En L'an de Mon 30-E ...
En L'an de Mon 30-E ...
En L'an de Mon 30-E ...
Que toutes mes hontes i’eus beues Que toutes les hontes j’eus bues,
Ne du tout fol, ne du tout sage, Ni du tout fou, ni du tout sage,
Non obstant maintes peines eues, Nonobstant (malgré) maintes peines eues,
Lesquelles i’ay toutes receues Lesquelles j’ai toutes reçues
Sous la main Thibault d’Aussigny*… Sous la main Thibault d’Auvigny…
S’euesque il est, seignant les rues, Si évêque il est, saignant les rues,
Qu’il soit le myen ie le reny : Qu’il soit le mien, je le renie :
Mon seigneur n’est ne mon euesque, Mon seigneur n’est, ni mon évêque,
Soubz luy ne tiens s’il n’est en friche; Sous lui ne tiens, s’il n’est en friche (= de
Foy ne luy doy ne hommage auecque, lui dépend s’il n’est pas cultivé);
Ie ne suis son serf ne sa bische. …. Foi ni lui dois, ni hommage avec,
------- (* évêque d’Orléans) ------ Je ne suis ni son serf (кріпак), ni sa biche
(лань).
Voici un extrait de la Ballade des pendus :
Freres humains qui après nous viuez, Frères humains qui après nous vivez,
N’ayez les cuers contre nous endurciz, N’ayez les cœurs contre nous endurcis,
Car se pitié de nous pouurez* avez, Car, si pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tost de vous merciz. Dieu en aura plutôt de vous merci.
Vous nous voyez cy attachez cinq, six : Vous nous voyez ici attachés, cinq, six:
Quant de la chair, que trop aurons nourrie, Quant à la chair, que nous trop avons
Elle est pieça deuorée & pourrie, nourrie,
Et nous, les os, devenons cendre et Elle est pièce* dévorée et pourrie,
pouldre. Et nous, les os, devenons cendre et
(*pouurez = pauvres). poudre.
(*= depuis longtemps)
Nous venons de citer, parmi les plus célèbres, quelques œuvres littéraires de
différents domaines, dont les titres eux-mêmes et certaines citations peuvent servir
d’exemples linguistiques du moyen français :
Le vocalisme.
• L’apport capital du moyen français, c’est la tendance à la formation d’un
accent tout particulier, appelé accent de groupe ou accent rythmique qui mène à la
soudure de plusieurs éléments comme s’ils formaient un mot unique phonique.
L’accentuation du groupe est pareille à celle du mot en ce sens que c’est la dernière
syllabe du groupe qui porte l’accent à moins qu’elle ne se termine par un e affaibli
[ə]. Tout comme dans un mot, il existe donc dans un groupe accentuel une syllabe
postonique : porte [‘pɔrtə], prends-le [‘prãn lə].
• Les formes de l’ancien français, dues à l’existence des enclitiques* tels
que, par exemple, jol (jo le), nes (ne les), sin (si ne), etc. ne sont plus employées. Ces
combinaisons sont dissoutes et forment désormais deux mots, ce qui explique la
désaccentuation des pronoms sujets et compléments, des conjonctions et des
particules. Ex. : Je le verray : qui ne le voult mie de loing abandonner.
NB : Le petit point sous la graphie (la lettre) phonique indique que le phonème est
« fermé », le petit signe ressemblant à une virgule – que le phonème est « ouvert ».
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