Partie - Pratique - Genres

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Reconnaître les différents genres de l'éloquence:

1. À quel genre de l'éloquence (délibératif, épidictique, judiciaire) chacun


des extraits suivants appartient-il ?

Pour chacun des textes, quelles valeurs sont mises en avant (morales,
esthétiques, pratiques) ?
1. Il y eut un moment où il considéra l'avenir. Se dénoncer, grand Dieu ! se livrer ! Il
envisagea avec un immense désespoir tout ce qu'il faudrait quitter, tout ce qu'il
faudrait reprendre. Il faudrait donc dire adieu à cette existence si bonne, si pure, si
radieuse, à ce respect de tous, à l'honneur, à la liberté ! Il n'irait plus se promener dans
les champs, il n'entendrait plus chanter les oiseaux au mois de mai, il ne ferait plus
l'aumône aux petits enfants ! Il ne sentirait plus la douceur des regards de
reconnaissance et d'amour fixés sur lui ! […] Grand Dieu ! au lieu de cela, la
chiourme, le carcan , la veste rouge, la chaîne au pied, la fatigue, le cachot, le lit de
camp, toutes ces horreurs connues ! À son âge, après avoir été ce qu'il était ! Si
encore il était jeune ! Mais, vieux, être tutoyé par le premier venu, être fouillé par le
garde-chiourme, recevoir le coup de bâton de l'argousin  ! […]
Et, quoi qu'il fît, il retombait toujours sur ce poignant dilemme qui était au fond de sa
rêverie : – rester dans le paradis et y devenir démon ! rentrer dans l'enfer et y devenir
ange !
Que faire, grand Dieu ! que faire ?
Victor Hugo, Les Misérables, 1862.

2. Jean Jaurès prononce ici à la Chambre des députés un discours expliquant son
opposition à la peine de mort.
Ah ! messieurs, je n'ai pas l'intention de démêler à fond ; mais savez-vous quelle est
notre objection principale contre la peine de mort ? Savez-vous quelle devrait être,
pour tous les républicains, pour tous les hommes, l'objection principale contre la
peine de mort ? C'est qu'elle détourne précisément les assemblées, c'est qu'elle
détourne les nations de la recherche des responsabilités sociales dans le crime.
(Applaudissements à l'extrême gauche et sur divers bancs à gauche.)
Ah ! c'est chose facile, c'est procédé commode : un crime se commet, on fait monter
un homme sur l'échafaud, une tête tombe ; la question est réglée, le problème est
résolu. Nous, nous disons qu'il est simplement posé ; nous disons que notre devoir est
d'abattre la guillotine et de regarder au-delà les responsabilités sociales.
(Applaudissements à l'extrême-gauche.)
Jean Jaurès, discours prononcé à la Chambre des Députés le 18 novembre 1908.
Analyser les règles rhétoriques
2
*Identifiez le genre de l'éloquence de cet extrait.
**Étudiez le type d'énonciation utilisé dans cet article : qui sont les
destinataires ? Comment se construit dès lors l'éthos de l'écrivain ?
*Mettez en action ce discours en le lisant de manière expressive et animée.
Cette lettre ouverte d'Émile Zola à l'attention du président de la République a pour
objectif d'innocenter le capitaine Alfred Dreyfus, un officier juif français accusé à
tort d'espionnage et condamné par un tribunal militaire.
Mais cette lettre est longue, monsieur le Président, et il est temps de conclure.
J'accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de
l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son
œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus
coupables. […]
J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une enquête
scélérate, j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous
avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.
J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard,
d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un examen médical ne
les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement. […]
J'accuse enfin le premier conseil de guerre d'avoir violé le droit, en condamnant un
accusé sur une pièce restée secrète, et j'accuse le second conseil de guerre d'avoir
couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique
d'acquitter sciemment un coupable.
En portant ces accusations, je n'ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30
et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et
c'est volontairement que je m'expose.
Quant aux gens que j'accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n'ai
contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de
malfaisance sociale. Et l'acte que j'accomplis ici n'est qu'un moyen révolutionnaire
pour hâter l'explosion de la vérité et de la justice.
Je n'ai qu'une passion, celle de la lumière, au nom de l'humanité qui a tant souffert et
qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n'est que le cri de mon âme. Qu'on
ose donc me traduire en cour d'assises et que l'enquête ait lieu au grand jour !
J'attends.
Émile Zola, « J'accuse… ! », L'Aurore, 13 janvier 1898.

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