Papers by Valentin Husson
Aux trois blessures narcissiques que Freud dégagea en son temps, le temps présent en laisse aff... more Aux trois blessures narcissiques que Freud dégagea en son temps, le temps présent en laisse affleurer une quatrième : celle de l’écosophie. L’être humain savait déjà, depuis Copernic, n’être plus au centre de l’Univers (l’héliocentrisme remplaça le géocentrisme) ; il avait également acté, depuis Darwin, qu’il n’était plus premier dans l’ordre de la création, mais le produit tardif d’une longue et lente évolution d’une espèce simiesque (la théorie de l’évolution remplaça le créationnisme) ; il avait tout encore subi, depuis Freud, le contre-coup de la découverte de l’inconscient, en reconnaissant qu’il n’était plus maître dans sa propre maison, et que, pis encore, sa maison était hantée par une histoire ne cessant de faire retour ; il commence à prendre conscience, désormais, qu’il n’est pas au sommet de la Nature, mais qu’il est une partie de celle-ci. Cette quatrième blessure narcissique, destituant dernièrement la maîtrise de l’animal humain, répond du nom d’écosophie.
Rien de plus quotidien que l'acte de manger. Rien de plus vital non plus. Mais n'y at -il pas dav... more Rien de plus quotidien que l'acte de manger. Rien de plus vital non plus. Mais n'y at -il pas davantage qu'une simple nécessité dans l'art d'apprêter les mets et de les goûter ? Dans cet essai gourmand et érudit, traversant avec grâce l'histoire de la philosophie comme celle de la gastronomie, Valentin Husson suggère qu'il y en effet a plus-beaucoup plus. Manger est un art-un art qui relève autant de l'esthétique que de l'éthique, du savoir que de la politique ou de l'écologie. Goûter, c'est apprendre à recréer un rapport avec notre environnement direct. C'est retrouver la saveur possible d'un terroir, d'une saison ou d'un produit. C'est choisir comment s'orienter par la bouche dans un monde qui aimerait décider de notre goût à notre place. C'est, surtout, se réconcilier avec l'idée que la vie puisse être bonne au sens le plus littéral du terme : au sens de sa saveur. Et si l'art de vivre était d'abord un art des vivres ?
On aura essayé, dans notre période où des actes meurtriers sont commis au nom de Dieu, de réévalu... more On aura essayé, dans notre période où des actes meurtriers sont commis au nom de Dieu, de réévaluer la compréhension de celui-ci dans la philosophie contemporaine de Kant à Lévinas. En effet, là où autrefois Dieu réglait le régime de signification de la vie et de la mort, jusqu'à déterminer le sens du sacrifice de cette vie, la philosophie contemporaine tente de dégager – c'était du moins notre thèse principale – un Dieu déceptif et non plus tout-puissant. Ce Dieu ne justifierait ainsi plus le sens de la vie, mais décevrait le sens de celle-ci en l'ouvrant non pas à la promesse d'une vie après la mort, mais à la finitude comme telle. Cette ouverture divine à la finitude, ouvre en cela même à des injonctions éthiques et politiques. Si « Dieu est mort », ainsi, c'est en tant que, dans sa mort, il ouvre également l'instant de la mort en général : la mienne et celle de l'Autre – a fortiori –, en intimant chacun et chaque autre à se veiller dans une Bien-veill...
On aura essaye, dans notre periode ou des actes meurtriers sont commis au nom de Dieu, de reevalu... more On aura essaye, dans notre periode ou des actes meurtriers sont commis au nom de Dieu, de reevaluer la comprehension de celui-ci dans la philosophie contemporaine de Kant a Levinas. En effet, la ou autrefois Dieu reglait le regime de signification de la vie et de la mort, jusqu'a determiner le sens du sacrifice de cette vie, la philosophie contemporaine tente de degager – c'etait du moins notre these principale – un Dieu deceptif et non plus tout-puissant. Ce Dieu ne justifierait ainsi plus le sens de la vie, mais decevrait le sens de celle-ci en l'ouvrant non pas a la promesse d'une vie apres la mort, mais a la finitude comme telle. Cette ouverture divine a la finitude, ouvre en cela meme a des injonctions ethiques et politiques. Si « Dieu est mort », ainsi, c'est en tant que, dans sa mort, il ouvre egalement l'instant de la mort en general : la mienne et celle de l'Autre – a fortiori –, en intimant chacun et chaque autre a se veiller dans une Bien-veill...
Les Cahiers philosophiques de Strasbourg, 2015
On se propose dans ce livre de relire l’Histoire occidentale à
partir du problème de l’appropriat... more On se propose dans ce livre de relire l’Histoire occidentale à
partir du problème de l’appropriation. L’Histoire ne serait
pas celle de l’Esprit (Hegel) ou de l’être (Heidegger), mais
celle de notre appropriation de la Terre. Une Histoire de
l’avoir reste ainsi à faire. Dès son commencement, cependant,
une confusion sémantique a recouvert le sens originel
de cette appropriation, qui n’est pas possession prédatrice,
mais procès de (co-)propriation, déploiement de ce qui est
« approprié » pour bien vivre dans cette copropriété des
vivants. Cette oblitération fit que l’Histoire occidentale se
déploya comme un arraisonnement de la Nature, et un effacement
de cette éco-logique. Le sens de notre Histoire, qu’on
croyait finie, s’indique par là même: penser une appropriation
de la vie terrestre rendant possible sa pérennité et sa
continuité. L’Ecologique de l’Histoire articule cette hypothèse
nouvelle et inédite.
« Il y a plaisir à saluer l’arrivée d’un philosophe tout neuf qui
soudain bondit dans le cortège dionysiaque. Plus on est de fous,
plus on pense, le proverbe dit vrai et notre temps de misère a plus
que besoin de se refaire – s’il se peut – une vigueur spéculative. »
(Jean-Luc Nancy)
Je ne ferai pas ici la critique sévère qu'exige l'Islam. De culture chrétienne, par ma famille, r... more Je ne ferai pas ici la critique sévère qu'exige l'Islam. De culture chrétienne, par ma famille, résolument athée depuis l'adolescence, je n'ai pas à me substituer à ceux qui doivent prendre la parole, et le calame de l'écriture, pour opérer ce travail d'herméneutique, de généalogie, et de déconstruction, qui figure, déjà, dans la sourate 96 du Coran (première sourate reçue par le prophète Mahomet, première dans l'ordre chronologique et aussi dans l'ordre des impératifs), comme l'injonction même du musulman : « Lis au nom de ton Seigneur (…), C'est Lui qui a fait du calame un moyen du savoir et qui a fait connaître à l'homme ce qu'il ignorait ». Iqrâ' est traditionnellement traduit par « lis », mais il signifie également : « rassemble », c'est-à-dire rassemble tous les éléments d'analyse, de discernement, pour produire une lecture différenciée, nuancée ; rassemble la véridicité de ce texte et l'historicité présente de ton temps, afin de produire une vérité époquale et relative, et non absolue et définitive ; lie, en somme, l'esprit de la lettre à l'esprit de ton temps. Cette nouvelle herméneutique de l'Islam, qui se fait déjà et continuera à se faire-je l'espère-avec force, nécessite que l'Islam se départisse des courants islamistes qui le grèvent.
On essaye dans cet article de réévaluer le geste prétendument "radical" du réalisme spéculatif de... more On essaye dans cet article de réévaluer le geste prétendument "radical" du réalisme spéculatif de Quentin Meillassoux. De son ontologie et de sa théologie, ainsi que sa conception du Dieu à venir en tant qu'elle se libère - ou pas - des philosophies dont elle veut s'extraire. Cette pensée est-elle novatrice? Rompt-elle avec la tradition philosophique et religieuse? Le "peut-être" du Coup de dés est-il le signe de l'absolue nécessité de la contingence ou le nom que les Juifs de la Kabbale donnaient au Dieu lui-même (El venant de "Oulaî" signifiant "Peut-être)?
Là où Heidegger nous aura dit que l'être ne pouvait être pensé que par le Poème, Badiou ne le cro... more Là où Heidegger nous aura dit que l'être ne pouvait être pensé que par le Poème, Badiou ne le croit pensable qu'à partir du Mathème. Les deux, pourtant, s'accordent sur ceci que l'ontologie thématise l'être comme rien. Pour le dire d'emblée : l'ontologie nous astreint à « une théorie du vide ». Ou plus encore : le vide est le nom propre de l'être. Ce qui, on le sait, ne s'oppose en rien à Heidegger. Car ce dernier, en effet, a toujours été très à même d'égaliser l'être à son retrait, d'égaliser l'être à l'absence, à rien, au vide. L'être, dit-il, dans Über den Anfang, est « une fumée vide ». Ou encore : « le Vide est le même que le Rien ». Mais qu'est-ce à dire que l'ontologie n'a plus à s'épuiser « à la recherche du rien » ? Laquelle recherche est, pour Badiou, ce qui rend la poésie, chez Heidegger, « complice de la mort ». Pourquoi désuturer l'ontologie du poétique, afin de la rendre à la mathématique ? Et comment, si « l'être est mathématique », peut-il être pensé par cette dernière ? En s'intéressant à toutes ces questions, nous verrons que l'ontologie badiousienne, de conjurer le spectre du vide, conjure avec lui le temps, la dissémination du temps, qu'on appelle la différance ou la mort, et se fait reprendre par là même dans le tissu métaphysique le plus traditionnel, et dans une sorte de religion du politique.
-Déconstruire, dit-on, c'est démanteler, déclôturer, déclore, autrement dit : libérer. Cette libé... more -Déconstruire, dit-on, c'est démanteler, déclôturer, déclore, autrement dit : libérer. Cette libération laisserait ainsi apparaître une autre ossature, un autre rapport architectural et architectonique de notre édifice philosophique. C'est aussi libérer la pensée de ses oppositions, de ses strictions dans laquelle elle est condamnée. Au fond, déconstruire reviendrait donc à décondamner, si condamner dit bien également en français : enfermer, enclore, délimiter (comme lorsqu'on condamne une pièce, par exemple). Or, c'est cette condamnation et cette décondamnation que j'aimerais ici interroger, suspecter, rendre énigmatique. Dit autrement : c'est le geste même de Derrida, son style ou ses styles, ses tours et contours d'écriture que je voudrais défier. Ce qui est impossible, on le sait. Derrida est inassignable : il y en a plus d'un, toujours un de plus, toujours un tour retors en plus, un tour, un détour, un contour supplémentaires. Même cela nous l'aurons appris de lui. Comme nous aurons appris de lui que toute fidélité se devait d'être infidèle, et que tout serment ne pouvait commencer inévitablement que par « un parjure ». Cette infidélité faite à Derrida, cet enfant dans le dos que l'on aimerait lui faire ici, concernerait précisément la condamnation. Ce qui fait que, parfois, les styles de Derrida condamnent par avance ce qu'ils voudraient dé-condamner, c'est-à-dire libérer. Condamner, en cela, signifiera donc : fermer, réduire, limiter, cloitrer, de telle façon que l'ouverture ne libère plus ce qu'elle devait libérer. « Plus d'une langue », « plus d'une limite », cela n'a jamais pu signifier pour lui : ce qui n'a plus de limite. Ou si l'on aime mieux : cela n'a jamais pu signifier « l'illimitation du jeu » 1 , comme il l'avançait pourtant dans De la grammatologie. Ainsi, si en effet l'opération derridienne fut définie, dès son commencement, par la dissémination infinie, par l'itérabilité en droit illimitée, par la destinerrance sans retour, ou l'incalculabilité, cette opération, dis-je donc, aura toujours déjà été écrite sous la contrainte de certains tropes, de certaines figures, d'une certaine tonalité. Cette tonalité, Derrida le disait lui-même, était celle de la nostalgie, de la mélancolie, voire de la contrition (acte de celui qui est plein de regret pour ses péchés). Ce tropisme des tropes nostalgiques ou mélancoliques, comme nous l'appellerons ici, ce naturel stylistique de Derrida, nous occupera dès lors, pour ce qu'il contraint et condamne son geste disséminant. Ecrivant sous cette contrainte, et la dictée de cette contrainte -mais peut-on d'ailleurs écrire autrement que sous la contrainte d'un symptôme ? -, Derrida contraint la portée de son geste pour en limiter le mouvement infini. A ce titre, si la déconstruction arrive bien depuis une excédance ou une excession, depuis un plus inassignable et contagieux, si elle arrive donc bien depuis « plus d'une langue », c'est ce « plus », cette surenchère, 1 Derrida, De la grammatologie, Paris, Les éditions de minuit, 1968, p.73.
Que peut la musique d'une langue ou d'un mot? Est-elle, comme le disait Hugo, "un bruit qui pense... more Que peut la musique d'une langue ou d'un mot? Est-elle, comme le disait Hugo, "un bruit qui pense"? Y-a-t-il, dès lors, de la musique en philosophie? La philosophie peut-elle penser la (ou sa) musicalité? Questions subsidiaires : la philosophie musicalise-t-elle ? Inversement, la musique philosophe-t-elle?
Ce sont à ces questions qu'on tente de répondre, en interrogeant l'allergie des philosophes à l'égard d'une musique qui viendrait contaminer et menacer leur langue. Qu'est-ce que cette haine de la musique dit de la philosophie, de Platon jusqu'à Heidegger? Et si la pensée - pour penser encore - devait enfin succomber aux chants des sirènes?
Drafts by Valentin Husson
Ce que j'aimerais tenter faire c'est de retracer brièvement les grands moments de l'universel dan... more Ce que j'aimerais tenter faire c'est de retracer brièvement les grands moments de l'universel dans l'Histoire occidentale, de baliser massivement ses ruptures et ses compréhensions, afin d'ouvrir la possibilité de penser ce que pourrait être l'universel de l'écologie.
Ce que j'aimerais souligner, depuis Dostoïevski, depuis son écriture poétique ou philosophique, e... more Ce que j'aimerais souligner, depuis Dostoïevski, depuis son écriture poétique ou philosophique, est la valeur des dettes dans son oeuvre. De son premier roman, Les Pauvres gens à son dernier Les Frères Karamazov, en passant par Le Joueur, Crime et châtiment ou L'Adolescent, la dette et la culpabilité sont au coeur de l'oeuvre de Dostoïevski. Si Dieu n'existe pas, tout est permis ; et cette totale permissivité figure notre culpabilité. C'est du moins l'interprétation admise. À ce titre, je dirais que ce que l'écrivain russe dégage tout au long de ses romans ou de ses journaux : c'est l'espoir d'une restitution des dettes. Restituer, cela veut dire : rendre à quelqu'un son dû ; le libérer de ses dettes, le déculpabiliser. Il y a donc une éthique à penser à l'horizon de cela : celle d'une vie rachetée de sa ruine (dettes, crime, culpabilité, condamnation à mort) et rendue à son innocence. Tant de motifs ou de figures indiquent ce rachat chez Dostoïevski : l'amour, l'argent, le Christ. Nous passerons, ainsi, par celles-ci pour rendre raison de ces nombreuses raisons d'espérer. L'autre enjeu est de faire valoir le geste restitutif lui-même comme le geste impératif de la pensée en temps de détresse. Le XX° siècle philosophique aura été celui de la déconstruction ; de Heidegger à Derrida, il aura fallu remettre en question toutes les fondations de notre architectonique philosophique, quitte à nous laisser désemparer au beau milieu des ruines, quitte à demeurer paralyser, dans l'incapacité d'affirmer un espoir en l'avenir. Après la déconstruction, donc, la restitution. Dostoïevski figure ce « pas en arrière » qu'il nous faut faire afin de penser à nouveaux frais. Par son oeuvre, il ouvre, plus qu'aucun autre, la question de la restitution, qu'elle soit celle des dettes par l'amour, ou celle de l'espoir rachetant la vie de sa ruine nihiliste. Ainsi, toute la question de Dostoïevski est celle de la restitution de l'espoir, soit celle, c'est égal, de la restitution de l'innocence de vivre.
J'aimerais avancer trois choses. Premièrement, je tiendrais que la vie, chez Derrida, a manqué d'... more J'aimerais avancer trois choses. Premièrement, je tiendrais que la vie, chez Derrida, a manqué d'être définie comme indéconstructible, en ce qu'elle a été mise sous condition de la mort. J'appellerai cette vie : la vie conditionnelle. Deuxièmement, j'essayerai de rendre compte que c'est en raison d'une certaine forme qu'a pu prendre le geste déconstructif, dans certaines de ses accentuations, que cette vie-là n'a pu au fond être pensée dans son inconditionnalité. Enfin, et troisièmement, j'aimerais soutenir l'hypothèse qu'être fidèle à Derrida, et à ce qu'on a pu appeler commodément la déconstruction, nécessite aujourd'hui, plus que de déconstruire, de restituer les indéconstructibles. Ce fut, je le crois, le dernier enjeu de la pensée de Derrida. Après la déconstruction, la restitution ? Voilà le programme démesuré pour qui, ayant tout appris de Derrida, croit savoir qu'être fidèle ne se peut sans infidélité.
Philosophie by Valentin Husson
Histoire by Valentin Husson
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partir du problème de l’appropriation. L’Histoire ne serait
pas celle de l’Esprit (Hegel) ou de l’être (Heidegger), mais
celle de notre appropriation de la Terre. Une Histoire de
l’avoir reste ainsi à faire. Dès son commencement, cependant,
une confusion sémantique a recouvert le sens originel
de cette appropriation, qui n’est pas possession prédatrice,
mais procès de (co-)propriation, déploiement de ce qui est
« approprié » pour bien vivre dans cette copropriété des
vivants. Cette oblitération fit que l’Histoire occidentale se
déploya comme un arraisonnement de la Nature, et un effacement
de cette éco-logique. Le sens de notre Histoire, qu’on
croyait finie, s’indique par là même: penser une appropriation
de la vie terrestre rendant possible sa pérennité et sa
continuité. L’Ecologique de l’Histoire articule cette hypothèse
nouvelle et inédite.
« Il y a plaisir à saluer l’arrivée d’un philosophe tout neuf qui
soudain bondit dans le cortège dionysiaque. Plus on est de fous,
plus on pense, le proverbe dit vrai et notre temps de misère a plus
que besoin de se refaire – s’il se peut – une vigueur spéculative. »
(Jean-Luc Nancy)
Ce sont à ces questions qu'on tente de répondre, en interrogeant l'allergie des philosophes à l'égard d'une musique qui viendrait contaminer et menacer leur langue. Qu'est-ce que cette haine de la musique dit de la philosophie, de Platon jusqu'à Heidegger? Et si la pensée - pour penser encore - devait enfin succomber aux chants des sirènes?
Drafts by Valentin Husson
Philosophie by Valentin Husson
Histoire by Valentin Husson
partir du problème de l’appropriation. L’Histoire ne serait
pas celle de l’Esprit (Hegel) ou de l’être (Heidegger), mais
celle de notre appropriation de la Terre. Une Histoire de
l’avoir reste ainsi à faire. Dès son commencement, cependant,
une confusion sémantique a recouvert le sens originel
de cette appropriation, qui n’est pas possession prédatrice,
mais procès de (co-)propriation, déploiement de ce qui est
« approprié » pour bien vivre dans cette copropriété des
vivants. Cette oblitération fit que l’Histoire occidentale se
déploya comme un arraisonnement de la Nature, et un effacement
de cette éco-logique. Le sens de notre Histoire, qu’on
croyait finie, s’indique par là même: penser une appropriation
de la vie terrestre rendant possible sa pérennité et sa
continuité. L’Ecologique de l’Histoire articule cette hypothèse
nouvelle et inédite.
« Il y a plaisir à saluer l’arrivée d’un philosophe tout neuf qui
soudain bondit dans le cortège dionysiaque. Plus on est de fous,
plus on pense, le proverbe dit vrai et notre temps de misère a plus
que besoin de se refaire – s’il se peut – une vigueur spéculative. »
(Jean-Luc Nancy)
Ce sont à ces questions qu'on tente de répondre, en interrogeant l'allergie des philosophes à l'égard d'une musique qui viendrait contaminer et menacer leur langue. Qu'est-ce que cette haine de la musique dit de la philosophie, de Platon jusqu'à Heidegger? Et si la pensée - pour penser encore - devait enfin succomber aux chants des sirènes?