EnfantExposeViolenceConjugale Publication
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Ont également participé au groupe de travail mis en place en vue de préparer la présente publication :
Alexandra Adriaenssens, directrice, Direction de l’Egalité des Chances, Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Anne Rees, référente maltraitance, ONE
Bernard Devos, Délégué général aux droits de l’enfant
Deborah Dewulf, responsable des équipes SOS Enfants, ONE
Deborah Kupperberg, attachée, Direction de l’Egalité des Chances, Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles
Fatiha Ismaili, proviseure, Athénée Royal Leonardo Da Vinci
Françoise Raoult, conseillère de l’Aide à la jeunesse, S.A.J. de Huy
Frédéric Benne, coresponsable, Centre de Prévention des Violences Conjugales et Familiales
Gérard Hansen, conseiller de l’aide à la jeunesse, S.A.J. de Verviers
Jean-Louis Simoens, responsable, Service formations au Collectif Contre les Violences Familiales et l’Exclusion
Josiane Coruzzi, directrice, Solidarité Femmes et refuges pour femmes battues
Le service Égalité des Chances du Département des Affaires sociales de la Province de Liège
Lionel Galand, Réseau pour l’élimination des violences entre partenaires
Nathalie Hannard, éducatrice spécialisée à l’Athénée Royal d’Auderghem
Nathalie Ruyskart, coordinatrice de la Section égalité des chances de la Province du Brabant wallon
Stéphanie Eeckhoudt, psychologue à La Touline, Service d’aide aux justiciable du Brabant wallon ainsi qu’à l’Eglantier,
Maison d’accueil et service d’accompagnement pour femmes en difficultés et leurs enfants
Thierry Génard, médiateur scolaire (Bruxelles), Fédération Wallonie-Bruxelles
Valérie Gobert, Valérie Martin, Olivier Antoine et Pascal Bartholomé, asbl Praxis
Veronica Saldi, éducatrice spécialisée, Solidarité Femmes et refuges pour femmes battues
Xavier Blendeman, éducateur enfants, Centre de Prévention des Violences Conjugales et Familiales
Remerciements :
Nous remercions vivement Madame Rosine Horincq Detournay pour son implication active dans la rédaction de cette
publication, ainsi que Madame Karen Sadlier et l’Observatoire des violences envers les femmes de Seine-Saint-Denis
(France) pour avoir autorisé la reproduction d’extraits de ses outils.
Nos remerciements vont également à toutes les personnes qui se sont impliquées dans la rédaction de fiches spécifiques à
chaque type de professionnel. Si ces fiches ne font pas partie de la publication actuelle, elles nous ont permis de mettre à
jour certaines situations concrètes évoquées ici.
Relecture : Edito3
Graphisme : polygraph.be
Imprimeur : JCBGAM
ISBN : 978-2-9601251-2-2
Bruxelles, Belgique, 2013
UN ENFANT
EXPOSÉ
AUX VIOLENCES
CONJUGALES
EST UN ENFANT
MALTRAITÉ
2
PRÉFACE 5
INTRODUCTION 6
2. Travailler en réseau. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
ANNEXES
2. Outils. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
3. Formations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89
4. Contacts utiles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91
5. Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96
6. Sitographie. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103
4
:(
:)
5
PRÉFACE
Fadila Laanan
Ministre de la Culture, de l’Audiovisuel, de la Santé et de l’Egalité des Chances
L orsqu’un enfant vit des difficultés, il est important qu’aucune hypothèse ne soit rejetée
quant à leur origine.
Dans ce cadre, la violence conjugale constitue sans aucun doute la forme la plus courante de
violence subie au sein de la famille et du foyer1.
Ensemble de comportements, actes, attitudes de l’un des partenaires visant à contrôler et do-
miner l’autre, la violence entre partenaires constitue une forme de violence intrafamiliale qui
affecte également les autres membres de la famille, parmi lesquels les enfants.
Cependant, sur le terrain, on constate que la question d’une possible violence conjugale entre
les parents n’est pas toujours prise en compte par les différents intervenants auprès des enfants.
Dans ce contexte, j’ai chargé la Direction de l’Egalité des Chances du Ministère de la Fédération
Wallonie-Bruxelles de rédiger une publication à destination des professionnels - éducateurs,
enseignants, psychologues, services d’aide à la jeunesse, secteur associatif, etc. - à la question
des enfants exposés aux violences conjugales.
L’objectif de cette publication est donc de sensibiliser les professionnels sur les spécificités de
la violence conjugale et sur la nécessité d’adapter les interventions menées sur le terrain, tant
auprès des enfants que de leurs parents.
Pour ce faire, il est important de reconnaître les situations de violences conjugales, de tenir
compte de leurs spécificités (cycle de la violence conjugale, relations d’emprise, etc.) dans les
pratiques, de (re)connaître l’impact de la violence conjugale sur l’enfant et les rôles que celui
peut être amené à adopter dans la dynamique familiale, de même que l’impact sur la parenta-
lité. Ceci afin de garantir la meilleure efficacité dans l’approche de la problématique de l’enfant
et d’éviter de mettre en danger le parent victime.
Après avoir analysé les travaux existants en la matière, la Direction de l’Egalité des Chances a
mis sur pied, en septembre 2012, un groupe de travail réunissant des professionnels des prin-
cipaux secteurs concernés par la problématique au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles :
petite enfance, enseignement, centres psycho-médico-sociaux (CPMS), aide à la Jeunesse, le
Délégué Général aux Droits de l’Enfant (DGDE), les Coordinations provinciales de lutte contre
la violence à l’égard des femmes et le secteur associatif de l’aide aux victimes et auteurs de
violence conjugale.
(1) Plan d’action national de lutte La rédaction de cette publication a pu être menée à bien grâce à ce réseau de spécialistes. Elle
contre la violence entre partenaires
et d’autres formes de violences
est le fruit d’une collaboration avec celles et ceux qui travaillent sur le terrain au quotidien, et
intrafamiliales 2010-2014 je tiens à les en remercier.
6
INTRODUCTION
;-[
INTRODUCTION 7
;-]
(1) Pâquet-Deehy Ann, (2000), Les De nombreuses études montrent l’impact du climat de violence conjugale sur le bien-être et
pratiques d’intervention auprès des
enfants et des adolescents exposés les différentes sphères de vie de l’enfant - santé physique, psychologique, apprentissages
à la violence conjugale, Sainte-Foy, scolaires, fonctionnement social, capacités relationnelles…
Québec, CRI-VIFF
(2) Racicot Karine, Fortin Andrée, Pour grandir harmonieusement, un enfant a besoin d’amour, de limites structurantes, de res-
Dagenais, Christian (2010) Réduire pect et de sécurité. A l’inverse, l’enfant qui est régulièrement confronté à un contexte familial
les conséquences de l’exposition
où dominent la peur, la colère et la culpabilité, peut présenter de nombreuses difficultés de dé-
et l’enfant à la violence conjugale :
pourquoi mise sur la relation mère- veloppement3 et souffrir de problèmes internalisés (troubles tels que l’anxiété, la dépression,
enfant ?, Les cahiers internationaux le retrait social ou une faible estime de soi) et externalisés (impulsivité, hyperactivité, troubles
de psychologie sociale, 2012/2,
Numéro 86, p 321-342
de l’attention, agressivité ou encore délinquance)4.
(3) Sadlier Karent (ss la dir.), (2010) Chaque enfant est unique et les facteurs de risques et de protection sont nombreux. C’est
L’enfant face à la violence dans le
couple, Dunod pourquoi l’exposition à la violence conjugale entraîne, selon les cas, des effets de nature et
d’intensité variables.
(4) Bourrassa, C. (2006). L’exposition
à la violence conjugale
psychologique et verbale et son Cependant, on constate que lorsqu’un enfant vit des difficultés, la question d’une possible
effet sur le comportement des violence conjugale entre les parents n’est pas toujours prise en compte.
adolescents. Journal International
de Victimologie, 13.
Kitzmann, K.M., Gaylord, N.K., Holt, La violence conjugale fait partie de la problématique de la maltraitance faite aux enfants et ne
A.R., & Kenny, E.D. (2003). Child constitue pas une forme spécifique de maltraitance. Mais il apparaît essentiel de tenir compte
witnesses to domestic violence:
de ses spécificités (particulièrement le rapport de domination de l’auteur sur la victime), et d’y
A meta-analytic review. Journal of
Consulting and Clinical Psychology, adapter les pratiques d’intervention et les relations avec les parents.
71(2), 339-352.
Sternberg, K.J., Lamb, M.E., Guterman,
E., & Abbott, C.B. (2006). Effects of
La connaissance de la problématique de la violence conjugale et de son impact sur les enfants
early and later family violence on doit permettre à tout intervenant d’optimaliser sa propre action. Il serait contreproductif de
children’s behavior problems and « spécialiser » cette mise en danger des enfants. Il ne s’agit pas de créer un champ d’interven-
depression: A longitudinal, multi-
informant perspective. Child Abuse
tion réservé à des services ou des autorités spécifiques, mais d’avoir une intervention adaptée
& Neglect, 30(3), 283-306. s’appuyant sur les services et structures existants.
8 INTRODUCTION
Afin de prendre en charge de façon adéquate un enfant exposé à la violence au sein du couple
et de comprendre le contexte au sein duquel il se trouve, il est nécessaire de bien appréhender
ce que recouvre le processus de violence conjugale : comment l’identifier, quelles sont ses dif-
férentes phases, quelles en sont les manifestations, qu’implique-t-il pour chacun des parents
et, en particulier, pour l’enfant, etc. ?
1.1. LA COLÈRE
La colère est une émotion normale et inévitable. On ne choisit pas d’être en colère. Par contre,
on peut choisir la manière de gérer sa colère, d’y faire face, de l’exprimer.
La colère n’est pas néfaste pour l’individu, si l’énergie qui en émane est canalisée correc-
tement. Une colère bien gérée peut permettre de s’affirmer et d’exprimer ses sentiments. A
l’inverse, une colère mal maîtrisée peut servir de prétexte à la violence5.
La colère n’implique pas nécessairement un rapport avec l’autre, c’est-à-dire qu’elle peut être
(5) Arseneau, L., Lampron, C., Delisle,
ressentie sans que personne ne soit mis en cause6.
R., Beaulieu, M-C., & Paradis, F.
(2005). L’intervention auprès
d’un enfant exposé à la violence
conjugale. Activité de formation. 1.2. L’AGRESSIVITÉ
Beauport : Direction régionale
de santé publique, Agence de L’agressivité est un mode d’expression. C’est une disposition mentale initialement liée à la
développement de réseaux locaux
de services de santé et de services survie, qui est nécessaire en cas d’attaque, par exemple. Il s’agit d’une pulsion fondamen-
sociaux de la Capitale-Nationale. tale, d’un état qui, comme la colère, n’implique pas forcément la participation d’une autre
personne7. Cette énergie peut être constructive (lorsqu’elle conduit à l’affirmation de soi ou
(6) Prud’homme, Diane (2004) La
violence à l’école n’est pas un qu’elle favorise le développement, la réalisation de soi) comme destructive (lorsqu’elle conduit
jeu d’enfant! Pour intervenir à une prise de pouvoir sur l’autre)8.
dès le primaire. Les éditions du
remue-ménage, Le regroupement
provincial des maisons Il existe différents types d’agressions : les agressions expressives, les agressions instrumen-
d’hébergement et de transition tales et les agressions de défense9 :
pour femmes victimes de violence
conjugale.
L’agression expressive est liée à un manque temporaire de maîtrise de soi. Elle est déclen-
q
(7) Arseneau, L., Lampron, C., Delisle, chée par une pression irrésistible (le plus souvent une émotion forte, comme la colère,
R., Beaulieu, M-C., & Paradis, F.(2005),
Ibidem
qu’on n’arrive pas à gérer) et aboutit généralement à un sentiment de culpabilité. Ce type
d’agression survient notamment dans les conflits de couples.
(8) Prud’homme, Diane. (2004) ibidem
(9) Campbell, Anne (1993) Men, Exemple : en voiture, Dominique s’engage dans un carrefour trop rapidement. Une
Women, and aggression : from voiture arrive en trombe. Le chauffeur, croyant que Dominique allait passer et risquer
rage in marriage to violence in the l’accident, lui profère des insultes.
street : how gender affects way,
New York/London: Basic Books/
Harpercollins.
INTRODUCTION 9
1 LA VIOLENCE CONJUGALE : DE QUOI PARLE-T-ON ?
L’agression instrumentale n’est pas liée à une perte de sang-froid. C’est un moyen d’im-
q
poser son emprise, de démontrer sa supériorité, d’obtenir, de consolider ou de conserver
le pouvoir sur la personne agressée. L’agression instrumentale peut être planifiée. Elle
apporte des avantages à l’agresseur : obtenir la satisfaction de ses besoins et de ses désirs
sans discuter, argumenter ni négocier.
Exemple : après cet incident sans gravité, Dominique s’engage sur la route et constate
que la voiture qu’il a croisée l’attend. Le chauffeur lui fait ensuite des queues de pois-
son, l’empêche de dépasser et freine brutalement devant lui.
L’agression de défense vise, comme son nom l’indique, à se défendre, à cesser une at-
q
taque et à reprendre un certain contrôle. Il s’agit d’une agression en situation de légitime
défense.
L’affirmation de soi est une manifestation de ses points de vue, besoins, malaises, attentes.
Elle résulte d’un choix et suppose le respect de soi-même et de l’autre. Il n’y a pas de prise
de pouvoir.
La légitime défense est le fait de se défendre ou de défendre ses proches, contre les agres-
sions et les violences. Ainsi, frapper ou hurler peut constituer soit un comportement violent,
s’il s’inscrit dans une volonté de prise de pouvoir et de contrôle sur l’autre, soit de la légitime
défense, lorsque la personne tente de protéger son intégrité physique et psychique et/ou celle
des siens. La légitime défense n’est pas de la violence, elle en est consécutive et elle n’a pas
le même but.
1.5. LE CONFLIT
Un conflit naît d’une divergence d’opinions ou de valeurs. Il consiste en une opposition d’in-
térêts entre deux ou plusieurs personnes, sans que la peur détermine qui sera le gagnant. Il
s’agit de mésentente, de désaccord entre individus à égalité dans la relation. Le conflit apparaît
(10) Arseneau, L., Lampron, C.,
Delisle, R., Beaulieu, M-C., & Paradis, F. lorsqu’un des individus se sent brimé ou tente de « gagner » sur l’autre. Le conflit génère des
(2005), Op.cit. tensions, qui en sont constitutives.
(11) Arseneau, L., Lampron, C.,
Delisle, R., Beaulieu, M-C., & Paradis, F. Les conflits surviennent dans toute relation intime. Bien gérés, ils peuvent être résolus sans
(2005), Op.cit. violence, par la négociation, le compromis ou la médiation10.
10 INTRODUCTION
1.6. LA VIOLENCE
La violence est un contrôle et une recherche de pouvoir d’une personne sur une autre. C’est
un ensemble d’attitudes, de propos, de comportements visant à dévaloriser, dominer, contrôler,
apeurer, blesser psychologiquement et/ou physiquement une autre personne11.
La violence s’inscrit donc exclusivement dans un rapport à l’autre12. Intentionnelle et volon-
taire, elle résulte d’un choix et poursuit un but précis : la prise de pouvoir, le contrôle. Les
agressions instrumentales sont le moyen d’atteindre ce but. Elles s’exercent directement
sur le/la partenaire, ou à l’égard des enfants, des animaux domestiques, des objets... Elles
peuvent prendre différentes formes : psychologique, verbale, sexuelle, physique, écono-
mique, administrative…
On parle de violence conjugale lorsque celle-ci s’inscrit dans le cadre d’une relation entre par-
tenaires - y compris parfois après leur séparation.
« Les violences dans les relations intimes sont un ensemble de comportements,
d’actes, d’attitudes de l’un des partenaires ou ex-partenaires qui visent à contrôler
et dominer l’autre. Elles comprennent les agressions, les menaces ou les contraintes
verbales, physiques, sexuelles, économiques, répétées ou amenées à se répéter, por-
tant atteintes à l’intégrité de l’autre et même à son intégration socio-professionnelle.
Ces violences affectent non seulement la victime, mais également les autres membres
de la famille, parmi lesquels les enfants. Elles constituent une forme de violence
intrafamiliale. Il apparaît que dans la grande majorité, les auteurs de ces violences
sont des hommes et les victimes, des femmes. Les violences dans les relations intimes
sont la manifestation dans la sphère privée, des relations de pouvoir inégal entre les
femmes et les hommes encore à l’œuvre dans notre société. […] La violence entre
partenaires constitue sans aucun doute la forme la plus courante de violence subie
au sein de la famille ou du foyer. »13
Cette définition vise tous les couples, mariés ou non, ensemble ou séparés, de même sexe ou
de sexe différent, qu’ils cohabitent ou pas.
La violence conjugale se distingue donc du conflit, dans la mesure où est mis en place un
rapport de pouvoir. Il n’y a plus de place ni pour la négociation, la prise de décision en com-
mun, ni même pour le désaccord ou le conflit. C’est systématiquement le même partenaire qui
« gagne » et l’autre qui « cède ». L’une des deux personnes maintient le pouvoir sur l’autre,
sur la relation, et décide pour l’essentiel. Son enjeu relationnel est que l’autre se plie à ses
(12) Prud’homme, Diane. (2004), décisions, quel que soit l’objet de la confrontation. Pour y arriver, il peut être menaçant jusqu’à
Op.cit.
ce que l’autre ait suffisamment peur pour ne plus le contrarier.
(13) Plan d’action national de lutte
contre la violence entre partenaires C’est cette spécificité, la prise de pouvoir d’un partenaire du couple sur l’autre et ses consé-
et d’autres formes de violences
intrafamiliales 2008-2010 (Belgique).
quences, qui demanderont toute l’attention des professionnels intervenant auprès des enfants
C’est nous qui soulignons. exposés.
INTRODUCTION 11
1 LA VIOLENCE CONJUGALE : DE QUOI PARLE-T-ON ?
Le tableau14 ci-après distingue les caractéristiques propres au conflit de couple de celles de la violence conjugale.
Le pouvoir et le contrôle Ce n’est pas la prise de pouvoir sur l’autre qui est Un partenaire cherche à avoir le pouvoir sur l’autre
sur l’autre en jeu, mais plutôt la répartition du pouvoir dans la et utilisera tous les moyens pour y arriver.
relation.
L’intention Le sujet du conflit est aussi sa cause. Le but La violence est le moyen choisi pour obtenir le
de l’agressivité est limité au fait de gagner pouvoir sur l’autre. L’usage de la violence n’est pas
momentanément le pouvoir dans la relation. impulsif mais stratégique, c’est une violence de
Certains parlent ici de violence de type agression, type punition15, que l’auteur utilise afin de rendre le
mais si les gestes peuvent être violents, il ne s’agit comportement de l’autre conforme à ses attentes.
pas de violence conjugale puisque la position des L’auteur maintient la position haute, il y a emprise.
partenaires est symétrique.
La persistance Le conflit porte sur un sujet de discorde en La violence est cyclique et récurrente. Une
particulier. Il peut être ponctuel, aigu ou/et parfois dynamique s’installe, laissant de plus en plus la
devenir chronique. place aux explosions et épisodes de violence, au
détriment des phases de rémission-lune de miel. Elle
devient chronique.
Les manifestations de Le conflit et ses expressions sont bidirectionnelles, La violence est unidirectionnelle, non réciproque.
l’agressivité réciproques. Il arrive qu’un conflit dégénère et L’auteur se sent légitime dans ses comportements
s’envenime par des agressions mutuelles. Dans tous violents. Les agressions sont instrumentales. Il arrive
les cas, il s’agit d’agressions expressives. que la victime se défende par des agressions de
légitime défense.
L’impact Les impacts peuvent être nombreux. Les séquelles Les impacts peuvent être nombreux, les séquelles
peuvent être profondes, mais pas à long terme. profondes et l’estime de soi de la victime est forte-
L’estime de soi est généralement conservée. ment réduite. Vu le contexte de danger permanent,
un sentiment de peur s’installe durablement. Les
troubles peuvent s’exprimer à long terme et faire
place à un syndrome de stress post-traumatique.
Responsabilisation L’agresseur se sent responsable de son passage à L’auteur ne se sent ni coupable, ni responsable de
l’acte. En dehors du conflit, les deux partenaires ont son passage à l’acte et cherche à le légitimer par des
souvent envie de changer ou acceptent de changer justifications qui le déresponsabilisent. Différents
leurs comportements pour améliorer leur relation de types de justification peuvent être utilisés :
couple. - de nature (par ex. : « les hommes sont
pulsionnels ») ;
- de système (par ex. : « quand on est marié, la
femme se doit d’obéir ») ;
- de provocation (par ex. : « elle sait comment je
suis, il ne fallait pas me provoquer ») ;
- de récusation (par ex. : « de toute façon, elle est
complètement folle ») ;
- de victimisation (par ex. : « c’est à cause de mon
enfance malheureuse »).
La victime quant à elle, se culpabilise, se sur-
responsabilise et intègre les justifications de l’auteur.
(14) Librement inspiré de la publication : L’enfant, une éponge... L’enfant exposé à la violence conjugale. Son vécu,
notre rôle. (2012) Paradis, Louise. Québec, Direction régionale de santé publique de la Capitale-Nationale
(15) Perrone Reynaldo et Nannini Martine (2012) Violence et abus sexuels dans la famille, Une vision systémique de
conduites sociales violentes, coll. Art de la psychothérapie
12 INTRODUCTION
Lorsque la violence conjugale est présente dans un couple, elle se manifeste le plus souvent
sous forme d’un cycle qui comporte quatre phases : l’escalade de la tension, l’explosion de la
violence, la justification/culpabilisation et la lune de miel/rémission.
ESCALADE
2 EXPLOSION
DE LA TENSION DE LA VIOLENCE
LUNE DE MIEL
3
JUSTIFICATION
4
RÉMISSION CULPABILISATION
L’auteur, par ses paroles et attitudes, installe un climat de tension et prétexte la soi-disant
q
incompétence ou les erreurs de sa/son partenaire. Tout incident est prétexte (et non la
cause) à déclencher la violence.
La victime, par peur, tente de tout faire pour ne pas mécontenter l’auteur. Elle doute d’elle-
q
même, est anxieuse, elle a peur de le contrarier et de commettre des erreurs.
L’auteur, considérant que la/le partenaire n’a pas répondu à ses attentes, pose un acte de
q
violence. Il peut s’agir d’insultes, de cris, d’accusations, de disqualification, de menaces, de
coups… L’auteur donne l’impression de perdre le contrôle de lui-même. La violence « éclate ».
La victime se sent humiliée, perdue, désespérée, démolie, brisée. Elle a peur que la vio-
q
lence reprenne. Elle peut craindre pour sa vie et celle de ses enfants.
« tu m’as stressé-e », « tu sais comment je suis »), explique l’origine de sa violence (« j’ai
des problèmes de nerfs », « j’ai été un enfant battu ») ou encore l’attribue à un facteur
externe (fatigue, chômage, alcool, problème quelconque).
Durant les deux premières phases, les actes de l’auteur lui permettent de prendre (ou de
reprendre) le contrôle sur la/le partenaire (climat de menace et d’agression). Durant les deux
autres phases, il agit pour récupérer la/le partenaire (justification, culpabilisation et réconci-
liation). Ce cycle se répète sans cesse et de façon de plus en plus fréquente. Plus le cycle se
répète, plus les phases de justification et de lune de miel tendent à raccourcir - jusqu’à dispa-
raître -, et plus les phases de tensions gagnent en intensité et en fréquence.
En effet, les victimes font souvent appel à leur entourage et aux services d’aide directement
après la phase d’explosion de la violence. Une fois la crise passée, l’auteur cherche à recon-
quérir son/sa partenaire en promettant le changement ; la victime peut croire qu’il ne s’agissait
que d’un incident qui ne se reproduira plus. Le couple passe alors à la phase de lune de miel
(17) Librement inspiré de Arseneau, / rémission. Il est donc fréquent que la demande d’aide de la victime, son projet de porter
L., Lampron, C., Levaque, R. & Paradis, F.
plainte, de quitter définitivement le conjoint, sa volonté de protéger les enfants de la violence,
(2005). Op. cit.
laissent ensuite place à une reprise de la relation avec l’auteur des violences et/ou le retour
(18) Librement inspiré de Severac, au domicile18.
Nadège (2012), Les enfants exposés
à la violence conjugale : Recherches
et pratiques, Rapport d’étude pour En résonance du vécu des enfants, les intervenant-e-s peuvent alors se sentir démotivé-e-s,
l’ONED, GIP Enfance en Danger. impuissant-e-s, voire ressentir de la méfiance quant au potentiel de changement de la victime,
(19) Horincq Detournay Rosine,
à ses motivations profondes. L’auteur peut alors apparaître, à tort, comme la figure stable,
www.psychogenre.org l’élément central et positif pour encadrer les enfants19.
INTRODUCTION 15
Le débat public peut être source de confusion en matière de violence conjugale. Certaines
études démontrent que les femmes sont les principales victimes, tandis que d’autres avancent
que les violences entre partenaires sont individuelles et désexualisées, c’est-à-dire infligées
tant par les hommes que par les femmes, et ce de manière symétrique ou complémentaire20.
Le terrorisme intime : cette forme de violence se manifeste par la prise de contrôle d’un
q
partenaire sur l’autre et la répartition inégale du pouvoir au sein du couple. Principalement
infligée par les hommes, cette forme de violence implique les menaces, l’intimidation,
le contrôle économique, la violence psychologique, l’isolement, la violence physique ou
sexuelle. Elle crée pour la victime un climat de peur permanente. Ce que Johnson nomme
« terrorisme intime » correspond, dans cette publication, aux situations de violence conju-
gale (telle que définie page 10), où les agressions sont instrumentales.
On peut penser que la violence est l’unique fait de traits de personnalité, de facteurs indi-
viduels. Dans cette perspective, certaines personnes seraient violentes, d’autres moins. La
violence conjugale serait donc individualisée (c’est-à-dire qu’elle dépendrait de l’individu uni-
quement) et désexualisée (c’est-à-dire infligée tant par les femmes que par les hommes et ne
dépendant pas du sexe de l’auteur ou de la victime).
Une autre approche pourrait faire reposer la violence conjugale uniquement sur les interactions
du couple, leurs modes de communication, sans tenir compte de la socialisation des êtres hu-
mains. Le fait que les rapports sociaux entre les femmes et les hommes puissent encore être
inégalitaires hiérarchisés et puissent reposer sur des rapports de pouvoir, n’interviendrait pas
dans l’explication.
(22) Horincq Detournay Rosine,
www.psychogenre.org
Enfin, on pourrait être tenté d’expliquer la violence conjugale en se basant uniquement sur la
(23) La notion de genre est un socialisation selon le sexe et l’apprentissage des rôles socio-sexuels différenciés et hiérarchisés
« concept qui se réfère aux
différences sociales entre les
entre hommes et femmes. Bien que ce niveau d’explication soit essentiel, s’y limiter serait
femmes et les hommes qui sont mésestimer les facteurs spécifiques du couple, des êtres qui le composent, de leur histoire,
acquises, susceptibles de changer de leur subjectivité.
avec le temps et largement
variables tant à l’intérieur que
parmi les différentes cultures Travailler au sujet de la violence conjugale et des enfants qui y sont exposés nécessite de dé-
» (« 100 mots pour l’égalité ». velopper un regard multidimensionnel et une analyse de genre23, pour adapter au mieux nos
Glossaire de termes sur l’égalité
entre les femmes et les hommes, pratiques aux besoins des personnes concernées24.
Commission européenne, Direction
Emploi & Affaires sociales, 1998).
5 – LA VIOLENCE CONJUGALE,
UN PHÉNOMÈNE ENCORE TRÈS RÉPANDU
A ce jour, il n’existe pas en Belgique d’étude quantitative portant spécifiquement sur la vio-
lence conjugale, telle que définie dans les différents plans d’actions nationaux de lutte contre
la violence entre partenaires.
En 2010, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a publié le rapport de recherche
« Les expériences des femmes et des hommes en matière de violence psychologique, physique
et sexuelle ».
Cette étude, réalisée par l’Université de Liège25, avait pour objectif général d’obtenir, via une ac-
tualisation des données relatives à la violence liée au genre, une meilleure compréhension de
la survenance, des formes et de la gravité de la violence psychologique, physique et sexuelle
dont les femmes et les hommes peuvent faire l’expérience, ainsi que des facteurs de risque
et de protection26.
Dans ce cadre, les chercheurs se sont limités aux violences interpersonnelles, se référant à la
notion d’atteinte à l’intégrité physique ou morale de la personne27.
L’enquête montre que 12,5% des répondants déclarent avoir subi au moins une forme de vio-
lence au cours des 12 mois précédents de la part de leur partenaire ou ex-partenaire (soit plus
d’une personne sur 8).
Au cours de leur vie, femmes et hommes peuvent être victimes de différentes formes de
violence. L’étude montre que, toutes formes de violence confondues, les hommes sont plus
fréquemment victimes de violence que les femmes, quel qu’en soit l’auteur.
Cependant, pour les personnes qui ont été victimes d’une violence autre que verbale au cours
de leur vie (c’est-à-dire pour 28,9% des femmes et pour 33% des hommes lors de l’enquête)28,
la relation entre la victime et l’auteur est très différente selon le sexe de la victime. Lorsque les
hommes sont victimes de violence, c’est principalement de la part d’un inconnu, tandis que
(25) « Les expériences des femmes les femmes le sont principalement de la part de leur partenaire.
et des hommes en matière de
violence psychologique, physique
et sexuelle », Université de Liège, Rapport à l’auteur, identifié pour le fait le plus grave (N=828), en %
Centre d’étude de l’Opinion, Panel
de démographie familiale, sous Femme Hommes Ensemble
la direction de Marc Jacquemin et
Frédéric Heselmans, IEFH, 2010 Partenaire 30,8% 5,7% 17,5%
Famille 27,4% 16,2% 21,5%
(26) « Les expériences des femmes
et des hommes en matière de
Proche 11,3% 15,8% 13,6%
violence psychologique, physique Travail 17,2% 21,9% 19,7%
et sexuelle », (2010), Op. cit., p.11.
Inconnu 13,3% 40,4% 27,7%
(27) « Les expériences des femmes
et des hommes en matière de
violence psychologique, physique
et sexuelle », (2010), Op. cit., p.13.
Chez les femmes, si l’on compare toutes les formes de violence selon le type de faits les plus
graves, ce sont les agressions physiques et les rapports sexuels forcés qui sont principalement
(28) Les expériences des femmes exercés par le partenaire.
et des hommes en matière de
violence psychologique, physique
et sexuelle », (2010), Op. cit., p 28
18 INTRODUCTION
Giflé, frappé, agression physique (N=21) 55,6% 27,8% 1,4% 4,2% 11,1%
Enfermé ou mis à la porte (N=10) 40,0% 60% sans objet sans objet sans objet
Si on effectue cette même comparaison pour les hommes, les faits les plus graves à leur en-
contre sont le fait d’inconnus, et consistent en agressions physiques, menaces avec arme ou
tentative de tuer.
Giflé, frappé, agression physique (N=21) 4,7% 7,1% 14,1% 7,1% 67,1%
Enfermé ou mis à la porte (N=11) 45,5% 36,4% sans objet 9,1% 9,1%
Les faits subis sont en général plus graves pour les femmes que pour les hommes. Les consé-
quences - psychologiques et physiques - de la violence conjugale sont donc plus importantes
pour elles également. 40,7% des femmes victimes se sentent moins confiantes, 25,7% éprouvent
de la honte et 23,9% sont devenues plus agressives, tandis que ces chiffres chez les hommes
victimes sont respectivement de 16,1%, 7% et 9,2%29.
Les femmes sont aussi beaucoup plus nombreuses à faire appel à la ligne « Écoute violences
conjugales ». En 2011, elles représentaient 93% des appelants30.
(29) « Les expériences des femmes
et des hommes en matière de
violence psychologique, physique
et sexuelle », IEFH, (2010), Op. cit.,
p.104
En Belgique, 45.148 plaintes pour des faits de violence conjugale ont été déposées auprès de la
police en 2011, soit une moyenne de 123 plaintes par jour31. Et en 2010, on a comptabilisé dans
notre pays 78 tentatives d’assassinat de la compagne (ou ex-compagne), soit une tentative
tous les 5 jours, 14% aboutissant au décès de la victime32.
Enfin, il est important de noter que 10% seulement des victimes d’actes de violence portent
plainte33. Le faible taux de dépôt de plainte peut s’expliquer par divers facteurs :
les victimes pensent pouvoir éviter d’autres épisodes de violence en adaptant leur
q
comportement ;
les victimes espèrent que la violence n’était qu’un acte isolé, un dérapage qui ne se repro-
q
duira plus ;
la phase de « lune de miel » les convainc que leur partenaire a changé et qu’il ne recom-
q
mencera plus.
Les femmes étant les principales victimes et les hommes les principaux auteurs de la violence
conjugale, c’est à ce constat et à ces dynamiques que l’on fera prioritairement référence dans
cette publication. Toutefois, l’analyse peut également être utile dans les cas d’homme victime
et de femme auteure de violence conjugale, de même que pour les situations où il s’agit de
couples de même sexe.
Dans son rapport « Les expériences des femmes et des hommes en matière de violence psy-
chologique, physique et sexuelle »34, publié en 2010, l’Institut pour l’égalité des femmes et
des hommes remarque que dans plus de 40% des situations de violences entre partenaires,
au moins un enfant a été témoin d’actes violents commis sur un de ses parents35. Les enfants
sont particulièrement présents lors des situations de « violences graves » (48,8%) et « très
graves » (43,2%)36.
Lorsque des violences ont lieu entre partenaires séparés, les violences sont, dans plus de 56%
des cas, vues ou entendues par les enfants37.
Selon une étude canadienne, 40% des enfants exposés aux violences conjugales subissent eux-
mêmes des maltraitances physiques de la part de l’auteur38.
Les enfants exposés aux violences conjugales représentent donc un nombre important de vic-
times et nécessitent une intervention adaptée.
Les impacts de la violence conjugale sur les enfants sont nombreux et ils sont largement étu-
diés, notamment au Canada et en France. Outre le risque que l’enfant puisse être une victime
directe de la violence, ces impacts peuvent être asymptomatiques, psychologiques, comporte-
mentaux, relationnels, physiques...
Les études quantitatives relatives à l’impact de la violence conjugale sur la santé et les com-
portements sociaux des enfants qui y sont exposés ont principalement été menées au Canada.
Elles indiquent que les enfants exposés aux violences conjugales présentent 10 à 17 fois plus
de troubles affectifs et comportementaux que les autres enfants (dépression, anxiété, repli sur
soi, refus d’aller à l’école, angoisse de séparation vis-à-vis de la mère39, agressivité, reproduc-
tion de la violence…).
60% des enfants exposés aux violences conjugales présentent un syndrome de stress post-trau-
matique complet40.
Les enfants exposés à la violence conjugale peuvent en outre être confrontés de manière bru-
tale à la mortalité.
Depuis 2006, une étude annuelle41 sur les morts violentes au sein du couple est menée en
France par la délégation aux victimes du Ministère de l’Intérieur. Pour l’année 2012, cette étude
met en évidence que :
9 enfants mineurs ont été tués par leur père en même temps que leur mère ; une mère
q
étant enceinte, on comptabilise également le décès d’un fœtus ;
20 enfants ont été témoins oculaires de scènes de crime, tandis que 48 enfants étaient
q
présents au domicile lors d’une telle scène ;
(40) Lehmann, P. (1997). The Si ces statistiques se focalisent sur les conséquences les plus graves, il ne faut pas minimiser
Development of Posttraumatic l’impact de la violence sur le développement de tout enfant qui y est exposé, à court, moyen
Stress Disorder (PTSD) in a Sample
et long-terme.
of Child Witness to Mother Assault.
Journal of Family Violence, 12(3):
241-257.
PARTIE I
:-\
PARTIE I 23
:-/
aux jeunes en difficulté, ainsi qu’aux personnes qui éprouvent de graves difficultés dans
q
l’exécution de leurs obligations parentales ;
à tout enfant dont la santé ou la sécurité est en danger ou dont les conditions d’éducation
q
sont compromises par son comportement, celui de sa famille ou de ses familiers.
D’autre part, le décret2 relatif à l’aide aux enfants victimes de maltraitance du 12 mai 2004
définit la maltraitance comme toute situation de violences physiques, de sévices corporels,
d’abus sexuels, de violences psychologiques ou de négligences graves qui compromettent le
développement physique, psychologique ou affectif de l’enfant ; une attitude ou un comporte-
ment maltraitant pouvant être intentionnel ou non.
Aussi, si l’exposition à la violence conjugale n’apparaît pas, de fait, comme une catégorie spé-
cifique de danger dans la législation3, elle est constitutive - au minimum - d’un risque, dans la
mesure où elle se traduit la plupart du temps par la présence de plusieurs formes de mauvais
traitements4. La situation des enfants exposés à la violence conjugale relève donc de ces deux
décrets.
Par ailleurs, la Belgique a signé la convention du 7 avril 2011 du Conseil de l’Europe sur la pré-
vention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique5. Celle-ci
dispose que « les enfants sont des victimes de la violence domestique, y compris en tant que
témoins de violence au sein de la famille » et définit plusieurs objectifs visant à leur assurer
protection et soutien. L’article 26 énonce ainsi l’obligation de veiller à ce que les services et
(1) Décret du 4 mars relatif à l’Aide
à la Jeunesse 1991 (M.B. 12.06.1991) l’assistance fournis aux victimes prennent en compte les droits et les besoins de leurs enfants.
Si nécessaire, ceux-ci doivent bénéficier d’actions psychosociales ayant fait leurs preuves,
(2) Décret du 12 mai 2004 relatif
à l’aide aux enfants victimes de
adaptées à leur âge et à leur développement, et visant à ce qu’ils puissent faire face aux trau-
maltraitance (M.B. 14.06.2004) matismes qu’ils ont subis.
Le développement des enfants est influencé à la fois par des facteurs de risques et des facteurs
de protection, au niveau individuel, social proche (l’entourage, les familles élargies), social
éloigné (l’école, le quartier, les groupes fréquentés) ou encore juridique et politique (textes
légaux de protection de l’enfance, plan d’actions pour lutter contre les violences conjugales…).
Comme toute autre forme de maltraitance, les effets et les conséquences de l’exposition à la
violence conjugale sur les enfants se situent à plusieurs niveaux : le développement affectif et
relationnel, la santé physique et mentale, les comportements, le développement cognitif et les
acquisitions scolaires, l’apprentissage des relations sociales, etc.
Il n’y a pas de facteur causal simple et direct entre l’exposition des enfants aux violences et leurs
problèmes de développement, l’enfant et son environnement étant en interaction constante et
s’influençant mutuellement. Les enfants peuvent donc réagir, s’adapter et traverser le trauma de
l’exposition à la violence conjugale de manières différentes, et ce en fonction de nombreux facteurs
de risque, de vulnérabilité et ceux de protection et de résilience, à la fois internes et externes7.
Les symptômes généraux décrits ci-dessous ne sont pas spécifiques de l’exposition à la violence
conjugale mais sont caractéristiques d’une possibilité de maltraitance. En leur présence, le/la
professionnel-le peut formuler l’hypothèse que l’enfant est exposé à des violences conjugales :
des troubles de l’attachement, un manque de sécurité relationnelle, avec des enfants particu-
q
lièrement sensibles dans les moments de séparation (par exemple lorsqu’il faut quitter la mère
pour entrer à la crèche ou à l’école), qui émettent le besoin urgent de rentrer à la maison, etc. ;
des difficultés post-traumatiques, avec des pensées intrusives concernant les violences :
q
cauchemars, jeux répétitifs dans lesquels les enfants mettent en scène la violence, com-
portements agressifs ; ce symptôme est présent chez plus de la moitié des enfants expo-
sés à la violence conjugale ;
Lorsque l’enfant vit de la maltraitance directe à son égard, en plus de son exposition à la vio-
lence conjugale, les impacts croisés doivent être considérés.
Certains enfants peuvent présenter une souffrance dissociative, au cours de laquelle inter-
viennent des processus neurologiques qui les coupent de leurs émotions, les empêchant de
ressentir la peur, la colère ou la tristesse. Si la dissociation est un mécanisme de protection
qui peut aider l’enfant à survivre à la violence et aux traumatismes sans réaction émotionnelle
apparente à court terme, elle l’empêche cependant de ressentir, d’exprimer ses émotions ver-
balement et participe au fait de réduire les possibilités de demande d’aide et de soutien. Les
émotions sont exprimées de manière non élaborée, par le biais de comportements inadaptés,
anxieux, agressifs envers soi-même ou les autres. La dissociation participe à des difficultés
psychologiques et relationnelles graves dans le moyen et long terme.
Dans tous les cas, face à un enfant qui a vécu la violence conjugale, il est important d’évaluer
plusieurs axes :
l’état général de l’enfant, les symptômes qu’il/elle présente ou l’absence de symptôme, son
q
fonctionnement psychologique et la présence de signes de souffrance psychique, son déve-
loppement dans les relations sociales, son degré de sécurité dans l’attachement aux autres,
son investissement à l’école et ses apprentissages scolaires, sa santé physique, etc. ;
Les recherches s’accordent sur le fait que les enfants exposés à la violence conju-
gale qui ne seraient pas détectés et qui ne disposeraient pas suffisamment de fac-
teurs de soutien à la résilience, présentent un risque accru de développer des pro-
blèmes de santé mentale, voire un syndrome de stress post-traumatique (SSPT). Le
SSPT conséquent à la violence conjugale et le trouble déficitaire de l’attention avec
hyperactivité (TDAH) présentent des symptômes communs (difficultés de concen-
tration, problèmes d’attention, irritabilité, comportements perturbateurs, troubles
du sommeil, anxiété, dépression, etc.). Lorsque l’on constate ces symptômes, il
s’avère donc essentiel de différencier le diagnostic.
PARTIE I 27
Les impacts décrits ci-dessous par catégorie d’âge ne sont pas spécifiques de l’exposition à la
violence conjugale, mais sont symptomatiques d’une possibilité de maltraitance. En leur pré-
sence, le/la professionnel-le peut formuler l’hypothèse que l’enfant est exposé aux violences
conjugales.
Stade prénatal : Les violences se manifestent plus fréquemment dans les périodes de
q
changements dans la relation de couple. Il est donc courant qu’elles commencent, conti-
nuent ou s’amplifient durant la grossesse. Dans le cas de femmes enceintes maltraitées, le
fœtus court indiscutablement un risque de traumatisme direct et indirect. Outre les risques
de blessures ou d’atteinte aux organes liés à son développement, voire de mort fœtale8, les
connaissances actuelles à propos de la sensorialité fœtale et des interactions biologiques
entre la mère et le fœtus laissent présupposer qu’au moment de l’acte violent, ce dernier
vit des modifications physiologiques et biologiques soudaines, comme sa mère9.
Entre 0 et 36 mois : Les bébés et tout petits enfants, plus dépendants dans la satisfaction
q
de leurs besoins élémentaires mais aussi plus souvent au domicile, sont davantage sus-
ceptibles d’être exposés à un épisode de violence, avec le risque majeur10 d’être frappés
ou blessés par le parent auteur, volontairement ou non. Les violences conjugales entravent
le processus de socialisation et le développement de liens d’attachement sécure. L’enfant
peut ressentir une détresse créée par des bruits forts et des images liés à la violence. Des
sentiments de peur et d’insécurité peuvent inhiber son exploration de l’environnement. Le
jeune enfant est en outre exposé à des modèles inadaptés de gestion des émotions et des
relations, il observe et intègre des modèles violents de résolution du conflit et d’interac-
tions sociales.
(8) D’après le rapport Henrion (qui Entre 3 et 6 ans : C’est la tranche d’âge où les enfants montrent le plus de symptômes
q
cite Parsons et al. 1999) « 51,2 % externalisés par rapport à l’exposition aux violences conjugales, et intériorisent des mo-
des femmes enceintes décédées (et dèles inadaptés de gestion de la peur et de la colère. Des signes classiques de souffrance
donc leurs bébés aussi) à la suite
de traumatismes physiques étaient apparaissent généralement : troubles du sommeil, troubles de l’alimentation, difficultés de
connues de leur gynécologue propreté, difficultés de séparation, agressivité ou timidité exagérée, etc.
comme étant victimes de violences
de la part de leur partenaire ou
d’une connaissance ». Entre 7 et 10 ans : Les sentiments de honte et de culpabilité peuvent faire en sorte que
q
l’enfant se coupe des autres, l’empêchant d’accéder à la construction d’une relation adap-
(9) Vasselier-Novelli Catherine, Heim
tée avec ses pairs et de chercher du soutien social. L’enfant est en quête de sens par
Charles (2006) Les enfants victimes
de violence conjugales, Cahiers rapport au monde qui l’entoure et donc par rapport à la violence à laquelle il est exposé.
critiques de thérapie familiale et de Il peut commencer à devenir « arbitre » et à décider si la violence est justifiable ou excu-
pratique de réseaux n° 36, janvier
2006, De Boeck Université.
sable. Il peut aussi intervenir de façon directe dans les épisodes violents, soit en partici-
pant pour soutenir le parent auteur, soit en tentant de protéger le parent victime.
(10) Rapport d’étude Les enfants
exposés à la violence conjugale
(2012) Observatoire national de
Entre 11 et 14 ans : La violence conjugale étant généralement présente dès la petite en-
q
l’enfance en danger, France, p. 19. fance, le/la jeune adolescent-e y est donc vraisemblablement exposé-e depuis une longue
28 PARTIE I
De manière générale, les filles présentent plus de conséquences intériorisées, tandis que les
garçons montrent davantage de problèmes extériorisés. Pour les filles, bien qu’elles soient
(11) Savarda Nancy, Zaouche Gaudron
Chantal (2010) État des lieux moins visibles, les conséquences semblent s’aggraver lorsqu’elles atteignent l’adolescence12.
des recherches sur les enfants
exposés à la violence conjugale, D’autre part, les apprentissages peuvent amener les jeunes à reproduire la violence ou la vic-
Neurapsychiatrie de l’Enfance et de
l’Adolescence, volume 58, Issue 8, timisation dans leurs relations amoureuses à l’adolescence13 et, à plus long terme, dans leurs
novembre 2010, p. 513-522 relations de couple14.
(12) Pour une analyse plus détaillée
voir Horincq Detournay Rosine, La reproduction transgénérationnelle de la violence se traduit, chez les garçons, généralement
www.psychogenre.org par l’adoption de comportements agressifs, l’expression de comportements de contrôle, de
prise de pouvoir et de domination sur l’autre. Chez les filles, on constate plus fréquemment
(13) Centre national d’information
sur la violence dans la famille, une victimisation, qui repose sur le fait de s’adapter au désir et attentes de l’autre, de repous-
1996; Jaffe et al., 1992; Cantrell et ser les limites de ce qui est acceptable pour soi, par empathie et/ou pour exister, ou encore
al., 1995
pour tenter d’obtenir une reconnaissance sociale15.
(14) Aldarando et Sugarman (1996)
Centre national d’information sur La répétition de la violence et la distinction de son impact selon le sexe prennent notamment
la violence dans la famille, 1996;
Dee Post et al. (1981); Hotaling et leur source dans des facteurs sociaux. En effet, la socialisation traditionnelle des garçons et
Sugarman (1986) Howell et Pugliesi des filles, les rôles socio-sexuels attendus par chacun d’eux (valeurs associées à la féminité et
(1988); Jaffe et al. (1992); MacLeod à la virilité) et les rapports sociaux de sexe intériorisés favorisent un processus qui participe à
(1987); Rodgers (1994); Rosenbaum et
O’Leary (1981) la reproduction de la violence16.
(15) Jaffe, P. G., Wolfe, D. A., et Si cette répétition transgénérationnelle de la violence (violence conjugale et maltraitances sur
Wilson, S. K., Children of battered
women, (1990), Op. cit. les enfants) reste fréquemment observée, elle n’est cependant pas inéluctable. Dans certaines
familles, la violence cesse au fil des générations, au gré des avancées et des gains intergéné-
(16) Lire à ce sujet les ouvrages
rationnels ; dans d’autres, la violence cesse en une seule génération.
de Marie Duru Bellat, Anne Dafflon
Novelle, Horincq Detournay Rosine,
www.psychogenre.org. Lorsqu’un enfant n’est plus exposé aux violences conjugales, qu’il peut s’épanouir dans un
Jeu pédagogique sur ce sujet
http://www.animeco.fr/
contexte de sécurité, qu’il est soutenu par des tuteurs de résiliences et qu’il apprend que
socialisation_diff_acti_01.swf d’autres modèles non-violents et égalitaires existent dans les relations avec autrui (et qu’il
consulté le 15.07.13 peut les intégrer), le risque de reproduction transgénérationnelle de la violence conjugale est
(17) Horincq Detournay Rosine,
considérablement amoindri17.
www.psychogenre.org
PARTIE I 29
3 L’IMPACT DE LA VIOLENCE CONJUGALE SUR L’ENFANT
Outre les conséquences décrites ci-dessus, les enfants exposés font des apprentissages inap-
propriés sur les rôles de l’homme et de la femme dans la famille, ainsi que sur la façon d’éta-
blir des relations et de gérer les questions de pouvoir, les désaccords ou les conflits.
le fait d’avoir peur de la personne qu’on aime est un comportement normal, et qu’il faut
q
donc essayer de lui faire plaisir afin d’éviter la violence ;
la violence est un moyen efficace pour régler les désaccords, les conflits et gérer le stress
q
ou la colère ;
la prise de pouvoir sur une autre personne ou sur une situation est légitime ;
q
l’inégalité du pouvoir et dans la prise de décision entre les hommes et les femmes est
q
normale ;
la dénonciation de la violence à l’extérieur de la famille a peu d’effet, elle est déloyale, elle
q
peut même être perçue comme dangereuse.
4 - STRATÉGIES DE L’ENFANT
EXPOSÉ À LA VIOLENCE CONJUGALE19
Selon leur âge et leur évolution, selon les facteurs de risques et de protection que leur situa-
tion présente, les enfants vont développer des stratégies de survie pour parvenir à s’adapter
à un contexte de violence. Ces mécanismes de défense et de protection pour leur intégrité
psychique et physique vont susciter plus ou moins de facteurs de vulnérabilité et de résilience
au cours de leur développement.
Prise en charge comme gardien protecteur : l’enfant essaie de prendre la situation en main
> en protégeant ses frères et sœurs face au danger ;
> en adoptant un rôle de parent auprès de ses frères et sœurs ;
> en se dévouant complètement pour le parent victime, le plus souvent sa mère.
Tentatives de donner du sens aux violences, de les prédire, d’éviter l’irruption des compor-
q
tements violents : l’enfant
> a des pensées telles que « maman a été méchante et l’a mérité », « j’ai mal agi et c’est
de ma faute », « papa éprouve beaucoup de stress au travail et il ne fallait pas l’énerver
»;
> se dit qu’il peut faire cesser la violence en changeant son propre comportement ;
> essaie d’être un enfant parfait ;
> ment pour dissimuler des choses désagréables (comme par exemple un mauvais résul-
tat scolaire) et éviter de fâcher l’auteur de la violence.
Certaines stratégies peuvent être efficaces pour supporter momentanément une crise d’ex-
plosion de la violence et ses conséquences. Cependant, elles sont néfastes pour l’intérêt de
l’enfant si elles sont adoptées sur le long terme.
Une fois que l’enfant et son parent victime sont en sécurité, on constate généralement l’aban-
don graduel des stratégies qui produisent ces effets négatifs et leur remplacement par des
stratégies plus adaptées aux besoins de l’enfant.
32 PARTIE I
Les enfants exposés à la violence conjugale peuvent, au gré de leur développement et afin de
se protéger, endosser des rôles différents à l’intérieur de la dynamique familiale20.
Les rôles décrits ici ne sont pas exhaustifs, ni mutuellement exclusifs ; les enfants peuvent en
effet en changer au cours du processus de violence conjugale. Au sein de la fratrie également,
les rôles peuvent se modifier et être tenus tour à tour par l’un ou l’autre des enfants.
Certains rôles induisent une adhésion rigide à des comportements. Dans tous les cas, si ces
rôles permettent aux enfants de retrouver une impression de contrôle sur leur environnement,
ils vont à l’encontre de leur épanouissement s’ils sont maintenus à long terme.
L’enfant « petit parent » : parentifié vis-à-vis de sa fratrie et de son parent victime, il veille
q
à leur sécurité lors des passages à l’acte violents. Sa position d’enfant parentifié induit une
autonomie précoce et donc fragile. Il peut présenter un tableau clinique anxio-dépressif.
L’enfant « confident du parent victime » : il a accès aux sentiments, aux inquiétudes et
q
aux projets de son parent victime et se positionne en complice. Suite aux passages à l’acte
violents, il s’oppose à la minimisation ou au déni de son parent victime. L’éventuelle am-
bivalence du parent victime vis-à-vis de l’agresseur peut l’amener à perdre confiance dans
la stabilité de l’adulte.
L’enfant « petit agresseur » : le parent auteur de la violence l’encourage à agresser son
q
parent victime verbalement ou physiquement en sa présence. Cet enfant s’inscrit dans un
processus psychologique d’identification à l’agresseur avec des passages à l’acte violents.
L’enfant « modèle » : il tente de prévenir la violence et évite de provoquer des éléments
q
qu’il croit générateurs de violence. Il excelle à l’école, évite de contrarier ses parents, tente
de se débrouiller sans leur demander d’aide. Sa souffrance anxio-dépressive peut passer
inaperçue en raison d’une présentation sociale hyper adaptée.
L’enfant « arbitre » : il essaie de maintenir la paix dans la famille, de prévenir la violence.
q
Cela peut se traduire en demandant au parent victime de se montrer plus soumis afin de
ne pas agacer l’agresseur. Ici encore, l’échec de sa tentative de maîtrise de la violence peut
participer à une souffrance anxio-dépressive.
Lorsque l’enfant n’est plus exposé aux violences et qu’il bénéficie d’un environnement soute-
nant, il peut se dégager du rôle figé qu’il a endossé. Le gel ou l’exacerbation des émotions et
des comportements consécutifs à l’exposition à la violence peuvent laisser la place à une meil-
leure exploration et expression émotionnelle, ce qui aura un impact au niveau de ses relations
à autrui.
Ces quatre positionnements (parti pris pour le parent victime, parti pris pour le parent auteur,
conflit de loyauté, secret) génèrent des comportements et ont des conséquences spécifiques
pour l’enfant, à chacune des quatre phases du cycle de la violence conjugale. Articuler les
stratégies développées par l’enfant avec les différentes phases du cycle permet une approche
plus précise et spécifique du vécu des enfants exposés aux violences conjugales. Ceci concerne
tant les filles que les garçons.
ESCALADE
2 EXPLOSION
DE LA TENSION DE LA VIOLENCE
LUNE DE MIEL
3
JUSTIFICATION
4
RÉMISSION CULPABILISATION
Dans les deux cas, il s’agit de rôles incontestablement trop lourds pour les épaules de l’enfant.
Il est en état d’hypervigilance tandis que ses parents, centrés sur les tensions quotidiennes, se
montrent l’un comme l’autre moins disponibles à ses besoins et aux tâches éducatives.
Le matin, Emilie, huit ans, se plaint de maux de ventre auprès de ses parents. Elle ne
veut pas aller à l’école car elle craint qu’il n’arrive quelque chose à sa maman en son
absence.
q Explosion de la violence
L’explosion de la violence génère chez l’enfant le besoin d’intervenir et/ou le plonge dans un
état chaotique et de terreur. Il/elle peut vouloir protéger le parent victime, s’interposer de
manière indirecte (par exemple en faisant diversion) ou directe vis-à-vis du parent auteur. Il/
elle peut aussi être tétanisé-e par la violence, voire se mettre à l’écart. On observe également
une attitude de parentification envers la fratrie. Par conséquent, l’enfant éprouve un sentiment
d’impuissance, mais également de terreur ; avec même des risques physiques concrets pour
l’enfant qui s’interpose.
Justine, dix ans, se montre hypervigilante à la violence qui éclate entre son père et sa
mère. Le père passe des mots aux coups. Justine plonge entre ses deux parents comme un
bouclier pour que les coups cessent, pensant que son père ne portera pas la main sur elle.
q Justification / culpabilisation
L’enfant peut avoir intégré les arguments du parent auteur ou du parent victime. Il/elle peut
aussi se sentir responsable de la cause de la violence et se culpabiliser. Il peut arriver que le
parent victime, tout comme le parent auteur, désigne l’enfant comme bouc émissaire. Cela affecte
grandement la confiance que l’enfant porte en lui, le plongeant dans la confusion et le mal-être.
Grégory a onze ans. Sa mère l’aide à faire ses devoirs. En rentrant du travail, son père
commence à crier sur sa mère parce que le repas n’est pas prêt. Il part en claquant la
porte. Grégory dit à sa mère qu’il n’a plus besoin de son aide.
Voyant son attitude comme ayant aidé au retour au calme, l’enfant renforce son rôle de pro-
tecteur, de sauveur. Mais le couple, en situation de rapprochement relationnel, voire fusionnel,
peut le laisser sans repère, engendrant un ressentiment par rapport au parent victime. Il pense
être le seul à conserver la lanterne pour éclairer les violences qui viennent de se produire.
Redoutant le retour des tensions, il maintient une grande vigilance. La phase de la lune de miel
est par ailleurs propice à le faire changer de positionnement.
Le lendemain d’une scène de violence, les parents d’Hugo, quatorze ans, rentrent de leur
soirée en amoureux. Au moment du coucher, Hugo interpelle sa maman : « tu as déjà
oublié ce qu’il t’a fait hier ? » La mère lui répond : « il vient de perdre son travail, il faut
le comprendre. Ça va aller maintenant. »
36 PARTIE I
Comme mécanisme de défense psychique, pour sa propre survie, l’enfant s’identifie à l’agres-
seur. Il/elle perçoit le parent victime comme responsable d’une violence qui, par conséquent,
semble méritée. Dans ce contexte, l’environnement est composé de « gagnants » et de « per-
dants » ; la violence est un moyen efficace pour être « du côté des gagnants ».
q Escalade de la tension
Durant cette phase, l’enfant qui prend parti pour le parent auteur adopte des comportements
qui ont tendance à favoriser l’escalade de la tension. Il/elle contribue à renforcer le pouvoir du
parent auteur, notamment par un comportement de séduction à son égard et un comportement
extrêmement contrôlant à l’adresse du parent victime, tout en sapant l’autorité de celui-ci.
L’enfant tente de se protéger de la violence en s’alliant au plus fort.
Quand son père revient à la maison, Henri lui rapporte en détail les faits et gestes de sa
maman : « Tu sais papa, maman a téléphoné à une copine et ça a duré longtemps ! En
plus, elle a parlé de toi. »
q Explosion de la violence
Sami, cinq ans, surenchérit à la violence de son père, il insulte et frappe sa mère sous
les encouragements du père : « vas-y, tape ta mère, elle l’a bien cherché ! »
q Justification / culpabilisation
Suite à l’explosion de la violence, les émotions sont tellement fortes - et souvent ambivalentes
– que, pour les assimiler, l’enfant doit adhérer aux justifications du parent auteur. Il/elle crédi-
bilise le parent auteur, le déresponsabilise, renforce la culpabilité qu’il fait endosser au parent
victime et éprouve de ce fait moins de remords et de culpabilité à l’égard de la situation de
violence. Cela renforce son parti pris pour le parent auteur ainsi que la relation de loyauté
à son égard. S’il l’enfant n’adhère pas aux justifications du parent auteur, il s’agit alors d’un
moment opportun à un changement de positionnement.
De retour de l’école, Elodie, huit ans, toise sa mère, manifestement accablée par les
violences subies : « tu vois bien que papa est fatigué, il ne fallait pas le provoquer. C’est
papa qui décide, on n’a pas à sortir sans raison. »
Émile est perdu, son père et sa mère ne se quittent plus. Pour tenter d’attirer leur at-
tention, il se montre capricieux et pique des crises. Son père lui dit : « ta maman t’a
déjà demandé de te calmer ! »
Quel que soit le rôle qu’ils endossent, les enfants sont pris dans des conflits de loyauté com-
plexes. Nous parlerons ici plus précisément des enfants qui sont pris dans un conflit de loyauté
parce qu’ils reçoivent des informations contradictoires de la part des parents et se sentent
forcés de prendre position pour l’un ou pour l’autre. Ils ne prennent parti ni pour l’un, ni pour
l’autre, et tentent de rester fidèle à leurs deux parents en même temps. Dans ce contexte, les
violences sont appréhendées comme inéluctables.
q Escalade de la tension
L’enfant plongé dans un conflit de loyauté est en situation de déchirement, partagé entre ses
deux parents. Il/elle vit la phase de l’escalade de la violence dans un état d’anxiété extrême,
s’attachant à tenter de diminuer la tension entre le parent auteur et sa victime, à jouer un rôle
de pacificateur.
Aujourd’hui, John, douze ans, a entendu le ton monter entre ses parents, tout au long
de la journée. Au moment du repas, il mange en quatrième vitesse. Son père lui de-
mande si ça va, il lui répond que tout va bien. Il ne lui a pas parlé de ses problèmes à
l’école, pour ne pas mettre de l’huile sur le feu.
q Explosion de la violence
L’enfant est dans les coulisses de la crise. Il est plongé dans un sentiment d’impuissance, tout
en se sentant responsable de la violence qui éclate entre ses parents.
Caroline, quatre ans, entend ses parents crier dans le salon. Elle s’est réfugiée avec ses
nounours en dessous de son lit. Ses maux de ventre la reprennent. Elle a très peur et
se sent démunie.
q Justification / culpabilisation
Le sentiment d’être forcément déloyal et coupable augmente la confusion chez l’enfant. Devant
la difficulté de trouver du sens à la violence, les justifications des parents pourront orienter le
positionnement de l’enfant vers un parti pris pour le parent auteur ou pour le parent victime.
Le lendemain matin, le calme est revenu dans la maison. Au petit déjeuner, les parents
de Ryan (onze ans) s’expliquent sur ce qui s’est passé la veille. Mais ces explications et
les excuses ne l’aident pas à comprendre pourquoi ils vivent l’enfer.
38 PARTIE I
Le comportement de l’enfant ne change pas. La tension diminue. Il/elle ne doit plus choisir
entre ses deux parents, mais le conflit de loyauté perdure et peut avoir des répercussions au
fur et à mesure des crises. L’enfant se sent responsable du bien-être du couple parental et des
épisodes de violence.
Sophie, quinze ans, marche derrière ses parents enlacés. Elle se sent apaisée, tout
rentre dans l’ordre.
6.4. SECRET
Devant la banalisation, voire le déni que le couple et chacun des parents pose sur la violence,
l’enfant peut douter de ses sensations, ne plus se faire confiance et même bloquer ses sou-
venirs et ses émotions, prétextant que rien ne se passe. Il s’agit du positionnement le plus
difficile à identifier. L’enfant, de même que tous les membres de la famille, vit sous la loi du
secret, qui ne peut être partagé sous aucun prétexte.
q Escalade de la tension
L’enfant ignore l’escalade de la violence, apparaît effacé, en phase avec le discours de minimi-
sation, voire de déni tenu par la famille.
q Explosion de la violence
La violence explose, mais le secret la voile d’indifférence, de banalité. Par terreur, l’enfant se
déconnecte.
q Justification / culpabilisation
Pour l’enfant, rien de grave ne s’est passé, il s’agit juste d’un incident. Au même titre que
sa famille, il est persuadé qu’il n’y a rien à justifier. Cette attitude de banalisation et de déni
l’empêche d’en parler et de se faire aider. Souvent, l’enfant se coupe de ses émotions.
Michel, quinze ans, répond à la question d’un voisin qui s’étonne d’avoir entendu des
pleurs toute la soirée, dans leur appartement : « en même temps, une fille, ça pleure ».
La lune de miel est la confirmation que tout va bien, que rien ne s’est passé.
PARTIE I 39
40
PARTIE II
:[
PARTIE II 41
:]
Avertissement :
Dans la partie I de cette publication, les explications des concepts relatifs à la violence conju-
gale faisaient référence à des « parents victimes » et des « parents auteurs », quel que soit le
sexe des auteurs et des victimes.
Cette partie II est basée sur la recherche et les observations de terrain. Les travaux existants
portent sur les situations les plus fréquemment rencontrées, à savoir une mère victime et
un père auteur. Aussi, nous désignerons ici le « parent victime » par la mère et le « parent
auteur » par le père. Il peut aussi s’agir de beaux-parents ou d’autres référents parentaux.
Dans ces cas de figure, les informations mentionnées restent valables bien qu’elles doivent être
adaptées à ces autres configurations. De même, ce texte peut rester utile s’il s’agit d’une mère
auteure de violence conjugale et d’un père victime, même si cette configuration est beaucoup
plus rare.
1 - LE STYLE PARENTAL
DES PÈRES AUTEURS DE VIOLENCE CONJUGALE3
En dépit de leur petit nombre, les études existantes montrent très clairement que les pères
violents ont un style de parentalité différent de celui des pères non violents4.
La capacité d’empathie des pères auteurs, leur faculté de tenir compte des besoins de l’autre
(3) http://www.criviff.qc.ca/en-
fants_exposes/cms/index.php?me- et en particulier de ceux des enfants, est restreinte. On constate souvent du narcissisme, de
nu=24&temps=1262791906, consulté même que des traits de personnalité qui en découlent. Néanmoins, il s’agit de distinguer les
le 07.05.2013. Intervention lors du
colloque de l’Acfas : Parentalité actes de la personne. Les actes de violence ne sont jamais acceptables et ils sont punissables.
en contexte de violence conjugale Par contre, l’auteur de violence – en tant que personne – peut être aidé afin de trouver des
(Montréal, mai 2012), recherche
en cours : L’engagement paternel
ressources qui lui permettront de mieux développer ses aptitudes parentales.
en contexte de violence conjugale :
points de vue des pères et des Certains auteurs de violence conjugale, lorsqu’ils sont contraints à suivre un accompagnement
intervenants-es œuvrant auprès des
conjoints violents, Bourassa Chantal, spécialisé (la reconnaissance du problème par l’auteur lui-même et la demande d’aide est
Letourneau Nicole, Lessard Geneviève, très rarement spontanée, elle se fait le plus souvent sous injonction judiciaire et/ou sociale),
Holden Georges
en renouant avec l’enfant qui est en eux, puis avec leur propre enfant, peuvent développer
(4) Kédia Marianne et Sabouraud-Séguin progressivement une parentalité suffisamment bientraitante.
Aurore Parentalité et violence dans
le couple in Sadlier, Karen (Dir.),
(2010). Op. cit.
Les pères auteurs de violence conjugale ont peu d’interactions positives avec leurs enfants,
sont moins affectueux envers ceux-ci et peuvent se montrer insensibles aux expériences ou
aux sentiments de leurs enfants10.
Bien que les enfants exposés à la violence conjugale soient en mesure d’identifier certains
aspects positifs liés à leur relation avec leur parent auteur de violence, ils considèrent plutôt
cette relation comme empreinte de tristesse et de déception. Ces jeunes éprouvent parfois des
difficultés à percevoir ce parent comme une personne sur laquelle ils peuvent compter ou en
qui ils peuvent avoir confiance. Ils se disent souvent soulagés par son absence, puisque cela
signifie qu’ils ne seront pas exposés à la violence conjugale pendant cette période11.
Il est toutefois important de mentionner que certains pères auteurs de violence se perçoivent
comme une source importante de soutien émotionnel pour leurs enfants et considèrent leur
(10) Bancroft, L., & Silverman, J.G. rôle de parent comme étant de première importance. Plusieurs désirent en effet une relation
(2002). Op.cit., p. 284-285, Edleson,
J.L., & Williams, O.J. (2007). Op.cit.
plus proche et chaleureuse avec leurs enfants. Ils considèrent également leurs enfants comme
une importante source de motivation en vue de changer leurs comportements12. Aider l’auteur
(11) Lapierre, S. (2006). « Ma mère de violence conjugale, ayant été enfant lui-même, à s’identifier à son enfant intérieur, puis à
était à lui, comme une possession
un peu » : Le point de vue son enfant réel, lui permet de retrouver de l’empathie vis-à-vis de son enfant beaucoup plus
d’enfants et d’adolescents vivant rapidement que vis-à-vis d’un-e conjoint-e ou ex-conjoint-e. Il s’agit d’un lien de filiation très
dans un contexte de violence fort, qui perdure au-delà de la relation conjugale et peut donc maintenir l’enjeu d’un change-
familiale. Journal International de
Victimologie, 13. ment. L’auteur peut également être ramené, par effet miroir, à sa propre enfance, et éventuel-
lement aux violences dont il a lui-même été victime en tant qu’enfant.
(12) Bent-Goodley, T., & Williams, O.J.
(2007). Fathers’ voices on parenting
and violence, dans J.L. Edleson Cependant, les études et la littérature disponibles attirent l’attention sur le fait que les rôles de
et Williams (dir.), Parenting by conjoint et de parent auteur de violence conjugale sont indissociables. Ainsi, même si sa vio-
men who batter: New directions
lence peut être considérée comme l’expression d’une souffrance très ancienne, le fait d’humi-
for assesment and intervention,
New-York, Oxford University Press, lier ou de frapper son/sa partenaire, de faire preuve de violence à son égard, remet fortement
p. 32-35. en cause la capacité de l’auteur à être un « bon parent »13.
Bourrassa, C. (2006). L’exposition à la
violence conjugale psychologique
et verbale et son effet sur le
comportement des adolescents. 1.3. LES RELATIONS TRIADIQUES (PARENTS–ENFANT)
Journal International de
Victimologie, 13.
Fox, G.L., Sayers, J., & Bruce, C. (2001). Les parents auteurs de violence conjugale peuvent avoir des comportements manipulateurs,
Beyond bravado: Redemption and et tenter d’influencer leurs enfants afin de modifier leur perception du parent victime et de la
rehabilitation in the bathering
accounts of men who batter. vie familiale.
Marriage and Family Review, 32,
137-163 Ils peuvent par exemple tenter d’influencer positivement l’image que les enfants ont d’eux,
(13) Kédia Marianne et Sabouraud- dénigrer l’autorité parentale du parent victime ou encore affirmer aux enfants que ce parent est
Séguin Aurore Parentalité et violence indigne de respect et ne sait pas s’occuper d’eux14. Ceci risque d’accentuer le conflit de loyauté
dans le couple in Sadlier, Karen
des enfants et de leur faire vivre de la confusion15.
(Dir.), (2010). Op.cit.
(14) Bancroft, L., & Silverman, J.G. Comme avec leur partenaire, les parents auteurs développent des stratégies de pouvoir et de
(2002). Op.cit., p. 284-285, Edleson,
J.L., & Williams, O.J. (2007). Op.cit.,
contrôle envers leurs enfants, qui peuvent prendre différentes formes.
Holden, G.W., & Ritchie, K.L. (1991).
Op. cit, p. 25-36.
A PROPOS DE L’AUTORITÉ
Pour grandir et se développer harmonieusement, les enfants ont besoin d’un cadre
éducatif structurant et chaleureux, dans lequel l’autorité a sa place.
2 - LE STYLE PARENTAL
DES MÈRES VICTIMES DE VIOLENCE CONJUGALE16
Les études portant sur les mères victimes de violence conjugale sont beaucoup plus nom-
breuses que les recherches concernant le style parental des pères violents. Aussi, on peut donc
(16) http://www.criviff.qc.ca/en-
fants_exposes/cms/index.php?me- penser que les mères présentent plus de troubles psychiques que les pères et que les consé-
nu=24&temps=1262791906, consulté quences de ces troubles sur l’enfant sont plus importantes que celles d’avoir un père violent17.
le 07.05.2013.
(17) Kédia Marianne et Sabouraud- Les manquements des mères, en tant que parent, sont beaucoup plus signalés que ceux des
Séguin Aurore Parentalité et violence pères. Dans le cadre d’une intervention psycho-sociale autour d’enfants exposés aux violences
dans le couple in Sadlier, Karen
conjugales, ce déséquilibre peut laisser croire que les mères - victimes - éprouvent davantage
(Dir.), (2010). Op. Cit.
de difficultés, alors qu’il est principalement dû au fait qu’elles sont beaucoup plus fréquem-
(18) Rapport d’étude « Les enfants ment les interlocutrices des services sociaux18.
exposés à la violence conjugale »,
Observatoire national de l’enfance
en danger, France, 2012, p.34. Ainsi, au regard de certaines études, les violences conjugales, parce qu’elles provoquent d’im-
portants troubles psychologiques chez les mères victimes, risquent d’affecter fortement leur
(19) Strauss M. (1990) Ordinary
violence, child abuse, and wife
capacité à éduquer leurs enfants et de les empêcher d’exercer leur rôle parental adéquate-
beating : what do they have in ment. Ces études montrent notamment que ces mères victimes ont, deux fois plus souvent que
common ? in Strauss M., Gelles les autres, recours à la violence physique comme stratégie éducative19.
R. (1990) Physical violence in
American families (p. 403-424),
New Brunswick, NJ, Transaction D’autres études, au contraire, tendent à démontrer que les mères victimes de violences conju-
Publishers. gales mettent en place des stratégies spécifiques de protection psychologique de leurs en-
(20) Kédia Marianne et Sabouraud- fants : elles veillent à leur assurer un soutien émotionnel (en les rassurant sur leur amour, leur
Séguin Aurore Parentalité et violence sécurité…), à leur dire la vérité tout en les ménageant ou encore à instiller de l’espoir quant
dans le couple in Sadlier, Karen à l’avenir20.
(Dir.), (2010). Op. cit.
(21) Van Horn P., Lieberman A. (2002) Certaines études21 montrent même que, de manière générale, les victimes de violence conju-
Domestic Violence and Parenting : A
gales ont un style de parentalité tout à fait comparable à celui des mères non violentées,
Review of Litterature, San Francisco,
Judicial Council of California, capables d’être structurantes, chaleureuses, encourageantes et disponibles.
Administrative Office of the Courts,
Center for Families, Children and
the Courts.
La synthèse de ces recherches met en évidence deux éléments importants :
(22) Des recherches Bien que certaines mères victimes de violence conjugale puissent parfois avoir des com-
q
supplémentaires sont nécessaires
afin de documenter les stratégies portements inadéquats envers leurs enfants22, ces comportements sont généralement une
maternelles positives permettant conséquence de la violence conjugale subie.
de mieux de protéger les enfants
et d’atténuer les impacts de
l’exposition à la violence conjugale Les mères victimes de violences conjugales modifient leur style de parentalité en fonction
q
chez ces derniers. de la présence ou de l’absence du conjoint violent. Une fois qu’elles arrivent à se sous-
traire à la violence du conjoint, ces mères ne sont pas plus violentes envers leurs enfants
(23) Walker E. (1984) The battered
Women Syndrome, New York, que d’autres parents23.
Springer.
Tant pour elles que pour leurs enfants, il importe donc de soutenir les mères victimes afin
(24) Arseneau, L., Lampron, C.,
Delisle, R., Beaulieu, M-C., & Paradis, d’atténuer les conséquences de la violence conjugale24.
F. (2005). L’intervention auprès
d’un enfant exposé à la violence
conjugale. Activité de formation.
Beauport : Direction régionale
de santé publique, Agence de
développement de réseaux locaux
de services de santé et de services
sociaux de la Capitale-Nationale.
46 PARTIE II
(25) Fortin, A., Damant, D., Doucet, M., & 2.1. HABILETÉS PARENTALES
de la Sablonnière, E. (2006). L’impact de la
violence conjugale pour l’enfant : Ca-
ractéristiques des mères, qualité de la Bien que les enfants exposés à la violence conjugale perçoivent positivement leur mère et
relation mère-enfant et point de vue de
l’enfant. Rapport présenté à la direction
l’identifient comme une importante source de protection et de soutien, les difficultés émotives
des services sociaux. Ministère de la engendrées par la violence subie peuvent faire en sorte qu’elles puissent moins aisément
santé et des services sociaux du gou- prendre soin de leurs enfants et pourvoir à leurs besoins quotidiens25.
vernement du Québec.
Levendosky, A.A., Huth-Bocks, A.C., Shapiro,
D.L., & Semel, M.A. (2003). The impact of Très affectées par la violence, ces mères peuvent être plus stressées dans l’exercice de leur
domestic violence on the maternal?child
relationship and preschool-Age chil- rôle parental et se montrer moins positives et moins constantes sur le plan de leurs pratiques
dren’s functioning. Journal of Family éducatives26.
Psychology, 17(3), 275-287.
Ybarra, G.J., Wilkens, S.L., & Lieberman, A.F.
(2007). The influence of domestic violence En présence de leur conjoint, les mères victimes peuvent se montrer soit plus froides ou
on preschooler behavior and functioning.
Journal of family violence, 22, 33-42.
brusques, soit au contraire plus indulgentes ou permissives à l’égard de leur enfant. Cette
inconstance peut être une stratégie afin d’éviter l’explosion de la violence et, par là, protéger
(26) Holden, G.W., & Ritchie, K.L. (1991). l’enfant27.
Op. cit., p. 311-327, Huth-Bocks, A. C.,
Levendosky, A. A., & Semel, M. A. (2001). The
direct and indirect effects of domestic
violence on young children’s intellectual
functioning. Journal of Family Violence, 2.2. RELATION MÈRE-ENFANT
16(3), 269-290, Letourneau, N.L., Fedick,
C.B., & Willms, J.D. (2007). Mothering
and domestic violence: A longitudinal Les mères victimes de violence conjugale qui présentent des symptômes de détresse psycho-
analysis. Journal of family violence, 22 logique peuvent être moins disponibles émotionnellement, et adopter moins de conduites
(8), 649-659, Levendosky, A.A., Huth-Bocks,
A.C., Shapiro, D.L., & Semel, M.A. (2003). op.
bienveillantes ou structurantes et de soutien envers leurs enfants. Ceci affecte la qualité de
cit., Lyons-Ruth, K., Wolfe, R., & Lyubchik, A. la relation mère-enfant et peut entraîner des difficultés d’adaptation chez l’enfant. En effet,
(2000). Depression and the parenting of moins la mère adopte de comportements positifs envers l’enfant, plus ce dernier risque de
young children: Making the case for early
preventive mental health services. Har- présenter des troubles de conduite, de l’anxiété ou de la dépression28.
vard Review of Psychiatry, 8(3), 148-153.
(27) Levendosky, A.A., & Graham-Bermann, Les enfants peuvent aussi interagir de façon moins positive avec leur mère victime de violence,
S.A. (2001). Parenting in battered wom- lui démontrer moins d’attention et en être moins proches29.
en: The effects of domestic violence on
women and their children. Journal of
Family Violence, 16(2), 171-190.. Des études permettent par contre de constater que certaines mères victimes de violence ont de
(28) Fortin, A., Damant, D., Doucet, M., & de
meilleures relations avec leurs enfants que les parents ne vivant pas cette violence. Ces mères
la Sablonnière, E. (2006). Op. cit. se montrent plus attentives, empathiques, chaleureuses et sensibles face à leurs enfants. Elles
adoptent plus de pratiques de soins et de protection à l’égard de leurs enfants et évitent da-
(29) Edleson, J.L., Mbilinyi, L.F., & Hagemeister,
A.K. (2003). How children are involved vantage les stratégies négatives pouvant nuire à leur estime de soi30.
in adult domestic violence: Results from
a four-city telephone survey. Journal of
Interpersonal Violence, 18(1), 18-32. Par la présence d’un environnement familial structuré31 et soutenant, ces mères peuvent mieux
Fortin, A., Trabelsi, M., & Dupuis, F. (2002). Les développer leurs compétences parentales dans l’intérêt de l’enfant et les relations mère-enfant
enfants témoins de violence conjugale :
analyse des facteurs de protection. Docu- peuvent favoriser les facteurs de protection.
ment synthèse, Distribué par le Centre de
liaison sur l’intervention et la prévention
psychosociales (CLIPP).
Levendosky, A.A., Huth-Bocks, A.C., Shapiro,
D.L., & Semel, M.A. (2003). op. cit.
Les mères victimes de violence conjugale sont, pour la plupart, des parents attentifs à leurs
enfants. Il arrive néanmoins qu’elles les maltraitent, tandis qu’elles sont elles-mêmes violen-
tées. Il se peut aussi que la mère veille à donner une bonne image du parent auteur à l’enfant,
l’excusant et trouvant des explications à ses comportements violents.
Par ailleurs, dans des situations où un père abuse sexuellement de l’enfant et que la mère
protège le secret, il arrive souvent que celle-ci soit victime de violence conjugale.
De manière générale, les mères victimes montrent fréquemment un tableau dépressif, consé-
cutif aux violences. Dans le processus de violence, chaque enfant adopte généralement un rôle,
qui peut se modifier au cours du processus. Bien souvent, l’enfant (ou l’un des enfants) devient
« l’antidépresseur » de sa mère, son espoir face à la dynamique conjugale dysfonctionnelle.
Enfin, on remarque souvent que les mères qui sortent du processus de la violence conjugale et
vivent dans un environnement sécure, retrouvent - voire développent - leurs compétences pa-
rentales de manière très significative. Ce retour des compétences parentales s’observe moins
chez les auteurs de violence conjugale, pour qui une prise en charge et un travail spécifique
sont nécessaires.
48 PARTIE II
Cependant, dans les situations d’un enfant exposé à la violence conjugale, la prise en compte
dans les interventions et le travail de la dynamique conjugale et des rapports de pouvoir est
nécessaire pour assurer une meilleure efficacité de l’accompagnement familial, parental et
celui de l’enfant. De même, la dimension de la parentalité doit être prise en compte dans la
prise en charge à la fois des auteurs et des victimes de violence.
L’évaluation des risques pour l’enfant nécessite également d’interroger les compétences pa-
rentales de l’auteur. Un manque d’évaluation de ces compétences aura tendance à rendre
injustement la mère victime, responsable soit d’une incapacité à protéger les enfants aussi
longtemps qu’elle reste avec l’auteur, soit d’une surprotection lorsqu’elle souhaite se protéger
et/ou marquer une distance par rapport à l’auteur.
Seule la reconnaissance de sa violence par l’auteur - qui la plupart du temps nécessite que
celle-ci soit judiciairement reconnue et sanctionnée - peut déboucher avec lui sur un che-
minement de recherche de stratégies alternatives à ses comportements violents et sur une
responsabilisation de son rôle de père et un développement de ses compétences parentales.
Sa responsabilisation en tant que conjoint violent pourra survenir - ou non - lors de ce suivi.
Dans les cas où le père auteur ne reconnaît pas la problématique et sa responsabilité, c’est
uniquement le dépassement du traumatisme lié à la violence conjugale qui va permettre à la
mère victime de développer à nouveau ses compétences parentales et éducatives, de même
que le déploiement de ressources autour d’elle et de ses enfants. Souvent, dans l’intérêt de
l’enfant, il est nécessaire qu’un cadre définissant les modalités de contacts et les responsabi-
lités parentales soit mis en œuvre (décision du tribunal, programme d’aide au Service d’Aide à
la Jeunesse…). Parfois, la contrainte doit être maintenue davantage.
PARTIE II 49
En cas de violence conjugale, il est fréquent que le couple reste ensemble, de manière continue
ou discontinue. L’enfant vit alors dans un climat permanent de violence.
Il importe que les pratiques s’adaptent au fait que les conjoints sont ensemble, pris dans un
processus de domination conjugale, quelle que soit la situation :
le couple se maintient durant un temps relativement long, parfois plusieurs années, avant
q
que le parent victime ne rompe la relation ; la séparation s’opère généralement progressi-
vement, et exceptionnellement en une fois ;
Intervenir dans des situations d’emprise et de violence est toujours difficile, d’autant plus
lorsque la relation conjugale se maintient et que la violence conjugale n’est ni dévoilée ni
reconnue par le couple. Dans cette situation, impliquer ou non le père auteur de violence
conjugale dans l’intervention pose question, entre autres en termes de sécurité de la mère et
des enfants, vu les risques d’intensification de l’emprise générée par l’entrée du tiers social.
Différents événements peuvent être à l’origine d’une intervention, au sens large du terme.
Ainsi, un épisode plus grave de violence conjugale qui rend tout à coup cette violence visible,
l’évolution vers une autre forme de violence, un dépôt de plainte, une demande d’aide induite
par des messages de prévention générale (campagne médiatique de lutte contre les violences
conjugales), etc. pourront mettre la victime de violence, avec ou sans ses enfants, en contact
avec des intervenants sociaux.
Mais la plupart du temps, ce sont les symptômes présentés par les enfants eux-mêmes -
conséquents à leur mal-être lié au fait de vivre dans un climat de violence conjugale et/ou de
violence intrafamiliale et/ou de maltraitances directes - qui vont amener l’intervention sociale,
plus ou moins souhaitée par les parents, voire imposée lorsque des mesures judiciaires ont
été adoptées.
On peut considérer que les symptômes de ces enfants revêtent certaines fonctions : appeler
au secours pour soi-même et pour les autres (la fratrie, le parent victime), montrer qu’il y a
un problème (la violence) en attirant l’attention sur soi (par exemple un enfant qui se montre
agressif, hyperactif à l’école…), faire entrer le tiers social structurant dans le système familial
(32) Horincq Detournay Rosine,
et conjugal, etc.
www.psychogenre.org
50 PARTIE II
Alerté-e-s par ces symptômes, les intervenant-e-s de première ligne (école, CPMS, SPSE, méde-
cins, éducateurs-trices, etc.) invitent ou convoquent alors souvent les parents. L’intervention
va viser à travailler avec eux à partir des symptômes de l’enfant.
Il convient ici de se poser des questions spécifiques, d’avoir une attention particulière aux
dynamiques de violence conjugale qui peuvent rester occultées.
Si les parents sont ouverts à demander de l’aide et à l’accepter, ils pourront être orientés vers
les équipes SOS Enfants et/ou vers les Services d’Aide à la Jeunesse (SAJ). Il faudra cependant
veiller à soutenir le processus et à vérifier que la demande s’opère effectivement. En effet, les
rapports de domination (conjugale, familiale) constituent pour les familles et les parents une
entrave à la demande d’aide et au maintien de celle-ci. L’emprise est généralement marquée
par un repli sur soi et des stratégies d’évitement à l’égard des intervenant-e-s.
Le couple en contexte de violence conjugale étant rarement favorable à une intervention psy-
cho-sociale, il faudra parfois une injonction judiciaire (mesure imposée par le Tribunal de la
Jeunesse) afin de la mettre en place. A un moment donné du processus d’accompagnement,
cette aide sous contrainte peut permettre à la famille, aux parents de - devoir - s’ouvrir sur
les questions de pouvoir et de violence, sur leurs responsabilités parentales et sur les besoins
des enfants. En effet, les besoins de l’enfant auront souvent été mis de côté, le parent auteur
(ainsi que, parfois, le parent victime) considérant souvent le couple conjugal comme central et
prioritaire alors que la violence conjugale aura pris toute la place au sein de la famille.
Dans le meilleur des cas, le passage vers le Service d’Aide à la Jeunesse ou d’autres services
(équipe SOS-Enfants par exemple) peut redevenir possible dans le cas d’une aide négociée.
Dans d’autres cas, les plus fréquents lorsqu’il s’agit d’emprise et les plus graves en termes
de risques pour les enfants, la mesure judiciaire devra se maintenir et sera en soi un levier
précieux et incontournable pour le changement (aide sous contrainte).
incite, voire oblige les parents à demander de l’aide pour eux-mêmes et pour leurs enfants ;
q
génère un travail sur les questions de violence dans le couple, pour la famille et la mise
q
en place d’un cadre de sécurité relationnelle et de ses limites ;
Selon les interventions, les intervenant-e-s et leurs missions, toutes les personnes vivant sous
le même toit et/ou seront invitées/impliquées/convoquées : les parents qui ont des droits et
des devoirs parentaux à l’égard de cet/ces enfant-s, de même que les personnes qui partagent
l’éducation (grands-parents, beaux-parents, oncles et tantes, etc.).
PARTIE II 51
4 PARENTALITÉ ET VIOLENCE CONJUGALE EN SITUATION DE MAINTIEN DU COUPLE
Suite à une intervention psycho-sociale, les enfants peuvent se sentir coupables et/ou
être culpabilisés par les parents (l’un des parents ou les deux) d’avoir permis l’entrée
du tiers social dans ce qui peut être considéré comme « l’intimité de la famille et du
couple ». Cette situation est propice à l’apparition de maltraitances directes à l’égard
de l’enfant, considéré comme l’instigateur du dévoilement. Le fil rouge de l’intervention
consistera donc à évaluer de manière répétée le danger encouru par l’enfant à court,
moyen et long terme et à envisager des solutions afin de préserver son intégrité psy-
chique et physique.
S’il est vrai que la violence conjugale impacte souvent négativement les compétences paren-
tales des deux parents, c’est presque toujours la mère qui la personne la plus preneuse d’aide
relative à l’enfant .C’est souvent elle qui est la personne la plus motivée au changement et qui
est prête à agir pour que la situation s’améliore pour ses enfants, voire pour elle. Ainsi, elle
peut devenir demandeuse d’aide et actrice des changements. La plupart du temps, c’est le fait
d’agir pour ses enfants et de les protéger qui constitue pour la mère le moteur de changement.
En situation de violence conjugale, l’engagement des mères dans le processus de travail à long
terme est généralement plus intense que celui des pères.
Dans les situations de maltraitances à l’égard des enfants, toutes les personnes du système
familial sont impliquées dans le travail, le-s parent-s maltraitant-s y compris. Leur implication
permet de favoriser une meilleure compréhension des enjeux, le développement de leurs
compétences individuelles et parentales, les ressources familiales. Cette implication permet
également de rappeler et veiller ensemble au cadre légal et social et au mandat éventuel.
Dans le cadre d’un accompagnement relatif à la violence conjugale, le travail avec les parents
démontre que leur relation avec l’enfant et la prise de conscience de l’impact des violences sur
celui-ci peuvent devenir des leviers de changement.
Dans les situations où les parents vivent ensemble, c’est généralement le père qui détient et
maintient le pouvoir dans la famille. Tenter d’intervenir pour travailler avec les enfants, la mère
et la famille sans travailler avec le père auteur de violence, c’est risquer qu’il renforce son em-
prise. Stratégiquement, il s’agit de passer par celui qui détient le pouvoir dans le système pour
mieux travailler au sein de ce système et favoriser un changement vers davantage de sécurité
relationnelle et personnelle.
Lorsque des mesures adéquates sont prises, voir les parents ensemble (avec ou sans les en-
fants) permet à l’intervenant-e de construire son analyse, de comprendre les enjeux et de dé-
velopper des interventions les plus adéquates au sujet des compétences parentales des deux
parents et des ressources familiales à mettre en place.
52 PARTIE II
Lorsque la mère est sous emprise, tenter de la voir seule pour parler de l’enfant et de la
violence conjugale pourrait avoir des conséquences dommageables, voire dangereuses, pour
chacun d’eux :
le contrôle, voire la violence, du père sur sa conjointe et sur les enfants peut augmenter
q
dans le but de reprendre le pouvoir sur la situation ;
Alors que l’intervention tentera d’être réparatrice et séparatrice, la mise en échec pourrait être
rapide ; la famille et le couple se refermeront vraisemblablement sur eux-mêmes, nécessitant
l’apparition de nouveaux symptômes chez l’enfant pour qu’une nouvelle intervention sociale
puisse se mettre en place.
Rejoindre les auteurs de violence conjugale, arriver à ce qu’ils viennent en entretien, travailler
leurs responsabilités parentales – et non pas seulement celles du parent victime - est donc
incontournable et peut même être un levier dans le travail d’accompagnement des familles, au
bénéfice des enfants et de leurs besoins tout autant que le travail avec le parent victime et le
travail au sujet de leur couple et de la famille.
L’enfant restant au cœur de l’intervention, les objectifs consistent à permettre des change-
ments dans la famille, à sortir l’enfant de la violence et des maltraitances, à veiller à ses inté-
rêts, à ses besoins et à son bien-être.
Ces objectifs s’opérationnalisent via des interventions plurielles telles que des entretiens de
famille, de couple et/ou individuels, qui prendront place selon le moment du processus d’ac-
compagnement et la nécessité du cadre.
A titre indicatif, voici une liste, non exhaustive, d’objectifs à poursuivre dans les interventions
lorsque les parents sont en couple, vivant ou non ensemble officiellement, en situation de vio-
lence conjugale. Ces objectifs devront bien entendu être adaptés aux situations particulières.
PARTIE II 53
4 PARENTALITÉ ET VIOLENCE CONJUGALE EN SITUATION DE MAINTIEN DU COUPLE
identifier comment les enfants s’adaptent, réagissent durant et suite à la violence conju-
q
gale, quels sont leurs facteurs de vulnérabilité, de résilience internes et externes ;
augmenter la sécurité relationnelle dans le système familial dans son ensemble et mainte-
q
nir les besoins, la sécurité et l’intérêt des enfants au cœur des préoccupations ;
sensibiliser les deux parents et les référents parentaux impliqués aux conséquences de
q
l’exposition de l’enfant aux violences, parmi lesquelles la violence conjugale et les maltrai-
tances indirectes ;
favoriser des réponses parentales plus adéquates face aux besoins des enfants, y compris
q
quant à l’exposition à la violence conjugale ;
travailler sur les distances relationnelles, les questions d’autonomie et de pouvoir (tant
q
pour le parent victime que pour le parent auteur) ;
gérer aussi les désaccords, les conflits, l’écoute et le respect de l’avis de l’autre ;
q
travailler en réseau.
q
54 PARTIE II
s’appuyer sur une personne tierce de la famille ou du réseau de l’enfant qui influence
q
positivement le climat de sécurité relationnelle et qui peut tirer le signal d’alarme en cas
de problème de sécurité des enfants ou du parent victime.
Dans les situations de violence conjugale avec concomitance ou non de maltraitances à l’égard
de l’enfant, lorsque les conjoints sont ensemble, toutes les personnes seront impliquées dans
le travail et les interventions proposées, y compris le parent auteur de violence conjugale.
Ce n’est que dans les cas les plus graves, et lorsque le système familial et les personnes qui
le composent maintiennent le danger pour l’enfant (ou les enfants), que des personnes seront
mises à distance et ce dans l’intérêt de l’enfant. Il ne s’agit pas de maintenir les liens à tout
prix, mais bien de les travailler à tout prix.
La mise à distance se réalise soit par déchéance parentale (très rarement utilisée en Belgique),
soit par une mesure de protection judiciaire qui limite et/ou encadre les contacts et les rela-
tions parent-s-enfant-s, soit par une mesure d’éloignement de l’enfant (ou des enfants) du
milieu familial. Le danger qu’encoure l’enfant, qu’il soit grave et imminent ou grave mais sans
urgence, constitue la boussole des intervenant-e-s. Il doit être évalué constamment et intégrer
les conséquences pour l’enfant à court, moyen et long terme.
De la même manière, dans les situations de violence conjugale avec concomitance ou non de
maltraitances à l’égard de l’enfant, lorsque les conjoints sont ensemble, toutes les personnes
seront impliquées dans le travail et les interventions proposées, y compris le parent auteur de
violence conjugale.
Il est évident que si la mère souhaite recevoir un soutien personnel à un quelconque moment
de l’intervention, elle pourra être orientée vers une structure spécifiquement dédiée aux vic-
times de violences conjugales.
Notons que dans certains cas, la violence peut être exercée par le beau-père. Même si léga-
lement, en Belgique, il n’a pas (encore) de droits parentaux équivalents à ceux d’un parent
biologique (la reconnaissance de la parenté sociale est en cheminement dans nos cadres ju-
ridiques), ce référent parental peut néanmoins exercer un rôle éducatif à l’égard des enfants.
Les stratégies utilisées pour l’impliquer dans l’intervention peuvent être similaires à celles
utilisées pour le parent auteur de violence, mais en faisant référence à ses responsabilités
co-parentales, en tant que parent social.
PARTIE II 55
4 PARENTALITÉ ET VIOLENCE CONJUGALE EN SITUATION DE MAINTIEN DU COUPLE
Voir les parents ou les référents parentaux ensemble, séparément, avec les enfants ou non,
sont des modalités d’intervention, des moyens qui doivent être évalués en fonction des objec-
tifs poursuivis avec, au cœur de l’intervention, l’intérêt des enfants. La modalité d’intervention
s’adaptera en fonction du moment du cycle de la violence où se trouve la famille et tâchera
d’anticiper les suites possibles.
Tenir compte du degré d’implication de chacun des deux parents, de leur motivation au chan-
gement et des potentialités de les faire devenir acteurs de changement reste pertinent tout au
long de l’accompagnement.
56 PARTIE II
En Belgique, le législateur prévoit que l’autorité parentale est exercée conjointement par les
deux parents :
la loi du 18 avril 2006, tendant à privilégier l’hébergement égalitaire de l’enfant dont les
q
parents sont séparés et réglementant l’exécution forcée en matière d’hébergement de
l’enfant.
L’organisation de l’autorité parentale conjointe concerne, entre autre, des décisions relatives
à la santé, l’éducation, la formation, les loisirs, l’hébergement, l’orientation philosophique ou
religieuse, etc. Elle présuppose une égalité entre les parents.
En contexte de violence conjugale, les relations de pouvoir et de contrôle entre le parent auteur
et le parent victime ne les placent pas sur un niveau d’égalité. En cas de séparation, l’auteur
de violence tente parfois, à tout prix, de reprendre le contrôle de son ex-conjoint-e. Dans ce
type de contexte, le parent victime n’est pas en mesure de faire valoir adéquatement son point
de vue face à son ex-partenaire et toute décision concernant l’enfant peut devenir, pour le
parent auteur, prétexte à exercer à nouveau des violences et pour le parent victime, un rappel
de l’emprise subie.
Lorsque les intervenant-e-s invitent les parents ensemble, puisque l’autorité parentale est
conjointe, l’intervention doit tenir compte de l’existence d’une relation d’emprise et d’une iné-
galité relationnelle majeure entre les conjoints. Par exemple, il sera particulièrement important
d’assurer un cadre de travail qui fait tiers et qui est clair, de voir et d’entendre les parents séparé-
ment. Dans ce contexte, la médiation entre les parents apparaît contre-indiquée. L’intervention se
donnera les moyens d’entendre et de tenir compte des besoins des enfants mais aussi du parent
victime de violence conjugale, souvent principal garant de la sécurité de l’enfant.
Mis à distance de sa partenaire, le parent auteur peut d’autant plus être tenté d’instrumentali-
ser l’enfant, que celui-ci est le seul lien qui demeure avec elle. L’exercice du droit de visite est
parfois l’unique occasion pour le parent auteur d’avoir accès à la victime, lui donnant ainsi la
possibilité de la dévaloriser, la menacer, ou même de passer à l’acte.
S’il ne voit plus son ex-partenaire, le parent auteur pourra se servir des enfants pour obtenir
des renseignements sur la victime : où vit-elle ? A-t-elle un nouveau compagnon ?
Il pourra également utiliser les enfants pour la dénigrer ou maintenir une violence à distance :
(33) Sadlier Karen (2011) Les mots
non paiement de la pension alimentaire, médisance, monter les enfants contre elle, non-res-
pour le dire, Op. cit., p.6. pect des moments de garde, négligence ou violence envers les enfants...
PARTIE II 57
5 VERS UNE PARENTALITÉ ADAPTÉE EN CAS DE SÉPARATION DU COUPLE
Enfin, la violence peut aussi s’exercer lors du passage de l’enfant d’un parent à l’autre, lors de
contacts téléphoniques ou courriels à propos des décisions relatives à l’enfant ou d’informa-
tions nécessaires à échanger, concernant par exemple des frais extraordinaires.
(34) Sadlier Karen (2011) Les mots 5.3. L’ALIÉNATION PARENTALE, UN CONCEPT CONTROVERSÉ35
pour le dire, Op. cit., p.6.
L’instrumentalisation de l’enfant dans le conflit conjugal est connue des professionnels depuis
(35) Horincq Detournay Rosine,
www.psychogenre.org longtemps. Elle peut être exacerbée à certaines périodes, en particulier celle de la séparation.
Elle mérite une attention particulière dans le cadre de l’accompagnement des enfants qui la
(36) Le Syndrome d’Aliénation
Parentale (SAP) a été développé
vivent et qui sont maltraités.
et défendu en tant que trouble
de l’enfance par le psychiatre Actuellement, le phénomène de l’instrumentalisation de l’enfant est de plus en plus nom-
nord-américain Richard Gardner
(1985). Ce processus au cours
mé et réduit à « l’aliénation parentale » ; un processus au cours duquel l’enfant devient un
duquel l’enfant deviendrait un instrument dans la lutte conjugale. Un parent « monte » son enfant contre l’autre parent, au
instrument dans la lutte conjugale point que l’enfant en perde tout jugement critique et rejette cet autre parent sans autre raison
présente l’enfant comme incapable
d’avoir une pensée personnelle. apparente que l’aliénation. Aux États-Unis et au Canada, ce concept a souvent été invoqué par
Gardner voit précisément dans le des pères jugés pour abus sexuel sur leur enfant pour se disculper et incriminer la mère. A
seul fait que l’enfant se prétende noter que la définition de ce phénomène est critiquable, vu l’historique de son émergence et
être un « penseur indépendant »
la preuve qu’il ne l’est pas. son absence de base scientifique36.
Sur le plan politique, Gardner a
activement œuvré pour l’abolition L’instrumentalisation des enfants est un phénomène plus complexe que ce qui est présenté
du signalement obligatoire
d’agressions sexuelles sur mineurs. comme « syndrome d’aliénation parentale ». Les situations d’instrumentalisation de l’enfant
Systématiquement rejeté par sont souvent davantage reliées aux conflits conjugaux qui ne se résolvent pas et où les parents
la communauté scientifique,
appellent les enfants à « choisir leur camp et à affronter l’autre camp ». Elles sont initiées et
médicale et psychiatrique, le
Syndrome d’Aliénation parentale entretenues tant par les mères que par les pères, et le plus souvent de manière simultanée
(SAP) développé par Gardner, par les deux parents.
dont les écrits publiés à compte
d’auteur ne s’appuient sur aucune
démarche scientifique minimale, Dans les situations de violence conjugale où le couple se sépare, on constate fréquemment
est un concept qui ne repose sur que le parent auteur des violences - le plus souvent le père - tente, au travers des enfants, de
aucun symptôme médical défini
ni sur aucun diagnostic précis. reprendre le pouvoir sur la situation et sur son ex-partenaire et d’ainsi poursuivre la violence
De nombreux écrits contestent conjugale.
la définition de Gardner et
l’explication du phénomène
(Warshak Williams, (2001), Wood La situation suivante, qui n’est pas rare en contexte de violence conjugale, est parfois inter-
(1994), Hayez et Kinoo (2009). prétée - à tort - comme une « instrumentalisation de type aliénation parentale par la mère ».
Les écrits de Gardner suscitent
également la controverse dans
la mesure où cet auteur défend
ouvertement la pédophilie et Situation exemple : La mère, victime de violences conjugales, a quitté le domicile avec
minimise l’inceste. En effet,
ses enfants. Le père se victimise dans un rôle de père privé de ses enfants et en de-
Gardner estime que les relations
sexuelles entre adultes et enfants mande la garde principale. Il accuse la mère d’être incapable de s‘occuper convenable-
font partie du répertoire naturel ment des enfants et d’être responsable de leurs problèmes de comportement, qu’il doit
de l’activité sexuelle humaine
et qu’elles seraient saines et
« corriger » par des mesures punitives. Comme la mère veut protéger ses enfants, elle
bénéfiques pour les enfants refuse que le père les voie. Celui-ci l’accuse alors d’aliénation parentale.
GARDNER Richard A. (1992), True
and False Accusations of child sex
abuse, Creative Therapeutics, note
27, 24.
58 PARTIE II
Lorsque le couple est séparé, certaines situations peuvent parfois mettre en danger le parent
victime et avoir des impacts négatifs directs sur l’enfant :
la mise en présence des deux parents lors de rendez-vous auprès de services psycho-sociaux ;
q
q la passation des enfants dans le cadre des droits de visites, sans dispositif sécurisé ;
la résidence alternée (garde partagée) lorsque le parent auteur l’utilise pour maintenir le
q
contrôle et l’emprise sur son ex-conjoint-e.
L’organisation de l’autorité parentale et des liens familiaux dans l’après-séparation doit donc
reposer sur une évaluation, qui prenne en compte la nécessité de préserver autant que pos-
sible le lien de l’enfant avec chacun des parents s’il est constructif pour l’enfant, et garantisse
la sécurité du parent victime et de l’enfant, y compris lorsque les liens entre l’enfant et le
parent auteur sont maintenus.
Dans le contexte canadien, le schéma de P. G. Jaffe & C. V. Crooks (ci-contre) fournit une illus-
tration de cette recherche d’équilibre entre le maintien des liens et la sécurité, au sujet des
droits de visite et de l’attribution du droit de garde.
Séparation conflictuelle
Violence conjugale
• E valuateurs spcécialisés
• Surveillance des décisions judicaires/
audiences en révision
• Résidence au parent non auteur de
violences
• Visite encadrée entre enfant et parent
auteur de violence conjugale
• Exercice en parallèle de l’autorité
parentale
• Programme auprès de l’auteur de
violence
• Services à la victime de violence
• Programme pour enfants exposés à la
DROIT DE VISITE violence
Janet R. Johnson, spécialisée en droit de la famille aux États-Unis, propose cinq principes di-
recteurs pour la résolution des priorités conflictuelles lors des décisions concernant la garde39 :
1. protéger l’enfant ;
2. préserver la sécurité et réconforter le parent victime ;
3. respecter le droit des victimes adultes à diriger leur propre vie ;
4. tenir les auteurs de violence familiale responsables de leur comportement abusif ;
5. permettre aux enfants d’accéder à leurs deux parents.
Une attention particulière doit donc être accordée à la gestion de l’autorité parentale conjointe.
Celle-ci doit être organisée de manière à éviter toute confrontation non sécurisée entre le pa-
rent auteur et le parent victime de violences.
la parentalité en parallèle : celle-ci peut s’exercer soit dans le cadre d’un droit de visite
q
et d’hébergement classique, soit quand l’enfant voit le parent auteur dans un espace de
rencontre ou lors de visites médiatisées. Elle implique en fait deux parentalités séparées.
Tout en préservant le principe de l’autorité conjointe, lorsque les parents sont séparés, la
méthodologie émergeante du travail de la parentalité en parallèle implique de dissocier, de
séparer les parentalités de manière réelle et symbolique, sous peine que les questions éduca-
tives ne soient instrumentalisées et utilisées dans le processus même de violence conjugale.
Loin de créer ou de magnifier un conflit de loyauté chez l’enfant, la parentalité en parallèle dé-
gage l’enfant des questions directes le concernant comme vecteur d’exercice des violences dans
le couple parental. Elle tend à protéger l’enfant, dans sa réalité quotidienne, dans le concret.
Elle offre aussi un cadre symbolique autour de ce qui est acceptable ou non, pour la société, la
communauté humaine, autour des rapports de pouvoir dans le couple, dans la famille.
La parentalité en parallèle permet donc à l’enfant de vivre sa relation avec chaque parent en
étant moins « triangulé » dans la violence conjugale, et d’ainsi soutenir au maximum son bien-
être et la relation avec ses parents, tout en veillant à la sécurité relationnelle et au respect de
chacun. Un travail est néanmoins nécessaire pour que l’enfant soit dégagé du processus de
(39) Johnston Janet R. (2007) violence conjugale au niveau psychique.
Introducing perspective in family
law and social science research,
Family Court Review, Volume 45, L’objectif majeur de la parentalité en parallèle est de mettre un cadre autour de l’exercice des fonc-
Issue 1, January 2007, Pages: 15–21, tions parentales, afin que celles-ci ne participent plus au maintien et au renforcement du processus
de la violence. C’est ce cadre qui fait tiers entre les parents et favorise l’élaboration psychique de
(40) Jaffe, P. G., Crooks, C. V., & Bala,
N. (2005). Making appropriate l’enfant. La parentalité en parallèle ne s’applique qu’aux situations où le couple se sépare.
parenting arrangements in family
violence cases: Applying the
literature to identify promising
La construction d’une parentalité en parallèle implique40 :
practices (Family, Children and
Youth Section Research Report q de faire de la sécurité de l’enfant et du parent victime une priorité ;
No. 2005-FCY-3E). Ottawa, Ontario,
Canada: Department of Justice
Canada. q de ne jamais mettre en présence les deux parents ;
PARTIE II 61
5 VERS UNE PARENTALITÉ ADAPTÉE EN CAS DE SÉPARATION DU COUPLE
idéalement, de préparer l’enfant avant la visite au parent auteur et de le revoir après celle-ci,
q
afin de ventiler ses émotions au sujet de la visite et de son retour auprès du parent victime ;
de travailler en partenariat avec d’autres services qui suivent les parents et l’enfant, et ce
q
via des contacts réguliers ;
La parentalité en parallèle constitue un mode adapté à un contexte de violence conjugale. Le tableau ci-dessous la
compare, dans les différentes situations et décisions qui concerne l’enfant, à la co-parentalité lorsque qu’il n’y a pas de
violence au sein du couple41.
PARTIE III
LA PLACE ET LE RÔLE
DES PROFESSIONNELS
:/
PARTIE III 63
:\
Face à des enfants exposés à la violence conjugale, les professionnel-le-s jouent un rôle
essentiel.
Apporter aide et soutien à des personnes en difficulté place systématiquement les profession-
nel-le-s en situation de recevoir des confidences. De nombreux/ses professionnel-le-s de 1ère
ligne sont soumis-es au secret professionnel. Cette obligation est régie par l’article 458 du Code
pénal qui punit la violation du secret professionnel qui s’applique à toute personne dépositaire
par état ou par profession des secrets qu’on lui confie.
Ces confidences peuvent parfois mettre les professionnel-le-s de l’aide en difficulté : comment
faire le lien avec les autres professionnels qui seront amenés à intervenir, comment protéger
l’enfant tout en respectant ses confidences ?
Agir autour de l’enfant, l’accompagner, coordonner les actions, prendre des avis de spécia-
listes, voire dénoncer une maltraitance, sont des forme d’assistance à un enfant en danger.
Pour faire passer le principe d’assistance à personne en danger avant le principe de secret
professionnel, il faut que la situation relève d’un danger grave et imminent, et non simplement
d’inquiétudes occasionnelles et de rumeurs. Il est également possible d’agir dans l’intérêt de
l’enfant, sans caractère urgent.
La collaboration des parents est toujours recherchée et leur accord sur les mesures à prendre
également. Les mesures acceptées, qui font appel aux compétences parentales, ont souvent
un meilleur pronostic. Néanmoins, dans les cas de violence conjugale, cela n’est pas toujours
possible. Une mesure de protection s’impose alors. Nous reprenons ci-dessous des points de
repères juridiques concernant les questions du secret professionnel et de sa levée, dans les
situations des enfants exposés aux violences conjugales.
64 PARTIE III
BASES LÉGALES
La législation permet, dans certains cas, de lever le secret professionnel lorsque l’enfant et/ou le
parent victime sont/est en danger. Elle punit également la non-assistance à personne en danger.
Par principe, le secret professionnel est la garantie permettant qu’une relation de confiance
entre le professionnel et la personne qui fait la demande d’aide puisse se créer.
à l’usager-ère de se confier sans crainte d’être dénoncé-e, ni que des faits de sa vie privée
q
ne soient dévoilés (puisque le professionnel a le devoir de se taire) ;
Le secret est une obligation du « dépositaire du secret » de ne pas révéler aux tiers ce qui lui
a été confié par « le maître du secret ». Il est fondé sur la préservation d’intérêts généraux,
qui dépassent les intérêts individuels.
Il vise à protéger l’usager, mais aussi l’ensemble des usagers ainsi que les professionnels tenus
au secret et la société dans son ensemble.
Si la loi ne définit pas expressément le secret professionnel, plusieurs normes le garantissent :
des principes éthiques et règles morales, des règles déontologiques et des dispositions
juridiques.
Ainsi, l’article 458 du Code pénal précise que : « les médecins, chirurgiens, officiers de santé,
pharmaciens, sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profes-
sion, des secrets qu’on leur confie, qui, hors le cas où ils sont appelés à rendre témoignage
en justice et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront révélés, seront
punis d’un emprisonnement de huit jours à six mois et d’une amende de cent [euros] à cinq
cents [euros]. »
Toutes les informations qu’une personne confie ne sont pas à considérer comme secrètes. Les
informations qui ne comportent aucun nom concret, aucun détail - et ne permettent qu’une
description en termes généraux - ne font pas partie du secret professionnel2.
(1) Mues F., L’obligation de secret 1.2. SECRET PROFESSIONNEL ET DEVOIR DE DISCRÉTION
du CPAS face à la demande de
renseignements notamment des
services de Certaines professions sont clairement soumises au secret professionnel (tel que prévu par
police et/ou des sociétés de
le Code pénal). Elles disposent en outre d’un code de déontologie et d’éthique propre à leur
recouvrement de créance, Note
au Comité directeur de la Section profession ou à leur secteur. Il s’agit des médecins, infirmiers, sages-femmes, pharmaciens,
CPAS de assistants sociaux, psychologues, juriste, avocat… Ces professionnel-le-s peuvent se retrouver
l’AVCB, 25.5.1998.
dans des services tels que les Services d’Aide à la Jeunesse (SAJ), les Services de Protection
(2) AWHIP, Conseil wallon de la de Judiciaire (SPJ), les Centres psycho-médico-sociaux (CPMS), les Services de Promotion de
personne handicapée, Le secret la Santé à l’Ecole (SPSE), les Equipes SOS Enfant, les Centres publics d’Aide sociale (CPAS), les
professionnel partagé. Pistes de
réflexion pour une bonne pratique,
Services d’Assistance policière aux Victimes (SAPV), etc. où ils seront également tenus au secret
2009 professionnel dans le cadre - et avec les limites - des missions que ces services poursuivent.
66 PARTIE III
Certaines professions ne sont pas soumises au secret professionnel mais bien au devoir de
discrétion. C’est le cas des directions d’établissement, du corps enseignant et éducatif, des
directions de crèche, des puéricultrices, etc. Le devoir de discrétion se distingue du secret pro-
fessionnel sur le fond et les implications en cas de divulgation non justifiée sont différentes.
Le secret professionnel est consacré par de nombreux codes ou règles (Code pénal, codes de
déontologie spécifiques à chaque profession) et sa violation expose à des peines d’amende et
de prison. Afin de garantir la protection de l’usager, il permet au professionnel de se retrancher
derrière le silence.
La transgression du devoir de discrétion ne fera l’objet d’aucune peine, mais elle pourrait néan-
moins se voir sanctionner par le licenciement du professionnel indiscret ou par l’obligation de
verser des dommages et intérêts à la personne lésée.
Notre législation n’a prévu aucune réglementation spécifique relative au partage du secret
professionnel. Néanmoins, la jurisprudence considère que certaines informations couvertes par
le secret professionnel (et qui le restent) peuvent être partagées dans le cadre du travail en
équipe ou du travail en réseaux dans certaines conditions cumulatives.
Cinq conditions doivent être réunies pour que des informations puissent être partagées :
Les informations sont partagées avec une personne également soumise au secret
q
professionnel ;
La personne avec laquelle les informations sont partagées poursuit des missions
q
identiques ;
Le « maitre du secret » doit être averti de ce qui sera partagé, avec qui et pourquoi ;
q
En son article 458, le Code pénal prévoit des exceptions à l’obligation du secret professionnel.
Le professionnel a le droit de lever le secret (et non l’obligation) s’il/elle est appelé-e à témoi-
gner devant un juge (et non un policier ou le procureur du Roi) ; la révélation ne sera faite que
dans la stricte mesure où le professionnel estime que c’est utile ;
L’article 458 bis3, qui concerne spécifiquement les mineurs et les personnes vulnérables (no-
tamment celles impliquées dans de la violence conjugale), autorise la levée du secret profes-
sionnel afin d’éviter la survenance d’un mal grave et imminent pour l’intégrité physique ou
mentale de la personne concernée, ou lorsqu’il y a des indices d’un danger sérieux et réel et
que le professionnel n’est pas en mesure de protéger la victime.
(3) Entrée en vigueur
depuis le 1er mars 2013
PARTIE III 67
1 LA PLACE ET LE RÔLE DES PROFESSIONNELS
Ai-je connaissance du fait qu’un enfant a été maltraité et qu’il existe un danger grave et
q
imminent pour son intégrité physique ou mentale ?
Ai-je connaissance d’indices d’un danger sérieux et réel que d’autres enfants sont victimes
q
de maltraitance ?
Ai-je fait le constat que je ne suis personnellement pas en mesure de protéger cet enfant ?
q
Ai-je fait le constat, qu’interpellé par mes soins, mon équipe, un autre service du secteur
q
médico-psycho-social ou le Service d’Aide à la Jeunesse ne peuvent davantage le protéger ?6
Si le professionnel est dans ce cas de figure, le fait d’informer le procureur du Roi ne le dis-
pense pas de porter assistance aux enfants en danger dans la mesure des moyens qu’il peut
mettre en œuvre lui-même ou avec l’aide de tiers.
l’information au conseiller de l’aide à la jeunesse peut contenir en outre tous les rensei-
q
gnements utiles pour la mise en place d’une aide.
2 - TRAVAILLER EN RÉSEAU
De manière générale, les interventions menées dans des situations de violences intrafamiliales,
conjugales et celles impliquant des maltraitances sont plus efficaces lorsque le travail est ef-
fectué en réseau.
Cependant, dans ces situations, les obstacles à la collaboration sont nombreux : le contexte
organisationnel, le manque de connaissance et d’échanges au sein d’un même secteur et/ou
entre les secteurs qui interviennent auprès des mêmes personnes mais avec des missions -
plus ou moins - différentes, les tensions qui peuvent exister entre certains services et entre
certains secteurs, leur positionnement idéologique, les cadres de pensées et les clés de com-
préhension, les représentations différentes au sujet d’une même problématique, de sa défini-
tion, des interventions à réaliser et des solutions à dégager...
La violence abîme les liens, atteint la capacité de reliance des personnes et des services,
empêche le tiers d’exister, appauvrit les ressources. La violence est aussi caractérisée par des
rapports de pouvoir et d’emprise, de la toute-puissance. Par résonance, les rapports de domi-
nation peuvent se reproduire entre intervenant-e-s, ce qui accentue le processus de la violence
si la résonance n’est pas dépassée.
L’accompagnement des enfants exposés aux violences conjugales implique un travail entre
professionnel-le-s du même secteur, dont certaines des missions peuvent être communes :
Centres psycho-médico-sociaux (CPMS), Services de Promotion de la Santé à l’École (SPSE),
Équipes SOS Enfant, Services d’Aide à la Jeunesse (SAJ), Services de Protection Judiciaire (SPJ)
et les services du secteur de l’Aide à la Jeunesse (COE, SAAE, SAIE, etc…). Il implique parfois
aussi un travail entre secteurs différents (Enseignement, Santé, Aide à la jeunesse, Justice,
Action sociale, Petite Enfance). Cet accompagnement se voit renforcé s’il inclut des échanges
entre les intervenant-e-s et l’articulation des pratiques. Créer des réseaux, travailler ensemble,
soutenir la collaboration et la concertation intersectorielles, réaliser des échanges de pratiques
permet de mieux articuler les interventions et de favoriser dès lors de meilleures pratiques
auprès des enfants, de leurs familles et de leurs référents parentaux impliqués directement et
indirectement dans la violence conjugale.
PARTIE III 69
Dans cette optique et sans entrer dans les pratiques, nous avons regroupé ci-après quelques
points d’attention, afin d’aider les intervenant-e-s à acquérir des réflexes sensibles à l’exposi-
tion éventuelle des enfants aux violences conjugales.
Lorsqu’un-e professionnel-le constate des conflits entre parents, un climat et des comporte-
ments violents qui affectent l’enfant, il est important :
d’envisager qu’il puisse s’agir de violence conjugale (en distinguant celle-ci de l’agressivité
q
et du conflit) ;
d’envisager les conséquences de cette violence pour l’enfant qui y est exposé ;
q
Lorsqu’on est amené à intervenir dans une situation d’enfant présentant des difficultés - au
niveau psychologique, comportemental, cognitif, social, relationnel -, auprès d’une famille qui
présente des difficultés ou nécessite un soutien à la parentalité, ou encore lorsqu’on est face
à un enfant maltraité, une famille maltraitante, des transactions violentes, il est important :
d’envisager l’hypothèse qu’il existe de la violence conjugale et, parmi d’autres possibilités,
q
d’envisager un lien entre le mandat, la demande et la violence conjugale ;
(7) Horincq Detournay Rosine.
Pour une version longue des points
d’attention, consulter le site
d’adapter ses interventions à cette hypothèse ;
q
www.psychogenre.org
70 PARTIE III
Lorsque perdure une situation éducative difficile, avec ou sans maltraitance, il est important
pour le/la professionnel-le :
d’envisager que la violence conjugale puisse être une source importante des problèmes de
q
l’enfant, ainsi que de l’appauvrissement des ressources familiales et parentales ;
d’informer les autres services professionnels des liens possibles entre les problématiques
q
présentées et la violence conjugale ;
ANNEXES
(:-/
ANNEXES 73
(:-\
1.1. LE COUPLE
(1) Schéma librement adapté du 1.1.1. Roue du pouvoir et du contrôle dans le couple
modèle élaboré par le Domestic
Abuse Intervention Project, Centre
for Children and Families in the Ce schéma1 présente les différentes formes de pouvoir et de contrôle qui peuvent survenir
Justice System 2004, Duluth entre partenaires en contexte de violence conjugale).
www.lfcc.on.ca/PAEMR_page7.pdf
(2) Schéma librement adapté du 1.1.2. Roue du respect et de l’égalité dans le couple
modèle élaboré par le Domestic
Abuse Intervention Project, Centre
for Children and Families in the Ce schéma2 présente la relation de couple basée sur le respect et l’égalité.
Justice System 2004, Duluth,
www.hotpeachpages.net/lang/
apprendre7.pdf
1.2. L’ENFANT
(3) Schéma librement adapté
du modèle élaboré par le
1.2.1. Roue de l’enfant victime de maltraitance parentale
Domestic Abuse Intervention
Project, Centre for Children and
Families in the Justice System Ce schéma3 présente les tactiques de pouvoir et de contrôle associées à la maltraitance de
2004, Duluth, www.lfcc.on.ca/
PAEMR_pages22-23.pdf
parents vis-à-vis de leurs enfants.
Cet outil d’aide à la parentalité représente les actes d’attention et de soin envers les enfants
(4) Schéma librement adapté
du modèle élaboré par le que tout parent est amené à prodiguer.4
Domestic Abuse Intervention
Project, Centre for Children
and Families in the Justice
Il est utilisé dans la pratique, par les intervenants de terrain, pour aider les parents dont les
System 2004, Duluth enfants sont victimes de maltraitance de la part d’un des parents, ou des deux.
SÉCURITÉ
PARTAGE PHYSIQUE
Pourvoir à la nourriture,
S’intéresser et participer CADRE ET au logement, aux vêtements,
à la vie des enfants: aux soins…
DISCIPLINE
école, sports, loisirs, Veiller à la sécurité des enfants
événement spéciaux,… face aux accidents domestiques
Partager des activités ensemble : Encourager une bonne nutrition et
lecture, jeu, balade,… l’hygiène personnelle des enfants
Maintenir une régularité d’horaire dans
les activités quotidiennes, des rituels familiaux
1.2.3. Roue de l’enfant exposé aux violences conjugale, lorsque les parents sont en couple
Ce schéma5 présente les formes de violences auxquelles sont exposés les enfants ainsi que
(5) Horincq Detournay Rosine. leurs conséquences possibles dans un contexte de violence conjugale lorsque que les parents
site www.psychogenre.org sont en couple.
1.2.4. Roue de l’enfant davantage protégé des violences conjugales, lorsque les parents sont
en couple
(6) Horincq Detournay Rosine. Ce schéma6 présente les situations où les interventions et le travail en réseau ont permis que
site www.psychogenre.org les facteurs de protection et de résilience soient activés autant que possible, auprès d’un d’en-
fant et de ses parents qui vivent de la violence conjugale et qu’ils sont en couple.
MODE
SOCIALISATION RELATIONNEL
1.2.5. Roue de l’enfant exposé aux violences conjugales, lorsque les parents sont séparés
CO-PARENTALITÉ,
UN MODE DE VIOLENCES
PARENTALITÉ PSYCHOLOGIQUES
INADAPTÉ
enfant parentifié
utilisation des enfants, par l’auteur, pour
par l’auteur, pour obtenir 40% d’entre eux
des informations sur
AUTONOMIE ENFANT VIOLENCES
par la mère victime,
l’autre parent FRAGILISÉE EXPOSÉ PHYSIQUES
pour une minorité
attachement insécure ou d’entre elles
désorganisé
TRAUMATISME SOCIALISATION
INADAPTÉE
1.2.6. Roue de l’enfant davantage protégé des violences conjugales, lorsque les parents sont
séparés
(8) Sadlier Karen (2011)
Les mots pour le dire, Ce schéma8 présente les critères de protection de l’enfant exposé aux violences conjugales en
Tome 1, Op. cit., p. 9 cas de séparation de ses parents.
PARENTALITÉ
EN PARALLÈLE,
UN MODE DE CLIMAT
PARENTALITÉ PSYCHOLOGIQUE
ADAPTÉ APAISÉ
ENFANT
DAVANTAGE
AUTONOMIE PROTÉGÉ SOCIALISATION
responsabilités affectives modèle de relations homme-
ADAPTÉE
adaptées à l’âge de l’enfant femme égalitaires
valorisation de l’enfant et de activation d’un réseau de
ses compétences soutien pour se protéger
place de l’enfant préservé par apprentissage de stratégies
un environnement non-violent non-violentes pour résoudre
conflits et frustrations
SANTÉ
PSYCHOLOGIQUE
RÉALISATION DE SOI
Comprendre ce que je vis et être
aidé à me responsabiliser
Apprendre que la violence est inacceptable
et qu’il existe d’autres façons de résoudre
les problèmes (développement des
compétences sociales)
Me familiariser avec le principe de l’égalité
dans les relations femmes-hommes et
déconstruire les stéréotypes entourant la
violence envers les femmes
•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
ESTIME DE SOI
Améliorer mon estime, ma confiance en
moi, mon sentiment d’autonomie et de
pouvoir d’action sur ma vie
•••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
AMOUR ET APPARTENANCE
Eprouver des sentiments clairs à l’égard de chacun de mes
deux parents, même si ces sentiments sont ambivalents
Avoir une bonne relation d’attachement
Jouer un rôle d’enfant au sein de ma famille et ne pas
endosser de responsabilités d’adultes
Entretenir une relation avec un adulte significatif en dehors de mes parents
Rompre le silence par rapport à la violence
Savoir reconnaitre mes émotions, les exprimer, être écouté-e, entendu-e, compris-e
••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
PROTECTION ET SÉCURITÉ
Etre protégé-e et apprendre à me protéger lors des violences
Etre rassuré-e et entouré-e après l’explosion de la violence
Bénéficier de la supervision, du soutien et de l’encadrement parental (sécurité émotionnelle)
••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••
BESOINS ESSENTIELS
Manger, dormir, être vêtu-e convenablement
Me sentir aimé-e
Bénéficier d’une certaine stabilité dans mon milieu de vie
ANNEXES 83
1 COMPRENDRE LA VIOLENCE CONJUGALE : SCHÉMAS ET MODÈLES DE RÉFÉRENCE
(10) Horincq Detournay Rosine, Selon que la prise en charge de l’enfant se situe durant l’une ou l’autre phase du cycle
www.psychogenre.org de la violence, certaines interventions pourront être avancées ou postposées et adaptées.
2
urgence si le danger est grave et imminent
• Lui rappeler les stratégies de protection
envisagées
• Activer tout ce qui est possible pour augmenter
EXPLOSION
la sécurité de l’enfant
DE LA VIOLENCE
• Construire ses interventions et/ou prendre des
mesures centrées sur l’intérêt de l’enfant
1
ESCALADE
• Se positionner contre la violence, dire que
des solutions et des alternatives existent
• aider l’enfant à clarifier ses émotions, • Offrir à l’enfant du temps et des
DE LA TENSION espaces, pour parler, pour sortir de
les événements vécus et ses loyautés
ce qu’il.elle a vécu durant l’explosion
relationnelles de la violence, normaliser et valider
• Ecouter et rassurer l’enfant autant que • Le déculpabiliser, le déresponsabiliser à ce qu’elle.il a ressenti
possible propos de la violence conjugale • L’aider à exprimer ses craintes/
• Envisager avec l’enfant des stratégies de • Lui offrir un encadrement soutenant et doutes/espoirs/émotions/sentiments
protection le concernant ainsi que sa fratrie,
lors des phases “escalade de la tension” et
structurant durant la phase “justification/
• L’informer et lui permettre de reconnaitre les culpabilisation”
“explosion de la violence”
phases potentielles du cycle de la violence • Envisager avec l’enfant si elle.il a pu
• Penser les personnes ressource et comment
activer les stratégies de protection,
leur demander de l’aide afin qu’elle/il puisse augmenter un controle à
voir avec l’enfant tout ce qui le
• L’informer du cycle de la violence afin son niveau et anticiper ab minima protègerait encore mieux et qui lui
qu’elle/il puisse prévoir la succession • informer des missions de l’intervenant et semble être réalisable lors d’une
probables des phases et avoir une de ses limites, ainsi que de la possibilité prochaine crise (éventuelle mais
compréhension systémique de ce qui lui de dévoilement en cas de danger grave et probable)
arrive
• Rappeler à l’enfant les aides possibles à son
imminent
3
niveau et comment les solliciter • Informer l’enfant des aides possibles à son
niveau
JUSTIFICATION
CULPABILISATION
4
• Retracer les événements vécus et permettre à l’enfant
de ventiler ses émotions
• Offrir à l’enfant une vision de son avenir plus
LUNE DE MIEL égalitaire et paisible
RÉMISSION • Travailler les liens et la sécurité relationnelle de
l’enfant
• Lui rappeler et reparler des stratégies de protection
envisagées
• Voir avec les parents quelles seraient à leurs yeux
les meilleures solutions concrètes et réalistes pour
protéger leur enfant.
• Décrocher l’autorisation des deux parents (victime et
auteur) afin que l’enfant puisse utiliser les stratégies
de protection envisagées lors des phases “escalade
de la tension” et “explosion de la violence”.
84 ANNEXES
2 - OUTILS
Que faire si je suis confronté à une situation de maltraitance d’enfant ? M’appuyer sur un ré-
seau de confiance… (2013) - brochure destinée aux professionnels, développée par la Direction
générale de l’Aide à la Jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles
C et outil a pour objectif d’expliciter les démarches qui peuvent être suivies par les intervenants
confrontés à une situation de maltraitance, replaçant chacun d’entre eux dans son rôle, ses
limites et ses devoirs et clarifiant les relations entre secteurs.
http://www.one.be/fileadmin/user_upload/accomp/sos/121217_Brochure_Maltraitance.pdf
C e référentiel délimite les notions de soutien à la parentalité et les inscrit dans le dispositif en
place en Fédération Wallonie-Bruxelles ; il expose les quatre principes au cœur du soutien à la
parentalité et dresse des balises pour l’intervention.
http://www.aidealajeunesse.cfwb.be/fileadmin/sites/ajss/upload/ajss_super_editor/DGAJ/Publi-
cations/Referentiel_soutien_a_la_parentalite.pdf
Petits yeux, grandes oreilles (2010) - dépliant émanant de la réflexion d’un groupe de travail
réuni à l’initiative du Délégué général aux droits de l’enfant de la Fédération Wallonie-Bruxelles,
qui présente brièvement la problématique de l’exposition à la violence conjugale et ses impacts
http://www.dgde.cfwb.be/fileadmin/sites/dgde/upload/dgde_super_editor/dgde_editor/docu-
ments/groupes_de_travail/pts_yeux_gdes_oreilles023.pdf
Lien équivalent : http://bit.ly/10cfNKc
L’aide aux enfants victimes de maltraitances, guide à l’usage des intervenants auprès des en-
fants et des adolescents (2004) - outil développé par Yapaka, le programme de prévention de
la maltraitance à l’initiative de la Fédération Wallonie-Bruxelles
C e document a pour objet principal de suggérer aux professionnel-le-s des manières d’inter-
venir face à un dévoilement de maltraitance, ainsi que des moyens d’aider un enfant qui en
est victime.
http://www.yapaka.be/files/ta_guide.pdf
86 ANNEXES
2 OUTILS
Points de repère pour prévenir la maltraitance (2008) - outil développé par Yapaka, le pro-
gramme de prévention de la maltraitance à l’initiative de la Fédération Wallonie-Bruxelles
P artant des questions et de la position des professionnel-le-s, ce livre aborde différents thèmes
liés à la maltraitance, son approche, les formes de soutien possibles, l’accompagnement des
enfants et des familles, la prévention, etc.
http://www.yapaka.be/sites/yapaka.be/files/publication/TA_Guide_WEB.pdf
Valisette pédagogique « Le même dilemme » (2013) - outil de sensibilisation à l’impact des vio-
lences conjugales sur les enfants témoins, réalisé par l’antenne « accrochage scolaire » de l’Ac-
tion de Prévention et de Citoyenneté de la Ville de la Louvière et la police locale de la Louvière
Informations : [email protected]
Violences faites aux femmes. Les enfants souffrent - outil méthodologique d’aide à l’entretien
de femmes présumées victimes de violences conjugales
E dité par l’Observatoire des violences envers les femmes du Conseil général de la Seine-Saint-
Denis, cet ouvrage a pour objectif d’aider les professionnel-le-s à libérer la parole des femmes
victimes, afin de mieux les accompagner dans leur parcours pour sortir des violences.
http://www.seine-saint-denis.fr/spip.php?page=imprimer&id_article=4061
Lien équivalent : http://bit.ly/18Mzv7b
Les mots pour le dire, Tome 1 - guide à destination des professionnel-le-s, développé par le
Département de la Seine-Saint-Denis.
vec une partie explicative et l’autre pratique, cet outil permet aux professionnel-les de tra-
A
vailler avec des mères et des enfants victimes de violence dans le couple dans un objectif de
résilience. Il aborde de nombreux aspects : liens entre maltraitance et exposition à la violence
conjugale, parentalité et violence conjugale, rôles endossés par les enfants exposés, comment
parler de la violence conjugale à l’enfant, etc.
http://www.seine-saint-denis.fr/spip.php?page=imprimer&id_article=4061
Lien équivalent : http://bit.ly/18Mzv7b
Les mots pour le dire, Tome 2 - guide à destination des profesionnel-le-s, développé par le
Département de la Seine-Saint-Denis.
C et outil propose dix activités à mener avec les enfants victimes de violence dans le couple et
avec leur parent victime, en vue d’amplifier les facteurs associés à la résilience psychologique.
http://www.seine-saint-denis.fr/spip.php?page=imprimer&id_article=4061
Lien équivalent : http://bit.ly/18Mzv7b
Les mots pour le dire, Tome 3 - guide à destination des professionnel-le-s, développé par le
Département de la Seine-Saint-Denis.
C et outil présente dix activités à mener avec les adolescent-e-s victimes des violences dans le
couple parental ou dans leur propre couple.
http://www.seine-saint-denis.fr/spip.php?page=imprimer&id_article=4061
Lien équivalent : http://bit.ly/18Mzv7b
ANNEXES 87
2 OUTILS
La santé des enfants exposés aux violences conjugales. Le monde du silence - brochure éditée
par le Conseil général de la Haute-Loire, en collaboration avec le Groupement régional de Santé
publique d’Auvergne
estiné aux parents, cet outil a pour objectif d’attirer leur attention sur les conséquences de
D
l’exposition aux violences conjugales pour leurs enfants et sur les signaux que ceux-ci peuvent
émettre.
http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/SEEVC-Brochure-Le_monde_du_silence.pdf
Livret d’accompagnement de la brochure « La santé des enfants exposés aux violences conju-
gales » – outil édité par le Conseil général de la Haute-Loire en collaboration avec le Groupe-
ment régional de Santé publique d’Auvergne
C e guide s’adresse aux professionnel-le-s intervenant auprès des victimes directes et des
auteurs de violences conjugales. Il apporte des conseils relatifs à l’utilisation de la brochure
destinée aux parents, ainsi que des informations sur le phénomène de la violence conjugale et
sur son impact (distinction entre violence et conflit, formes de violences, symptômes possibles
chez l’enfant selon son âge…).
http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Livretsanteviolenceconjugale.pdf
2.3. OUTILS DÉVELOPPÉS AU QUÉBEC
L’enfant, une éponge... L’enfant exposé à la violence conjugale. Son vécu, notre rôle (2012) - ou-
til développé par la Direction régionale de santé publique de la Capitale-Nationale de Québec,
dans le cadre d’un projet en faveur d’une intervention concertée et intersectorielle auprès des
enfants et des jeunes victimes de violences conjugales
http://www.dspq.qc.ca/publications/eponge-web.pdf
Petits yeux, petites oreilles. Comment la violence envers une mère façonne les enfants lors-
qu’ils grandissent - outil édité par le Center for Children & Families in the Justice System
C ette brochure présente les impacts de la violence envers la mère sur l’enfant. Elle vise à
aider les professionnel-le-s à mieux comprendre comment chaque enfant est façonné par les
expériences qu’il vit à la maison et à prendre en considération les aspects contextuels de la vie
familiale dans l’aide et l’accompagnement des enfants.
http://www.lfcc.on.ca/petits_yeux_petites_oreilles.pdf
Apprendre à écouter, apprendre à aider. Comprendre la violence faite aux femmes et ses effets
sur les enfants (2005) - outil édité par le Center for Children & Families in the Justice System,
destiné aux professionnels.
C ette brochure aborde les notions essentielles de la problématique des enfants exposés :
comment intervenir adéquatement, quelle attitude adopter face au dévoilement d’un enfant,
l’information des professionnels face au syndrome vicariant, etc. Elle est complétée de statis-
tiques et de références bibliographiques et en ligne.
http://www.lfcc.on.ca/apprendre.pdf
88 ANNEXES
2 OUTILS
La violence conjugale post-séparation… une situation bien réelle - outil édité par le Centre de
recherche interdisciplinaire sur la violence familiale et la violence faite aux femmes (CRI-VIFF)
éveloppée à l’attention des femmes (potentiellement) victimes, cette brochure propose une
D
série d’informations et de conseils relatifs à la violence conjugale après la séparation.
http://www.criviff.qc.ca/upload/publications/pub_151.pdf
Outils d’évaluation du risque de violence envers le partenaire intime : Un examen (2012) - rap-
port du gouvernement canadien rédigé par Melissa Northcott, analysant les outils d’évaluation
du risque de violence envers le partenaire intime
http://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/vf-fv/rr12_8/index.html
Recensement des outils d’évaluation des risques de violence conjugale utilisés au Canada
(2009) – rapport rédigé par Allison Millar (division de la recherche et de la statistique)
Préparé pour le Ministère canadien de la Justice ce rapport recense les outils d’évaluation des
risques de violence conjugale utilisés au Canada.
http://www.justice.gc.ca/fra/pr-rp/jp-cj/vf-fv/rr09_7/index.html
3 - FORMATIONS
1. AU NIVEAU INSTITUTIONNEL
Composés d’associations d’aide aux femmes victimes de violences conjugales (Collectif contre
les Violences familiales et l’Exclusion, Solidarité Femmes) d’une part, et d’aide aux auteurs
de violence (Praxis) d’autre part, les Pôles de ressources spécialisées en violences conjugales
et intrafamiliales font partie intégrante du dispositif de lutte contre les violences entre parte-
naires au sein de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Formations proposées :
- Les violences conjugales et intrafamiliales : comprendre, prévenir, accompagner, intervenir ;
- Intervention auprès des enfants dans un contexte de violences conjugales et intrafamiliales ;
- Développer les compétences de travail en réseau intersectoriel ;
- Impact sur les intervenants.
www.violencesconjugales.be
2. AU NIVEAU PRIVÉ12
3 FORMATIONS
organisations qui les emploient. Elles portent sur des thèmes essentiels : la place des profes-
sionnels, leur positionnement face aux systèmes violents et les modes d’interventions.
www.cfip.be / [email protected]
4 - CONTACTS UTILES
Nous reprenons ci-après une série de contacts d’organisations, centres d’écoute, répertoires
qui peuvent être utiles face à une problématique de violence conjugale.
Répertoire des acteurs régionaux et locaux en matière de violence entre partenaires et intrafa-
miliale en Région de Bruxelles-Capitale
www.egalitedeschancesbruxelles.irisnet.be/fr/violence/outils-et-brochures/attachment/
repertoire_complet-version-du-4-octobre-2010-4/
Les Conseillers de l’aide à la jeunesse et leur service (SAJ : Service d’aide à la jeu-
nesse) ont pour rôle de soutenir le jeune et sa famille afin qu’il reçoive l’aide des
services compétents (CPAS, Centre de Santé mentale, Centre PMS...). Les Conseillers
de l’aide à la jeunesse reçoivent les demandes d’aide individuelle. Ils organisent et
mettent en oeuvre l’aide spécialisée sollicitée ou acceptée. Les Conseillers de l’aide
à la jeunesse ont également la responsabilité au niveau de la prévention générale au
sein de l’arrondissement qu’ils couvrent (un SAJ par arrondissement judiciaire).
Les Directeurs de l’aide à la jeunesse et leur service (SPJ : Service de protection judi-
ciaire) mettent en œuvre, dans le cadre de la contrainte, les mesures imposées par le
Tribunal de la Jeunesse relatives aux enfants.
92 ANNEXES
4 CONTACTS UTILES
Refuges spécialisés pour femmes et enfants victimes de violence conjugale (refuge avec adresse
secrète, ligne téléphonique, permanences d’accueil et consultations sociales et juridiques)
La Consoude -Tournai
Tel. : 069 22 10 24
[email protected]
www.cpas-tournai.be/cpas_intranet/index.php?idpage=DET0060111
ANNEXES 93
4 CONTACTS UTILES
Les Services d’Aide aux Victimes apportent une aide gratuite et sans obligation aux
victimes et à leurs proches, sur simple demande, même lorsqu’aucune plainte n’a été
déposée à la police. Les Services d’Aide aux Victimes sont indépendants de la police
et de la justice. Tous leurs collaborateurs sont tenus au secret professionnel.
Les entretiens ont lieu dans un local garantissant la discrétion et si nécessaire à
domicile ou à l’hôpital.
Les Services d’Aide aux Victimes procurent à court, moyen ou long terme :
- une aide psychologique adaptée aux conséquences de l’événement subi ;
- une aide dans les démarches d’ordre administratif, social et juridique.
4 CONTACTS UTILES
Praxis - Liège
Tél. : 04/228 12 28
[email protected]
Praxis - Bruxelles
Tél. : 02/217 98 70
[email protected]
Praxis - Hainaut
Tél. : 064/34 19 00
[email protected]
ANNEXES 95
4 CONTACTS UTILES
Police
www.policelocale.be/portal/fr/zones-de-police-liste.html
5 - BIBLIOGRAPHIE
BAKER, L.L. & CUNNINGHAM A.J. (2004). Pour aider les enfants à mieux réussir / en assistant dans
leur rôle maternel les survivantes de la violence faite aux femmes : une ressource pour appuyer
l’art d’être un bon parent. London, ON: Centre for Children & Families in the Justice System.
BAKER, L.L., JAFFE, Peter G.& MOORE, K.J. (2001). Comprendre les effets de la violence en milieu
familial : un guide destiné aux éducateurs et éducatrices de la petite enfance. London, ON:
Centre for Children & Families in the Justice System.
BENSON, M.L. & FOX G.L. (2004). When Violence Hits Home: How Economics and Neighborhood
Play a Role. Washington, D C: National Institute of Justice (NCJ 205004).
www.ojp.usdoj.gov/nij
BOURASSA Chantal, LETOURNEAU Nicole, LESSARD Geneviève, HOLDEN Georges (2012) L’enga-
gement paternel en contexte de violence conjugale : points de vue des pères et des interve-
nants-es œuvrant auprès des conjoints violents, recherche en cours
BOWN, B.V. & BZOSTEK S. (2003). Violence in the Lives of Children. Washington, DC: Child Trends.
www.childtrendsdatabank.org
CAMPBELL Anne (1993) Men, Women, and aggression : from rage in marriage to violence in the
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Implications for Intervention. Trauma, Violence & Abuse, 1(4): 321-342.
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cortisol in pediatric posttraumatic stress disorder. Biological Psychiatry, 51, 575 – 582.
CHAMBERLAIN Claire (2003). Violences parentales et violence conjugale : des réalités plurielles,
multidimensionnelles et interreliées, Presse de l’Université du Québec.
CIRILLO Stefano, DI BLASIO Paola (2005) La famille maltraitante, ESF, Editions Fabert, coll. Psy-
chothérapies créatives
CODE, R. (2003). Les refuges pour femmes violentées au Canada. Centre canadien de la statis-
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Comité canadien sur la violence faite aux femmes, Ottawa, ON: Ministre des Approvisionne-
ments et Services Canada (1993). Un nouvel horizon : Éliminer la violence - Atteindre l’égalité.
COTE Isabelle, DALLAIRE Louis-François, VEZINA Jean-François (2005). Tempête dans la famille :
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CUNNINGHAM, A.J. & BAKER L.L. (2004). What About Me! Seeking to Understand the Child’s View
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ANNEXES 97
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www.aidealajeunesse.cfwb.be/index.php?id=306
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(CRI-VIFF) : Les enfants exposés à la violence conjugale
www.criviff.qc.ca/enfants_exposes/cms/index.php?accueil=1
Enfants exposés à la violence entre partenaires (Cellule de coordination de l’aide aux enfants
victimes de maltraitance)
www.yapaka.be/thematique/violence-conjugale-impact-sur-lenfant
Collectif contre les Violences Familiales et l’Exclusion (CVFE) : études et recherches sur la
violence conjugale et intrafamiliale, l’exposition des enfants à la violence conjugale
www.cvfe.be/publications
Psychogenre : ce site réunit des textes de réflexion et des outils d’intervention conçus par
Rosine Horincq Detournay sur des questions de maltraitances, d’abus sexuels, de violences
intrafamiliales, de violences conjugales, d’EVRAS (Education à la Vie Relationnelle, Affective et
Sexuelle), d’analyse de genre et de processus d’emprise.
www.psychogenre.org
104 NOTES