Desc Diagnostic Microbio Ioa 2020 Dupieux Chabert

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Diagnostic microbiologique

des Infections Ostéo-Articulaires

Dr Céline DUPIEUX-CHABERT
[email protected]

Laboratoire de Bactériologie – Institut des Agents Infectieux - Hôpital de la Croix Rousse


Centre de Référence des Infections Ostéo-Articulaires Complexes Rhône-Alpes
Diagnostic bactériologique des IOA
 IOA très majoritairement bactériennes (97%)

 Diagnostic bactériologique indispensable pour affirmer l’infection et choisir


le traitement adapté (antibiogramme)

 Avant antibiothérapie ou après arrêt prolongé

 Diagnostic bactériologique parfois difficile


• microorganismes très variés, isolement parfois laborieux
• infections polymicrobiennes
• interprétation parfois délicate

 Résultats dépendent
• qualité des prélèvements
• rapidité du transport (<2-4h)
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• techniques utilisées au laboratoire
Les prélèvements bactériologiques
 Fistule / cicatrice
• écouvillonnage : à proscrire, mauvaise concordance avec
Mackowiack, JAMA 1978 ;
prélèvements profonds Treteault et al, J Arthroplasty 2013
• aspiration profonde après rinçage de la fistule : non recommandée,
peu contributif sauf isolement de S. aureus (VPP 78%)

 Hémocultures en cas d’infection aiguë

 Prélèvements profonds : liquide articulaire, prélèvements per-


opératoires +++

 Liquides de drainage : surveillance du site infecté opéré ; si +, risque


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accru de récidive ; ne pas utiliser à visée diagnostique
Prélèvements profonds 1/2
 Liquide articulaire
• ponction pré-opératoire : documentation utile au choix de
la prise en charge chirurgicale en 1 ou 2 temps

• pour la bactériologie :
poudrier ou tube sec stérile,
ET flacons d’hémocultures aéro/anaérobie ou
pédiatrique (mais pas à la place du tube)

• pour la cytologie : tube avec anti-coagulant


(héparine ou citrate)

 Biopsie sous scan (très petite biopsie)


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en tube avec un peu de sérum phy stérile
Prélèvements profonds 2/2
 Prélèvements tissulaires per-opératoires
Ni trop, ni trop peu…
Objectifs : augmenter la sensibilité tout en limitant les contaminations
- Avant antibiothérapie ou après fenêtre antibiotique
- Prélèvements multiples +++

Recommandations :
• minimum 3 prélèvements
• optimum 5 à 7 prélèvements
sites anatomiques différents, macroscopiquement pathologiques si
possible : os, synoviale, liquide articulaire, pus …
privilégier tissus d’interface
• 1 prélèvement pour anatomo-pathologie (PNN, autres étiologies)

identification du prélèvement, nature, localisation, traitement antibiotique, ATCD… 5


Prise en charge des prélèvements au
laboratoire
 Prélèvements précieux, non renouvelables
 Impératif = éviter la contamination
• Hotte à flux laminaire PSM2
• Matériel stérile
• Limiter les manipulations

 Nécessité d’un prétraitement des prélèvements solides

 Après ensemencement, congélation des surplus de prélèvements


jusqu’au rendu définitif (et souvent plus) pour
• colorations spécifiques
• éventuelles recherches complémentaires : mycobactéries, champignons, …
• techniques moléculaires 6
Prétraitement des prélèvements
 Les prélèvements solides (fragments d’os ou de tissus) doivent
être impérativement broyés avant ensemencement

Chronophage
Risque de
contaminations

ex : poudrier à billes (prêt à l’emploi, usage unique)


- transport, broyage et conservation des prélèvements
- limite les manipulations donc les risques de contaminations
- libération des bactéries de matrice osseuse/biofilm : ↗ sensibilité
Roux et al, Clin Microbiol Infect 2010 7
Examen direct
Orientation diagnostique : réaction cellulaire ? présence de bactéries ?

 Coloration de Gram : bactéries


• sensibilité faible (6 à 30 %, faible sur prothèse)
• spécificité élevée (99 %)

 Appréciation semi-quantitative des leucocytes

 Cytologie du liquide articulaire


• Quantification des leucocytes, formule leucocytaire
• Recherche de microcristaux
Arthrite septique Infection de prothèse

Seuil GB > 10 000/mm3 > 1 700/mm3


Seuil PNN > 90 % > 65 % 8
Trampuz et al, Am J Med 2004
Mise en culture
Bactéries d’IOA chroniques : biofilm / intracellulaire / métaboliquement peu
actives + très diverses → milieux riches variés, nombreux et incubation longue

Recommandations Référentiel de Microbiologie REMIC


 Gélose au sang en aérobiose
 Gélose au sang cuit, supplémentée, sous 5% de CO2
 Gélose au sang en anaérobiose
 Milieu liquide Bouillon Schaedler et/ou Bouillon Cœur-Cervelle
Lecture régulière → résultats rendus progressivement à J1, J2… jusqu’aux résultats
définitifs à J14
attention pousse tardive ou infections polymicrobiennes

 Utilisation possible des flacons d’hémocultures avec incubation prolongée


jusqu’à J14 dans un automate :
• ensemencement du liquide articulaire : - directement par le préleveur
- enfant +++
• ensemencement du broyat en remplacement du milieu liquide 9
Yagupsky et al. J Clin Microbiol 1992 ; Bemer et al, J Clin Microbiol 2016 ; Peel et al, J Clin Microbiol 2017
Mise en culture
Incubation longue (14 jours)

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Schäfer et al, Clin Infect Dis 2008
Lecture des cultures
 Lecture attentive :
• détection d’infections plurimicrobiennes (≈ 15 %)
• recherche des différents aspects de colonies même si même espèce
-> différents antibiogrammes
• recherche des micro-colonies/Small Colony Variants (SCV) :
- variants au métabolisme ralenti, d’où croissance retardée
- parfois difficultés d’identification phénotypique
- potentiellement plus résistants aux antibiotiques
- perte activité bactéricide des antibiotiques
- sources de récidives S. aureus SCV

 D’où : observation des cultures par du personnel formé


identification et antibiogramme sur chaque aspect de colonie
conservation de toutes les souches
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Interprétation +/- complexe
 Infections aiguës à espèces classiques
Bactéries « normales »
• ED +
• réaction cellulaire ++
• culture rapide
S. aureus

J2 J10
 Infections chroniques
Bactéries « stressées »
• ED –
• peu de PNN
• culture lente >> 48 heures Staphylocoques à coagulase négative
• peu de colonies
• bactéries de la flore cutanée fréquentes sur matériel
• aspects polymorphes des cultures +/- SCV
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• antibiogrammes différents
Interprétation des cultures

Fonction de :

• contexte clinique (infection aiguë vs chronique, ostéomyélite vs arthrite


primitive vs infection sur prothèse, antibiothérapie préalable)

• la ou les espèces identifiées

• la nature et le nombre des prélèvements positifs et éventuellement, pour ces


derniers, le nombre de milieux positifs et de colonies observées

Mais : pas de consensus définitif

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Interprétation des cultures
 Retenir le diagnostic d’IOA quand
• ≥ 3 prélèvements per-opératoires (2 selon l’ICM 2018)
ou 2 prélèvements espacés dans le temps (1 per-op + 1 liq articulaire ou 1 hémoc)
positifs à la même bactérie (même espèce et même antibiogramme) appartenant à la flore
cutanée (SCN, C. acnes, corynébactéries, …)
• ≥ 1 prélèvement (per-op ou pré-op ou hémoc) positif à une bactérie virulente,
n’appartenant pas à la flore cutanée ou pour laquelle la question d’une
contamination ne se pose pas (Staphylococcus aureus, entérobactéries, Pseudomonas
aeruginosa, Streptococcus pneumoniae, Salmonella spp., Listeria spp., Neisseria gonorrhoeae,
Campylobacter spp., Pasteurella, …)

 Infection probablement exclue


En absence de signe histologique, cytologique ou clinique
• tous les prélèvements per-opératoires stériles (à condition d’avoir été réalisés
après 15 jours d’arrêt de toute antibiothérapie)
• 1 seul prélèvement per-opératoire positif à une bactérie de la flore cutanée ou
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avirulente Recommandations SPILF 2009
Que faire des prélèvements restés stériles ?
10 à 25 % des IOA selon les séries et les contextes épidémio-
cliniques

• patient sous antibiotique (arrêt minimum 15 j)


• prélèvement mal fait
• transport trop long
• culture inadéquate
• bactérie trop fragile
• mycobactérie
• espèce particulière et/ou non cultivable

Comment améliorer le diagnostic ? 15


Sonication des implants
 Objectif : décoller les bactéries engluées dans le biofilm sur le matériel

 Sonication des prothèses et matériels dans soluté de Ringer


puis ensemencement du liquide (Trampuz et al. N Engl J Med 2007)

Sonicat considéré positif si ≥ 5 UFC / 0,5 mL


↗ sensibilité de la culture (Se 78,5 % ; Spé 98,8 %)

Intérêt quand fenêtre antibiotique trop courte ou inexistante


Mais pas d’étude comparative par rapport au broyage (équivalent ?) 16
et lourdeur pour le laboratoire
Approches moléculaires
 Pour documenter l’infection

• PCR universelle 16S


Avantage : pas d’a priori
Problèmes : manque de sensibilité (< à la culture) -> contributive que si +
pb pour les infections plurimicrobiennes
laboratoires spécialisés, délais et coûts
Bemer et al, J Clin Microiol 2014 ; Levy et al, Am J Med 2013

• PCR ciblées : + sensibles que PCR 16S


- Kingella kingae (enfant < 4 ans) Chometon et al, Pediatr Infect Dis J 2007

- Staphylococcus spp et S. aureus


- Streptococcus spp et S. pneumoniae
- Cutibacterium acnes

 Indications plutôt limitées : à réserver quand culture – et


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forte suspicion d’IOA, notamment si patient sous ATB
Approches moléculaires rapides
 Pour orienter le traitement probabiliste

 Diagnostic en ≈ 1h des IOA à SASM et SARM par le test GeneXpert


MRSA (détection S. aureus et gène mec)
- sensibilité et spécificité excellentes → adaptation précoce du
traitement probabiliste (stop vancomycine ou daptomycine)
- pb coût : sur combien de prélèvements le faire et lesquels ?
Dubouix-Bourandi et al, J Clin Microbiol 2011 ;
Valour et al, Diagn Microbiol Infect Dis 2014

 Tests PCR multiplex (« syndromiques ») en développement


• Unyvero ITI, Biofire FilmArray BJI…
• Problèmes : espèces ciblées limitées, manque de sensibilité quand
faible inoculum
• Uniquement quelques marqueurs de résistance
Malandain et al, Clin Microbiol Infect 2018 18
Approche sérologique dans les IOA ?

BJI InoPlex®
Marmor et al, J Clin Microbiol 2016

Antigènes coatés sur des billes pour détecter IgG anti- :


S. aureus, S. epidermidis, S. lugdunensis,
S. agalactiae (strepto B) et C. acnes
455 patients dont 176 infections de prothèse

• 40 % des patients de cette étude infectés


par des germes non ciblés par ce test

• Sensibilité et spécificité insuffisantes


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Conclusion
 Points clés du diagnostic microbiologique
• Qualité et gestion des prélèvements
• Conditions de cultures CULTURE!!!
• Travail délicat et difficultés rencontrées
• Résultats échelonnés parfois longs à obtenir
• Collaboration indispensable bactériologiste – chirurgien -
infectiologue

 Nouveaux outils : doivent trouver leur place


• amélioration des cultures
• outils moléculaires
• biomarqueurs
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Références bibliographiques

• Recommandations de pratique clinique « Infections ostéo-articulaires sur


matériel (prothèse, implant, ostéo-synthèse) ». SPILF, 2009

• Recommandation de bonne pratique « Prothèse de hanche ou de genou :


diagnostic et prise en charge de l’infection dans le mois suivant
l’implantation ». HAS, 2014

• Second International Consensus Meeting (ICM) on orthopaedic infections.


2018

• Référentiel en microbiologie médicale, 6ème édition. Société Française de


Microbiologie, 2018

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