Baudelairetextes
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L'albatros
Correspondances
Une charogne
Chant d’automne
L'invitation au voyage
Le flacon
A une passante
Le Chat
Les Chats
LXXXIX - Le Cygne
A Victor Hugo
II
La chevelure
Abel et Caïn
ENIVREZ-VOUS
Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible
fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer
sans trêve.
Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, vous vous
réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à
l'oiseau, à l'horloge; à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce
qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est. Et le vent, la vague, l'étoile,
l'oiseau, l'horloge, vous répondront, il est l'heure de s'enivrer ; pour ne pas être les
esclaves martyrisés du temps, enivrez-vous, enivrez-vous sans cesse de vin, de poésie,
de vertu, à votre guise.