’acquérir. Revivre et analyser les flux et les reflux de l’illusio militante, prendre conscience et rendre compte de la sorte de sens pratique que nécessite de faire carrière chez Les Verts, ont également été de pair, et m’ont fait être, sans répit, en enquête. J’ai ainsi pu démontrer les rudesses et les difficultés spécifiques de l’apprentissage vert, alourdies par l’image sociale du parti, et insister sur le caractère très sélectif de la socialisation partisane. J’ai pu analyser et présenter, sous forme de séquences contextualisées et en suivant le principe des éliminations successives auquel il donne lieu, le processus de professionnalisation politique. Pour écrire ma thèse, je n’ai gardé que le plus saillant, le plus typique : deux groupes locaux, une commission thématique nationale, quelques campagnes électorales. De quoi donner un point de vue nouveau sur le parti. On le dit régionaliste, je l’ai montré presque jacobin. On le dit environnementaliste, j’ai analysé son offre économique. On le dit mal inscrit dans le champ politique, je l’ai montré semi‐professionnalisé. Ces choix ne me permettent de présenter, j’en ai conscience, qu’une part infime des matériaux dont je dispose. Mais ils ont été faits alors que j’avais pu, comme on le dit parfois, saturer mes hypothèses, lesquelles n’étaient pas saisissables avec les outils théoriques et méthodologiques qui avaient été utilisés jusque‐là. Faisant le pari qu’il était possible de produire une sociologie de l’engagement militant par l’engagement militant, j’ai ainsi pu répondre à l’ensemble des questions que posent ce type de travail — qui s’engage ? où ? comment ? à quel moment ? pour faire quoi ? de quelle manière ? jusqu’à quand ? —, décrire finement les mécanismes de la socialisation partisane, d’écologisation des idées et des pratiques militantes, et analyser l’ensemble du processus d’apprentissage et d’exercice des métiers de collaborateur et de représentant politique. 6 Ainsi conduit, mon travail permet de réfuter de nombreuses hypothèses anciennes : le caractère prépondérant de la préoccupation environnementale dans l’adhésion, la frustration et le déclassement social des militants et la revalorisation sociale que leur procurerait l’adhésion, l’absence d’idéologie verte, le caractère antisystème de leur projet et de leur organisation. Il permet, dans le même temps, de prendre toute la mesure du poids de la socialisation catholique et des engagements familiaux, de préciser le rôle de la participation des militants aux événements de mai‐ juin 1968 et aux luttes de terrain qui les ont suivies, et de pointer le caractère dominé du multipositionnement des militants. Mon travail permet également de révéler la nature relativement stigmatisante du militantisme vert, de souligner le poids des campagnes électorales et des formats de réunion dans l’engagement, et de comprendre, enfin, les multiples expressions de « l’être vert », qui sont révélatrices de manières de concevoir la politique et d’en faire. Ni religion, ni morale, ni don de soi, pas plus que stratégie consciente de professionnalisation, le militantisme vert est finalement, à mon sens, une réinvention de soi en contexte partisan. Adossé à un ensemble distinctif de pratiques quotidiennes et politiques, qui s’amenuise d’autant plus que les militants se professionnalisent et que le recrutement partisan évolue, il qualifie celles et ceux dont l’habitus partisan, structuré sur le mode minoritaire, leur permet de jouer des ambiguïtés du terme même de « politique », et d’utiliser l’ensemble des identités stratégiques qu’autorise l’institution partisane. Souple mais exigeante, à l’idéologie à la fois moraliste et progressiste, elle structure des représentations aussi prescrites que plurielles, et tolère autant de « vérités » que de « pratiques » différenciées. Constitués en avant‐garde sociale et politique, veillant à toujours conserver une longueur d’avance dans l’écologisation de leurs pratiques et de leurs prises de positions, afin de bénéficier pleinement des rétributions symboliques que cette position confère à celles et ceux qui peuvent en assumer les coûts, les verts composent avec les règles qui régissent le champ politique et que, « minoritaires dans les majorités » ou siégeant dans les oppositions, ils ne peuvent pas transformer. Outsiders mais pas amateurs, ils font de la politique, ce qui les différencie clairement des militants moraux ou altermondialistes avec lesquels on les 7 compare trop souvent, et qui font généralement confondre, à tort, « écologistes » et « verts ». La récente transformation des Verts en EELV et la progressive – bien qu’incertaine ‐ présidentialisation interne du parti sont peut‐être à penser au regard de ces derniers constats. En effet, si cette transformation est bien la preuve de l’impatience commune aux militants verts à gouverner, elle montre, au‐delà, que les Verts rompent en partie, ces derniers temps, avec les types de légitimité qui prévalaient chez eux jusque là. L’éthique, la compétence et la participation aux luttes de terrain restent structurantes. Mais elles sont désormais pesées au regard du capital médiatique des candidats, et de leur capacité à rendre désirables les évolutions qu’implique la « transformation écologique de la société ». Dans ce cadre, le dyptique idéologique vert, qui allie transformation des modes de gestion des affaires publiques et pratiques individuelles distinctives, est nécessairement réinterprété. Les caricatures qui ont été dressées — avec leur participation — de Nicolas Hulot et d’Éva Joly lors de la primaire de 2011, et qui faisaient du premier le tenant de l’écologie de la pédagogie, et de l’autre celle de l’écologie punitive, montrent bien qu’au‐delà des discours de démarcation que les représentants du parti peuvent tenir, ce sont bien les pratiques distinctives qui sont au cœur des enjeux. L’attachement des militants à ces dernières et à leur valorisation dans l’espace politique, est ainsi, structurant, et l’on peut supposer que si cet attachement disparaissait, les verts perdraient le fondement pratique qui légitime leur position d’avant‐garde politique et sociale, et avec lui, les bénéfices qu’ils tirent de cette position dans la compétition électorale. Voulant dire quelque chose de juste et d’utile sur Les Verts, je n’ai peut‐être pas été au bout de ce que mes matériaux d’enquête me permettaient de dire. Mais puisque l’on m’a invitée à monter en généralité, ‐ je dirai que j’ai, tout d’abord, contribué à faire une sociologie familiale de l’engagement militant. Ayant eu l’opportunité d’enquêter sur toutes les familles des militants sélectionnés et de réaliser des entretiens avec sept de leurs enfants ou, autrement dit, avec des représentants de la première génération d’individus 8 socialisés de manière « intentionnelle » aux manières vertes de penser et de faire, j’ai pu mesurer le rôle d’aïeux, de collatéraux lointains ou plus largement de ce que je nomme les « autrui significatifs » dans le processus de socialisation politique. Rarement investiguées, ces relations informent largement sur la part de ce qui s’hérite dans l’engagement et de ce qui structure ses modalités et lieux d’expressions. Grâce aux enfants de mes enquêtés, je peux également supposer que la pérennité des Verts tient en partie au sentiment des générations futures qu’ils constituent la meilleure terre d’expression de leur bonheur militant. ‐ Je dirais, ensuite, que j’ai contribué à éclairer le mécanisme d’imbrication de l’habitus et de l’institution en contexte partisan, et à dessiner les contours de ce que serait un habitus de minoritaire. J’ai, finalement, été beaucoup préoccupée par cela. Montrer que l’ancien structure bien au‐delà des volontés, qu’une institution, même souple, peut réactualiser et faire tenir ensemble des dispositions, les refaçonner, et que c’est dans ce qui se joue au moment de l’interaction de l’habitus et de l’institution que vivent l’organisation et l’engagement militant. Que c’est aussi dans ce moment, qu’ils peuvent, parfois, se trouver à être désajustés, inopérants, presque obsolètes. Les désengagements sont en effet la preuve que les capacités de restructuration de l’habitus et l’élasticité de l’institution, ne sont, chez Les Verts pas plus qu’ailleurs, infinies. Comme toute entreprise de (re)fabrication de soi, le « devenir vert » a en effet ses limites. De ce point de vue, je pourrais ainsi dire que, d’une certaine manière, en cherchant à comprendre comment se constitue et vit une avant‐garde, j’ai fais une sociologie de l’élastique, ou plus exactement, de l’élasticité des structures sociales. À la manière des enfants qui fabriquent ces petits bracelets qui font la mode de cet été, j’ai entrelacé et noué ensemble, un habitus, une institution, une réactualisation d’habitus, une rénovation d’institution, un dépérissement d’habitus, un reflux de l’engagement. J’ai entremêlé, démêlé, observé ma vie et celle des autres militants, pour voir jusqu’où ce qui nous constitue en être politique peut aller, tenir, se nouer ; à quel prix l’on gagne quelque marge de liberté, sur, avec ou malgré l’institution ; et à quel moment, 9 l’entrelacement de ce que nous sommes et de ce nous construisons, finit par se défaire, ou par se transmettre. Je vous remercie de votre attention. 10