ODG Postambule

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EL O. de G.

L’adresse aux femmes (l. 1 à 19) – Postambule, de « Femme, réveille-toi » à « vous n’avez qu’à le vouloir. »

Problématique – Étudiez la stratégie argumentative visant à convaincre les femmes de faire valoir leurs droits

Introduction
Si la Révolution française permet de déclarer tous les citoyens égaux, elle laisse de côté les femmes, qui,
malgré le rôle qu’elles ont joué en 1789, n’obtiennent pas dans les faits les mêmes droits que les hommes. C’est
pourquoi, en 1791, Olympe de Gouges rédige une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Dans ce
texte, elle rappelle à l’Assemblée nationale la nécessité d’une réelle égalité entre les sexes pour permettre un
gouvernement et une société équilibrés. A la suite de l’énumération des différents articles, elle s’adresse
directement aux femmes dans un Postambule, pour les inciter à rejoindre son combat. Elle entend ainsi les
convaincre d’obtenir des droits réels. Après avoir attiré leur attention sur leur propre condition, l’auteure dresse le
constat d’inégalités persistantes après la Révolution, avant d’énumérer une série de conseils.

I. Lignes 1 à 6 : L’appel au sursaut et à la révolte

a. une voix de la raison


➢ apostrophe « Femme » (l.1) qui ouvre le texte – elle est directement prise à parti, sens générale ; fait écho
à l’adresse aux hommes
➢ 1er verbe à l’impératif « réveille-toi » (l.1) – O. de G. se positionne ainsi comme la voix de la raison et
cherche à provoquer une réaction chez des interlocutrices, c’est-à-dire l’ensemble des femmes
➢ vb. à l’impératif, « reconnais tes droits » (l.1) signale que l’injonction faite aux femmes est légitime ; le
mot « droits » se trouve en opposition avec le terme « usurpation « (l.3)

b. une description péjorative de la société de l’Ancien Régime


➢ la métaphore du « tocsin de la raison » (l.1) fait référence à la Révolution française et au fait qu’elle
s’appuie sur les principes des Lumières, comme l’égalité et la liberté, époque d’avancée dans le domaine
des connaissances
➢ hyperbole « tout l’univers » (l.1) permet de donner à ce changement une portée qui dépasse les frontières
mêmes de la France, ainsi l’auteure doit pouvoir concerner les femmes du monde entier
➢ les champs lexicaux de la bêtise et de l’ignorance décrivent l’Ancien Régime comme une société pleine
« de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonge » (l.2) marquée par « la sottise et […]
l’usurpation » (l.3) ; certains mots comme « fanatisme » et « superstition » constituent peut-être des
attaques contre l’Église (voir aussi Candide de VOLTAIRE, chapitres sur l’Inquisition, l’autodafé)
➢ O. de G. rappelle combien le changement de situation de l’homme est en lien avec l’action de la femme ;
« l’homme esclave » a pu atteindre la liberté en unissant les forces de tous mais aussi de toutes ; elle
insiste bien sur le rôle de la femme dans l’accession à la liberté ; l’expression « avoir besoin » montre
combien l’homme est redevable à la femme

c. dénonciation de la passivité des femmes


➢ l’interrogation finale est marquée par la tonalité polémique : « O femmes ! Femmes, quand cesserez-
vous d’être aveugles? » ; le « ô » , interjection souvent utilisée en poésie donne au texte un ton
emphatique ; les femmes ainsi apostrophées retrouvent, comme au début du texte, une place d’accusées
➢ O. de G. sous-entend que les femmes sont en partie responsables de leur sort, et les incite à plus de
clairvoyance : « quand cesserez-vous d’être aveugles ? » (l.5-6) ; les femmes sont « aveugles »
puisqu’elles laissent les hommes les asservir, « il est devenu injuste envers sa compagne » (l.5) et
n’agissent pas pour mettre fin à cette situation ; leur passivité est implicitement soulignée

II. Lignes 6 - 13 : Le constat d’une inégalité marquée

a. échec de la Révolution française ?


➢ dans les réponses aux 2 questions, « Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la
Révolution ? » (l.6) et « Votre empire est détruit ; que vous reste-t-il donc ? » (l.8), O. de G. fait le constat
de l’échec de la Révolution française en ce qui concerne les droits des femmes ; le changement de
régime leur a fait même perdre le peu d’influence qu’elles avaient
➢ l’injustice des hommes s’impose dès lors ainsi que la nécessité d’agir, cf les champs lexicaux de la
bassesse et de l’oppression : « mépris » (l.6), « corruption » (l.7), « détruit » (l.8), « injustices » (l.8)
b. revendication d’un statut égal avec le sexe masculin
➢ l’expression « La réclamation de votre patrimoine » (l.9) renvoie aux droits des femmes, à savoir au
statut égal avec le sexe masculin dont elles devraient bénéficier
➢ choix du terme « patrimoine » qui fait référence à un ensemble de biens hérités collectivement ; O. de G.
souligne que ces droits sont naturels

c. critique de la religion chrétienne


➢ O. de G. fait référence aux noces de Cana de manière ironique ; l’allusion à l’épisode de la vie du
Christ lors des noces de Cana est reprise par la question finale qui serait posée par les « législateurs » ;
« femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? » (l.12-13) Il s’agit ici d’une interprétation des
paroles du Christ qui aurait déclaré à sa mère Marie qu’il était de nature divine quand elle n’était
qu’humaine. Olympe de GOUGES affiche peut-être là son esprit anticlérical en concluant à l’expression
d’un mépris du Christ pour les femmes
➢ elle critique ainsi les préceptes de la religion chrétienne, qui pourrait légitimer l’inégalité des sexes et
continuer à influencer la vie politique du pays, comme pendant l’Ancien Régime : « longtemps
accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison » (l.11-12)
➢ la réponse à la dernière question est formulée explicitement par l’auteure ; la brièveté de celle-ci,
« Tout, auriez-vous à répondre » s’oppose à la longueur de la phrase précédente dans un souci
d’insistance ; le conditionnel présent « auriez-vous » montre combien cette réponse reste hypothétique :
pour que « tout » soit commun entre l’homme et la femme, l’auteure suggère que la femme doit prendre
son avenir en main

III. Lignes 13 - 19 : Des revendications placées sous le signe de la raison

a. des revendications légitimes


➢ O. de G. incite les femmes à défendre leurs droits en faisant appel à la « raison » (l.14) et à la
« philosophie » (l.15)
➢ elle les invite à argumenter avec rigueur sur la nécessité de l’égalité des sexes et en montrant le
caractère objectivement injuste ou méprisant de l’attitude des hommes : « vaines prétentions de
supériorité » (l.15), elle rend ces revendications légitimes
➢ l’auteure insiste aussi sur le courage et la force de ses concitoyennes (l.14) et les assure qu’elles sont
capables , grâce à leur obstination, de faire entendre raison aux hommes : « vous verrez bientôt... » (l.16)

b. une tonalité épique


➢ les femmes sont désignées comme des combattantes face aux ennemis que ce sont les hommes cf le
champ lexical de la guerre avec , dans le camp masculin, la « faiblesse » (l.8, 13), de « vaines
prétentions » (l.15), de « serviles adorateurs rampant » (l.16-17), et du côté féminin, la « force » opposée
« courageusement » (l.14), des « étendards » (l.15), « l’énergie déployée » (l.16), des « trésors » (l.17) et
des « barrières » (l.18) renversées
➢ ce lexique de guerre rappelle la tonalité épique, propre à exalter les prouesses de héros

c. message d’espoir adressé aux femmes


➢ les conséquences du soulèvement des femmes sont formulées au futur prophétique, empreint d’espoir :
« vous verrez » (l.16)
➢ le verbe « partager » (l.17) montre combien l’avantage est grand pour tous d’adopter jusqu’au bout les
principes de la Révolution
➢ la dernière phrase insiste sur le pouvoir d’émancipation des femmes et leur adresse un message fort
d’encouragement et d’espoir
➢ GN « votre pouvoir » (l.18) et verbe « vouloir » (l.19) se font écho sur le plan sonore dans la dernière
phrase, liés à une même action ; l’auteure souligne que par leur volonté et leur courage, les citoyennes
sont aptes à vaincre les « barrières » (l.18) des préjugés et des inégalités sociales : « vous n’avez qu’à le
vouloir » (l.18-19) ; O. de G. fait ainsi des femmes des êtres de raison et de caractère

Conclusion
La réécriture de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789) permet à Olympe de Gouges
de mettre en avant le rôle majeur des femmes au sein de la société. C’est à elles que cet extrait s’adresse avant
tout. Il vise en effet à les amener à réfléchir sur leur condition pour agir avec raison et revendiquer leurs droits
naturels. L’extrait est ainsi marqué par un ton très combatif et fédérateur. La modernité de ce texte se mesure au
fait que le discours féministe déployé par Olympe de Gouges pour valoriser et défendre les droits des femmes au
XVIIIe siècle est toujours d’actualité.
Question de grammaire

Relevez toutes les propositions négatives. Vous indiquerez pour chacune d’elles le type de négation dont il s’agit,
les éléments qui les composent et leur portée.

➢ 2 négations partielles composées des adverbes de négation « ne » et « plus » : « Le puissant empire de la


nature n’est plus environné de préjugés » (l.2) et « mais qui n’est plus de saison » (l.12) ; dans les 2 cas,
les négations portent sur les attributs du verbe « être »
➢ 2 négations restrictives composées de l’adverbe de négation « ne » et de la conjonction de
subordination « que » : « Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des
hommes » (l.7) et « vous n’avez qu’à le vouloir » (l.18-19) ; elles peuvent ainsi être remplacées par
« seulement »
➢ une négation explétive composée uniquement de l’adverbe de négation « ne » : Craignez-vous que nos
législateurs français […] ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? » (l.10-
13) ; la négation explétive n’a pas de sens négatif et ne modifie pas le sens de l’énoncé ; son usage
est purement formel ; il est tout à fait possible de supprimer « ne » sans que le sens de la phrase en soit
modifié

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