Documents Contrerevolutionnaires07
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Réserver l’action pour l’avenir serait une faute ; réserver la vérité en serait une plus grande encore.
Cardinal Pie
L
Père le Pape Pie IX Y Y Y a politique est la direction du
mouvement social, dans l’ordre
temporel ; c’est la direction des idées,
« Pie IX, Pape. Lettre de M. le comte de des aspirations, des forces vives d’une nation.
« Bien-aimé fils, Salut et Bénédiction Chambord La politique d’un gouvernement est bonne
Apostolique. et sage, lorsque ce gouvernement dirige,
« C’est en revenant de Chambord que j’ai selon la vérité et la justice, les idées, les
« Nous avons reçu avec plaisir votre nouvel trouvé à Bruges, Monseigneur, votre aspirations, les forces vives de la nation. Au
opuscule, et nous lui souhaitons de tout admirable lettre et l’hommage qui contraire, sa politique est fausse et mauvaise,
notre cœur de dissiper chez les autres les l’accompagne. J’ai reçu l’un et l’autre avec un lorsque la direction imprimée au pays n’est
erreurs que vous-même, éclairé par les véritable bonheur. pas selon la vérité et la justice, ou, plus
malheurs de votre patrie, vous avez eu le simplement encore selon la volonté de DIEU,
bonheur de rejeter. « Ce petit livre, auquel votre modestie qui est le souverain Maître du monde et qui
donne le nom d’opuscule, est le traité le plus veut que tout dans le monde tourne au vrai
« En effet, ce ne sont pas seulement les complet et le plus lumineux qu’on puisse lire bien et au salut de ses enfants.
sectes impies qui conspirent contre l’Église sur ce grand sujet de la souveraineté royale.
2 Les documents contrerévolutionnaires no 7 — Septembre 2000
Touchant à chaque instant aux intérêts de Profondément bonne, mais profondément « Oui, bientôt, j’en ai la ferme confiance,
la Religion, la politique, à ce point de vue, égarée, la pauvre France revient à la tous les bons esprits et tous les nobles cœurs
intéresse directement l’Église ; et le Pape, les monarchie légitime, comme le pauvre enfant
Évêques, les prêtres, lorsqu’ils s’occupent des prodigue, lui aussi égaré par de folles
questions politiques à ce grand point de vue passions, est revenu à la maison paternelle. « L’unique port de
religieux, exercent un droit sacré et
remplissent le premier de leurs devoirs.
L’excès de sa misère l’a fait rentrer en lui-
même ; il s’est aperçu que lui, le noble enfant, salut est dans la
En effet, quoi de plus dangereux pour le
n’était couvert que de haillons, qu’il ne
gardait que de vils animaux, et qu’il ne
monarchie
salut des âmes qu’une direction
antichrétienne donnée par un pouvoir
pouvait y tenir plus longtemps. Confus,
repentant, il se dit : « Je me lèverai, et j’irai
héréditaire et
quelconque aux idées d’une nation, à ses trouver mon père ; j’avouerai ma faute, et il traditionnelle. »
institutions publiques, à son éducation, à ses me pardonnera ! » Et généreux dans le bien
lois, à ses mœurs ? Par une politique, par une comme il avait été ardent dans le mal, il se
direction publique contraire à la loi divine leva sans plus tarder, et prit le chemin de reconnaîtront que, pour notre chère patrie,
dont l’Église, et l’Église seule, est la cette maison qu’il n’eût jamais dû quitter. l’unique port de salut est dans la monarchie
gardienne ici-bas, le mal s’opère en grand et héréditaire et traditionnelle, la seule
dans des proportions effrayantes. Au Telle est aujourd’hui notre pauvre chère véritable, la seule qui, en renouant l’antique
contraire, rien de plus favorable au salut des France. Séduite par Voltaire et par alliance de la royauté et de la liberté, peut
âmes qu’une direction chrétienne et vraie, Rousseau, par les idéologues du dernier ouvrir encore à la France une nouvelle ère de
donnée par le pouvoir à toute une société. siècle, elle a rejeté l’autorité de ses prospérité, de bonheur et de gloire
Souverains légitimes ; elle a renié tout son (Correspondance, p. 197).
C’est uniquement à ce point de vue que glorieux et religieux passé, pour
l’Église s’occupe des questions sociales et s’abandonner aux premiers-venus, et même à « Aujourd’hui, comme il y a dix-sept ans,
politiques. C’est aussi à ce point de vue que des scélérats, à des infâmes tels que écrivait-il encore en 1869, je suis convaincu et
j’écris ces quelques pages, dictées, ce me Robespierre et Marat. Elle s’est jetée dans j’affirme que la monarchie héréditaire est
semble, par la foi et le bon sens, où la passion l’unique port de salut, où, après tant d’orages,
toutes sortes d’aventures, républicaines,
demeure étrangère, et où je m’adresse à la la France pourra retrouver enfin le repos et le
dictatoriales, constitutionnelles, parle- bonheur.
bonne foi du lecteur. mentaires, bourgeoises, démocratiques,
césariennes, socialistes : partout, à chaque « Poursuivre, en dehors de cette
Élevé, comme tant d’autres, dans un siècle nouveau gouvernement, elle a cru trouver la
de révolutions et dans un milieu libéral, je monarchie, la réalisation des réformes
paix ; elle n’a trouvé que la ruine. légitimes que demandent avec raison tant
n’ai pas toujours eu le bonheur de connaître
aussi clairement qu’aujourd’hui les d’esprits éclairés, chercher la stabilité dans
Punie par où elle avait péché, la France, les combinaisons de l’arbitraire et du hasard,
importantes vérités que j’expose ici, et dont après avoir abandonné sa monarchie
le simple énoncé me paraît être la bannir le droit chrétien de la société, baser
traditionnelle, en est arrivée à ces abîmes sur des expédients l’alliance féconde de
démonstration la plus convaincante. A la sans nom, où l’on voit tombées les
lueur des événements si graves qui, depuis l’autorité et de la liberté, c’est courir au-
malheureuses qui se laissent séduire par un devant de déceptions certaines
quelques années, ébranlent la société, étranger et qui, de faute en faute, en arrivent
beaucoup d’esprits sincères ont vu (Correspondance, p. 268) . »
à la ruine totale et au déshonneur.
distinctement ce que jusqu’alors ils n’avaient II
fait qu’entrevoir, ou même ce qu’ils avaient Du fond de l’abime où nous ont entraînés
ignoré. Je suis de ce nombre ; et c’est pour les erreurs révolutionnaires, despotiques et Comment et en quel sens Henri V est,
faire profiter les autres de ce que j’ai reçu, que anarchiques, nous ouvrons enfin les yeux, de droit, le légitime Souverain de la
je prends la plume pour exposer simplement, nous reconnaissons humblement que nous France.
telles que je les comprends, ces vérités de nous sommes trompés, et nous voulons
salut public et de réorganisation de notre réparer nos fautes.
chère France. Depuis cent cinquante ans, on a fait tout ce
qu’on a pu pour enlever à la France et la foi
Voilà pourquoi nous revenons au principe religieuse et la foi politique. On a mis tout en
Quoique les questions que je touche ici monarchique et à celui qui seul le représente
soient grosses comme le monde et sujettes à œuvre pour lui faire perdre ce qu’on pourrait
à savoir Henri V, chef de la maison royale de appeler « le sens de l’autorité », c’est-à-dire les
des développements, à des discussions sans France.
nombre, le peu que j’en dis me semble vraies notions et l’amour de l’obéissance. Les
suffisant pour satisfaire les esprits honnêtes, incrédules et les francs-maçons du dernier
« Je ne doute pas, écrivait ce Prince en 1861, siècle sont parvenus à lui faire oublier ce
chez qui la foi et la bonne foi ont conservé le je ne doute pas que tous les bons esprits et
sens du vrai. qu’elle devait et à son DIEU et à son Roi. Ses
tous les nobles cœurs, éclairés par les vieilles et nobles traditions de fidélité à
événements et l’expérience, ne l’Église et de fidélité à la monarchie ont été
Je leur offre ce petit travail, en priant DIEU reconnaissent bientôt que la violation du
de les bénir et de les convaincre. tournées en dérision, et on lui a persuadé
grand principe de l’hérédité royale a été pour qu’elle pouvait à son gré être fidèle ou
la France et l’Europe un immense malheur, et infidèle, être chrétienne ou athée,
I que le retour à cette loi fondamentale est monarchique ou révolutionnaire. Elle en a
l’unique port de salut où elles peuvent enfin essayé ; elle a goûté de l’indépendance ; et elle
Pourquoi, après cinq ou six essais, trouver le repos.
plus misérables les uns que les autres, s’est si bien habituée à n’avoir pour loi que ses
la France tourne enfin ses regards caprices, à ne plus rien respecter, à faire et à
« En effet, comment ne pas voir
vers le principe monarchique, défaire ses Souverains, qu’elle ne peut pour
aujourd’hui, après tant de mécomptes et
représenté par Henri V. ainsi dire plus concevoir un Roi qui se
d’essais infructueux, que la monarchie
présente à elle avec des droits qu’il ne tient
traditionnelle, appuyée sur le droit
Parce qu’elle ne voit plus de salut que là. pas d’elle, qu’elle n’a point par conséquent le
héréditaire et consacrée par le temps, peut
droit de discuter, encore moins de nier et de
seule rendre au pays, avec un gouvernement
Parce que l’expérience lui fait comprendre renverser.
régulier et stable, cette sécurité de tous les
enfin qu’on ne peut point bâtir sur le sable droits, cette garantie de tous les intérêts, cet
mouvant de principes qu’on a forgés soi- Tel est, devant la France, Henri V, chef de
accord nécessaire d’une autorité forte et la maison royale de Bourbon, héritier
même, et qu’en politique comme en religion d’une sage liberté, qui sont les plus solides
il y a des vérités auxquelles il faut revenir bon légitime, et seul légitime, de la couronne de
bases de l’ordre public et les plus sûrs gages saint Louis, d’Henri IV et de Louis XIV.
gré mal gré, si l’on ne veut être sans fin le du bonheur des peuples (Correspondance de M.
jouet ou plutôt la victime des révolutions. le comte de Chambord, Genève, 1871, p. 206). Il ne s’impose pas à la France ; il se propose.
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Mais il se propose comme le seul Souverain titre légitime, c’est-à-dire conforme à la loi qu’on respecte le droit, le « droit divin » n’est-
légitime, tenant ses droits de sa naissance de DIEU et aux traditions du pays. Violer il pas au contraire une doctrine parfaitement
même et d’une antique constitution cette propriété royale, c’est voler ; et le vol raisonnable, la conséquence évidente des
nationale, que nulle violence n’avait le droit est interdit par les lois divines et humaines. principes les plus certains ?
de renverser.
En fait de souveraineté comme en fait de IV
Il ne s’impose pas, parce que, pour être propriété, le droit humain est sanctionné par
stable, toute autorité morale doit être le droit divin, s’appuie sur lui, devient une Comment on peut reconnaître avec
librement reconnue et acceptée ; mais, une seule et même chose avec lui : de telle sorte certitude sur qui repose le droit divin.
fois donnée cette reconnaissance solennelle qu’il est à la fois humain et divin.
de son droit, Henri V se présente à la France D’abord, au moyen des événements et des
au nom de Celui de qui procède tout droit et Remarquons-le d’ailleurs : le droit divin du circonstances, qui manifestent les vues de la
toute souveraineté légitime. Roi légitime n’est pas, comme on se Providence sur tel ou tel Prince ; puis, par
l’imagine, un fait isolé dans la société. La l’examen approfondi des principes qui sont
Que la France eût été heureuse, si, au lieu société repose sur une foule de faits humains ou qui seront la base du gouvernement de ce
de se laisser séduire par de chimériques donnant lieu au droit divin. C’est de droit Prince ; puis enfin, par les fruits de salut et de
promesses et par de grands mots, elle était divin que je possède ma maison, mon champ, véritable bonheur qui résultent ou qui
restée fidèle à son Roi ! et tous les fruits de mon travail ; c’est de droit résulteront des principes de son
divin que je possède ce dont je suis devenu le gouvernement.
Henri V est Roi de France, non en vertu de propriétaire légitime, à la suite et par l’effet
la capricieuse volonté du peuple, mais en de faits humains, de conventions purement Lorsque ces trois conditions se trouvent
vertu de l’ordre établi de DIEU ; il est Roi de humaines. réunies sur la tête d’un Souverain, on peut
France de droit divin. affirmer, sans crainte de se tromper, que ce
Il n’en est pas autrement du droit du Souverain est le dépositaire des droits de
III Souverain légitime à sa couronne. Bien que DIEU pour le bien du pays qu’il gouverne ou
ce droit résulte de faits humains, comme qu’il gouvernera. Et si, par-dessus le marché,
Ce que c’est que le droit divin, dont on nous le disions tout à l’heure, il n’en est pas la sainte Église prend en main ses droits, le
se moque avec tant de légèreté. moins divin ; et dès lors on peut et on doit protégeant de ses sympathies et de sa divine
dire que c’est de droit divin qu’il possède sa autorité, la certitude, du moins pour les
Il n’y a que l’ignorance qui s’en moque. « Le couronne. chrétiens, devient telle que le doute ne
droit divin », quand on sait ce que c’est, est la semble plus permis.
chose du monde la plus simple et la plus Or, il n’y a pas de droit contre le droit.
vénérable. Contre le droit à la fois humain et divin de la Je dis d’abord que la légitimité d’un Prince
souveraineté légitime, il n’y a pas plus de droit et la volonté de DIEU qui l’a établi ou qui veut
Ainsi que le mot l’indique, le « droit divin » qu’il n’y en a contre le droit à la fois humain et l’établir à la tête d’une nation se manifestent
c’est le droit de DIEU. Que DIEU, souverain divin en vertu duquel tout propriétaire par les événements. La Providence mène, en
Maître de toutes choses, ait le droit de diriger légitime possède ce qu’il possède. — De effet, d’une manière souveraine les choses du
les sociétés et les peuples, cela est plus clair grâce, méditons bien ces choses. Elles sont, monde, et fait souvent servir à ses desseins
que le jour. DIEU n’est-il pas le Roi suprême je le sais, un peu abstraites ; elles choquent les les événements les plus imprévus,
de tous les rois et de tous les peuples, le idées courantes, vulgarisées par la quelquefois même les crimes et les injustices
Seigneur souverain et absolu de toutes les Révolution ; mais elles sont vraies ; et des hommes. Elle punit les péchés d’un
sociétés ? Son droit est au-dessus de tous les aujourd’hui plus que jamais, il est peuple, en lui retirant tel ou tel bon Prince
droits ; et tous les droits légitimes viennent indispensable de le bien comprendre. dont il n’est plus digne ; elle punit les péchés
de lui, comme toutes les gouttes d’eau d’un de telle et telle famille royale, en laissant
ruisseau viennent de la source. Tout droit En résumé, pour un Souverain quelconque, déchoir du trône ses descendants et ses
véritable est donc un droit divin, une régner de « droit divin », c’est tout héritiers. Dans sa colère ou dans sa
communication du droit de DIEU. simplement régner légitimement, en vertu miséricorde, elle chasse ou elle ramène les
de droits légitimes ; c’est être le représentant dynasties, elle suscite une dynastie nouvelle ;
En matière de souveraineté, cette légitime de DIEU pour le gouvernement et alors c’est surtout par les événements
communication, pour être réelle, n’a d’une société, d’un peuple. De là cette qu’elle exprime ses volontés. Rien de plus
nullement besoin d’être surnaturelle ni formule célèbre, qui fait tant crier les impies certain que ce principe, dont la fameuse
miraculeuse : il n’est pas nécessaire que le et les ignorants : régner par la grâce de DIEU. théorie moderne des « faits accomplis » n’est
bon DIEU apparaisse en personne ou envoie que la caricature. Ordinairement, ce n’est
un Ange pour dire à un peuple : « Voici le Donc, quand nous disons qu’Henri V est qu’avec le temps et de loin que l’on peut juger
Souverain que je te donne ; voici la race de « droit divin » le Roi de France, nous avec certitude le véritable caractère de ces
royale qui te gouvernera. » Non, ce n’est pas voulons dire que, d’après la loi de DIEU, et événements, touchant la légitimité du
ainsi que DIEU mène les sociétés et choisit d’après les plus vénérables traditions de la pouvoir qui en est issu. Jusque-là, on n’a que
les dépositaires de ses droits. Pour France, le droit de ce Prince à la couronne des présomptions. — Comme on le voit, ces
communiquer ses droits souverains sur tel ou repose sur des titres légitimes, inattaquables, événements providentiels ne donnent pas le
tel peuple, le bon DIEU se sert de faits et sur une prescription huit fois séculaire, droit ; ils ne font que le manifester.
humains, parfaitement suffisants pour qu’il est le dépositaire de l’autorité
établir le droit divin : la naissance, par souveraine de DIEU, lequel est le Maître
exemple, et le droit de succession ; ou bien suprême du peuple français comme de tous Rien de ce qui est
encore une élection régulière. Le droit à la les peuples ; qu’il est ainsi le Roi légitime à
couronne est, en effet, un véritable droit de qui la France doit obéir, si elle veut faire la révolutionnaire ne
propriété, qui s’acquiert comme toutes les volonté de DIEU, si elle ne veut point se saurait venir de DIEU.
propriétés : par naissance, par héritage, par révolter contre le droit de DIEU.
conquête, par donation, enfin par Voilà une pierre de
prescription. La prescription a toujours la
vertu de légitimer le titre primordial lorsqu’il
Voilà ce que c’est que le « droit divin ». touche pour éprouver
est vicieux, de le confirmer lorsqu’il est Est-ce là, dites-moi, chose si étrange ? Est- la légitimité des droits
légitime. ce là surtout quelque chose d’absurde, de
ridicule, d’intolérable comme l’affirment
d’un prétendant
Oui, la couronne — je ne dis pas le depuis cent ans nos petits bavards à la couronne.
royaume, mais la couronne, c’est-à-dire le démocrates de la libre-pensée et du
droit de commander et de régner — est une journalisme ?
propriété ; une propriété que nul n’a le droit Je dis en second lieu que la légitimité, le
de ravir à celui qui la possède en vertu d’un droit divin d’un Souverain se reconnaît à la
Du moment que l’on croit en DIEU et
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nature des principes sur lesquels repose son été souvent très-difficile de sacrilège sur le Vicaire de JÉSUS-CHRIST, se
pouvoir. Rien de ce qui est contraire à la loi déterminer de quel côté se trouvait le découronna de ses propres mains et fut rejeté
divine, à la foi et à la morale catholiques, à droit divin. de DIEU et de la France, comme chacun sait.
l’enseignement du Saint-Siège, au respect
des droits souverains de JÉSUS-CHRIST sur le En pratique, la légitimité n’est pas toujours En 1830, le droit divin était trop
monde ; rien de ce qui est contraire à la facile à déterminer ; du moins, pas aussi facile évidemment du côté de la branche aînée des
justice, à l’honnêteté, au droit des gens ; rien que, par la grâce de DIEU, elle l’est Bourbons ; la Révolution trouva plus
de ce qui est révolutionnaire ne saurait venir aujourd’hui. Et c’est là ce qui explique les commode de le supprimer dédaigneusement,
de DIEU. Voilà une pierre de touche très- hésitations, pour ne pas dire les divisions de et d’asseoir tant bien que mal la royauté de
simple, très-pratique, pour éprouver la beaucoup de gens de bien, dans les temps de Louis-Philippe sur un prétendu droit
légitimité des droits d’un prétendant à la révolutions et d’ébranlements politiques. exclusivement populaire.
couronne. Dans les principes sur lesquels
s’appuie la revendication de ses droits, il faut Il y a des temps où le droit divin, la En 1852, beaucoup de gens de bien, effrayés
que tout soit conforme, ou du moins ne soit légitimité du véritable Souverain, est un fait des menaces de l’anarchie et croyant trouver,
point contraire à ce que la loi et la raison nous évident. Ainsi, en France, avant 1789, la loi dans un nouveau régime impérial, des
montrent comme la volonté de DIEU. — fondamentale du royaume était tellement éléments très-sérieux de salut et de bonheur
Notons-le bien, je parle ici des principes et claire relativement aux droits de succession pour la France, espérèrent en Napoléon, et
non des actes : les principes doivent être au trône ; les principes sur lesquels s’appuyait oublièrent ce qui devait inspirer des craintes.
absolument vrais, absolument conformes à la la monarchie étaient tellement conformes à La cause d’Henri V, si claire en théorie, leur
volonté de DIEU ; les actes, au contraire, sont la foi catholique et au droit des gens ; la semblait alors une vérité dont la pratique
toujours plus ou moins imparfaits, à cause de prospérité et la force qui en découlaient pour était devenue impossible ; et beaucoup se
la faiblesse humaine. Si, pour être légitime, la France étaient si évidentes, que, pendant disaient que ce noble et vertueux Prince était
un gouvernement devait être parfait, il de longs siècles, pas une difficulté, pas un sans doute, comme Louis XVI et Louis
faudrait renoncer à en trouver un ; et la doute sérieux n’ont pu s’élever à cet égard. XVII, une victime expiatoire des fautes de
société civile, livrée à l’anarchie ou au ses aïeux. L’impossibilité de son retour
despotisme, s’effondrerait bientôt dans le En outre, la France étant essentiellement paraissait « un fait accompli » ; et puis, la
gouffre des révolutions. catholique, l’autorité suprême de l’Église et France régicide avait-elle suffisamment
du Saint-Siège était toujours là pour décider expié son crime de 93 ?
Enfin la légitimité et l’origine sacrée du au besoin et d’une manière souveraine les
droit d’un Prince au gouvernement d’une grands cas de conscience sociaux et Mais la Providence, qui a ses moments
nation peut et même doit se reconnaître aux politiques qui auraient pu diviser la nation. marqués, semble nous dire aujourd’hui :
fruits de salut qui résultent ou devront C’est ce qui eut lieu deux fois en douze ou « Vous vous êtes trompés ! Je vous ai réservé,
nécessairement résulter de son avènement treize siècles, à l’avènement de la dynastie dans ma miséricorde, un Souverain selon
au pouvoir. « Aux fruits jugez de l’arbre », Carlovingienne et à celui la dynastie mon cœur ; un Souverain qui, régnant d’après
nous dit Notre-Seigneur dans l’Évangile. Capétienne. Un instant le calvinisme mes lois et se glorifiant d’être avant tout mon
Lorsqu’il est évident que le vrai bien d’une d’Henri IV suscita un doute ; mais il fut serviteur, vous tirera de l’abîme des
nation, son salut, sa paix, son bonheur bientôt résolu, et l’abjuration du Roi y mit fin révolutions, et fera refleurir, sur la terre de
résulteront du gouvernement d’un Prince, on de la manière la plus heureuse pour le pays. France, la paix véritable et le véritable
peut affirmer également, sans crainte bonheur. »
d’erreur, que ce Prince est élu de DIEU pour En dehors de ces cas exceptionnels,
gouverner cette nation, et que par nécessairement très rares, la loi C’est à force de souffrances que nous en
conséquent il en est le Souverain légitime. constitutionnelle de la France, telle que sommes venus à entendre, à comprendre
DIEU veut, en effet, le bien, le bonheur des l’avaient réglée et la Providence et l’Église et cette grande voix. DIEU parle au monde par
sociétés comme des individus ; il ne confie les instincts de la nation, suivait son cours les événements, disions-nous tout à l’heure.
l’autorité que pour procurer ce bien et ce comme un beau fleuve, paisible, profond, Ceux de ces dernières années sont tellement
bonheur ; et dès lors que l’expérience montre majestueux. Mais, depuis un siècle, tous les éloquents, les châtiments ont été si terribles,
qu’un Souverain procure, par la sagesse et la principes, religieux, politiques et sociaux, l’unique espoir du salut est si évidemment
force de son gouvernement, le bien véritable ont été, sinon renversés, du moins dans le retour à la monarchie légitime et
d’un pays, tout doit faire conclure à la profondément ébranlés dans notre pauvre héréditaire de la race de saint Louis, à une
légitimité, au droit divin de ce Souverain. — France ; à l’ancienne lumière ont succédé de souveraineté qui repose sur des principes
Je ne saurais trop le répéter : pas plus que les tels brouillards, qu’on n’y voyait pour ainsi chrétiens et anti-révolutionnaires,
deux premières, cette troisième condition ne dire plus à dix pas devant soi, et que la foi qu’aujourd’hui le doute ne semble plus
suffirait, à elle seule, pour manifester le droit politique, si ferme jadis et si simple, ne se permis.
divin ; d’autant plus qu’en pareille matière, trouvait plus que dans un petit nombre
on peut facilement s’abuser, prendre d’esprits très-fermes et de cœurs très-élevés. Oui, le fils de saint Louis, le chef de la
l’apparence pour la réalité et regarder maison de Bourbon, est notre Roi légitime,
comme solide et durable un bien-être Ce qu’il avait été si facile de déterminer le Roi que DIEU nous prépare, que DIEU a
purement passager. dans des temps meilleurs était devenu sinon daigné nous réserver. Acclamons-le sans
très-difficile, du moins beaucoup plus crainte. Bien que, en matière politique, la
J’ai ajouté, et il n’est pas besoin de le difficile dans ces temps-ci. C’est ainsi qu’en certitude pratique du droit divin ne puisse
prouver longuement, que si l’autorité des 1801 Pie VII, voyant les affreuses ruines pas être aussi absolue que lorsqu’il s’agit du
sympathies de l’Église vient se joindre à ces religieuses de la France et se rappelant peut- Pape, chef de l’Église, ou du père, chef de la
trois signes très-probables, moralement être les fautes (nous ne cherchons point à le famille, néanmoins lorsqu’il y a certitude
certains, de la volonté de DIEU sur un Prince nier) que les Bourbons avaient commises ou morale on peut, on doit même se prononcer
et sur un peuple, le doute n’est plus guère laissé commettre contre la sainte Église, put et ne pas hésiter.
permis à la conscience d’un catholique. croire un instant que Napoléon était suscité
de DIEU pour commencer une dynastie C’est ce qui a lieu relativement au droit
Appliquons ces principes aux pouvoirs qui nouvelle ; et il crut pouvoir le sacrer. Les faits d’Henri V à la couronne de France ; et c’est
se disputent en ce moment le droit de montrèrent bientôt que, si DIEU avait daigné ce qui fait que nous n’hésitons pas à le
gouverner la France. N’est-il pas évident se servir de cet homme extraordinaire pour reconnaître comme notre seul Roi légitime.
qu’Henri V remplit seul les conditions du relever en France les ruines de son Église, il
programme ? ne régnait point par lui ni en lui. Le doute qui VI
avait pu s’élever un instant à cet égard,
V Napoléon se chargea de le dissiper lui- Pourquoi la France ne parvient pas
même : foulant aux pieds tous les droits, se constituer en République.
Comment et pourquoi, depuis le mettant son ambition au-dessus des lois
commencement de notre siècle, il a divines et humaines, il porta une main Eh ! mon DIEU ! Pour une raison fort
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Les documents contrerévolutionnaires n 7 — Septembre 2000 5
simple : une femme blonde a beau se teindre Les faits sont là. Toutes les fois qu’elle a pu peut, à son gré, le mettre à la porte, et se
les cheveux en noir ou même en rouge, elle voter librement, l’immense majorité de la choisir un autre commis.
n’en demeure pas moins en réalité, une nation a repoussé la république et proclamé
blonde. Pour un temps, elle semble brune ; la monarchie. Or, comme en dehors du droit D’après l’Église, le Roi ne règne et ne
pour un temps, elle semble rousse ; mais, bon divin, il n’y a que la souveraineté nationale, gouverne qu’au nom de DIEU et comme
gré mal gré, les cheveux repoussent toujours c’est là une décision sans appel, une preuve exerçant les droits de DIEU ; et l’Église est
blonds. sans réplique. toujours là pour lui rappeler ses devoirs et
l’empêcher d’abuser de sa puissance. D’après
La France est monarchique dans sa On est si monarchique en France que dès la doctrine révolutionnaire, le Roi ne règne
constitution même ; elle a le sang qu’on est tombé en république, on cherche et ne gouverne qu’au nom du peuple ; la
monarchique, comme elle a le sang immédiatement un dictateur : témoins, le volonté nationale, c’est-à-dire, en bon
catholique et militaire. C’est un fait dont général Bonaparte, à la fin du dernier siècle ; français, les caprices de la multitude aveugle
l’évidence est attestée par l’histoire et, au le général Cavaignac, en 1848 ; et Thiers en et du suffrage universel sont sa règle unique,
besoin, par les efforts impuissants que cette 1871. sa lumière et sa morale ; son seul frein, c’est la
pauvre France fait depuis un siècle, pour crainte de déplaire au peuple et de perdre sa
changer son tempérament. Non, la France n’est pas, ne sera pas place.
républicaine ; elle ne peut pas, elle ne veut
pas l’être. Instruite par l’expérience, elle veut C’est cette doctrine sociale et politique de
Dieu a élu la France vivre ; elle veut revivre aujourd’hui, et comme la Révolution qui a présidé, plus ou moins
jadis, plus que jadis, donner au monde ses directement, à tous les gouvernements de fait
pour être le bras droit belles fleurs et ses excellents fruits. que nous avons eus depuis la grande, c’est-à-
de son Vicaire. dire la terrible révolution française ; tous ont
Donc, revenons enfin à cette maison plus ou moins régné et gouverné au nom des
paternelle d’où nous sommes follement fameux principes de 89, qui ne sont autre
Et pourquoi notre belle et bonne France sortis, en dehors de laquelle nous n’avons chose que les principes sociaux et politiques
est-elle essentiellement catholique, trouvé que des déceptions ; rentrons-y : nous de la Révolution. On les appelle
essentiellement monarchique, y retrouverons la paix, le bonheur et le repos. ordinairement immortels ; c’est mortels qu’il
essentiellement militaire ? Ah ! c’est que faut dire.
DIEU, qui l’a élue entre toutes les autres VII
nations de la terre pour être le bras droit de En effet, tous les pauvres gouvernements
son Vicaire ici-bas, l’a façonnée à l’image et Ce que c’est que la Révolution, qui se sont appuyés sur ces principes, en sont
ressemblance de son Église. L’Église est adversaire du droit divin et par morts. Le droit de la force les avait amenés :
catholique, monarchique et militante : la conséquent de la cause d’Henri V. le droit de la force les a fait partir. Toutes nos
France, « qui a été faite par les Évêques, révolutions viennent des principes
comme une ruche est faite par les abeilles », Il ne faut pas confondre ce qu’on appelle en révolutionnaires ; et tant que la cause
selon l’expression d’un célèbre historien général « la Révolution » avec la révolution subsistera, les effets subsisteront aussi.
protestant, la France est née catholique ; elle française de 1789. La Révolution proprement Qu’on applique ces principes de bonne ou de
ne peut cesser de l’être, sans cesser d’être la dite est plus qu’un fait : c’est une doctrine, un mauvaise foi, il importe peu ; qu’on les
France ; elle est née monarchique, et a été ensemble de principes et de théories sociales applique avec plus ou moins d’habileté, il
baptisée comme telle par saint Rémy, en la et politiques, que l’Assemblée nationale de importe peu encore : du moment qu’on les
personne de Clovis, son vrai premier Roi ; on 1789 n’a fait qu’appliquer à la France ; et cette applique, on est perdu tôt ou tard ; de même
aura beau faire, elle est et elle sera toujours doctrine qu’on a appelée justement la qu’on meurt tôt ou tard, quand on avale un
monarchique ; enfin la France est née Révolution, c’est-à-dire la grande révolte, est poison mortel. Impossible de faire de l’ordre
militaire et guerrière : Clovis était soldat ; un immense blasphème et une théorie avec du désordre.
Charlemagne, Philippe-Auguste, saint abominable. C’est la négation impudente du
Louis, Henri IV, Louis XIV, tous nos grands droit de DIEU sur les sociétés, et du droit « Le mal, écrivait Henri V, vient des
Souverains ont été des soldats. qu’il a donné à son Église d’enseigner et de atteintes portées, depuis plus d’un demi-
diriger les rois et les peuples dans la voie du siècle, aux grands principes sur lesquels
Telle est la constitution intime de la salut. repose tout l’ordre social et politique ; et le
France ; tel est l’ordre providentiel qui régit remède, c’est le retour à ces principes sacrés.
les destinées de notre patrie, et auquel elle ne C’est une doctrine nouvelle, née des Tout ce qui pourrait encore être essayé hors
saurait déroger impunément. D’autres révoltes protestantes, de l’incrédulité de là n’aboutirait qu’à des révolutions
nations, autrement organisées, peuvent et voltairienne et des conspirations de la franc- nouvelles et au triomphe plus ou moins
même doivent peut-être vivre en république, maçonnerie. Elle déclare que l’Église de prochain, mais infaillible, des fatales
parce que tel est leur tempérament social et DIEU n’a aucun droit d’enseigner ni de doctrines dont le but est le bouleversement
politique ; mais, pour nous, il n’en est pas diriger les sociétés, d’inspirer les lois, de et l’entière destruction de la société
ainsi : pour la France, cesser d’être une s’interposer entre les Souverains et les (Correspondance, p. 99). »
monarchie, c’est descendre du trône où peuples pour empêcher l’injustice et
DIEU et l’Église l’ont miséricordieusement maintenir les droits de la vérité. D’après la Il n’est pas nécessaire d’être bien fin pour
placée ; c’est déroger ; c’est quitter un état doctrine révolutionnaire, les Souverains et voir que le droit divin est en opposition
meilleur pour un état moins parfait et moins leurs gouvernements relèvent, non plus de directe avec la théorie révolutionnaire et la
noble. Saint Thomas établit, en effet, que la DIEU, mais du peuple ; DIEU n’est plus le prétendue souveraineté du peuple ; et c’est
forme monarchique est, dans la société Maître suprême de la nation : c’est le peuple parce que l’esprit révolutionnaire s’est
chrétienne, la forme gouvernementale la plus qui seul est son propre maître ; de là les noms infiltré dans presque toutes les têtes depuis
parfaite : c’est pour cela sans doute que le de « peuple souverain », et de « souveraineté un siècle, qu’il est devenu si difficile de faire
Seigneur l’a choisie et pour l’Église et pour la du peuple ». De là encore la fameuse et comprendre aux gens la vérité en matière
famille, c’est-à dire pour les deux sociétés absurde théorie du suffrage universel, où le sociale et politique.
qu’il a instituées lui-même, non-seulement peuple-roi, trompé, conduit par le bout du
quant au fond, mais encore quant à la forme. nez par le premier-venu, vote sans savoir ce Sachons-le bien : c’est principalement
qu’il veut, sans comprendre ce qu’il fait, sans parce qu’elle est l’ennemie jurée de DIEU et
Quoi qu’il en soit de la perfection relative connaître les élus pour qui on le fait voter. de son Église, que la Révolution est
de la forme monarchique, le fait est, quant à l’ennemie de la royauté légitime, de la
la France, qu’elle ne peut vivre ni prospérer Dans ce beau système, le Souverain n’est monarchie très-chrétienne, aujourd’hui
en dehors du terrain de la monarchie. DIEU plus le délégué, le représentant de DIEU, représentée par Henri V.
sait, et le démon aussi, combien de tentatives chargé par lui de procurer le vrai bonheur du
infructueuses ont été faites depuis cent ans, peuple : le Souverain, dans le système Tout ce qui, à un degré quelconque, est
pour transporter la pauvre France dans des révolutionnaire, est le commis, le révolutionnaire en France est contraire à la
terrains autres que celui où DIEU l’a plantée ? représentant du Peuple-Souverain, lequel cause d’Henri V : c’est la preuve la plus
6 Les documents contrerévolutionnaires no 7 — Septembre 2000
splendide de la légitimité, de la sainteté de autres. Aucun gouvernement issu de la chrétien, ami de l’ordre et du bonheur
cette cause. Révolution n’est viable. publics, éclairé et conduit par la loi de DIEU,
dirigé par les lumières de la foi dans le droit
VIII La monarchie légitime, la monarchie sentier de la justice ? Autant est abominable
vraiment catholique qu’il s’agit de relever, le type du tyran et du despote, autant celui du
Que l’antique monarchie chrétienne diffère par son essence de tous ces Roi chrétien est noble, attrayant et digne de
qu’il s’agit de restaurer en France gouvernements. Le Roi Henri V, qui, par la respect.
diffère essentiellement de tous les grâce de DIEU, la comprend et la représente,
pouvoirs qui nous ont gouvernés s’appuie sur un droit qu’il tient de DIEU et La monarchie française, telle que l’avaient
depuis 89. que confirme l’enseignement catholique le constituée et l’Église et les siècles, était
plus traditionnel, le plus autorisé. S’il garantie contre ses propres faiblesses, autant
Ce qui fait qu’un pouvoir est légitime, ce ne revendique la couronne, c’est qu’elle lui que peut l’être ici-bas une institution
sont ni les intentions ni les qualités de celui appartient par sa naissance ; c’est qu’elle est à humaine. D’après cette constitution
qui l’exerce : ce sont les principes sur lesquels lui, d’après l’antique et vénérable incomparable, le Roi avait d’abord pour
il s’appuie. De même, ce qui fait qu’un constitution française, que les passions et premier conseiller et, pour ainsi dire, pour
pouvoir est révolutionnaire, ce ne sont ni les l’incrédulité ont seules fait oublier à notre lumière et conscience, l’Église, la foi, la loi
intentions ni la perversité de ceux qui pauvre France, et s’il ne fait que se proposer à divine, représentée par les Évêques et, au
l’exercent, mais bien les principes la libre acceptation de son peuple, le droit, le besoin, par le Pape. Quelle plus puissante
révolutionnaires qui lui servent de base. droit divin au nom duquel il nous dit à tous : garantie contre les écarts de l’orgueil et du
Cette distinction est fondamentale. « Je suis votre Roi », s’impose à notre esprit, despotisme ?
comme toute vérité.
Depuis 1789, tous les gouvernements de Ensuite, le Roi était entouré des sommités
fait qui se sont succédé et qui ont dirigé la Donc, indépendamment de toute de la France, des plus puissants et des plus
France, se sont tous, comme nous l’avons dit, considération personnelle, la royauté riches seigneurs du pays, qui, après l’Ordre
appuyés plus ou moins sur les principes d’Henri V repose sur des principes vrais, du clergé, formaient le second Ordre de la
mensongers de la souveraineté du peuple et certains, immuables, catholiques ; tandis que nation. Les seigneurs, par leur puissance
de l’indifférence politique en matière de les autres gouvernements que nous avons eus même, tempéraient ce que l’autorité royale
religion. Pour ce motif, tous ont été plus ou depuis près d’un siècle reposaient sur la base pouvait avoir de trop puissant, garantissaient
moins révolutionnaires. essentiellement fragile de principes erronés, ainsi le peuple contre les abus de pouvoir
révolutionnaires, condamnés par la foi et, on toujours possibles par cela seul qu’un Roi est
peut bien l’ajouter, par la saine raison et un homme ; et en même temps ils couvraient
La liberté, ou plutôt, l’expérience. le Roi contre les révoltes également possibles
de ses sujets.
la licence de la La légitimité est essentiellement une
presse, est la grande question de principes ; il ne faut jamais en
faire, comme on le fait presque toujours, une
Enfin, le peuple proprement dit,
fortement organisé au moyen de nombreuses
arme de la question de personnes. institutions municipales et ouvrières,
jouissait de libertés très-étendues et très-
Révolution. IX réelles, protégées par l’Église et aussi vieilles
que la France elle-même.
Si, en remontant sur le trône de
La Restauration elle-même, tout en France, le Roi y fera monter avec lui Lorsque le besoin s’en faisait sentir, les
maintenant le vrai principe monarchique, « le despotisme et la tyrannie ». représentants du clergé, des seigneurs et des
avait fait à l’esprit du temps des concessions communes, librement élus par leurs pairs, se
qui l’ont perdue en l’affaiblissant. Elle avait Les aveugles adversaires de la monarchie rassemblaient autour du Roi et portaient à sa
conservé trois éléments de mort : légitime ont trois vieilles rengaines, qui connaissance toutes les plaintes, tous les
l’Université napoléonienne, qui était et qui alimentent, depuis cent ans, toute la presse désirs de la France. C’était ce qu’on appelait
est toujours l’école, la pépinière de la révolutionnaire, celle qui porte l’habit noir les Assemblées des notables ou les États généraux
Révolution ; la liberté, ou plutôt, la licence de comme celle qui porte la blouse. La première du royaume. Malheureusement pour la
la presse, qui est la grande arme de la de ces rengaines, qui ne mérite pas même France et pour la monarchie elle-même, ces
Révolution ; enfin la franc-maconnerie, qui qu’on s’y arrête, c’est l’accusation de grandes assises nationales furent supprimées
est l’armée organisée de la Révolution. La « théocratie ». On confond, parce qu’on le de fait, à partir de Richelieu.
Révolution a perdu Charles X, comme elle veut bien, et parce qu’on ne sait pas ce dont
avait perdu Louis XVI. on parle, la théocratie, qui est le Tant que les États généraux purent se
gouvernement direct et immédiat de DIEU, réunir, la monarchie chrétienne et française
« Je suis la Révolution, » disait un jour, de avec la soumission archi-légitime d’un fut le premier et le plus magnifique pouvoir
er
lui-même, Napoléon I . Louis-Philippe eût Souverain et de son gouvernement à la de l’Europe ; et, sauf des perfectionnements
pu en dire autant, quoique à un autre point de volonté de DIEU. Le gouvernement de Moïse et des changements de forme nécessités par
vue. Nos deux républiques, plus encore, s’il était un gouvernement théocratique ; le le changement des temps, c’est à ce type
se peut ; et chacun sait comment le second gouvernement que nous demandons est tout excellent que nous voudrions revenir. Ce
Empire, malgré la modération habituelle, simplement un gouvernement chrétien et n’est point là rétrograder : c’est remonter à
pour ne pas dire l’hypocrisie, de ses procédés soumis à la loi de DIEU. une hauteur d’où nous ont fait descendre le
avait inscrit, en tête de sa constitution « les protestantisme d’abord, puis l’absolutisme
immortels principes de 89, la souveraineté La seconde rengaine révolutionnaire, ce de Richelieu et de Louis XIV, puis enfin les
nationale et le suffrage universel ». sont les grands mots de despotisme et de honteuses doctrines de l’incrédulité
tyrannie. Tout roi est un despote ; tout prince voltairienne et de l’impiété révolutionnaire.
Le premier Empire était la Révolution est un tyran. Ici encore, ils ne savent ce qu’ils
militaire ; le gouvernement de Juillet, la disent ; ou plutôt ils ne le savent que trop : ils Rien n’est plus opposé au despotisme et à
Révolution parlementaire, bourgeoise ; les mentent, pour séduire le pauvre peuple. la tyrannie que la vraie monarchie chrétienne
trois Républiques, la Révolution et traditionnelle de la France. Cette
démocratique ; le second Empire, la Un despote est un homme qui gouverne, monarchie est le pouvoir le plus juste, le plus
Révolution diplomatique et soi-disant commande, défend, en suivant ses caprices, fort, et tout à la fois le plus réglé qu’il soit
pacifique. sans tenir compte de la justice ni du droit. Un possible de concevoir. En le redemandant à
tyran est un despote cruel, un despote qui DIEU et aux hommes, nous demandons, non
Tous ces pouvoirs, bâtis sur le sable, ne non-seulement gouverne arbitrairement, l’esclavage, mais la délivrance de notre patrie.
pouvaient durer : le souffle de la colère de mais qui, de plus, opprime, écrase le pauvre Nous voulons l’autorité, non le despotisme ;
DIEU les a renversés les uns après les autres, peuple. Quel rapport, dites-moi, y a-t-il entre nous voulons la liberté, non la licence ; nous
les uns comme les autres, les uns sur les ces deux idées et celle d’un Roi légitime, voulons le règne de DIEU sur la France, parce
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que ce règne, oublié depuis trop longtemps, catholiques de la France, et à sa vieille monarchie très-chrétienne, nous
n’est que le règne de la vérité, de la paix, de constitution si sage et si forte. n’entendons pas le moins du monde le retour
l’ordre et de la vraie liberté. à l’arbitraire, à l’omnipotence de la Cour, au
Quant au despotisme et à la tyrannie, nous Sous Louis XIV, la France s’absorba de règne du bon plaisir et du caprice royal. Nous
laissons cela aux révolutionnaires et à ces plus en plus dans l’autorité personnelle du entendons, et le Roi Henri V l’entend ainsi le
pouvoirs de toute couleur, nés de la Roi. Sous la Régence du duc d’Orléans, tout premier, le retour à une autorité, légitime en
Révolution, qui ne parlent si haut de la était soumis aux influences et même aux son essence, forte mais toujours juste en son
liberté que parce qu’elle fait défaut à la intrigues de la Cour ; et cet état de choses exercice ; le retour à une autorité soumise à la
pauvre France et que ne pouvant lui donner continua sous le règne de Louis XV. suprême autorité de DIEU, éclairée et
la chose, ils cherchent à la satisfaire avec le sauvegardée par l’enseignement de la sainte
mot. Église, tempérée et tout ensemble soutenue
Cette abominable par de fortes institutions provinciales et par
Le Roi de France nous apportera, DIEU des libertés municipales, qui remplaceront
aidant, la vraie liberté, en même temps que la tyrannie, ces scènes les anciennes institutions emportées par le
vraie autorité. Voilà pourquoi nous hideuses, ces vent des révolutions.
soupirons après son retour.
meurtres, ces échafauds Voyez si le programme royal que Henri V a
Voici ce que, du fond de son exil, dit et
répète ce tyran d’un nouveau genre : « La
sanglants, ces ruines de tracé de sa propre main ressemble en quoi
que ce soit à l’absolutisme de « l’ancien
France réclame à bon droit les garanties du tout genre, cet épou- régime ». « Mes dispositions, écrivait-il dès
gouvernement représentatif, honnêtement,
loyalement pratiqué avec toutes les libertés
vantable régicide, ces 1856, dans un manifeste que toute la France a
connu, mes dispositions sont toujours les
et tout le contrôle nécessaires. Elle désire forfaits sans nom seront mêmes et ne changeront jamais.
une sage décentralisation administrative, et
une protection efficace contre les abus à jamais le stigmate du « Exclusion de tout arbitraire ; — le règne
d’autorité. Un gouvernement qui fait de règne de la Révolution. et le respect des lois ; — l’honnêteté et le
l’honnêteté et de la probité politique la règle droit partout ; — le pays sincèrement
invariable de sa conduite, loin de redouter représenté, votant l’impôt et concourant à la
ces garanties et cette protection, doit, au De là naquirent une quantité d’abus, qu’on confection des lois ; — les dépenses
contraire, les rechercher sans cesse appelle aujourd’hui les abus de « l’ancien sincèrement contrôlées ; — la propriété, la
(Correspondance, p. 269). » régime ». Une lettre de cachet suffisait pour liberté individuelle et religieuse inviolables
envoyer un homme en prison, sans aucun et sacrées ; — l’administration communale et
Non assurément, ni l’Église catholique, ni jugement ; c’était un acte essentiellement départementale sagement et
la monarchie traditionnelle ne sont hostiles arbitraire, qui ne devait amener aucune progressivement décentralisées ; — le libre
aux doctrines de tolérance et de liberté ; et, justification, aucune défense ; un acte dont accès pour tous aux honneurs et aux
loin d’être les ennemis de tout progrès bien les conséquences étaient indéfinies, que rien avantages sociaux : telles sont à mes yeux les
entendu, elles en ont souvent pris la sage ne contrôlait, qui ouvrait la porte à toutes les véritables garanties d’un bon gouvernement ;
initiative et toujours favorisé le salutaire injustices et qui était justement odieux. Les et tout mon désir est de pouvoir un jour me
développement. charges les plus importantes de l’État et dévouer tout entier à l’établir en France, et
même de l’Église s’obtenaient trop souvent assurer ainsi à ma patrie le repos et le
« Il est utile, ajoute le Prince, de rappeler par des favoris ; on vendait et on achetait les bonheur (Correspondance, p. 157). »
cette vérité à ceux qui l’oublient (Ib., p. 210). » charges de la magistrature, etc. La
Révolution, il est vrai, en a fait cent fois, cent Et, dix ans après, il disait plus
X mille fois plus. Qu’est-ce, en effet, que ces explicitement encore : « Un pouvoir fondé
abus, en comparaison de cette abominable sur l’hérédité monarchique, respecté dans
Que la monarchie chrétienne tyrannie, de ces scènes hideuses, de ces son principe et dans son action, sans faiblesse
représentée par Henri V n’a rien de meurtres, de ces échafauds sanglants, de ces comme sans arbitraire ; — le gouvernement
commun avec « les abus de l’ancien ruines de tout genre, et, par-dessus tout, de représentatif dans sa puissante vitalité ; — les
régime ». cet épouvantable régicide, de ces forfaits dépenses publiques sérieusement
sans nom qui seront à jamais le stigmate du contrôlées ; — le règne des lois ; — le libre
La troisième rengaine, qui revient à tout règne de la Révolution ? accès de chacun aux emplois et aux
propos sous la plume et sur la langue des honneurs ; — la liberté religieuse et les
ennemis de la monarchie, c’est ce qu’on est Mais enfin les abus de l’absolutisme étaient libertés civiles consacrées et hors d’atteinte ;
convenu d’appeler « les abus de l’ancien réels, étaient criants, et la nécessité d’une — l’administration intérieure dégagée des
régime ». réforme sérieuse était sentie de tous, à entraves d’une centralisation excessive ; — la
commencer par le bon et honnête Louis propriété foncière rendue à la vie et à
Ici, il faut distinguer entre « l’ancien XVI. l’indépendance par la diminution des charges
régime », et « le régime très-ancien », ou, pour qui pèsent sur elle ; — l’agriculture, le
parler plus clairement, le régime très- Si la terrible révolution qui fit expier à commerce, l’industrie constamment
chrétien. Louis XVI et à toute la famille royale les encouragés ; — et, au-dessus de tout cela, une
fautes de ses devanciers n’éclata point plus grande chose : l’honnêteté ! L’honnêteté qui
En effet, à l’époque de la Révolution tôt, ce fut à cause de la puissante vitalité que n’est pas moins une obligation dans la vie
française, une modification fatale s’était la monarchie française avait puisée dans sa publique que dans la vie privée ; l’honnêteté
opérée insensiblement dans le régime vieille et chrétienne constitution. La France qui fait la valeur morale des États comme des
intérieur de la France. Le Cardinal de vivait de son passé. Elle finit pourtant par particuliers (Correspondance, p. 254). »
Richelieu, craignant sans doute d’être gêné succomber. Les voltairiens, les francs-
dans les plans de sa politique par les États maçons et les autres révolutionnaires Voilà le très-ancien et très-chrétien régime
généraux, parvint à les empêcher de se réunir attaquèrent la royauté par son côté dont nous saluons d’avance le retour.
pendant le règne de Louis XIII, ou, pour vulnérable ; ils parvinrent, en ajoutant le
mieux dire, pendant tout son règne à lui- mensonge aux exagérations, à détacher le XI
même. En même temps, il comprima, il peuple de son Roi ; ils lui firent oublier ses
abaissa tant qu’il put la puissance des nobles traditions de foi et de fidélité ; ils S’il est vrai que le règne d’Henri V
seigneurs et la liberté des Évêques, contre- circonvinrent le Roi lui-même, paralysèrent serait le règne d’une caste privilégiée,
poids si utile, si indispensable de l’autorité ses efforts, et finirent par le faire passer du le règne de la noblesse et de la Cour.
royale. Louis XIV suivit son exemple. Il put trône à la prison du Temple, et du Temple à
bientôt dire cette parole devenue célèbre : l’horrible échafaud du 21 janvier. C’est le Prince lui-même qui va répondre à
« L’État, c’est moi » : axiome gros de dangers, ce préjugé par trop démocratique.
contraire aux droits de DIEU, aux traditions Quand nous parlons d’un retour à la « Je me suis constamment efforcé, écrivait-
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il y a plus de vingt ans, de prouver par mes à remonter un jour sur le trône de mes pères, D’abord savez-vous ce que c’est que la
paroles comme par ma conduite, que, si la je n’aurai pas trop du concours de tous les dîme ? Sur cent qui s’en épouvantent, il y en a
Providence m’appelle à régner un jour, je ne cœurs qui aiment sincèrement leur patrie, quatre-vingt-dix-neuf qui ne savent pas ce
serai pas le Roi d’une seule classe, mais le Roi pour m’aider à remplir les grands devoirs qui que c’est, et le centième ne le sait pas non
ou plutôt le père de tous. Partout et toujours, me seront imposés (Ib., p. 126). » plus. La dîme était une redevance annuelle
je me suis montré accessible à tous les que payaient autrefois à l’Église les braves
Français, sans distinction de classes et de Après cela n’est-il pas évident que le règne gens qui vivaient sous sa protection dans les
conditions. Je les ai tous vus, tous écoutés, d’Henri V serait le règne d’une caste domaines ecclésiastiques. C’était une espèce
tous admis à se presser autour de moi. privilégiée, le règne de la noblesse et de la d’impôt qui se payait en nature, et qui
Cour ? Qu’en dites-vous ? constatait le devoir imposé par Notre-
« Comment après cela pourrait-on encore Seigneur au peuple chrétien de subvenir aux
me soupçonner de ne vouloir être que le Roi XII besoins temporels de ceux qui se dévouent à
d’une caste privilégiée, ou, pour employer les ses besoins spirituels.
termes dont on se sert, le Roi de l’ancien Quelle est la vraie liberté que la
régime, de l’ancienne noblesse, de l’ancienne France attend de son Roi. Dans les temps de foi, cette redevance
Cour ? J’ai toujours cru, et je suis heureux de paraissait toute naturelle. Quoi de plus
me voir ici d’accord avec les meilleurs esprits, Sur ce point encore, nous avons sa parole : simple, en effet, que la reconnaissance
que désormais la Cour ne peut plus être ce « Aujourd’hui, a-t-il dit, relever tout à la fois effective envers cette Église bienfaisante,
qu’elle était autrefois. l’autorité royale et la liberté, en les fortifiant dont les ministres abandonnent tout pour se
l’une par l’autre pour les préserver de ces dévouer au salut des âmes, à l’instruction et à
« J’ai toujours cru également qu’il faut que cruels retours, de ces fatales alternatives l’éducation du peuple fidèle, à
toutes les classes de la nation s’unissent pour d’anarchie et de despotisme, de licence et de l’administration des sacrements, à la prière
travailler de concert au salut commun, y servitude, voilà le problème. J’ai la ferme publique et au soin des pauvres ? Dîme veut
contribuant, les unes par leur expérience des confiance qu’il me sera donné de contribuer dire dixième, l’Église et la coutume avaient, en
affaires, les autres par l’utile influence au moins à le résoudre (Correspondance, p. effet, fixé au dixième la part qui devait
qu’elles doivent à leur position sociale. Il faut 193). revenir au clergé sur les fruits et produits de
que toutes soient engagées dans cette lutte la terre.
du bien contre le mal ; que toutes y apportent « Fasse le ciel que bientôt, sortant de mon
le concours de leur zèle et de leur inaction forcée, je puisse me sacrifier tout La Révolution s’indigne contre la dîme,
coopération ; que toutes y prennent leur part entier au triomphe du droit sur l’iniquité, de parce que la dîme avait un caractère
de responsabilité, afin d’aider loyalement et la vérité sur le mensonge, de l’ordre et de la essentiellement religieux, parce qu’elle était
efficacement le pouvoir à fonder un liberté sur la licence et l’oppression : en un un acte de foi et de soumission à cette Église
gouvernement qui ait tous les moyens de mot, de la civilisation chrétienne sur la abhorrée dont la destruction est le but final
remplir sa haute mission, et qui soit durable. barbarie révolutionnaire. C’est mon désir de la grande conspiration révolutionnaire.
ardent et ma ferme espérance (Ib., p. 199) ». Mais que la dîme soit chose bonne ou
« Toujours aussi j’ai eu l’intime conviction mauvaise, juste ou injuste, où a-t-on pris
qu’il n’y a que la monarchie restaurée sur la La licence, la barbarie révolutionnaire, qu’Henri V pense à la rétablir ? Ces sortes
base du droit héréditaire et traditionnel qui, nous les voyons à l’œuvre depuis cent ans, à d’accusations sont tellement ridicules que,
répondant à tous les besoins de la société, chacune de nos révolutions. Les orgies pour toute réponse, il suffit de hausser les
telle que l’ont faite les événements accomplis sanglantes de 93, les massacres et les épaules.
depuis plus d’un demi-siècle, puisse concilier proscriptions de la Terreur, les barricades de
tous les intérêts, sauvegarder tous les droits juillet, les assassinats des Princes et des Rois, Ce sont les sociétés secrètes et les mauvais
acquis, et mettre la France en pleine et les horreurs des journées de juin, et, par- journaux qui ont inventé ces stupidités et qui
irrévocable possession de toutes les sages dessus tout, le règne sanglant et ignoble de la les font avaler au peuple « le plus spirituel du
libertés qui lui sont nécessaires. Commune en 1871, avec la guerre civile, le monde » (vieux style).
pillage organisé et l’incendie de Paris : voilà
« J’apprécie tous les services qui ont été les fruits de cette licence qui a osé s’appeler la Il en est de même de ces fameux droits
rendus à la patrie ; je tiens compte de tout ce liberté. féodaux, qu’Henri V, disaient-ils, va rétablir.
qui a été fait à différentes époques, pour la Encore une chimère ; encore une calomnie
préserver des maux extrêmes dont elle était Henri V nous apportera la liberté, la bonne absurde !
et dont elle est encore menacée. liberté du bien et du vrai ; et c’est parce qu’il
aimera la liberté, qu’il détestera, qu’il « Les droits féodaux » n’étaient guère que
« J’appelle tous les dévouements, tous les réprimera la licence. des redevances, souvent très-peu onéreuses,
esprits éclairés, toutes les âmes généreuses, ou encore certains hommages, insignifiants
tous les cœurs droits, dans quelques rangs Cependant, que les nigauds se rassurent : le en eux-mêmes, qu’imposaient les seigneurs à
qu’ils se trouvent, et sous quelque drapeau Roi très-chrétien ne persécutera, ne brûlera leurs vassaux, en échange des terres dont ils
qu’ils aient combattu jusqu’ici, à me prêter personne ; seulement, il empêchera de son leur abandonnaient les fruits ou même la
l’appui de leurs lumières, de leur bonne mieux le démon et ses bons amis de faire propriété. Dans un temps où l’orgueil et
volonté, de leurs nobles et unanimes efforts leurs mauvais coups, de perdre les âmes et l’envie n’avaient pas encore été surexcités
pour sauver le pays, assurer son avenir, et lui d’empoisonner le pauvre peuple. parmi les ouvriers et les paysans, ces droits
préparer, après tant d’épreuves, de seigneuriaux n’avaient rien de choquant ; et il
vicissitudes et de malheurs, de nouveaux Le retour du Roi légitime, c’est donc au ne faut pas juger de ces anciens usages avec
jours de gloire et de prospérité. fond le retour de la liberté légitime, qui seule l’esprit de folle indépendance qui relâche et
mérite le beau nom de liberté. bouleverse aujourd’hui tous les liens sociaux.
« Telles ont été dans tous les temps, et
telles sont encore mes dispositions et mes XIII Maintenant le seigneur universel,
vues (Correspondance, p. 106) ». insatiable et invisible, qui s’appelle l’État, a
Si Henri V va rétablir, comme on veut jeté son grappin redoutable sur la France ; il
Plus tard, Henri V insistait sur le même le faire croire, « la dîme et les droits lui suffit d’une loi, d’un décret portant
sujet. « Loin de repousser personne, disait-il, féodaux ». l’étiquette de « l’utilité publique », pour
je serai heureux, au contraire, d’accueillir prendre tout ce qui lui plaît, pour violer sans
tous les hommes utiles, dans quelque Voilà encore une de ces niaiseries, plus appel la propriété individuelle ; par la
situation politique qu’ils se soient trouvés, à grosses qu’une montagne, et que l’on avale conscription, il prend de force nos enfants,
quelque nuance d’opinion qu’ils sans sourciller, sous les pieuses exhortations les arrache au foyer et au bonheur
appartiennent, pourvu qu’ils apportent au des francs-maçons et des démocrates, qui domestiques, les jette brutalement ou dans la
service de l’État un zèle éclairé et un véritable n’en croient pas un mot. corruption des casernes, ou sous les canons
dévouement. Car, si la Providence m’appelle de l’ennemi ; du matin au soir, du
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commencement jusqu’à la fin de la vie, il chrétiennement les enfants des familles l’ordre avec du désordre, de l’autorité avec les
foule aux pieds les droits les plus sacrés de la chrétiennes, à faire connaître et à faire servir principes qui sapent l’autorité par sa base. Il
famille et de la conscience, sans compter le bon DIEU ; mais , comme l’Église elle- faut qu’ils choisissent ou le Roi, ou la
ceux de DIEU et de l’Église. même , il n’obligera personne à être chrétien. Révolution ; ou le droit, ou le caprice ; ou le
Ceux-qui voudront aller en enfer auront blanc ou le rouge. Il n’y a plus de place pour le
Et les misérables qui ont jeté et qui toujours la liberté d’y aller ; seulement les tricolore, lequel est doublé de rouge, nous ne
maintiennent notre France dans cet empoisonneurs publics n’auront plus toute le voyons que trop depuis 89.
esclavage osent accuser un passé qui avait liberté de séduire, de calomnier, de pervertir.
contre lui des abus sans aucun doute, mais Est-ce là un mal, je vous prie ? Le Roi Henri V a l’honneur insigne de
dont les institutions fondamentales étaient représenter, et de représenter seul
excellentes, protectrices de toutes les Ayant pour base le droit et la justice, le aujourd’hui, le grand principe de la
libertés vraies, essentiellement conformes à règne d’Henri V sera le règne de l’honnêteté légitimité. C’est pour cela qu’il tient en ses
la loi de DIEU. et du bien. Voilà pourquoi il est digne des mains le salut de la France ; c’est pour cela
sympathies, des respects de tous les que tous les véritables hommes d’ordre, tous
Presque tout ce qu’on a dit de ces horribles honnêtes gens. les gens de bien doivent se ranger sous sa
« droits féodaux » sont de pures inventions ou bannière.
des exagérations grossières, uniquement Savez-vous quel est le véritable éteignoir ?
dictées par la haine de l’autorité légitime et C’est l’autocratie aveugle de l’État XVI
par l’impiété. révolutionnaire, qui opprime et qui
supprime arbitrairement ce qui lui déplaît et, Comment, chez un très-grand nombre
De grâce, gardons-nous une bonne fois de avant tout, la liberté catholique, mère et de gens de bien, appartenant aux
cette école de mensonge qui nous séduit, qui protectrice de toutes les autres libertés. anciens partis politiques, le retour de
nous perd depuis plus d’un siècle, et la monarchie légitime n’est que la
demandons à DIEU de rendre au peuple XV réalisation de ce qu’ils ont vainement
français le sens du vrai que la Révolution cherché jusqu’ici.
semble lui avoir enlevé si profondément. Pourquoi tous les hommes d’ordre
doivent saluer avec bonheur le retour Parmi les anciens libéraux, à l’époque de la
Henri V ne songe pas plus à rétablir la dîme d’Henri V. révolution française, et même parmi les
et les droits féodaux qu’à nous faire marcher républicains modérés, il y avait bon nombre
la tête en bas, ou à remplacer le chassepot par Henri V, s’il m’est permis de parler ainsi, d’hommes fort sincères, qui, choqués outre
les vieilles arbalètes du temps de saint Louis, n’est pas tant un homme qu’un principe : mesure des abus de l’absolutisme royal, ne
et les canons rayés par les vénérables C’est le principe du droit, qui vient se virent, dans la révolution qui s’opérait en
catapultes des Étrusques. substituer à l’absence de tout principe, ou, ce France et à laquelle ils travaillaient avec
qui est pis encore, aux principes erronés, enthousiasme, qu’un retour aux anciennes
XIV chimériques, délétères, de la souveraineté du libertés nationales et la cessation du régime
peuple et de l’athéisme politique. de l’arbitraire. Le fait est certain.
Si Henri V forcera tout le monde
d’aller à la Messe et à confesse. Henri V, c’est l’ordre, l’ordre stable et vrai, De même, quelques années plus tard,
succédant à cette apparence d’ordre fait avec er
lorsque Napoléon I releva le trône brisé, et,
Dans celles de nos provinces qui sont du désordre, dont nous jouissons depuis 1789. mêlant le faux avec le vrai, constitua
encore chrétiennes, les sociétés secrètes font l’Empire, beaucoup de gens honorables se
peur aux pauvres gens en les menaçant de la Nous l’avons dit, nous en sommes arrivés à rallièrent au nouvel ordre de choses, parce
dîme et des droits féodaux. Dans les un tel point, qu’il n’y a plus maintenant de qu’ils n’y voyaient qu’un élément d’autorité
provinces, trop nombreuses hélas ! où la milieu possible pour ces partis mitoyens, et de force, capable de réparer les ruines de la
Révolution a fait son œuvre et a demi-vrais, demi-faux, qui croyaient pouvoir Terreur.
déchristianisé les masses, on leur dit : « Le vivre avec des fragments de vérité sans être
jour où Henri V arrivera au pouvoir, il vous obligés de rompre avec les fameux principes Sous la Restauration, on salua les Bourbons
forcera d’aller à la Messe et à confesse. Ce de 89, marotte de notre siècle. Pas plus en comme représentant le principe
sera le règne des curés, des jésuites, des politique qu’en religion ces tiers-partis ne monarchique héréditaire et les antiques
capucins. Nous n’aurons plus la liberté de sont possibles aujourd’hui. Si on veut le traditions de la France ; mais on ne se
penser. Nous serons sous l’éteignoir clérical. rétablissement de l’ordre, il faut le vouloir préoccupait pas, ou du moins pas assez, du
Donc, honnêtes moutons, ajoutent-ils, votez tout entier, non-seulement avec ses venin libéral et gallican, qui était répandu
pour nous. Soyez des nôtres. » conséquences, mais aussi avec son principe, dans la charte de 1815 et dans l’ensemble de
c’est-à-dire avec le retour d’une monarchie nos lois athées.
Et il y a des gens, beaucoup de gens assez évidemment légitime, dont le droit est
bêtes (qu’on me pardonne cette expression indiscutable et supérieur aux caprices et aux Malgré son origine si évidemment
qui rend exactement ma pensée), oui, assez oscillations du peuple. révolutionnaire, malgré ses tendances
bêtes pour le croire. irréligieuses et libérâtres, le régime de Juillet
compta également parmi ses partisans bon
Non, Henri V n’obligera personne à aller à
la Messe ni à confesse. Non, il n’opprimera
Il faut choisir : ou nombre d’hommes honnêtes qui croyaient
sincèrement à la liberté du libéralisme et qui
personne ; il ne lésera aucun des droits de bien être homme voulaient de très-bonne foi le bien public.
votre conscience. Ce qu’il fera, ce sera de
protéger tout ce qui est bon contre tout ce d’ordre avec le Roi Il en fut de même sous la république de
qui est mauvais ; de protéger les pauvres gens,
beaucoup plus nombreux qu’on ne pense, qui
légitime ; ou bien 1848 ; sans être républicains, quantité
d’hommes d’ordre crurent trouver dans la
sont actuellement privés de liberté
religieuse, par les exigences odieuses et
être franchement république une forme d’institutions plus
large, plus simple, plus adaptée aux exigences
arbitraires d’une quantité de patrons ou de révolutionnaire. du moment. Ils purent donc se rallier très-
maîtres sans conscience. loyalement, très-sincèrement à cette pauvre
Il faut choisir : ou bien être homme d’ordre république.
Parce qu’il sera un Souverain sérieusement
(grand mot dont on a bien abusé depuis cent
chrétien, sérieusement catholique, le Roi A son tour et malgré certains « points
ans), être homme d’ordre avec le Roi
empêchera, autant qu’il pourra, les scandales noirs » qui dès lors apparaissaient à l’horizon,
légitime ; ou bien être franchement
publics de l’impiété ; et par ses exemples le rétablissement du second Empire put être
révolutionnaire. Les métis, qu’on appelle « les
d’abord, puis par l’influence d’une autorité regardé par les hommes d’ordre comme un
libéraux », sont des révolutionnaires qui
prudente et ferme, il aidera l’Église à faire le bonheur pour la France, d’autant plus
s’ignorent, qui croient qu’on peut faire de
bien, à combattre les vices, à élever facilement que les premières années du règne
10 Les documents contrerévolutionnaires no 7 — Septembre 2000
de Napoléon III parurent empreintes d’un rétablissement de la monarchie au dire de bien des missionnaires, c’est une
caractère de modération ferme et de respect légitime. dégradation inconnue chez les nègres et les
pour la Religion, qui faisait bien augurer de sauvages.
l’avenir. Esprits conservateurs, ils trouvaient Parce que la monarchie légitime est seule
dans le régime impérial un élément capable de rétablir tout de bon l’ordre et la Quoique les travailleurs de la campagne
vigoureux d’autorité, nécessaire, semblait-il, paix ; parce que les révolutions qui sont nées soient moins malheureux, ils sont tombés
pour réprimer l’anarchie. précisément de l’oubli des principes sur bien bas aussi ; ils ont perdu le sens chrétien,
lesquels repose la vraie monarchie, enlèvent le respect du prêtre et des choses saintes ; ils
Ces hommes étaient véritablement des aux pauvres travailleurs le nécessaire, le pain ont perdu la simplicité, la bonne et joyeuse
hommes d’ordre, des gens de bien. Ce qu’ils de chaque jour. naïveté d’autrefois. Eux aussi s’occupent de
ont cherché, ce qu’ils ont cru trouver dans politique ; le café et le cabaret ont remplacé
ces différents régimes, c’était la sécurité, la Avec nos belles révolutions modernes, les bienfaisantes réunions à l’Église. Trop
paix publique, la prospérité du pays : toutes nous passons notre temps à renverser souvent l’instituteur semble n’avoir d’autre
choses excellentes. aujourd’hui ce que nous avons bâti hier. Il n’y mission que de paralyser l’influence du curé,
a plus de sécurité dans les esprits, plus de de pervertir la foi des enfants et de préparer
Mais ces biens si désirables ne se trouvent stabilité dans les affaires, et par conséquent il ainsi des générations de plus en plus
que là où la Providence les a mis comme en n’y a pas d’affaires ; le travail est interrompu à révolutionnaires.
dépôt : dans la vraie et légitime autorité, dans tout propos : or le travail, qu’est-ce pour
la vraie et légitime liberté : dans la vraie l’ouvrier et le pauvre peuple, sinon le pain Le retour à la monarchie chrétienne et
autorité, qui seule peut sérieusement quotidien, le strict nécessaire ? Pour le riche, légitime sera, tout le monde le sent fort bien,
réprimer la licence ; et dans la vraie liberté, les révolutions sont sans doute fort le retour à un état de choses tout différent.
qui seule n’est pas un danger pour l’autorité. désastreuses aussi ; mais enfin elles ne le L’ordre, remis à la base même des
privent que du superflu. A l’ouvrier, au institutions du pays, se fera bientôt sentir
Or, dans la monarchie très-chrétienne, que pauvre travailleur, elles enlèvent tout ; elles le jusque dans les détails : il en sera de la France
représente Henri V et qu’il s’agit de rendre à réduisent à la misère, et le poussent trop comme d’un arbre à moitié desséché, auquel
notre France, nous trouverons ce que nous souvent à des extrémités détestables, car la la vie est rendue peu à peu par l’eau
avons vainement, quoique honnêtement, misère est mauvaise conseillère. bienfaisante qui vient baigner ses racines : il
cherché ailleurs. reverdit, il pousse de nouvelles branches ; il
Autrefois, lorsque les bases de la société retrouve bientôt son ancienne vigueur et sa
En devenant légitimistes , c’est-à-dire étaient affermies par le respect de notre fécondité première.
partisans de la monarchie légitime, nous ne antique et chrétienne monarchie, l’ordre
faisons que saisir l’idéal après lequel nous n’était jamais troublé qu’à la surface. Un Roi Cette métamorphose bienheureuse peut
avons inutilement couru sur la terre succédait à un Roi ; le Roi ne mourait pas. Un s’effectuer en beaucoup moins de temps
étrangère. Nous faisons comme le voyageur changement de règne ne changeait rien à la qu’on ne pense : si la France rappelait
qui, après avoir pris, sans le savoir, et à France ; c’était simplement un grand deuil de aujourd’hui et acclamait son Roi, en peu
plusieurs reprises, des chemins qui ne le famille, auquel s’unissait une grande joie de d’années le crédit, le commerce, les grandes
menaient point à son but, reconnaît enfin famille. Alors comme toujours, il y avait des et les petites affaires reprendraient avec
son erreur, et rentre sans hésiter dans le vrai misères, sans aucun doute : il y aura toujours d’autant plus d’ardeur qu’on pourrait enfin
chemin, dès qu’il vient à le connaître. des misères ici-bas, et les meilleurs régimes compter sur l’avenir. Les méchants
ne font que les diminuer ; mais la santé de la pourraient cette fois trembler tout de bon,
Nous faisons comme ces pauvres âmes que France n’était pas atteinte par ces maux les méchants qui sont les seuls véritables
le malheur de leur naissance et de leur accidentels ; la prospérité, la foi, l’honneur et ennemis du pauvre peuple ; et les bons, c’est-
éducation a fait grandir ou dans le bonheur du peuple demeuraient intacts. à-dire les vrais amis, les seuls bienfaiteurs de
l’indifférence ou dans le schisme ou dans la classe laborieuse, pourraient enfin se
l’hérésie, et qui embrassent avec autant de L’esprit démocratique et révolutionnaire, rassurer et mettre la main, sans hésiter, à la
droiture que de bonheur la foi catholique dès introduit en France par le calvinisme, ne reconstruction du grand édifice social. Les
que leurs yeux s’ouvrent à sa lumière. cessa de battre en brèche, pendant plus de sources du vice et de l’irréligion, qui sont les
deux cents ans, cette belle et excellente principales sources de la misère, seraient
En politique comme en religion, comme en monarchie française qui servait de taries, autant du moins que le permettent et
toutes choses, ne faut-il pas mettre avant fondement à la paix et à la prospérité du pays. l’imperfection de toutes les choses de ce
tout l’amour de la vérité ? Du moment que la En 1789, l’édifice s’écroula ; et depuis, nous monde et la difficulté des circonstances.
vérité politique se montre à nous, comme avons vécu de ruines et au milieu de ruines.
elle le fait en ces temps-ci, claire et Dans son long exil, Henri V a beaucoup
lumineuse, rallions-nous sans hésiter autour A qui, dites-moi, ont profité les douze ou étudié les grandes questions qui intéressent
de son drapeau, et bénissons DIEU qui nous treize révolutions qui, depuis 89, se sont la classe ouvrière, soit dans les villes, soit dans
permet enfin de saluer la réalisation de nos succédé sans interruption ? Est-ce aux les campagnes. Il a sur ce point les idées les
plus chères, de nos plus légitimes espérances. pauvres gens ? Est-ce aux ouvriers de nos plus généreuses, les plus arrêtées. Voici
grandes villes ? De plus en plus exploités par comment, dans un document public,
Rallions-nous à la monarchie héréditaire l’industrie, beaucoup d’entre eux se trouvent spécialement consacré à cette grave
d’Henri V, afin d’être de vrais gens, de vrais réduits à une espèce d’esclavage qui question, il résumait ses pensées : « En
hommes d’ordre. Si l’on nous accuse d’être ressemble fort à l’état lamentable des présence des difficultés actuelles, ne semble-
inconséquents avec notre passé, nous aurons esclaves du paganisme. Pour ces pauvres t-il pas que, fidèle à toutes les traditions de
la consolation bien supérieure d’être gens, plus de liberté religieuse : sous peine de son glorieux passé, la royauté vraiment
conséquents avec notre conscience et avec mourir de faim, ils sont forcés de travailler le chrétienne et vraiment française doive faire
des instincts d’honnêteté qui grâces à DIEU, dimanche, d’oublier DIEU, de vivre sans aujourd’hui, pour l’émancipation et la
ne nous ont jamais fait défaut, mais qui, religion, loin de l’Église. Avec la liberté du prospérité morale et matérielle des classes
jusqu’à ce jour, n’étaient point guidés par une dimanche, ils ont perdu et l’esprit de famille, ouvrières, ce qu’elle a fait en d’autres temps
lumière suffisante. et le bonheur tranquille du foyer, et le repos pour l’affranchissement des communes ?
nécessaire à la vie ; les cabarets, la mauvaise N’est-ce pas à cette royauté qu’il appartient
En politique comme en religion, passer du presse, les sociétés secrètes, les associations d’appeler le peuple du travail à jouir de la
camp de l’erreur dans le camp de la vérité, ce politiques et révolutionnaires sont venues liberté et de la paix, sous la garantie
n’est pas apostasier, c’est se convertir, c’est compléter l’œuvre, et les épouvantables nécessaire de l’autorité, sous la tutelle
remplir un véritable devoir de conscience. excès qui déshonorent depuis quelque temps spontanée du dévouement et sous les
la plupart de nos grandes villes font toucher auspices de la charité chrétienne
XVII du doigt la profondeur du mal où la (Correspondance, p. 239) ? »
Révolution a jeté la classe ouvrière. Quant
Pourquoi les ouvriers et les paysans aux mœurs de tout ce monde-là, il n’en faut Le retour d’Henri V au trône de France
sont tout spécialement intéressés au point parler : c’est quelque chose d’effrayant ; serait pour tous, mais surtout pour le peuple
Les documents contrerévolutionnaires no 7 — Septembre 2000 11
proprement dit, le commencement d’une ère Révolution ont fini par produire leur effet ; « Français, écrivait le Prince le 9 octobre
nouvelle, d’une ère vraiment chrétienne, puis, parce que quantité de gens de bien sont 1870, vous êtes de nouveau maîtres de vos
vraiment heureuse. des pleutres. destinées.
XVIII Quantité de gens de bien croient et « Pour la quatrième fois depuis moins d’un
espèrent en la monarchie ; mais il n’osent pas demi-siècle, vos institutions politiques se
Si cela vaut la peine de rappeler Henri le dire tout haut. — Oh ! que de petites sont écroulées et nous sommes livrés aux plus
V, puisqu’il n’a pas d’enfants. lâchetés chez les gens de bien ! Tout douloureuses épreuves.
dernièrement un homme d’esprit les appelait
Il n’a pas d’enfants, mais il a des héritiers ; « les gens de bien peu de cœur ». Pour la cause « La France doit-elle voir le terme de ces
et ces héritiers lui succéderaient de la monarchie comme pour la cause de la agitations stériles, source de tant de
légitimement, sans aucune secousse, d’après Religion, quatre-vingt-dix personnes sur malheurs ? C’est à vous de répondre.
la foi fondamentale de la monarchie cent rougissent de la vérité, et ont la
française. déplorable faiblesse de ne pas affirmer « Durant les longues années d’un exil
hautement leurs convictions. immérité, je n’ai pas permis un seul jour que
Depuis bientôt neuf cents ans, ce cas s’est mon nom fût une cause de division et de
présenté six fois déjà ; et jamais cela n’a fait trouble ; mais aujourd’hui qu’il peut être un
l’ombre d’une difficulté. Reprenons la même Jusqu’à quand les mé- gage de conciliation et de sécurité, je n’hésite
loi. Rentrons dans les mêmes traditions ; et pas à dire à mon pays que je suis prêt à me
nous retrouverons la même paix, chants seront-ils seuls dévouer tout entier à son bonheur.
récompense des mêmes vertus sociales et
politiques. Ne l’oublions pas ; Henri V est,
à montrer de l’énergie, « Oui, la France se relèvera si, éclairée par
avant tout, un principe. Devant ce principe, à s’entendre, à agir, à les leçons de l’expérience, lasse de tant
toutes les questions personnelles
disparaissent. Quant à ses héritiers légitimes,
l’emporter presque d’essais infructueux, elle consent à rentrer
dans les voies que la Providence lui a tracées.
nous ne voyons plus en eux que des partout, malgré leur
descendants de saint Louis et d’Henri IV,
des princes de la race royale de France, que le
infime minorité ? Quoi ! « Chef de cette maison de Bourbon, qui,
avec l’aide de DIEU et de vos pères, a
droit de leur naissance, que le droit divin nous avons pour nous constitué la France dans sa puissante unité, je
appelle au trône. devais ressentir plus profondément que tout
la vérité ; DIEU est autre l’étendue de nos désastres, et mieux
Et puis, lors même qu’Henri V n’aurait avec nous : et nous qu’à tout autre il m’appartient de les réparer.
aucun héritier, ni direct ni indirect, il n’en
resterait pas moins indispensable de avons peur ! « Ne l’oubliez pas : c’est par le retour à ses
reconnaître son droit et de rentrer dans les traditions de foi et d’honneur, que la grande
voies d’où la Révolution nous a fait sortir. nation, un moment affaiblie, recouvrera sa
Cette soumission serait devant DIEU et Jusqu’à quand les méchants seront-ils seuls puissance et sa gloire.
devant les hommes le témoignage de la vérité à montrer de l’énergie, à s’entendre, à agir, à
de notre repentir ; elle nous attirerait pour l’emporter presque partout, malgré leur « Je vous le disais naguère : gouverner ne
l’avenir les miséricordes divines. Après infime minorité ? Quoi ! nous avons pour consiste pas à flatter les passions des peuples,
Henri V, on aviserait. nous la vérité ; DIEU est avec nous : et nous mais à s’appuyer sur leurs vertus.
avons peur ! Quelle anomalie !
« Ne vous laissez plus entraîner par de
Point de salut pour Il y en a qui craignent qu’Henri V ne soit
trop consciencieux, trop chrétien. Oui, il y
fatales illusions. Les institutions
la France, tant en a, et beaucoup, même parmi les gens de
républicaines qui peuvent correspondre aux
aspirations des sociétés nouvelles, ne
bien, si réellement honnêtes, si bons et si
qu’elle demeurera nombreux. C’est insensé : un Souverain peut-
prendront jamais racine sur notre vieux sol
monarchique.
loin de son DIEU et il être trop chrétien, trop consciencieux,
surtout dans un temps comme le nôtre, où il « Pénétré des besoins de mon temps, toute
de son Roi, s’agit de relever les caractères énervés par la
corruption, et de remonter le moral de la
mon ambition est de fonder, avec vous, un
gouvernement vraiment national, ayant le
hors de l’Église. France ? Ces pauvres disciples de M.
Prud’homme ne se doutent pas du mal
droit pour base, l’honnêteté pour moyen, la
grandeur morale pour but.
incalculable qu’ils font au pays : leur
La grande affaire pour nous, c’est de inintelligence et leur faiblesse ouvrent à deux « Effaçons jusqu’au souvenir de nos
rentrer dans les voies du droit, et de nous battants les portes aux révolutionnaires et dissensions passées, si funestes au
débarrasser une bonne fois de ces haillons aux révolutions. développement du véritable progrès et de la
ensanglantés qui nous déshonorent et qu’on vraie liberté.
appelle les principes révolutionnaires. Point Un peu d’énergie ! Et demain, si nous le
de salut pour la France, tant qu’elle voulons, la cause du Roi sera populaire, sera « Français, qu’un seul cri s’échappe de notre
demeurera loin de son DIEU et de son Roi, gagnée ! cœur :
hors de l’Église, pour courir d’aventures en
aventures, et tomber de monarchies frelatées XX « Tout pour la France, par la France et avec la
en républiques impossibles. France !
Comment Henri V vient de faire lui-
Dans le principe de la légitimité, nous même, à deux reprises, appel au bon « HENRI. »
retrouverons le double trésor que nous avons sens et à la bonne foi de la France.
perdu : l’autorité véritable et la véritable Plus récemment encore, le descendant de
liberté. Au mois d’octobre dernier, pendant que saint Louis écrivait, pour qu’on les rendît
l’invasion allemande ensanglantait, écrasait publiques, les lignes suivantes, qui ont
XIX la France ; pendant que l’ennemi assiégeait et produit sur tous les esprits honnêtes un
affamait Paris, Henri V a cru devoir faire un incroyable effet. Ce nouveau manifeste
Si la cause d’Henri V est bonne et appel au bon sens et à la bonne foi du pays. résume, en le revêtant d’une autorité
vraie, pourquoi donc n’est-elle pas Ses paroles si simples, si nobles, achèveront vraiment royale, les considérations
plus populaire ? de convaincre les esprits qui pourraient renfermées dans le présent travail.
douter encore.
D’abord, parce que les calomnies de la « Comme vous, mon cher ami, j’assiste
o
12 Les documents contrerévolutionnaires n 7 — Septembre 2000
l’âme navrée, aux cruelles péripéties de cette elle ne fera jamais qu’une halte dans le nations. Ce n’est qu’aux époques de ses plus
abominable guerre civile, qui a suivi de si près désordre ; elle oscillera perpétuellement grands malheurs que la France a abandonné
les désastres de l’invasion. entre le césarisme et l’anarchie, ces deux ce glorieux patronage.
formes également honteuses des décadences
« Je n’ai pas besoin de vous dire combien je païennes, et n’échappera pas au sort des « Croyez-le bien, je serai appelé non-
m’associe aux tristes réflexions, qu’elle vous peuples infidèles à leur mission. seulement parce que je suis le droit, mais
inspire, et combien je comprends vos parce que je suis l’ordre, parce que je suis la
angoisses. « Le pays l’a bien compris, il a choisi pour réforme, parce que je suis le fondé de pouvoir
mandataires des hommes éclairés comme nécessaire, pour remettre en sa place ce qui
« Lorsque la première bombe étrangère vous sur les besoins de leur temps, mais non n’y est pas, et gouverner avec la justice et les
éclata sur Paris, je ne me suis plus souvenu moins pénétrés des principes nécessaires à lois, dans le but de réparer les maux du passé
que des grandeurs de la ville où je suis né : j’ai toute société qui veut vivre dans l’honneur et et de préparer enfin un avenir.
jeté au monde un cri de douleur qui a été dans la liberté.
entendu ; je ne pouvais rien de plus, et « C’est pourquoi, mon cher ami, malgré ce « On se dira que j’ai la vieille épée de la
aujourd’hui comme alors, je suis réduit à qui reste de préjugés, tout le bon sens de la France dans la main, et dans la poitrine ce
gémir sur les horreurs de cette guerre France aspire à la monarchie. Les lueurs de cœur de Roi et de père qui n’a point de parti.
fratricide. l’incendie lui font apercevoir son chemin ;
elle sent qu’il lui faut l’ordre, la justice, « Je ne suis point un parti, et je ne veux pas
« Mais ayez confiance, les difficultés de l’honnêteté ; et qu’en dehors de la monarchie revenir pour régner par un parti. Je n’ai ni
cette douloureuse entreprise ne sont pas au- traditionnelle, elle ne peut rien espérer de injure à venger, ni ennemis à écarter, ni
dessus de l’héroisme de notre armée. tout cela. fortune à refaire, sauf celle de la France, et je
puis choisir partout les ouvriers qui voudront
« Vous vivez, me dites-vous, au milieu « Combattez avec énergie les erreurs et les loyalement s’associer à ce grand ouvrage.
d’hommes de tous les partis, préoccupés de préventions qui trouvent un accès trop facile
savoir ce que je veux, ce que je désire, ce que jusque dans les âmes les plus généreuses. « Je ne ramène que la Religion, la concorde
j’espère. et la paix. Je ne veux exercer de dictature que
« On dit que je prétends me faire décerner celle de la clémence, parce que, dans mes
« Faites-leur bien connaître mes pensées un pouvoir sans limite. Plût à DIEU qu’on mains seulement, la clémence est encore la
les plus intimes, et tous les sentiments dont n’eût pas accordé si légèrement ce pouvoir à justice.
je suis animé. ceux qui, dans les jours d’orage, se sont
présentés sous le nom de sauveurs ! Nous « Voilà, mon cher ami, pourquoi je ne
« Dites-leur que je ne les ai jamais trompés, n’aurions pas la douleur de gémir aujourd’hui désespère pas de mon pays, et pourquoi je ne
que je ne les tromperai jamais, et que je leur sur les maux de la patrie. recule pas devant l’immensité de la tâche.
demande, au nom de la civilisation, au nom
du monde entier, témoin de nos malheurs, « Ce que je demande, vous le savez, c’est de « La parole est à la France, et l’heure à
d’oublier nos dissensions, nos préjugés et nos travailler à la régénération du pays ; c’est de DIEU.
rancunes. donner l’essor à toutes ses aspirations
légitimes ; c’est, à la tête de toute la Maison « HENRI.
« Prémunissez-les contre les calomnies de France, de présider à ses destinées, en
répandues dans l’intention de faire croire soumettant avec confiance les actes du « 9 mai 1871. »
que, découragé par l’excés de nos infortunes, gouvernement au sérieux contrôle de
désespérant de l’avenir de mon pays, j’ai représentants librement élus. Je plains le cœur français, qui, devant de
renoncé au bonheur de le sauver. pareils accents, ne laisserait point échapper
« On dit que la monarchie traditionnelle notre vieux cri national :
« Il sera sauvé, le jour où il cessera de est incompatible avec l’égalité de tous devant
confondre la licence avec la liberté ; il le sera la loi. « VIVE LE ROI ! »
surtout quand il n’attendra plus son salut de
ces gouvernements d’aventure, qui, après « Répétez bien que je n’ignore pas à ce CONCLUSION
quelques années de fausse sécurité, le jettent point les leçons de l’histoire et les conditions
dans d’effroyables abîmes. de la vie des peuples. Comment tolérerais-je « Et si, malgré tout cela, Henri V ne
des privilèges pour d’autres, moi qui ne remontait point sur le trône ? Si, pour une
« Au-dessus des agitations de la politique, il demande que celui de consacrer tous les raison ou pour une autre, les faits venaient à
y a une France qui souffre, une France qui ne instants de ma vie à la sécurité et au bonheur ne pas répondre à vos principes et à vos
veut pas périr, et qui ne périra pas ; car de la France, et d’être toujours à la peine espérances ? »
lorsque DIEU soumet une nation à de avant d’être avec elle à l’honneur?
pareilles épreuves, c’est qu’il a encore sur elle — Eh bien ! répondrais-je, ces principes
de grands desseins. « On dit que l’indépendance de la Papauté n’en seraient pas moins certains en eux-
m’est chère, et que je suis résolu à lui obtenir mêmes, et la question de la monarchie
d’efficaces garanties. On dit vrai. chrétienne et légitime n’en resterait pas
« L’abandon des moins en elle-même une grande, une sainte
vérité, digne de tout respect.
principes est la « La liberté de
Si ce malheur arrivait, de deux choses
vraie cause de l’Église est la l’une : ou bien la Providence, dans les secrets
nos désastres. » première condition impénétrables de sa toute-puissance,
r é s e r ve r a i t à l a F r a n c e d e s v o i e s
Adresses