Droit Des Obligations: - :HSMDOA UXW W
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le contenu
60 fiches pour réviser tout le cours de Droit des obligations : 6e édition
• les définitions à connaître, les erreurs à éviter, les points essentiels à retenir
• des exercices corrigés pour vérifier ses connaissances
• des repères bibliographiques pour aller plus loin
• 1 index
le sommaire 6e éd.
1. La notion d’obligation 33. La responsabilité des artisans du fait
2. La notion de contrat de leurs apprentis
3. La classification des contrats 34. La responsabilité des instituteurs du fait
4. La capacité de leurs élèves
5. L’existence du consentement 35. Un principe général de responsabilité
6. L’étalement du consentement du fait d’autrui ?.
7. Le vice du consentement : l’erreur 36. Le principe général de responsabilité du fait
8. Le vice du consentement : le dol des choses
Droit
9. Le vice du consentement : la violence 37. La responsabilité spéciale du fait des choses
10. La lésion 38. La responsabilité du fait des produits
11. L’objet défectueux
des obligations
14. L’ordre public et les bonnes mœurs de responsabilité ou d’indemnisation
15. La sanction de l’irrégularité du contrat 41. Les caractères du dommage
(les nullités et la caducité) 42. Les formes du dommage
16. La force obligatoire du contrat 43. Le lien de causalité
17. La simulation 44. La gestion d’affaires
18. Le risque 45. Le paiement de l’indu
19. L’effet relatif du contrat 46. L’enrichissement injustifié
20. La durée du contrat 47. La cession de créance et de dette
21. La cession de contrat 48. La novation
22. L’interprétation du contrat 49. La délégation
23. La modification du contrat 50. Le paiement pur et simple
24. La responsabilité contractuelle (conditions 51. La compensation
et exonération) 52. La subrogation personnelle
25. La responsabilité contractuelle (la réparation) 53. L’action oblique
26. L’aménagement de la responsabilité 54. L’action paulienne
contractuelle 55. La confusion
27. L’inexécution du contrat synallagmatique 56. La remise de dette
28. Les fondements de la responsabilité délictuelle 57. Le terme et la condition
29. La différenciation entre la responsabilité 58. La solidarité
délictuelle et les autres responsabilités 59. La prescription extinctive
30. Le fait personnel 60. La preuve des obligations
31. La responsabilité des père et mère
32. La responsabilité du commettant du fait Arnaud Lecourt
de son préposé
l’auteur le public
Arnaud Lecourt est maître de conférences à • Licence 2 Droit
l’université de Pau et des Pays • CRFPA
de l’Adour et directeur de l’Institut d’études
judiciaires et de l’Unité de droit des affaires
(UDA, CRAJ, EA 1929).
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fiches de
Droit des obligations
6e édition
Arnaud Lecourt
Maître de conférences à l’université de Pau et des Pays de l’Adour
Directeur de l’Institut d’études judiciaires
Directeur de l’unité de droit des affaires (UDA, CRAJ, EA 1929)
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ISBN 9782340-053410
©Ellipses Édition Marketing S.A., 2019
32, rue Bargue 75740 Paris cedex 15
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Index.......................................................................................................461
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Fiche 1
La notion d’obligation
• Définition
Pris sous un sens général, il désigne tout devoir auquel un individu est astreint en
vertu de règles morales, familiales, professionnelles ou encore sociales. Par exemple,
tout individu vivant en France est tenu, en vertu de règles sociales, de rouler à
droite, de s’arrêter au feu rouge… De même, il est moralement répréhensible de porter
atteinte à son prochain ou de lui nuire de quelque façon que ce soit. Cependant,
même si ces devoirs s’appuient sur la règle morale ou sur des prescriptions légales
ou réglementaires, il ne s’agit pas encore d’obligation au sens juridique du terme,
parce qu’il n’existe pas de créancier à cette obligation. Il n’existe donc pas de lien
de droit entre deux personnes.
Prise sous un sens purement juridique, l’obligation renvoie en revanche à l’idée
d’un lien de droit entre deux personnes en vertu duquel l’une d’elles, le créancier,
peut exiger de l’autre, le débiteur, une prestation précisément prédéterminée. En
tant que lien de droit, l’obligation peut donc être l’objet d’une sanction étatique, le
lien n’étant plus seulement moral comme dans le cas des obligations naturelles. Par
exemple, dans la vente, l’obligation du débiteur (l’acheteur) est de verser un prix au
créancier (le vendeur). Toute obligation comporte ainsi ce double aspect, négatif (la
dette qui pèse sur le débiteur) et actif (la créance qui bénéficie au créancier). À la
différence du simple devoir, l’obligation est un élément du patrimoine du créancier
comme du débiteur.
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des
contrats, du régime général et de la preuve des obligations précise désormais,
dans un article préliminaire (C. civ., art. 1100), que les obligations naissent d’actes
juridiques, de faits juridiques, ou de l’autorité de la seule loi.
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en vertu duquel le débiteur n’est jamais tenu qu’à hauteur de la somme inscrite dans
le contrat. D’autre part, en cas d’inexécution, il sera possible de saisir les biens du
débiteur d’une somme d’argent alors qu’il ne sera pas permis de le faire dans le cadre
d’une obligation en nature ; dans ce cas, seul un paiement en argent sera admis.
La troisième catégorie se fonde sur les exigences contraignantes de la prestation.
On oppose ainsi les obligations de moyen aux obligations de résultat. Si le débiteur
est tenu d’une obligation de moyen, il doit mettre en œuvre tous les moyens qui
sont à sa disposition pour accomplir la prestation, sans être tenu d’aboutir à un
résultat déterminé. Sa responsabilité ne sera engagée que s’il commet une faute.
En revanche, le débiteur tenu d’une obligation de résultat s’engage à aboutir à un
résultat précis sous peine d’engager sa responsabilité. Cette distinction présente
l’intérêt majeur de répartir différemment la charge de la preuve de la faute en cas
d’inexécution contractuelle. Le créancier prouvera bien plus aisément le défaut de
résultat que l’absence de mise en œuvre des moyens adéquats.
L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des
contrats, du régime général et de la preuve des obligations introduit dans le Code
civil une nouvelle classification : aux côtés de l’obligation alternative par laquelle
le débiteur s’engage à fournir une prestation parmi plusieurs déterminées, à son
choix ou au choix du créancier suivant les cas, deux autres types d’obligations à
objet plural prennent place dans le code : l’obligation cumulative, qui a pour objet
plusieurs prestations également dues, et l’obligation facultative, qui ne comporte
qu’une seule prestation due, mais dont le débiteur peut se libérer en fournissant
une autre prestation, déterminée d’avance. Ainsi, l’article 1306 nouveau du Code
civil définit l’obligation cumulative comme celle en vertu de laquelle le débiteur
est cumulativement tenu de plusieurs obligations ; elle ne s’éteint que lorsque le
débiteur a fourni toutes les prestations, contrairement à l’obligation alternative.
Quant à l’article 1308 nouveau du Code civil, il appréhende l’obligation facultative
comme celle qui a pour objet une certaine prestation, mais dont le débiteur a la
faculté, pour se libérer, d’en fournir une autre. L’obligation facultative est éteinte
si l’exécution de la prestation initialement prévue devient impossible pour cause de
force majeure. Quant à l’article 1307 nouveau, qui vise l’obligation alternative plus
classique, il la définit comme celle qui a pour objet plusieurs prestations et dont
l’exécution de l’une d’elles libère le débiteur. L’article 1307-1 nouveau du Code civil
reprend la règle selon laquelle le choix entre les différentes prestations appartient
au débiteur et, en cas de silence, la possibilité pour l’autre partie, après mise en
demeure, d’effectuer ce choix ou de résoudre le contrat. L’ordonnance consacre à
l’alinéa 3 la solution prétorienne aux termes de laquelle le choix exercé est définitif
et fait perdre à l’obligation son caractère alternatif. Les articles 1307-2 à 1307-4
nouveaux du Code civil précisent, d’une part, que l’impossibilité d’exécuter qui procède
d’un cas de force majeure libère le débiteur, d’autre part, que le débiteur qui n’a pas
fait de choix doit exécuter, si l’une des prestations devient impossible, l’une des
autres et, enfin, que le créancier qui n’a pas fait connaître son choix doit, si l’une
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des prestations devient impossible à exécuter par suite d’un cas de force majeure,
se contenter de l’une des autres. L’article 1305-5 nouveau du Code civil conclut en
précisant que lorsque toutes les prestations deviennent impossibles, le débiteur
• Attention
La catégorie des faits juridiques n’est pas homogène ; elle englobe des faits qui
peuvent être aussi bien totalement involontaires (une naissance ou un décès)
que marqués d’une volonté sous-jacente (dommage injustement causé à autrui,
appauvrissement injuste d’autrui…). Le fait est ici voulu, mais pas l’obligation
qui en découle.
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• À retenir
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CORRIGÉ
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Fiche 2
La notion de contrat
• Définition
Contrat : selon l’article 1101 nouveau du Code civil, issu de l’ordonnance n° 2016-
131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général
et de la preuve des obligations, qui en propose une version modernisée, le contrat
n’est plus « une convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’obligent
envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose »,
mais « un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destinées à créer,
modifier, transmettre ou éteindre des obligations ». Abandonnant la référence
aux notions controversées d’obligation de faire, de ne pas faire et de donner,
l’ordonnance recentre ainsi la définition du contrat sur sa nature en qualité
d’accord de volontés, et sur ses effets multiples : création toujours mais aussi
désormais modification, transmission et extinction d’obligations (contrairement
à la convention, notion plus large qui inclut également l’accord de volonté mais
destiné uniquement à produire des effets de droit).
Le contrat n’est pas non plus un acte unilatéral. Ce dernier est un acte juridique
particulier qui ne nécessite qu’une seule volonté pour produire des effets de droit,
par exemple, un testament par lequel un individu règle la dévolution de ses biens
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• Attention
L’acte unilatéral ne doit pas être confondu avec le contrat unilatéral. Ce dernier,
comme tout contrat, suppose un échange des consentements des parties, mais ne
fait naître d’obligations qu’à l’égard d’une seule. Par exemple, le cautionnement
est un contrat unilatéral car seul la caution est obligée. Dans l’acte unilatéral,
il n’y a aucun accord (testament par exemple).
Le contrat créé, modifie, transmet ou éteint des obligations (article 1101 C. civ.)
et il lie les parties (article 1103 C. civ.). Dès lors, la convention qui ne fait pas naître
d’obligations, même si elle produit des effets juridiques, comme celle qui ne lie pas
les parties parce qu’elle n’est pas destinée à engendrer des effets juridiques, n’est
pas un contrat.
La convention qui ne fait naître aucune obligation, même si elle produit des
effets juridiques, n’est pas un contrat. Les volontés se sont bien rencontrées, elles
engendrent des effets de droit, mais elles n’ont créé aucune obligation.
Il faut cependant noter que cette distinction n’a guère de portée pratique.
En revanche, la convention qui ne lie pas les parties, parce qu’elle n’a pas pour
objectif de faire naître une obligation, ne peut pas non plus être considérée comme un
contrat. La distinction présente ici beaucoup plus d’intérêt que précédemment. C’est
ainsi qu’un certain nombre d’actes relève plus de la courtoisie que du droit : accepter
une invitation à dîner ne lie pas pour autant juridiquement les parties, accepter un
cadeau n’engendre aucune obligation… Ce type d’engagement ne présente aucun
caractère obligatoire. De même, les actes de complaisance ne devraient, a priori,
présenter aucune difficulté. Le simple fait d’accepter, par exemple, un covoiturage
pour rendre service à une personne ou encore le fait de proposer bénévolement ses
services à autrui pour l’aider dans son entreprise, n’est pas générateur d’obligation.
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Simplement, les choses peuvent être un peu plus compliquées. Dans certaines
hypothèses, la jurisprudence n’hésite pas à qualifier l’acte de contrat de service
gratuit (Cass. civ. 1re, 27 janv. 1993, JCP éd. G, 1993, I, 3727, n° 5, obs. Viney).
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Le contrat est un acte juridique. Or, un acte est juridique parce qu’il est sanc-
tionné. Dès lors, si le créancier peut obtenir en justice la condamnation de son
débiteur à exécuter son obligation, l’acte envisagé est bien un contrat et ne peut
donc s’analyser en de simples relations sociales informelles (v. II).
• À retenir
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CORRIGÉ
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Fiche 3
La classification des contrats
• Définition
• Attention
Le Code civil oppose ensuite les contrats à titre onéreux et les contrats à titre
gratuit. Le contrat est onéreux quand chaque partie, reçoit de l’autre un avantage
qui est la contrepartie de celui qu’elle procure (art. 1107C. civ.). C’est le cas de la
vente car le vendeur ne va donner la chose que contre le versement d’un prix. Il
n’a aucune vocation à enrichir l’acheteur et réciproquement. Le contrat est gratuit
quand l’une des parties procure à l’autre un avantage sans attendre ni recevoir de
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que les règles générales s’appliquent sous réserve des règles spéciales. Les règles
générales de l’ordonnance seront ainsi écartées lorsqu’elles seront impossibles à
appliquer en même temps que les règles spéciales prévues pour les contrats spéciaux,
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question de savoir si chacun de ces contrats est soumis au régime juridique qui lui
est propre ou si l’ensemble obéit à un régime juridique spécifique à raison de cette
complexité. Le cas du crédit-bail est très représentatif de cet intérêt. Une personne
• Attention
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• Remarque
Les différentes catégories étudiées ne sont pas exclusives les unes des autres ;
elles peuvent parfaitement se croiser et se combiner. Ainsi, la vente est-elle
tout à la fois un contrat négocié, synallagmatique, à exécution instantanée,
nommé, commutatif et à titre onéreux. Elle est également un contrat-échange
de droit interne.
• À retenir
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CORRIGÉ
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Fiche 4
La capacité
I. L’incapacité
II. L’insanité
III. La représentation
• Définition
L’article 1145, alinéa 1er nouveau du Code civil pose le principe en des termes très
clairs : « Toute personne physique peut contracter, sauf en cas d’incapacité prévue
par la loi. » L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit
des contrats, du régime général et de la preuve des obligations introduit un alinéa 2
à l’article 1145 aux termes duquel « la capacité des personnes morales est limitée
aux actes utiles à la réalisation de leur objet tel que défini par leurs statuts et aux
actes qui leur sont accessoires, dans le respect des règles applicables à chacune
d’entre elles ». Cette entrée des personnes morales au sein des règles de capacité
était une demande des milieux économiques. Mais cette disposition a suscité de
nombreuses interrogations et sa mise en œuvre pratique a posé d’importantes diffi-
cultés. Qu’est-ce qu’un acte utile par exemple ? La loi n° 2018-287 du 20 avril 2018
ratifiant l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 a ainsi supprimé purement et
simplement cette partie de l’article. Désormais, l’article 1145, alinéa 2, nouveau du
code civil dispose que : « La capacité des personnes morales est limitée par les règles
applicables à chacune d’entre elles ». Le texte est entré en vigueur le 1er octobre
2018, et la condition demeure pour tous les contrats conclus entre le 1er octobre
2016 et le 1er octobre 2018. Il apparaît ainsi très nettement que l’incapacité est
l’exception et qu’elle doit avoir été prévue par les textes. L’aptitude à consentir est
cependant plus complexe. Pour que le contrat soit valablement constitué, il faut
non seulement que le consentement émane d’une personne capable civilement, mais
également d’une personne qui soit en mesure de se rendre compte de la portée de
ses actes (enfant en bas âge, dément, individu ivre…). Dès lors, si le Code civil
envisage essentiellement cette question au travers des dispositions qui ont trait à la
capacité, il peut également avoir recours à la théorie de l’absence de consentement
si un individu, bien que capable, n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté. C’est le
problème de l’insanité d’esprit.
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I. L’incapacité
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Fiche 4 • La capacité
Pour les incapables majeurs, les solutions ne diffèrent guère de celles qui sont
données en droit des personnes. Un incapable majeur sous sauvegarde de justice pourra
parfaitement conclure seul les contrats qu’il envisage, mais ils pourront cependant
être annulés s’ils sont lésionnaires pour lui ou réduits s’ils sont excessifs au regard
de ses facultés. Pour l’incapable placé sous un régime de curatelle, les choses sont
un peu plus complexes. Il pourra effectuer seul les contrats de la vie courante et les
actes d’administration, mais il lui faudra l’assistance de son curateur pour les actes
de dispositions (vente d’un fonds de commerce par exemple). Là encore, les actes
qui lui seraient préjudiciables pourront être annulés sur le fondement de la lésion.
Le majeur sous tutelle est en revanche dans la même situation qu’un mineur non
émancipé. C’est son tuteur qui le représentera dans tous les actes de la vie civile et
notamment pour tous les contrats qu’il souhaiterait passer.
L’incapacité de jouissance est plus grave. À la différence de l’incapacité d’exer-
cice qui est générale, l’incapacité de jouissance est toujours spéciale. Elle ne joue
que dans des cas précisément énumérés, où seul le représentant légal pourra exercer
le droit de l’incapable. C’est ainsi que l’article 1596 du Code civil énonce que « ne
peuvent se rendre adjudicataires, sous peine de nullité, ni par eux-mêmes, ni par
des personnes interposées : les tuteurs, des biens de ceux dont ils ont la tutelle ; les
mandataires, des biens qu’ils sont chargés de vendre […] ». De même, l’article 1125-1
du Code civil disposait que « sauf autorisation de justice, il est interdit, à peine de
nullité, à quiconque exerce une fonction ou occupe un emploi dans un établisse-
ment hébergeant des personnes âgées ou dispensant des soins psychiatriques de se
rendre acquéreur d’un bien ou cessionnaire d’un droit appartenant à une personne
admise dans l’établissement […] ». Cet article est abrogé par l’ordonnance n° 2016-
131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et
de la preuve des obligations à compter du 1er octobre 2016. Ces dispositions sont
déplacées dans le Code de l’action sociale et des familles et dans le Code de la
santé publique. De même encore, l’incapacité de recevoir de l’article 909 du Code
civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007
s’applique au médecin qui est chargé du traitement médical du patient et qui lui
a prodigué, à ce titre, des soins réguliers et durables (Cass. civ. 1re, 15 janv. 2014,
n° 12-22.950). Cela signifie a contrario que ceux qui interviennent ponctuellement
échappent à l’incapacité.
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II. L’insanité
Il est possible que certaines personnes, bien que juridiquement capables, puissent
malgré tout être hors d’état de mesurer la portée de leurs actes et donc d’exprimer
un véritable consentement. C’est le cas de celles qui ont subi une altération de leurs
facultés mentales, mais qui ne sont pas encore soumises à un régime de protection,
ou encore de celles qui contractent sous l’emprise passagère de produits stupéfiants
(drogue) ou altérants (alcool). Dans ces hypothèses, le contrat ne peut pas être
valablement formé à défaut de volonté clairement exprimée, et donc de consente-
ment véritable. L’article 489 du Code civil l’énonce clairement : « Pour faire un acte
valable, il faut être sain d’esprit. » L’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016
portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obli-
gations reprend cette idée à l’article 1129 nouveau du Code civil, qui dispose que,
conformément à l’article 414-1, il faut être sain d’esprit pour consentir valablement
à un contrat. La difficulté provient ici du fait que, quand le consentement émane
d’une personne a priori capable, l’absence d’altération de ses facultés mentales est
présumée. C’est donc à celui qui agit en nullité sur ce fondement de prouver que le
consentement au contrat est absent.
Pour que le contrat ou tout autre acte puisse être annulé, celui qui doute de
la réalité du consentement doit d’abord apporter la preuve d’un trouble mental du
contractant. C’est dire qu’il devra établir l’absence de lucidité ou encore l’absence
de volonté véritable d’entrer en contrat. La jurisprudence n’exige pas un trouble
mental prolongé ; il suffit d’un trouble suffisamment grave (une dépression ne suffit
pas, tout comme une intelligence d’un très faible niveau ne parviendrait pas à faire
tomber l’acte). Celui qui remet en cause la valeur du consentement donné doit ensuite
prouver que le trouble fut contemporain de la formation du contrat. Afin de pallier
les difficultés de preuve prévisibles, la jurisprudence est là encore tolérante : elle
se contente d’une insanité d’esprit « à l’époque » de l’acte, sauf pour le défendeur à
établir que, exceptionnellement, à cet instant, lors de la formation du contrat, il
était parfaitement lucide. La preuve de ce fait peut être rapportée par tous moyens
car il s’agit d’un fait juridique.
Le régime de la sanction diffère selon que la nullité est demandée du vivant
de l’auteur de l’acte ou après son décès. S’il est vivant, il sera toujours possible de
requérir son avis et de se forger une opinion. S’il est décédé, il sera plus tentant
d’affirmer son insanité d’esprit pour échapper, peut-être, à un acte ennuyeux.
Si l’auteur de l’acte est vivant, l’article 489, alinéa 2, du Code civil dispose qu’il
pourra seul agir en nullité, ou éventuellement son tuteur ou son curateur. L’action
doit être intentée dans les 5 ans suivant le jour où le trouble a cessé. Il s’agit donc
d’une nullité relative, bien qu’un élément essentiel du contrat ait été omis. Le but,
en effet, n’est pas ici de protéger l’intérêt général mais l’intérêt de la personne dont
les facultés mentales sont altérées.
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Si l’auteur est décédé, mais que l’action a été engagée avant, ses héritiers
peuvent la poursuivre. Dans le cas contraire, l’action obéit à un régime beaucoup
plus restrictif, notamment s’il s’agit d’un contrat à titre onéreux. En effet, la loi
Fiche 4 • La capacité
n’offre aux héritiers la possibilité d’agir que s’ils se trouvent dans l’un des trois
cas suivants : soit que l’acte porte en lui-même la preuve d’un trouble mental (acte
incohérent par exemple), soit qu’il a été fait dans un temps où l’intéressé était
placé sous sauvegarde de justice, soit qu’une action a été introduite avant le décès
aux fins de voir ouvrir une tutelle ou une curatelle (l’auteur donnait donc déjà des
signes de détresse mentale au moment où il a passé l’acte ; il est donc légitime de
tenter d’en apporter la preuve post mortem). En revanche, les libéralités peuvent
être attaquées après la mort de leur auteur, en vertu de l’article 901 du Code civil,
sans que la preuve du trouble mental soit assujettie aux restrictions susmentionnées.
Soucieuse d’harmoniser le régime de la prescription des actions en nullité pour
insanité d’esprit tant en matière de donation que de testament, elle décide désormais
que la prescription de l’action des héritiers en nullité d’une donation faite par leur
auteur pour insanité d’esprit ne commence à courir qu’à compter du décès de ce dernier
(Cass. civ. 1re, 29 janv. 2014, n° 12-35.341). La solution fut déjà posée. L’action en
nullité pour insanité d’esprit d’un acte à titre gratuit d’un disposant ne peut être
introduite par ses héritiers qu’à compter de son décès, la prescription ne peut donc
commencer à courir avant cette date (Cass. civ. 1re, 20 mars 2013, n° 11-28.318). La
controverse portait sur le point de savoir si le point de départ de la prescription était
le décès du disposant ou la date de l’acte. La solution arrêtée par la Cour est oppor-
tune même si elle paraît contraire au droit commun de la prescription extinctive. En
effet, l’article 2224 du Code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières
se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou
aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Appliqué aux héritiers d’un
disposant, le point de départ de l’action devrait être le jour de la connaissance de
l’acte. Cependant, de son vivant, seul l’auteur peut agir en nullité, non ses héritiers.
Ce n’est qu’une conséquence directe de la nature de la nullité – relative –. Au décès,
ses héritiers recueillent son action par voie de succession. Si le point de départ de
l’action en nullité n’était pas reporté, leur action se trouverait prescrite alors même
qu’ils n’auraient jamais été en mesure de l’exercer.
III. La représentation
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jusqu’à l’ordonnance de 2016, le Code civil ne comprenait que des règles éparses
sur les diverses formes de représentation (notamment le mandat des articles 1984
et s. du Code civil), mais sans jamais en dégager un régime global. C’est désormais
chose faite.
L’article 1153 nouveau du Code civil précise ainsi que le représentant légal,
judiciaire ou conventionnel n’est fondé à agir que dans la limite des pouvoirs qui
lui ont été conférés. L’article 1154 nouveau reprend la distinction classique entre
la représentation parfaite (le représentant agit au nom et pour le compte du repré-
senté, comme dans le mandat par exemple ou le contrat d’agence commerciale) et
la représentation imparfaite (le représentant agit en son nom mais pour le compte
du représenté comme dans le contrat de commission par exemple). L’article 1155
nouveau distingue les actes que le représentant peut accomplir selon que le pouvoir
est général (actes conservatoires et d’administration) ou spécial (actes pour lesquels
il est spécialement habilité).
L’article 1156 nouveau est important. Il clarifie les sanctions du dépassement
de pouvoir, incertaines en jurisprudence. La première sanction retenue n’est pas la
nullité de l’acte accompli sans pouvoir mais son inopposabilité à l’égard du repré-
senté (al. 1er). Ce texte, de façon novatrice, prend en compte dans son alinéa 2, la
théorie de l’apparence développée par le juge : si, en principe, le représenté n’est
pas obligé envers les tiers pour ce que le mandataire a fait au-delà du pouvoir qui
lui a été conféré, il en est autrement lorsqu’il résulte des circonstances que le tiers
a pu légitimement croire que le représentant agissait en vertu d’un pouvoir et dans
les limites de ce pouvoir. L’article 1156 prévoit une seconde sanction en cas de
dépassement de pouvoir : le tiers contractant peut agir en nullité quand il ne savait
pas que l’acte était accompli par un représentant sans pouvoir. L’article réserve
cependant la ratification expresse du représenté (al. 3).
L’article 1157 nouveau précise quant à lui qu’en cas de détournement de pouvoir,
la sanction est la nullité en faveur du représenté, à condition cependant que le tiers
soit de mauvaise foi. Cette constitution de la mauvaise foi est facilitée désormais
par l’introduction, à l’article 1158 nouveau, d’une action interrogatoire en faveur
du tiers, afin de purger les doutes qu’il pourrait avoir sur l’étendue des pouvoirs du
représentant.
Enfin, l’article 1159 nouveau précise que la représentation dessaisit pendant sa
durée le représenté de ses pouvoirs transférés au représentant, ces derniers cessant
dès lors que le représentant est atteint d’incapacité ou frappé d’une interdiction
(art. 1160 nouveau C. civ.). L’article 1161 nouveau clôt ces dispositions en préci-
sant qu’un représentant ne peut agir pour le compte des deux parties au contrat
ni contracter pour son propre compte avec le représenté, à peine de nullité. Ces
règles sont communément admises dans les divers projets européens. L’article 1161
nouveau du code civil, à l’instar de l’article 1145, alinéa 2, a posé de nombreux
problèmes d’articulation, notamment avec le droit des sociétés. La loi n° 2018-287
du 20 avril 2018 ratifiant l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 a opté pour
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une révision radicale. Après avoir ajouté que cette disposition n’avait pas lieu d’être
en l’absence « d’opposition d’intérêts », la loi cantonne désormais cet article aux
seules personnes physiques.
Fiche 4 • La capacité
• À retenir
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CORRIGÉ
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Fiche 5
L’existence du consentement
• Définition
Ainsi, l’article 1113 nouveau du Code civil – inséré dans une nouvelle section
relative à l’offre et à l’acceptation – dispose que le contrat est formé par la rencontre
d’une offre et d’une acceptation par lesquelles les parties manifestent leur volonté
de s’engager, cette volonté pouvant résulter d’une déclaration ou d’un comportement
non équivoque de son auteur.
L’article 1114 nouveau du Code civil, quant lui, définit l’offre et présente ses
caractéristiques, empruntées à la jurisprudence constante en la matière. L’offre,
faite à personne déterminée ou indéterminée, comprend les éléments essentiels du
contrat envisagé et exprime la volonté de son auteur d’être lié en cas d’acceptation.
À défaut, il y a seulement invitation à entrer en pourparlers. Cette approche confirme
les constructions prétoriennes antérieures.
Les caractères de l’offre sont connus ; ils sont en effet au nombre de deux.
La pollicitation doit d’abord être précise et complète. Cela signifie qu’une
acceptation simple (un « oui » par exemple) doit suffire pour emporter formation
du contrat. Dès lors, l’offrant doit avoir nettement déterminé dans son offre les
éléments essentiels du contrat qu’il propose à autrui de conclure : nature du contrat,
conditions économiques, clauses principales, économie générale, prix, chose vendue
par exemple…
• Attention
L’offre doit également être ferme. Le pollicitant doit ainsi manifester clairement
sa volonté de contracter en proposant une offre dont la seule expression est exclu-
sive de toute réserve (Cass. com., 6 mars 1990, Bull. civ., IV, n° 74). Autrement dit,
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le contenu
60 fiches pour réviser tout le cours de Droit des obligations : 6e édition
• les définitions à connaître, les erreurs à éviter, les points essentiels à retenir
• des exercices corrigés pour vérifier ses connaissances
• des repères bibliographiques pour aller plus loin
• 1 index
le sommaire 6e éd.
1. La notion d’obligation 33. La responsabilité des artisans du fait
2. La notion de contrat de leurs apprentis
3. La classification des contrats 34. La responsabilité des instituteurs du fait
4. La capacité de leurs élèves
5. L’existence du consentement 35. Un principe général de responsabilité
6. L’étalement du consentement du fait d’autrui ?.
7. Le vice du consentement : l’erreur 36. Le principe général de responsabilité du fait
8. Le vice du consentement : le dol des choses
Droit
9. Le vice du consentement : la violence 37. La responsabilité spéciale du fait des choses
10. La lésion 38. La responsabilité du fait des produits
11. L’objet défectueux
des obligations
14. L’ordre public et les bonnes mœurs de responsabilité ou d’indemnisation
15. La sanction de l’irrégularité du contrat 41. Les caractères du dommage
(les nullités et la caducité) 42. Les formes du dommage
16. La force obligatoire du contrat 43. Le lien de causalité
17. La simulation 44. La gestion d’affaires
18. Le risque 45. Le paiement de l’indu
19. L’effet relatif du contrat 46. L’enrichissement injustifié
20. La durée du contrat 47. La cession de créance et de dette
21. La cession de contrat 48. La novation
22. L’interprétation du contrat 49. La délégation
23. La modification du contrat 50. Le paiement pur et simple
24. La responsabilité contractuelle (conditions 51. La compensation
et exonération) 52. La subrogation personnelle
25. La responsabilité contractuelle (la réparation) 53. L’action oblique
26. L’aménagement de la responsabilité 54. L’action paulienne
contractuelle 55. La confusion
27. L’inexécution du contrat synallagmatique 56. La remise de dette
28. Les fondements de la responsabilité délictuelle 57. Le terme et la condition
29. La différenciation entre la responsabilité 58. La solidarité
délictuelle et les autres responsabilités 59. La prescription extinctive
30. Le fait personnel 60. La preuve des obligations
31. La responsabilité des père et mère
32. La responsabilité du commettant du fait Arnaud Lecourt
de son préposé
l’auteur le public
Arnaud Lecourt est maître de conférences à • Licence 2 Droit
l’université de Pau et des Pays • CRFPA
de l’Adour et directeur de l’Institut d’études
judiciaires et de l’Unité de droit des affaires
(UDA, CRAJ, EA 1929).
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