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UNIVERSITE MONTPELLIER I

ECOLE DOCTORALE
DROIT ET SCIENCE POLITIQUE

Année : 2012

THESE

pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE L’UNIVERSITÉ MONTPELLIER 1

Discipline : Droit privé et Sciences criminelles

Présentée et soutenue publiquement par :

Salim YAACOUB

Le 8 décembre 2012

LE STATUT DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL


EN DROIT LIBANAIS : DE L’INSPIRATION AU DÉPASSEMENT
D’UN MODÈLE FRANÇAIS DE PROTECTION

Directeur de thèse
M. le Professeur Nicolas FERRIER

Jury
M. Yvan AUGUET, Professeur à l’Université de Perpignan Via Domitia
Mme. Séverine CABRILLAC, Professeur à l’Université Montpellier I
M. Nicolas ERÉSÉO, Maître de conférences à l’Université de Strasbourg
M. Nicolas FERRIER, Professeur à l’Université Montpellier I
« La Faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises
dans cette thèse ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur »
Dédicace

A mon père, pour ses sacrifices sans

retour, pour ses motivations sans

cesse, pour sa volonté sans faiblesse. Je

souhaite que ce travail lui offre le

soulagement moral pour toutes les

difficultés croisées de sa vie.

A ma mère, pour l’amour, la

lumière et les prières. Pour son soutien

sans faille, son encouragement dans les

moments de doute et pour tout ce

qu’elle a pu m’apporter pour franchir

les obstacles les plus difficiles.

A mes sœurs

A mon frère

Il m’est impossible de trouver des

mots pour dire à quel point je suis fier

d’être un parmi vous et à quel point je

vous aime.
REMERCIEMENTS

J’adresse mes sincères remerciements à Monsieur le Professeur Nicolas FERRIER


pour la confiance qu’il m’a accordée en acceptant de diriger ce travail et sans qui cette
thèse n’aurait pas été menée à terme. Je lui suis reconnaissant pour sa constante
disponibilité, son aide précieuse, ses conseils éclairants et son soutien permanent.
C’est pour moi un très grand honneur d’avoir été orienté et encadré par ce grand
professionnel. J’ai appris à ses côtés l’art de la recherche tout au long de ce travail.

J’exprime mes plus vifs remerciements à Madame le Professeur Séverine


CABRILLAC pour avoir bien voulu porter une appréciation sur ce travail et participer
au jury de soutenance. Je n’oublie pas qu’elle fut et demeure la source de mes
premiers pas vers ce travail. Je lui témoigne en cela ma sincère gratitude

Mes remerciements vont également à Monsieur le Professeur Yvan AUGUET et


Monsieur Nicolas ERÉSÉO pour l’intérêt qu’ils ont porté à mon travail en me faisant
l’honneur d’être rapporteurs de cette thèse.

Je tiens à remercier également Monsieur le Professeur Honoraire André-Pierre


MAISTRE pour sa collaboration fraternelle et sa relecture enrichissante. Il m’a appris
le style juridique. Qu’il trouve ici le signe de ma sincère reconnaissance et de ma
solide amitié.

Je n’oublierai pas les aides permanentes de Maître Céleste YAACOUB pour la


recherche à distance en droit libanais. Je la remercie pour son soutien et son
assistance.

Je tiens à remercier tous ceux qui m’ont supporté et ont contribué, d’une manière
ou d’une autre, à la réalisation de ce travail de recherche, notamment Valorine TAWK.

Enfin, je salue de tout cœur ceux à qui je dois l’essentiel, tous les membres de ma
famille : Abdallah, Arzée, Céleste, Rami et Rita, pour leurs encouragements
incessants, pour la confiance et l’intérêt qu'ils ont accordé à mes études pour ma
réussite.
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

Adde : ajouter
aff. : Affaire Ibid. : renvoie au même ouvrage cité dans la
AJDI : Actualité juridique de droit note précédente
immobilier Infra : ci-dessous
al.: Alinéa J.-Cl. : JurisClasseur (Encyclopédies)
art. : Article JCP : JurisClasseur périodique
AN : Assemblée nationale J.O. : Journal Officiel
Ass. plén. : Assemblée plénière JOUE : Journal officiel de l'Union
Bull. civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de européenne
cassation (chambre civile) Jurispr. : Jurisprudence
Bull. crim. : Bulletin des arrêts de la Cour Lettre distrib. : Lettre de distribution
de cassation (chambre criminelle) LGDJ : Librairie générale de droit et de
C. civ. : Code civil jurisprudence
C. com. : Code de commerce lib. : Libanais
C. consom. : Code de la consommation LPA : Les Petites affiches
C. trav. : Code du travail n° : Numéro
C.O.C : Code des obligations et des contrats Obs. : Observations
CA : Cour d'appel op. cit. : Opere citato (ouvrage précité)
Cah. dr. entr. : Cahiers de droit de ord. : Ordonnance
l'entreprise p. : Page
Cass. civ. : Cour de cassation chambre préf. : Préface
civile PUF : Presses universitaires de France
Cass. com. : Cour de cassation chambre Rapp. : Rapport
commerciale Rec. Baz : Recueil de jurisprudence de
Cass. crim. : Cour de cassation chambre Jamil Baz
criminelle Rec. Hatem : Recueil de jurisprudence de
Cass. soc. : Cour de cassation chambre Chahine Hatem
sociale Rép. civ. Dalloz : Dalloz (Encyclopédie)
CCI : Chambre de commerce internationale Rev. al Adl : Revue de justice du barreau
CE : Conseil d'État de Beyrouth
ch. : Chambre RJDA : Revue de jurisprudence de droit des
chron. : Chronique affaires
CJCE : Cour de Justice des Communautés RJL : Revue juridique libanaise
Européennes RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil
CNC : Conseil national de la consommation RTD com. : Revue trimestrielle de droit
Coll. : Collection commercial et de droit économique
Cons. conc. : Conseil de la concurrence s. : Suivant
Cons. const. : Conseil constitutionnel Sader : Bulletin Sader
Cons. prud'h. : Conseil des prud'hommes Sirey : Recueil Sirey
consom. : Consommation somm. : Sommaire
Contrats, conc. consom. : Contrats, Supra : ci-dessus
concurrence, consommation T. com. : Tribunal de commerce
D. : Dalloz (Recueil) t. : Tome
doctr. : Doctrine TGI : Tribunal de grande instance
éd. : Édition TI : Tribunal d'instance
fasc. : Fascicule vol. : Volume
Gaz. Pal. : Gazette du Palais
SOMMAIRE

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE
LA QUALIFICATION ALTERNATIVE DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DECRÉT-LOI N. 34/67

TITRE PREMIER: L’AGISSEMENT POUR AUTRUI

PREMIER CHAPITRE : LES MODALITÉS DE L’ACTIVITÉ


Section 1 : L’agissement à titre professionnel
Section 2 : L’agissement à titre permanent
Section 3 : L’agissement à titre indépendant

DEUXIÈME CHAPITRE : LA TENEUR DE L’ACTIVITÉ


Section 1 : L’action au nom d’autrui
Section 2 : L’action pour le compte d’autrui

TITRE SECOND : L’AGISSEMENT POUR SON PROPRE COMPTE

PREMIER CHAPITRE : LE COMMERCANT -REPRÉSENTANT-


Section 1 : Les divergences
Section 2 : Les ressemblances

DEUXIÈME CHAPITRE : LE COMMERCANT -DISTRIBUTEUR EXCLUSIF UNIQUE-


Section 1 : L’exclusivité
Section 2 : L’unicité
DEUXIÈME PARTIE
LES EFFETS DE LA PROTECTION DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DECRÉT-LOI N. 34/67

TITRE PREMIER : LES EFFETS ENTRE LES PARTIES


PREMIER CHAPITRE : L’EXCÉCUTION DU CONTRAT
Section 1 : Les obligations du représentant commercial
Section 2 - Les obligations du représenté

DEUXIÈME CHAPITRE : L’EXTINCTION DU CONTRAT


Section 1 : Les causes d’extinction
Section 2 : Les conséquences d’extinction

TITRE SECOND : LES EFFETS À L’ÉGARD DES TIERS


PREMIER CHAPITRE : LES CONDITIONS D’OPPOSABILITÉ
Section 1 : Le principe tenant à l’exigence de la simple connaissance
Section 2 : La dérogation tenante à l’exigence de la publicité

DEUXIÈME CHAPITRE : LES CONSÉQUENCES DE L’OPPOSABILITÉ


Section 1- L’obligation pour les tiers de respecter l’exclusivité
Section 2 : La sanction du non-respect des contrats d'exclusivité par les tiers

CONCLUSION GÉNÉRALE
INTRODUCTION

« Qui ne risque rien ne gagne rien »


-8-

1. Par sa position géopolitique, le Liban a toujours été au carrefour de trois


continents et le passage obligé entre l'Occident et le Moyen-Orient, bénéficiant au
surplus d'un accès vers l'Asie centrale et la Russie. Il essaye de faire partie de
l'Organisation Mondiale du Commerce depuis de nombreuses années et a obtenu le
statut d'observateur depuis 19991. En raison de cette position, le Liban a toujours été
un lieu propice à la liquidation des conflits régionaux et nationaux, source d’une très
grande influence sur son économie2. A ce titre, rappelons qu’il n’est pas un pays
essentiellement producteur au vrai sens du terme3, mais un pays surtout importateur
par excellence4. C’est en conséquence de ce cadre géopolitique que le secteur tertiaire
devait acquérir un développement spectaculaire. Le « service » constituait un des
principaux éléments de l’économie libanaise5. Le commerce du Liban devait aussi,
continuer à constituer l’élément traditionnel principal de cette vie économique6, vu

1
Ses relations avec l'Union Européenne sont privilégiées : il existe un accord d'association entre les
deux entités, appelé également partenariat euro-méditerranéen, qui prévoit notamment la création
d'une zone de libre-échange entre le Liban et l'Union Européenne à l'échéance 2014. Par le fait même,
le pays fut maintes fois envahi et conquis par pratiquement tous les peuples du bassin méditerranéen,
ainsi que par des tribus nomades qui remontèrent de la péninsule arabique.
2
Dès son indépendance et jusqu’à nos jours, le Liban a vécu beaucoup des guerres rendant son
économie déséquilibrée, et qui ont nécessité un fort rétablissent au niveau économique et sociale. La
guerre civile qui débute en 1975 a sapé tous les fondements de l'économie libanaise. Le pays a alors
connu un fort problème de concentration des activités économiques dans le grand Beyrouth : G.
CORM, Economie : «Malgré la guerre, les Libanais ont confiance dans leur système bancaire», Le
Temps, 2006.
3
Jusqu'à la moitié du XXe siècle, le Liban était encore largement un pays rural. Il se rapprochait par
exemple de la Suisse. Puis, avant la première guerre (1975-1990), le secteur des services commerciaux
s'était fortement développé au détriment de l'agriculture. Les produits agricoles des terres cultivables
suffisent à combler les besoins de la population, mais la spéculation du marché étranger a ouvert la
porte à une forte concurrence. Il n’est pas non plus un pays essentiellement industriel, étant donné
qu’il ne possède pas de matière première essentielle pour la viabilité contrôlée et dirigée d’un tel
secteur. Mais récemment la découverte de ressources gazières et pétrolières dans sa mer territoriale a
été annoncée.
4
Le Liban n’a pas une production suffisante pour pouvoir subvenir à ses besoins aussi bien
qualitativement que quantitativement. La production destinée à l’exportation demeure encore très
modeste, et en tout cas, insignifiante par rapport à l’ensemble de la vie économique libanaise. Par
conséquent, le Liban n’est pas simplement importateur pour ses propres besoins, il est aussi
importateur pour un grand nombre de pays du monde arabe et moyen oriental : M. MAHMASSANI,
La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 125.
5
En effet, environ 70% du revenu national était assuré par les secteurs de services, et dont les
rentrées rendaient excédentaire la balance de paiements et comblaient l'énorme déficit chronique de la
balance Commerciale : M. AOUAD, Situation et problèmes économiques, www.opuslibani.org.lb
6
C'est une économie de consommation qui se base surtout, sur l'importation, d'où un grand besoin
en devises étrangères, ce qui se répercute sur la valeur, de la monnaie nationale et la rend très sensible
aux fluctuations et aux crises, autant internes qu'externes. D'où un déficit chronique de la balance
-9-

qu’il a gagné une force d'impulsion depuis la fin des conflits dérangeant le pays. Une
grande majorité de la population est commerçante et c’est ainsi que le commerçant
libanais joue le rôle d’exportateur par rapport au reste des pays du Moyen-Orient. Il
exporte des produits qu’il a lui-même importés.

2. Le commerce s’exerçait sans doute à l’origine sans marchands et sans


intermédiaires professionnels et consistait essentiellement en l’activité d’échanges
ponctuels ou en cadeaux entre peuplades7 : C’est le cas du Liban, qui dès avant sa
naissance, grâce à sa situation géographique sur la Méditerranée, a vécu du commerce
par les phéniciens avec leurs navires sillonnant la Méditerranée, et transportant tout ce
qui peut s'échanger ou se vendre8. Le commerce professionnel a pris naissance
lorsque l’homme a cessé de produire pour ses propres besoins et a cherché à tirer
profit de la vente à autrui9.

3. Par la suite, il est aujourd’hui difficile pour un fabricant ou une entreprise,


et ce quelle que soit sa taille, de penser à accroître ses ventes et débouchés, et par là
même son chiffre d’affaires, en se contentant d’une implantation locale, que celle-ci le
soit aussi bien au niveau d’une région que d’un pays. Dans le même temps, la rapidité
et la multiplicité des moyens de transport modernes ont créé, depuis moins d’un
siècle, un énorme développement des échanges nationaux et internationaux. Ce qui a

commerciale ; et, aussi, une très forte dépendance vis-à-vis de l'extérieur à la fois pour importer les
biens de consommation ou les matières premières, et pour exporter les produits agricoles ou industriels.
Le secteur commercial occupait, depuis les années cinquante la place la plus importante au sein de
l'économie libanaise. Sa contribution à la formation du revenu national dépassait 30%, c'est-à-dire
presque autant que la contribution des secteurs industriel et agricole réunis : J.-L. REIFFERS, F.
BLANC, N. GRAND, S. PALMERO, Profil pays Liban, Institut de la Méditerranée, France, Femise,
2005, p. 22.
7
E. SAMHABER, Histoire du commerce, Arthaud, 1963, p. 10.
8
La motivation première qui les pousse vers d'autres rivages reste cependant d'ordre commercial.
Citons par ex : les denrées alimentaires telles que le vin, l'huile ou les grains (blé, orge) dans leurs
amphores de forme caractéristique, rondes et ventrues, minerais de cuivre, d'argent et surtout d'étain
servant à la production du bronze ; des produits de luxe : animaux exotiques pour les cours royales tels
que les singes ou les crocodiles, pourpre, bois de cèdre, parfums et pierres précieuses qui sert de
monnaie d'échange avec les populations locales : P. ZALLOUA, Identifying Genetic Traces of
Historical Expansions: Phoenician Footprints in the Mediterranean,The American Journal of Human
Genetics, 2008.
9
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 4.
-10-

accéléré, le phénomène de la « mondialisation » ces dernières années10. Ce dernier a


synthétisé les efforts et la volonté des acteurs économiques d’être présents et de faire
du commerce au niveau mondial. Au cours de cette phase commerciale, le producteur
et le consommateur ne sont plus en relation directe11 et, en effet, le producteur ne
peut pas tout faire seul pour la diffusion et la commercialisation de ces produits ; les
échanges se réalisent alors par l’intermédiation, suite au développement de la
demande12 qui a entrainé la production de masse et donc la standardisation des
produits13. Ainsi, vu que la distribution est la phase du circuit économique au cours de
laquelle les producteurs atteignent les consommateurs et utilisateurs finaux de leurs
produits et/ou services14, il s'agit bien d'une étape essentielle de l'activité économique,
car « à quoi sert de fabriquer si nul ne peut acheter le bien »15. Ce concept se
concrétisera par la commercialisation de ces produits suivant le réseau de distribution.

4. Plutôt qu’à l’acquisition de sociétés, prises de participations, création de


succursales ou de filiales à l’étranger, la plupart des entreprises étrangères préfèrent
souvent recourir aux réseaux de distribution et de représentation avec des partenaires
locaux16, chargés d’écouler les produits dans une zone délimitée17 ; concept pratiqué
pour mettre en relations d’affaires des parties ne se connaissant pas personnellement,

10
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, nº 1.
11
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, nº 2.
12
Préparée par les physiocrates qui ont proposé le passage de la subsistance à l’opulence, du
minimum de la conservation de l’existence au maximum de la jouissance : C. LARRERE, L’invention
de l’économie au XVIII siècle, PUF, 1992 ; Dans l’économie de pénurie où l’offre est inférieure à la
demande, la revente des produits est garanti et l’intermédiaire remplit une fonction de rapprochement
des produits des consommateurs. C’est avec le passage de l’économie de pénurie à l’économie
d’abondance où l’offre étant supérieure à la demande, que le distributeur remplit une fonction
primordiale : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., nº 2.
13
P. VERLEY, La révolution industrielle, Folio Histoire, 1997 : cité par D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., nº 2.
14
Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et l’exclusivité territoriale, th., Montpellier,
2010, p. 7.
15
Ph. LE TOURNEAU, Concession. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses
concessions. Fondement et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc.
1010, 2006, n° 38 et s. ; 2010, n° 148 et 151.
16
V. HEUZE, « Pratique des contrats internationaux », Dict. Joly, t. 1, livre 1, 1988, p. 5.
17
J.-M. LELOUP, Le partage de marché par les réseaux de vente et les réseaux de distribution, in :
Dix ans de droit de l’entreprise, 1978, nº 935, 956.
-11-

suite à l’intermédiation d’une tierce personne pouvant garantir la bonne moralité des
futures parties contractantes : « Entre deux familles alliées, la procédure de location
de terres est simplifiée car les parties concluent l’affaire directement. Mais s’il n’y a
pas d’alliance entre les parties, la demande doit être faite auprès d’un tiers qui leur
est allié. Ce tiers devient l’intermédiaire et entame les pourparlers pour le compte de
la partie qui est intéressée »18.

5. A ce titre, soulignons que la société libanaise et, par conséquent, l’économie


libanaise sont marquées par les données géographiques et politiques du Liban. Sa
situation géographique l’ouvre au commerce international, ce qui a attiré et incité les
étrangers à investir au Liban ; d’où l’importance des mouvements de circulation et le
statut de point de liaison entre l’est et l’ouest. C’est du fait du développement
prodigieux des échanges commerciaux internationaux, que les marchés étrangers ont
été naturellement visés par les opérateurs économiques19. La commercialisation des
produits et leur diffusion, suivant la technique de coopération qualifié également
d’exportation ou d’intégration verticale, est une méthode souple fondée sur le droit
des contrats par l’intervention des tiers ou partenaires locaux. Or, l’écoulement des
produits en grandes quantités suppose l’exploitation continuelle de nouveaux marchés
existants, ce qui rend de plus en plus indispensable le recours à l’aide d’intermédiaires
du commerce devant agir de manière permanente et continue au service du fabricant
ou du distributeur.

6. Sur ce stade, la distribution apparaît comme une fonction non plus


seulement utile mais indispensable20 au cœur de la société dite de consommation : « si
nul ne réalise sa propre vie tout seul, mais seulement par la médiation des autres

18
J. BOUGOUMA, La représentation commerciale dans les états de la C.E.A.O, th., Montpellier,
1992, nº 39.
19
S. PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
20
A. PIATIER, Traité sommaire de la distribution, par P. AVRIL, 1964, p. 9 ; J. ZLATIEV, Le
mécanisme de la vente, DUNOD, 1961 : cité par D. FERRIER, op. cit.
-12-

hommes ; si plus fondamentalement, tout est toujours solidaire de tout, alors les
intermédiaires sont partout »21.

7. Ainsi, comme nous l’avons dit, si le Liban n’est pas un pays producteur
mais consommateur, il faut bien alors des intermédiaires de commerce qui assurent
avec permanence la satisfaction des besoins de la population en matière de
consommation ; cela devait donner un élan particulier à la profession du représentant
commercial22 -sujet de notre étude-. Cette question d’intermédiation n’est pas propre
au Liban puisqu’elle se trouve aussi en France ; elle occupe une importance
particulière au Liban à cause de sa « situation » et de sa « fonction ». Dans le premier
cas, elle est dotée d’un sens passif et signifie « ce qui se trouve placé entre deux
autres termes »23, au propre ou au figuré. Ainsi parle-t-on d’une division, d’une
solution ou encore d’un parti intermédiaire. Dans le second, avec un sens actif, elle
vise en revanche « ce qui établit un lien entre deux autres termes »24.

8. Au vu de l’importance de ces deux éléments, « situation » et « fonction »,


nous nous permettrons d’identifier l’intermédiaire en droit français et libanais (I)
suivant la notion d’intermédiation qui s’identifie à une opération très générale
d’entremise entre deux personnes dans la circulation des produits et des services25. A
ce titre, un recours au terme général de notre recherche -la représentation- sera utile
pour vérifier ensuite le concept de la représentation en droit commercial, et en
particulier du représentant commercial en droit libanais et français (II). Soulignons
que des difficultés vont être rencontrées (III), avant de déterminer la problématique et
d’exposer le justificatif de notre plan d’étude (IV).

21
LAVELLE, Dialectique du monde sensible, 1922 : cité par M. GUILLAUME-HOFNUNG, La
médiation, 2e éd. PUF, Paris, coll. Que sais-je ?, nº 2930, 2000, v. La médiation comme mode de
règlement des conflits dans la vie des affaires, LPA, 1999, nº 138.
22
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, op. cit., p. 25.
23
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 12.
24
A. LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, vol. 1, 5e éd., Paris, PUF,
coll., Quadrige, 1999, v. intermédiaire, p. 533.
25
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 12.
-13-

I. La définition d’intermédiaire

9. Dérivé du latin intermedius, signifiant qui est au milieu26.


Philosophiquement, la notion d’intermédiaire structure tout d’abord plusieurs
concepts fondamentaux du discours juridique27. Elle s’utilise tantôt comme un adjectif
désignant ce qui est entre deux éléments et forme transition entre eux, tantôt comme
un nom commun donne à la personne par l’entremise de laquelle on arrive à quelque
résultat28.

10. C'est dans le domaine économique29 que les intermédiaires ont pris une
importance considérable, en particulier dans le domaine des marchés à l'exportation.
Selon le critère économique, « serait véritablement un intermédiaire professionnel
extérieur à l’entreprise qui assurerait la jonction entre le commerçant et le tiers. En
somme l’intermédiaire n’est ni un salarié ni un point de vente du principal »30. En
effet, la difficulté n’est plus de produire, elle est désormais de vendre31. Dès lors,
l’intermédiaire s’interpose entre le principal et le tiers en occupant une position
centrale. Il apporte sa connaissance du pays et ses relations au niveau des grands
producteurs. La notion d’intermédiaire renvoie ici aux extrêmes du circuit
économique : l’intermédiaire relie le producteur au consommateur final ou encore
l’offre et la demande, ce lien étant de nature essentiellement économique32. A ce titre,

26
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 562.
27
Elle structure d’ailleurs bien d’autres discours. C’est ainsi par le recours au concept
d’intermédiaire que J. Le GOFF a rendu compte de la naissance du Purgatoire dans l’imaginaire
chrétien de l’au-delà. Or ce passage des systèmes dualistes à un système ternaire, loin de ne constituer
qu’une transformation anecdotique, traduit une véritable révolution mentale et sociale ; v. La naissance
du purgatoire, NRF, Gallimard, Bibliothèque des histoires, 1981, spéc, « Penser l’intermédiaire», p. 16
et s. ; v. D.-R. DUFOUR, Les mystères de la trinité, NRF, Gallimard, Bibliothèque des sciences
sociales, 1990 : cité par N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations
contractuelles, LGDJ, Paris, préf. C. JAMIN, 2007, nº 3.
28
Dictionnaire de l’Académie française, « intermédiaire ».
29
V. supra note 12.
30
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 44.
31
D. FERRIER, op. cit., nº 2.
32
J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants, concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011,
nº 955.
-14-

l’intermédiaire représente une étape dans la circulation d’un produit ou service33.


Ainsi parle-t-on fréquemment des intermédiaires en droit de la distribution34. Ce
secteur, devenu essentiel dans l’activité économique contemporaine35, permet aux
producteurs d’atteindre les consommateurs, d’écouler les produits qu’ils conçoivent et
fabriquent, assumant une fonction logistique, la distribution requiert l’intervention de
nombreux intermédiaires36.

11. Dans le domaine commercial, l’intermédiaire se définit comme « celui qui


fait profession de mettre en relation deux ou plusieurs personnes en vue de la
conclusion d’une convention »37. Cette notion s'entend de personnes dont les activités
se caractérisent juridiquement par l'existence d'un mandat leur permettant d'agir pour
le compte d'autrui et, économiquement, par le fait que ces intermédiaires ne
fournissent pas avec leurs propres moyens d'exploitation les biens et les services qui
sont l'objet de la transaction pour laquelle ils s'entremettent38. Selon le critère
juridique, serait considéré comme intermédiaire la personne qui agit pour le compte

33
P. COUSI, G. MARION, Les intermédiaires du commerce, préf. M. GRENTE, LGDJ, Paris,
1963, n° 3 : « avant de parvenir à l’utilisation, la chose suit un circuit commercial compliqué et met en
action une foule d’intermédiaires aux statuts les plus divers ». Les auteurs parlent d’ailleurs
significativement des intermédiaires entre le fabricant et l’utilisateur ; A. De THEUX, Le droit de la
représentation commerciale, Etude comparative et critique du statut des représentants salariés et des
agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1,
1975, nº 15, p. 29, propose de définir l’intermédiaire, ou auxiliaire du commerce, comme « celui qui
dans le circuit commercial, rapproche d’une manière ou d’une autre le fabricant et le consommateur,
le vendeur et l’acheteur. Outre le représentant de commerce, il faut mentionner sous ce terme le
courtier, le concessionnaire, le commissionnaire…».
34
L. AMIEL-COSME, Les réseaux de distribution, préf. Y. GUYON, LGDJ, 1995, nº 1 : «
L’organisation de la distribution en réseau peut nécessiter la présence de plus ou moins
d’intermédiaires entre le fabricant et le distributeur » ; D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd.
LexisNexis, 2012, nº 1 : « La distribution est un acte intermédiaire défini tardivement en raison de sa
proximité, source de confusion, avec la production et la consommation ».
35
L’évolution historique du rôle de ces intermédiaires en droit des affaires est notamment retracée
par C. CHAMPAUD, Le droit des affaires, 5e éd., PUF, coll. « Que sais-je? », 1994, n° 1978, p. 100 et
s.
36
Le nombre, le statut et la fonction de ces intermédiaires varient selon le type de circuit envisagé :
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº 60.
37
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, nº 473 ; S.
PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
38
Instruction du 31 juill. 1992, BOI 3CA-92, nº 77.
-15-

d’autrui de telle sorte que l’acte qu’elle accomplit produise directement ou


indirectement ses effets sur la tête du principal39.

12. En effet, l'intermédiation économique ou l’intermédiation commerciale


oriente le rôle d'intermédiaire pour faciliter la mise en relation de plusieurs personnes
physiques ou morales ayant des intérêts complémentaires. En règle générale,
l’intermédiaire est choisi du fait de sa bonne connaissance tant économique que
culturelle de sa zone d’intervention, pour développer une clientèle au nom et pour le
compte de l’entreprise ou de la personne qui l’emploie40. Ainsi le faut-il pour
commercialiser son produit au Liban, et suite à la complication des droits et des
procédures, il est recommandé de trouver quelqu'un de fiable ayant ses contacts et
pouvant surmonter les obstacles administratifs plus facilement qu'un étranger. C’est
dire qu’il est généralement conseillé de passer par un intermédiaire local connaissant
le système, le pays, la langue et pouvant faciliter la commercialisation du produit. A
ce titre, une distinction a nettement été opérée entre la notion d’ « intermédiaire » et
celle de « conseil en commerce international ».41

13. Ainsi, l’éloignement accru entre les centres de production, de distribution et


de consommation ; le besoin de créer une clientèle ; le besoin d’assurer la vente de
marchandises fabriquées en grandes quantités grâce aux progrès sans cesse croissants
du machinisme, ont suscité la naissance ou la multiplication d’intermédiaires 42: les
représentants de commerce (VRP), les commissionnaires, les courtiers, les
franchiseurs, les concessionnaires de vente et les agents commerciaux43. Ceux-ci, sont

39
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, op. cit., nº 46.
40
Le recours aux agents commerciaux est notamment recommandé aux PME du fait de la souplesse
et des moindres coûts et risques qu’ils représentent en comparaison des autres solutions : C.-C.
GUILLOT, T. FORSTERLING, Le droit des agents commerciaux, des représentants salariés et des
concessionnaires en république fédérale d’Allemagne, Gaz. Pal., 1982, 2, 83.
41
Cette distinction se rapproche de celle rencontrée entre contrat conclu à l’occasion de la
conclusion d’un contrat et contrat conclu dans le cadre de la conclusion d’un contrat : N. DISSAUX,
op. cit., nº 362, 534.
42
Soit toux ceux qui participent de la distribution de biens ou de services d’un producteur à
l’utilisateur final : Ph. GRIGNON, Le fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du
commerce, préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, nº 1.
43
R. BALDI, Le droit de la distribution commerciale dans l’Europe Communautaire, Bruylant,
Bruxelles, 1988, p. 12 : La distinction entre ces différents intervenants n’est pas toujours aussi nette
dans l’ensemble des systèmes juridiques. Seuls les pays de Civil Law opèrent une classification
-16-

classés dans la catégorie des intermédiaires économiques et sont groupés selon qu’ils
agissent pour le compte d'autrui ou qu’ils agissent pour leur propre compte. La
première catégorie constitue la catégorie de référence des intermédiaires, lesquels
apparaissent comme les représentants de leurs commettants, dans le cadre des
transactions auxquelles ils prennent part44 : un intermédiaire est regardé comme
agissant au nom d'autrui lorsqu'il met en relation deux personnes qui contractent entre
elles (intermédiaire courtier) ou lorsqu'il contracte personnellement avec le tiers
(intermédiaire mandataire). En ce sens, s’il est évident qu’on s’en fait une idée
précise, celle-ci reste confusément exprimée, le terme « intermédiaire » désignant
tantôt un simple représentant de fait45, tantôt un participant à la conclusion d’un
contrat pour autrui46.

14. En revanche, les intermédiaires sont considérés comme agissant en leur


nom propre lorsqu'ils ne remplissent pas les conditions permettant de considérer qu'ils
agissent au nom d'autrui47. Ces intermédiaires sont alors regardés comme ayant
personnellement acquis et livré le bien ou comme ayant personnellement reçu ou
fourni les services ; à la différence des intermédiaires de référence, dont l'intervention

tranchée. Dans les pays de Common Law, il n’existe pas de réelle règlementation en la matière. On doit
reconnaître que ces classifications structurelles telles qu’elles existent en pays de Civil Law ne
recueillent pas l’assentiment unanime de tous les auteurs. Ainsi certains auteurs opèrent une sous
distinction au sein même de la technique de coopération et d’exportation et opposent les techniques
contractuelles d’implantation par la commercialisation incluant les représentants de commerce, les
courtiers et les agents commerciaux, des techniques contractuelles d’implantation par la production
regroupant quant à elles la licence de brevet, le franchisage industriel et la cotraitance : Ph. Le
TOURNEAU, Les techniques contractuelles d’implantation à l’étranger, Gaz. Pal, 1994, p. 3 et s.
Quant à MM P.-A. GOURION et G. PEYRARD, Droit du commerce international, LGDJ, 1994, p. 68
et s., ils proposent une classification différente : la technique dite de coopération ou d’exportation se
subdivise en vente par intermédiaires incluant notamment les courtiers, les commissionnaires et agents
commerciaux. En revanche, selon ces mêmes auteurs, relèvent de la vente en coopération, les
groupements d’exportateur réalisés sous forme d’association, les GIE et les sociétés commerciales. Au-
delà des classifications opérées par la doctrine, force de constater que l’œuvre créatrice de la pratique
est foisonnante et dépasse parfois le cadre rigide fixé par les auteurs.
44
E. CRUVELIER, Taxes sur le chiffre d'affaires, D., 2012, nº 260.
45
Cass. com., 24 mai 1994 et 13 juin 1995, LPA, 1996, nº 84, p. 37 et s.
46
Après avoir écrit que le porte-fort à la différence d’un simple intermédiaire, s’est engagé
personnellement à l’égard de l’un des contractants à apporter l’adhésion de tiers au contrat, M.
DARGONE-LABBE ne craint pas d’utiliser la notion d’intermédiaire pour désigner l’ensemble des
personnes ayant mission de participer directement à la formation d’un contrat : Y. DARGONE-
LABBE, Vices du consentement et manœuvres dolosives émanant du représentant de l’une des parties
au contrat, Rép. Defrénois, 1996, I, art. 36399, p. 1206 et s.
47
E. CRUVELIER, op. cit., nº 263.
-17-

est purement transparente, ces intermédiaires constituent des personnes opaques entre
leur commettant et le client avec lequel ils traitent. Ainsi, les intermédiaires opaques
sont considérés comme étant des « acheteurs-vendeurs » des biens ou des services
pour lesquels ils s'entremettent48. Ce qui a été approuvé par M. BLAISE qui a
considéré les intermédiaires, des personnes physiques ou morales qui s’insèrent dans
le circuit de distribution entre le fabricant et le consommateur, et qui sont des
commerçants indépendants qui achètent et revendent pour leur propre compte49.

15. L’intermédiaire en droit commercial a pris plusieurs formes tant au Liban


qu’en France, et a été reconnu sous plusieurs termes et selon différentes définitions.
Mais une figure plus connue dans ce secteur -objet de notre travail- occupe une place
historique prépondérante50 suite à l’étude des techniques de la distribution
internationale : c’est la représentation commerciale. Elle a gagné de l’importance à la
suite du mouvement de concentration des entreprises de grande production, et à la
suite de l’augmentation du nombre des produits fabriqués.

16. La représentation commerciale offre une grande importance dans la vie


commerciale contemporaine comme étant l’appréciable forme de l’entremise
commerciale51, et en particulier comme étant le Liban -pays de commerce et de
service- importateur. En d’autres termes, sur cette assise, la règle de libre concurrence
est de rigueur, où ce libéralisme, en effet, constitue le stimulant du progrès

48
Ainsi, s'agissant de commissionnaires à la vente, ils sont considérés comme ayant acquis les biens
de leurs commettants avant de les revendre à leurs clients : X. DELPECH, Régime des intermédiaires
en opérations de banque et en services de paiements, D, 2012, nº 256.
49
J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants, concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011,
nº 973, note 1.
50
C'est au XIXe siècle que les agents commerciaux ont commencé à façonner le visage juridique
que nous leur connaissons aujourd'hui et ceci sous le double aspect de la licéité et de la qualification de
leur activité : J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, nº 2.
51
« L’entremise porte sur la circulation des produits. Le commerce étant la circulation des
produits, qui réside dans la l’ensemble des actes qui font avancer le produit jusqu’à ce qu’il soit arrivé
au consommateur. Il y a incontestablement dans tout commerce un fait d’entremise. Seulement on a eu
le tort de ne pas préciser sur quoi porte cette entremise » : E. THALLER, Courte étude sur les actes de
commerce, Annales de droit commercial français, étranger et international, 1895, p. 177-203, spéc., nº
9, cité par N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº
91.
-18-

économique au Liban52. A l’intérieur de ce régime économique, la représentation


commerciale tient une place d’honneur.

17. Cependant, toute entreprise d’une certaine envergure, dans quelque branche
commerciale ou industrielle que ce soit, poste à travers le territoire, sur un nombre
plus ou moins grand de places, des représentants ayant mission de créer, d’entretenir
et d’accroître sa clientèle, de préparer ou de conclure pour elle des opérations. Les
firmes productrices étrangères gagnent alors à être représentées par un représentant
habile, qui, une fois habitué au marché de la production de la firme, essaye
d’augmenter au maximum ses profits en lui trouvant le plus grand nombre de marchés
aussi bien au Liban qu’ailleurs. C’est dire que le fait pour une personne d’agir par
substitution en replacement d’autrui est un phénomène universel et constant auquel
tout un chacun a un moment ou à un autre recouru53.

18. Exposons les articles cités dans les deux droits libanais et français pour
préciser la notion de chaque catégorie de personnes relevant de ce phénomène
d’intermédiation, et en particulier celle qui est le sujet de notre thèse : le représentant
commercial.

II. La représentation et la notion du représentant commercial

19. En droit romain, un autre aspect différent de celui revêtu actuellement pour
la représentation a été employé : c’est la formule de procuration par laquelle le
mandant exprimait sa volonté de constituer une autre personne comme son
représentant54. La procuration intégrait la notion de représentation. La conception de
la représentation, en droit romain, se caractérisait par deux traits : « elle était en

52
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 126.
53
La notion de représentation a dès lors interpellé les philosophes et les psychologues. De
nombreuses études ont été consacrées à ce thème et il nous est impossible içi de toutes les citer : C.
DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, op. cit., nº 3.
54
Le mandat, dans sa forme élaborée actuelle, était par exemple inconnu à Rome dont la position en
la matière est résumée par l'adage Alteri stipulari nemo potest : On ne peut stipuler en faveur d'un autre
: J.-L. HERZOG, Les agents commerciaux dans la Rome Antique, RTD com., 1965, p. 61.
-19-

premier lieu un acte à titre gratuit ; en second lieu, occasionnelle, elle consistait en
un service d’ami »55.

20. Plusieurs définitions spéciales56 ont été formulées qui renvoient au sens
classique définissant la représentation, comme étant l'objet d'une convention ou de la
loi qui règle l'effet par lequel une personne, le représentant, engage une personne dite
la personne représentée, au nom de laquelle la première a traité avec un tiers. Dans le
sens juridique, la représentation apparaît comme un mécanisme par lequel le
représentant -investi à ce titre d’un pouvoir conventionnel, légal ou judicaire-
accomplit, au nom et pour le compte du représenté, un acte juridique dont les effets se
produisent directement sur la tête de ce dernier57.

21. Dire qu’une personne (le représentant) en engage une autre (le représenté),
signifie deux choses : d’abord que la personne engage des effets juridiques, c'est dire
que l’on est en présence d’un acte du représentant et que la représentation ne
représente pas un fait mais un mécanisme juridique. Il n’y a représentation que si
l’intervenant collabore à ce qui est proprement juridique dans l’acte 58. C’est sur cette
distinction que repose toute la notion de représentation, car le représentant se
distingue de l’aide simple, précisément en droit romain, par cette circonstance que sa
coopération est de nature juridique. L’idée qui l’explique fait partie de la théorie
générale de l’acte juridique, car agir en représentation, c’est faire un acte au nom et
pour le compte d’autrui, en vertu d’un pouvoir.

55
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., nº 2.
56
M. Le FERME a considéré la représentation comme une profession qui consiste en la visite d'une
clientèle éventuelle ou acquise, à l'extérieur de l'entreprise, dans le but et au bénéfice de celle-ci, de
prendre ou provoquer des ordres ou commandes : H.-P. Le FERME, Représentation industrielle et
commerciale, 2e éd. Sirey, 1980, p. 3 ; Ainsi, M. le professeur DIDIER, a considéré que la
représentation se caractérise par le fait que les actes accomplis par une personne s’imputent de manière
dérogatoire à une autre que celle qui a agi : Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé, préf. Y.
LEQUETTE, LGDJ, 2000, nº 165 et s. ; A son tour, M. THIOYE a défini la représentation selon deux
axes : le premier issu de la conception réelle, où il l’a considérée comme le mécanisme par lequel une
personne agit par substitution, en remplaçant autrui ; le second issu de la conception fonctionnelle, où
la représentation ne désigne plus, ici, une opération matérielle, mais intervient plutôt dans
l’établissement d’un lien de droit, en tant que technique par laquelle le représentant se substitue au
représenté dans la passation d’un acte juridique : M. THIOYE, Droit des intermédiaires immobiliers,
2e éd., LexisNexis, 2012, nº 412 et s.
57
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 894.
58
Dans le même sens, Ph. DIDIER, op. cit., nº 167 : considère la représentation comme la
dissociation entre celui qui agit et celui qui supporte les effets juridiques de l’acte.
-20-

22. Ensuite, vu que ses effets ne l’affectent pas, mais vont être rattachés à une
autre personne, c'est dire que l’acte fait l’objet d’une imputation dérogatoire. Plus que
la représentation entendue comme un mécanisme d’imputation dérogatoire des effets
d’un acte juridique59, c’est donc la possibilité d’une relation tripartite qui, au fond,
distinguerait le mandat du louage. Le recours au concept de représentation ne serait
que le manteau technique de cette sorte de structure tridimensionnelle impliquée par
l’économie du contrat de mandat60.

Qu’en est-il de la représentation dans le domaine commercial en droit


libanais et français ?

23. La représentation commerciale s’est développée comme une composante


indispensable de tout essor économique et de toute expansion des activités
commerciales. Ceci dû notamment au développement des moyens de transport et de la
technologie d’internet61 qui ont entrainé un développement parallèle des moyens de
communication. En effet en matière de commerce, une concurrence fructueuse
suppose une rapidité d’action et un choix du moment opportun pour agir 62. C’est dire

59
M. STORCK, Essai sur le mécanisme de la représentation dans les actes juridiques, préf. D.
HUET-WEILLER, coll. BDP, LGDJ, t. 172, Paris, 1982, nº 44 et s., p. 40 et s.: imputation des effets
d’un acte juridique.
60
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 226.
61
L’émergence d’internet commence à s’imposer comme un véritable outil nécessaire dans une
politique de distribution et de contact avec la clientèle, permettant d’élargir la base de sa zone
d’intervention, et de toucher de nouveaux consommateurs : D. FERRIER, La distribution sur l’internet,
Cah. dr. entr., 2002, nº 12 et s.
62
Cet essor a certainement produit ses fruits en deux domaines : celui des spéculations et celui du
tourisme. D’une part, de nombreuses opérations portant sur des marchandises ont lieu à titre spéculatif,
à la lumière des prix internationaux. Les entreprises spécialisées ont leurs agents postes sur les marchés
principaux. Dans ce domaine, ce sont les moyens de communication qui sont le principal instrument de
travail, car en matière de spéculation, les opérations et transactions ont lieu sans besoin de déplacer la
marchandise. D’autre part, le tourisme a pris un tel développement vu que de très grosses entreprises
ont organisé dans la plupart des régions du monde, des agences qui assurent tous les services
nécessaires aux voyageurs, tels que les billets de voyage, les réservations dans les hôtels,
l’établissement de tout un programme d’agrément, etc… La concurrence, en ce domaine, repose entre
autres, sur les moyens de communication, étant donné que souvent les clients sont pressés, et n’aiment
avoir de rapports qu’avec une seule agence : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en
droit positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 13.
-21-

qu’une meilleure connaissance des marchés et leur bon contrôle sont assurés grâce à
la rapidité des communications.

24. La représentation n’est pas un simple travail qui peut être abordé par
n’importe quelle personne ayant « échoué » dans l’exercice d’un autre métier, comme
le dit M. Le FERME : « Il n’a rien réussi, il est maintenant représentant de
commerce »63. Car chaque domaine a besoin de son spécialiste et surtout dans le
domaine juridique où le commercial est une branche du droit privé. Nous pouvons
assimiler la représentation à la chirurgie médicale, où devant le développement des
maladies, la médecine progresse, et chaque cas nécessite alors une chirurgie adaptée ;
cas de la représentation commerciale qui est une branche spéciale de la représentation
en général, et face à la pluralité des situations et à l’évolution économique, le besoin
s’est fait jour du représentant commercial moyennant des connaissances
indispensables.

25. Ainsi, en droit privé positif français, la représentation est une institution
aujourd’hui particulièrement bien saisie. Selon CAPITANT, il y a représentation
« lorsqu’un acte juridique est accompli par une personne, pour le compte d’une
autre, dans les conditions telles que les effets se produisent directement et
immédiatement, sur la tête du représenté, comme si lui-même avant accompli
l’acte »64. Sa définition selon laquelle une personne, le représentant, est investie du
pouvoir de conclure un acte juridique dont les effets se produiront dans le patrimoine
d’une autre personne, le représenté, ne soulève plus guère de controverses. Ses
conditions et ses effets sont arrêtés. La typologie des cas de représentation,
conventionnelle, volontaire ou légale, est également classique, et la description
traditionnelle de l’évolution historique de l’institution, conçue par le code civil sur le
modèle du mandat avant que le droit moderne n’en voie l’archétype dans la
représentation des incapables, l’est tout autant65.

63
H.-P. Le FERME, op. cit., p. 4.
64
H. CAPITANT, Introduction à l’étude du droit, Paris, 3e éd., 1912, p. 365 : cité par N.
DISSAUX, op. cit. nº 380.
65
E. GAILLARD, La représentation et ses idéologies en droit privé français, Droits, 1987, p. 91 et
s. : « Ainsi perçue dans ses composantes idéologiques, la représentation apparaît beaucoup moins
paisible qu’on aurait pu le penser de prime à abord. Les individualistes acharnes, que n’effrayent par
-22-

26. Comme il est facile de le constater, la profession de représentant


commercial est fort ancienne, trouvant ses sources dans la Rome Antique66, voire
avant, ses traces et prémices dérivant du Code d’Hammourabi67. La représentation
commerciale a été définie par la doctrine comme l'activité qui consiste, dans un
premier temps, en une circulation à l'extérieur de l'entreprise pour prospecter,
rechercher la clientèle et se poursuit, dans un deuxième temps, par la négociation
d'une ou plusieurs affaires avec cette clientèle68.

27. En outre, la représentation étant la figure juridique par excellence de


l’entremise commerciale69. L’objet essentiel de cette institution est de faire naître par
l’intermédiaire du représentant, des droits et des obligations qui figureront
directement dans le patrimoine du représenté. Il peut s’agir soit d’une représentation
parfaite où le représentant intervient avec une contemplatio domini bien établie, c’est
dire au nom et pour le compte du représenté dans un système des transparences
totales ; soit d’une représentation imparfaite70 où le représentant intervient en son
nom, c’est dire proprio nomine, mais pour le compte du représenté dans un climat
d’opacité. On entend, par représentation commerciale, le mécanisme par lequel le
représentant confie le pouvoir à une autre personne afin d’agir en son nom et/ou pour
son compte à l’égard des tiers.

les phénomènes de supériorité, comme sans doute les marxistes, soucieux d’exalter la lutte des classes,
spécialement dans l’entreprises, verront dans certains de représentation un luxe inutile, sinon un «
artifice idéologique », tandis que d’autres, plus soucieux d’harmonie et de pax sociale, fut-ce au prix
de certaines concessions aux pouvoirs en place, y verront peut-être une merveilleuse technique
d’apaisement des conflits. Il suffit à cette place de constater que la représentation n’est assurément pas
une institution neutre, indifférente aux grands courants de pensée qui traverse notre droit ».
66
J.-L. HERZOG, Les agents commerciaux dans la Rome Antique, op. cit. p .61 et s.
67
J.-J. CLAMAGERANT, Du louage d’industrie, du mandat et de la commission en droit romain,
dans l’ancien droit français et dans le droit actuel, Paris 1856 : cité par F. FOURNIER, L’agence
commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, nº 2.
68
A. De THEUX, Le droit de la représentation commerciale, Etude comparative et critique du
statut des représentants salariés et des agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit
Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1, 1975, nº 68 ; J. GRIMALDI d'ESDRA, La mission du
VRP, Rép. trav., 1996, chron. p. 1 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants, Placiers), Rép.
com. 2007, Ch.1, parag.1.
69
Sur les aspects philosophiques de la représentation : Revue Française de Théorie Juridique, Paris,
PUF, 1987, nº 6.
70
V. infra nº 209 et s.
-23-

28. La situation géographique amenant les étrangers à investir au Liban a


favorisé la réalisation d’accords de représentation commerciale ; meilleure méthode
pour diffuser les produits commerciaux à l’étranger et s'introduire sur le marché
libanais à l'aide d'un agent intermédiaire local. Sur cette assise, les représentants
commerciaux suite à l’ importance de leurs activités de médiation, ont non seulement
facilité l’échange des marchandises produites dans les différentes contrées du globe,
mais en même temps et plus fondamentalement encore, rapproché les peuples, leurs
cultures, leurs civilisations, tout produit étant marqué du savoir-faire, de la science et
de la vision du monde de son producteur71. Ce fût et c’est toujours le rôle des
commerçants libanais qui devaient devenir des intermédiaires entre les fabricants ou
les distributeurs sur les marchés mondiaux d’une part, entre le consommateur du
marché libanais et des marchés des Etats de la région d’autre part72. A ce titre, les
représentants libanais et en particulier les commerçants sont d’une force économique
moindre face aux producteurs qui sont en majorité de grosses firmes étrangères. En
effet, il est normal que le commerçant libanais, considéré comme organe moteur et
dynamique de l’économie libanaise, soit protégé contre les agissements des firmes
étrangères dont le but principal -bien que légitime- est la recherche du maximum de
profit, quels qu’en soient les moyens73.

29. Mais comme le succès d’une marque lancée sur un marché se mesure par le
volume des ventes ainsi que par le volume des rentrées, et, comme les firmes
productrices ainsi que tout commerçant recherchent le plus grand intérêt pécuniaire
souvent au détriment de certaines règles de bonne conduite, une tendance a été
remarquée chez certaines firmes à changer continuellement de représentant, rien que
pour une augmentation minime des ventes74. Une telle pratique, en principe, n’est pas

71
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 3.
72
Les intermédiaires sont des personnes physiques ou morales qui s’insèrent dans le circuit de
distribution entre le fabricant et le consommateur, et qui sont des commerçants indépendants qui
achètent et revendent pour leur propre compte : J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants,
concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011, nº 973, note 1 ; N. DISSAUX, La qualification
d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº 66 et s.
73
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 126.
74
Ibid.
-24-

répréhensible, car le commerçant recherche, avant tout le profit. Elle devient


répréhensible lorsque la firme productrice, ayant accepté les conditions du
représentant, lui aurait retiré la représentation pour la donner à un autre, et ce, après
que le premier a déployé tous ces efforts pour faire connaître la marque. La firme
productrice aurait ainsi, par son fait, laissé le premier représentant supporter les pertes
par lui subies pour faire connaître la dite marque, dans l’espoir d’en recueillir le fruit
dans un proche avenir. En somme, elle l’aurait privé des fruits d’un investissement
assez sérieux. Elle aurait, en outre, bénéficié, sans contrepartie, desdits efforts, et,
enfin, aurait réussi à imposer ses conditions à un second représentant, à raison de la
marque déjà lancée, et des marchés déjà ouverts par le premier représentant.

30. C’est notamment pour éviter une telle pratique et dans le but d’assurer une
garantie de protection pour le représentant commercial, que le législateur libanais est
intervenu pour assurer une certaine sécurité à cette catégorie de personnes, qui en fait
constitue l’un des principaux éléments de l’économie libanaise. Cette sécurité a fait
l’objet de plusieurs transformations sur le plan des textes régissant la matière.

31. Dès 1807, l’article 74 du Code de commerce français inscrivait les courtiers
et les agents de change dans la catégorie plus vaste des « agents intermédiaires »75. Un
siècle et demi plus tard, un arrêté du 5 novembre 1946 codifiait les règles applicables
aux « intermédiaires du commerce »76. Entre ces deux dates, le Code de commerce
libanais promulgué par le décret-loi N. 304 du 24 décembre 1942 établissait les
principes de la concurrence et envisageait certaines formes de l’entremise
commerciale, notamment le mandat commercial77, le courtage78 et la commission79.

75
Ce texte fut abrogé par l’ordonnance du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du Code
de commerce (Ordonnance nº 2000-912).
76
D. 1946, L., 453. Ce texte n’est plus en vigueur. Il est annulé par le Conseil d’Etat : CE, 30 avril
1948, JCP, 1948, II, 4401, note J. HEMARD.
77
Art. 272 C. com. lib.: « Le mandat est commercial quand il est relatif à des opérations
commerciales.
Il prend plus spécialement le nom de commission et est régi par les dispositions du chapitre suivant,
lorsque le mandataire doit agir en son propre nom ou sous un nom social pour le compte de son
commettant.
Quand le mandataire doit agir au nom du mandant, ses droit et ses obligations sont déterminés par
le livre VIII de la deuxième partie du code des obligations ».
-25-

Le code lui-même prévoyait indirectement la représentation commerciale dans


l’article 27880.

32. Quelques années plus tard, et pour les raisons ci-dessus, le législateur
libanais a perçu la nécessité d’une règlementation qui organiserait le travail du
représentant commercial au Liban, déterminerait les éléments caractéristiques d’une
telle profession, et lui apporterait une certaine protection. Cette dernière se justifie
d’une manière indirecte par le fait que les dispositions du code pénal relatives à la
concurrence illicite ne suffisent pas à assurer une protection exemplaire81. C’est le
décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967, modifié par la loi N. 39 du 6 février 1975 et le
décret-loi N. 73/83 du 9 septembre 1983, qui a réglé le régime juridique de la
représentation commerciale en identifiant les personnes aptes à bénéficier du statut de
représentant commercial. Il a prévu dans son article premier : « Le représentant
commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et indépendante, et
sans être lié par un contrat de louage de services, entreprend des négociations pour
conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, et

78
Art. 291 C. com. lib.: « Le courtage est un contrat par lequel une partie dite courtier, est
chargée moyennant une rémunération, soit d’indiquer à l’autre partie l’occasion de conclure une
convention, soit de lui servir d’intermédiaire pour la négociation d’un contrat.
Les règles du mandat sont, d’une manière générale, applicables au courtage ».
79
Art. 279 C. com. lib. : « Le commissionnaire, est celui qui se charge de conclure en son propre
nom, mais pour le compte de son mandant, des achats, des ventes et d’autres opérations commerciales
moyennant une commission ou une provision.
Les règles de mandat sont applicables au contrat de commission, sous réserve des dispositions du
présent chapitre ».
En revanche, en droit français nous trouvons dans le code de commerce français, l’article L.132-1
al.1 : « Le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social pour le compte
d'un commettant ».
80
Art. 278 C. com. lib. : « Suivant l’état de subordination ou d’indépendance résultant des
conventions intervenue, les représentants de commerce doivent être considérés tantôt comme des
préposes, tantôt comme de simples mandataires.
Ils ont toujours droit toutefois, en cas de rupture même non abusive, du contrat, à l’observation du
délai de préavis d’usage, su du moins la représentation commerciale est leur unique profession.
Lorsqu’un mandataire représentant pour plusieurs maisons commerciales, a des locaux, un
personnel, une organisation et des frais généraux, c’est possible de le considérer comme un véritable
propriétaire d’un projet de représentation commerciale, il devient personnellement commerçant ».
81
La répression de la concurrence illicite et l’incrimination de son auteur sont soumises à des
conditions très rigoureuses relativement à l’imputabilité et à l’intention de l’auteur, de sorte que,
souvent, il est très difficile d’en apporter la preuve certaine qui autorise d’infliger la répression. Par
conséquent, de nombreux actes, en eux nuisibles aux commerçants et à l’économie, ne tombent pas
sous le coup de la loi pénale, ni même celui de la loi civile : v. infra nº 507 et s.
-26-

le cas échéant, se livre à ces activités au nom des producteurs ou des commerçants et
pour leur compte.

Est aussi considéré comme représentant commercial, le commerçant qui


entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un
contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ».

33. Ce décret-loi a pris en effet comme modèle l’alinéa premier du décret N.


58-1345 du 23 décembre 1958, adopté en France pour protéger la catégorie des agents
commerciaux qui a prévu ce qui suit : « l’agent commercial est le mandataire qui, à
titre de profession habituelle et indépendante, sans être lié par un contrat de louage
de services, négocie et éventuellement conclut des achats, des ventes, des locations ou
des prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels ou
de commerçants ». Complété par différents textes, pour aboutir à une définition plus
précise à l’agent commercial, la dernière en date étant la loi 91-593 du 25 juin 199182
et notamment son article premier devenu l’actuel article L. 134-1 du code de
commerce : « l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession
indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon
permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente,
d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de
producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut
être une personne physique ou une personne morale ».

34. Approche appréciative : La France étant le parrain du Liban83, elle lui a


emprunté d’une manière non exclusive84 la technique et le contenu de son code

82
Modifié par le décret (n° 92-506) du 10 juin 1992, relatifs aux agents commerciaux, JORF n° 135
du 12 juin 1992, p. 7719.
83
Accompagnement peu après la première guerre mondiale en 1920 qui perdure au niveau culturels,
académiques, publiques, littéraires, scientifiques, sociales, juridiques… Soulignons dans ce dernier cas,
que l’on trouve une grande influence du droit français sur le droit libanais, puisque sa constitution
l’était. C’est avant son indépendance en 1943, se trouvant encore sous le mandat français, que fut
élaboré le brouillon de la constitution libanaise en 1926, devenu par la suite la constitution de la
république. Ce brouillon a été clairement inspiré de l’esprit de la troisième république française.
84
Le Code libanais a puisé aussi dans d'autres sources : conventions internationales, usages et autres
coutumes s'adaptant avec les particularités du milieu libanais. En réalité, l'emprunt n'est plus exclusif,
-27-

commercial85. Le code commercial libanais n'étant donc pas un « produit libanais »86,
d’où l’affirmation que la définition du représentant commercial libanais était inspirée
du droit français, car le décret-loi N. 34/67, à première vue, paraît être ressembler à
son homologue français. Il convient de souligner que malgré l’option de la langue
française, le style du Code libanais s’est distingué du style du Code français. Ainsi,
nous trouvons dans le Code libanais, des images, des explications et des « clauses
interprétatives » qui n’ont pas leurs équivalents dans le Code français. A l'instar du
Code français de 1807, le Code de commerce libanais constitue une législation
d'exception en ce sens qu'il régit seulement les actes de commerce et les
commerçants87.

35. Ce qui a été justifié postérieurement avec le décret-loi N. 34/67 par MM.
les professeurs FABIA et SAFA qui aient pensé que les deux constructions juridiques
n’étaient pas quasiment calqués l’une sur l’autre: « Contrairement à ce qui a été écrit,
le décret n'est pas un simple démarquage de textes législatifs venus d'autres pays.
Notamment, la protection qu'avait instituée le droit français était beaucoup plus
limitée, quant aux personnes et quant aux moyens, parce que dans bien des branches

le droit français est sous l’influence du droit communautaire (Selon J. DELORS président français de la
commission européenne cité par P. LEGER in l'Euro juge, Atelier nº 6, Quarantaine de la magistrature
ENM, 1999, 80% de la législation française serait d'origine communautaire) qui a commencé à
conquérir le Liban en vertu du Contrat d'Association de 2002 conclu avec l'Union Européenne (Cf. loi
nº 474, 12 déc. 2002, JO nº 68, 17 déc. 2002 p. 7389 et s.) et l'accord de libre-échange de 2006 (V. L nº
732, 15 mai 2006, J.O nº 26, 25 mai 2006, p. 2849 et s.) ; Les dispositions de la loi libanaise du 4
février 2005 sur la protection du consommateur et celle plus récente de la loi du 8 décembre 2006 sur le
dumping (J.O nº 60, 21 déc. 2006, p. 6664 et s.) en sont révélateurs.
85
Le Code de commerce libanais en 1850 qui n'était que la reproduction pure et simple du Code de
commerce français de 1807 d'avant la loi de 1867 sur les sociétés par actions. Ce Code a régi le Liban
pendant l'empire ottoman et jusqu'à la promulgation du Code de commerce libanais en vertu du décret
nº 304 du 24 décembre 1942 (J.O Lib. nº 4075 du 7 avril 1943). En effet, le Code de commerce libanais
est resté fidèle à la forme du Code de commerce français elle-même puisée , bien que maladroitement,
cette modélisation fut facilitée par la « réception » dix ans auparavant du Code napoléonien de 1804
débouchant alors sur la forme et la promulgation du Code des obligations et des contrats libanais en
date du 9 mars 1932 .
86
Le texte original du Code de Commerce libanais a été rédigé en langue française, en partie par G.
COHENDI (professeur à la faculté de droit de Lyon) et révisé par J. CHEVALIIER (directeur de
l'Ecole de droit de Beyrouth de 1946 à 1955), et porta les empreintes du modèle français : v. J.
DUCRUET, Université Saint-Joseph de Beyrouth, faculté de droit et des sciences politiques et
économiques, Livre d'or 1913-1993, p. 24, cité par F. NAMMOUR, Code de commerce: L’expérience
Libanaise, Colloque sur le bicentenaire du Code de commerce français organisé par le Laboratoire de
droit privé de la faculté de droit de l'Université Montpellier I, mai 2007.
87
Ch. SAFA, Droit commercial, maritime et aérien, in Le droit libanais, les systèmes de droit
contemporain XV, Institut de Droit comparé de Paris et de Lyon, LGDJ, 1963, t. 1, p. 285, nº 6.
-28-

les agents commerciaux en France ont depuis longtemps renoncé à se faire une
concurrence désastreuse et ont élaboré des contrats-types sauvegardant leurs
intérêts, qu'ils s'entendent pour imposer à leurs représentés. Cette voie paraissant
impossible au Liban, l'intervention du législateur y fut plus étendue, plus détaillée, et
présente à ce point de vue comme à d'autres une originalité incontestable. Toutefois,
il peut être établi qu'elle ne dépasse pas les limites de l'équité et ne heurte aucun
principe considéré comme d'ordre public international »88.

36. A la lecture de l’article premier du décret-loi N. 34/67 et de l’article L. 134-


1 C. com., nous constatons, à première vue, que le représentant commercial libanais
ressemble à l’agent commercial français puisque les deux rentrent presque dans la
même définition mais en termes différents. C’est dire que si nous cherchons juste le
vocable « représentant » en droit français, nous tombons sur un autre type
d’intermédiaires, chargés de prospecter la clientèle pour le compte de leur employeur,
étant étendu que ces représentants était à l’époque des salariés89. En d’autres termes,
l’appellation d’agent commercial en France, trouve néanmoins sa justification dans le
fait que la loi prévoit une catégorie d’intermédiaires salariés régis par le Code du
travail, et qui effectuent des opérations proches de celles des agents commerciaux : ils
sont appelés représentants de commerce ; il s’agit des voyageurs, représentants et
placiers appelés couramment VRP dont le statut particulier est incorporé au Code du
travail dans les articles L. 7311-3 et s90.

37. Cette dernière catégorie de représentants statuaires ne suffisait pas à


couvrir l’ensemble des opérations que l’on aurait pu souhaiter voir exécuter par un tel
intermédiaire91; leur statut de salarié ne rendait pas les VRP suffisamment

88
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, nº 2.
89
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, nº 573, 574.
90
Art. L. 7311-3 c. trav. : « Est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui :
1° Travaille pour le compte d'un ou plusieurs employeurs ;
2° Exerce en fait d'une façon exclusive et constante une profession de représentant ;
3° Ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ;
4° Est liée à l'employeur par des engagements déterminant : La nature des prestations de services
ou des marchandises offertes à la vente ou à l'achat ; La région dans laquelle il exerce son activité ou
les catégories de clients qu'il est chargé de visiter ; Le taux des rémunérations ».
91
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, nº 7.
-29-

indépendants, et restreignait le spectre de leur activité. C’est pour pouvoir remplir


toutes exigences et ces attentes qu’émergea alors la figure de l’agent commercial92.
En revanche, le droit libanais ne prévoit pas un statut particulier pour cette catégorie
de personnes, vu que le représentant commercial n’est pas un employé régi par le
Code du travail, puisque l’article premier de décret-loi N. 34 lui attribue expressément
la qualité de mandataire. Il nous paraît pertinent de distinguer le représentant de
commerce (VRP) du représentant commercial au sens du décret-loi N. 34/67, vu que
le premier est régi par le Code du travail. Sur ce point, les droits libanais et français ne
sont pas similaires.

38. Cependant, en droit français n’existe pas une définition tacite du


représentant commercial mais, simplement, plusieurs articles législatifs qui entourent
la « famille représentative » dont l’agent commercial est le membre important. De là,
chaque catégorie d’intermédiaire bénéficie d’un article propre prévu par la loi,
notamment l’article L.132-1 al.1 définissant le commissionnaire93 et l’article L. 146-1
définissant le gérant-mandataire94. A ce titre, se trouve la grande distinction entre le
droit français et le droit libanais dans lequel un décret-loi fut réservé au représentant
commercial. Sur cette assise, nous remarquons que le droit libanais est allé plus loin
que le droit français en étendant sa protection pour réunir d’autres personnes que le
représentant commercial -mandataire-95 qualifiées de « représentant commercial »
après réunion de certaines conditions.

92
D. DESURVIRE, La distribution commerciale en France et dans la communauté européenne,
LPA, 1989, nº 43.
93
Art. L.132-1 al.1 C. com.: « Le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un
nom social pour le compte d'un commettant ».
94
Art. L. 146-1 C. com. : « Les personnes physiques ou morales qui gèrent un fonds de commerce
ou un fonds artisanal, moyennant le versement d'une commission proportionnelle au chiffre d'affaires,
sont qualifiées de "gérants-mandataires" lorsque le contrat conclu avec le mandant, pour le compte
duquel, le cas échéant dans le cadre d'un réseau, elles gèrent ce fonds, qui en reste propriétaire et
supporte les risques liés à son exploitation, leur fixe une mission, en leur laissant toute latitude, dans le
cadre ainsi tracé, de déterminer leurs conditions de travail, d'embaucher du personnel et de se
substituer des remplaçants dans leur activité à leurs frais et sous leur entière responsabilité ».
95
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-30-

39. A ce titre un tableau comparatif peut être résumé :

Droit Libanais Droit Français

Art. 279 C. com. : le commissionnaire, Art. L. 132-1 al. 1 C. com. : Le


est celui qui se charge de conclure en son commissionnaire est celui qui agit en son
propre nom, mais pour le compte de son propre nom ou sous un nom social pour le
mandant, des achats, des ventes et d’autres compte d'un commettant.
opérations commerciales moyennant une
commission ou une provision.
Les règles de mandat sont applicables
au contrat de commission, sous réserve des
dispositions du présent chapitre.

Art. 1 du décret-loi N. 34/67 de 5 aout Art. L. 134-1 al. 1 C. com. : L'agent


1967 : Le représentant commercial est le commercial est un mandataire qui, à titre
mandataire qui, par sa profession habituelle de profession indépendante, sans être lié
et indépendante, et sans être lié par un par un contrat de louage de services, est
contrat de louage de services, entreprend chargé, de façon permanente, de négocier
des négociations pour conclure des et, éventuellement, de conclure des
opérations, de vente, d’achat, de location contrats de vente, d'achat, de location ou
ou de prestation de services, et le cas de prestation de services, au nom et pour
échéant, se livre à ces activités au nom des le compte de producteurs, d'industriels, de
producteurs ou des commerçants et pour commerçants ou d'autres agents
leur compte. commerciaux. Il peut être une personne
Est aussi considéré comme représentant physique ou une personne morale.
commercial, le commerçant qui entreprend,
pour son propre compte de vendre ce qu’il
aura acheté en vertu d’un contrat lui
donnant la qualité de représentant ou de
distributeur exclusif unique.

Art. 278 C. com. : Suivant l’état de Art. L. 7311-3 C. trav. : « Est


subordination ou d’indépendance résultant voyageur, représentant ou placier, toute
des conventions intervenue, les personne qui :
représentants de commerce doivent être 1° Travaille pour le compte d'un ou
considérés tantôt comme des préposés, plusieurs employeurs ; 2° Exerce en fait
tantôt comme de simples mandataires. d'une façon exclusive et constante une
profession de représentant ; 3° Ne fait
aucune opération commerciale pour son
compte personnel ; 4° Est liée à
l'employeur par des engagements
déterminant: a) La nature des prestations
de services ou des marchandises offertes à
la vente ou à l'achat ; b) La région dans
laquelle il exerce son activité ou les
catégories de clients qu'il est chargé de
visiter ; c) Le taux des rémunérations.
-31-

40. L’image de l’agent commercial en France sera celle du représentant


commercial au Liban. En fait, le décret-loi libanais N. 34/67 précède le décret-loi N.
58-1345 du 23 décembre 1958, mais en effet, le dépasse en accordant la protection à
d’autres catégories de personnes qui sont visées en droit français. De là, nous voyons
l’importance de ce décret par rapport au droit français, et par conséquent, l’intérêt de
notre sujet sur le statut du représentant commercial en droit libanais. Celui-ci part du
modèle français de protection mais avec une intention de dépassement. Pour se faire,
nous allons prendre le droit libanais comme point de départ de notre recherche, sans
perdre de vue le droit français. A partir de là, chaque fois que nous aborderons le
terme de « représentant commercial » au sens du décret-loi N. 34/67- celui-ci sera
mentionné en italique.

41. Cependant le modèle de protection a été vérifié par le législateur dans le


décret-loi sous trois niveaux. En premier lieu, par l’accord d’une exclusivité
opposable aux tiers, une fois celle-ci publiée par le représentant par voie d’inscription
au registre du commerce96. En second lieu, par la reconnaissance expresse du
caractère d’intérêt commun, et par le bénéfice d’une indemnité prévue chaque fois
qu’il y a rupture du contrat de représentation commerciale, même non abusive, sauf
faute de sa part ou motif légitime97. En troisième lieu, par la détermination des
tribunaux saisis devant lesquels d’éventuels litiges pourraient être soumis pour assurer

96
Al. 3 de l’art. 2 du décret-loi nº 34/67 : « La clause de représentation exclusive n’est opposable à
l’égard des tiers que si elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre
du commerce ».
97
Art. 4 du décret-loi nº 34/67 : « Le contrat de représentation commerciale est considéré conclu
dans l’intérêt commun des parties contractantes.
Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre motif légitime,
permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité équivalente au
dommage subi et au gain manqué.
Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par l’arrivée
de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité évaluée par les
tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la marque de son
mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès,
le refus de son mandant de renouveler le contrat de représentation ».
-32-

une meilleure application de la loi98, vu la multitude et la complexité des privilèges


accordés aux étrangers.

42. Ce qui se traduit par une préoccupation du législateur d’assurer au


représentant commercial un avantage non négligeable99 et aux parties une justice de
plus en plus équitable loin de toute discrimination dans son lieu d’exercice d’activité
au regard du droit de son pays100. C’est comme si le législateur, dans ce cas particulier
et spécial au droit libanais, avait adopté le critère de nationalité pour la détermination
du tribunal internationalement compétent101. Par conséquent, nous remarquons que le
législateur libanais a indirectement déclaré qu’en matière de représentation
commerciale, les tribunaux libanais seraient compétents lorsqu’un libanais est partie
au litige et de manière générale lors d’un litige subi par un représentant commercial
notamment libanais exerçant ses activités au Liban102.

43. Ces approches sont déduites des dispositions de l’article premier du décret-
loi N. 34/67, où le législateur impose que « le représentant commercial personne
physique doit être libanais et doit avoir un établissement commercial au Liban ; ainsi
que pour les représentants commerciaux personnes moraux que ce soient des sociétés
de personnes ou des sociétés à responsabilité limitée : Il faut que la majorité des
associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et
que celui qui a le droit de signer soit libanais. De même pour les sociétés anonymes :
Il faut que la majorité du capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des
membres du conseil d’administration ainsi que le directeur général ou la personne
déléguée par le président du conseil d’administration ou par le directeur général
pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».

98
Art. 5 du décret-loi nº 34/67 : « Nonobstant toute clause contraire, les tribunaux du lieu où le
représentant commercial exerce son activité sont compétents pour trancher les litiges naissant du
contrat de représentation commerciale ».
99
Cet avantage est concrétisé par le déplacement effectué par l’autre partie devant des juridictions
étrangères aux textes inconnus.
100
TI Beyrouth, Ch. com., décision nº 33/697, 15 déc. 1971, Rec. Hatem, vol. 113, p. 18 à 20.
101
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. de Lib.,
1972, p. 239.
102
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 1, n° 6.
-33-

44. Sur ce point précis, nous nous contenterons de ne pas entrer plus avant dans
le développement de cette question. Cette dernière en effet ne fait pas partie de notre
étude vu qu’elle ressort du droit international privé.

III. Les difficultés rencontrées

45. L’objet de notre étude est le rapprochement de deux systèmes juridiques,


source des difficultés classiques rencontrées. Parmi ces difficultés, l’une, primordiale,
était celle de la recherche d’une méthode convenable à retenir pour le rapprochement
des notions étudiées dans les deux droits et leur traduction. Mais la difficulté
principale était celle de maitriser les deux droits libanais et français.

46. Cependant, vu que les lois adoptées en droit libanais sont restées
inchangées, elles sont non seulement d'inspiration française, mais parfois rédigées en
français103. C’est le cas de la jurisprudence, où fréquemment des décisions -alors que
l’arabe est la langue officielle- contiennent des passages de référence en français,
voire tirés d'ouvrage français104. C’est dire que le droit français a servi de base parfois
à la jurisprudence libanaise qui continue à prendre en considération. Il demeure la
source du droit libanais quand se présentent de nouveaux problèmes ou de nouveaux
litiges ; les juges libanais alors se référant à la jurisprudence française y trouvant
l’inspiration pour une solution105.

103
Par exemple, le Code de procédure civile libanais de 1933 est rédigé en français. Bien que le
Code de procédure civile ait été publié pour la première fois en arabe en 1983, l'expérience
jurisprudentielle et législative libanaise s'est largement inspirée du nouveau Code de procédure civile
français.
104
En droit commercial, le juge libanais pourra se référer à une jurisprudence antérieure soit, en
dehors ou contrairement à une telle jurisprudence, apporter une nouvelle solution fondée sur des
considérations tirées de l'équité et de la loyauté commerciale (Art. 6 C. com. lib). Cette disposition
consacre certes la prééminence de la loi comme source du droit commercial, mais elle consacre
également le courant doctrinal français de l'époque hostile à la méthode d'interprétation qui n'acceptait
d'autre fondement que la loi écrite excluant les précédents ou autorités, les usages non consacrés par la
loi, le sentiment de l'équité, l'idée de l'utilité générale (Art. 371 C.O.C).
105
Dans le même sens l'article 3 du Code de commerce libanais aux termes duquel : « A défaut de
toute disposition légale applicable, le juge pourra s'inspirer tant des précédents jurisprudentiels que
des exigences de l'équité et de la loyauté commerciale ».
-34-

47. Des divergences linguistiques et donc juridiques peuvent résulter entre les
textes français et arabes, dans ce cas, le texte français, considéré comme texte original
fera foi, sous condition de respecter l’intention du législateur libanais. Ce respect sera
traduit par une référence prudente et non aveugle au droit français, surtout lorsqu’il
s’agit de dispositions envisagées à la lumière des circonstances socio-économiques et
politiques pré-décrites. Image rencontrée souvent dans notre travail, vu la faiblesse de
références en droit libanais face à la richesse française. Ce qui nous a causé des
difficultés pour les démonstrations et les développements des sujets abordés.

48. En effet, au cours de notre étude, nous allons trouver beaucoup de


références françaises sur les solutions prises par la jurisprudence libanaise. Raison
pour laquelle, il était utile de clarifier l’ambigüité d’un mélange entre références
libanaises et françaises par le recours à l’origine des relations franco-libanaises,
surtout que notre recherche se focalise sur le droit commercial comparatif. En
revanche, au cas où les jurisprudences et les références relèvent purement du droit
libanais, une traduction personnelle s’est orientée d’une approche du style arabe au
style français.

IV. La problématique et l’annonce du plan

49. Dans une recherche d’intelligence des règles de droit, des divergences de
forme en droit libanais par rapport au droit français apparaissent dans le domaine de la
représentation en matière commerciale. Ces divergences permettent au droit libanais
de s’inspirer de formes différentes pour résoudre ses problèmes juridiques complexes.
L’idée globale du décret-loi N. 34/67 ne désigne pas stricto sensu l’intermédiaire,
mais nous pousse à vérifier lequel mérite la protection dudit décret-loi. En d’autres
termes, le statut protecteur propre au représentant commercial s’applique-t-il à
d’autres agents commerciaux que le décret-loi ignorait ? Qu’en est-il des
caractéristiques de la protection du droit libanais issue du décret-loi N. 34/67 à l’égard
des autres intermédiaires de commerce ?

50. Pour pouvoir répondre à ces questions, il a fallu mettre en parallèle les deux
droits libanais et français afin de voir comment chaque droit résout la même situation
-35-

problématique et à défaut la solution propre à une situation unique. Nous allons suivre
une démarche classique consistant à rapprocher les notions de représentation
commerciale dans les deux pays. Ceci nécessite l’identification des éléments de
qualification pour chaque catégorie de personnes, afin de bénéficier des dispositions
du décret-loi N. 34/67. Il a fallu aussi reconnaître en quoi la notion du représentant
commercial dans les relations contractuelles pouvait être comprise dans un sens
suffisamment précis pour dépasser les paradoxes qu’elle soulève a priori ; et partant,
lui conférer une cohérence de nature à en faire le substrat d’une catégorie juridique106.
Comme le remarquait GENY, « pour qu’un phénomène sorte du chaos de la vie
sociale et obtienne les sanctions précises du droit, il faut, avant tout, qu’il soit
caractérisé par des traits, qui le mettent à part et l’érigent en institution
juridique »107.

51. Une fois les éléments de qualification du représentant commercial


identifiés, une certaine protection accordée au représentant libanais implique la
production d’effets de droit déterminés. C’est lors de la conclusion d’un contrat de
représentation commerciale, que des conséquences découlent entre les parties et se
produisent à l’égard des tiers.

52. Suivant ces approches, nous divisons notre étude en deux parties : la
première consistant à vérifier la qualification alternative du représentant commercial
au sens du décret-loi N. 34/67. Dans une seconde, nous relèverons les effets de la
protection du représentant commercial au sens dudit décret-loi.

106
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 46.
107
F. GENY, Science et technique en droit privé positif, Nouvelle contribution à la critique de la
méthode juridique, 3 partie: Elaboration technique du droit positif, Paris, Sirey, 1921, ch. 5, p. 167 et
s. :spéc. Sur le rôle des catégories réelles dans la technique du droit : cité par N. DISSAUX, ibid.
PREMIÈRE PARTIE

LA QUALIFICATION ALTERNATIVE
DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DÉCRET-LOI N. 34/67
-37-

53. La représentation commerciale est une des formes de l’entremise


commerciale108, tel que le mandat, la commission, le courtage : elle prend différentes
formes à la lumière des données de l’activité économique née de l’ « intermédiation »
et qui s’identifie à une opération très générale d’entremise entre deux personnes dans
la circulation des produits et des services109. La dépendance de la forme de
l’entremise par rapport au secteur économique a été bien mise en relief par M. De
GRANRUT, rapporteur général au congrès d’Arnhem de l’Union Internationale des
Avocats110, qui s’est exprimé en ces termes :

« La complexité de la vie économique, les impératifs fiscaux, la non-adaptation


des notions juridiques traditionnelles à ces notions font apparaître que le mandat ou
la vente existe rarement à l’état pur et qu’au surplus, les parties, pour des raisons
externes, sont amenées à qualifier leurs relations contractuelles d’une façon inexacte.

108
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; CA
Versailles, 30 juin 2005, n° 02VE00459 : l’existence des missions de prospection ou d'assistance
technique et commerciale qui devaient donner lieu à des documents écrits, faisant état des analyses,
démarches ou études qu'aurait effectuées pour le compte de la redevable les sociétés mandatées par
elle, la société G. MARTINOT justifie la réalité d'une « entremise commerciale » effectuée par la
société Sicopar, entremise ayant permis l'obtention des marchés en contrepartie d'une commission et
qui, en raison de son caractère immatériel, n'avait pas nécessairement à donner lieu à l'établissement
d'études techniques ou de rapports d'exécution ; CA Paris, 2e Ch., 25 mars 1997, n° 95PA01501 : si
l'intéressé exerçait une activité d’« entremise commerciale » auprès d'une clientèle majoritairement
italienne, c'était pour le compte de la société Organisation Glorig ; CA Paris, 2e Ch., 27 sept. 2006, n°
04PA00566 : Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société François Sanchez et Associés a
pour objet social le conseil en recrutement de cadres et en ressources humaines ; que, comme l'indique
le ministre défendeur, elle est chargée, sur demande de sociétés françaises ou étrangères et en qualité
d'intermédiaire, de mettre en relation l'employeur et l'employé potentiels, après étude préalable et
travaux de recherche, notamment dans le secteur bancaire, des assurances, de l'industrie
agroalimentaire et du bâtiment ; qu'elle est rémunérée par les employeurs, dont elle doit être regardée
comme étant le mandataire, selon un pourcentage de la rémunération du salarié recherché ; qu'une telle
activité doit être qualifiée d'activité d’entremise, par nature commerciale, sans qu'il y ait lieu de
rechercher si cette activité pouvait par ailleurs être considérée comme commerciale en raison de
l'importance des moyens mis en œuvre ou de la spéculation sur le travail d'autrui.
109
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
2007, n° 46 et s.
110
Congrès conclut en Sept. 1965 dont le thème était « La représentation commerciale
internationale » où le rapporteur général M. Bernard De GRANRUT avait adressé aux juristes un
questionnaire très détaillé sur les différentes formes de la représentation et de la concession
commerciale en sept points : historique, définition, différentes catégories de la représentation, la
concession, le contentieux, droit international privé, la représentation et le droit des ententes. Et les
réponses à ce questionnaire étaient la base pour établir le rapport général en question. Dans ce même
sens, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 8.
-38-

En abandonnant le critère purement juridique, on peut alors constater que la


représentation commerciale couvre une réalité économique qui est la vente par un
intermédiaire contrôlé. Ce contrôle pourra être la subordination totale du
représentant salarié, dont la personnalité disparaît totalement derrière celle du
mandant, à la liberté quasi-totale du concessionnaire astreint cependant à respecter
des prix, des quantités, un secteur et souvent une politique commerciale.

C’est donc l’examen des conditions juridiques dans lesquelles le producteur peut
diriger son activité commerciale, même en dehors de son entreprise, qui doivent être
définies, et c’est en définitive l’existence d’un mandat plus ou moins étroit que nous
allons découvrir dans ces différentes catégories qui existent rarement en droit dans
les différentes législations, mais qui existent en fait, dans la plupart des pays »111.

54. Le représentant commercial, en tant qu’intermédiaire du commerce, obéit


aux règles du droit commercial, à celles du droit civil et aux autres règles régissant les
différentes formes de représentation. Cependant, il n’est pas le seul intermédiaire,
étant donné qu’il partage cette qualité avec les diverses catégories de personnes visées
aux articles 254 et suivants du Code de commerce libanais, ainsi qu’avec les
personnes qui obéissent aux règles prévues par le Code du travail. Selon l’article
premier du décret-loi N. 34/67, « le représentant commercial, est le mandataire
qui… », d’où comme première conséquence, le représentant commercial n’est pas un
employé régi par le Code du travail, étant donné que cet article premier lui attribue
expressément la qualité de mandataire et dans la mesure où on distingue
traditionnellement le mandataire du salarié. Par ailleurs, si le représentant a la qualité
de mandataire, tout mandataire intermédiaire du commerce n’est pas pour autant un
représentant commercial régi par les dispositions du décret-loi N. 34/67112.

55. Ainsi, le législateur français a tenté d’englober les mandataires


indépendants et les voyageurs, représentants et placiers (VRP.), à l’époque
« représentants salariés », sous un même régime, aux termes de la loi du 18 juillet
1937 dont est issu aujourd’hui l’article L. 7311-3 et suivants du Code du travail. Cette

111
V. le rapport général précité, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 8.
112
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 9.
-39-

tentative de fusion des professions a avorté suite à l’hostilité des agents


commerciaux ; elle fait apparaître à ce stade les premières velléités de réaliser un
statut spécifique des agents commerciaux. Les mandataires indépendants, qualifiés
alors de « représentants indépendants », voulurent échapper au risque de rattachement
de leur activité à un statut de salarié. Leur désignation fut, dès lors, celle d’agents
commerciaux, ce qui permettait de les démarquer des VRP113. Au Liban, la loi ne
prévoit pas un statut particulier pour ces personnes114, le seul critère pris en
considération étant la nature des rapports existant entre les représentants et les
représentés. En revenant aux dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67,
nous constatons que le législateur libanais donne une définition du représentant
commercial mandataire dans son premier alinéa ; dans le second, il entend étendre
l’application de ladite loi à d’autres catégories de personnes. Par conséquent, le
décret-loi N. 34 ne s’applique pas uniquement aux représentants commerciaux
mandataires, comme c’est le cas en France où chaque catégorie de représentant exige
un article spécial ; il s’applique aussi à d’autres personnes assimilées aux
représentants mandataires dans un souci de justice et de protection115.

56. D’après les dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67, nous


remarquons que le législateur libanais a suivi le chemin de son modèle français, pour
qualifier le représentant commercial, tout en partant des bases du mandat, en le
considérant comme « mandataire qui… », et en excluant sa relation avec le mandant
par un contrat de louage de service, afin de le distinguer des autres intermédiaires de
commerce. En effet, il s’est basé sur les éléments contractuels du mandat pour décrire
la qualité du représentant commercial, imposant à cet intermédiaire commercial
d’agir au nom du son mandant (le producteur, ou le commerçant) et pour son compte
(le compte du mandant). Le texte précise que la qualification ne change pas si le
représentant commercial tend à vendre ce qu’il achète, pour son propre compte.

57. A cet égard, une remarque d’ordre terminologique s’impose. En effet, les
personnes visées par le décret-loi N. 34/67 sont souvent nommées soit agents

113
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 24 et s.
114
V. infra n° 139.
115
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-40-

commerciaux, soit représentants commerciaux. Certains préfèrent plutôt l’appellation


d’agents commerciaux116. Le terme de représentant nous semble préférable, étant
donné que ce terme rend mieux compte de l’idée d’entremise entre fabricants et
détaillants ou clients.

58. Le droit libanais et le droit français ont adhéré à la théorie moderne de la


représentation en ce que celle-ci implique l’agissement au nom et pour le compte
d’autrui et qu’elle produit un effet direct : l’engagement du représenté. Dans les deux
systèmes juridiques, la représentation commerciale puise ses sources dans la
représentation civile, précisément dans la représentation civile volontaire, qui a
comme source la volonté des parties117. Selon le premier alinéa de l’article premier du
décret-loi libanais N. 34/67, le représentant commercial au sens principal agit au nom
et pour le compte d’autrui : à ce titre il engage directement le représenté118.
Cependant, au sens accessoire, il agit -aux termes du deuxième alinéa du décret-loi
précité- pour son propre compte en tant que commerçant ayant la qualité de
représentant ou bien la qualité de distributeur exclusif. Deux phases sont à distinguer :
l’agissement pour le compte d’autrui ou bien l’agissement pour son propre compte.

59. Le commerçant qui vend ce qu’il aurait acheté pour son propre compte, est
donc considéré comme représentant commercial au sens du deuxième alinéa de
l’article premier du décret-loi N. 34/67, sous réserve que le contrat lui confère la
qualité de « représentant » ou de « distributeur exclusif ». Ainsi, concernant le décret-
loi N. 34/67, la qualification d’intermédiaire commercial comme représentant
commercial n’oblige pas à réaliser des opérations commerciales sous le nom du
mandant et pour son propre compte, tant que ce représentant commercial jouit de
cette qualification, même s’il a conclu des affaires commerciales pour son propre
compte dans le cadre d’un contrat garantissant sa qualité de représentant ou de
distributeur exclusif.

116
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, éd. Sader, t. 2, 1988,
Art. 1er., n° 4.
117
Cass. com., 10 déc. 2003, RTD civ., 2004, p. 285, obs. J. MESTRE et B. FAGES ; cah. dr. entr.,
2004-3, p. 31, obs. Ph. GRIGNON.
118
M. MAHMASSANI, op.cit. p. 11.
-41-

60. Après cette analyse probante, il apparaît que le droit français détermine en
un article propre chaque catégorie de personnes, tandis que, selon les dispositions de
l’article premier du décret-loi N. 34/67, le législateur libanais a désigné trois
catégories de personnes pouvant bénéficier du statut de représentant commercial : le
mandataire agissant pour le compte d’autrui selon l’alinéa premier de l’article précité ;
le commerçant « représentant » et le commerçant « distributeur exclusif » agissant
pour leur propre compte - aux termes du deuxième alinéa.

61. Ceci nous permet de diviser notre première partie en deux titres successifs
suivant les dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67 : le premier titre
sera relié à son alinéa premier concernant le représentant -mandataire qui agit pour le
compte d’autrui. Et le second titre sera relié à son deuxième alinéa concernant
le « commerçant », qui agit pour son propre compte en tant que « représentant » ou
bien « distributeur exclusif ». Ces champs d’études vont être étudiés en droit libanais
en comparaison avec le droit français : d’un côté, ce que ce dernier qualifie stricto
sensu de représentant ; de l’autre, ce qui ne correspond pas à un représentant.
TITRE PREMIER

L’AGISSEMENT POUR AUTRUI


-43-

62. L’instrument universel et constant du commerce juridique est le recours au


service d’autrui119. En droit français, lorsque ce service consiste à accomplir un acte
juridique, il se traduit par l’existence de la représentation et, d’une façon plus précise
et plus élaborée, par le contrat de mandat120. Le mandat est le contrat consensuel,
synallagmatique et intuitu personæ, par lequel un mandant confie à un mandataire, qui
accepte cette charge, le pouvoir d’accomplir pour lui et en son nom un acte juridique à
titre de représentant121. Le Code civil français dispose ainsi dans l’alinéa premier de
son article 1984 que : « Le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne
donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son
nom »122. Et, de ce fait, le législateur français n’a pas contribué à éclairer la définition
du mandat comme cela existe en droit libanais, puisqu’il a usé du terme
« procuration » qui émane du droit romain123, et qu’il l’a mis au même niveau que le
mandat. Il s’agit là d’une ambigüité qui nous incite à séparer le mandat de la
procuration, puisque cette dernière est le pouvoir confié par le mandant au
mandataire, alors que le mandat est le contrat qui confère le pouvoir.

63. De son côté, dans le premier alinéa de l’article 769 du Code de commerce,
le droit libanais définit le mandat, comme « le contrat en vertu duquel le mandant
délègue au mandataire le pouvoir d’exercer une affaire ou plusieurs affaires, ou de
conclure un acte ou un fait ou plusieurs actes et faits, sous condition de l’acceptation
du mandataire ». Et suite aux dispositions de l’article premier du décret-loi libanais
N. 34/67, nous trouvons que le représentant commercial est : « le mandataire qui, par
sa profession habituelle et indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de
services, entreprend des négociations pour conclure des opérations, de vente,
d’achat, de location ou de prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces

119
S. PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
120
Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 1.
121
Cette définition est proche, bien que distincte, de celle qui est donnée par G. CORNU,
Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 634 ; V. aussi le nouveau C. civ.
du Québec, art. 2130, al. 1er : « Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le
pouvoir de la représenter dans l’accomplissement d’un acte juridique avec un tiers, à une autre
personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s’oblige à l’exercer »: cité par Ph. LE
TOURNEAU, Mandat, op. cit., n° 3.
122
C. civ., art. 1984, al. 1er. – Certains arrêts reprennent textuellement cette formule : Cass. civ. 3e
Ch., 17 févr. 1999, Bull. civ., III, n° 40, D. 1999, IR 69.
123
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 2.
-44-

activités au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur compte »; D’où un
point commun comme première conséquence aux deux définitions entre le mandataire
et le représentant commercial, où tous les deux concluent des actes pour leurs
mandants, c'est dire qu’ils agissent pour le compte d’autrui.

64. En revanche, la représentation commerciale est une matière imprégnée


aussi bien de droit civil que de droit commercial. Elle est imprégnée du droit civil
dans la mesure où la représentation commerciale est, d’abord, un contrat, ensuite un
mandat d’intérêt commun dans le sens où le mandataire est intéressé à la réussite de
l'affaire pour laquelle il a été pressenti et où il échappe à la règle de la libre
révocabilité124 lorsqu’il « y a intérêt du mandant et du mandataire à l’essor de
l’entreprise par création et développement de la clientèle »125. De même, elle est
imprégnée du droit commercial dans la mesure où elle porte sur des activités
commerciales qui, en particulier, déterminent les formes de la représentation.

65. Forgée par les canonistes, la théorie de la représentation dans sa modalité la


plus fine qu’est le mandat, fut reprise par DOMAT et POTHIER, dont s’inspirèrent
largement les auteurs du Code civil français126 ; DOMAT a défini le mandat, qu’il
nomme procuration, comme « l’acte par lequel celui qui ne peut vaquer lui-même à
ses affaires donne pouvoir à un autre de le faire pour lui, comme s’il était présent :
soit qu’il faille simplement gérer, et prendre soin de quelque biens ou de quelque
affaire, ou qu’il soit nécessaire de traiter avec d’autres »127. POTHIER l’a défini pour
sa part comme « le contrat par lequel l’un des contractants confie la gestion d’une ou
de plusieurs affaires pour la faire en sa place et à ses risques, à l’autre contractant
qui s’en charge gratuitement et s’oblige à lui rendre compte »128.

124
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 51 ; S. BRAUDO, Définition de mandat,
Dictionnaire du droit privé, www.dictionnaire-juridique.com, 2004.
125
Cass. com., 20 fév 2007, Bull. 2007, IV, n° 57 ; Cass. com., 26 mai 2009, pourvoi n° 08-13839,
Lechevin c/ Société Hadimo.
126
J.-L. GAZZANIGA, Mandat et représentation dans l’Ancien Droit, Droits, n° 6, 1987, p. 21et s.
127
J. DOMAT, Les lois civiles dans leur ordre naturel, t. 14, sect. 1 parag. 1 : cité par Ph. DIDIER,
De la représentation en droit privé, préf. Y. LEQUETTE, LGDJ, 2000, n° 60.
128
R.-J. POTHIER, Traité du mandat, 1781, article préliminaire : cité par Ph. DIDIER, op. cit., n°
60.
-45-

66. Le rapprochement entre représentation et mandat est d’usage répandu. Il est


même habituel de considérer que la représentation est un élément constitutif du
mandat, de même que le contrat d’agence commerciale constitue une émanation et
une déclinaison du contrat de mandat. Il est le fruit d’une professionnalisation du
mandat et de sa mise en œuvre dans le cadre d’opérations commerciales129.

67. En outre, la jurisprudence fait de la représentation un critère du mandat.


Pour reprendre la distinction classique entre les éléments dits accidentels, naturels ou
essentiels à la qualification d’un contrat130, il faudrait considérer que la représentation
est un trait essentiel du mandat131 c'est dire qu’il ne pourrait y avoir de mandat sans
représentation. Certes, représenter, c’est agir au nom d’autrui132, mais la réciproque
n’est pas toujours vraie : agir au nom d’autrui n’est pas nécessairement représenter.
Une simple négociation contractuelle peut en effet être menée par une personne au
nom d’une autre ; agir au nom d’autrui ne signifie rien d’autre pour une personne
qu’entrer en relations avec un tiers en lui faisant savoir qu’elle portera le nom
d’autrui133 . Or, si on s’en tient à la stricte phase de négociation, aucune représentation
ne saurait être mise en œuvre. A défaut de la conclusion d’un acte juridique, la
représentation ne peut en effet s’exercer134. Cette présentation n’emporte cependant
pas la conviction. Ce n’est que par un accident de l’histoire que le droit français a lié

129
F. FOURNIER, La nature et le régime juridiques de l’agence commerciale, th., 1995, p. 161.
130
Depuis les travaux de la Glose, la tradition savante distingue trois catégories d’éléments
susceptibles d’influer sur la qualification d’un contrat: un élément est dit essentiel à la qualification si
l’on ne peut pas imaginer le contrat en cause sans lui (ainsi en est-il du prix dans la vente) ; il est dit
naturel s’il est présumé être présent mais peut être écarté par les parties au moyen d’une stipulation
expresse; il est dit accidentel s’il n’est présent que si les parties l’ont spécialement voulu: cité par Ph.
DIDIER, op. cit., n° 270.
131
Comme l’écrit M. TOMASIN dans une étude sur la distinction entre le mandat et le contrat de
travail: « La doctrine hésite depuis toujours entre deux conceptions différentes du mandat ; la
conception la plus étroite définissant le mandat comme un pouvoir donne au mandataire de
représenter le mandant et la conception plus large qui définit le mandat comme un contrat par lequel
le mandant confie au mandataire la gestion d’une ou plusieurs affaires pour agir à sa place et en son
nom »: D. TOMASIN, A la recherche d’une distinction entre mandat et contrat de travail, in Mél.
dédiés au Président M. DESPAX, Presses de l’université des sciences sociales de Toulouse, 2002, p.
203-237, spéc. n° 7, p. 209.
132
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
2007, p. 103.
133
N. DISSAUX op. cit.
134
M. STORCK, Essai sur le mécanisme de la représentation dans les actes juridiques, préf. D.
HUET-WEILLER, coll. BDP, LGDJ, t. 172, Paris, 1982, p. 40 et s.
-46-

mandat et représentation, prenant ainsi le contre-pied des autres droits de la famille


romano-germanique135.

68. De même, la représentation est généralement reconnue comme étant de


l’essence du mandat, la formulation même de l’article 1984 du Code civil laisse
entendre que le mandat est représentatif : c’est le « pouvoir de faire quelque chose
pour le mandant et en son nom ». Mais, en dépit de l’esprit du cet article, certains
auteurs considèrent que la représentation n’est pas de l’essence du mandat136.
Autrement dit, le donneur d’ordre habilite le représentant qui agira pour lui et
représentera sa personne : il est en quelque sorte un auteur lui-même. Un mandataire
n’agit jamais en son propre nom, in nomine proprio (ou il n’est plus mandataire) : il
agit in contemplatio domini, au nom du mandant (et pour le compte de celui-ci), et ce
depuis le Moyen Âge en droit canonique.

69. Le mandataire représente la personne du mandant et se désigne comme tel


aux yeux de ceux avec lesquels il traite. Ils le considèrent comme un représentant et
non point comme un personnage qui agit pour lui-même. Ils savent bien qu’il agit in
contemplatio domini et non pas in nomine proprio. Ce n’est donc pas seulement dans
les rapports du mandant avec son mandataire qu’il est entendu d’avance que celui-ci
agit au nom de celui-là : c’est également envers les tiers que cette substitution est
acquise. Le mandat joue la transparence : le tiers peut savoir quel est le mandant,
même si cela lui indiffère.

D’où nous pouvons tirer les idées suivantes :

70. La première : le principe selon lequel la représentation est de l’essence du


mandat est que le mandataire doit jouir d’une autonomie certaine, d’une sorte
d’indépendance, d’une liberté -même relative- dans l’organisation de son entreprise137

135
Ph. DIDIER, op. cit., n° 70 et s.
136
Ch. AUBRY et Ch. RAU, Droit civil français, par A. PONSARD et N. BDEJEAN de la BÂTIE,
t. 6, 7e éd., Litec, 1975, n° 164 ; A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et
commerciaux, 9e éd., Montchrestien, 2011, n° 911 ; F. COLLART DUTILLEUL et Ph.
DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D., 2011, n° 660.
137
Cass. com., 29 oct. 2002, RJDA, 2003, n° 132, relève, pour qualifier un contrat de mandat, que
l’intéressé bénéficie « d’une maîtrise de l’organisation de son entreprise ».
-47-

et la conduite de la mission confiée par le mandant138: ce sont les modalités de


l’activité exercée -premier chapitre-. La seconde exprimant la teneur de cette activité :
le caractère représentatif du mandat est que ce contrat ne peut avoir pour objet, à titre
principal, que l’accomplissement d’actes juridiques139 au nom et pour le compte
d’autrui -deuxième chapitre-.

138
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 187.
139
A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et commerciaux, 9e éd.,
Montchrestien, 2011, n° 909.
-48-

PREMIER CHAPITRE

LES MODALITÉS DE L’ACTIVITÉ

71. Selon l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi libanais N. 34/67, le


représentant commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et
indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de services, entreprend des
négociations pour conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de
prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces activités au nom des
producteurs ou des commerçants et pour leur compte, et d’après l’article L. 134-1 al.1
C. com. : « l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession
indépendante, sans être lié par un contrat de louage de services, est chargé, de façon
permanente, de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente,
d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de
producteurs, d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux. Il peut
être une personne physique ou une personne morale ».

72. Une simple lecture comparative des deux textes permet de constater qu’ils
sont similaires à l’exception du mot « habituelle » dans le texte français d’une part, et
l’absence des « mandants industriels » ou « autres agents commerciaux » dans le texte
libanais d’autre part. En revanche, les mots « producteurs » et « industriels »
expriment une fonction économique. Le mot « producteurs » est particulièrement utile
pour reconnaître la qualification d'agent commercial à ceux qui opèrent pour le monde
agricole (agriculteurs, personnes physiques et personnes morales non
commerçantes)140 ou pour des artisans ayant une activité de production141. D’où un
tableau comparatif primaire avec les points essentiels suivant la première lecture des
deux textes :

140
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 28.
141
Il a été jugé que l'activité d'architecte d'intérieur-designer, qui ne relève pas d'une profession
réglementée et consiste à aménager des magasins, à réaliser des stands de salons et des décors de
vitrines ainsi qu'à créer des objets, constitue une activité économique impliquant la circulation de biens
et la fourniture de services, se rattache à celle de producteur au sens de l'article L. 134-1 du code de
commerce : Cass. com., 20 mars 2012, n° 11-15.287, D. 2012. Actu. 871, obs. E. CHEVRIER.
-49-

Droit libanais : Droit français :


Art. 1 décret-loi N. 34/67 Art. L. 134-1 al.1 C. com.
Représentant commercial est mandataire… Agent commercial est mandataire…
Profession habituelle indépendante Profession indépendante
Absence d’un contrat de louage de services Absence d’un contrat de louage de services
Négociation et conclusion Négociation et conclusion
Agissement au nom et pour le compte des Agissement au nom et pour le compte des
producteurs et commerçants producteurs, commerçants, industriels et autres
agents commerciaux
Personne physique ou morale Personne physique ou morale

73. Développant le fond de chacun d’eux, afin de connaître les points communs
et les points de divergences, nous pouvons penser que, pour pouvoir jouir du statut de
représentant commercial libanais ou d’agent commercial français, il ne faut pas
seulement agir d’une manière indépendante mais encore professionnelle, après avoir
traité de manière permanente, sans être lié par un contrat de travail.

74. C’est le principe d’indépendance qui est clairement exprimé en droit


français aussi bien qu’en droit libanais ; suivant les dispositions de l’art. L. 134-1 al.1
C. com., l'agent commercial est un mandataire qui, à titre de profession
indépendante…, ainsi que de l’article L. 134-3 C. com. qui dispose que : « L'agent
commercial peut accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants.
Toutefois, il ne peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle
de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier ». Ces deux textes, trouvent leur
homologue en droit libanais dans l’al. 1 de l’art. 1 du décret-loi libanais N. 34/67, où
le représentant commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et
indépendante…, et dans l’al. 2 de l’art. 3 du décret-loi libanais N. 34/67 où le
représentant…..peut : « accepter des nouvelles représentations sans en référer à son
mandant à condition que l’objet de la nouvelle représentation ne soit pas en
contradiction avec celui de la première ou bien ne constitue pas une concurrence à
celle-ci ».
-50-

75. Deux points importants sont à relever dans ces articles français et libanais :
« à titre de profession permanente indépendante » et « sans autorisation ». Le principe
d’agissement de l’agent commercial est clairement et doublement exprimé. En effet,
pour justifier les traits caractéristiques de la qualification de l’agent commercial
français ou du représentant commercial libanais, chacun d’eux devait exercer son
activité à titre de profession habituelle indépendante, sans être lié par un contrat de
louages de services.

76. Cette modalité d’exercice de l’activité peut être développée en trois


sections suivant les dispositions de l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi
N. 34/67, où nous constatons que le fait par lequel le représentant commercial exerce
des opérations commerciales à titre de profession habituelle, indique que le
représentant nommé fait de la représentation commerciale sa profession (section 1),
d’une manière permanente (section 2) et indépendante (section 3), où il doit être libre
dans l’organisation de son entreprise, tout en disposant de larges pouvoirs d’initiative
dans l’exercice de sa mission.
-51-

SECTION 1

L’AGISSEMENT À TITRE PROFESSIONNEL

77. Cette condition touche certainement l’organisation de l’activité du


représentant, mais ne lui impose nullement de s’organiser en entreprise. Elle signifie
simplement que le mandataire doit faire de la représentation commerciale sa
profession pour bénéficier du statut de représentant commercial : il doit donc
l’exercer de manière régulière et continue, et non simplement de manière
occasionnelle142 et irrégulière. Dire que le mandataire exerce la profession de
représentation commerciale implique nécessairement qu’il l’exerce habituellement, la
profession étant par définition habituelle. Cet élément de profession est l’un des traits
principaux qui distingue le représentant commercial du mandataire ordinaire143,
lequel n’agit que pour un ou quelques actes isolés. C’est ainsi qu’une personne ne
pourra pas prétendre au bénéfice du statut en question au seul motif qu’elle aurait
traité une seule affaire à titre de courtier, de commissionnaire, de concessionnaire ou
de mandataire simple. Donc, en principe, l’élément de répétition est nécessaire pour la
qualification de la profession comme « représentation commerciale »144.

78. En effet, il n’est pas nécessaire d’exercer à titre de profession principale,


comme défini dans l’article premier du décret-loi N. 34/67 qui dispose que le
représentant commercial est le mandataire qui agit à titre de profession habituelle ; il
ne faut nullement comprendre par-là l’exercice à titre de profession unique exclusive
et cela en deux sens. D’une part, le représentant commercial peut entreprendre pour
son propre compte d’autres actes de commerce que ceux qui font l’objet de la
représentation145, et par suite, en faire l’objet d’une profession personnelle distincte.

142
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 473 et s., n° 17 ; Cass. com., 16
janv. 1968, JCP. 1968, 15551, II ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970,
p. 465, n° 1.
143
Les représentants mandataires ordinaires sont des représentants qui, bien que non liés par un
contrat de travail, ne remplissent pas toutes les conditions exigées pour bénéficier du statut des agents
commerciaux : F. FLICHY, Représentant de commerce, (Statut juridique, fiscal, et social du VRP), 14e
éd., Delmas, 2003, n° 125.
144
M. MAHMASSANI op. cit.
145
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
-52-

D’autre part, il n’est pas attaché exclusivement au service d’un seul représenté, il peut
cumuler la représentation de plusieurs commerçants, à la seule condition qu’il n’y ait
pas contradiction entre les objets des diverses représentations et qu’elles ne soient pas
concurrentielles l’une par rapport à l’autre146. En effet, l’agent commercial peut avoir
d’autres occupations à condition que celles-ci ne soient pas concurrentes ou
incompatibles avec l’objet de la représentation. Au surplus, il n’est même pas
nécessaire que l’intermédiaire agisse à titre de profession principale147.

79. De même, en droit français, l’agent commercial est un mandataire qui agit à
titre de profession indépendante…, cette qualité de mandataire professionnel s’est
affirmée durant toute la continuité du statut ordinaire de l’agent, au même titre que
son indépendance, ainsi que l’exprime parfaitement l’art. L. 134-1 C. com., tout en
précisant qu’il agit au nom et pour le compte du commettant. Il le représente en effet
au sens du droit civil : par conséquent, les opérations faites par l’agent produisent
leurs effets dans le patrimoine de ses mandants. C’est l’effet habituel de la
représentation148, et la conséquence de la condition d’exercice de l’agence
commerciale à titre de profession.

1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.


2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs salaires
ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et dans ce
cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
146
Art. 3, al. 2 du décret-loi n° 34/67 ; Cass. com., 16 mai 1961, Gaz. Pal., 1961, 2.
147
Cass. com., 16 janv. 1968, JCP, 1968, 15551, II : qui confirme l’arrêt de la Cour de Rouen du 20
mai 1965, Gaz. Pal. 1966, I, 8. Dans cette espèce, il s’agissait d’une société qui avait obtenu d’un
fabricant d’agir soit comme revendeur, soit comme mandataire. Les arrêts en question refusent à la
société le statut de représentant commercial au motif que l’objet de la société étant la vente de matériel
de boulangerie, elle ne pouvait représenter le fabricant en contractant à titre de profession habituelle.
Ces arrêts, critiqués à juste titre par M. HEMARD in RTD com., 1968, p. 1120, n° 12, ne tiennent pas
compte du fait qu’il n’est pas exigé qu’il s’agisse de la profession unique ou principale. v. J.
HEMARD, Les agents commerciaux, op. cit. n° 17.
148
En conséquence l’agent commercial ne peut être responsable des difficultés d’exécution du
contrat entre son mandant et le client de celui-ci : CA Amiens, 20 mai 2003, RG 00/01520, ord. Réf.
TGI Poitiers, 27 août 2003, n° 03/00141 : « Attendu que la société Klaes Reinhold justifie de sa qualité
de simple mandataire, que sa présence en la cause se révèle inutile pour le bon déroulement des
mesures d’expertise ».
-53-

SECTION 2

L’AGISSEMENT À TITRE PERMANENT

80. La loi du 25 juin 1991 met en évidence les fondements essentiels de la


définition de la qualification d’agence commerciale : la permanence du mandat et
l’indépendance de l’agent. La jurisprudence montre que la permanence de la mission
n’est pas suffisante pour qualifier d’agent commercial une partie149, mais qu’elle
demeure un élément essentiel du statut qui ne bénéfice pas aux agents occasionnels150.

81. En effet, la pluralité d’actes, objet de la représentation commerciale, ne


suffit pas en droit libanais à la caractériser ; il faut, par surcroît, que
l’accomplissement des actes soit appelé à se poursuivre dans le temps. Un mandat qui
aurait pour objet certains actes, si nombreux soient-ils, mais dont l’identité et le
nombre sont déterminés, ne serait qu’un mandant ordinaire. Aussi, la loi dit que la
représentation commerciale est un contrat « à durée déterminée ou indéterminée »151.
D’ailleurs, ce caractère de continuité de la représentation commerciale résulte du fait
qu’elle n’est conçue qu’en tant qu’exercice d’une profession habituelle. Bien que le
représentant commercial exerce une profession personnelle indépendante, il reste un
mandataire représentatif, le texte de loi est sur ce point très précis : « le représentant
commercial…accomplit ces actes au nom des producteurs ou des commerçants et
pour leur compte »152. De même, le droit français a adopté ce caractère durable du
mandat qui a bien été indiqué dans la loi du 25 juin 1991, selon l’art. L. 134-11 du
Code de commerce, tout en prévoyant que le contrat peut être à durée déterminée ou

149
Cass. com., 10 déc. 2003, arrêt n° 1811, pourvoi n° 01-11923 ; CA Paris, 12 mars 2003, Lettre
distrib., juin 2003 ; CA Montpellier, 4 fév. 2003, Lettre distrib., mars 2003 ; Cass. com., 3 oct. 2000,
pourvoi n° 97-19999.
150
Cass. com., 16 janv. 1968, JCP, 1968, 15551, II.
151
Art. 2, al. 1 du décret-loi n° 34/67: « Tout contrat passé après l’entrée en vigueur du présent
décret-loi, doit être constaté par écrit. Il peut être soit à durée déterminée soit à durée indéterminée ».
152
Art. 1, al. 1 du décret-loi n° 34/67.
-54-

indéterminée. En outre, la Cour de cassation française s’attache au caractère de


permanence pour qualifier le contrat d’agence commerciale153.

82. La « permanence », suppose la condition d’avoir traité plusieurs opérations


avec le mandant154. Cette condition se distingue de la condition d’exercice à titre de
profession habituelle, en tant que cette dernière concerne uniquement le représentant
dans l’organisation de ses activités rémunératrices, alors que la condition de
permanence concerne le représentant dans ses rapports avec le représenté. Cette
« permanence » impose à l'agent une vigilance constante de sauvegarde des intérêts
du mandant155. C’est ainsi qu’un intermédiaire peut traiter, à titre de profession, une
multitude d’opérations occasionnelles pour une multitude de mandants, et qu’il
devient représentant commercial lorsqu’il traite une série d’opérations, pendant un
certain laps de temps, pour le compte d’un même mandant.

83. Revenons à l’exigence que présente la loi quant à l’exercice de la


profession d’agent commercial. L’agent commercial doit exercer son activité de façon
permanente156. Le décret français N. 58-1345 du 23 décembre 1958, qui a instauré une
protection d’ordre public de l’agent commercial, prévoyait dans le premier alinéa de
son premier article que l’agent devait exercer son activité « à titre de profession
habituelle »157. Cette dernière expression se retrouve dans le décret-loi libanais N.
34/67 qui a souligné dans l’alinéa premier de son premier article que le représentant
commercial agit « à titre de profession habituelle ». Ce qui vérifie encore notre
analyse justifiant les sources françaises du droit libanais, puisque le texte libanais

153
Cass. com., 14 juin 2005, Docyan, n° 03-19150 : « La Cour d’appel qui a fait ressortit le
caractère indépendant du mandataire et celui permanent de son activité, a légalement justifié sa
décision ».
154
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 68.
155
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 52.
156
Art. L. 134-1 C. com.
157
Art. 1 al. 1 : « Le mandataire qui, à titre de profession habituelle et indépendante, sans être lié
par un contrat de louage de services, négocie et éventuellement conclut des achats, des ventes, des
locations ou des prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels ou de
commerçants ».
-55-

s’est inspiré de l’ancien texte français, où cette même expression était assez discutable
car l’idée de profession indique à elle seule déjà le caractère habituel de l’activité158.

84. En réalité, il s’agit d’apprécier le caractère de permanence de l’activité de


l’agent. Cette permanence se traduit par la stabilité et la continuité de la relation
contractuelle, car c’est la mission, l’objet du contrat d’agent, qui est porteur de ce
caractère de permanence. Le contrat d’agence fixe une mission qui s’inscrit dans la
durée. Elle ne doit pas être occasionnelle159. C’est donc la représentation qui est
confiée qui doit acquérir ce caractère permanent.

En effet, la permanence suppose deux éléments :

85. D’une part, la condition de permanence ferait défaut s’il s’agit d’une
opération occasionnelle traitée entre l’agent et le mandant ; ainsi, le mandataire
occasionnel ne peut pas compter sur la protection apportée par le décret-loi N. 34/67
contre la rupture abusive du mandat par le représenté. D’autre part, la répétition
occasionnelle des opérations entre mandant et intermédiaire ne suffit point à conférer
à ce dernier la qualité de représentant commercial160.

86. Mais un problème se pose : quand peut-on admettre que des actes de
représentation constituent une profession habituelle ? Quel nombre d’opérations doit-
on considérer comme suffisant pour attribuer à leur auteur la qualification d’agent
commercial ? Il s’agit dans chaque cas particulier de l’appréciation d’un ensemble de
circonstances. En raison de l’analogie des dispositions de l’art. L. 121-1 C. com.:
« Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur
profession habituelle », qui a son similaire en droit libanais suivant les dispositions de
l’art. 9 du Code de commerce161. Il ressort que la profession habituelle n’est pas
nécessairement la profession principale et peut n’avoir aucun rapport avec cette

158
J.-J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats- Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 22.
159
Cass. com., 16 janv. 1968, JCP, 1968, 15551, II et RTD com., 1968, 1119, J. HEMARD.
160
Cass. com., 16 oct. 1967, D. 1967, 751 ; Cass. com., 13 oct. 1959, Gaz. Pal., 1959, 2, 286 et
JCP, 1960, II, 11509, 1ere espèce, J. HEMARD.
161
Art. 9 C. com. Lib : Les commerçants sont les personnes dont la profession est d’effectuer des
opérations commerciales.
-56-

dernière162. L’agent libre sera donc soumis aux dispositions dudit article, s’il effectue
des actes de représentation à titre accessoire, à condition toutefois que ces opérations
soient répétées assez régulièrement. S’il en est autrement, l’intéressé ne sera pas agent
commercial mais simple mandataire.

87. L’agent commercial est donc un chargé d’affaires permanent du mandant


dans l'univers commercial pour lequel il a reçu mandat163, car comme l’a écrit M.
GUYENOT, « ces missions ne peuvent être effectuées que si le mandat est
permanent »164. Cette condition existe tacitement en droit libanais plus qu’en droit
français, où, elle a été indiquée précisément par le mot « habituelle » dans la
définition du représentant commercial par le décret-loi N. 34/67, tout en signalant que
le mot habituelle existait précédemment dans les textes français avec le décret de
1958, avant la naissance de la loi de 1991, base du Code de commerce actuel.

88. Après avoir exposer ces deux modalités d’exercice de l’activité concernant
le professionnalisme et la permanence nécessaires pour l’acquisition de qualité de
représentant commercial, il reste une troisième modalité, la plus importante, celle de
l’indépendance, où à défaut de sa présence, le représentant sera soumis au droit du
travail en tant que salarié ou bien au statut de VRP.

162
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, Paris, 1967, p. 295.
163
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 52.
164
J. GUYENOT, VRP et agents commerciaux, Libr. du journal des notaires et des avocats Paris,
1975, n° 242 et s.
-57-

SECTION 3

L’AGISSEMENT À TITRE INDÉPENDANT

89. Le contrat de mandat met des obligations à la charge du mandataire telles


que l’obligation d’accomplir la mission dans le cadre des instructions reçues et
l’obligation de rendre compte. Ces obligations, bien que limitant partiellement et
provisoirement la marge de manœuvre de l’intermédiaire, ne créent pas entre lui et
l’entreprise du fournisseur de lien de subordination juridique et n’entrainent pas
automatiquement l’application du droit social au mandataire165 : « l’entreprise confie
souvent la diffusion de ses produits à des mandataires pour échapper aux contraintes
du droit social »166.

90. La question est de déterminer le degré d’autonomie par lequel les


représentants peuvent agir dans le cadre d’une représentation commerciale :
l’autonomie dont bénéficie le mandataire, que ce soit l’agent commercial en France
ou bien le représentant commercial au Liban, est avant tout juridique -lorsqu’il
n’existe entre le donneur d’ordres et le mandataire aucun lien de subordination
juridique-. Le mandataire doit tenir compte des instructions du mandant pour
l’exécution de la mission, mais le fait de se conformer à ces instructions ne le
transforme pas automatiquement en salarié et ne fait pas naître automatiquement un
lien de subordination. Il faudrait que ces instructions soient précises et fréquentes
pour que le juge mette en évidence l’existence du lien de subordination et qualifie, par
exemple, de gérance salariée ce que les parties avaient qualifié de gérance non
salariée167. L’autonomie est de nature économique, lorsque l’intermédiaire, grâce à la
diversité de ses relations commerciales, ne dépend pas pour substituer de missions
confiées par un seul fournisseur ou lorsque les revenus qu’il tire de ses principaux

165
L’application du droit social est subordonnée à la satisfaction de conditions traduisant la faible
autonomie du mandaitre : D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 157.
166
Idem.
167
Cass. Soc., 21 avr. 1988, Bull. V, p. 159.
-58-

donneurs d’ordres sont suffisants pour assurer son autonomie réelle168 : c’est la teneur
de l’exigence, ce sera notre premier paragraphe.

91. Cette condition d’indépendance marque l’originalité et la particularité du


représentant commercial par rapport aux différents intermédiaires de commerce, et
notamment, des représentants, voyageurs et placiers (VRP) qui, eux, sont liés par un
louage de services. Cependant, le terme indépendance doit être largement
interprété169, étant donné qu’il a été utilisé par le législateur libanais uniquement pour
marquer le contraste avec la situation de subordination qui résulte d’un louage de
services170.

92. En effet, l’indépendance juridique signifie non seulement que le


représentant de commerce ne doit pas être lié par un contrat de travail et par là qu’on
le distingue des VRP171 mais encore -comme se contente de le dire le décret N.
34/67-, que le représentant peut librement sans autorisation du représenté, « désigner
des représentants qui lui sont propres, engager des employés » 172, et aussi, d’une
façon générale, organiser son activité comme il l’entend, travailler d’après les
méthodes qu’il veut, engager et traiter librement son personnel, s’installer, en son
nom propre, dans le local de son choix. S’il doit, sans doute, rendre compte à son
mandant du résultat des opérations qu’il conclut, il n’est pourtant pas obligé de tenir
son mandant au courant des moyens qu’il a employés pour arriver à cette fin, ni
fournir des rapports périodiques sur son activité. Il n’empêche, cependant, que le

168
J. BOUDAUD, Les intermédiaires du commerce en droit français et mexicain, th., Montpellier,
2001, p. 187.
169
Cass. soc., 19 mai 1950, Bull. civ., 1950, III 289 ; Cass. soc., 20 mars 1956, Bull. civ., 1956, IV,
217 ; Cass. soc., 16 mars 1959, JCP 1959, 65206.
170
Faut-il définir un régime juridique pour ce que certains désignent comme la « parasubordination
» ? La question est posée, tant en France que dans le reste de l'Union européenne, de la reconnaissance
d'un régime de protection spécifique au profit de travailleurs qui ne sont ni des salariés ni à proprement
parler des travailleurs indépendants. La tâche est ardue, tant en raison des incertitudes des
qualifications que de la diversité des régimes appliqués aux différents professionnels concernés. La
construction d'un régime spécifique exige avant tout de déterminer un critère commun d'identification,
qui pourrait être trouvé dans la combinaison entre l'existence d'un rapport de pouvoir et la participation
du travailleur aux risques de l'activité : E. PESKINE, Entre subordination et indépendance : en quête
d'une troisième voie, Rev. trav. l, D, 2008, p. 371.
171
D. BIKOVA, Les spécificités en matière de représentation commerciale du droit bulgare par
rapport au droit français, th., Montpellier, 2009, n° 156.
172
Art. 3 al. 2 du décret-loi n° 34/67.
-59-

représenté peut adresser au représentant des instructions ou directives, tant du moins


qu’elles ne sont pas impératives, qu’elles ne constituent que de simples
suggestions173.

93. Pour déterminer s’il existe ou non un lien de subordination les juges se
fondent sur un ensemble d’éléments concordants. Par exemple, il a été jugé qu’il n’y
avait pas de lien de subordination pour un agent commercial dès lors qu’il prospectait
la clientèle à sa convenance, qu’il décidait librement de l’organisation et de la
fréquence de ses tournées sans être tenu de rendre compte, qu’il avait la possibilité
d’employer des préposés et le droit de représenter d’autres mandants, qu’il négociait
sous sa responsabilité propre et moyennant une rémunération à la commission des
opérations commerciales pour le compte du mandant174.

94. A l’opposé, il a été jugé que ne pouvait pas être qualifié d’agent
commercial une personne qui devait se présenter en tous lieux et en toutes
circonstances au nom du mandant et non sous son nom propre, obtenir l’approbation
du mandant sur les accords auxquels il parvenait avec un client, qui ne devait
collaborer exclusivement qu’avec le mandant qui mettait à sa disposition ses bureaux,
son secrétariat et sa publicité175. Cette liste de caractéristiques n’est pas exhaustive et
les juges peuvent tenir compte de tout élément factuel créant une dépendance
juridique et un contrôle de l’agent par le mandant. Il va de soi que des sanctions qui
seraient prises à l’encontre de l’agent pour non-respect d’obligations plaçant l’agent
sous la dépendance et le contrôle du mandant lèveraient tout doute sur la réalité du
lien de subordination. Toutefois, l’élément d’indépendance demeure un élément de
fait qui peut être prouvé par tous moyens.

95. Pour cela, le bénéfice du statut de représentant commercial ne sera pas


refusé au commerçant qui reçoit des directives de la maison représentée176, des
documents publicitaires ou à celui qui doit rendre compte périodiquement, même à

173
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 467.
174
Cass. soc., 9 juin 1994, 91-18.618 ; A. De THEUX, Le statut européen du l’agent commercial,
Approche critique de droit comparé, Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 1992.
175
Cass. soc., 13 avr. 2005, 03-18.513.
176
E. TYAN, op. cit., p 466, n° 2.
-60-

intervalles très courts. Nous rappellerons que l’agent commercial français comme le
représentant commercial libanais, est un travailleur indépendant dont la profession est
caractérisée par l’absence d’un lien de subordination avec le commettant. En présence
d’un lien de subordination juridique, le contrat d’agent commercial est prévu devenir
un contrat de travail régi par le Code du travail. Nous citerons également qu’un lien
de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler
l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné177. D’où la
nécessité de traiter la sanction de l’exigence, ce sera notre deuxième paragraphe.

Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence

96. La législation française qui traite de l’agent commercial est précise : elle
propose son indépendance ou l’absence de subordination pesant sur lui. La loi du 25
juin 1991, codifie l’art. L. 134-1 C. com., n’hésite pas devant la redondance, elle
indique que l’agent exerce « à titre de profession indépendante, sans être lié par un
contrat de louage de services ». Cette répétition est reprise du décret du 23 décembre
1958, qui avait bien marqué la différence avec les représentants salariés. Ce qui
montre bien le maintien du droit français en ce qui concerne l’agence. L’agent
commercial est donc à son compte dans la vie économique. Il court les risques de son
activité pour en conserver le profit, libre de l’organisation de son entreprise comme de
ses activités.

97. En outre, pour que le contrat soit qualifié de « représentation


commerciale », il faut que le représentant commercial jouisse d’une certaine
indépendance :

177
CA Aix-en-Provence, Ch. 03 A, 26 nov. 2010, n° 09/22491 ; CA Rennes, Ch. sec. soc., 17 mars
2010, n° 08/06351 ; CA Versailles, Ch. 05, 30 avr. 2009, n° 08/00811 : « …Considérant qu'un lien de
subordination caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir
de donner des ordres, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements… » ; A. De
THEUX, Le statut européen du l’agent commercial, op. cit.
-61-

Il a toute liberté quant à l'organisation de son entreprise (A) : il dispose d'une


grande initiative pour commercialiser les produits dont il a la charge. Il n'a pas à se
conformer aux instructions de son mandant; par exemple, il n'a pas à lui remettre des
comptes rendus de visite. Il a toute latitude pour recruter son personnel sans
l'obtention d'autorisation. L'agent commercial a toute liberté de choix quant à la
structure juridique de son entreprise: entreprise individuelle, EURL, SARL, SA, etc...

98. Il a toute liberté quant au choix de ses activités (B) : Il peut, en effet, agir
dans l'intérêt de plusieurs mandants, cependant dans la limite du respect de son
obligation de non concurrence. A la différence du VRP, l'agent commercial prend des
risques dans l'exercice de son activité et engage son patrimoine (ou celui de son
entreprise suivant la structure juridique qu'il choisit). Il a une personnalité
économique autonome exclusive du salariat. Comme tout entrepreneur, il peut
acquérir et transmettre les éléments d'actifs de son entreprise.

A- La liberté d’organiser son entreprise

99. C’est le premier corollaire de l’indépendance juridique. Les contrats le


rappellent parfois : « En sa qualité d’agent commercial mandataire, l’agent jouit de
l’indépendance propre à tout chef d’entreprise dans l’organisation de son
activité »178. D’ailleurs, il n’est pas nécessaire de comprendre le mot indépendance
comme signifiant la nécessité pour l’agent d’être organisé en entreprise autonome179.
Cela ne se fonde sur aucune base justifiable. Sa seule justification repose sur la
pratique en cours, étant donné que la plupart des représentants commerciaux sont
organisés en entreprise, bien que rien ne les y obligent juridiquement. En effet, le
terme indépendant tel que conçu par l’article premier du décret-loi N. 34/67 se réfère
à la nature des liens qui existent entre les parties et non à la manière et le lieu
d’exercice de la représentation, et tant que la firme représentée est satisfaite et accepte

178
Contrat présenté par J.-M. LELOUP dans La distribution, cas n° 6 p.76. coll. « Cas pratiques du
droit des affaires », D., 1971, cité par J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 6e éd., Delmas, 2005.
179
G. LHUILLIER, Concurrence, RTD com., 1994 p. 645 ; CA Paris, 22 sept. 1993, 1ere Ch. Sect.
Concurrence, non publié (n° répertoire général : 93/141499), sur recours contre une décision 92-D-66
du Conseil de la concurrence en date du 8 déc. 1992.
-62-

de poursuivre sa collaboration avec lui. L’indépendance se limite à définir les rapports


des parties entre elles.

100. En effet dans le cadre des missions qui lui sont confiées, l’agent dispose de
la plus large initiative personnelle pour accroître son audience et développer la
commercialisation des produits dont il a la charge. Il peut organiser tous les services
de nature à favoriser son action : prospection, marchandisage, informatisation des
statistiques commerciales, entreposage ; il est maître de son organisation des salariés
et des matériels qu’il met en œuvre180; il peut en particulier, devant des circonstances
imprévues et en l’absence d’instructions particulières, adapter son comportement en
fonction de la nouvelle situation181. Du reste, d’une façon générale, le titulaire d’un
pouvoir est investi de la capacité de trancher, par l’exercice de sa volonté, une
situation juridique et d’imposer à autrui la décision prise : « le titulaire du pouvoir est
bien le « décideur » que décrivent les économistes »182. Par exemple, la liberté est
laissée à un agent commercial quant à la fixation du prix, la détermination du délai de
livraison, ou quant aux autres modalités du contrat183, etc… De même, il peut adopter
les voies et les moyens qui lui paraissent les mieux adaptés à la mission confiée, par
exemple de recourir à l’internet184. Mais dès à présent, on constate deux aspects de la
liberté d’organisation qui sont les suivantes :

101. L’agent peut être une personne physique ou une personne morale, ce qui a
été indiqué expressément par la loi du 25 juin 1991 et l’art L. 134-1 al.1 C. com.:
« L’agent commercial… peut être une personne physique ou une personne morale »,
en organisant librement les moyens humains de son entreprise ; il y a là équivalence
avec le représentant commercial libanais qui peut être une personne morale ou une

180
J. THIEFFRY et C. GRANIER, Les contrats d’agence dans le droit de la distribution français et
communautaire: Gaz. Pal. 1992, 1, doctr., p. 258.
181
Ph. PETEL, Les obligations du mandataire, préf. M. CABRILLAC, Litec, 1988, n° 104.
182
E. GAILLARD, Le pouvoir en droit français, préf. G. CORNU, Economica, 1985, n° 216 ; V.
aussi sur le pouvoir, P. LOKIEC, Contrat et pouvoir : essai sur les transformations du droit privé des
rapports contractuels, préf. A. LYON-CAEN., LGDJ, 2004, n° 6 et s.
183
Cass. civ., 1ere Ch., 9 déc. 1997, Resp. civ. et assur. 1998, n° 99 ; Cass. civ., 1ere Ch., 6 juill.
2000, Bull. civ. I, n° 200, RJDA 2001, n° 23, mandat exprès d’aliéner et de consentir aux prix, charges
et conditions que le mandataire aviserait.
184
Art. L. 321-2, al. 2 C. com., le laisse entendre pour les ventes aux enchères publiques réalisées à
distance par un mandataire.
-63-

société selon les dispositions du troisième alinéa de l’article premier du décret-loi N.


34/67185, quand le droit libanais exige la qualité de représentant commercial, liée à sa
nationalité libanaise186 tout en tenant compte de la réciprocité que les représentants
commerciaux étrangers devront prouver. Cela a été prescrit par le décret-loi ; le
représentant commercial doit être libanais et doit avoir un établissement commercial
au Liban187, ce qui n’a pas été précisé en droit français concernant l’agent
commercial.

102. L’agent peut recruter librement son personnel, ce qui constitue une
prérogative évidente de tout chef d’entreprise. Les moyens humains résultant de la
liberté de choix de l’agent pour l’exécution de sa mission, sont bien évidemment
l’emploi de personnel salarié. Outre un personnel salarié, l’agent peut s’adjoindre des
collaborateurs, personnes physiques ou morales, ayant la qualité d’agent commercial,
comme l’alinéa premier de l’article premier de la loi du 25 juin 1991, le prévoit
expressément. Le mandant ne peut opposer un quelconque refus puisqu’il ne dispose
sur cette décision d’aucun droit d’ingérence. Le personnel est choisi selon les critères
de sélection définis par le mandant et, en considération de ses besoins, pour le
développement de son entreprise. Içi, se manifeste son autonomie face à son mandant
comme il est dit dans le deuxième alinéa du second article du décret N. 58-1345 du 23
décembre 1958 : « l’agent peut recruter ou employer sans autorisation, des sous-

185
Art. 1, al. 4 du décret-loi n° 34/67 : « Et si le représentant de commerce est une société, il faut :
a- Dans les sociétés de personnes et pour les sociétés à responsabilité limitée : que la majorité des
associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et que celui qui a le
droit de signer soit libanais.
b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la majorité du capital
appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du conseil d’administration ainsi que son
directeur général, ou que la personne déléguée par le président du conseil d’administration ou par le
directeur général pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».
186
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 1, n° 11 : En ce qui concerne les sociétés, autre que celles en participation, la
reconnaissance de la nationalité libanaise pour l’exercée de la profession d’agent commercial est
soumise à des conditions particulières à cette matière, exorbitantes du droit commun des sociétés, qui
sont détaillées aux alinéas 4 et du présent article dont les dispositions ne nécessitent pas de
commentaires ; TI Mont-Liban, décision nº 81 du 29 mai 1996, Rev. al Adl, 1998, p. 153.
187
Art. 1, al. 3 du décret-loi n° 34/67 : « A dater de l’entrée en vigueur du présent décret-loi, tout en
maintenant les droits acquis antérieurement et en tenant compte de la réciprocité que les représentants
commerciaux étrangers devront prouver, le représentant commercial doit être libanais et doit avoir un
établissement commercial au Liban ».
-64-

agents rémunérés par lui », tout en signalant, que cette caractéristique a été
mentionnée en droit libanais pour le représentant commercial et notamment dans le
troisième alinéa du troisième article du décret-loi N. 34/67.

103. Le mandataire détermine le moment et la nature du contrat de travail. Il


peut décider de recruter de nouveaux employés, d’accroître ou de réduire ses effectifs.
Il gère seul son personnel salarié. Il définit les fonctions que chacun doit occuper et
aussi, les pouvoirs que certains doivent exercer pour la bonne marche de son
entreprise. Il est certain, dans ce cadre, que le mandataire effectif est l’entreprise elle-
même et non simplement le représentant de cette entreprise, conformément aux règles
relatives aux entreprises individuelles ou aux sociétés. Le personnel sera soumis lui
aux directives du mandataire en sa qualité d’employeur, et non aux volontés ou
intentions du mandant. Les salariés seront tenus de respecter les engagements pris
avec leur employeur au titre de leur contrat de travail, et non au titre du contrat de
mandat.

B- La liberté de choisir son activité

104. Selon les dispositions de l’article 3 précité du décret-loi N. 34/67, le


représentant commercial jouit d’une indépendance spéciale à trois niveaux :

I) personnel : en effectuant des opérations commerciales pour son propre compte


ce qui lui donne la qualité de commerçant188, et cette dernière ne se modifie pas,
même si dans certains cas ceci est permis pour le propriétaire du projet -la société
représentée- d’imposer certaines conditions sur le représentant commercial189 ;
solution adoptée par M. le professeur TYAN : « Toutefois, la règle de l’indépendance

188
Cass. civ. lib. 1ere Ch., arrêt préparatoire, n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21: « …le
commerçant qui achète des produits et les distribue en les vendant aux clients, en retirant un gain de la
différence de prix… » ; M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1,
1970, p. 147, n° 100. B, 2e condition : « Elles (les conditions du décret du 23 déc. 1958 et du décret du
22 août 1968) affirment le caractère indépendant de la profession de l’agent statuaire. Tout d’abord, il
peut effectuer des opérations commerciales pour son propre compte ; dans ce cas il est commerçant et
doit s’inscrire au registre commercial ».
189
CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et
l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p 89 et s.
-65-

du représentant ne nous parait pas faire obstacle à des stipulations qui réserveraient
un certain contrôle au représenté, telles que la stipulation imposant au représentant
l’obligation de rendre compte… de fournir des rapports… »190 .

II) autonome : en décidant à titre individuel de prendre de nouvelles


représentations sans en référer à son mandant, à condition qu’elles ne soient pas en
contradiction ou en concurrence avec les anciennes représentations191.

III) pécuniaire : en jouissant d’une autorité économique permettant la


rémunération des salariés ou des sous-agents employés par lui192.

105. En effet, l’indépendance du représentant se traduit par une très grande


liberté en dehors de l’exécution de la mission. C’est une des conséquences de
l’autonomie de l’agence commerciale puisque celle-ci n’est liée à la volonté du
mandant que pour la réalisation de sa mission, notamment par la définition du pouvoir
accordé à l’agent et ses limites193. C’est aussi le corollaire de l’indépendance, qui se
développe dans deux directions différentes, d’une part l’agent peut agir pour plusieurs
mandants (a), d’autre part, il peut, sans perdre sa qualité d’agent, exercer
simultanément d’autres professions (b).

190
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 467, n° 1306.
191
En droit français : l’agent peut accepter, sans autorisation préalable, la représentation d'autres
donneurs d'ordres (agent multicartes), y compris de concurrents de son mandant mais, dans cette
dernière circonstance, avec l'accord de ce dernier (art. L. 134-3 C. com.). Et, réciproquement, le
mandant peut pour le même territoire ou la même clientèle traiter avec d'autres agents ou intermédiaires
ou encore agir personnellement (vendre directement) : Cass. com., 25 mars 1974, n° 73-11.423, Bull.
civ., IV, n° 103 ; F.-X. LICARI, La notion d’agent commercial et l'indemnité de fin de contrat dans la
jurisprudence récente de la CEE, RLDC 2006, Chron. n° 2118 ; Ph. GRIGNON, Le fondement de
l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce, préf. D. FERRIER et J.-M.
MOUSSERON, Litec, 2000, n° 172 et s.
192
CA Rouen, Ch. des Urgences, 27 oct. 2009, n° 08/02653 : «…Attendu que ce contrat autorisait
Monsieur Daniel S. à recruter sans autorisation, des sous agents rémunérés par lui...» ; Cass. soc.,
Rejet 13 déc. 1973 n° 72-40.442, Bull. civ., Ch. Soc., n° 668, p. 615 : « …Dans l’exercice de la
profession d’agent commercial, ce dernier peut recruter des sous agents qui lui sont subordonnés… ».
193
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 304.
-66-

a- La pluralité des mandats

106. L’agent commercial peut être multicarte. Cela se traduit en termes


juridiques par la possibilité d’agir au nom et pour le compte de plusieurs mandants
simultanément. Le Code civil français ne fait aucune restriction particulière à cette
pratique, dès lors que le mandataire ne va pas à l’encontre des intérêts de ses
mandants. Cela a été prévu dans l’art. L. 134-3 C. com.: « L’agent commercial peut
accepter sans autorisation la représentation de nouveaux mandants. Toutefois, il ne
peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses
mandants sans l’accord de ce dernier », et dans l’al. 2 de l’art. 3 du décret-loi libanais
N. 34/67 : « Le représentant…..peut accepter des nouvelles représentations sans en
référer à son mandant à condition que l’objet de la nouvelle représentation ne soit
pas en contradiction avec celui de la première ou bien ne constitue pas une
concurrence à celle-ci ».

107. Les deux textes emploient des formulations quasiment similaires. Le texte
français désigne tacitement la condition d’obtention de l’accord pour l’acceptation de
nouvelle représentation concurrente à la principale, tandis que le texte libanais ne le
prévoit pas, à condition seulement que la deuxième représentation ne soit pas
concurrente ou en contradiction avec la précédente.

108. Nous voyons donc que le texte libanais propose un mode d’approche en
limitant la nouvelle représentation à l’objet de concurrence. C'est dire que l’objet de la
nouvelle représentation ne doit pas être concurrent ou en contradiction avec la
principale représentation, alors que le texte français a accepté cette solution à
condition que soit obtenue l’accord du mandant. En d’autres termes, l’agent
commercial peut accepter la représentation d’une entreprise concurrente s’il obtient
l’accord de son mandant, ce qui n’a pas été mentionné en droit libanais. Il s’est limité
à l’objet de concurrence comme condition d’acceptation de nouveaux mandats.

109. En d’autres termes, la possibilité d’accepter plusieurs mandants, a été


confirmée plusieurs fois, suivant l’utilisation des termes aux pluriels. L’agent
commercial peut agir « au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de
-67-

commerçants ou d'autres agents commerciaux»194 ; L’agent… « l’un de ses


mandants »…195 ; Le représentant commercial agit…. « au nom et pour le compte de
producteurs ou de commerçants »196. Donc, cette utilisation répétitive du pluriel dans
la désignation des mandants, confirme l’objectif de pluralité de mandats des deux
législateurs français et libanais. Cette pluralité confère à l’agent qui est un prestataire
de services de vente, une collaboration avec plusieurs directions commerciales,
menant des stratégies différentes, ce qui fait de lui un professionnel pluri-marchés,
avec une ampleur de vue et une souplesse d’esprit dont ses mandants peuvent
bénéficier197. C’est dire, elle est d'ailleurs bien conforme aux objectifs des parties au
contrat : l'agent par la pluralité des produits offerts acquiert une connaissance
approfondie de chacun de ses clients, peut leur présenter des produits nouveaux ou
saisonniers pour lesquels une force de vente intégrée serait trop coûteuse198.
Entreprise de services de vente, l'agent commercial offre à ses partenaires l'ampleur
de vue d'un prestataire opérant sur plusieurs marchés puisque chacune des firmes qu'il
représente a son propre marché.

110. En revanche, il ne faut pas oublier que cette pluralité atteint une limite,
mieux énoncée dans le texte français que dans le texte libanais. Nous avons déjà
mentionné que l’art. L. 134-3 C. com., a bien autorisé l’agent à représenter plusieurs
mandants, avec une interdiction des représentations concurrentes sauf accord des
mandants concernés199. Cette limite du principe d’indépendance n’est pourtant que la
traduction d’une obligation de bonne foi200, inhérente au mandat commercial201.

194
Art. L. 134-1 C. com.
195
Art. L. 134-3 C. com.
196
Art. 1 du décret-loi Libanais n° 34/67.
197
J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 6e éd., Delmas, 2005, p. 45.
198
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 29.
199
Cass. com., 19 déc. 1995: Lettre distrib. 1996-3: sous réserve qu’ils ne soient pas concurrents.
200
Dans le concept de bonne foi, Encyclopédie Dalloz Droit Civil: Verbis Bonne Foi :
n°2 : La bonne foi est l’équivalent juridique de la bonne volonté morale.
n°3 : On s’accorde à reconnaître à cette notion deux fonctions principales, c’est d’une part la
loyauté exigée dans les actes juridiques…, c’est d’autre part la croyance erronée et excusable protégée
comme telle à l’équivalent d’un droit. (dénommée Guter Glaube).
n°27 : La bonne foi s’apprécie généralement au moment de l’acte irrégulier ou de l’origine de la
situation irrégulière dont on se prévaut.
-68-

L’interdiction n’est pas non plus absolue puisqu’elle disparaît au moment où le


mandant autorise la représentation d’autres entreprises concurrentes, tandis qu’au
Liban comme nous l’avons signalé précédemment, le représentant peut accepter des
nouvelles représentations, sans en référer à son mandant, à condition qu’elles ne
soient concurrentes ou en contradiction avec la première.

111. Cette tactique a été suivie par M. ABOU EID dans son étude sur le décret-
loi N. 34/67, critiquant l’arrêt de la Cour d’appel de Beyrouth de 4 mai 1978 :

« Attendu qu’il est approuvé d’une part, que l’appelant représente toujours la
société « Tabaconi » et que la production de cette dernière est similaire de celle de la
société intimée « Fock et Fohl ». Et d’autre part, vu que l’appelant lors de la
conclusion du contrat de représentation n’a pas informé la société intimée qu’il
représente la société « Tabaconi », et que son excuse était que la société appelante ne
lui a rien demandé,

Attendu qu’il n’y a qu’un seul acheteur pour les produits, qu’il est donc normal
que si la société intimée avait eu connaissance que l’appelant représentait la société
« Tabaconi », elle ne lui aurait jamais octroyé la qualité de représentant, puisque la
gamme des produits de la société « Tabaconi » est plus vaste et diversifiée que sa
production ; que cette dernière n’est pas seulement une concurrente -puisqu’il n’y a
qu’un seul acheteur- mais qu’elle diminue beaucoup la circulation de ses produits, ce
qui est en contradiction avec l’intention des contractants lors de la conclusion du
contrat de représentation,

Attendu que le mandataire a le devoir d’informer son mandant sur toutes les
circonstances qui le conduise à modifier le mandat ou à se rétracter comme le
souligne l’article 787 Code des obligations et contrats libanais. L’appelant avait donc
le devoir d’informer la société lors de la conclusion du contrat, de sa représentation
à l’égard de la société « Tabaconi » et des problèmes de concurrence,

Attendu que, la Cour considère qu’il incombe à l’appelant, lors de la discussion


des conditions du contrat de représentation, en fonction du principe de l’équité et de

201
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 66.
-69-

la loyauté commerciale cité précédemment, d’informer la société intimée qu’il


représente la société « Tabaconi », où le cas échéant, qu’elle puisse se comporter
selon son intérêt. Ainsi l’appelant en choisissant la dissimulation, a causé un
préjudice à la société intimée ; cette dernière a le droit de demander la résiliation du
contrat de représentation sur le fondement que le fait de dissimuler, rend le contrat
vicié de dol.

Attendu que dans les circonstances présentes, il est demandé le rejet de l’action
de l’appelant, et expliciter que l’intimée a le droit de revendiquer la résiliation du
contrat de représentation »202.

Analysons les conséquences découlant de cet arrêt :

112. Retournant aux faits exposés dans l’arrêt sujet de cette analyse, nous
constatons que l’appelant avait l’intention et la volonté de dissimuler sur la société
intimée « Fock et Fohl » sa situation comme représentant pour la société
« Tabaconi ». Et puisque ces informations sont considérées comme essentielles et
fondamentales par rapport à l’intimée -vu que la société tabaconi fabrique des
produits similaires-, il était conseillé à l’appelant d’informer cette dernière.

113. Ce qui nous conduit à dire que son refus d’énoncer ces informations n’est
pas une simple dissimulation, mais au contraire un acte de mauvaise foi, parce que la
société « Fock et Fohl » aurait aimé d’être alertée sur la nature et la qualité des
marchandises produites par la société « Tabaconi » que l’appelant représente ; elle
n’aurait jamais conclu contrat, du fait que cette représentation va lui causer des
dommages étant donné la faiblesse de la distribution de ses produits.

114. En revanche, l’approche consacrée par le deuxième alinéa du troisième


article du décret-loi N. 34/67 : « accepter des nouvelles représentations sans en
référer à son mandant à condition que l’objet de la nouvelle représentation ne soit
pas en contradiction avec celui de la première ou bien ne constitue pas une
concurrence à celle-ci », indique la nécessité de se conformer au principe de l’équité

202
CA Beyrouth, 1ere Ch., n° 58/1969, arrêt n° 149 de 4 mai 1978, Albert Malek c/ Société Fock
et Fohl, Rev. al Adl, 1980, p. 124 à 127.
-70-

et de la loyauté commerciale203 prévu dans le troisième article du Code de commerce


libanais204. Ce qui signifie qu’il appartient aux commerçants de bien construire leurs
relations commerciales loin des comportements viciés qui influencent la volonté des
contractants lors de leurs engagements. De façon que, s’ils n’aboutissent pas à faire
apparaître leur bonne foi éthique, le contrat sera entaché d’un vice de consentement
qui le corrompt.

115. Il n’est pas conseillé au représentant commercial d’user de dissimulation


dans ses comportements, sous peine de retour négative. Notons que sera jugée, la
seule dissimulation qui relève de la volonté du dissimulant de cacher des
informations, au titre desquelles le contractant n’aurait pas voulu faire affaire205. En
rappelant que les degrés de dissimulation varient en fonction du sujet caché ; celui-ci
peut être sans importance, essentiel ou fondamental puisque capable d’influencer la
volonté de la tierce personne.

116. Si donc la dissimulation est du premier type, cas pardonnable, elle entre
dans le cadre du simple dol « Dolus bonus ». Mais si elle est du deuxième type -cas de
l’arrêt évoqué-, nécessitant déclaration vu l’importance du sujet masqué qui
influencera la volonté du contractant, elle sera alors considérée comme un dol
mauvais « Dolus malus ». Et le fait qu’elle soit pratiquée par le dissimulant, signifie
bien que ce dernier avait la volonté de ne rien révéler et l’intention de causer un
dommage à son cocontractant. Celui-ci devient donc responsable du dol206. En France,
la distinction entre ces deux types de dol n’a pas lieu d’être, vu que tout dol est
condamnable, étant donné que la répression du dol s’est même considérablement

203
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 1, 2004, art.
3, p. 18 et 19.
204
Art. 3 C. com. : « A défaut de toute disposition légale applicable, le juge pourra s’inspirer tant
des précédents jurisprudentiels que des exigences de l’équité et de la loyauté commerciale ».
205
R. JADAYEL, La dissimulation source de la responsabilité au niveau contractuelle et
délictuelle, Rev. al Adl, 1984, t. 4, p. 319 à 347.
206
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 3, p. 91.
-71-

alourdie avec l’atténuation de l’exigence de mauvaise foi illustrée par les nombreuses
espèces207.

117. En conséquence, l’appelant a trompé la société intimée. La faute et le dol,


basés sur les caractéristiques fondamentales de la relation, ont permis la conclusion du
contrat et ont poussé l’intimée à nommer l’appelant comme son représentant. Or, si le
vice de consentement atteint le sujet de l’obligation, s’il contient les qualités
essentielles de l’objet ou même la source de l’obligation, s’il est le motif primordial
de conclusion du contrat, alors il est cause de l’annulation du contrat relativement aux
dispositions des articles 203, 208 et 209 du Code des obligations et contrats
libanais208. Il faut encore que l’auteur qui a commis la faute et le dol ait eu la volonté
de préjudicier par des manœuvres mêmes immorales209 ayant entraîné l’autre partie à
conclure le contrat, avec un résultat qui lui a été préjudiciable.

118. Le législateur libanais n’a donc pas retenu que l’objet de la nouvelle
représentation était concurrente de la première et le représentant doit en référer à son
mandant ; le mot « se référer » exprimant prendre son accord, son avis, se réclamer…,
il y n’a pas alors adéquation entre les deux législations. En effet, l’article 3 du décret-
loi N. 34/67, devrait être plus précis, plus clair dans ses termes et devrait être modifié
comme en témoigne le texte français ; car cette restriction à la liberté de l’agent
consiste en une obligation de non-concurrence au bénéfice du mandant et du
représenté en signalant que ce dernier peut imposer au représentant commercial,
d’une façon claire et tacite, l’interdiction des actes de concurrence et
d’incompatibilité210.

207
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 436.
208
E. EID, Le fonds de commerce, t. 1, 1983, n° 79, p. 188.
209
P. BONNASSIES, Le dol dans la conclusion des contrats, th., Lille, 1955, p. 522: « …Le
contractant, qui exploite immoralement l’état… de ce contractant, commet un dol parce qu’il commet
un acte contraire à la bonne foi ».
210
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Documents Huvelin, éd. Université Saint
Joseph, t. 2, 1974, Art. 3, n° 3: « Le contrat d’agence précisera utilement l’interdiction faite à l’agent,
par le présent article, pour le cas d’incompatibilité ou de concurrence, il pourrait aller jusqu’à
interdire à l’agent, sauf agrément de la firme représentée, toute représentation d’une autre firme,
indépendamment du risque d’incompatibilité ou de concurrence ».
-72-

b- Le cumul des professions

119. Revenons aux dispositions des deux textes libanais et français ; rien
n’indique que la profession de représentant ou d’agent doive être une profession
exercée à titre exclusif, comme c’est le cas pour le VRP. La représentation peut
parfaitement constituer, pour l’intermédiaire de commerce, une occupation secondaire
pourvu qu’elle soit matériellement habituelle, et, que, dans l’esprit du représentant,
elle constitue une profession entre autres ; cette solution a été affirmée en France, par
une réponse ministérielle à une question écrite211.

120. Ceci permet aux agents commerciaux d’exercer une autre activité que celle
qu’ils exercent au titre du contrat d’agence. S’il en est ainsi, le problème du cumul des
professions se pose tout en formant une manifestation normale de la liberté de
travailler et d’entreprendre212. Pour le résoudre, il faut faire la distinction entre le cas
où l’agent exerce une autre profession principale ou secondaire qui serait libre, et le
cas où le dit agent exerce une profession salariée en vertu d’un contrat de louage de
services :

121. Dans le premier cas, celui de cumul avec une ou plusieurs professions
libres, aucun problème ne se pose. Le cumul est parfaitement valable, à condition
qu’il n’y ait pas concurrence indue de la seconde activité avec l’objet de la
représentation, ce qui a été consacrée par la loi de 1991 dans son article 15, qui
permet que cette activité ne soit exercée qu’à titre accessoire213. En revanche, les
raisons de l’éventuelle exclusion du bénéfice de la qualité d’agent, quand l’activité
d’agent est l’accessoire d’un contrat écrit passé pour un autre objet, tiennent à la
volonté de ne pas perturber l’équilibre d’une opération de distribution, automobile214
en l’occurrence.

211
J.O. Deb. Parl. AN, n° 2153, 3 oct. 1959, p. 1689.
212
Sur la liberté d’entreprendre : Cons. Const. décision 81.132 du 16 1982, D., 1983, 169, note L.
HAMON ; J. MESTRE, Le conseil constitutionnel, la liberté d’entreprendre et la propriété, D. 1884,
chron.1 ; R. SAVY, La constitution des juges, D., 1983, Chron. 105: cité par J.-M. LELOUP, op cit., p.
46.
213
Art. L. 134-15 C. com.
214
AN Séance du 23 mai 1991, JOAN, p. 2233, 2238, 2239, note M. DOUBIN.
-73-

122. Il s’agit d’exclure du domaine de la loi ceux que l’on nomme « les agents
de marque automobile », qui sont des garagistes liées aux concessionnaires. En
contrepartie du panonceau de la marque et de l’appartenance au réseau de celle-ci, le
concessionnaire leur demande de vendre, en son nom et pour son compte, un quota
annuel de véhicules. C’est, dans ce cas particulier qui n’avait pratiquement jamais
provoqué de demande d’application du décret 1958 ou de la notion de mandat
d’intérêt commun, que le droit français s’est écarté de sa tradition qui ne recherchait
pas, pour qualifier un contrat d’agence commerciale, la part occupée par l’exécution
de ce mandat dans l’activité du professionnel215.

123. L’agence commerciale peut être exercée à titre accessoire d’une autre
activité, elle, principale. On jauge assez bien ici, l’indépendance de l’agent puisqu’il
lui est possible de n’exercer une autre activité qu’en appoint ou en complément. En
effet, l’exercice à titre accessoire de l’activité d’agent commercial donne un argument
de plus à cette analyse de l’indépendance de l’agent mais surtout, il dégage clairement
l’idée qu’un agent est libre face à son mandant et libre d’organiser son activité, son
entreprise, comme bon lui semble à condition de ne pas porter préjudice aux intérêts
du mandant.

124. Dans le second cas, celui de cumul avec une profession qui suppose un lien
de subordination : ces deux activités, que tout oppose en théorie quant à leur nature
juridique, peuvent être exercées de manière cumulative mais la doctrine s’accorde
pour considérer qu’il ne s’agit là que d’une tolérance216. Le cumul ne semble pas être
conforme à l’esprit de certains des textes régissant ces deux institutions. Mais à notre
avis, cette optique est erronée : lorsqu’une personne est liée par un lien de
subordination, elle l’est uniquement dans les limites du contrat de louage de services.
Et une fois le travail accompli et l’horaire expiré, le salarié préposé redevient libre, et
pourra effectuer tout travail en dehors de tout contrôle du commettant avec comme

215
Nous pouvons citer deux décisions de la chambre commerciale de la Cour de cassation relatives
à des litiges opposant des concessionnaires à des agents commerciaux: 18 fév. 2000, arrêt n° 194, sur
pourvoi 97-21.368 pour un contrat de 1986 rompu 1992, et 19 déc. 2000, arrêt n° 2133, sur pourvoi 98-
13.262 pour un contrat ayant existé du 15 sept. au 24 nov. 1988.
216
Notamment: J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 88 et J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, op. cit.
-74-

seule restriction le respect des exigences de bonne foi217 ; le préposé doit, en effet,
s’abstenir de toute activité qui pourrait, directement ou indirectement, nuire aux
intérêts du commettant.

125. Cela est d’autant plus vrai que l’activité de l’agent commercial est par
définition une activité indépendante. Et, à ce seul titre, l’agent qui serait lié à une
autre firme par subordination, pourra à sa guise s’organiser et organiser son travail de
représentation de sorte à ne pas nuire au commettant. Il convient en effet de
reconnaître que l’agent commercial a la possibilité d’exercer une activité salariée mais
que celle-ci ne peut porter sur une représentation comme dans le cas du VRP. Ce n’est
qu’avec ses mandants que l’agent ne peut pas être soumis à un contrat de travail. Au
regard du statut de VRP, l’activité d’agent commercial qui serait exercée avec celle de
VRP, ferait perdre à ce salarié le statut de VRP218. C’est ainsi qu’en application des
principes qui précédent, le cumul des professions de VRP et de représentant
commercial est en principe valable avec les réserves concernant les règles de non-
concurrence.

126. En tout cas, l’indépendance du représentant ne peut être, à notre avis,


exclue totalement ou partiellement par l’effet de stipulations contraires, car elles
dénatureraient ce genre de mandat commercial, compromettant l’un des éléments
constitutifs. Toutefois, cette règle ne nous paraît pas faire obstacle à des stipulations
qui réserveraient un certain contrôle au représenté, telles que la stipulation imposant
au représentant l’obligation de rendre compte de ses démarches au représenté, de lui
fournir des rapports périodiques sur son activité. De la sorte, le statut du représentant
commercial, au sens du droit libanais, se confondra avec celui de l’agent commercial
au sens du droit français, dès lors que, dans ce droit, la seule caractéristique

217
Art. 1134 C. civ.: « les conventions légalement formées … doivent être exécutées de bonne foi ».
218
Cass. soc., 8 nov. 1967, Bull. n° 701, p. 594 : un représentant qui ne recevait qu’à certaines
occasions des instructions précises du mandant, qui, au cours de ces dernières années d’activités, (…)
payait l’impôt de la patente et celui frappant les bénéfices des professions non commerciales et (…)
supportait, en outre, les cotisations de travailleur indépendant, n’est pas fondé prétendre avoir eu la
qualité de salarié en l’absence d’un lien de subordination à son employeur.
-75-

distinctive du représentant commercial par rapport à l’agent commercial consiste en


ce que, à la différence de ce dernier, il est soumis à la susdite obligation219.

127. En conclusion, cette liberté de l’agent en fait un acteur très intéressant dans
les réseaux de distribution concentrant mandant, à la vente par exemple, services
périphériques à cette vente, multiplicité des relations avec les clients et les
producteurs. Il présente les avantages d’être le noyau d’un réseau de distribution, et
ceci aura pour effet de dynamiser ou d’améliorer les débouchés des produits ou les
services des mandants. Après avoir traité dans un premier paragraphe la spécificité de
l’indépendance juridique caractérisée par l’absence de lien de subordination, nous
devons dans un second paragraphe, vérifier les conséquences assorties du défaut
d’indépendance.

Paragraphe 2 : La sanction de l’exigence

128. L’indépendance est une qualité intrinsèque de l’agent commercial et toute


clause visant à entraver cette indépendance permet de requalifier le faux agent
commercial en salarié. Il est ainsi considéré comme un véritable créateur d'entreprise
et ne doit pas être sous la subordination du ou de ses mandants. C'est ce qui le
distingue du représentant salarié (VRP). La qualification légale de louages de services
du contrat liant le représentant de commerce statuaire et le commerçant pour le
compte duquel est assurée une mission de prospection constitue, malgré une
obligation certaine de collaboration réciproque des parties220, un obstacle technique
majeur à la reconnaissance de l’existence de propriété a minima commune entre les
parties et a maxima propre au représentant, de la clientèle : l’appartenance exclusive à

219
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 672 ; E. TYAN, Droit commercial,
Entremise commerciale, p. 467.
220
Ph. GRIGNON, Le fondement de l’indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce,
préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, n° 33 et s.
-76-

l’employeur des fruits du travail du salarié est, en effet, un des effets du contrat de
travail221.

129. Sur le plan juridique, le seul critère de distinction entre les statuts du
représentant commercial et du représentant de commerce, est l’existence ou non d’un
lien de subordination juridique : le représentant commercial exerce ses activités
librement, à l’inverse du représentant de commerce, qui est soumis à l’autorité du
représentant. Classiquement, le contrat de travail et le contrat de mandat (puisque la
représentation conventionnelle s’identifie au mandat en droit français) sont deux
contrats nommés qui se distinguent clairement. Le premier se caractérise par un lien
de subordination juridique, le second par une certaine indépendance du représentant.

130. En France, si la loi n’a jamais donné de définition précise du représentant


de commerce, celui-ci a toujours été assimilé à un intermédiaire entre les
commerçants et les clients comme le souligne M. Ondet222. La représentation
commerciale a été définie en doctrine comme l'activité qui consiste, dans un premier
temps, en une circulation à l'extérieur de l'entreprise pour prospecter, rechercher la
clientèle et se poursuit, dans un deuxième temps, par la négociation d'une ou plusieurs
affaires avec cette clientèle223.

131. La jurisprudence a fait sienne cette analyse, subordonnant le bénéfice du


statut en définissant la mission du représentant de commerce comme l’activité de
prospection de clientèle224 pour le compte d’une ou plusieurs entreprises en vue de

221
Th. REVET, Rupture des contrats de dépendance et rupture du contrat de travail, Rev. Jur.de
l’Ile de France, t. 1, 1996.
222
P. ONDET, Le représentant de commerce, th., Poitiers, 1926, p. 29 : « Le représentant de
commerce est ou non mandataire selon qu’il a ou qu’il n’a pas le pouvoir de conclure une affaire au
nom de la maison dont il s’occupe ».
223
A. De THEUX, Le droit de la représentation commerciale, Etude comparative et critique du
statut des représentants salariés et des agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit
Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1, 1975, no 68 ; J. GRIMALDI d'ESDRA, La mission du
VRP, Rép. trav., 1996, chron. p. 1 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants, Placiers), Rép.
com., 2007, Ch.1, parag.1.
224
CA Paris, Ch. 22 A, 13 fév. 2008, n° 06/ 08646 : « La représentation implique la prospection
d’une clientèle à l'extérieur de l'entreprise ».
-77-

prendre des commandes225. L’activité du représentant présente ainsi deux


caractéristiques : prospection226 et prise d’ordres227. Ces deux derniers en tant que
suivies par la jurisprudence228, se retrouvent dans la législation et les textes
applicables aujourd’hui aux représentants de commerce.

132. C’est la loi du 18 juillet 1937, qui a assimilé les représentants de commerce
à des salariés, dès qu’ils exercent leur activité dans des conditions déterminées229. Elle
a attribué aux représentants de commerce les termes génériques ou plus exactement,
la formule de voyageurs, représentants et placiers (VRP). Selon celle-ci, il y avait un
contrat de louage de service (contrat de travail) lorsque le VRP :

- Travaillait pour le compte d’un ou plusieurs employeurs ;

- Exerçait en fait d’une façon exclusive et constante sa profession de représentant ;

- Ne faisait effectivement aucune opération commerciale pour son compte


personnel ;

- Était lié à son employeur par des engagements déterminant la nature des
prestations de service ou la nature des marchandises offertes à la vente ou à l’achat, la
région dans laquelle il devait exercer son activité ou les catégories de clients qu’il
était chargé de visiter et le taux des rémunérations.

133. La loi du 18 juillet 1937 n’était pas d’ordre public et les parties pouvaient
donc l’écarter d’un commun accord en précisant dans le contrat que l’intéressé n’était
pas engagé en qualité de salarié, c'est dire de voyageur, représentant et placier, mais

225
H. FLICHY, Représentant de commerce, (Statut juridique, fiscal, et social du VRP), 14e éd.,
Delmas, 2003, n° 102.
226
La prospection est habituellement définie comme l'activité consistant à rechercher de manière
méthodique des clients potentiels. Pour le cas particulier du VRP, la prospection, en contrepartie de
laquelle le représentant ne peut se voir imposer de verser à l'employeur un prix représentant la valeur
de la clientèle qu'il sera chargé de visiter (Cass. soc. 3 oct. 2006, no 06-42.320), suppose une recherche
de clientèle selon certaines modalités.
227
CA Aix-en-Provence, Ch. 09 B, 8 nov. 2007, n° 06/03811 : « La représentation ne suppose pas
seulement la prospection de clientèle mais également la prise ainsi que la transmission de
commandes ».
228
CA Rennes, Ch. Des Prud’H, 08, 6 mai 2010, n° 08/00512 : « chaque contrat de travail a pour
objet la représentation, prospection de clientèle pour obtenir et transmettre des commandes, et fixe une
rémunération à la commission ».
229
M. DIJAN, Le représentant de commerce et La loi du 18 juill. 1937, th., Toulouse, 1941.
-78-

en qualité de mandataire. D’où une nouvelle loi du 7 mars 1957 intervenue pour
supprimer la possibilité d’écarter l’application du statut du VRP lorsque ses
conditions d’application sont remplies. Cette dernière loi a donné au statut de
représentant de commerce un caractère d’ordre public en précisant que les contrats
des représentants de commerce étaient, nonobstant toute stipulation contraire expresse
ou en leur silence, des contrats de travail, en ajoutant que l’absence de clause
interdisant soit l’exercice d’une autre profession, soit l’accomplissement d’opérations
commerciales personnelles ne peut faire obstacle à l’application des dispositions du
statut230.

134. En effet, il leur est préféré les termes de « représentants de commerce » ou


« agents technico-commerciaux231» dans le cas où ils fournissent une certaine
assistance technique aux clients. Cette qualité salariée a été accordé au représentant de
commerce pour qu’il puisse bénéficier des nouvelles dispositions sociales du front
populaire sans qu’il y ait lieu de rechercher si, comme pour les autres salariés, il était
placé sous une réelle subordination juridique.

135. De ce qui précède, nous constatons qu’un intermédiaire ne peut se prévaloir


du statut de VRP que s’il réunit toutes les conditions de l’art. L. 7311-3 C. trav., peu
importe donc que ce dernier ne soit pas placé dans un lien de subordination à son
employeur232. Telle est la solution, ancienne233 et constante rappelée par la Cour de
cassation dans un arrêt du 13 janvier 2009234. En outre, la législation du travail se
trouve écartée235 lorsque l’intermédiaire a adopté le statut des agents commerciaux
institué par le décret du 23 décembre 1958, alors même qu’il ne profite pas de toutes
les libertés que lui accorde ce statut et qu’il exerce en fait son activité dans des
conditions qui ne le différencient pas d’un VRP. En tant que la qualité de VRP est
présumée, la preuve de l’existence d’un contrat d’agent commercial devra être établie

230
H. FLICHY., Représentant de commerce, op. cit., n° 105.
231
L’équipe rédactionnelle de la Rev. Fiduciaire, Les VRP, éd. La villeguérin, 1998.
232
S. MAILLARD, Absence de lien de subordination et statut de VRP, D., 2009.
233
Cass. soc., 12 mars 1942, JCP 1942. II. 1952, note PAILLOT ; 3 déc. 1969, D., 1970. 184, 2e
espèce, note J.-J. DUPEYROUX ; 18 févr. 1976, Bull. civ.,V, n° 487 ; 4 janv. 1979, Bull. civ., V, n° 9
234
Cass. soc., 13 Janv. 2009, n° de pourvoi: 08-40157, Bull. V, 2009, n° 10.
235
Cass. soc., Rejet, 2 juin 2010, n° 08-43.525 ; CA Poitiers, Ch. soc., 22 sept. 2010, n° 07/02279.
-79-

par celui qui désire s’en prévaloir. Pratiquement, l’intéressé ne sera considéré comme
agent commercial que s’il est titulaire d’un contrat écrit et s’il a accompli les
formalités auxquelles sont astreints les agents commerciaux236.

136. Donc le VRP, en tant qu’intermédiaire de commerce (il prospecte la


clientèle et reçoit les commandes pour le compte de l'entreprise, intermédiaire entre le
producteur et le client ou le distributeur237), jouit d’une certaine indépendance dans
son travail et, de ce fait, se différencie des autres salariés de l’entreprise. Il bénéficie
d’une protection juridique spécifique lui permettant d’avoir un droit sur la clientèle
qu'il a apporté à l’entreprise, sous forme d'une indemnité de clientèle (applicable en
cas de licenciement).

137. En revanche, une nette différence existe entre les représentants


commerciaux et les VRP. Il ne suffit pas de dire que les uns sont des intermédiaires
du commerce libre, et les autres salariés, car le représentant commercial effectue
aussi bien un travail salarié ; il ne travaille pas gratuitement. Cette différence de statut
entres les deux catégories d’intermédiaires s’établit surtout au niveau des liens qui
existent entre elles et le représenté238. La distinction entre agents commerciaux et
VRP porte essentiellement sur la nature du lien contractuel, établi entre les
mandataires et leurs mandants respectifs, qui est un lien juridique. Selon M.
Hanine, «…en pratique, il faut reconnaître que dans les faits, règne une certaine
confusion lorsqu’il s’agit de différencier les professions de VRP et d’agent
commercial… »239.

138. En effet, le VRP est un employé qui touche un salaire déterminé suivant
son contrat de travail240. Il est soumis à son employeur en vertu d’un lien de

236
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, Paris, 1967, p. 299.
237
Cass. soc., Rejet 22 oct. 2008 n° 07-42.571 : « La représentation implique la prospection d’une
clientèle à l'extérieur de l'entreprise ».
238
Cass. soc., 5 janv. 1959, JCP, 1959, II, 11195 note BIZIERE ; Cass. com., 27 janv. 1959, Bull.,
III, 45.
239
J.- J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 18, p. 5.
240
CA Paris, PÔLE 06, Ch. 0412, oct. 2010, n° 09/00731 ; CA Paris, PÔLE 06 Ch. 08, 20 mai
2010, n° 08/09948 ; CA Poitiers, Ch. soc., 30 mars 2010, n° 08/04237 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 09
A, 21 janv. 2010, n° 08/01842 ; CA Grenoble, Ch. soc., 1 juill. 2009, n° 08/04022 : Cass. civ., Rejet,
-80-

subordination, d’où contrairement, l’agent commercial français ou le représentant


commercial libanais sont sans lien de subordination et libres dans l’organisation de
leur travail241. En tout état de cause, le VRP ne peut se soustraire au pouvoir du
contrôle et de direction qu’exerce sur lui son employeur, son autonomie s’arrête au
fait qu’il ne travaille pas dans l’enceinte de l’entreprise. Ainsi, il a été jugé que la
personne qui a obtenu une exclusivité sur tout le territoire français et organise
librement son activité jouit d’une indépendance incompatible avec le statut de VRP242.
Le statut de VRP peut néanmoins être retenu même s’il jouit d’une large liberté dans
l’exercice de sa profession. Pour cette raison, il est régi par les dispositions du Code
du travail, celles du Code de la sécurité sociale, et en général, par toutes les
dispositions rentrant dans le cadre de la législation de travail243.

139. Cette question au Liban ne se pose pas. Il y existe certes une catégorie244 de
VRP dont les membres ne jouissent pas d’un statut particulier. Ils sont purement et
simplement régis par les dispositions générales de la législation du travail, au même
titre que les salariés ordinaires employés dans n’importe quel domaine, et sans le
moindre traitement spécifique. Cependant, ces derniers, au Liban, jouissent

28 mai 2009, n° 08-16.143 ; CA Riom, 23 juin 2009, n° 08/02315 ; CA Bordeaux, Ch. soc., Sect. A,
avr. 2009, n° 07/04671.
241
Cass. soc., 5 janv. 1990, Bull. com., V, n° 7.
242
Cass. soc., 26 oct. 1982, Bull. com.,V, n° 154.
243
Sur la distinction entre le lien de subordination du salarié et la liberté du mandataire en droit
américain, v. W. SEAVY, The law of Agency, West Pub. Co., 1964, p. 8, n° 6 : cité par M.
MAHMASSANI op. cit.
244
En ce sens les articles suivants de la Loi du 23 sept. 1946 portant Code du travail Libanais, dans
sa teneur modifiée au 31 déc. 1993 et au 24 juill. 1996 :
Art. 3. Les salariés se répartissent en employés et en ouvriers: L'employé est tout salarié qui
accomplit un travail de bureau ou un travail non manuel ; L'ouvrier est tout salarié qui n'est pas de la
catégorie des employés. Quant aux stagiaires, provisoires ou journaliers, ils sont assimilés aux
employés s'ils accomplissent un travail confié normalement à des employés et ils sont assimilés aux
ouvriers s'ils accomplissent des travaux autres. Le stagiaire est tout salarié encore en formation et qui
n'a pas acquis dans sa profession la technique du salarié qualifié.
Art. 4. La corporation est un ensemble de salariés ou d'employeurs ou de maîtres-artisans qui font
partie d'une des catégories prévues à l'article suivant et groupés en associations selon les conditions
fixées au titre IV de la présente loi.
Art. 5. Les corporations se répartissent en quatre grandes catégories:
1) les corporations industrielles,
2) les corporations commerciales,
3) les corporations agricoles,
4) les corporations des professions libérales.
-81-

certainement de quelques avantages supérieurs à ceux qui sont accordés à titre


particulier par l’employeur en vertu du contrat. Il en est ainsi du taux assez important
des commissions -taux qui rentre dans le calcul du salaire-, des primes, des bonus, des
indemnités de déplacements, etc…245. Mais bien sûr, ces avantages demeurent à la
discrétion de l’employeur ; ils doivent être négociés.

140. En outre le représentant commercial, plus couramment appelé en France


agent commercial, est souvent un mandataire dans le plein sens du terme ; il s’agit
d’une personne, physique ou morale suivant les deux droits français et libanais, qui
généralement, a érigé ses activités en entreprise professionnelle plus ou moins
importante, selon le volume de ses affaires et le nombre de représentations qu’elle
détient246. Tandis que le VRP, ne peut être qu’une personne physique, étant liée à ses
commettants par un contrat de louage de service. Des représentants pourront sans
doute se grouper en société civile mais chacun d’eux, pour bénéficier du statut, devra
traiter à titre personnel avec ses commettants.

141. De même, la création entre représentants d’une association en participation


occulte ne prive pas les intéressés des avantages du statut. Le représentant
commercial n’a d’autres liens avec la firme représentée que ceux prévus au statut
particulier professionnel, à la réglementation du mandat en général et au contrat
d’agence. Concernant ce dernier, il est à remarquer que les clauses de ce contrat ne
pourront assujettir le représentant à un lien de subordination, auquel cas celui-ci
pourra se prévaloir de toutes les dispositions de la législation du travail. Dans tous les
cas, le lien de subordination est un élément de fait qui peut être prouvé à tout moment

245
En ce sens l’article 57 de la Loi du 23 sept. 1946 portant code du travail Libanais, dans sa teneur
modifiée au 31 déc. 1993 et au 24 juill. 1996 : « Par salaire, on entend la rémunération de base
calculée au temps et encaissée par le salarié ainsi que les majorations et commissions ajoutées au
salaire de base » ; et l’article 68 du code de la sécurité sociale libanaise, mis en exécution et promulgué
par Décret n° 13955 du 26 sept. 1963 et modifié jusqu'au 31/12/1998 : « Le gain, servant de base au
calcul des cotisations, comprend le revenu total produit par l'emploi, y compris tous les éléments et
compléments et, notamment, la rétribution habituelle des heures de travail supplémentaires, les
rétributions habituelles versées par des tiers (pourboires), ainsi que les avantages en nature ».
246
Cass. com., 26 juin 1961, Bull. civ., 1961. III, 246 : La distinction du mandate et du louage de
services ; Cass. soc., 1 juin 1961, Bull. civ., 1961, IV, 473 ; Cass. soc., 28 avr. 1960, Bull. civ., 1960,
IV, 322 : La distinction VRP et agent commercial.
-82-

par tous les moyens de preuve247. En France et au Liban, les représentants


commerciaux jouissent d’un statut particulier qui définit plus ou moins
rigoureusement leurs droits et obligations vis-à-vis de la firme représentée et des tiers.

Nous pouvons tirer les conséquences suivantes de cette différence :

142. En premier lieu, quand le représentant commercial est tenu à une


obligation de non-concurrence, le VRP est tenu à celle d’exclusivité absolue248. En
effet, le représentant commercial peut représenter plusieurs firmes à condition que
leurs produits respectifs ne soient pas concurrentiels. Cependant le VRP est tenu de
représenter exclusivement249 son employeur sans possibilité pour lui d’avoir d’autres
représentations à titre de VRP sauf l'autorisation préalable de son employeur250
quelles que soient leurs natures et même si elles ne sont pas de nature
concurrentielles251. C’est ce qui explique le fait que les VRP, en général, choisissent
des firmes qui fabriquent un grand nombre de produits, ou même des agents
commerciaux qui détiennent un grand nombre de représentations. Après tout, il est
normal que le VRP ne puisse pas avoir plus d’une représentation car le lien de
subordination existant entre le VRP et le premier employeur s’oppose à ce qu’un
second lien de subordination puisse exister entre le même VRP et une autre firme.
C’est ce qui, d’ailleurs, explique que le VRP, soit régi par les dispositions du Code du
travail, car s’il ne peut représenter plus d’une seule firme, il mérite protection.

143. En second lieu, le VRP n’est pas un commerçant et ne peut se voir opposer
les règles du droit du commerce à l’occasion de l’exercice de ses activités ; il l’est
l’égal en ce sens du représentant en droit français, tandis que, le représentant

247
Comme élément de preuve de la condition de salarié, les clauses d’essai et de préavis retenues en
France par le conseil des Prud’hommes dans une décision infirmée par la Cour d’appel de Paris sur
contredit du requérant, par un arrêt du 3 fév. 1969, RTD civ., 1969, p. 1073, n° 13.
248
Cass. com., 22 mai 1967, Bull. civ., 1967, III, 189, mais cela n’empêche pas le représentant
commercial d’agir en exclusivité.
249
CA Nancy, 4 juin 1959, D, 1959, 373 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants,
Placiers), Rép. com., 2007, op.cit. ; Cass. soc., 6 oct. 2010, n° 09-68.325.
250
Cass. soc., 23 mars 1953, D., 1953. 370 ; Cass. soc., 17 juin 1970, D., 1971. 165, note S.
DURETESTE.
251
Cass. soc., 17 mars 1970, D., 1970, somm. 152 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs,
Représentants, Placiers), Rép. Com., 2010, Ch. 3, parag. 3.
-83-

commercial libanais est un commerçant suivant les dispositions de l’article premier du


décret-loi N. 34/67. C’est du moins vrai pour le Liban étant donné que des
contestations sérieuses ont eu lieu en France à propos du caractère commercial ou
civil de l’activité du représentant commercial ; finalement la jurisprudence a adopté le
principe de non commercialité pour ce qui est de l’agent commercial252, ce que nous
traiterons postérieurement en détail dans le second titre de ce chapitre.

144. En troisième lieu, le VRP agit toujours pour le compte de son employeur.
Sa mission se limite à recueillir uniquement les demandes, car il ne représente pas
l’employeur au sens juridique du terme bien qu’il soit appelé représentant du
commerce. En revanche, l’agent commercial si on l’appelle représentant commercial,
c’est qu’il représente juridiquement la firme productrice ; il peut traiter aussi bien
pour le compte et au nom de la firme représentée que pour son propre compte et en
son propre nom. Il peut tout aussi bien conclure les contrats avec la clientèle qu’il
aurait pu prospecter personnellement ou par l’intermédiaire de VRP travaillant à son
service.

145. En quatrième lieu, la commission touchée par le VRP à titre de


rémunération en plus de son salaire compte obligatoirement dans le calcul de
l’indemnité de licenciement et des cotisations à verser à la caisse de sécurité sociale.
Par contre, pour ce qui est du représentant commercial, la commission par lui touchée
n’est qu’un élément d’appréciation parmi tant d’autres appartenant au juge pour
l’appréciation de l’opportunité et du montant d’une éventuelle indemnité.

146. En cinquième lieu253, malgré la différence de statut entre VRP et


représentant commercial, le cumul des deux occupations est parfaitement valable à
condition, toutefois de respecter la règle de non-concurrence. En effet, un VRP peut, à
titre accessoire, être agent commercial et détenir d’autres représentations qui ne
seraient pas concurrentielles à celle faisant l’objet de son emploi. La situation n’est
pas la même que celle dans laquelle le VRP ne peut être subordonnée en même temps

252
Cass. com., 26 fév. 2008, n° de pourvoi : 06-20772 : « l'agent commercial, simple mandataire
qui n’a pas de clientèle propre, ne peut être titulaire d'un fonds de commerce, et n'a pas la qualité de
commerçant » ; CA Besançon, 22 oct. 2008, 08/ 1385, CA Paris, 25 juin 2008, 08/3132.
253
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 33.
-84-

à plusieurs personnes sans créer un conflit de subordinations et causer au premier


employer les préjudices éventuels pouvant résulter de la seconde subordination. Cela
est d’autant plus vrai que le lien de subordination suppose la liberté du patron dans la
détermination des conditions du travail et leur modification, surtout pour ce qui est de
l’horaire et des jours de vacances payées, et des heures supplémentaires…En
revanche, dans le cas de cumul, l’employeur du VRP peut demeurer parfaitement
maître, et donner les ordres qui lui conviennent à son employé sans risque de se voir
un jour opposer des contre-ordres résultants d’une autre subordination. En même
temps, le VRP, pour ce qui est de l’agence, serait libre d’organiser son travail de
manière à ne pas porter la moindre atteinte ou le moindre préjudice au libre exercice
par l’employeur de ses prérogatives résultant du lien de subordination. Ce même
raisonnement s’applique dans le cas où l’agent commercial se ferait accessoirement
employeur à titre de VRP.

147. En sixième lieu, le représentant commercial peut employer des VRP à son
service, car étant le mandataire de la firme représentée, il peut aussi agir pour son
compte et en son nom254. Mais cela ne veut pas dire que les VRP ainsi recrutés sont
embauchés directement par la firme représentée par l’agent, à moins que le contrat de
ce dernier avec celle-ci ne lui confère ce droit. En réalité, dans la majorité des cas,
l’agent en tant que gérant d’une entreprise indépendante, embauche les VRP ces
derniers devant être responsables devant lui uniquement. Par contre, les VRP,
n’agissant pas pour leur propre compte, et n’étant point indépendants dans
l’organisation de leurs activités, ne peuvent se faire assister par des VRP. Il résulte de
ce qui précède que lorsque le VRP, est en même temps représentant commercial de
firmes non concurrentielles de son employeur, il peut se faire assister par des VRP, et
même par des sous-agents255. Mais il ne pourra agir qu’en sa qualité d’agent, et en

254
CA Paris, 3 fév. 1969, cité par E. TYAN, op. cit.
255
Art. 3 du décret-loi libanais n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans
l’exercice des activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale
habituelle, et peut plus particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
-85-

cette qualité seulement. Le mandat, par conséquent, conféré au sous-agent, ainsi


que l’activité confiée à ses VRP assistants ne pourront en aucun cas concerner ses
propres activités en tant que lui-même VRP.

148. En septième lieu, les instructions données au VRP par l’employeur sont
des ordres256 et il est tenu de les exécuter. Il doit augmenter la clientèle de son
employeur, mais il s’oblige aussi à garder le contact avec la clientèle antérieurement
formée par celui-ci. Il est tenu aux horaires de travail de son employeur et aux rendez-
vous pris par celui-ci auprès de ses clients. Le représentant commercial, par contre,
est libre dans la prospection de la clientèle ; les instructions à lui données ne sont
jamais des ordres257. D’un temps à l’autre, il rend simplement compte de sa gestion ;
il s’agit là de la caractéristique du statut de mandataire qui est principalement celui du
représentant. Cependant, il faut se garder de confondre intermédiaire du commerce
libre ou mandataire avec le représentant commercial, car si ce dernier est
obligatoirement libre, l’inverse n’est pas vrai.

149. Après avoir exposé le critère d’indépendance nécessaire pour le bénéfice


du statut de représentant commercial, il s’agit d’analyser dans un deuxième
chapitre le rôle principale dans l’accomplissement de la mission du représentant
commercial, qui est l’agissement pour le compte d’autrui, en exerçant des actes
juridiques au nom du représenté.

3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs salaires
ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et dans
ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
256
J. HEMARD, RTD civ., 1966, p. 986, n° 11: la critique de la décision de la CA Colmar qui a
considéré le fait de recevoir des directives comme caractéristique du lien de subordination.
257
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 18 ; Cass. soc., 12 mars 1953, Bull.
civ., 1953, IV. 152 ; Cass. soc., 15 oct. 1953, Bull. civ., 1953, IV, 455.
-86-

DEUXIÈME CHAPITRE

LA TENEUR DE L’ACTIVITÉ

150. En tant que mandataire, l’agent commercial dans le droit français, ou le


représentant commercial dans le droit libanais, doit accomplir sa mission au nom et
pour le compte de son mandant, ce que signale l’art L. 134-1 C. com. : L'agent
commercial est un mandataire qui, ... est chargé, de façon permanente, de négocier
et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de
prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de
commerçants ou d'autres agents commerciaux… Ainsi que l’art. 1 du décret-loi N.
34/67 : Le représentant commercial est le mandataire qui, … entreprend des
négociations pour conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de
prestation de services,… au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur
compte.

151. Suivant ces deux définitions, la qualification de l’agent commercial ou du


représentant commercial suppose, conformément à la qualification de mandat, qu’il
accomplisse des actes juridiques au nom et pour le compte du mandant. D’où deux
phases successives à aborder dans ce chapitre ; une première section « au nom
d’autrui…», une seconde « pour le compte d’autrui… », selon lesquelles les
opérations doivent être exécutées par le mandataire ; de ce fait découlera pour les
représentants qui agissent pour le compte d’autrui une distinction suivant le nom sous
lequel ils agissent : soit leur nom propre, c’est le cas des mandataires, soit le nom
d’autrui, c’est le cas des commissionnaires.
-87-

SECTION 1

L’ACTION AU NOM D’AUTRUI

152. L'agent commercial, ou bien le représentant commercial en tant que


mandataire, agissent au nom de leurs mandants, comme le prévoit l'art. L. 134-1 du
Code de commerce et l’art. 1 du décret-loi N. 34/67. L’essor de l’agence commerciale
a entraîné une adaptation particulière du mandat classique puisqu’elle couvre un
champ d’application à la fois étroit et plus large que le mandat du Code civil.

153. Elle a un champ d’application plus étroit car l’agent commercial ne peut
conclure que certaines actes258 : c'est dire qu’il ne peut effectuer en droit français que
des opérations de vente ou d’achat de biens mobiliers ou de services ou des opérations
de location sur ces mêmes biens259. De même, le représentant commercial libanais ne
peut que conclure des achats, des ventes, des locations ou des prestations des
services260.

154. Juridiquement, dans la mesure où il agit en son nom, il est personnellement


tenu des obligations qu'il a contractées avec un tiers pour le compte d’autrui261. Le
champ d’application est également par certains aspects plus large car l’agent doit
effectuer des actes juridiques dans le cadre des pouvoirs qui lui sont confiés lors de
l’exercice de sa mission, mais ces actes sont le résultat des actes matériels qui les
précédent dans l’exercice de la promotion des produits du mandant, la prospection de
clientèle et la négociation des contrats précités262 : d’où la nécessité de vérifier la
nature des actes accomplis, sujet de notre premier paragraphe ; nous y aborderons
l’étendue des actes accomplis au nom d’autrui et la question de gestion du fonds de

258
En d’autres termes, nous citons par exemple quelques actes exclus et qui n'entraient pas dans le
champ d’application du statut des agents commerciaux : « Les ventes de gazomètres réalisées avec son
intervention » : CA Lyon, Ch. civ., 01 A, 9 sept. 2010, n° 08/02259 ; « Les opérations sur les
immeubles » : B. BOULOC, Mandat, Mandataire, Cessation du contrat, com., 7 juill. 2004, D., 2004,
2230, obs. B. SAINTOURENS, RTD com., 2005 p. 162 ; « Les opérations de banque » : B. BOULOC,
Agent commercial, Statut légal, Intermédiaire en opérations de banque (non), RTD com., 2004, p. 587.
259
Art. L. 134-1 al.1 C. com.
260
Art. 1. al.1 décret-loi n° 34/67.
261
A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément d'appartenance du fonds, D., 2012,
Ch. 13, n° 182.
262
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 188 et s.
-88-

commerce par laquelle un mandataire est chargé de gérer un fonds, au nom et pour le
compte d'un mandant : ce sera notre deuxième paragraphe.

Paragraphe 1 : La nature des actes

155. En revenant aux dispositions des deux textes libanais (art. 272 C. com. et s.)
et français (art. 1984 C. civ.), il s’avère que le mandataire libanais conclut des actes
ou des affaires sous condition de l’acceptation du mandataire, tandis que le
mandataire français « fait quelque chose ». Donc, en première déduction, apparaissent
la simplicité et la clarté du texte libanais face au texte français, où la notion de « faire
quelque chose » au nom de quelqu’un rappelle souvent celle d’un acte juridique263.

156. En outre, on entend par acte juridique, le mécanisme par lequel toute
manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit264. La plupart du
temps, la tâche confiée au mandataire n'est que ponctuelle ; elle consiste en
l'accomplissement d'un ou plusieurs actes juridiques isolés. En voici quelques
illustrations : crédit-bail265, pool bancaire266, société en formation267, caution268 dans

263
Il en découle selon AUBRY et RAU, que le mandat ne consiste pas faire des actes quelconques,
notamment des actes matériels, mais seulement des actes juridiques, pour le compte d’autrui : C.
AUBRY et C. RAU, Cours de droit civil français, par E. BARTIN, t. 6, 5e éd., LGDJ, Paris, 1920, p.
153 : cité par S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E.
JAYME, Litec, 2003 ; J. GHESTIN , M. BILLIAU , Traité de droit civil, Les obligations, les effets du
contrat, Paris, 1992, n° 793 : « En dépit du lien qui unit la représentation au mandat, la Cour de
cassation n’hésite cependant pas à admettre la qualification de mandat pour l’accomplissement de
simples actes matériels » ; Cass. civ., 19 fév. 1968, D., 1968, 393 : Doit être cassé l’arrêt qui pour
qualifier de contrat d’entreprise une convention intervenue entre les parties se fonde sur le fait que si
l’un avait donné à l’autre, « pouvoir… de confier la construction d’une maison à l’entrepreneur de son
choix, en précisant le type, le plan et le prix ». La Cour de cassation casse cet arrêt au motif qu’il s’agit
d’un pouvoir d’accomplir pour leur compte (les mandants) un acte juridique en l’espèce, plus que d’un
simple mandat grave et gratuit.
264
J. CARBONNIER, Droit civil, Les biens et les obligations, vol. 2, PUF, Quadrige, 2004, p. 1939
; Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.
cit., n° 181.
265
Mandat donné à un crédit-preneur d'acheter et de réceptionner au nom et pour le compte de
l'établissement de crédit-bail, dont la fonction est purement financière, le bien qui sera l'objet de la
location : CA Versailles, 6 mai 1997, D. aff. 1997, p. 1117.
266
Pouvoir spécial donné par écrit au chef de file d'un pool bancaire de déclarer les créances des
autres banques à la procédure collective du débiteur : Il s'agit d'une exigence maintes fois rappelée par
la Cour de cassation ; V. ainsi Cass. com., 16 oct. 2001, D., 2001, act. jurispr. p. 3275, obs. A.
-89-

la perspective d'une cession d'actions, mandat donné à une banque d'affaires 269 ou à
un dirigeant social270 de trouver un acquéreur.

157. Revenant aux dispositions des textes libanais (décret-loi N. 34) et français
(L. 134-1 C. com.), quant aux actes eux-mêmes que le représentant ou l'agent a
mission de négocier et éventuellement de conclure, ces articles en fournissent une
énumération très large. Les deux textes prévoient que l'activité s'étend à des achats,
des ventes, des locations ou des prestations de services.

158. Ce n'est pas uniquement pour le compte de vendeurs qu'agissent les agents
commerciaux. La qualité d'agent commercial est donc acquise à ceux qui recherchent
au nom et pour le compte d'autrui des fournisseurs de biens. Elle est également offerte
à ceux qui, agissant pour des fournisseurs ou des loueurs de services, recherchent des
prestataires ou des locataires. Sera agent commercial celui qui cherchera une clientèle
pour le compte d'une entreprise de location de matériel ; sera également agent
commercial celui qui recherchera des fournisseurs ou des loueurs de services pour le
compte de ses mandants, tel l'agent de publicité qui, pour le compte des
« annonceurs », recherche des « supports »271. La qualité d'agent commercial n'est
donc en rien limitée ni par l'objet des opérations négociées ou conclues ni par la

LIENHARD ; Ass. plén., 26 janv. 2001, JCP, E, 2001, n° 14, p. 617, note M. BEHAR-TOUCHAIS ;
RTD com., 2001, p. 508, obs. A. MARTIN-SERF ; RD bancaire et financier 2001, n° 66, note F.-X.
LUCAS ; Cass. com., 30 mars 1999 : Bull. Joly 1999, p. 764, note J.-J. DAIGRE ; Cass. com., 17 déc.
1996 : JCP E 1997, II, 941, note M. BEHAR-TOUCHAIS.
267
Mandat donné par des associés, dans les statuts ou par acte séparé, à l'un ou plusieurs d'entre eux
ou au gérant non associé qui a été désigné, de prendre des engagements pour le compte de la société en
formation. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que les modalités en soient précisées par le mandat,
l'immatriculation de la société au registre du commerce emportera reprise de ces engagements par
ladite société : D., n° 67-236, 23 mars 1967, art. 26. - C. com., art. L. 210-6.
268
Procuration donnée à un notaire de se porter caution des dettes d'une société : Cass. civ., 1ere
Ch., 7 nov. 2000, Bull. civ., I, n° 277 ; D. 2001, somm. p. 690, obs. L. AYNES ; Defrénois 2001, p.
256, note J.-L. AUBERT, précisant que l'annexion d'une telle procuration à l'acte authentique ne suffit
pas à la purger de ses vices au regard de l'article 1326 du code civil. - V. dans le même sens Cass. civ.,
1ere Ch., 19 juin 2001, D. 2001, à propos d'un mandat donné par télécopie.
269
CA Versailles, 23 févr. 2001, RJDA 2001, n° 1072.
270
Cass. com., 27 févr. 1996, Bull. civ., IV, n° 65 ; D., 1996, jurispr. p. 518, note Ph. MALAURIE ;
JCP, G, 1996, II, 22655, note J. GHESTIN ; JCP, E, 1996, II, 838, note D. SCHMIDT et N. DION.
271
Cass. com., 29 oct. 2002, Bull. civ., IV, n° 156, ce double mandat n'est pas interdit par l'article
20, L. "Sapin" n° 93-122, 29 janv. 1993, J.-Cl. Fasc. 4020.
-90-

qualité de la personne au nom de laquelle l'agent intervient272. Sur cette assise, un


arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation a été rendu en date du 10
juillet 2007273. Ce dernier vient opportunément rappeler que la distinction entre la
qualification d’agent commercial et celle de commerçant résulte de la prise en
considération de l'activité exercée réellement et non pas de la dénomination donnée
par les parties à un contrat274.

159. Il est vrai que les circonstances de l'affaire pouvaient susciter interrogation :
Un contrat, signé entre une société produisant du vin de champagne et une société
ayant pour mission de commercialiser les champagnes produits, prévoyait que
certains clients seraient directement facturés par la société productrice et que la
société chargée de la commercialisation serait rémunérée par une commission
négociée au préalable avec la société productrice. Les juges du fond ont refusé de
retenir la qualification d'agent commercial pour la société chargée de la
commercialisation alors même que l'agent commercial est un professionnel
indépendant chargé de négocier des contrats pour le compte d'un tiers moyennant le
versement d'une commission (art. L. 134-1 C. com.)

160. Il est en effet relevé que les clients, acquéreurs des bouteilles de
champagne, formaient en réalité la clientèle personnelle de celui qui jouait le rôle
d'intermédiaire. Plusieurs éléments factuels sont à ce titre retenus : les acheteurs ont
toujours considéré dans leurs correspondances que le professionnel était un
distributeur, ce dernier se comportait comme un distributeur soucieux de préserver les
relations commerciales établies avec les clients ; il se considérait lui-même engagé par
les volumes commandés au point d'avoir recours à un autre fournisseur pour satisfaire
les commandes. Au connu de ces divers éléments, la Cour de cassation considère que
la Cour d'appel a pu valablement en déduire qu'il ne se comportait pas comme un
simple mandataire chargé de négocier et de conclure des contrats pour le compte d'un

272
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, Qualité d'agent, J.-Cl., Contrats-Distribution, Fasc.
3490, Cote : 11, 2004.
273
Cass. com., 10 juill. 2007, pourvoi n° 05-19.373, arrêt n° 945 F-P+B, D. 2007. AJ. 2158, obs. X.
DELPECH.
274
V. déjà en ce sens, Cass. com., 10 déc. 2003, D. 2004. AJ. 210, obs. E. CHEVRIER ; D. 2005.
Pan° 150, obs. D. FERRIER.
-91-

tiers. Une des observations suscitées par cette décision est relative à la prépondérance
confirmée du rôle du caractère personnel de la clientèle pour trancher la question de la
qualification de l'agent commercial275 .

161. Pour demeurer sous cette qualification, le professionnel doit se limiter à un


rôle d'intermédiaire pour favoriser la conclusion des contrats entre des clients et
l'entreprise mandante. Dès lors que l'intéressé développe et entretient par ses
diligences personnelles une clientèle qui s'adresse à lui comme elle le ferait à l'égard
d'un véritable distributeur et qu'il prend vis-à-vis de ses clients des engagements
propres, n'impliquant pas l'entreprise pour laquelle il est sensé agir comme simple
intermédiaire, il ne peut alors relever du statut d'agent commercial mais doit être
considéré comme « un commerçant » développant, à ce titre, une clientèle
personnelle276.

162. En effet les contractants ne peuvent se retrancher derrière la qualification


qu’ils ont donnée au contrat comme le rappelle la jurisprudence : « Il appartient au
juge de rectifier la qualification erronée que les parties ont pu donner à un
contrat »277 ; « le statut social ne dépend pas de la volonté exprimée par les parties ni
de la qualification qu’elles ont donnée à leurs conventions, mais des conditions dans
lesquelles le travail est effectivement accompli »278 ; « l’existence d’une relation de
travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination
qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est
exercée l’activité des travailleurs »279. Cette jurisprudence constante a d’ailleurs été
consacrée par la loi du 19/01/2000 qui a modifié l’article L. 120-3 du Code du travail.
Désormais, le fait pour l’agent d’être inscrit au registre spécial de agents

275
V. F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, E. BLARY-CLEMENT, Droit commercial, 10e éd.,
Montchrestien, 2010, n° 263.
276
Dans le même sens : Cass. com., 26 févr. 2008, D., 2008. Jurispr. 2907, n° 06-20.772 note D.
FERRIER ; JCP, E, 2008, n° 22, p. 19, obs. N. DISSAUX ; JCP 2008. II. 10094, note D. MAINGUY ;
Contrats, conc. consom. 2008, n° 95, obs. MATHEY ; LPA 9 juill. 2008, note O. TIQUANT ; RJDA
2008, n° 901 ; E. CHEVRIER, Concurrence-Distribution, D., 2010 : La Cour régulatrice qui avait
rappelé que l'agent commercial, simple mandataire qui n'a pas de clientèle propre, ne peut être titulaire
d'un fonds de commerce et n'a pas la qualité de commerçant.
277
Cass. soc., 27 fév. 1973 : cité par M. MAHMASSANI, op. cit.
278
Cass. soc., 9 juin 1994, 91-18.618.
279
Cass. soc., 19 déc. 2000, 98-40.572, Bull. soc., 2000 V, n° 437, p. 337.
-92-

commerciaux (RSAC) et de régler ses charges sociales ne présume plus de sa qualité


de travailleur indépendant.

163. Le statut des agents commerciaux est d'ordre public. Or, si la loi n° 91-593
du 25 juin 1991 a expressément prévu, et encore dans un cas limité, la possibilité de
renoncer au statut d'agent commercial280, nulle disposition ne permet d'adhérer
volontairement au statut dès lors que l'activité du mandataire ne correspond pas à la
définition donnée de l'agent commercial par l'art. L. 134-1 C. com. Ainsi, la qualité
d'agent découle de la constatation d'un certain nombre de conditions de fond
permettant l'accès à la profession, la réglementation leur réservant alors le titre d' «
agent commercial » et l'application du statut protecteur légal281.

164. En réalité, l'application du statut d'agent commercial ne dépend ni de la


volonté des parties exprimée dans le contrat, ni de la dénomination qu'elles ont
donnée à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l'activité est
effectivement exercée282. Notion très proche de sa voisine en droit libanais suivant
une jurisprudence de la Cour d’appel libanaise qui dans un arrêt a conclu comme suit :
« Alors la Cour, suivant son droit d’estimation, considère que les conditions mises
par l’intimée : la désignation des sociétés que l’appelante peut vendre, la limitation
aux prix déterminés, la prise des mesures de préventions détaillées, et un inventaire
des marchandises déposées à la fin de chaque mois, ne dénient pas la qualité de
représentant commercial pour l’appelante »283.

165. En effet, les parties n’ont aucun rôle dans la qualification et, si elles le font,
cette qualification ne sera jamais obligatoire aux juges qui, doivent rechercher eu

280
Art. L. 134-15 C. com. : « Lorsque l'activité d'agent commercial est exercée en exécution d'un
contrat écrit passé entre les parties à titre principal pour un autre objet, celles-ci peuvent décider par
écrit que les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la partie correspondant à
l'activité d'agence commerciale.
Cette renonciation est nulle si l'exécution du contrat fait apparaître que l'activité d'agence
commerciale est exercée, en réalité, à titre principal ou déterminant ».
281
E. CHEVRIER, Pas de rattachement volontaire au statut des agents commerciaux, D., 2004, p.
211.
282
Cass. com., 10 déc. 2003, D. 2004. AJ 211, obs. E. CHEVRIER, et 2005. Pan° 148, spéc. 150,
obs. D. FERRIER ; RTD civ., 2004. 285, obs. J. MESTRE et B. FAGES.
283
CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et
l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p. 89 et 90.
-93-

égard aux stipulations contractuelles mais aussi en fonction des modalités d'exécution
du contrat, quel est le véritable statut de la personne se présentant comme agent
commercial284 et doivent donner la vraie qualification au contrat en vertu des
dispositions de l’art. 370 du Code de procédure civil libanais, qui déclare clairement :
« C’est au juge de donner la vrai qualification juridique pour les faits et les actes en
questions, sans être restreint par celle menée par les parties »285.

166. Revenant à l’arrêt de la Cour d’appel libanaise cité précédemment, nous


constatons que le contrat qui lie les deux parties en conflit, désigne en l’appelante la
mandatée à vendre des marchandises de qualités différentes au nom et pour le compte
de l’intimée ; c’est à la Cour de qualifier la nature exacte de ce contrat. Elle l’a
considéré comme un mandat commercial dans lequel l’intermédiaire de commerce
joue le rôle de l’agent commercial, du fait qu’il agit au nom et pour le compte de son
mandant. Et puisque la représentation commerciale n’est que simplement un mandat
commercial, alors l’appelante est considérée comme représentant commercial, même
si le mandant a stipulé certaines conditions : la désignation des sociétés avec
lesquelles il est permis de passer contrat, la limitation aux prix déterminés, la prise des
mesures de préventions détaillées et un inventaire des marchandises déposées à la fin
de chaque mois. Et l’absence du droit d’exclusivité dans les affaires entre les parties
du contrat ne change pas du fait de cette qualification, bien que la représentation
commerciale puisse être un mandat commercial simple, tantôt qu’elle puisse être
menée par la qualité d’exclusivité286.

167. Ainsi il a été jugé que la seule volonté des parties ne peut suffire à
soustraire un salarié au statut social (agent commercial, VRP ou autre) et les juges
doivent examiner les conditions de fait dans lesquelles s'exerce l'activité et qualifier la
relation contractuelle en fonction de celles-ci287 ; a l’opposé, l'acceptation d'un contrat
d'agent commercial ne peut interdire de demander la requalification du contrat initial

284
E. CHEVRIER, Pas de rattachement volontaire au statut des agents commerciaux, op. cit.
285
Code de Procédure civile entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 5, éd. 2005,
explication de l’art. 370 Code de procédure civile libanais.
286
Art. 2, al. 2 du décret-loi n° 34/67 de 5 août 1967.
287
CA Besançon, 26 sept. 2003 : Juris-Data n° 2003-234522 ; Dans le même sens : Cass. com., 10
déc. 2003, pourvoi n° 01-11.923, Juris-Data n° 2003-021538.
-94-

en contrat de travail288, avec une liberté contractuelle des parties de renoncer au statut
d'agent commercial289.

168. C'est donc de la manière la plus large qu'est comprise l'expression


mandataire, opinion renforcée lorsqu'on relève que l'allusion au mandat définit non
seulement la nature juridique du service rendu par l'agent commercial, mais qu’elle
exprime également l'indépendance dans laquelle la profession doit être exercée
comme nous l’avons vu précédemment.

169. Certains auteurs290 ont considéré que l'inclusion des achats dans la liste des
opérations confiées à l'agent commercial constituait une extension anormale du
contrat d'agence qui empiéterait ainsi sur le contrat de courtage. Cette objection ne
nous semble pas décisive : l'agent n'est pas un courtier lié par un contrat durable, dont
le rôle, comme pour ce qui est de celui-ci, est de mettre en présence deux contractants
potentiels. La jurisprudence sur ce point est bien établie : « En l’absence notamment
de production de toutes prises d’ordres ou de commandes ou de conclusions de
contrats au nom et pour le compte du mandant, le contrat doit être bien qualifié de
courtage et ne réunit pas les conditions d’application du statut d’agent
commercial »291.

170. Lorsque l'activité est réglementée par un statut particulier, la qualification


d'agent commercial est, de ce seul fait, écartée par la jurisprudence. Idée adoptée par
la Cour de cassation292 en déduisant que le contrat conclu entre un agent immobilier et

288
Cass. soc., 18 juill. 2001, pourvoi n° 97-42.784, Juris-Data n° 2001-011014.
289
Cass. com., 3 mars 2004, pourvoi n° 02-12.905, Juris-Data n° 2004-022751.
290
J. CATONI, La rupture du contrat d'agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, p. 65, n° 74. - J. GUYENOT, VRP et agents commerciaux, Libr. du
journal des notaires et des avocats 1975, p. 178, n° 321 ; Les agents commerciaux, LPA, 5 juill. 1974,
n° 13 ; J.-Ch. SEMA, Agents commerciaux, t. 1, Rép. com., n° 68.
291
Cass. com., 3 oct. 2000, n° pourvoi 97- 19999 ; Cass. com., 6 mars 2001, JCP, éd. E. 2001, n°
1818.
292
Cass. com., 7 juill. 2004, pourvoi n° 02-18.135 [FS-P+B], Juris-Data n° 2004-024593, Bull.
2004, IV, n° 147, p. 162 : « Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que le contrat litigieux
exige de l'agent l'absence de condamnation interdisant la profession d'agent immobilier, lui donne
mandat de réaliser l'achat, la vente, l'échange d'immeubles ou l'achat, la vente du fonds de commerce,
de sorte que l'agent commercial prêtait de manière habituelle son concours à la conclusion de contrats
préliminaires à la vente, l'achat d'immeubles, du fonds de commerce ou de biens immobiliers et pouvait
-95-

un agent commercial qui exige de l'agent l'absence de condamnation interdisant la


profession d'agent immobilier, lui donne mandat de réaliser l'achat, la vente, l'échange
d'immeubles ou l'achat et la vente du fonds de commerce ; mais il n'y a pas contrat
d'agence, car l'agent prête son concours de manière habituelle à la conclusion de
contrats préliminaires à la vente, l'achat d'immeubles, du fonds de commerce ou de
biens immobiliers293. Ainsi ayant constaté que l'activité principale d'une personne
consiste à prêter son concours à des opérations de vente ou de location immobilière,
dès lors qu'elle a pour objet de faire visiter les biens en vente et de conduire les
négociations préalables à la signature des actes de vente, une Cour d'appel a
caractérisé l'activité d'agent immobilier de cette personne, ce qui l'empêche de
réclamer l'application à son profit de l'article L. 134-1, alinéa 2, du Code de
commerce, relatif à l'agent commercial294.

171. Dans le même sens, « un agent qui, en vertu d'une convention passée avec
une société de louage de véhicules, a pour mission de développer l'activité
commerciale de la société auprès des hôtels, est rattaché à la direction régionale de
ladite société, doit établir chaque mois un rapport d'activité et un rapport de visites ;
alors qu'il bénéficie de la mise à disposition d'un bureau, d'un téléphone ainsi que
d'un véhicule de fonction, il ne dispose pas, fût-il régulièrement inscrit au registre des
agents commerciaux, de l'indépendance que requiert le statut. Lorsqu'en outre, il est
établi que la mission de cet agent, faute de n'avoir aucun pouvoir de conclure ou de
négocier des contrats et des commissions au nom et pour le compte de la société, ne
lui octroi qu’un rôle d'intermédiaire entre la société et les concierges des hôtels,
l'intéressé qui ne remplit aucune des conditions posées par l'article L. 134-1 précité
n'est pas fondé à revendiquer la qualité d'agent commercial »295.

même assister à l'authentification de ces opérations devant notaires tandis que sa rémunération était
fixée comme en matière d'opérations de marchands de biens ».
293
B. FAGES, Mandat commercial, J.-Cl. Contrats-Distribution, Fasc. 810, Cote : 05, 2004.
294
Cass. civ., 1ere Ch., 17 févr. 2011, D., 2011, Actu. 676, obs. Y. ROUQUET.
295
CA Versailles, 12e Ch., arrêt n° 157 du 29 mars 2001 : Gaz. Pal. 2002, somm. p. 142 : Aff.
Europcar : Le prétendu agent remettait des plaquettes d’informations sur les locations des véhicules à
des concierges d’hôtel afin de les inciter à faire louer par les clients ces véhicules ; l’agent ne
transmettait aucune commande, seuls les concierges le faisaient auprès du loueur. Vu qu’il a agi en
exécutant une mission d’intermédiaire sans négociation d’aucune condition des contrats, la Cour
d’appel l’a qualifié de courtier.
-96-

172. M. le professeur EDELINE résumait ainsi cette situation ambiguë : « … le


mandat d’agent commercial… s’analyse principalement en une mission générale,
accomplie en l’absence de tout lien de proposition, de création d’une clientèle pour
certains produits et services »296. Et c’est dans le même sens qu’allait l’analyse du
décret-loi libanais N. 34/67 suivant M. le professeur HEMARD : « Les termes du
décret-loi ouvrent un champ d’application pratiquement illimitée à l’activité des
agents commerciaux… »297. De même, M. le professeur TYAN déduisait : « …Par
ailleurs, l’objet de l’entremise du représentant commercial comprend non seulement
la conclusion des transactions, mais aussi l’exercice de toute activité en vue d’arriver
à cette conclusion : rôle d’initiative pour susciter, par tous moyens appropriés, les
occasions de conclure des contrats, autrement dit, un rôle de recherche de
clientèle… »298. ll vaudrait mieux dire, une mission générale de créer un courant
d’affaires, pour ne pas conduire à une assimilation de l’agent commercial au VRP en
faisant référence à l’obligation de développer la clientèle qui ne pèse qu’à la charge de
ce dernier.

173. Sans ce choix exprès de la loi, la mission de l’agent commercial devrait être
qualifiée distributivement de mandat pour la passation d’actes juridiques par le
mandataire et de contrat d’entreprise dans l’hypothèse d’actes matériels299. La
réalisation d’actes matériels sur ordre d’une autre personne que l’exécutant est en
effet qualifiée de louage d’ouvrage ou de contrat d’entreprise300. Ce critère de
distinction demeure opérationnel. C'est lui, par exemple, qui permet de juger que n'a
pas la qualité de mandataire le commerçant qui exploite un emplacement dans un
grand magasin, avant le passage aux caisses, et se contente d'accomplir des actes
matériels de présentation de produits à l'exclusion d'actes juridiques de vente pour le
compte du magasin301.

296
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, 1967, p. 300.
297
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 592.
298
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468, n° 1306.
299
J. HUET, Les principaux contrats spéciaux, 3e éd., LGDJ, 2012, n° 31124.
300
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit. n° 184 ; Cass. civ., 1, 19 fév. 1968, D. 1968.
301
Cass. com., 8 janv. 2002, Bull. civ., IV, n° 1 ; Contrats, conc., consom. 2002, comm. 87, note L.
LEVENEUR ; RTD civ., 2002, p. 323, obs. P.-Y. GAUTIER.
-97-

174. Nul doute que cette mission générale, hors la conclusion d’un contrat, -acte
juridique- réputé être un mandat, ne correspond pas à la nature classique de ce dernier.
Cette vision hétérodoxe du mandat n’a pu être reconnue que lorsque la loi au sens
large, c’est dire en l’occurrence le décret de 1958, en a décidé ainsi. Pourtant, la
jurisprudence requiert la réalisation d’actes juridiques : « L’agent peut ne pas
bénéficier du pouvoir de conclure les contrats et simplement en négocier les
conditions … mais il devra néanmoins accomplir des actes juridiques pour le compte
de ses mandants qui se trouvent ainsi engagés »302.

175. En effet, il demeure que la qualification d'acte juridique pose parfois


question, notamment à propos du paiement, analysé tantôt comme un acte juridique,
tantôt comme un fait juridique. En tout état de cause, cette qualification d’acte
découle du fait de l’agissement au nom d’autrui, qui dans son étendue, se rapproche
de la gestion du fonds de commerce, ce que nous allons analyser dans notre deuxième
paragraphe.

Paragraphe 2 : L’étendue des actes - la gestion

du fonds de commerce

176. La qualification de gérance-mandat n'est pas incompatible avec


l'accomplissement d'actes matériels, dès lors que ces derniers présentent un caractère
accessoire303, ce qui est généralement le cas dans la mesure où l'activité de gérance de
fonds emporte principalement l'accomplissement d'actes juridiques auprès de la
clientèle ou de fournisseurs. Donc, le gérant tout comme le représentant commercial
accomplissent des actes juridiques. C’est ainsi qu’en contrepartie, « le contrat de
représentation commerciale apparaît comme un accord entre une personne et une
autre possédant un fonds de commerce, dont une clientèle tendant à croître

302
Cass. com., 24 sept. 2003, Lettre distrib., nov. 2003, n° pourvoi: 02-12265.
303
Rapp. Cass. com., 1 juin 1993, Bull. civ., 1993, IV, n° 221 qui décide qu'en matière de
distribution de carburants effectuée sous le régime du mandat, la conservation par l'exploitant d'une
station-service des recettes provenant des ventes à la clientèle jusqu'à leur versement quotidien sur un
compte bancaire désigné par la compagnie pétrolière ne constitue pas, sauf stipulations contraires, un
contrat de dépôt au sein du contrat de mandat mais l'exécution même de ce dernier.
-98-

continuellement, et une autre qui, moyennant commissions, voudrait profiter de cette


clientèle pour accroître son chiffre d’affaires »304. La jurisprudence a cependant
estimé que « dès la réunion d’éléments susceptibles d’attirer une clientèle celle-ci est
réputée exister, entrainant par la même l’apparition d’un fonds de commerce »305.

177. En outre, l’exploitation du fonds de commerce peut se faire directement par


le propriétaire du fonds, ou être confiée à un tiers. C’est souvent le cas lorsqu’un
mineur dont les parents sont décédés hérite d’un fonds de commerce comme on l’a
signalé précédemment. En raison de son incapacité, le mineur, ne pouvant être
commerçant (art. L. 121-2 C. com.), ne peut l’exploiter lui-même. Il est donc possible
notamment de confier la gestion du fonds à un gérant, plus spécialement à un
locataire-gérant pour le maintenir dans le giron familial. Mais pour permettre au
propriétaire du fonds de commerce d’atteindre son objectif de ne pas gérer le fonds
tout en continuant à en maîtriser la propriété, la pratique a créé de nombreux contrats
qui sont connus sous le terme générique de « gérance » du fonds de commerce, le plus
connu étant la location-gérance.

178. Ainsi, M. le professeur FERRIER distingue deux techniques d’exploitation


d’un fonds de commerce ou artisanal, celle dissociant la propriété du fonds de son
exploitation (la location-gérance), et celle qui associe les deux306. Au sein de la
première catégorie, le locataire-gérant exploite le fonds à ses risques et périls (sous
réserve cependant de l’art. L. 144-7 C. com.). Au sein de la deuxième catégorie, le
fonds est exploité au nom et pour le compte du propriétaire, soit directement (par le
propriétaire lui-même), soit indirectement (par un gérant agissant au nom et pour le

304
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban, p.
284.
305
Cass. com., 27 fév. 1973, D., 1974, p. 283, note J. DERRUPE.
306
Le statut de gérant mandataire du fonds de commerce, créé par la loi du 2 août 2008, n'a pas
atteint l'objectif de sécurité juridique que lui assignaient ses promoteurs soucieux d'éviter l'application
du droit social. Une confirmation en est donnée par la modification apportée à l'article L. 146-1 du code
de commerce par la loi n° 2010-853 du 23 juill. 2010 disposant que la clause « commerciale » du
contrat de gérance-mandat qui « précise... les normes de gestion et d'exploitation du fonds à respecter
et les modalités du contrôle susceptible d'être effectué par le mandant » n'est pas « de nature à
modifier la nature du contrat » : Lettre distrib., sept. 2010, note N. FERRIER.
-99-

compte du propriétaire), mais en tout état de cause c’est le propriétaire du fonds qui «
assume les risques et recueille les profits liés à cette exploitation »307.

179. Cependant, le représentant commercial libanais, l’agent commercial et le


gérant mandataire français présentent des traits communs. Ils sont des mandataires,
agissant « au nom et pour le compte » d'un mandant de manière habituelle,
indépendante et à titre professionnel308. La distinction paraît cependant évidente si
l'on rappelle que les deux premiers exercent essentiellement une fonction de
négociation et de recherche ou de prospection d'une clientèle; ils agissent plutôt en
amont de la conclusion du contrat309. Tandis que le gérant mandataire exerce
essentiellement une fonction de gestion d'un fonds, et agit plutôt en aval. Dès lors, la
création, le maintien, voire le développement de la clientèle, sont l'essence de l'agence
et de la représentation commerciale, mais non de la gérance de succursale dont l'objet
est avant tout la fourniture de services ou de produits à ceux qui sont déjà attirés par
l'enseigne du mandant310.

180. La distinction apparaît clairement lorsque la politique promotionnelle est


déterminée par le mandant : le gérant mandataire ne peut être qualifié d'agent
commercial puisqu'il ne négocie pas311. Au demeurant, il ressort d'une décision assez
récente que le mandataire ne mérite pas non plus la qualité d'agent commercial
lorsqu'il n'est pas habilité à négocier les termes des contrats312. En revanche, elle
devient délicate, voire impossible, lorsque le gérant mandataire peut déterminer la
politique promotionnelle et a pour mission, outre la gestion du fonds, la négociation

307
N. FERRIER, Le statut de gérant- mandataire issu de la loi du 2 août 2005, LPA, 26 mai 2006,
n° 105, p.4 et s. ; le même auteur : Contrat de Gérance-Mandat: J.-CL. com., 2008, Fasc. 323 ; F.
LEMEUNIER, Fonds de commerce, Achat et vente, Exploitation et gérance, 16 éd., Delmas, 2004, n°
1201: l’auteur regroupe les contrats de gérance de fonds dans le cadre de trois catégories: gérance-
salariée, contrat de mandat, et celui de location-gérance. Dans le cadre de ce dernier, le gérant exploite
en son nom, pour son compte, à ses risques et périls. Dans le cadre du contrat de travail et mandat, le
gérant exploite pour le compte du propriétaire du fonds, aux risques et périls de ce dernier.
308
Art. 1 décret-loi n° 34/67 ; Art. L 134-1 C. com. ; Art. L. 146-1 C. com.
309
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit.
310
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, J.-Cl. Com., Fasc. 323, Cote : 04, 2008.
311
Ce que nous étudierons plus tard en détails.
312
Cass. com., 15 janv. 2008, n° 06-14.698, Lettre distrib., avr. 2008, où le statut d'agent
commercial est refusé à celui qui ne pouvait apporter aucune modification, de quelque nature que ce
soit, aux tarifs et conditions fixés par le mandat.
-100-

de contrats et le développement de la clientèle du mandant 313. Dans ce cas, le gérant


mandataire peut être également considéré comme un agent commercial314 sauf à une
exigence de prospection, ce qui peut aboutir à un conflit de régimes, particulièrement
épineux lorsque deux statuts spéciaux sont en cause : celui de l'agence commerciale et
celui du gérant mandataire.

181. En effet, les deux statuts en cause présentent un caractère impératif,


relevant plus précisément d'un ordre public de protection. Il conviendrait d'appliquer
les statuts d'agent commercial et de gérant mandataire de manière distributive, en
retenant, conformément au principe de faveur qui s'impose dans un tel conflit entre
règles d'ordre public de protection, les dispositions les plus favorables au gérant
mandataire également agent commercial315.

182. En conséquence, la qualification de gérance-mandat suppose,


conformément à la qualification du mandat ou de la représentation commerciale, que
le gérant mandataire accomplisse des actes juridiques au nom et pour le compte du
mandant. C'est en effet la question de la nature du contrat qui est soulevée à travers
l'examen des conditions d'exploitation du fonds et particulièrement des normes fixées
par le mandant: celles-ci traduisent-elles ou non l'existence d'un lien de subordination
emportant requalification du contrat de gérance-mandat en contrat de travail316?

183. La Cour de cassation approuve la requalification en contrat de travail


lorsque le gérant est tenu de respecter les normes du mandant en matière de
décoration, d'éclairage, de tenue du personnel, de prestations à fournir détaillées « de
façon hypocondriaque », sans liberté dans la fixation des prix, le choix des clients, les
procédures d'accueil, de promotion, de publicité, de tenue de la comptabilité, et
soumis à des inspections suivies de remontrances et de menace de représailles au cas

313
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, op.cit.
314
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D.,
2011, n° 678, pour qui la différence entre le gérant mandataire et l'agent commercial tenant à l'activité
de gestion du premier et de prospection du second n'est peut-être pas réelle.
315
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, op.cit.
316
Rapp. Soc., 19 mai 2010, n° 09-40.103.
-101-

de non-respect des instructions317. En revanche, elle approuve le refus de requalifier


en contrat de travail le contrat de gérance-mandat sous prétexte qu'il avait été conclu
après un entretien sur l'aptitude du candidat gérant-mandataire à exercer ses fonctions
et avait mis à la charge du gérant-mandataire, pendant quelques mois, des tâches de
vente et de tenue de caisse318.

184. Après avoir évoqué l’agissement du gérant au nom du mandant, c'est dire
en révélant aux tiers sa qualité de mandataire et l'identité du mandant, il s’agit dans
une deuxième section, de rédiger l’agissement pour le compte d’autrui tout en
rappelant que celui qui est chargé seulement de négocier des contrats ou de prospecter
une clientèle pour le compte du propriétaire du fonds n'est pas un gérant mandataire
car il accomplit des actes matériels et non juridiques319.

317
Cass. soc., 8 juin 2010, n° 08-44.965, Sté B et B.
318
Cass. soc., 23 juin 2010, n° 09-40.093, Sté Babou.
319
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, op. cit.,
parag. 6, n° 639, note 3, pour qui la négociation d'un acte est la première marche de sa conclusion.
-102-

SECTION 2

L’ACTION POUR LE COMPTE D’AUTRUI

185. Le représentant commercial étant un mandataire, agit en conséquence pour


le compte d'autrui, c'est dire qu’il est appelé à accomplir des actes dont le bénéfice
direct va à son mandant320. L'agent en tant que mandataire devrait avoir normalement
la qualité pour conclure des actes juridiques au nom et pour le compte des mandants.
En réalité, et ce n'est pas là une des moindres originalités de son activité, il s’agit de
vérifier la possibilité pour l'agent commercial de conclure de tels actes, en tant que
négociateur : c’est la teneur de l’exigence, sujet de notre premier paragraphe.

186. En revanche, quand il agit pour le compte d’autrui, le représentant


commercial s'oppose à l'intermédiaire qui conclut des affaires pour son propre
compte, tel par exemple le concessionnaire revendeur ; il se distingue d’une part du
commissionnaire qui agit pour le compte d'un commettant, mais en son propre nom
ou sous un nom social qui n'est pas celui de son commettant321 et à ce titre, la
jurisprudence refuse de manière systématique d'appliquer au contrat de commission le
régime du mandat d'intérêt commun en raison précisément du fait qu'agissant en son
propre nom, le commissionnaire n'est pas un mandataire322 ; d’autre part, il se
distingue du courtier, qui, comme intermédiaire de commerce, joue le rôle d’un
« facilitateur » entre les parties du contrat, les aidant à aboutir à la conclusion du
contrat sans qu’il intervienne comme partie323.

320
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit. ; Dans le même sens : Cass. civ., 1ere Ch. Rejet,
15 janv. 1991, n° 88-15.413 : « l'agent d'affaires qui encaisse les loyers pour le compte du propriétaire
bailleur est un mandataire qui agit pour le seul compte du mandant sans avoir la propriété des fonds
qu'il détient » ; M. THIOYE, Manque de transparence de l'administrateur de biens et engagement
personnel à l'égard des tiers, AJDI, D., 2004 p. 746: « le fait que le mandataire agit au nom et pour le
compte de son mandant (les deux autres éléments résidant dans le fait que le mandataire accomplit des
actes juridiques et sans subordination). Le mandataire agit pour le compte du mandant, ce qui signifie
que c'est dans le patrimoine de ce dernier, sur sa tête, que se réalisent les effets de droit voulus par le
représentant ».
321
Art. L. 132-1 C. com. ; Cass. com., 3 mai 1965, Bull. civ., 1965, III, n° 280.
322
Cass. com., 10 juin 1969, Bull. civ., 1969, IV, n° 218 ; Cass. com., 10 févr. 1970, Bull. civ.,
1970, IV, n° 49 ; Cass. com., 20 févr. 2007, Juris-Data n° 2007-037690 ; Contrats. conc. consom. 2007,
comm. 145, obs. L. LEVENEUR.
323
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 112.
-103-

187. La qualité d'agent n'est donc pas incompatible avec l'exercice d'une activité
autre que celle de mandataire. Une même personne peut être, vis-à-vis d'un fabricant,
dans la situation d'agent commercial et, dans ses rapports avec un autre fabricant, dans
une situation d'acheteur et de revendeur324. D’une autre manière, il est vrai qu’en tant
qu'agent commercial, ce dernier n'agit pas pour son propre compte mais comme
mandataire325.

188. En effet, afin de clarifier la notion de représentation commerciale en ses


formes dans les deux droits libanais et français, nous devons analyser la portée du fait
d’agir pour le compte d’autrui : ce sera notre deuxième paragraphe.

Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence

189. En revenant aux dispositions de l’article premier du décret-loi libanais N.


34/67, nous trouvons que le législateur a clairement signalé que le représentant
commercial est le mandataire qui (…), « entreprend des négociations pour conclure
(…) au nom et pour le compte de producteurs ou de commerçants ». Tandis qu’en
droit français, le texte de l’art L. 134-1 C. com., est comme suit : l’agent commercial
est le mandataire qui (…) « est chargé, de façon permanente, de négocier et,
éventuellement, de conclure (…) au nom et pour le compte de producteurs,
d'industriels, de commerçants ou d'autres agents commerciaux ».

190. Il est parfois bien difficile de dissocier la négociation de la conclusion :


dans la pratique, il est rare que le mandant désavoue son agent, fût-il simple
négociateur. En outre, la négociation dans les deux textes est importante et nécessaire
de sorte de vérifier l’exigence certaine du pouvoir de négocier (A) ; tandis qu’au
Liban nous constatons, à première lecture, que les négociations sont assez
importantes, de telle sorte que celles-ci se doivent si possible d’aboutir à un résultat :

324
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit.
325
Cass. soc., 28 avr. 1960, JCP CI 1962, II, 71010.
-104-

la conclusion d’un contrat, alors qu’en France et toujours à première lecture, nous
pouvons parler de la faiblesse du pouvoir de conclusion des contrats, en raison de
l’utilisation de l’adverbe « éventuellement ». C'est dire que l’agent n’est pas commis
pour conclure des contrats mais pour mener les actions nécessaires à la conclusion des
contrats326. Cette hypothèse de l’agent commercial avec la faiblesse du pouvoir de
conclure est la plus courante même dans le champ commercial. C’est ainsi que la
chambre de commerce international précise que cette alternative n’est pas habituelle
dans le commerce international327. D’où l’utilité de traiter l’exigence discutée du
pouvoir de conclure (B).

A- L’exigence certaine du pouvoir de négocier

191. Au sens étroit, la négociation se limite à discuter les termes d’un contrat, au
sens large ce serait proposer l’adhésion à un contrat ; entre ces deux acceptions
pourraient intervenir plusieurs offres de contrat préétablies par le mandant entre
lesquelles devrait s’opérer le choix du client328. Le sens large devrait être retenu dès
lors que le mandant doit pouvoir fixer au moins un cadre de négociation,
particulièrement quand l’agent est habilité à conclure. L’absence de pouvoir de
conclure des contrats ne devrait pas faire obstacle à la qualification dès lors que la
notion de mandat est souvent entendue de manière large par la doctrine329 , la
jurisprudence330 et le législateur lui-même331.

326
J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 72: F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER,
2e éd. Litec, 2005, n° 194.
327
Contrat Modèle CCI de contrat d’agence commerciale, 1992, CCI, p. 2, note 13 relative à l’art.
33 du modèle contrat.
328
Rapp. Cass. com., 14 juin 2005, D. 2006, Pan.514, obs. D. FERRIER.
329
R. de QUENAUDON, J.-Cl. C. civ., art. 1984 à 1990, Fasc. 10 n° 32 : « Selon une conception
large peut -être plus conforme à la tradition le mandat n’implique pas une représentation parfaite mais
seulement une volonté de gérer l’affaire d’autrui » ; R.-J. POTHIER, Cours de droit civil français,
1871, p. 40, 410, cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 186.
330
Cass. com., 25 fév. 2003, n° 99-20147 : « assimile la simple présentation des produits à un
mandat » ; Cass. civ., 16 juin 1998, Bull. civ., II, n° 211 : « assimile une mission d’expertise à un
mandat » ; CA Paris, 9 juin 1995, Juris-Data 1995, 022849 : « considère le visiteur médical comme un
mandataire ».
-105-

A ce titre, l’agent en bénéficie-t-il s’il transmet des commandes ?

192. Une décision jurisprudentielle assez récente est venue répondre à cette
question, tout en considérant que la mission de négociation de l’agent commercial
peut résulter de la simple prise de commandes332. La solution s’impose lorsque
l’intermédiaire remplit une fonction essentiellement technique, une activité
« d’assistance et de conseil » en se bornant à « transmettre les commandes »333, ou
une mission de prospection, d’assistance commerciale, de contrôle et de suivi des
expéditions, se limitant à des opérations matérielles334.

193. En outre, le simple pouvoir de négocier des contrats -principe exigé par la
loi-, c'est dire de négocier des actes juridiques auxquels intervient seul le mandant
pour son compte, passe au premier chef par la réalisation d’actes matériels
(rencontres, prise de contact, tournées, remise de documents commerciaux,
présentation des produits…)335. Cependant, la jurisprudence exige plus de l’agent
négociateur : il doit réaliser des actes juridiques lui-même pour le compte d’autrui
afin de bénéficier du statut protecteur336. L'intermédiaire qui ne représente pas le
mandant ne peut évidemment prétendre au bénéfice du statut d’agent commercial. Ce
sera le cas de l'intermédiaire qui se comporte comme un revendeur et non comme un
négociateur337; en l'occurrence, l'intermédiaire assurait lui-même la fourniture des
produits, n'hésitant pas à s'adresser à un concurrent du « mandant » pour satisfaire les
demandes.

331
Loi 2 janv. 1970, art. 5 et 6 en matière d’agence immobilière ; C. trav., art. L. 7121-11 en
matière d’agence artistique.
332
CA Paris, 14 mai 2009, n° 07/00621.
333
CA Versailles, Ch. 12, sect. 2, 8 févr. 2007, Euro Tech c/ Eagle Picher, JCP, E 2007. Somm.
2272 ; JCP, E 2007, 1706.
334
Cass. com., 20 mai 2008, Contrats, conc, consom, 2008, n° 179, D. 2009, pan 1893, obs. D.
FERRIER ; CA Paris, Ch. 5 B, 27 sept. 2007, SA Etam c/ Sté Turkay Tekstil, Juris-Data n° 2007-
348057.
335
F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 155 : « La négociation se caractérise par des actes matériels… » ; J.-J. HANINE,
Le contrat d'agent commercial en droit français et en droit italien, th., Paris II, 1977, p. 70 :
« L’activité des négociations de l’agent commercial est essentiellement matérielle ».
336
CA Limoges, Ch. civ., 31 mars 2011, n° 09/01679.
337
Cass. com., 10 juill. 2007, n° 05-19.373, Société F. Bonnet c/ Société Bacchus, Juris-Data n°
2007-040136 ; D. 2007. AJ. 2158, obs. X. DELPECH ; RTD com., 2008. 45, obs. B. SAINTOURENS.
-106-

194. La qualification du mandat est discutée au profit de celle du contrat


d’entreprise338 car dans le mandat civil, le mandant donne au mandataire le pouvoir de
l’engager par la conclusion d’actes juridiques339, mais s’il s’agit d’une agence
commerciale le mandant demande à l’agent de prospecter, c'est dire de rechercher
activement des clients, de négocier des ventes ou des prestations de services et
éventuellement de l’engager340. L’intermédiaire qui ne négocie pas ne peut pas
prétendre au bénéfice du statut de l’agent commercial341.

195. Dans le même sens, il a été jugé : « La possibilité pour l'agent commercial
de négocier librement les contrats est souvent déterminante pour caractériser son
indépendance. Ainsi d'une société SFR qui a conclu avec une société RCE un "contrat
partenaire" pour deux ans renouvelable par tacite reconduction par période annuelle
sauf dénonciation aux modalités contractuellement prévues. Par ce contrat, la société
SFR confie à la société RCE la diffusion de services de radiotéléphonie et diverses
tâches liées à l'enregistrement des demandes d'abonnement. À la rupture du contrat,
le distributeur invoque l'existence d'un contrat d'agence commerciale. La Cour de
cassation rejette la qualification d'agent commercial aux motifs que l'agent
commercial est un mandataire indépendant chargé de négocier et, éventuellement, de
conclure des contrats au nom et pour le compte de son mandant ; l'arrêt constate que
la société RCE s'était engagée par contrat à n'apporter aucune modification, de
quelque nature que ce soit, aux tarifs et conditions fixés par la société SFR pour la
souscription des abonnements aux services, puis relève, procédant ainsi à la
recherche prétendument omise, que dans la pratique des parties, la seule
« négociation » alléguée par la société RCE n'avait pas été menée au nom et pour le
compte de la société SFR, mais pour son propre compte dans la mesure où elle

338
F. FOURNIER L’agence commerciale, op. cit p. 105 ; P. PUIG, La qualification du contrat
d’entreprise, préf. B. TEYSSIYE, éd. Panthéon Assas, 2002, n° 134 ; C. DILOY, Le contrat d’agence
commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE, LGDJ, 2000, n° 83.
339
C. civ., art. 1984, 1988 et 1998.
340
CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 8 déc. 2010, n° 10/05076 ; CA Amiens, Ch. 01, Sect. 02, 11 déc.
2008, n° 07/01102.
341
Cass. com., 12 oct. 2010, n° 09-69.771: en matière de promotion immobilière ; CA Versailles, 11
fév. 2010, n° 09-00396 ; Cass. com., 27 oct. 2009, D., 2011, pan° 548, obs. D. FERRIER ; CA Paris,
23 fév. 2006, JCP, G 2006, III, 10108, note Ph. STOFFEL-MUNCK ; Cass. com., 14 juin 2005, D,
2006, Pan. P. 514, obs. D. FERRIER.
-107-

revendait, en l'espèce, un matériel que lui avait vendu cette société ; qu'en l'état de ces
constatations, il résultait que la société RCE n'était investie d'aucun pouvoir de
négocier les contrats, la Cour d'appel [...] a exactement rejeté la prétention de cette
société au bénéfice du statut d'agent commercial »342.

196. En effet, la négociation peut être réalisée sous deux formes : soit par des
actes matériels343, préparatoires, qui devront être complétés par l’accord des parties
pour devenir des actes juridiques344, soit en constituant éventuellement des actes
juridiques quand une offre est sollicitée345. Il nous faut donc considérer qu'à défaut de
stipulation expresse l'agent commercial est censé avoir simplement le pouvoir de
négocier : c’est seulement s'il en a été investi expressément qu'il a le pouvoir de
conclure346, c'est-à-dire d’accomplir des actes juridiques pour le compte du
mandant347. Cependant, la vertu cardinale de la négociation, inscrite clairement dans
les deux textes français et libanais, permet de bénéficier du statut d’agent commercial
dans le droit français ou du statut de représentant commercial selon le décret-loi
libanais.

342
Cass. com., 15 janv. 2008, n° 06-14.698, FS-P+B, SA RCE c/ SA SFR : Juris-Data n° 2008-
042333 ; Contrats, conc. consom. 2008, comm. 68, obs. N. MATHEY.
343
La négociation consiste en un ensemble d’actes matériels ayant pour finalité d’amener le client à
contracter avec le commettant : S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et
allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 18 ; F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en
droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 155 : « La négociation se caractérise par des
actes matériels… ».
344
J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 72.
345
J.-M. LELOUP, JCP, éd. E., 1987, II, 15024, n° 10.
346
Suivant l’adverbe « éventuellement » découlant de l’art. L.134-1 C. com., l’agent commercial
aura pour le premier pas censé avoir le pouvoir de négocier afin qu’au bout d’un second pas puisse
conclure. Il s’agit de noter en ce sens que la jurisprudence n’a pas séparer ces deux pouvoirs l’un de
l’autre : CA Bordeaux, Ch. civ. 02, 6 oct. 2010, n° 09/04290 ; CA Versailles, Ch. 12, Sect. 01, 23 sept.
2010, n° 10/00775 : « l’agent n'avait pas le pouvoir de négocier ni d’ailleurs de conclure des contrats
de vente ou d'achat pour le compte de la société » ; CA Versailles, Ch. 12, Sect. 02, 6 mai 2010, n°
09/01049 ; CA Paris, 14 mai 2009, n° 07/00621 ; CA Paris, Ch. 18 C, 9 oct. 2008, n° 07/08504 ; CA
Paris, Ch. 18 C, 30 nov. 2007, n° 07/04487 ; CA Versailles, Ch. 17, 24 mars 2006, n° 05/00816 ; CA
Versailles, 29 mars 2001, n° 2000-1861 ; Cass. soc., Rejet, 25 janv. 1995, n° 90-45.796, Bull. 1995, V,
n° 40, p 29 ; Dans le même sens, G. BORENFREUND, La notion d'établissement distinct à la croisée
des chemins, Rev. trav., 2011, p. 24: « Plus précisément, le choix de confier ou non à son représentant,
à la tête de l'unité considérée, le pouvoir de négocier voire de conclure un accord collectif au sein de
l'établissement, pourrait devenir décisif ».
347
B. FAGES, Mandat Commercial, op.cit.
-108-

B- L’exigence discutée du pouvoir de conclure

197. Reprenons les deux textes français et libanais. En droit libanais, le


mandataire entreprend des négociations pour conclure, c'est dire que l’une de ses
missions paraît être la conclusion des contrats après certaines négociations. De
manière différente, en droit français, le pouvoir de conclure les contrats conféré au
mandataire n’est qu’accessoire348 ou soumis à condition suivant l’emploi de l’adverbe
« éventuellement » : le mandataire est chargé de négocier et, éventuellement, de
conclure signifie d'abord que celui qui négocie n'est jamais sûr de conclure l'affaire349,
mais avec la possibilité que l'aboutissement de son travail de prospection et les efforts
qu'il a fournis créent une clientèle350. La création, le maintien, voire le développement
de la clientèle constituent, par excellence, le but que tout agent se doit d'atteindre.
C'est tout au long des négociations et au moment de la passation des commandes que
se révéleront les qualités personnelles de l'agent.

198. En d’autres termes, si le mandataire, dont la plupart des actions exécutées


pour le compte du mandant constituaient des prestations, avait parfois été conduit à
prendre des initiatives localement, à préconiser et à effectuer quelques actions
commerciales, à intervenir dans le déroulement des opérations et à recevoir, à titre
occasionnel, des bons de commande qui concernaient des approvisionnements à la
suite d'appel d'offres après que les négociations commerciales avaient déjà eu lieu, il

348
« La conclusion d’actes juridiques ne constitue qu’une activité accessoire au travail de
prospection, mission première de l’agent » : Ph. GRIGNON, Le fondement de l'indemnité de fin de
contrat des intermédiaires du commerce, préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, n°
173. Certains la considèrent également comme « exceptionnelle » : A. De THEUX, Le droit de la
représentation commerciale, Etude comparative et critique du statut des représentants salariés et des
agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1,
1975, n° 78 ; R. SAVATIER, Droit des affaires, 1962, p. 283 à 285 : cité par Ph. GRIGNON, Le
fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce, note 644.
349
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 49.
350
L’obligation de prospection entraine l’agent à agir continuellement dans le but d’amener de
nouveaux clients à son commettant, à développer le volume de transactions et donc le chiffre d’affaires
réalisé avec les anciens clients ; il ne devra pas se contenter de maintenir les relations déjà constituées,
mais bien plus observer le marché qui lui a été dévolu, et être à l’écoute des exigences de sa clientèle :
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec,
2003, p. 20.
-109-

ne disposait pas, de façon permanente, d'un pouvoir de négocier des contrats au nom
et pour le compte du mandant : ce qui, -au vu des articles L. 134-1 et L. 134-4 du
Code de commerce- a conduit une jurisprudence à denier à ce mandataire la qualité
d'agent commercial351.

199. Donc, comme première déduction des deux textes, l’acte de conclusion des
contrats parait être volontaire en droit français sans être lié au pouvoir de négociation
qui, en droit libanais, peut conduire à la conclusion des actes. Sur cette assise, il s’agit
de noter que la conclusion ne suppose pas nécessairement une négociation, et la
négociation n’implique pas toujours une conclusion352 : Solution adoptée par la Cour
d’appel de Douai laquelle a considéré que « la mission d'agent commercial suppose,
en conséquence, un mandat de prospection de la clientèle du mandant par l'agent,
soit pour conclure un contrat, soit pour préparer cette conclusion par un travail de
négociation c'est-à- dire de discussion notamment sur le type de marchandises, la
quantité, le prix et les modalités de paiement au nom et pour le compte du mandant.
Cette mission correspond donc à la négociation prévue par l’article L. 134-1 du Code
de commerce sans qu'il soit nécessaire que l'agent ait un pouvoir pour conclure le
contrat lui-même, ce qui suffit à caractériser la mission de l'agent commercial au sens
de ce texte »353.

200. En effet l’intermédiaire auquel il est interdit de conclure des contrats au


nom et pour le compte du mandant peut-il prétendre au bénéfice du statut d’agent
commercial ? La Cour de cassation a considéré que : « La négociation suffit ainsi à
caractériser l'agence commerciale, qui n'est pas nécessairement subordonnée à la
conclusion directe des contrats par l'agent »354 ; En pratique, l'agent ne conclut pas
toujours stricto sensu. La commande obtenue par l'agent commercial peut, dans
certains cas, faire l'objet d'une confirmation écrite par le mandant, qui parfait le

351
Cass. com., 27 avr. 2011, D., 2011, Actu. 1279 ; v. déjà Cass. com., 15 janv. 2008, D., 2008, AJ
350, obs. E. CHEVRIER ; RTD com., 2008, 495, obs. B. SAINTOURENS ; RTD civ., 2008, 299, obs.
B. FAGES.
352
D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., Litec, 2009, n° 185 et note 404 : « … Pourtant
l’agent commercial négocie sans forcément conclure » ; Cass. civ., 2 déc. 1997, JCP, G, 1998, IV, 157,
n° 1140.
353
CA Douai, Ch. 02 Sect. 02, 17 sept. 2009, n° 07/08370.
354
Cass. com., 18 nov. 2008, n° de pourvoi : 07-16751.
-110-

contrat355. Elle pourrait même être informelle et l'acceptation du mandant être tacite,
mais elle n'avantagerait aucune partie et ne mettrait pas à l'abri l'une d'elle contre la
mauvaise foi de l'autre.

Ici surgit une question d’importance : l’agent peut-il ne pas être habilité à
conclure des contrats au nom et pour le compte du mandant ?

201. Il semblerait que l’on doive répondre négativement, tout en admettant que
le pouvoir de conclure détenu par l’agent a -au sens strictement juridique-, un
caractère « accessoire », si l’on s’en tient de la définition de l’agent commercial en
droit français356 ; en droit libanais, ce pouvoir a un caractère « principal ». Ainsi, la
Cour d'appel de Paris allait dans le même sens en estimant que si la qualification
d’agent commercial ne requiert pas que ce dernier ait de manière permanente mission
de conclure des contrats au nom et pour le compte du mandant, elle suppose qu'il
puisse éventuellement conclure de tels contrats357. Dans le même sens, un arrêt
célèbre précise pareillement : « n'est pas un agent commercial la personne qui se
contente, au titre d'un contrat, de prospecter des clients, de transmettre les offres et
de remettre à son cocontractant les commandes passées, sans être autorisée pour
autant à conclure des contrats au nom et pour le compte de celui-ci et sans qu'il soit
prévu le versement d'une indemnité de clientèle en cas de rupture du contrat »358.
Ainsi il a été jugé que « n’est pas un agent commercial l’intermédiaire qui se borne à
présenter les conditions proposées par le mandant »359. Le principe serait alors que le
pouvoir de négociation se trouve nécessairement dans tous les contrats d’agence

355
B. FAGES, Mandat Commercial, J.-Cl. Contrats-Distribution, Fasc. 810, Cote : 05, 2004.
356
La majorité de la doctrine considère que ce pouvoir est exceptionnel : F.-X. LICARI, La
protection du distributeur intégré en droit français et allemand, op. cit ; Ph. LE TOURNEAU et alii,
Droit de la responsabilité et des contrats, 9e éd., Dalloz Action, 2012, n° 5531 ; D. FERRIER, op.cit,
n° 161 et 174 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 183 ; A. De THEUX, Le statut
européen de l’agent commercial, op. cit., n° 34 ; même auteur, Le droit de la représentation
commerciale, op. cit., n° 78 ; J.-J. HANINE, Agents commerciaux-Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-
Distribution, Fasc. 1230, 1991, n° 7.
357
CA Paris, 27 sept. 2007, 5e Ch., Juris-Data n° 2007- 348057 : N’est pas agent commercial celui
qui se voit refuser tout pouvoir de conclure.
358
CA Paris, 6 nov. 2007, n° 06-10396.
359
Cass. com., 27 oct. 2009, n° 08-16.623 ; Cass. com., 15 janv. 2008, D., 2008, act. Jurispr., 350,
obs. E. CHEVRIER.
-111-

commerciale et l’application du statut d’agent commercial rendue possible360, car la


conclusion des affaires est à vrai dire le prolongement de la mission de négociation :
c’est le sens étroit de la négociation361 qui est aujourd’hui retenu en France362.

202. En réalité, ce qui est demandé aux agents commerciaux, c’est de créer un
courant d’affaires363 et notamment, de maintenir et développer le volume des ventes
dans la clientèle existante et de prospecter tous les clients potentiels, c’est-à-dire
d’avoir apporté, créé ou développé une clientèle364. Le mandant attend de son agent
qu’il mette ses compétences et sa connaissance du marché au service de son
entreprise. Cette attente vise à permettre à l’entreprise du mandant d’être mise en
rapport avec des prospects. C’est là tout l’intérêt de la formule de l’agence
commerciale365. Il faut admettre que sa fonction primordiale est de susciter des offres
des clients potentiels de l’entreprise, ce qui constitue un acte juridique à ce titre366.

203. En revanche, l’agent n’entre pas réellement dans le processus de


distribution des produits mais plutôt dans une activité plus large qui est celle de la
diffusion : étant donné que « le diffuseur doit exécuter la prestation de présentation
et le cas échéant de négociation des produits ou services en respectant les modalités
convenues avec le fournisseur, et informer ce dernier sur l’exécution de la prestation,
c’est-à-dire sur les clients sollicités, le résultat des négociations »367. Son action se
situe en amont de la commande ; celle-ci est presque subalterne dans la fonction de

360
L’intermédiaire qui ne disposait pas de façon permanente du pouvoir de négocier n’est pas un
agent commercial : Cass. com., 27 avr. 2011, D., 2011, p. 1279.
361
V. supra n° 192.
362
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 186
363
CA Rennes, Ch. 01 B, 1 oct. 2010, n° 09/02272 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11 mars 2010, n°
08/03694 ; CA Lyon, Ch. civ., 01 B, 17 déc. 2009, n° 09/06347 ; Cass, com., 17 mars 2009, n° 08-
10.398 ; CA Orléans, Ch. Solennelle, 18 nov. 2008, n° 08/01089 : « Elle soutient qu'il ne démontre pas
remplir les conditions liées à l'octroi de l'indemnité de clientèle qui impliquent d'une part la création
d'un lien de fidélité entre l'acheteur et l'entreprise, et la constitution d'un courant d’affaires, d'autre
part :ce qui ne justifie pas du développement en nombre de la clientèle » ; CA Paris, Ch. 05 B, 6 nov.
2008, n° 05/20095 ; CA Paris Ch. 21 C, 6 mai 2008, n° 06/11172.
364
CA Riom, 11 mars 2008, n° 06/02817.
365
« L’esprit de l'agence commerciale... est essentiellement d'attirer une clientèle vers les produits
du mandant » : Contrats, conc. consom. 2011, Comm. 190, note N. MATHEY.
366
J.-M. LELOUP, JCP, éd E., 1987, II, 15024, n° 10.
367
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 63.
-112-

l’agent commercial. Son métier comporte essentiellement des actions de recherche et


de prospection des clients, et des actions de promotion des produits objets du contrat
d’agence commerciale. Aussi, le mandant garde-t-il en général le contrôle de la
diffusion de ces produits, par l’absence du pouvoir de conclure de l’agent
commercial ? C’est ce qui en fait un « mandataire particulier » : un mandataire
réalisant essentiellement des actes matériels, outre que la négociation ne crée pas
d’obligation à la charge du mandant, et en effet ne constitue pas un acte juridique368.

204. Il découle de ce qui précède que l’activité de négociation n’est pas unique,
elle est la règle (agent négociateur) ainsi que la possibilité de conclure l’exception
(agent contractant)369. Elle est constituée par une variété d’actions et d’opérations qui
ont toutes pour objet ou pour effet de mener à la même finalité : celle de la conclusion
d’un contrat370. Après avoir souligné la teneur de l’exigence pour le compte d’autrui
dans le premier paragraphe, il s’agit d’évoquer la portée de cette exigence dans un
deuxième paragraphe.

Paragraphe 2 : La portée de l’exigence.

205. Nous avons vu que l’agent commercial français ou le représentant


commercial libanais, en tant que mandataire professionnel, est un intermédiaire de
commerce qui exerce sa mission de façon permanente, indépendante et habituelle au
nom et pour le compte d’un mandant (de commerçants ou d’industriels), dans la
conclusion de contrats avec les clients et non pas pour son propre compte ; alors que
la représentation n’est, pour l’agent commercial, que le moyen utile et nécessaire au
développement de son activité. Quoique la reconnaissance de l’existence d’un pouvoir
d’agir au nom et pour le compte du mandant indique, sans ambages, que la
qualification de mandat est bien celle qu’il faut trouver dans l’origine du contrat
d’agence commerciale, le pouvoir de négocier et l’éventualité du pouvoir de conclure

368
CA Rouen, Ch. 01 Cabinet 01, 11 avr. 2007, n° 05/04494.
369
S. MEGNIN, op. cit., n° 19.
370
F. FOURNIER, op. cit., p. 114.
-113-

pourraient éloigner le contrat d’agent du contrat de mandat, au sens classique du


terme371.

206. De même, nous avons déjà vu que, s'il ne lui est demandé que d'accomplir
un ou plusieurs actes juridiques isolés, le mandataire que ce soit le représentant
commercial libanais ou l’agent commercial français, peut parfaitement s'en charger
dans le cadre d'une profession, à titre habituel et rémunéré, au service d'une pluralité
de mandants. Dans ce sens, il a été jugé que l’agent maritime peut se rapprocher du
représentant commercial au sens des articles 1 et 3 du contrat de représentation
commerciale du décret-loi N. 34/67 : « étant donné que par sa profession habituelle et
indépendante, il entreprend des négociations pour conclure des opérations de
location ou de prestation de services ; ainsi il est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale »372.
C'est ainsi que le contrat de mandat est l'un des instruments juridiques favoris de ceux
que l’on a coutume d'appeler les « agents d'affaires »373 ; il permet de désigner d'une
façon aussi générique qu'imprécise les professionnels s'occupant à titre habituel et
onéreux des affaires d'autrui.

Citons entre autres :

207. Agent immobilier, qui peut recevoir mandat d'acheter ou de vendre un


fonds de commerce ou un immeuble374 ; Agent de publicité, à qui mandat peut être
donné par un annonceur de passer des ordres d'insertion (achat d'espace) et d'en
effectuer le paiement au régisseur375 ; Agent de voyage376 ; Agent matrimonial377 ;

371
F. FOURNIER, op. cit. p. 123.
372
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
373
J.-Cl. Fasc. 1160 et 1170 : cité par B. FAGES, Mandat Commercial, op.cit. ; Cette expression
fugacement évoquée dans le C. com., art. L. 110-1, al. 6.
374
Cf. L. HOGUET, n° 70-9, 2 janv. 1970 et D. n° 72-678, 20 juill. 1972. - J.-Cl. Fasc. 1180.
375
Cass. com., 29 oct. 2002 : Bull. civ. IV, n° 156, ce double mandat n'est pas interdit par l'article
20, L. "Sapin" n° 93-122, 29 janv. 1993. - J.-Cl. Fasc. 4020.
376
L. n° 92-645, 13 juill. 1992. - J.-Cl. Fasc. 800.
377
V. sur la protection du client L. n° 89-421, 23 juin 1989 et Recomm. CCA, n° 87-02. - J.-Cl.
Fasc. 850 et 1290.
-114-

Agent artistique ou imprésario378 ; Agent privé de recherche, agent de renseignements


commerciaux, de recouvrement de créances... En réalité, ces professionnels n'agissent
pas toujours comme des mandataires. Ils peuvent se contenter de rapprocher les
parties en tant que simples courtiers (agence matrimoniale) ou, au contraire, aller
jusqu'à fournir des prestations de service relevant du contrat d'entreprise (agence de
voyage).

208. Donc en tant qu’intermédiaire de commerce, l’agent commercial se


379
comporte en vrai représentant et cela doit nous conduire à le distinguer des autres
mandataires, intermédiaires de la vie des affaires, lesquels, différemment, ont les
honneurs du Code de commerce en agissant pour le compte d'autrui mais sans faire
connaître le nom de leurs mandants : il s'agit des commissionnaires (A) et des
courtiers (B).

A- Distinction du représentant commercial du commissionnaire

209. L’identification de la représentation commerciale semble très proche de


celle de la représentation imparfaite ou commission, par laquelle le représentant ou
commissionnaire agit en son propre nom ou sous un nom social pour le compte
d'autrui ou commettant380. Ces deux représentations se rapprochent, du fait que
chaque intermédiaire de commerce est libre et indépendant dans l’organisation de ses
activités381 avec privilège au commissionnaire « mandataire indépendant » de réaliser
des opérations commerciales en son nom sans que l’identité de son commettant ne
soit révélée ; ceci a été baptisé du nom latin d’absence de contemplatio domini, alors
que le cas du représentant qui agit au nom du représenté dont l’identité est connue, ne
peut exister qu’en présence de contemplatio domini.

378
C. trav., art. L. 762-3 à L. 762-12.
379
Sur l'analyse théorique de la représentation, v. Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé,
préf. Y. LEQUETTE, LGDJ, 2000, n° 206 et s.
380
Art. L. 132-1 C. com.
381
Art. 3 du décret-loi libanais n° 34 de 5 août 1967.
-115-

210. On distingue alors deux types de représentations : la représentation parfaite


ou commerciale dans laquelle le représentant agit sous le nom et pour le compte de
son représenté, et la représentation imparfaite ou commission dans laquelle le
représentant agit sous son nom propre mais pour le compte de son représenté.

211. Le Code de commerce libanais identifie dans son article 279 le


commissionnaire comme celui qui se charge de conclure en son nom propre, mais
pour le compte de son mandant, des achats, des ventes et d’autres opérations
commerciales moyennant une commission ou une provision ; il en est de même du
Code de commerce français qui dans son article L. 132-1, considère le
commissionnaire comme celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social pour
le compte d'un commettant.

212. Suivant ces deux textes, une définition commune peut être proposée si l’on
considère le commissionnaire comme celui qui agit en son propre nom et pour le
compte d’autrui, dernier point où le représentant commercial libanais comme l’agent
commercial français se rejoignent, puisque tous les deux agissent pour le compte
d’autrui. Ainsi, une distinction terminologique peut être évoquée, concernant ces deux
textes, s’agissant du « nom social » par lequel le commissionnaire français peut agir
différemment du texte libanais qui ne spécifie pas ce détail dans cet article là, mais
était l’objet d’un autre article dans le Code de commerce libanais 382 ; il s’agit du
mandat commercial qui semble très proche du texte français tout en considérant, que
le mandat commercial prend le nom de commission lorsque le mandataire doit agir
en son propre nom ou sous un nom social pour le compte de son commettant. De
même, le texte libanais mentionne pour sa part une autre spécificité qui le distingue
du texte français, concernant l’existence d’une commission ou une provision pour le

382
Art. 272 C. com. : « Le mandat est commercial quand il est relatif aux opérations commerciales.
Il prend plus précisément le nom de la commission et est régi par les dispositions du chapitre
suivant, lorsque le mandataire doit agir en son nom propre ou sous un nom social pour le compte de
son commettant. Quand le mandataire doit agir au nom du mandant, ses droits et ses obligations sont
déterminés par le livre VIII de la deuxième partie du code des obligations ».
-116-

travail effectué : ainsi le législateur libanais a bien signalé l’existence d’une


rémunération -objet d’une déduction en droit français-383.

213. De même, l’acte d’« agir » dans le texte français a été moins bien défini et
spécifié que dans le texte libanais, car ce dernier mentionne le fait de « la charge de
conclure des achats, des ventes et d’autres opérations commerciales ». Par
conséquent, et parce que se trouve spécifiée d’une manière précise la qualité de
commissionnaire et son rôle de conclure des achats, des ventes et d’autres opérations
commerciales, nous pouvons en déduire qu’au niveau de la précision de la mission du
commissionnaire le texte libanais est plus clair et précis que le texte français qui
parait plus vague et général.

214. Or comme le commissionnaire libanais ou français n’agit point pour son


propre compte, il faudrait le distinguer sur ce point aussi du représentant commercial
libanais384, en rappelant que malgré son agissement en propre nom, le
commissionnaire reste un intermédiaire de commerce. D’une autre manière, le
représentant commercial se distingue du commissionnaire en tant qu’il n’agit pas en
son propre nom mais sous le nom du représenté, en conservant son indépendance,
avec l’absence du lien de subordination entre son représenté et lui. Cette confrontation
entre les deux statuts nous pousse à exposer les divergences entre le droit libanais et le
droit français, vu les difficultés qui apparaissent lors de la mise en œuvre (a). Mais la
distinction n’est pas toujours évidente au niveau de l’agissement pour le compte
d’autrui, où à partir des ressemblances nous pouvons étendre le décret-loi N. 34/67
(b).

383
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 95 : « Le commissionnaire a droit à commission, constitué le plus souvent d’un
pourcentage sur le montant brut de l’opération et la valeur totale du marché » ; CA Paris, 27 nov.
1991, D., 1992, IR 72.
384
Au sens de l’article premier alinéa second du décret-loi n° 34/67 qui assimile au représentant
commercial l’intermédiaire qui agit pour son propre compte en vertu d’un contrat lui conférant une
certaine exclusivité.
-117-

a- Les divergences entre le représentant commercial et le commissionnaire

215. D’après l’article 279 du Code de commerce libanais : « est


commissionnaire, l’intermédiaire du commerce qui prend charge de conclure en son
propre nom, mais pour le compte de son mandant, des achats, des ventes et d’autres
opérations commerciales moyennant une commission ou une provision ». De cette
définition, il apparaît de prime abord, que le commissionnaire, en principe, ne jouit
pas du statut d’agent commercial même s’il exerce son travail à titre de profession
habituelle. Nous constatons alors une divergence entre le commissionnaire et le
mandataire, car ce dernier conclut le contrat au nom et pour le compte de son
mandant ; pour cela tout ce qui naît du contrat, droits et obligations, sera attaché au
mandant.

216. Tandis que le commissionnaire conclut le contrat en son propre nom mais
pour le compte de son mandant ; ainsi si le commissionnaire achète des marchandises
pour le compte d’une autre personne, c’est comme s’il achète sous son propre nom
sans que le nom du mandant n’apparaisse pas dans le contrat. Ce qui aboutit à
l’acquisition par le commissionnaire des droits résultant du contrat, et l’engage envers
les personnes avec qui il traite385, comme si l’affaire le concernait personnellement386:
d’une autre manière, il sera interdit à la personne avec laquelle s’est engagé le
commissionnaire de porter plainte directement contre le commettant, de manière qu’il
sera impossible d’accepter l’inverse et de permettre au commettant de porter plainte
directe contre la personne qui a passé contrat avec le commissionnaire notamment
suivant les dispositions de l’art. 224 C.O.C : « Si le mandataire agit en son nom
propre alors que ce dernier est un faux, sans présenter le mandat qui lui est conféré,
il est interdit au tiers ayant passé contrat avec lui de porter plainte contre quelqu’un
d’autres, ainsi qu’aucune poursuite est faite contre ses tiers que par lui. Les règles du
mandat et de la représentation ne sera applicable que sur les relations entre le
mandataire passif et le mandant ».

385
Sujet à développer dans notre deuxième partie de cette étude concernant les effets de la
représentation commerciale.
386
Art. 280 C. com. Lib. ; TI Beyrouth, Ch. com., décision du 11 nov. 1973, Rec. Hatem, vol. 150,
p. 21 et 22.
-118-

217. En revenant aux dispositions de l’art. L. 132-1 C. com. dans son premier
alinéa, nous trouvons que le commissionnaire est un intermédiaire de commerce qui
agit en son nom mais pour le compte d'un commettant dans les limites du mandat qui
lui est conféré et pour les opérations qui lui sont confiées. Le cas échéant il apparaît
comme un mandataire indépendant387, en rappelant qu’une jurisprudence signale que
le commissionnaire n'est pas un mandataire388, sauf dans les relations internes
commettant-commissionnaire389. Cette solution semble être différente de celle du
droit libanais suivant le deuxième alinéa de l’article 279 C. com.390, assimilant au
commissionnaire la qualité d’un mandataire, pour qu’il puisse bénéficier du statut
protecteur du décret-loi N. 34/67, au sens de son alinéa premier de l’article premier,
avec certaines variantes dans les modalités d’exercice de ces activités.

218. L'utilisation du terme commissionnaire dans les deux alinéas de l'art. L.


132-1 C. com. précité, recouvre différentes notions du contrat de commission ;
solution adoptée par Mme le professeur DUMONT-LEFRAND dans son étude sur la
notion du contrat de commission : « … Les contours de la notion de commission
peuvent être appréhendés de façon positive et de façon négative… Selon la première
conception, dite extensive, serait commissionnaire celui qui agit pour le compte d'un
commettant, qu'il agisse en son nom ou au nom du commettant. La commission serait,
tout simplement, la forme commerciale du mandat et comporterait ou non de la
représentation selon que l'on est dans le cadre de l'alinéa 1er ou de l'alinéa 2….

387
Rapp. CA Versailles, 9 juin 2011, Concurrences 2011, n° 3, obs. D. FERRIER : reconnaît que la
mise à disposition de l’enseigne et de la marque n’influe pas sur la qualification du contrat de
commission et que le commissionnaire a une clientèle propre ; Cass. com., 29 juin 2010, Bull. civ.,
2010, IV, n° 114, D. 2011, pan. 548, obs. D. FERRIER ; CA Paris, 13 sept. 2006, D. 2007, pan° 1914,
obs. D. FERRIER., cassé par Cass. com., 26 fév. 2008 D. 2008, obs. D. FERRIER, au motif que le
commissionnaire était aux termes du contrat de commission un commerçant indépendant propriétaire
de son fonds de commerce. L’idée a été beaucoup discutée en doctrine où, plutôt l’avis général
considère que la commission est un mandat : R. RODIERE, Droit civil, Mandat, t. 3, n° 45 ; E.
THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à l'exclusion du droit maritime, par J.
PERCEROU, t. 1, suppl. 8e éd., Rousseau, 1936, n° 1102 ; MM. RIPERT et ROBLOT, ont assimilé le
commissionnaire comme un mandataire salarié : G. RIPERT et R. ROBLOT Traité de droits des
affaires, Du droit commercial au droit économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-
Lextenso, 2010, n° 157. Pour ces derniers la commission serait un mandat sans représentation parfaite :
avis adopté par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit.
388
Cass. com., 6 mars 2001, DMF 2001, p. 499, note D. AMMAR.
389
V. J.-Cl. Commercial, Fasc. 59, n° 4.
390
Art. 279, al. 2 C. com. lib. : « Les règles du mandat s’appliquent au contrat de commission avec
réserve des dispositions du présent chapitre ».
-119-

Selon une seconde conception, dite restrictive, le commissionnaire serait


exclusivement celui qui traite en son propre nom une opération pour le compte
d'autrui. La commission serait une opération pour le compte d'autrui caractérisée par
l'opacité du commissionnaire, traduisant apparemment un défaut de représentation
du commettant. Cette approche retient le mode d'action du commissionnaire comme
mode d'identification de celui-ci, malgré le maintien du terme commissionnaire pour
désigner l'intermédiaire qui agit au nom et pour le compte d'autrui, dans l'article L.
132-1, alinéa 2, du Code de commerce… »391 .

219. En rappelant que c’est uniquement l’alinéa premier de l’article premier du


décret-loi N. 34/67 qui peut être appliqué, étant donné que les personnes visées au
second alinéa ne sont pas des mandataires ; ainsi, ce dernier est une exception qui, à
ce titre, doit être interprétée restrictivement392. Par conséquent, une interprétation
stricte ne permet en aucun cas d’étendre le bénéfice de cet article au commissionnaire,
car cet article concerne uniquement l’intermédiaire du commerce traitant pour son
propre compte, c’est dire qu’il n’a pas la qualité de mandataire mais celle d’un
commerçant393.

220. En définitive nous ne dirons pas avec MM. les professeurs FABIA et SAFA
que le commissionnaire bénéficierait du statut de représentant commercial s’il jouit
d’une certaine exclusivité394, car cette opinion se base sur le deuxième alinéa de
l’article premier du décret-loi N. 34 selon lequel l’élément d’exclusivité dans les
rapports du mandant et de l’intermédiaire peut provoquer l’application dudit décret-
loi. Nous dirons plutôt que les commissionnaires sont des représentants commerciaux
dans la mesure où ils agissent dans les mêmes conditions que le représentant
mandataire visé à l’alinéa premier dudit article. Solution opposée en France où

391
M.-P. DUMONT-LEFRAND, Op. cit.
392
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301 : « Les exceptions sont d’interprétations stricte », p. 196 : « La loi
spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
393
Art. 1, al. 2 du décret-loi libanais n° 34/67: « Est aussi considéré représentant commercial, le
commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un
contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ».
394
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
-120-

d’après M. le professeur HEMARD, les commissionnaires ne le sont pas car ils


jouissent d’un statut légal ce qui explique leur exclusion de l’agence395.

221. Aussi bien il n’existe pas dans la loi française une précision analogue à
celle qui figure dans l’art. 279 al. 1. C. com. lib., définissant la commission comme
un contrat fait pour la conclusion d’opérations commerciales. Cela ne signifie certes
pas que des opérations non-commerciales ne peuvent être conclues par un mandataire
agissant en son nom propre pour le compte du mandant396. C'est en cela qu'il se
distingue du mandataire397. Le caractère des opérations objet du contrat de
commission s’apprécie dans la personne du commettant, dès lors qu’elles sont
accomplies pour son compte, qu’elles sont propres.

222. C’est le point de vue général398. Peu importe le caractère qu’elles peuvent
avoir quant à la personne du tiers cocontractant399. En conséquence, il y aura
commission au cas où les opérations à conclure sont commerciales 400 pour le
commettant, soit en tant qu’actes de commerce par nature soit par accessoire ; concept
adopté par M. le professeur TYAN : « Il n’y a contrat de commission, tel qu’il est
conçu par le Code de commerce libanais401 et auquel, seul, sont applicables les règles
particulières qui y sont prévues, que s’il a pour objet la conclusion d’opérations
commerciales »402. Aussi, n’y a-t-il pas lieu, en l’occurrence, de tenir compte de la
solution qui prévaut en droit français, selon laquelle il y a toujours commission même
si celle-ci porte sur des opérations civiles, telles que des ventes de produits du sol
pour le compte d’un agriculteur403.

395
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 473 et s.
396
Cass. soc., 5 mai 1971 n° 69-14.636, Bull. civ., V, n° 334, p. 282.
397
Cass. com., 2 nov. 1954, Gaz. Pal., 1955, 1, p. 5 ; JCP, G 1955, II, 8496
398
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité de droit commercial, 2e éd. Paris, 1891, t. 3, n° 419 :
cité par M. MAHMASSANI, op. cit. p. 56.
399
Cass. soc., Rejet, 9 juin 1994, n° 91-18.618.
400
Cass. com., Rejet, 9 fév. 2010 n° 08-20.504 ; CA Colmar, Ch. civ., 01 Sect. A, 1 sept. 2009, n° 1
06/03392 ; CA d'Agen, Ch. soc., 4 déc. 2001, n° 00/01476.
401
Art. 279 C. com. lib., al 1er.
402
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 479.
403
J. HAMEL et G. LAGARDE, I, 159, in fine ; E.D.Co, v. acte de commerce, n° 321.
-121-

223. Il n'est pas envisageable que le commissionnaire soit uniquement celui qui
agit en son propre nom dans la mesure où le texte précédent, dans son deuxième
alinéa, continue de qualifier de commissionnaire et de soumettre aux règles du mandat
celui qui agit au nom du commettant. Donc le critère permettant d'identifier un
commissionnaire est le double agissement de celui-ci en son propre nom et pour le
compte d'autrui et c’est ce qui a été consacré par la jurisprudence française404 ; il y a
divergence avec la solution libanaise sur ce point, quand se trouve adopté le seul
critère de l’agissement pour le compte d’autrui afin de le faire bénéficier de la
protection spéciale du décret-loi N. 34/67 prévu pour le représentant commercial
libanais.

224. En revanche, la présence du commissionnaire instaure une certaine


confiance entre le commettant et les tiers, tant dans les relations d’affaires que dans
les relations contractuelles. Le commissionnaire garantit l’anonymat et apporte une
sécurité plus grande au commettant car seul le commissionnaire est mis
contractuellement en relation avec le client, alors que le mandat de l’agent
commercial s’expose aux actions des clients. Cette transparence est fondamentale en
matière de mandat. A la différence du contrat de commission, « …c’est la volonté
des parties -içi d’aménager la transparence du représentant- qui caractérise la
technique du mandat et point le résultat acquis… »405. Le commissionnaire ne saurait
bénéficier du régime protecteur accordé à l’agent commercial français 406. En tout état
de cause, la qualification pose parfois problème lors de sa mise en œuvre : c’est le cas
de commission-affiliation407, où le commissionnaire-affilié pose des difficultés de
mise en œuvre puisqu’il est un commerçant et il n’est pas toujours évident pour lui de

404
CA Orléans, CT0344, 28 nov. 2007, n° 06/02893 ; Cass. com., 20 mai 1997, RJDA 10/1997, n°
1187 ; Cass. com., 3 janv. 1995, RJDA 4/1995, n° 425 ; 22 mai 1991, Bull. civ., IV, n° 173 ; 21 juin
1982 : Bull. civ., IV, n° 235, JCP G 1982, IV, 314 ; 10 févr. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Cass. com., 2
nov. 1954, Gaz. Pal. 1955, 1, 5.
405
J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle, 2e éd., Francis Lefèbvre, 1999, p. 203.
406
Ordonnance de CJCE du 10 fév. 2004, Aff. C. 85/03, publiée au JO, C 112, 10 mai 2003 et au
JO de l' UE, C 94/17, 17 avr. 2004 : Demande de décision préjudicielle du Polymeles Protodikeio
Athinon (Grèce): Mavrona & Sia OE c/ Delta Etaireia Symmetochon AE, ayant pour objet à obtenir
une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 déc.
1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux
indépendants (JO L 382, p. 17), dans le sens que « les personnes qui agissent pour le compte d'un
commettant, mais en leur nom propre, n'entrent pas dans le champ d'application de cette directive ».
407
V. Titre 2 de cette première partie.
-122-

traiter sous son nom : il relève de l’alinéa 2 du de l’article premier du décret-loi N.


34/67 -commerçant ayant la qualité de représentant-, sujet de notre deuxième titre, ce
que nous traiterons plus tard.

225. Après avoir exposé l’indifférence d’agissement entre le représentant


mandataire qui agit au nom d’autrui et le commissionnaire qui agit en son propre
nom ; il s’agit de vérifier ce qu’a d’essentiel le point commun entre le droit français
et libanais, concernant le commissionnaire et le représentant commercial où tous les
deux agissent « pour le compte d’autrui ».

b- Les ressemblances entre le représentant commercial et le commissionnaire

b-1. L’exposé

226. L’utilité de la commission favorise le commerce lointain, mais avec deux


inconvénients. D’abord, elle prend un certain temps, du fait des distances entre
l’investissement et la libération du profit, ensuite elle peut être risquée, car les voies
de communication sont mauvaises et parfois dangereuses. Dès lors il peut être
hasardeux d’entrer en affaires avec une personne de quelque contrée lointaine aux
mœurs inconnues. Mais même entre pays civilisés, les difficultés que soulèvent les
conflits de lois applicables ou de juridictions compétentes sont perçues comme autant
d’obstacles à une résolution rapide d’un possible litige408.

227. Toutes ces considérations freinent le commerce car elles dissuadent de


contacter avec des étrangers sur place, d’où le rôle du commissionnaire pour
surmonter ces obstacles tout en tirant aussi sa substance de la crainte que suscite le
commerce lointain. La difficulté de ce type de commerce pourrait sembler aujourd’hui
dépassée. Par exemple la sévérité avec laquelle le droit de la consommation traite
l’importateur nous semble procéder de la même inquiétude. Soumettre à la
responsabilité du fabricant409 l’importateur qui distribue en France des produits
fabriqués à l’étranger, c’est vouloir avoir en France un répondant du producteur

408
Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé, op.cit., p. 135.
409
Art. L. 212-1 C. consom.
-123-

étranger, c'est dire donner la possibilité d’avoir un interlocuteur sur le territoire


national contre lequel on puisse agir facilement.

228. Le sens principal de l’adoption du commissionnaire pour la conclusion de


la transaction est, la plupart du temps, que la tierce personne n’accepte pas la
collaboration avec le mandant, considérant qu’il est incapable dans le domaine
commercial ; la coopération avec le commissionnaire augmente sa valeur
commerciale face à son capacité à conclure des contrats. Pour cela, le tiers ne trouvant
pas un mandant capable de réaliser les opérations commerciales, est incité à accréditer
le commissionnaire étant donné la confiance dont il jouit envers les tiers. De même, la
commission contribue efficacement à l’augmentation des opérations commerciales et
leur rapidité d’exécution.

229. Il a été révélé que la commission, plus qu’un simple contrat, est « un
véritable besoin du commerce international »410 . Pourtant, la commission met en
relation des intervenants dont le service commercial que rend le commissionnaire au
commettant ; soit en intervenant comme commissionnaire de vente, et permettant à un
producteur éloigné géographiquement de diffuser sa production sur la place où il
opère, en lui ouvrant ainsi un marché autrement impossible à atteindre411 ; soit en
intervenant comme commissionnaire d’achat, permettant au contraire à un
commerçant de s’approvisionner à une source à laquelle ce dernier aurait
difficilement accès.

230. Passer par l’intermédiaire d’un commissionnaire offre ainsi deux


avantages : voir sa production diffusée sans investissement de distribution important
et toucher des fonds sans attendre la vente définitive de ses marchandises412.
Cependant, le commettant quand il passe par un commissionnaire, garde sur lui le

410
F.M.B REYNOLDS, Agency, Theory and practice, 1978, p. 230 et s. : cité par Ph. DIDIER, De
la représentation en droit privé, op. cit., n° 112.
411
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 157 et s.
412
L’exposé des motifs de la loi du 23 mai 1863 réformant le gage commercial met en évidence que
la simplification des règles du gage commercial et l’extension du privilège du commissionnaire avait
pour but de répondre aux succès commerciaux anglais que l’on attribuait en partie à la facilité avec
laquelle les commissionnaires anglais pouvaient affier ce double service : cité par Ph. DIDIER, op.cit.,
n° 111 et s.
-124-

risque commercial de l’opération. En effet, dès lors que la commission ne transfère


pas la propriété des marchandises au commissionnaire, c’est le commettant qui, en
tant que propriétaire, supporte le préjudice pécuniaire si sa marchandise ne se vend
pas, ou si elle le fait avec retard. Il supporte donc l’aléa commercial.

231. Mais il peut lui arriver de supporter, en plus, l’insolvabilité du tiers


contractant : si le commissionnaire livre sa marchandise à un acquéreur qui se révèle
insolvable, c’est le commettant qui en subit les conséquences. Pour éviter ce
désagrément, le commettant peut stipuler du commissionnaire qu’il lui garantisse la
solvabilité du tiers. On parle alors de convention « ducroire »413, dont encore le droit
libanais use, mais en la reliant au cas de la représentation commerciale et non de la
commission tout en énonçant dans l’alinéa 2 de l’art. 2 du décret-loi N. 34/67, modifié
par la loi applicable par le décret N. 9636 du 6/2/1975, que : « le contrat de
représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité limitant la
représentation à un représentant unique, ou stipulant la garantie du représentant
envers ceux avec lesquels il contracte pour le compte de son représenté (convention
ducroire), ou une clause de consignation de marchandises en vue de la livrer à la
clientèle ».

232. Nous trouvons ici un point commun entre le commissionnaire français et le


représentant commercial libanais car tous les deux ont la capacité de garantir le client
avec lequel ils contractent pour le compte de leur mandant et cela suivant une
convention « ducroire »414. Et cet engagement personnel du commissionnaire favorise
l’épanouissement du commerce lointain.

413
De l’italien del credere, qui signifie littéralement "de la confiance", forme lexicale adoptée par le
droit anglais où cependant elle n’apparaît que tardivement et par le biais des assurances maritimes.
414
Nous nous limitons à ce qui aide notre distinction afin de développer ce point-là dans notre
deuxième partie de notre étude.
-125-

b-2. Le commissionnaire relève-t-il du décret-loi N. 34/67 ?

233. Le contrat de commission est un contrat issu de la pratique commerciale et


dont le développement a accompagné l’essor du grand commerce415. La définition du
commissionnaire apparaît pour la première fois, en France, dans un manuscrit du
XVIIIème siècle, relatif aux « usages et coutumes de Marseille »416, et récemment
dans l’art. L. 132-1 C. com. : « le commissionnaire est celui qui agit en son propre
nom ou sous un nom social pour le compte d'un commettant.

Les devoirs et les droits du commissionnaire qui agit au nom d'un commettant
sont déterminés par le titre XIII du livre III du Code civil ».

234. Reprenons l’art. 279 du Code de commerce libanais : « le commissionnaire,


est celui qui se charge de conclure en son propre nom, mais pour le compte de son
mandant, des achats, des ventes et d’autres opérations commerciales moyennant une
commission ou une provision.

Les règles de mandat sont applicables au contrat de commission, sous réserve


des dispositions du présent chapitre ».

235. A première vue, il apparaît que l’article français se rapproche beaucoup et


semble très similaire de son voisin libanais, notamment les articles 272 et 279 du
Code de commerce. La définition du contrat de commission dans les deux textes
intègre la double caractéristique de l'agissement du commissionnaire, lequel intervient
en « son propre nom », et pour « le compte d'autrui ». Ce double agissement le
distingue du courtier, du mandataire, outre que le contrat de commission se rencontre
dans des domaines variés dont le droit de la distribution, celui des transports, le droit
douanier ou encore le droit boursier.

415
J. HAMEL, Le contrat de commission- Etudes de droit commercial, D., Paris, 1949 ; Ph.
DIDIER, op.cit.
416
Manuscrit de la bibliothèque de Munich, Cod. Gall., n° 183, publié par Zeller dans la Z.H.R,
1918, p. 130, Livre V : Des consuls du Levant et des commissionnaires : il est dit, dans ce texte,
que « le commissionnaire est celui qui, faisant les affaires des autres, agit en son nom, et s’oblige ainsi
lui-même sans engager directement ses commettants » : cité par J. BOUDAUD, Les intermédiaires du
commerce en droit français et mexicain, th., Montpellier, 2001, n° 15.
-126-

236. Une décision de la jurisprudence libanaise a mis en relief la question de


rattachement du commissionnaire au décret-loi N. 34/67 :

« Prenons le cas de la compagnie de Construction et des Annonces : celle-ci est


associée par un contrat à la compagnie Krant Advertising limited. Cette dernière l’a
chargée de procéder à la publicité et à l’annonce pour une durée non spécifique,
selon les conditions énoncées expressément dans le contrat sous le contrôle de la
compagnie défenderesse, et conformément aux instructions.

Il semble que la défenderesse a résilié le contrat en question. C’est ce qui a incité


la demanderesse à présenter son action devant le tribunal de commerce de première
instance de Beyrouth en exposant que la société l’a chargée, au titre d’un contrat de
représentation commerciale, d’accomplir au Liban, sous son nom et pour son compte,
tous les types de publicité et d’annonce pour une durée indéterminée. Ayant résilié ce
contrat, elle sera alors obligée à le réparer.

Attendu que la Cour commerciale de la première instance de Beyrouth a


considéré l’incompatibilité du contrat avec les œuvres et les pouvoirs du représentant
commercial, qui conclut des opérations commerciales sous sa responsabilité et à ses
frais, sans l'aide qu'il peut parfois recevoir de la compagnie qu'il représente. Ce qui
conduit à dire que le contrat liant la demanderesse à la défenderesse, constitue un
contrat de mandat commercial au sens des articles 272 et suivants du droit de
commerce.

Tant que la demanderesse concluait des contrats sous son nom propre et pour le
compte de la société défenderesse, le contrat de mandat en question constituait en
fait un contrat de commission soumis aux dispositions du mandat, au moins dans les
relations entre le commettant et le commissionnaire -conformément aux dispositions
des articles 279-280 du Code de commerce ; par la suite chacune des parties
contractantes aura le droit de mettre fin au contrat sans indemnisation »417.

417
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 718/747, du 23 nov. 1969, Compagnie de Construction et des
Annonces c/ Compagnie Krant Advertising limited, Rec. Hatem, 1970, vol. 113, p. 23 et s.
-127-

237. Il découle des motivations de l’arrêt, objet de ce débat, que la demanderesse


avait conclu les contrats en son nom propre mais pour le compte de la compagnie
défenderesse. Fallait-il donner à son contrat la qualité de représentation commerciale?

238. Il ressort des attendus de l’arrêt que la demanderesse a perçu une


commission pour des services de publicité qui ont été fournies à la société
défenderesse. Relevons les éléments suivants :

- Un agent intermédiaire tient à conclure les contrats en son propre nom

- Mais pour le compte du mandant

- Contre une commission convenue

Ces éléments indiquent l’existence d’une commission à travers laquelle


l’intermédiaire du commerce agit en son propre nom mais pour le compte de celui
qu’il l’a chargé d’exécuter le travail.

239. Cet agent jouit-il en tant que commissionnaire de la qualité de représentant


commercial et, par la suite, de la protection du décret législatif N. 34/67 du 5 août
1967 ?

Il demeure encore aujourd’hui des incertitudes sur certaines conséquences


juridiques liées à la nature du mandat sans contemplatio domini418. En effet, dès lors
qu’il est certain que le commissionnaire est personnellement engagé envers les
tiers419, peut-on encore considérer qu’il s’agit d’un cas de représentation420 ?

240. En revanche, suivant les dispositions du premier alinéa de l'article premier,


du décret législatif N. 34/67, il résulte que le législateur a décrit le représentant
commercial à partir du contrat de mandat parce qu'il l’a considéré comme mandataire
agissant « au nom et pour le compte de producteurs ou de commerçants ». Cela
signifie-t-il qu’il a imposé au mandataire la qualification de représentant commercial

418
L’absence du nom et / ou de l’identité du représenté.
419
A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et commerciaux, 9e éd.,
Montchrestien, 2011, n° 986.
420
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6 éd., Defrénois, 2012,
n° 538.
-128-

pour agir « au nom » et « pour le compte » de son mandant ? Ces deux conditions
sont-elles stipulées cumulativement?

241. La doctrine n’a pas tranché cette question. Avant d'aborder ce point, il est
utile de préciser la notion de « commission » : « c’est celle par laquelle le
commissionnaire travaille par une délégation du commettant, en son propre nom mais
pour le compte de son commettant »421. Cela est-il en contradiction avec le concept du
premier alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, lequel évoque l’exécution
des actes « au nom » et « pour le compte » du mandant ?

242. M. le professeur TYAN, a considéré que les deux conditions précitées sont
imposées cumulativement : « …D’une part, en effet, le texte indique, comme objet de
la représentation commerciale, les démarches en vue de la conclusion de contrats et
cette conclusion même, à titre cumulatif et non alternatif… » 422.

« …Le représentant commercial…accomplit ces actes au nom des producteurs ou


des commerçants et pour leur compte…C’est là le trait principal par lequel la
représentation commerciale se distingue de la commission… » 423.

243. De leur côté, MM. les professeurs FABIA et SAFA, explicitant le décret-loi
N. 34/67, et particulièrement son article premier, ont considéré que : « …Dans cette
modalité, l’agent commercial opère tantôt en révélant au tiers son mandat et
l’identité de son mandat, tantôt il agit seul et en son nom propre … »424. Et en effet,
ils ont donc considéré le mandataire comme représentant commercial, même s’il a agi
en son propre nom, en lui permettant de bénéficier des dispositions du décret législatif
N. 34/67 du 5 août 1967.

244. Dans le même sens, M. MAHMASSANI a adopté cet avis, en considérant


que les dispositions du premier article du décret-loi susmentionné, même si elles ont

421
Art. 279 C. com. lib.
422
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468.
423
E. TYAN, op. cit, p. 469 ; J. HEMARD, Les représentants commerciaux, RTD com., 1959, p
576, 586.
424
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
Art. 1er., n° 4.
-129-

défini le représentant commercial comme le mandataire qui agit au nom et pour le


compte de son mandant, cela ne signifie pas que ces deux conditions sont imposées
cumulativement. Mais au contraire, la principale et essentielle condition est que le
mandataire -intermédiaire- agit pour le compte de son mandant : « …Par conséquent,
il faut déduire que si l’article premier, alinéa premier, du décret-loi N. 34/67, définit
le représentant commercial comme étant le mandataire qui agit au nom et pour le
compte du mandant, il ne s’agit point-là de deux conditions qui doivent
obligatoirement être réunies cumulativement. La condition primordiale serait que
l’intermédiaire ait agi pour le compte du commettant ; autrement, il perdrait la
qualité de mandataire, de sorte que la condition d’avoir agi au nom du mandant
deviendrait secondaire et surabondante… » 425.

Nous avons tendance à adopter le deuxième avis pour les raisons suivantes :

245. Si la commission se distingue d’autres mandats commerciaux du fait que le


commissionnaire agit en son propre nom selon les dispositions des articles 272, alinéa
2 et articles 279 du Code de commerce libanais : ce critère-là ne peut pas aboutir à
exclure l'application des dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67, en
tant que celle-ci s’en distingue encore, suite à la « nature de l’opération » confiée au
commissionnaire pour l’accomplir.

246. Si cette opération est commerciale, il y a une commission, nonobstant le


fait que le commissionnaire aura agi en son propre nom ou bien au nom de son
commettant. Ainsi, certains ont ajouté une autre condition : que le commissionnaire
soit professionnel426. Tandis que d'autres estiment que le critère de distinction doit se
fonder sur « la nature des actes », base des rapports d’affaires : si ces derniers sont des

425
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 51.
426
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité de droit commercial, op. cit., n° 414 et 419 ; A.
WAHL, Précis théorique et pratique de droit commercial, n° 1343 ; E. TYAN, Droit commercial, éd.
Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 479.
-130-

articles, matériaux, titres ou actes commerciaux, le mandat sera une commission, que
le mandataire ait agi en son propre nom ou sous le nom de son mandant427.

247. Par la suite, la qualification du mandat par commission ne dépend pas


uniquement du fait que le commissionnaire agit en son propre nom, de même que le
mandat prend la forme de la commission, indépendamment du fait que le mandataire
aurait agi en son propre nom ou sous le nom de son mandant.

248. Ce qui nous incite à dire que le critère n'est pas seulement d’agir « sous le
nom du mandant », comme il est reconnu ; la détermination de la commission peut
être liée à « la nature de la relation » entre les parties, à « la professionnalité » ou à
« la nature des actes » à accomplir, ce qui est également adopté comme justification
par M. MAHMASSANI : «… D’ailleurs, pour de nombreux auteurs, la seule
différence qui existe entre la commission et le mandat, réside dans la nature des actes
à accomplir et la personne du commissionnaire. En effet, l’objet de la commission
doit être des actes de commerce428 et le commissionnaire doit agir à titre
professionnel429. Or la représentation commerciale, bien que définie comme mandat,
consiste en actes de commerce devant être effectués par un intermédiaire de
commerce qui agit à titre de profession habituelle… »430.

249. Cependant, puisque dans le domaine de la représentation commerciale il est


exigé de compter sur la « relation qui lie le représenté à son représentant
commercial » pour admettre ou rejeter l’application des dispositions du décret-loi N.
34/67 du 5 août 1967, il en résulte que cette relation ou liaison entre les deux parties
mentionnées n’affecte pas la relation entre le mandant et son mandataire ; il importe
peu que ce dernier agisse en son nom propre ou sous le nom de son mandant ; cela a
été signalé par la doctrine : «…Analogie avec le mandat – Le commettant charge le
commissionnaire d’accomplir pour lui un acte juridique : acheter ou vendre une

427
Art. 272 C. com. Lib. ; E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à l'exclusion du
droit maritime, op. cit., n° 1110 et s.
428
Th. DUBAELE, Commerçant, Rép. com., 2004 ; D. HOUTCIEFF, Actes de commerce, Rép.
com., 2008 ; CA administrative Nantes, 1ere Ch., 17 avr. 2006, n° 03NT01332.
429
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, t. 3, n° 419 ; A. WAHL, Précis théorique et pratique de
droit commercial, n° 1343 ; E. TYAN op cit. p. 49.
430
M. MAHMASSANI, op. cit., p 50.
-131-

marchandise ou des titres de bourses, conclure un contrat de transport. Cette mission


est analogue à celle qu’un mandat confère à un mandataire….Comme tout
mandataire, le commissionnaire doit se conformer aux ordres reçus et rendre compte
de leur exécution…C’est avec l’intuitu personae – le droit commun du mandat…En
revanche, l’intérêt commun fait échec à la révocation unilatérale, ou du moins exige
que celle-ci donne droit à dommages-intérêts »431.

250. Ainsi nous n’avons plus aucune raison de priver de protection et du


bénéfice des dispositions du décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967 le commissionnaire
qui agit en son nom propre, alors qu’une telle protection est maintenue pour le
mandataire qui agit au nom du mandant, bien que les deux agissent pareillement pour
le compte de ce dernier. C’est ce qui résulte, d’ailleurs, d’un commentaire de MM. les
professeurs FABIA et SAFA. Ils déclarent en substance : « Dans cette modalité,
l’agent commercial opère tantôt en révélant au tiers son mandat et l’identité de son
mandant, tantôt il agit seul et en son nom propre»432.

251. Nous pouvons dire que le critère pour accorder le bénéficie des dispositions
du décret-loi N. 34/67 est « la relation et le lien » entre le mandant et son
mandataire : ce qui a été adopté par M. MAHMASSANI, « … Donc ce sont les liens
qui unissent l’intermédiaire au mandant, qui, seuls doivent être pris en considération
pour décider de l’attribution ou de refus de la qualité de représentation commerciale,
et, par conséquent, du bénéfice du décret-loi N. 34. Et, si ce sont uniquement ces liens
qui doivent être pris en considération, nous nous rendons compte que ces liens
demeurent pratiquement inchangés entre mandant et mandataire selon que ce dernier
ait agi en son propre nom ou au nom du mandant… »433

252. Suivant l'adoption du principe de « la relation et le lien » entre le mandant


et le représentant commercial comme source fondamentale pour cette distinction,
nous sommes conduits à dire que l’exécution des actes commerciaux « au

431
J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de droit commercial, t. 2, D., 1966, n°
1198, p. 285.
432
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous article 1er, n° 4.
433
M. MAHMASSANI, op. cit., p.50 ; J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de
droit commercial, D., 1966, t. 2, n° 1198.
-132-

nom » et « pour le compte » du mandant, ne sont pas deux conditions qui doivent
obligatoirement être réunies cumulativement. De toute évidence, le critère pour
l’identification du contrat comme contrat de représentation commerciale est le fait que
l’intermédiaire mandataire ait agi pour le compte de son mandant434.

253. Sur l’appui de ces analyses et principes, et revenant à la décision de la Cour


de la première instance de Beyrouth435, nous pouvons dire que la relation qui lie
l'entreprise de Construction et des Annonces -demanderesse-, à la société Krant
Advertising Limited -défenderesse-, est une relation entre commettant et
commissionnaire. Et que cette relation laisse la demanderesse profiter des dispositions
du décret-loi N. 34/67, indépendamment du fait que le commissionnaire -la
demanderesse- avait conclu les contrats en son nom propre et pour le compte de la
défenderesse.

254. Le fait que la Cour commerciale de la première instance de Beyrouth, soit


contre cette opinion, entraine la non confirmation de l’arrêt ; il était préférable de
considérer que le décret législatif N. 34/67 englobe dans sa protection le
commissionnaire qui agit en son propre nom, mais dans l'intérêt et pour le compte de
son commettant. La distinction de la commission par rapport au mandat ne repose pas
sur un critère de fait lié à l'opacité effective du commissionnaire436. Le
commissionnaire ne devient pas mandataire du seul fait qu'il a révélé le nom du
commettant pour le compte duquel il agit437. En fait, et comme nous l’avons signalé
précédemment, il n’y a donc aucune raison pour que le commissionnaire se trouve
privé du bénéfice des dispositions du décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967.

255. Après avoir exposé les ressemblances et les divergences entre le


représentant commercial et le commissionnaire, venons-en à la deuxième évaluation
de la portée de la notion de l’action pour le compte d’autrui dans sa forme de

434
Art. 1 du décret-loi n° 34/67 ; Art. 279 C. com. ; M. MAHMASSANI, op. cit. : « La condition
primordiale serait que l’intermédiaire ait agi pour le compte du commettant ».
435
V. supra n° 236.
436
M.-P. DUMONT-LEFRAND., Notion de contrat de commission, J.-Cl., Contrats-Distribution,
01 Juill. 2003.
437
Cass. com., 7 mai 1962, Bull. civ., III, n° 240 ; 15 juill. 1963, Bull. civ., III, n° 378.
-133-

courtage ; là, le rôle du courtier se limite à la conciliation et la proximité entre les


deux parties du contrat comme nous allons l’étudier dans la section suivante, tandis
que le commissionnaire conclut en son propre nom et pour le compte d’une autre
personne dont le nom n’apparaît pas dans le contrat. C’est pour cela que le
commissionnaire sera responsable des effets du contrat devant les tiers438,
contrairement au courtier qui ne l’est pas, dans lequel il intervient pour la médiation
entre les parties ; signalons que cet agissement lui donne la qualité de commerçant, ce
qui le rend semblable au représentant commercial libanais.

B- Distinction du représentant commercial du courtier

256. Dès que le mouvement commercial a dépassé le stade du marché


hebdomadaire de banlieue, les négociants ont eu besoin d’intermédiaires car « seul le
degré de développement d’un marché conditionne l’apparition des courtiers », vu
que « les communications étaient difficiles et la connaissance des langues étrangères
n’était pas aussi répandue que de nos jours, car les pratiques commerciales étaient
déjà affaire d’initié »439.

257. Fruit des impératifs sociaux et économiques, la nécessité de recourir à


l’entremise des courtiers ne peut que s’accroître en raison de la mondialisation, de la
multiplicité des réseaux ou circuits de distribution et de la nécessité impérative d’agir
vite dans toute transaction. Et comme nous l’avons signalé précédemment, la
représentation commerciale est une forme entre autres de l’entremise commerciale440

438
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 109 : étant personnellement partie aux contrats qu’il conclut, le contrat conclu avec le
tiers n’étant pas réputé conclu par le donneur d’ordre, il est tenu personnellement des obligations
contractées à l’égard des tiers ; M.-P. DUMONT-LEFRAND, L’opération de commission, Litec, Paris,
2000, n° 626 : « Il a été toutefois proposé de distinguer entre les effets réels de l’opération de
commission, qui se produiraient directement dans le patrimoine du commettant, pendant que le
commissionnaire resterait personnellement lié sur le plan des effets obligatoires » ; F.
AUCKENTHALER, Commettant, commissionnaires à la vente : détermination du véritable titulaire de
la créance envers le tiers contractant, D. 1998, Chron., 53 ; Cass. com., 10 fév. 1970, D., 1970, 392.
439
J.-A. VAN HOUTTE, Les courtiers au moyen âge, Rev. historique de droit français et étrangers,
Sirey, 1936, p. 110 : cité par J. BOUDAUD, Les intermédiaires du commerce en droit français et
mexicain, th., Montpellier, 2001.
440
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-134-

et notamment le courtage où la mission essentielle du courtier est de mettre en rapport


des personnes qui, peut-être, contracteront éventuellement entre elles par la suite.

258. Les courtiers servaient alors d’intermédiaires dans les transactions en les
facilitant sans prendre part aux négociations, leur fonction étant de rapprocher les
parties. D’où, l’étude des divergences (a) entre les deux droits libanais et français,
ainsi que des ressemblances (b), afin de savoir si le courtier peut bénéficier des
dispositions du décret-loi N. 34/67.

a- Les divergences entre le représentant commercial et le courtier

259. Le courtier libanais ou français est un intermédiaire indépendant qui met en


relation des personnes désireuses de traiter entre elles, sans conclure aucun acte
juridique pour le compte de son client (appelé donneur d'ordres), ce qui le distingue
sur ce point du représentant commercial libanais ou de l’agent commercial français.
En principe, il se borne à s'efforcer de rapprocher les parties mais là s'arrête sa
mission car les parties font normalement affaire ensemble, sans que le courtier
intervienne en tant que représentant de l'une d'elles lors de la conclusion de l'acte441. Il
est commerçant dès lors qu’il exerce le courtage, acte de commerce, à titre de
profession habituelle.

260. La distinction est tout aussi nette entre le mandat civil et la représentation
commerciale libanaise dont l’objet est la conclusion d’un contrat, et le courtage dont
l’objet est seulement de favoriser la conclusion d’un contrat projeté par le donneur
d’ordres. Le courtier français n’est donc pas assimilable à un mandataire d’intérêt
commun442 ou à un agent commercial443, et s’éloigne du représentant commercial

441
Cass. com., 13 mai 2003 : Contrats, conc., consom. 2003, comm. 124, note L. LEVENEUR.
442
Le courtier est facilement révocable, Cass. civ., 7 juill. 1987: JCP G 1988, II, 20914, obs. J.
BIGOT, mais n’a pas droit à une indemnité analogue à celle d’un mandataire d’intérêt commun, même
s’il intervient régulièrement depuis longtemps pour le donneur d’ordres, CA paris 24 juin 1963: RTD
com., 1964, p. 607, obs. J. HEMARD ; CA Rennes, 9 juill. 1974, JCP G 1975, II, 17990, obs. R.
PLAISANT : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit.
443
Cass. com., 13 oct. 1959, JCP G 1960, II, 11509, note H.T ; Cass. soc., 16 oct. 1967, D.,1967, p.
751 et pourtant l’agent commercial négocie sans forcément conclure ; Cass civ., 2 déc. 1997, JCP G
1998, IV, 157, n° 1140: cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., op. cit.
-135-

libanais, en tant qu’il n’est pas un mandataire permanent, différemment du courtier


libanais, mandataire, comme nous l’avons montré précédemment.

261. En outre si les règles du mandat sont applicables, cela ne veut pas dire pour
autant que le contrat de courtage est soumis au même régime juridique que le
mandat ; le courtier peut, éventuellement, aller jusqu'à effectuer les négociations
devant aboutir au contrat, mais il ne pourra jamais atteindre la phase de la conclusion,
auquel cas, il deviendra soit commissionnaire, soit mandataire simple, selon les
modalités de conclusion du contrat444 ; ce qui le distingue du représentant commercial
libanais qui a la capacité de conclure. Ainsi, il a été décidé que le contrat, par lequel
le donneur d’ordres « mandate » une personne d’effectuer les contacts et négociations
nécessaires afin de vendre un bien fonds en contrepartie d’une commission, n’est pas
un contrat de mandat mais un contrat de courtage445.

262. Ainsi, l’opération de courtage est objectivement commerciale et n’a pas à


être réalisée sous forme d’entreprise, c'est dire en tant qu’opération commerciale par
déclaration de la loi, même lorsque son objet est civil446 ; le courtage se distingue dès
lors de l’agence commerciale, opération civile.

263. Dans le courtage, le contrat est conclu directement entre les parties
(fournisseur et distributeur)447, sans que le courtier s’y trouve engagé448 ; il ne saurait
en particulier être garant de l’exécution des commandes passées par les
distributeurs449 sauf le cas d’existence d’une clause, d’où l’absence de « ducroire ».
Situation différente de celle du représentant commercial libanais ou de l’agent
commercial français, où tous les deux sont garants de leurs mandants avec l’existence
de convention ducroire. Egalement, le courtier sera indemnisé même si le contrat n’est

444
M. MAHMASSANI, op.cit. p. 277 et s.
445
CA Beyrouth, 5e Ch., arrêt n° 733, 13 juin 1962, RJL, 1962, p. 251.
446
Vente de récolte agricole, Ph. DEVESA, Courtage, J.-Cl., Contrats-Distribution, Fasc. 345, n°
14.
447
TGI Strasbourg, 29 sept. 1983: JCP E 1984, cah. dr. entr., n° 2, p. 11 ; Versailles, 14 avr. 1988 :
D. 1988, inf. Rap. p. 144.
448
Cependant le courtier peut être poursuivi pour contrefaçon : Cass. com., 27 fév. 1996: RTD
com., 1996, p. 679, obs. J. AZEMA.
449
Cass. com., 28 mai 1991, Bull. civ., IV, n° 196, p. 139 ; RTD civ., 1992, 86, obs. J. MESTRE.
-136-

pas conclu à condition que ses services aient été bénéfiques pour l’une ou l’autre
partie450.

264. Finalement, il s’agit de s’interroger sur la faible divergence entre le courtier


libanais et le courtier français ; soulignons l’adéquation entre les deux qui ne
concluent jamais eux-mêmes des contrats même au nom de leur client ; soulignons
aussi l’ambigüité du droit français, quand dans un article, il définit le courtage
contrairement à son voisin libanais. Celui-ci donc a spécifié tacitement dans son Code
de commerce une définition du courtage tout autant qu’il précise de l’acte de
négociation que peut exercer le courtier libanais. En d’autres termes, le droit libanais
a donné une définition du courtage au titre de laquelle sont précisées les activités
commises par le courtier. Voyons ce qu’il en est des ressemblances.

b- Les ressemblances entre le représentant commercial et le courtier

265. L’article 291 du Code de commerce libanais dispose ce qui suit : « Le


courtage est un contrat par lequel une partie dite courtier, est chargée moyennant une
rémunération, soit d’indiquer à l’autre partie l’occasion de conclure une convention,
soit de lui servir d’intermédiaire pour la négociation d’un contrat.

Les règles du mandat sont, d’une manière générale, applicables au courtage ».

266. Le courtier est un trait d’union se bornant à rapprocher des parties qui
concluront éventuellement une convention451. C’est en ce sens qu’il faut comprendre
les dispositions de l’article précité définissant le courtage par la mission du courtier à
savoir « indiquer à une partie l’occasion de conclure une convention »452.

450
CA Beyrouth, 3e Ch., arrêt n° 401, 31 mars 1971, Rev. al Adl, 1971, p. 466.
451
Cass. com., 3 fév. 1958, D. 1958, p. 433 ; RTD com., 1958, p. 810 ; Bull. civ., III, n° 56, 3 janv.
1967, D. 1967, p. 369, Bull. civ., III, n° 40 ; CA Montpellier, 25 mars 1953, S. 1954, 2, p. 14 ; D. 1953,
p. 469.
452
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
art. 291 note 2 ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1286 et 1287.
Dans le même sens: Cass. civ. lib. 1ere Ch., n° 46, 27 mars 2001, Rec. Sader 2001, p. 60 ; n° 26, 6 avr.
1962, RJL, 1962, p. 223.
-137-

267. Se précise alors la formulation générale suivante : le courtier est un


médiateur au sein d’une opération de courtage où il sert d’intermédiaire entre un
donneur d’ordres et un tiers453 en vue de la conclusion d’un contrat entre ces derniers.
En effet, il a pour mission essentielle de faciliter la conclusion du contrat objet-
conséquence de l’accord de courtage. C'est dire que le rôle de courtier ne prévoit pas
la conclusion d’un accord entre un vendeur et un acheteur mais s’étend à la
surveillance de certaines opérations concourant à l’exécution du contrat et du
marché454. Son rôle s’identifie par la présentation d’un partenaire sérieux et
solvable455, manifestant la volonté de remplir les conditions émises par le donneur
d’ordres relativement au marché traité.

b.1- L’exposé

268. L’indépendance : Bien que l’article 291 du Code de commerce libanais


applique au courtage les règles du mandat, le propre rôle du courtier n’est pas de
traiter lui-même au nom et pour le compte de son client, mais seulement de mettre
celui-ci en rapport avec une personne disposée à conclure l’opération recherchée ; les
deux parties (client et fournisseur) ainsi rapprochées ne sont liées que quand elles ont
elles-mêmes contracté. Quelles que soient les modalités de son intervention, le
courtier libanais ou français, exerce son activité en toute indépendance 456 mais pour le
compte du donneur d’ordre. Ce caractère indépendant est commun avec le
représentant commercial, et exclut toute idée de subordination. Ainsi, un
intermédiaire qui ne recherche pas en toute indépendance des partenaires ou une

453
Par conséquent, l’intermédiation suppose que le courtage porte sur les biens d’autrui et non pas
sur ceux du courtier : Cass. civ. Lib., 5e Ch., n° 41, 19 mars 2002, Rec. Sader, p. 400, 401.
454
CE, 6 juill. 1994, req. n° 116079.
455
Art. 295 C. com. : « Le courtier ne peut s’entremettre pour des personnes notoirement
insolvables ou dont il connaît l’incapacité ».
456
Ass. plén., 8 janv. 1993, JCP, G 1993, II, 22040, note Y. SAINT-JOURS : sans contrôle
hiérarchique, sans obligation de reddition de compte, sans quota ni secteur affecté, le courtier ne saurait
être affilié à la sécurité sociale. En retour, sa subordination au donneur d’ordres entraine requalification
du contrat en contrat de travail, Cass. soc., 12 mai 1948, Bull civ., III, n° 508 ; RTD com., 1949, p.
362, note J. HEMARD: liste des clients à démarcher fournie par le donneur d’ordre et reddition des
comptes exigée par lui: cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 272.
-138-

clientèle, pour son donneur d’ordre, mais qui, au contraire reçoit une liste de clients à
démarcher et doit rendre compte de son activité à intervalles réguliers, risque de ne
pas être considéré comme un courtier457.

269. La jurisprudence va en ce sens et la chambre sociale de la Cour de cassation


française, dans un arrêt en date du 26 février 1959, se fonde sur l’absence de lien de
subordination entre un représentant en vins et les services d’entreprises de transport
auxquels ses clients, acheteurs de vins, ont recours, pour qualifier les actes effectués
par ce représentant d’opérations de courtage458. D’autres juridictions ont, d’ailleurs,
utilisé cette caractéristique d’indépendance du courtage, pour opérer la distinction
entre le courtier et d’autres catégories d’intermédiaires : c’est ce que révèlent diverses
décisions du Conseil d’Etat français.

270. Dans une décision de 13 novembre 1931, le Conseil d’Etat considère


comme courtier professionnel le contribuable qui achète des marchandises pour le
compte de négociants auxquels il n’est lié par aucun contrat de travail459 ; en l’espèce
il semble qu’il s’agit plutôt d’un commissionnaire. De même, dans un arrêt en date du
25 mars 1996, le Conseil d’Etat qualifie de courtier de contribuable qui, en son nom
personnel et sous sa propre responsabilité, présente à un établissement de crédit qu’il
choisit lui-même et auprès duquel il n’a pas à rendre compte de sa propre activité, les
demandes de prêts d’acquéreurs éventuels de véhicules automobiles460. Sans ce
caractère d’indépendance, les juges ne retiennent pas la qualification de courtier. Les
caractères de profession habituelle et d’activité indépendante sont donc nécessaires à
la qualification du contrat de courtage461 : caractères communs avec le représentant
commercial libanais.

271. L’objet de l’activité du courtier, en tant que mandataire462, est parfaitement


compatible avec celui de l’activité de représentant commercial, en mentionnant que

457
Cass. soc., 12 mai 1984, op.cit.
458
Cass. soc., 26 fév. 1959, Bull. civ. IV, n° 307 ; Cass. soc., 8 nov. 1967, Bull. civ., IV, n° 701.
459
CE, 4e sous-sect., 13 nov. 1931, req. n° 17150, DUPONT 1932, p. 171.
460
CE, 9e sous-sect., 25 mars 1966, req. n° 67178, DUPONT 1966, p. 289.
461
Cass. com., 15 oct. 1996, JCP, 1997, 2e éd. G., p. 921, note F. POLLAND-DULIAN
462
V. infra n° 277 et s.
-139-

l’acte de courtage, étant commercial en droit libanais463 et français464, quel qu’en soit
l’auteur ou quel qu’en soit l’objet465, ne peut pas être accompli par ceux à qui la loi ou
le statut professionnel interdit d’accomplir des actes de commerce comme le
notaire466, l’avocat467, l’huissier. Nous ne pouvons pas, à cet égard, rétorquer que
l’objet du mandat doit obligatoirement être un acte juridique468, car en droit libanais,
l’objet du mandat peut, à titre principal, consister simplement en faits469.

272. La commercialité : le courtier est celui qui fait habituellement profession


de mettre en rapport des personnes en vue de faciliter, ou de faire aboutir, la
conclusion de conventions, opérations ou transactions entre ces personnes. Sa
fonction consiste à rapprocher des parties470, et de mettre en relation ses clients avec
de potentiels contractants, sans transmettre ni ordres ni commandes471. C’est dire qu’il
exerce son activité de manière habituelle et à titre professionnel et sera assimilé à un
commerçant472.

273. En effet l’art. L 121-1 du Code de commerce français édicte: « Sont


commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et font leur profession
habituelle ». Ce qui a été confirmé par la jurisprudence en signalant que seule la

463
L’article 6 du code de commerce libanais répute acte de commerce par sa nature
propre « l’entreprise de courtage ».
464
L’art. L 110-1 al. 7 C. com. déclare, entre autres, acte de commerce, toute opération de courtage.
465
Même lorsque son objet est civil, le courtage est considéré comme acte de commerce: vente de
récolte agricole, Ph. DEVESA, Courtage, J.-Cl. Contrats -distribution, Fasc. 345, n° 14, D. FERRIER,
Droit de la distribution, op.cit, n° 270.
466
Art. 38 de la loi libanaise n° 337 du 8 juin 1994.
467
Art. 15 de la loi libanaise du 11 mars 1970 relative à la réglementation de la profession d’avocat.
468
« L’élément qualifiant du contrat de mandat est la conclusion d’un plusieurs actes juridiques au
nom et pour le compte du cocontractant » : F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en
droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 155 ; J. HUET, Les principaux contrats
spéciaux, 3e éd., LGDJ, 2012, n° 31109 et s.
469
Art. 769 C.O.C, al. 1, dispose ce qui suit: « le mandat est un contrat par lequel le mandant
confie au mandataire qui accepte la charge de gérer une ou plusieurs affaires ou accomplir un ou
plusieurs actes ou faits ».
470
T. com. Seine, 14 mars 1894, Gaz. trib., 13 mai 1894: cité par D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., note 456.
471
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 188.
472
Lorsqu’il exerce bien sur l’activité de courtage à titre professionnel et donc habituel, art. L. 131-
1 et L. 131-5 C. com.
-140-

réitération professionnelle des opérations de courtage donne à celui qui les accomplit
de manière habituelle la qualité de commerçant473. Il effectue des actes de commerce
dans le cadre de sa mission qui consiste en le rapprochement des parties. Par contre, le
texte libanais est légèrement différent en prévoyant une conception subjective tout en
rejoignant la solution française.

274. Au surplus, la prédominance de la conception subjective résulte de


l’adoption par le Code libanais de la théorie de la commercialité accessoire. En effet,
l’article 8 du Code de commerce libanais énonce : « la loi répute encore actes de
commerces tous ceux qui sont fait par le commerçant pour les besoins de son
commerce - les actes du commerçant sont présumés, dans le doute, avoir cette
destination, sauf preuve contraire ». Ce qui en effet rapproche le courtier français -
intermédiaire commerçant-474 du représentant commercial -commerçant- et cela
suivant les dispositions de l’alinéa second de l’article premier du décret-loi N.
34/67475.

275. La similitude entre l’agent commercial et le courtier, quand ceux-ci ne sont


pas titulaires d’un pouvoir représentatif, est frappante. D’ailleurs, c’est le cas tant en
droit libanais qu’en droit français. Les auteurs écrivent, à ce titre, que « parfois,
l’agent commercial ne représente pas plus son mandant que le courtier ne représente
son donneur d’ordres »476 ; que l’agent, même investi d’un pouvoir de conclure, est
assimilable au courtier477, cas d’absence de pouvoir représentatif, « l’agent n’est ni
plus ni moins qu’un courtier lié par un contrat durable au principal, dès lors qu’il
négocie des opérations d’achat ou de vente »478 . La jurisprudence, quant à elle,

473
Cass. com., 24 janv. 1984, Bull. civ., IV, n° 27, 3 avr. 1984, JCP, 1984, 4e éd., G., 184 ; Cass.
civ. lib., 14 nov. 1967, Rev. al Adl, 1968, p. 412.
474
Lorsqu’il exerce bien sur l’activité de courtage à titre professionnel et donc habituelle, art. L.
131-1 et L. 131-5 C. com.
475
Et aussi considéré représentant commercial, le commerçant qui…
476
Ph. DEVESA, L’opération de courtage: un groupe de contrats au service de la notion
d’entremise, préf. J.-M. MOUSSERON, Litec, 1993, n° 464.
477
J.-J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 39.
478
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, n° 54 et 55; D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., Litec, 2009, n° 270, note 404 :
-141-

souligne que « la qualité de courtier n’emporte pas nécessairement celle de


mandataire »479.

b. 2- Le courtier relève-t-il du décret-loi N. 34/67 ?

276. L’article premier du décret-loi N. 34/67 dispose ce qui suit: « Le


représentant commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et
indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de services, entreprend des
négociations pour conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de
prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces activités au nom des
producteurs ou des commerçants et pour leur compte.

Et aussi considéré représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour


son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la
qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ».

277. D’après l’alinéa premier de cet article, le représentant commercial négocie


et conclut les contrats ou les prestations de services480, et ne s’oppose pas à ce qu’un
simple courtier dont l’étendue du mandat est limitée puisse bénéficier de son statut,
solution débattue dans la doctrine :

278. D’après M. le professeur TYAN, il faut l’existence de deux conditions à


titre cumulatif, qui sont la négociation et la conclusion des transactions objet de la
représentation commerciale : «…Par ailleurs, l’objet de l’entremise du représentant
comprend non seulement la conclusion des transactions, mais aussi l’exercice de
toute activité en vue d’arriver à cette conclusion : rôle d’initiative pour susciter, par

« le courtier n’est donc pas assimilable à un mandataire d’intérêt commun ou à un agent


commercial…. Et pourtant l’agent commercial négocie sans forcément conclure ».
479
A propos d’un courtier qui a causé un préjudice au tiers, et qui engage sa propre responsabilité,
faute pour lui d’être aussi, mandataire: Cass. civ., 1ere Ch., 18 oct. 2005, Juris-Data n° 2005-030313,
note L. LEVENEUR.
480
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous art. 1er, n° 13.
-142-

tous moyens appropriés, les occasions de conclure des contrats, autrement dit, un
rôle de recherche de clientèle… »481.

279. Tandis que MM. les professeurs FABIA et SAFA, considèrent que le
courtier ne pourra prétendre jouir du statut de représentant que s’il agit avec
exclusivité482. Or, la condition d’exclusivité est une condition essentielle
supplémentaire que doivent remplir les personnes visées à l’alinéa second de l’article
premier du décret-loi N. 34/67. Et comme nous l’avons dit au sujet des
commissionnaires, elle n’est nécessaire que lorsqu’il s’agit d’intermédiaires du
commerce non-mandataires. Mais comme la qualité de courtier en tant que mandataire
est discutable en doctrine libanaise, c’est l’alinéa premier du même article qui lui
pourrait être applicable sans besoin d’exclusivité.

280. Contrairement M. MAHMASSANI adopte un avis original. Il désigne tant


que le représentant commercial négocie, et éventuellement, conclut les contrats, les
seuls courtiers qui négocient les contrats peuvent être qualifiés de représentants
commerciaux : «…Seuls les courtiers qui négocient les contrats ou les prestations de
services peuvent être considérés de représentants commerciaux s’ils réunissent les
conditions de l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67… »483.

281. Mais à notre avis, il résulte des dispositions de l’alinéa premier du l’article
précité, que le sujet de la représentation commerciale peut être, soit la négociation
pour conclure des opérations de ventes ou d’achats, soit la négociation afin de
conclure des opérations de locations ou bien la négociation pour conclure des
opérations de prestations de services. C'est dire que le représentant négocie
l’opération et éventuellement la conclut, en mentionnant que le terme « négocie » de
l’article premier du décret-loi N. 34/67 a, quand même, une signification plus large
que ce même terme utilisé à l’article 291 du Code de commerce, puisqu’il est utilisé
afin de permettre son application à tout intermédiaire de commerce mandataire
agissant à titre de profession habituelle et réunissant les diverses autres conditions.

481
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468, n° 1306.
482
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit., n° 6.
483
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 53.
-143-

282. Revenant au premier alinéa de l’article 291 du Code de commerce libanais ,


qui définit également le courtage comme le contrat par lequel le courtier sert à une
autre partie « d’intermédiaire à la négociation du contrat » , et son deuxième alinéa
qui a pris soin de poser expressément un principe général aux termes duquel : « les
règles du mandat sont, d’une manière générale, applicable au courtage » , le courtier
pourrait être un mandataire484, mais à mandat spécial, et à prérogatives limitées,
puisque le rôle du courtier se limite à mettre en rapport d’éventuelles futures parties à
un contrat485 : Idée reçue par M. MEGNIN dans sa thèse comparative sur le contrat
d’agence commerciale486, où il a considéré que le courtier peut se voir
exceptionnellement chargé de conclure un mandat, et endosse ainsi le temps de cette
mission les habits de mandataire487. Cette déduction de rapprochement résulte du fait
que le courtier intervient comme intermédiaire dans la négociation du contrat ainsi
que du fait de l’application des règles du mandat.

283. En d’autres termes, lorsque le courtier se charge de servir d’intermédiaire à


un tiers pour la négociation d’un contrat moyennant une rémunération, il intervient
dans ce rôle-ci, pour le compte de la tierce personne488. Ce qui permet l’application
des règles du mandat qui, d’une manière générale, couvrent la relation entre le
courtier et la personne qu’il a chargé (relation entre mandant et mandataire). Théorie
beaucoup discutée en doctrine, où le courant majoritaire considère que le courtier
n’est pas un mandataire qui conclut l’acte au nom de l’une des parties du contrat ou

484
Cass. civ., n° 58, 28 mai 1964, RJL 1964, p. 922.
485
E. TYAN, op.cit., nº 1286 : « …le courtage est un mandat par lequel une personne…», et n°
1287 : « …on analyse généralement le courtage en un mandat… ».
486
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 107.
487
CA Lyon, 15 juin 1988, D. 988, IR 237 ; CA Reims, 12 juin 1985, RTD com., 1986, 292, obs. J.
HEMARD et B. BOULOC, Gaz. Pal., 111985, 2, 64, note J. ROZIER ; Cass. com., 21 déc. 1953, RTD
com., 1955, 377, obs. J. HEMARD.
488
« Si l’analogie peut paraitre en soi pertinente, elle ne peut être juridiquement fondée du fait
qu’elle méconnaîtrait alors la différence fondamentale entre l’agent commercial, lié à son commettant
par une relation d’affaire constante, alors que le courtier, même s’il n’intervient pas toujours de
manière seulement occasionnelle, mais parfois pendant une courte durée pour le compte de son
donneur, ne peut prétendre être considéré comme économiquement intégré à l’entreprise » : J.-J.
HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230, 1991.
-144-

l’autre, sans être responsable de l’exécution du contrat et ne supporte pas les


obligations et les devoirs qui en découlent489.

284. Mais en tant qu’intermédiaire dans les négociations, nous pouvons déduire
que le courtier participe à ces négociations pour le compte de son donneur d’ordre
sans la capacité de conclure le contrat490, ce qui a été précisé dans les dispositions du
courtage par l’article 293 du Code de commerce dans son troisième alinéa : « Le
courtier a droit à sa rémunération dès que les données qui les a présenté ou les
négociations qui les a effectué aboutissent à la conclusion du contrat ». En ce sens, il
faut comprendre le terme « négocie » comme visant toute démarche effectuée par le
courtier auprès du tiers relativement à l’affaire proposée, même si aucun accord n’a
pu être atteint avant l’intervention du commettant491.

285. A notre avis, cette capacité de négociation issue des dispositions l’art. 293
al.1 C. com. lib., est moins faible que celle du représentant commercial qui négocie
dans le vrai sens du mot, car elle est limitée à la discussion des offres des contrats. En
d’autres termes c’est une négociation qui reste sous la forme du contrat sans discuter
les détails tandis que celle dont jouit le représentant commercial est une négociation
qui peut englober le contenu du contrat et ses conditions afin d’aboutir parfois à une
conclusion. Donc le pouvoir de négociation pour le compte d’autrui est commun entre
les deux droits libanais et français, le courtier se bornant, à négocier les offres de
fournisseurs pour obtenir des conditions de vente intéressantes au profit des
distributeurs qui de leur côté sont libres de contracter492.

286. Par conséquent, nous dirons que le courtier libanais, du seul fait qu’il soit
commerçant et qu’il jouit d’une certaine exclusivité, en agissant à titre de profession

489
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 89 ; S.
MOUGHARBEL, Droit commercial Libanais, éd. Dar al Kitab, 2001 ; E. NASSIF, L’intermédiaire en
droit commercial, éd. Al Halabi, 1996.
490
Cass. com., 13 oct. 1959, Gaz. Pal.,1959, 2, 286.
491
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 55.
492
CA Bordeaux , Ch. civ., 05 n° 11/06411 - 07 déc. 2011 ; CA Nîmes, Ch. 02 B, n° 10/03525 - 01
déc. 2011 ; Cass. com., 27 oct. 2009, n° 08-16623 ; CA Poitiers, Ch. civ., 01, n° 08/02335 - 20
nov. 2009 ; J.-M. PARDESSUS., Cours de droit commercial, 6e éd., t. 1, Libr. de Jurisprudence de
TARLIER H., 1836, p. 77, numérisés.
-145-

habituelle avec indépendance et une certaine permanence, il en bénéficie du statut


protecteur du décret-loi N. 34/67 au sens du deuxième alinéa de l’article premier. De
même en tant que mandataire négociant les opérations commerciales, il bénéficie du
statut du représentant commercial au sens de l’alinéa premier de l’article premier du
décret-loi N. 34/67.

287. En conclusion, nous pouvons dessiner le tableau comparatif suivant


distinguant le représentant commercial du courtier :

Représentant commercial Courtier libanais


au sens du décret-loi N. 34/67
Commerçant Commerçant
Capable de conclure Incapable de conclure
Indépendant Indépendant
Pouvoir de négociation Pouvoir de négociation
Garant (ducroire) Non garant
-146-

Conclusion du premier titre

288. Suivant les dispositions de l’alinéa premier du premier article du décret-loi


N. 34 du 5 août 1967, se précise une première image classique de la notion du
représentant commercial constituée par « l’agissement pour le compte d’autrui ».
Cette action a permis la détermination des conditions nécessaires au bénéfice du statut
de représentant commercial tout en agissant à titre professionnel, permanent et
indépendant.

289. Une distinction se fait avec d’autres intermédiaires mais pas toujours
évidente, où suivant les points communs on pouvait étendre le décret-loi N. 34/67 au
commissionnaire et au courtier. Après avoir développé ce premier titre, il s’agit
d’exposer dans un deuxième titre, la seconde image, accessoire, de l’article précité en
son deuxième alinéa, formée par « l’agissement pour son propre compte ».
TITRE SECOND

L’AGISSEMENT POUR SON PROPRE COMPTE


-148-

290. Le représentant commercial est, selon le premier alinéa de l’article premier


du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août 1967, « un mandataire ». Cet alinéa permet
une large interprétation, comme nous l’avons démontré précédemment. Au titre des
dispositions de ce décret législatif, le législateur a voulu en élargir la protection à un
intermédiaire autre que le mandataire493, raison pour laquelle il a introduit un
deuxième alinéa à l’article premier, dans lequel il considère -accessoirement- «
comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son propre
compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de
représentant ou de distributeur exclusif unique ».

291. En d’autres termes, le deuxième alinéa de l'article premier du décret-loi


libanais N. 34/67 du 5 août 1967 paraît une exception à la règle énoncée au premier
alinéa de l'article premier, où normalement chaque exception est interprétée
restrictivement494, conformément à la règle latine: Exceptio est strictissimae
interpretationis495. Cette interprétation est adoptée par une jurisprudence496 et une
partie de la doctrine497.

292. Le but du décret-loi N. 34 est de protéger les commerçants libanais contre


les excès abusifs des grandes firmes étrangères498. Cette idée de protection de
personnes ayant la qualité de commerçants peut en effet apparaître paradoxale à
première vue, car l’histoire et la structure du Code de commerce enseignent que le
commerçant est considéré par le législateur comme étant par principe indigne de

493
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
494
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301: « Les exceptions sont d’interprétations stricte » ; p. 196 : « La loi
spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
495
Adage classique juridique latin signifiant que l’exception est d’interprétation très stricte.
496
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de
pharmacie c/ Compagnie suisse Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 22.
497
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 170 : «
…l’extension apportée par l’alinéa second de l’article de l’article premier doit être interprétée
restrictivement ».
498
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 : « Vu
que le décret-loi de la représentation commerciale est un droit protecteur, imposant dans la pluparts
de ses dispositions. Il a pour objet d’une manière principale la protection du représentant commercial
contre l’abus des firmes productrices économiquement fortes ».
-149-

protection. D’où l’utilité de lui accorder un niveau minimal de protection juridique499


en l’assimilant au représentant commercial tout en agissant en vertu d’un contrat qui
lui confère la qualité de représentant ou de distributeur exclusif500. En effet,
l’extension de l’alinéa second constitue, en tant que telle, une exception, et doit, à ce
titre, être interprétée restrictivement, d’autant plus qu’elle est conçue en termes très
précis501.

293. Le législateur libanais en prévoyant deux alinéas différents dans le premier


article du décret-loi N. 34/67 relié à la définition du représentant commercial, a voulu
séparer deux types de personnes réputées représentants commerciaux, un principal et
l’autre auxiliaire. Le premier alinéa définit de manière principale le représentant
commercial libanais comme ayant la qualité de mandataire agissant au nom et pour le
compte d’autrui, alors que le deuxième alinéa, définit de manière auxiliaire pour les
cas spéciaux, le statut « commerçant » agissant en vertu d’un contrat lui conférant la
qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ; ce sera le représentant
commercial.

294. Analysons ce deuxième alinéa ; nous trouvons qu’il est une dérogation à la
définition générale du représentant commercial -mandataire agissant pour le compte
d’autrui- du fait qu’il introduit une nouvelle catégorie de personnes qui, tout en
agissant pour leur propre compte, bénéficient de la protection du décret-loi N. 34/67.
Ces personnes ayant la même caractéristique qui est la qualité commerciale. Cette
qualité est en lien avec la question de nationalité, qui toutes les deux marquent une
originalité en droit libanais ainsi que signalé dans les derniers alinéas de l’article
premier du décret-loi N. 34/ 67 ce qui suit:

« A dater de l’entrée en vigueur du présent décret-loi, tout en maintenant les


droits acquis antérieurement et en tenant compte de la réciprocité que les

499
Idée inspirée de la thèse de M. LICARI sur la protection du distributeur intégré en droit français
et allemand, où l’agent commercial est considéré par la doctrine allemande comme le prototype du
distributeur intégré : F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand,
préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 23.
500
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
501
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 67.
-150-

représentants commerciaux étrangers devront prouver, le représentant commercial


doit être libanais et doit avoir un établissement commercial au Liban .

Et si le représentant de commerce est une société, il faut :

a- Dans les sociétés de personnes et pour les sociétés à responsabilité limitée :


que la majorité des associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne
à des libanais et que celui qui a le droit de signer soit libanais.

b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la
majorité du capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du
conseil d’administration et son directeur général, ou que la personne déléguée par le
président du conseil d’administration ou par le directeur général pour toutes ou
certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».

295. Le législateur libanais a insisté sur la nationalité Libanaise d’une part,


comme condition spéciale pour les étrangers qui se pratique tacitement en ce sens par
la limitation de l’exercice de l’activité aux personnes ayant la nationalité libanaise. Et
de l’autre, comme condition générale pour la majorité des membres et associés de ses
sociétés ainsi que pour leur capital. En d’autres termes, le législateur libanais a stipulé
l’acquisition de la nationalité libanaise comme condition primordiale de l’exercice de
la représentation commerciale et du bénéfice du statut du représentant commercial,
outre l’existence d’un établissement commercial au Liban. Cette législation nous pose
la question suivante : l’activité doit-elle être exécutée au Liban ? Il semblerait que oui.
Alors que le droit français habilite l’exercice de l’activité commerciale aux
commerçants étrangers mais sous certaines conditions502.

502
M. MENJUCQ, Droit commercial et des affaires, 7e éd., LGDJ, 2011, p. 35 : « Comme
l’obtention d’une carte de commerçant étranger, sauf s’ils détenaient la carte de résident ou s’ils
bénéficiaient d’un traité international conclu entre l’Etat national et la France comme c’était le cas
pour les ressortissants de l’Union européenne et d’un certain nombre de pays d’Afrique
francophone » ; En d’autres termes, contrairement à son voisin libanais, le législateur français n’a pas
insisté sur l’obligation d’avoir la nationalité française pour la majorité des associés ou du capital ou du
gérant, puisque les associés en nom collectif et commandités ont la qualité des commerçants. Et attendu
que les étrangers en droit français peuvent être des commerçants sous certaines conditions, alors que la
question de nationalité citée par le droit libanais ne trouve pas de place en droit français, qui considère
même les sociétés nationalisées (La France a connu deux vagues de nationalisations: En 1945 : La
Banque de France, Crédit Lyonnais et les sociétés d’assurances… ; En 1982 : 5 sociétés industrielles,
39 banque de dépôt et 2 compagnies financières) comme commerçantes suivant leur qualification de
sociétés commerciales par la forme, qui généralement, ont conservé leur statut de sociétés anonymes et
-151-

296. L’interprétation de l’article premier du décret-loi N. 34 du 5 août 1967, et


notamment la condition d’exercice de la représentation à titre de profession habituelle,
nous révèle que l’agent est un commerçant soumis à toutes les règles du droit
commercial libanais503. De là, nous trouvons une grande divergence avec le droit
français, concernant cette qualité de « commerçant », notamment l’inscription au
registre du commerce où le gérant-mandataire du fonds de commerce peut aussi
s’inscrire504, et à défaut, au registre spécial des agents commerciaux505, ce qui dénote,
semble-t-il, une intention du législateur français de ne pas reconnaître la qualité de
commerçant à l’agent commercial de plein droit506.

297. La doctrine reste toutefois très partagée sur la question507. En l'état actuel la
jurisprudence a toujours persisté dans le refus de reconnaître à l’agent commercial la

restent soumises de point de vue de leur gestion, au Code de commerce (Cependant la loi du 26 juill.
1983 a instauré, dans les sociétés nationalisées et les EPIC, un régime de congestion, les représentants
du personnel siégeant dans les conseils d’administration et les conseils de surveillance).
503
E. TYAN, op.cit., p. 469, n° 1307 : est d’avis pour ne pas reconnaître au représentant
commercial la qualité de commerçant, à moins qu’il ne soit organisé en entreprise de représentation de
plusieurs maisons.
504
Art. L. 146-1 C. com.
505
Tenu au greffe du tribunal de commerce, prévue par l'art. 4 du décret n° 58-1345 du 23 déc.
1958. Ce registre spécial étant distinct du registre du commerce et des sociétés prévu par le décret n°
84-406 du 30 mai 1984.
506
CA Amiens, 17 fév. 1960, Gaz. Pal., 1960, 2. 18 ; Critique de J. HEMARD, RTD com., 1960, p.
623, n° 9. Dans cet arrêt, la Cour reconnaît la non-validité de la clause compromissoire étant donné que
le contrat n’est pas commercial, l’agent n’étant pas un commerçant. Cette décision est conforme à de
nombreuses autres décisions dont : CA Paris, 11 juin 1947, JCP, 1947, II, 3840 et s. 1949.2.27, note H.
SOLUS ; CA Lyon, 11 fév. 1952, D., 1952, 222 ; CA Paris, 29 juin 1956, JCP, 1956, II, 9524, note
MOTULSKY.
507
Pour certains auteurs, en effet, les agents commerciaux sont tous commerçants (d'après les droits
allemand, Belge et Néerlandais, des commerçants : K.-J. HOPT, L'entreprise et le droit européen,
quelques réflexions sur la réglementation européenne de l'activité et de l'organisation de l'entreprise,
Revue des sociétés, n° 2, 01/04/2001, p. 301.) car ils agissent, à la manière des commissionnaires et des
courtiers, en intermédiaires professionnels et indépendants ; ils peuvent, de surcroît, engager des sous-
agents (Cf. R. HOUIN et M. PEDAMON, Droit commercial, 9e éd., D., 1990, n° 625 et 627 ; Sans
doute, l'agent commercial ne passe pas d'actes juridiques en son nom personnel mais c'est aussi le cas
des courtiers qui ont pourtant la qualité de commerçant en vertu de l'art. 632 C. com. Et si la loi traite le
courtier de commerçant parce qu'il agit comme intermédiaire, de façon professionnelle et indépendante,
la même solution devrait être donnée pour les agents commerciaux dont le mode d'activité n'est pas sur
ce point différent (En ce sens J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, 573, n° 22).
Cette décision a été critiquée très lucidement par M. le professeur GUYON (Y. GUYON, Droit des
affaires, Droit commercial général et sociétés, 12e éd., Economica, t. 1, 2003, n° 812, p. 847 et s.). La
situation d'intermédiaire du commerce ne conduit pas forcément à l'attribution de la qualité de
commerçant agissant à titre de profession indépendante qui négocie et conclut éventuellement des
contrats pour le compte d'une ou plusieurs entreprises-mandantes. La qualité de mandataire, qui impose
-152-

qualité de commerçant508, sauf à établir qu'il exerce une activité commerciale à son
compte distincte de celle exercée au nom du producteur, du l'industriel ou du
commerçant le mandant509 : le cas échéant, il rejoint le représentant commercial -
commerçant suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67-
qui encore, peut effectuer des opérations commerciales pour son propre compte en
recueillant un gain résultant de la totalité du prix des produits vendus510.

298. Quoi qu'il en soit, en adoptant la thèse de la jurisprudence, ce jugement


s'expose à la réprobation de la doctrine minoritaire qui a toujours affirmé le caractère
commercial de la profession d'agent commercial511, ayant le mérite d'unifier le statut
de tous les intermédiaires du commerce, quel que soit le mode de leur intervention512.
En outre, et d’après les dispositions de l’article L. 134-1 du Code de commerce,
l’agent commercial est défini comme un mandataire qui…. Etant donc mandataire,
l’agent commercial n’est pas commerçant513 d’après ce que nous avons exposé,

la nature civile de sa profession, justifie que l'agent commercial ne soit pas non plus considéré comme
un commerçant, même si la solution ne s'est pas affirmée rapidement (Les conséquences de la nature
civile de la profession s'expriment dans les domaines administratif, fiscal et judiciaire) : J.-M.
LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 32.
508
CA Nîmes, Ch. soc., 25 janv. 2011, n° 10/03938 ; CA Nîmes, 18 nov. 2010, n° 09/05195 ; CA
Rennes, Ch. 02 com., 3 déc. 2008, n° 07/06832 ; CA Versailles, Ch. 06, 13 juin 2006, n° 05/05684 ;
CA Montpellier, Ch. 02 A, 9 mai 2006, n° 05/01344 ; Cass. com., 29 oct. 1979, Bull. civ., IV, n° 266 ;
Gaz. Pal. 1980.1.87, note J. DUPICHOT ; D. 1980.69 ; RTD com., 1980.814, obs. J. HEMARD ; JCP
1981.II.19591, note VINCENS ; CA Bordeaux, 13 nov. 1979, Gaz. Pal. 1980.2.672, note J.-
J. HANINE; CA Amiens, 17 févr. 1960, Gaz. Pal., 1960.2.18.
509
Un débat ancien qui s'est cristallisé sur la question de savoir si les agents commerciaux ont ou
non la qualité de commerçant : le juge de Montfort-sur-Meu a débouté l'administration fiscale au motif
qu'il n'était pas établi que l'intéressé, agent commercial, exerçait une activité commerciale pour son
propre compte, distincte de celle exercée au nom du l'industriel, du producteur ou du commerçant
l'ayant mandaté (TI Montfort-sur-Meu, 22 oct. 1990, n° XTIMM221090X, Recueil Dalloz 1992, p. 102
). Devant le silence des textes, certaines juridictions avaient retenu, par analogie de situation à l'égard
du courtier ou du commissionnaire, la qualification de commerçant de l'agent commercial, en tant
qu'intermédiaire professionnel, étroitement associé à la vie des affaires : CA Amiens, 13 juill. 1977,
JCP 1979. II. 19163, note J. HEMARD, RTD com., 1979.504, note J. HEMARD, et 1979.697, obs. J.
DERRUPPE.
510
L. MATAR, Encyclopédie du droit Commercial, éd., La société moderne du livre, t. 1, 2004, p.
227.
511
B. BOULOC et P.-L. CHATAIN, Un agent commercial, qui n’est pas commerçant de fait,
bénéficie de la loi n° 89-1010 du 31 déc. 1989, D., 1992, p. 102.
512
Th. DUBAELE, Commerçant, Rép. Com., 2004.
513
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 156 ; B.
SAINTOURENS, Les nouvelles obligations déclaratives de l'agent commercial lors de sa demande
-153-

puisqu’il ne fait pas d’actes de commerce en son nom et pour son compte, c'est dire
qu'il n'achète pas les marchandises, ni ne reçoit la rémunération des ventes qu'il aura
effectuées, et ne s'engage pas pour le compte de l'entreprise. Mais au contraire il sera
rémunéré pour ses services et au taux des différents contrats conclus par l'entreprise
qui l'embauche ; en effet, son activité n’est donc pas commerciale mais civile514.

299. La nouvelle localisation des règles de l’agence commerciale dans le Code


de commerce français et le rapprochement avec l’activité du courtier qui ne conclut
pas de vente515 a inspiré la qualification de mandataire commerçant 516, mais le
rapprochement opéré entre le régime de l’agent commercial et celui du VRP517 rend
difficile son assimilation à un commerçant518, dans la mesure où en exécutant son
mandat, l'agent commercial ne fait pas d'actes de commerce, puisque les contrats
préparés produisent leurs effets dans le patrimoine du mandant de telle sorte qu'il agit
au nom et pour le compte d'autrui.

300. En effet, nous venons de montrer que la commercialité participait de la


définition même du représentant commercial. Cela nous permet immédiatement de
noter la différence qui existe entre les statuts au Liban et en France. Alors qu’en
France, l’agent commercial n’a de commerçant que le nom à moins qu’il n’effectue
des opérations commerciales pour son propre compte, au Liban, par contre, le travail
qu’il effectue, même s’il n’est pas pour son propre compte, constitue une série

d'immatriculation, (Décr. n° 2007-750 du 9 mai 2007 relatif au registre du commerce et des sociétés et
modifiant le code de commerce, J.O 10 mai 2007), RTD com., 2007 p. 674 ; Y. SERRA, L'agent
commercial n’est pas un commerçant et il ne peut donc lui être opposé une clause attributive de
compétence au tribunal de commerce, D. 1996 p. 247.
514
Cass. com., 24 oct. 1995, Bull.1995, IV, n° 258, p. 238 ; n° 248, p. 228.
515
Cass. com., 6 mars 2001, JCP, 2001, p. 28, obs. Ph. GRIGNON.
516
J.-J. HANINE, L’agent commercial est-il un commerçant? Qualité d’agent, op.cit.
517
Ph. PETEL, Les agents commerciaux, Colloque du 20 avr. 1992 sur « La force de vente de
l’entreprise et le droit de travail, Institut d’Etude européennes et Internationales sur le travail, faculté de
Montpellier, Litec, 1992, cité par D. FERRIER op. cit. ; C. com., art. L. 134-1 à L. 134-17 ; anc.
L. no 91-593 du 25 juin 1991, D. 1991.276 ; J.-M. LELOUP, La loi du 25 juin 1991 relative aux
rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants ou le triomphe de l'intérêt commun, JCP,
éd. E, 1992. I. 105.
518
Cass. com., 26 fév. 2008, D., 2008, pan. p. 1296, note D. FERRIER, à propos d’un contrat de
commission-affiliation précise que la qualification d’agent commercial est incompatible avec celle de
commerçant indépendant car l’agent commercial n’a pas de clientèle attachée à son activité mais
intervient auprès de la clientèle du mandant.
-154-

d’opérations commerciales effectuées à titre de profession. Par conséquent, si, en


France, la nature commerciale a pu faire l’objet d’une critique pour lui refuser le
bénéfice du statut du représentant commercial, au Liban, par contre, cette nature
constitue un élément indispensable pour la reconnaissance de la qualité de
représentant aux dites sociétés.

301. Aussi, ne pouvons-nous imaginer cette qualité attribuée à une société civile
de fait ou de droit, à peine de porter atteinte aux intérêts des tiers qui contractent avec
elle. En revanche, l’activité de commercialité est concrétisée souvent et notamment,
suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 par « l’achat
pour revendre »519, qui, à son tour, est réalisé en vertu d’un contrat conférant la qualité
de représentant ou de distributeur exclusif unique. Deux catégories de personnes
forment les sujets de notre développement : soit le commerçant ayant la qualité de
représentant -ce sera notre premier chapitre-, soit le commerçant ayant la qualité du
distributeur exclusif -ce sera notre deuxième chapitre-.

519
L’acte le plus courant du commerce qui, par nature est visible dans le secteur de la distribution :
G. BERGER-WALLISER et A. MOES, Les conditions d'accès au marché français pour les opérateurs
économiques étrangers, non ressortissants communautaires, D., 2009, p. 669.
-155-

PREMIER CHAPITRE

LE COMMERCANT -REPRÉSENTANT-

302. Comme nous l’avons vu précédemment, la jurisprudence a fini dans son


ensemble par refuser de considérer l’agent commercial comme un commerçant et la
Cour de cassation s’est prononcée en faveur du caractère civil du mandat de l'agent
commercial520. Mais une nouvelle figure du droit français attire notre attention lors de
notre recherche, celle d’un commerçant indépendant issue de la notion de
commission-affiliation. Le contrat de commission-affiliation peut être défini comme
une convention par laquelle le distributeur -commerçant indépendant- dit « affilié »,
propriétaire de son fonds de commerce laisse la gestion de son stock de marchandise
qui lui est confié à titre de dépôt à l’initiative de son fournisseur, tout en bénéficiant
de la notoriété de la marque521. En quelque sorte, l'affilié est le dépositaire du stock en
vue de la commercialisation auprès du consommateur final, avec en contrepartie le
versement d’une commission calculée sur le chiffre d’affaires réalisé de l’ordre de 30
% à 45 %522. C’est dire que le « commissionnaire-affilié » vend en son nom pour le
compte du fournisseur et sous son enseigne la marchandise dont il n’est pas
propriétaire.

303. Cette situation du « commissionnaire-affilié » en tant que commerçant


indépendant assurant dans le cadre de son activité, la commercialisation des produits
pour le compte d’autrui se rapproche-t-elle du celle du représentant au sens du
deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, qui agit pour son propre
compte possédant la qualité de commerçant différemment de l’agent commercial
français qui n’est pas commerçant523 ? D’où l’utilité de distinguer les points de

520
Sur l'impossibilité de la preuve par tous moyens de la modification de la rémunération prévue
par un bon de commission, V. Cass. com., 24 oct. 1995, Bull. civ., IV, no 248, RTD com., 1996, 235,
obs. J. DERRUPPE ; sur la nullité d'une clause attributive de compétence au tribunal de commerce,
V. Cass. com., 24 oct. 1995, D., 1995, IR 247, D. Affaires 1995.197.
521
Ph. GRIGNON, Distribution, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 58 ; D. FERRIER, Concurrence-
Distribution, D., 2012 p. 578, n° 3 ; A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément
d'appartenance du fonds, D., 2012, Ch. 13, n° 171.
522
T. DJEDJE, Stratégie de développement pour une PME en restauration rapide, ESC Bordeaux -
MBA Commerce et Marketing 2008, B, n° 1 ; D. BASCHET, Le contrat de commission- affiliation,
www.acfranchise.tv/fr.
523
Y. SERRA, Agent Commercial, D., 1996, p. 247.
-156-

divergences des deux cas dans une première section, afin d’exposer dans une
deuxième les ressemblances qui pourront l’étendre au décret-loi N. 34/67.
-157-

SECTION 1

LES DIVERGENCES

304. Curieux contrat, pour lequel les recherches dans les banques de données de
jurisprudence ne donnent aucun résultat, comme s’il échappait au contentieux alors
que la pratique contractuelle montre que ce contrat est usuellement utilisé. De là, nous
trouvons la grande différence avec la représentation commerciale en droit libanais où,
un texte législatif spécial s’est prévu à ce titre.

305. Reste cependant à valider la formule, contrat de commission-affiliation. Le


terme « contrat-affiliation » n’est apparemment guère parlant. Il semble pourtant avoir
déjà gagné les faveurs de la pratique. Admettons donc le titre « contrat de
commission-affiliation »524. On aurait pu songer aussi à un « contrat de commission-
franchise » ou « d’agence franchise »525. Signalons cependant que ce titre n’a aucune
espèce d’importance juridique ; il en a une, d’ordre économique et « marketing »,
mais c’est une toute autre question. La pratique du contrat de « commission-affiliation
», principalement dans le secteur textile a sans doute déjà figé l’appellation de ce
contrat526.

306. Comparons la définition évoquée ci-dessus de la commission-affiliation


avec celle du représentant commercial au sens du deuxième alinéa du premier article
du décret-loi N. 34/67 : « Est aussi considéré comme représentant commercial, le
commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté
en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur exclusif
unique ».

524
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION», op.
cit.
525
La Fédération Française de la Franchise admet la compatibilité de ces contrats avec les contrats
de franchise pour autant, que le contrat respecte l’indépendance juridique et financière du
commissionnaire, ce qui suppose notamment une marge de manœuvre dans l’établissement des prix de
vente, prévoie une licence d’enseigne au commissionnaire, la communication d’un savoir-faire et d’une
assistance. Tout cela montre bien que l’on est assez proche du contrat de franchise.
526
R. BOUT, M. BRUSCHI, S. POILLOT-PERRUZETTO et M. LUBY, Droit économique, Lamy,
2005, n° 3896 : Exemple d’enseigne appliquant la commission-affiliation : Etam, Body One, Mango.
-158-

307. A première lecture, soulignons une distinction linguistique : le terme


« convention » n’a pas de similaire en droit libanais, puisque le contrat en droit
français est une convention527, tandis qu’en droit libanais le contrat est un accord528.
En vérité, le contrat de « commission-affiliation » n’est rien d’autre qu’un contrat
présentant un objet au moins double : il contient une composante « commission »
ainsi qu’une composante « affiliation » dont les éléments viennent renforcer
l’intégration à un réseau constitué par le commettant. Intervenant tous deux pour le
compte de leur donneur d’ordre, différemment du représentant commercial (au sens
du deuxième alinéa dudit article) qui agit pour son propre compte, il est possible de
distinguer le mandataire du commissionnaire selon que l’intermédiaire intervient au
nom de son mandant ou au contraire sous son propre nom529.

308. En d’autres termes, les contrats de l’affaire sont conclus pour le compte du
commettant. Cet élément est banal ; il ne permet en aucune façon de distinguer si la
convention est constitutive d’un contrat de mandat ou d’une opération de commission
puisque ce critère est commun à ces deux formes d’intermédiation, comme cela a déjà
été montré. La commission se trouve ainsi transplantée dans un domaine pour lequel
elle n'a pas été originairement conçue. Le commissionnaire traditionnel vend, de
manière ponctuelle, pour le compte d'un commettant dont le nom, en principe, n'est
pas révélé. Il est un intermédiaire opaque. Le commissionnaire-affilié, lui, est un
collaborateur permanent qui vend les produits d'une entreprise disposant d'une
enseigne nationale ou internationale, entreprise nécessairement portée à la
connaissance des acheteurs. Il est un intermédiaire transparent : solution différente du
celle du représentant commercial, commerçant ayant la qualité d’un représentant et
non d’un intermédiaire. La révélation du nom du commettant ne modifie pas, certes,

527
Art. 1101 c.civ. fr. : « Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes
s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».
528
Art. 165 C.O.C : « L’accord étant chaque union entre deux volontés afin de créer des effets
juridiques, et dans la mesure où il a pour but la construction de relations obligatoires, il est nommé
contrat ».
529
Cass. com., 20 mai 1997, RJDA 10/1997, n° 1187 ; Cass. com., 3 janv. 1995, RJDA 4/1995, n°
425 ; Cass. com., 22 mai 1991, Bull. civ., III, n° 173 ; Cass. com., 21 juin 1982, Bull. civ., IV, n° 235,
JCP G, 1982, IV, 314 ; Cass. com., 10 fév. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Cass. com., 3 mai 1965 Bull.
civ. III, n° 280 ; Cass. com., 3 mai 1965, Bull. civ., III, n° 280 ; Cass. com., 19 mars 1958, JCP 58, éd
G, IV, 66.
-159-

la nature du contrat qui reste un contrat sans représentation530 et ne devient pas, en


principe, un mandat531 : différemment de celui qui confère au commerçant la qualité
de « représentant » pour obtenir la qualité de représentant commercial après avoir
agir pour son propre compte.

309. En outre, une autre distinction est utile : elle concerne la propriété des
produits vendus. Attendu que le commissionnaire-affilié n’acquiert pas la propriété
des marchandises qu’il s’occupe de commercialiser532, quand, le représentant
commercial au sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N.34/67,
acquiert la propriété des marchandises vendues, en tant que acheteur-revendeur
comme nous l’avons évoqués ci-haut. Sur cette base, plusieurs questions attirent notre
attention : Comment la personne désignée au deuxième alinéa de l’article premier va-
t-elle posséder deux qualités presque contradictoires : celle d’un commerçant et celle
d’un représentant ? Et le cas échéant, rejoint-elle la définition du premier alinéa en
tant que représentant? En d’autres termes, peut-on, en son nom et pour son compte,
vendre des produits en qualité de représentant ?

310. Au vu de l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67, la


qualité du représentant commercial apporte l’image simple du mandataire agissant au
nom et pour le compte d’autrui. Cet agissement pour le compte d’autrui éloigne le
rapprochement de la qualité « représentant » conféré au commerçant agissant pour son
propre compte en effectuant une action d’achat pour revente. Cette dernière action se
réalise sous deux conditions : La première est qu'il y ait eu un achat ; la deuxième est
l’intention de vendre avec profit533, d’où le retour au fond de la définition de la

530
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 5e éd., D.,
2000, n° 667.
531
P. CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012, n° 107.
532
Cela confirme la thèse de la représentation réelle qui caractérise le contrat de commission. v. M.-
P. DUMONT-LEFRAND, L’opération de commission, préf. J.-M. MOUSSERON, Litec, Paris, 2000,
spéc. no 265 s. ; R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l'intermédiation, RTD com.,
2011, p. 215 : « Au regard du transfert de propriété des marchandises vendues, le commissionnaire est
totalement transparent puisque le commettant reste le propriétaire des marchandises ».
533
Dans l'intention de revendre : l'intention suffira, même si, par la suite, la revente n'a pas eu lieu.
Inversement, de même la revente ne constituera pas un acte de commerce si l'achat n'a pas été fait dans
l'intention de revendre: E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la
doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005 ; Sera acte de commerce
également, l'achat fait dans l'intention de louer ; E. EID et Ch. EID, Droit commercial, éd. Sader,
-160-

profession : en tant que métier, la recherche du gain pour vivre sera l’acte de volonté
essentielle.

311. Donc cet acte de commerce signalé dans le décret-loi N. 34/67, pèse sur la
qualité de « commerçant » devant celle de « représentant » muni d’un contrat.
L’essentiel est que la personne doit être un commerçant avant l’existence d’un certain
contrat lui conférant la qualité de « représentant ». Nous constatons que cette dernière
est secondaire et formelle devant la qualité de « commerçant ». En d’autres termes,
l’intention ambiguë du législateur est, en priorité, la recherche de la qualité de
« commerçant » pour l’octroi de la qualité de représentant commercial au sens du
deuxième alinéa de l’article premier, afin de savoir ensuite si l’activité de représentant
englobe totalement l’activité du vendeur.

312. En effet, les caractéristiques de la qualité commerciale sont fortes pour le


commerçant -représentant- au sens de l’alinéa second de l’article premier du décret-
loi N. 34/67, alors qu’il y a une perte d’indépendance pour le commerçant- affilié- car
il n’est plus maître de la gestion des stocks, ni propriétaire des marchandises dont il
fait la vente. L'intermédiation portant valorisation du fonds de commerce d'autrui peut
prendre des formes multiples. La transformation du contrat d’agence commerciale en
un contrat de commission-affiliation est possible534. Les différentes qualifications en
présence n'empêchent pas de détecter des caractéristiques communes aux différents
contrats. Ces caractéristiques communes mettent en évidence la relative autonomie
qui caractérise l'activité de l'intermédiaire, sans faire de lui un salarié du propriétaire
du fonds de commerce535. Voyons la portée des ressemblances entre le
commissionnaire-affilié et le représentant -commerçant- sur le décret-loi N. 34/67.

Beyrouth, t. 1, 2007, p 156 ; F. ATOUI, Droit commercial, éd. Maison des sciences arabes, Beyrouth, t.
1, 1986, p. 86.
534
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION », in
mél. Ph. LE TOURNEAU, Rép. civ. Dalloz, 2007 : « Une telle transformation n’est pas de nature à
écarter le taux de litige mais simplement, en principe toujours, la lourdeur systématique de la charge
d’indemnisation ».
535
R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l'intermédiation, RTD com., 2011, p.
215.
-161-

SECTION 2

LES RESSEMBLANCES

313. Le refus de la qualification d'agent commercial repose en l'espèce sur la


prise en compte du comportement536 du professionnel concerné537. Ce comportement
résulte de la qualité commerçante commune à ces deux types de personnes.

314. Le commissionnaire -commerçant indépendant538- est alors un


intermédiaire occasionnel539, la commission étant un contrat « d'occasion »540 qui se
distingue des contrats dits « de situation » aménageant, eux, des relations durables541.

315. Des impératifs expliquent le transport de la commission à la vente dans


d'autres secteurs de la distribution, tel celui de l'équipement de la personne où se sont
créés des réseaux faisant ouvertement de la commission un contrat d'intégration,
puisque baptisé « commission-affiliation »542. Ce contrat de « commission-affiliation
» a pu être présenté par un auteur praticien AMEDEE-MANESME, à la communauté
de la doctrine, comme une formule contractuelle expressément alternative au contrat

536
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 39 : « ...Si l’agent commercial exerce son activité sous formes de société commerciale,
ce qui sera fréquemment le cas, il se verra alors bien entendu soumis aux règles du droit commercial ».
537
F. COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D.,
2011, n° 678 : « La nature civile de la profession d’agent serait donc imposée par la qualité de
mandataire de l’agent ».
538
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6 éd., Defrénois, 2012,
n° 538 ; D. FERRIER, La commission-affiliation : Charybde ou Scylla ? D., 2008 p. 2907 ; Cass. com.,
7 oct. 1997, JCP 1998, II, 10201, note O. LITTY.
539
On s'est parfois demandé si le privilège de l'article L. 132-2 pouvait bénéficier au
commissionnaire occasionnel. Certains l'ont nié, estimant que seul le commissionnaire professionnel
pourrait s'en prévaloir (Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité De Droit Commercial., t. 3,
no 486 ; J. HEMARD, op. cit.). D'autres auteurs estiment que rien ne justifie une telle exclusion ; R.
PALLARD, Les Obligations du commettant et les garanties du commissionnaire, D., 1949 p. 137).
C'est d'ailleurs la solution retenue par la jurisprudence qui accorde le bénéfice du privilège à l'acte isolé
de commission, même s'il n'a pas le caractère commercial (Req. 14 juin 1877, DP 1878. 1. 475 ; CA
Agen, 8 juill. 1867, S. 1868. 2. 101).
540
F. AUQUE, La commission- affiliation, AJDI, 2001, p. 1059.
541
M. CABRILLAC, Remarques sur la théorie générale du contrat et les créations récentes de la
pratique commerciale, in Mél. Marty, Université des sciences sociales de Toulouse, 1978, p. 259.
542
A. LANVIN, Affiliation ou franchise ?, Franchise Magazine, fév. 1996, n° 132.
-162-

de franchise : « il n’y a pas de différence entre le contrat de franchise et le contrat de


commission-affiliation en ce qui concerne la licence d’enseigne, la communication de
savoir-faire, la formation ou l’assistance. La distinction s’opère sur le fait que la
clause d’approvisionnement en matière de franchise est remplacée par une clause de
dépôt-vente »543. C’est ainsi, en effet, que se présente généralement le contrat de
commission-affiliation et non, a priori, comme une alternative à d’autres contrats,
notamment le contrat d’agence commerciale544 ou le contrat de commission à la
vente. Il s’agit de souligner à cet égard que M. VABRES considère que la
commission-affiliation est donc une commission à la vente, dans la mesure où le
commettant reste propriétaire du stock ; ainsi peut-il fixer lui-même le prix des
produits545, sans prendre le risque d'une condamnation au titre de la prohibition des
prix imposés au distributeur546.

316. Assez curieusement, pourtant, la jurisprudence est relativement pauvre en


exemples. Tout juste peut-on relever un cas de contrat de commission-affiliation du
réseau Chattawak, dans le secteur du prêt à porter, requalifié en contrat d’agence
commerciale par un jugement, fort critiquable, du Tribunal de Commerce du 6 février
2004 dans lequel le tribunal considérait, pour faire droit aux demandes du
commissionnaire-affilié, que :

« Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces versées aux débats que l’affilié agit
de manière autonome, que les ventes sont faites pour le compte de Chattawak, que
l’affilié encaisse le produit des ventes en versant ces montants sur un compte
bancaire ouvert au nom de Chattawak, que le tarif est établi par Chattawak, qu’une
exclusivité est instaurée, que les marchandises restent la propriété entière et exclusive
de Chattawak ; le tribunal dira que la société Chantal Pieri a reçu un mandat de

543
G. AMEDEE-MANESME, La politique des prix et la commission-affiliation : un juste équilibre
à trouver, D., aff., 1999,1160.
544
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION », in
mél. Ph. LE TOURNEAU, Rép. civ. Dalloz, 2007.
545
F.-L. SIMON, Théorie et pratique du droit de la franchise, éd. Joly, 2009, spéc. n° 19.
546
R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l’intermédiation, RTD com., 2011, p.
215.
-163-

vendre les produits du fabricant et pour son compte, en contrepartie d’une


commission et dira qu’il s’agit d’un contrat commercial ».

317. Dans cette affaire, un ancien affilié Chattawak, suite à la rupture du contrat
de commission-affiliation, avait demandé au juge la requalification dudit contrat en
contrat d'agence commerciale, l'enjeu étant l'obtention de l'indemnité de rupture
accordée à tout agent commercial pour un montant équivalent à au moins deux années
de commissions à hauteur de 145 000 euros. Par arrêt du 13 septembre 2006, la Cour
d'appel de Paris avait confirmé la requalification en invoquant les conditions de
forme: l'affilié ne communiquait que sous le nom de l'enseigne et sa raison sociale,
son numéro RCS ne figurant pas sur les tickets de caisse.

318. La société Chattawak s'étant pourvu en cassation, la Cour de cassation a


cassé l'arrêt en question (Cass. Com. 26 février 2008) et renvoyé l'affaire une nouvelle
fois devant la Cour d'appel de Paris pour être rejugée au motif que le contrat conclu
entre la société Chattawak et son affilié stipulait que l'affilié était « un commerçant
indépendant propriétaire de son fonds de commerce » alors que la qualification
d'agent commercial est incompatible avec le fait d'être propriétaire du fonds de
commerce.

319. Or, par arrêt en date du 9 avril 2009547, la Cour d'appel de Paris a confirmé
la requalification du contrat en contrat d'agent commercial. L’un des motifs était que
les prix lui étaient imposés, absence du pouvoir de négocier qui pourtant en matière
d’agence commerciale écarte le statut. En effet, nonobstant la clause relevée par la
Cour de cassation, la Cour d'appel a jugé à l'occasion de son second arrêt : « Il résulte
des éléments versés aux débats et dont l'essentiel a été rappelé plus haut, que la
plupart des éléments susceptibles de composer le fonds de commerce appartenaient à
la société Chattawak ou étaient étroitement contrôlés par celle-ci, spécialement
l'enseigne, le matériel et le stock ».

320. A nouveau saisie, la Cour de cassation en date de 29 juin 2010548 vient de


rappeler fermement son opposition à cette requalification du contrat de commission-

547
Arrêt rendu sur renvoi après cassation 26 fév. 2008, pourvoi n° C-06. 20.772.
548
Cass. com., pourvoi n° 09-66773, 29 juin 2010.
-164-

affiliation en contrat d’agent commercial. Les hauts magistrats reprochent à la Cour


d’appel :

I) De n’avoir pas recherché laquelle des deux sociétés avait la qualité


juridique de vendeur, n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des
articles L. 132-1 et L. 134-1 du Code de commerce.

321. Si nous suivons cette orientation, il faudrait comprendre que la distance


entre le commissionnaire et l'agent commercial repose sur la qualité de « vendeur » à
l'égard des consommateurs des marchandises concernées. Une telle démarche suscite
plusieurs observations. D'abord, évoquons la qualité de « vendeur » ; il faut tout de
même signaler que, dans le cas de figure concerné, le distributeur est censé vendre un
bien dont il n'est pas lui-même propriétaire puisque la propriété de la marchandise
demeure celle du fournisseur. Il ne pourra donc tenir sa qualité de commerçant de
l'achat de biens en vue de leur revente (art. L. 110-1, 1°, et L. 121-1 C. com.) sauf
dans l’existence d’une intention de revendre avec bénéfice549. En définitive, tout est
ici renvoyé à la condition d'une opération réalisée « en son propre nom », visée par
l'article L. 132-1 du Code de commerce pour caractériser la qualification de
commissionnaire. Mais, dans le cas de la « commission-affiliation », cette
circonstance se réduit à bien peu de choses et l'on est en droit de se demander s'il ne
s'agit pas que d'un aspect tout à fait formel, mis en avant et entretenu à dessein par les
zélateurs de ladite qualification pour tenter d'en sauver la singularité550.

322. Dans l'affaire examinée, la seule référence à la marque Chattawak


apparaissait sur les tickets de caisse, matérialisation probablement unique des contrats
de « vente » des marchandises à la clientèle, et non point la dénomination de la
société assurant l'exploitation du point de vente551. Ajoutons à cela que les documents

549
J.-P. MAUBLANC, Notification de l'avis de la commission le jour de l'émission de l'avis de mise
en recouvrement et assimilation de l'exploitation de l'immeuble à un défaut d'intention de revendre,
AJDI, 2008 p. 603 ; I. NAJJAR, L'« ensemble contractuel » sur sa lancée..., D., 2005, p. 1105.
550
S. BERNARD, L'amusante « commission-affiliation » provoque la confusion, D., 2010, p. 687.
551
Ce litige et les arrêts de cour qui se succèdent depuis 2006 vous ont-ils amené à changer vos
pratiques sur le terrain avec vos commissionnaires-affiliés s’agissant des méthodes d’encaissement, de
-165-

commerciaux (publicités...) et l'enseigne ne faisaient référence qu'à la marque, nous


ne voyons pas trop comment les clients pouvaient identifié que leur « vendeur » était
une personne juridique autre que la société propriétaire de la marque. Ajoutons encore
que la somme encaissée était portée directement sur un compte bancaire ouvert au
nom de la société titulaire de la marque : il ne reste que bien peu de chose pour
caractériser la qualité de « vendeur » en ce qui concerne le distributeur.

323. Un agent commercial ne ferait pas moins ni mieux. Si nous voulons bien
admettre que la révélation du nom du mandant ne suffit pas à écarter la qualification
de commissionnaire, encore faut-il, pour que tout ceci soit un peu crédible, que les
consommateurs cocontractants puissent identifier celui qui est censé être le « vendeur
», agissant « en son propre nom » : solution identique de celle du représentant
commercial au sens du deuxième alinéa du décret-loi N. 34/67 qui, en tant que
commerçant, acquiert la qualité de « vendeur » après avoir entrepris de vendre ce
qu’il aura acheté. Mettre en avant la réalisation des opérations par le distributeur « en
son nom » pour en déduire la qualification de commissionnaire apparaît, dans le
contexte visé, comme relevant de l'incantation plus que de la démonstration. La Cour
d'appel de renvoi pourrait donc tout à fait répondre à cette demande de la Cour de
cassation sans devoir en inférer que l'on est bien en présence d'un véritable mandataire
au sens de l'article L. 132-1 du Code de commerce552.

II) De se polariser sur le statut d’agent commercial, simple


mandataire, qui n’a pas de clientèle propre.

324. Alors qu’une clientèle, à l’évidence détachable de la marque Chattawak,


était attachée à la société Chantal Pieri qui avait su en fidéliser une en ce lieu, tandis
que la société Chattawak avait pu ouvrir, dans le même temps, un nouveau magasin
dans la même ville à son enseigne ; si le distributeur ne dispose pas d'une clientèle
propre, il n'est pas un commissionnaire commerçant. L’ironie de l’histoire, c’est que

facturation, voire de fixation des prix de vente en magasin ? Question posée au président de la société
Chattawak, S. CHOMARAT, Franchise-Magazine.com, 30 juin 2010.
552
D. FERRIER, Concurrence- Distribution, D., 2011, p. 540.
-166-

Chattawak ne se développe en commission-affiliation que dans les villes moyennes et


sélectionne ses partenaires en fonction de leur intégration dans la ville553. Bref, la
marque recherche avant tout des partenaires « propriétaires de leur clientèle »554,
puisque c’est le fondement même d’un commerce et c’est l’outil principal d’un
commerçant. Ce que n’est justement pas un agent commercial, mais rejoint par cette
situation le représentant commercial prévu au deuxième alinéa de l’article premier,
qui est commerçant agissant pour son propre compte en retirant son propre bénéfice
auprès de ses propres clients, après avoir eu la qualité de représentant 555. Or, la Cour
d’appel indiquait en substance que l’ancienne affiliée développait sa propre clientèle
mais qu’elle n’était qu’un simple agent commercial. C’était déraisonnable, et cela a
été relevé par la Cour de cassation.

III) De tenir la cession, par la société Chantal Pieri, du droit au bail


des locaux où était exploité le fonds de commerce pour un élément non essentiel
du litige.

325. Alors que le fait qu’elle soit titulaire d’un bail commercial est un élément
essentiel pour déterminer si celle-ci avait la qualité de commerçant qu’un agent
commercial ne peut posséder. Contre la décision de la Cour d’appel, la Cour de
cassation556 rejette de nouveau la qualification d’agent commercial. Dans son arrêt,
elle souligne que « le fonds de commerce est une universalité de fait, qui peut
comprendre divers éléments, au nombre desquels cumulativement ou non, la clientèle,
le droit au bail, l’enseigne, le matériel, le stock, des marques, des licences ». Elle
ajoute que « la plupart des éléments susceptibles de composer le fonds de commerce
appartenaient à la société Chattawak ou étaient étroitement contrôlés par celle-ci,
spécialement l’enseigne, le matériel et le stock ».

553
A.-L. ALLAIN, Chattawak : l'affiliation sans contrefaçon, Franchise-Magazine.com, Succès et
Dérapages, publié le 12 mars 2008.
554
F. FARKAS, Affaire Chattawak : La Cour de cassation remet les pendules à l’heure dans son
arrêt du 29 juin 2010, www.franchise-land.com
555
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 89.
556
Cass. com., pourvoi n° 06-20772, 26 fév. 2008.
-167-

326. En conclusion, la Cour de renvoi règle la contradiction entre la qualification


d'agent commercial mandataire civil qui agit au nom du mandant, et donc s'adresse à
la clientèle du mandant, et le commissionnaire-affilié mandataire commerçant qui agit
en son nom et donc s'adresse à sa propre clientèle attachée à son fonds de
commerce557: solution identique du représentant commercial libanais qui, en tant que
commerçant agit en son propre nom avec sa propre clientèle. En d’autres termes, la
qualité de « commerçant » est une présomption que le commerçant agit en son propre
nom puisqu’il ne peut pas exercer son activité commerciale sans être inscrit au
registre commercial sous un nom commercial558 : documents demandés lors de
l’immatriculation au dit registre559.

Sur cette assise, le commissionnaire-affilié relève-t-il des dispositions du décret-


loi N. 34/67 du fait qu’il est commerçant ?

327. Nous remarquons que le contrat de commission-affiliation indiquera en


effet, de façon explicite ou implicite, que l’affilié intervient de façon autonome sans
être placé sous la subordination du commettant. Cependant l’autonomie ou
l’indépendance de l’intermédiaire peut être une condition importante de la
qualification d’un contrat, de distribution par exemple. De son côté, Mme. AUQUE
voit dans ce nouveau contrat, un danger qui fait du commissionnaire-affilié un
commerçant doublement dépendant, d'une part, du commettant qui représente sa
clientèle, qui est son unique client, d'autre part, du propriétaire560.

557
D. FERRIER, Requalification d'un commissionnaire-affilié en agent commercial : épilogue, D.
2009, p. 1942.
558
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 89 ; A.
KHEIR, Droit commercial Libanais, éd. La société moderne du livre, 1997.
559
Cette immatriculation n'a pas pour effet de conférer la qualité de commerçant pour l'agent
commercial français exerçant une profession indépendante. Dans la mesure où, comme dans l'espèce ici
rapportée, c'est la qualification d'agent commercial qui est déniée, l'intéressé devra alors requérir son
immatriculation au registre du commerce et des sociétés à titre de commerçant et se soumettre à toutes
les obligations attachées à cette qualification : B. SAINTOURENS, L'exploitation d'une clientèle
propre exclut la qualification d'agent commercial, RTD com., 2008 p. 45.
560
F. AUQUE, La commission-affiliation, AJDI, 2001, p. 1059 : « Juridiquement distinct du contrat
de franchise, le contrat de commission-affiliation soulève, au regard des notions du fonds de commerce
et de clientèle, des questions auxquelles ne peuvent pas être apportées les mêmes réponses. Le contrat
-168-

328. Reprenons les dispositions du deuxième alinéa de l’article premier du


décret-loi N. 34/67: « Est aussi considéré comme représentant commercial, le
commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté
en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ». Suivant les
argumentations de l’affaire Chattawak évoquée, les hauts magistrats rappellent que «
l’agent commercial, simple mandataire qui n’a pas de clientèle propre, ne peut être
titulaire d’un fonds de commerce et n’a pas la qualité de commerçant ». Ce qui est

de commission est un acte préparatoire à d'autres conventions, en l'espèce des ventes, impliquant des
opérations à trois personnes : commettant, commissionnaire, acheteurs. Quelle que soit la conception
que l'on retienne du fonds, que l'on admette ou que l'on rejette l'idée d'une appartenance de la
clientèle, on doit reconnaître l'existence de relations d'affaires, actuelles ou potentielles, au sein de ce
rapport triangulaire, ce qui conduit à se demander laquelle ou lesquelles parmi ces trois catégories de
personnes constitue(nt) une clientèle pour l'autre ou pour les autres. La plupart des auteurs ne traitent
la question qu'indirectement, utilisant la notion de clientèle pour distinguer la commission du mandat
d'intérêt commun et déterminer dans quel cas l'intermédiaire a droit ou n'a pas droit à indemnité en
cas de rupture des relations contractuelles ». M. Didier FERRIER affirme ainsi : « Considérant, à
juste titre, que le commissionnaire, sauf à ne pas avoir cette qualité, est titulaire de la clientèle puisqu’
il masque, si ce n'est économiquement tout au moins juridiquement, le commettant aux yeux des tiers,
la jurisprudence refuse toute indemnisation au commissionnaire dans cette hypothèse » : D. FERRIER,
Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 269. Plus prudemment, Mme Marie-Pierre
Dumont relève que la clientèle est contractuellement liée au commissionnaire pendant la durée de sa
mission : M.-P. DUMONT, L'opération de commission, Litec, Paris, 2000, n° 813, puis conclut : « En
résumé, la jurisprudence refuse d'étendre les règles du mandat d'intérêt commun à la commission
parce qu'elle estime que les commissionnaires ne peuvent se prévaloir d'une clientèle commune
existant entre eux et leurs commettants dans la mesure où ils exploitent la clientèle pour le compte
d'autrui mais en leur propre nom ». La question de la clientèle est polluée, semble-t-il, par le débat sur
l'intérêt commun, concept qui renvoie à celui d'entreprise commune, de collaboration à la réalisation
d'une œuvre commune, mais pas à la notion, fréquemment mentionnée par les auteurs, de « clientèle
commune » : A. BRUNET, Clientèle commune et mandat d'intérêt commun, Etudes dédiées à A.
WEILL, D., p. 85 ; J. GHESTIN, Mandat d'intérêt commun, Mél. DERRUPPE, Litec, 1991, p. 105 ; La
Cour de cassation ne se prononce pas sur l'appartenance de la clientèle, pas plus qu'elle ne le fait
lorsqu'elle refuse une indemnité de rupture au commissionnaire, rappelant, au visa de l'ancien article 94
du Code de commerce, que, « en vertu du texte susvisé, les articles 1984 et suivants du Code civil ne
s'appliquent qu'à celui qui, à l'égard de la clientèle, agit au nom du commettant et non pas en son nom
» : Cass. com. 10 fév. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Le commissionnaire agit à l'égard de la clientèle, ce
qui ne signifie pas que cette clientèle soit sienne, le temps de la mission ou de manière irrévocable. La
propriété de la clientèle est peut-être un mythe ; l'appartenance de la clientèle, constituée en cas de
commission-affiliation par les acheteurs potentiels ou actuels des produits du commettant, est
certainement une erreur. Le commissionnaire-affilié, commerçant indépendant et propriétaire d'un
fonds de commerce, a pourtant bien dans son patrimoine une valeur, « valeur qui représente l'espoir de
maintenir le chiffre d'affaires réalisé au cours des mois précédents », selon la définition qui peut être
retenue de la clientèle : F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, Droit commercial, 6e éd., Montchrestien, 1999,
n° 297 ; De quoi, dès lors, est faite cette valeur ? De quasiment rien, répond un auteur, à propos des
diffuseurs de presse, pour lesquels « seuls le droit au bail et le mobilier d'exploitation peuvent [...] être
considérés comme constitutifs du fonds de commerce » : E. CADOU, La distribution de la presse.
Etude des contrats conclus dans le cadre de la loi du 2 avril 1947, LGDJ, 1998, n° 494 ; rien d'autre
pour le commissionnaire-affilié ? Rien : aucun des signes de ralliement des acheteurs des produits du
commettant, un contrat à durée déterminée et incessible, et, lorsqu'il est locataire, le droit au bail que
seule une décision ancienne et isolée a contesté à un commissionnaire à la vente : CA Bordeaux 18
déc.1948, JCP, G 1949.II.4706, note J. HEMARD.
-169-

contraire, disent-ils, à la disposition contractuelle qui prévoit que la société Chantal


Pieri est « un commerçant indépendant propriétaire de son fonds de commerce ».

329. C’est là, effectivement, le point déterminant. En tant que commerçant


indépendant, l’affiliée intervient et conclut les ventes en son nom propre, ce qui exclut
sans contestation possible la qualification de mandat au sens de l’article 1984 du Code
civil et ainsi, a fortiori, celle de contrat d’agence commerciale, et rejoint par cette
solution le représentant commercial au sens du deuxième alinéa du décret-loi N.
34/67 sujet de ce chapitre, qui en tant que commerçant agit en son nom propre ; étant
entendu que le nom commercial est celui utilisé par le professionnel pour s'engager
dans le commerce et afin de faciliter la distinction de son fonds de commerce d’autres
fonds561.

330. Mais la qualité de commerçant ne suffit pas en elle-même à pouvoir


bénéficier du statut de représentant commercial au sens du deuxième alinéa dudit
décret-loi ; celui-ci doit agir pour son propre compte par la vente de ce qu’il aura
acheté en vertu d’un contrat lui conférant la qualité de représentant562. De même, le
« commissionnaire-affilié » assure la commercialisation des produits pour le compte
d’autrui et non pas pour son propre compte, vu que l'organisation d'un réseau
« commission-affiliation » ne repose pas sur le schéma classique de l'achat pour
revendre mais sur la commission (à la vente), dès lors que les marchandises
demeurent la propriété du fournisseur et sont seulement mises en dépôt-vente chez
l'affilié563.

331. En effet, nous dirons que le « commissionnaire-affilié » ne relève pas des


dispositions de l’alinéa second du décret-loi N. 34/67 vu qu’il agit pour le compte
d’autrui en tant que commerçant, ce qui le rapproche de l’alinéa premier. Mais
comme nous l’avons vu au cours du premier titre, les personnes désignées à l’alinéa
premier dudit décret sont des mandataires et non des commerçants. En d’autres
termes, le « commissionnaire-affilié » se situe entre les deux alinéas dudit décret sans

561
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 231.
562
V. Supra n° 308-309.
563
A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément d'appartenance du fonds, D., 2012,
Ch. 13, n° 171.
-170-

profiter du bénéfice du statut du représentant commercial. En revanche, les


fournisseurs et grands distributeurs espèrent profiter de la commission-affiliation:
mieux maîtriser leur politique commerciale et leurs résultats, bien contrôler la chaîne
de diffusion de leurs produits, accélérer leur croissance sans nécessairement revenir à
l'exploitation directe, prospérer grâce à une technique souple qui conduit à
externaliser la fonction de distribution au sein d'un réseau renforcé par la présence de
commerçants indépendants ayant la qualité d'intermédiaire et non de mandataire564.

332. C’était le premier type de personnes visées au deuxième alinéa de l’article


premier du décret-loi N. 34/67 ; il s’agit maintenant d’analyser, dans un deuxième
chapitre, le second type de cette même catégorie : le commerçant ayant la qualité de
distributeur exclusif unique. En effet, il faut remarquer que le décret-loi N. 34/67
accuse de sérieuses carences dans la définition de la représentation commerciale. Cela
est très important, car l’interprétation en cas de carence de la loi devient libre, de sorte
que l’application ou le rejet en bloc dudit statut risquerait d’avoir lieu pour un simple
excès dans l’interprétation au détriment de la personne que la loi envisageait de
protéger.

564
B. SAINTOURENS, L'amusante « commission-affiliation » provoque la confusion, D., 2010, p.
687.
-171-

DEUXIÈME CHAPITRE

LE COMMERCANT -DISTRIBUTEUR EXCLUSIF UNIQUE-

333. Revenant aux dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67,


relevons un alinéa ajouté par le législateur rencontré avec peu de variantes à travers le
Moyen-Orient, le représentant commercial peut y être classé selon deux modèles : le
premier que nous venons d’étudier, celui du commerçant représentant, et le second,
celui de notre étude actuelle, par laquelle le représentant commercial est classé
comme distributeur exclusif unique. Ce deuxième alinéa, peut en effet se trouver dans
les appareils judiciaires et administratifs qui imposent la protection de l'agent-
distributeur dans un contrat d'exclusivité565. Cet alinéa a introduit dans la notion du
représentant commercial une autre description désignant le commerçant qui vend
sous son propre nom et pour son propre compte ce qu’il aura acheté sous condition
que son contrat englobe la qualité d’exclusivité. Cependant, le représentant qui a le
droit exclusif de vente est la formule la plus utilisée au Liban, raison pour laquelle le
législateur parait élargir la définition du représentant commercial en considérant celui
qui a le droit exclusif de vente comme représentant commercial, et par la suite le faire
bénéficier de la protection du décret-loi N. 34/67566.

334. Située entre la production et la consommation, la distribution a été définie


tardivement par les économistes567 comme un acte intermédiaire, en raison de sa
proximité, source de confusion568. Ainsi d’après M. le professeur FERRIER, la
distribution est une opération économique569, et s’agissant de son statut, les

565
Ch. MALLAT, Comparative models of freedom of trade: The hurdle of Lebanese sole agency,
Centre d’études et de recherche de l’USJ, Liban, 2002.
566
« L’aspect économique de la représentation commerciale a primé aux dépens de sa définition
juridique » : M. NASR, Cours de droit commercial, éd. Université Libanaise, 1987- 1988, p. 333 ; S.
SALEH, La représentation commerciale, Rev. al Adl, 1968, fasc. 4, p. 78.
567
P. LASSEGUE, La politique commerciale au point de vente: tensions entre producteurs et
distributeurs par BRUGIER-VERREE, Economica, 1977: « par un paradoxe énorme et à peine
croyable les questions touchant à la distribution ont été jusqu’à une date récente tout à fait ignorée par
les économistes… ».
568
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 1.
569
Les termes distributions et distributeur sont parfois utilisés dans les textes juridiques mais n’ont
pas fait l’objet de définition légale, L. n° 89-1008, 31 déc. 1989, art. 12 : « Le gouvernement
-172-

définitions de la distribution proposées par les juristes et les économistes mettent


toutes l’accent sur l’activité d’intermédiation commerciale570 :

« Ensemble d’activités d’intermédiaire qui permet au producteur d’atteindre le


consommateur »571

« Ensemble des opérations psychologiques, juridiques et matérielles qui


permettent d’acheminer les marchandises du producteur aux usagers qu’il s’agisse
d’industriels transformateurs ou de particuliers consommateurs »572

« Ensemble des opérations de mise de biens à la disposition des consommateurs


au lieu, au moment, sous la forme, dans l’assortiment et dans les quantités
correspondant aux besoins des consommateurs »573

335. Nous pouvons en déduire, suivant M. BEAUCHARD, que la distribution


recouvre toutes les opérations d’acheminement des produits du producteur au
consommateur574, pour en venir à une définition juridique actuelle selon M. le

représentera un rapport sur …les producteurs, commerce traditionnel, artisanat, grossiste, grande
distribution… » ; C. com., art. L. 441-7 : « Une convention écrite entre le fournisseur et le
distributeur » : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.
570
A prendre dans un sens économique et non au sens juridique de la représentation, Rapp. N.
DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris, 2007.
571
R. BALDI, Le droit de la distribution commerciale dans l’Europe communautaire, Bruylant,
Bruxelles, 1988, p. 11 ; M. De JUGLART, et B. IPPOLITO, L’acte de distribution serait un acte
intermédiaire situé entre la production et la consommation définitive des produits, Cours de droit
commercial, Montchrestien, 1988, t. 1, n° 76.
572
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p.
356 : « fonction économique consistant à assurer l’écoulement des produits du stade de la production à
celui de la consommation » ; S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements
opportunistes, Etude particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, p. 9 ;
M. BEHAR-TOUCHAIS, et G. VIRASSAMY, Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999, n° 5 ; J.-
M. MOUSSERON, et alii, Droit de la distribution, préf. J. HEMARD, Librairies techniques, 1975, p. 8
et s.
573
Dictionnaire commercial, PUF, 1994, p. 247 : « Ensemble des activités qui s’exercent tout au
long du canal de distribution d’un bien ou d’un service vendu, entre le producteur ou le dernier
transformateur ou l’importateur et le consommateur ou l’utilisateur final de ce bien ou de ce
service » ; P. LASSEGUE , Manuel de la distribution, Fonctions-Structures-Evolution, Les cours de
Droit, 1977, Rapp.: « ensemble des activités qui s’exercent depuis le moment où le produit, sous sa
forme d’utilisation entre dans le magasin commercial du producteur ou du transformateur jusqu’au
moment où le consommateur en prend livraison », Assises nationales du commerce, cité par D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 3.
574
J. BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, Thémis Dr. privé, PUF, 1996,
p. 21.
-173-

professeur FERRIER, issue des notions précédentes : la distribution peut être ainsi
définie comme « l’ensemble des opérations matérielles et juridiques qui permettent
de commercialiser des produits ou des services auprès de distributeurs et
consommateurs professionnels ou non professionnels »575. Sous l’angle juridique de la
distribution au sens large, il s’agit d’approcher la définition proposée pour le
représentant commercial suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi
N. 34/67 ; celui-ci exerce la commercialisation des produits achetés pour son propre
compte, toujours après avoir acquis la qualité de distributeur exclusif unique.

336. Cette qualité comporte deux caractéristiques qui nécessitent une analyse
séparée afin de bien comprendre la classification de ce représentant commercial
suivant ce deuxième alinéa : exclusif et unique. C’est là que se soulèvent les
questions. L’exclusivité comprend-elle les produits ou les personnes ? En d’autres
termes la distribution sera exclusive quant à des produits déterminés ou quant à
certaines personnes ? Le cumul de ces deux caractéristiques au bénéfice du statut de
représentant commercial est-il nécessaire? Pour répondre à ces questions, il nous faut
étudier dans deux sections différentes : l’exclusivité d’une part, -ce sera notre
première section- et d’autre part l’unicité -ce sera notre deuxième section-.

575
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 6.
-174-

SECTION 1

L’EXCLUSIVITÉ

337. Pour le commerce, et particulièrement pour la distribution des produits,


c'est-à-dire la commercialisation auprès des distributeurs et des consommateurs, la
stipulation d’une exclusivité présente un antagonisme576. Le mot « exclusivité »,
apparu en 1802577, vient du terme « exclusif », anciennement défini : qui a « force
d’exclure »578, qui exclut tout partage579. Il trouve son origine dans le verbe «
exclure »580, ou excludere composé de « ex », marquant l’exclusion, et de
« claudere », signifiant fermer581.

338. Le terme est aujourd’hui courant et la doctrine s’accorde à penser qu’il vise
une obligation négative « obligation de ne pas faire », qui résulte d’une clause
d’exclusivité pratiquée dans plusieurs sortes de contrats tels que les contrats de
distribution, d’entreprise, de licence, et de sous-traitance582. La clause d’exclusivité
est, pour le professeur MOUSSERON, la clause en vertu de laquelle un opérateur «

576
S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, Etude
particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, p. 2.
577
Voltaire écrivait exclusiveté, qui sera ainsi répertorié, en 1812, par Boiste. En 1820, le mot
exclusivité apparaît sous la plume de Laveaux, dans Français moderne, t. 13, p. 127. Cf., not.: Trésor
de la langue française, 1980, t. 8, p. 412-413: cité par S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les
comportements opportunistes, op.cit.
578
Exclusif est emprunté au latin médiéval exclusivus (XIIIème) ; En 1960, le Dictionnaire
universel d’Antoine Furetière, définissait le mot exclure ainsi: refuser l’entrée ; s’opposer aux
prétentions de quelqu’un : cité par D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd.
Bruylant, 2008, p. 5.
579
Le Littré évoque encore le terme latin exclusio : « action d’exclure, de mettre hors. Méthode
d’exclusion », Hachette 2000, v. Exclusion. Au v. Exclusif, on lit « qui a la force d’exclure ». Sur
l’exclusivité, en général, P. GOURDON, L’exclusivité, préf. P. Le CANNU, LGDJ, 2006 ; O.
CACHARD, L’exclusivité, Ecrits rédigés en l’honneur de J. FOYER, Economica 2008, p. 215.
580
N. ERESEO, L’exclusivité contractuelle, préf. D. FERRIER, Litec, 2008, p. 5.
581
Le terme clause dérive également de claudere : ibid.
582
S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, op. cit., p. 2 ;
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 126 ; D. LEGEAIS,
Concession exclusive, J.-Cl. com. fasc. 307, nov. 2001.
-175-

débiteur d’exclusivité » est tenu de n’effectuer une prestation déterminée qu’auprès


d’un autre opérateur « créancier d’exclusivité »583.

339. Dans les contrats de distribution, l’exclusivité joue un rôle très important et
essentiel, puisque elle permet d’établir un courant d’affaires unique ou tout au moins
privilégié entre fournisseur et distributeur en limitant la possibilité, pour l’un ou pour
les deux, de traiter avec d’autres partenaires. Voyons dans un premier paragraphe la
teneur de l’exigence de l’exclusivité, pour en discuter, dans un deuxième, la portée au
regard des dispositions du décret-loi N. 34/67.

Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence

340. Historiquement, parmi les réseaux de distribution vint l’exclusivité de


fourniture, qui a donné naissance au contrat de concession584. Ensuite, s’est mis sur
pied le réseau de distribution sélective. Il est reconnu en droit libanais que le contrat
de concession de vente peut être formulé en deux modèles séparés l’un de l’autre : Le
premier est celui du concessionnaire non-exclusif de vente, il s’agit de tout
distributeur agréé ordinaire qui était connu à l’origine en France sous le nom de
concessionnaire libre585. Le second est celui du concessionnaire de vente à titre
exclusif ; il s’agit de tout concessionnaire exclusif.

341. Dès le début du XIXe siècle, les fabricants ont pris conscience que leur
intérêt était d'attacher les consommateurs à la marque que portent leurs produits586.
C'est en fonction de cette préoccupation que s'est dessiné le cadre juridique de la

583
J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle, par P. MOUSSERON, J. RAYNARD, J.-B.
SEUBE, 4e éd., Francis Lefebvre, 2010, n° 672.
584
Y. MARDENALOM, Etude comparative des réseaux de distribution, th., Montpellier, 1999, p.
2.
585
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, op. cit., n° 21.
586
Selon M. LICARI, l’exclusivité de marque est définie comme suit : « De point de vue de l’intérêt
du fabricant à une distribution dynamique de ses produits et à la préservation de l’image de la marque
qu’il a construite, une clause obligeant le concessionnaire à distribuer exclusivement des produits de
la marque de son concédant est en principe efficace », F.-X. LICARI, La protection du distributeur
intégré en droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 449.
-176-

concession exclusive587. Le distributeur agréé -ou le « distributeur non-exclusif »-, a


le droit de vendre, en plus des marchandises et des produits de son contractant, des
marchandises similaires pour d'autres producteurs. Cela signifie, de manière claire et
explicite, qu’il n'y a pas lieu de parler d'une distribution exclusive, restrictive à une
personne ; alors que le concessionnaire de vente exclusive échange cette exclusivité
avec son mandant, et lui interdit de vendre des produits ou des marchandises
similaires et concurrentes aux marchandises qu’il pouvait vendre à l'origine. Ce qui en
effet a été reconnu par la jurisprudence588 et la doctrine589.

342. Ainsi, selon une définition ancienne et toujours d’actualité, le contrat de


concession exclusive est « une convention par lequel un commerçant -
concessionnaire- met son entreprise de distribution au service d'un autre commerçant
ou industriel -concédant- pour assumer exclusivement, sur un territoire déterminé,
pendant une période définie et sous la surveillance du concédant, la distribution de
produits dont le monopole de revente lui est concédé »590. Cependant, ce type de
contrat commercial d'origine récente ne possède pas en France de statut légal qui lui
soit propre, mais dénommé en droit communautaire de la concurrence par
« distribution exclusive » et définie comme « l’opération par laquelle le fournisseur
accepte de ne vendre sa production qu’à un seul distributeur en vue de la revente sur
un territoire déterminé »591. Il ne relève d'aucune formule contractuelle précédente et

587
Dans le même sens, l’avis du M. LICARI qui considère que « Les clauses organisant une
exclusivité de marque, sont accordées au concessionnaire ou au franchisé », F.- X. LICARI, op. cit, p.
449.
588
TI Beyrouth, Ch. com. décision n° 721/492 du 23 déc.1969, op. cit., p. 26 au 33 ; Cass. com.,
19 déc. 1989, Bull. civ., IV, no 327, D. 1990, somm. 368, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 15 déc. 1992,
Bull. civ. IV, no 409 ; Cass. com., 10 janv. 1995, D. 1995, IR 43 ; Cass. com., Rejet 17 juill. 2001, D,
n° 99-17.251 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 04, 16 sept. 2009, D, n° 07/12211.
589
R. PLAISANT, Les contrats d’exclusivité, RTD com., 1964, p. 13, n° 17: Le contrat de
concession est celui comportant une double exclusivité, ou exclusivité bilatérale avec délimitation de
zones d’exclusivité ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, p. 461, n° 16 ; Y.
PICOD, Y. AUGUET, M. GOMY, Concurrence, Rép. com., fév. 2009 ; P. ARHEL, Accords de
distribution, Rép. Com, juin 2010.
590
CA Versailles, 9 avr. 1998, n° 1995-6501 ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD
com., 1963, 451, n° 24 : cité par M. PEDAMON et H. KENFACK, Droit commercial, Commerçant et
fonds de commerce, Concurrence et contrat de commerce, 3e éd., D., 2011, n° 775.
591
CE, communication de la commission n° 2000/C 291/01, Lignes directrices sur les restrictions
verticales, J.O C 291 du 13.10.2000, point 161- Rapp. Définition du règlement CE. n°1983-
83 : « accord par lequel une partie s’engage vis-à-vis de l’autre à ne livrer certains produits qu’à
-177-

permet aujourd'hui la commercialisation de divers produits, notamment de produits


dont la diffusion nécessite certaines exigences comme la distribution de produits de
luxe, et de biens de consommation durable comme les produits de marque.

343. Cette dénomination en droit communautaire pour la concession exclusive


n’a pas la même signification que la distribution exclusive en droit libanais. Raison
pour laquelle nous allons distinguer dans une première rubrique le distributeur
exclusif de personnes soumises à différents accords de distribution, pour en vérifier
dans une deuxième les ressemblances aboutissant à étendre aux personnes désignées
le statut du décret-loi N. 34/67 au sens de l’alinéa second de son article premier.

A- Les divergences

a- Par rapport au concessionnaire exclusif

344. La Cour de cassation civile libanaise592 a répondu aux questions posées


concernant le représentant commercial et le concessionnaire ; elle a considéré qu' « il
est connu en principe, suivant la législation française, que le représentant
commercial diffère du concessionnaire, comme étant le premier qui vend des
marchandises à autrui, au nom et pour le compte de la personne qui la représente,
tandis que le second achète des marchandises d’un magasin et les vend à autrui en
son nom et pour son compte »593.

345. En d’autres termes, il est permis au distributeur agréé -concessionnaire non-


exclusif de vente- la vente normale des marchandises similaires aux marchandises
qu’il est autorisé à vendre, ce qui signifie que le concessionnaire n'est pas assujetti à
la clause d’exclusivité qui l’oblige à vendre seulement les marchandises objet du

celle-ci dans le but de la revente dans l’ensemble ou dans une partie définie du territoire du marché
commun » (art. 1).
592
Cass. civ., arrêt n° 12, 22 oct. 1962, Rec. Baz, 1962, p. 70.
593
F. SABIANI, Dossier 282, Dommages de travaux publics : mise en œuvre de l'indemnisation,
2010, Sect. 1, §2, 282.100 ; CA Versailles, 9 avr. 1998, n° 1995-6501 ; C. CHAMPAUD, op. cit., p.
457 et 458 ; J. HEMARD, Les agents commerciaux, op. cit, n° 80, 81, 82, p. 619, 620 ; CA Paris, 22
déc., 1966, JCP, 1967, II, 15085.
-178-

contrat de concession sans autres marchandises similaires. Ce qui indique que le


vendeur, de son côté, a le droit à tout moment de se mettre d’accord avec autres
concessionnaires de vente, contrairement au concessionnaire de vente exclusive594.

346. En revanche, l’article 4 du décret-loi N. 34/67 dispose que la représentation


commerciale est conclue dans l’intérêt commun des parties, différemment du contrat
de concession commerciale qualifié de sui-generis595. En outre, le tribunal de la
première instance de Beyrouth a rendu un avis sur ce point : dans une affaire l’une des
parties réclamait l’application d’un article du Code des obligations et des contrats
relatif au mandat ; dans un cas de concession de ventes, le tribunal a tenu à vérifier si
la condition d’exclusivité existait avant l’acte, admettant par-là que si telle condition
était vérifiée, les règles du mandat trouveraient leur application596. Cependant, le
tribunal ne fournit aucune explication à cet égard mais, à notre avis, même pour la
représentation fondée sur la concession exclusive des ventes597, les règles du mandat
doivent pouvoir s’appliquer à tire supplétif. Et pourtant, cette position s’explique
parfaitement, étant donné que l’idée de mandat résulte de la notion de concession des
ventes dont l’exécution doit s’étaler dans le temps pour une période déterminée ou
indéterminée.

347. La qualification d’un tel rapport aboutit à l’idée de mandat. Au niveau de


chaque opération effectuée par le concessionnaire avec la firme concédante, il s’agit
de ventes partielles régies par les règles de la vente, au niveau de l’ensemble des

594
C. CHAMPAUD, op. cit., p. 461 ; R. PLAISANT , op. cit.
595
F.-X. LICARI, op.cit, p. 95 : « Ce résultat ne saurait satisfaire car, ainsi que l’écrivent MM.
MALAURIE et AYNES : ‘‘ il serait de bonne méthode de ne recourir à ce refus de qualification qu’à
titre subsidiaire, lorsqu’il est impossible de faire entrer le contrat dans une catégorie préexistante. En
fait, le recours à l’institution sui-generis n’est souvent qu’un refus paresseux d’analyse’’. Un tel écueil
doit donc être évité » ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, 451, 469.
596
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de
pharmacie c/ Compagnie suisse Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 26, n° 8.
597
J. HEMARD, Chronique à la RTD com., 1971, p. 159, n° 6, sur la distinction de la concession et
du mandat d’intérêt commun, à l’occasion de l’arrêt de la Cour de cass. du 13 mai 1970, Bull. civ.,
1970, IV. 144 et D. 1970, note J. GUYENOT. Cette solution s’explique parfaitement en droit français
étant donné que celui-ci réserve la qualité d’agent commercial aux seuls mandataires strictement et
exclusivement, c'est-à-dire, aux personnes agissant au nom et pour le compte du mandant, et non aux
commissionnaires et aux courtiers dont la représentation est imparfaite ; Guide de gestion RF, VRP et
agents commerciaux, Rev. fiduciaire, 2000.
-179-

opérations, par contre, les règles de la vente ne suffisent plus598. Il s’agit, en effet,
d’un contrat à exécution successive très comparable au mandat599 : Idée variée en
doctrine française où le contrat de concession successive prend plusieurs formes :
vente avec charges600, vente à monopole601, vente portant sur des livraisons
successives602, prestation de services603 et louage d’ouvrage604. En fait, le
concessionnaire des ventes désigné par une certaine firme pour une durée déterminée
ou indéterminée, représente la firme concédante dans le secteur concédé. Il s’agit
d’une représentation que M. SALEH appelle représentation économique605, et qui,
quelle que soit son appellation, participe de la notion de mandat.

348. Ainsi, il n’y a pas lieu de distinguer la distribution exclusive de la


concession exclusive, dans la mesure où la réservation de la revente des produits à un

598
Dans les arrêts de la C. cass. (13 mai et 27 oct. 1970), ce problème d’ensemble n’a pas été
envisagée étant donné que les discussions ont tourné autour de la qualification de chaque opération à
part. En l’occurrence, la Cour décida que le payement de commissions sur les ventes n’était pas
caractéristique de l’agence commerciale et ne pouvait ôter aux rapports des parties la qualification de
concession des ventes. D’ailleurs, si les tribunaux français, conformément à leur loi, refusent la qualité
d’agent commercial au concessionnaire exclusif des ventes, ils ont, quand même, essayé de pallier à cet
état, par la notion de mandat apparent : CA Poitiers, 3 nov. 1964, inédit, commenté par J. HEMARD,
RTD com., 1966, p. 107, n°8. D’autre part, un arrêt de la Cour d’Aix en Provence (31 oct. 1963, Gaz.
Pal. 1964, 1, 57 et JCP, 1964, II, 13647, note J. HEMARD ) a retenu la qualification de mandat pour un
contrat de concession exclusive des ventes en relevant les différents éléments qui lient le
concessionnaire au concédant, notamment l’exclusivité, la permanence, la limitation de la région
concédée, les limitations de prix…
599
S. SALEH, La représentation commerciale, Rev. al Adl, 1967, n° 4.
600
P. COULOMBEL, Les obligations spéciales de l’acheteur dans certaines ventes commerciales,
Etudes sur la vente, 1951, 319.
601
Cass. com., 9 juill. 1952, RTD com., 1953, 721, obs. J. HEMARD.
602
P. COUSI, G. MARION, Les intermédiaires du commerce, préf. M. GRENTE, LGDJ, Paris,
1963, n° 29.
603
J. Le CALVEZ, Evolution et rôle des clauses d’exclusivité : les aspects juridiques des
conventions de concession exclusive, th., Paris I, 1979, t. 1, 306 ; F. COLLART-DUTILLEUL et Ph.
DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9 e éd., D., 2011, n° 936.
604
F.-X. LICARI , op.cit, p. 95 : « Un tel rattachement est généralement stigmatisé comme étant
trop commode, trop facile du fait du caractère lâche et accueillant de la définition de ce contrat perçu
comme une bonne à tout faire. Toutefois il a été relevé à juste titre que le recours à une telle
qualification, à condition d’en faire bon usage l’avantage d’éviter l’émergence trop facile de contrats
sui-generis ».
605
S. SALEH, Commercial Agency and Distributorship in the Arab Middle East: A Study in Shari'a
and Statute Law, Oct. 1, 1994.
-180-

seul distributeur sur un territoire déterminé est qualifiante606. En d’autres termes,


l’exclusivité ne peut en aucun cas se présumer lorsqu’il n’y est pas expressément fait
référence dans le contrat de distribution607.

b- Par rapport au distributeur sélectif

349. Dans la pratique, la distribution sélective est apparue en France dans le


domaine de la commercialisation des produits de luxe et surtout dans celui des
parfums608. Suivant M. LE TOURNEAU, le distributeur sélectionné en cas de
distribution sélective est un commerçant traditionnel, acceptant de réserver une partie
de son activité et de la surface de son magasin à la vente de produits livrés par un
distributeur de marque, où le cas échéant, peut vendre d’autres produits que ceux de
son partenaire609 ou concurrents610. Par cette qualification, il se rapproche du
distributeur exclusif au sens du décret-loi N. 34/67 en tant que commerçant revendeur
et s’éloigne par la possibilité de vendre des produits concurrents: ce que nous allons
étudier postérieurement. Cependant, à la différence de la distribution exclusive, la
distribution sélective n'emporte pas exclusivité territoriale611, ou de clientèle612 au
profit du distributeur sélectionné.

606
M. ZOIA, L’incidence du droit communautaire sur les contrats spéciaux, th. Toulouse I, 1999,
n° 800.
607
CA Lyon, 20 fév. 2003, RJDA 2003, n° 1055 : Tout en montrant suivant divers éléments que le
contrat n’avait pas un caractère exclusif.
608
Ph. LE TOURNEAU, Concessions. Concession libre : la distribution sélective, J.-Cl. Contrats
distribution, fasc. 1020, 2010 (1re éd. 1981 ; 8e éd. avec M. Zoïa) n° 39 et s., qui affirme à tort que la
distribution sélective est borné aux produits techniques et luxueux.
609
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 24.
610
Cass. crim., 3 nov. 1982, JCP, 1983, I, 3108, obs., Ch. VILLEMART, cah. dr. entr., 1983, n° 1,
p. 16 : « Un contrat de distribution sélective est celui par lequel, d’une part, le fournisseur s’engage à
approvisionner dans un secteur déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de
critères objectifs de caractère qualitatif, sans discrimination et sans limitation quantitative injustifiées,
et par lequel, d’autre part, le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits concurrents » ; CA
Colmar, 19 mai 1983, PIBD, 1983, n° 333, III, 258 ; CA Paris, 8 juill. 1983, Gaz. Pal., 1983, 2, 566.
611
Lignes directrices sur les restrictions verticales, Communication 2010/C130/01 du 19 mai 2010,
JOUE, n° C 130, pt 174.
612
Ibid, pt, 169.
-181-

350. Il s'agit donc d'une formule plus souple que la distribution exclusive, et,
pour cette raison, préférée lorsque le fournisseur souhaite organiser la
commercialisation de ses produits de sorte que soient satisfaits uniquement certains
critères de qualité613. Elle apparaît, aussi, moins nocive pour le jeu de la concurrence
puisque l'absence d'exclusivité territoriale favorise la concurrence intramarque, c'est-
à-dire la concurrence entre les distributeurs qui ont été sélectionnés pour la
commercialisation des produits de la marque, tandis que l'absence d'exclusivité
d'achat favorise la concurrence intermarque, c'est-à-dire entre des fabricants ou des
marques concurrentes614.

B- Les ressemblances

a- Avec la concession exclusive

351. Elle n’a pas été définie par le législateur. La définition du contrat de
concession provient de la circulaire Fontanet du 31 mars 1960615 relative à
l'interdiction des pratiques commerciales restreignant la concurrence : « une
convention liant le fournisseur à un nombre limité de commerçants auxquels il
réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines
obligations »616. En d’autres termes, la concession commerciale est un contrat liant
un fournisseur à un commerçant indépendant, auquel il réserve l'exclusivité de la
vente d'un produit dans un territoire déterminé617, à la condition qu'il accepte un
contrôle commercial, comptable, voire financier de son entreprise et parfois s'engage
à s'approvisionner, dans ce secteur, exclusivement chez le concédant618.

613
D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 112.
614
Ibid, n° 113.
615
O. MEVEL, Y. LERAY, XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique : « Les
premiers résultats relatifs à l’application de la Loi Dutreil en France : une approche contractuelle au
travers du cas d’une centrale d’achat de la grande distribution alimentaire », Montréal, Juin 2007.
616
JO, Paris, 02-04-1960 p. 3048-3053.
617
Y. MAROT, www.apce.com (Agence pour la création d’entreprises), 2011.
618
Ph. BECQUE, Le contrat de concession exclusive en droit interne, th., Montpellier, 1985, p. 6.
-182-

352. En revanche, l’alinéa second de l’article premier du décret-loi N. 34/67


prévoit son application à une certaine catégorie de concessionnaires : « Est aussi
considéré comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son
propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la
qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ». Il s’agit des
concessionnaires des ventes. C’est le cas des personnes qui s’entendent avec des
firmes industrielles qui n’ont pas de service de ventes pour s’occuper de l’écoulement
de leurs produits, non à titre de commerçants indépendants 619. Dans ce cas, le
concessionnaire traite la marchandise de la firme concédante à ses risques et périls. Il
achète la production, entière ou en partie, en paye le prix, au comptant ou à crédit,
puis s’en va à la revendre pour faire les bénéfices qu’il désire, réserve faite du cas où
la firme impose au concessionnaire un prix de vente au détail déterminé620. Ce qui a
été admis en doctrine par M. MAHMASSANI dans le cadre qui suit: « …Le
concessionnaire est l’intermédiaire du commerce qui prend en charge d’exécuter,
pour son propre compte, et à ses risques et périls, la mission objet de la
concession »621. De même par MM. LAURIOL et ANSQUER dans l’article premier
de leur proposition de loi, où ils ont considérés : « Est réputée concession de vente
tout contrat par lequel l’une des parties, ci-après dénommée concédant, réserve à une
autre, ci-après dénommée concessionnaire le droit pour celle-ci de vendre en son
nom et pour son propre compte, sur le territoire qui lui est concédé, tout ou partie des
produits de marque que le concédant fabrique ou distribue »622.

353. Le concessionnaire ne vend pas au nom et pour le compte du concédant,


mais achète lui-même les produits qu’il revend pour son propre compte623: il rejoint
par cette qualification le commerçant au sens du deuxième alinéa qui entreprend pour
son propre compte de vendre ce qu’il a acheté. Donc les deux agissent pour leur

619
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 55.
620
M. MAHMASSANI, op.cit., p. 54 et 55.
621
Ibid.
622
Proposition de loi n° 529, AN, seconde session ordinaire 1977-1978 du 1er juill. 1978 : cité par
Ph. BECQUE, op. cit., p. 6.
623
F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 98.
-183-

propre compte en tant que commerçants revendeurs624. Par conséquent, nous pouvons
expliciter les trois caractéristiques suivantes du contrat de concession exclusive :

354. 1) C’est un contrat impliquant une activité d’achat pour revendre, qui
apparaît ainsi comme l’acte type de distribution625: le concessionnaire agit en son
propre nom et pour son compte personnel en achetant les produits du fournisseur qu'il
revend à sa clientèle. Cette activité commerciale va se dérouler dans le cadre d'un
réseau de distribution en liant un fabriquant ou concédant, au concessionnaire,
commerçant indépendant revendeur qui va acheter les biens du fabriquant pour les
revendre626 : Même solution qu’en droit libanais concernant le distributeur exclusif au
sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 ; celui-ci a la
qualité d’un commerçant agissant pour son propre compte en tant que revendeur.
Ajoutons à cela que le concessionnaire détient donc la propriété des biens qu’il vend
en son nom et pour son propre compte ce qui serait exclu pour l’agent commercial.
C’est en fait un opérateur de commerce bien éloigné de l’agent commercial. Il est un
élément du circuit de distribution627.

355. 2) L’existence d’une exclusivité de fourniture, également appelée


exclusivité territoriale628, reposée sur le concédant. Celui-ci doit approvisionner

624
C. CHAMPEAU, La concession commerciale, RTD com., 1963, p. 451.
625
M. PEDAMON, et H. KENFACK, Droit commercial, op. cit., n° 55 : « les activités de la
distribution…sont des activités commerciales par excellence ». Le commerce en France, 2007-2008,
INSEE références, p. 8 : Le secteur du commerce regroupe le entreprises dont l’activité principale est
l’achat pour la revente en l’état.
626
Le concessionnaire est un commerçant au titre de l’art. L.110-1 du code de commerce qui range
dans les actes de commerce l’achat pour revendre.
627
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 22.
628
La notion d'exclusivité territoriale selon le règlement d'exemption n° 4087/88 du 30 nov. 1988
permet au franchiseur d'accorder une exclusivité territoriale au franchisé en renonçant :
- à exploiter lui-même le concept sur le territoire concédé,
- à fournir les produits objet de la franchise à des utilisateurs finals ou à des revendeurs,
- à concéder une franchise à d'autres distributeurs que le franchisé.
Le règlement étend l'application de l'exemption à la franchise principale en autorisant « l'obligation
pour le franchisé de n'exploiter la franchise qu'à partir des locaux visés au contrat », ainsi que «
l'obligation pour le franchisé de s'abstenir de rechercher des clients hors du territoire visé au contrat
pour les produits ou services qui font l'objet de la franchise ». Ce texte exclut toutefois la protection
territoriale absolue puisque l'exemption ne s'applique pas aux contrats qui comprennent une obligation
-184-

exclusivement le concessionnaire avec ses produits dans le secteur géographique qui a


été attribué au revendeur629. Il appartient au fournisseur de faire respecter l'exclusivité
qu'il a concédée630. Le secteur géographique du vendeur doit être défini précisément
dans le contrat de concession. Il s’agit d’une zone d’exclusivité territoriale, les
concurrents ne peuvent pas intervenir sur le territoire des autres membres du
réseau631. Cependant cette interdiction doit être modérée car elle ne peut faire obstacle
au droit de la concurrence.

356. L’exclusivité de clientèle632 se limite aux différents revendeurs, avec


l’interdiction de faire de la prospection hors du secteur. Mais, ils conservent la
possibilité d’accepter les commandes émanant de clients hors secteur qui se
présentent spontanément. En particulier, le contrat de concession exclusive se
caractérise par cette exclusivité territoriale, qui en constitue l’élément essentiel633. En
ce sens, la Cour de cassation a prévu que la présence d'une clause d'exclusivité
territoriale suffit à caractériser une relation de concession exclusive634. Aussi, dans un
arrêt précèdent, elle a prévu qu’à défaut d'exclusivité territoriale, le contrat de

pour le franchisé de ne pas fournir à l'intérieur du Marché commun les produits ou services faisant
l'objet d'accord de franchise des utilisateurs finals en fonction de leur résidence.
629
Conseil de la concurrence 2 juill. 1998 relatif au secret des affaires disponible sur le site Internet
du Conseil de la concurrence (www.conseil-concurrence.fr).
630
Cass. com., 20 fév. 2007, n° de pourvoi : 04-17752, D., 2007.
631
Cass. com., 26 janv. 1999, arrêt, n° 251, Rejet, Pourvoi n° 96-22. 457.
632
Il a été jugé que la clause dite «de clientèle» qui interdit au salarié, en cas de cessation du contrat
de travail, de contracter directement ou indirectement avec des clients de l'ancien employeur, même sur
sollicitation de leur part, c'est-à-dire sans manquement à son obligation de loyauté, est une clause de
non-concurrence, illicite en ce qu'elle est dépourvue de contrepartie financière et non limitée dans le
temps et l'espace : Cass. soc., 27 oct. 2009, Bull. civ., V, n° 232 ; CA Versailles, Ch. 05, n° 10/04122,
D., 02 fév. 2012.
633
Il est enseigné que l’exclusivité est de l’essence de la concession : C. CHAMPAUD, La
concession commerciale, RTD com., 1963, p. 451, à l’inverse, par exemple, de la franchise : Ph. LE
TOURNEAU, Les contrats de franchisage, 2e éd., Litec, 2007, n° 17 et 430 ; L’affirmation est à
nuancer puisque nous le pouvons concevoir une concession sans exclusivité : Ph. LE TOURNEAU,
Concessions. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses concessions. Fondement
et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1010, 2006, n° 38 et s. et
noter que la répartition territoriale est usuelle en matière de franchise (sans en être une condition de
validité : Cass. com., 9 nov. 1993, Bull. civ., IV, n°403). Finalement, l’idée a une portée toute relative :
les juges doivent toujours interroger la volonté réelle des parties (Cass. com.. 9 fév. 1976, JCP, 1977,
II, n°18598, obs. J. HEMARD).
634
Cass. com., 22 janv. 1991, JCP E 1991, II, 201, note L. LEVENEUR.
-185-

concession devra être disqualifié635. Or, il s'agit là d'une condition de validité et d'un
critère d'existence du contrat de concession636, et nous la rencontrons fréquemment
dans les contrats de franchisage637 ou les contrats d’agence commerciale638.

357. Dans le réseau de distribution exclusive639, le distributeur agréé bénéficie


d'un monopole640 de commercialisation sur un territoire déterminé641. Le réseau de
distribution organise ainsi une répartition géographique de la clientèle, dans la mesure
où chaque distributeur a la garantie d'être le seul revendeur du réseau à
commercialiser les produits, objets de l'accord au sein de la zone contractuellement
définie (ou auprès d'une clientèle donnée)642: Solution presque semblable à celle
adoptée en droit libanais où la délégation de vente exclusive, requiert le vendeur d’un
côté et le distributeur agréé de l’autre, pour liquider des produits précis dans une
région indiquée, avec une obligation exclusive bilatérale entre les deux parties.

358. Ainsi, il est bien requis que l’obligation imposée sur chacune des deux
parties, est réciproque643 et restrictive pour les deux ensembles, de façon qu’elle rende
impossible au vendeur de vendre les produits à quelqu’un d’autre que le distributeur
agréé. En d’autres termes, l'exclusivité territoriale oblige le fournisseur à ne pas livrer
les produits, dans le territoire concédé, à des revendeurs autres que le distributeur

635
Pour un exemple de disqualification en contrat d'agréation, v. Cass. com., 9 févr. 1976, JCP G
1977, II, 18598, note J. HEMARD : cité par Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et
l’exclusivité territoriale, th., Montpellier, 2010, p. 14.
636
D. LEGEAIS, Concession exclusive, J.-Cl. Comm. Fasc. 307, nov. 2001.
637
Il est, cependant, nécessaire de démontrer que les parties ont convenu d’une telle clause,
nullement nécessaire en la matière: Cass. com., 19 nov. 2002, cah, dr. ent. 2003/3, p. 23 obs. D.
MAINGUY.
638
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 419 et s.
639
V. Supra n° 342 où la concession exclusive est nommée distribution exclusive par le droit
communautaire.
640
« Le monopole du concessionnaire est restreint à une aire géographique déterminée, appelée
zone, territoire ou secteur de concession. Cette aire peut recouvrir un continent, un pays, une région,
un département, une ville, un quartier » : C. CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD com.,
1963, n° 11.
641
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 633.
642
Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et l’exclusivité territoriale, th., Montpellier,
2010, p. 15.
643
Ce que nous traiterons postérieurement.
-186-

exclusif644. Ainsi, l’obligation d’exclusivité impose à ce dernier de vendre les produits


sans possibilité de liquider des produits similaires appartenant aux autres sociétés645.

359. Va dans le même sens, l’avis de M. BECQUE dans sa thèse sur le contrat
de concession exclusive en droit interne646 où il a considéré que, si lors d’un contrat
de distribution, l’exclusivité est réciproque, il s’agit alors d’un contrat de concession
exclusive647 comportant une double exclusivité bilatérale avec délimitation de zone
d’exclusivité648. Mais, dans une version allégée, l’exclusivité territoriale peut n’être
qu’une « exclusivité d’enseigne »649 où le débiteur s’engage seulement à ne pas ouvrir
ou laisser ouvrir un point de vente dans le territoire désigné sans autre restriction à sa
liberté commerciale. En matière d’exclusivité territoriale de commercialisation, on
parle ainsi de « protection territoriale absolue »650 lorsque le contrat accorde au
créancier de l’exclusivité un monopole complet sur le territoire octroyé651.

360. 3) L’existence d’une exclusivité d’approvisionnement incombée au


concessionnaire652. Il s’engage à n’acheter certains produits qu’à un seul fournisseur,
le concédant. De ce fait, il ne peut pas vendre des produits similaires au sein de son
commerce : Idée semblable à celle adoptée par le législateur libanais qui avait
l’intention dans le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, de

644
D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 87.
645
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 677, 17 mai 1973, Rev. al Adl, 1973, p. 400.
646
Ph. BECQUE, op. cit.
647
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 26 et 27.
648
R. PLAISANT, op. cit. n° 17, p. 13 ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com.,
1963, p. 461, n° 13.
649
Dans le même sens, il y a aussi l’ «exclusivité d’implantation » : Cass. com., 14 mars 2006, D.,
2006, p. 1901, note H. KENFACK ; Comm. n° 99, p. 37, obs. H. LECUYER, JCP, 2006, I, 153, obs.,
M. GHAGNY.
650
Le glossaire des termes employés dans le domaine de la politique de concurrence de l’Union
européenne édité par la Commission définit la protection territoriale absolue comme « une pratique
exercée par des producteurs ou des fournisseurs concernant la revente de leurs produits et entraînant un
cloisonnement des marchés ou des territoires ».
651
Le respect des règles de concurrence conduit les parties à prévoir une clause plus douce,
engageant seulement le débiteur à interdire les ventes dites « actives » dans le territoire : il est alors
d’usage de parler d’exclusivité « renforcée ».
652
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n°648 : « L’exclusivité d’achat
était normalement une condition de validité de la concession en droit interne à l’époque où le refus de
la vente était pénalement condamné ».
-187-

protéger le commerçant ayant la qualité de représentant ou de distributeur unique à


titre exclusif, restreint par la condition d’exclusivité réciproque qui lui impose la
limitation de son activité à la seule promotion des marchandises du représenté, sans
autres marchandises similaires et concurrentes653. Ce qui était adopté comme solution
par MM. les professeurs FABIA et SAFA dans leur commentaire sur le décret-loi N.
34/67 : « Les auteurs du présent commentaire estiment en effet, que l’esprit de la loi
fut de sauvegarder la situation de ceux qui ont fourni des services permanents à
l’entreprise représentée avec exclusivité réciproque »654.

361. Le concédant acquiert une garantie de vente de sa marchandise et, le


concessionnaire sur l’approvisionnement des marchandises655. L'exclusivité
d'approvisionnement est typique des contrats de distribution d’essence ou des contrats
des fabricants de bière656 au Nord et à L’Est de la France avec les débits de boisson.
Une Cour d'appel a ainsi énoncé que « si l'exclusivité de revente au profit du
concessionnaire constitue un élément caractérisant la convention de concession,
l'exclusivité d'approvisionnement n'en est pas un et il est loisible au concessionnaire,
sauf disposition contraire de son contrat, de conserver sa liberté
d'approvisionnement »657.

362. En effet, le concessionnaire supporte une subordination juridique quant à la


politique de vente de ses produits souvent rattachés à la notoriété de la marque du
concédant. Il est également astreint à une exclusivité d'approvisionnement

653
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 81.
654
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
655
LPA, n° 237 du 28/11/2000, p. 22-30.
656
Du fait de son mode ancien de fabrication par fermentation basse exigeant une surveillance
constante en cave par un ouvrier du brasseur, qui devenait ensuite son distributeur exclusif en
contrepartie d’une aide pécuniaire : Sur l’origine de la clause d’exclusivité dans les contrats de bière,
Cf. note J. HEMARD, Traité théorique et pratique de droit commercial, t. 1, Les contrats
commerciaux, Sirey, 1953, p. 67. Différents travaux doctrinaux y ont été consacrés, P.
FALCIMAIGNE, Les conventions de fourniture exclusive en brasserie de la Région du nord de la
France, th., Paris, 1944 ; H. FORTIER, Conditions de validité de la clause d’exclusivité
d’approvisionnement imposé par les brasseurs aux débitants, th. Nancy, 1933 ; E. DEMONTES,
Clauses d’exclusivité d’approvisionnement, Rev. crit. 1932, p. 10 et s. ; J. MARCHAND, Des rapports
existants dans le Nord de la France entre brasseurs et débitants, th., Lille, 1930.
657
CA Aix-en-Provence, 8 juin 2000 : Juris-Data n° 2000-124286.
-188-

contractuellement délimitée qu’il tient de son concédant, et, en contrepartie, il


bénéficie d'un monopole de revente sur ce territoire, ce qui pourrait le rapprocher de
certains agents exclusifs. On parle de « faisceau d'obligations réciproques de faire et
de ne pas faire qui permet d'assurer sa subordination économique ». Effectivement, il
s'agit d'un contrat conclu « intuitu personae », ce qui sous-entend un devoir de
loyauté, d'honnêteté et de sincérité à la charge des deux parties, dont l'intérêt commun
est le développement d'une clientèle, et par conséquent, du chiffre d'affaire658.

363. Ainsi, il en résulte à la charge du distributeur (concessionnaire) un


engagement d’exclusivité d’approvisionnement et de revente au profit du fournisseur
et à la charge du fournisseur (concédant) un engagement d’exclusivité de fourniture
au profit du distributeur659: c’est dire une exclusivité réciproque, cas de l’exclusivité
du représentant commercial au sens du deuxième alinéa de l’article premier du
décret-loi N. 34/67660, qui agit en vertu d’un contrat lui conférant la qualité de
distributeur exclusif.

364. En effet, nous pouvons en déduire que si dans le contrat de concession, le


concessionnaire bénéficie d’une clause d’exclusivité nécessaire à la naissance du
contrat, il mérite la protection des dispositions du décret-loi N. 34/67 au sens du
deuxième alinéa de son article premier, en tant que commerçant, agissant pour son
propre compte par la vente de ce qu’il a acheté661.

658
M. GRANIER, Le contrat de concession exclusive (Hermès), Montpellier I - Master I, Droit des
affaires, p. 68.
659
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 663.
660
V. infra n° 418 et s.
661
Le commerçant au sens du deuxième alinéa du décret-loi n° 34/67 vend ce qu’il achète : cet acte
se réalise par l’achat tout d’abord, pour la revente après qui sera la même notion de celle du
commissionnaire qui achète les produits qu’il revend pour son propre compte.
-189-

b- Avec la quasi-exclusivité

365. Il n’est pas rare qu’une clause mette à la charge d’une des parties une
obligation d’approvisionnement exclusif662 limitée à un pourcentage déterminé de ses
besoins en produits ou services contractuels. Elle se rencontre dans les contrats-cadres
d’approvisionnement, lorsque l’acheteur promet de n’acheter qu’auprès du
fournisseur ou de la personne qu’il désigne. Dès lors que le débiteur conserve une
partie plus ou moins importante de sa liberté d’approvisionnement, peut-on encore
parler d’exclusivité ? Cela pose le problème de la quasi-exclusivité663.

366. M. ERESEO a considéré dans sa thèse sur l’exclusivité contractuelle que


la notion de quasi-exclusivité n’a fait l’objet à ce jour d’aucune étude d’importance en
doctrine, ce qui révèle l’embarras qu’elle suscite664. Les travaux les plus récents et les
plus approfondis consacrés à la clause d’exclusivité ne font pas exception à ce constat.
Ainsi Mme LEBRETTON consacre un paragraphe à la quasi-exclusivité à l’occasion
de l’examen de la loi dite « Doubin » mais la notion ne fait pas l’objet d’une étude
d’ensemble665. De son côté, M. BOSCO, exclut la quasi-exclusivité de son domaine
d’investigation en ces termes : « Les contrats qui obligent le contractant à réserver
seulement une partie de son activité contractuelle à son partenaire ne sont… pas des
contrats exclusifs…Tout au plus peut-on dire, à l’instar du législateur qu’il y a alors
quasi-exclusivité »666.

367. La notion de quasi-exclusivité a été envisagée pour la première fois dans le


droit des relations des dépendances, par la loi du 21 mars 1941, devenue l’article L.

662
Sur cette clause, connue aussi sous « clause d’exclusivité d’approvisionnement » ou encore «
d’exclusivité d’achats » : note Ph. LE TOURNEAU, Exclusivités unilatérales, J.-Cl., Contrats-
Distribution, fasc. 1000, 8e éd. 2010. Ce type de clauses connaît de nombreuses déclinaisons, par
exemple, lorsque l’acheteur s’engage envers son contractant à acquérir les produits auprès d’un tiers
désigné. La promesse d’exclusivité se combine alors tout simplement avec une stipulation pour autrui :
Cass. com., 6 fév. 2007, n° 04-11718, inéd. ; de même, l’obligation d’exclusivité peut obliger non pas
nécessairement à revendre des produits acquis du fournisseur mais simplement des produits frappés de
sa marque (clause dite de mono-marquisme).
663
N. ERESEO, L’exclusivité contractuelle, préf. D. FERRIER, Litec, 2008, p. 120.
664
Ibid, n° 192.
665
S. LEBRETTON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, préf. M.
PEDAMON, Litec 2002.
666
D. BOSCO, Le contrat exclusif, th. Aix-Marseille, 2005, n° 7.
-190-

781-1, 2 du Code du travail puis L. 7321-2, qui s’applique aux personnes « dont la
profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui
leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise,
lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par
cette entreprise et aux conditions et prix imposés par ladite entreprise » . Partant de
cette définition, et afin de distinguer avec le représentant commercial au sens du
deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, ayant la qualité de
distributeur exclusif unique, nous pouvons dire ce qui suit :

368. Ce texte offre en effet le bénéfice du droit social plus précisément aux
personnes physiques667 dont la profession consiste « à vendre des marchandises de
toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une
seule entreprise ».

369. b.1) A première vue, cette spécification pour les personnes physiques ne
trouve pas d’homologue en droit libanais puisque le représentant commercial peut
être une personne physique ou morale668 ainsi que le précise le deuxième alinéa de
l’article premier : le distributeur a la qualité de commerçant que celui soit personne
physique ou morale.

370. b.2) Ainsi, le premier diffuseur pourrait être le producteur lorsqu’il vend
lui-même directement ses produits mais, le plus souvent, il fait appel à des opérateurs
spécialisés qui vont le représenter. Il en est ainsi des diffuseurs liés par un contrat de
travail669, ou par un contrat de mandat, par lequel le mandataire agit au nom et pour le
compte du mandant et spécialement dans cette catégorie, le mandataire exclusif pour
la vente. Et le cas échéant, nous trouvons ici une grande divergence entre le droit
libanais et français ; pour ce dernier, le mandataire exclusif est d’une part soumis au

667
CA Paris, 18 janv. 2000, D., 2001, somm., p. 297, obs. D. FERRIER : application possible au
gérant de la société « écran » ; Cass. soc., 22 mars 2006, D. 2007, pan° 1915 obs. D. FERRIER.
668
Art. 2 du décret-loi n° 34/67.
669
Des requalifications sont d’ailleurs possibles par application de l’article. L. 781-1 C. trav. cf. not.
: Cass. com., 21 oct. 1970, SA Prénatal c/ Haberkorn: Bull. civ., IV, p. 243 et s., n° 278. Dans cette
affaire, un arrêt de Cour d’appel avait déclaré compétent le conseil des prud’hommes, au motif que le
distributeur qui avait exclusivité de la vente dans un secteur déterminé, n’était qu’un agent de
distribution au service de Prénatal ; v. Cass. soc., 25 fév. 1998, SARL France acheminement c/ Robert:
D. 1998, Somm. Comm., p. 339, obs. D. FERRIER.
-191-

droit du travail670, lorsqu’il vend de manière exclusive ou quasi exclusive les produits
qu’il reçoit d’un mandant et, d’autre part, il est soumis aux règles gouvernant le
contrat de mandat lorsqu’il est consignataire671 parfois qualifié de dépositaire672 ; En
droit libanais il n’est pas soumis au droit de travail, mais bénéficie des dispositions du
droit commercial et notamment son décret-loi N. 34/67 qui lui donne une protection
spéciale après son assimilation à un représentant commercial au sens dudit décret.

371. b.3) L’activité de diffuseur doit être professionnelle673, et se rapproche par


cette qualité de l’état du distributeur exclusif qui est un commerçant agissant d’une
manière professionnelle au sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi
N. 34/67.

372. b.4) L’activité doit consister dans la vente des produits fournis
exclusivement ou presque exclusivement par le mandant lui-même ou bien par des
fournisseurs agréés par ce dernier674 ou par une entreprise seule. Dans ce dernier cas,
la qualité de précision « unique » pour l’entreprise et l’exclusivité des produis fournis
rejoignent l’esprit du deuxième alinéa de l’article premier de décret-loi N. 34/67,
imposant la qualité de distributeur exclusif unique.

670
D’après la loi du 21 mars 1941 codifiée à l’article L. 7321-2 du code du travail prévoit
l’application du droit de travail aux personnes physiques « dont la profession consiste essentiellement à
vendre des marchandises ou denrées de toute nature…qui leur sont fournies exclusivement ou presque
exclusivement par une seule entreprise, industrielle ou commerciale…lorsque ces personnes exercent
leur profession dans un local fourni ou agrée par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par
ladite entreprise » ; Cass. soc., 22 mars 2006, D., 2007, pan° 1915, obs. D. FERRIER.
671
Y compris, lorsque les conditions sont remplis, les dispositions spéciales des articles L. 134-1 et
s. C. com. concernant les agences commerciaux, et les cas échéant toute autre convention corrélée au
mandat: franchise par exemple, Cass. soc., 25 fév. 1998, Lettre distrib. 1998-4 : cité par D. FERRIER,
Droit de la distribution, op. cit. ; Cass. soc., 1er mars 1973, JCP, CL 1975, 11754, note H.
MEYZONNADE ; L’activité de mandataire pouvant être couplée avec une seconde activité d’acheteur-
revendeur : Cass. com., 21 oct. 1970, Bull. civ., IV, n° 278.
672
La qualification de dépositaire utilisée par la pratique est discutable, dès lors que le contrat de
dépôt a pour objet la conservation de la chose en vue de la rendre au déposant (C. civ, art. 1915) et non
de la vendre.
673
C. trav. art. L.7321-2, modifié par la Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, art. 55 : « dont la
profession consiste…».
674
Cass. soc., 13 janv. 1972, JCP 1972, II, 17240 bis, La jurisprudence assimile à cette hypothèse
celle où les produits, autres que ceux du mandant, sont définis par ce dernier, Cass. soc., 8 juill. 1977,
Bull. civ., V, p. 383.
-192-

373. En outre, la jurisprudence considère que les produits doivent être


commercialisés à des prix fixés par le mandant, tout en exprimant la dépendance
économique675 du diffuseur privé de toute politique autonome du prix676. Il en résulte
que le diffuseur ne peut être que mandataire ou commissionnaire à la vente puisque
l’art. L. 442-5 du Code de commerce réprime le fait pour un fournisseur d’imposer à
un distributeur un prix de revente677. Et par conséquent, lorsque le mandataire
intervient comme gérant de succursale, on le qualifie, parfois, de « gérant salarié »
pour le distinguer du « gérant non salarié » visé par l’article L. 7322-1 du Code du
travail678, mais le gérant est stricto sensu « non salarié » dès lors qu’il est lié au
fournisseur non par un contrat de travail mais par un contrat de mandat679. Ainsi, la
Cour d’appel de Paris a estimé que ne bénéficiait pas des dispositions de l’article L.
7321-2 du Code du travail, le diffuseur qui offrait à la clientèle des prestations des
services lui assurant un profit supérieur au tiers de ses profits globaux680.

374. Cette dépendance économique découle des prescriptions de l’article ci-


dessus, d’où résulte l’obligation aux personnes concernées d’« exercer leur profession
dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par
cette entreprise », et de commercialiser selon les instructions du mandant, les produits
à détenir, les services à fournir aux clients, les horaires d’ouverture du point de
vente681 : cet état trouve son similaire dans le droit libanais concernant le distributeur
exclusif unique dans un cas de toute importance qui éclaire notre pensée lorsque nous
parlons de distribution exclusive, celui de la « station pétrolière » : le contrat qui lie
les deux parties constitue-t-il un contrat de représentation commerciale ?

675
Cass. soc., 18 nov. 1981, D., 1983, p.243, note Y. SAINT-JOURS, référence à la subordination
économique.
676
Cass. soc., 3 fév. 1988, Bull. civ., V, n° 84.
677
« Est puni…le fait par toute personne d’imposer, directement ou indirectement, un caractère
minimal au prix de revente d’un produit ou d’un bien… ou à une marge commerciale » ; sur la sévérité
dont font preuve les juges dans l’application de ce texte.
678
D. BIKOVA, Les spécificités en matière de représentation commerciale du droit bulgare par
rapport au droit français, th., Montpellier, 2009, n° 96.
679
Y. CHALARON, Gérant des succursales, Rép. trav., 1997, n° 59 ; J.-F. CESARO, Gérants
mandataires de succursale, J.-Cl. Contrats-distribution, 2003, Fasc. 3560.
680
CA Paris, 14 juin 1982, JCP, G 1983, II, 19924, concl. C. Connen.
681
Cass. soc., 12 janv. 1983, Bull. civ, V, n° 14.
-193-

Le cas de la « station pétrolière » : Le tribunal de première instance de Beyrouth


en sa chambre commerciale, dans une célèbre affaire concernant la compagnie
« Mobil Oil », a soulevé les problèmes découlant de cette question. Voici quels sont
les motifs de la décision :

375. «« Vu que l’article premier du décret-loi N. 34/67, mentionne en son


premier aliéna que « le représentant commercial est le mandataire qui, par sa
profession habituelle et indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de
services, entreprend des négociations pour conclure des opérations, de vente,
d’achat, de location ou de prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces
activités au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur compte » ; le statut
du demandeur ne s’applique pas sur ces dispositions, car il n’est un mandataire
délégué ou un intermédiaire entre la compagnie défenderesse et ses clients pour
accomplir les opérations, de vente, d’achat, de location ou de prestation de services.

376. Ainsi le deuxième alinéa du l’article ci-dessus, dispose qu’il « est aussi
considéré comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son
propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la
qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique », où l’élément essentiel
dans cette phase, est, pour le commerçant, de se voir reconnue la qualité de
représentant ou distributeur unique à titre exclusif. Et comme il est justifié, le
demandeur n’avait pas la qualité de représentant ou distributeur exclusif pour les
produits de la défenderesse dans la ville de Beyrouth, puisque cette dernière avait
passée contrat avec autres personnes pour vendre et distribuer ses produits. De plus, il
est mentionné que dans les contrats conclus avec le demandeur et celui passé avec les
autres personnes avec lesquels elle s’est engagée, qu’elle a droit de vendre de façon
directe ou indirecte, tous ses produits dans la zone citée, sans que le demandeur ou les
personnes nommées aient le droit, de présenter une opposition en ce sens ou même de
demander n’importe quelle indemnité.

377. Les conditions du deuxième alinéa de l’article premier mentionné seront


inapplicables au demandeur, surtout qu’il n’a pas la qualité de représentant ou
-194-

distributeur exclusif pour les produits de la compagnie défenderesse. Dans le même


sens s’exprime le commentaire du décret-loi N. 34 du 5 août 1967 par MM. les
professeurs FABIA et SAFA : « L’esprit de la loi fut de sauvegarder la situation de
ceux qui ont fourni des services permanents à l’entreprise représentée avec
exclusivité réciproque. La situation sera souvent facilitée par la qualification d’agent,
seul agent, donnée au représentant dans le contrat avec la firme représentée, par sa
représentation aux clients en cette qualité, au vu et au su de la firme.

On ne doit pas admettre au bénéfice de la loi le commissionnaire qui n’aurait fait


pour son commettant qu’une seule opération, ou même plusieurs, mais séparées par
un intervalle prolongé au cours duquel le représenté, qui n’avait promis aucune
exclusivité, eut recours à d’autres représentants, ou bien opéra lui-même directement.

On concède, par contre, ce bénéfice au commissionnaire qui a fourni son


entremise avec une permanence, une exclusivité, constatées durant une période telle
que celles usitées pour les agences commerciales traditionnelles, surtout si ce
commissionnaire a revêtu, à la connaissance du commettant, le titre d’agent ou seul
agent de celui-ci.

On souhaite que la jurisprudence ce fixe sur cette base rationnelle »682.

378. En réalité, suivant la doctrine et la jurisprudence, il est reconnu que


l’accord qui lie le propriétaire de la station pétrolière à une compagnie pétrolière
déterminée, ne constitue pas un contrat de vente et d’achat suivant les droits et
obligations cités ; à la lumière des droits qui appartiennent à chacune des parties
contractantes et les obligations qui leurs incombent, aboutissant à l’attachement de la
personne citée par la compagnie pétrolière, de telle sorte qu’elle obéisse aux
règlements de la compagnie nommée683, outre l’exécution de son travail sous la
marque, les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière.

682
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
683
Prix des ventes et leurs conditions, pourcentage de commission et organisation du loyer : tel la
station pour vente et la distribution de l’essence, huiles, lavages, graissage, et la présentation d’un
service complet pour les clients.
-195-

379. Attendu que cet accord n’obéit pas aux dispositions d’un contrat déterminé
par le législateur et n’entre pas dans le champ d’application des contrats nommés, de
telle sorte qu’il soit un des contrats innommés de l’article 175 C.O.C.684 ;

Attendu que dans le champ des contrats innommés, l’accord passé entre les
contractants forme la charte auxquelles ils obéissent, suivant les dispositions de
l’article 221 C.O.C. ;

Attendu que l’article 12 du contrat, conclu entre les deux parties, dispose que ce
dernier est établi pour une période indéterminée, et qu’il est permis à chacune des
parties de le résilier par l’envoi d’un préavis de trois jours, sous forme de lettre
recommandée, sans nécessité de prouver les causes de résiliation et sans qu’il y ait
droit pour chacune des parties de demander à l’autre n’importe quelle indemnité ;

De ce fait, peu importe les raisons de résiliation de la part de la société


défenderesse, prouvées ou non ; il s’agit de rejeter l’action pour l’indemnité résultant
de la résiliation du contrat, et cela conformément à ce à quoi la défenderesse s’est
engagée par l’article 12 précité entrainant la résiliation du contrat ci-dessous, puisqu’il
n’appartient pas au demandeur de réclamer d’indemnité suite à la résiliation »»685.

Critiquons la solution à laquelle a abouti cette jurisprudence :

380. A première vue, nous déduisons que le tribunal de première instance de


Beyrouth en sa chambre commerciale, a considéré que le contrat de vente et d’achat
des produits pétroliers et leurs dérivés, est incompatible, d’une part avec la
qualification donnée pour le représentant commercial au premier alinéa de l’article
premier du décret-loi N. 34/67, puisque le demandeur (propriétaire de la station
pétrolière) n’est pas un mandataire délégué ou un intermédiaire entre la compagnie
défenderesse et ses clients pour conclure les opérations, de vente, d’achat, de location
ou de prestation de services ; et d’autre part, avec les dispositions du deuxième alinéa

684
TI Seine, 21 et 28 mars 1966, D. 1966, Somm. S.J., p. 91, n° 14690 ; R. RODIERE et C.
CHAMPAUD, S.J. 1966, 1ère partie, n° 1988 ; D. FERRIER, D. 1966, Chron., p. 55.
685
TI Beyrouth, décision n° 237/ 275 du 17 avr. 1969 contre « Mobil Oil », Rec. Hatem, vol. 113, p.
13 à 16.
-196-

du même article, puisque le demandeur n’avait pas la qualité de représentant ou


distributeur exclusif pour les produits de la défenderesse.

381. Il résulte des faits de l’arrêt, que le demandeur confère à son contrat avec la
compagnie pétrolière « Mobil Oil » la qualité de représentation commerciale, tandis
que la défenderesse soutient qu’il y a formation d’un contrat de vente et d’achat
d’essence et d’huiles. Devant cette divergence de qualification, le tribunal de première
instance de Beyrouth en sa chambre commerciale, a considéré qu’il lui appartient de
donner au contrat sa vraie qualification au vu des articles et des engagements des
parties dans ce but précis.

382. En réalité, la qualification de la relation contractuelle est objective et


appartient aux seuls juges de fond686. A ce titre, pour que le juge puisse octroyer la
bonne qualification de cet acte, il tend à interpréter les expressions mentionnées dans
ce contrat, ainsi que la prise en considération de la volonté des parties lors de la
conclusion de ce dernier687. Cependant, pour que le juge puisse accomplir cette
mission, il faut qu’il recourt aux faits matériels, objets du contrat688. Voyons alors la
volonté majeure des parties lors de la conclusion du contrat et la forme juridique de ce
dernier.

686
Art. 370 C.P.C. lib. ; E. ABOU EID, Les procédures civiles entre le texte, la jurisprudence et la
doctrine, t. 5, l’explication de l’art 370, 2005 ; CA Versailles, Ch. 03, 21 déc. 2006, n° 05/06750 :
« Cependant, malgré cette qualification de contrat de sous-traitance, il appartient au juge de
rechercher la nature véritable de la convention passée entre les parties et de lui restituer le cas
échéant sa véritable qualification ».
687
Art. 366 C.O.C. : « il appartient au juge dans l’explication des actes juridiques, de recourir sur
l’intention du personne engagée (si l’obligation est unilatéral) ou bien sur la volonté des parties (s’il y
avait contrat), et non de rester river sur le sens littéral du texte» ; V. dans le même sens : A. RIEG, Le
rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 630 : « Les conventions doivent être
exécutées de bonne foi, cela signifie conformément à l’intention des parties et au but qu’elles se sont
proposés en contractant » ; Cass. soc., sans renvoi, 16 juin 2009, n° 08-42.261, Bull. 2009, n°
148 : « Il appartient au juge du fond d'interpréter le contrat en vue de lui donner son exacte
qualification, la volonté des parties, pas plus qu'une circulaire ministérielle ne pouvant faire échec à
l'application du statut protecteur attaché au contrat de travail » ; V. dans le même sens : CA Toulouse,
Ch. 04, Sect. 01, Ch. soc., 19 mars 2008, n° 07/00501 ; Cass., Ass. plén., Rejet, 19 déc. 2003, n° 01-
10.670, Bull. 2003, A. P. n° 7, p. 19 : « …le critère de la qualification étant la volonté des parties… ».
688
V. dans le même sens : A. RIEG, op. cit., p. 358 : « L’acte juridique, étant un substratum de
volonté, il est logique d’interpréter un contrat en recherchant la volonté qui a animé les contractants.
L’acte juridique étant le produit d’une ou plusieurs volontés, c’est nécessairement d’après l’intention
profonde des auteurs qu’il faut en apprécier les conséquences ».
-197-

383. Le tribunal de première instance de Beyrouth, a déduit que la relation


contractuelle entre les deux parties (le propriétaire de la station et la compagnie
« Mobil Oil ») dans l’arrêt sujet de ce débat, entre dans la catégorie des contrats
innommés. Mais en revenant aux dispositions de l’art. 175 C.O.C., nous trouvons
que : « Les contrats peuvent être nommés selon que la loi les a désigné une forme et
une nomination précises. Et les règles prévus dans la première partie de ce Code,
s’appliquent sur les contrats nommés et innommés. Tandis que les règles citées dans
la deuxième partie, ne s’appliquent pas sur les contrats innommés sauf en tant que
mesure, et suivant leur compatibilité entre eux et avec les contrats nommés
désignés ».

Suivant ces dispositions, pouvons-nous dire que le Code a défini l’acte juridique
qui lie le propriétaire de la station pétrolière à la compagnie pétrolière ?

384. Nous avons déjà mentionné que, d’une part, la question de la qualification
de la relation contractuelle entre les parties de cet acte, nécessite le recours à la
volonté et l’intention des parties concrétisées dans les articles du contrat qui
détermine cette relation ; et d’autre part, la recherche de l’intention des contractants se
réalise lors de la rencontre de leurs volontés, c’est dire lors de la conclusion du
contrat. Ainsi, suivant l’article 366 C.O.C., le juge se renseigne sur cette intention
suivant la volonté commune des parties et non à partir du sens littéral du texte.

385. A ce titre, revenant à la décision sujet de ce débat, il est bien prouvé que le
tribunal n’a jamais parlé de l’intention des parties et de leurs volontés lors de la
conclusion du contrat, puisqu’il s’est basé sur le sens littéral du texte, c'est dire sur le
sens littéral des articles du contrat en énonçant que : « à la lumière des droits qui
appartiennent à chacune des parties contractantes et les obligations qui leurs
incombent, aboutissant à l’union de la personne citée par la compagnie pétrolière,
de façon qu’elle obéisse aux règlements de la compagnie nommée ». En d’autres
termes, il n’a pas appliqué les dispositions de l’art. 366 C.O.C. (intention et volonté
des contractants) et l’a violé une deuxième fois lorsqu’il s’est contenté du sens littéral
des articles du contrat, (en correspondance avec l’imposition de l’article 366 sur
l’écartement du sens littéral du texte), car l’attachement du propriétaire de la station
pétrolière à la compagnie pétrolière n’est pas réel puisque l’attachement signifie la
-198-

fusion totale et complète, ce qui n’est pas constaté dans la relation du propriétaire de
la station pétrolière avec la compagnie.

386. Le cas échéant, supposant la réalité de cette fusion, il n’y aurait jamais de
droits et d’obligations pour chacune des deux parties du contrat, et celui-ci devient
alors un contrat d’adhésion689 : toutes ces raisons ont rendu impossible pour le
tribunal la qualification du contrat comme contrat nommé.

387. Nous pensons que la question de l’« union » posée et adoptée par ce
tribunal ne peut être reçue. De même, le fait de dire que le propriétaire de la station
pétrolière « obéit aux règlements de la compagnie nommée (quant aux prix de vente et
de ses conditions, du pourcentage de commission et de l’organisation du loyer690,
outre l’exécution de son travail sous la marque, les couleurs et le nom de la
compagnie pétrolière) », ne constitue pas un motif pour considérer le contrat comme
un contrat innomé, comme l’a retenu le tribunal de première instance de Beyrouth,
mais au contraire, le motif sera la recherche des volontés des parties.

388. Ensuite, puisque le tribunal n’a pas respecté les normes juridiques citées
dans l’article 366 C.O.C., qu’il a opposé les principes d’interprétation des contrats
indiqués, qu’il se met alors en contradiction avec les dispositions juridiques prises en
considération ; il ne peut donc être reconnu ni accepté. Reste à se demander comment
il fallait qualifier ce contrat ?

389. Revenant aux faits de cette affaire, il est clair que le contrat conclu avec le
demandeur et la défenderesse a stipulé des droits et des obligations pour chacun
d’eux, et a donné au demandeur les produits de la compagnie défenderesse pour les
stocker et les vendre aux clients, sous conditions déterminées quant aux prix de vente,
outre la stipulation du montant de la commission sur la vente des produits appartenant
au propriétaire de la station : Solution presque similaire la quasi-exclusivité en droit

689
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 37.
690
Tel la station pour vente et la distribution de l’essence, huiles, lavages, graissage, et la
présentation d’un service complet pour les clients ; outre l’exécution de son travail sous la marque, les
couleurs et le nom de la compagnie pétrolière.
-199-

français qui s’exprime nécessairement par un pourcentage691 figuré par le chiffre


d’affaires692 ou bien par le bénéfice693, qui est un point fort discutable694. La
distribution d’hydrocarbure est la situation la plus fréquente dans le cas de notre
analyse : le pompiste agit au nom et pour le compte ou en son nom mais pour le
compte d’une compagnie pétrolière et se trouve alors rémunéré par des commissions
calculées en pourcentage des ventes effectuées695.

390. Il ressort de ces faits, que le demandeur achète les produits de la société
pétrolière (essences, huiles et graisses) afin de les vendre aux clients et offre les autres

691
La quasi-exclusivité n’a pas été retenue dans des espèces, ni satisfaite, qu’à partir de 66% de la
part exclusive de l’activité : D. FERRIER, Droit de la distribution, 5 éd. Litec, 2009, n° 158, dans un
rapport de deux tiers et pour un taux de 80% : La jurisprudence admet l’approvisionnement quai-
exclusif lorsque le gérant achète 80% des marchandises auprès d’une seule entreprise: Cass. soc., 7
juill. 1977, pourvoi n° 76-40686, Sté Natalys c/ Douville, Bull., n° 4801 ; CA Paris, 5e Ch., B., 2 nov.
1995, Sté Liverson c/ Sté Seris, Juris-Data nº 1995-023668 ; J.-M. MOUSSERON et R. FABRE, La loi
du 21 mars 1941: une loi en expansion? JCP, éd. E, 1978, cah. dr. entr., n° 2, p. 4 et s.: « La
jurisprudence parait établir la quasi-exclusivité autour de 80% » ; S. REGHNAULT, La tentation
d’autoritarisme de la loi DOUBIN, P. Aff. 10 janv., 2003, n° 8, p. 13: « lorsque le chiffre d’affaires
sous exclusivité est supérieur à 70 ou 80 % du chiffre d’affaires globale, le distributeur est en situation
de quasi-exclusivité ».
692
Le chiffre d’affaires peut se définit comme le montant des transactions réalisées par l’entreprise
avec les tiers dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante et apparaît dans la vente,
travaux et prestations de services. La tendance est au gonflement artificiel de la partie de l’activité du
pompiste qui est exercée sous exclusivité (la distribution des hydrocarbures et parfois des lubrifiants)
par l’intégration dans le chiffre d’affaires du distributeur de sommes qui ne sont perçues que pour le
compte de l’Etat et du fournisseur ; les activités exercées hors exclusivité, parfois désignées par
l’expression secteur libre, se trouvant alors sous-estimées : Cass. com., 22 mars 2006, Ste Esso c/
Epoux X, pourvoi n° 05-42.233, Bull, V, n° 122, qui donne en ces termes la liste des activités du
secteur libre d’un pompiste de maque : « mille références de produits boutique (dont les pneus,
batteries, accessoires destines aux véhicules et tous produits à usage domestique, les produits
alimentaires et boissons, la restauration rapide), les prestations de lavage, graissage, pose,
réparations courantes, échanges de pièces et d’accessoires, et les lubrifiants non utilises dans la
station-service ».
693
Le bénéfice est la traduction, au cours d’un exercice comptable, de l’excédent des produits sur
les charges, ce qui a nécessairement pour conséquence d’exclure les sommes perçues pour le compte
d’autrui et l’ensemble des frais engagés dans le cadre de l’activité professionnelle où toute entreprise
que son survie économique y dépend.
694
Ce problème a soulevé un débat devant les tribunaux concernant l’assiette de la quasi-
exclusivité: D’une part, il a été intégré les sommes perçues soit au profit du trésor public ou bien au
profit du fournisseur pour le calcul du chiffres d’affaires. Tandis que d’autre part, il y avait une
division par l’acceptation et le refus du bénéfice réalisée par le distributeur.
695
Ph. DIDIER, A propos du contrat de concession : la station-service, D., 1966, chron. p. 55 : Sur
le cadre contractuel des relations entre pompistes et compagnies pétrolières ; R. RODIERE et C.
CHAMPAUD, A propos des pompistes de marque, les contrats de distribution intégrée et la marge
commerciale du distributeur, JCP, 1966, I, 1988 ; E. SHAEFFER, Le pompiste en station-service
partagé, JCP 1972, I, 2503. Adde: J. GHESTIN et B. DESCHE, La vente, LGDJ, 1990, n° 307.
-200-

services nécessaires comme carburants et lubrifiants aux voitures de ces même


clients696. Ce qui nous conduit à dire que la relation entre les deux parties relève du
concept indiqué par les dispositions du premier alinéa de l’article premier du décret-
loi N. 34 de 5 août 1967 : « Le représentant commercial est le mandataire qui, par sa
profession habituelle et indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de
services, entreprend des négociations pour conclure des opérations, de vente,
d’achat, de location ou de prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces
activités au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur compte ».

391. Ainsi cette qualification et cette situation ne changent pas du fait que la
compagnie pétrolière a stipulé certaines conditions concernant les objets suivants : la
détermination de prix de vente du litre d’essence, ou du kilo d’huile, ou de la
maintenance des voitures, ou de la graisse : Il en est de même en cas de quasi-
exclusivité697 ; Et du fait qu’il est reconnu que le mandant peut stipuler de telles
conditions sans qu’il y ait contradiction avec sa liberté698.

696
Un arrêt a ainsi admis l’existence d’une quasi-exclusivité au motif que « l’activité principale de
la station-service était celle de distribution de carburant, les autres activités (ventes et prestations)
n’étaient exercées le plus souvent qu’à l’occasion de l’exercice de l’activité principale » : CA Amiens,
22 oct. 2003, Piaulet c/ Sté Esso, Juris-Data n° 2003-241404.
697
Cass. soc., 3 fév. 1988, Sté Esso c / CPAM Paris, Bull., v., n° 84 ; Cass. Ch. Réun, 23 juin 1966,
Bull. n° 2 qui relève au sujet d’un contrat de gérance de succursale que « par la convention litigieuse,
(la gérante) s’engageait à assurer la représentation exclusive des articles de la société PRENATAL
ainsi que la gérance de la succursale de BREST, et à se conformer aux prix, tarifs et conditions
imposes par ladite société… et se reconnaissait comptable à l’égard de la société du produit des
ventes et que celle-ci se réservait d’apprécier l’importance des stocks à fournir et d’opérer à tout
moment e contrôle de ces stocks et de la caisse… ; les clauses, suivant lesquelles (la gérante) n’était
placée dans aucun lieu de subordination vis-à-vis de la société et restait maître de son temps et de
l’organisation de son travail, se trouvaient en désaccord avec les autres clauses du contrat, et ne
modifiaient pas l’économie générale de la convention… ; l’arrêt attaqué, qui n’a pas dénaturé la
convention, a déduit, à bon droit, l’existence d’un lien de subordination d’employé à employeur, de
nature à rendre obligatoire l’affiliation de la (gérante) aux assurances sociales ».
698
Arrêt analysé au bout de notre étude : CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil
boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p 89 à 92 ; E.
TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306, p. 467 : « Toutefois, la
règle de l’indépendance du représentant ne nous parait pas faire obstacle à des stipulations qui
réservaient un certain contrôle au représenté, telles que la stipulation imposant au représentant
l’obligation de rendre compte de ses démarches au représenté, de lui fournir des rapports périodiques
sur son activité » ; dans le même sens, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 59 : « … Pour cela, le bénéfice du statut de représentant
commercial ne sera pas refusé au commerçant qui reçoit des directives de la maison représentée, des
documents publicitaires, ou à celui qui doit rendre compte périodiquement, même à intervalles très
courts ».
-201-

392. En vérifiant le contenu de cet alinéa, nous constatons que, d’une part les
conséquences entrevues peuvent concerner plusieurs activités que le représentant
commercial peut effectuer699 et d’autre part, que les stations pétrolières présentent des
multiservices pour leurs clients700.

393. Cependant l’offre de ces services se situe dans l’« objet » désigné par
l’article premier du décret-loi N. 34/67, qui relève du sujet « prestations de services »
parmi les activités effectuées par le représentant commercial701. De même, la
réception d’une commission, le cas échéant, entre dans le concept de la représentation
commerciale, puisque le représentant commercial, qui entreprend les actes désignés
par l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67, les exécutent à travers
le cadre de sa représentation commerciale en touchant par contre une commission702 :
Solution opposée à celle adoptée en cas de quasi-exclusivité où il a été jugé ce qui
suit : « Ayant retenu que les commissions tirées de la vente des carburants ne
représentaient qu’une faible partie des résultats bénéficiaires de la station-service,
dont l’essentiel provenait de l’activité d’une boutique de vente, qui n’était soumise à
aucune exclusivité d’approvisionnement ; elle a pu en déduire que l’activité de la
station-service ne consistait pas à vendre exclusivement ou presque exclusivement des
carburants fournis par le bailleur et, par-là, que les exploitants, qui n’étaient pas

699
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 592 : « Les termes du décret
ouvrent un champ pratiquement illimité à l’activité des agents commerciaux ».
700
CA Montpellier, Ch. 01, D, 19 janv. 2011, n° 10/02131, aff. Totale : « Il était également prévu
que le locataire pouvait exercer l'activité de tous commerces et notamment celui de stations-service, de
distribution de produits pétroliers ou autres sources énergétiques avec prestation de tous services
(installation de lavage, graissage, logements destiné aux gérants, poste d'accès) et vente de tous
articles pouvant satisfaire les besoins des automobilistes ainsi que toutes activités commerciales
annexes ou complémentaires » ; CA Grenoble, Ch. civ., 01, 26 fév. 2008, n° 05/00994 : «…les
opérations de station-service (vidange, graissage) et les opérations d'entretien…, et la fourniture lors
des vidanges des lubrifiants… » ; CA Versailles, Ch. 06, 31 oct. 2006, n° 06/01508 : « …il exerçait
dans la station-service d’autres activités que la distribution de carburants… » ; Cass com., Cassation
partielle sans renvoi, 7 janv. 2004, n° 01-10.429 : « Attendu, d'une part, qu'ayant estimé que l'analyse
du préjudice ne se limite pas à la vente du carburant mais comprend l'exploitation de la station-service
dans toutes ses activités… » ; CA Lyon, 3 avr. 2003, n° 2001/06093.
701
E. TYAN, op. cit., p. 467 et 468: « Objet de la représentation – Les actes, objet de l’entremise
du représentant, peuvent être, comme le dit l’article premier du décret-loi n° 34/67, des opérations de
vente, achat, location, prestation de service…».
702
E. EID, Les contrats commerciaux et les opérations de banque, 1968, p. 180 et 191, art. 65.
-202-

placés sous la dépendance économique du fournisseur de carburants, ne relevaient


pas de l’article L. 7321-2 a) du Code du travail »703.

394. Revenant aux faits de la décision sujet de notre analyse et de notre


discussion : il est remarquable que le tribunal ait considéré que « … l’exercice du
travail sous la marque, les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière, ne constitue
pas un contrat de vente et d’achat… » : Ce qui est incompatible avec les dispositions
de l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67. En effet si le
propriétaire de la station pétrolière achetait les essences, huiles, graisses pour les
vendre aux clients, ou présentait des prestations de services pour ces derniers au nom
du représenté, cela signifierait qu’il est qualifié comme représentant commercial
suivant les éléments de cette activité dans les opérations effectuées. L’analyse suivie
par le tribunal de première instance de Beyrouth sur ce sujet, est en contradiction avec
les simples normes et règles juridiques, puisque qu’il s’inspire des éléments de
l’article premier et réclame ensuite que l’exercice de ces opérations commerciales ne
constitue pas un contrat de vente et d’achat cité dans le même article.

395. Ainsi, toujours à partir des faits du jugement, le tribunal a considéré que
« l’utilisation de l’espace loué emporte l’usage d’une station pour la vente et la
distribution des essences, huiles, graissages et prestation de service complet pour les
clients »704, n’obéissait pas aux dispositions d’un contrat désigné par le législateur : ce
qui est en contradiction avec la réalité. Car celui qui effectue des opérations et des
actes juridiques, faisant de ces activités sa profession, et organise son travail à travers
d’une société, constituera par effet un fonds de commerce considéré comme l’outil du
projet commercial705. Le cas échéant, lorsque cette personne exerce des activités ou
des opérations comme celles organisées et nommées dans l’article premier du décret-
loi N. 34/67, elle sera considérée comme si elle exécutait les affaires d’une agence
commerciale qualifiée par représentation commerciale. Ce qui nous pousse à dire -

703
Cass. com., 22 mars 2006, M. Y. LEHANNEUR c/ Sté Carautoroutes, pourvoi n° 04- 43343.
704
V. dans le même sens : CA Montpellier, Ch. 01, D, 19 janv. 2011, n° 10/02131 : « … que la
société preneuse pourra édifier à ses frais sur les terrains loués toutes les constructions nécessaires à
l'exploitation de son commerce notamment des locaux à usage de stations-service, installation de
lavage, graissage, logements destiné aux gérants, poste d'accès… ».
705
Art. 278 C. com. lib. ; Art. 1 du décret-loi n° 34/67 ; CA, Aix-en-Provence, Ch. 08 A, 20 sept.
2007, n° 06/07560 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 04 C, 25 janv. 2007, n° 04/04651.
-203-

contrairement à la solution à laquelle a abouti le tribunal de première instance de


Beyrouth-, que le traitement de la société, sa préparation pour le commerce, et sa
qualification comme station pétrolière, obéit aux dispositions du contrat de
représentation commerciale suivant le décret-loi mentionné.

396. Tandis que le fait de mentionner que « l’exercice du travail sous la marque,
les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière », ne peut être considéré comme
motif pour écarter le contrat du cadre de la représentation commerciale. En vérité, la
marque, les affiches publicitaires, les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière,
sont tous des logos ou enseignes que ces sociétés délèguent au propriétaire de la
station pétrolière. Ces enseignes, entrent dans la phase de la publicité de la compagnie
pétrolière d’une part, et d’autre part servent à distinguer les produits de cette dernière
des produits des autres compagnies pétrolières, puisque l’enseigne est la
dénomination sous laquelle, le commerce est exercé et connu du public706, que le
commerçant utilise pour distinguer des autres son fonds de commerce707.

397. A ce titre, le fait d’utiliser ces affiches sous le nom de la marque, les
couleurs et le nom de la compagnie, n’a pour but que d’attirer l’attention des clients
vers la société commerciale et les produits du représenté, et les conduire vers la
station pétrolière : ce qui est proche de l’activité de la société lorsqu’elle aboutit à
personnifier la qualité du commerce708. Sur cette base, nous ne pouvons considérer ses
affiches comme une forme d’excuse pour estimer que le contrat est innommé, et par

706
En France, l’enseigne est défini par l'article L. 581-3 du code de l'environnement ; V. dans le
même sens : P. ROUBIER, Propriété industrielle, t. 2, Sirey, 1954, p. 702, n° 297 : « L’enseigne est
essentiellement une désignation d’un établissement de commerce ou d’industrie apposée sur les locaux
où cet établissement est exploité. Elle sert à fixer l’attention de la clientèle d’une manière en quelque
sorte extérieure, et particulièrement frappante », cité par E. ABOU EID, Droit commercial entre le
texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2,
2005, p. 39.
707
Il est également un des éléments incorporels du fonds de commerce, et le prolongement du nom
commercial.
708
Cass. com., Anvers, 14 juill. 1902, Jurisp du port d’Anvers, 1902-1-320 : « …En général, une
enseigne est attachée à l’exploitation d’une industrie ou d’un fonds de commerce, dont elle constitue
un accessoire… », cité par E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la
doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 39 ; CA Paris, PÔLE 05,
Ch. 04, 20 oct. 2010, n° 08/10864 : « … l’enseigne Espace SFR pour l’exploitation de son fonds de
commerce… » ; CA Aix-en-Provence, Ch. 15 A, 28 mai 2010, n° 08/13455 ; CA Bordeaux, Ch. civ.
02, 1 déc. 2009, n° 09/02764 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 09, 12 nov. 2009, n° 09/12833 ; CA Versailles,
Ch. 16, 29 mai 2008, n° 07/07239 ; CA Paris, Ch. 03 A 4, sept. 2007, n° 06/14980.
-204-

conséquent, le contrat sera considéré comme contrat de représentation commerciale,


et le demandeur comme représentant commercial pour la compagnie
défenderesse « Mobil Oil ».

398. En conclusion, après avoir exposé les ressemblances plus que les
divergences entre le distributeur exclusif au sens du décret-loi N. 34/67 et le
concessionnaire exclusif du droit français, en tant que tous les deux sont des
commerçants, revendeurs et agissent pour leur propre compte en vertu d’un contrat
nécessitant l’existence d’une exclusivité réciproque avec interdiction de vendre
d’autres produits concurrents709 ; il s’agit de vérifier dans un deuxième paragraphe la
portée de l’exigence de l’exclusivité au sens du deuxième alinéa de l’article premier
du décret-loi N. 34/67.

Paragraphe 2 : La portée de l’exigence

399. Le deuxième article du décret-loi N. 34/67 qui prévoit la possibilité pour les
parties d’insérer une clause d’exclusivité dans le contrat de représentation
commerciale710, ne prévoit pas la solution à donner à cette question de sorte qu’il faut
appliquer les règles générales du droit civil. En effet, entre parties, cette clause ne
peut être absolue sans violer la liberté civile contractuelle. En d’autres termes, les
parties s’engagent à respecter leurs obligations respectives résultant de la clause
d’exclusivité711, la plus importante étant celle du concédant, représentant ou
représenté, de ne pas commercer avec les produits objets de l’exclusivité dans le
secteur concédé, et durant la période entière de la concession. Elle doit être limitée

709
M. LICARI considère que les clauses de relatives à la distribution des produits concrétisées par
les stipulations d’exclusivité, sont généralement accompagnées d’une interdiction de concurrence: F.-
X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec,
2002, p. 450.
710
Art. 2 (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975 et la loi n° 671 du 6/2/1998) : « Ce contrat de
représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité limitant la représentation à un
représentant unique ».
711
Idée à développer plus tard au cours de notre étude.
-205-

dans l’espace, et, surtout, dans le temps712, à peine de nullité, c’est que l’une des
parties au contrat de représentation commerciale ne pourra s’engager éternellement à
ne pas exercer le commerce objet de l’exclusivité713. Il s’agit donc, d’une atteinte à la
liberté civile contractuelle, puisque l’exclusivité doit permettre d'optimiser les efforts
voire rentabiliser les investissements714.

400. Cette remarque, cependant, s’applique uniquement aux contrats à durée


indéterminée, étant donné que ces derniers ne lient pas leur auteur indéfiniment, et
peuvent être résiliés à tout moment. Mais, même s’agissant des contrats à durée
déterminée, cette durée ne peut être excessive, auquel cas, les tribunaux jouiront d’un
pouvoir souverain d’appréciation de l’opportunité de cette durée. Les tribunaux
peuvent censurer l’application de la prohibition de l’engagement permanent, et veiller
à ce que cette prohibition ne soit pas détournée par la fixation d’un délai très long715.
Il ne peut être question d’envisager les droits et les obligations entre les parties d’un
contrat de représentation commerciale résultant de la convention d’exclusivité que si
cette convention est valide (A).

401. L’exclusivité est unilatérale si son débiteur est le seul engagé dans des liens
exclusifs716. L’hypothèse est fréquente, par exemple, dans les contrats
d’approvisionnement où seul l’acheteur supporte une obligation frappée d’exclusivité,

712
Une limite de dix ans est expressément prévue par les dispositions de l’article L. 330-1 C. com.
anciennement la loi du 14 octobre 1943 sur les conventions d’exclusivité portant sur des biens
meubles : CA Toulouse 4 mars 1968, Chronique de J. HEMARD relative à la RTD com., 1969, p. 790,
n° 9.
713
Cass. civ., n° 73 du 9 mars 1963, RJL, 1963, p. 677 : d’après cet arrêt une seule limitation
suffirait ; V. aussi Cass. com., 7 janvier 1969, JCP, 1969, II, 16121, et la chronique de M. HEMARD à
l’occasion de l’arrêt en question RTD com., 1970, p. 179 et 180, n° 5 : Dans cette espèce, la cour
confond entre la liberté publique du commerce et de l’industrie, et la liberté contractuelle qui est une
liberté civile. Elle dit en l’occurrence, que la seule limitation dans l’espace suffit pour nier l’article à la
liberté de commercer. Cependant, nous ne pensons pas devoir voir dans cette attitude de la cour que la
limitation dans le temps ne doit pas être une condition de validité de la clause d’exclusivité, étant
donné que dans l’espèce à elle soumise, il s’agissait d’un contrat à durée indéterminée qui peut être
résilié à tout moment.
714
D. FERRIER, La considération juridique du réseau, in Mél. offerts à Ch. MOULY, Litec, 1998,
p. 95 s., spéc. n° 19.
715
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 153 : tel que, par exemple, quarante ou cinquante ans pour un
commerçant qui en a cinquante ou soixante.
716
Ph. LE TOURNEAU, Exclusivités unilatérales, op. cit.
-206-

dans les contrats de travail717 et dans les contrats de franchise718. L’exclusivité


unilatérale se fait le reflet d’une domination contractuelle: une seule partie a consenti
à aliéner sa liberté de choix719. A l’inverse, quand l’exclusivité est bilatérale ou
réciproque, c'est dire quand à l’engagement exclusif de l’une des parties répond
l’engagement exclusif de l’autre720, le rapport contractuel tend alors vers un autre
équilibre. D’où l’utilité de vérifier ainsi la nature de l’exclusivité conférée au
commerçant afin de bénéficier du statut du représentant commercial en tant que
distributeur exclusif (B)

A- La nécessité d’une exclusivité

402. Deux questions se soulèvent lorsque nous entendons parler de l’exclusivité


du deuxième alinéa du premier article du décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967 : Est-ce
que ce dernier, englobe dans sa protection les commerçants en absence d’une clause
d’exclusivité ? Et par conséquent les dispositions du même décret, englobent-elles
dans sa protection le « distributeur non-exclusif » ?

403. La jurisprudence libanaise a répondu à ces questions par un ancien arrêt


comme il suit : « …Comme la demanderesse qui se pourvoit en cassation déclare
que, les faits de l'affaire indiquent que le représentant a agi avec autrui en son nom
propre et pour son propre compte, et en retire un bénéfice par la différence des prix,
et que toute sa publicité était en son nom propre et pour son compte, même s’il était
en train de vendre des outils commerciaux pour d’autres entreprises commerciales ;

717
Sur la clause d’exclusivité dans le contrat de travail : R. VATINET , Les principes mis en preuve
par la jurisprudence relative aux clauses de non-concurrence en droit de travail, Droit social, 1998, p.
534 ; A. SUPIOT, Critique du droit du travail, PUF, 2007, coll., Quadrige.
718
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de franchisage, op.cit. n° 430 et s. ; N. NEFUSSY-LEROY,
Les clauses d’exclusivité dans le contrat de franchise, th., Nice, 1992 : cité par D. BOSCO,
L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd. Bruylant, 2008, p. 12.
719
D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, op.cit., p. 13.
720
Par exemple, l’acquéreur promet de n’acheter qu’au vendeur qui promet de ne vendre qu’à
l’acquéreur. Il est aussi possible que chacune des parties s’oblige à une exclusivité, mais que les deux
exclusivités ne se répondent pas: par ex., le fournisseur promet une exclusivité territoriale à l’acquéreur
qui promet de ne conclure aucun contrat d’entretien avec un tiers : nous pouvons parler d’obligations
d’exclusivités croisées.
-207-

n'est-il pas alors logique qu'il soit en même temps son mandataire et mandataire pour
d’autres entreprises concurrentes, puisque la description juridique de cette situation
lui donne la qualité d’un vendeur secondaire et non pas d’un mandataire
commercial.

Toutefois, le texte de l'article 272 du Code de commerce721 retient que le


mandataire commercial peut agir soit en son propre nom, soit pour le compte du
mandant.

Attendu qu’il n'y a pas d'influence sur la description de la relation entre les
parties, en tant que mandat commercial, suivant l’argumentation de la partie
demanderesse, le représentant a été mandataire pour autres entreprises concurrentes,
puisque il l’est permis au représentant commercial d’être mandataire pour plusieurs
mandants en même temps, comme l'indiquent les dispositions de l'art. 278, al 3. C.
com.

En conséquence la justification proposé sera rejetée »722.

Comment envisager cette approche?

404. Sur le fond de l’arrêt précité, il semble qu'un différend soit survenu entre la
demanderesse et le représentant mentionné, sur la nature de la « qualification » du
travail effectué par ce dernier, et de savoir si le décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967, englobe dans sa protection, les personnes qui vendent les marchandises qu'ils
achètent en retirant leurs bénéfices de la différence des prix, sans qu'il y ait une
« exclusivité » de représentation et de distribution.

405. Dans l’affaire ci-dessus, la demanderesse déclare que :

- Le représentant avait acheté ses marchandises et les avait vendues à des clients
en son nom propre et pour son propre compte, en retirant ses bénéfices de la
différence de prix.

721
Art. 272 C. com.: « … le mandataire doit agir en son nom propre ou sous un nom social pour le
compte de son mandant… ».
722
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt préparatoire n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21, p. 58.
-208-

- En plus, qu’il n'avait pas limité la distribution des marchandises de la partie


demanderesse, mais au contraire, qu’il avait pratiqué la vente des outils commerciaux
auprès d'autres entreprises commerciales.

- La publicité effectuée par le représentant, concerne les produits et les


marchandises de la demanderesse et le reste des outils qui traitent de vendre, aussi
bien qu’il a exercé cette publicité en son nom propre et pour son propre bénéfice.

406. Ce qui nous conduit à dire que le représentant n'était pas un agent
commercial pour la demanderesse, mais un « vendeur secondaire », ce qui ne lui
permet pas de bénéficier des dispositions du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967. Mais la Cour de cassation civile, en sa première chambre, et comme réponse à
la demande de l'appel et sa raison citée, a considéré que, l'agent commercial peut
travailler sous son propre nom ou sous le nom de son mandant. Et qu’il n’y a aucun
effet sur la description de la relation entre les deux parties, par le fait que le
représentant était un agent mandataire pour des entreprises autres que la société
demanderesse, puisque il est permis au représentant commercial d’être mandataire
pour plusieurs mandants en même temps, suivant les dispositions de l’art. 278, al 3. C.
com. lib.723 et l’art. 3 du décret-loi N. 34/67724, et pour cela la raison de cassation sera
rejetée.

723
Art. 278 al. 3 C. com. : « … Lorsqu’un mandataire représentant pour plusieurs maisons
commerciales, a des locaux, un personnel, une organisation et des frais généraux, c’est possible de le
considérer comme un véritable propriétaire d’un projet de représentation commerciale, il devient
personnellement commerçant ».
724
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement:
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle –ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs salaires
ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et dans ce
cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
-209-

407. Il résulte de ces faits que la Cour de cassation civile725 en sa première


chambre a considéré que le commerçant qui achète des biens et des marchandises et
les distribue par leur vente auprès des clients, en retirant ses bénéfices de la différence
de prix, est un « agent commercial » et bénéfice des dispositions du décret-loi libanais
N. 34/67 du 5 août 1967, même si sa distribution n'était pas « exclusive » et même s’il
représentait d’autres sociétés concurrentes726.

408. Mais à notre avis, la décision prise par la Cour de cassation peut être
critiquée pour les raisons juridiques suivantes :

En retournant aux faits énumérés dans l’arrêt précité, nous constatons clairement
que le représentant achetait les produits et les outils de la société demanderesse et les
vendait en son nom propre et pour son propre compte en retirant son bénéfice de la
différence des prix. Mais il n’était pas un « distributeur exclusif » pour ces produits et
sa relation avec cette société ne se basait pas sur l’« exclusivité ». De fait, le
représentant avait exercé l'achat et la vente des outils commerciaux similaires aux
produits de la société demanderesse, mais fabriqué par d’autres entreprises.

409. Ce qui nous incite à dire que ce dernier n'était pas un mandataire suivant la
notion du premier alinéa de l’article premier du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967, puisqu’il exerçait son travail sous son propre nom et pour son propre compte -
présomption de sa qualité de commerçant- ; de plus il n’était pas un « distributeur
exclusif » suivant la notion du deuxième alinéa du premier article du décret-loi
précité en raison de l’absence d’un contrat d’exclusivité. La relation qui le lie avec la
compagnie demanderesse n'est qu’une relation « distributeur-vendeur » pour les
produits de cette société.

410. En effet, la description adoptée par la Cour de cassation civile pour le


représentant n'était pas convenable, puisque nous ne pouvons pas considérer le
représentant, comme mandataire de la société demanderesse. La description correcte
qui s'applique à lui, pourrait être celle d’un « distributeur non-exclusif » pour les

725
Cass. civ. lib 15 mars 1973, op. cit.
726
Tout cela en lien avec les dispositions de l’art. 278, al. 3 C. com. lib., qui permet au mandataire
d’être représentant pour plusieurs clients en même temps. V. supra note 723.
-210-

marchandises et les produits de l'entreprise. Mais, une interrogation trouve sa place


après ces analyses et déductions : les dispositions du décret-loi libanais N. 34/67 du
5 août 1967, englobent-elles dans leur protection le « distributeur non-exclusif »?

411. En réalité, même si l’intermédiaire avait la qualité de distributeur, cela ne


suffirait pas pour qu’il bénéficie des dispositions du décret-loi N. 34/67, il faut que sa
distribution soit notamment exclusive. Ce qui est reconnu par la jurisprudence et la
doctrine : « …Mais, il ne suffit pas d’être « distributeur-vendeur » pour se voir
attribuer la qualité de représentant commercial. Il faut en plus exercer cette
exclusivité…en vertu d’un contrat conférant à l’intermédiaire la qualité d’agent ou de
distributeur exclusif… »727 .

412. En d’autres termes, l’exclusivité en ces formes est déduite des relations des
parties contractantes. C’est une condition nécessaire pour l’application des
dispositions du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août 1967 -Condition sine qua
non728- de manière que son absence amène à considérer l’intermédiaire du commerce
comme un « distributeur non-exclusif » ne bénéficiant pas de la protection du décret
législatif susmentionné, et en particulier du deuxième alinéa de l'article premier729.

413. Revenant à la décision, objet de cette discussion, puisque d’une part, le


représentant n’était pas un « distributeur exclusif », il n’était pas autorisé à bénéficier
des dispositions du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 du 5
août 1967. Et d'autre part, vu que le « distributeur non-exclusif » n’est pas considéré
comme mandataire tel nous l'avons déjà mentionné, il ne pourrait pas bénéficier du
premier alinéa de l’article premier du décret-loi mentionné. Et par conséquent, la
description et le résultat atteints par la Cour de cassation civile, dans l’arrêt objet de
ce débat ne sont pas correctes, mais de plus semblent entrer en opposition avec les
dispositions de l'article premier du décret-loi mentionné.

727
M. MAHMASSANI, op. cit, p. 55 ; Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009,
Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492, 23 déc. 1969, Rec.
Hatem, vol. 113, p. 26 à 33.
728
Terme juridique latin signifiant « sans laquelle cela ne pourrait pas être ».
729
Voir dans le même sens : C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, n° 12
: Bien que le distributeur agréé soit un commerçant, qui achète pour revendre, il se distingue
essentiellement du concessionnaire par le défaut d’exclusivité.
-211-

414. En reprenant le contenu de l'article premier de ce dernier décret-loi, nous


trouvons que le deuxième alinéa de cet article déclare qu’ « est considéré comme
représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son propre compte de
vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de
représentant ou de distributeur exclusif unique ». Cet alinéa, qui n'a pas de similaire
dans la législation française, désigne le représentant ou le « distributeur exclusif
unique » et requiert qu’il doit être considéré comme représentant commercial.

415. Cependant, le législateur libanais a dû trouver ce qui justifie la protection


du représentant -mandataire- ou celui qu’il considère comme représentant -
distributeur exclusif- sans la volonté de protéger le « distributeur non-exclusif »730, en
considérant que le distributeur unique avait rompu toute relation avec toute personne
autre celle qu’il l’a chargée de distribuer ; et même avec les clients qui n'achètent pas
de marchandises de la personne mentionnée, le non-renouvellement de contrat entre
eux, tend à son effondrement de façon commerciale. En d’autres termes, le non-
renouvellement du contrat avec l'un d'eux n’aboutit qu’à la perte de certains clients,
aussi bien qu'il pouvait pousser et exhorter ses clients à l’achat des produits distribués
par lui731. Cette question est la source du deuxième alinéa de l’article second du
décret-loi N. 34/67732. Dans ce sens, un jugement du tribunal de première instance de
Beyrouth avait comme but de vérifier si le demandeur peut bénéficier des dispositions
du second alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 :

416. « Il résultait des faits que les deux parties avaient l’intention de désigner le
demandeur comme délégué et « distributeur non-exclusif » pour vendre les produits
de la société défenderesse, et que le contrat passé entre eux ne comportait pas un
article notant que le droit de distribution est exclusif et restrictif pour le seul
demandeur, et qu’il n’avait pas le droit de vendre des produits similaires à ceux de la
défenderesse.

730
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
731
Dans le même sens : C. CHAMPAUD, op. cit., p. 462.
732
Art. 2, al. 2 du décret-loi n° 34/67 : « Ce contrat peut comporter une clause limitant la
représentation à un représentant unique… ».
-212-

Attendu que si la défenderesse n’a pas utilisée son droit de faire distribuer ses
produits par une personne autre que le demandeur simultanément avec ce dernier,
cela ne veut pas dire qu’elle a renoncé à ce droit. Ainsi, il n’est pas possible de
considérer que l’accord des deux parties dépasse le cadre du contrat écrit et rejoint
l’article de l’« exclusivité » -contrairement au contenu du contrat- sauf s’il y avait des
éléments importants et suffisants ayant pour but de prouver que les deux parties en
avaient la volonté et que leur accord était assujetti à l’article de l’« exclusivité ».

Cependant, le cas échéant, rien n’indique que les parties avaient la volonté
d’assujettir leur relation à l’article de l’« exclusivité », différemment du contenu de
l’accord écrit passé entre eux. Ce qui, en effet, montre que la situation du demandeur
est incompatible avec les impositions du deuxième alinéa de l’article premier du
décret-loi N. 34/67, puisqu’il n’avait pas la qualité de représentant ou distributeur
unique à titre exclusif, mais qu’il avait la qualité de délégué ordinaire à la vente ou
de distributeur normal »733.

417. Par conséquent, suivant la réciproque du jugement ci-dessus et suivant la


synthèse de l’arrêt de la Cour de cassation cité précédemment 734, nous pouvons en
déduire que le décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août 1967, ne s’applique pas aux
commerçants ou aux distributeurs sans qu'il y ait une « exclusivité » de représentation
qui est une condition essentielle pour l’application du deuxième alinéa du premier
article dudit décret-loi. Voyons alors la nature de cette exclusivité.

B- La nature de l’exclusivité : réciproque ou non ?

418. La jurisprudence libanaise n’est pas unique sur la question de savoir si


l’« exclusivité » est réciproque entre les parties du contrat et notamment pour
l’application du décret-loi N. 34/67 ; ou bien si l’engagement de l’exclusivité de la
représentation incombe à une société représentée, où il est permis à son représentant
de représenter d’autres sociétés et de distribuer leurs produits similaires sans aucune

733
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492, 23 déc. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 26 à 33.
734
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt préparatoire, n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21, p. 58.
-213-

interdiction ou restriction. Cependant la Cour de cassation civile libanaise a considéré


ce qui suit : « La limitation de l’exclusivité dans le contrat en faveur du représentant
commercial, sans qu’elle soit réciproque et encore active en faveur de la société, ne
s’oppose pas aux règles générales qui organise la liberté des contrats. Ainsi, il
n’existe pas dans la législation spéciale qui règlemente les représentants
commerciaux de texte qui les force à croire qu’il est interdit au représentant de
consommer des cosmétiques autres que ceux que la société avait choisi exclusivement
pour la consommation »735.

419. Comme la jurisprudence, la doctrine n’est pas d’accord sur ce sujet. Vu que
MM. les professeurs FABIA et SAFA considèrent que l’exclusivité est réciproque736,
alors que M. le professeur HATEM, considère que l’exclusivité est non réciproque737.
Où en sommes-nous de ces avis jurisprudentiels et de ces opinions doctrinales ?

420. Nous avons montré au-dessus que la représentation commerciale se conclut


en vertu d’un contrat, avec pour principale caractéristique « l’obligation » par laquelle
le contrat se qualifie. Cette obligation dans le contrat de représentation commerciale
prend la forme de l’« exclusivité ».

Reprenons l’article premier du décret-loi N. 34/67 en ces deux premiers alinéas :

Al. 1 : « Le représentant commercial est le mandataire qui, par sa profession


habituelle et indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de services,
entreprend des négociations pour conclure des opérations, de vente, d’achat, de
location ou de prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces activités au nom
des producteurs ou des commerçants et pour leur compte ».

Al. 2 : « Est aussi considéré comme représentant commercial, le commerçant qui


entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un
contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ».

735
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1974, Rec. Chahine, n° 150, p. 22 et 23.
736
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
737
Ch. HATEM, Rec. Hatem, vol. 150, p. 24.
-214-

421. Suivant ces dispositions, nous constatons que la représentation commerciale


et la distribution à titre exclusif se réalisent par un « contrat nommé », qui est celui de
vente ou d’achat, de location ou de prestations de services. Vu que le contrat de vente
tant en droit libanais que français est connu comme contrat à titre onéreux, ce dernier
peut être réciproque et bilatéral738 lorsque les contractants s'obligent réciproquement
les uns envers les autres, ou bien non réciproque et unilatéral739 lorsqu'une ou
plusieurs personnes sont obligées envers l’une ou plusieurs autres, sans que de la part
de ces dernières il y ait d'engagement. Qu’en est-il du contrat de la représentation
commerciale ? L’obligation de l’exclusivité est-elle ou non réciproque ? Si une des
parties s’engage par obligation de résultat suivant un devoir précis qui lui impose à
engager avec l’autre partie à titre exclusif, cette dernière échange-t-elle avec la
première cette obligation ?

422. Si la représentation commerciale ou la distribution exclusive se créent à


partir d’un contrat de vente et d’achat, ce dernier est soumis à des mesures précisées
suivant la volonté et l’intention communes des parties. Cependant, suivant les
dispositions de l’article 366 du Code des obligations et contrats libanais, « il
appartient au juge dans la lecture des actes juridiques, de rechercher l’intention de la
personne engagée (si l’obligation est unilatérale) ou bien la volonté des parties (s’il
y avait contrat), et non de rester river au sens littéral du texte »740.

423. Le premier alinéa de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 mentionne ce qui


suit: « Le contrat de représentation commerciale est réputé conclu dans l’intérêt
commun des parties contractantes ». Ainsi le deuxième alinéa de l’article 3 dudit
décret rappelle que « le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale
habituelle, et peut plus particulièrement:… accepter la représentation de nouveaux
mandants sans en référer à son mandant à condition que l'objet de la nouvelle
représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue pas
une concurrence à celle –ci ».

738
Art. 1102 C. civ. fr. et art. 169 C.O.C. lib.
739
Art. 1103 C. civ. fr. et art. 169 C.O.C. lib., al. 3.
740
Art. 366 C.O.C. lib.
-215-

424. Suivant ces deux textes, il est remarquable que le contrat qui lie le
représentant au représenté, et qui contient une clause d’exclusivité de représentation
ou de distribution, se classe parmi les contrats à titre onéreux. Et ce type de contrats
est stipulé en faveur des intérêts de toutes les parties qui toucheront des profits et des
avantages égaux741. En conséquence, lorsque le distributeur exclusif touche les
avantages de la distribution exclusive limitée à sa personne, ou à sa société ou à sa
compagnie, alors la nature de l’acte lui impose l’égalité des obligations et des
avantages, de telle manière qu’il s’engage à son tour par des obligations envers son
contractant. Tout cela est relatif à la création de l’équilibre des prestations résultant du
fait que l’acte est synallagmatique. Ainsi, si l’article 278 C. com. lib. en son deuxième
alinéa a permis au représentant commercial de représenter plusieurs firmes
commerciales, ceci est relié par la désignation constatée à l’article 3 du décret-loi N.
34/67, quand le texte spécial s’applique par opposition au texte général suivant
l’adage Specialia generalibus derogant742.

425. Il est reconnu que l’obligation d’exclusivité devra être synallagmatique743


contrairement à la pensée suivie par la Cour de cassation civile qui a considéré qu’« il
n’existe pas dans la législation spéciale qui règle les représentants commerciaux, de
texte qui le force à croire qu’il est interdit au représentant de consommer des
cosmétiques autres que ceux que la société avait exclusivement choisis pour la
distribution »744. Ce raisonnement-là n’est pas précis à notre avis, car il est en
contradiction avec :

- la notion et la nature du contrat de représentation commerciale exclusive

- le principe de l’équilibre des prestations

- la notion des contenus des articles 3 et 4 du décret-loi N. 34/ 67745.

741
Art. 169 C.O.C. lib.
742
Principe Latin selon lequel, lorsque deux règles de droit sont applicables à une situation, l’une
générale et l’autre spéciale, c’est cette dernière qui se déroge et doit prévaloir.
743
Décision n° 05- D-32 du 22 juin 2005 du Conseil de la concurrence ; Cass. civ., 1ere Ch., 20 mai
2003 ; CA Paris, 1er mars 1957, Boulbès, 1957-2-9875.
744
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1974, op. cit.
745
L’art. 4 al. 1 du décret-loi nº 34/67 mentionne ce qui suit: « Le contrat de représentation
commerciale est réputé conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ». Ainsi l’art. 3 al. 2
-216-

426. Et s’il est reconnu que « si une seule partie se trouve engagée quand
l’autre n’est prévue soumise qu’à quelques obligations postérieurement, suivant des
conditions spéciales ou lors de l’exécution du contrat, alors ce dernier ne perd pas la
qualité de contrat non synallagmatique comme dans le prêt d’utilisation, le dépôt, le
gage » 746 ; Comme cette supposition est invalide dans le cas de représentation
commerciale exclusive, car l’article 3 du décret-loi N. 34/67, même s’il a donné au
représentant commercial le droit « d’accepter la représentation de nouveaux
mandants sans en référer à son mandant », conditionne que « l'objet de la nouvelle
représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue pas
une concurrence à celle-ci » .

427. Cela signifie que l’engagement de la part de la société et l’octroi de


l’exclusivité de représentation et de distribution pour le représentant commercial, doit
se rejoindre d’autre part par une obligation qui incombe au dit représentant : celui de
non-concurrence et de non contradiction avec la première représentation. Il en résulte
que l’obligation est réciproque entre les deux parties du contrat : Solution adoptée par
le tribunal de première instance de Beyrouth où il a considéré que « le contrat de
distribution exclusive englobe un engagement sur l’une des parties contractantes, qui
lui interdit de commercialiser ses produits au Liban de manière directe ou indirecte
sauf à travers son distributeur exclusif unique »747.

428. En outre, l’autre indice de la réciprocité de cette obligation, est la


considération que « le contrat de représentation commerciale est réputé conclu dans
l’intérêt commun des parties contractantes »748, où il n’est pas permis pour une partie

dudit décret rappelle que « le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des activités de
sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement:… accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à
condition que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou
bien ne constitue pas une concurrence à celle-ci ».
746
Art. 168 C.O.C., al. 3.
747
TI Beyrouth, décision n° 443, 23 mai 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213-216.
748
Art. 4 al.1, décret-loi n° 34/67, V. dans le même sens en droit français : L'article L. 134-4 C.
com. ; CA Orléans, Ch. com., 25 nov. 2010, n° 10/01197 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 04, 22 sept. 2010,
n° 08/06616 ; CA Saint-Denis-de-la-Réunion, Ch. civ., 23 juill. 2010, n° 09/00941 ; CA Paris, PÔLE
05, Ch. 05, 1 juill.2010, n° 10/07894 ; CA Bordeaux, Ch. civ., 01 Sect. B, 18 mai 2010, n° 09/02649 ;
CA Angers, Ch. com., 8 avr. 2010, n° 09/00165 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 05, 1 avr. 2010, n°
-217-

seule de le résilier lorsqu’elle le désire749 : Solution prise du Code des obligation et


contrats libanais par son article 245750, et choisie par M. BOULOC dans son
commentaire sur la révocation du mandat d’intérêt commun : « Si le mandat a été
conféré tant dans l’intérêt du mandant que du mandataire, l’existence d’un mandat
d’intérêt empêche le mandant de révoquer le mandat quand bon lui semble »751. Le
cas échéant, si le mandant a révoqué le contrat sans faute du représentant distributeur
ou autre cause légitime, ce dernier a le droit -malgré toute clause contraire- de
demander des indemnités.

429. Cet équilibre dans les droits et les obligations indique bien la volonté du
législateur de conserver le même équilibre entre droits et obligations, et de considérer
la représentation commerciale exclusive comme contrat synallagmatique et réciproque
de la part des obligations et des droits, et à titre onéreux752 mis en faveur des parties
contractantes afin d’obtenir des avantages égaux. En revanche, il s’agit de rappeler
que la loi française n'interdit pas aux parties contractantes de stipuler une clause
d’exclusivité unilatérale ou bilatérale. Unilatérale, très fréquente (presqu'une clause de
style), par laquelle le mandant confie à son partenaire le monopole de la
représentation pour un territoire géographique spécifié ou pour une clientèle
déterminée. Bilatérale, plus rare, par laquelle l'agent s'engage de son côté à ne
représenter que ce mandant.

430. Cela dit, d’un autre côté, l’interprétation des relations obligatoires entre les
parties du contrat, nécessite la recherche de la volonté et de l’intention des
contractants comme le souligne l’article 366 C.O.C. : Solution adoptée par M.

09/07999 ; CA Caen, Ch. 01, Sect. civ. et com., 20 sept. 2007, n° 05/03722 ; Cass. com., Rejet, 22 févr.
2005, n° 03-12.753.
749
CA Limoges, Ch. civ., 16 sept. 2010, n° 08/01453 : Mandat d’intérêt commun, voir juger que la
révocation unilatérale du mandat était illégitime et abusive ; CA Basse-Terre, Ch. civ., 01, 16 mars
2009, n° 06/00854 ; CA Toulouse, Ch. 02, Sect. 02, 1 déc. 2009, n° 08/00966.
750
Art. 245 C.O.C.: « il n’est pas permis en principe de résilier les contrats que par l’accord de
tous ceux qui les ont créés… ».
751
B. BOULOC, Mandat d'intérêt commun, (Révocation, Conditions) RTD com., 1990, p. 249 :
« Le mandataire prétendait qu'en l'absence de tout préjudice subi par le mandant dans l'exécution du
mandat, le mandant ne pouvait pas révoquer le mandat ».
752
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 3, p. 31.
-218-

MAHMASSANI : « …En effet, pour déterminer le bénéficiaire de la clause


d’exclusivité, ce n’est pas l’intention du législateur qu’il faut chercher, mais plutôt
l’intention des parties. En matière contractuelle, la volonté des parties fait loi, et le
législateur a entendu reconnaître l’exclusivité dans la modalité convenue par les
parties »753.

431. Revenant au sujet de notre analyse754, l’arrêt de la Cour de cassation


libanaise755, serait-il possible d’expliquer l’intention de la société fabricante
représentée de considérer que l’exclusivité lui appartient toute seule sans le
distributeur qui la représente ? Bien sûr que non, car comme tel raisonnement diverge
avec la notion de fabrication ; ainsi se trouve libérer le représentant distributeur de
n’importe quel engagement face à son contractant. L’interprétation de la volonté et de
l’intention doit obéir à certaines mesures et conditions précises, qui prennent en
considération l’intérêt commun des parties contractantes, leurs droits et leur
protection, suivant le besoin social et les dispositions de la loi 756. En l’occurrence la
volonté de la fabrication n’avait pas du tout comme objet de libérer le distributeur
exclusif de ses engagements et obligations envers elle, et par conséquent la décision
prise par l’arrêt de la Cour de cassation n’est pas conforme quand celle du tribunal de
première instance de Beyrouth, en sa chambre commerciale, doit être suivie.

432. Après avoir évoqué le premier élément -l’exclusivité- du contrat de la


représentation commerciale selon les dispositions de l’alinéa second de l’article
premier du décret-loi N. 34/67, voyons le deuxième élément de cet alinéa -l’unicité-.

753
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 154.
754
La nature de l’exclusivité.
755
Cass. civ. 1ere Ch., 10 janv. 1974, op. cit.
756
V. en ce sens : A. RIEG, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 9 : « Il
apparaît artificiel, à l’heure actuelle, de rechercher la substance de l’acte juridique dans la seule
intention ou dans la seule déclaration. La véritable solution réside dans une conciliation contre la
puissance de la volonté individuelle et la sécurité des transactions. Intention et volonté de déclaration
sont des mots commodes pour désigner l’épanouissement de la volonté humaine aux prises avec le
besoin social de sécurité ».
-219-

SECTION 2

L’UNICITÉ

433. Le schéma qui se forme devant nous est le suivant : l’existence d’un contrat
contenant une clause d’exclusivité limitant la distribution par une personne unique,
précisée et déterminée. Pouvons-nous alors constater que l’obligation prend effet sur
la partie engagée seulement, ou bien la dépasse pour rejoindre l’autre partie
contractante afin d’équilibrer les obligations et les échanger757 comme nous venons le
démontrer ?

434. Que se passe-t-il si le contrat contient une clause limitant la représentation à


un seul représentant ? Une question similaire s’est posée en droit français :
l'exclusivité au profit du donneur d'ordres est-elle valide ?

435. La clause d'exclusivité au profit du donneur d'ordres, par laquelle l'agent


promet de ne pas accepter la représentation d'entreprises non-concurrentes est valide,
à s'en tenir à la lettre de la loi. Mais, à regarder les choses de plus près, la philosophie
de ce contrat, qui implique une large indépendance de l'agent, laisse planer un doute.
Comment parler d'indépendance ou même d'autonomie, lorsqu'une partie dépend
totalement de son partenaire, avec lequel elle est liée exclusivement ? Un tel contrat
de dépendance, selon le titre de la thèse de M. VIRASSAMY758, semble rebelle à la
qualification de contrat d'agence commerciale759.

436. En outre, en l'espèce, la clause d'exclusivité rompt l'équilibre des


prestations dans l'intérêt unilatéral d'une seule des deux parties. Ne pourrait-on pas la
regarder sous cet aspect comme contradictoire avec la qualification légale de mandat
d'intérêt commun, du moins à l'esprit de cette notion (même si elle n'est généralement
avancée que pour paralyser la faculté discrétionnaire de rompre un mandat à durée
indéterminée) ? Quoi qu'il en soit la clause d'exclusivité stipulée au profit du donneur

757
Il s’agit de signaler que nous ne voulons pas s’interroger sur les effets au fond, mais juste se
limiter à ce qui aide notre analyse.
758
G. VIRASSAMY, Les contrats de dépendance, préf. J. GHESTIN, th., LGDJ, 1986.
759
Contra CA Paris, 14 mai 1999, RJDA 1999, no 1198 : analysant toutes les obligations mises à la
charge de l'agent, et indiquant qu'elles n'affectent en rien son indépendance dans sa prospection, et
donc sa qualité.
-220-

d'ordres emporte, au titre de la loyauté contractuelle, que ce dernier doit s'abstenir de


troubler l'activité de l'agent dans son secteur760 .

437. En revanche, le droit de la concurrence d’origine communautaire vise


seulement l’accord de distribution exclusive. Il le définit comme le contrat par lequel
« le fournisseur accepte de ne vendre sa production qu’a un seul distributeur en vue
de la revente sur un territoire déterminé »761. Selon la définition suscitée, le réseau de
distribution exclusive organise ainsi une répartition géographique de la clientèle, dans
la mesure où chaque distributeur a la garantie d'être le seul revendeur du réseau à
commercialiser les produits, objets de l'accord au sein de la zone contractuellement
définie.

438. Cette identification spéciale au droit communautaire trouve son homologue


et d’une manière tacite dans le décret-loi libanais N. 34/67 suivant son deuxième
alinéa de son premier article, au terme duquel apparaît clairement l’expression
de « distributeur exclusif unique ». Cette volonté tacite du législateur libanais s’est
exprimée pour assurer la valeur de cette qualification comme élément essentiel au
bénéfice de la protection de la représentation commerciale du décret-loi N. 34/67. A
ce titre, il est demandé d’avoir les deux qualités ensemble pour pouvoir appliquer les
dispositions dudit décret-loi : c'est dire, avoir l’exclusivité de produits par une seule
personne. En d’autres termes une exclusivité de produits et de personnes en même
temps pour une même période dans une zone déterminée762.

439. Attendu que, le deuxième alinéa de l'article premier du décret-loi libanais


N. 34/67 du 5 août 1967, est une exception à la règle énoncée au premier alinéa de
l'article premier, où normalement chaque exception est interprétée restrictivement763,

760
CA Rennes, 1 déc. 1993, D., 1994. IR 127 : ce qui n'est pas le cas lorsque, comme en l'esp., le
mandant nomme un « animateur prescription » dans la zone.
761
CE, communication de la commission n° 2000/C 291/01, Lignes directrices sur les restrictions
verticales, JO. C 291 du 13.10.2000, pt. 161.
762
Le secteur géographique défini s’agit d’une zone d’exclusivité territoriale, les concurrents ne
peuvent pas intervenir sur le territoire des autres membres du réseau : Cass. com., 26 janv. 1999, arrêt,
n° 251, Rejet, Pourvoi n° 96-22. 457.
763
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301 : « Les exceptions sont d’interprétations stricte » ; p. 196 : « La loi
-221-

conformément à la règle latine: Exceptio est strictissimae interpretationis764, il s’agit


de lui conférer la stricte explication qui la mérite suivant l’intention du législateur en
ce qui concerne l’expression « distributeur exclusif unique ».

440. Ce qui a été mentionné indirectement par le législateur par le décret N.


3417 émis le 13/7/2000765 dans lequel était énoncé dans son article 4, alinéa 3, ce qui
suit :

« Lors de chaque règlement de redevance annuelle, le représentant commercial


reçoit du ministère de l’économie et de commerce, une attestation qui sera valide
devant tous les types d’organismes compétents, affichant :

a- le nom de la société ou du fonds inscrit au registre de la représentation


commerciale, sa nationalité et son adresse.

b- le nom du représentant commercial et son adresse.

c- la nature des produits et des services ou même les travaux que la


représentation commerciale englobe.

d- le champ géographique de la représentation commerciale.

e- la nature de la représentation commerciale (exclusive ou non).

f- la date d’enregistrement du contrat de représentation commerciale et son durée


(selon les dispositions du contrat)

g- la période au bout du quelle la redevance a été réglée.

h- la date d’expiration de cette attestation.

441. Ce décret est venu nous aider à consolider notre analyse en ce que le
législateur impose la qualité d’exclusivité de produits à un seul distributeur, suivant
que l’attestation délivrée indique les spécificités de la convention de l’exclusivité
notamment :

spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
764
Adage classique juridique latin signifiant que l’exception est d’interprétation très stricte.
765
Précisant les conditions d’application de l’article 40 du Code de budget général de l’année 1998,
lié à la redevance annuelle imposée sur les contrats de représentation commerciale.
-222-

- la nature des produits et des services ou même les travaux que la représentation
commerciale englobe, c'est dire qu’il s’agit de désigner et préciser les produits
concernés par l’exclusivité. En d’autres termes, l’exclusivité tombe sur certains
produits déterminés par leurs qualités, genres et types.

- le nom et l’adresse du représentant commercial et non ceux de plusieurs


représentants, ce qui conduit à l’identifier parmi d’autres.

- le champ géographique de la représentation commerciale, c'est dire que celle-ci


est limitée dans une zone et région déterminées.

442. De plus, ce raisonnement d’unicité a été repris par plusieurs décisions


jurisprudentielles libanaises dont nous tirons les importantes citations aptes à justifier
notre analyse :

« Le droit de l’importation des produits et sa commercialisation au Liban sera


limité par le seul représentant commercial ayant la qualité de distributeur exclusif
unique, quelle que soit la personne choisie pour exporter ses produits au Liban et
dans le pays d’exportation »766.

« L’exclusivité de représentation et de distribution après son enregistrement au


registre du commerce, sera exclusive à la société demanderesse à l’exclusion de
toutes autres sur le territoire libanais avec l’obligation de la partie représentée de
n’avoir octroyé à aucune autre partie le droit de la représenter au Liban sans
l’accord écrit de la demanderesse »767.

« Attendu que le contrat de représentation exclusive, enregistré au registre du


commerce, est opposable aux tiers, et protège le représentant contre l’importation des
produits dont il représente exclusivement, même si l’importation est effectuée par le
fabricant qui le représente directement, ou d’une autre source, et même si dans un
autre pays il a acheté ses produits de son producteur et les a revendus. Et le fait de
dire que la représentation exclusive n’a aucun effet contre le défendeur puisqu’il a
acheté les produits d’un pays différent de celui de production, ouvre la porte à la
fraude sur l’application du décret- loi N. 34/67 de la représentation commerciale. Et,

766
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 16 oct. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
767
TI Beyrouth, décision n° 443, 23 mai 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216.
-223-

par la suite, il sera possible à n’importe quelle personne, à travers un tiers à


l’étranger, d’importer des produits similaires à ceux concernés par la représentation
exclusive, c'est-à-dire ceux dont le représentant exclusif unique, représente et
distribue exclusivement et par contre affaiblit les dispositions du décret-loi N.
34/67 »768.

« L’importation des produits Philips et leur commercialisation sont réservées


exclusivement au distributeur exclusif qui est le seul distributeur ayant le droit de
vendre les produits désignés qu’il représente, et dans le champ géographique qui lui
est octroyé suivant un contrat de représentation commerciale. Ce qui conduit à dire
qu’il est interdit à l’exportateur de vendre des produits à autrui dans la même région,
que ce soit de façon directe ou indirecte »769.

443. Il résulte de ces décisions jurisprudentielles qu’en cas de stipulation dans le


contrat de représentation commerciale, -une clause d’exclusivité pour une personne-,
le contact sera exclusif pour cette dernière. En d’autres termes, quiconque, achetant
des produits de l’extérieur pour les vendre dans le territoire désigné pour la
commercialisation de ces produits par le distributeur exclusif, sera responsable à
l’égard de ce dernier. Peu importe l’origine des produits importés, que ce soit de la
société représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat de
représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant770. Tout
cela en relation avec l’effet de l’enregistrement de la clause d’exclusivité, ce que nous
traiterons dans notre deuxième partie ; cependant nous nous contenterons d’aborder
l’importance issue de l’exclusivité de produits et par une seule personne.

444. En revanche, cette situation de spécificité de la commercialisation des


produits désignés par une seule personne ne se distingue dans l’exposé de la franchise
en droit français, ce qui nous invite à étudier la teneur de l’exigence de l’unicité -ce
sera notre premier paragraphe-. Mais si quelques mesures ne sont pas retenues, cette

768
TI Beyrouth, décision n° 459, 21 oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147.
769
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 677, 17 mai 1973, Rev. al Adl., 1973, p. 400 ; Cass. civ.,
1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Rec. Baz, nº 21, p. 167, 168.
770
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 48.
-224-

unicité risque de constituer une atteinte au monopole dans le domaine commercial,


d’où l’utilité de vérifier la portée de l’exigence -ce sera notre deuxième paragraphe-.

Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence

445. Issus d’une civilisation de commerçants, les libanais sont des entrepreneurs
hors pair. Malgré le risque politique inhérent, le Liban est un pays capable de se
reconstruire, d’innover, et de créer ; pays où des Libanais conservent leur esprit
d'initiative, leur créativité et leur tradition d'excellents commerçants pour exporter
leurs idées, leurs concepts, leurs produits771. Raison pour laquelle une association des
franchiseurs pour promouvoir et organiser le cadre juridique du développement des
savoir-faire libanais dans le monde, a été créée en Février 2007 avec l’aide de la
Fédération Française de la Franchise : c’est la « Lebanese Franchising Association ».

446. Le développement de l’industrie automobile, dès avant la première Guerre


Mondiale, suscita772, l’apparition du franchising773, contrat d’origine américaine774.
En droit français, il n’a pas soulevé l’intervention d’une législation spécifique775, mais
c’est le règlement d'exemption du droit communautaire du 30 novembre 1988776

771
Des concepts purement Libanais, innovants et audacieux : Al Rifai, Patchi, Pain d’Or, La Maison
du Café, Rectangle Jaune, Najjar Gourmet, Crepaway, Daniel’s, Naï Lingerie, Casper & Gambini’s,
Eternity, Salmontini, Water Lemon, Café Blanc, Huashis, La Posta, Al Sultan Brahim, Kabab-ji, La
Tabkha, Wooden Bakery, Moulin d’Or, ABC…
772
Par l’effet de la législation anti-trust prohibant la vente directe des véhicules par les
constructeurs aux utilisateurs.
773
Né en 1871 aux Etats-Unis avec la marque « Singer », issu d’un mot français qui signifie être
libre de servitudes.
774
J.-M. LELOUP, La franchise - Droit et pratique, 4e éd., Delmas, 2004, p. 10.
775
Il faut signaler l’existence d’un texte réglementaire, qui impose aux franchises de faire état, à
l’intérieur et à l’extérieur de leur de leur établissement, de leur qualité d’entreprise indépendante: arrêté
du 21 fév. 1991, J.O. 1er mars 1991, 2963, expliqué par note de service du directeur général de la
DGCCRF n° 5724 du 21 mai 1991, BOCCRF 30 mai 1991, 154.
776
Règlement (4087/88/CE) modifié par le Règlement de 2790-1999 (JOCE 29 déc. 1999, L. 336-
21 à 25) complété des lignes directrices du 13 oct. 2000 sur les restrictions verticales.
-225-

modifié par le règlement N. 330/2010777, qui a désigné par franchise « un ensemble


de droits de propriété industrielle ou intellectuelle concernant des marques, noms
commerciaux, enseignes, dessins et modèles, droit d’auteurs, savoir-faire ou brevets,
destinés à être exploités pour la revente de produits ou la prestation de services à des
utilisateurs finals ». Ensuite elle a été définie, suivant M. le professeur FERRIER778,
comme la convention par laquelle un franchiseur qui réussit dans une activité779 de
distributeur notamment780, permet à des franchisés de réitérer les éléments de cette
réussite781 moyennant rémunération.

447. La croissance de la franchise l’a étendue ensuite à toute sortes de produits


et de services. Elle est parfois analysée comme une sorte de contrat de concession782,
alors que sa finalité, tenant à la réitération d’une réussite commerciale783, la distingue
nettement de la concession commerciale d’une part, dont le seul objectif est la revente
de produits784, et se rejoint par ce dernier avec la distribution exclusive libanaise au
sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967.
Tandis que d’autre part, elle ne se distingue pas fondamentalement de la

777
JOCE, Règlement de la commission du 20 avr. 2010, L.102/1, concernant l'application de
l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories
d'accords verticaux et de pratiques concertées.
778
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 681.
779
L’activité elle-même peut être commerciale ou artisanale, Cass. com., 25 oct. 1994 : Lettre
distrib., 1995-1 : Le distributeur franchisé pour la pose d’ongles acryliques est un artisan, ou encore
civile: agence matrimoniale.
780
D. FERRIER, La franchise industrielle, JCP, E, 1989, CDE, n° 1.
781
CJCE, 28 janv. 1986, Pronuptia : Rec. CJCE 1986, I, p. 353 : « le franchiseur s’est installé dans
un marché comme un distributeur et a ainsi pu mettre au point un ensemble de méthodes
commerciales… qui ont fait son succès » ; CA Paris, 24 janv. 1975, PIBD 1975, 3, p. 323 : « le
franchiseur a un ensemble de méthodes commerciales de nature à fonder la réussite ».
782
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6e éd. Defrénois, 2012,
n° 838 et s.
783
J.-M. LELOUP, La franchise - Droit et pratique, 4e éd., Delmas, 2004, n° 235 : « Il n’y a pas de
franchise sans réussite réitérable ».
784
D. FERRIER, Le droit de distribution, op. cit., n° 683.
-226-

concession785, en tant qu’elle est un ensemble constitué de produits, de biens, et/ou


services786, d’un savoir-faire787, de signes de ralliement788.

448. Finalement le système juridique français a abouti à une définition commune


pour le contrat de franchise, posée par M. LELOUP, reprise par la doctrine789 et
consacrée par la jurisprudence790, en le considérant comme « le contrat
synallagmatique à exécution successive par lequel une entreprise, dénommée
franchiseur, confère à une ou plusieurs autres entreprises, dénommées franchisées, le
droit de réitérer, sous l’enseigne du franchiseur, à l’aide de ses signes de ralliement
de la clientèle et de son assistance continue, le système de gestion préalablement
expérimenté par le franchiseur et devant, grâce à l’avantage concurrentiel qu’il
procure, raisonnablement permettre à un franchisé diligent de faires des affaires
profitables »791.

449. De ces points de vue, une franchise peut avoir pour objet : la fourniture des
services, la production et la vente d’un ou plusieurs biens. Mais il se peut, que les
franchises peuvent être classées selon l’ « objet » du système franchisé, c'est dire
selon la nature de l’opération que le franchiseur pratique avec succès et fait pratiquer
aux franchisés en conformité avec le système qu’il a mis au point, expérimenté et
conceptualisé792. Et par conséquent, la franchise peut être analysée en trois
catégories : les franchises de services, les franchises de production et les franchises de
distribution. Ces dernières les plus nombreuses en France, nous intéressent pour notre

785
Y. MAROT, Le droit de la Franchise, Mémento juridique, éd. Gualino, Paris, 2003, p. 27.
786
Règl. n° 2790-1999, art. 1, f, Lignes directives, pt. 198, Contrat Modèle de Franchise de la
chambre de commerce internationale, pub., ICC éd., 2000.
787
La franchise est une figure contractuelle plus moderne que la concession, elle repose sur des
valeurs incorporelles (savoir-faire) ; M. BEHAR-TOUCHAIS et G. VIRASSAMY, Les contrats de la
distribution, LGDJ, 1999, n° 1543.
788
Y. MAROT, Le droit de la Franchise, op. cit., p. 53.
789
M. BENNAMI, Le contrat de franchise et le redressement et la liquidation judiciaires, th.,
Université de Lausanne, 2003, n° 58 ; Ch. ZIMMER, Devenir franchisé ou lancer une franchise, 3e éd.
Vuibert, 2011, p. 41.
790
CA Amiens, Ch. com., 6 oct. 2000, RG n° 96/02089, Sté Scintelle, Bukowitz et Delaby c/ Sté
Radenne et UAP.
791
J.-M. LELOUP, La franchise, 4ème éd., op. cit., n° 111.
792
Idem, n° 201.
-227-

comparaison et ont pour objet la distribution d’un bien ou d’une collection de biens.
Et il se peut, que le franchiseur soit diffuseur en injectant un produit dans le circuit de
distribution sans être lui-même producteur793.

450. La franchise de distribution constitue un contrat de fourniture puisqu’il a


engagement de fourniture et d’approvisionnement. A ce titre, elle se distingue encore
de la concession, en tant que cette dernière lie généralement un fabricant de produits à
un commerçant distributeur, d’où elle forme d’une part un mode de collaboration
entre le secteur secondaire et le secteur tertiaire suivant M. CHAMPAUD794, et
d’autre part un mode de collaboration entre entreprises indépendantes suivant M.
LELOUP795. Tandis que la franchise suppose que le fabricant se soit fait distributeur,
puisqu’il n’y a pas de franchise sans réussite préalable réitérable, alors que le
concédant n’a besoin d’avoir mérité le concessionnaire pour qu’il y ait concession796.

451. Ainsi, la franchise de distribution est classiquement, l’une des formules


contractuelles créatrices d’un réseau de distribution, dans lequel, le contrat de
franchise est conclu entre entreprises indépendantes, qui toutes deux détiennent une
part de marché, ont la maitrise de leurs décisions, agissent pour leur compte où se
rencontrent avec le distributeur unique libanais, qui agit pour son propre compte en
tant que commerçant suivant les dispositions du deuxième alinéa de l’article premier
du décret-loi N. 34/67. En revanche, cette situation du franchisé se diffère de celle de
l’agent commercial, mandataire, n’agissant ni en son nom ni pour son compte, mais
au nom et pour le compte de ses mandants.

452. A titre comparatif, concernant la qualité des parties, il s’agit de signaler


que : Au début, le franchiseur est presque toujours une personne morale797, mais rien

793
Ibid.
794
C. CHAMPAUD, Le droit des affaires, 5e éd., PUF, coll. « Que sais-je? », 1994, n° 1978, p. 103
et s.
795
J.-M. LELOUP, La franchise, 4e éd., op. cit., p. 10.
796
They have provided an additional method of exploitation of their product, they have gone direct
into the retail market….: M. MENDELSOHN, The guide to Franchising, 3rd éd., Pergamon Press 1982,
p. 35.
797
CA Pau, Ch. 02, Sect. 01, 26 avr. 2007, n° 06/02285 ; CA Grenoble, Ch. com., 7 mai 2008, n°
06/03778 ; CA Agen, Ch. com., 12 nov. 2007, n° 07/00100 ; F. FRANCK, L'équilibre des réseaux de
franchise de parfumerie de luxe : d'un équilibre menacé à l'équilibre nécessaire, D. 2002, p. 793.
-228-

ne l’empêche d’être une personne physique798 : Même solution avec le distributeur


exclusif suivant les dispositions du décret-loi N. 34/67799.

453. Ensuite, attendu que c’est le règlement du droit communautaire N.


330/2010 sur les restrictions verticales qui a fait l’objet d’une définition pour la
franchise ;

Attendu que, dans le cadre de l’Union Européenne, comme il est connu que
toute discrimination fondée sur la nationalité est interdite ;

Attendu que l’un des objectifs de la Communauté économique Européenne


a été la libre circulation des travailleurs et la liberté d’établissements pour l’exercice
des activités indépendantes ;

454. Alors, les parties au contrat de franchise peuvent être françaises ou


étrangères800, où il leur suffit dans ce dernier cas de se conformer à la réglementation
de l’exercice par un étranger en France de l’activité concernée : Idée divergente avec
le distributeur exclusif libanais qui ne peut être étranger.

455. Enfin, les parties au contrat de franchise peuvent être801 ou non


commerçantes802, suivant une décision de la Cour de cassation au titre de laquelle, est
reconnue la qualité civile d’une franchisée de l’Onglerie803. Ainsi pouvons-nous
concevoir des franchises dans les activités agricoles804, artisanales et libérales805 ; la

798
CA Pau, Ch. 02, Sect. 01, 27 avr. 2009, n° 08/00203 ; L. GIMALAC, Le contrat d'intégration
révélé par les actions en comblement et en extension du passif (art. 180 et 182 de la loi du 25 janv.
1985 sur les entreprises en difficultés), RTD com., 1999, p. 601.
799
Art. 2 dudit décret.
800
Y. MAROT, Prolongements de l'arrêt de la Chambre commerciale du 10 fév. 1998 sur
l'information précontractuelle en matière de contrat de franchise, (des conséquences beaucoup plus
importantes qu'on pouvait le croire), D., 1999, p. 431.
801
CA Grenoble, Ch. com., 11 fév. 2010, n° 08/02585 ; CA Versailles, Ch. 14, 16 sept. 2009, n°
08/07686 ; CA Paris, Ch. 05 A, 21 janv. 2009, n° 06/11392 ; CA Paris, Ch. 05 A, 13 fév. 2008, n°
05/20435 ; CA Paris, Ch. 05 A, 31 oct. 2007, n° 05/23349 ; CA Paris, Ch. 05 A, 30 mai 2007, n°
06/01862 ; CA Toulouse, Ch. 02, Sect. 02, 20 juin 2006, n° 05/03200.
802
CA Douai, Ch. 02, Sect. 02, 20 janv. 2011, n° 08/09574.
803
Cass. com., 25 oct. 1994, Contrats, conc. consom. 1995, comm., n° 2.
804
CA Rouen, Ch. de la proximité, 2 avr. 2009, n° 08/01005 ; CA Rennes, Ch. 07, 30 sept. 2009, n°
07/05729.
805
J.-M. LELOUP, La franchise, 4e éd., op. cit., p. 13.
-229-

qualité de commerçant des parties ne constitue pas un élément essentiel pour la


qualification du contrat : Solution opposée au droit libanais, où le distributeur exclusif
est tacitement défini dans le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N.
34/67, comme « le commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce
qu’il aura acheté… ».

De ce qui précède, il ressort que le franchisé se rapproche du


distributeur unique libanais au sens du décret-loi N.34/67, mais relève-t-il de
personnes protégées par ce décret-loi ?

456. Au Liban, le contrat de franchise s’est vu définir par le tribunal de la


première instance de Beyrouth comme « l’accord conclu entre un commerçant ou un
industriel traitant de gros, et une personne qui exerce ou souhaite exercer le
commerce de détail de manière indépendant et pour son propre compte. Alors la
société tend à faciliter la formation d’un centre ou d’un magasin commercial qui
appartient au commerçant. Elle lui donne le droit de vendre de marchandise d’une
célèbre marque, avec le droit d'utiliser cette marque et le nom commercial dans son
magasin à condition que le commerçant s’interdise à ne pas vendre d'autres
marchandises concurrentes à cette marque »806.

457. D’une manière générale, la franchise peut être définie comme un contrat du
droit commercial par lequel un commerçant dit « le franchiseur », concède à un autre
commerçant dit « le franchisé », le droit d'utiliser tout ou partie des droits incorporels
lui appartenant (nom commercial, marques, licences), généralement contre le
versement d'un pourcentage sur son chiffre d'affaires ou d'un pourcentage calculé sur
ses bénéfices.

458. Sur cette assise, vu que le franchisé est un commerçant agissant pour son
propre compte -qualité commune en droit français et libanais- ; cette qualité le
rapproche du distributeur unique au sens du deuxième alinéa de l’article premier du
décret-loi N. 34/67 en tant que commerçant agissant pour son propre compte en vue
d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ; il se différencie toutefois par :

806
TI Beyrouth., décision n° 28/96 du 30/1/92, Rev. al Adl, 2002, n° 3.
-230-

459. I) L’indépendance dans le contrat de franchise est une indépendance étroite


et limitée. Ce droit préserve au concédant de larges pouvoirs, qui n’ont pas de
similaires dans le contrat de représentation commerciale. Le représentant commercial
jouissant d’une indépendance plus vaste. Notons l'existence d'une intervention
continue du franchiseur à travers la surveillance du travail du franchisé et la
contribution à son organisation : Idée adoptée par M. LICARI tout en considérant
comme piliers du contrat de franchise : « la communication d’un savoir-faire par le
franchiseur au franchisé et l’activité de distribution au sens large : la promotion du
produit et la surveillance du marché en cause par le distributeur »807.

460. II) La clause de l’exclusivité ne constitue pas une condition préalable et


essentielle pour la création de la franchise comme c’est le cas de la représentation
commerciale808 . Sur ce point, M. le professeur FERRIER avait la position la plus
élaborée en retenant que « l’exclusivité territoriale dans la franchise doit être
conçue… comme un élément du savoir-faire, c'est-à-dire comme l’assiette territoriale
de la réussite initiale du franchiseur dans son point de distribution modèle, et par la
suite de la réussite de chaque franchisé »809. Ainsi, la jurisprudence a nettement
choisi de ne pas retenir l’exclusivité territoriale parmi les éléments constitutifs du
contrat de franchise sauf lorsqu’elle est nécessaire pour assurer la réussite
commerciale du franchisé810. En d’autres termes, la franchise existe avec ou sans

807
F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 117. Il s’agit de noter que, M. LICARI considère le contrat de franchise comme
un contrat d’entreprise ou une forme atypique du contrat de louage d’ouvrage, puisque le pouvoir de
contrôle et de direction du maitre y est très aigu, alors que dans la forme idéale-typique du louage
d’ouvrage de telles prérogatives sont absentes ou faibles.
808
L’exclusivité est nécessaire à la qualification du contrat de représentation commerciale au sens
du décret-loi n° 34/67 comme nous allons le montrer postérieurement.
809
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 703 : L’exclusivité
territoriale est moins justifiée par la protection de l’investissement du franchisé, qu’imposée par la
réitération de la réussite par le franchisé. Cependant le règlement n° 487/1988 exemptait la réservation
de territoire au profit des franchises, au motif qu’elle était indispensable pour protéger leur
investissement : Règl. n° 487/1988, art. 2, a, et consid 10 ; Dans le même sens, CA Paris, 16 déc. 1992,
D. 1995, somm. p. 78, obs. D. FERRIER.
810
Cass. com., 19 nov. 2002, Gilde Aurore c/ Duhoo, D., 2003 p. 2427, obs. D. FERRIER ; CA
Paris, 5e Ch. A, 12 janv. 1994, Adeve c/ Ada, Juris-Data n° 020468 ; Cass. com., 16 janv. 1990, D.,
1990, Somm., p. 369 ; Cass. com., 28 janv. 1980, JCP, 1981, II, 19533, note J. AZEMA.
-231-

clause d’exclusivité811, qui n’est jamais le cas pour la distribution exclusive du droit
libanais, ni pour la concession exclusive du droit français.

461. En effet, nous ne voyons pas d’impossibilité de priver le franchisé de la


protection des dispositions du décret-loi N. 34/67 au sens du deuxième alinéa de
premier article, à la condition de l’exigence d’une exclusivité en agissant pour son
propre compte en tant que commerçant.

Paragraphe 2 : La portée de l’exigence

462. Voyons le poids de l’unicité sur l’atteinte au monopole dans le domaine


commercial. Une célèbre affaire évoquant la question d’un monopole dans un ancien
arrêt libanais, liée à l’exclusivité du sel marin par une seule personne, où il a été jugé
ce qui suit :

« Il est justifié, à partir des documents du procès, que les demandeurs -


producteurs du sel sur la côte libanaise- se sont mis d’accord pour limiter la
distribution et la liquidation du sel marin à la partie défenderesse, suivant une
convention, au terme de laquelle, et se sont engagés à vendre toute la production de
sel à la seule défenderesse qui, à son tour s’est engagée à acheter la totalité de la
production,

Après un laps de temps, la partie défenderesse a notifié aux demandeurs qu’elle


ne pourrait plus recevoir les quantités de sel, après qu’elle était poursuivie en justice
par le procureur général, au titre que le contrat conclu entre eux est illicite,

Attendu que les demandeurs demandent la résiliation du contrat objet de ce


procès par application de la clause pénale, la partie défenderesse demande le rejet de
ce procès du fait que le contrat est d’une nullité absolue face à l’illicéité de sa cause,

Attendu que la cause illicite ou illégale, est celle contraire à l’ordre public, aux
bonnes mœurs et aux dispositions obligatoire de la loi,

811
L. AMIEL-COSME, Les réseaux de distribution, préf. Y. GUYON, LGDJ, 1995, n° 14 à 17.
-232-

Attendu que la cause de passer contrat est le motif personnel qui engage la partie
contractante à construire le contrat,

Attendu que le motif qui a porté les producteurs du sel à conclure la convention
citée ci-haut, est le fait de limiter la distribution et la liquidation du sel marin entre
eux comme assurance pour leurs propres intérêts…

La Cour après en avoir évalué, trouve dans cette convention ce qui viole la règle
d’offre et de demande dans le marché du commerce au motif de la poursuite de la
partie demanderesse par le procureur général suivant les dispositions de l’art. 658 C.
pén., relié à la concurrence déloyale, et par contre la cause du contrat sera illicite
face à son contradiction avec l’ordre public »812.

463. Il est remarquable que la clause de l’exclusivité de la représentation diffère


de l’exclusivité de distribution et liquidation des produits, suivant la société
du « monopole ». C’est le décret-loi N. 32 du 5 août 1967 imposant des règles
spéciales aboutissant à la lutte contre le monopole et la hausse des prix, modifié par le
décret-loi N. 73/1983, liée à l’acquisition des produits et des marchandises et des
fruits et leurs commercialisations, qui dans son article 14 impose ce qui suit :

« Est considéré monopole :

1- Chaque convention ou entente aboutit à la lutte contre la concurrence dans la


production des produits, marchandises et fruits, ou leur achat, importation ou
liquidation, et a pour effet de faciliter l’augmentation de leurs prix d’une manière
artificielle ou dans le but d’empêcher la diminution de ses prix.

2- Chaque convention ou entente contenant des services permettant de lutter


contre la concurrence dans son exécution aura pour but de faciliter l’augmentation
de ses charges d’une façon artificielle ou afin d’empêcher la diminution de ces
charges.

3- Chaque acte aboutissant à la collection des matières ou marchandises ou


fruits, ou à ses disparitions dans le but de hausser ses valeurs, ou par la fermeture de

812
TI Liban Nord, décision n° 504, 24 déc. 1970, Rec. Hatem, vol. 150, p. 20, 21.
-233-

ses bureaux ou ses dépôts pour des raisons illicites afin de retirer un bénéfice, ne
constitue pas un résultat normal pour la règle d’offre et de demande ».

464. Il résulte de ces dispositions, que le législateur parle du « motif » objet du


monopole. D’où l’utilité de distinguer entre ententes licites et illicites :

- Est considéré ententes licites, celles qui aboutissent à la prévention des abus de
la concurrence, à la réglementation des prix de vente, et à la liquidation des produits.

- Est considéré ententes illicites, et par contre prohibées, celles qui aboutissent à la
lutte contre la concurrence et d’avoir le contrôle du marché par la collection des
matériaux ou produits afin de hausser leur valeur et affaiblir la règle d’offre et de
demande.

465. A partir de la définition de cet acte suivant ce décret-loi, chaque convention


ou entente qui aura pour objet le monopole sera illégale, car elle aura pour effet de
contrôler la quantité de production, sa qualité et les prix : dans le même sens, « est
nulle la clause d'exclusivité tendant à assurer à un distributeur de presse le monopole
sur une partie substantielle du marché de la presse écrite, dès lors qu'elle n'est pas
économiquement justifiée »813. Ce qui forme une violation à la règle d’offre et de
demande ainsi qu’à la règle de la libre concurrence814.

466. L’idée maitresse découlant de cet arrêt, est le motif qui a porté les
producteurs du sel à conclure la convention avec la partie défenderesse, aboutissant à
l’exclusivité de la distribution et la liquidation du sel dans leur intérêt commun. Mais
le tribunal, a adopté le critère d’entente pour arriver à cette solution. En réalité, le
critère juridique qui permet de distinguer les ententes professionnelles licites de celles
illicites, est le critère de « validité » et non celui d’entente ; solution admise par M.
BLAISE : « …Mais il est unanimement reconnu que cette exigence de la loi permet

813
CA Paris, 12 déc. 1996, JCP, éd. E, 1997. II. 953, note M. BEHAR-TOUCHAIS.
814
E. EID, Les actes de commerces, commerçants et fonds de commerce, 1992, p. 314.
-234-

de distinguer les ententes licites de celles qui tombent sous le coup de la disposition
pénale. Il s’agit donc d’un critère de validité et non d’existence de l’entente »815.

467. Cependant le tribunal a considéré que la cause de l’entente ou de la


convention conclue est illicite, ce qui conduit à dire que cette convention est d’une
nullité absolue : idée inspirée de la thèse de M. BLAISE : « …Cette conséquence ne
provient pas d’un défaut de rédaction du texte, elle signifie, au contraire, que
l’entente tombe sous le coup de la loi dès sa formation, dès que l’accord a pris forme,
et avant toute activité et toute réalisation d’un résultat »816. En conséquence, la
convention qui avait pour but de retirer des bénéfices injustifiés et illicites, est
considérée elle-même comme illicite et par suite nulle.

468. En effet, inutile de rappeler que tout monopole n’est pas considéré
illicite817 : Raison pour laquelle, il s’agit de chercher le but et l’objet des conventions

815
J.-B. BLAISE, Le statut juridique des ententes économiques, préf. R. ROBLOT, Litec, 1964, p.
172.
816
Ibid.
817
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1, 1970, p. 344, n°
179 : « Par contre, sont valables les conventions ou ententes intervenues en application d’un texte
légale (par exemple dans le secteur agricole relatives aux mesures d'adaptation aux situations de
crises pour résorber la surcapacité pour rétablir l'équilibre du marché et stabiliser les prix : Décret. nº
96-500, 7 juin 1996, relatif aux accords entre producteurs agricoles et entreprises concernant des
mesures d'adaptation à des situations de crise, JO nº 134, 11 juin 1996) ou celles ayant pour but le
développement économique (rationalisation) » ; CA Versailles, 29 mars 2001, n° 1998-3896 ; M.
GERARD, Les modes de gestion des services publics locaux en Allemagne et le problème de
l’ouverture à la concurrence, RFDA 1995, p. 462 ; Y. GUENZOUI, Entente et contrat : le trouble
notionnel, RTD com., 2006 , p. 273 : « L'on peut, en effet, appréhender ce processus de rapprochement
dans l'entente comme la perte d'autonomie, d'indépendance chez les acteurs économiques,
rapprochement impliquant donc un abandon progressif de la liberté commerciale. L'identification de
ces étapes, condensées dans ce processus, nous permettra dès lors de déceler le seuil distinguant les
ententes illicites des ententes licites » ; l'article 81, paragraphe 1er, du traité de Rome (ex-article 85)
interdit tout accord entre entreprises qui a pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de
fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun : « Sont incompatibles avec le marché
commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et
toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui
ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à
l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à:
a) fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de
transaction,
b) limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les
investissements,
c) répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement,
d) appliquer, à l'égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations
équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence,
-235-

conclues pour éviter le monopole et par la suite la sanction. Si l’objet est licite la
sanction sera évitée, tel le fait de se grouper pour obtenir l’unification des prix de
fabrication afin d’en empêcher l’avilissement818, ou bien le fait de non déterminer une
hausse factice des prix, mais de faire cesser l’avilissement que leur a fait subir la
concurrence locale819. Mais s’il apparaît que les ententes professionnelles aboutissent
à la réduction de la concurrence ou son annulation en faveur de l’intérêt personnel ou
commun des contractants, seront considérées illicites, à cause de leur violation du
principe de la liberté du commerce et de l’industrie820 et par contre contraire à l’ordre
public.

e) subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les partenaires, de prestations


supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de
ces contrats ».
818
Cass. 3 mai 1911, D.P., 1912-1-33 : « ce fait ne constitue pas une violation de l’art. 419 ancien
code pénale », dans son 2e chapitre relative au crimes et délits contre les propriétés notamment la
violation des règlements relatives aux manufactures, au Commerce et aux arts qui énonce ce qui suit :
Tous ceux qui, par des faits faux ou calomnieux semés à dessein dans le public, par des suroffres faites
aux prix que demandaient les vendeurs eux-mêmes, par réunions ou coalitions entre les principaux
détenteurs d'une même marchandise ou denrée, tendant à ne la pas vendre, ou à ne la vendre qu'à un
certain prix, ou qui par des voies ou moyens frauduleux quelconques auront opéré la hausse ou la
baisse du prix des denrées ou marchandises ou des papiers et effets publics au-dessus ou au-dessous
des prix qu'aurait déterminés la concurrence naturelle et libre du commerce, seront punis d'un
emprisonnement d'un mois au moins, d'un an au plus, et d'une amende de cinq cents francs à dix mille
francs. Les coupables pourront de plus être mis, par l'arrêt ou le jugement, sous la surveillance de la
haute police pendant deux ans au moins et cinq ans au plus : cité par E. ABOU EID, Droit commercial
entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t.
2, 2005, p. 78.
819
CA Paris, 18 oct. 2000, Gaz. Pal., 2002, Somm. 170 ; F. DURET-ROBERT, Droit du marché de
l'art, D. Action, 2004 ; L. MAUGER-VIELPEAU, Les ventes aux enchères publiques, préf. P.-Y.
GAUTIER, Economica, 2002 ; R. SEMMIER, Le régime juridique de la vente sur folle enchère, Gaz.
Pal. 2002, 2, doctr. 1232 ; Articles J.-C. HONLET. et O. de BAECQUE, « La réforme des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques (à propos de la loi no 2000-642 du 10 juill. 2000) »,
D., 2001. Chron. p. 141 ; R. MAURICE, Le commissaire-priseur et les ventes publiques de meubles,
préf. A. ROBERT, LGDJ, 1971 ; Cass. civ. 26 oct., 1921, D.P., 1925-1-120 : cité par E. ABOU EID,
Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le
décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 77.
820
Il est possible que la convention de fixation de prix soit une entrave pour les contractants, mais il
faudrait que ce fut le commerce considère dans son sens absolu et relativement au droit des tiers qui fut
gêné dans sa liberté pour que les tribunaux puissent, dans un intérêt général, l’annuler. Ne nuisant en
rien la liberté du commerce, puisqu’elle n’imposait d’obligations qu’aux contractants… : Cass. Req. 4
janv. 1842, Sirey, 1842-1-231 : cité par E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la
jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 84.
-236-

469. L’article L. 420-1 C. com. du doit français821 va dans le même sens ainsi
que l’avis doctrinal de MM. De JUGLART et IPPOLITO : « Sont prohibées toutes
ententes, conventions, coalitions soit ayant pour effet d’empêcher, de restreindre ou
de fausser le libre jeu de la concurrence822, ou bien ayant pour objet d’instaurer une
discipline collective de comportement sur le marché823 en modifiant les conditions
normales824; non seulement sont interdites les ententes « horizontales » entre
producteurs ayant la même activité, mais aussi les « intégrations verticales » entre
producteurs et agents commerciaux, ou revendeurs qui se traduisent par les « clauses
d’exclusivité » »825.

470. Une question nous interroge en revenant aux faits de l’arrêt précité : Le
contenu de la convention et son but à limiter la distribution et la commercialisation du
sel sur la côte libanaise par une seule personne, constituent-ils un monopole au sens
du décret-loi N. 32/67 ?

471. M. ABOU EID a répondu à cette question dans son étude sur la
représentation commerciale au sens du décret-loi N. 34/67, en analysant cette affaire;
il pose la question suivante: la partie demanderesse était-elle seule propriétaire de
l’extraction et de la production du sel marin au Liban ?

821
D'autres clauses ont été déclarées illicites, sur le fondement de la prohibition des ententes
empêchant, aux motifs qu'elles restreignaient ou faussaient le jeu de la concurrence sur un marché
pertinent (C. com., art. L. 420-1).
822
En faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient ou de vente, ou en favorisant une hausse
artificielle des prix, ou en entravant le progrès technique, ou en limitant l’exercice de la libre
concurrence par d’autres entreprises, par exemple les ententes entre entreprises pour fixer un tarif
commun, se repartir des quotas de fabrication ou géographiquement la clientèle : M. MALAURIE-
VIGNAL, L’abus de la position dominante, LGDJ, 2002, n° 16 et s. ; G. CANIVET et C.
CHAMPALAUNE, La notion de marché dans la jurisprudence de la chambre commerciale, financière
et économique de la Cour de cassation, Mél. P. BEZARD, Montchrestien 2002, p. 257 et s. ; L.
BIDAUD, La délimitation de marché pertinent en droit français de la concurrence, Litec, 2001, p. 78 ;
B. de BELVAL, Essai sur la notion juridique de marché, th., Lyon 3, 2000, n° 85.
823
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la concurrence interne et européen, 5e éd., D., 2011, n°
147 et s. ; M. PEDAMON et H. KENFACK, Droit commercial, Commerçant et fonds de commerce,
Concurrence et contrat de commerce, 3e éd., D., 2011, n° 618 et s.
824
A. BALLET, L’exclusivité et le réseau de distribution, th., Montpellier, 2005, n° 67.
825
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Cours de droit commercial, vol. 1, 11e éd., Montchrestien,
1995, p. 179 et s.
-237-

« - Si cette production est la seule au Liban, il est permis de dire que l’exclusivité
de la distribution et de la commercialisation du sel par la partie défenderesse,
constitue un monopole illicite. Le cas échéant, le but de cette exclusivité sera un objet
personnel, au terme duquel les contractants aboutissent à la réduction de la
concurrence et de la liberté de commerce et d’industrie.

- Mais si cette production existait sur toutes les côtes libanaises, et non limitée à
la partie demanderesse, on ne peut pas parler de monopole. Le cas échéant, on peut
dire que les propriétaires de l’extraction du sel ont limité la distribution au nord du
Liban à la partie défenderesse, et par la suite seront applicables les dispositions du
décret-loi N. 34/67 liés à la représentation commerciale sans aucun dommage à la
liberté de commerce ».

472. De tout ce qui précède, nous pouvons déduire d’après cet avis doctrinal que
nous suggérons de suivre une idée essentielle à la rédaction de la clause d’exclusivité
dans le contrat de représentation commerciale, au terme de laquelle, le commerçant
acquiert la qualité de distributeur exclusif unique. C'est dire qu’il faut toujours
chercher le but pour lequel la convention d’exclusivité sera conclue, de façon qu’elle
soit toujours licite et non dans l’intérêt personnel des parties.
-238-

Conclusion du deuxième titre

473. En conclusion, il ressort de tout ce qui précède que le représentant


commercial n’est pas un intermédiaire du commerce sui-generis. La représentation
commerciale est un statut qui s’applique à différentes catégories de personnes qui
remplissent certaines conditions, sachant que les textes relatifs à leurs catégories
respectives demeurent toujours applicables dans la mesure où ils ne sont pas en
contradiction avec les dispositions du statut d’agent commercial, tel que prévu au
décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967.

474. Nous attirons, cependant, l’attention au fait que le représentant, au Liban,


n’est pas simplement le mandataire, mais aussi le distributeur exclusif. Cette
assimilation est, toutefois, très significative, car elle sous-entend que le distributeur
exclusif ou le concessionnaire exclusif partage des qualités communes et une situation
comparable à celle des mandataires commerciaux826. Par conséquent, l’article premier
sous-entend des conditions déterminées que doit remplir l’intermédiaire du commerce
pour qu’il puisse jouir du statut prévu au décret-loi N. 34/67, conditions qui nous
aident par un effort de synthèse pour mettre en lumière le régime du représentant
commercial à lequel s’applique le décret-loi.

826
CA Paris, 29 juin 1960, Gaz. Pal. 1960, 2, 200.
-239-

Conclusion de la première partie

475. Le droit français, où la représentation conventionnelle s’identifie au mandat


et le cumul de celui-ci avec les contrats de travail ou d’entreprise sans être
expressément reconnue, distingue les différents représentants commerciaux en
fonction du degré de dépendance ou d’indépendance du représentant. Le cas échéant
se vérifie une échelle entre subordination juridique totale ou relative, avec une
multitude de nuances entre les deux. Dans le cadre de l’identification de la
représentation commerciale, sur le terrain de la comparaison du droit libanais et
français, il était nécessaire tout d’abord de préciser la notion même de représentation
commerciale, en tant que notion générique composée de différents régimes faisant
partie de la même famille en droit français, avant de voir l’unique notion du droit
libanais. Suivant ce dernier, nous avons traité la qualité de représentant en tant que
mandataire agissant pour le compte de son représenté et à titre exceptionnel, en tant
que commerçant agissant pour son propre compte après avoir acquis la qualité d’un
représentant ou d’un distributeur exclusif unique.

476. En revanche, d’une manière générale, la qualification juridique consiste à


attribuer une qualité juridique à une chose, une personne, une activité. Il s'agit, pour le
juriste, de passer d'un élément de fait à une catégorie juridique, au moyen de critères
juridiques. Les qualifications juridiques du représentant commercial, dans la première
partie de notre étude, nécessitent naturellement la détermination des effets résultant.
Ces effets sont le fruit d’un régime applicable, qui, d’une part s’articule, autour du
postulat de la position de faiblesse qu’occupe l’agent commercial par rapport à son
commettant827, et d’autre part, l’application de ce régime dépend de la loi qui est
applicable au contrat que ce soit interne ou international 828. Ce qui nous incite à
introduire une deuxième partie à notre étude qui emporte les conséquences du régime
de protection pour le représentant commercial selon le décret-loi N. 34/67, en les
comparants avec le droit français.

827
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 201.
828
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 463.
DEUXIÈME PARTIE

LES EFFETS DE LA PROTECTION


DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DECRÉT-LOI N. 34/67
-241-

477. La représentation commerciale étant un contrat né par la rencontre des


volontés entre un représentant et un représenté afin de gérer les rapports entre eux,
elle est régie par les règles générales des obligations et des contrats du droit libanais.
Cependant, ce contrat, du moment qu’il régit des situations touchant les secteurs
commercial et économique, présente des particularités de détail visant à assurer la
protection qui s’impose lorsqu’il s’agit de rapports économiques829 entre personnes
présumées en général être de force économique égale830. Protection issue du principe
de la sécurité juridique qui réclame que ces personnes bénéficient de manière
équivalente du même statut protecteur831. Ce dernier est incarné par l’exclusivité qui,
dûment enregistrée, impose aux tiers son respect et protège le commerçant contre les
agissements frauduleux de ces tiers.

478. Comme les règles de formation des contrats, les règles générales relatives
aux effets des contrats s’appliquent, en principe, aux effets du contrat de
représentation commerciale. Antérieurement à 1967, c’est dire, avant l’entrée en
vigueur du décret-loi N. 34, c’était le droit commun des contrats qui s’appliquait
s’agissant des clauses d’exclusivité. Le principe de l’effet relatif des contrats était la
règle primordiale par excellence qui s’appliquait. La situation, alors, était très
semblable à la situation actuelle du droit français en la matière et ce, en vertu du
principe de la force obligatoire des contrats et les règles du mandat832. Nous ne
étendrons pas, pour le moment, sur les détails de ces règlementations, car, afin
d’éviter des redites, il en sera question à l’occasion de chaque élément qui sera étudié
ci-après, et ce, à titre de comparaison pouvant mieux mettre en valeur les buts
véritables et l’esprit du droit libanais en matière.

829
La relation commerciale est en effet comprise au sens large comme une « relation
professionnelle », peu important qu'elle soit ou non commerciale. Elle doit être entendue aussi comme
« une notion économique et non juridique » : CA Paris, 20 janv. 2011, n° 10/1509 ; On mesure en effet
le fossé qui sépare un agent exerçant tout seul sur un territoire déterminé de l’agent organisé en société
anonyme, actif à l’échelle d’un pays : J.-M. LELOUP Agents commerciaux, 2001, n° 103, cité par S.
MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec,
2003, n° 246.
830
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 97.
831
La protection d’une catégorie de personnes mise en place par une législation concerne tous les
membres de cette catégorie : S. MEGNIN, idem.
832
Cass. civ. n° 63 du 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, RJL,
1963, p. 957 ; CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill., 1965, p. 818.
-242-

479. C’est ainsi que, d’une part, les rapports des parties entre elles sont régis par
les termes de leurs contrats qui ne seraient pas contraires aux dispositions impératives
du décret-loi N. 34/67, et ce, en vertu du principe de la force obligatoire des
contrats833. D’autre part, les rapports des parties à l’égard des tiers seront régis par le
principe de l’effet relatif des contrats834.

480. Le droit français ne reconnaît pratiquement aucun effet particulier à la


convention d’exclusivité autre que ceux qui résultent du principe de l’effet relatif des
contrats, notamment l’opposabilité aux tiers qui en avaient eu connaissance ; dès lors,
le fait de méconnaître consciemment une clause d'exclusivité était générateur de faute
et constitutif de concurrence déloyale835. Alors que le décret-loi libanais N. 34/67,
notamment le troisième alinéa de son deuxième article reconnaît que la clause
d’exclusivité puisse être opposable aux tiers : « La clause de représentation exclusive
n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été dument publiée par le
représentant par voie d’inscription au registre du commerce, elle n’est pas applicable
pour les produits alimentaires à l’exception des produits de consommation spéciale
qui seront déterminés par décret pris en Conseil des Ministres ». Ce concept a été
rigoureusement appliqué par les tribunaux, en consacrant de la sorte le caractère
absolu de l’opposabilité de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers une fois celle-ci
publiée836. Cependant, la loi a pris soin de sauvegarder les droits des tiers, à cet égard.

833
Suivant l’art. 1134 C. civ.: « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui
les ont faites ; Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes
que la loi autorise ; Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Art. 221 C.O.C. : « Les contrats
établis d’une manière légale sont obligatoires pour les contractants, et doit se comprendre, s’expliquer
et s’exécuter selon la bonne foi, l’équité et la coutume ».
834
Art. 1165 C. civ.: « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C. : « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne, c’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
835
P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors réseau,
(A propos des affaires Leclerc-parfumerie), D., 1990, p. 43 : Pour des clauses d'exclusivité territoriale
de vente : Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199 ; Pour une clause d'approvisionnement
exclusif : Cass. com., 11 oct. 1971, Bull. civ. IV, n° 237 ; D. 1972.120.
836
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4, p. 1550 ; Juge d’exécution Al Maten,
décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct.
1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168.
-243-

Elle a exigé leur information par voie d’inscription au registre du commerce, bien que
la protection assurée aux tiers par ce registre soit contestable837.

481. Cependant, ce n’est pas à dire que le décret-loi N. 34/67 a réglé tous ces
problèmes. S’il en a réglé certains, tel que l’affirmation du principe de l’opposabilité
de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers, il a, par contre, totalement ignoré les
effets de cette exclusivité dans les rapports des parties entre elles : ce sera le sujet de
notre premier titre. Un second titre sera consacré à la vérification de la négligence de
nombreux aspects afférents aux rapports des parties avec les tiers, notamment la
délimitation de la portée de l’exclusivité ainsi que la valeur de l’inscription.

837
Idée que nous reprendrons en détail à l’occasion de l’étude de la valeur de l’inscription en
question.
TITRE PREMIER

LES EFFETS ENTRE LES PARTIES


-245-

482. Les rapports des parties entre elles sont régis par les termes de leurs
contrats qui ne seraient pas contraires aux dispositions impératives du décret-loi N.
34/67, et ce, en vertu du principe de la force obligatoire des contrats. C’est ainsi que
tous les effets entre les parties découlent du droit commun du contrat où les règles
générales relatives aux effets des contrats s’appliquent, le cas échéant nous n’y
revenons pas car ce qui nous intéresse c’est qui est spécifique au décret-loi N. 34/67.

483. Toutefois si ce sont les règles de la force obligatoire des contrats qui
s’appliquent dans les rapports entre les parties, cela ne veut pas dire qu’il suffit de s’y
référer pour établir le régime des conventions d’exclusivité dans les rapports des
parties à un contrat de représentation commerciale. Ce dernier bénéficie d’un régime
juridique protecteur tout aussi particulier que sa nature : Solution suivie par M. le
professeur FERRIER quand il confirme que le régime de l’agence commerciale,
inspiré par le souci de protéger le mandataire dans sa relation avec le mandant, ne
relève pas essentiellement du droit des contrats838. A ce titre, aucune divergence de
principe n’existe entre droit libanais et français, mais il existe toujours, des
divergences de détails qui ne sont pas susceptibles de modifier les grandes lignes
d’une étude à cet égard. Ces détails seront mentionnés en temps opportun et
développés uniquement dans la mesure où ils permettront une meilleure description
de l’état du droit libanais.

484. Toute la finalité du statut spécial du représentant commercial réside dans le


fait de vouloir contrebalancer la dépendance réelle ou supposée du représentant en
instituant un système protecteur lors de l’exécution du contrat de représentation
commerciale : conséquence d’un objectif de stabilité du lien contractuel et de sa
rentabilité. D’une part, comme la représentation commerciale relève du domaine
contractuel, et, comme la loi ne règlemente pas les obligations des parties résultant
des clauses d’exclusivité, il est normal que les parties règlementent leurs obligations à
leur guise.

838
M. FERRIER considère qu’en plus de l’application du droit des contrats, il y aura lieu parfois à
l’application du droit de la concurrence pour protéger aussi les fournisseurs ou les agents concurrents et
cela suite à l’importance du rôle joué par l’agent commercial dans la diffusion des produits : D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 197.
-246-

485. D’autre part, une telle exclusivité est depuis longtemps présentée comme
caractéristique des réseaux de distribution839 et les obligations d'exclusivité sur
lesquelles elle repose comme fondamentales840. Dans les rapports entre les parties,
elle impose au cocontractant bénéficiaire de s’abstenir d’effectuer toute transaction du
genre couvert par l’exclusivité. Elle prend la forme d’une atteinte à la liberté
d’entreprendre qui en constitue l’aspect majeur et le plus classique du principe de la
liberté du commerce et de l’industrie. L’atteinte est purement conventionnelle. Cet
aspect le mieux protégé, normalement par sa consécration constitutionnelle841, est
aussi le plus limité par les pouvoirs publics842.

486. La singularité de ce régime résulte de la conjugaison de deux phénomènes :


La protection du représentant commercial dans le déroulement du contrat et à son
achèvement. Ces deux phénomènes engendrent les deux chapitres de ce titre. Dans un
premier chapitre, il sera question des causes de la protection du représentant
commercial dans l’exécution du contrat. Un second fera l’objet de la phase de
l’extinction du contrat de représentation commerciale, au regard des causes et des
effets de la fin du contrat.

839
B. TEYSSIE, Les groupes de contrat, préf. J.-M. MOUSSERON, LGDJ 1975, t. 139, p. 108 :
cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE- LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 1.
840
J.-M. LELOUP, Le partage de marché par les réseaux de vente et les réseaux de distribution,
Dix ans de droit de l'entreprise, éd. Librairies techniques, 1978, p. 956 : cité par N. FERRIER, L.
SAUTONIE- LAGUIONIE, idem.
841
La liberté d’entreprendre a été reconnue par le Conseil Constitutionnel comme s’imposant au
législateur, CE Sect., 23 oct. 1981, Ministre de l’économie c/ Société Sagmar : « la liberté du
commerce ne s’exerce que dans les limites fixées par la loi ». Elle a une valeur supérieure à celle de la
loi et des limitations peuvent lui être apportées à la condition qu’elles soient d’origine législative : CE,
22 mars 1991, Association fédérale des nouveaux consommateurs et Société Tousalon.
842
La liberté d’entreprendre peut être soumise aux contraintes de l’ordre public. En effet, la
sécurité, la salubrité, la tranquillité ou la santé publique (CE, 25/11/94, Ministère d’Etat, Ministère de
l’intérieur et de l’Aménagement du territoire : fermeture d’une boucherie-charcuterie) permettent aux
autorités de police de réglementer l’exercice des professions dans la mesure où cette activité risque d’y
porter atteinte. Sa réglementation doit tenir compte des circonstances de temps et de lieu et être
strictement justifiée par les menaces que son exercice comporte pour l’ordre public : J. AURELIE et C.
ZYLBERBOGEN, Le CE et la liberté du commerce et de l’industrie, publié sur site Internet
www.droitfil.free.fr
-247-

PREMIER CHAPITRE

L’EXCÉCUTION DU CONTRAT

487. Attendu qu’en principe, le représentant commercial est le mandataire qui


agit au nom et pour le compte du mandat ; attendu qu’à titre d’exception, il agit en son
nom et pour son propre compte sous forme de distributeur exclusif : il demeure que
certaines dispositions relatives au mandat seront applicables, et notamment, celles de
la révocation et de l’extinction du mandat. Cependant, si les obligations générales
découlant du mandat, et si la détermination de l’étendue des pouvoirs du mandataire
trouvent leur application inchangée au contrat de représentation, c’est que le décret-loi
N. 34/67 est resté silencieux sur ce point843.

488. En revanche, ce décret-loi s’est prononcé sur d’autres points touchant la


représentation. Dans son article 3, le décret-loi N. 34/67 traite des obligations
particulières résultant du contrat de représentation commerciale844. Mais si les
dispositions de l’article 3 déjà traité ne constituent aucune modalité particulière des
obligations du mandataire étant donné que la détermination de l’objet et de l’étendue
du mandat ressort exclusivement de la volonté des parties, par contre, les dispositions
de l’article 4 s’écartent des règles d’extinction du mandat.

489. Le législateur marque bien ainsi la nature du contrat de représentation


commerciale, tout entier inspiré par le concept d'intérêt commun. Principe retenu pour
la première fois par la Cour de cassation le 11 février 1891, qui créa la notion de

843
La représentation commerciale n’étant pas une forme sui-generis de l’entremise commerciale, ce
sont les règles générales du mandat qui s’appliquent au cas de silence du décret-loi n° 34/67 régissant
la représentation commerciale : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif
libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 278.
844
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
-248-

mandat d'intérêt commun en jugeant que « lorsque le mandat a été donné dans
l'intérêt du mandant et du mandataire, il ne peut pas être révoqué par la volonté de
l'une ou l'autre des parties, mais seulement de leur consentement mutuel, ou pour une
cause légitime reconnue en justice ou enfin, suivant les clauses et conditions
spécifiques dans le contrat »845.

490. Au sens du décret-loi N. 34/67, il s’agit, soit d’un mandant ou soit d’une
distribution exclusive846. L’article quatre indique que « le contrat de représentation
commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ».
En effet, si, normalement, en vertu d’un mandat ordinaire, le mandataire doit exécuter
l’acte objet du mandat dans l’intérêt du mandant847, cette exécution devrait être plus
sévèrement mesurée lorsque cette même opération est aussi faite par le représentant
dans son propre intérêt, ou si le représenté a accordé la représentation au représentant
dans l’intérêt de ce dernier848.

491. De son côté, l'article L. 134-4 du Code de commerce français affirme les
principes directeurs de l'exécution du contrat par une progression bien construite.
L'alinéa premier recopie textuellement l'article 3, alinéa 1er, du décret du 23
décembre 1958 ancien : « Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et
leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties ». Il s’agit en premier
lieu de l’intérêt de la partie représentée, ensuite de l’intérêt du représentant à l’essor
de l’entreprise par création et développement de la clientèle849. Celui-ci est d’un
intérêt certain : il consiste principalement dans l’exercice professionnel850 de la

845
Cass. civ., 11 févr. 1891, DP 1891.1.197 ; V. aussi Cass. req. 8 avr. 1857, DP 1858.1.134 ; 6
janv. 1873, DP 1873.1.116 ; Cass. civ., 13 mai 1885, DP 1885.1.350 : cité par J.-M. LELOUP, Agent
commercial, D., 2012, n° 3.
846
Art. 1 du décret-loi n° 34/67.
847
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 141.
848
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 310.
849
Cass. civ., 13 mai 1885, DP 1885, I, p. 350, S. 1887, I, p. 220, première décision publiée, elle
concernait un mandat de gestion d’immeuble : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.
note. 143.
850
T. com., Rouen commenté par J. HEMARD, sans aucune autre référence à la RTD com., 1961,
p. 663, n° 11 : Dans cette espèce, une firme productrice d’huiles fait mandat au représentant de stocker
et de manier ses huiles. Ces derniers ne prospectant pas de clientèle, le tribunal considéra qu’il n’y
avait point intérêt commun.
-249-

représentation, et l’espoir d’un salaire continu et permanent proportionnel aux efforts


qu’il déploie. En d’autres termes, le profit du mandataire et celui du mandant se
trouvent liés dans et par l’accroissement de la clientèle851. En effet, nous suivons
l’avis du M. le professeur FERRIER sur cet intérêt commun852 qui, caractérisé par la
convergence853 durable854 des intérêts du mandant et du mandataire, justifierait la
protection du représentant mandataire855.

492. Il s’agit alors, dans le cas particulier de la clause d’exclusivité dans le


contrat de représentation commerciale, de savoir à quoi les parties se sont engagées.
Par obligation, les contractants sont ordonnés par la finalité commune à laquelle, en
exécution d'un mandat permanent, ils doivent consacrer l'un et l'autre leurs efforts
durables : la part de marché qu'il leur faut conquérir ou maintenir856.

493. En effet, des obligations diverses du mandataire incomberont au


représentant commercial en sa qualité de mandataire857 ; elles n’offrent pas
d’applications particulières au cas de la représentation commerciale. Cependant, il y a
des obligations qui caractérisent chacune des modalités que nous venons de décrire858,

851
Peu important que seul le mandant ait un droit sur la clientèle : Cass. com., 24 nov. 2009, n° 08-
19.596.
852
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 179.
853
Etant donné que dans le contrat de mandat en vue de la diffusion, chaque opération profite aux
deux parties contrairement au mandat traditionnel où le mandataire intervient de manière altruiste dans
le seul intérêt du mandant : idem.
854
A la différence du mandat où le mandataire intervient en principe de manière ponctuelle pour le
mandant, les opérations dans ce cas sont appelées à se répéter. Par ex. : Le diffuseur mandataire trouve
intérêt dans la constitution, en fait d’une clientèle à répétition des opérations pour lesquelles il traite, A.
BENABENT, Le contrat d’intérêt commun, LPA 7 déc. 1990, n° 147, p. 22. Application aux diffuseurs
de presse : Cass. com., 20 fév. 2007, Contrats, conc. consom, 2007, L. LEVENEUR.
855
C. civ. art. 1831-1 : mandat d’intérêt commun dans la promotion immobilière ; art. 1833 C. civ.
en matière de société ; Ph. GRIGNON, Le concept d’intérêt commun dans le droit de la distribution,
Mél. CABRILLAC, Litec, 1999, p. 127 ; T. HASSLER, L’intérêt commun, RTD com., 1984, p. 581.
856
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 47.
857
Suivant les dispositions de l’al.1 de l’art. 1 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial
est le mandataire qui…
858
Comme nous l’avons déjà montré plusieurs reprises, le décret-loi n° 34/67 ne prétend pas
résoudre tous les problèmes, et répondre à toutes les questions susceptibles de résulter de la
représentation commerciale qui consiste dans l’exercice permanent, indépendant et professionnel d’une
activité à titre de mandataire, commissionnaire, courtier ou concessionnaire. Les règles générales du
code de commerce, des obligations et des contrats continueront à régir respectivement, chacune des
catégories de la représentation commerciale, à côté des dispositions, en majorité impératives, du décret-
-250-

de sorte qu’il faille en faire l’énumération. D’où l’utilité de revenir à certaines


obligations à l’occasion de l’étude des différents problèmes touchant le mandat 859, et
devant recevoir application particulière au contrat de représentation commerciale. Ces
obligations appartiennent en général au représentant commercial en tant que
mandataire, mais certaines peuvent être communes avec le représentant commercial
en tant que distributeur exclusif, telle la négociation et la loyauté860.

494. Pour cela, une première section sera consacré aux obligations du
représentant envers le représenté. Dans une deuxième, il s’agira des obligations du
représenté envers le représentant. Le tout dans le cadre de la représentation
commerciale suivant le décret-loi N. 34/67, tout en vérifiant les obligations
communes à tous les représentants commerciaux et ceux qui en sont propres en tant
que mandataires.

loi n° 34/67. Mais dans tous les cas, les règles du mandat seront toujours applicables à toutes ces
catégories, d’abord parce que les contrats de commission et de courtage constituent des formes
particulières du mandat, ensuite, s’agissant de la concession, pour les raisons énoncées à la première
partie. C’est pourquoi, seules les obligations des parties particulières à la représentation commerciale
comme forme complexe de l’entremise commerciale seront traitées dans cette section.
859
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 15.
860
V. Titre 2, Chapitre2 de la 1e partie : Le commerçant ayant la qualité de distributeur exclusif
unique. Il a été jugé qu’ « un concessionnaire exclusif des ventes est réputé un mandataire d’intérêt
commun car il visitait la clientèle, signalait au fabricant l’usage irrégulier de sa marque… » : CA
Lyon, 29 janv. 1964, D., 1965, 185, note R. PLAISANT.
-251-

SECTION 1

LES OBLIGATIONS DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL

495. D’après les règles générales du mandat, et celles particulières au mandataire


commercial, commissionnaire et courtier, diverses obligations incombent à
l’intermédiaire de chaque catégorie. Il en est de même pour d’autres obligations qui
incombent aussi aux représentants ayant la qualité de distributeurs exclusifs uniques.
Dans cette section, il ne sera pas question des obligations particulières résultant de
chaque type d’entremise autre que le mandat, dont les règles s’appliquent à toutes les
catégories précitées, y compris la concession de ventes861.

496. Nous nous sommes interrogés précédemment862 et d’une manière indirecte


sur les obligations du représentant qui, de manière générale, en tant que mandataire,
doit accomplir correctement la mission qui lui est confiée863 avec la diligence d’un
bon père de famille864. C’est-à-dire de se tenir à ce que l’on lui a ordonné865, sans aller
au-delà866, et s’il est un professionnel, de l’accomplir en bon professionnel867. Tels

861
Distribution exclusive : C’est que les dispositions du code de commerce relatives aux
commissionnaires et aux courtiers déclarent expressément les règles du mandat civil et commercial
applicables aux rapports de ceux-ci avec le commettant ou le donneur d’ordre d’une part. D’autre
part, la notion de représentation économique et la continuité des rapports résultant de l’exclusivité
permet d’étendre les principales obligations du mandataire au concessionnaire qualifié de
représentant commercial suivant les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 1 du décret-loi n° 34/67: M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 301.
862
Au cours de la première partie de notre étude suivant les dispositions de l’alinéa premier de
l’article premier du décret-loi n° 34/67.
863
Art. 1991 C. civ. : « Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé,
et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.
Il est tenu de même d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la
demeure ».
864
D’après l’art. 786 C.O.C. cette obligation doit être entendue plus rigoureusement si la
représentation commerciale est un mandat salarié ainsi qu’un mandat d’intérêt commun : J.
HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 39 et s.
865
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 176.
866
Cass. com., 2 déc. 1992, Bull. civ., IV, n° 298.
867
Art. L. 134-4 C. com. al. 3 : « L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon
professionnel » ; Ce qui entraine alors le respect de certains devoirs, comme le devoir de renseignement
notamment : CA Paris, 1e juill. 1992, D., 1993, 79 ; CA Paris, 11 janv. 1994, JCP, éd., E., 1994, Pan.,
463.
-252-

sont les principes directeurs, combinés avec les usages professionnels et les règles du
Code civil relatives au mandat, qui gouvernent les obligations de chaque partie.

497. En d’autres termes, le mandataire doit appliquer les instructions reçues du


mandant et lui rendre compte. La plus importante de ces instructions confiées est la
négociation868 avec des clients potentiels en leur présentant les produits ou services et
en leur assurant la promotion. Cette négociation peut conduire dans certains cas à la
conclusion du contrat au nom et pour le compte du représenté869.

498. Le mandataire doit informer le mandant sur les diligences accomplies dans
l’exécution de la mission qui lui a été confiée870, et, plus précisément, sur le
déroulement et les résultats de cette mission871. En d’autres termes, l’objet de
l'obligation d'informer est ce qui est nécessaire au mandant pour donner des
instructions à l'agent, permettant ainsi une exécution convenable du contrat d'agence
qui les unit872. Ce qui emporte l’obligation de fournir les renseignements utiles873 sur
la situation du marché : information sur la commercialisation de nouveaux produits,
sur l’apparition d’un nouveau fournisseur….874. Il en est ainsi, aussi de l’obligation du

868
V. Supra 1e partie, n° 191 et s.
869
Lorsque c’est le cas, elle est encadrée par les instructions auxquelles l’agent doit se conformer
strictement, (suivant l’art. 1989 C. civ. aux termes duquel le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce
qui est porté dans son mandat) sauf lorsque des adaptions doivent être opérées pour assurer la suite
nécessaire et le préliminaire obligatoire de l’acte dont il est chargé ou pour protéger les intérêts du
mandant : Ph. PETEL, Le contrat de mandant, D., 1994, p. 51.
870
Les informations données au mandant se classent le plus souvent dans les rubriques : diligences
de l'agent, résultats de ces diligences, souhaits de la clientèle, état du marché, actions de la
concurrence : J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
871
En France, cette obligation ne saurait être trop lourde sous peine de requalification du contrat
d’agence commercial en contrat de VRP, voire en contrat de travail : D. FERRIER, Droit de la
distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 210 (compte rendu hebdomadaire incompatible avec
l’indépendance de l’agent : Cass. com., 20 fév. 1959, Bull. civ., 1959, IV, n° 227).
872
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
873
Art. L. 134-4 C. com., vise de manière large l’information, il s’agit d’une disposition
impérative : « Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de
loyauté et un devoir réciproque d'information » ; art. L. 134-16 C. com. ; Rapp. D. 1958, art.
1 : « L’agent commercial doit communiquer à son mandant toute information nécessaire à l’exécution
de son contrat » : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., note 230.
874
L’agent qui bénéfice d’une réelle compétence au regard du marché sur lequel il intervient peut
être en raison de cette obligation amené à participer à l’élaboration de la politique commerciale du
mandant. Ainsi dans les contrats concernant des marchés étrangers où des exigences règlementaires
liées à la normalisation des produits et des incertitudes commerciales liées au contexte économique
-253-

mandataire d’ « informer le mandant de toutes les circonstances qui pourraient


déterminer ce dernier à rétracter ou à modifier le mandat » comme le souligne
l’article 787 du Code des obligations et contrats libanais.

499. Cette obligation s’applique au représentant même si le représenté ne doit,


normalement, pas révoquer sans indemnité sauf certains circonstances déterminées, il
doit, néanmoins, être mis, conformément à la loi, au courant de toutes les
circonstances accompagnant l’exécution par le représentant de sa mission, de sorte
qu’il puisse adopter la position qui lui convient avec les conséquences qui en
découlent875. En effet, le devoir d'informer est la conséquence naturelle du
professionnalisme et de la loyauté qui incombent à l'agent876. Cette dernière, outre le
fait d'accomplir fidèlement ce que chacun a à faire, c'est informer l'autre afin que
chacun puisse tout au long de la collaboration agir au mieux pour l'intérêt commun877.

500. Il en est enfin, de l’obligation du représentant commercial de rendre


compte au représenté de sa gestion878 dans les mêmes termes que l’obligation du
mandataire par rapport au mandant, et à ce titre il doit fournir au mandant toute
information utile sur l’exécution de la mission ainsi que sur le compte de la gestion879.
Cette obligation du représentant commercial lui incombe à chaque fois que le
représenté en réclame l’exécution, et à n’importe quel moment pendant l’exercice de
la représentation. Cette obligation, cependant, ne doit pas jeter de la confusion avec la
notion d’indépendance du représentant à l’égard du représenté dans l’exercice de ses
activités. L’indépendance, mettant en jeu la notion de contrôle à priori, le compte
rendu est moyen de contrôle à postériori.

nécessitent l’adaptation des produits, l’agent est tenu de signaler les normes applicables aux produits
voire de conseiller des prix adaptés au marché : D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 210.
875
Le décret du 10 juin 1992 a inséré dans le décret du 23 déc. 1958 un texte d'application de
l'article 4 de la loi : « L'agent commercial doit communiquer à son mandant toute information
nécessaire à l'exécution de son contrat ».
876
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
877
Ibid., n° 47.
878
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306, p. 467.
879
Art. 1993 C. civ. : « Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison
au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût
point été dû au mandant ».
-254-

501. Si le contrat d’agence commerciale entraine bien entendu pour les deux
parties un certain nombre d’obligations, l’élément essentiel reste que celles-ci doivent
être exécutées dans le respect de la bonne foi et de la loyauté dans les rapports
réciproques entre contractants. Sur ce point, rappelons que la notion de bonne foi
nécessite un approfondissement. En droit français, cette notion reste un concept
relativement étroit, car la doctrine comme la jurisprudence ne retiennent qu’une
approche subjective en accordant une place fondamentale à l’intention qui anime une
partie lors de son acte880. Elle renvoie d’un côté au principe de loyauté dans
l’exécution des conventions tel que posé à l’article 1134, al. 3 C. civ.881, mais peut
également signifier d’un autre côté la croyance erronée et légitime d’une personne en
l’existence ou non d’un fait ou d’un droit882. Ce concept est consacré par le deuxième
alinéa du troisième article du décret-loi N. 34/67883, qui manifeste l’obligation d’être
attaché au principe de l’équité et de la loyauté commerciale884 prévu dans le troisième
article du Code de commerce libanais885.

502. Ce devoir de loyauté constitue une véritable notion « cadre »886, qui coiffe
l’ensemble des obligations des parties. Ainsi, il ne suffit pas pour une partie de
remplir ses obligations à l’égard de l’autre, encore faut-il qu’elle les remplisse
loyalement, c’est dire de la manière la plus avantageuse pour l’autre partie. Le contrat

880
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME.,
Litec, 2003, n° 217.
881
Art. 1134 C. civ. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».
882
S. MEGNIN, idem. ; Ph. LE TOURNEAU, Bonne foi, Rép. civ. Dalloz, 2e éd. 2009 (avec M.
POUMAREDE ; 1ere éd. 1996), n° 2 et s.
883
Art. 3. al. 2 décret-loi n° 34/67 : « Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice
des activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut
plus particulièrement:
Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition que
l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue
pas une concurrence à celle –ci ».
884
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, l’art. 3, p. 90 et s.
885
Art. 3 C. com. : « A défaut de toute disposition légale applicable, le juge pourra s’inspirer tant
des précédents jurisprudentiels que des exigences de l’équité et de la loyauté commerciale ».
886
Y. PICOD, Le devoir de loyauté dans l’exécution du contrat, préf. G. COUTURIER, Paris,
LGDJ, 1989, n° 70 et s.
-255-

d’agence est une œuvre commune, dans lequel les parties sont étroitement liées887, et
met en place un rapport continu d’obligation qui exige le respect d’une exécution
loyale des obligations de chaque partie. L’agent doit remplir sa mission au mieux des
intérêts de son commettant, pour ensuite pouvoir prétendre à sa rémunération888 ; pour
cela, le commettant doit assurer à son agent les conditions de travail les plus
performantes pour l’aider à exécuter le plus efficacement sa mission889. Dès lors,
l’encadrement de ces obligations par la notion de bonne foi et de loyauté est
incontournable. Si la loi890 et la jurisprudence891 françaises ont repris la référence à la
loyauté nécessaire entre les parties, ce principe n’apparaît pas dans le décret-loi
libanais. Mais en tout cas, cette exigence de loyauté commande, en principe, une
obligation de non concurrence (paragraphe 1) et une obligation de garantie
(paragraphe 2) et justifie parfois une obligation d’exclusivité892. Obligations qui
incombent au représentant commercial et qui ne découlent plus de la nature juridique
du mandat, mais plutôt de l’organisation professionnelle du représentant suivant
l’article 3 du décret-loi N. 34/67893.

887
Ce qui renvoie à la conception du mandat d’intérêt commun pour les deux droits libanais et
français dans lequel les parties collaborent à une finalité commune.
888
L’art. 134-2 C. com. exige que l’agent exécute son mandat en bon professionnel et l’article 1 du
décret-loi n° 34/67 dispose que le représentant commercial par sa profession habituelle doit agir…
889
Cass. com., 24 nov. 1998, JCP, éd E. 1999, 1242, note C. JAMIN.
890
L’art. 134-2 C. com. : Les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une
obligation de loyauté…
891
Un célèbre arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation a illustré ce principe en
considérant que de simples doutes émis publiquement par l’agent commercial sur l’honnêteté et la
compétence du mandant caractérisaient un manquement à l’obligation de loyauté et justifiaient la
cessation des relations contractuelles : Cass. com., 17 mars 1998, Lamy affaires, n° 289. Cela rejoint le
sens généralement rattaché en France à la bonne foi, qui caractérise le comportement loyal et honnête
des parties : P. JOURDAIN, La bonne foi dans la formation du contrat, Rapport français : Travaux de
l’association H. Capitant, t. 13, 1992, 121.
892
D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 206.
893
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
-256-

Paragraphe 1 : L’obligation de non-concurrence

503. C'est la conséquence naturelle de l'intérêt commun : les contractants doivent


unir leurs efforts pour conquérir ou maintenir une part de marché. Il n'est pas
concevable que, pendant le contrat, l'un d'eux porte atteinte à l'intérêt commun en
favorisant une entreprise qui peut réduire la valeur, commune au mandant et à l'agent,
qui forme l'objet du mandat894.

504. Vu que cette obligation trouve source dans l’article 3 précité du décret-loi
N. 34/67, son origine dérive du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, et
ses applications pratiques, telles que définies par les usages de l’exercice honnête du
commerce895. Cette règle est énoncée à l'article L. 134-3 selon laquelle l'agent « ne
peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses
mandants sans accord de ce dernier » est dans la droite ligne de la qualification du
contrat d'agence.

505. En revanche, l’article 3 énonce le principe de cette obligation, sans en


définir les modalités et les conditions d’application ; en effet, toute concurrence
constitue une violation de l’article 3. L’appréciation de cette concurrence, pour en
définir les éléments, doit être faite à la lumière des divers facteurs dont la nature des
liens existant entre le représentant et la firme représentée, l’objet de la représentation,
l’ordre chronologique des représentations, et tout autre facteur susceptible de mettre
en lumière la nature de la concurrence exercée. Les dispositions de cet article 3 ne
spécifient pas dans quelle mesure l’objet de la seconde représentation ne doit pas être
en contradiction avec celui de la première (A). Enfin, cet article ne spécifie nullement
l’étendue de cette obligation mais la justifie (B).

3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
894
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 53.
895
En droit communautaire le règlement nº 330/2010 et les lignes directrices qui l'accompagnent
distinguent plusieurs types d'accords de distribution dont les accords stipulant une obligation d'achat
exclusif, également qualifié de « mono-marquisme » ou d'« obligation de non-concurrence ».
-257-

A- La teneur

506. Interdire tout acte de concurrence quelle qu’en soit l’amplitude : question
qui a été sujet de nombreuses discussions. S’il fallait s’en tenir à la définition de la
concurrence condamnable en matière de représentation commerciale, le législateur
n’aurait pas pris soin d’y consacrer un article spécial du décret-loi N. 34/67. Le fait
qu’il ait envisagé le problème à nouveau montre son intention d’interdire aux
représentants tout acte de concurrence, à titre de condition pour le bénéfice du statut
prévu. Deux ordres de justifications confirment la nécessité de l’obligation de non-
concurrence qui incombe au représentant à l’égard du représenté. Le premier ordre de
justification s’attache à la nature des rapports qui lient le représentant et le représenté
(a). Le second s’attache au mécanisme d’exécution du contrat de représentation
commerciale (b).

a- La nature des rapports liant le représentant au représenté

507. Rappelons que ce lien est celui d’intérêt commun896. Ce dernier accordé au
représentant doit mieux veiller aux intérêts du représenté en s’abstenant d’effectuer
tout acte de nature à lui porter préjudice897. C’est cet intérêt commun existant entre le
représenté et le représentant qui impose à ce dernier de s’abstenir d’effectuer tout acte
concurrentiel quelle qu’en soit la nature898. C’est à ce titre, en fin de compte, que
l’obligation de non-concurrence s’impose au représentant. Cette notion explique, par
ailleurs, pourquoi toute concurrence est prohibée, et non seulement, celle revêtant un
caractère illicite. En effet, la concurrence illicite est sanctionnée dans les rapports des

896
Suivant l’art. 4. du décret-loi n° 34/67, (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975) : Le contrat
de représentation commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ;
Art. L. 134-4 C. com., al. 1 : « Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants
sont conclus dans l'intérêt commun des parties ».
897
CA Poitiers, Ch. civ., 02, 18 janv. 2011, n° 07/00003 ; C. CHAMPAUD, D. DIDIER, Associé
minoritaire, Salarié démissionnaire, Création d'une entreprise concurrente, Obligation générale de
non-concurrence (non). Réparation du préjudice (non), D., 2010.
898
Selon la jurisprudence, il résulte de cet intérêt commun que le mandat emporte une obligation de
non-concurrence de plein droit à la charge du mandataire : Cass. com., 16 mars 1993, D., 1994, p. 224,
note Y. PICOD, ce qui n’exclut pas la possibilité pour le mandataire de représenter un autre mandant
non concurrent du premier : D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., note 159.
-258-

tiers étrangers à la représentation, en vertu du principe de la liberté du commerce et de


l’industrie899. Ce caractère illicite est requis étant donné que les tiers sont, par
définition, étrangers au représenté, et, n’ont aucune raison, en dehors des règles de la
bonne foi, de veiller à ses intérêts. Mais, dans les rapports des parties au contrat de
représentation entre elles, celles-ci s’engagent mutuellement à veiller aux intérêts
réciproques900.

b- Le mécanisme d’exécution du contrat de représentation

508. L’obligation de non-concurrence qui incombe au représentant à l’égard du


représenté, se justifie par la notion de clientèle901. Le représentant mandataire
prospecte cette clientèle et s’engage à l’exploiter au profit du représenté 902. Cette
observation emporte la conséquence importante selon laquelle le représentant, au cas
de rupture de la représentation, pourrait se servir de cette même clientèle pour
l’exploitation d’une autre représentation en la mettant au profit de la firme nouvelle
ayant accordé la nouvelle représentation903. Donc, si le représentant s’engage à mettre
la clientèle qu’il se forme au profit du représenté, tout acte de nature à intéresser cette
clientèle par des produits similaires aux premiers serait concurrentiel. Il en serait ainsi
de tout produit de nature à provoquer la clientèle à délaisser les produits objet de la
représentation pour laquelle le représentant s’est engagé à la mettre à profit. Par

899
En effet, la répression de la concurrence illicite et l’incrimination de son auteur est soumises à
des conditions très rigoureuses relativement à l’imputabilité et à l’intention de l’auteur, de sorte que,
souvent, il est très difficile d’en apporter la preuve certaine qui autorise d’infliger la répression. Par
conséquent, de nombreux actes, en eux nuisibles aux commerçants et à l’économie, ne tombent pas
sous le coup de la loi pénale, ni même celui de la loi civile : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 139.
900
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 173.
901
A. BRUNET, Clientèle commune et contrat d’intérêt commun, Etudes dédiées à A. WEILL, D.,
1983, p. 85 et s.: l’auteur fonde la reconnaissance d’un contrat d’intérêt commun sur l’existence d’une
clientèle commune.
902
Le mandataire d’intérêt commun diffuse de manière habituelle des produits ou services au nom
et pour le compte du mandant en prospectant une clientèle et en recueillant des commandes : D.
FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 175. Dans le même sens, il a été jugé que le diffuseur
d’abonnements téléphoniques qui ne conclut pas de contrat au nom et pour le compte du fournisseur
n’est pas un mandataire d’intérêt commun : Cass. com., 21 juin 2011, Contrats, conc. consom. 2011,
comm. 190, obs. N. MATHEY.
903
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 172.
-259-

conséquent, l’obligation de non-concurrence apparaît comme une obligation


participant de la nature même de la représentation904. La violation de cette obligation
constitue, en même temps, une violation de l’engagement d’exercice de bonne foi de
la représentation.

509. D’après le principe de la liberté du commerce et de l’industrie, tout acte de


concurrence en soi n’est pas condamnable. Pour qu’il le soit, cette concurrence doit
revêtir un caractère illicite. Cependant, il ne s’agit point de cette concurrence simple
ou illicite lorsqu’on parle de l’obligation visée à l’article 3 précité905. L’appréciation
du caractère illicite ou licite de la concurrence se fait lorsque l’acte concurrentiel est
le fait d’un tiers par rapport au représentant. En revanche, dans les rapports du
représentant avec le représenté, tout acte de concurrence, soit-il simple ou illicite, est
prohibé. Il s’agit là, d’une obligation contractuelle906, condition primordiale de
l’exécution de bonne foi du contrat de représentation907. Nous sommes alors en
présence d'une obligation de non-concurrence qui interdit à une personne d'exercer
une activité professionnelle déterminée en concurrence avec une autre personne et

904
Par l’exigence du principe de loyauté ; S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les
comportements opportunistes, Etude particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON,
Litec, 2002, n° 160 et s.
905
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
906
Résultant de la concurrence interdite qui est à distinguer de la concurrence déloyale. La
concurrence interdite sanctionne la violation d’une règle et recouvre deux situations. Si la règle violée
est légale, la concurrence est dite « illégale ». Si elle a une origine contractuelle, telle par exemple la
violation d’une clause de non concurrence, elle prend le nom de concurrence « anti-contractuelle » : Y.
PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 40.
907
La violation, en effet, de cette obligation constitue une faute grave de nature à priver le
représentant de l’indemnité de rupture : CA Douai, 21 oct. 1966, Gaz. Pal., 1967, 2 e sem. p.14, n° 7.
-260-

dont la finalité consiste, en neutralisant la concurrence de celui qui y est astreint, à


protéger la clientèle du créancier de non-concurrence908.

510. Cela résulte des termes explicites de l’article 3 en question : son deuxième
alinéa, interdit l’acceptation de représentations nouvelles dont l’objet est simplement
en contradiction avec celui de la première représentation, ou bien constitue une
concurrence à celle-ci. Il ressort, a priori, de ce texte que tout acte de concurrence est
absolument prohibé. Un regard vers les dispositions du Code pénal, sur ce point nous
aide pour le prouver909.

511. Tout l’intérêt de ces dispositions porte sur le sens qu’il faut donner à l'objet
de la nouvelle représentation pour qu’il ne soit pas en contradiction avec la première
ou bien ne constitue pas une concurrence à celle-ci. L’idée de concurrence a son
siège, non dans la nouvelle représentation elle-même, mais bien dans les produits
qu’elle fabrique et distribue, sur le marché sur lequel elle intervient 910. Ce sont,
comme en droit de la concurrence, les marchés de produits ou la marque qui sont pris
en considération et non l’entreprise concurrente en tant que telle, par référence au
caractère substituable ou non des produits911. L’expression employée par le législateur
français est en ce sens un peu courte912 puisqu’il s’est basé sur l’expression
« entreprises concurrentes »913, tandis que le législateur libanais a suivi une notion
plus large et claire en conditionnant que l'objet de la nouvelle représentation ne soit
pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue pas une concurrence à
celle-ci.

908
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, op. cit., n° 41.
909
Au Liban, le droit de la concurrence n'existe presque pas. En effet, il n'existe que quelques textes
éparpillés concernant par exemple la concurrence frauduleuse (art. 714 du code pénal), la concurrence
déloyale et le parasitisme (on se base sur la faute art. 122 du C.O.C), la spéculation frauduleuse (art. 73
du décret-loi n° 73 du 9-9-1983) et l'art. 14 du décret-loi n° 73 du 19-9-1983 annulant les monopoles
qui nuisent à la concurrence et condamnant les auteurs du délit à une amende et à un emprisonnement
de 6 mois à 3 ans.
910
CA Beyrouth, Ch. 1, n° 58/ 1969, arrêt n° 149 de 4 mai 1978, Albert Malek c/ Société Fock et
Fohl, Rev. al Adl, 1980, p. 124 à 127.
911
Y. PICOD, La réciprocité de l’obligation de loyauté et d’information entre le mandant et l’agent
commercial, D., 2002, somm., p. 1263, citant un arrêt de la CA Paris du 8 mars 2001.
912
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 312.
913
Art. L. 134-3 C. com. : « l'agent commercial ne peut accepter la représentation d'une entreprise
concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier ».
-261-

512. C’est dire que deux éléments sont indispensables pour l’acceptation de
nouvelles représentations par le représentant : la non contradiction de l’objet
commercial et la non concurrence de ce dernier avec la première représentation. Par
cela, le législateur libanais a bien précisé, que c’est l’objet de la concurrence qui ne
doit pas être concurrent en soi-même et non pas l’entreprise en tant que telle comme
indiqué en droit français914. En effet, le législateur, n’ayant pas réglé les modalités de
l’exclusivité, ni apporté une exigence particulière à ce sujet, a entendu en laisser la
libre détermination aux parties.

513. Notons, cependant, que seules les opérations et représentations nouvelles


revêtant un caractère concurrentiel915 sont soumises à la condition de l’autorisation.
Toute autre opération et toute autre représentation non-concurrentielles peuvent être
prises en charge par le représentant sans même en refermer au premier représenté916.
En ce sens, la jurisprudence donne une définition stricte et restrictive de la
concurrence entre mandants : Quand les produits présentant des caractéristiques
différentes, se prêtent à des utilisations distinctes ou ont un caractère complémentaire
alors même qu’ils sont similaires, l’agent peut agir pour plusieurs mandants pour
représenter ces produits917. Les produits ne peuvent donc être concurrents par leurs
prix ou leurs modes de distribution ou même leurs lieux de vente….918

914
L’appréciation du caractère concurrent des produits en cause sera parfois délicate, la directive
européenne de 1986 se réfère de manière souple à leur « type » (art. 20-2) : D. FERRIER, Droit de la
distribution, op.cit., n° 207.
915
Sur ce point le Doyen ROUBIER a opéré une classification des actes de concurrence déloyale
qui dégage quatre sortes de déloyauté : la confusion dans l’esprit du public (l’imitation des produits ou
des signes distinctifs d’un concurrent), le dénigrement de l’entreprise concurrente, la désorganisation
interne d’une entreprise rivale, la désorganisation générale du marché : P. ROUBIER, Le droit de la
propriété industrielle, t. 1, Sirey, 1952, n° 110. Par la suite, M. SAINT-GAL a ajouté l’hypothèse du
parasitisme, qui sanctionne le comportement d’un commerçant n’étant pas nécessairement en
concurrence avec une autre personne : Y. SAINT-GAL, Concurrence déloyale et concurrence
parasitaire, RIPIA, 1956, p. 37 ; Protection et défense des marques de fabrique et concurrence
déloyale, 5e éd., Delmas, 1982. L’élément constant de toutes ces hypothèses tient à la souplesse du
fondement technique utilisé : l’art. 1382 C. civ.
916
CA Caen, 28 oct. 1966, Gaz Pal., 1967, 1 er sem., p. 12, n° 10 : Dans cette espèce, il est
expressément prévu que « l’agent commercial qui est lie à son mandant par un contrat conforme au
décret du 23 déc.1958 n’est pas tenu de déclarer ses autres mandants si aucune obligation n’est
formulée en ce sens ».
917
Cass. com., 26 mars 1966, Bull. civ., IV, 154.
918
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 171.
-262-

514. La Cour d’appel de Paris a ajouté que le mandat d’agent ne s’ «


accommodait pas d’un lien concurrent de même nature et de même niveau ». Tel est
le cas si le contrat du concurrent comporte « des obligations similaires à celles
contenues dans le contrat d’agent commercial conclu avec le mandant initial »919. Il
faudrait démontrer pour certains une « concurrence frontale, destructrice de l’intérêt
commun »920. Il convient néanmoins de préciser que la notion de l’interdiction de
représentation d’entreprises concurrentes semble parfois traduite en jurisprudence par
l’interdiction de représenter des produits concurrents, de même gamme, et non des
entreprises921.

515. En ce sens, la Cour d’appel de Paris a décidé que si l’agent représentait


d’autres marques, celles-ci n’étaient pas concurrentes à la marque du mandant922. En
d’autres termes, la concurrence qui existe entre les produits doit être analysée dans les
termes où elle est repartie au moment de l’acceptation de la représentation de
nouveaux mandants. Dans ce cadre, les parties auront intérêt à définir ce qu’elles
entendent par produits, ou même, par entreprises concurrentes923. Les critères
qu’elles définiront seront une base de distinction très utiles entres les différents
produits que l’agent pourrait représenter ou non, avec ou sans autorisation924. En
pratique, l’identité de produits peut être considérée comme intéressante par les
mandants et ne pas les gêner. Tout est en ce que domaine une question d’appréciation
des objectifs sur le marché de manière à non causer un trouble commercial925.

919
CA Paris, 9 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001.
920
La réciprocité de l’obligation de loyauté et d’information entre le mandant et l’agent
commercial, Y. PICOT, D., 2002, somm., p. 1263, citant un arrêt de la CA Paris du 8 mars 2001 ; F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., p. 171.
921
CA Paris, 6 fév. 2002, Juris-Data n° 181850 ; Cass. com., 19 nov. 1996, JCP, éd. E., 1997, pan
30.
922
CA Paris, 22 janv. 2002, Juris-Data n° 181709.
923
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., p. 172.
924
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 312.
925
Le trouble peut résulter de l’affaiblissement ou de la banalisation de l’image de la marque d’un
producteur, de nature à affecter la rentabilité des investissements qu’il a réalisés : D. FERRIER, Droit
de la distribution, op. cit. n° 440 ; L’article 115-17,7 C. consom., punit de 2 ans d’emprisonnement et
d’une amende de 37500 € le fait de mentionner sur un produit la présence dans sa composition d’un
autre produit bénéficiant d’une appellation d’origine lorsque cette mention détourne ou affaiblit la
réputation de l’appellation concernée : Cass. com., 30 janv. 1996, D. 1997, 232, obs. Y. SERRA :
-263-

L’exception au principe de l’interdiction de nouvelles représentations


concurrentielles : l’autorisation

516. L’intention du législateur ayant été telle, l’article 3, et, par conséquent,
l’obligation de non-concurrence doivent être largement interprétés. En effet, non
seulement les nouvelles représentations concurrentielles sont prohibées, mais tout acte
à cet égard, et quelle qu’en soit la valeur, l’est, car si le représentant peut faire des
opérations commerciales indépendantes, celles-ci ne doivent nullement être
concurrentielles au représenté.

517. Au surplus, bien que l’alinéa 2 de l’article 3 ne prohibe que les nouvelles
représentations concurrentielles, la prohibition doit s’étendre à tous les actes pouvant
être entrepris par le représentant en dehors de l’objet de la représentation. Cela
découle de l’esprit du décret-loi N. 34/67 et de l’intention du législateur, car, si celui-
ci est tenu d’accorder des avantages certains au représentant commercial, ces
avantages sont la contrepartie des restrictions imposées à celui-ci même, au titre de la
non-concurrence, et en vue de l’exécution de la bonne foi du contrat de
représentation. S’il en était autrement, tout représentant commercial aurait pu frauder
la loi en prétendant que l’ensemble des opérations concurrentielles par lui effectuées
l’ont été non à titre de représentation, mais plutôt, à titre d’opérations indépendantes.

518. Cependant, cette prohibition des actes concurrentiels n’est qu’une


prohibition de principe qui peut être levée par une autorisation accordée par le
représenté au représentant : Solution justifiée en droit français où l’interdiction de
l’agent commercial de représenter une entreprise concurrente926 sans autorisation927

banalisation d’un message publicitaire ; CA Paris, 11 fév. 1989, D.1995, somm, p. 96, obs. J.-J.
BRUST: banalisation d’une marque et diminution de son prestige ; V.-M. NUSSENBAUM, Evaluation
du préjudice de marque, Le cas particulier de l’atteinte à l’image de marque, JCP, E, 1993, I, 303.
926
D’un point de vue français, il a été relevé que cela détruirai alors la finalité du contrat d’agence
commerciale, qui repose sur la notion d’intérêt commun, car la déloyauté est ce qui crée, à l’issue du
cocontractant, une divergence d’intérêt commun : J.-M. LELOUP, JCP., éd. E., 1992, chron° 105, n°
27 ; La jurisprudence n’hésite d’ailleurs pas à étendre cette solution à tout mandant d’intérêt commun
lorsque les conditions d’application de la loi sur les agents commerciaux ne sont pas réunies : Cass.
com., 16 mars 1993, D. 1994, somm. 224, obs. Y. PICOD ; Ph. GRIGNON, Le concept d’intérêt
commun dans le droit de la distribution, Mél. CABRILLAC, Litec, 1999, p. 127.
-264-

n’est pas non plus absolue puisqu’elle disparaît au moment où le mandant autorise la
représentation d’autres entreprises concurrentes928. De même, selon la jurisprudence,
cette interdiction disparaît lorsque l’agent a informé son mandant et que ce dernier ne
s’est opposé à la représentation concurrente929.

519. L’étendue de cette autorisation doit être interprétée à la lumière de


l’intention des parties, et, notamment, celle du représenté. Celui-ci peut accorder
l’autorisation soit pour une opération donnée, soit pour la représentation de certains
produits seulement. Elle peut, en outre, être limitée dans le temps ou l’espace930. Elle
est susceptible de toutes les modalités jugées bonnes par le représenté. L’autorisation
peut être soit expresse soit tacite931. Elle peut intervenir après ou avant l’acceptation
de la nouvelle représentation. L’autorisation est tacite lorsque la première firme, en
connaissance de cause, garde le silence pendant un temps raisonnable et ne soulève
aucune objection932.

B- La portée

520. Déterminons la portée de la situation du représentant, concédant de


l’exclusivité, amené à s’abstenir d’accepter de nouvelles représentations. Nous
pouvons nous demander si toute représentation nouvelle est interdite, ou uniquement
celle qui, directement ou indirectement, fait concurrence à l’objet de l’exclusivité. La
réponse résulte, a contrario, du texte de l’article 3 précité, qui autorise le représentant

927
CA Paris, 9 oct. 2001, Lettre distrib., 2001, 11 ; Art. L. 134-3 C. com. : « l'agent commercial ne
peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans
accord de ce dernier ».
928
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 170.
929
Cass. com., 25 juin 2002, n° pourvoi 99-20.063, arrêt n° 1233 : la représentation concurrente est
admise « en l’absence de contestation des affirmations de l’agent selon lesquelles le mandant
connaissait » le lien concurrent.
930
Cass. soc., n° 09-68.537, D., 28 sept. 2011 ; CA Rennes, n° 11/02250, D., 27 sept. 2011 ; CA
Toulouse, Ch. 02 Sect., 02, D., n° 09/03958, 21 juin 2011.
931
L’acceptation pourrait selon la jurisprudence être tacite : CA Bordeaux, 4 déc. 1969, Gaz. Pal.,
1970, 1, p. 27.
932
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous art. 3, n° 7.
-265-

à accepter de nouvelles représentations non-concurrentes à la première. Par


conséquent, et a contrario, toute représentation concurrente est strictement prohibée.
Cette obligation incombe à tout représentant même non exclusif933, de sorte que
l’exclusivité ne peut être interprétée que dans le sens de l’interdiction absolue d’avoir
de nouvelles représentations concurrentes. Autrement, la clause d’exclusivité n’aurait
aucun sens.

521. Dans ce cas, l’exclusivité demeure, et il ne pourra pas être dit que les
parties ont convenu, par ladite autorisation, d’abroger la clause d’exclusivité. Le
représentant ne pourra pas s’en prévaloir pour accueillir d’autres représentations.
Pareillement la firme représentée ne pourra s’en prévaloir pour refuser au représentant
les avantages constituant la contrepartie de l’exclusivité, ou même lui nier la qualité
de représentant commercial et le priver ainsi des dispositions du décret-loi N. 34/67.

522. Mais, bien entendu, une telle solution s’applique uniquement lorsque la
clause d’exclusivité est rédigée en termes généraux, vu que la distribution exclusive
postule la désignation d’un seul distributeur pour un territoire donné ou une clientèle
définie934. Il en est différemment lorsque les parties conviennent de modalités
particulières relativement à l’objet de la représentation ou au secteur d’opération.
Dans le premier cas, il peut être convenu que l’exclusivité se limite à une catégorie
déterminée de produits, comme, par exemple, la catégorie des produits industriels935 ;
le représentant garde alors le droit d’obtenir d’autres représentations comme le
vêtement. Dans le second cas, relatif au secteur protégé, le représentant s’engage à ne
représenter, dans le secteur en question, que son co-contractant. Mais, il garde le droit
de représenter toutes autres firmes exerçant ailleurs. C’est ainsi que, si l’exclusivité
est limitée au Liban, le représentant ne pourra représenter au Liban que sa firme co-

933
Surtout aux deux catégories de personnes suivant les alinéas 1 (représentant mandataire) et 2
(commerçant représentant) de l’article 1 du décret-loi n° 34/67.
934
J. VOGEL et L. VOGEL, Aspects économiques des relations fournisseurs-distributeurs, Le droit
de la concurrence et le droit de la distribution prennent-ils suffisamment en compte l’analyse
économique des restrictions verticales ? Rev. conc., s, 1-2011, n° 41.
935
D. FERRIER, Concurrence-Distribution, D., 2012, p. 577, n° 2 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 01
B, n° 10/05877, D., 09 déc. 2010 ; CA Paris, Ch. 05 B, n° 08/14160, D., 21 juill. 2008 ; CA Versailles,
Ch. 01, Sect. n° 01 - 05/04367, D., 08 juin 2006.
-266-

contractante. Mais il pourra avoir toutes autres représentations, même concurrentes,


en dehors du Liban, comme, par exemple, ailleurs dans le Moyen Orient936.

523. Il a été jugé dans l’ensemble qu’« une clause de non concurrence est en
principe licite et ne doit être annulée que dans la mesure où elle porte atteinte à la
liberté du travail en raison de son étendue dans le temps, dans l’espace et quant à la
nature de l’activité exercée. La restitution devant être appréciée en fonction de ces
trois critères. En conséquence, est justifiée la décision refusant d’annuler une telle
clause interdisant à un représentant toute concurrence pendant les cinq années
commençant à courir à compter de la rupture du contrat dans un rayon de 500 km à
vol d’oiseau d’une ville déterminée, dès lors qu’il est constaté que l’intéressé, n’étant
pas spécialiste pouvait, malgré cette interdiction temporaire, entreprendre une
représentation de produits différents, ou continuer à exercer son activité ancienne sur
une portion nettement délimitée du territoire français »937.

524. Quand le représentant commercial est concédant de l’exclusivité, c’est dire


lorsqu’il s’est engagé à ne représenter que son co-contractant, il s’engage à refuser
toute nouvelle représentation à peine de voir engagé sa responsabilité pour violation
de l’exclusivité. Il ne peut, par conséquent, se fournir ailleurs que chez son co-
contractant938; idée similaire du droit français où l'agent commercial assume une
obligation légale de non-concurrence au bénéfice de son mandant939. La violation de

936
Au demeurant, il a été jugé que l’agent commercial est souvent autorisé à distribuer des produits
concurrents en limitant cette possibilité, de nature que la nouvelle activité ne soit pas de nature à
affecter l’exécution des autres missions précédentes qui lui ont déjà été confiées : CA Paris, 9 oct.
2001, Lettre distrib., 2001-11 ; P. CRAHAY, Guide des contrats internationaux d’agence et de
concession de vente, Bruxelles, 1989, 63 ; Dans le même sens, en droit communautaire le distributeur
sélectionné doit évidemment être libre de « prospecter la clientèle, établir des succursales, entretenir
des dépôts dans n'importe quel État membre », puisqu'il n'existe pas d'exclusivité territoriale au profit
des autres distributeurs sélectionnés comme d'ailleurs à son profit : Décis. no 77/100 de la Commission,
21 déc. 1976, JOCE, no L 30, 2 févr. 1977, Junghans, pt 29. Ainsi constitue une restriction de
concurrence tombant sous le coup de l'article 101, § 1er, l'interdiction faite à un distributeur sélectionné
établi dans un État membre mais chargé de commercialiser les produits dans un territoire situé hors de
l'Union européenne de revendre directement ou de réexporter ces produits dans l'Union Européenne :
CJCE, 28 avr. 1988, Javico, aff. C-306/96, Rec. I. 1983.
937
Cass. com., 20 mars 1973, n° 72-10.760, Bull. com., n° 127, p. 111.
938
CA Colmar, 5 nov. 1958, D. 1959. 183, note P. VOIRIN.
939
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 207 ; S. MEGNIN, Le
contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME., Litec, 2003, n° 321 et s.
-267-

cette obligation justifierait la rupture du contrat sans indemnité940 ou, peut constituer
un élément contribuant à la reconnaissance d’une faute grave privative d’indemnité941.

525. Une question se pose, celle de savoir quelle serait la situation du


représentant si deux représentations qui n’étaient pas concurrentielles à l’origine
venaient à l’être. Il en est ainsi, lorsque, par exemple la firme qui a accordé la
première représentation venait à diffuser nouvellement ses produits concurrentiels à la
firme ayant accordé la seconde représentation942. La première réponse qui viendrait à
l’esprit, dans ce cas, serait de dire que, chronologiquement, la firme qui a accordé en
premier lieu la représentation devrait avoir la priorité des services du représentant, de
sorte que celui-ci devrait refuser la distribution des nouveaux produits concurrentiels
de la seconde firme, ou bien renoncer à la représentation de celle-ci si c’était la
première firme qui venait à lancer les nouveaux produits concurrentiels.

526. En réalité, il n’est rien, l’ordre chronologique des représentations ne devant


pas entrer en jeu dans la détermination de l’ordre de priorité. Il faut dire, à notre avis,
que, quelle que soit la firme qui lance de nouveaux produits, première ou dernière à
réserver les services du représentant, elle doit se voir refuser les services du
représentant s’agissant des nouveaux produits concurrentiels à d’autres firmes qu’il
représente. La justification d’une telle solution doit se retrouver dans la notion de
clientèle : le représentant commercial, en réalité, prospecte une clientèle qu’il destine
aux produits de la firme représentée943. Et, d’après le contrat de représentation, le
représentant s’engage à mettre cette clientèle au profit de la firme représentée. Or, s’il
vient, par la suite, à servir cette même clientèle en nouveaux produits d’une autre

940
Cass. com., 7 juill. 1993, n° 82-12.271, Bull. civ. IV, n° 209, p. 182, RTD com. 1994, p. 104 ;
Cass. com., 21 juin 1967, n° 66-11.426, Bull. civ. III, n° 259, p. 250 : Sur l’interdiction contractuelle
faite à un agent commercial de représenter un matériel concurrent « présentant les mêmes
caractéristiques techniques que celui vendu » par l’autre mandant. Le premier mandant avait alors
demandé au mandant de choisir entre les deux représentations. Cette concurrence entraine légitimement
la résiliation sans indemnité du contrat de mandat commercial pour le mandataire qui avait violé
l’interdiction contractuelle de représenter du matériel présentant les mêmes caractéristiques techniques
que celui vendu par son mandant.
941
T. com., Pau, 23 juin 1999, Lettre distrib., 1999.
942
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous art. 3, n° 6.
943
v. 1e partie, titre 1, Ch. 2, sect. 2 (L’action au nom d’autrui).
-268-

firme, c’est qu’il violerait l’obligation par lui contractée auparavant à l’égard de la
première firme en lui retirant la clientèle en question à son profit.

527. Une conséquence très importante en découlera alors, les clauses des
contrats de représentation imposant au représentant de traiter tous les produits même à
venir de la firme représentée, doivent être considérées comme inefficaces chaque fois
que les nouveaux produits sont concurrentiels à une autre firme représentée. Cela peut
paraître contradictoire avec la possibilité pour les parties de convenir d’une clause
d’exclusivité en faveur de l’une ou de l’autre d’entre elles. En réalité, cette
inefficacité proviendrait du caractère potestatif de la faculté ainsi accordée à la firme
représentée. Cependant, si cette clause était assortie de limitation permettant au
représentant de ne plus être à la merci de la volonté exclusive du représenté, elle serait
alors valable. Il en serait ainsi des clauses interdisant au représentant de représenter
des firmes produisant un genre déterminé de produits. En tout cas, les juges du fond,
en ce domaine, jouissent d’un pouvoir d’appréciation considérable, étant donné que la
preuve du caractère potestatif simple ou pure requiert un examen minutieux des
circonstances, examen ressortissant de la souveraineté du juge. Ce pouvoir que
possède le juge pour former sa conviction dénote qu’il ne s’agit point là d’une
condition imposée par le législateur de manière non fondée.

Paragraphe 2 : L’obligation de garantie - ducroire

528. Cette obligation découle des deux articles 2 et 3 du décret-loi N. 34/67944


suite à l’obligation d’information du représentant commercial, et particulièrement lors
de son compte-rendu d’activité. En effet, il incombe au représentant commercial ou à
l’agent commercial, en tant qu’intermédiaire professionnel, d’examiner la solvabilité
des clients pour prévenir ou limiter leur défaillance945. De même, il est tenu

944
Art. 2 : Ce contrat de représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité stipulant
la garantie du représentant envers ceux avec lesquels il contracte pour le compte de son représenté
(ducroire), Art. 3 : Le représentant commercial peut … nommer des représentants à lui ou employer
des salariés subordonnés qui paye leurs salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations
qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants.
945
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 238.
-269-

d’informer son commettant des clients dont la situation financière pourrait poser
problème. Il commettra une faute grave s’il traite une affaire avec un client reconnu
insolvable946, en supportant les dommages-intérêts subi par son entreprise, alors que
son commettant disposera d’un motif de rupture du contrat d’agence sans
indemnité947.

529. I- Ducroire : Le deuxième alinéa de l’article 2 de décret-loi N. 34/67,


modifié par la loi applicable par le décret N. 9636 du 6/2/1975, dispose : « Ce contrat
de représentation commerciale peut contenir une clause…. stipulant la garantie du
représentant envers ceux avec lesquels il contracte pour le compte de son représenté
(ducroire)……». Le Code de commerce français ne contient aucune disposition
relative à la convention de ducroire. Il s'agit d'une institution issue de l'usage et de la
pratique commerciale dont la nature juridique est controversée. En d’autres termes la
convention de ducroire peut également s'induire des circonstances 948 ou aussi résulter
des usages949. Il a parfois été soutenu qu'il s'agissait d'un cautionnement 950, sauf

946
La responsabilité civile du commettant a pour but unique de protéger les tiers et le Trésor public
contre l'insolvabilité de l'auteur de l'infraction, et non de décharger celui-ci dans une mesure
quelconque de la responsabilité qui lui incombe : Cass. crim., 11 juill. 1978, Bull. crim., n° 231.
947
Par contre, si une fois ces renseignements transmis, le commettant décide de conclure l’affaire
avec ce client, que celui-ci ne s’exécute pas, la perte qui peut en découler sera supportée par le
commettant, alors que le risque pour l’agent se limitera à la perte de sa commission sur cette affaire.
Toutefois, il existe une possibilité pour le commettant de faire transférer ce risque sur son agent à
travers une convention spéciale que l’on appelle « ducroire » : S. MEGNIN, Le contrat d’agence
commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 195 ; Il a été relevé que le
recours à une telle clause s’est raréfié du fait de l’essor de l’assurance-crédit et des bureaux de
renseignements commerciaux : J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 2001, note 1 sous n° 810.
948
Le commissionnaire qui a reçu un relevé de compte le constituant débiteur en vertu de la
convention de ducroire, et l'a accepté sans protester, doit être considéré comme ayant reconnu
l'existence de cette convention : CA Aix-en-Provence, 23 nov. 1937, DH 1938. 105 : cité par P.
CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012.
949
Ainsi, selon les usages de la place de Marseille, le commissionnaire vendeur est toujours
ducroire dans les ventes de sucre : CA Aix-en-Provence, 29 avr. 1866, Rec. Marseille 1866. 1. 148. Les
usages en vigueur dans les relations entre support de publicité, agent de publicité et annonceur
attribuent, sauf convention contraire, à l'agent de publicité le double rôle de commissionnaire ducroire
du support et de conseil de l'annonceur : Cass. com., 5 mars 1969, Bull. civ., IV, n° 88 ; CA Paris, 15
nov. 1968, Quot. Jurispr. 1969. 6 ; et, en matière de presse, pour un dépositaire distributeur : CA
Rennes, 9 juill. 1974 : cité par P. CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012.
950
A. WAHL, Précis théorique et pratique de droit commercial, 1922, Sirey, n° 1351. Cette
opinion se trouve confortée par une décision de la Cour de cassation : Req. 6 mars 1935, S. 1935. 1.
210 où on objecte cependant, en général, que le cautionnement est un contrat accessoire qui garantit un
engagement principal. Or, dit-on, il n'y a pas de « contrat principal » entre le tiers et le commettant : le
commissionnaire est seul obligé envers ce commettant, qui n'a pas d'action directe contre le tiers
débiteur : P. CHAUVEL, Commissionnaire, op. cit.
-270-

précision contraire le qualifiant de garantie de solvabilité951. Ensuite on a vu dans la


convention de ducroire une opération d'assurance et, plus précisément, d'assurance-
solvabilité952. Ainsi elle s’est assimilée à la promesse porte-fort qui constitue un
engagement personnel autonome953 d'une personne promettant à son cocontractant
d'obtenir l'engagement d'un tiers à son égard954. Elle peut naturellement résulter d'une
stipulation expresse et se rapproche de la promesse de porte-fort qui ne peut résulter
que d'actes manifestant l'intention certaine du promettant de s'engager pour un tiers955.

530. Souvent stipulée dans les contrats passés par les intermédiaires
commerciaux, la clause de ducroire ne revêt pas toujours la même signification dans
l'esprit des parties. Ainsi, le commissionnaire supportant une obligation de résultat en
recherchant sa pleine exécution au profit du commettant956. Mais le plus souvent, il ne
supporte que l’obligation de mettre en œuvre les moyens nécessaires à la diffusion des
produits sans pour autant garantir leur vente et leur paiement957. Cette responsabilité
atténuée s’aggrave quand l’agent commercial doit supporter les conséquences de
l’inexécution du contrat par le client et donc les risques de la réussite de l’opération
conclue pour le compte du mandant958. Cas identique de celui qui se porte fort de
l'exécution d'un engagement par un tiers ; dans ce cas il se contraint accessoirement à
l'engagement principal souscrit par le tiers devant satisfaire, si le tiers ne s'exécute pas
lui-même959.

951
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, op. cit., p. 195.
952
Le commissionnaire ducroire répond purement et simplement de l'inexécution, dès l'arrivée du
terme et sans bénéfice de discussion : E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à
l'exclusion du droit maritime, par J. PERCEROU, t. 1, suppl. 8e éd., Rousseau, 1936, n° 1128 ; L.
LACOUR et J. BOUTERON, Précis de droit commercial, t. 1, 3e éd., D., 1925, n° 948 : cité par P.
CHAUVEL, Commissionnaire, op. cit.
953
CA Douai, 2 déc. 1999: BICC 1 août 2000, n° 1003.
954
Cass. civ., 1ere Ch., 25 janv. 2005, Bull. civ., I, n° 43 ; D., 2005. IR 387 ; JCP 2006. II. 10021,
note Ph. SIMLER ; Defrénois 2005. 908, obs. J. HONORAT ; Contrats, conc. consom. 2005, n° 81,
note L. LEVENEUR ; RTD civ., 2005. 391, obs. J. MESTRE et B. FAGES.
955
Cass. com., 17 juill. 2001, Contrats, conc. consom. 2001, n° 170, note L. LEVENEUR.
956
Cass. com., 6 janv. 1981, Bull. civ., 1981, IV, n° 4, JCP, G. 1982, II, 19829, note J. HEMARD.
957
Cass. com., 18 nov.1969, Bull. civ., 1969, IV, n° 343.
958
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 238.
959
Cass. com., 18 déc. 2007, JCP 2008. 1. 152, n° 13, obs. Ph. SIMLER ; Banque et droit
2008/118, p. 43, note N. RONTCHEVSKY et F. JACOB.
-271-

531. Largement entendue par la jurisprudence, c’est avec un célèbre arrêt de la


Cour de cassation que la portée de l’obligation ducroire a été précisée : « à défaut de
toute stipulation contraire, fût-elle implicite, la clause de ducroire garantit le défaut
de paiement à l'échéance par un tiers et non la solvabilité de celui-ci »960. Ainsi, la
chambre commerciale de la Cour de cassation indique-t-elle, beaucoup plus nettement
encore qu'elle ne l'avait fait dans un précédent arrêt961, que la clause de ducroire962
met à la charge de l'intermédiaire (agent, commissionnaire, courtier) l'engagement de
garantir le paiement à l'échéance par le client qu'il a trouvé, et qu'elle se rapproche
donc fortement d'une sûreté personnelle963. Il est souvent alors convenu que sa
responsabilité est limitée à une partie seulement des impayés où cependant, le contrat
d’agence devrait échapper à l’application du droit de la concurrence964.

532. II- Garantie : Suivant l’article 3 al. 3 du décret-loi N. 34/67, le


représentant commercial peut « nommer des représentants à lui ou employer des

960
Cass. com., 22 oct. 1996, Bull. civ. IV, n° 246, p. 213, Defrénois, 1997.330, obs. Ph.
DELEBECQUE , Contrats, conc. consom. 1997, n° 21, obs. L. LEVENEUR ; D., 1998, 511, note
ARLIE D.- Rapp. BEAUCHARD J., Droit de la distribution et de la consommation, Thémis Dr. privé,
PUF, 1996, p. 158 : estime que le ducroire ne saurait garantir la force majeur, Cass. com., 22 oct. 1996,
JCP, G, 1997, I, 4033, n° 12, note Ph. SIMLER.
961
Cass. com., 6 janv. 1981, Bull. civ., IV, n° 4, p. 4 ; JCP 1982.II.19829, note J. HEMARD.
962
M. VIVANT, Convention de ducroire, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc., n° 955 ; Sur la nature
juridique de ducroire : D. HENNEBELLE, La spécificité de la nature juridique du ducroire
d’intermédiaire, JCP, E, 2000, 1366.
963
M. CABRILLAC, C. MOULY, S. CABRILLAC, PH. PETEL, Droit des sûretés, 9e éd.,
LexisNexis, 2010, n° 450 ; Ph. SIMLER et Ph. DELEBECQUE, Droit civil, Les sûretés, la publicité
foncière, 1995, n° 11 ; F. GORE, Le commissionnaire ducroire, Etudes sur la commission, préf. J.
HAMEL, 1949, p. 307 ; (Ceci étant, la Haute juridiction réserve cependant la possibilité
conventionnelle de limiter la portée de cet engagement, et notamment de la cantonner à la simple
garantie des clients notoirement insolvables. Mais tel n'était pas manifestement le cas en l'espèce
puisque, aussi bien, les deux clauses de l'acte avaient clairement vocation à vivre en parallèle, l'une
invitant l'agent à se défier des clients de ce type et l'autre mettant beaucoup plus largement à sa charge
l'engagement de couvrir les impayés de ceux dont il avait obtenu l'engagement pour le compte de son
mandant. Simplement est-il permis de penser que cette dernière stipulation a quand même vocation à
être privée d'effet dans le cas particulier où c'est le bénéficiaire du ducroire qui est à l'origine de
l'inexécution qu'il veut faire garantir par l'intermédiaire : J. MESTRE, La portée de la clause de
ducroire, RTD civ., 1997, p. 653.
964
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 205, 238.
-272-

salariés subordonnés qui paye leurs salaires ou leurs commissions et qui n'auront de
relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants »965.

533. L’unité de la représentation veut que le représenté n’ait des rapports


qu’avec la personne qu’il a choisie pour le représenter. Suivant le texte de l’al. 3, si le
représentant nomme des sous-agents ou employés qui ne répondent que de lui, c’est
qu’en revanche, il est seul à répondre de leurs actes à l’égard du représenté966. Cette
solution se justifie d’une manière indirecte, conformément à une formule assez
générale de la responsabilité contractuelle du fait d’autrui : « On est responsable [du
dommage] qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre »967. Le
représentant commercial étant principalement un commerçant de profession, et le
plus souvent organisé en entreprise968. Or, pour une entreprise, il est normal qu’elle ait
à sa tête une seule personne qui serait responsable des actes de tout son personnel 969,
et que ce responsable ne puisse pas se déborder de répondre des actes des personnes
qui sont à son service970, soit à titre d’employés simples, soit à titre de sous-agents
mandataires971 ou salariés972. En effet, l’obligation de garantie apparaît comme une
contrepartie de l’indépendance qui marque ses rapports avec le représenté.

965
Cet article a comme similaire en droit français, l’art. 2, al. 2 du décret 1958 qui prévoyait que
l’agent « peut recruter….des sous-agents rémunérés par lui ».
966
J. HEMARD, Les agents commerciaux, op.cit., n° 50 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Code de
commerce annoté, op cit., sous art. 3, n° 11 ; Les sous-agents, par conséquent sont rémunérés par le
représentant de ses propres commissions : Cass. soc., 15 mars 1957, Bull. civ., 1957, IV, 283.
967
Ph. LE TOURNEAU, Responsabilité (en général), Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 195.
968
Selon le professeur VINEY, l'art. 1384, al. 5, ne vise pas le commettant en tant qu'individu mais
comme le représentant « de l'unité économique qu'il dirige » : Cass. com., D. 1994.124, note G.
VINEY.
969
En droit privé, le débiteur est responsable des faits des personnes qui participent à l'exécution de
ses obligations contractuelles. Il existe ainsi un principe général de responsabilité contractuelle du fait
d'autrui : les représentés sont contractuellement responsables du dommage causé par leurs représentants
dans l'exécution de l'obligation contractuelle du représenté : Ph. TERNEYRE, Responsabilité
contractuelle, D., 2012, n° 303.
970
C'est pourquoi, par exemple, la vengeance personnelle du fonctionnaire chargé de l'exécution du
contrat à l'égard du titulaire du contrat et ayant pour conséquence un manquement aux obligations
contractuelles, entraîne toujours la responsabilité contractuelle de l'administration dont relève ce
fonctionnaire (CE 12 juill. 1955, Bizet, Lebon 415) : Ph. TERNEYRE, op. cit., n° 305.
971
Conformément à la théorie classique du mandat, et malgré l'exception jurisprudentielle du
mandat tacite, les mandataires de l'administration sont contractuellement irresponsables du fait de
l'exécution des contrats qu'ils ont passés pour le compte de l'administration ; seule l'administration
-273-

534. Donc, si l’obligation de garantie en question répond à certains impératifs


qui la justifient, des conditions bien déterminées doivent, pour cela être réunies pour
qu’elle puisse recevoir application (A). Mais, comparée aux conditions de l’obligation
de garantie telle que prévue au Code des obligations et des contrats à l’occasion de la
substitution de mandataire, nous remarquons que l’obligation de garantie incombant
au représentant commercial présente des caractères particuliers (B)

A- Les conditions de l’obligation de garantie

535. Deux conditions doivent cumulativement être réunies à défaut desquelles le


représentant commercial ne pourra être tenu pour garant conformément aux
dispositions de l’article 3, al. 3 du décret-loi N. 34/67. Il faut, d’abord, qu’il y ait eu
sous-contrat (a). Il faut aussi que la personne ainsi désignée n’ait eu aucun rapport
avec le représenté (b).

a- L’existance de sous-contrat

536. S’agissant de la condition de sous-contrat, ce dernier peut prendre deux


formes. Il peut être soit à titre de salariat (employés), soit à titre de sous-agence
(représentants), conformément aux dispositions du décret-loi N. 34/67. La première
forme ne présente aucun problème particulier, car il est normal que le commettant
réponde des actes de son préposé973. La seconde forme, celle de la sous-agence974, est

mandante est considérée comme contractante et donc, comme seule obligée à la dette : Ph.
TERNEYRE, op. cit., n° 300.
972
« En sa qualité d’agent commercial mandataire, l’agent jouit de l’indépendance propre à tout
chef d’entreprise dans l’organisation de son activité » : Contrat présenté par LELOUP dans La
distribution, cas n° 6, p. 76. coll. « Cas pratiques du droit des affaires », D., 1971, cité par J.-M.
LELOUP, Agent commercial, D., 2012.
973
Art. 1384, al. 5 C. civ. : « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son
propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des
choses que l'on a sous sa garde : Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs
domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés » ; Les auteurs
contemporains sont quasiment unanimes à affirmer que la responsabilité du commettant est une
responsabilité indirecte. C'est le fait dommageable du préposé qui permet d'engager la responsabilité du
commettant. Celui-ci ne répond que du fait d'autrui et non de son propre fait à travers le fait d'autrui. Sa
-274-

celle de la représentation pure et simple. Celle-ci peut avoir lieu soit à titre de mandat
(commission ou courtage), soit à titre de concession des ventes. C’est le cas du
représentant général pour une région donnée qui nomme des sous-agents ou des
distributeurs exclusifs dans les différentes localités de la région dans laquelle il
exerce975.

537. L’intérêt de ces sous-contrats est ainsi résumé par M. LELOUP : « ils
favorisent la spécialisation, préparent des regroupements d'agences ou la constitution
de sociétés. Ils permettent la couverture du marché national par des agents à
l’importation, dénommés souvent agents généraux, et agissant localement par des
sous-agents »976. Il faut, cependant, se garder de ne pas confondre la désignation d’un
sous-agent avec la faculté de substitution d’un tiers issue des articles 1994 du Code
civil français977 et 783 du Code des obligations et contrats libanais978. Alors que dans
la seconde il y a transmissibilité979 et cession du mandat980, dans la sous-agence il n’y

responsabilité est commandée uniquement par la responsabilité du préposé, à laquelle elle vient se
superposer, dans la mesure où le commettant est plus apte à supporter la réparation du dommage et
cela, bien sûr, dans l'intérêt exclusif de la victime : F. BENAC-SCHMIDT, C. LARROUMET,
Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 12 ; CA Paris, PÔLE 05 Ch. 06, n° 05/08045, D., 23 juin
2011.
974
C’est un usage constant depuis de nombreuses années et notamment depuis l’arrêté du 5 nov.
1946 (art. 45 paru au JO du 13 nov. 1946, p. 9576) et le contrat-type du 26 oct. 1954 (art. 2. al. 2) : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 284 et s. ; J. NERET,
Le sous-contrat, LGDJ, 1979, n° 287.
975
Idée identique du celle de l’agent commercial qui peut faire référence à des sous-agents
commerciaux qui interviennent sous son nom et pour son compte : Art. L 134-1 C. com.
976
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D, 2012, n° 54.
977
Art. 1994 C. civ : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion :
1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un.
2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait
choix était notoirement incapable ou insolvable.
Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est
substituée ».
978
Art. 783 C.O.C : « le mandataire qui n’a pas le mandat, sera responsable de son substitué, et
sera questionné sur ses travaux personnels.
Et si le mandat lui a été conféré, ne sera responsable sauf s’il a choisi une personne qui ne remplit
pas les qualités demandées pour le mandat, ou sauf si avec un bon choix, a donné à son sous-agent des
instructions qui ont été cause au préjudice ou s’il a négligé son observation lorsqu’il était utile ».
979
Ph. PETEL, Les obligations du mandataire, th. Montpellier, 1987, p. 192, n° 302.
980
Le professeur MOUSSERON nomme cession de position contractuelle : « c’est-à-dire comme
l’opération par laquelle un partenaire contractuel…convient avec un opérateur…, demeuré
-275-

a pas transmissibilité de la représentation. Il semble indiquer que le sous-contrat est le


principe et la substitution est l’exception puisqu’elle entraine la création d’un sous-
contrat981.

538. Cette obligation de garantie s’applique au représentant concessionnaire des


ventes, dans les mêmes termes qu’elle s’applique au représentant mandataire. Le
concessionnaire des ventes, agissant avec permanence, exerce quand-même une
fonction de représentation dans laquelle il peut se faire assister soit par des employés,
soit par des sous-agents mandataires ou distributeurs exclusifs982. Si ces derniers dans
leurs activités ont pu commettre un acte quelconque de nature à porter préjudice au
représenté initial, il est normal que le représentant initial, concessionnaires des ventes,
doit répondre de leurs dits actes983.

539. Développons plus loin notre analyse. Nous dirons que l’obligation de
garantie du représentant commercial s’étend à tous les actes commis par toute
personne désignée par lui à quelque titre que ce soit984. L’énumération du paragraphe
3 de l’article 3 du décret-loi N.34/67 n’est pas limitative. Le fait d’avoir visé les sous-
agents l’est à titre de sévérité pour dire que la garantie est maintenue dans ce cas,

jusqu’alors étranger à la relation, le transfert de l’ensemble des dettes et des créances produites par
un contrat donné qui le lie à une autre personne… »: J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle,
2e éd, Francis Lefèbvre, 1999, n° 489 et s.
981
L’idée de substitution étant inspirée de la notion d’autonomie du mandataire qui suppose que le
mandataire demeure responsable de l’activité de son substitué. Donc il répond des actes de ce sous-
mandataire auprès du mandataire initial quand il n’a pas reçu une autorisation expresse du mandant : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 286 et 288.
982
Avec les réserves quant à l’étendue des pouvoirs du représentant principal.
983
L’agent commercial sera responsable à l’égard du mandant des actes du sous-agent, sauf si le
mandant a autorisé la sous-agence, mais dans ce cas l’agent engagera encore la responsabilité à l’égard
du mandant s’il n’exerce pas une surveillance normale sur les actes du sous-agent substitué : Cass. civ.
29 mai 1980, Bull. civ., I, n° 163. C'est sur le fondement de la confiance dans le préposé et qui est
assumée par le commettant envers les tiers, que celui-ci est tenu d'une obligation de garantir, aux
victimes des dommages causés par le préposé, la réparation à laquelle elles ont droit : F. BENAC-
SCHMIDT, C. LARROUMET, Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 30.
984
La jurisprudence met en œuvre une responsabilité contractuelle du fait d'autrui, par laquelle elle
déclare que le commissionnaire doit répondre du transporteur qu'il s'est substitué et dans la mesure
même où celui-ci est responsable : Cass. com., 2 févr. 1999, pourvoi n° F 96-17.915 ; Cass. com., 7
juill. 1998, Bull. civ., IV, n° 222 ; Cass. com., 3 oct. 1989, JCP 1990, II, n° 21423 ; D. 1990, Jurispr. p.
81, concl. Jeol, et Somm. p. 269, obs. M. REMOND-GOUILLOUD ; Cass. com., 16 juin 1981, D.
1981, IR p. 543, obs. B. MERCADAL ; Cass. com., 6 févr. 1973, JCP 1973, II, n° 17501, note R.
RODIERE.
-276-

quand bien même l’article 783 du Code des obligations et des contrats l’écarte985.
Mais, encore faut-il, pour cela, que le représentant, lui-même, ait désigné les
personnes dont il répond, et que celles-ci n’aient eu aucun rapport avec le représenté.

b- L’absence du rapport avec le representé

540. La condition exigeant que le sous-agent du représentant commercial n’ait


eu aucun rapport avec le représenté est une condition primordiale sans laquelle
l’obligation de garantie perdrait sa raison d’être. D’après cette condition, le
représentant lui-même doit désigner l’employé ou le représentant ; il doit aussi, lui-
même, rétribuer ces derniers. Il doit être le seul à pouvoir leur demander des comptes.
Par conséquent, si le sous-agent recevait les ordres ou les instructions du représenté
directement986, le représentant ne répondrait plus de ces actes en question987, et,
parfois, selon l’importance des actes en question, ne répondrait plus du tout de
l’ensemble de la gestion à l’égard du représenté : Situation divergente du droit
français où, en cas d’absence d’autorisation, le mandataire originaire est responsable
des actes de son substitué et répond de ses fautes à l’égard du mandant initial988.

985
Art. 783 C.O.C. : « Le mandataire qui n’a pas le mandat, sera responsable de son substitué, et
sera questionné sur ses travaux personnels.
Et si le mandat lui a été conféré, ne sera responsable sauf s’il a choisi une personne qui ne remplit
pas les qualités demandées pour le mandat, ou sauf si avec un bon choix, a donné à son substitué des
instructions qui ont été cause au préjudice ou s’il a négligé son observation lorsqu’il était utile ».
986
CA Lyon, 3e Ch., 11 fév. 2000, Juris-Data, n° 151457.
987
Vu l’absence du mécanisme de la représentation qui suppose un pouvoir conféré par un contrat,
par la loi ou par le juge ; Il ne peut jouer que lorsqu'il s'agit d'actes juridiques : F. BENAC-SCHMIDT,
C. LARROUMET, Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 7.
988
Si le mandataire initial n’a pas reçu l’autorisation de se substituer un tiers dans la gestion, il reste
responsable vis-à-vis du mandant de la bonne fin de la mission et de son exécution conforme au contrat
de mandat initial : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit. n° 290. Tandis que trois conditions
existant, sont dégagées par la jurisprudence pour écarter la responsabilité du commettant : Le préposé a
agi sans autorisation (Cass. civ., 2e Ch., 11 avr. 1986, Bull. civ., II, n° 48 ; Cass. crim., 21 mars 1989,
Bull. crim., n° 142) - Le préposé a agi à des fins étrangères à ses attributions (Cass. civ., 2e Ch., 28
févr. 1996, Bull. civ., II, n° 53 ; Cass. civ., 2e Ch., 22 janv. 1997, D., 1997, IR 53, Bull. civ., II, n° 21) -
Connaissance par la victime de l'abus de fonctions (Cass. civ., 2e Ch., 29 mai 1996, Bull. civ. II, n°
118, D. 1996, IR 151 ; Cass. civ., 2e Ch., 24 juin 1998, Bull. civ., II, n° 225 ).
-277-

541. De même, le représentant ne répond pas des sous-agents qui sont


directement ou indirectement rétribués par le représenté, à moins qu’un accord
contraire ne soit intervenu entre le représentant et le représenté : solution proche de
celle suivie en droit français, quand le mandant a autorisé mais n’a pas désigné le
substitué, le mandataire initial n’est pas responsable des actes de ce dernier989. Mais la
doctrine990 et la jurisprudence991 n’hésitent pas à mettre en cause la responsabilité du
mandataire initial s’il n’a pas exercé une surveillance efficace sur les actes de son
substitué992. Par conséquent, enfin, le représentant commercial ne répond point des
sous-agents qui lui auraient été imposés par le représenté993. Le sous-agent n’a, en
effet, de rapports qu’avec le représentant vu que le mandant, de son côté, ne peut
traiter directement avec les sous-agents994.

B- Les caractères de l’obligation de garantie

542. L’obligation de garantie du représentant commercial présente, d’abord un


caractère dérogatoire par rapport au droit commun du mandat (a). Elle présente aussi,
un caractère excessif (b).

989
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 299.
990
D. ALEXANDRE, Mandat, J.-Cl. civ., fasc., 1, art. 1991 à 2002, n° 64 ; Ph. PETEL, Les
obligations du mandataire, th., op. cit., n° 333 ; J. NERET, Le sous-contrat, th. Paris, LGDJ, 1979, n°
287 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., p. 164.
991
Cass. civ., 20 mai 1980, Bull. civ., I, n° 163 ; Cass. civ., 23 fév., 1983, Bull. I., n° 73, D., 1983,
481, note P. COUVRAT.
992
Ce devoir de surveillance peut s’accompagner d’un devoir d’assistance : fourniture des éléments
propres à la réalisation de la mission : Cass. civ., 16 nov. 1977, Bull., I., n° 423.
993
À cet égard, il faut faire les précisions suivantes : Le fait que le représenté ait imposé au
représentant un nombre déterminé de sous-agents, tout en lui laissant la liberté de les choisir, et, de les
superviser dans les conditions ci-dessus, n’exonère point le représentant de l’obligation de garantie.
D’autre part, même le fait d’avoir choisi les sous-agents en question, maintien l’obligation de garantie à
l’égard du représenté si les personnes ainsi choisies n’ont eu de rapports juridiques ou matériels
qu’avec le représentant. Mais, bien entendu, le représentant doit avoir gardé, pour cela, l’entière liberté
de les révoquer. En effet, la raison d’être qui détermine de telles conditions de l’obligation de garantie,
en marque les caractères particuliers : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 315.
994
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1979, Bull. civ., I, n° 17.
-278-

a- Le caractère dérogatoire

543. S’agissant du caractère dérogatoire par rapport au droit commun du mandat,


notons que la situation du sous-agent par rapport au représentant principal se
rapproche de celle du mandataire substitué par rapport au mandataire principal. Mais
ce n’est qu’un simple rapprochement car les dispositions de l’article 3, alinéa 3 du
décret-loi N. 34/67 dérogent aux dispositions du Code des obligations et des contrats
relatives au mandat à deux égard :

544. D’abord, d’après l’article 782 du Code des obligations et des contrats, « le
mandataire ne peut se substituer à une autre personne pour l’exécution du mandat,
sauf, dans les cas suivants : 1- Si le mandant l’a vraiment autorisé, 2- Si l’accord sur
ce droit est issu de la nature ou des circonstances du travail, 3- Si le mandat est
général et absolu ». Donc, d’après l’article en question, le principe est la non-
substitution. En contrepartie, en vertu du décret-loi N. 34/67, le principe est la
possibilité d’une forme de sous contrat, et l’exception l’interdiction. Le texte de
l’article 3 à cet égard n’étant pas impératif.

545. Ensuite, la seconde dérogation aux dispositions du Code des obligations et


des contrats relativement au mandat, se situe au niveau des conditions de cette
obligation de garantie. En effet, d’après l’article 783 du Code des obligations et des
contrats, le mandataire répond uniquement de celui qu’il s’est substitué dans la
gestion ; il répond aussi, rarement, du sous-mandataire substitué avec autorisation s’il
a effectué un mauvais choix de la personne995, « ou si, tout en ayant bien choisi, il a
donné au substitué des instructions qui ont été la cause du dommage, ou s’il a
manqué de le surveiller lorsque cette surveillance était nécessaire »996. Suivant

995
De sorte qu'à la responsabilité contractuelle du commissionnaire envers le commettant du fait du
substitué peut s'adjoindre une responsabilité contractuelle pour faute personnelle du commissionnaire
du fait du mauvais choix effectué : D. AMMAR, De l'étendue de la garantie du commissionnaire
envers le commettant du fait du substitué, D., 1999, p. 427.
996
Cass. civ., 23 fév. 1983, D., 1983, p. 481, note P. COUVRAT ; Dans le même sens l’art. 1994 C.
civ. : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion :
1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un.
2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait
choix était notoirement incapable ou insolvable.
-279-

l’article 3 précité, le représentant répond des actes du sous-agent dans tous les cas, à
l’exception de cas où le sous-contractant aurait eu des rapports avec le représenté. Or
d’après l’article 783, lorsque la substitution est autorisée, le principe est la non-
garantie étant donné que « le mandataire ne sera responsable sauf…. », c’est dire si
certaines conditions en sont réunies, la garantie s’impose comme exception. Alors que
d’après l’article 3 en question, le principe est celui de la garantie bien que
l’autorisation de nommer des sous-agents soit légale, c’est dire que la non-garantie
est l’exception.

546. Cependant, la position du décret-loi N. 34/67 dans cette attitude dérogatoire


au droit commun est parfaitement justifiable, car, si l’obligation de garantie, en
matière de mandat non-autorisé est la réponse du principe de la substitution997, il est
normal que cette même garantie soit un moyen de contrôler l’exercice non-abusif du
droit de désigner des sous-agents accordé uniformément à tous les représentants par le
décret-loi N. 34/67. Notons, enfin, que cette obligation de garantie, et par conséquent,
la responsabilité du représentant doit être plus lourdement envisagée si le représentant
a désigné des sous-agents, alors que le représenté avait pris soin de l’interdire
expressément dans le contrat de représentation.

b- Le caractere excessif

547. Par ailleurs, l’obligation de garantie incombant au représentant commercial


des actes effectués par des sous-agents conformément aux dispositions de l’article 3,
paragraphe 3, du décret-loi N. 34/67, cette obligation a un caractère excessif. En effet,
même si, d’après l’article en question aucun rapport ne doit exister entre les sous-
agents du représentant avec le représenté998, cela n’empêche point le représenté de

Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est
substituée ».
997
Sachant que le code civil permet cette substitution même lorsque le mandant ne l’a pas autorisée,
le mandataire originaire sera responsable des actes de son substitué. Cependant il ne l’admet pas quand
le mandant a interdit cette substitution : F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e
éd., Litec, 2005, n° 287.
998
Dans le même sens, il a été jugé que le mandant ne peut traiter directement avec un sous-agent :
Cass. civ., 10 janv. 1979, Bull. civ., I, n° 17.
-280-

pouvoir agir directement contre eux comme étant les auteurs du préjudice à lui causé
par leur fait. En réalité, les dispositions de l’article 3 interdisent uniquement le recours
direct des sous-agents du représentant contre le représenté, si les conditions de
l’obligation de garantie telles que définies ci-dessus sont réunies999 : Solution opposée
au droit français où il a été jugé que le sous-agent peut agir directement contre le
mandant pour obtenir le paiement des avances, frais, rémunérations1000.

548. D’ailleurs le maintien du recours direct du représenté contre les sous-agents


du représentant résulte formellement des dispositions de l’article 784 du Code des
obligations et des contrats selon lequel « dans tous les cas, le substitué est directement
tenu envers le mandant, dans les mêmes conditions que le mandataire »1001. Après
tout, c’est là l’intérêt de l’obligation de garantie, celui d’accorder au créancier un
débiteur en plus pour la même créance. D’autre part, les dispositions combinées des
articles 3 et 4 en question dénotent un éloignement de la représentation des règles du
mandat sur deux points : d’une part, ces dispositions remettent en question le décès de
l’une des parties ainsi que le changement involontaire d’état comme causes de
cessation de la représentation, apportant par-là, une atténuation au caractère intuitu
personae du mandat : Idée justifiée par la doctrine française1002.

549. Ces obligations caractéristiques qui incombent au représentant commercial


ne sont pas excessives, étant donné qu’elles trouvent leur contrepartie dans les
obligations qui incombent à la firme représentée. Après avoir traité les obligations du
représentant commercial envers son représenté, voyons ce qu’il en ait des obligations
du représenté envers son représentant.

999
Le recours, par contre, par la voie indirecte est valable. Il en est ainsi lorsque le représentant
principal n’ayant pas acquitté les sous-agents leur dû, omet de réclamer ses propres dûs au représenté :
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit. art. 3, n° 12.
1000
Cass. civ., 27 déc. 1960, D., 1961, p. 491, note J. BIGOT ; Cass. com., 5 oct. 1993, Bull. civ.,
IV, n° 320.
1001
Cet article trouve un similaire en droit français avec l’art. 1994, al. 3 C. civ. : « Dans tous les
cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée ».
1002
Sur la nécessité d’un agrément du substitué dans ce cas, M. NERET considère que la possibilité
de substitution va à l’encontre du principe d’intuitu personae : J. NERET, Le sous-contrat, th. Paris,
LGDJ, 1979, n° 85 ; M. LE TOURNEAU considère à ce sujet qu’il s’agit d’une anomalie : Ph. Le
TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 239.
-281-

SECTION 2

LES OBLIGATIONS DU REPRÉSENTÉ

550. La clause d’exclusivité dans les contrats de représentation commerciale


crée des obligations plus ou moins lourdes selon que la firme représentée est
bénéficiaire ou concédante de l’exclusivité. Lorsque la firme représentée est
bénéficiaire de l’exclusivité, c’est dire, lorsque le représentant s’engage à fournir
auprès d’elle uniquement, aucune obligation particulière, caractéristique du cas,
n’incombera à la firme en question. Il en est ainsi des modalités particulières relatives
aux obligations de la firme sur la quantité de production fournie, la durée de
fourniture, les prix etc… Il en est tout autrement lorsque la firme représentée est
concédante de l’exclusivité, c’est dire lorsque le représentant en est bénéficiaire, où il
a été jugé qu’il appartient au fournisseur de faire respecter l'exclusivité qu'il a
concédée1003.

551. Cependant, comme la représentation commerciale est une forme de


l’entremise commerciale1004 fondée sur le mandat, toutes ces obligations vont
incomber au représenté avec des modalités particulières d’application au sens du
décret-loi N. 34/67. Sachant que, nous trouvons des obligations communes entre le
représentant commercial et le représenté, comme l’obligation de loyauté qui emporte
une obligation de non-concurrence et parfois une obligation d’exclusivité.

552. C’est ainsi que nous retrouverons d’une part, dans un premier paragraphe,
l’obligation du représenté de fournir tous les moyens nécessaires devant permettre au
représentant l’exercice de la représentation ; ces derniers résultent des dispositions des
règles du mandat prévues au Code des obligations et contrats libanais et au Code civil
français1005. En effet, au moment où la firme consent à accorder l’exclusivité au
représentant, elle s’engage directement à ne fournir les produits ayant fait l’objet de

1003
Cass. com., 20 févr. 2007, Bull. civ., IV, n° 52 ; D. 2007. AJ 795, obs. E. CHEVRIER ; JCP
2007. IV. 1657 ; Contrats, conc. consom. 2007, n° 121, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; Lettre
distrib., 2007, p. 2.
1004
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1005
Le mandant ne doit pas gêner l’agent commercial dans l’exécution de la mission, suite à
l’obligation de loyauté prévue par l’article L. 134-4 C. com.
-282-

l’exclusivité à aucun autre représentant ou simple commerçant du secteur concédé1006.


Et, indirectement, elle garantit que les produits protégés ne seront pas vendus dans le
secteur concédé.

553. D’autre part, ayant exercé son activité, le représentant commercial


bénéfice d’une certaine protection prévue par les règles du mandat, rapport
contractuel fondé sur la confiance. Dans un deuxième paragraphe, il sera question de
cette protection, assurée par le représenté, qui s’engage aussi à rétribuer son
représentant pour tous les efforts qu’il aurait déployés1007, et à le rembourser les frais
engagés pour l’exécution de la mission1008.

554. Ces obligations devant incomber au représenté se retrouvent, pratiquement,


dans toutes les catégories de représentation commerciale, y compris la distribution
exclusive de vente1009. Cependant, s’agissant de cette dernière forme, point n’est
besoin de reprendre l’étude des obligations du vendeur, celles de la délivrance et de
garantie, celles-ci ne présentant aucune modalité particulière s’agissant de la
représentation commerciale. A ce niveau il s’agit de rappeler que nous allons se
contenter sur les obligations mentionnées dans le décret-loi et commun aux règles de
mandant afin d’éviter une répétition d’étude des dispositions des règles du droit civil.

1006
L'exclusivité territoriale oblige le fournisseur à ne pas livrer les produits, dans le territoire
concédé, à des revendeurs autres que le distributeur exclusif : D. FERRIER, Accords de distribution,
D., 2011, n° 87.
1007
Dans les domaines de la commission et du courtage, ces obligations se traduisent
respectivement par les obligations de verser la commission et le courtage, et celles de traiter avec le
contractant du courtier. Les mandataires, commissionnaires et courtiers disposent, pour cela, des divers
privilèges et moyens de sûreté pour obtenir l’exécution par le commettant de ses obligations : M.
MAHMASSANI, op.cit., p. 279.
1008
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 63.
1009
Suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi n° 34/67 : « Est aussi considéré
comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce
qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur
exclusif unique ».
-283-

Paragraphe 1 : L’obligation de permettre l’exercice

de la représentation

555. D’après les règles du mandat, prévues au Code des obligations et contrats
libanais et au Code civil français, le mandant, en contractant avec le mandataire,
s’engage à offrir tous les moyens nécessaires pour permettre au mandataire
l’exécution de son mandat1010. Tout comme le mandataire, le représentant commercial
est tenu au respect de sa mission et doit s’y conformer, vu le véritable lien qui unit la
représentation commerciale à la qualification de mandant.

556. Cette obligation du représenté se traduit dans son application pratique par
une série d’obligations individuelles et accessoires, dont l’énumération et la
règlementation dépend exclusivement des parties. Cependant, parmi ces obligations,
deux apparaîssent comme caractéristiques de la représentation commerciale. D’une
part, il s’agit d’une série d’obligations imposant au représenté d’adopter une attitude
positive (A), et d’effectuer certaines prestations, afin de permettre l’exercice de la
représentation en somme de « faire quelque chose »1011. Il s’agit, notamment, des
divers services que le représenté serait appelé à accorder au représentant 1012. D’autre
part (B), il s’agit des obligations imposant au représenté d’adopter une attitude
négative, une obligation de ne pas faire, celle de s’abstenir d’effectuer certains actes,
notamment la concurrence, de nature à entraver l’exécution normale de la
représentation1013.

1010
Le mandant ne doit pas gêner l’agent commercial dans l’exécution de la mission, suite à
l’obligation de loyauté prévue par l’article L. 134-4 C. com.
1011
Le mandant doit donner à l’agent commercial les moyens de développer fructueusement son
activité pour la diffusion des produits : D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis,
2012, n° 213.
1012
Le cas échéant des échantillons de produits ainsi que les informations nécessaires à l’exécution
du contrat, notamment les conditions de vente et les données du marché dont il aurait connaissance :
Art. L. 134-4 C. com., art. L. 134-16 C. com.
1013
Le mandant ne doit pas évidemment désigner d’autres agents commerciaux dans le territoire
confié en exclusivité au mandataire : CA Paris, 17 janv. 1995, somm. p. 260, obs., Y. SERRA ; M.-F.
NICOLAS-MAGUIN, Le mandat exclusif, D., 1979, chron. p. 265.
-284-

A- L’obligation de faire

557. C’est un domaine où la volonté des parties est maîtresse cause d’absence de
précision à cet égard dans le décret-loi N. 34/67. Il dépendra de l’habileté du
représentant d’obtenir du représenté l’engagement d’effectuer le plus grand nombre
de prestations et d’actes tendant à faciliter et à garantir l’exercice de la
représentation1014. C’est ainsi que l’article 4 de la directive européenne de 1986, qui a
d’abord déterminé le contenu de l’obligation du mandant d’un agent commercial :

« 1. Dans ses rapports avec l'agent commercial, le commettant doit agir


loyalement et de bonne foi.

2. En particulier, le commettant doit:

a) mettre à la disposition de l'agent commercial la documentation nécessaire qui


a trait aux marchandises concernées ; b) procurer à l'agent commercial les
informations nécessaires à l'exécution du contrat d'agence, notamment aviser l'agent
commercial dans un délai raisonnable dès qu'il prévoit que le volume des opérations
commerciales sera sensiblement inférieur à celui auquel l'agent commercial aurait pu
normalement s'attendre »1015.

558. Ensuite, le législateur français a repris tout a plus l’esprit de la directive


dans l’article 2 du décret de 1958 : « Le mandant doit mettre à la disposition de
l'agent commercial toute documentation utile sur les produits ou services qui font
l'objet du contrat d'agence.

Il doit communiquer à l'agent commercial les informations nécessaires à


l'exécution du contrat. Il doit, notamment s'il prévoit que le volume des opérations

1014
S’agissant des facilités auxquelles s’engage le représenté, et dont la détermination est laissé à la
volonté des parties, il faut mentionner surtout la littérature destiné à la publicité. Il s’agit de toute
brochure, renseignement ou autre tendant à mieux faire connaître les produits objets de la
représentation : E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 24.
1015
Directive 86/653/CEE du Conseil du 18 déc. 1986 relative à la coordination des droits des États
membres concernant les agents commerciaux indépendants, J.O. n° L 382 du 31/12/1986, p. 0017 –
0021.
-285-

sera sensiblement inférieur à celui auquel l'agent commercial aurait pu normalement


s'attendre, l'en aviser dans un délai raisonnable.

Il doit également informer l'agent commercial, dans un délai raisonnable, de son


acceptation, de son refus ou de l'inexécution d'une opération que celui-ci lui a
apportée ».

559. Ces principes ont été modifiés par l’art. L. 134-4 al. 2 C. com., précisant
que « les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une
obligation de loyauté et un devoir réciproque d’information…. Le mandant doit
mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat ». En d’autres termes,
mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat, c'est lui permettre de
connaître les produits ou services qui font l'objet du contrat, et de convaincre les
clients potentiels1016. Cette dernière se justifie d’un côté, par le devoir que supporte le
mandant d’informer le mandataire des obstacles qu’il pourrait rencontrer avec certains
clients, de façon de recentrer son activité sur des clients moins douteux 1017. Et de
l’autre côté, par le devoir d’obligation visé par le mandant à l’agent pour lui permettre
de créer un courant d’affaires1018. Il s’agit d’un devoir coopératif de loyauté et de
confiance utile à une issue favorable de la mission1019.

1016
La « documentation utile » que le mandant doit remettre à l'agent (Décr. 23 déc. 1958, art. 2,
mod. par Décr. 10 juin 1992) a cette double finalité. Il faut que l'agent puisse informer la clientèle à
l'aide des supports habituels de la communication commerciale (brochures, catalogues, échantillons,
notices techniques). Il faut que l'agent soit lui-même informé par le mandant, notamment sur la
technologie des produits nouveaux à l'égard desquels le mandant a une véritable obligation
d'enseignement. L'article 2 précité revêt également un caractère impératif : J.-M. LELOUP, Agent
commercial, D, 2012, n° 59.
1017
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 104.
1018
CA Rennes, Ch. 01 B, 1 oct. 2010, n° 09/02272 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11 mars 2010,
n° 08/03694 ; CA Lyon, Ch. civ, 01 B, 17 déc. 2009, n° 09/06347 ; Cass. com., 17 mars 2009, n° 08-
10. 398.
1019
Ne pas connaître le particularisme de cette obligation dans le contrat d’agence commerciale en
tant que telle, aurait, en premier lieu, l’effet de rendre inopérants de nombreux contrats de mandat où le
mandant ne souscrirait pas à son obligation d’information du mandataire et, en second lieu, remettrait
en cause la nécessité d’un rapport de confiance entre les parties en les remettant en cause la
communauté d’intérêts qui les lie, qui correspond, pour le mandant, à l’avantage de placer un homme
de confiance ou de compétence à la tête d’une mission particulière et, pour le mandataire, soit au fait de
rendre service, soit à l’espérance de tirer quelque profit de son action pour le commettant : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 83.
-286-

560. En contrepartie, à défaut de mentions particulières du contrat de


représentation relativement à la détermination des obligations particulières respectives
des parties, le représenté s’engage à répondre aux demandes de renseignements à lui
adressées par le représentant1020, à peine d’engager sa responsabilité pour avoir
manqué à l’obligation en question1021; ce qui pourrait rarement, constituer une faute
susceptible d’entraîner la résiliation du contrat aux torts du mandant1022.

561. En pratique la jurisprudence sanctionne le mandant qui manquerait à cette


obligation de « donner les moyens de réussir la mission ou de ne pas l’entraver »1023.
Ainsi, la Cour de cassation indique que la Cour d’appel devait rechercher si tant
qu’« informé des difficultés de l’agent en raison des ventes parallèles de produits

1020
Le mandant doit fournir les moyens nécessaires à l’agent commercial pour réaliser sa mission.
Ces moyens consistent dans l’information du mandataire, dans la fourniture d’instructions, de
renseignements et de documents : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 59 ; C’est ainsi
qu’il incombera au représenté de répondre à toutes les demandes de renseignements concernant les
produits rentrant dans la représentation et sans lesquelles l’exercice par le représentant de ses activités
serait rendu impossible. Il en est ainsi des délais de fabrication et de livraison, des quantités disponibles
lorsque le contrat n’aurait pas déterminé par avance un chiffre minimum des ventes. Il en est ainsi aussi
de certains renseignements concernant les caractéristiques des produits eux-mêmes : H. HADATHI,
Cours de droit des obligations et des contrats, Usek, 2002, p. 112.
1021
Cette responsabilité découle du fait que le mandant s’abstenant de mettre le mandataire en
mesure de réaliser à sa mission, en ne lui ayant pas fourni les informations, les documents ou les
instructions nécessaires à la bonne exécution de sa tâche : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.
cit., n° 82 ; Il pourra être sanctionné s’il intervient directement dans le territoire confié à l’agent, même
en l’absence d’exclusivité : CA Versailles, 7 juill. 1999, RJDA, 1999, n° 1203 ; « Le mandant devra se
soumettre à ces obligations, sous peine de contrevenir, d’une part aux dispositions du code civil
concernant l’exécution des conventions de bonne foi et l’obligation générale de loyauté entre les
parties » : art. 1134, al. 3, C. civ.
1022
Comme par exemple, le refus de fournir des échantillons et documentation : J. CATONI, La
rupture du contrat d’agence commerciale et le décret de 1958, préf. J. GAULTHIER, Paris, 1970, n°
121. Cette opinion a été discutée en doctrine, étant donné que le représenté ne pourra y être obligé s’il
n’y s’est pas engagé expressément au contrat de représentation. Cela se comprend parfaitement à la
lumière aussi bien des règles du mandat que de celles de la représentation commerciale. D’autre part, le
représentant, en tant que mandataire, représente le mandant, donc, fait ce qu’aurait fait le mandant. Or,
il n’est pas indispensable pour le producteur de distribuer des échantillons et documentations. Ainsi,
c’est le représenté qui fixe l’objet de la représentation et son étendue. Il peut, parfaitement, ne pas y
inclure la distribution d’échantillons ; et au cas de silence du contrat, il faut interpréter dans le sens qui
ne ferait pas dire aux parties ou à l’une d’elles ce qu’elles n’ont point voulu dire. Par conséquent, nous
considérons qu’au cas de silence du contrat, le représenté ne peut être réputé avoir révoqué la
représentation à ses torts, pour la simple raison qu’il aurait refusé de fournir documents et échantillons
au représentant : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du
Liban, 1972, p. 281 et 282. Dans le sens opposé, M. FOURNIER considère que ce manque d’obligation
aurait pour résultat non pas de provoquer la caducité du contrat pour défaut d’objet ou son annulation
pour impossibilité de réaliser l’objet contractuel mais d’engager la responsabilité contractuelle du
mandant : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 82.
1023
F. FOURNIER, op. cit., n° 81.
-287-

venant des centrales d’achat qui s’approvisionnaient en métropole (auprès du


mandant), le mandant a pris des mesures concrètes pour permettre à son mandataire
de pratiquer des prix concurrentiels, proches de ceux des mêmes produits vendus
dans le cadre de ces ventes parallèles et de le mettre ainsi en mesure d’exécuter son
mandat »1024. En d’autres termes, le mandant doit s’assurer que l’agent peut agir sans
subir la concurrence déloyale par des mesures discriminatoires, du mandant lui-même
ou de son réseau de distribution1025.

562. En effet, il faut dire qu’il ne s’agit-là d’une obligation inhérente à la


représentation commerciale que dans la mesure où ces renseignements s’inscrivent
dans le cadre de la représentation, et sont donc indispensables pour le représentant
dans l’exécution de son contrat1026. Le mandant se trouve également soumis dans le
cadre de son obligation de fournir les moyens nécessaires au mandataire pour réaliser
sa mission, à honorer les engagements souscrits par le représentant dans les limites de
l’objet de l’exécution1027, ce qui entraîne une autre obligation essentielle et
primordiale1028, celle d’exécuter de manière satisfaisante1029, et de ne livrer des

1024
Cass. com., 24 nov. 1998, D. 1999, IR, p. 9.
1025
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 81.
1026
Ces dernières sont celles qui doivent permettre à l’agent de promouvoir son produit et d’en
présenter les avantages et les caractéristiques particulières notamment sur les nouvelles techniques et
sur les nouveaux produits : J.-M. LELOUP, JCP, éd. E., 1987, I, 15024, n° 19, p. 495.
1027
Il s’agit de remboursement des frais du mandataire et de son indemnisation pour les pertes qu’il
a subies à l’occasion de l’exécution de la mission : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n°
59.
1028
L’application pratique de cette obligation prend deux formes différentes selon qu’il s’agit de
représentation commerciale à base de mandat ou de représentation commerciale à base de concession
des ventes. Lorsqu’il s’agit à base de mandat, le représentant est réputé agir au nom et pour le compte
du représenté. Il ne peut, en principe, refuser d’exécuter et d’honorer les engagements acceptés par le
représentant : J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 59. Dans le même sens, il a
été jugé que le représenté est même tenu d’assurer le service après-vente lorsqu’il s’agit de produits
hautement techniques et spécialisés : Cass. com., 7 janv. 1969, JCP., 1969, II, 16121 ; Lorsqu’il s’agit
de représentation commerciale à base de concession des ventes, le représentant achète du représenté,
puis revend aux tiers pour son propre compte les produits ainsi achetés. Son avantage réside dans
l’exclusivité dont il jouit, selon laquelle il est seul à pouvoir acheter ces produits en question, et par
conséquent, de pouvoir seul revendre ces produits sur le marché concédé. Dans ce cas, l’obligation du
représenté est celle de vendre au représentant les quantités qu’il aurait commandées : M.
MAHMASSANI, op. cit., p. 288.
1029
Sous peine de subir le préjudice de perdre la clientèle, ainsi que les bénéfices qu’il escomptait
recueillir. Dans ce cas, si la mauvaise exécution par le représenté se répétait, de manière à lui donner un
caractère fautif, le représenté pourrait être réputé avoir résilié le contrat de représentation à ses torts,
-288-

marchandises de mauvaise qualité1030. Ces engagements, trouvent leur fondement


dans la notion de clientèle. Cependant, si le représenté manquant de répondre aux
demandes de renseignements présentées par le représentant, la responsabilité serait
d’autant plus grande au vu du risque subi par le représentant de perdre partie de sa
clientèle à cause du retard ou du défaut de réponse1031.

563. Après avoir abordé les obligations d’attitude positive incombant au


représenté, voyons celles qui exigent de lui une conduite négative, « de ne pas faire
quelque chose », à peine d’engager sa responsabilité avec toutes les conséquences de
nature à en découler (B).

B- L’obligation de ne pas faire

564. Le représenté en accordant la représentation pour ses produits à un


commerçant, s’engage, en même temps, à observer une certaine ligne de conduite qui
lui impose de s’abstenir d’accomplir certains actes. Il en est ainsi de tout acte de
nature à entraver l’exercice de la représentation d’une manière bénéfique aux deux
parties. Citons parmi ces obligations les deux plus importantes. Il s’agit de
l’obligation de non-concurrence (a) et de l’obligation de ne pas modifier le prix de
manière abusive (b).

entrainant, par-là, sa responsabilité conformément aux dispositions de l’article 4 du décret-loi n°


34/67 : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 289.
1030
Cass. com., 26 janv. 1970, Bull. civ., 1970, IV, 30 et J. HEMARD, RTD com., 1971, p. 162,
163, n° 12 : Dans cette espèce, la livraison de matériels de mauvaise qualité à l’agent est de nature à
entrainer la résiliation du contrat aux torts du représenté.
1031
Raisonnement effectué par M. CATONI considérant que les parties au contrat de représentation,
au moment où elles concluent le contrat, visent à s’associer de fait en vue de constituer une clientèle
commune dont les deux parties bénéficieraient, l’une, le représenté sous forme d’accroissement de son
chiffre d’affaires, l’autre, le représentant, sous forme d’accroissement de ses rentrées par voies de
commissions : J. CATONI, La rupture du contrat d'agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 22.
-289-

a- L’obligation de non-concurrence

565. Le représenté s’engage d’une part, à s’abstenir de tout acte de nature à


attirer la clientèle formée par les soins du représentant. Il doit, pour cela, s’abstenir de
communiquer, directement ou indirectement la clientèle, aussi bien celle formée par le
représentant que celle antérieure à son entrée en jeu1032. La prospection de la clientèle
ancienne se trouve interdite au représenté, car, en vertu du contrat de représentation, il
en concède le profit au représentant1033.

566. En contrepartie, les juridictions ont pris l'habitude d'intégrer ces principes
dans la motivation de leurs décisions en soulignant par exemple que « la liberté de la
concurrence reste, dans une économie libérale, le principe fondamental des rapports
commerciaux, chaque commerçant ou industriel ayant la possibilité d'attirer à lui la
clientèle de ses concurrents sans que cela puisse lui être reproché.… »1034 ; ou bien en
affirmant que le « principe fondamental de la liberté du commerce permet de
s'attacher les clients d'un concurrent sans que soit engagée la responsabilité de
l'instigateur du déplacement ainsi opéré, aucune clientèle ne pouvant, en toute
hypothèse, faire l'objet d'un droit privatif…»1035. Ces principes sont confirmés tout
aussi clairement par la Commission des Communautés européennes lorsqu'elle
indique que « l'achalandage et la clientèle d'une entreprise ne sont protégés par
aucun droit absolu. Ils représentent plutôt une position concurrentielle de pur fait qui

1032
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 290 ; Le vendeur d'un fonds de commerce a l'obligation de
s'abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé. En dépit d'une clause de non-
concurrence n'interdisant à une société cédante de faire concurrence à une société cessionnaire que sur
le territoire français, et pendant une période de trois ans, la cédante s'oblige nécessairement à garantir
l'effectivité de la cession et la totalité de son fonds de commerce et s'interdit d'attirer vers elle son
ancienne clientèle implantée tant en France que dans les autres pays d'Europe et aux Etats-Unis : CA
Rouen, 25 mai 2000, D., n° 1995/321.
1033
Cette obligation est facile à sanctionner lorsque la représentation a été accordée au représentant
commercial avec exclusivité pour un territoire donné. Dans ce cas, toute transaction passé par le
représenté, directement ou indirectement, dans le secteur concédé en exclusivité constitue une violation
par le représenté de l’obligation de non-concurrence : Cass. com., 9 mars 1970, Bull. civ., 1970, IV, 84,
dans cette espèce, la Cour de cassation retient la responsabilité d’un producteur qui avait accordé une
concession à un commerçant avant l’expiration de la concession exclusive accordée auparavant à un
autre commerçant dans le même secteur : C. CHAMPEAU, La concession commerciale, RTD com.,
1963, n° 53.
1034
CA Amiens, 7 mai 1974, D., 1975. 263, note J.-C. FOURGOUX.
1035
CA Paris, 9 juin 1999, D., 2000, Somm. 325, obs. Y. AUGUET.
-290-

est exposée à tout moment aux attaques de tiers concurrents »1036. A ce titre, il s’agit
de rappeler que l’application de ces principes est traditionnellement sous la réserve «
de respecter les usages loyaux du commerce »1037.

567. D’autre part, le représenté s’engage à s’abstenir de fournir les produits


ayant fait l’objet de la convention d’exclusivité dans le secteur concédé. Ceci résulte
directement de l’engagement souscrit par la firme représentée en application du
principe de la force obligatoire du contrat. Cependant, comme la représentation
commerciale ne consiste pas uniquement dans la vente ou la distribution de produits,
l’obligation qui résulte de l’exclusivité, est celle de s’abstenir de traiter avec tout autre
représentant ou commerçant relativement à l’objet de la représentation dans le secteur
concédé, et durant toute la période convenue1038. Se trouve également visée
l’obligation d’exclusivité en droit français, imposant au mandant de ne pas désigner
d’autres agents pour le même type d’opération ou de clientèle dans le territoire
contractuel1039 ; elle affecte le jeu de la concurrence en éliminant tout autre agent
concurrent1040.

568. Cependant, une distinction, à cet égard, s’impose entre droit français 1041 et
droit libanais1042. En effet, en France, cette obligation n’est pas absolue1043 où s’est

1036
Décis. Comm. CE 26 juill. 1976, Reuter c/ BASF, JOCE, n° L 254.
1037
Cass. com., 1 juin 1999, n° 97-15.421, D., 2000, Somm. 325, obs. Y. AUGUET ; CA Paris, 8
nov. 1996, D. 1997. Somm. 241, obs. Y. SERRA ; CA Paris, 5 mars 1987, D., 1988, Somm. 180, obs.
Y. SERRA.
1038
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 24 ; TI Beyrouth, Ch. com.,
décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de pharmacie c/ Compagnie suisse
Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 22 ; J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité de vente, RTD com.,
1963, n° 15 et s.
1039
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 242.
1040
En ce sens, N. KOCH, et G. MARENCO, L’article 85 et les contrats d’agence, CDE 1987, n° 6,
p. 604- Rapp. Dir. 18 déc. 1986, JOCE, L. 382, 31 déc.1986, art. 20 admettant une obligation de non-
concurrence pendant un délai de deux ans après la fin du contrat.
1041
R. PLAISANT, Les contrats d’exclusivité, RTD com., 1964, n° 11. Cependant, à cet égard, la
législation française a pris une certaine orientation économico-sociale que nous ne pouvons aborder
pour ne pas sortir de notre sujet ; J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité, op. cit., n° 3 et s., à
l’occasion du décret du 24 juin 1958 sur le refus de vente, J.O. 25 juin, et son interprétation par la
circulaire Fontanet du 31 mars 1960, J.O. 2 avr. 1960, p. 3048 et D. 1960. L. 124, ainsi que du Traité
de Rome sur le droit européen des ententes et la liberté du commerce comme moteur de l’économie.
-291-

considéré que sera a fortiori condamnée la clause accordant une exclusivité


territoriale dite « absolue » par laquelle le bénéficiaire de l’exclusivité est , d’une part,
protégé contre toute vente opérée par un revendeur1044, concessionnaire ou revendeur
extérieur au réseau1045, fournie hors du territoire concédé ; d’autre part, contraint de
ne pas intervenir lui-même hors de ce territoire1046.

569. Le cas suivant se pose souvent : des représentants exclusifs se voient


concurrencer par un commerçant relativement au même objet de la représentation
dans son propre secteur d’exclusivité. Ce commerçant concurrent ne s’est pas procuré
la production de la firme représentée, mais bien plutôt d’un autre représentant de cette
firme ou d’un autre importateur1047. A cet égard, il est uniquement question de savoir
si la firme représentée concédante de l’exclusivité peut ou non être tenue responsable
pour violation d’une obligation de garantie résultant de la concession de
représentation exclusive1048. Il semble qu’il faille répondre par l’affirmative avec
certaines réserves. Toutefois, si la firme représentée est tenue de garantir le
représentant exclusif de toute concurrence, il ne s’agit pas là d’une obligation de
garantie pure et simple.

570. Certaines observations, dans ce cas s’imposent. Il s’agit d’une obligation de


résultat du second degré, une obligation qui impose à la firme représentée une certaine

1042
En effet, pour certains produits, en France, le commerçant n’est pas libre dans le choix de la
clientèle. Pour cela, et dans tous les cas où la représentation porte sur des produits touchés par la
législation relative au refus de vente, la convention d’exclusivité ne pourra recevoir application et
exécution. Elle sera, plutôt, nulle comme ayant un objet illicite. Au Liban, par contre, comme une telle
législation n’existe pas, chacun est libre de vendre ou de ne pas vendre, dans la mesure où sa publicité
ne constitue pas une véritable pollicitation : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en
droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 161.
1043
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 639.
1044
Il est, dans ce cas, passible des responsabilités civile et pénale pour refus de vente : Y. PICOD,
Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 251 ; P. ARHEL, Transparence
tarifaire et pratiques restrictives, D., 2012, n° 259.
1045
Comm. CE 20 sept., 2000, Opel, JOCE, n° L. 59, 28 fév.2001 : amende de 43 millions d’euros ;
TPICE, 6 juill. 2000, VW, Rec., TPICE, 2000, II, p. 2707 : amende de 90 millions d’euros.
1046
Cass. crim., 21 mars 1972, D. 1973, p. 677, note T. LVAINER ; CJEC 20 juin 1978, Tepea,
Rec, CJCE, 1978, I, p. 1391.
1047
Il ne s’agit pas, dans ce cas, d’analyser l’attitude de cet importateur parallèle et ses rapports
avec les parties étant donné qu’il en sera question au second chapitre du présent titre.
1048
Ch. FABIA, Les conventions d’exclusivité, Commerce du Levant, n° 22, 1962, p. 9 et s. ; J.-M.
MOUSSERON, EDL, 1964, p. 291 et s.
-292-

règle de conduite à l’égard du représentant auquel elle a accordé une exclusivité1049.


Elle crée uniquement à la charge de la firme représentée une présomption simple de
négligence de prendre les mesures de protection, présomption qui admet toute preuve
contraire. Elle offre l’avantage au représentant exclusif lésé, en cas de concurrence, de
ne pas avoir à apporter la preuve de la négligence de la firme représentée. C’est à
celle-ci de prouver qu’elle a pris toutes les mesures de protection nécessaires 1050 ;
preuve demeurant plus difficile lorsque le représentant commercial ne jouit d’aucune
exclusivité. Le cas échéant, la représentée reste libre de distribuer ses produits sur le
marché du représentant, soit directement ou indirectement, par l’intermédiaire d’un
second représentant, avec l’interdiction de détournement de la clientèle de ce
représentant non-exclusif1051. Elle ne pourra donc pas être tenue de réparer le
préjudice subi par le représentant pour violation de l’exclusivité si auparavant il s’était
engagé auprès d’elle de la respecter1052. En contrepartie, la responsabilité de la firme
représentée serait engagée pour violation de l’obligation de non-concurrence, chaque
fois qu’il aurait passé une transaction directement avec une personne d’une région
rentrant dans le ressort du secteur concédé pour la représentation, et ce, sans
l’intermédiaire du représentant1053. Cette violation pourra, éventuellement constituer
une cause de résiliation du contrat de représentation aux torts du représenté, avec

1049
L’obligation de garantie en question est une obligation de résultat du second degré, et c’est ce
qui lui donne un caractère précaire. Cette précarité résulte du fait que la firme représentée ne peut être
tenue responsable du seul fait qu’une concurrence a pu se produire dans le secteur de l’exclusivité : M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p.
162.
1050
Elle devrait par exemple, aviser toute personne du secteur en question qui s’adresserait à elle
directement, de contacter le représentant de la place : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 291.
1051
Cass. com., 3 déc. 1963, RTD com., 1964, p. 375, n° 7 : Dans cette espèce, le représenté avait,
en cours d’exécution du contrat de représentation, invité la clientèle du représentant, par voie de
circulaire, à s’adresser désormais, à lui exclusivement. Le caractère illicite d’une telle concurrence, par
conséquent, en ressort.
1052
En contrepartie, elle redevient responsable pour les dommages ultérieurs causés au représentant
si elle omet de prendre les mesures susceptibles de mettre fin à la concurrence. La firme représentée ne
garantit pas la réparation du préjudice de plein droit. Ce n’est donc, pas le résultat qui déterminera sa
situation. Ce sont les moyens déployés par elle et les mesures prises qui, comparés au résultat,
détermineront la responsabilité. La firme représentée est réputée avoir exécuté son obligation de
garantie en question si elle prouve qu’elle a pris tous les mesures possibles pour éviter la concurrence :
M. MAHMASSANI, op.cit., p. 162.
1053
Cass. com., 9 mars 1970, Bull. civ., 1970, IV, 84 : Dans cette espèce, la Cour de cassation
retient la responsabilité d’un producteur qui avait accordé une concession à un commerçant avant
l’expiration de la concession exclusive accordée auparavant à un autre commerçant dans le même
secteur.
-293-

toutes les conséquences qui découlent de l’application des dispositions de l’article 4


du décret-loi N. 34/671054.

571. En effet, il ne suffit pas que la firme représentée s’abstienne de traiter


directement avec un autre représentant ou commerçant du secteur concédé concernant
l’objet de la représentation à l’intérieur dudit secteur1055. Elle doit prendre toutes les
mesures nécessaires1056 afin d’éviter qu’une concurrence soit faite à son représentant
exclusif dans le respect de l’exclusivité concédée en raison d’une obligation de non-
concurrence1057. C’est ainsi qu’elle doit prévoir, dans les contrats ultérieurs qu’elle
passe avec des sous-agents, une clause par laquelle elle interdit à ceux-ci d’opérer
dans le secteur protégé, et de faire concurrence au représentant exclusif1058. Or, ce
serait lui nuire que de permettre de le concurrencer.

572. En pratique, le contenu de cette obligation de non-concurrence sera souvent


précisé par une clause de non-concurrence insérée dans le contrat d'agence, ce qui
permet aux parties d'aménager la concurrence dans le cadre de leur collaboration1059.
La portée de l'obligation de non-concurrence doit être soulignée. La Cour de cassation
a en effet logiquement transposé aux autres mandats d'intérêt commun les solutions
valant pour le contrat d'agence commerciale1060. De la même manière, l'économie du

1054
Sa responsabilité peut se traduira par la naissance pour le représentant, d’un droit aux
commissions qui lui seraient revenues si la transaction en question avait eu lieu par son intermédiaire :
CA Grenoble, 8 oct. 1969, JCP, 1970, II, 16339, note J. HEMARD ; ceci forme une règle élémentaire
du calcul des éléments du préjudice subi en matière d’entremise commerciale.
1055
CA Rennes, 23 déc. 1965, commenté par J. HEMARD, RTD com., 1966, p. 634 n° 4 : Dans
cette espèce, le concédant avait agi contre un tiers commerçant qui avait violé l’exclusivité du
concessionnaire exclusif et a obtenu gain de cause ; CA Paris, 23 oct. 1964, RTD com., 1965, p. 155,
n° 9 : la firme représentée a retiré la représentation au mandataire qui empiétait sur le domaine d’un
autre représentant exclusif.
1056
Dans le cas d'un agent entravé dans son action par les ventes parallèles d'un client du mandant,
la Cour de cassation a décidé que le mandant devait prendre les mesures concrètes permettant à l'agent
commercial de pratiquer des prix concurrentiels proches de ceux pratiqués pour les ventes parallèles :
Cass. com., 24 nov. 1998, RTD civ., n° 1999.646, obs. P.-Y. GAUTIER.
1057
CA Paris, 8 mars 2001, D. 2002, somm. 1263, obs. Y. PICOD ; 10 janv. 1994, D. 1995, somm.
208, obs. Y. SERRA; 17 janv. 1995, D. 1995, somm. 260, obs. Y. SERRA.
1058
Juge unique Beyrouth, décision n° 241 du 14 fév. 1958, Rec. Hatem, vol. 33, p. 34, n° 2
1059
Cass. com., 4 juin 2002, n° 00-14.688, D., 2003, somm. 904, obs. Y. PICOD ; CA Versailles,
28 oct. 1999, D. 2000, somm. 317, obs. M.-L. IZORCHE.
1060
Cass. com., 16 mars 1993, n° 91-11.194, Bull. civ., IV, n° 109, D., 1994, somm. 224, obs. Y.
PICOD.
-294-

contrat de concession commerciale invite à considérer que le concédant, pendant la


durée du contrat de concession, est débiteur d'une obligation de non-concurrence de
plein droit envers le concessionnaire, obligation qui lui interdit de vendre lui-même
les produits concernés sur le territoire concédé et, dans la même limite,
d'approvisionner d'autres revendeurs que le concessionnaire1061.

573. La firme représentée doit, en outre, au cas de fourniture à un commerçant


dans un port du secteur concédé, ou un port voisin, interdire à l’acheteur de distribuer
à l’intérieur dudit secteur1062. En plus, elle doit lui imposer l’obligation de les
réexporter en totalité, car il ne peut garder la marchandise auprès de lui sans violer la
convention d’exclusivité ; et la firme représentée ne peut lui imposer uniquement de
s’abstenir de distribuer les marchandises1063, lui permettant par-là de la garder auprès
de lui, sans violer son engagement d’exclusivité.

b- L’obligation de ne pas modifier les prix

de manière abusive

574. Le représenté doit s’abstenir d’entraver la gestion de la représentation par


voie de modification des prix. En effet, il pourrait être très facile pour le représenté de
hausser ou de baisser considérablement ses prix, de manière à les rendre pour le
représentant vainement compétitifs sur le marché où il exerce1064, ou insuffisamment

1061
Cass. com., 19 déc. 1989, Bull. civ., IV, n° 327, D. 1990, somm. 368, obs. D. FERRIER ; 10
janv. 1995, D. 1995, IR 43.
1062
L'accord de fourniture exclusive est défini dans les Lignes directrices comme celui par lequel le
fournisseur est tenu de vendre les produits contractuels uniquement ou principalement à un seul
acheteur à l'intérieur du marché européen. La Commission précise que pour les biens ou services
intermédiaires, la fourniture exclusive est souvent appelée « fourniture industrielle », et invite à
distinguer l'accord de fourniture qui relève des accords de distribution en général et l'accord de
fourniture industrielle qui porte sur des produits entrant dans la fabrication de produits finis et
correspond plutôt à un accord de production : D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 21.
1063
Le règlement no 330/2010 interdit la stipulation d'un engagement de non-concurrence post-
contractuelle à la charge du distributeur (Règl. art. 5-1, b, annulant « toute obligation directe ou
indirecte interdisant à l'acheteur, à l'expiration de l'accord, de fabriquer, d'acheter, de vendre ou de
revendre des biens ou des services) : D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 21.
1064
La modification des prix peut ne pas être l’ouvre fantaisiste du représenté, mais dictée par des
impératifs touchants aux prix sur le marché international, ou pour d’autres motifs réputés légitimes par
les usages du commerce : Cass. com., 29 avr. 1969, Bull. civ., 1969, IV, 141.
-295-

rémunérants1065. Il ne peut se voir imposer par le représenté de vendre à un prix


inférieur au prix de vente convenu en application de l’adage « qui doit garantit ne peut
évincer » : Solution justifiée en droit français où le mandant serait sanctionné s’il
proposait lui-même des prix inférieurs aux clients, en leur envoyant directement des
tarifs plus alléchants1066. Dans le même sens, il a été jugé que le mandant devait
permettre à l’agent commercial, chargé de la vente, de pratiquer des prix
concurrentiels par rapport à ceux offerts par un revendeur1067. Il en est ainsi
même lorsque la modification des prix touche des produits à livrer au représentant
mandataire ou concessionnaire des ventes. Cependant, il ne saurait y avoir abus du
seul fait que le prix pratiqué est supérieur à celui auquel le fournisseur s’est lui-même
approvisionné ou à celui auquel il vend à des grands distributeurs1068.

575. Finalement si le représenté s’engage à fournir au représentant,


positivement ou négativement, tous les moyens de nature à permettre l’exercice de la
représentation, ses obligations ne s’arrêtent pas là. Car, si le représentant a pu exercer
ses activités de manière convenable, d’autres obligations incomberont aussi au
représenté, obligations découlant de cette exécution successive. Il s’agit, notamment,
de l’obligation pour le représenté de rémunérer le représentant

Paragraphe 2 : L’obligation de rémunération

576. Il est difficile d’imaginer en tout état de cause qu’un représentant


commercial ou un agent commercial puisse se soumettre à un contrat sans qu’il soit

1065
C’est en certain s’agissant du représentant concessionnaire des ventes qui a acheté pour un prix
déterminée : CA Paris, 5 juill. 1967, RTD com., 1968, p. 108 et D., 1967, 730.
1066
Cass. com., 14 mars 1995, arrêt n° 546, pourvoi n° 93-14.760.
1067
Cette possibilité est ouverte par la stipulation d’un mandat indicatif ou d’une clause dite de
survente autorisant l’agent commercial à négocier d’un prix supérieur à celui fixé par le mandant ;
Cass. com., 24 nov. 1998, Bull civ., IV, n° 277 : au motif qu’il n’était pas établi que le mandant avait
pris des mesures concrètes pour permettre au mandataire de pratiquer des prix concurrentiels proches
de ceux de ces mêmes produits vendus dans le cadre de ventes parallèles, Rapp. Cass. com., 3 nov.
1992, Bull civ., IV, n° 338 ; Solution excessive, en l’espèce, car le revendeur s’approvisionnait auprès
du mandant à des prix très intéressants grâce à une centrale d’achat : F. FOURNIER, L’agence
commerciale, op.cit., n° 81.
1068
CA Paris, 27 juin 1997, D., 1998, somm. p. 336, obs. D. FERRIER ( Hydrocarbures).
-296-

question de rémunération1069. Cette obligation résulte directement des dispositions des


articles 1999 et 2000 du Code civil français, où le mandant doit payer à l’agent
commercial la rémunération qui lui est due ainsi que les frais et pertes qu’il a
supportés dans l’exécution de sa mission, qui sont couverts généralement par la
commission1070. Ce mode de rémunération évite toute charge fixe et stimule le zèle du
réseau de vente1071. Cette obligation du représenté résulte des dispositions de l’art.
793 C.O.C.1072 et s. et l’art L. 134-5 C. com.1073, ainsi que des dispositions du Code de
commerce relatives aux obligations des commettants et donneurs d’ordre à l’égard des
commissionnaires et courtiers.

577. Elle se pose seulement lorsque le représentant est un simple mandataire au


sens de l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67, et non lorsqu’il a
la qualité d’un distributeur exclusif où il achète et paye lui-même la marchandise du
représenté et la revend à ses risques et périls. Le cas échant sera inutile la
rémunération pour stimuler son activité ainsi que pour les affaires traitées par lui,
étant donné qu’elle forme la conséquence de la nature du contrat d’agence
commerciale qui est un mandat salarié conclu entre professionnels1074.

578. Cette rémunération peut prendre les formes suivantes : D’abord, celle d’une
somme forfaitaire payable périodiquement1075 quel que soit le volume et le nombre

1069
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 580.
1070
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 214.
1071
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 63.
1072
Art. 793 C.O.C. al. 1 : « le mandant doit payer au mandataire tout ce qui a dépensé d’argent et
tout ce qui a payé comme frais dans le but de l’exécution du mandat. Et s’il a droit à un salaire, il doit
le payer indépendamment du résultat du travail sauf le cas de faute du mandataire ».
1073
Art. L. 134-5 C. com. : « Tout élément de la rémunération variant avec le nombre ou la valeur
des affaires constitue une commission au sens du présent chapitre.
Les articles L. 134-6 à L. 134-9 s'appliquent lorsque l'agent est rémunéré en tout ou partie à la
commission ainsi définie.
Dans le silence du contrat, l'agent commercial a droit à une rémunération conforme aux usages
pratiqués, dans le secteur d'activité couvert par son mandat, là où il exerce son activité. En l'absence
d'usages, l'agent commercial a droit à une rémunération raisonnable qui tient compte de tous les
éléments qui ont trait à l'opération ».
1074
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 580.
1075
Cette forme est connue en France comme une rémunération fixe : Rapp. J.-J. HANINE,
Distribution, Agents commerciaux, J.-Cl., fasc. 1240, n° 57, p. 12, pour qui cette rémunération
serait « l’indice d’un rapport de subordination vis-à-vis du mandant… ».
-297-

des opérations traitées par le représentant1076. Elle peut ensuite, prendre la forme de
commissions proportionnelles à la valeur des opérations traitées 1077 par
l’intermédiaire du représentant1078. Le cas échéant, la commission est due et devient
immédiatement exigible une fois que le représentant a conclu l’opération1079 et sans
qu’il soit besoin que le représenté ait obtenu l’exécution intégrale des opérations du
tiers contractant1080 : Solution proche de celle suivie en droit français où l’agent
commercial n’est payé qu’à partir du moment où le contrat avec le client est venu à
exécution complète1081, « ou devrait l'avoir exécuté en vertu de l'accord conclu avec le
tiers ou bien encore dès que le tiers a exécuté l'opération »1082, même si la mission n’a
pas eu de résultats dès lors que le mandataire l’a entreprise avec tous les moyens
utiles à sa bonne fin1083. Ainsi, dans l'exemple d'une vente, la commission est acquise

1076
Il s’agit de noter que le paiement d’une somme forfaitaire périodique à titre de rémunération
n’est pas incompatible avec le statut de représentant commercial et ne transforme pas la relation des
parties en louage de services, étant donné que ce n’est pas le mode de calcul pour la qualification des
parties entres elles qui compte. Contrairement en France, l’agent commercial n’étant alors pas
rémunéré en fonction des résultats pourraient être assimilé à un salarié si les conditions de ses
interventions sont fixées et contrôlées par le mandant : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.,
n° 234.
1077
La commission est en fonction du nombre ou de la valeur des affaires conclues grâce à l’agent :
Art. L. 134-5 C. com.
1078
Il a été jugé que la rémunération est proportionnelle au chiffres d’affaires ou au bénéficie
réalisé : CA Paris, 23 avr. 1968, Gaz. Pal., 1968, 2, p. 136.
1079
Solution favorable à l’agent commercial mise par l’article L. 134-9 C. com., en disposant qu’il a
droit à une commission dès lors que le mandant ou le client a exécuté l’opération ; Cass. com., 27 janv.
1959, Bull. civ., 1959, III, 45 ; Cass. com., 13 fév. 1961, III, 71 : Dans cette espèce, la Cour a reconnu
au représentant un droit aux commissions pour les commandes faites par lui avant la rupture de son
contrat mais qui n’ont pas encore été livrées. Elle lui a même reconnu ce droit, dans le même cas, si la
rupture a eu lieu avant que toute commande ne soit effectuée, mais alors que des clients s’étaient
inscrits auprès de lui en vue d’une prochaine commande. Telle solution que nous approuvons
pleinement, se fonde sur la notion de clientèle, celle-ci étant devenu la propriété du représentant du seul
fait de son inscription auprès de lui.
1080
En application des dispositions de l’art. 285 C. com. lib. : « Sous réserves des dispositions de
l’article précèdent, la commission est due par cela seul que l’opération a été conclue et alors même
que le tiers n’exécuterait pas les obligations assumées par lui, à moins que cette inexécution se résulte
d’une faute du commissionnaire ».
1081
L’art. L. 134-9 C. com., retient une solution favorable à l’agent commercial en disposant qu’il a
droit à une commission dès lors que le mandant ou le client a exécuté l’opération ; Cass. com., 31 mars
1992, RJDA, 1992, n° 817 : clause prévoyant que les commissions seraient dues uniquement sur les
affaires menées à bonne fin.
1082
Art. L. 134-9 C. com.
1083
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit. n° 67. Cette règle peut d’ailleurs être reprochée
de celle de la gestion d’affaires dans l’hypothèse d’un commissionnaire-priseur : Cass. civ., 1ere Ch.,
23 mars 1982, Bull. civ., I., n° 119.
-298-

au moment où le client aurait dû payer si le mandant avait livré à bonne date 1084.
Enfin, la rémunération peut consister dans le cumul des deux formes précédentes.

579. Cependant lorsque le contrat ne prévoit pas les conditions de rémunération


de l’agent, celui-ci a droit à une rémunération conforme aux usages pratiqués dans le
secteur d’activité couvert par son mandant là où il exerce son activité, et s’il n’existe
pas d’usage applicable, il a droit à une rémunération raisonnable qui tient compte de
tous les éléments qui ont trait à l’opération qui sera fixé par les juges 1085. La forme et
le taux de la rémunération sont donc déterminés par l'usage s'ils ne l'ont pas été par la
convention, et par le juge s'ils ne le sont pas par l'usage. Mais, dès lors que la
rémunération consiste en une commission, la loi a prévu, avec précision, le droit à la
commission, le fait générateur de la commission et son paiement.

580. Sur cette construction, la recherche en droit français a été plus développée
en distinguant entre deux situations donnant droit à une commission1086 : Cas des
opérations conclues pendant la durée du contrat d’agence et le cas des opérations
conclues après la fin de ce contrat. Pendant la durée du contrat d’agence, l’agent
commercial a droit à une commission pour tout contrat conclu par son
intermédiaire1087. Dans le même sens, lorsque l’agent est chargé avec ou sans
exclusivité1088, d’un territoire ou d’une clientèle spécifique définie comme un

1084
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 67.
1085
Art. L. 134-5 C. com. : « Dans le silence du contrat, l'agent commercial a droit à une
rémunération conforme aux usages pratiqués, dans le secteur d'activité couvert par son mandat, là où
il exerce son activité. En l'absence d'usages, l'agent commercial a droit à une rémunération
raisonnable qui tient compte de tous les éléments qui ont trait à l'opération » ; art. 795 C.O.C. : « Si la
rémunération n’est pas prévu, elle sera désignée selon l’usage pratiqué dans le lieu où le mandat a été
conclu, si non selon les circonstances ».
1086
Art. L. 134-6 C. com. : « Pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du
contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 lorsqu'elle a
été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu
antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre.
Lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent
commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du
contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ».
1087
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 216 : commissionnement
direct.
1088
Cass. com., 23 janv. 2007, D. 2007, 439, obs. E. CHEVRIER ; CDE 2007, n° 3, p. 53, obs. M.
BOURDEAU.
-299-

groupement de personnes déterminé1089, il a droit à une commission pour tout contrat


conclu par le mandant1090, même sans son intervention avec un client1091 relevant de
ce territoire1092 ou de cette clientèle1093.

581. Après la fin du contrat, l’agent commercial peut encore prétendre à une
commission dans la mesure où les contrats conclus entre le mandant et le tiers sont les
fruits des diligences qu’il avait mises en œuvre1094. Toutefois, le droit à commission
s’éteint si le contrat entre le mandant et le tiers n’est pas exécuté du fait d’une
circonstance non imputable au mandant, telle qu’un cas de force majeur ou
l’inexécution fautive du tiers1095.

582. Dans ce premier chapitre, nous avons exposé les causes de protection du
représentant commercial dans l’exécution du contrat de représentation commerciale,

1089
Art. L. 134-6, al. 2 C. com ; Cass. com., 8 déc. 2009, Bull. civ., 2009, IV, n° 159 ; D., 2011,
pan. 548, obs. D. FERRIER : Pas de limitation précise du secteur.
1090
Il en va autrement des contrats conclus par un tiers, centrale d’achat ou revendeur par exemple,
sans intervention du mandant, CJEC, 17 janv. 2008, Contrats, conc. consom. 2008, n° 67, obs. N.
MATHEY, D. 2009, pan. 2893, obs. D. FERRIER.
1091
C.J.R., 12 déc. 1996, D. 1997.438, note J.-M. LELOUP.
1092
Lorsque le client est une central d’achat, sont prises en compte les opérations portant sur les
produits commandés et livrés dans l’entrepôt de la central même s’ils sont ensuite fournis à des points
de vente d’adhérents situés hors du territoire : Cass. com., 3 mars 2009, D., 2009, pan. 2893obs. D.
FERRIER.
1093
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 216 : commissionnement direct ou indirect ;
Cass. com.. 8 déc. 2009, Agence commerciale : indemnité de rupture et rappel de commissions n° 08-
17.749, D, note E. CHEVRIER ; CA Rennes, Ch. 02 com., 10/00198, 24 mai 2011. Le
commissionnement indirect est munis des termes de l'alinéa 2 de l'article L. 134-6 du code de
commerce, « lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé,
l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée
du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe » ; étant entendu que
cette disposition ne lie pas le droit à commission de l'agent à l'existence en sa faveur d'une clause de
représentation exclusive : Cass. com., 23 janv. 2007, Bull. civ., IV, n° 5 ; BICC 15 mai 2007, p. 68, et
les obs. ; D. 2007. Chron. C. cass. 1308, obs. R. SALOMON, et AJ 439, obs. E. CHEVRIER ; RTD
com., 2007. 588, obs. B. BOULOC ; JCP E 2007, n° 50, p. 21, note M. FAURE-ABBAD ; Contrats,
conc. consom. 2007, n° 68, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; RJDA 2008, n° 260 ; RLDA mars 2007,
38, note E. BACCICHETTI.
1094
Art. L. 134-7 C. com. ; Cela concerne en premier lieu, les commandes reçues par le mandant ou
par l’agent commercial avant la cessation du contrat mais exécutées après la cessation. Et en second
lieu, les opérations qui seraient principalement dues à son activité au cours du contrat et se trouveraient
conclus dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat : D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., n° 216.
1095
Art. 794 C. com. lib et art. L.134-10 C. com ., art L. 134-16 C. com.
-300-

il sera question dans un deuxième chapitre de la protection du représentant


commercial lors de l’extinction du contrat, au regard des causes et des effets de sa fin.
-301-

DEUXIÈME CHAPITRE

L’EXTINCTION DU CONTRAT

583. Le contrat de représentation commerciale est un contrat synallagmatique


puisque des obligations incombent aussi bien au représenté qu’au représentant. Donc,
en application des règles générales relatives à la responsabilité contractuelle, toute
inexécution de l’une quelconque de ces obligations sera susceptible d’entraîner soit
une exécution forcée, soit la résiliation pure et simple du contrat, aux torts de la partie
qui aurait manqué à ses obligations. C’est ainsi que si le représentant manquait à l’une
de ses obligations, le représenté pourrait soit réclamer une exécution forcée dans
certains cas, soit le considérer comme ayant unilatéralement résilié le contrat, soit
même agir en condamnation du représentant à des dommages-intérêts. En revanche,
un distributeur a tendance à être assimilé à un représentant commercial, et bénéficie
de la clause d'exclusivité, même s'il achète et vend pour son propre compte1096. Cela
semble être le point essentiel de la différence entre les deux régimes libanais et
français, chaque fois qu’un libanais (ou un importateur oriental) réclame une
indemnité pour la résiliation d'un contrat. En pratique, cela permet la saisie des biens
et de l'implication de tout nouvel agent/importateur comme un codébiteur in solidum
avec le directeur/exportateur étranger par l'agent/opérateur dont le contrat est résilié
ou non renouvelé.

584. Un corollaire a la dimension « exorbitante » se pose par rapport à la stricte


application des lois sur l'organisme/l'importation par les autorités judiciaires et
administratives mises en place dans le pays. Depuis sa création, le décret-loi N. 34/67
a été retenu pour sa dimension exorbitante par M. le professeur TYAN : « Le décret a
reconnu au représentant en vertu d'un tel contrat un droit exorbitant: bien que ce
contrat soit arrivé à terme, le représenté est obligé -sauf faute du représentant ou
motif légitime- à renouveler le contrat (art. 4, al. 2, in fine) sous peine de dommages-
intérêts, au cas où l'activité du représentant aurait abouti à un succès manifeste
consistant dans la diffusion de la marque du mandant ou dans l'augmentation du

1096
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 86.
-302-

nombre de ses clients »1097. Illustration du caractère exorbitant de ces dispositions,


l'appareil judiciaire a tendance à être impliqué dans l'octroi d'une indemnité, qui est
souvent accordé, afin que soient pris en compte « les gains manqués » une indemnité
de deux, trois et jusqu'à cinq fois le montant des bénéfices nets d'une moyenne
annuelle des dernières années de l'agence1098.

585. L’immense impact sur le commerce de ces règlements explique pourquoi, à


côté de travaux conjoints, la représentation commerciale et la distribution offrent au
praticien commercial au Liban (et dans le Moyen-Orient en général) un des
principaux éléments de base de son activité quotidienne. Dans un pays où le
commerce et les services bancaires ont longtemps constitué le nerf de la richesse, le
décret-loi 34/67 et ses modifications de 1975, est le lieu central des litiges
commerciaux.

586. Cependant, ce n’est point toute inexécution de la part du représentant qui


ouvrirait droit au représenté de priver le représentant de l’indemnité prévue à l’article
4 du décret-loi N. 34/67. Les juges disposent d’un pouvoir d’appréciation pour
décider de considérer l’inexécution d’une obligation comme suffisante à mettre fin au
contrat, et ce à la lumière de la gravité de la faute commise par le représentant1099. En
tout état de cause, ce sont les règles particulières du mandat et la théorie générale des
contrats qui ont servi de base pour le législateur libanais s’agissant de l’article 4 du
décret-loi N. 34/67, plutôt que le droit français1100. L’article 4 en question, en effet
vise la révocation de la représentation par le représenté apportant par là des précisions

1097
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 1, 1968, n° 147.
1098
L'appareil administratif veille à ce que, une fois que l'agence a été violée ou non-renouvelée, un
agent subséquent serait tenue solidairement responsable avec le directeur de l'étranger pour le montant
de l'indemnité décrétée par le tribunal. Dans certains pays du Golfe, le ministère du Commerce ou d'un
comité spécialisé refuse l'enregistrement d'un nouvel agent pour autant que la résiliation de l'agence
précédente n'a pas été totalement réglée.
1099
Cass. com., 28 mai 2002, Bull. civ., IV, n° 91 ; D. 2003. Somm. 459, obs. Ph. DELEBECQUE.
1100
Comme nous l’avons indiqué précédemment, que le droit français a servi de base pour le droit
libanais. Le cas échéant, le décret-loi n° 34/67 a inspiré quelques, ses dispositions du décret n°58-1345
du 23 déc. 1958 relatif aux agents commerciaux qui a cité dans son article 3 : « Les contrats intervenus
entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties.
Leur résiliation par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute du mandataire, ouvre droit
au profit de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité compensatrice du préjudice
subi ».
-303-

quant aux modalités d’application de l’article 8101101 alinéa premier du Code des
obligations et des contrats, en disposant ce qui suit : « Le mandant peut, quand bon lui
semble, révoquer le mandat. Toute clause contraire est sans effet, tant entre les
parties qu’à l’égard des tiers. La stipulation d’un salaire n’empêche pas le mandant
de faire usage de ce droit ».

587. Or l’article 4 du décret-loi N. 34/67 dispose : « Le contrat de représentation


commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes.

Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre


motif légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer
une indemnité équivalente au dommage subi et au gain manqué.

Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend


fin par l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès
apparent dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du
nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation ».

588. Mais, si le décret-loi N. 34/67 part de l’hypothèse selon laquelle le contrat


de représentation commerciale est un mandat quelles qu’en soient ses formes, il
demeure que l’article 4 de celui-ci n’a porté que sur la règlementation du droit de
révocation du mandat dans son application au contrat de représentation commerciale.
S’il en est ainsi, c’est que les autres causes d’extinction du mandat seront aussi les
causes d’extinction de la représentation1102, sauf celles qui sont incomptables avec

1101
Art. 810 C.O.C. al. 2: « Cependant, lorsque le mandat a été donné dans l’intérêt du mandataire
ou celui d’un tiers, le mandant ne peut le révoquer sans l’assentiment de la partie dans l’intérêt de
laquelle le mandat a été donné ».
1102
D’après l’article 808 C.O.C., les causes d’extinction du mandat sont: l’accomplissement de
l’affaire pour laquelle le mandat a été donné, l’avènement de la condition résolutoire ou l’avènement
du terme déterminé pour le mandat, la révocation du mandataire par le mandant, la renonciation du
mandataire au mandat, le décès du mandataire ou du mandant, le changement d’état des parties ou de
l’une d’elles, l’impossibilité d’exécution résultant d’une cause indépendante de la volonté des
contractants ; Art. 2003 C. civ. : Le mandat finit : par la révocation du mandataire, par la renonciation
de celui-ci au mandat, par la mort, la tutelle des majeurs ou la déconfiture, soit du mandant, soit du
mandataire.
-304-

l’objet de la représentation, -les causes involontaires1103-. Cela ne veut nullement dire


que les dispositions du code des obligations et des contrats relatives à l’extinction du
mandat seront applicables mutatis mutandis1104 à la représentation commerciale, étant
donné que la définition de celle-ci, notamment les éléments de permanence et
d’exercice à titre de profession ainsi que l’élément psychologique requièrent des
modalités particulières d’application.

589. Raison pour laquelle nous nous contenterons d’exposer dans une première
section, les causes de résiliation suivant les dispositions du décret-loi N. 34/67, qui
trouveront application d’après le principe d’intérêt commun. Toutefois, la
réglementation de la rupture volontaire du contrat de représentation commerciale,
bien qu’expressément déclarée comme découlant du caractère d’intérêt commun de ce
mode d’entremise, en réalité dépasse les conséquences normales de la notion de
mandat d’intérêt commun1105, et notamment, en ce qui concerne le calcul de
l’indemnité. Des conséquences qui découlent de ces causes de résiliation concernant
l’indemnité des différents préjudices résultant des dispositions dudit décret-loi, feront
l’objet d’une seconde section.

1103
Parmi les causes involontaires d’extinction du mandat, nous citons le décès du représentant ou
du représenté, et le changement d’état de l’un d’eux. Ces causes s’expliquent par le caractère intuitu
personae de ce dernier. Mais leur application au contrat de représentation commerciale sera marquée
par l’effacement de l’intuitu personae qui marque les rapports des parties : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 322. Une remarque à
citer concernant le droit français, dès lors que la loi ne distingue pas entre les causes de décès de l'agent
commercial, qui constitue l'événement objectif à l'origine de la rupture du contrat, le suicide d'un agent
commercial ne peut exclure le droit à indemnisation de ses ayants droit : Cass. com., 23 nov. 2010, D.
2010. Actu. 2906, obs. E. CHEVRIER.
1104
Mutatis mutandis est une locution latine, signifiant littéralement : « Ce qui devait être changé
ayant été changé », et que l'on pourrait traduire de façon plus actuelle par : « Une fois effectués les
changements nécessaires ».
1105
V. supra nº 64, 489 et s.
-305-

SECTION 1

LES CAUSES D’EXTINCTION

590. La représentation commerciale jouit d’un caractère de continuité. En


d’autres termes, le contrat de représentation commerciale ne se forme pas par
l’exécution d’une seule opération et l’accomplissement de son objet, étant donné que
la représentation n’a jamais été accordée pour une ou plusieurs affaires déterminées.
L’effet « permanence » s’oppose à l’extinction due à l’exécution d’une opération
déterminée. D’où, il sera impossible de dire que le contrat sera résilié une fois son
objet réalisé ; en effet, celui-ci, ne prend fin que par l’achèvement de l’objet de la
représentation, issue du contrat. La représentation se termine par la fin du contrat.

591. En effet, l’article 4 du décret-loi N. 34/67 a précisé la nature du contrat de


représentation et les circonstances de sa résiliation, en considérant qu’il est réputé
conclu dans l’intérêt commun des parties1106. L’article 4 en question a précisé les
modalités d’extinction du contrat de représentation commerciale, modalités qui
découlent du caractère d’intérêt commun1107. Sur cette assise il s’agit de noter que non
toutes les causes d’extinction du mandat seront applicables au contrat de
représentation commerciale1108. Ainsi cet article n’a admis la résiliation qu’à cause de
la faute du représentant ou tout autre motif légitime, ou pour l’avènement du terme du
contrat qui, lui, prend fin.

D’où l’utilité de traiter dans cette première section chacune de ces causes
séparément, pour en étudier les conséquences qui en découlent dans une deuxième.

1106
Mme LEBRETON a préféré la notion d’ « intérêt de la relation contractuelle d’exclusivité » au
lieu de celle d’ « intérêt commun », car de toute façon, il ne peut être question d’invoquer la
reconnaissance d’une qualification juridique autonome fondée sur l’intérêt commun : S. LEBRETON,
L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, Etude particulière aux contrats de
distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, n° 66.
1107
Dans la notion d’intérêt commun, ce n’est pas que chacun ait respectivement son propre intérêt
dans le contrat, mais plutôt que les deux parties partage le même intérêt, c’est-à-dire la même finalité
qui découle de la bonne exécution de ce contrat : S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en
droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, n° 126. De cette finalité a été inspiré la
résiliation du contrat de représentation commerciale et le droit à indemnité au représentant.
1108
Seules les causes affectées par l’intérêt commun seront applicables à la représentation
commerciale.
-306-

Paragraphe 1 : La faute du représentant

592. Cette faute si elle existait, élimine toute indemnité prévue par l’article 3 du
décret-loi N. 34/67. Elle a été cité anciennement par le décret N. 58-1345 du 23
décembre 1958 relatif aux agents commerciaux dans son article 3 : « La résiliation
par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute du mandataire, ouvre droit au
profit de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité
compensatrice du préjudice subi ». Mais, aussi bien qu’en France1109 qu’au Liban, les
textes demeurent silencieux sur la nature de la faute en question où aucune
spécification n’est donnée pour savoir le poids et l’étendue de cette faute 1110. En
d’autres termes, la simple faute est-elle suffisante ou doit-elle être lourde ? La simple
négligence tient-elle lieu de faute ?

593. Il a été jugé en France que la faute doit avoir certaine gravité pour qu’elle
puisse entrainer la rupture du contrat de représentation sans versement d’indemnité au
représentant1111. Cette idée a servi de base pour le projet loi qui a été débattu au
parlement avant la mise en vigueur par le décret-loi N. 34/67. En effet, d’après ce
projet loi, le représenté ne pouvait être exonéré de l’indemnité du contrat de
représentation que si le représentant avait commis une faute lourde1112. Or le texte
actuel omet cette exigence en la remplaçant simplement par « la faute du représentant
ou tout autre motif légitime ». Cela veut dire qu’il était dans l’intention du législateur
libanais de ne priver le représentant de l’indemnité que dans les cas extrêmes où une
faute lourde est commise. Exigence sévère et contradictoire avec la liberté du

1109
Art. L. 134-13 C. com. : « La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas
suivants : La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ».
1110
CA Paris, 30 janv. 1965, note J. HEMARD, RTD com., 1965, p. 925, n° 11.
1111
CA Lyon Ch. civ., 01 B, 10/06385, 10 janv. 2012 ; CA Paris, PÔLE 05 Ch. 05, 09/20562, 08
déc. 2011 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11/06500, 23 nov. 2011 ; CA Douai 21 oct. 1966, Gaz. Pal.,
1967, 2e semestre, p.14, n° 7 ; CA Douai 23 avr. 1966, Gaz. Pal. 1967, 1e semestre, p. 12, n° 8 : seule
la faute grave de l’agent commercial peut dispenser le mandant de l’obligation à lui imposée par le
décret du 23 déc. 1958 ; T. com., Seine 28 fév. 1952, Gaz. Pal., 1952, 2, 62.
1112
La faute justifiant le refus d’indemnité devraient être, sinon lourde, du moins bien précise et
caractérisée : Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd.
Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 2.
-307-

commerce : Solution qui n’est pas en conformité avec les articles 786 et 790 du Code
des obligations et contrats libanais, qui prévoient que la responsabilité du mandataire
doit être rigoureusement appréciée lorsqu’il est salarié, de sorte que, s’agissant de la
représentation, la faute simple du représentant doit être retenue pour justifier la
révocation sans indemnité.

594. En contrepartie, la responsabilité du représentant est engagée à l’égard du


représenté chaque fois qu’il lui cause un préjudice de par sa faute, ce qui l’amène à
réparer le préjudice subi, sans pour cela, que son contrat soit nécessairement
résilié1113. En effet priver le représentant de l’indemnité de rupture supposerait une
responsabilité incombant à ce dernier, et notamment un préjudice déjà subi par le
représenté1114. Ce préjudice quelle qu’en soit la gravité, doit résulter d’un
comportement du représentant particulièrement fautif pour entrainer la résiliation sans
indemnité. Un arrêt de l’assemblée plénière justifie ces idées en considérant qu’:

« Attendu que pour engager la responsabilité délictuelle du contractant qui avait


abusé de l’utilisation de son droit dans la rupture des négociations sérieuses sans
motif légitime, ou bien qui n’était pas rigoureux dans la gestion des négociations, il
faut que ses agissements soient fautifs et fasse subir un préjudice aux tiers, étant
entendu qu’un lien de causalité entre la faute et le préjudice subi soit manifeste.

Attendu que la faute résulte d’un agissement négligeable comme le fait d’omettre
le recours contre l’autre partie après que les deux parties auront commencé la
négociation des conditions du contrat, ou du fait d’une rupture non justifiée des
négociations, ou du fait de s’abstenir de conclure le contrat sans motif légitime après
avoir guider l’autre partie au stade de la conclusion du contrat »1115.

595. C’est ainsi que la baisse du chiffre d’affaires du représenté est un préjudice
valable1116. Et si cette baisse est imputable au représentant par preuve d’une

1113
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 367.
1114
Ce préjudice doit consister dans une faute tellement grave qu’elle menacerait les intérêts du
représenté si les liens de représentation devaient être maintenus. En effet, une faute, quelque grave
qu’elle soit, commise occasionnellement, ne devraient pas entrainer la résiliation en entier du contrat
sans indemnité de rupture : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 366.
1115
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4, p. 1550.
1116
Cass. com., 11 juin 2002, n° pourvoi 99-20.360, arrêt n° 1138.
-308-

insuffisance d’activité1117, la privation de l’indemnité sera justifiée1118 car il s’agit


d’une faute grave1119.

Qu’entend-t-on, dans notre développement, par faute grave ?

596. La Cour de cassation indique dans une formule synthétique que « seule la
faute grave qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et
rend impossible le maintien du lien contractuel, est privative de l'indemnité
compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat d'agence commerciale
et qu'il appartient au mandant de rapporter la preuve d'une telle faute»1120. En
premier lieu, on entend par faute, tout acte positif, toute commission ou toute
négligence effectuée par le représentant en violation des lois et règlements.
Notamment, il s’agit pour le représentant de la violation des obligations qui lui
incombent en vertu du décret-loi N. 34/67, des obligations convenues par les parties
au contrat1121, et des autres règles légales et coutumières régissant la profession1122.
En effet, le défaut d'immatriculation ne pourra être considéré comme une faute grave
au sens de l'art. L. 134-12 C. com. privative du droit à indemnité de rupture1123. Il a
été jugé que c’est une faute grave de la part de l'agent de représenter une entreprise

1117
Cass. civ., Ch. 4, arrêt du 18/10/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 3, p. 1138 : « L’insuffisance de
l’effort nécessaire pour assurer la continuité du contrat constitue la faute, en raison d’échec à
respecter les obligations contractuelles et par la suite la responsabilité de résilier le contrat » ; CA
Montpellier, 7 janv. 1999, Lettre distrib., juin 1999 : « Tant le défaut d’activité injustifié que l’absence
d’explications données au mandant sur cette inactivité, caractérisent la faute de l’agent commercial et
justifie la rupture du contrat ».
1118
CA Paris, 30 janv. 1965, RTD com., 1965, p. 925, n° 11: D’après cet arrêt, l’insuffisance du
chiffre d’affaires ne constitue pas une faute.
1119
CA Paris, 5e Ch., Sect. A, 11 fév. 2004, RG n° 2001/14955.
1120
Cass. com., 15 oct. 2002, Sté Marcel Lenne, Contrats, conc. consom., fév. 2002, comm., p. 12.
1121
CA Paris, 22 juin 1964, RTD com., 1964, p. 813, n°7, note J. HEMARD : Dans cette espèce, la
Cour, bien qu’elle alloue quand même une indemnité au concessionnaire, relève que celui-ci a violé ses
obligations contractuelles et que, pour cette raison l’indemnité devrait être très faible. Et, dans ce cas,
la responsabilité du concédant a été retenue pour ledit faible montant parce qu’il avait résilié le contrat
en quarante-huit heures, qui, malgré les agissements du concessionnaire, est une période très brève qui
engage la responsabilité.
1122
La Cour de cassation a retenue comme faute grave, la perte de confiance issue d’un agent qui
n’a pas informé loyalement son mandant que le concurrent de ce dernier venait de prendre une
participation majoritaire dans son capitale : Cass. com., 30 nov. 2004, n° pourvoi 02-17414.
1123
Cass. com., 15 oct. 2002, Contrats, conc., consom. 2003, n° 19, obs. L. LEVENEUR ; Lettre
distrib. déc. 2002, p. 2.
-309-

concurrente de celle de l'un de ses mandants1124. Ce peut être aussi la quasi-


inexistence de sa prospection avec une insuffisance chronique d'activité1125.

597. C’est ainsi que la négligence continue1126 du représentant de prendre les


mesures liées à sa représentation constitue une faute grave susceptible de provoquer la
résiliation sans indemnité, si les autres conditions en sont réunies1127. En revanche, il
a été jugé que « le fait de l’inexécution d’un effort compatible avec les produits
internationaux représentés, ainsi que la restriction de l’activité dans une zone
déterminée en négligeant la totalité du marché libanais, ne constitue pas une faute
du représentant justifiant la résiliation du contrat sans indemnité ; surtout que le
contrat ne contient aucune clause résolutoire déterminant la quantité de vente ou
d’exportation, ni les points de ventes ou de distributions prévu pour le
représentant »1128.

598. En second lieu, la gravité consiste dans l’ampleur du résultat de l’acte


fautif, mais surtout dans l’ampleur du risque que cet acte crée pour les intérêts du
représenté. C’est ainsi que, par exemple, une faute professionnelle dénote une certaine
incompétence du représentant de nature à consister un danger permanent et continu

1124
CA Montpellier, 16 janv. 1991, ibid., n° 0613 ; CA Grenoble, 4 avr. 1991, Juris-Data, n°
041428 ; Cass. com., 21 juin 1967, Bull. civ., III, n° 259.
1125
Cass. com., 4 juill. 2000, Deliencourt c/ Sté Sièges d'Argentat, Journagence juill. 2001, p. 2.
1126
Est négligence continue, le fait de ne pas répondre aux lettres, de ne pas prendre les diligences
nécessaires auprès des clients défaillants, la visite de la clientèle de manière insuffisante : CA Paris, 23
oct. 1964, RTD com., 1965, p. 155 n° 9, note J. HEMARD ; Ainsi il a été jugé pour que la négligence
continue soit assimilée à la faute grave, que la société ait avisé le représentant d’ajuster son
comportement : CA Paris, 30 janv. 1965, RTD com., 1965, p. 925, n° 11.
1127
L’insuffisance du personnel du représentant ne justifie pas une rupture sans indemnité sur le
fondement de la faute du représentant: M. MAHMASSANI, op. cit., p. 368.
1128
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659.
-310-

pour les intérêts du représenté1129. Le cas échéant, la tolérance n’efface pas la gravité
de cette faute1130.

599. Pour l’appréciation de cette gravité, l’attitude des parties, notamment


celle du représenté, est particulièrement essentielle. En effet, celui-ci peut avoir
accepté à l’avance des risques, auquel cas il sera requis contre lui une faute très grave
emportant un risque particulièrement sérieux privant le représentant de l’indemnité de
rupture1131 ; il en est ainsi lorsqu’il s’agit de la résiliation non d’un contrat de
représentation à durée indéterminée mais d’un contrat conclu pour une durée
déterminée1132. Dans ce cas, en effet, le représenté accepte d’avance les risques de la
gestion du représentant pour la durée convenue ; on devrait alors être plus exigeant en
ce qui concerne la gravité de la faute que lorsqu’il s’agit d’un contrat à durée
indéterminée.

600. A la lumière de tout ce qui précède, nous constatons que les tribunaux
disposent de très vastes pouvoirs en la matière1133. C’est à eux d’apprécier l’ampleur
du préjudice subi, la nature du comportement qui est à l’origine de ce préjudice, de la
gravité d’un tel comportement1134 au cas où il s’agirait d’un comportement fautif1135.

1129
La faute grave sera constituée par des manquements caractérisées tels que : Vente des produits
concurrents sans accord du mandant : Cass. com., 24 mai 2011, n° 10-16.969, com. 25 sept. 2007,
Contrats, conc. Consom, 2008, n° 5 p. 19, obs. N. MATHEY ; Refus d’appliquer les méthodes de
revente du mandant : Cass. com., 29 nov. 1971, Bull. civ., IV, n° 287 ; Défaillance dans la prospection
de la clientèle : Cass. com., 6 janv. 1975, RTD com., 1976, p. 185, obs. J. HEMARD ; Insuffisance
dans la fourniture d’informations au mandat : Cass. com., 3 janv. 1991, RJDA, 1991, 2, n° 112.
1130
CA Bordeaux, Ch. soc., Sect. A, n° 09/07307, D., 29 mars 2011 ; CA Versailles, Ch. 17, n°
10/03050, D., 26 oct. 2011 ; CA Douai, n° 11/00097 D., 28 oct. 2011.
1131
La faute grave de représentant est toujours appréciée de manière restrictive par la jurisprudence,
car elle le prive de la protection légalement prévue en fin de contrat : D. FERRIER, Droit de la
distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 223.
1132
Il convient de distinguer la faute grave justifiant la privation d'indemnité de rupture du simple
manquement aux obligations contractuelles justifiant la rupture du contrat : Cass. com., 21 juin 2011,
JCP, E, 2011, n° 1607, note N. MATHEY, RJDA, 2011, n° 1020.
1133
Pour déterminer si un agent commercial a droit, lors de la rupture du contrat d'agence, à
l'indemnité compensatrice légalement prévue, il appartient au seul juge, et non à la convention des
parties, de qualifier de faute grave les faits qui lui sont soumis : Cass. com., 28 mai 2002, Bull. civ., IV,
n° 91 ; D., 2003. Somm. 459, obs. Ph. DELEBECQUE ; JCP E 2002, n° 51-52, p. 2063, note V.
PERRUCHOT-TRIBOULET ; RTD civ., 2002. 833, obs. P.-Y. GAUTIER ; RTD com., 2003, 158,
obs. B. BOULOC; Dr. et patr. oct. 2002, p. 102, obs. P. CHAUVEL ; LPA 3 juill. 2003, obs. J.
ETNER.
1134
La faute grave étant toujours appréciée strictement, en faveur de l'agent : D. FERRIER,
Concurrence-Distribution, D., 2012 p. 577.
-311-

MM. Les professeurs FABIA et SAFA, considèrent que les juges ne devraient pas
retenir comme telle la moindre erreur, le moindre manque de diligence d’un agent
ancien et qui s’était montré productif1136. En effet, nous dirons que la faute devra être
appréciée selon les circonstances particulières de l’espèce1137.

Paragraphe 2 : Le motif légitime

601. Là aussi, l’article 4 du décret-loi N. 34/67 est silencieux sur la signification


de l’expression « motif légitime ». Il l’a cité au même titre que la faute du
représentant pour l’exonération du représenté de l’indemnité de la rupture. Le
législateur en effet, laisse au juge du fond une liberté considérable quant à
l’application pratique à faire de cette notion, notamment, dans un domaine tel que
celui de la représentation commerciale. Pour détailler ce point, nous exposons deux
célèbres décisions du tribunal de commerce de Beyrouth, qui ne font pas la différence
entre le motif légitime et le comportement fautif du représentant justifiant une rupture
sans indemnité.

602. Dans ces deux décisions, le tribunal en question émet expressément cette
opinion. Nous citerons, cependant, un passage particulièrement significatif du chaque
décision afin de vérifier la conformité du motif légitime avec les dispositions de
l’article 4 du décret-loi N. 34/67 :

« Attendu que la nécessité de réorganisation des réseaux par le représenté, dans


le but de développer ses activités et de réussir à la lutte contre autres concurrents, ne
constitue pas un motif légitime pour sa résiliation du contrat avec le représentant
sans indemnité. Étant donné que le versement d’une indemnité est imputable suivant
les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 de la représentation

1135
Par contre, le maintien de la relation, après reproche de comportements fautifs de l'agent,
démontre que ceux-ci n'étaient pas aux yeux du mandant constitutifs d'une faute grave : Cass. com., 10
mai 2011, n° 10-17.952 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n°
34/67, 2e éd. Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 3.
1136
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, op. cit., sous art. 4, n° 2.
1137
Cass. civ. lib., nº 8 du 15 fév. 2001, Rev. Cassandre 2001, p. 159.
-312-

commerciale, sauf le cas d’absence d’une faute de représentant ou d’autre motif


légitime justifiant la résiliation »1138.

603. Plus tardivement, le même tribunal n’a pas pris en considération de manière
directe la réorganisation des réseaux comme motif légitime : « Attendu que la
réorganisation de ses représentations par la firme représentée ne constitue pas le
motif légitime prévue à l’alinéa 2 de l’article 4 de la loi sur la représentation
commerciale, sauf si la nécessité d’une telle réorganisation résulte d’un motif
légitime du fait du représentant. C’est-à-dire d’une baisse du chiffre d’affaires du fait
de la violation par le représentant des obligations qui lui incombent en vertu des
articles 785 et 786 C.O.C., de sorte que ladite baisse serait due à la mauvaise gestion
du représentant, à sa faute ou sa négligence, et non à des causes extérieures à sa
volonté telles que les conditions économiques ou la concurrence d’autres firmes
productrices…»1139.

604. Avant d’analyser les conséquences qui découlent de ces deux décisions, il
s’agit de savoir qu’est-ce qu’on entend par motif légitime au sens du décret-loi N.
34/67 ?

Le motif légitime d’abord, peut consister dans toute circonstance étrangère


extérieure au comportement du représentant, rendant l’exécution du contrat
inacceptable1140. En d’autres termes, c’est un évènement privant les bénéficiaires du
contrat de l’utilisation normale de la représentation. Ce comportement, ne peut
constituer en effet le motif légitime, car il ne peut entrainer la résiliation de la

1138
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
1139
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 468/144, 3 juill. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 10 à 12.
1140
M. MAHMASSANI considère le cas échéant qu’il s’agisse d’une impossibilité d’exécution de
l’ensemble des obligations réciproques relatives à la représentation ou des obligations principales. Il ne
s’agit pas là de l’impossibilité d’exécution d’une ou de plusieurs opérations, non plus de l’impossibilité
provisoire d’exécution de la représentation commerciale. Il faut qu’il s’agisse d’une impossibilité
permanente ou apparemment permanente. En effet, le représentant, s’il exécute régulièrement ses
obligations, devrait pouvoir reprendre au représentant sa maitrise de sa clientèle, ou si la reprise de la
représentation dans les mêmes conditions se révélait aptes cette longue période au détriment du
représenté. Cette impossibilité d’exécution ne doit pas d’ailleurs être imputable au représenté, c’est-à-
dire, elle ne doit pas avoir été provoqué par la faute ou la négligence du représenté, alors qu’il aurait
pu en prévoir les conséquences. Il en est ainsi lorsque le représenté a effectué un u plusieurs actes qui
ont entrainé l’impossibilité d’exécution de la représentation en entier : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 372.
-313-

représentation sans indemnité, à moins qu’il ne présente un caractère particulièrement


grave1141. En effet, pour que le motif légitime soit admis, il ne doit pas être le résultat
d’une faute de la personne demandeur, c’est dire le résultat de sa négligence ou de son
imprudence ou de sa violation des principes et des lois.

605. Cependant le contrat de représentation commerciale est d’une part un


contrat intuitu personae1142, où sur cette assise, les professeurs FABIA et SAFA,
relèvent un motif parmi d’autres dérivant de cette considération indiscutable dans
ledit contrat : le décès de l’agent1143. Sur ce point M. MAHMASSANI n’est pas
d’accord et considère qu’il s’agit là d’une question de fait, que les juges du fond
doivent étudier dans chaque cas particulier pour dire si le décès entraîne la résiliation
de plein droit de la représentation commerciale sans indemnité1144.

606. D’autre part, il est conclu dans l’intérêt commun des parties. C’est dire que
si la représentation est conclue dans l’intérêt du représentant, elle est aussi, conclue
dans l’intérêt du représenté. Le motif légitime peut de même provenir du représentant
ou du représenté. Sur cette assise, si l’intérêt du représenté est affecté par les causes

1141
Cass. com., 9 fév. 1971, JCP, G, 1972, II, 17064, note J. HEMARD ; CA Paris, 20 avr. 1972,
D., 1973, somm., p. 105.
1142
Cet élément n’a point la même ampleur qu’il a s’agissant du mandat, vu que ce dernier, en
principe, est un contrat conclu intuitu personae. Dans ce contrat, c’est la personne même du mandataire
qui est déterminante pour le mandant, de sorte que le mandat devrait s’éteindre chaque fois que le
mandataire n’est plus ou change d’état, la raison déterminante ayant disparu. C’est ainsi que le mandat
prend fin si le mandataire décède ou s’il subit un changement d’état : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 323 ; Art. 292 C.O.C. et art. 1237 C.
civ. ; TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 405/1504, 8 nov. 1970, Rec. Hatem, vol. 113, p. 21 et 22.
1143
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 4, n° 5. Soulignons à ce titre que ceci devrait être applicable dans les cas prévus à
l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi n° 34/67, identifiant le représentant commercial
comme mandaitre, puisque l’art. 808 C.O.C. prévoit l’extinction du mandat au cas de décès du
mandataire : « Le décès ou le changement d’état du mandant éteint le mandat du mandataire principale
et celui qu’il s’est substitué sauf :
-Lorsque le mandat a été conféré dans l’intérêt du mandataire ou dans l’intérêt d’un tiers.
-Lorsqu’il a pour objet un fait à accomplir après la mort »
1144
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 335 :
« Il s’agit pour les juges du fond de voir, d’abord, dans chaque cas particulier, quel avait été le motif
déterminant des parties. S’ils remarquent que l’intuitu personae a été prépondérant, ils confirment la
résiliation sans indemnité. Si d’autres éléments prépondérants existent, la transmissibilité serait
prononcée, si ces éléments n’ont pas fait défaut ». L’appréciation de l’élément d’intuitu personae en
question doit se faire au moment de la conclusion du contrat de représentation commerciale, autrement
on ferait échec aux règles de droit qui interdisent la révision des contrats pour imprévision.
-314-

légiférées par la loi, rien n’interdit de considérer le contrat résilié sans que soit imposé
une indemnité de représenté contre le représentant suivant le motif légitime annoncé à
l’article 4 du décret-loi N. 34/671145. Dans ce sens, il a été jugé que, « la modification
unilatérale de la nature du contrat ayant pour objet de remplacer le représentant par
une tierce personne ou d’introduire une autre pour participer à l’exécution du contrat
de représentation commerciale, peut aboutir à l’imperfection dans l’exécution du
contrat et constitue le motif légitime permettant au représenté la rupture dudit contrat
sans indemnité »1146.

607. A l’autre extrême, il faut se garder de confondre le motif légitime avec la


force majeure ou le cas fortuit1147. Il en est ainsi, si le motif légitime devait se limiter
aux cas de force majeure et de cas fortuit ; le législateur n’aurait pas eu besoin de le
prévoir comme cause distincte de révocation sans indemnité, étant donné que celles-ci
sont de plein droit, et sans besoin d’être mentionnées expressément, des causes
d’exonération de responsabilité1148.

608. Pour ce qui est du premier arrêt cité ci-dessus1149, nous remarquons que le
représenté n’impute aucune faute au représentant dans l’exécution de la
représentation. En revanche, il a justifié sa résiliation du contrat par un motif
personnel relié à sa propre situation, ayant pour objet la réorganisation de ses réseaux
et de ses mandataires dans la méditerranée. Le tribunal considère que les motifs
inspirés par le représenté, ne justifie absolument pas, la résiliation de la relation
contractuelle sans indemniser le représentant commercial ; si aucune faute de ce
dernier n’est prouvée ou si aucun motif légitime justifie la résiliation du contrat. Sur

1145
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 4, p. 101 : cette solution au Liban, est
plus conforme au caractère d’intérêt commun qu’elle ne l’est en France. En effet, en France, avant le
décret de 1958, ce sont les règles générales du mandat d’intérêt commun qui s’appliquent. Selon ces
règles, ce mandat peut être révoqué par le mandant pour un motif légitime. Par contre, sous le régime
du décret en question, seule la faute du représentant est reconnue comme exonératoire, le motif ne
jouant plus.
1146
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 405/1504, 8 nov. 1970, Rec. Hatem, vol. 113, p. 21 et 22.
1147
Cass. soc., 16 déc. 1948, JCP., 1948, III, 1132 : La force majeure est un événement exceptionnel
auquel on ne peut faire face. Cet événement doit présenter trois caractéristiques : Il doit être irrésistible,
extérieur et imprévisible. Ainsi, la force majeure est étroitement encadrée.
1148
CA Mont Liban, n° 5, 7 janv. 1963, RJL, 1963, p. 514.
1149
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
-315-

ce point, notons que le motif basé sur l’idée de la réorganisation des mandats, des
services ou des projets, a été refusé par la majorité de la jurisprudence française1150, et
a été source d’indemnisation en cas de contrats à durée indéterminée1151.

609. En effet, si l’intérêt du représenté nécessite la réorganisation de son projet


commercial dans le but de l’élargir et de le rénover pour le rendre compatible avec le
développement industriel, agronomique, commercial ou avec la technologie moderne,
nous voyons dans la réorganisation un motif légitime justifiant la résiliation. Ce qui
conduit à dire que le motif basé sur la réorganisation du projet commercial trouve sa
justification juridique, contrairement à ce qui est suivi par partie de la jurisprudence.

610. Dans le second arrêt1152, nous remarquons que la firme représentée a résilié
le contrat de représentation commerciale, à raison de l’existence d’un motif légitime,
qui se résume par la baisse du chiffre d’affaires dans le marché libanais1153. En plus ce
motif légitime trouve justification par sa volonté dans la réorganisation et le

1150
CA Toulouse, Ch. 04 Sect. 01, Ch. soc., 09/01933, 28 avr. 2010 ; Attendu d’autre part, que la
Cour a pu considérer comme intervenue sans cause légitime la rupture de ce mandat, la prétendue
réorganisation de l’entreprise invoquée par lui ne pouvant constituer une cause légitime de révocation
dudit mandat : Cass. com., 8 oct. 1969, Dalloz-Sirey 1970, 1e espèce, p. 143 ; Il est à bon droit décidé
qu’ayant le caractère de mandat d’intérêt commun, le contrat liant un agent commercial à une
entreprise, ne peut être unilatéralement résilié sans motif légitime, et qu’il y a lieu de faire droit à
l’action en dommages-intérêts de l’agent, alors que l’employeur n’établit l’existence d’aucun motif
pouvant justifier la rupture du contrat par sa seule volonté, et que la réorganisation de ses services, dont
il fait état à l’appui de sa décision, ne constitue pas une cause légitime de cessation du mandat que
comporte le contrat de l’agent commercial : Cass. com., 26 fév., 1958, D., 1958, p. 541 ; Il est à bon
droit décidé qu’ayant le caractère de mandat d’intérêt commun, le contrat liant un agent commercial à
une entreprise, ne peut être unilatéralement résilié sans motif légitime, et qu’il u a lieu de faire droit à
l’action en dommages-intérêts de l’agent, alors que l’employeur n’établit l’existence d’aucun motif
pouvant justifier la rupture du contrat par sa seule volonté, et que la réorganisation de ses services, dont
il fait état à l’appui de sa décision, ne constitue pas une cause légitime de cessation du mandat que
comporte le contrat de l’agent commercial : Cass. com., 21 fév. 1958, 2e espèce, D., 1958, p. 541 ; En
l’absence de motif légitime, la réorganisation des services, qui constitue un droit incontestable pour un
chef d’entreprise et peut entrainer la cessation du contrat de louage de services sous certaines
conditions, ne constitue pas une cause légitime de cassation du mandat que comporte le contrat d’agent
commercial : CA Paris, 28 et 31 janv. 1953, D., 1953, p. 617.
1151
La rupture d’un contrat à durée déterminée pour réorganisation du réseau de distribution du
mandant emporte droit à indemnité : Cass. com., 14 oct. 1997, RJDA 3/98, n° 279 ; Cass. com., 22 mai
1975, Bull., IV, n°134 : le contrat prévoyait un droit de modifier le secteur attribué mais n’autorisait
pas son amputation unilatérale et substantielle sans observation d’un préavis.
1152
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 468/144, 3 juill. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 10 à 12.
1153
En France, il a été jugé que la baisse des chiffres d’affaires suscitées n’est pas suffisante à
prouver à l’insuffisance d’activité : Cass. com., 11 juin 2002, n° pourvoi 99-20.360, arrêt n° 1138.
-316-

développement des conditions de sa représentation et leurs compatibilités avec le


développement industriel.

611. Sur cette assise, le tribunal a considéré que la réorganisation des services de
vente et de distribution pour cause de baisse du chiffre d’affaires n’est pas une cause
de révocation sans indemnité et ne constitue pas un motif légitime1154. En d’autres
termes, la révocation sans indemnité d’un représentant pour baisse du chiffre de
ventes qui ne lui est pas imputable ne constitue pas le motif légitime, si cette baisse
est due à un fait imputable au représenté. Mais en revanche, si la baisse du chiffre
d’affaires était le résultat des circonstances économiques et financières, extérieures à
la volonté du représentant, il y aurait motif légitime une fois que les limites de la perte
atteintes : Solution adoptée par la jurisprudence1155 et la doctrine1156.

612. Dans ces arrêts, le tribunal, comme nous pouvons le voir, examine le fait
qui lui est soumis, à la lumière du comportement personnel du représentant, pour dire
qu’il s’agit d’un motif légitime. Il constate, en effet, l’absence de faute du
représentant, et conclut qu’il n’y avait pas motif légitime. La source de cette attitude
est que le tribunal a voulu se fonder sur des références françaises 1157 alors que le droit
français et la loi française sont différents en la matière, étant donné que la faute du

1154
S’agissant de la réorganisation par le représenté de ses services de distribution et de vente, il
faut noter qu’il s’agit là de mesure internes étrangères aux rapports avec le représentant, étant donné
qu’elles visent non à corriger et à éviter des fautes commises par le représentant, mais à accroître le
chiffre d’affaires. Cette réorganisation peut prendre plusieurs formes : il s’agit, parfois d’une répartition
nouvelle des zones de représentation, de l’annulation de certaines autres zones pour inefficacité. Il peut
s’agir aussi d’une association de sociétés entre elles uniquement dans le but d’avoir un service de
distribution et de vente : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais,
op. cit, p. 375.
1155
Des motifs admissible pour légitimer la résiliation ou le non-renouvellement du contrat : Le
changement de gérance, ou de composition de conseil d’administration non agrée par la firme
représentée, la cessation du fonds de commerce de l’agent, ou sa mise en gérance libre, ou son apport
en société sans l’agrément de la firme représentée, ou enfin la déclaration en faillite de l’agent: Cass.
civ., arrêt n° 27, 29 mars 1973, Rev. al Adl, 1973, p. 325 ; T. com., Beyrouth, décision n° 555 du 10
oct. 1974, Rev. al Adl, 1975, p. 321.
1156
Parmi les motifs autre que la faute de l’agent admissibles pour légitimer la résiliation ou le non-
renouvellement du contrat : la dissolution d’une société ou sa transformation en un type offrant un de
moindres garanties à la firme représentée : Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce
annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 5.
1157
La réorganisation de son entreprise ne permet pas au mandant une résiliation sans indemnité : J.
HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 71, p. 614.
-317-

représentant, en France, est le seul motif légitime de la résiliation de l’agence


commerciale sans indemnité1158.

613. Cette solution du droit libanais qui retient le motif légitime étranger au
comportement du représentant et non-imputable au représenté, est parfaitement
compatible avec les principes du droit et d’équité. En effet, le fait que le motif
légitime soit retenu comme cause de résiliation du contrat de représentation
commerciale sans indemnité, est de nature à sauvegarder relativement 1159 la liberté
contractuelle des parties, notamment lorsqu’il s’agit d’un contrat à durée
indéterminée. Mais, quand même, le système libanais à cet égard, sauvegarde mieux
la liberté contractuelle que le droit français qui a juste retenu la faute de l’agent 1160,
puisqu’il prend soin de prévoir le motif légitime à côté de la faute comme fin de non-
recevoir à l’action de ce dernier en réclamation de l’indemnité de rupture.

La partie désignée par le motif légitime, sera le représentant ou le représenté ?

614. Le tribunal du commerce de Beyrouth dans ces deux arrêts a considéré que
le motif légitime doit résulter du fait du représentant commercial. Il a adopté l’avis
des MM. les professeurs FABIA et SAFA, qui dans leur commentaire du décret-loi
expliquent que le motif légitime doit être apprécié à la lumière du comportement du
représentant1161. Ce sur quoi nous ne sommes pas d’accord avec ces deux avis
doctrinaux et jurisprudentiels pour les deux raisons suivantes :

615. - Raison juridique, qui se réfère aux dispositions de l’article 4 du décret-loi


N. 34/67, où le législateur a utilisé l’expression suivante « sans faute du représentant
ou autre motif légitime ». C’est dire qu’il a adopté deux choix : le premier celui de la

1158
Seule la faute de l’agent exclut le droit à indemnité, et celui-ci reste ouvert même si par ailleurs
la résiliation du mandat peut être justifiée par une cause légitime : idem.
1159
Nous disons relativement, car normalement en vertu de la liberté contractuelle, tout contrat
conclu pour une durée indéterminée doit pouvoir être résilié à tout moment.
1160
Cette notion en France, de motif légitime, ne pourra être retenue que lorsque l’intermédiaire n’a
pas la qualité d’agent commercial, si, du moins, il est lié au commettant par un mandat d’intérêt
commun : Cass. civ., 16 fév. 1970, Bull. civ., 1970, IV, 55 ; Cass. com., 8 oct. 1969, JCP, 1970, II,
16339.
1161
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit., sous art. 4, n° 10 : « …le respect de
l’esprit du présent décret-loi, qui est de ne priver l’agent de l’indemnité méritée par son activité
antérieure que si le motif de rupture provient de lui.. ».
-318-

faute du représentant et le second celui du motif légitime en séparant entre eux.


L’interprétation de cette expression, nécessite de donner un sens au texte et
l’expliquer d’une manière convenable avec l’intention du législateur. Vient dans le
même sens l’avis de M. MAHMASSANI pour consolider notre opinion en
considérant que, « si le motif légitime devait consister dans le comportement du
représentant, le législateur ne l’aurait point prévu avec la faute de celui-ci à titre
alternatif »1162.

616. - Raison déduite du concept de la notion de l’intérêt commun, intérêt qui


peut être de la part du représenté ou du la part du représentant, étant donné que le
contrat de représentation commerciale est réputé conclu dans l’intérêt commun des
parties1163.

Paragraphe 3 : Le terme

617. L’article 808 alinéa 2, du Code des obligations et contrats dispose que le
mandat cesse de plein droit par l’avènement de la condition résolutoire ou
l’évènement du terme qui y a été ajouté. En d’autres termes, le contrat convenu pour
une durée déterminée prend nécessairement et naturellement fin à l’arrivée du terme
stipulé. Si l’on applique la deuxième condition de cet article au contrat de
représentation commerciale, on devrait dire que la cessation de la représentation aurait
lieu sans indemnité, malgré le défaut de la faute du représenté ou du motif légitime,
lorsque la durée prévue par les parties prend terme. Une telle solution n’est alors pas
possible à la lumière du texte particulier à la représentation commerciale, notamment
l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 puisqu’il prévoit qu’: « Aussi, il
appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par
l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès
apparent dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du

1162
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 371.
1163
Art. 4, al. 1 du décret-loi n° 34/67.
-319-

nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation».

618. M. FOURNIER favorise la distinction du contrat à durée déterminée arrivé


à son terme et le non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée
renouvelable1164. Dans le premier cas, il considère que l’indemnisation de l’agent est
inconcevable car sans fondement sous les réserves proposées par M. le professeur
MOUSSERON1165. Dans le second cas, le non-renouvellement d’un contrat à durée
déterminée renouvelable, sans pouvoir invoquer une faute grave, est cause
d’indemnité1166. Dans un premier temps, la Cour de cassation a sanctionné un
industriel d'avoir « abusé du droit qui était le sien de ne pas renouveler à son
expiration le contrat à durée déterminée liant les parties »1167. Dans un second
temps, la Cour de cassation s’est orientée de manière très différente, avec une
tournure inattendue en jugeant qu’ « en l’absence de circonstances particulières de
nature à justifier le non-renouvellement, celui-ci prend un caractère abusif
susceptible d’ouvrir droit à réparation au profit de l’agent commercial. Cette
réparation est qualifié d’indemnité de préjudice »1168. Il nous apparaît donc que, dans
le premier temps, les juges ont considéré que n’importe quel non-renouvellement d’un
contrat à durée déterminée serait abusif. Par la suite, les juges ont donc caractérisé
l’acquisition du caractère abusif en le liant aux circonstances particulières, c’est dire
que le non-renouvellement ne doit pas être abusif.

619. Ce terme « abusif » a échappé au législateur libanais qui ne le mentionne


pas dans le décret-loi N. 34/67, mais une simple analyse de l’alinéa 3 de l’article 4

1164
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 497.
1165
Dans cette hypothèse, le professeur MOUSSERON avait proposé une formule indiquant que
dans le cas d’une fin liée à l’exécution normale du contrat ( échéance du terme extinctif affectant un
contrat à durée déterminée) : la réparation devrait correspondre, le cas échéant à l’indemnisation des
investissements recommandés par le mandant non amortis et réparation du préjudice tenant à une faute
accompagnant pareille extinction : J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl. n° 5, p.
28, n° 10.
1166
Cass. com., 13 nov. 2003, JCP, éd. E, pan. n° 2.
1167
Cass. com., 9 oct. 1990, JCP, éd. E, 1991. II. 211, note J.-J. HANINE.
1168
Cass. com., 28 mars 1995, arrêt n° 693, D., pourvoi n° 93-16.747.
-320-

dudit décret1169 nous permet néanmoins de lui trouver un sens approchant. Cette
analyse est l’exception à la règle stipulant que les textes spéciaux sont interprétés
d’une manière stricte suivant l’adage : Exceptio est strictissimae interpretationis1170.
Le texte dispose que « l’a empêché d’en tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation ». C’est dire que le refus de
renouvellement du contrat par le représentant a pour objet ou but, d’une manière ou
d’une autre, de priver le représentant d’en tirer le gain résultant du succès réalisé. En
d’autres termes, le non-renouvellement forme un obstacle au représentant en faveur de
son droit à une indemnité en fin du contrat, ce qui le rapproche du caractère abusif.
Ainsi il a été jugé que « la rupture des négociations et la signature du contrat avec un
tiers après plusieurs promesses à la conclusion, constitue un acte abusif dans
l’utilisation de sa liberté née de la bonne foi et de l’usage commercial »1171. En effet,
si l’abus peut être caractérisé par l’absence de faute grave présidant au non-
renouvellement, il peut l’être de manière plus évidente lorsque le mandant tente
d’imposer de nouvelles conditions pour le contrat renouvelé et que l’agent s’y
refuse1172.

620. L’article L. 134-11 du Code de commerce, précise cependant qu’ « un


contrat à durée déterminée qui continue à être exécuté par les parties après son terme
est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée », à l’instar de la solution
retenue pour les contrats de travail1173 . Citons le cas du contrat conclu pour une durée
indéterminée qui n’a pas été évoqué dans le décret-loi N. 34/67. Selon l’art. L. 134-11

1169
Art. 4, al. 3 : « Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat
prend fin par l’avènement de son terme, et nonobstant toute clause contraire, le droit de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la
promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché
d’en tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation ».
1170
Adage classique juridique latin qui signifie que l’exception est d’interprétation très stricte.
1171
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4 p. 1550.
1172
Cass. com., 27 oct. 1998, Lettre distrib. 1999-1: L’indemnisation de l’agent est admissible au
cas de non-renouvellement mais parce que le non-renouvellement était abusif.
1173
F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, E. BLARY-CLEMENT, Droit commercial, 10e éd.,
Montchrestien, 2010, n° 437 ; J.-M. LELOUP, Agent commercial, Rép. trav., 1994, n° 70.
-321-

C. com., il peut être rompu à tout moment, sous la seule réserve d’un préavis, sauf
force majeure ou faute grave1174.

621. Si le non-renouvellement a eu lieu après plusieurs reconductions tacites, un


nouveau contrat sera conclu aux conditions de l’ancien avec une durée déterminée1175,
de sorte que le non-renouvellement s’identifierait alors à sa réalisation avec toutes les
conséquences qui en découlent1176. Cette idée a été critiquée en jurisprudence par un
arrêt de la Cour de cassation, écartant l’indemnisation de l’agent au motif que
« l’existence de plusieurs contrats successifs à durée déterminée ne modifie pas la
nature des relations contractuelles des parties, qui ne deviennent pas régies par un
contrat unique à durée indéterminée »1177 ; puis par la Cour d’appel en refusant de
qualifier de contrat à durée indéterminée un contrat à durée déterminée tacitement
reconductible1178.

622. En contrepartie, si aucune clause de reconduction tacite n’existe, et si le


contrat est renouvelé à la fin de chaque période sans convention particulière, ceci
s’analyse comme une prorogation du terme1179.

1174
Art. L134-11 C. com. : « Lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des
parties peut y mettre fin moyennant un préavis.
La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la
deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes.
En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.
Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de
l'une des parties ou de la survenance d'un cas de force majeure ».
1175
CA Pau, Ch. 02 Sect. 01, 09/00847, 14 juin 2010 ; A. REYGROBELLET, Partie 7 Fonds de
commerce, Location-gérance du fonds de commerce, D., 2010, Dossier 792 ; J.-M. MOUSSERRON,
Technique contractuelle, par P. MOUSSERON, J. RAYNARD, J.-B. SEUBE, 4e éd. Lefebvre, 2010,
n° 553 et s. ; Cass. com., 13 nov. 2003, D., 2003, p. 3047, obs. E. CHEVRIER ; cah. dr. entr., 2004,
p.33, obs. Ph. GRIGNON, RTD com., 2004, p. 365, obs. B. BOULOUC.
1176
Cass. civ., 1ere Ch., 15 nov. 2005, n° 02-21366 : « En l’absence de précision de durée, le
contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée et peut alors être résilié à tout
moment par chacune des parties » ; J. HEMARD, obs. RTD com., 1964, p. 136, n° 136: le contrat à
durée déterminée devient à durée indéterminée après plusieurs renouvellement si aucune limite à la
tacite reconduction n’est stipulée. Cependant, cela n’est pas reconnu par certaines décisions : Cass. 10
fév. et 5 nov. 1960, D. 1961, 249 ; Cass. soc., 14 nov. 1963, JCP, 1964, 13471.
1177
Cass. com., 23 oct. 1990, D., arrêt n° 1214.
1178
CA Versailles, Ch. 12, sect. 1, 15 juin 2000, RG n° 99/04079.
1179
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 221 ; J. MESTRE, B.
FAGES, Proroger ou renouveler, RTD civ., 2003, p. 498 ; Cass. com., 9 juill. 2002, n° 00-22.512, D.,
-322-

623. Après avoir évoqué les causes de résiliation du contrat de représentation


commerciale relevant des dispositions du décret-loi N. 34/67, il s’agit de vérifier dans
une deuxième section, la portée découlant de ces causes.

2002, 2735 ; RJDA 2003, n° 54 ; Cass. com., 14 janv. 2003, n° 00-11.781, D. 2003.2304, note H.
KENFACK.
-323-

SECTION 2

LES CONSÉQUENCES D’EXTINCTION

624. Nous avons remarqué ci-dessus, que l’extinction avait lieu normalement
sans aucune obligation particulière à la charge du représenté, notamment le versement
d’une indemnité de rupture au profit du représentant. Mais, rien n’empêche que,
d’autres conséquences soient susceptibles d’en découler, même les cas qui entrainent
une indemnité au profit du représentant. Pour cela, nous traiterons des conséquences
générales dans une première analyse (Parag. 1), puis dans une deuxième, il sera
question du cas particulier, le plus courant, de l’indemnité de rupture (Parag. 2).

Paragraphe 1 : Les conséquences générales

625. Le contrat de représentation commerciale étant un contrat à exécution


successive, il suppose, avec le caractère de permanence qui le caractérise, qu’une
série d’opérations doivent avoir lieu entre les parties, et entre celles-ci et les tiers1180.
Les rapports des parties à la clause d’exclusivité, insérée dans le contrat de
représentation commerciale, sont déterminés et marqués par les obligations qui leurs
incombent. Il est normal que l’inobservation par l’une des parties de ces obligations
entraine sa responsabilité et parfois la résiliation du contrat aux torts de la partie
auteur de la violation1181. Cette responsabilité qui en découle est pratiquement
contractuelle, fondée sur le principe de la force obligatoire des contrats1182. Elle se
traduit soit par la résiliation, sujet de cette rubrique, soit par une réparation pécuniaire,
soit par le cumul des deux.

1180
Il s’agit à cet égard, surtout des rapports des parties avec les sous-agents que le représentant
aurait désignés pour les besoins de sa profession. Les problèmes avec les autres tiers ne posent pas de
problèmes particuliers, à cet égard et relevons de la section suivante.
1181
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op. cit., sous art. 2, n° 11.
1182
Art. 1134 C. civ. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites ; Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise ; Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Art. 221 C.O.C. : « les contrats établis d’une
manière légale sont obligatoires pour les contractants, et doit se comprendre, s’expliquer et s’exécuter
selon la bonne foi, l’équité et la coutume ».
-324-

626. Il est d’autres conséquences dont nous citons les deux principales : Il s’agit
pour chaque partie de restituer à l’autre les effets qui lui appartiennent demeurées par
devers elle1183, pour qu’ensuite s’opère entre elle un règlement de comptes général1184.
Le plus souvent, le cas de restitution porte sur la marchandise invendue demeurée
auprès du représentant, au moment de la survenance de l’extinction du contrat de
représentation.

627. En effet, cette solution est parfaitement compréhensible lorsque le


représentant est un mandataire qui agit au nom et pour le compte du représenté. C’est
que le représentant reçoit les marchandises à titre de dépôt et non à titre de propriété.
Si elles ne sont pas vendues au moment de la rupture, le représenté qui en serait
demeuré propriétaire pourrait et devrait les reprendre. Cette qualification de dépôt
paraît douteuse en droit français, car le dépôt est conclu dans l’intérêt du déposant et a
pour finalité la conservation de la chose et non son utilisation1185. Cependant, le
contrat impose généralement au distributeur d’utiliser ce matériel conformément à la
destination fixée par le fournisseur1186 de sorte que la qualification de dépôt pourrait
être sollicitée1187.

1183
Il est une pratique dans le domaine de la représentation commerciale, en vertu de laquelle le
représenté souvent fournit au représentant différents documents, notamment, des fiches de clients
antérieurs à l’entrée en jeu du représentant, du matériel publicitaire, des prospectus, des échantillons,
des bureaux et des matériaux…. : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif
libanais, op. cit., p. 391 et 392.
1184
Notamment la clôture du compte courant existant entre elles. C’est ainsi que le représenté devra
verser au représentant tous les arriérés des commissions qui lui sont dues, et que le représentant, à son
tour, doit restituer au représenté toutes sommes qui reviennent à ce dernier d’opérations conclues par
l’intermédiaire du premier pour le compte du dernier : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 395.
1185
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., 2012 LexisNexis, n° 589.
1186
Cass. com., 22 mars 1982, Bull. civ., 1982, IV, n° 115: condamnation pour concurrence
déloyale dans les mêmes circonstances. Le distributeur s’exposerait aux sanctions de l’abus de
confiance au cas de détournement ou d’atteinte portée à l’objet prêté, art. 314-1 C. pénale : « L'abus de
confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un
bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou
d'en faire un usage déterminé. L'abus de confiance est puni de trois ans d'emprisonnement et de
375000 euros d'amende » ; Cass. crim, 11 mars 1964, JCP, G, 1964, IV, 22 : condamnation pour
contrefaçon du distributeur qui avait stocké des produits concurrents dans les cuves prêtées par le
fournisseur.
1187
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 589.
-325-

628. Cependant, quelle que soit la qualification retenue, le distributeur doit


restituer, à la fin du contrat, le matériel mis à disposition par le fournisseur 1188. Le cas
le plus difficile étant celui de la rupture des contrats de distribution
d’hydrocarbures1189, où la jurisprudence, relevant que le fournisseur avait intérêt à ne
pas voir son matériel réutilisé au profit d’un concurrent, imposait la restitution en
nature1190.

629. En revanche, les choses se compliquent lorsqu’il s’agit du représentant


concessionnaire des ventes agissant pour son propre compte à titre de commerçant
indépendant : Il devrait être en mesure de restituer la marchandise du représenté
demeurée invendue1191, et contraindre ce dernier à accepter cette restitution malgré
toute clause contraire, et notamment les clauses par lesquelles le représenté se réserve
simplement le droit d’accepter la restitution. Une partie de la doctrine1192 et de la
jurisprudence1193 est fixée en ce sens.

1188
J. RAYNARD, La restitution dans les contrats de distribution, La cessation des relations
d’affaires, PU Aix, 1997, p. 179 ; Cass. com., 13 mai, 1975, JCP, Cl, 1975, I, 4631.
1189
Les pétroliers ayant prêté les cuves de stockage et les installations de tirage des carburants
entendaient faire jouer une clause stipulant leur restitution en nature, pour obliger le pompiste à
supporter les frais comme les conséquences de cette restitution et les dissuader ainsi de mettre fin au
contrat ou de ne pas en accepter le renouvellement : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n°
590. Cette clause de restitution en nature a été finalement annulée, mais sur le terrain du droit de la
concurrence au motif qu’elle participait d’une entente (art. L. 420-1 C. com.), en imposant
indirectement aux distributeurs la poursuite des relations contractuelles avec le fournisseur et en
limitant ainsi la fluidité du marché des distributeurs entre les fournisseurs alors qu’elle n’était
nullement essentielle à l’équilibre du contrat liant fournisseurs et revendeurs : Cons. Conc. 29 sept.
1987, JCP, CDE, n° 6, obs. F. PEROCHON, puis Cons. Conc. Déc. n° 90-D-39, 23 oct. 1990 : BOCC
30 nov. 1990, prononçant des amendes contre les fournisseurs qui n’avaient pas supprimé cette clause.
1190
Sur le fondement des articles 544, 1134, 1875 et 1244 du code civil, Cass. com., 25 oct. 1983,
CDE, 1984, 2 ; Cass. com., 29 juin 1985, Bull. civ., 1985, IV, n° 43.
1191
Cette marchandise consiste aussi bien dans l’objet principal de la représentation que dans les
produits accessoires telles que les pièces de rechange lorsqu’il s’agit de la vente de voitures : Cass.
com., 13 fév. 1961, Bull. civ., 1961, III, 71.
1192
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 4, n° 14 : « on estime que la reprise du stock constituée chez l’agent
concessionnaire peut être imposée à la firme représentée, d’abord si elle est prévue au contrat, et dans
les conditions déterminées par celui-ci, ensuite, et même si elle n’est pas prévue, s’il apparaît que dans
la commune intention des parties, les achats de l’agent pour la constitution du stock étaient liés à
l’existence et au maintien de la concession, ces achats se trouvant ainsi, implicitement, mais
nécessairement, affectés d’une condition résolutoire réalisée par la fin du contrat, quelle qu’en soit la
cause ».
1193
T. com., Seine, 25 juin 1962, RTD com., 1963, p. 620, n° 10 ; CA Paris, 12 oct. 1966, RTD
com., 1966, p. 984, n° 6 ; Cass. com., 22 janv. 1969, JCP, 1969, II, 16066, note J. HEMARD ;
-326-

Paragraphe 2 : L’indemnité de la rupture du contrat

de représentation commerciale

630. Cette obligation résulte des dispositions de l’article 4 du décret-loi N.


34/67 : « Le contrat de représentation commerciale est considéré conclu dans
l’intérêt commun des parties contractantes.

Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre


motif légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer
une indemnité équivalente au dommage subi et au gain manqué.

Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend


fin par l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès
apparent dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du
nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation ».

631. Cet article a fait une application particulièrement intéressante de la notion


d’intérêt commun. Ce faisant, il a prévu d’une part, une indemnité au profit du
représentant équivalente au dommage subi et au gain manqué1194, causée par la
rupture de la représentation par le mandant sans faute du représentant ou autre motif
légitime ; et de l’autre, une indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si l’activité du
représentant a abouti avec succès à la promotion de la marque de son mandant ou à

Cependant, il en est autrement lorsque les stocks invendus ont été commandés après la notification de
la résiliation et pendant la durée du préavis. Dans ce cas, il n’y pas lieu à restitution étant donné que,
dans ce cas le représentant est en mesure de limiter ses commandes après de justes prévisions : T. com.,
Seine 19 déc. 1963, commenté J. HEMARD, RTD com., 1964, p. 373, n° 4 ; Dans le même sens, M.
CABRILLAC, D., 1964, chron. p. 181 ; Toutefois, des décisions ont refusé de reconnaître une telle
obligation à la charge du concédant : Cass. com., 16 fév. 1970, Bull. civ., 1970, IV, 59 ; CA Paris, 10
oct. 1963, JCP, éd. CI, n° 72907, mais ce dernier arrêt reconnaît un droit à indemnité au
concessionnaire de ce chef.
1194
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p.1659 : « Le préjudice matériel se concrétise notamment par ce qui a été supporté comme
frais pour la promotion des produits et sa diffusion, ainsi que ce qui a été subi de gain manqué ».
-327-

l’augmentation de sa clientèle, mais que l’attitude du mandant de ne point renouveler


le contrat l’aurait empêché d’en tirer profit.

632. Dans le même sens, il a été jugé qu’« en ouvrant son site Internet de
réservation directe et en empêchant ainsi les agents de remplir leur fonction en vue
du développement de la marque, et en les privant de la rémunération sur le chiffre des
ventes réalisées par Internet, alors que, de son côté, l'agent, lié par la clause
d'exclusivité figurant au contrat, était dans l'impossibilité de compenser ce manque à
gagner par la distribution de produits concurrents, la société n'a pas respecté le
principe d'exécution de bonne foi du contrat de mandat d'intérêt commun la liant à
ses agents »1195.

633. La finalité de cet article est de limiter les hypothèses où le mandant pourra
mettre fin au contrat, permettant ainsi de toute façon, de le contraindre à payer le prix
de son désengagement de la relation contractuelle. Cet article relatif à la rupture du
contrat de représentation, prévoit que l’indemnité doit être égale au préjudice subi par
le représentant et le gain manqué de ce dernier. Or, le préjudice subi par le
représentant et le gain par lui manqué peuvent être souvent la perte de la rémunération
escomptée, et dont il aurait pu profiter du fait des agissements du représenté. Cette
obligation d’indemnisation du représentant concerne le remboursement des frais
encourus par celui-ci et la réparation du préjudice éventuellement subi à l’occasion de
l’exercice de la représentation1196. En d’autres termes, et sauf disposition contraire,
seuls les frais encourus par le représentant et les préjudices subis par ce dernier pour
la conclusion d’une opération déterminée, incombent au représenté, à condition qu’ils
n’aient pas été provoqués par le représentant dans une opération risquée.

634. A ce stade, le législateur mentionne les principales conditions nécessaires


pour l’indemnité, mais demeure silencieux sur les modalités de cette indemnité ou sur

1195
T. com., Bobigny, 29 janv. 2008, D., 2008, AJ 474, obs. C. MANARA ; Gaz. Pal. 2008. 1050,
obs. J.-B. GOUACHE ; RJDA 2008, n° 872.
1196
Il s’agit des frais et préjudices normaux qui résultent ordinairement de l’exécution du contrat
par le représentant à titre de mandataire, commissionnaire, courtier ou concessionnaire exclusif des
ventes. Sachant que tous autres frais ou préjudices subis en vue de la promotion du chiffre d’affaires du
fonds appartenant au représentant, même en relations avec l’objet de la représentation demeurent à la
charge du seul représentant : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 294.
-328-

le montant de celle-ci. Les tribunaux, en effet se sont vu reconnaître un large pouvoir


d’appréciation en ce domaine1197. Il sera question de vérifier le fondement de
l’indemnité due au représentant (A), pour développer ensuite ses conditions (B), afin
de traiter de montant de cette indemnité (C).

A- Le fondement de l’indemnité

635. Le législateur a mentionné dans les deux aliénas 2 et 3 de l’article 4 du


décret-loi N.34/67 que « nonobstant tout clause contraire, le représentant peut
réclamer une indemnité ». Concept consacré en France depuis le décret n°58-1345 du
23 décembre 1958 qui a prévu dans son art. 3 al. 2 que : « La résiliation par le
mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute du mandataire, ouvre droit au profit
de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité compensatrice du
préjudice subi ». Or, avec la nouvelle loi de 1991, un nouveau texte a été introduit par
l’article L. 134-12 C. com. : « En cas de cessation de ses relations avec le mandant,
l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice
subi ».

636. Nous remarquons que le législateur français a apporté des modifications sur
le décret de 1958 en éliminant l’expression « nonobstant toute clause contraire », qui
continue à exister jusqu’à nos jours dans le décret-loi N. 34/67. Par ces modifications,
le législateur français s’est éloigné des principes du droit civil et a sensiblement remis
en cause la conception classique de l’indemnisation de l’agent1198. Par-là, cette
dernière se voit conférer un caractère d’autant plus automatique qu’elle est bien
souvent, en pratique accouplée à l’idée de préjudice. Cette indemnité marque
l’originalité du contrat de la représentation commerciale vu qu’elle est due malgré

1197
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl 2008, p. 1144 : « Attendu que la vérification
de la réalisation des conditions nécessaires pour indemniser le représentant commercial contre le non-
renouvellement du contrat de représentation lors de l’avènement de son terme, est une question du fait
dont son évaluation incombe aux juges du fond sans aucun contrôl de la Cour de cassation ».
1198
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 492 : « Etant
donné que le droit de l’indemnisation compensatrice du préjudice est le fruit d’une adaptation des
règles du droit civil, et notamment celles applicables au mandat ».
-329-

tout clause contraire du contrat1199. Elle est due à partir de la date de la résiliation en
raison du principe de l’effet déclaratif1200. Elle consiste dès lors en une véritable
menace sur le mandant, que sa responsabilité soit ou non en cause dans l’issue du
contrat1201. En effet, les modalités de cette indemnité dépendront du fondement qui lui
est attribué.

637. a- En premier lieu, s’agissant de la réparation de l’intégralité du préjudice


subi et du gain manqué citée à l’alinéa 2 de l’article 4 en question, celle-ci découle
des règles de la responsabilité, et notamment la responsabilité contractuelle1202. Nous
pouvons inspirer les notions adoptées par la jurisprudence relative au préjudice
concerné où peut être relié au : investissements non amortis, cout de licenciement,
fermeture de locaux, néanmoins tempérés par la situation de dépendance adoptée par
la victime de la rupture1203. Le fait dommageable n’étant autre que la rupture elle-
même1204 si elle réunit les conditions que nous avons cités ci-dessus. C’est le cas
applicable aux agents commerciaux en France qui ne s’agit pas d’une indemnité liée à
la perte de la clientèle1205, mais doit être liée à la perte des commissions1206 ou des

1199
Un arrêt de la Cour de cassation française (Com. 26 nov. 1959, Bull. civ., 1959, IV, 946) est
venu dire que le représenté pouvait désigner un représentant d’abord pour une période d’essai, et qu’à
l’issue de cette période, si un contrat définitif est conclu, aucun droit à indemnité n’est dû.
1200
Art. 559 C.P.C. : Les effets d’un jugement revient à la date de la réclamation devant les
tribunaux ; Art. 247 C.O.C. : La résiliation donne fin au contrat à partir de la date de sa réalisation.
D’où le jugement de résiliation est notamment déclaratif suivant le principe de l’art. 559 C.P.C. Juge
d’exécution Al Maten, décision n° 145/2006 du 29/3/2006 ; Dans le même sens : Cass. com., 17 mars
1982, Bull. civ. IV n° 97 ; Cass, civ., 1ère Ch., 20 Déc. 1982, Juris-Data n° 002786.
1201
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 493.
1202
E. TYAN, op. cit., p. 473, n° 1312 ; M. MAHMASSANI, op. cit., p. 394- 400 ; Ch. FABIA et P.
SAFA, Code de commerce annoté, t. 2, 3e éd. Sader 1988, Décret-loi n° 34/67, art. 4 n° 19.
1203
Cass. com., 23 avr. 2003, JCP, éd. E, jurisp, 1792, Lettre distrib., mai 2003 ; CA Douai, 2e Ch.,
15 mars 2001, JCP, éd. E, jurisp, 1861.
1204
Ph. PETEL, Colloque du 20 avr. 1992 sur La force de vente de l’entreprise et le droit de travail,
Institut d’Etude européennes et Internationales sur le travail, faculté de Montpellier, Litec, 1992 : « le
préjudice ainsi définie suppose que le contrat fasse l’objet d’une rupture et non d’une expiration
prévue à l’avance ».
1205
Cass. com., 25 juin 2002, n° pourvoi 99- 20959, Contrats - Concurrence - Consommation, nov.
2002, p. 12 : « l’indemnité de fin de contrat n’est pas une indemnité de clientèle, établie en fonction de
la clientèle créée ou apportée mais une indemnité réparant le préjudice causé par la cessation des
relations contractuelles » ; CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001 : « contrairement à
l’indemnité de clientèle du VRP, l’indemnité de rupture de l’agent commerciale n’implique pas que
celui-ci ait crée ou apportée la clientèle » ; Cass. com., 17 juill. 2001, arrêt n° 1485, n° pourvoi 99-
11.852 ; CA Bordeaux, 12 fév. 1969, Gaz. Pal, 1969, 2, 288 : cet arrêt prévoit expressément que
-330-

avantages1207 si le contrat avait été poursuivi1208. En d’autres termes, le droit à


l’indemnité de l’agent commercial n’a pas en effet, le même fondement que
l’indemnité de clientèle du VRP, puisque ce dernier doit lui avoir « apporté, crée ou
développé » une clientèle afin de pouvoir bénéficier d’une indemnité1209, quand
l’agent commercial doit recevoir une indemnité pour réparer le préjudice qu’il
subit1210.

Cette solution a été le sujet de plusieurs analyses :

638. Suivant l’interprétation du M. le professeur MOUSSERON, il s’agit de


prendre en compte dans le droit à indemnité de l’agent commercial, « non la clientèle
mais le bénéfice de cette dernière »1211. A son tour, M. De THEUX indique que la
solution évoquée réside dans « l’octroi d’une indemnité semblable à tous les agents
commerciaux ayant développé une clientèle »1212. La Cour de cassation a affirmé
aussi que « le préjudice subi par l’agent commercial est consécutif à la perte du droit
qu’il avait de prospecter une clientèle déterminée et d’en tirer bénéfice en percevant

l’indemnité de rupture du contrat d’agence commerciale est la compensation d’un préjudice subi et non
le prix d’une clientèle.
1206
CA Bourges, 1e Ch., 8 déc. 1998, n° 1146 : « Le préjudice est principalement constitué de la
perte des commissions auxquelles l’agent pouvait raisonnablement prétendre dans la poursuite de son
mandant ».
1207
J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl. n° 5 : « Le préjudice que subit
l’agent à l’occasion de la cessation du contrat, correspond à la privation d’avantages ».
1208
Cass. com., 19 mars 2002, pourvoi n° 99-21.439, arrêt n° 648.
1209
J.-M. MOUSSERON, J.-J. BURST, N. CHOLLET, Ch. LAVABRE, J.-M. LELOUP et A.
SEUBE, Droit de la distribution, Librairies techniques, 1975, p. 358, n° 455 : « Il faut donc qu’il y ait
une perte d’une clientèle existante précédemment constituée aux risques de représentant » ; N.
CATALA, J. AARON, Le personnel et les intermédiaires de l’entreprise, Librairies techniques, 1971,
p. 213, n° 326.
1210
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 504.
1211
J.-M. MOUSSERON, J.-J. BURST, N. CHOLLET, Ch. LAVABRE, J.-M. LELOUP et A.
SEUBE, Droit de la distribution, Librairies techniques, 1975, p. 512, n° 396 et 397 : « L’agent perd le
bénéficie de la clientèle attachée à la représentation d’une entreprise ».
1212
A. De THEUX, Le statut européen de l’agent commercial, Approche citrique de droit comparé,
Facultés universitaires Saint Louis, Bruxelles, 1992, p. 182, n° 130.
-331-

des commissions »1213. Ensuite, il a été jugé que l’indemnité résulte de la perte des
ressources tirées de la clientèle1214.

639. Cette idée de lier l’indemnité à l’apport de clientèle ou son développement


est irrecevable en application de l'article L. 134-16, comme étant contraire à l'article
L. 134-12 selon lequel l'indemnité de cessation de contrat a vocation à réparer le
préjudice subi par l'agent commercial du fait de la rupture. Ce dont il résulte que pour
la détermination de l'indemnité, il doit être tenu compte de « l'ensemble des
commissions perçues par l'agent durant l'exécution du contrat »1215, sans qu'il y ait
lieu de distinguer si elles proviennent de clients préexistant ou au contraire apportés
par l'agent. En contrepartie, cette idée a été admise en matière internationale par la
chambre de commerce internationale, qui a répondu à la fois à l’objectif de protection
de l’agence commerciale et à l’impératif de lier l’indemnité à un préjudice réel : «
l’agent sera en droit de réclamer une indemnité de clientèle si et dans la mesure où :
(…) il a apporté au commettant de nouveaux clients ou il a augmenté de manière
significative le volume des affaires avec les clients existants et le commettant à
obtenir des bénéfices substantiels des affaires traitées avec ses clients »1216. Cette
alternative de rédaction concernant l’indemnisation de l’agent prévue par la chambre
de commerce internationale, nous rapproche du deuxième type d’indemnité issue de
l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67, vu que l’indemnité est reliée
indirectement à la promotion de la marque du mandant ou à l’augmentation du
nombre de ses clients1217.

1213
Cass. com., 20 mars 1972, JCP, éd. G, 1973, II, 17297.
1214
Cass. com., 28 mai 2001, arrêt n° 1046 : « Loin de se borner à fixer le préjudice conformément
à un usage, l’arrêt a justifié son évaluation par une appréciation concrète et détaillée en retenant que
le préjudice résulte de la perte des ressources tirées de la clientèle, établie par le revenu imposable ».
1215
CA Montpellier, Ch. 02, 24 nov. 2009, D., n° 08/04383.
1216
Contrat modèle ICC d’agence commerciale, 2002, 2e éd., art. 21.1 A.
1217
Art. 4, al. 3, du décret-loi n° 34/67 : « Aussi, il appartient au représentant commercial, même
au cas où le contrat prend fin par l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de
réclamer une indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent
dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a
empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation ».
-332-

640. b- En second lieu, s’agissant de l’indemnité évaluée par les tribunaux ou


les juges du fond1218 citée à l’alinéa 3 de l’article 4 en question, celle-ci trouve son
fondement dans la notion d’enrichissement sans cause1219. D’après cet article, en effet,
le représentant est en droit de réclamer une indemnité au cas de non-renouvellement
du contrat à durée déterminée, lorsque le représentant a réussi avec succès la
promotion de la marque de son mandant et l’augmentation de sa clientèle, mais qu’il
avait été privé d’en tirer profit par le non-renouvellement. Il apparaît que c’est la
notion de clientèle qui prend le rôle primordiale, et non plus l’idée de réparation d’un
préjudice quelconque. C’est plutôt la notion d’équité, celle de réparation d’un
appauvrissement du représentant corrélatif à un enrichissement qui en ressort1220.

641. L’indemnité en question est réputée une indemnité de clientèle et ne sera


due que si le représentant réussit à prouver un appauvrissement subi du fait de la perte
d’une clientèle constituée durant son agissement au nom et pour le compte du
représentant1221. S’il n’a pas augmenté la clientèle ou n’a pas réussi dans la promotion
de la marque représentée, ne bénéficie d’une indemnité1222. C’est la notion élargie
adoptée s’agissant des VRP en France1223 où ils prospectent et augmentent la clientèle

1218
Dans la plupart de temps, il s’agit de désigné un expert pour l’évaluation du préjudice subi
prenant naissance au moment même de la rupture du contrat.
1219
L’agent commercial qui ne prouve pas de préjudice, son indemnité est un enrichissement sans
cause au détriment du mandant : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 508 ; M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit.. p. 398 ;
L’enrichissement sans cause qui est sanctionnée par l'action "de in rem verso", appartient à la catégorie
des quasi-contrats. L'action est admise lorsque le patrimoine d'une personne s'est enrichie au détriment
d'une autre et que l’appauvrissement corrélatif qui en est résulté ne trouve sa justification, ni dans une
convention ou une libéralité, ni dans une disposition légale ou réglementaire : Ch. FILIOS,
L'enrichissement sans cause en droit privé français interne et vues comparatives, th. Lille II, 1999.
1220
Cass. civ. 1ere Ch., 25 fév. 2003, Bull. 2003, I, n° 55, p. 42, RTD civ., avr.-juin 2003, n° 2, p.
297-298, note J. MESTRE et F. BERTRAND : Parmi les conditions de l’enrichissement sans cause, il
y a celle où une autre personne ait subi un appauvrissement, une perte financière réelle ou un manque à
gagner ou une perte réalisée.
1221
T. com. Paris, 15 oct. 2001, Lettre distrib., déc. 2001.
1222
CA Lyon, 28 fév. 2002, Juris-Data , n° 174712.
1223
L’indemnité de clientèle des VRP correspond parfaitement à la condition de professionnels de
ces derniers. Ils bénéficient en effet, de toutes les prestations sociales de la législation du travail, y
compris l’indemnité du chômage, au cas où il aurait lieu. Par contre, s’agissant de la représentation à
base de rapports d’indépendance entre le représenté et le représentant, la conception d’indemnité de
clientèle s’avère déplacée et inefficace, étant donné que le représentant établit son commerce à ses frais
et périls, il supporte souvent seul les couts de la publicités et autres…Or, étant un commerçant libre, il
ne pourrait profiter de toutes les prestations dont profitent les VRP, de sorte que le préjudice ainsi subi
-333-

pour le compte du représenté qui en devient le seul ayant droit et propriétaire afin de
pouvoir bénéficier d’une indemnité1224. Tandis que le représentant « agent », bien
qu’il agisse au nom et pour le compte du représenté, prospecte la clientèle et
l’augmente à son propre profit et à celui de son propre fonds de commerce. En effet,
la rupture du contrat de représentation n’est pas de nature à transférer en aucun cas la
propriété de la clientèle du représentant au représenté1225.

642. De ce qui précède, nous pouvons déduire que le législateur libanais a fait
état des sources françaises pour le fondement de l’indemnité du représentant
commercial libanais. Cet usage conjugué est le fondement de l’indemnité liée au
dommage subi pour l’agent commercial et le fondement de l’indemnité liée à la perte
de la clientèle pour les VRP. C’est dire que le représentant commercial libanais
profite des deux types d’indemnités citées ci-dessus ; le cas échéant, l’idée de cumuler
l’indemnité compensatrice du préjudice subi et une indemnité de clientèle a été
écartée en France1226.

B- Les conditions de l’indemnité

643. Le décret-loi N. 34/67 a visé dans son quatrième article les conditions
d’indemnité relatif au représentant commercial nonobstant toute clause contraire. Il

s’avère plus important que la clientèle perdue : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en


droit positif libanais, op. cit., p. 402.
1224
Art. L. 751-9 C. trav.: « En cas de résiliation d'un contrat à durée indéterminée par le fait de
l'employeur et lorsque cette résiliation n'est pas provoquée par une faute grave de l'employé, …, celui-
ci a droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et
en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui » ; J.-M. MOUSSERON, J.-J. BURST,
N. CHOLLET, Ch. LAVABRE , J.-M. LELOUP et A. SEUBE, Droit de la distribution, Librairies
techniques, 1975, p.358, n° 455 : « Il faut donc qu’il y ait une perte d’une clientèle existante
précédemment constituée aux risques de représentant » ; N. CATALA, J. AARON, Le personnel et les
intermédiaires de l’entreprise, Librairies techniques, 1971, p. 213, n° 326.
1225
Cass. com., 1 déc. 1992, arrêt n° 1802 : « Accordant une indemnité à l’agent commercial au
motif qu’il est prouvé qu’il a apporté sa propre cliente à la société ».
1226
Cass. com., 25 juin 2002, n° pourvoi 99- 20959, Contrats. – Conc. – Consom., nov. 2002, p.
12 : « En condamnant la société SDR à payer à la société MUSO une indemnité de perte de clientèle,
alors que l’article L. 134-12 C. com. a transposé la directive en optant pour la réparation du préjudice
cause par la cessation des relations contractuelles, et non la réparation de la perte de clientèle, la
Cour d’appel a violé les textes susvisés ».
-334-

s’agit en premier lieu de l’absence de faute du représentant ou tout autre motif


légitime. En second lieu, le non-renouvellement du contrat conclu pour une période
déterminée lors de la survenance de son terme, doit empêcher le représentant de tirer
bénéfice du succès, fruit de la promotion de la marque ou de l’augmentation de la
clientèle.

644. Vu que le concept de la première catégorie a été évoqué précédemment1227,


nous développons les conditions de la deuxième catégorie. A première lecture, nous
constatons que le législateur a règlementé les cas de non-renouvellement du contrat
conclu pour une période déterminée, tout en imposant deux sous-conditions pour que
le représentant puisse profiter d’une quelconque indemnité :

645. D’une part, le représentant doit avoir « abouti à un succès apparent dans la
promotion de la marque de son mandant, ou à l’augmentation du nombre de ses
clients ». Mais, ce sont des termes non-rigoureux, car il est difficile de trouver une
juste mesure pour la promotion d’une marque, ou pour la reconnaissance du nombre
exact d’une clientèle. Par conséquent, il s’agit là, d’une question de fait laissée à
l’appréciation des juges du fond, qui devraient examiner toutes les circonstances
portées à leur connaissance par les parties concernant le sujet. Ils prendront
notamment en considération, le chiffre d’affaires de la firme représenté pour le même
marché avant et après l’entrée en jeu du représentant, le volume et l’ampleur de la
publicité qu’il a effectuée ainsi que le taux d’augmentation du chiffre d’affaires relevé
de manière périodique1228.

646. D’autre part, une seconde sous-condition doit aussi être réalisée pour ouvrir
le droit au représentant de réclamer une indemnité de non-renouvellement. Il s’agit
pour le représenté d’avoir refusé de renouveler le contrat, alors que le représentant n’a
pas eu le temps de profiter de l’augmentation de clientèle, et de la promotion de la

1227
V. supra n° 592 et s.
1228
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 18/10/2007, Rev. al Adl 2008, t. 3, p. 1138.
-335-

marque obtenue par ses soins1229. Cela donc, suppose une augmentation réelle, c’est
dire la preuve certaine que le représentant aurait été en mesure d’en profiter1230.

647. Les deux conditions précitées doivent être réunies, une seule ne suffit pas.
La preuve de la réalisation des conditions nécessaires pour l’indemnité n’est pas aisée,
il s’agira d’une tâche assez délicate qui demandera du juge du fond beaucoup de
réalisme1231. Dans ce sens, la jurisprudence libanaise a pu s’interroger sur les
dispositions de l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 suite à un arrêt de la
Cour d’appel de Beyrouth, qui a soulevé la question de non-renouvellement du contrat
de représentation commerciale malgré l’augmentation du chiffre d’affaire effectué par
le représentant :

648. « Attendu que la représentée n’a pas renouvelé le contrat de représentation


commerciale lors de la survenance de son terme, et s’est mise d’accord avec une
autre société pour la représenter,

Attendu que le représentant commercial déclare que la résiliation du contrat de


représentation commerciale par la société représentée (Office Centrale de Librairie),
était sans motif légitime, et que les achats n’étaient pas faibles comme l’a indiquée
cette dernière,

Attendu qu’en application du texte de l’article 4, il est demandé de vérifier si


l’activité du représentant a abouti à un succès manifeste dans la promotion des
brochures de la société représentée (Office Centrale de Librairie), et par la suite l’a
empêché d’en tirer profit suite à ce succès : ce qui lui ouvre droit à une indemnité à
déterminer,

1229
Cass. com., 20 mai 1969, Bull. 1969, 4, 182, et D., 1969, 649 : « La résiliation a eu pour effet
de le priver, au moment où ils commençaient à devenir rémunérateurs des résultats qu’il était en droit
d’atteindre de ses efforts et frais de prospection ».
1230
Il en est ainsi, chaque fois qu’une firme représentée a profité de campagnes publicitaires très
coûteuses menées par le représentant avec succès, avant qu’il n’ait pu récupérer ses frais et effectuer les
bénéfices escomptés de ladite campagne, pour lui retirer la représentation et l’accorder à un autre
représentant à qui elle imposerait sa marque bien lancée et promue.
1231
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl 2008, p. 1144 : « Attendu que la vérification
de la réalisation des conditions nécessaires pour indemniser le représentant commercial contre le non-
renouvellement du contrat de représentation lors de l’avènement de son terme, est une question du fait
dont son évaluation incombe aux juges du fond sans aucun control de la Cour de cassation…».
-336-

Attendu que la nette différence entre les ventes des années successives manifeste
que l’activité du représentant a abouti à une augmentation du chiffre d’affaires ainsi
qu’à la promotion des brochures,

Attendu que la Cour, en prenant en considération les circonstances du procès et


ses conséquences, évalue et détermine le taux d’indemnité prévu issue du non-
renouvellement et sans motif légitime »1232.

649. Suivant cet arrêt, nous constatons que la Cour d’appel, une fois vérifiée
d’une part l’existence d’un succès dans l’activité du représentant concrétisé par la
différence résultant des ventes successives, et de l’autre que la représentée l’a
empêché d’en tirer profit, a attribué une indemnité en faveur du représentant muni du
non-renouvellement du contrat après son déchéance, malgré le succès de la vente par
le représentant commercial. Cependant, notre attention est attirée par ce fait non
évoqué par la Cour : le représentant considère le non-renouvellement du contrat de
représentation commerciale lors de la survenance de son terme, comme résiliation de
celui-ci.

650. Ce fait est abordé en France avec le décret de 1958. Il a été jugé que la
survenance du terme d'un contrat à durée déterminée n'est pas une résiliation et
n'ouvrait pas droit à indemnité au profit de l'agent1233. Cette jurisprudence a été
critiquée au nom de la fraude à la loi et au nom de l'intérêt commun pour opérer une
transition vers la loi du 25 juin 19911234, par un arrêt de la Cour de cassation qui
retient que « selon l’article L. 134-12 du Code de commerce, la cessation du contrat
d’agent commercial, même à durée déterminée, donne à l’agent droit à réparation du
préjudice résultant de la perte pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation de la
clientèle commune »1235.

1232
CA Beyrouth, Ch. civ., 2e ass., arrêt n° 218, 13 avr. 1983, Rec. Hatem, vol. 183, p. 424 à 428.
1233
Cass. com., 24 avr. 1974, D., 1975, 765, note V. DELAPORTE ; 7 mars 1977, JCP, 1979, II,
19072, note J.-J. HANINE.
1234
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, 71.
1235
Cass. com., 23 avr. 2003, Lettre distrib., mai 2003, note Ph. GRIGNON ; Agence commerciale :
droit à indemnité et cessation avant terme du contrat à durée déterminée, D., 2003, p. 1362, note E.
CHEVRIER.
-337-

651. Par conséquent, faut-il voir dans ces dispositions une atteinte au caractère
impératif de l’alinéa 2 du même article1236 ? C’est-à-dire la conclusion du contrat à
durée déterminée peut-elle constituer un biais pour détourner la règle impérative selon
laquelle la résiliation ne peut avoir lieu, en principe, sans indemnité1237 ? Il ne le
semble pas, car si, au bout de la première période contractuelle, les conditions de
l’octroi de l’indemnité de non-renouvellement ne sont pas réunies, nous pouvons
penser à la possibilité d’existence du motif légitime de rupture, en application de
l’alinéa 2 du même texte. En ce sens l'indemnisation de l'agent commercial est
provoquée par la cessation du contrat, elle est donc due aussi bien pour un contrat à
durée déterminée venu à échéance que pour un contrat à durée indéterminée1238 :
« cela mettra un terme à la jurisprudence qui déniait à l’agent tout droit à indemnité
en cas de non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée »1239.

652. En d’autres termes, nous remarquons que le législateur a mis à la


disposition du représentant une indemnité variante suivant différentes situations et
circonstances. Encore une fois, il nous montre son modèle de protection en faveur du
représentant commercial en imposant une indemnité conditionnée suivant différentes
évaluations. Tout d’abord elle est conditionnée à l’inexistence d’une faute grave ou
motif légitime de la part du représentant où elle sera égale au dommage subi ou au
gain manqué. Ensuite, elle est conditionnée au non-renouvellent du représenté qui a
empêché le représentant d’en tirer le bénéfice issu du succès de la promotion de la
marque ou de l’augmentation de la clientèle du son représenté : conditions vérifiées
par la Cour d’appel de Beyrouth1240, suivie par la Cour de cassation jugeant
indispensable la réunion de trois conditions pour l’obtention de
l’indemnité : « Attendu que la Cour d’appel a interprété et appliqué d’une manière

1236
Art. 4, al. 2 du décret-loi n° 34/67 : « Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute
du représentant ou autre motif légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de
réclamer une indemnité équivalente au dommage subi et au gain manqué ».
1237
Dans le cas de l’agence commerciale, la loi de 1991 est cependant passée outre la notion de
préjudice pour assurer à l’agent une indemnisation automatique de l’agent en fin du contrat : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., n° 571.
1238
Art. L. 134-12, al. 1er C. com. ; Cass. com.., 28 mai 2002, Arkopharma e.a. c/ Gravier,
Journagence 14 oct. 2002, p. 2.
1239
J.-J. HANINE, Les rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, LPA, n° 122, 11
oct. 1992, p. 18, n° 22.
1240
CA Beyrouth, 11/6/2007, Rev. al Adl, 2007, p. 1108.
-338-

correcte l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67, lorsqu’elle a considéré


l’obligation de la réunion de trois conditions cumulatives pour que le représentant
commercial ait droit à l’indemnité issue du non-renouvellement du contrat de
représentation lors de l’avènement de son terme. Ces conditions sont l’inexistence
d’un motif légitime pour le non-renouvellement, l’aboutissement de l’activité du
représentant commercial a un manifeste succès dans la promotion de la marque de
son mandant ou à l’augmentation de sa clientèle, et que le refus de renouvellement a
empêché le représentant d’en tirer le profit de ce succès »1241.

653. En effet, même si toutes les conditions sont réunies, l’indemnité sera refusé
au représentant si le représenté ne renouvelle point le contrat pour une faute suffisante
commise par le représentant, ou pour un motif légitime qui répond à la définition que
nous avons établie précédemment. Solution divergente de celle en droit français où ,
« contrairement à la solution aujourd’hui retenue par le juge, le non-renouvellement
d’un contrat d’agence commerciale à durée déterminée ne devrait donc pas emporter
droit à réparation au profit de l’agent, sauf pour le préjudice tenant à une faute
commise par le mandant à l’occasion du non-renouvellement »1242. Toutefois, quelles
que soient les circonstances, l’indemnité de rupture est la conséquence suprême de
tout acte de résiliation ou de non-renouvellement, aux cas où les conditions de la
cessation du contrat sans indemnité ne sont pas réunies. Mais en droit français, l'agent
commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai
d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits1243 ;
alors qu’une telle exigence ne se retrouve pas en droit libanais.

C- Le montant de l’indemnité

654. Nous avons vu que le représentant commercial bénéficie de deux types


d’indemnités évoquées aux alinéas 2 et 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67. La
première étant celle qui tend à la réparation du préjudice subi et du gain manqué

1241
Cass. civ., 4e Ch., arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl, 2008, p. 1144.
1242
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 229.
1243
Al. 2, art. L. 134-12 C. com.
-339-

(al.2), gain que le représentant pouvait valablement escompter de manière assez


certaine : c’est un élément entre autres du préjudice moral, notamment lorsque la
rupture du contrat aurait porté atteinte à la réputation commerciale du représentant1244.
La seconde est lorsque l’indemnité de ce préjudice s’étend à la perte de la clientèle
(al.3) qui n’est qu’un élément entre autres du préjudice matériel. En d’autres termes,
l’indemnité doit couvrir l’intégralité du préjudice matériel et du préjudice moral du
représentant causés par la rupture1245, point de départ du raisonnement des tribunaux
pour son évaluation. Elle doit avoir pour objet la réparation du préjudice que lui cause
la privation pour l’avenir du courant d’affaires sur lequel il percevrait une
commission1246. M. FOURNIER, considère que « le principe est l’indexation du
montant de l’indemnité sur un certain nombre de commissions alors que ce montant
devrait d’abord être équivalent à la valeur du préjudice subi »1247. Un arrêt de la Cour
de cassation nous attire pour clarifier notre développement en jugeant que : « La
cessation du contrat d’agent commercial, même à durée déterminée, donne droit à
réparation du préjudice résulte de la perte pour l’avenir des revenus tirés de
l’exploitation de clientèle commune ; tandis que le caractère anticipé de cette
occasion donne droit à réparation du préjudice résultant de la perte de commissions
jusqu’à la date conventionnellement prévue »1248.

655. S’agissant du non-renouvellement du contrat à durée déterminée, seule la


clientèle constituée par le représentant sera prise en considération1249. La clientèle

1244
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « Le préjudice moral se caractérise par la surprise du représentant de la
résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans le marché commercial et à sa réputation économique ».
1245
Ibid : « Attendu que les indemnités résultant de la résiliation englobent en plus du préjudice
moral caractérisé par la surprise du représentant de la résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans
le marché commercial et à sa réputation économique, un préjudice matériel sera retenu, concrétisé
notamment par ce qui a été supporté comme frais pour la promotion des produits et sa diffusion, ainsi
que ce qui a été subi de gain manqué ».
1246
Cass. com., 25 juin 2002, RJDA, 12/02/ n° 1260 ; CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov.
2001 : « contrairement à l’indemnité de clientèle du VRP, l’indemnité de rupture de l’agent
commerciale n’implique pas que celui-ci ait crée ou apportée la clientèle ».
1247
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 510.
1248
Cass. com., 23 avr. 2003, pourvoi n° 01-15639, arrêt n° 643 ; Dans le même sens, D. FERRIER,
L’indemnisation de l’agent commercial au terme du contrat, D., 2003, somm. p. 2883 ; Cass. com., 23
avr. 2003, D. 2003, p. 1362, note E. CHEVRIER.
1249
T. com., Mont Liban, décision n° 86/105, 30/12/1986.
-340-

préexistante ne rentre pas en ligne de compte. Le chiffre d’affaires escompté par


rapport à cette clientèle servira de base qui sera augmentée proportionnellement à la
durée du contrat1250. C’est dire que si l’agent augmente1251, voire maintient la
clientèle, ceci sera pris en compte dans l’évaluation de l’indemnité et inversement
également, s’il la réduit. Dans le même sens, un arrêt de la Cour d’appel de Versailles
a suivi ce raisonnement en jugeant ce qui suit : « en l’absence de faute de l’agent dont
le chiffre d’affaires a baissé de 16,8 à 26,9% par rapport à l’objectif, alors que le
contrat prévoit une faculté de résilier pour le mandant en cas de chiffre d’affaires
inférieure de 10% à l’objectif de vente contractuel, la Cour précise que l’indemnité
vise à réparer le préjudice résultant pour l’agent de la perte de clientèle qui lui
appartenait et qui restera, après la résiliation du contrat attachée à son mandant ;
l’indemnité issue de la perte de la clientèle doit être évaluée en fonction de l’origine
de cette dernière, de son importance et de son ancienneté »1252.

656. S’agissant de la rupture du contrat conclu pour une durée déterminée, il


semble que la règle générale doive être appliquée avec les nuances qui s’imposent.
Cette règle générale veut que le représenté exécute toutes ses obligations
contractuelles sans exception, en payant au représentant les commissions intégrales
des opérations escomptées jusqu’à la fin de la durée du contrat1253. Dans cette
hypothèse M. le professeur MOUSSERON avait proposé une formule indiquant que
dans le cas d’ « une fin liée à l’exécution normale du contrat (échéance du terme
extinctif affectant un contrat à durée déterminée) : La réparation devrait
correspondre, le cas échéant à l’indemnisation des investissements recommandés par
le mandant non amortis et réparation du préjudice tenant à une faute accompagnant
pareille extinction »1254.

1250
CA Beyrouth, Ch. civ., 2e ass., arrêt n° 218, 13 avr. 1983, Rec. Hatem, vol. 183, p. 424 à 428.
1251
Cass. com., 6 fév. 1996, RJDA 4/96, n° 492 : « C’est à tort que l’arrêt limite le montant de
l’indemnité allouée à la société LIMATRAP au montant des commissions que cette dernière aurait
perçues entre la date de la résiliation du contrat et la date d’expiration de celui-ci, son préjudice
comprenait également les conséquences de sa perte d’activité et qu’elle devait en outre être indemnisée
pour avoir augmenté la cliente de son mandant ».
1252
CA Versailles, 15 sept. 2000, BRDA 21/100, n° 10.
1253
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 408.
1254
J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl., n° 5, p. 28, n° 10.
-341-

657. La Cour d’appel de Lyon adopte une autre position: « l’indemnité de


résiliation est destinée à compenser le préjudice subi par l’agent du fait de la
cessation de son mandat doit s’apprécier en considération notamment de la perte des
commissions auxquelles il aurait pu prétendre et de la réduction du bénéfice qu’il
aurait tiré de l’investissement réalisé pour l’exercice de son mandat »1255.

658. En revanche, concernant la rupture du contrat à durée indéterminée, ni le


législateur français ni le législateur libanais n’ont prévu un mode de calcul de
l’indemnité, mais plusieurs modes relativement significatifs ont été suivis en France.
En effet, l’usage relié à la règle d’indemnisation a improvisé une formule selon
laquelle le représentant aura droit à une réparation égale à deux années de l’ensemble
de commissions1256 calculées sur la base moyenne1257 des profits effectués durant les
trois dernières années1258. Cet usage, bien que non-obligatoire1259, s’est transformé en
une pratique1260 et, a été consacré par plusieurs décisions judiciaires1261 pour devenir
le principe d’indemnisation1262.

1255
CA Lyon, 8 sept. 1995, JCP, éd. G, IV, 836 ; Dans le même sens, T. com., Paris, 5 juill. 2000,
Juris-Data, n° 122734.
1256
Cass. com., 5 avr. 2005, D., 2005, obs. E. CHEVRIER, incluant les sommes perçues au titre
d’une activité logistique ; Cass. com., 12 fév.1985, arrêt n° 189 : la Cour indique que la valeur de deux
années de commissions est suffisante en ce domaine.
1257
Le chiffre d’affaires antérieur est très important comme indicative, où il a été alloué une
indemnité très modérée en se fondant sur le fait que le mandataire lui-même reconnaissait que ses
efforts pour accroître le volume des affaires traitées restaient vains et qu’il n’avait aucun espoir de voir
augmenter le chiffre de ses commissions : CA Douai, 27 sept. 1963, Gaz. Pal., 1964, 1, 128, obs. J.
HEMARD, RTD com., 1964, p. 375, n° 7.
1258
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit. p. 101 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale,
op. cit. p. 288 ; J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 1205 et s. ; J. THIEFFRY, La
distribution des produits à l’étranger, RTD com., 1985, 730.
1259
CA Lyon, 3e Ch. civ., 7 nov. 2002, Juris-Data n° 194736 : « Cet usage ne s’impose pas aux
juridictions, la mesure de l’indemnité étant celle du préjudice subi » ; CA Paris 5e Ch., 20 janv.
1995 : « Aucune disposition législative ou règlementaire n’impose le versement de deux années de
commissions à titre d’indemnité de rupture d’un contrat d’agent commercial » ; CA Bordeaux, 4 déc.
1969, Gaz Pal., 1970, 1, 27 ; CA Paris, 13 fév.1964, Gaz. Pal. 1964, 1, 333 : Cet arrêt non seulement ne
reconnaît aucune force obligatoire à la coutume en question, mais aussi s’élève contre une telle
application pour dire qu’il faudrait uniquement se référer au préjudice subi ; Cependant pour M.
HEMARD, cet usage serait intéressant à défaut d’éléments d’évaluation du préjudice : J. HEMARD,
RTD com., 1964, p. 608, n° 13.
1260
CA Paris, 20 janv. 1995, D., 1997, somm., p. 52, obs. D. FERRIER.
1261
CA Lyon, 28 fév. 2002, Juris-Data n° 174712 ; CA Paris 28 juin 2002, Juris-Data n° 188811 ;
CA Nîmes, 6 déc. 2001, Juris-Data n° 176652 ; CA Paris 5 juill. 1975, LPA 24 déc. 1975 : alloue trois
-342-

659. En outre, la chambre de commerce internationale a répondu à la fois à


l’objectif de protection de l’agence commerciale et à l’impératif de lier l’indemnité à
un préjudice réel en indiquant le plafond de l’indemnité de l’agent : « Le montant de
l’indemnité ne dépassera pas une année de commission. Ce plafond se calcule sur la
rémunération annuelle moyenne de l’agent au cours des cinq années précédentes, et
lorsque le contrat a duré moins de cinq ans, sur la moyenne de la rémunération
annuelle obtenue pendant la durée effective du contrat »1263. Dans le même sens un
arrêt de la Cour de cassation libanaise nous attire où a été jugé ce qui suit : « Attendu
que la détermination du montant du bénéfice sur les trois dernières années est basé
sur des factures originales issues de la société Mercury, et qui montre le niveau de
communication au bout des dernières années.

Attendu qu’il faut considérer que le montant d’indemnité équivaut à 60% de la


somme de la commission dans les trois dernières années »1264.

660. En effet, les parties sont libres de convenir du montant de l’indemnité1265


sous la seule réserve que celle-ci corresponde à l’intégralité du préjudice subi1266.
C’est dire que dans le but de protéger le représentant, l’indemnité prévu par le contrat
existe uniquement si elle déroge en sa faveur à celle résultant de la loi. En revanche,
son montant peut être réduit du fait du comportement de l’agent ayant prospecté des
entreprises concurrentes, qui n’envoie pas de rapports réguliers sur son activité ou
apporte des clients peu rentables1267. Il peut être analysé au regard des investissements
réalisés par l’agent1268 où leurs absences réduira le montant de l’indemnité1269. Mais à

années de commissions ; CA Bordeaux 12 fév. 1969, Gaz. Pal., 1969, 2, 288 ; Cass. com., 26 fév. 1958,
Gaz. Pal., 1958, 1, 348, D., 1958, 541.
1262
Cass. req. 29 oct. 1930, DH 1930.554 : cité J.-M. LELOUP, Agent commercial, D, 2012, n° 86
1263
Contrat modèle ICC d’agence commerciale, 2002, 2e éd., art. 21.2.
1264
Cass. civ., 4e Ch., arrêt du 8/11/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 1, p. 227.
1265
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 231. A fortiori les modalités d’un paiement
anticipé et le cas échéant fractionne de la somme qui serait due à la rupture du contrat : Contra Paris, 15
oct. 2009, n° 07/09671, Sté Valéo.
1266
Cass. com., 14 oct. 1974, Bull. civ., IV, n° 244.
1267
CA Montpellier, 11 juill. 2001, Lettre distrib., oct. 2001 : « Le montant de l’indemnité est réduit
au motif que la prospection de clientèle en faveur d’entreprises concurrentes était de nature à minorer
le préjudice à la rupture subi par l’agent ».
1268
CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001 : « L’indemnité de rupture de l’agent
commercial doit donc être calculée sur la base de la totalité de sa rémunération, l’évaluation se faisant
-343-

notre avis, le droit des parties de prévoir d’avance le mode de calcul de l’indemnité,
devrait s’exercer sous le contrôle du juge qui garde plein pouvoir pour augmenter la
somme ou la réduire.

661. Finalement, l’article 4 du décret-loi N. 34/67 a signalé dans un quatrième


alinéa que : « n’est prise en considération pour le calcul de l’indemnité prévue à
l’alinéa précèdent, que la perte subie par le représentant en ce qui concerne le
marché libanais ». Par conséquent nous voyons que le législateur a indiqué lors de
l’élaboration du décret-loi N. 34/67 le champ applicable au calcul de l’indemnité, qui
a été supprimée par la modification apportée par le décret N. 9639 du 6/2/1975.

662. Sur cette assise, M. le professeur TYAN considère que cette disposition
s’applique à l’ensemble de l’article 4, c’est dire aussi bien pour les contrats à durée
indéterminée que pour les contrats conclus pour une durée déterminée, considérant
qu’il n’y a lieu de distinguer entre les deux modalités1270. A l’opposé MM. les
professeurs FABIA et SAFA considèrent que cet alinéa ne vise que l’alinéa précèdent,
à savoir celui qui traite du non-renouvellement1271. Solution suivie par M.
MAHMASSANI qui a considéré que, « par application de ce quatrième alinéa, les
tribunaux libanais doivent pouvoir tenir compte des préjudices subis sur tous les
marchés libanais et étrangers pour le calcul de l’indemnité ; et ce chaque fois qu’ils
sont en présence de la rupture d’un contrat à durée déterminée ou indéterminée, alors
qu’ils ne doivent tenir compte que du marché libanais lorsqu’il s’agit du non-
renouvellement d’un contrat à durée déterminée »1272.

en fonction notamment de la durée des relations contractuelles, de l’importance des investissements


effectués par l’agent et de la part de l’activité perdue dans son chiffre d’affaires globale ».
1269
CA Lyon, 3e Ch. civ., 7 nov. 2002, Juris-Data n° 194736 : 15,5 mois d’indemnité pour 8,5
années de contrat, en l’absence d’investissement de l’agent.
1270
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 467, n° 1306.
1271
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op. cit., art. 4, n° 19 : à l’exclusion du
contrat à durée déterminée devenu à durée indéterminée par voie de reconductions tacites successives.
1272
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 406.
-344-

663. A notre avis, le texte est tacite par la désignation de l’alinéa 3 et non
l’ensemble de l’article 4. Il restreint la compétence des tribunaux libanais1273, en cas
de rupture du contrat aux pertes subies sur le marché libanais. C’est comme si le
législateur, dans ce cas particulier, avait adopté le critère de nationalité pour la
détermination du tribunal compétent1274. En d’autres termes, le législateur libanais a
entendu interdire au représentant muni d’un contrat à durée déterminée de réclamer
auprès des tribunaux libanais, une indemnité de rupture qui tiendrait compte des
marchés non-libanais. Mais avec l’annulation de l’alinéa 4 en question, nous pensons
que cette modification a été voulue pour ouvrir la porte à la plus forte indemnisation
du préjudice subi sur tous les marchés où la représentation s’exerce et non seulement
sur le territoire libanais.

664. Vu que cet alinéa, est lié au précèdent pour lequel le fondement de
l’indemnité découle de l’idée de clientèle et de promotion de la marque1275, nous
constatons que le législateur libanais a attaché cette indemnité à la clientèle libanaise.
Après sa suppression, cette indemnité demeure accessible pour toutes les clientèles
hors le territoire libanais, de façon à mieux couvrir le représentant commercial en
augmentant sa chance de hausser le montant de l’indemnité. C’est dire qu’il y a là une
mesure de protection élargie pour le représentant commercial doté par une large
indemnité pour perte subie, que le contrat soit conclu au Liban ou à l’étranger. En
effet, nous pouvons en déduire que le législateur a autorisé le représentant à réclamer
auprès des tribunaux libanais, l’indemnité tenant compte de tous les marchés inclus
dans la représentation, et non seulement du marché libanais.

1273
Attendu qu’en principe, le représentant commercial est libanais, et exerce ses activités au Liban
suivant les dispositions de l’article premier du décret-loi n° 34/67 , et attendu que suivant l’article 5
dudit décret-loi : « Nonobstant toute clause contraire, les tribunaux du lieu où le représentant
commercial exerce son activité sont compétents pour trancher les litiges naissant du contrat de
représentation commerciale», nous pouvons déduire que le législateur a voulu désigner la compétence
des tribunaux libanais.
1274
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. de Lib.,
1972, p. 239.
1275
V. supra n° 630 et s.
-345-

Conclusion du premier titre

665. Les effets entre les parties sont régis d’une manière globale par les
dispositions du droit commun, en ce que chacun des parties aura des obligations
envers l’autre. Des dispositions spéciales prévues par le décret-loi montrent leur
impact surtout à l’égard du représentant commercial bénéficiaire de la clause
d’exclusivité. Ce dernier jouit d’une certaine protection réalisée par une indemnité qui
lui est incombe nonobstant toute clause contraire : Si d’une part le contrat a été résilié
par le représenté sans faute du représentant ou autre motif légitime ; si d’autre part
son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la marque de son
mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le
bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation.

666. Après avoir traité dans un premier titre des relations des parties entre elles
quant à la structure de leurs obligations et les conséquences qui en découlent, voyons
maintenant dans un second, les effets du contrat de la représentation commerciale par
rapport aux tiers en fonction de l’exclusivité issue du décret-loi N. 34/67.
TITRE SECOND

LES EFFETS À L’ÉGARD DES TIERS


-347-

667. La représentation commerciale ayant pour objet l’entremise


commerciale1276, trois parties au moins entreront en jeu. Il s’agit, d’abord, du
représenté, ensuite, du représentant, et, enfin, du tiers auprès duquel le représentant
remplace le représenté. Cette tierce personne en question n’est point partie au contrat
de représentation, et, pour cela ses droits et ses obligations seront ceux qui résultent
des principes de l’effet relatif et de la force obligatoire des contrats, à moins d’une
clause d’exclusivité qui forme une dérogation sur le principe général -la relativité des
contrats-. Ce dernier étant le fruit de l’article 225 du Code des obligations et des
contrats et de l'article 1165 du Code civil français1277, où les contrats ne peuvent ni
nuire, ni profiter aux tiers c'est dire qu'ils sont impuissants à rendre une tierce
personne créancière ou débitrice. En d’autres termes, ce principe (ainsi que tous les
autres principes d'ailleurs) supporte de nombreuses exceptions dans la mesure où
certains contrats peuvent parfois comporter des effets à l'égard de tierces personnes -
l’opposabilité-.

668. Il est couramment admis qu’un principe d’opposabilité, précisant et


tempérant le principe de l’effet relatif des contrats, constitue le fondement des effets
du contrat à l’égard des tiers. Le principe d’opposabilité se justifierait en effet, par
l’idée que le contrat constitue un fait dont l’existence s’imposerait à tous, par la nature
des droits subjectifs qu’il fait naître ou encore par le principe de la force
obligatoire1278. C'est à la doctrine française qu'il revient d'avoir systématisé la
distinction entre l'effet obligatoire, intéressant seulement les parties que nous avons
traité dans le titre premier, et l'opposabilité, qui conduit à faire reconnaître l'existence
du contrat par les tiers sans pour autant constituer une entorse à la relativité des

1276
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1277
Art. 1165 C. civ. : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C: « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne. C’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
1278
R. WINTGEN, Etude critique de la notion d'opposabilité, Les effets du contrat à l'égard des
tiers en droit français et en droit allemand, préf. J. GHESTIN, LGDJ, 2004, n° 178.
-348-

conventions puisqu'il ne s'agit pas, en principe, d'obliger les tiers mais simplement de
leur en imposer le respect1279.

669. Tel qu’il est consacré par l’article 1165 du Code civil, le principe de la
force obligatoire a été formulé par POTHIER, qui le justifiait par l’idée que la volonté
ne peut produire d’effets qu’à l’égard de ceux qui l’ont exprimée1280. En droit romain,
de nombreuses solutions sont justifiées par l’idée, à la fois plus générale et plus
restreinte, que ce qui a été fait entre les uns ne doit pas détériorer la situation juridique
des autres1281. Toutes ces solutions sont consacrées sans la moindre référence à un
principe général selon lequel le contrat ne produirait d’effets qu’entre les parties.
Quant à l’adage « res inter alios acta aliis nec nocet nec prodest »1282, il a
vraisemblablement été formulé au XIXe siècle par les commentateurs du Code civil.

670. En France, où il est historiquement lié à la théorie de l’autonomie de la


volonté, le principe de l’effet relatif du contrat a été fragilisé par la contestation de
celle-ci. Sans doute est-ce ce qui explique en partie que l'on trouve fort peu d'arrêts
ayant posé expressément le principe d'opposabilité aux tiers. La première Chambre
civile1283 a toutefois eu déjà l'occasion d'affirmer que, « s'il est de principe que les
conventions ne peuvent faire naître d'obligations qu'entre les parties contractantes,
elles n'en sont pas moins opposables aux tiers ». L'opposabilité du contrat aux tiers
traduit ainsi l'impossibilité dans laquelle ils se trouvent d'ignorer une situation
juridique à la création de laquelle ils n'ont certes pas contribué, mais qui est une
composante d'un ordonnancement juridique que, nécessaire reflet des rapports socio-

1279
D. FERRIER, Concurrence-Distribution : pan. 2005, D., 2006 ; J. GHESTIN, C. JAMIN et M.
BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 678, spéc. n° 724 ; F. BERTRAND,
L'opposabilité du contrat aux tiers, th., Paris II, 1979.
1280
R.-J. POTHIER, Cours de droit civil français, 1871, p. 40, 410 : cité par R. WINTGEN, Etude
critique de la notion d'opposabilité, op. cit.
1281
Le droit romain admet en revanche que l’on puisse améliorer la condition juridique d’un tiers,
tout en interdisant, néanmoins, la stipulation pour autrui.
1282
Locution latine signifiant qu'un contrat ne peut pas affecter négativement les droits d'un tiers.
1283
Cass. civ., 14 févr. 1984, Bull. civ., I, n° 601. L'arrêt commenté s'inscrit dans cette doctrine,
qu'il vient prolonger puisqu'il approuve les juges du fond d'avoir fait « application du principe
d'opposabilité des conventions aux tiers ».
-349-

économiques sur ce terrain du droit, ils sont tenus de respecter1284. En cela,


l'opposabilité constitue le prolongement nécessaire de la force obligatoire du contrat
sans pour autant obliger les tiers, c'est dire sans les rendre créanciers ou débiteurs
envers l'une ou l'autre des parties1285. A ce titre, voyons dans un premier chapitre les
conditions de l’opposabilité dans le contrat de la représentation commerciale, afin de
vérifier dans un second les conséquences qui en découlent.

1284
M. BILLIAU, J. MOURY, Opposabilité du contrat aux tiers et responsabilité de ceux-ci envers
les parties : une application au contrat d’édition, D., 2001.
1285
Comp. P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, n°
53, p. 806-807.
-350-

PREMIER CHAPITRE

LES CONDITIONS D’OPPOSABILITÉ

671. L'opposabilité est un phénomène général qui tend à faire reconnaître


l'existence du contrat par les tiers, car si ces derniers étaient autorisés à le
méconnaître, il ne pourrait pratiquement pas atteindre l'efficacité, même entre les
parties1286. C’est le principe d’opposabilité en droit commun où les conventions
d'exclusivité, en dépit de leur effet relatif, étaient « opposables » aux tiers qui en
avaient eu connaissance ; dès lors, le fait de méconnaître consciemment une clause
d'exclusivité était générateur de faute et constitutif de concurrence déloyale1287- sujet
de notre première section-.

672. En revanche, l’alinéa 3 de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 précise la


publication de la clause d’exclusivité par le représentant, par voie d’inscription au
registre du commerce pour qu’elle soit opposable aux tiers : « La clause de
représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été dument
publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du commerce, elle n’est
pas applicable pour les produits alimentaires à l’exception des produits de
consommation spéciale qui seront déterminés par décret pris en Conseil des
Ministres ». Selon la manière dont le législateur a conçu le problème, notons que
l’effet de l’exclusivité à l’égard des tiers, assuré par voie d’inscription au registre du
commerce, n’est valable que dans le cas de la clause de l’exclusivité insérée dans le
contrat de représentation commerciale. Ce modèle d’opposabilité du droit libanais
constitue une dérogation au principe d’opposabilité de droit commun -sujet de notre
deuxième section-.

1286
J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU , op. cit., n° 724 ; F. TERRE, Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 490.
1287
P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors
réseau, (A propos des affaires Leclerc-parfumerie), D., 1990 p. 43 : Pour des clauses d'exclusivité
territoriale de vente : Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199 ; Pour une clause
d'approvisionnement exclusif : Cass. com., 11 oct. 1971, Bull. civ., IV, n° 237 ; D. 1972.120.
-351-

SECTION 1

LE PRINCIPE TENANT À L’EXIGENCE

DE LA SIMPLE CONNAISSANCE

673. L'existence d'un devoir d'inviolabilité du contrat -au titre de son


opposabilité- auquel est tenu le distributeur parallèle en sa qualité de tiers au réseau,
lui interdit principalement de participer à la violation des obligations contractuelles
des membres du réseau, et a pu être déniée au nom de la nécessaire protection des
tiers au contrat1288. Il a ainsi été avancé qu'il importe de concilier l'intérêt des tiers et
celui des parties. Or, tel est bien le cas si l'on prend garde à ne pas confondre le
principe d'opposabilité et son efficience : lorsqu'il est avancé que tous les éléments de
l'ordre juridique sont opposables aux tiers, il ne s'agit là que d'une opposabilité de
principe, nécessairement distincte de sa mise en oeuvre1289. La connaissance de
l'élément opposable -la publicité de la clause1290- constitue une condition
déterminante de la mise en œuvre de l'opposabilité et garantit le respect des droits des
tiers1291.

1288
R. WINTGEN, Etude critique de la notion d'opposabilité, Les effets du contrat à l'égard des
tiers en droit français et en droit allemand, préf. J. GHESTIN, LGDJ, 2004, n° 164 : Considérant que
l'opposabilité n'est pas un principe juridique en ce qu'il n'a qu'une vertu descriptive, l'auteur conteste
l'existence d'un devoir général des tiers de ne pas porter atteinte au contrat. Parmi ses arguments, il
retient que « les intérêts des tiers, leur liberté et leur sécurité juridique, s'opposent à ce que les parties
puissent leur imposer le respect de tout ce qu'elles peuvent valablement stipuler entre elles. La
conciliation des intérêts en présence requiert une appréciation circonstanciée et une protection
adaptée des tiers ».
1289
J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf. D. MARTIN, LGDJ, 1984, n° 7.
1290
T. com., Caen 14 janv. 1959, cité par C. CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD
com., 1963, n° 63, note 3, où d’après cet arrêt, la publicité suffisante, parfois, peut servir à prouver la
connaissance ; La publicité contient toujours une part d’information, ne serait-ce que pour faire
connaître l’existence du produit ou du service : Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S.
ROBINNE, V. VALETTE-ERCOLE, Droit de la consommation, Tout le Droit, Ellipses, 2008, p. 109.
1291
L'essentiel de la critique de R. WINTGEN (v. Supra note 1288) tombe s'il est distingué, comme
l'a établi notamment M. Duclos entre le principe de l'opposabilité et son efficience : « il importe peu
[...] que le débiteur ait lui-même transgressé ou scrupuleusement respecté son propre engagement.
Affirmer le contraire serait minimisé dans cette matière le rôle de l'opposabilité du droit personnel,
pour ne voir dans la responsabilité du tiers qu'une conséquence de sa prétendue « complicité » avec le
débiteur. Si la personne tierce est fautive, c'est qu'elle doit s'abstenir de toute entrave aux créances
d'autrui du fait de leur opposabilité » : J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf.
D. MARTIN, LGDJ, 1984, n° 172, p. 199- Solution retenue par L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La
fraude paulienne, préf. G. WICKER, LGDJ, 2008, vol. 500, n° 195 s., spéc., n° 204.
-352-

674. Cette exigence de simple connaissance par le tiers de l’existence de la


clause d’exclusivité suffit pour engager sa responsabilité s’il vient à en violer les
dispositions : Solution retenue par la jurisprudence française1292, lorsque la clause est
valable, c’est dire non contradictoire avec le refus de vente1293, ainsi que dans le droit
libanais à l’entrée en vigueur du décret-loi N. 34/671294. Il s’agit, alors d’une
opposabilité relative étant donné que la responsabilité des tiers pour avoir ignoré ces
obligations ne serait engagée que s’ils ont eu connaissance de l’existence du contrat, à
moins qu’il ne s’agisse de droits réels opposables à tous de manière absolue : solution
retenue par Mme. BALLET en considérant qu’« à partir du moment où le tiers a
connaissance du contrat de distribution, celui-ci est normalement opposable »1295.

675. Il n’en est pas moins utile de s’inspirer de solutions admises de longue date
en d’autres domaines, que ce soit celui de la propriété industrielle ou en particulier
celui des clauses de non-concurrence. S’agissant de la propriété industrielle, deux
règlements sur la marque communautaire indiquent ce qui suit concernant
l’opposabilité aux tiers : « Toutefois, avant son inscription, un tel acte est opposable

1292
V. en ce sens : CA Paris, 22 juin 1960, Gaz. Pal., 1960, II. 200 et JCP, 1960, II, 857, note A.
CHAVANNE ; La Cour de Paris a retenu la responsabilité d’un tiers ayant violé l’exclusivité d’un
concessionnaire exclusif ayant fait l’objet d’une large publicité : CA Paris, 9 avr. 1962, note R.
PLAISANT, n° 10, note 10.
1293
La jurisprudence admet en effet que, sous certaines conditions, les contrats de concession
exclusive (Cass. crim., 11 juill. 1962, BRANDT, D., 1962, 497, Rapp. COSTA ; S. 1962.219, note J.
ROBERT ; 22 oct. 1964, BRUNEL, D., 1964, 753, note J. - L. C. ; JCP 1965.II.14160, note J.
HEMARD ; 21 mars 1972, Seneclauze, Bull. crim., n° 292 ; D., 1973, 677, note T. IVAINER ; JCP
1972.II.17222, note P. L.), puis l'existence de réseaux de distribution sélective (Cass. crim., 3 nov.
1982, LAVIN, Bull. crim., n° 238 ; D. 1983.IR.211, obs. C. GAVALDA et L. de LEYSSAC ; Gaz.
Pal., 1982, 2, 658, note J.-P. MARCHI), puissent justifier le refus de vente en rendant les marchandises
indisponibles. Sur les effets de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers à la lumière de la nouvelle
législation sur le refus de vente : J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité de la vente, RTD com.,
1963, p. 529 et s. ; J. ROBERT, De l’opposabilité des contrats d’exclusivité, D., 1963, p. 189 : cité par
P. JOURDAIN, op. cit., p. 43.
1294
S’agissant des droits français et libanais antérieur à 1967, la solution s’identifie par les règles de
la liberté du commerce et de l’industrie. En effet, d’après ce principe, la concurrence est licite. Elle est,
plus encore, une caractéristique du système libéral qui consacre la liberté du commerce et de
l’industrie. Et ce n’est qu’au moment où elle devient illicite, c’est-à-dire, lorsqu’elle tend à nuire aux
intérêts du représentant exclusif, qu’elle devient alors sanctionnée et prohibée : M. MAHMASSANI,
op. cit.
1295
A. BALLET, L’exclusivité et le réseau de distribution, th, 2005, Montpellier, n° 561 : « …. Le
tiers ne doit alors ni accomplir un acte susceptible de porter atteinte aux prévisions des parties, ni
pouvoir bénéficier indirectement des efforts comme des investissements déployés par le promoteur du
réseau et par ses membres. Cela s’oppose pourtant au principe selon lequel chacun a le droit de
développer une activité concurrente ».
-353-

aux tiers qui ont acquis des droits sur la marque, le dessin ou modèle communautaire
enregistré après la date de cet acte, mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de
l'acquisition de ces droits »1296 .

676. S’agissant des clauses de non-concurrence, la jurisprudence n’hésite pas à


mettre à la charge de l’employeur, souvent de façon forte rigoureuse1297, une
obligation de se renseigner sur l’existence éventuelle d’une obligation de non-
concurrence1298. La Cour de cassation invite d’ailleurs les juges à rechercher
l’existence d’usages ou de pratiques propres au secteur considéré pour asseoir une
quasi-présomption de connaissance de l’obligation souscrite par le salarié1299.

677. En revanche, dans une affaire jugée en 20061300, il a été posé par la Cour de
cassation que le bailleur d’un local commercial qui a promis une exclusivité à l’un de
ses locataires doit faire respecter la clause par ses autres locataires, à qui il avait
pourtant concédé un droit concurrent. Or, dans cette affaire, ces derniers n’avaient pas
eu connaissance de l’exclusivité concédée préalablement, leur activité concurrente
n’était donc pour eux pas fautive1301. En posant que le bailleur devait faire respecter
l’exclusivité promise, la Cour de cassation sacrifiait donc les intérêts des tiers de
bonne foi au nom de la force obligatoire de l’exclusivité. En outre, concrètement,
nous ne voyons guère comment le bailleur peut imposer aux tiers de cesser de faire
concurrence au titulaire de l’exclusivité. La Cour de renvoi n’a d’ailleurs pas fait

1296
Propriété industrielle, Deuxième partie : Règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 fév.
2009, sur la marque communautaire (JOUE L 78 du 24 mars 2009), art. 23 et Règlement (CE) n°
6/2002 du 12 déc. 2001, sur la marque communautaire, art. 33 : D., misent à jour le 8/5/2012.
1297
CA Aix, 2e Ch., 20 déc. 2002, Bull. d’Aix 2002-2, p. 291, obs. D. BOSCO : « Sanction de
l’employeur malgré la production d’une attestation écrite du salarié en ce sens qu’aucune obligation
de non-concurrence n’était à sa charge ».
1298
Cass. com., 18 déc. 2001, D., 2003, Somm., p. 1029, obs. Y. PICOD ; CA Versailles 29 juin
2001, Somm., p. 234, obs. Y. PICOD ; CA Paris, 10 janv., 2001, D., 2001, Somm. p. 1311, obs. Y.
SERRA.
1299
Cass. com., 18 déc. 2001, préc.
1300
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006, JCP, 2006, II, n° 10119, note O. DESHAYES ; JCP, 2006, DT
éd. E, p. 1780, n° 2504, obs. J. RAYNARD ; RTD civ., 2006, p. 554, obs. J. MESTRE, et B. FAGES ;
Administrer 2006, n° 390, p. 45 obs. J.-D. BARBIER ; RDC, 2006, p. 1154, obs. J.-B. SEUBE, RDC,
2007, p. 267, obs. D. MAZEAU et p. 295, obs. G. VINEY.
1301
CA de la Cour de renvoi après cassation, Paris, 16e Ch. B., 27 sept. 2007, Juris-Data, n° 2007-
343444.
-354-

mystère de son hostilité à cette idée que le bailleur doit faire respecter l’exclusivité
aux tiers de bonne foi1302.

678. L’examen des faits de l’espèce litigieuse pourrait, le cas échéant, inciter le
juge à y déceler une connaissance par le tiers de l’exclusivité d’autrui1303. Le tiers, en
ce domaine, doit respecter la clause d’exclusivité, et s’y conformer s’il vient à en
connaître l’existence et ce, dans les limites de l’opposabilité simple résultant du
principe de l’effet relatif du contrat1304. Le distributeur automobile qui sollicite la
conclusion d’un contrat de concession auprès d’une marque renommée ne peut-il être
présumé connaître l’exclusivité territoriale du concessionnaire situé dans le même
département que lui1305 ? Le médecin qui réalise un acte relevant de la spécialité de
l’un de ses confrères exerçant dans la même clinique peut-il raisonnablement ignorer
l’exclusivité dont celui-ci bénéficiaire ? Dans ces situations, et dans bien d’autres
encore1306, le tiers doit ou devrait connaître l’existence des droits d’autrui. M.
LELOUP justifie ce devoir de s’informer, en considérant qu’en tant qu'entrepreneur
indépendant, le distributeur n'est pas un consommateur : « le franchisé est un
entrepreneur, il ne peut se comporter comme un animal encagé à qui on apporte de la

1302
D’après l’arrêt, l’exécution d’une condamnation sanctionnant la violation d’un premier contrat
ne peut avoir aucune influence sur les obligations d’un tiers à ce contrat dans l’exécution d’un
deuxième contrat sans mettre des obligations nouvelles à la charge de ce tiers et contrevenir à l’effet
relatif des conventions. La Cour observe à juste titre que le bailleur « ne dispose dès lors d’aucun
moyen de contraindre la société (tiers) de cesser son activité si celle-ci refuse ; que dans ce cas, la
clause d’exclusivité consentie (au locataire) se résoudra en dommages-intérêts ».
1303
Cass. com., 7 juill. 2004, Loi DOUBIN : le distributeur doit-il se renseigner ?, n° 02-15.950 (n°
1164 FS-P+B), D., 2004, p. 2229.
1304
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 195.
1305
Rapp. Paris, 22 juin 1960, JCP, 1960, II, 11857, note A. CHAVANNE : « Les contrats
d’exclusivité sont en principe bien connus de tous les professionnels d’une branche déterminée ». Au
sujet d’un contrat de franchise : CA Paris, 5e Ch. B., 22 nov. 2007, SAS Prodim c/ Soc. Francap, Juris-
Data n° 2007-356526 (Selon l’arrêt, en sa qualité de grossiste approvisionnant très habituellement les
commerces de proximité, le fournisseur ne pouvait ignorer que les contrats de franchise comportent au
moins l’obligation de ne pas adhérer à une autre organisation, quelle que soit son importance, pendant
la durée du contrat).
1306
L’agent immobilier qui obtiendrait un droit de représentation au sujet d’un bien pour lequel il
est d’usage de solliciter un droit exclusif, l’employeur qui embaucherait un salarié bien connu dans le
secteur professionnel, le locataire qui ne pouvait ignorer l’exclusivité consentie à un concurrent situé
dans la galerie commerciale : cité par D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd.
Bruylant, 2008.
-355-

nourriture. Il doit aller à la chasse aux informations. Il a le devoir de s'informer,


vérifier, recouper, validé les renseignements reçus »1307.

679. Sur ces raisonnements, une question posée par les professeurs FERRIER et
SAUTONIE- LAGUIONIE, attire notre analyse : La connaissance du réseau suffit-
elle à établir l'élément moral de la faute du distributeur parallèle1308 ? En d’autres
termes, la simple connaissance de la clause d’exclusivité constitue l’élément moral
nécessaire pour engager la responsabilité des tiers ?

680. MM. les professeurs FABIA et SAFA ne sont pas de cet avis et considèrent
que « l’inscription au registre du commerce est une formalité essentielle et qu’aucune
autre formalité ou circonstance, ni une circulaire, ni la connaissance démontrée chez
les tiers, ne saurait permettre d’invoquer l’exclusivité à son encontre »1309. De même,
M. Eid, a considéré que si le représentant exclusif a omis l’inscription au registre du
commerce, la clause d’exclusivité à l’égard des tiers ne sera pas opposable même s’ils
ont eu connaissance par un autre moyen1310. Tandis que la jurisprudence libanaise a
considéré qu’il suffit de prouver la simple connaissance par le tiers importateur de
l’exclusivité pour engager sa responsabilité : « il suffira que le bénéficiaire apporte la
preuve de la connaissance par le tiers de l’existence de l’exclusivité pour que la
responsabilité de ce dernier soit engagée »1311.

681. S'agissant de la charge de la preuve, c'est logiquement au demandeur en


l'occurrence celui qui conteste la distribution parallèle1312, de prouver que le
revendeur connaissait l'existence du réseau, c'est dire des contrats qui le constituent et

1307
J.-M. LELOUP, La franchise, Delmas 2000, n° 953.
1308
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 10.
1309
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 10.
1310
E. EID, Les actes de commerces, les commerçants et le fonds de commerce, éd. Bakhos, 1992,
p. 313.
1311
Cass. Lib. 7e Ch., arrêt n° 41, 8/2/2001 ; Juge de référé Beyrouth, décision n° 151, 2007, Rev. al
Adl, 2007 ; TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 152, 5/4/2001, Rev. al Adl, 2001.
1312
La pratique désigne le marché de la distribution parallèle par l’expression de marché gris : M.
TOUCHAIS-BEHAR, La protection du réseau de distribution, Aspects Contemporains du droit de la
distribution, Montchrestien, 1996, p. 53.
-356-

ses clauses1313. Néanmoins les juges exigent en pratique la preuve de la connaissance


par le revendeur de l'interdiction1314, ce qui est conforme au principe d'opposabilité.

682. Cependant, en droit de la distribution comme en droit commun1315, la


preuve de la connaissance du contrat peut être directe, supposant d'établir la
connaissance effective du contrat par le tiers ; ou résulter de présomptions, lorsque le
tiers ne pouvait pas ne pas connaître le contrat, cause d’appréciation subjective, c'est-
à-dire au regard de l'expérience du distributeur et de sa connaissance des affaires ou
du domaine d'activité concerné1316. Par exemple, il a été jugé qu'« il appartenait au
franchisé en sa qualité de professionnel averti du commerce » d'apprécier la valeur
des informations transmises1317, ou que « le franchisé, commerçant indépendant,
devait être considéré comme un professionnel avisé et prudent, qui ne saurait se
laisser abuser »1318. Ainsi, la preuve d'une connaissance effective peut résulter de la
notification aux tiers de l'exclusivité contractuelle dont bénéficient les membres du
réseau1319. La notoriété du réseau permettra par ailleurs de présumer sa connaissance
par le tiers1320, à qui il appartient alors de démontrer qu'il ignorait l'existence des
contrats de distribution constitutifs du réseau1321.

683. Cette preuve peut être apportée par tout moyen, à condition qu’elle rende
certain le fait à prouver. Il peut s’agir d’une notification adressée au concurrent en

1313
Cass. com., 25 avr. 2001, Bull. civ., IV, n° 77.
1314
Cass. com., 9 oct. 2001, Contrats, conc. consom., 2002, comm. 8, obs. M. MALAURIE-
VIGNAL.
1315
V. ainsi, en cas de fraude paulienne, où l'intention frauduleuse du tiers contractant, qui suppose
sa conscience du préjudice causé au créancier, sera parfois déduite de sa qualité. V. par ex., pour la
qualité de conjoint du débiteur : Cass. com., 1er mars 1994, Bull. civ., IV, n° 81 ; D. 1994. Somm. 215,
note E. FORTIS ; Defrénois, 1994. 1118, obs. D. MAZEAU, où la Cour a retenu que l'épouse du
débiteur ne pouvait pas ignorer la fraude de son mari et avait « nécessairement conscience de
l'opération et des fins poursuivies ».
1316
Cass. com., 10 mai 2000, cah. dr. entr., 2001, n° 2, p. 28, obs. J.-L. RESPAUD ; CA Limoges,
28 oct. 1997, BICC 1er avr. 1998, p. 24.
1317
CA Paris, 16 avr. 1991, D. 1992, Somm. p. 391, obs. D. FERRIER.
1318
CA Paris, 23 mars 1993, D. 1995, Somm. p. 75, obs. D. FERRIER.
1319
Cass. com., 21 févr. 1978, Bull. civ., IV, n° 73.
1320
Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199.
1321
En ce sens, CA Paris, 18 avr. 2008, n° 07/04360, SARL PMC Distribution c/ SAS Pacific
Création ; TGI Paris, 9 juill. 2008, n° RG 03/04457, SA Christian Dior Couture c/ Sté Bazar Chic.
-357-

personne. Ou bien d’une publicité suffisante faite par les voies d’information
publiques avec la preuve que celle-ci est parvenue au concurrent qui a violé
l’exclusivité en personne. Cependant, la simple apparence ne suffit pas1322.
L’exclusivité de fait non plus. Le représentant doit prouver avec certitude que son
concurrent avait eu la connaissance de l’exclusivité, que celle-ci était insérée à un
contrat de représentation commerciale, et que, enfin, cette exclusivité répondait aux
conditions du décret-loi N. 34/67. Mais, si la preuve de la connaissance par le tiers de
l’existence de la représentation exclusive peut être faite par tout moyen 1323, elle est,
toutefois, difficile à apporter. Il faut la preuve que la publicité telle que décrite plus
haut est parvenue au concurrent en personne. Donc, il faut la preuve d’une
connaissance effective.

684. Il en découle la preuve de la connaissance par le tiers de l’existence de la


clause d’exclusivité qui ressort de son devoir d’inviolabilité dont il est tenu dans le
cas d’opposabilité du réseau de distribution1324. En effet, la responsabilité d'un tiers ne
peut être recherchée que s'il est établi que le contrat, ou plus largement le droit
d'autrui, lui était effectivement opposable1325. Ainsi, les tiers ne peuvent valablement
se voir reprocher l'atteinte à un droit qu'ils ignoraient, ce qui garantit la sécurité des
relations juridiques. Les conditions de mise en œuvre de l'opposabilité, parmi

1322
La simple possibilité de connaissance ne suffit pas, sauf certains cas de concessionnaires
collègues qui connaissent le marché et la publicité y relative : T. com., Caen, 14 janv., 1959, cité par C.
CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, n° 63, note 3.
1323
Cass. com., 12 mars 1963, D., 1963, J. 367, note J. ROBERT.
1324
Partant de là, aussi bien la jurisprudence a décidé que les tiers, en ce domaine, doivent respecter
la clause d’exclusivité, et s’y conformer s’ils viennent à en connaître l’existence et ce, dans les limites
de l’opposabilité simple résultant du principe de l’effet relatif du contrat : E. ABOU EID, Droit
commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 2, 2005, La représentation commerciale,
le décret-loi n° 34/67, art. 2, p. 24 et s.
1325
Le contenu de l'art. L. 442-6, I, 6° C. com., qui sanctionne la tierce complicité en cas de
distribution parallèle, pourrait a priori faire douter de la condition de la responsabilité du distributeur
parallèle vu sa connaissance du réseau auquel la revente parallèle peut porter atteinte. Le texte vise le
fait « de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau
faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles
applicables du droit de la concurrence ». La connaissance du réseau ou la conscience de l'atteinte au
réseau ne figurent pas dans les conditions requises par ce texte : N. FERRIER, L. SAUTONIE-
LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 10
et s.
-358-

lesquelles figure la connaissance du contrat, sont donc bien respectueuses de l'intérêt


des tiers1326.

685. Mais, il faut alors, pour que la simple connaissance suffise, que le
revendeur se soit adressé au concédant de l’exclusivité ou à un distributeur auquel le
concédant a expressément interdit de vendre dans la région de l’exclusivité1327. Mais,
si le revendeur s’est adressé en dehors de la zone déterminée, même en connaissant
l’existence de l’exclusivité, le principe de l’effet relatif du contrat s’opposerait à
retenir sa responsabilité1328. Dans ce cas, une intention de fraude1329 serait
indispensable pour retenir la responsabilité pour violation de l’exclusivité1330. A ce
titre, une formule utilisée par la jurisprudence depuis 1983 considérant que : le fait de
commercialiser dans un territoire exclusif des produits en dépit des droit d’exclusivité
dont bénéficie, à la connaissance même du revendeur, le concessionnaire, ne constitue
pas, en lui-même1331, une faute1332.

1326
Parfois, l'intérêt des tiers est même jugé prépondérant, ce qui conduira à limiter l'opposabilité du
contrat : Ibid.
1327
M. PLAISANT parle de la connaissance notoire de l’exclusivité : Les contrats de l’exclusivité,
RTD com., 1964, n° 11 ; J. GUYENOT, op. cit., n° 25 et s. ; CA Douai 26 janv. 1961, RTD com.,
1961, p. 906, n° 11 ; CA Paris, 22 juin 1960, RTD com., 1960, p. 873, n° 10 ; Cass. com., 12 mars
1963, D., 1963, n° 367, note J. ROBERT ; CA Beyrouth, n° 1197, 14 mai 1965, Rec. Hatem, vol. 60,
p. 31, n° 2 ; CA Beyrouth, n° 1299, 30 juin 1959, RJL, 1959, p. 263 ; Juge unique Beyrouth, n° 732, 21
avr. 1961, RJL, 1961, p. 689, Rec. Hatem, vol. 46, p. 28, n° 1.
1328
Cass. civ., n° 67 du 3 mai 1947, RJL, 1967, p. 560 : Dans cette espèce, il est strictement fait
application du principe de l’effet relatif du contrat qui impose aux tiers uniquement le respect du
contrat. En effet, il reconnaît la validité des activités d’un importateur parallèle tant que celui-ci ne
s’est pas adressé directement au cocontractant du représentant exclusif ou à un distributeur à qui le
fabricant a interdit de vendre dans la zone de l’exclusivité. Voir aussi : CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill.
1965, RJL, 1965, p. 818 ; Cass. civ. n° 115 du 23 oct. 1969, RJL, 1970, p. 418 ; TI Beyrouth n° 2561
du 14 déc. 1961, Rec. Hatem, vol. 50, p. 24, n° 3 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, Rec. Hatem,
vol. 52, p. 22, n° 2 ; TI Beyrouth, n° 742 du 16 mai 1956 ; TI Beyrouth, n° 1311 du 15 mai 1964, Rec.
Hatem, vol. 59, p. 21, n° 2.
1329
L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La fraude paulienne, préf. G. WICKER, LGDJ, 2008, vol. 500,
n° 215 et s.
1330
Il en serait ainsi lorsque l’importateur achète du concédant avec engagement de ne pas vendre
dans la région concédée en exclusivité, puis viole cet engagement en vendant à un prix notoirement
inférieur au prix du représentant exclusif de manière à lui causer un lourd préjudice : TI Beyrouth n°
742 du 16 mai 1956 ; Il en serait de même aussi si l’importateur parallèle a fait usage de manœuvres
frauduleuses en collusion avec son vendeur en vue de nuire au représentant exclusif : Cass. civ., n° 115
du 23 oct. 1969, RJL, 1970, p. 418.
1331
C’est-à-dire en l’absence des actes de concurrence déloyale, Cass. com., 19 oct. 1999, Bull. civ.,
1999, IV, n° 168 ; Cass. com., 26 janv. 1999, JCP, E, 1999, CDE, n° 2, p. 25, obs. D. FERRIER ; Cass.
com., 13 janv. 1998 et 10 fév. 1998, D., 1998, p. 331, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 9 juil. 1996, D.
-359-

686. Pourtant, si, dans un premier temps, il appartenait au promoteur du réseau


de démontrer, outre la licéité du réseau sans laquelle les contrats qui le composent
sont illicites et, partant inopposables aux tiers, les circonstances particulières
établissant la faute du distributeur parallèle, les juges ont fait preuve, dans un second
temps, d'une sévérité plus grande à l'égard de ce dernier1333. Désormais, le refus de
justifier la provenance des produits1334 présume l'illicéité de l'approvisionnement et,
partant, établit l'atteinte illicite au réseau1335. Cette nouvelle orientation
jurisprudentielle s'expliquerait, selon certains, par l'inopposabilité du réseau aux
tiers1336 et, selon d'autres, par l'absence d'atteinte au réseau par le distributeur
parallèle1337.

687. Nous venons de traiter d’une simple application d’un principe reconnu par
la loi, celui de l’opposabilité à l’égard des tiers de l’exclusivité insérée dans le contrat
de représentation commerciale, et ce, malgré le principe de l’effet relatif du contrat, et
celui de la liberté du commerce et de l’industrie. Mais, d’après l’alinéa 3 de l’article 2

1997, somm. p. 56, obs. D. FERRIER : « un opérateur qui n’est ni revendeur agrée du réseau du
constructeur, ni intermédiaire mandaté peut se livrer à une activité d’importation parallèle et de
revente indépendante de véhicules neufs de cette marque ».
1332
Cass. com., 16 fév. et 12 juil. 1983, D. 1984, 5489, note D. FERRIER.
1333
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 4.
1334
Solution identique au droit libanais suivant le célèbre arrêt de la Cour de cassation libanaise,
1ere Ch. civ., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168 :
« n’importe qui, achetant des produits de l’extérieur pour les vendre dans le territoire désigné pour la
commercialisation de ces produits par le distributeur exclusif, sera responsable contre le représentant
commercial de la violation de l’exclusivité. Peu importe l’originalité des produits importés, que ce soit
de la société représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat de
représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant ».
1335
CA Paris, 7 nov. 2001, Lettre distrib, 2001-12: Présentation de factures émises par une société
de façade ; Cass. com., 27 oct. 1992, D. 1992. 505, note A. BENABENT, Adde com. 4 déc. 2001: « il
appartient à l'opérateur ayant acquis des véhicules neufs pour les revendre de faire la preuve qu'il les
a régulièrement acquis sur un réseau parallèle ou auprès d'un autre concessionnaire ».
1336
D. FERRIER, La liberté du commerce et de l'industrie, in R. CABRILLAC, M.-A. FRISON-
ROCHE et Th. REVET (dir.), Libertés et droits fondamentaux, 13e éd., D., 2007, p. 711 et s. ; Ph. LE
TOURNEAU, Concessions. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses
concessions. Fondement et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc.
1010, 2010, n° 148 et 151 ; P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers
revendeurs hors réseau, D. 1990. Chron. 43 s., spéc. n° 8 ; G. VIRASSAMY, La connaissance et
l'opposabilité, in Les effets du contrat à l'égard des tiers, LGDJ, 1992, p. 132 s., spéc. n° 38.
1337
J. GHESTIN, Ch. JAMIN et M. BILLIAU, op. cit., n° 736 in fine ; P. JOURDAIN, art. préc.
spéc., n° 8.
-360-

du décret-loi N. 34/67, une dérogation s’impose à ce principe, par le complément de


la publication de la clause d’exclusivité issue du contrat de la représentation
commerciale : « La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des
tiers que si elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au
registre du commerce». Cette dérogation spéciale au décret-loi fera l’objet de notre
deuxième section.
-361-

SECTION 2

LA DÉROGATION TENANTE À L’EXIGENCE

DE LA PUBLICITÉ

688. L’exclusivité dont le représentant est bénéficiaire s’impose aux tiers de


manière totale du seul fait de l’inscription au registre du commerce1338.
L’enregistrement de l’exclusivité assuré par le représentant bénéficiaire ne lui donne
aucun effet particulier autre que ceux qui résultent de l’application des principes
généraux du droit, et notamment la relativité1339. Cet effet est limité aux seuls cas des
rapports du représentant bénéficiaire de l’exclusivité avec les tiers1340. Il ne sera,
donc, traité des rapports du représenté ou du représentant avec les tiers qu’en leur
qualité de bénéficiaires, de sorte que nous n’aurons pas besoin de préciser leur qualité
chaque fois qu’ils seront mentionnés1341.

689. Cela résulte expressément et clairement du texte de l’article 2 du décret-loi


N. 34/67 qui prévoit l’inscription en disposant ce qui suit : « Ce contrat peut
comporter une clause limitant la représentation à un représentant unique …. La
clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été
dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du commerce ».

690. Nous voyons que l’effet de l’inscription ne vise que la possibilité


d’exclusivité liée au représentant, et non celle de l’exclusivité accordée au représenté.
Dans ce dernier cas, ce sont les règles générales qui s’appliquent telles qu’elles

1338
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 46.
1339
Art. 1165 C. civ : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C. : « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne. C’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
1340
Idem.
1341
Ce problème a été abordé par M. FABIA qui a recherché le fondement du droit reconnu au
bénéficiaire de la convention d’exclusivité, vis-à-vis des tiers. Il compare ce droit au droit légal,
comme le droit de propriété qui est opposable à tous. Mais, il note immédiatement que les droits réels
ont été consacrés par des dispositions légales, et qu’un droit réel ne pouvait exister sans l’intervention
du législateur. Cependant, il admet qu’une telle qualification puisse être donnée au droit en question si
le législateur intervenait pour en déclarer l’opposabilité absolue : Ch. FABIA, Les conventions
d’exclusivité, Commerce du Levant, vol. 22, 15 juin 1962, p. 11.
-362-

résultent simplement du principe de l’effet relatif du contrat. En d’autres termes, et


dans tous autres cas, même les plus proches de la représentation commerciale, il faut
revenir aux règles générales de l’exclusivité telles qu’elles résultent des principes
généraux des contrats1342. S’il en était autrement, quel intérêt aurait eu le représentant
à assurer la publicité de la clause dont il n’est pas bénéficiaire. Les professeurs
FABIA et SAFA, par contre, ne sont pas de cet avis, et considèrent que l’effet absolu
par voie d’inscription au registre du commerce bénéfice aussi bien au représentant
exclusif qu’au représenté exclusif1343.

691. Nous ne partageons pas leur opinion et nous suivons l’opinion de M.


MAHMASSANI pour les considérations de l’ordre public économique et de la
politique sociale qui ont déterminé l’élaboration d’une telle législation1344 : « C’est
une législation qui vise généralement à la protection des commerçants libanais, qui,
souvent, sont des représentants commerciaux »1345. Elle vise aussi la protection de
l’économie libanaise, fondée surtout sur le commerce et les services1346. La
représentation, en fin de compte, ne touche-t-elle pas à ces deux secteurs ? Ainsi, il
devient normal que le législateur libanais se préoccupe uniquement du représentant
qui n’est autre que le commerçant libanais. C’est ainsi que, lorsque le législateur vise
particulièrement le cas du représentant bénéficiaire de l’exclusivité pour lui accorder
une protection absolue par voie de publicité au registre du commerce, cette
disposition ne doit en aucun cas, s’étendre au représenté bénéficiaire de l’exclusivité
sans en violer le caractère exceptionnel.

1342
Cass. civ., n° 63 du 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, RJL,
1963, p. 957 ; CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill. 1965, p. 818.
1343
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 2, n° 3 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Les conventions d’exclusivité, Commerce du
Levant, vol. 22, 15 juin 1962, p. 3, n° 9.
1344
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 175,
adde v. introduction de notre étude.
1345
En remplissant les conditions de l’al.2 de l’art. 2 du décret-loi n° 34/67 : M. MAAMARI, Cours
de droit commercial -Les actes de commerce, commerçant et fonds de commerce- USEK, 2004 ; E.
ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation
commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 86 ; Ch. MALLAT, Comparative models of freedom
of trade: The hurdle of Lebanese sole agency, Centre d’études et de recherche de l’USJ, Liban, 2002.
1346
R. NASNAS, président d'Axa Moyen-Orient et président du conseil économique et social du
Liban, déclare ce qui suit : C’est justement « grâce aux banquiers, aux hommes d'affaires et aux
industriels restés à leurs postes que l'économie libanaise avait survécu aux quinze ans de guerre entre
1975-1990 » : L. LUTAUD, Le Figaro, 21 juill. 2006.
-363-

692. Il est intéressant de noter que l’article 2 du décret-loi N. 34/67 prévoit que
la clause d’exclusivité est opposable à l’égard des tiers uniquement si elle est inscrite
au registre du commerce. En revanche, un projet loi qui n’a jamais eu naissance a été
proposé pour la modification de cet article par la suppression de la publicité et par
effet l’opposabilité1347. Ce projet-loi a été refusé, cause de la contradiction de son
objet à l’intérêt public. En d’autres termes, il n’était pas dans le but de supprimer le
monopole, protéger les consommateurs, garantir la nature et la qualité, et organiser la
transportation et la concurrence1348. Cette observation faite attire notre attention sur le
poids de la publicité dans le décret-loi N. 34/67 sujet de cette section.

693. Reprenons les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 2 du décret-loi N. 34/67


« La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle
a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du
commerce ». L’utilisation de la conjonction « que » indique la nécessité, la suffisance
et l’importance de la publicité comme condition pour l’opposabilité de la clause
d’exclusivité. Mais cette condition est-elle primordiale et principale pour
l’opposabilité ? A ce titre, M. MAHMASSANI, pense que dans certaines conditions,
la clause d’exclusivité dans le contrat de représentation commerciale peut produire
des effets à l’égard des tiers en dehors de toute inscription au registre du
commerce : « L’inscription au registre du commerce est une condition essentielle
pour que la clause d’exclusivité produise des effets à l’égard des tiers de manière
inconditionnelle et indiscutable, mais il ne s’agit point du tout là, d’une condition
indispensable »1349.

694. Cela ne veut nullement dire qu’au Liban, l’enregistrement est devenu une
condition fondamentale et indispensable de cet effet de l’exclusivité, mais qu’il fait

1347
Projet-loi de 30 janv. 2004 concernant la modification du décret-loi n° 34/67 :
« Article 1 : Seront annulés les deux alinéas 3 et 4 de l’article 2 du décret-loi n° 34/67 ( la
représentation commerciale ) et remplacées par le texte qui suit : la clause d’exclusivité n’est
opposable aux tiers.
Article 2 : Ce projet loi sera publié au journal officiel et sera mis en vigueur après 4 ans de sa
publication ».
1348
J.O du janv. 2004, p. 21.
1349
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 200.
-364-

naitre sa protection1350. Sur cet acquis une distinction trouve lieu afin de vérifier la
valeur de la publicité dans l’opposabilité de la clause d’exclusivité au regard du
décret-loi N. 34/67, comme une condition essentielle dans la teneur de l’exigence
(Parag. 1) ou une condition indispensable dans la sanction de l’exigence (Parag. 2).

Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence

695. Lors de l’émission du décret N. 34/67, la loi était silencieuse en ce qui


concerne la procédure de l’inscription de la clause d’exclusivité au registre du
commerce. D’où l’utilité d’étudier l’efficacité de cette exclusivité lors de son
inscription au registre commercial suivant les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 2
dudit décret : « La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des
tiers que si elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au
registre du commerce ». A ce titre, l’exclusivité inscrite sera t- elle opposable ou bien
nécessitera-t-elle quelques formalités pour sa validité ? En effet, cette publicité a été
prévue comme charge de l’inscription pour la confier au représentant sans en prévoir
les modalités, qui, ultérieurement, ont été affichées par le Ministère de l’économie et
du commerce. Le bénéficiaire doit prendre toutes les mesures nécessaires pour
réserver ce bénéfice et profiter d’une protection. Il s’agit d’analyser selon les
dispositions du Ministère de l’économie et du commerce, le contenu de l’inscription
(A), et les modalités de celle-ci (B).

A- Le contenu de l’inscription

Voyons les formes approuvées et suivies d’une manière générale devant les
tribunaux libanais ainsi que l’exception à certains produits.

1350
E. EID et Ch. Eid, Droit commercial, éd. Sader, Beyrouth, t. 1, 2007, p 223.
-365-

a- L’exposé

696. Aucune forme particulière pour l’inscription n’est imposée par le législateur
libanais. L’usage des termes sacramentels et autres n’est pas du tout requis. La forme
de l’inscription a été précisée suivant des normes et des modèles approuvés par le
Ministère. Cependant, certaines mentions relatives au contenu sont exigées à titre de
validité, bien que non-visées directement par la loi. C’est le décret-loi N. 3417 émis
le 20/7/20001351, qui s’est interrogé d’une manière indirecte au contenu de
l’inscription, en précisant dans l’alinéa 3 de son article 4, les conditions d’application
de l’article 40 du Code de budget général de l’année 1998, lié à la redevance annuelle
imposée sur les contrats de représentation commerciale: « Lors de chaque paiement
de redevance annuelle, le représentant commercial reçoit du ministère de l’économie
et du commerce, une attestation qui sera valide devant tous les types d’organismes
concernés, affichant :

a- Le nom de la compagnie ou la société inscrite au registre de la


représentation commerciale et sa nationalité et son adresse

b- Le nom du représentant commercial et son adresse

c- La nature des produits et des services ou même les travaux dont la


représentation commerciale englobe

d- Le champ géographique de la représentation commerciale

e- La nature de la représentation commerciale (exclusive ou non)

f- La date de l’inscription du contrat de représentation commerciale et sa durée


de validité (selon les dispositions du contrat)

g- La durée périodique dont la redevance a été réglée

h- La date d’échéance de l’attestation »1352.

1351
J.O. du 20 juill. 2000.
1352
En France de nouvelles obligations déclaratives ont survenu par le décret du 9 mai 2007 relatif
au registre du commerce et des sociétés complète l'article R. 134-5 du code de commerce (anc. Décr.
du 23 déc. 1958, art. 4-1) relatif aux obligations déclaratives de l'agent commercial lors de sa demande
d'immatriculation. Ces déclarations nouvelles portent, le cas échéant, sur la déclaration d'insaisissabilité
-366-

697. Il s’agit, notamment, des précisions qui doivent se retrouver pour former
valablement la clause d’exclusivité elle-même : les produits1353 et la zone d’exercice
de l’exclusivité qui doit être bien précisée1354. Il ne peut être pallié au silence de la
clause à cet égard. Celle-ci dans ce cas est nulle comme rendant incertaine l’étendue
de la liberté du commerce et de l’industrie des tiers qui ne peut leur être totalement
retirée, mais qui peut uniquement l’être partiellement. Obligatoirement aussi,
l’inscription doit clairement désigner le nom et la profession1355 du représentant
bénéficiaire de l’exclusivité1356.

698. Par contre, d’autres mentions ne sont pas exigées à peine de nullité. Mais, il
est de l’avantage du bénéficiaire de les prévoir. Prenons l’exemple de M.
MAHMASSANI, s’agissant de la marchandise ou de l’objet de la représentation : à
défaut de précision à cet égard, il faut dire que la notion même de représentation
impose la solution selon laquelle l’objet de celle-ci englobe la totalité des activités du
représenté1357. En d’autres termes, le représentant ne représente pas une marque, ou
un produit, ou des marchandises. Il représente la personne physique ou morale auteur
de cette marque ou producteur des marchandises, et en général, maître des activités
diverses qui forment son commerce. Mais, là où les choses se compliquent et tournent
au détriment du représentant, c’est lorsque celui-ci retrouve des commerçants qui
représentent le même co-contractant, et ce, antérieurement ou postérieurement à sa
représentation1358. Dans ce cas, le représenté peut toujours exciper du fait que le

de sa résidence principale, prévue par l'article L. 526-1 du code de commerce issu de la loi du 1 er août
2003 sur l'initiative économique, ainsi que l'identité de son conjoint, si celui-ci souhaite bénéficier du
statut du conjoint collaborateur (Décr. n° 2007-750 du 9 mai 2007, JO 10 mai).
1353
V. annexe II : Enregistrement du contrat de représentation commerciale, ou agence exclusive :
parmi les documents demandés « L’accord entre l’entreprise locale et l’entreprise étrangère ou une
copie conforme datée en mentionnant exclusivement les matières ou les produits inclus dans le champ
d’exclusivité…».
1354
Suivant le décret n° 3417/2000, idem, dans son article 4, alinéa 3 ; S. MEGNIN, Le contrat
d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 55 : « Un accord
entre les parties sur l’idée d’attribution d’un territoire à un agent commercial, doit apparaître
clairement et de manière non équivoque ».
1355
V. annexe III : Demande d'enregistrement d'un contrat de représentation commerciale.
1356
Suivant le décret n° 3417/2000, idem, dans son article 4, alinéa 3.
1357
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 177.
1358
Idem.
-367-

représentant mécontent n’avait pas obtenu la totalité de ses activités, mais une partie
seulement, ce qui est parfaitement possible ; dans ce cas, alors, il devient difficile
pour le représentant de prouver l’étendue de sa représentation, et, il faudra, pour cela
rechercher quelle était l’intention des parties1359, à travers les correspondances entre
eux, et tous indices de nature à permettre et faciliter une telle recherche1360.

699. A cet égard, il faut enregistrer la clause même accompagnée de la signature


des parties, où une simple déclaration du représentant ne suffirait pas. L’acte initial
entre les parties qui prévoit l’exclusivité et signé de celles-ci doit être enregistré pour
deux raisons primordiales. D’une part, il s’agit d’une garantie de sérieux et de
certitude quant à l’origine de l’exclusivité. Cela, ainsi, permet d’éviter les agissements
frauduleux de certains commerçants qui tenteraient illicitement de profiter d’une
protection à laquelle ils n’ont pas droit. D’autre part, la signature du représenté
concédant est nécessaire pour informer les tiers de l’identité et de la qualité de celui-
ci. En effet, la qualité en question est d’une importance appréciable pour la
détermination de l’étendue et de la portée de l’effet résultant de l’inscription, tel qu’il
sera montré à l’occasion des effets de celle-ci.

700. Enfin, quant à savoir s’il suffit d’enregistrer uniquement la clause


d’exclusivité sans le contrat initial de représentation, et ce, au cas où ils ne seraient
pas constatés dans un même titre. Il nous semble, à cet égard, après la révision des
normes du Ministère de l’économie et du commerce qu’il faille exiger l’inscription
aussi bien de l’exclusivité que du contrat de représentation commerciale auquel elle se

1359
CA Versailles, 11 mai 2006, Lettre distrib., nov. 2006, p. 2 ; CA Lyon, 20 févr. 2003, RJDA
2003, n° 1055 ; Lettre distrib., oct. 2003, p. 2, Comp. ; Cass. com., 3 juill. 2001: RJDA 2002, n°
35 : « En l'absence d'écrit non équivoque, en raison de la règle de la liberté de la preuve entre
commerçants, il incombe, d'une part, à la partie qui s'en prétend bénéficiaire de rapporter la preuve de
la clause d'exclusivité et il appartient, d'autre part, à la juridiction saisie d'apprécier le caractère
suffisant des éléments qui lui sont soumis pour établir, à partir de la commune intention des parties,
l'existence d'une obligation d'approvisionnement pour le distributeur auprès du fournisseur ».
1360
Art. 366 C.O.C. : « Il appartient au juge dans l’explication des actes juridiques, de recourir sur
l’intention du personne engagée (si l’obligation est unilatéral) ou bien sur la volonté des parties (s’il y
avait contrat), et non de rester river sur le sens littéral du texte» ; CA Liban Nord, arrêt du 24 juill.
1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol.
159 ; A. RIEG, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 358 : « L’acte juridique,
étant un substratum de volonté, il est logique d’interpréter un contrat en recherchant la volonté qui a
animé les contractants. L’acte juridique étant le produit d’une ou plusieurs volontés, c’est
nécessairement d’après l’intention profonde des auteurs qu’il faut en apprécier les conséquences ».
-368-

rattache1361. En effet, nous avons montré, ci-dessus, que l’exclusivité protégée était
celle accordée au commerçant intermédiaire jouissant de la qualité du représentant
commercial. Nous avons montré aussi que le texte en question était un texte
d’exception qui, à ce titre, devrait être appliqué limitativement et sur interprétation
restrictive1362. Par conséquent, il est normal de considérer que seule l’exclusivité dans
la représentation commerciale peut produire des effets à l’égard des tiers de manière
absolue, par voie d’inscription au registre du commerce. Il en résulte que l’existence
du rapport de représentation commerciale tel que définie par l’article premier du
décret-loi N. 34/67 est une condition préalable pour la reconnaissance de l’effet
résultant de l’inscription au registre du commerce1363. Il apparaît donc, que
l’inscription de la totalité du contrat de représentation commerciale devient nécessaire
pour que le tiers concerné par la publicité en question puisse être en mesure de
vérifier si la condition préalable d’existence du rapport de représentation commerciale
est effectivement réalisée1364.

b- L’exception -Les produits non concernés-

701. Après avoir vu que la loi a prévu l’obligation de citer les marchandises
incluent dans le champ d’exclusivité, il s’agit de s’interroger sur la question des
qualités des marchandises. Est-ce que toutes les marchandises sont susceptibles d’être
commercialisés ou bien trouve-t-on quelques restrictions ?

702. Suivant les formulaires approuvés par le Ministère de l’économie et du


commerce, il s’agit de « spécifier une date ultérieure afin que le service puisse
vérifier les documents et s’adresser aux organismes concernés »1365. En d’autres

1361
V. Annexe IV : Demande d’attestation en vertu de l’accomplissement d’inscription d’un contrat.
1362
V. le Titre 2 de la 1ère partie de cette étude.
1363
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 4.
1364
V. Annexe III : La demande d'enregistrement d'un contrat de représentation commerciale.
1365
Affaire renvoyée à l'Office du boycott d'Israël : V. Annexe II : Le mécanisme de déroulement
du fichier, son délai d'achèvement et les frais prévus.
-369-

termes il s’agit de vérifier si ces produits ne font pas l’objet d’interdiction de


commerce, c’est-à-dire n’appartient pas aux pays « ennemis », ni découlant de sources
illégales.

703. Le droit français ne les a pas nommés tacitement comme son voisin
libanais, qui, dans les alinéas de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 a mentionné ce
qui suit :

Al. 2 : « Ce contrat peut comporter… une clause de consignation de marchandise


en vue de la livrer aux clients ».

Al. 3 : « La clause de représentation exclusive … est inapplicable pour les


produits alimentaires à l’exception des produits de consommation privée qui seront
déterminés par décret pris en Conseil des Ministres après consultation d’une comité
qui sera composée du Directeur Général de l’Economie et du Commerce, d’un
représentant de la chambre Syndicale des Représentants de Commerce au Liban, d’un
représentant de la Fédération Nationale Générale des Sociétés Coopératives, d’un
représentant de la Confédération Générale des Travailleurs, et d’un représentant de
la chambre de Commerce et d’Industrie. Ce comité sera désigné par décret pris en
Conseil des Ministres ».

Al. 4 : « L’exclusivité de la représentation commerciale pour les produits


alimentaires pourra être rétablie par décret pris en Conseil des Ministres après
consultation du comité mentionné au paragraphe précédent, lorsque les circonstances
économiques le permettront ».

704. Reprenons le contenu de ces alinéas ; on y trouve que le législateur a voulu


exonérer du champ d’application de l’exclusivité les produits alimentaires à
l’exception des produits de consommation privée qui seront déterminés par décret
pris en Conseil des Ministres. Réciproquement, l’exclusivité touche les produits de
consommation privée. Nous trouvons dans ce texte une ambigüité concernant le
concept de « consommation privée». Il s’agit de déduire l’intention de législateur dans
cette expression et à quoi veut-il aboutir ?
-370-

705. Comme réponse à cette question, des textes complémentaires à l’article 2


du décret-loi N. 34/67, sont venus éclaircir cette ambigüité, peut-être pas d’une façon
complète, mais au moins d’une manière qui nous aide à compléter notre analyse.

706. Ces textes sont les suivants :

L’article 15, alinéa 2 du décret-loi N. 73/83 du 9/9/1983, reliée à l’acquisition des


produits, matières, revenus et à leur commercialisation, dispose ce qui suit : « Malgré
tout texte opposé, la clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des
tiers que si elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au
registre du commerce, et contre les produits qualifiés comme accessoires ou
complémentaires, sans autres ».

707. Ainsi, un décret N. 3339 daté du 6/4/1992, est venu désigner les produits
qui ne sont pas considérés comme accessoires ou complémentaires, et dont la clause
d’exclusivité ne produit pas effets, en précisant ce qui suit :

Art. 1 : « Sont considérés non complémentaires ou accessoires :

- les produits alimentaires pour consommation humaine et animal, quelques


soient leurs noms, types et qualités

- les produits de nettoyage et les poudres à laver »

Art. 2 : « La clause de représentation exclusive sur les produits exclus de la


gamme des complémentaires ou accessoires dans l’article premier ci-dessus ne
produit pas effet à l’égard des tiers »

708. Ensuite, un décret N. 3417 émis le 20/7/2000, précise les conditions


d’application de l’article 40 du Code de budget général de l’année 1998, lié à la
redevance annuelle imposée sur les contrats de représentation commerciale, dans
lequel était énoncé dans son article 4 , alinéa 3, ce qui suit :

« Lors de chaque paiement de redevance annuelle, le représentant commercial


reçoit du ministère de l’économie et du commerce, une attestation qui sera valide
devant tous les types d’organismes concernés, affichant :
-371-

… c- la nature des produits et des services ou même les travaux dont la


représentation commerciale englobe

d- le champ géographique de la représentation commerciale…. ».

709. De ce qui précède, nous constatons que le législateur, 25 ans après la


naissance du décret-loi N. 34/67, a jeté un regard indirect vers ce dernier à travers le
décret N. 3339 du 6/4/1992 sans toucher au fond ; tout en désignant une catégorie de
produits qui ne sont pas considérés comme accessoires ou complémentaires, et dont la
clause d’exclusivité n’est pas applicable. C’est dire qu’ils sont exclus du champ
d’application de l’exclusivité. En d’autres termes après que le législateur a exclus
dans le premier amendement au décret-loi N. 34/67, les produits alimentaires sauf ce
qui en est des produits qualifiés comme « accessoires ou complémentaires » ; il est
revenu dans l’alinéa 2 de l’article 15 du décret-loi N. 73/83 pour limité le champ
d’application de la représentation, en l’appliquant aux produits qualifiés comme
accessoires ou complémentaires que ce soit des produits alimentaires ou non.

710. Ainsi, il s’agit de noter que la modification apportée à l’article 2 du décret-


loi N. 34/67, n’a pas supprimé la clause d’exclusivité de la représentation
commerciale, mais a dût écarter l’effet absolu de l’inscription de cet article
l’équilibrant avec autres contrats, notamment en ce qui concerne la relativité des
effets. Dans le même sens l’avis de M. MAHMASSANI dans son étude sur
l’exclusion des produits alimentaires de la clause d’exclusivité : « La disposition du
nouvel article 2 modifié selon laquelle l’exclusivité ne produit pas d’effets à l’égard
des tiers quand elle se rapporte aux produits alimentaires, ne rend pas pour cela
telles clauses d’exclusivité nulles ou inexistantes. Seulement elle replace les effets de
l’exclusivité en matière de produits alimentaires dans le contexte général du droit des
contrats…En effet, si les contrats de représentation exclusive n’obligent plus les tiers
qui n’y ont pas participé, ces derniers ne peuvent quand même pas ignorer au moins
l’existence de ce contrat. Donc, les tiers ne peuvent effectuer des actes de nature à
empêcher le contrat de produire ses effets entre les parties »1366.

1366
M. MAHMASSANI, Proche Orient, Etudes juridiques, janv. 1975, déc. 1977, p. 167, 4e parag.
-372-

711. « C’est ainsi que les tiers ne peuvent sans engager leur responsabilité
entrer en contrat avec la firme représentée sans l’intermédiaire du représentant, car
si l’exclusion ne produit plus d’effet à l’égard des tiers, elle continue à produire des
effets entre les parties et demeure opposable aux tiers »1367.

712. En comparant ce regard du législateur aux dispositions de l’alinéa 3 de


l’article 2 du décret-loi N. 34/67, nous trouvons un point commun qui est
l’ « inapplication de la clause d’exclusivité » sur les produits alimentaires qui sont
bien considérés comme produits accessoires ou complémentaires. Ainsi, par le décret
N. 3339 qui est venu compléter l’article 2 du décret-loi N. 34/67, le législateur n’a pas
éclairé le sens de l’expression « consommation privée », qui demeure un point
controversé jusqu'à présent ouvrant plusieurs discussions dont nous citons les deux
plus importantes :

713. La première datée de 19881368, à la suite d’un débat soulevé au parlement


libanais lié à la question de la lutte contre le monopole et la réalisation de la
concurrence ; une initiative a été lancée, par un certain nombre de députés, visant à
assurer la stabilité des prix, en dépit de la chute quasi quotidienne du taux de change
de la livre libanaise. Cette initiative a permis d’atteindre « l'équilibre par le secteur
coopératif grâce à l'appui des prêts à faible intérêt, afin de permettre d'importer les
produits nécessaires, en particulier les aliments, où une concurrence dans l'offre des
prix et un équilibre entre les secteurs privé et coopératif auront lieu ».

714. Mais une fois l’importation par les sociétés coopératives commencée,
celles-ci se sont trouvées face à la représentation commerciale et son décret-loi N. 34/
67, notamment par l’exception marquée sur les produits de « consommation privée »
qui sont hors l’application de la clause d’exclusivité citée par le troisième alinéa du
deuxième article du décret-loi susmentionné. Précisément, elles ont été interrompues
parce que la détermination de la notion « consommation privée » n’a pas vu le jour
car le comité désigné par décret pris en Conseil des Ministres selon la loi de 1975, n’a
pas été formé et le décret n’a pas été émis par le Conseil des Ministres.

1367
Idem, 5e parag.
1368
Entretien passé par M. N. AL ASSAAD avec le Président du Parlement Libanais, publié dans
le journal « Al-Safir », 18 fév. 2002.
-373-

715. Sur cette base, un texte d'un projet-loi a été lancé en proposant la
suppression du terme « consommation privée ». Dans ce but, une session
parlementaire s’est rassemblée le 26 mai 1988, au cours de laquelle un débat
parlementaire s’est déroulé ; il en est venu à dire que « le problème est plus grave que
nous le pensions, nous avons donc reporté à plus tard l’examen du projet-loi et nous
avons demandé au gouvernement de former ledit comité et de publier le décret ».

716. Ensuite, une deuxième discussion a eu lieu en 2002 concernant un projet-


1369
loi sur la suppression de « la protection de la représentation commerciale
exclusive ». Le parlement a vu la nécessité de promouvoir l'intérêt potentiel de
protection des consommateurs afin de leur permettre de jouer le rôle qui leur incombe,
-en particulier après l'application de la loi de la valeur ajoutée (TVA)-, ainsi que la
nécessité de proposer des solutions appropriées dans le cas d’annulation des agences
exclusives. En effet, si la mesure d'annulation de la représentation commerciale
exclusive a été adoptée, elle doit être globale et non partielle, et des contrôles
nécessaires doivent être mis pour interdire ses impacts négatifs, notamment en matière
de médicaments.

717. Cependant le parlement a voulu avancer le sujet de l'abolition des


monopoles, en conformité avec le principe selon lequel l'État, lorsqu’il abolit ses
monopoles, ne devrait pas protéger les monopoles des autres ; il souligne la nécessité
pour l'exhaustivité de ce principe, notamment pour ce qui touche au retrait de l'état du
marché pour le carburant et son ouverture à la concurrence, d’atteindre une réduction
des prix que nous n’attendons même pas.

B- Les modalités de l’inscription

718. Le décret-loi N. 34/67 est silencieux relativement au moment où on doit


intervenir l’inscription de la clause d’exclusivité au registre du commerce, dans le
folio du représentant. De même aucune désignation pour le lieu où celle-ci doit être
effectuée.

1369
Cité par le journal officiel du parlement libanais daté de 13 janv. 2002.
-374-

a- Le moment de l’inscription

719. Pour répondre à cette question et clarifier cette modalité, il est


indispensable de retourner aux règles générales du Code de commerce qui régissent la
tenue et les effets afférents au registre du commerce. D’après l’article 22 du Code de
commerce libanais1370, l’inscription au registre du commerce peut servir deux buts :
d’une part, il sert à recueillir tous les renseignements qui doivent obligatoirement être
mis à la disposition du public. D’autre part, il sert à permettre aux commerçants
désireux de protéger un droit quelconque, d’effectuer la publicité nécessaire, et ce,
dans la mesure où la loi reconnaît des effets à cette publicité1371. Dans ce sens, la
jurisprudence française a défini la publicité comme étant « toute information destinée
à permettre au client potentiel de se faire une opinion sur les caractéristiques des
biens ou services qui lui sont proposés »1372.

720. Par ailleurs, l’article 31 du Code de commerce libanais prévoit que, « dans
tous les cas où il n’est pas fixé de délai particulier par les articles qui le précèdent,
l’inscription devrait se faire dans le délai d’un moins à partir de la date du titre ou de
l’acte devant être publié ». Il n’est pas question d’appliquer ce texte au cas de la
représentation exclusive pour dire que l’inscription doit avoir lieu dans le mois
suivant la conclusion de l’accord d’exclusivité. En effet, l’article 31 en question ne
concerne que le cas où l’inscription est obligatoire et ne dépend pas de la volonté de
l’obligé, donc, uniquement le premier cas visé par l’article 22. C’est une obligation
qui, si elle n’est pas remplie, donne lieu à des sanctions. Or, dans notre cas, il en est
différemment, étant donné que l’inscription est simplement un devoir accordé au

1370
L’art. 22 C. com.: « Le registre du commerce permet au public de recueillir des renseignements
complets sur toutes les maisons de commerce et les fonds de commerce fonctionnant dans le pays.
Il est aussi, quand la loi le déclare expressément, un instrument de publicité destiné à rendre
opposables aux tiers les mentions qui y sont contenues ».
1371
E. ABOU EID, Droit de commerce entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 1, 2004,
art. 22, p. 113 et s.
1372
En raison même de son influence, elle fait l’objet de multiples règlementations contraignantes
avec des régimes spéciaux tenant à la nature du produit ou service : alcool, tabac, crédit…. Ou aux
conditions de diffusion : P. et F. GREFFE, La publicité et la loi, préf. M. LEVY, Litec, 11e éd., 2009 ;
Cass. crim., 14 oct. 1998, JCP, G, 1999, II, 10066, note Ph. CONTE.
-375-

représentant, et qu’il n’est pas tenu d’exécuter à peine de sanctions pécuniaires,


civiles et pénales1373 : Idée proche du droit français, où la loi du 25 janvier 1991 a
supprimé en son sein le formalisme d’immatriculation au registre spécial des agents
commerciaux1374 qui était autrefois nécessaire à la reconnaissance du statut d’agent
commercial1375.

721. Son inobservation ne pourra se traduire que par une éventuelle privation du
droit de se prévaloir de l’exclusivité : Situation à mettre en parallèle avec le fait que le
bénéfice du statut d’agent commercial n’est plus assujetti à la formalité
d’immatriculation au registre spécial des agents commerciaux1376, mais se trouve
toujours requise à titre informatif et comme mesure de police1377. Par conséquent,
cette durée imposée d’office à l’art. 31 C. com., ne concerne pas notre cas. Il en
résulte que le représentant commercial peut, à tout moment, effectuer cette inscription
en payant une redevance annuelle de somme de cinq cents milles livres libanaises,
quitte à ce que celle-ci produise des effets seulement à partir de ce moment1378.

722. Reste à savoir si l’abstention d’inscrire l’exclusivité pendant un certain


temps au point de créer une conviction que le représentant n’est pas exclusif, peut

1373
Antérieurement en France, pour pouvoir bénéficier du statut d’agent commercial, l’agent devait
être immatriculé à un registre spécial : Art. 4, al. 2 Décret 1985. L’immatriculation au dit registre était
une obligation, sous peine d’amende (contravention de 5 e classe) : F. FOURNIER, L’agence
commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 476.
1374
« Cette loi n’a pas subordonné l’application du statut d’agent commercial à l’accomplissement
d’une quelconque formalité administrative » : Cass. com., 7 juill. 2004, Bull. civ., IV, n° 146.
1375
Il en résulte un élargissement de l’application territoriale du dispositif, que la jurisprudence
avait déjà anticipé en supprimant l’exigence de l’inscription pour les agents commerciaux domiciliés à
l’étranger : Cass. com., 19 nov. 1997, D., Affaires, 1997, p. 77 ; Depuis un décret n° 2010-1310 du 2
nov. 2010, les agents commerciaux domiciliés à l’étranger, sans établissement en France et qui
n’exercent que temporairement et occasionnellement leur activité en France, sont dispensés de
l’immatriculation ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., p. 94 ; S. MEGNIN, Le contrat
d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 18.
1376
CA Caen, Ch. 01 Sect. civ., et com., 09/03367, 03 mars 2011 ; CA Bordeaux, Ch. civ., 02,
09/04270, 11 janv. 2011 ; Cass. com., 7 juill. 2004, Lettre distrib., sept. 2004 ; CA Paris, 14 mai 1999,
RJDA, 11/99, n° 1198.
1377
Cass. com., 7 juill. 2004, Défaut d'immatriculation des agents commerciaux, n° 02-17.107 (n°
1125 F-P+B), D., 2004, p. 2228 ; Le décret 1958 sanctionne d’une amende de la 5e classe les
déclarations inexactes (art. 11), l’omission ou le retard d’immatriculation, de modification ou de
radiation (art. 12), et d’une amende de la 3e classe l’omission sur les documents professionnels des
lieux et numéro d’immatriculation (art. 13).
1378
Juge de référé Beyrouth, décision n° 443, 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216 ; TI
Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
-376-

avoir pour effet de rendre l’exclusivité caduque, ou signifier une renonciation à celle-
ci, de sorte que l’inscription ne devient plus efficace1379? Il faut catégoriquement
répondre par la négative, car le non-usage d’un droit ne le fait pas perdre à son auteur
qui demeure libre d’en déterminer les moments d’exercice et d’abstention de manière
discrétionnaire1380 : Solution suivi par le juge du référé du Beyrouth, qui a considéré
que « le défaut d’enregistrement n’aboutit pas à perdre l’exclusivité, en signalant que
c’est l’ancienneté de l’usage qui tient compte de la propriété de la marque
enregistrée ou de l’exclusivité »1381.

723. Ainsi, la Cour de justice des communautés européennes va plus loin dans ce
sens où elle a considéré que « l’absence d’inscription ne doit pas porter atteinte à la
protection de l’agent commercial dans sa relation au mandat »1382. Dans le même
sens, vient la solution suivie pour les commerçants, où le défaut d’immatriculation ne
fait pas tomber la qualité du commerçant1383. Ainsi, il a été jugé que « le défaut
d’immatriculation au registre spécial des agents commerciaux prévu par l’article 4
du décret 1958 interdit seulement au mandataire de bénéficier des avantages
particuliers prévus par ce décret »1384. Mais cette décision est sans valeur

1379
En outre, l'immatriculation des agents commerciaux sur un registre spécial tenu au greffe du
tribunal de commerce (prévue par art. R. 134-6 C. com.), n'est plus une condition d'application du
statut ; elle ne conserve qu'une valeur administrative de « police professionnelle » : Cass. com., 7 juill.
2004, n° 02-17.107, Bull. civ., IV, n° 146 ; RJDA 2004, n° 134 ; D. 2004. 2228. Elle peut s'effectuer
par voie électronique (art. R. 134-13 C. com.,). Cependant, la Cour de cassation a jugé que l'article L.
134-16 du code de commerce, réputant non écrite toute clause contraire à certaines dispositions du
statut des agents commerciaux, n'interdit pas aux parties de subordonner la prise d'effet du contrat à
l'immatriculation de l'agent au registre spécial : Cass. com., 8 juill. 2003, Bull. civ., IV, n° 116. Quoi
qu'il en soit, ce contrat restait et reste consensuel, et peut se prouver par tout moyen : Cass. com., 19
janv. 1993, Bull. civ., IV, n° 11 ; Cass. com., 25 juin 2002, Bull. civ., IV, n° 110.
1380
Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 76.
1381
Juge de référé de Beyrouth, décision n° 151, 2007, Rev. al Adl, 2007.
1382
CJCE, 6 mars 2003, Rec. CJCE I, 2371.
1383
Cette solution objective, et quelque peu rassurante, est aujourd'hui remise en cause de manière
indirecte ; M. MAAMARI, Cours de droit commercial -Les actes de commerce, commerçant et fonds
de commerce- USEK, 2004 ; Th. DUBAELE, Commerçant, D., 2011 : La qualification de commerçant
suppose l'accomplissement d'actes de commerce, qui doivent alors s'effectuer suivant des conditions
matérielles déterminées.
1384
Cass. com., 13 nov.1990, D., 1990, IR, p. 279.
-377-

actuellement étant donné que la formalité d’immatriculation est sans conséquence sur
le bénéfice du statut d’agent commercial1385.

724. En d’autres termes, d’une part, c’est la pratique des actes commerciaux qui
donne la qualité au commerçant et d’autre part, c’est l’antériorité de l’utilisation de
l’exclusivité qui prouve et vérifie son acquisition1386. Mais il s’agit de signaler que le
non versement de la redevance annuelle 500.000 L.L dans un délai de deux mois à
compter de la date d'échéance de celle-ci, apporte l'annulation de l'enregistrement
conformément à l'article 4, alinéa 2 du décret 3417 du 20/7/20001387.

b- Le lieu de l’inscription

725. Avant la naissance de l’Etat Libanais et la fin du mandat Français, deux


décrets N. 2044 et N. 2067, émis le 19/7/1923 pour la construction et l’organisation
d’un office de protection des droits de propriétés intellectuelles, ont été la base de la
promulgation de l’arrêt N. 2385, daté du 17/1/1924. Ce dernier est relié au règlement
des droits des propriétés commerciales et industrielles, qui dans son article 53,
modifié par la loi du 31/1/1946, s’est interrogé sur la question de « l’inscription
auprès du directeur de l’office de protection sous forme de dépôt …»1388.
Ultérieurement, avec le décret-loi N. 34/67, suivant l’article 2, alinéa 3, le législateur
prévoit que l’inscription doit être faite au registre du commerce et suivant l’article 4,
alinéa 4, 1er, il en prévoit l’inscription dans un registre spécial qui sera établi au
ministère de l’économie et du commerce pour les sociétés et les établissements

1385
Cass. com., 7 juill. 2004, Lettre distrib., sept. 2004.
1386
Cass. Lib. Ch. 7, arrêt n° 41, 8/2/2001 ; TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 152, 5/4/2001, Rev. al
Adl, 2001 : « Ce qui est important est qu’il revient à chaque demandeur de prouver l’ancienneté de la
marque dans la durée antérieure au dépôt…c’est l’antériorité de l’usage qu’il faut prendre en
considération au cas où le dépôt d’une certaine marque n’est pas fait… » ; Cass. civ. lib, 5e Ch., arrêt
n° 20, 8/2/2000, éd. Sader, p. 333.
1387
Art. 4, al. 2 du décret 3417 du 20/07/2000 : « Une somme de 500.000 L.L doit être versée
comme taxes dans un délai de deux mois à compter de la date d'échéance de la redevance annuelle,
sous peine d'annulation de l'enregistrement ».
1388
Arrêt n° 2385, du 17/1/1924, art. 53, modifié par la loi du 31/1/1946, J.O.
-378-

désirant s’occuper de la représentation commerciale au Liban1389. La même solution a


été rendue dans une espèce équivalente, écartant le grief du défaut d’immatriculation
en France de l’agent exerçant en Allemagne1390.

726. Mais, aucune autre précision n’est faite, quant au registre auquel il faudrait
se référer. En effet, il existe un registre auprès de chaque tribunal de commerce au
Liban, c’est-à-dire huit registres, un par « mohafazah »1391. Cependant, d’après les
articles 22 et suivants du Code de commerce, relatifs au registre du commerce,
l’inscription doit se faire au registre du tribunal dans le ressort duquel le représentant
a son centre d’activités, ou son principal établissement1392 ; en effet, il est normal que
le représentant dont l’exclusivité englobe le territoire du lieu où il a son centre,
effectue l’inscription, d’abord, dans ce lieu1393.

1389
En France, le registre spécial des agents commerciaux a été institué par le décret n° 58-1345 du
23 déc. 1958 (D. 1959.132), précisé pour l'Alsace-Moselle par le décret n° 64-29 du 10 janv. 1964 (D.
1964.74), remanié par un décret n° 68-765 du 22 août 1968 (D. 1968.268) et complété par un arrêté du
même jour (J.O 17 sept.).
1390
Cass. com., 19 nov. 1996, JCP, éd. E., 1997, Pan. 30.
1391
La Mohafazah est une division administrative (Administration territoriale) dont l’équivalent en
France serait la région. Elle est généralement divisée en plusieurs Caza (Qada’a) dont son équivalent en
France serait le département. Chacune des Mohafazah est dirigée par un Mohafez nommé par décret
pris en conseil des ministres, titre qui correspond au grade de préfet en France : Le registre des
transporteurs et des loueurs est tenu par le préfet de région (Décr. 1999, art. 1er). Le nombre de
Mohafazah est passé de cinqt à huit par la loi 522 du 16 juill. 2003.
1392
Idée identique au droit français, Art. R. 134-6 C. com.: Les agents commerciaux se font
immatriculer, avant de commencer l'exercice de leurs activités, sur un registre spécial tenu au greffe du
tribunal de commerce dans le ressort duquel ils sont domiciliés. Ils produisent à cet effet une
déclaration dont un récépissé leur est délivré ; Art. R123-32 : « Dans le mois qui précède la date
déclarée du début de l'activité commerciale et, au plus tard, dans le délai de quinze jours à compter de
la date du début de cette activité, toute personne physique ayant la qualité de commerçant demande
son immatriculation au greffe du tribunal dans le ressort duquel est situé :
1° Soit son principal établissement ;
2° Soit, dans les cas prévus aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 123-10, son local
d'habitation ;
3° Soit, à défaut d'établissement ou de local d'habitation déclaré dans les cas prévus à l'article L.
123-10, sa commune de rattachement au sens des articles 23 et s. ».
1393
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 13 ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306
; Décr. Fr. 1999, art. 1 et 5 : Les entreprises doivent s'inscrire dans la région où est situé leur siège ;
concernant les entreprises étrangères établies en France, le lieu d'inscription est celui de leur
établissement principal : C. SCHIMITTER, Transports routiers de marchandises, D., mai 2007, sept.
2011, n° 67.
-379-

727. Appréciation critique : Nous voyons une certaine divergence de la


pratique avec la théorie. En effet, la solution que nous venons d’exposer, repose
principalement sur une donnée, celle de la vocation du registre du commerce et de la
publicité qu’elle est supposé rendre, sachant que l’inscription de la clause
d’exclusivité n’est pas pour justifier sa preuve mais pour sa publication1394. Par
conséquent, l’inscription au dit registre a un caractère déclaratif1395. Or, il ne s’agit
pas du tout là d’une donnée évidente. En effet, le registre du commerce, qui est
supposé assurer une publicité assez suffisante pour la protection des tiers, en réalité,
ne rend pas cette fonction de manière efficace. Cela est dû à la manière dont est tenu
le registre, et au manque de coordination entre les divers registres tenus auprès des
divers tribunaux de commerce au Liban.

728. D’une part, le registre est tenu par ordre des établissements, chacun ayant
son numéro. Une recherche peut éventuellement avoir lieu à partir du nom du
commerçant. Or, comment un commerçant peut-il savoir, pour une marque donnée, si
elle a ou n’a pas un représentant exclusif ? Doit-il pour cela consulter tous les dossiers
se chiffrant en milliers, depuis que le registre en question existe surtout avec le
manque du système informatique qui facilite et simplifie la liaison entre les divers
registres de chaque Caza.

729. D’autre part, si l’inscription dans un registre produit ses effets sur tout le
territoire libanais, il faudrait, pour le commerçant à supposer la première difficulté
surmontée, parcourir tout le territoire libanais, et consulter tous les registres qui y
existent. En effet, il n’existe aucune coordination, ni communication entre les divers
registres des différents Cazas. Il n’y a pas d’échange de renseignements ou
d’informations susceptibles de permettre à un commerçant de Caza de Beyrouth par
exemple, de connaître ceux qui en auraient besoin et les renseignements qui
l’intéresseraient, chez lui, mais qui seraient inscrits aux divers registres des autres
Cazas.

1394
CA Beyrouth, Ch. 3, arrêt n° 9/2008, Rev. al Adl, 2008.
1395
TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 266 du 29/10/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 3 : « Attendu que la
doctrine et la jurisprudence libanaise se mettent d’accord sur l’antériorité de l’utilisation comme
principe déclaré en droit libanais, pour l’acquisition du droit de propriété de la marque commerciale.
Le rôle de l’inscription se limite à la déclaration du droit non pas sa mise en place » ; TI Mont Liban
12/7/2004 : « …à condition que l’utilisation soit public et continue ».
-380-

730. Par conséquent, si le registre du commerce rend une publicité efficace


s’agissant du premier but tel que nous l’avons montré plus haut, la publicité, quant au
second but est illusoire. Par conséquent aussi, en déplorant que la publicité réelle soit
sacrifiée pour la tenue du registre, au lieu que cette dernière soit conçue en vue
d’assurer une meilleure publicité. Raison pour laquelle, le législateur s’est intervenu
en imposant l’inscription de chaque contrat de représentation commerciale et sa
clause d’exclusivité au Ministère de l’économie et du commerce en plus de son
inscription au registre du commerce de chaque Caza.

731. Cette inscription secondaire est venue pour éviter le recours aux différents
registres du commerce des différents Cazas, puisqu’il n’y a qu’un seul registre pour
l’unique ministère: idée proche qu’en France, où existe un registre spécial tenu pour
les agents commerciaux, distinct du registre du commerce1396. Mais comme il n’existe
pas sur ce point de règlementation particulière de l’exclusivité en France, il n’est pas
fait usage de ce registre spécial pour la protection de l’effet de la clause d’exclusivité
à l’égard des tiers1397. L’inscription au ministère de l’économie et du commerce a
rendue aux effets qui en résultent de la matière leur juste dimension et valeur, et nous
favorisons une avancée technologique d’Internet et d’informatique afin de diminuer le
déplacement des gens et faciliter leur travail, sachant que la rapidité est l’élément
fondamental du commerce1398. Une réforme en ce sens est souhaitable, malgré que
cette inscription a simplifiée un peu le problème de renseignements puisque le
ministère est devenu un centre général de référence pour tout le Liban.

1396
Art. R. 134-6 C. com. : « Les agents commerciaux se font immatriculer, avant de commencer
l'exercice de leurs activités, sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce dans le
ressort duquel ils sont domiciliés. Ils produisent à cet effet une déclaration dont récépissé leur est
délivré ».
1397
CA Versailles, 15 sept. 2011, D., 09/00224.
1398
En France, les déclarations relatives à l'immatriculation des agents commerciaux, à la
modification de leur situation ou à la cessation de leur activité peuvent désormais être effectuées par
voie électronique, dès lors qu'elles peuvent être transmises et reçues par cette voie (Décr. du 23 déc.
1958, art. 10-1 nouv. réd. Décr. n° 2005-77 du 1er févr. 2005, art. 42, J.O, 2 févr.).
-381-

Paragraphe 2 : La sanction de l’exigence

732. Sur le plan du texte, l’alinéa 3 de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 dispose


que « la clause d’exclusivité n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été
dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du commerce ».
A première vue, nous remarquons une opposabilité « inconditionnelle », celle qui
s’impose du seul fait qu’une inscription a pu avoir lieu au registre du commerce. Cela
revient à dire que, d’après ce texte, l’inscription au registre du commerce est une
formalité indispensable pour une opposabilité « inconditionnelle » du seul fait de la
constatation de l’inscription en exigence de la simple connaissance. Or rien
n’empêcherait d’apporter les preuves nécessaires qui sont de nature à assurer le but
visé par l’inscription1399 - « effet sous condition ».

733. Mais vu que le législateur libanais a voulu apporter une protection absolue
au réseau de distribution du représentant commercial, il lui en a fait bénéficier même
en dehors de l’inscription de cette exclusivité, étant donné que l’inscription de cette
clause n’est pas pour prouver son existence mais pour la déclarer et la publier afin de
la rendre opposable aux tiers1400. Par cette publication résultant de l’inscription, le
représentant commercial garantit mieux son droit à l’exclusivité1401, et à défaut il
appartient au représentant d’apporter la preuve des éléments nécessaires pour la
rendre opposable et interdire aux tiers de participer à la violation des obligations
contractuelles des parties.

734. En contrepartie, force est de constater que, même en matière de


représentation commerciale, l’effet de l’exclusivité non-enregistrée puisse être
envisagé, ce qui nous oblige à revenir à ces mêmes règles tirées des principes
généraux de l’effet relatif des contrats. Le législateur a exigé l’information aux tiers
par voie d’inscription au registre du commerce, bien que la protection assurée aux

1399
Néanmoins les juges exigent en pratique la preuve de la connaissance par le revendeur de
l’interdiction, ce qui est conforme au principe d'opposabilité : Cass. com., 9 oct. 2001, Contrats, conc.
consom. 2002. comm. 8, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
1400
CA Beyrouth, Ch. 3, arrêt n° 9/2008, Rev. al Adl, 2008.
1401
Trois idées sous-tendent en permanence le RCS: sécurité, publicité et transparence : P. BEDER,
Registre du commerce et des sociétés, D., 2012, n° 2.
-382-

tiers par ce registre soit contestable ; vu que l’étude au Liban, de l’effet de la clause
d’exclusivité en dehors de l’inscription est intéressante à plus d’un égard. D’où
l’utilité d’exposer ce cas (A) pour en savoir sa portée sur le décret-loi N. 34/67 (B).

A- L’exposé

735. La justification de l’effet de principe de l’exclusivité non-enregistrée à


l’égard des tiers, découle du fait que le législateur avait admis purement et
simplement le principe en question qui engage la responsabilité de tout importateur
ayant violé les termes quand celle-ci est enregistrée, et par effet dont les conditions
devaient être prouvées, à défaut d’inscription. Or à cet égard, le législateur a, à titre
exceptionnel, et s’agissant uniquement de la représentation commerciale, substitué le
principe de l’effet à l’égard des tiers de la clause d’exclusivité au principe de l’effet
relatif du contrat. Donc, le législateur a, de ce fait, créé une obligation pure et simple,
celle de respecter une clause d’exclusivité, même si l’on a été étranger à la convention
de représentation.

736. Le décret-loi N. 34/67 est une législation spéciale qui ressort du Code de
commerce général. Il est venu résoudre une question privée rattachée à la
représentation commerciale. Vu qu’en principe, les textes spéciaux sont interprétés
d’une manière stricte suivant l’adage : Exceptio est strictissimae interpretationis1402,
cette interprétation stricte de ce texte spécial aboutit à son application de manière
impérative1403.

737. Tout ce qui est omis par le législateur dans le texte spécial nécessite le
recours au texte général pour se renseigner, vu que l’interprétation stricte n’élimine

1402
Adage classique juridique latin qui signifie que l’exception est d’interprétation très stricte.
1403
E. ABOU EID, Code de procédure civile entre le texte et la jurisprudence et la doctrine,
Interprétation de l’article 4, t. 1, éd. 2002, p. 13 et 14 pour l’interprétation des textes spéciaux et
exceptionnels ; Dans le même sens F. HERMAN, Rép. Dr.fr., Verbis Lois et décrets, 1898, Légion
d’Honneur-Lyon, 2e tirage 1924, Paris, Sirey, t. 26, n° 359 : « L’un des procédés d’interprétation les
plus surs est, sans contredit, celui qui résulte du rapprochement du texte à interpréter et des autres
dispositions légales relatives à la même matière ou à des matières analogues », cité par E. ABOU EID,
Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le
décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 5, p. 134.
-383-

pas l’utilisation du texte de loi générale1404. Solution justifiée par M. le professeur


CARBONNIER : « La loi spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement,
et ses lacunes seront comblées par un appel au droit commun »1405. Alors que la loi
générale, n’a pas évoqué notre cas, celui du défaut de l’immatriculation de la clause
d’exclusivité, l’idéal sera de se contenter des dispositions du décret-loi N. 34/67 et de
les interpréter restrictivement. Idée adoptée par M. le professeur
CARBONNIER : « …La maxime signifie d’abord que les exceptions admises par la
loi doivent être renfermées dans leurs termes littéraux »1406.

738. La question de l’opposabilité de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers


par son inscription au registre du commerce, ressort d’une loi spéciale qui s’oppose à
la loi générale1407. Attendu que l’exception (le défaut d’immatriculation) à ce principe
a été évoquée en doctrine et a été débattue par une partie de la jurisprudence, voici ce
qui nécessite de notre part un regard pour en clarifier l’ambiguïté. Cette dernière a été
soulevée d’une manière indirecte dans le cas de reconduction tacite d’un contrat de
représentation commerciale arrivé à son terme. Faut-il alors publier de nouveau la
clause d’exclusivité par inscription au registre du commerce ?

739. Attendu que l’article 2 du décret-loi N. 34/67 n’a pas cité tacitement
l’obligation d’une deuxième publication de la clause d’exclusivité en cas de
renouvellement du contrat mais a imposé l’obligation d’inscription de la clause
d’exclusivité du contrat principal ; attendu que cet article appartient à une loi spéciale
qui demande son interprétation d’une manière rigoureusement stricte : il sera utile aux
tribunaux de la traiter dans le même sens, puisqu’il est défendu de distinguer là où le

1404
T. com., Beyrouth, décision n° 268, 29 avr. 1971, Rev. al Adl 1971, p. 714.
1405
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 196.
1406
Idem, p. 301.
1407
Contrairement à ce que l’on serait tenté de croire, c’est la loi spéciale qui a le plus de force :
elle est plus solide, étant mieux définie. Dans un premier sens, qui est quantitatif, la loi spéciale (lex
specialis) s’oppose à la loi générale en ce qu’elle régit seulement une fraction de l’objet de celle-ci, elle
traite de l’espèce et non de genre. Dans un second sens, qui est qualitatif, la loi spéciale s’oppose à la
loi générale, représentant le droit commun, comme l’exception au principe : Idem., p. 82 et 83, n° 22.
-384-

législateur ne le fait pas, conformément à l’adage : Ubi lex non distinguit, nec nos
distinguere debemus1408.

740. Cette notion résulte de la théorie suivant laquelle il est interdit dans les
textes de lois spéciaux d’élargir l’interprétation, cas du bail et de la location
gérance1409, notamment la gérance libre, qui ont un caractère exceptionnel1410. Là
encore cette question a été évoquée avec une divergence d’avis en cas de tacite
reconduction de la location-gérance : d’un côté, la répétition de publication est
obligatoire1411, c’est dire qu’il faut publier de nouveau le contrat de gérance libre -
renouvelé tacitement- vu qu’il forme un nouveau contrat1412. De l’autre côté, il n'y a
pas lieu de renouveler la publication du contrat1413, avis stable pour la
jurisprudence1414. Sur cette différence, les deux professeurs FABIA et SAFA, ont

1408
Adage classique juridique latin signifiant que là où la loi ne distingue pas, nous non plus ne
devons pas distinguer.
1409
Lorsque le locataire-gérant continue son exploitation, après l'échéance du terme, sans qu'un
nouveau contrat ait été conclu, il y a tacite reconduction au sens de l'article 1738 du code civil. Le
premier contrat prend fin à son échéance et il se forme tacitement un nouveau contrat au contenu
rigoureusement identique au précédent mais qui est à durée indéterminée. Ce texte ayant été écrit pour
le bail d'immeuble, mais la jurisprudence s'est clairement prononcée pour l'extension ; et ce, que celle-
ci ait été prévue par le bail (Cass. com., 11 juill. 1967, Bull. civ., III, n° 289) ou non (Cass. com., 7
juill. 1966, Bull. civ., III, n° 350 ; D. 1966. Jurispr. 555 ; JCP 1966, II, 14842, note J. NECTOUX ;
RTD com., 1966. 908, n° 7, obs. A. JAUFFRET).
1410
Trib. Baux Baabda, décision n° 349 du 14/11/1960 ; F. ABI RACHED, Annexe des Baux, t. 1,
p. 367.
1411
Par la tacite reconduction du contrat, un nouveau contrat nait par l’application de l’art. 8 de la
loi de 1956, qui ne distingue pas entre la première location et les autres successives : J. HAMEL, G.
LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de droit commercial, D., 1966, t. 2, p. 55 ; R. SAVATIER, Sem.
Jur., 1964 -2-13780. Ces avis doctrinaux se sont basés sur la protection des droits des tiers, notamment
les créanciers du locataire-gérant : E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence
et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 71.
1412
CA Paris, 22 oct. 1962, D., 1963, p. 49 ; T. com., Nice, décision du 25 oct. 1960, Sem. Jur., 2-
2316. En revanche, les choses se compliquent sur le terrain du bail commercial où une jurisprudence
constante de la troisième chambre civile considère que la tacite reconduction n'emporte pas formation
d'un nouveau contrat... : Cass. civ., 3e ch., 10 févr. 1975, Bull. civ., III, n° 70 ; 23 juin 1981, Gaz. Pal.
1982. I. 52 ; 18 mars 1998, Bull. civ., III, n° 63.
1413
A. REYGROBELLET, Partie 7, Fonds de commerce, Location-gérance du fonds de commerce,
D., 2010, Dossier 792 ; M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien, t. 1,
1970, p. 446, n° 237 A : « C’est à l’expiration de la durée généralement brève de 1 à 3 ans que la
location-gérance prend fin, mais le contrat peut se renouveler par tacite reconduction, sans qu’il soit
nécessaire d’effectuer une nouvelle publicité » ; Le renouvellement par tacite reconduction du contrat
de location-gérance n’impose pas une nouvelle publicité par voie de déclaration modificative : Adde,
Registre du commerce, D., 2e éd., n° 52.
1414
La Cour d’Aix, a tracé les lignes primaires de l’avis stable de la jurisprudence actuelle en
considérant que : seul le contrat conclu au début de la location-gérance, à l’exclusion des accords
-385-

adopté le premier avis de la doctrine française en cas de représentation commerciale,


notamment celui du renouvellement de la clause d’exclusivité : « Au cas où le contrat
d’agence, fait à durée déterminée, est prorogé, ou renouvelé, mention de la
prorogation ou de renouvellement doit être faite au registre du commerce pour
maintenir l’exclusivité opposable aux tiers »1415.

741. A première lecture, nous constatons que ces deux professeurs ont mis en
rapport la modification apportée au contrat avec l’opposabilité de la clause
d’exclusivité ; de manière qu’il faille mentionner le renouvellement ou la prorogation
au registre du commerce afin de pouvoir tenir l’opposabilité de cette clause par
rapport aux tiers. Nous pensons que cette idée s’attache à la continuité de la publicité
et son principe d’opposabilité. Nous critiquons cette pensée sur deux points : Sous son
aspect général, puisque les professeurs FABIA et SAFA n’ont pas séparé la
« prorogation » du « renouvellement »1416, ils l’ont mise au même niveau dans le cas
de l’obligation d’une nouvelle inscription. Alors que la prorogation de contrat
correspond simplement à l'allongement conventionnel de la durée d'un contrat à durée
déterminée ; le renouvellement s'agit d'un nouveau contrat dont le contenu peut être
différent ou non du contrat initial1417. Par ailleurs, le législateur libanais n’a pas
mentionné dans le texte du décret-loi N. 34/67, le terme « prorogation », mais il s’est

ultérieurs des parties destinées à maintenir le locataire-gérant en place, était visé par l’art. 8 de la loi du
20 mars 1956, texte dérogatoire au droit commun et devant par suite recevoir une interprétation
restrictive : CA Aix, 9 déc. 1964, Gaz. Pal., 1964, 1- 329 ; Arrêt confirmé en cassation : « Attendu que
les articles 2 et 8 de la loi du 20 mars 1956 qui imposent l’obligation de publier le contrat de location-
gérance n’imposent pas, en cas de tacite reconduction du contrat, une nouvelle publicité ; aucune
modification n’étant dans ce cas intervenue dans la nature de l’exploitation ni dans la personne de
l’exploitant depuis la publication initiale » : Cass. com., 7 juill. 1966, D. 1966, p. 555 ; Dans le même
sens était l’avis de la Cour d’appel de Paris : Aucune modification n’étant intervenue dans
l’exploitation ou dans la personne du gérant, et alors que ce dernier continuait à être inscrit au registre
du commerce, les formalités de publicité n’avaient pas à être renouvelées : CA Paris, 29 mai 1964,
Sem., Jur., 1966-2-14842.
1415
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, art. 22, n° 8.
1416
V. supra n° 617 et 618.
1417
Cass. civ., 1e Ch., 15 nov. 2005, n° 02-21366, Prorogation, reconduction, ou renouvellement de
contrat : un peu d’ordre s'il vous plait ! : « La prorogation de contrat correspond simplement à
l'allongement conventionnel de la durée d'un contrat à durée déterminée. La prorogation doit donc
être prévue par avenant, lequel détermine la nouvelle échéance du contrat et, le cas échéant, de
nouvelles modalités juridiques. Tandis que le terme "renouvellement" vient du latin novus ou novellus
(nouveau). Il s'agit d'un nouveau contrat dont le contenu peut être différent ou non du contrat initial.
Le renouvellement peut être tacite ou exprès tant que son principe est prévu par un accord exprès des
parties, notamment dans le contrat initial ».
-386-

interrogé sur le terme de renouvellement : «…. le refus de son mandant de renouveler


le contrat de représentation l’a empêché d’en tirer le bénéfice de ce succès… ».

742. Nous abordons ces thèmes pour en dire que, les effets résultants de
« prorogation » ou « renouvellement » ne sont pas les mêmes, et n’aboutissent pas au
même résultat1418. En d’autres termes, l’avis doctrinal des professeurs FABIA et
SAFA s’il doit être pris en considération, le sera en cas de renouvellement du contrat
à durée déterminée par tacite reconduction. Le cas échéant un nouveau contrat est né,
et doit obéir aux dispositions qui règlent le contrat original, notamment l’inscription
au registre du commerce1419. Tout en rappelant, sur ce point, que le non-
renouvellement d’inscription au registre spécial des agents commerciaux ne saurait
suffire à lui retirer la qualité d'agent commercial1420.

743. Cette contestation de l’idée d’opposabilité à l’égard des tiers de la


représentation exclusive en dehors de toute inscription au registre du commerce, est
propre au droit libanais. Il n’est pas utile de répéter qu’en principe, pour que le contrat
soit opposable aux tiers, il est nécessaire d’être publié par son inscription au registre
du commerce. Suivant l’article 22 du Code de commerce1421, ce registre étant un
moyen de diffusion, permet au public la collecte des informations disponibles sur
toutes les sociétés commerciales exerçant sur le pays. Il ne deviendra, au sens de cet
article, un moyen qui rend opposable les dispositions inscrites ci-dessus, sauf si,
existe un texte tacite en ce sens1422. Cas de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 où
n’existe pas l’obligation de renouvellement de la clause d’exclusivité en cas de
renouvellement du contrat. En d’autres termes, si la loi était silencieuse sur cette

1418
Cass. civ., 3e Ch., 5 juin 2002, n° 00-20.806, D., 2002, 2471, obs. Y. ROUQUET ; JCP 2003,
éd., E. n° 807, note M. KEITA ; CA Versailles, 5 déc. 2002, RJDA 2003, n° 417.
1419
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 1, 17/2/1972, Drambawi c /Chams, Rec. Baz, nº 20, p. 105.
1420
CA Paris, Ch. 05 A5, déc. 2007, D., n° 05/22422.
1421
L’art. 22 C. com. : « Le registre du commerce permet au public de recueillir des renseignements
complets sur toutes les maisons de commerce et les fonds de commerce fonctionnant dans le pays.
Il est aussi, quand la loi le déclare expressément, un instrument de publicité destiné à rendre
opposables aux tiers les mentions qui y sont contenues ».
1422
E. ABOU EID, Droit de commerce entre le texte, la jurisprudence et la doctrine, explication de
l’art. 22, t. 1, 2004, p. 113.
-387-

question, et n’a pas voulu l’obligation d’une deuxième publication, il sera interdit
d’imposer cette dernière sous peine de considérer le contrat inopposable aux tiers.

744. C’est dire, en dehors des cas exceptionnels cités par des textes juridiques,
que le défaut d’enregistrement ne donne pas le droit à autrui de s’inspirer du principe
de l’inopposabilité du contrat. C’est ainsi que MM. les professeurs FABIA et SAFA
justifient notre pensée en considérant que « sauf disposition particulière de la loi,
l’inscription au registre du commerce n’a pas la valeur d’une publicité légale, ni ne
saurait dispenser d’une des autres mesures de publicité légalement requises ; hors les
cas exceptionnels prévus par la loi, l’omission de l’enregistrement ne permet pas aux
tiers d’invoquer l’inopposabilité de l’acte »1423. Reprenons cette dernière phrase :
l’omission de l’enregistrement ne permet pas aux tiers d’invoquer l’inopposabilité de
l’acte, nous en déduisons la réciproque suivante : en cas de défaut d’inscription, la
clause d’exclusivité reste opposable.

745. Par conséquent, si une situation de fait est capable de produire des effets, il
est plus logique de lui reconnaître ces effets s’il est prouvé que si elle est simplement
présumée. D’ailleurs, une telle solution n’est pas incompatible avec un système de
publicité, étant donné que le système de publicité, qui nous intéresse tend à faciliter la
preuve d’éléments reconnus valides antérieurement à l’inscription1424. En réalité, la
publicité résultant de l’inscription produit un effet absolu qui exclue toute preuve
contraire, même évidente. A défaut d’inscription, cette preuve sera admise. En effet, il
faut noter sur ce point, que l’omission d’inscription de la clause d’exclusivité n’efface
pas le droit du représentant commercial ni à cette exclusivité, ni à la protection issue

1423
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 128, mars 1971, sous art. 2, n° 10.
1424
Le système de publicité du registre foncier, du moins en matière de renseignements dont la
publicité est laissée à la discrétion du commerçant. En effet, s’agissant du registre foncier, les actes ne
sont pas valables, même entre les parties, que s’ils ont été dûment enregistrés. Au surplus, même dans
ce cas, les actes devant être enregistrés au registre foncier produisent des effets en dehors de toute
inscription, au cas d’intention de nuire de la part des parties ou des tiers. Il en est ainsi conformément à
la jurisprudence libanaise abondante, à cet égard, concernant la nullité de la seconde vente d’un même
immeuble effectuée malgré la connaissance de l’existence de la première vente non-enregistrée avec
intention de nuire.
-388-

d’elle1425. Ce qui veut dire que la publicité n’est pas un élément indispensable pour
l’opposabilité de la clause d’exclusivité vu qu’elle produit effets en dehors de toute
inscription et sa violation par autrui engage sa responsabilité. Mais, la situation se
complique quand il sera demandé au représentant un fait prouvant que la protection
de ces droits est assurée. Voyons la portée de la qualité « indispensable » comme
condition de la publicité de la clause d’exclusivité.

B- La portée

746. Avec la législation libanaise, et notamment avec le décret-loi N. 34/67, la


situation se différentie. Ce dernier est venu purement et simplement déclarer
l’opposabilité aux tiers dans les limites du principe de l’effet relatif du contrat. Il en
prévoit l’inscription pour porter à la connaissance des tiers l’existence de celle-ci en
vue de s’y conformer. En revanche, les réseaux de distribution se caractérisant par un
rapport d'exclusivité, leur atteinte peut affecter plus particulièrement l'exécution de
deux types d'obligations1426, soit de manière directe soit indirecte1427.

747. L'atteinte directe correspond à l'hypothèse classique d'un distributeur


parallèle qui se fournit personnellement auprès d'un membre du réseau. La violation
de l'exclusivité résulte directement de l'action du distributeur non sélectionné, tiers au
réseau1428. A l'inverse, l'atteinte est indirecte lorsqu'elle ne résulte pas de la seule
action de son auteur. Se trouve notamment visé celui qui ne commercialise pas
personnellement les produits concernés par l'exclusivité, mais favorise délibérément

1425
Dans le même sens, il a été jugé que le non renouvellement d’inscription au registre spécial des
agents commerciaux, ne saurait suffire à lui retirer la qualité d'agent commercial : CA Paris, Ch. 05 A
5, déc. 2007, D., n° 05/22422.
1426
Sujet traiter au cours de notre premier chapitre, mais on peut les citer de façon à éclairer notre
chemin de travail : En premier lieu, se trouver affectée l'obligation d'exclusivité qui interdit à chaque
distributeur sélectionné de revendre à des distributeurs non sélectionnés (art. L. 442-6-I, 6° C. com.).
En deuxième lieu, se trouver affectée l'obligation d'exclusivité qui interdit au promoteur du réseau de
fournir des tiers non sélectionnés et lui impose de tout mettre en œuvre pour assurer l'étanchéité de son
réseau : N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, op. cit.
1427
L. MAUGER-VILPEAU, Le revendeur non agréé, D., 2000, p. 341 : un concurrent qui profite
des avantages du réseau sans en supporter les contraintes.
1428
Cass. com., 12 juill. 1993, Bull. civ., IV, n° 295 ; Cass. com., 15 mars 1994, Bull. civ., I, n° 108.
-389-

la commercialisation par un autre distributeur non sélectionné, contribuant ainsi à la


violation par ce dernier de l'obligation d'exclusivité. Le développement de l'Internet et
des sites d'enchères en ligne est de nature à en fournir des illustrations1429.

748. L'ensemble des concepts évoqués peut s'analyser comme autant


d'applications de la théorie de la « tierce complicité ». Lorsqu’un distributeur non
sélectionné (tiers), qui achète des produits auprès du distributeur sélectionné, se rend
bien complice de la violation de l’obligation contractuelle de ne pas les revendre hors
réseau1430. Le distributeur engage sa responsabilité contractuelle1431, le tiers engage sa
responsabilité délictuelle1432. C'est l'hypothèse de la tierce complicité, qui n'impose
pas à un tiers au contrat d'exécuter les obligations nées de celui-ci mais de respecter
les droits nés de la convention conformément au principe d'opposabilité du contrat
aux tiers1433. Pour autant, la mauvaise foi du débiteur contractuel est-elle une
condition de la tierce complicité ?

749. L’examen des conditions de l’opposabilité à l’égard des tiers de la


représentation commerciale exclusive suppose réalisée une condition préalable, celle
du défaut d’inscription. En effet, on a pu admettre un tel effet à raison de la
constatation que l’inscription fait créer une présomption de mauvaise foi à charge de

1429
CA Paris, 3 sept. 2010, n° 08/12822, CCE 2010, n° 110, obs. A. DEBET ; Contrats, conc.
consom. 2010. comm. 247, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; JCP G 2010. 1111, note J. HUET, qui
retient, sur le fondement de l'article L. 442-6-I, 6° du code de commerce, la responsabilité civile de la
société Ebay, au motif que de nombreuses ventes de parfums de marque réalisées par l'intermédiaire du
site portaient une atteinte illicite aux réseaux de distribution sélective mis en place par les enseignes de
parfumeurs. En l'espèce, la violation des réseaux par la société Ebay, n'est pas directe, puisqu'elle n'est
pas venderesse des produits litigieux, mais seulement indirecte, en ce qu'elle favorise, par son site
d'enchère, la violation des réseaux par des annonceurs : cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE-
LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, op. cit., n° 110.
1430
CA Paris 22 oct. 1991, D., 1992, somm., p. 394, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 13 mars 1979,
D., 1981, 1, note Y. SERRA.
1431
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 615 : le distributeur doit
être tenu de ne pas revendre à des distributeurs non sélectionnés (ventes hors réseau).
1432
Sur le fondement d’une faute délictuelle - art. 1382 C. civ : Tout fait quelconque de l'homme,
qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; Dans le même
sens, G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 788.
1433
F. TERRE., Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis
Dalloz, 2009, n° 494 ; B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, Droit civil, Les obligations, Contrat,
6e éd., Litec, 1998, n° 1487 s.
-390-

toute personne qui violerait l’exclusivité ainsi enregistrée1434. Ainsi, à plus forte
raison, la preuve certaine de cette mauvaise foi devait pouvoir produire le même effet,
où ne serait pas logique que, si cette situation est réellement prouvée vraie, elle ne
puisse pas être opposable.

750. Cela ne doit pas nous conduire à méconnaître le caractère irréfragable de la


présomption ainsi créée : la présomption irréfragable de mauvaise foi sanctionne la
négligence de méconnaissance de l’exclusivité1435. Cette idée est la réciproque de
l’article L. 330-3 C. com., qui, en exigeant la communication d’informations sincères,
vise la bonne foi du débiteur des informations plus que l’exactitude de celles-ci. Les
juges reprennent cette considération en décidant que le débiteur de l’information est
tenu d’une obligation de moyens1436 et ne peut se voir reprocher des erreurs
d’estimation non fautives1437.

751. En ce cas, les juges retiennent que l'approvisionnement est irrégulier.


Certes, un membre du réseau n'a pas sciemment manqué à ses obligations
contractuelles puisqu'il ignorait la qualité de distributeur hors réseau de son
contractant. Cependant, le manquement contractuel existe dans la mesure où
l'obligation d'exclusivité, obligation de ne pas faire, est nécessairement une obligation
de résultat dont la violation constitue un manquement, même s'il n'est pas pour autant
la source d'une responsabilité pour le débiteur1438. La responsabilité du tiers ne se
limite donc pas aux hypothèses d'une fraude avec un membre du réseau, laquelle

1434
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, p. 37.
1435
Idem.
1436
Cass. civ., 5 déc. 2000, RJDA, 2001, n° 440 ; CA Paris, 29 oct. 1992, D., 1995, somm. p., 75,
obs. D. FERRIER.
1437
CA Paris, 22 sept. 1992, D. 1995, somm. p. 78, obs. D. FERRIER ; Rapp. Douai, 6 oct. 1992,
D. 1995, somm. p. 75, obs. D. FERRIER: Responsabilité contractuelle d’un franchiseur engagée pour
fourniture d’informations inexactes.
1438
V. art. 1147 et 1148 C. civ. Reste au débiteur à établir que l'inexécution est due au fait du tiers.
Si ce fait est constitutif d'une force majeure, le débiteur sera exonéré. Dans le cas contraire, il engagera
sa responsabilité vis-à-vis du fournisseur, mais pourra agir contre le tiers, obtenant ainsi une sorte «
d'exonération partielle indirecte » : J. FLOUR, J.-L. AUBERT et E. SAVAUX, Droit civil, Les
obligations, t. 3, Le rapport d'obligation, 7e éd., Paris, Sirey, D., 2011, n° 215.
-391-

supposerait une commune mauvaise foi1439. Ce qui importe, c'est que


l'approvisionnement résulte d'une violation des obligations nées du réseau, et que la
mauvaise foi du distributeur parallèle ne fasse aucun doute, ce qui est le cas s'il a
connaissance du réseau1440.

752. En effet, la réunion de deux éléments est suggérée pour que la distribution
parallèle soit sanctionnée sur la base de la violation par le distributeur parallèle de son
devoir d'inviolabilité des contrats constitutifs du réseau : un élément intentionnel, à
savoir la connaissance du réseau par le tiers distributeur, un élément matériel, à savoir
la participation à la violation de ses obligations par l'un des membres du réseau1441.

753. Nous venons de traiter dans cette deuxième section d’un cas qui, à notre
avis, est l’exception à l’exception. Le décret-loi étant un texte spécial, exceptionnel,
visant l’opposabilité à l’égard des tiers par l’inscription de la clause d’exclusivité,
l’exception en sera celle de défaut d’inscription de cette clause. Question que
retrouvent souvent les tribunaux libanais vu la différence d’avis entre la doctrine et la
jurisprudence. La réponse relève du pouvoir de l’appréciation fondamentale des juges
en la matière et leur manière d’interpréter les textes spéciaux.

754. Par ailleurs, le fait que l’appréciation de la faute ne doit plus avoir lieu
selon la distinction entre importateurs s’étant adressé en dehors de la zone déterminée
-aux marchés internationaux- pour retenir la responsabilité dans le premier cas, et la
rejeter dans le second. Le premier cas peut simplement servir à agir aussi contre le
représenté pour la violation de son obligation contractuelle résultant de la convention
d’exclusivité.

755. Mais s’agissant de l’importateur qui a acheté d’un distributeur qui lui a
interdit la distribution dans la zone protégée, et l’a fait malgré l’interdiction1442, nous
pensons que le représentant aurait le loisir d’agir soit par l’action en responsabilité

1439
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, p. 37.
1440
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 13.
1441
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, op. cit., n° 9.
1442
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 211.
-392-

contractuelle -sur le fondement de la stipulation pour autrui-, soit d’agir en


responsabilité délictuelle1443. Mais, nous pensons que la seconde branche de
l’alternative est la plus logique étant donné qu’en principe, la stipulation pour autrui
ne se présume pas. Détaillons ces conséquences de l’opposabilité dans un deuxième
chapitre.

1443
L. MAZEAU et A. TUNC, Traité de la responsabilité, t. 3, R.I.D comparé, 1961 n° 144.
-393-

DEUXIÈME CHAPITRE

LES CONSÉQUENCES DE L’OPPOSABILITÉ

756. Reprenons le contenu de l’alinéa 3 de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 :


« La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle
a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du
commerce ». A première vue et suivant l’explication de l’opposabilité énoncée ci-
haut, nous déduisons l’empêchement du tiers de participer à la violation de
l’exclusivité grâce à son devoir d’inviolabilité1444, qui, à un premier niveau leur
interdirait de s’associer à l’inexécution de ses obligations par l’un des contractants1445,
à un second niveau leur commanderait de respecter le droit ou la situation juridique
d’autrui1446. Le cas échéant un arbitrage trouve lieu entre plusieurs intérêts mais en
faveur des tiers : ceux des parties au réseau, qui justifient un devoir d'inviolabilité à la
charge des tiers, et ceux des tiers au réseau, qui justifient que leur devoir
d'inviolabilité n'aille pas jusqu'à leur imposer une atteinte à leurs propres droits1447.

757. Tous les effets qui résultent de l’inscription au registre du commerce de la


clause d’exclusivité semblent, en réalité, être groupés autour de l’idée d’assurer la
protection pour le représentant commercial et l’opposabilité de la clause d’exclusivité
par rapport aux tiers par voie d’inscription au registre du commerce. Le cas échéant, il
ne s'agit pas, en principe, d'obliger les tiers mais simplement de leur en imposer le
respect à ne pas violer le contenu de cette clause1448.

758. Il est certain que, d’après ce principe, le contrat ne peut imposer des
obligations aux tiers ; il peut, uniquement, leur rendre les obligations qui en découlent
simplement opposables. Il s’agit d’une exception pure et simple au principe de l’effet

1444
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 4.
1445
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 632.
1446
F. DEBOISSY, G. WICKER, Droit du contrat et droit du marché, éléments pour une
problématique, RDC, 2006, 1329.
1447
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, op. cit., n° 6.
1448
D. FERRIER, Concurrence-Distribution : pan. 2005, D., 2006 ; J. GHESTIN, C. JAMIN et M.
BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 678, spéc. n° 724 ; Comp. P. ANCEL, Force
obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, n° 53, p. 806-807.
-394-

relatif du contrat1449 en vue d’assurer une protection absolue. Cependant il n’en est
pas de même en France1450, où une flexibilité apparaît au niveau du concept de
l’opposabilité du réseau de distribution aux tiers, qui a connu un regain d'actualité
avec le développement de la vente par Internet1451.

759. La solution française s'imposait plus largement en l'absence de tierce


complicité car les juges considéraient qu'en revendant des produits objet d’exclusivité
d’un réseau déterminé en toute connaissance de cause, le distributeur parallèle violait
consciemment le droit d'autrui1452. Cette orientation jurisprudentielle posait le
principe d'une opposabilité « absolue » du réseau, c'est-à-dire des contrats qui le
composent1453. D’où l’utilité de justifier l’étendue de l’opposabilité à l’égard des tiers
dans une première section, c’est-à-dire comment et dans quelle mesure, les tiers sont
tenus de respecter une convention à laquelle ils sont demeurés étrangers, pour voir la
sanction de la violation du non-respect de cette opposabilité dans une seconde.

1449
La relativité étant considéré par rapport à l’étendue des droits conférés par le représenté à son
représentant exclusif. Selon le principe de l’effet relatif du contrat, un contrat ne profite pas aux tiers
sauf le cas de la stipulation pour autrui, expressément excepte par l’article 1165 C. civ. et ne leur nuit
pas. Il ne peut ainsi faire naitre un droit ou une obligation sur leur tête et ils ne peuvent ni être
contraints à exécuter le contrat, ni en réclamer eux même l’exécution : A. BALLET, L’exclusivité et le
réseau de distribution, op.cit., n° 561.
1450
CA Rennes, 23 déc. 1965, RTD com., 1966, p. 634, n° 4 : Dans cette espèce, le concédant avait
agi contre un tiers commerçant qui avait violé l’exclusivité du concessionnaire exclusif et a obtenu gain
de cause, note J. HEMARD.
1451
Se trouvent notamment visés les revendeurs hors réseau qui n'ont aucun point de vente physique
et distribuent exclusivement par Internet. L'examen du droit positif révèle en effet la sévérité de la
sanction de ceux que l'on désigne comme pure players, où la vente exclusive sur Internet par un
revendeur non agréé qui est, en elle-même, condamnée : N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE,
La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 40 et s. ; Tel serait
par exemple le cas si des distributeurs vendaient par Internet sans disposer de magasins physiques (pure
players) » : Cons. conc. 29 oct. 2008, n° 08-D-25, pt. 81 : « La possibilité d'acheter les produits sur
Internet apporte en effet aux consommateurs un service supplémentaire par rapport à l'achat dans les
magasins physiques : commander et acheter les produits à distance, sans limitation de temps.
L'utilisation d'Internet facilite également l'accès à l'information sur les produits et permet aux
consommateurs de procéder à des comparaisons de prix ».
1452
Cass. com., 21 févr. 1978, Bull. civ., IV, n° 73 ; Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ. III, n° 199.
1453
J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 736,
p. 788 pour qui la solution confère en fait un droit exclusif et absolu ; F. TERRE., Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 494 qui évoquent une
situation juridique absolue ; G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd.,
LGDJ, 1995, n° 206 in fine qui évoque la reconnaissance de la « pleine et entière opposabilité de ce
type d'accord ».
-395-

SECTION 1

L’OBLIGATION POUR LES TIERS DE RESPECTER L’EXCLUSIVITÉ

760. Si comme tout contrat, le contrat de distribution s'intègre dans


l'ordonnancement juridique et, à ce titre, produit des effets à l'égard des tiers, eux-
mêmes titulaires de droits opposables qui, dans ce contexte sont spécialement
protégés notamment au titre de la liberté du commerce et de l'industrie et de la liberté
de concurrence1454. Aussi, le principe tiré du droit commun selon lequel les parties ne
peuvent aller jusqu'à méconnaître les droits opposables des tiers prend ici une
dimension particulière : les parties au réseau de distribution ne peuvent aller jusqu'à
méconnaître la liberté du commerce et de l'industrie des tiers.

761. Ainsi, comme en droit commun, mais de façon plus manifeste dans un
contexte de libre commerce et de libre concurrence, l'opposabilité du contrat a pour
limite les droits opposables des tiers. Dans les rapports avec les tiers, il s’agit d’une
atteinte légale à la liberté des tiers d’exercer librement le commerce, car, bien qu’elle
résulte d’une convention entre les parties au contrat de représentation commerciale,
c’est la loi qui confirme cet effet à l’égard des tiers, de sorte qu’en fin de compte,
c’est la loi -ou plutôt le décret-loi N. 34/67- qui apporte cette limite à la liberté de la
concurrence. Aspect non consacré du principe de la liberté du commerce et de
l’industrie, qui semble de mieux en mieux assuré sous l’influence du droit
communautaire1455, malgré l’entrave que représente toujours l’interventionnisme
public local1456.

1454
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 6.
1455
L’art. 86 du Traité d’Amsterdam modifiant le traite sur l’Union Européen, les traités instituant
les communautés européennes et certains actes connexes (ex-article 90 du traité de Rome) prévoit que
« les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils
accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux
règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 12 et 81 à 89 inclus », relative au droit
de la concurrence, J.O n° C 340 du 10 nov. 1997.
Le droit communautaire contribue donc à la libre concurrence et à la liberté du commerce et de
l’industrie (qui prend une valeur au moins supra-législative). Mais d’une façon générale le droit de la
concurrence a tendance à s’imposer de plus en plus aux autorités publiques, comme en témoigne la
récente jurisprudence du Conseil d ’Etat qui rend applicable l’ordonnance de 86 sur les prix et la
concurrence applicable aux activités de production, de distribution et de services des personnes
-396-

762. Par conséquent, l'opposabilité des droits des tiers apparaît ainsi comme une
limite à la liberté contractuelle des parties : libres de contracter, les parties ne sont pas
libres de créer un contrat dont l'effet nuirait aux droits des tiers1457. Rechercher
l’étendue des effets de l’inscription de la clause d’exclusivité revient à en tracer les
limites. Cette délimitation relativement aux rapports du représentant et des tiers doit
nécessairement se faire « rationae loci »1458 et « rationae tempori »1459.

Paragraphe 1 : L’étendue dans l’espace

763. Nous avons montré plus hauts que le représentant commercial devait
enregistrer son exclusivité au registre du commerce auprès du tribunal dans le ressort
duquel il a son principal établissement et exerce son activité. Mais, ici, il s’agit de
savoir quel est l’espace territorial auquel s’étend l’effet de cette inscription. C’est-à-
dire, si le représentant ayant une exclusivité pour la totalité du territoire libanais a
inscrit son exclusivité au registre du commerce de Beyrouth, étant donné que son
principal établissement se trouve à Beyrouth, ce représentant peut-il, à partir de cette
inscription empêcher un commerçant d’un autre Caza1460 d’écouler des marchandises
identiques à celles objet de l’exclusivité à Beyrouth ?

764. Il semble qu’il faille répondre par l’affirmative. L’inscription produit effet
au moins, sur tout le territoire constituant le ressort du tribunal de commerce, auprès
duquel se trouve le registre sur lequel a eu lieu l’inscription, et certainement après

publiques. Il y a là une banalisation de l’intervention des opérateurs publics dans la compétition


économique : CE 26 mars 1999, société EDA.
1456
Le droit communautaire limite aujourd’hui l’interventionnisme public, et notamment la
possibilité d’octroyer des aides : CE, 29 avr. 1970, société Unipain, légalité d’un service de boulangerie
destinée à fournir des prisons.
1457
Rapp. WICKER G., Force obligatoire et contenu du contrat, in P. REMY-CORLAY et D.
FENOUILLET (dir.), Les concepts contractuels français à l'heure des Principes du droit européen des
contrats, D., coll. Thèmes et commentaires, 2003, p. 152 s., spéc. n° 23, selon lequel il s'agit là d'une «
application particulière à l'activité contractuelle du devoir général de ne pas nuire à autrui ».
1458
Par rapport au lieu, à la zone géographique.
1459
Par rapport au moment, à la date.
1460
V. supra note 1391.
-397-

l’introduction de l’inscription auprès du Ministère de l’économie et du commerce qui


couvre tout le territoire libanais. Ainsi, tout commerçant, d’où qu’il vienne, soit-il
établi à Beyrouth ou ailleurs, au Liban ou ailleurs, est tenu d’en respecter les
mentions, du moins pour le secteur en constituant le ressort. En d’autres termes, un
commerçant de n’importe quel Caza au Liban ne peut écouler au territoire de ce Caza,
des marchandises ayant fait l’objet d’une exclusivité pour tout le territoire libanais et
inscrite au registre du commerce de Beyrouth1461. En effet, cette solution résulte de la
manière dont est constitué le dit registre : d’une multitude de dossiers relatifs, chacun,
à un commerçant, personne physique ou morale. Donc, le critère de cette tenue du
registre est celui du principal établissement de chaque commerçant. C’est ainsi que
chaque commerçant publie les renseignements1462 qui intéressent les tiers au registre
de son principal établissement1463 quitte à ce que cette inscription produise effet pour
le Liban.

765. Après tout, s’il n’a d’établissement qu’à Beyrouth, il ne peut inscrire qu’à
Beyrouth puisqu’il n’aurait pas de dossier ailleurs, mais il peut avoir une inscription
sur le registre spécial du Ministère de l'économie et du commerce. Il en résulte donc,
deux conséquences : d’une part, si le commerçant a plusieurs établissements, même
non principaux, il devra effectuer, pour être mieux protégé, une inscription au registre
de chacun de ses établissements, en plus de l’inscription au registre du Ministère de
l'économie et du commerce. D’autre part, l’inscription faite au registre spécial du
Ministère de l'économie et du commerce, produit ses effets sur tout le territoire
libanais.

766. Cela dit, une question nous interroge : Un commerçant représentant une
firme qui traite d’une marque déterminée, enregistre sa représentation de ladite
marque au registre du commerce pour la totalité du territoire libanais. Peut-on alors le
considérer comme seul autorisé d’introduire au Liban les produits portant cette

1461
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et
168.
1462
V. annexe II et III.
1463
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 14.
-398-

marque, de sorte que le tiers commerçant qui aurait introduit cette même marque
engagerait la responsabilité à base de la violation de l’exclusivité ?

767. Pour illustrer le sens de cette question, et la réponse qu’il faut y donner,
nous citons un célèbre arrêt de la jurisprudence libanaise :

« Attendu que la société X est la représentante générale de la société Philips


(Hollande), suite à un contrat de représentation commerciale entre les deux sociétés
inscrit au registre du commerce,

Attendu que le contrat ci-dessus, mentionne que la société X est la représentante


et la distributrice exclusive au Liban pour tous les produits qui porte la marque
Philips,

Attendu que la société Kouyoumji a importé postérieurement à l’enregistrement


du contrat de la société Philips, une quantité de postes de télévision de marque
Philips, de Hambourg (Allemagne) afin de les vendre au Liban,

Attendu que suivant le deuxième article du décret-loi N. 34/67, si le contrat de


représentation commerciale comporte une clause limitant la représentation par le
seul représentant, le cas échéant la relation avec le tiers sera restreinte par ce
représentant sans aucun autre. Sur cet acquis, toute personne achetant des produits
de l’extérieur pour les vendre sur le territoire ou le marché désigné pour la
commercialisation de ces produits par le distributeur exclusif, sera responsable
contre ce dernier. Peu importe l’origine des produits importés, que ce soit de la
société représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat
de représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant,

Attendu que le principe de la relativité des contrats défini par l’article 225
C.O.C., ne s’applique pas à cette affaire, vu que le contrat de représentation
commerciale est inscrit au registre du commerce et qu’il est opposable aux tiers par
l’application du dernier alinéa du deuxième article du décret-loi N. 34/67 qui dispose
tacitement que la clause d’exclusivité n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a
été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du
commerce,
-399-

Alors la société X sera protégée par les dispositions du décret-loi N. 34/67 pour
l’exécution du contrat de représentation commerciale conclu avec la société
Hollandaise, et qui restreint à la société X l’importation des produits Philips et ses
commercialisations au Liban »1464.

768. Nous remarquons que le représentant a acquis son exclusivité de la firme


productrice mère (Hollande), et que l’importateur parallèle a eu recours à une firme
productrice de la même marque, mais sous licence de la firme mère (Allemagne).
Cette approche de la Cour de cassation est remarquable ; nous pouvons en retenir que
le distributeur exclusif est le seul distributeur ayant le droit de vendre les produits
désignés qu’il représente, et dans le champ géographique qui lui est octroyé suivant le
contrat de représentation commerciale. Ce qui conduit à dire qu’il est interdit à
l’exportateur de vendre des produits à autrui dans la même région, que ce soit de
façon directe ou indirecte. En effet, si le contrat de représentation commerciale, se
voit attribuer une clause d’exclusivité pour une personne, le contact ou le traitement
sera exclusif « pour la permettre d'optimiser ses efforts voire rentabiliser ses
investissements »1465.

769. En d’autres termes, n’importe qui, achetant des produits de l’extérieur dans
le but de les vendre sur le territoire désigné pour la commercialisation de ces produits
par le distributeur exclusif, sera responsable pour la violation de son devoir
d’inviolabilité. Peu importe la source des produits importés, que ce soit de la société
représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat de
représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant1466. Une

1464
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et
168.
1465
D. FERRIER, La considération juridique du réseau, Mél. offerts à Ch. MOULY, Litec, 1998, p.
95 s., spéc. n° 19.
1466
Juge de référé Beyrouth, décision n° 459, 21oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147 :
« Attendu que le contrat de représentation exclusive inscrit selon les normes au registre du commerce,
est opposable aux tiers, et il protège le représentant contre l’importation des produits possédant leur
représentation, que ce soit l’importation faite de l’usine représentée ou de n’importe autre origine. Et
le fait de dire avec la partie défenderesse que la représentation exclusive ne l’est pas opposable
puisque elle a acheté les produits outre le pays d’origine, forme une fraude contre l’application des
dispositions du décret-loi de représentation commerciale. Ce sera possible pour n’importe quel
personne à travers un tiers dans un tiers pays, d’importer les produits inclus par la représentation
exclusive. Ce qui bloque les dispositions du décret-loi de la représentation commerciale. En effet, le
-400-

exception à ce principe a été évoqué en doctrine : « cas où l’accord existant entre les
deux firmes productrices, firme mère et firme agissant sous licence, vise à ce que la
firme secondaire qui produit selon sa propre formule utilise la marque de la firme
principale avec signe distinctif ; dans ce cas, l’importateur n’est réputé avoir commis
aucune violation d’exclusivité »1467.

770. En effet, l’une des conséquences de l’opposabilité à l’égard des tiers d’une
clause d’exclusivité, se traduit par l’interdiction d’importer les mêmes marchandises
que celles que le représentant commercial exclusif représente et distribue sur le
territoire désigné1468 ; en considérant que la représentation commerciale et la
distribution exclusive touchent le domaine des libertés, notamment, la liberté du
commerce et de l’industrie1469. Cependant, si le contrat de représentation exclusive ne
crée pas d’obligation à la charge des tiers, en revanche il constitue un fait juridique
qui leur est opposable1470 et rendrait condamnable la commercialisation des produits
par un distributeur qui n’est pas sélectionné ou tout au moins qui n’est pas

fait d’importer les produits inclus dans la représentation même si d’un autre pays, constitue une
concurrence déloyale qui subit des préjudices pour l’autre partie ».
1467
« Mais, si l’accord en question vise à permettre à la firme secondaire de produire selon la
formule de la firme mère et sous la marque de celle-ci, dans ce cas, l’importateur qui serait fourni
auprès de la firme secondaire est réputé violé l’exclusivité. Il en est de même quand le représentant
acquière l’exclusivité de la firme secondaire dument habilitée pour cela par la firme mère. L’accord
peut avoir visé à donner à la firme secondaire le droit de fabriquer selon la formule de la maison mère,
mais sans autorisation d’utiliser le même nom : c’est le cas courant des fabriques d’automobiles qui
créent des filiales ou autres dans différents pays, et les marques, alors portent des noms très proches
l’un de l’autre pour marquer qu’il s’agit d’une marque originairement unique. Dans ce cas,
l’importateur de la seconde firme n’est réputé avoir violé l’exclusivité du représentant de la firme
mère, car les deux productions doivent, sur le terrain juridique être réputées totalement différentes » :
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p.
185.
1468
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 46 ; CA Beyrouth, 3e Ch. civ., arrêt
du 29/9/1994, Rev. al Adl, 1994, p. 93.
1469
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967 : « On estime d’autre part que l’exécution régulière de la formalité
d’inscription confère désormais au bénéficiaire de l’exclusivité le droit d’invoquer celle-ci. C’est donc
en connaissance de cause que le législateur adopte la forme de protection de l’exclusivité sans faire de
distinction quant à la provenance des marchandises, la jurisprudence libérale dont ces importateurs
avaient profité avant l’institution d’une publicité légale de l’exclusivité ne saurait plus être maintenue
depuis cette institution, dans le cas où cette publicité sera régulièrement faite ».
1470
M. GRIMALDI, Le contrat et le tiers, Mél. Ph. JESTAZ, D., 2006, p. 163 ; G. VINEY, Traité
de droit civil, Introduction à la responsabilité, op. cit., p. 206 ; Cass. com., 18 oct. 1994, D., 1996, p.
311, note I. KRIMMER.
-401-

sélectionnable1471. Solution retenue en cas de revente d’un produit que l'on sait
distribuer par les seuls intermédiaires agréés par le fabricant engendrerait une
désorganisation du réseau de distribution de l'entreprise rivale. Ces solutions avaient
l'avantage de préserver l'avenir des réseaux et d'assurer la pérennité de la distribution
intégrée confrontée aux exigences du droit de la concurrence1472.

771. Le législateur déclare la clause d’exclusivité efficace à l’égard des tiers si «


elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du
commerce ». Donc, si la publicité est la raison d’être de la solution apportée par le
législateur libanais en vertu du décret-loi N. 34/67, nous partageons avis avec M.
AWADA que l’inscription au registre du commerce créerait alors une présomption de
mauvaise foi à l’égard de tout commerçant ou exportateur qui introduirait des
marchandises protégées par une exclusivité enregistrée1473. Idée inspirée des
professeurs FABIA et SAFA dans leur commentaire au commerce du Levant : « Le
présent article prévoit que l’exclusivité de distribution peut être rendue opposable
aux tiers par inscription au registre du commerce en vue d’empêcher des concurrents
quelconques de mettre en vente des marchandises provenant de la firme représentée
qu’ils auraient réussi à se procurer soit auprès de celle-ci en violation de ses
obligations envers l’agent, soit aussi auprès d’autres possesseurs de ces
marchandises (importations parallèles)»1474. C’est une présomption irréfragable de
mauvaise foi qui n’admet jamais la preuve contraire1475.

772. Par conséquent, si le tiers importateur est responsable, c’est qu’il s’agit-là
d’une responsabilité pour violation d’une obligation légale qui crée une obligation de

1471
D. FERRIER, Le droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 632.
1472
CA Paris, 28 avr. 1988, D., 1989, Somm. 198, obs. J.-J. BURST ; CA Versailles, 4 mars 1987
et CA Paris, 24 mars 1987, D., 1988, Somm. 211, obs. Y. SERRA.
1473
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, P. 37. Dans le même sens, l’avis de M. MAHMASSANI.
1474
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 2, n° 4 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, art. 2 du
décret-loi n° 34, Commerce du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 12.
1475
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Lib.,
1972, p. 196.
-402-

résultat, et ce, en connaissance de cause1476. Etant connu que cette violation constitue
la sanction d’une obligation incombant à toute personne, celle de consulter le registre
du commerce crée à cet effet, spécialement pour renseigner les tiers. La solution
rendue par la Cour de Paris dans une affaire Vitasport en témoigne, où la faute d’un
agent immobilier avait été retenue pour avoir conduit son mandant à signer un projet
de bail commercial sans avoir vérifié l’existence d’une clause d’exclusivité au profit
d’un autre locataire d’un centre commercial1477. La faute était constituée parce que de
telles clauses sont d’un usage courant1478.

Qu’en est-il des distributeurs qui ont recourt à l'Internet ?

773. Dans ce cas, une distinction se manifeste, selon que la distribution est
opérée par Internet (c’est-à-dire en utilisant Internet comme un moyen de
communication -vente passive-) ou sur Internet (c’est-à-dire en utilisant un site
virtuel)1479. Précisons d'abord que l'utilisation de l’Internet pour vendre ou pour faire
de la publicité ne peut être en soi interdite que si elle est objectivement justifiée par la
nature des produits1480, mais c'est la vente exclusive sur Internet par un revendeur non
agréé qui est, en elle-même, condamnée1481. Tout au plus, le fournisseur peut-il
imposer des normes de qualité pour l'utilisation du site Internet, comme il le ferait
pour un magasin, une annonce publicitaire ou une action promotionnelle en général ?

1476
Il paraît évident que le distributeur parallèle qui connaît l'existence des contrats constitutifs du
réseau ne peut ignorer que sa revente parallèle est nuisible aux membres du réseau : N. FERRIER, L.
SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, op. cit.,
n° 12 ; V. dans le même sens, Rapp. G. VINEY, op. cit., n° 207-3, qui retient, s'agissant du droit
commun de la responsabilité du tiers complice, que « la connaissance du contrat et la réalisation
consciente d'actes qui entravent son exécution suffisent à établir la faute du tiers ».
1477
CA Paris, 16e Ch., A, 29 nov. 2004, J-D, n° 2004-268854.
1478
D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, op.cit. p. 457.
1479
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 616.
1480
Lignes directrices à l'occasion de l'adoption du règlement du 20 avr. 2010, JOCE, n° C 130, pt.
51 : « En principe tout distributeur doit être autorisé à utiliser Internet pour vendre ses produits » ; M.
MARTINEZ-LOPEZ, Distribution sélective et Internet, Competition Policy Newsletter, juin 2001, n°
2, p. 7 s ; Conf. par TPICE, 12 déc. 1996, aff. T- 19/92, Leclerc c/ commission, Rec. TPICE 1996, II, p.
1851, pt. 131 ; Rapp. L’appréciation favorable à l’interdiction de la vente par correspondance de
produits parfumants, Comm. CE, déc. n° 92/33, 16 déc. 1991, JOCE n° L. 12, 18 janv. 1992, aff.
IV/33.242, Yves Saint Laurent, pt. 30.
1481
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 43.
-403-

774. Une restriction à l'utilisation de l’Internet ne pourrait être envisagée que si


celle-ci entraînait la réalisation de ventes actives vers les territoires exclusifs ou aux
clientèles exclusives d'autres distributeurs1482. Il a été jugé que « le fait pour un
distributeur hors réseau de proposer sur Internet des produits que le fabricant réserve
à son réseau de distribution sélective constitue un trouble manifestement illicite,
indépendamment de la régularité des approvisionnements du distributeur hors réseau
et de leur provenance »1483. La Commission européenne apporte sur ces faits les
précisions suivantes : « En règle générale, l'utilisation par un distributeur d'un site
Internet pour vendre des produits est considérée comme une forme de vente passive,
car c'est un moyen raisonnable de permettre aux consommateurs d'atteindre le
distributeur (Lignes directives, pt. 52). L'utilisation d'un site Internet peut avoir des
effets au-delà du territoire et de la clientèle affectés au distributeur ; toutefois, ces
effets sont le résultat de la technologie qui permet un accès facile à partir de
n'importe quel lieu. Si un client visite le site Internet d'un distributeur et prend
contact avec ce dernier et si ce contact débouche sur une vente, y compris une
livraison, il s'agit là d'une vente passive. Il en va de même lorsqu'un client choisit
d'être (automatiquement) informé par le distributeur et que cela conduit à une vente.
En soi, la possibilité de choisir entre plusieurs langues offerte par le site en question
ne modifie pas le caractère passif d'une telle vente »1484. En effet, un message non
sollicité, transmis par courrier électronique, est considéré comme une vente active1485.

775. Cependant l’affaire « Pierre Fabre Dermo-Cosmétique » vient éclairer ce


point en considérant que « la distribution sélective ne saurait justifier en elle-même
l'interdiction faite aux distributeurs sélectionnés de revendre les produits sur

1482
Le distributeur exclusif peut vendre à des clients situés hors de la zone qui lui a été attribuée,
mais seulement de façon passive (le fait de satisfaire à des demandes non sollicitées, émanant de clients
individuels). En revanche, le fournisseur pourrait lui interdire de se livrer à des ventes actives (le fait de
prospecter des clients hors de la zone d'exclusivité attribuée à un distributeur) : Règlement n°
1400/2002 de la Commission européenne du 31 juill. 2002, art. 4-b.
1483
CA Paris, 18 avr. 2008, Europe juin 2008, comm., 209, obs. L. IDOT ; CA Paris, 5 sept. 2003,
Comm. com. électr. 2004, n° 19, obs. P. STOFFEL-MUNUCK ; Solution rigoureuse car le distributeur
hors réseau peut en principe librement commercialiser les produits dans un point de vente physique : D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, note 422.
1484
Lignes directrices à l'occasion de l'adoption du règlement du 20 avr. 2010, JOCE, n° C 130.
1485
P. ARHEL, Application du droit de la concurrence à la distribution automobile, LPA, 16 juill.
2004.
-404-

Internet »1486. Cette solution a fait l’objet d’une question préjudicielle à La Cour de
justice. Celle-ci a jugé que la clause imposant au distributeur de ne vendre les
produits que « dans un point de vente matérialisé et individualisé » et interdisant ainsi
la commercialisation sur Internet, constitue une « restriction de concurrence par
objet »1487.

776. Sur cet acquis, M. le professeur FERRIER soulève des interrogations étant
donné que la solution est abrupte au regard de l'exigence non respectée par la Cour
d'un « examen concret » de l'atteinte à la concurrence1488. D'une part, peut-on
considérer que l'interdiction de la commercialisation sur Internet ne doit pas
bénéficier de l'exemption catégorielle1489 parce qu'elle restreint les ventes actives et
passives alors que bien d'autres modalités de commercialisation sont utilisables1490 ?

1486
CA Paris, 29 oct. 2009, Pierre Fabre Dermo-Cosmétique, n° 08/23812.
1487
C'est-à-dire condamnable indépendamment de l'appréciation de son effet anticoncurrentiel, si
l'examen concret de son contenu comme de sa finalité, ainsi que du contexte juridique et économique
dans lequel elle s'inscrit, fait apparaître qu'elle n'est pas justifiée au regard des propriétés des produits
en cause. En l’occurrence, la cour relève que le respect de l'image du produit ne pouvant pas, en lui-
même, constituer une justification de l’exclusion de sa commercialisation sur Internet car la
préservation de cette image ne constitue pas en général un objectif légitime pour restreindre la
concurrence : CJUE, 13 oct. 2011, aff. C 439/03, JCP, G, 2011, 1430, note D. FERRIER ; D. 2011.
2590, obs. E. CHEVRIER ; Contrats, conc. consom. 2011. Comm. 257, obs. M. MALAURIE-
VIGNAL, et Comm. 263, obs. G. DECOCQ ; J.-L. LESQUINS et L. FERCHICHE, Les ventes sur
Internet dans le cadre de la distribution sélective, JCP E, 2011. 544.
1488
D. FERRIER, Concurrence-Distribution, D., 2012, p. 577 ; De même a considéré que la vente
exclusive sur Internet pose la question de la prise en charge des gouts de constitution du réseau et du
parasitisme et peut être source de distorsion de concurrence entre distributeurs : D. FERRIER, Droit de
la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 631.
1489
Règl. UE n° 330/2010, art. 4 : Restrictions retirant le bénéfice de l'exemption par catégorie -
restrictions caractérisées : L'exemption prévue à l'article 2 ne s'applique pas aux accords verticaux qui,
directement ou indirectement, isolément ou cumulés avec d'autres facteurs sur lesquels les parties
peuvent influer, ont pour objet:
c) de restreindre les ventes actives ou les ventes passives aux utilisateurs finals par les membres
d'un système de distribution sélective qui agissent en tant que détaillants sur le marché, sans préjudice
de la possibilité d'interdire à un membre du système d'exercer ses activités à partir d'un lieu
d'établissement non autorisé;
1490
« Il appartient au promoteur d'un réseau de distribution sélective d'apporter la démonstration
que la commercialisation au moyen d'un site Internet contrevient expressément aux obligations
souscrites par le distributeur. Dès lors que les documents contractuels ne faisaient aucune référence
aux modalités, probablement trop récentes, de commercialisation par un serveur en ligne des produits
concernés et qu'il est seulement fait mention que le distributeur s'engageait à « tout faire pour
développer les ventes », il faut considérer que le moyen Internet immatériel s'ajoute aux modalités
traditionnelles mises en place par le distributeur dans son officine et conformes aux exigences du
fournisseur relatives à la matérialité du lieu de vente » : Ordonnance rendue par T. com. Pontoise, La
-405-

D'autre part, peut-on considérer que l'interdiction de commercialisation sur Internet ne


peut pas bénéficier de l'exemption accordée à l'interdiction de revendre à partir d'un
lieu d'établissement non autorisé1491 alors que le site Internet peut être assimilé à un
point de vente ?

777. Dans un premier temps, la Cour de justice estime alors que l'accord de
distribution sélective stipulant une telle clause ne saurait bénéficier de l'exemption par
catégorie applicable aux restrictions verticales1492. Mais en conclusion, elle admet que
l'accord pourrait toutefois bénéficier d'une exemption individuelle (art. 101, § 3,
TFUE) dans la mesure évidemment où serait établi un bilan économique positif. Il
résulte de ce qui précède que la clause d’exclusivité produit des effets à l’égard des
tiers de manière absolue, uniquement dans la mesure où le droit du bénéficiaire est
dûment absolu 1493; et, dans ce cas, l’importateur parallèle est responsable pour
violation de l’exclusivité quelle que soit l’origine de sa fourniture1494.

Paragraphe 2 : L’étendue dans le temps

778. A cet égard, il s’agit de clarifier, principalement, deux points très


importants. D’abord, il s’agit de savoir le moment à partir duquel l’inscription
commence à produire ses effets. Ensuite, il s’agit de déterminer la durée des effets de
l’inscription.

vente, par un distributeur agréé, des produits contractuels sur un site Internet est-elle licite ? D., 1999,
n° XTCP150499X, p. 725.
1491
Règl. UE n° 330/2010, art. 4, c, op. cit.
1492
Règl. UE n° 330/2010 du 20 avr. 2010 concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du
traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) à des catégories d'accords verticaux et de
pratiques concertées.
1493
J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU , Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 736,
p. 788 pour qui la solution confère en fait un droit exclusif et absolu ; F. TERRE, Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 494 qui évoquent une
situation juridique absolue ; G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd.,
LGDJ, 1995, n° 206 in fine qui évoque la reconnaissance de la « pleine et entière opposabilité de ce
type d'accord ».
1494
TI Beyrouth, décision n° 459, 21 oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147 ; Cass. civ.,
1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168.
-406-

779. S’agissant du moment où l’inscription commence à produire ses effets,


c’est immédiatement au moment où elle est effectuée. Donc, à partir de ce moment,
nul n’est plus autorisé à concurrencer le représentant exclusif avec les produits
rentrant dans son exclusivité, à peine d’engager sa responsabilité à son égard :
Solution justifiée par les tribunaux libanais où a été jugé que : « Il en résulte du
présent procès, que la clause de représentation exclusive des produits de la
compagnie Beiersdorf, et surtout la marque Nivea sujet de ce litige, est comprise dans
la convention commerciale conclus entre les parties et inscrite au registre du
commerce à la date du 7/10/1967. Alors le droit d’importer les produits litigieux, et
leurs commercialisations au Liban, sera restrictif à l’appelante représentante dès la
date de l’enregistrement »1495.

780. Ainsi dans le même sens, cas d’une compagnie bénéficiaire d’une clause de
représentation d’exclusive, suivant un contrat inscrit au registre commercial et auprès
de l’office pour la protection de la propriété commerciale et industrielle dans le
Ministère de l’économie et du commerce, qui a pu protéger ses droits contre une
compagnie concurrente ayant inscrit son contrat de représentation exclusive
postérieurement à la date d’inscription du premier contrat. La Cour a jugé que « c’est
le premier contrat inscrit proprement selon les dispositions du décret-loi N.34/67, qui
est opposable aux tiers et produits effets dès la date de son inscription et sa
publication au registre du commerce. Le deuxième contrat n’est opposable aux tiers
qu’à partir de son inscription et non à partir de la date de sa conclusion »1496.

781. Cependant, cette solution doit être nuancée. En effet, une personne peut
avoir obtenu l’exclusivité d’une certaine marque alors qu’un commerçant tiers avait
déjà commandé une certaine quantité de marchandises de cette même marque, mais
ne l’a pas encore reçue, ou l’a reçue mais ne l’a pas complétement écoulée. Faut-il,
pour cela, l’empêcher d’écouler cette marchandise à l’intérieur du territoire protégé
par l’exclusivité, pour la seule raison que le représentant a réussi à enregistrer avant
de laisser au commerçant qui a fait la commande le temps d’écouler cette
marchandise ?

1495
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
1496
Juge de référé Beyrouth, décision n° 443, 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216.
-407-

782. A première vue, il faut répondre par l’affirmative si nous appliquons


textuellement les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 3 : la clause n’est opposable
sauf si elle est enregistrée. Mais d’après notre analyse consistant dans la possibilité
d’opposabilité en dehors de toute inscription1497, il faut répondre par la négative, car il
n’est pas juste de protéger une personne au détriment de tant d’autres qui auraient agi
en ignorance de cause. Cela se justifie, en réalité, par deux idées. D’abord, le décret-
loi N. 34/67 qui prévoit la possibilité d’imposer aux tiers le respect de la clause
d’exclusivité dûment enregistrée, a entendue en général, protéger le représentant
commercial du moment que cette inscription est effectuée1498. Par ailleurs, l’effet à
l’égard des tiers repose sur l’idée de publicité nécessaire de tout renseignement de
nature à intéresser ces tiers en matière de commerce. Ensuite, il a entendu protéger le
commerçant contre les agissements frauduleux et parasitaires des tiers1499. Or, dans ce
cas, celui sous examen, aussi bien le représentant que les tiers sont, en principe, des
commerçants libanais. Aussi n’y a-t-il rien de frauduleux dans le comportement de
ces commerçants qui, au moment où ils ont ordonné leur commande, aucune
exclusivité n’était encore déclarée. En d’autres termes, l’opposabilité ferait défaut au
cas d’importation antérieure à l’inscription, et de réception qui y serait postérieure.
La raison d’être de la protection faisant alors défaut, le tiers en question doit avoir la
possibilité d’écouler les produits, objet de sa commande, même après l’enregistrement
de l’exclusivité surtout s’il jouit d’une bonne foi.

783. S’agissant de la durée des effets de l’inscription, il faut dire qu’en principe,
l’inscription au registre du commerce de la convention d’exclusivité rattachée à un
contrat de représentation commerciale demeure valable et continue à produire ses
effets tant que dure l’efficacité de la clause d’exclusivité et celle du contrat de
représentation commerciale pour lequel elle sert de modalité. C’est ainsi que
l’inscription d’un contrat à durée indéterminée continuera à produire ses effets aussi
longtemps que le contrat lui servant de base continuera à régir les rapports des parties

1497
V. supra n° 688-735 et s.
1498
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1499
Y. PICOD, Plaidoyer pour une consécration législative de la concurrence déloyale, Mél. Y.
SERRA, D., 2006, p. 360 s., spéc. p. 368.
-408-

entre elles1500. Cependant, il ne faut surtout pas confondre contrat à durée


indéterminée et contrat perpétuel1501, car ce dernier est nul, et, son inscription
inefficace, comme portant atteinte à la liberté contractuelle de manière totale1502.
S’agissant des contrats à durée déterminée, cette durée doit clairement figurer à
l’inscription. Par ailleurs, cette inscription ne sera pas valable pour le contrat à durée
déterminée, renouvelé ou prorogé1503. L’inscription dans de telles occasions doit être
reformulée, et le renouvellement ou la prorogation, en conséquence, doivent être
mentionnés sur le registre du commerce1504.

784. Cependant, il en est différemment lorsque le contrat à durée déterminée


s’est transformé en contrat à durée indéterminée par suite de plusieurs
renouvellements tacites, survenus à l’expiration1505. Dans ce cas, le contrat devenu à
durée indéterminée, l’inscription n’a plus besoin d’être renouvelée continuellement
pour maintenir l’effet absolu qui en résulte. Mais, nous pensons qu’il serait préférable

1500
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 189.
1501
Il a été jugé que « le contrat prévoyant un renouvellement par tacite reconduction pour une
durée déterminée ne saurait recevoir la qualification de contrat conclu pour une durée indéterminée ;
qu'ayant constaté la stipulation prévoyant le renouvellement du contrat par tacite reconduction pour une
durée déterminée puis considéré que le fait que le contrat prévoyait une reconduction annuelle
expresse sans donner de limitation du nombre de renouvellement, les prorogations possibles à l'infini
étant de nature à caractériser l'existence d'un contrat à durée indéterminée sans préciser en quoi cette
circonstance eu égard aux termes clairs et précis de la clause permettait de qualifier le contrat comme
étant renouvelé pour une durée indéterminée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au
regard des articles 1134 du code civil et L. 134-11 du code de commerce » : Cass. com., 13 nov. 2003,
n° 02-10.448 (1532 FS-P), Agent commercial : qualification d'un CDD avec tacite reconduction
illimitée, D., 2003, p. 3047.
1502
Juge de référé Beyrouth, décision n° 10 juin 1986, Aff. Skayem c/ Boudikyan et Yemezian sarl.,
Rec. Baz, 1987.
1503
V. supra note 1417.
1504
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 37.
1505
L’art. L. 134-11 C. com., précise cependant qu’un contrat à durée déterminée qui continue à être
exécuté par les parties après son terme est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée ; J.
HEMARD, observations RTD com., 1964, p. 136, n° 136 : Le contrat à durée déterminée devient à
durée indéterminée après plusieurs renouvellement si aucune limite à la tacite reconduction n’est
stipulée ; Cependant, cela n’est pas reconnu par certaines décisions : Cass. 10 fév. et 5 nov., 1960, D.,
1961, 249 ; Cass. soc., 14 nov. 1963, JCP, 1964, 13471.
-409-

de renouveler quand même l’inscription au vu des hésitations de la jurisprudence sur


la qualification en cas de renouvellement par tacite reconduction1506.

785. Enfin, l’inscription s’éteint à la fin du contrat initial. Pour la période


nécessaire à la liquidation des rapports entre les parties, ou pour celle qui suit la
déclaration de faillite de l’une des parties, la liquidation avec exclusivité nécessiterait
une nouvelle inscription qui doit être précédée par un accord explicite en ce sens,
rédigé par un écrit, et signé du représenté concédant de l’exclusivité1507.

786. En effet, s’agissant de l’étendue de l’opposabilité en question, nous avons


remarqué que la délimitation que nous avons opéré, dans l’espace et dans le temps,
dépend largement de la volonté des parties, et notamment, de celle du concédant
représenté. En effet, c’est cette volonté réciproque qui détermine l’espace protégé et
l’objet de l’exclusivité qui peut différer de l’objet global de la représentation,
différence qui ne peut être qu’en quantités et non en qualité.

787. Finalement, si la volonté des parties permet d’expliquer l’étendue de


l’opposabilité à l’égard des tiers, elle ne peut par contre, en justifier le principe même.
C’est dire, si les effets de l’exclusivité à l’égard des tiers découlent de la convention
initiale de représentation et d’exclusivité, le principe même de l’opposabilité à l’égard
des tiers résulte de la volonté du législateur. Ce dernier a érigé le respect de
l’exclusivité, ainsi que la responsabilité pour violation de cette exclusivité, ce qui
constitue l’élément principal de la faute. Les études du principe d'opposabilité ont
permis de préciser les effets du contrat à l'égard des tiers. Voyons la sanction qui
découle de la violation de cette opposabilité.

1506
CA Paris, 20 févr. 2008, inédit, RG n° 05/02241 ; Cass. com., 29 janv. 2008, pourvoi n° 06-
13.462.
1507
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 11.
-410-

SECTION 2

LA SANCTION DU NON-RESPECT DES CONTRATS

D’EXCLUSIVITÉ PAR LES TIERS

788. Le principe d'opposabilité de nouveau affirmé doit, pour être efficace,


recevoir une sanction lorsque la situation juridique nouvelle créée par le contrat vient
précisément à être contrariée par un tiers. La nature de cette sanction est déterminée
en fonction des agissements du tiers1508. Observons à cet égard, tout d’abord, que la
responsabilité des tiers qui auraient violé l’exclusivité d’une partie au contrat de
représentation commerciale n’exclut point celle du contractant de la partie lésée1509.
En d’autres termes, l’enregistrement de la clause d’exclusivité crée une obligation de
résultat à l’égard des tiers et leur interdit d’exercer n’importe quel acte concurrent, car
les obligations de résultat imposent à son violeur la responsabilité de ses faits ;
solution reconnue par Frossard dans sa thèse : « … Cependant, si la loi impose des
limites précises à l’exercice du droit, si elle enjoint à tout commerçant de ne pas
accomplir tel ou tel acte parfaitement défini (interdiction des ventes avec primes, des
procédés de vente dits à la boule de neige, etc.) une prestation négative déterminée est
ainsi créée, et la violation de ces textes engagerait la responsabilité automatique du
contrevenant quel que soit son état d’âme »1510. Une action contre le co-contractant
sur le fondement de la responsabilité contractuelle est ouverte à la partie lésée à côté
de l’action directe contre le tiers importateur sur le fondement de la responsabilité
délictuelle tel que nous l’avons montré.

789. Nous sommes devant une responsabilité délictuelle pour violation d’une
exclusivité considérée efficace à l’égard des tiers. Il s’agit bien, là, d’une
responsabilité délictuelle, et non d’une responsabilité contractuelle parce que le tiers
responsable n’a point été partie au contrat. Ensuite, étant donné que le tiers qui viole
l’exclusivité n’est pas responsable de la violation d’une obligation contractuelle, mais

1508
J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 738.
1509
La responsabilité est solidaire chaque fois qu’un tiers sollicite et obtient la représentation d’une
firme en connaissant l’existence d’une autre représentation : Cass. civ., n° 21 du 8 nov. 1965, RJL,
1966, p. 622.
1510
J. FROSSARD, La distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R.
NERSON, th., LGDJ, 1965, p. 241, n° 417.
-411-

d’une simple obligation qui reconnaît la validité du monopole consenti par le


représenté au représentant, et qui impose aux tiers de ne pas en gêner l’exploitation.
Voyons ces deux responsabilités qui en découlent de la violation par les tiers de la
représentation exclusive, du côté civil (Parag. 1), et du côté pénale (Parag. 2).

Paragraphe 1 : La responsabilité civile

790. La responsabilité pour violation de l’exclusivité par un tiers, soit-elle


enregistrée ou non, trouve son fondement dans le principe général de la responsabilité
du fait personnel basé sur la faute. C’est l’article 122 du Code des obligations et des
contrats libanais qui en détermine les circonstances : « tout fait quelconque de
l'homme qui cause à autrui un dommage injuste oblige son auteur à réparation »1511.

791. Suivant les règles générales de la responsabilité civile, il faut apporter la


preuve de trois éléments : la faute, le préjudice, le lien de causalité entre la faute et le
préjudice subi. Dans notre cas, résultant de la violation des tiers de la clause
d’exclusivité, la simple violation prouvée ou présumée de la clause d’exclusivité
constitue l’élément matériel de la faute. L’élément moral étant réalisé du seul fait que
le tiers avait conscience que le contrat lui est opposable. D’où la faute simple prouvée
dans ce domaine suffit, tandis qu’en France, et avec la concurrence déloyale, elle
exige la démonstration d'une faute fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil,
laquelle n'est pas présumée. Le fait que la seule constatation d'une perte de clientèle
puisse faire présumer la faute, voire la responsabilité du concurrent, serait la négation
même du principe de liberté de la concurrence1512.

792. Comme l'écrivait M. SERRA, « s'il est un domaine où le dommage ne doit


pas être l'élément prédominant de la responsabilité, c'est bien celui de la
concurrence ; dans cette conception, la concurrence déloyale peut être caractérisée

1511
En droit français, art. 1382 C. civ. « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un
dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
1512
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S. ROBINNE, V. VALETTE-
ERCOLE, Concurrence interdite - Concurrence déloyale et parasitisme, pan. 2005-2006, 07/12/2006
-412-

par des comportements qui mettent en péril la concurrence en tant que telle, la
déloyauté ne reposant plus exclusivement sur des critères propres à la morale des
affaires »1513. En réalité, ce n'est pas le détournement de clientèle en lui-même qui est
sanctionné par l'action en concurrence déloyale, mais les moyens déloyaux utilisés
pour parvenir à cette fin1514. De nombreux arrêts subordonnent d'ailleurs la
responsabilité du tiers qui contracte en méconnaissance des droits d'autrui à sa
connaissance de ceux-ci1515 : « Toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à
enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle
à l'égard de la victime de l'infraction »1516. En revanche, d'une façon générale, nul
n'est tenu de s'informer sur l'existence de droits incompatibles avec les actes qu'il
entend conclure1517.

793. Les deux autres éléments, préjudice et lien de causalité, résultent d’une
simple constatation de faits. Le préjudice1518 consiste dans la commission du
représentant perdue du fait de l’importateur pour la quantité importée, ainsi que dans
le manque à gagner pour la même quantité, où a été jugé que « le préjudice matériel
se concrétise notamment par ce qui a été supporté comme frais pour la promotion
des produits et sa diffusion, ainsi que ce qui a été subi de gain manqué »1519. De
même, il a été jugé que « le préjudice pour la société mandante est caractérisé par le
fait de n'avoir pas tiré le profit des importants investissements qu'elle justifie... avoir
fait en matière de publicité et de promotion de ses programmes immobiliers »1520. Il
s’agit aussi du préjudice moral, éventuellement subi notamment par rapport à sa

1513
Y. SERRA, L'évolution de l'action en concurrence déloyale en droit français, in Mélanges
Dutoit, Genève, 2002, Libr. Droz, p. 287 s ; Concurrence déloyale, Rép. com., 2005, n° 94.
1514
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 24.
1515
V. J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU, préc., n° 745.
1516
Cass. com., 13 mars 1979, D. 1980, Jurispr. p. 1, note Y. SERRA.
1517
V., par ex., en matière de cession Dailly, Cass. com., 12 janv. 1999, Bull. civ., IV, n° 8 ; Adde,
S. GINOSSAR, Liberté contractuelle et respect des droits des tiers, émergence du délit civil de fraude,
LGDJ, 1963, n° 11, p. 24.
1518
V. supra n° 630 et s.
1519
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « le préjudice n’est nécessairement une perte causée au représenté, mais peut
consister en un gain manqué ».
1520
CA Aix-en-Provence, 2e Ch., 7 nov. 2005, Juris-Data n° 2005-292527.
-413-

réputation1521. Dans le même sens vient l’arrêt de l’assemblée plénière : « Attendu que
le préjudice matériel résulte par la perte de la représentation exclusive, dont elle a
subi des énormes efforts pour la qualifier en premier parmi d’autres. Cette perte a
des effets négatifs sur son patrimoine financier, ainsi que sur sa réputation et sa place
dans son entourage et dans le secteur commercial libanais ; ce qui forme l’élément
morale de ce préjudice et par la suite constitue un préjudice de la perte de chance
concrétisée par une chance sérieuse de gagner un profit futur en plus de ce qu’elle a
supportée comme frais du dossier »1522.

794. Ainsi, l'atteinte portée aux éléments attractifs de clientèle ou à la capacité


concurrentielle de l'entreprise constitue un préjudice indemnisable au titre de l'action
en concurrence déloyale, ce qui fait souvent dire à la jurisprudence1523 et à la
doctrine1524 que le préjudice s'infère de la faute, dénigrement qui provoque
nécessairement un trouble commercial à l'entreprise victime des agissements1525. En
effet, ce trouble commercial constitue un préjudice actuel et certain1526 permettant de
demander des dommages et intérêts, même en l'absence de perte de clientèle ou de
baisse du chiffre d'affaires1527. Pour le lien de causalité, il est normal que
l’importation en violation de l’exclusivité soit la cause du préjudice consistant

1521
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « le préjudice moral se caractérise par la surprise du représentant de la
résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans le marché commercial et à sa réputation économique ».
1522
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4 p. 1550.
1523
C'est ce qu'affirme la Cour d'appel de Paris, à propos d'un dénigrement largement avéré,
caractérisé par des propos dénigrants sur Internet tenu par un bijoutier à l'égard de son concurrent. Le
préjudice « s'infère nécessairement de ce dénigrement ainsi caractérisé qui est en effet générateur d'un
trouble commercial résultant d'une atteinte à l'image », sans qu'il n'y ait lieu de démontrer une baisse
de chiffre d'affaires consécutive aux pratiques dénoncées : CA Paris, 29 juin 2006, 5e Ch. B, n°
04/17068 ; Cass. com., 14 juin 2000, RJDA 2000, n°1195 : le préjudice s’infère nécessairement de
l’acte déloyal.
1524
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la concurrence interne et européen, 5e éd., D., 2011, n°
300 ; L. VOGEL, Droit français la concurrence, Lawlex, 2006, n° 20 ; Y. AUGUET, Droit de la
concurrence, Tout le Droit, Ellipses, 2002, p. 57.
1525
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S. ROBINNE, V. VALETTE-
ERCOLE, Concurrence interdite - Concurrence déloyale et parasitisme, pan. 2005-2006, 07/12/2006 ;
Y. SERRA, Concurrence déloyale, Rép. Com., n° 94.
1526
Ph. LE TOURNEAU, Parasitisme, J.-Cl. Concurrence consommation, fasc. 277 et 228, 4e éd.
2010 (1re éd. 1995), n° 14 ; M. CHAGNY, Droit de la concurrence et droit commun des obligations,
préf. J. GHESTIN, D., 2004, n° 514.
1527
G. CANIVET, Exposé introductif général in Conquête de la clientèle et droit de la concurrence,
Gaz. Pal., 2001, 2, doctr. 1650.
-414-

essentiellement dans un manque à gagner1528. Mais bien entendu, l’intervention du


concédant, à certains égards, peut se révéler nécessaire, parfois, même indispensable
pour faire cesser la concurrence. Il peut s’agir pour lui, s’il est lié au tiers par un
contrat de fourniture, de lui arrêter les fournitures, à titre de pression pour faire cesser
la concurrence frauduleuses entreprise par celui-ci contre le bénéficiaire, en violation
de l’exclusivité qu’il doit respecter1529.

795. Ces principes étaient justifiés à deux niveaux : En premier lieu, la


responsabilité délictuelle du tiers ne nécessite pas qu'il se soit rendu coupable d'une
fraude aux droits des contractants. Si la sanction de la participation à la violation par
le distributeur sélectionné de son obligation de ne pas revendre hors réseau est
maintenue1530 et se trouve même consacrée par le législateur1531, le seul fait d'acquérir
les produits sur un marché parallèle et de les commercialiser en dehors du réseau ne
constitue plus en lui-même une faute1532. La connaissance de l'existence du contrat ne
suffit pas pour engager la responsabilité du tiers. Ceci paraît préférable, vu qu’il
s'inscrit dans le sens de l'évolution de la responsabilité civile qui a conduit à la
suppression de l'élément subjectif de la faute civile1533.

1528
Juge unique civil, décision du 17/12/2009, Rev. al Adl, 2010. t. 2, p. 796.
1529
CA Beyrouth, 3e Ch. civ., arrêt du 29/9/1994, Rev. al Adl, 1994, p. 93 : « La Cour juge
l’interdiction d’introduire des marchandises fausses ou contrefaites de la marque Teffal sur le
territoire libanais, vu qu’il appartient au seul représentant commercial de ces produits de les importer
et les commercialiser au Liban. L’intégration de ces faux produits dans le marché libanais constitue
une tacite violation de ses droits découlant de la représentation exclusive ».
1530
Cass. com., 21 mars 1989, Bull. civ., IV, n° 98 ; D., 1989, 427, note A. BENABENT.
1531
L’art. L. 442-6, I, 6° C. com. conforte l’exigence en sanctionnant le fait: « de participer
directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au
distributeur lié par un accord de distribution sélective(…) exempté au titre des règles applicables au
droit de la concurrence ».
1532
CA Paris 17 fév. 1993 et Cass. com., 27 oct. 1992 : D., 1995, somm. p. 83, obs. D. FERRIER.
1533
G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd., LGDJ, 1995, n° 24 ;
Celle-ci résultant seulement de circonstances particulières : En effet, il ne doit pas agir en raison de la
concurrence déloyale ou de la contrefaçon car à défaut sa responsabilité civile pourra être engagée : P.
JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors réseaux, D.
1990, p. 43. Citons par ex : l’achat des marchandises dans des conditions illicites ou frauduleuses
(Cass. com., 27 oct. 1992, Bull. civ., 1992, IV, n° 322), la revente des produits dans des conditions
illicites : revente à perte (CA Paris, 24 mars 1987, D., 1987, p. 107) ou dans des conditions déloyales :
atteinte à l’image de la marque par le caractère dévalorisant de la commercialisation des produits (Cass.
com., 24 mai 2011, Contrats, conc. consom. 2011, comm. 188, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; CA
Paris, 22 sept. 2004, D. 2005, pan. P. 149, obs. D. FERRIER ; CJCE, 4 nov., 1997, Dior, Rec. CJCE,
1997, I, p. 6034 : « le revendeur non agréé ne peut utiliser la marque des produits qu’il commercialise
-415-

796. En second lieu, la responsabilité délictuelle du tiers n'est pas davantage


subordonnée à la preuve d'une violation par l'un des contractants de ses engagements
à l'égard de l'autre. La responsabilité du tiers est par conséquent indépendante de celle
éventuellement encourue par l'une des parties à l'égard de son cocontractant, celle-ci
réparant un préjudice différent de celui causé par les actes du tiers1534.

797. Une fois de plus, à cet égard, nous affirmons que l’inscription au registre du
commerce n’est pas une condition préalable pour retenir une responsabilité
quelconque. Toute exclusivité non-enregistrée peut aussi bien servir de fondement
à la responsabilité en question. Cependant, la seule condition préalable à la sanction
de l’opposabilité qui doit être prouvée, est celle de l’existence à la base, d’un contrat
de représentation commerciale auquel se rattacherait la clause, ainsi que la
connaissance du tiers de l’existence de ce contrat. Le rôle de l’intention regagne son
importance à l’occasion de la responsabilité pénale.

Paragraphe 2 : La responsabilité pénale

798. L’importateur qui viole la clause de l’exclusivité insérée dans un contrat de


représentation commerciale peut être pénalement tenu responsable du chef de la
concurrence frauduleuse. Cette responsabilité résulte des termes de l’article 714 du
Code pénal libanais relatif à la concurrence frauduleuse qui dispose ce qui
suit : « Toute personne qui, par des moyens frauduleux, des allégations mensongères
ou des insinuations malveillantes aura détourné à son profit la clientèle d’autrui,
sera, sur plainte, punie…». Cette définition de concurrence frauduleuse trouve
quelques points communs avec une ancienne définition de la concurrence déloyale en
droit français : « la concurrence déloyale est le fait d’un commerçant qui, de
mauvaise foi, détourne, ou tente de détourner la clientèle, nuit ou tente de nuire aux

hors réseau dans un voisinage qui risquerait d’amoindrir gravement l’image que le titulaire a réussi à
créer de sa marque » ; J.-M. MOUSSERON, Detchema ou le rêve avili, JCP, E, 1985, CDE, n° 3) ; La
contrefaçon supposant des faits distincts, en dernier lieu : Cass. com., 4 oct. 2011, Contrats, conc.
consom. n° 6, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
1534
V. Cass. com., 24 mars 1998, Bull. civ., IV, n° 111 ; D., 1999, Somm., p. 113, obs. R.
LIBCHABER.
-416-

intérêts d’un concurrent par des moyens contraires aux lois, aux usages ou à
l’honnêteté professionnelle »1535.

799. L’acte frauduleux doit comporter deux éléments: l'élément matériel qui
forme la méthode frauduleuse, celle non-conforme aux coutumes, aux usages
commerciaux, aux bonnes mœurs, et aux bonnes relations entre les commerçants ;
l’élément moral dont le principal objet est d’avoir le contrôle sur le marché et de
capter exclusivement les clients1536. En effet, pour que l’acte soit considéré comme
illicite, il est prévu qu’il soit incombé à la personne auteur et qu’il le commis avec sa
connaissance de l’illégalité de ce qu’il fait, comme indication sur sa mauvaise foi
supposée1537.

800. L’élément majeur est ici celui de l’intention. Il ne suffit pas que la violation
de l’exclusivité ait eu lieu. Il faut aussi qu’elle ait eu lieu avec une intention
particulièrement frauduleuse en vue de nuire au représentant exclusif. Cette intention
de nuire se traduit parfois par le détournement de clientèle qui peut constituer un
agissement frauduleux. C’est « le fait d’une personne ou d’une entreprise qui
détourne ou tente de détourner la clientèle d’une autre entreprise ou encore s’efforce
de nuire aux intérêts de cette entreprise par des moyens contraire aux lois ou aux
usages professionnels »1538. Dans le même sens, il a été jugé qu’ « avec une
motivation quasi identique à propos d'un détournement de clientèle suite au départ
d'un salarié. La Cour de cassation considère que les transferts de dossiers concernant
quatre clients d'un cabinet d'expertise comptable à un autre s'étaient effectués en
méconnaissance des règles de déontologie de la profession d'expert-comptable, ce qui
suffisait à établir que de tels agissements étaient constitutifs de concurrence
déloyale »1539.

1535
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1, 1970, p. 344, n°
181.
1536
TI Beyrouth, 3e Ch. civ., décision n° 1080, 28/1/1998, Rev. al Adl, 1999, t. 3 et 4, p. 465.
1537
Idem.
1538
TGI Paris, 4 nov. 1992, PIBD, 1993, 539, III, 180.
1539
Cass. com., 12 juill. 2011, n° 10-25.386, D. 2011. 2782, note A. ROBERT ; Contrats, conc.
consom. 2011, n° 221, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
-417-

801. Cependant, pour la preuve du détournement de la clientèle, nous devons


préciser que la recherche de la destination de la clientèle est très délicate1540. Par
exemple, il suffit pour déterminer la clientèle de la marque représentée par un
représentant bénéficiaire exclusif, de compter les personnes qui auraient traité avec le
tiers importateur qui a illicitement introduit le produit sans l’intermédiaire du
représentant1541. En revanche, le fait qu'un tiers utilise depuis longtemps un signe pour
un produit identique ou similaire prêtant à confusion avec la marque demandée et que
ce signe jouit d'un certain degré de protection juridique est l'un des facteurs pertinents
pour apprécier l'existence de la mauvaise foi du demandeur1542. La nature de la
marque demandée peut également être pertinente aux fins de l'appréciation de
l'existence de la mauvaise foi du demandeur1543. En effet, dans le cas où le signe
concerné consiste en la forme et la présentation d'ensemble d'un produit, l'existence de
la mauvaise foi du demandeur pourrait être établie plus facilement lorsque la liberté
de choix des concurrents quant à la forme et la présentation d'un produit est restreinte
en raison de considérations d'ordre technique ou commercial, de sorte que le titulaire
de la marque est en mesure d'empêcher ses concurrents non seulement d'utiliser un
signe identique ou similaire, mais également de commercialiser des produits
comparables1544.

802. Nous constatons que la jurisprudence a considéré le travail avec l'intention


de frauder comme le moyen le plus important de la concurrence frauduleuse et

1540
En effet, nul ne peut prétendre avoir des droits acquis sur une clientèle malgré la notion fictive
de propriété de la clientèle : Cass. civ., n° 69, 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560.
1541
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
Beyrouth, 1972, p. 169 : « Mais, si un représentant concédant de l’exclusivité pour une certaine
marque s’est fourni auprès d’une autre fabrique, comment savoir que les personnes qui ont traité avec
lui pour les produits illicitement représentés auraient traité pour le même volume s’agissant la
première marque, surtout que les nouveaux produits sont censés être différents de nature des premiers
pour ne pas leur être concurrentiels, conformément aux dispositions de l’article 3 du décret-loi
n°34/67 ».
1542
TI Mont Liban, 3e Ch., décision n° 23, 30/10/2000, Rev. al Adl, 2001, p. 220 : « La protection
traditionnelle pour le viol du nom commercial et de la marque commerciale, se représente par l’action
de la concurrence illicite, basée sur les principes de la responsabilité délictuelle, qui suppose le viol
ou la contrefaçon du nom commercial dans une activité commercial similaire ou identique ».
1543
L'appréciation de la mauvaise foi du déposant d'une marque communautaire, Arrêt rendu par
Cour de justice des Communautés européennes, 1ere Ch., 11 juin 2009, n° C-529/07.
1544
Règlement CE n° 40-94 du 20 déc. 1993, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli AG/ Franz
Hauswirth GmbH, art. 51, D., 2009 p. 2396.
-418-

conduit à la création de confusion dans l'esprit du consommateur. Dès lors, aux fins
d'apprécier l'existence de la mauvaise foi, il convient également de prendre en
considération l'intention du tiers au moment du dépôt de la demande d'enregistrement.
Ainsi, l'intention d'empêcher un tiers de commercialiser un produit peut, dans
certaines circonstances, caractériser la mauvaise foi du demandeur. Tel est notamment
le cas lorsqu'il s'avère, ultérieurement, que le demandeur a fait enregistrer en tant que
marque communautaire un signe sans intention de l'utiliser, uniquement en vue
d'empêcher l'entrée d'un tiers sur le marché.

803. Sur ces faits, le droit libanais, tant dans la doctrine que la jurisprudence1545,
différencie deux types de concurrence :

« La concurrence frauduleuse : elle suppose la mauvaise foi dans l’intention de


nuire au commerçant propriétaire de l’exclusivité.

La concurrence déloyale, qui ne suppose pas la mauvaise foi et la mauvaise


intention ci-dessus citées, mais peut se former par une faute ou un acte déloyal
commis par un commerçant à l’égard d’un autre commerçant propriétaire de
l’exclusivité »1546.

804. En effet, la mauvaise foi n’est pas une condition d’existence dans
l’infraction de la concurrence déloyale ; solution justifiée par un célèbre arrêt de la

1545
Cass. civ., 5e chambre, arrêt n° 20 du 23/8/2008, éd. Sader, Rev. al Adl, 2009 : « Attendu que
les articles 97 et 98 du décret N° 2385 du 17/1/1924 (Relié au règlement des droits des propriétés
commerciales et industrielles publié au J.O. 1924) forment la base juridique pour l’action en
concurrence déloyale. Et après que l’article 97 a précisé les deux cas de concurrence déloyale,
l’article 98 a distingué entre l’action tendant à obliger le concurrent d’arrêter la concurrence ou bien
l’acte préjudiciable, et l’action dont l’objet est l’obtention d’une indemnité.
Attendu que l’article 97 du décret N° 2385, n’a pas désigné la concurrence déloyale d’une manière
précise, mais il a noté qu’est considéré concurrence déloyale :
- Chaque dérogation pour ce décret, manquée d’une des conditions pour pouvoir appliquer les
sanctions citées dans le sixième titre,
- Chaque acte donnant aux tribunaux la liberté d’y juger et d’évaluer, dont il leur apparaît comme
une concurrence illégale.
Attendu que la doctrine et la jurisprudence ont défini la concurrence déloyale en supposant que le
commerçant ou l’industriel, commis une faute professionnelle qui s’exprime par la dérogation aux
principes de loyauté et d'intégrité imposés dans le commerce et dans les relations entre les
commerçants, cherchant des profits déloyaux par l’attirance des clients communs entre lui et le projet
qui a subi cette concurrence ».
1546
CA Beyrouth, 1ere Ch. civ., arrêt n° 916 du 13 juin 1968, Rec. Hatem, vol. 82, p. 57 à 59, n° 3.
-419-

jurisprudence libanaise dont nous reprenons les importantes citations pour consolider
les traces de notre analyse :

« Attendu que l’idée d’assurer la présence de concurrence déloyale, résulte dans


la mesure de créer une confusion dans l’esprit du public,

Attendu que la jurisprudence libanaise, a adopté l’idée de la faute pour


déterminer l’acte de concurrence déloyale, et sera disponible dans tout acte ou
comportement contraire aux principes d'intégrité commerciale, et les traditions, les
habitudes et les coutumes commerciaux imposée dans les relations entre les
commerçants sans aucune distinction entre faute volontaire ou involontaire, c’est-à-
dire sans que cet acte soit nécessairement munis par la mauvaise foi1547.

Attendu que le travail avec l'intention de frauder est le moyen le plus important de
la concurrence illicite et conduit à la création de confusion dans l'esprit du
consommateur comme cela a été expliqué ci-dessus.

Attendu que la confusion créée par la similitude entre les marques dans l’esprit
des clients, pourrait fournir un bénéfice à la défenderesse et un préjudice à la
demanderesse.

Attendu qu’étant le préjudice probable suffisant pour accepter l’action en


concurrence déloyale, sachant que le but dans le cas de la concurrence déloyale est
non seulement la rémunération du la personne préjudiciée mais, le plus important, la
cessation des actes déloyales composants de la concurrence »1548.

805. Mais grâce au besoin et l’affaiblissement de l’action de concurrence


déloyale dans la protection d’autres activités commerciales, la doctrine et la
jurisprudence libanaise ont créé l’action de concurrence parasitaire ou les agissements
parasitaires1549. Celle-ci est basée sur l'exploitation d’un commerçant, la réputation et

1547
TI Beyrouth, 3e ch. civ., décision n° 1080, du 28/1/1998, Rev. al Adl, 1999, t. 3 et 4, p. 465.
Dans le même sens, Cass. com., 18 avr. 1958, D., 1959, p. 81 : « Il n’est pas exigé que la faute soit
intentionnelle, ni même qu’il ait imprudence, la simple constatation de la violation d’un devoir
professionnel suffit ».
1548
Cass. civ., 5e ch., arrêt n° 20 du 23/8/2008, éd. Sader, Rev. al Adl, 2009.
1549
« Le parasite s'insère dans le sillage économique d'une entreprise, afin de tirer profit, sans
bourse délié, de ses efforts et de sa réputation. Il moissonne là où il n'a pas semé. On parle alors
d'agissements parasitaires… » : Y. GUYON, Droit des affaires, Entreprises en difficultés,
-420-

la renommée d’un autre commerçant, dans un champ commercial diffèrent de celui


pratiqué par le parasite, qui, le cas échéant, effectue des comportements qui lui
apporte des clients1550.

806. Il n’est pas nécessaire de s’y attarder. Les règles du droit pénal spécial
particulières à chaque infraction s’appliquent en totalité. Cependant, remarquons-nous
que l’inscription au registre du commerce de la représentation commerciale exclusive
ne crée qu’une présomption de mauvaise foi des tiers, et que celle-ci ne suffit pas à
provoquer une responsabilité pénale. Il découle de cette même disposition que le
moment pertinent aux fins de l'appréciation de l'existence de la mauvaise foi du tiers
est celui du dépôt, par l'intéressé, de la demande d'enregistrement1551.

807. D’après ce qui précède, nous remarquons que les effets résultant de
l’inscription, dans leur portée et leur étendue, découlent principalement de
l’opposabilité de la clause d’exclusivité elle-même. Une différence marquée entre les
régimes de l’exclusivité existants respectivement en France et au Liban. Cette
différence résulte d’un pas positif effectué par le législateur libanais, celui de
l’organisation de la publicité officielle de la convention d’exclusivité, et la
détermination des effets qui en résultent. Par conséquent, il apparaît que la différence
principale entre droit français et droit libanais en matière d’exclusivité se situe au
niveau de la situation juridique des tiers, personnes réputées étrangères au contrat de
représentation commerciale. En effet, lorsqu’une personne en représente une autre,
elle ne peut user, pour le compte de la personne représentée de droits que celle-ci ne
possède pas.

redressement judiciaire, faillite, 9e éd. Economica, t. 2, 2003, p. 862, n° 852. Pour M. Saint-Gal,
l’usurpation de la réputation d’autrui est le fait de se référer, sans s’adresser à la même clientèle, à une
marque ou à toute autre forme de propriété industrielle ou intellectuelle créée par un tiers et
particulièrement connue et ce à l’effet de tirer profit de sa renommée : Y. SAINT-GAL, Concurrence
déloyale, Concurrence parasitaire, agissements parasitaires: RIPLA 1956, n° 25/26, p. 37.
1550
TI Mont Liban, 3e ch., décision n° 23, 30/10/2000, Rev. al Adl, 2001, p. 220.
1551
L'appréciation de la mauvaise foi du déposant d'une marque communautaire, Arrêt rendu par
Cour de justice des Communautés européennes, 1ere Ch., 11 juin 2009, n° C-529/07.
-421-

Conclusion du second titre

808. Il est admis que l'opposabilité d'un contrat fait peser sur les tiers une
obligation de respecter la situation née du contrat, ce qui se traduit par une obligation
de ne pas faire1552 ou encore une obligation passive1553 et correspond au « devoir de
toute personne de tenir compte de ce qui existe en dehors d'elle et de s'abstenir
éventuellement d'y porter atteinte »1554. Le plus souvent, il est retenu que
l'opposabilité du contrat met à la charge des tiers un devoir d'inviolabilité1555. Ce
devoir d'inviolabilité conduit à une limitation de la liberté contractuelle des tiers
puisqu'ils sont tenus de ne pas porter atteinte à la situation contractuelle en s'associant
à la violation contractuelle d'une partie au contrat ou même en agissant de telle sorte
que l'utilité du contrat soit compromise pour les parties1556.

1552
F. TERRE., Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz,
2009, n° 490 ; J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001,
n° 730 ; Ph. MALAURIE, L. AYNES et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, 5e éd., Defrénois,
2011, n° 793 ; J. GHESTIN, Les effets du contrat à l'égard des tiers, comparaisons franco-belges,
LGDJ, 1998, n° 9.
1553
Y. FLOUR, L'effet des contrats à l'égard des tiers en droit international privé, th., Paris II,
1977, n° 37. Rapp. S. GINOSSAR, Droit réel, propriété et créance, élaboration d'un système rationnel
des droits patrimoniaux, LGDJ, 1960, et son analyse de l'obligation passive universelle appliquée aux
droits de créance qui traduit le devoir imposé aux tiers « de ne rien faire pour aider le débiteur à se
dérober de son engagement » : cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution
parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 7.
1554
J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf. D. MARTIN, LGDJ, 1984, n°
2-3.
1555
G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, op.cit., n° 202 ; F.
BERTRAND, L'opposabilité du contrat aux tiers, th., Paris II, 1979, n° 137.
1556
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, idem.
-422-

Conclusion de la deuxième partie

809. Nous retiendrons que, le principe d'opposabilité assure d’une part la


protection des parties et surtout du représentant commercial à deux égards. En
premier lieu, le promoteur d’un secteur est autorisé à opposer au distributeur parallèle
un contrat auquel il est également tiers, à savoir le contrat qui fonde le réseau
étranger, ce qui lui permet de se prévaloir de la situation contractuelle née du secteur
étranger afin d'établir la faute du revendeur parallèle. Le promoteur peut ainsi
reprocher la violation de l'exclusivité à laquelle était tenu le fournisseur étranger et à
laquelle s'est associé le distributeur parallèle en s'approvisionnant par ce biais. En
cela, l'illicéité de l'approvisionnement est établie. En second lieu, le promoteur oppose
son propre contrat, et plus largement son propre secteur, au distributeur parallèle pour
établir son préjudice1557.

810. Et d’autre part, ce principe assure l’opposabilité à l’égard des tiers en les
faisant respecter la situation juridique issue du contrat, en vue d’assurer une large
protection au représentant commercial. Cette protection est le fruit d’une publicité
suite à une inscription de la clause d’exclusivité au registre du commerce,
accompagnée par des sanctions en cas d’atteintes. En général, les droits subjectifs sont
protégés de façon préventive par l’inefficacité de l’exercice du droit par un tiers. Cette
protection peut être complétée de diverses manières et notamment par une interdiction
de porter atteinte à la substance du droit, sanctionnée par la responsabilité délictuelle.
Une telle protection est néanmoins une simple faculté pour l’ordre juridique, elle n’est
pas imposée par la nature du droit subjectif.

1557
« L'effet relatif des contrats n'interdit pas aux tiers d'invoquer la situation de fait créée par les
conventions auxquelles ils n'ont pas été parties, si cette situation de fait leur cause un préjudice de
nature à fonder une action en responsabilité délictuelle » : Cass. com., 11 janv. 2005, D. 2006. Somm.
512, obs. D. FERRIER.
CONCLUSION GÉNÉRALE
-424-

811. Nous avons montré que pour pouvoir bénéficier du statut de représentant
commercial libanais ou d’agent commercial français, il ne faut pas seulement agir
d’une manière indépendante mais encore professionnelle, après avoir traité de
manière permanente, sans être lié par un contrat de travail ou de louages de services.
Partant de là, le législateur libanais a cherché à règlementer le statut de certains
intermédiaires de commerce. Il a fait preuve d’un certain esprit de création mais par
inspiration du droit français, en étendant la protection du décret-loi N. 34/67 à
d’autres personnes que le représentant.

812. La protection concerne en premier lieu, le mandataire, soit le représentant


commercial en droit libanais agissant pour le compte de son représenté, correspondant
à l'agent commercial en droit français dont le statut a précisément inspiré le droit
libanais. La représentation conventionnelle en droit français s’identifie au mandat ; le
cumul de celui-ci avec les contrats de travail ou d’entreprise, sans être expressément
reconnu, crée une distinction entre les différents représentants commerciaux en
fonction du degré de dépendance ou d’indépendance du représentant. Le cas échéant
se vérifie une échelle entre subordination juridique totale ou relative, avec des
nuances entre les deux.

813. Cette indépendance est la qualité intrinsèque de l’agent commercial où


toute clause visant à entraver cette indépendance permet de requalifier le faux agent
commercial en salarié. En d’autres termes, le critère de distinction sur le plan
juridique entre les statuts du représentant commercial et du représentant de commerce
(VRP), est l’existence ou non d’un lien de subordination juridique : le représentant
commercial exerce ses activités librement, à l’inverse du représentant de commerce,
qui est soumis à l’autorité du représentant.

814. Cependant, le représentant est investi d'une mission le plus souvent durable,
par laquelle il est chargé de négocier, et éventuellement de conclure des contrats de
vente, d'achat, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte
d'autrui. C’est dire qu’il est appelé à accomplir des actes dont le bénéfice direct va à
son mandant. Le cas échéant, il devrait avoir normalement la qualité pour conclure
des actes juridiques au nom et pour le compte des mandants. C’est dire que
-425-

l’intermédiaire qui ne négocie pas ne peut pas prétendre au bénéfice du statut d’agent
commercial.

815. Ce dernier jouit d’un statut particulier qui définit plus ou moins
rigoureusement ses droits et obligations vis-à-vis de l’entreprise représentée et des
tiers. C’est que la qualité d'agent découle de la constatation d'un certain nombre de
conditions de fond permettant l'accès à la profession, la réglementation leur réservant
alors le titre d'« agent commercial » et l'application du statut de protecteur légal. En
réalité, l'application du statut du représentant commercial ou d'agent commercial ne
dépend ni de la volonté des parties exprimée dans le contrat, ni de la dénomination
qu'elles ont donnée à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l'activité
est effectivement exercée.

816. En revanche, le statut de représentant commercial confère à celui qui en


bénéficie plusieurs avantages qui tiennent à l'exclusivité dont il est investi,
l'indemnisation qui lui est accordée en cas de rupture et la compétence territoriale à
laquelle il est soumis. Ces éléments sont accompagnés par la notion d’intérêt
commun. Cette notion autrefois réservée aux seuls agents non statutaires aurait dû
disparaître en France à l’occasion de la loi de 1991 avec l’élargissement de la
qualification d’agence commerciale à toute personne qui en réunissait les conditions
et dorénavant strictement cantonnées et exigées. Bien au contraire, cette loi a comblé
les lacunes du statut protecteur d’agence commerciale pour les agents autrefois
qualifiés de non statutaires. Elle a donné une consécration inattendue et définitive à la
notion d’intérêt commun, qui permettait d'indemniser l'agent commercial en cas de
résiliation unilatérale injustifiée du contrat par le mandant. Cette notion commune aux
deux droits comprend deux éléments distincts : la continuité et la durée de la
collaboration entre les parties, et la constitution en commun d’une clientèle. Le
mandat ayant un double intérêt, il ne peut être révoqué que pour motifs légitimes ou
par consentement mutuel.

817. Le statut de représentant commercial au sens du décret-loi n’est toutefois


pas réservé aux seuls équivalents de l’agent commercial de droit français. Le
législateur libanais a, en effet, souhaité accorder la protection découlant du statut à
une catégorie plus large, englobant le commerçant agissant pour son propre compte
-426-

après avoir acquis la qualité d’un représentant ou d’un distributeur exclusif unique
suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67. Le représentant
commercial, au Liban, n’est donc pas simplement le mandataire, mais aussi le
distributeur exclusif.

818. Le modèle français de protection de l’agent commercial se trouve alors


dépassé par le droit libanais. Ce dépassement se concrétise par la réunion sous le
même décret-loi au Liban, des catégories des personnes existant en France sous
différents textes. De là, en agissant pour le compte d’autrui, le représentant s'oppose à
l'intermédiaire qui conclut des affaires pour son propre compte, tel par exemple le
concessionnaire revendeur ; il se distingue d’une part du commissionnaire qui agit
pour le compte d'un commettant, mais en son propre nom ou sous un nom social qui
n'est pas celui de son commettant ; d’autre part, il se distingue du courtier, qui,
comme intermédiaire de commerce, joue le rôle d’un « facilitateur » entre les parties
du contrat, les aidant à aboutir à la conclusion du contrat sans qu’il intervienne
comme partie. Sur cet acquis, nous avons pu démontrer qu’après la réunion de
certaines conditions, le commissionnaire, le courtier et le concessionnaire pourront
relever des personnes que le législateur voulait protéger sous le décret-loi sans les
nommer.

819. Cependant, en tant que mandataire, puisque telle est la qualification retenue
par le droit positif français, apparaisse la différence avec le droit libanais puisque
l'agent commercial ne peut avoir la qualité de commerçant. Or, une analyse différente
de la nature juridique du contrat d'agence a conduit parfois à retenir principalement la
conception du contrat d'entreprise. Ainsi, l'article 4 du décret du 22 décembre 1958
imposait aux agents commerciaux l'immatriculation préalable à leurs activités sur un
registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce de leur domicile. Mais la loi
du 25 juin 1991, codifiée sous les articles L 134-1 et suivants du Code de commerce,
intervenue pour transposer dans le droit interne la directive européenne du 18
décembre 1986, ne reprend pas l'obligation d'immatriculation : élément indispensable
pour l’opposabilité en droit libanais.

820. Le principe d'opposabilité issu de l’inscription de la clause d’exclusivité est


primordial pour cette catégorie de personnes visées à l’alinéa second de l’article
-427-

premier du décret-loi N. 34/67. Il assure la protection des parties et surtout du


représentant commercial- distributeur exclusif unique- Ceci se traduit par le respect
de la situation juridique issue du contrat, accompagné par des sanctions en cas
d’atteintes. En général, les droits subjectifs sont protégés de façon préventive par
l’inefficacité de l’exercice du droit par un tiers. Cette protection peut être complétée
de diverses manières, notamment par une interdiction de porter atteinte à la substance
du droit, sanctionnée par la responsabilité délictuelle.

821. Le statut du représentant commercial fait alors apparaître le caractère plus


protecteur du droit libanais sur le droit français. Cela résulte d’abord du régime
d’indemnité retenu en droit libanais. Certes, les droits français et libanais prévoient
une indemnité équivalente au préjudice subi, en cas de cessation du contrat par le
mandant sans faute du représentant. Mais en droit français, l'agent commercial perd le
droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la
cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits ; alors qu’une telle exigence ne
se retrouve pas en droit libanais.

822. Cela résulte ensuite des conditions de l’opposabilité aux tiers de la clause
d’exclusivité subordonnée en droit libanais à son inscription. Ceci se traduit par une
protection particulière accordée au représentant commercial de nationalité libanaise.
Cette dernière présente un privilège au représentant commercial. Ce qui a été vérifié à
plusieurs reprises par l’interrogation du législateur sur la nationalité libanaise du
représentant commercial ainsi que sur la nécessité de l’exercice du travail au Liban en
faveur des commerçants du pays. De même, une compétence territoriale a été mis en
faveur du représentant libanais, en qualifiant les tribunaux libanais compétents
lorsqu’un libanais est partie au litige et de manière générale lors d’un litige subi par
un représentant commercial notamment libanais exerçant ses activités au Liban; ce
qui présente le représentant commercial libanais en avantage à l’agent commercial
français.

823. En définitive, le droit libanais paraît plus protecteur des intermédiaires du


commerce que le droit français. On comprend alors que le représentant commercial
puisse constituer la véritable cheville ouvrière du commerce libanais par
l’intermédiation qu’il opère entre le producteur et l’acheteur. Homme pivot entre
-428-

plusieurs nations, le représentant commercial apporte à l’exportateur sa connaissance


du marché étranger, son savoir-faire et lui permet d’accéder rapidement à des
clientèles jusque-là inaccessibles. Dans ces conditions, nous comprenons aisément
que les opérateurs économiques sollicitent volontiers les représentants commerciaux
pour réaliser l’expansion de leurs activités de distribution, tant il est vrai que le
recours aux services d’autrui a toujours été un instrument juridique universel de la
commercialisation.
ANNEXES1558

1558
Libre traduction de l’auteur de la langue arabe
-430-

La Représentation Commerciale
Décret-loi N. 34 issue le 5/8/ 1967

Article 1 (modifié par le décret N. 9639 du 6/2/1975)

Le représentant commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et


indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de services, entreprend des négociations
pour conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, et le cas
échéant, se livre à ces activités au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur compte.

Est aussi considéré comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour
son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de
représentant ou de distributeur exclusif unique.

A dater de l’entrée en vigueur du présent décret-loi, tout en maintenant les droits acquis
antérieurement et en tenant compte de la réciprocité que les représentants commerciaux étrangers
devront prouver, le représentant commercial doit être libanais et doit avoir un établissement
commercial au Liban.

Et si le représentant de commerce est une société, il faut :

a- Dans les sociétés de personnes et pour les sociétés à responsabilité limitée : que la
majorité des associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et que
celui qui a le droit de signer soit libanais.
b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la majorité du
capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du conseil d’administration
ainsi que son directeur général, ou que la personne déléguée par le président du conseil
d’administration ou par le directeur général pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient
tous des libanais.

Article 2 (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975 et la loi N.671 du 6/2/1998)

Tout contrat de représentation commerciale qui sera conclu après l’entrée en vigueur du
présent décret-loi devra être établi par écrit. Et pourra être pour une période déterminée ou
indéterminée.
-431-

Ce contrat de représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité limitant la


représentation à un représentant unique, ou stipulant la garantie du représentant envers ceux avec
lesquels il contracte pour le compte de son représenté (ducroire), ou une clause de consignation
de marchandises en vue de la livrer à la clientèle.

La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été
dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du commerce, elle n’est pas
applicable pour les produits alimentaires à l’exception des produits de consommation spéciale
qui seront déterminés par décret pris en Conseil des Ministres après consultation d’une comité
qui sera composée du Directeur Général de l’Economie et du Commerce, d’un représentant de la
chambre Syndicale des Représentants de Commerce au Liban, d’un représentant de la Fédération
Nationale Générale des Sociétés Coopératives, d’un représentant de la Confédération Générale
des Travailleurs, et d’un représentant de la chambre de Commerce et d’Industrie. Ce comité sera
désigné par décret pris en Conseil des Ministres.

L’exclusivité de la représentation commerciale pour les produits alimentaires pourra être


rétablie par décret pris en Conseil des Ministres après consultation du comité mentionné au
paragraphe précédent, lorsque les circonstances économiques le permettront.

Une redevance annuelle de somme 500,000 L.L cinq cents milles livre libanaise, sera versée
contre chaque contrat de représentation commerciale inscrit au Ministère d’économie et de
commerce.

Article 3

Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des activités de sa


représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement:

1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.


2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à
condition que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première
ou bien ne constitue pas une concurrence à celle –ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses
-432-

mandants. Et dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations
respectives, soit aux dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.

Article 4 (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975)

Le contrat de représentation commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des
parties contractantes.

Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre motif
légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité
équivalente au dommage subi et au gain manqué.

Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par
l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité évaluée
par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la
marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le
bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de représentation

1- Un registre spécial sera établi au Ministère de l’économie et du commerce pour les


sociétés et les établissements désirant s’occuper de la représentation commerciale au Liban, où
ils seront obligés de s’y inscrire et un feuillet y sera ouvert :
a- Pour toute société dont son contrat de représentation a été enregistrée par son
mandataire dans son registre spécial à dater de l’entrée en vigueur de la présente loi.
b- Pour toute société objet d’une action en justice basé sur les dispositions du décret-loi
n 34 du 5 aout 1967 et de son amendement.

c- Pour toute société contre laquelle a été rendu un jugement non exécuté.

2- Les deux mentions suivantes peuvent être portées sur le feuillet de toute société :

a- La mention d’une action en justice qui lui est intenté en vertu du décret-loi n 34 du 5-
8-1967 et de ses amendements qui sera inscrite dès la présentation de l’assignation dont une
copie sera notifié au Ministère de l’économie et du commerce (le registre spécial).

b- La mention d’un jugement définitive rendu contre elle en vertu de décret-loi n 34 du 5


aout 1967 et de son amendement.

3- Il est permis à un nouveau représentant de représenter une société sur le feuillet de


laquelle figure une mention d’une action en justice et d’enregistrer sa représentation au registre
-433-

du commerce spécial, sous l’obligation, durant les 3 mois à dater du prononcé d’un jugement
irrévocable contre cette société en vertu du décret -loi n 34 du 5-8-1967 et de son amendement,
de choisir entre :

- l’exécution du jugement au lieu et place de la société condamnée, en conservant son droit


de recours contre cette dernière.
- le désistement définitif à la représentation de cette société et l’acceptation de la radier de
son registre spécial.

4- Il sera interdit à la société contre laquelle a été rendu un jugement irrévocable d’être
représentée au Liban tant qu’elle n’exécute pas elle-même le jugement rendu ou tant que son
nouveau représentant ne l’a pas exécuté en conservant son droit de recours contre elle.

5- Un ancien représentant a le droit , en cas de mention d’un jugement irrévocable en vertu


des dispositions du décret-loi n 34 du 5-8-1967 et de son amendement, sur le feuillet de la société
dont il représentait , de notifier la teneur du jugement à la direction des douanes afin de ne pas
permettre le dédouanement des marchandises importées produites par la société condamnée,
qu’après que son importateur présente une attestation certifiant la radiation de la mention sur le
feuillet de la société.

Article 5

Nonobstant toute clause contraire, les tribunaux du lieu où le représentant commercial


exerce son activité sont compétents pour trancher les litiges naissant du contrat de représentation
commerciale.

Article 6

Le présent-décret-loi doit être publié au Journal Officiel et ses dispositions sont applicables
aux contrats passés avant son entrée en vigueur, que ce soient écrits ou prouvés par tout autre
moyen admis selon la législation antérieure.

Annexe I
-434-

République Libanaise
Ministère de l'Economie et du Commerce
Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce - Département des Entreprises

Enregistrement du contrat de représentation commerciale, ou agence


exclusive
Ceux qui désirent enregistrer un contrat de représentation commerciale ou d’agence
exclusive, doivent retirer une attestation d’enregistrement auprès du Ministère de
l’économie et du commerce.

• Les documents demandés et leurs références:

Document Les conditions Référence


Une demande - Signée du directeur Ministère de l'Economie et
responsable de l’entreprise du Commerce
locale ou de la société ou du
commerçant ou de l’agent.
- Son thème est
l'enregistrement de la
représentation commerciale
(modèle approuvé par le
Ministère)
L’accord entre l’entreprise - Datée en mentionnant - Le registre du commerce
locale et l’entreprise étrangère exclusivement les matières ou dans le pays fabricant
ou une copie conforme les produits inclus dans le ou
champ d’exclusivité. - L’ambassade libanaise
- Certifié par: dans le pays fabricant
ou
- Le Ministère des affaires
étrangères Libanaises

- Traduit à la langue arabe - Interprète assermenté


- Certifié par : - Ministère de la justice
Attestation de Certifiée par : Le registre du commerce
l'enregistrement de l'accord au
registre du commerce
Le statut principal de - Si la demanderesse est Le registre du commerce
l'entreprise locale une entreprise
- Certifié par :
la radio commerciale Si la demanderesse est une Le registre du commerce
entreprise ou société ou un
commerçant

Un mandat Si le délégué à signer n’est Un notaire


pas personnellement le
demandeur, il sera remplacé
par le mandataire

• Le mécanisme de déroulement du fichier, son délai d'achèvement et les frais prévus:


-435-

Le mécanisme de Délai d’achèvement Frai prévu


fonctionnement du fichier

La livraison des documents au 5 jours au Timbre financier de valeur


département de l’office du commerce Maximum 1000 L.L
• enregistrer la transaction et la
donner un numéro et une date de
réception.
• garder le numéro et la date pour
la révision.
• spécifier une date ultérieure afin
que le service puisse vérifier les
documents et s’adresser aux
organismes concernés (affaire
renvoyée à l'Office du boycott
d'Israël).

A - Après son retour de l'Office du


Boycott et s'assurer qu'il n’est pas
interdit de s’engager avec,
et que l'ensemble des documents
nécessaires est complet, il sera
question de de préparer une
ordonnance d’encaissement en faveur
du secrétaire du fonds du Trésor
centrale.
S’il est interdit de s’engager avec
l’entreprise, le fichier sera conserver
en attendant le recours vers le
demandeur responsable de l’affaire et
lui notifier le résultat.

B- Si le dossier est incomplet, il


sera placé dans le dossier des litiges
afin de s’adresser aux demandeurs

Ministère des Finances ou la 500.000 L.L


Banque
• Versement de l’ordonnance pour
être payé
• Obtenir les deux copies bleu et
jaune

Département des Entreprises Immédiatement


• Retourner la copie bleue au
département des entreprises en gardant
la jaune
• Réception de l’attestation

Annexe II
-436-

Ministère de l'Economie et du Commerce


Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce
Département des Entreprises

Objet: Demande d'enregistrement d'un contrat de représentation commerciale

Demandeur : ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. de la nationalité ... ... ... ... ... ... ... ... ...
... .. résident ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ......................... .
Rue ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. propriétaire……………………..
Téléphone ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... qui pratique le
commerce…………………………………………………………………..
vous demande d’enregistrer le contrat de représentation commerciale émis par
l’entreprise... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ......... de la nationalité... ... ... ... ... ... ...
………….... ... ... .. ayant son établissement à…………………………………...et qui
pratique le commerce ou l’industrie
…………………………………………………………………………………………………
….. ………………………………………………………………………
comme les seuls représentants de cette entreprise au Liban, en espérant d'enregistrer cela
au registre spécial et nous donnant l’attestation demandée, sachant que ce
contrat est enregistré auprès du registre du commerce le ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ..........
sous le n ° ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. sous la réserve des droits découlant de
l'application de l'article 15 du décret législatif n.83/73

Cordialement,

Signature du demandeur ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ..

Annexe III
-437-

Ministère de l'Economie et du Commerce


Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce
Département des Entreprises

Date:……

Demandeur: ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...

Objet: Demande d’attestation en vertu de l’accomplissement d’inscription d’un contrat.

Auprès du Secrétariat du registre du commerce de Beyrouth.


L’intervenant demande... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... de votre secrétariat de lui
donner une attestation pour l’accomplissement d’inscription de représentation exclusive
entre lui et l’entreprise ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...
dans son registre commercial N. ... ... ... ... ... ... ... ... ... conformément aux règles .

Avec respect

La signature du demandeur: ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...

Annexe IV
-438-

Ministère de l'Economie et du Commerce


Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce
Département des Entreprises

Nom de la transaction: Paiement de taxes annuelles pour les contrats de représentation


commerciale

• Les documents à joindre et les endroits à accomplir:


1. Une demande signée par le demandeur (le directeur de succursale ou le mandataire)
en précisant clairement l'adresse de l’entreprise étrangère en langue étrangère et l'adresse du
mandataire au Liban
2. Une copie d’attestation pour l’ancien enregistrement (le demandeur)

• Le mécanisme de fonctionnement du fichier, son délai d'achèvement et les frais prévus:

Le mécanisme de Délai d’achèvement Frai prévu


fonctionnement du fichier

- Livrer les documents du Une semaine au maximum


Département du Registre du
Commerce
- L’émission du
département d’une ordonnance
d’encaissement
- Conserver le numéro et
la date pour la révision

Ministère des Finances ou 500.000 L.L versée dans


la Banque un délai de deux mois à
• le paiement de compter de la date d'échéance
l’ordonnance d’encaissement de la redevance annuelle, sous
peine d'annulation de
l'enregistrement
conformément à l'article 4,
alinéa 2 du décret 3417 du
5/4/2000

Département des Immédiatement


Entreprises
La copie bleue est livrée
au département des entreprises
et le demandeur garde la copie
jaune issue de l’ordonnance
d’encaissement

Annexe V
-439-

Ministère de l'Economie et du Commerce


Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce
Département des Entreprises

Objet: Demande de paiement des frais d'inscription pour...........................................


.................
Référence: Décret n ° 3417 date du 13 Juillet 2000

L’entreprise demanderesse sollicite: ..............................................


...........................................
Son adresse :…………………………………………………….

la donnez une attestation de payer les redevances annuels prévues contre


l'enregistrement de son contrat de représentation commerciale de
l’entreprise :…………………………………………………………………
son adresse :………………………………………………………..

Nom du signataire: ............................................... ......


Signature: ................................................ .....

Pièces jointes:
- Une copie de la précédente attestation

Annexe V
BIBILOGRAPHIE GÉNÉRALE
-441-

BIBILIOGRAPHIE FRANÇAISE
I- OUVRAGES GÉNÉRAUX, TRAITÉS, MANUELS

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- Cours de droit civil français, par E. BARTIN, t. 6, 5e éd. LGDJ, Paris, 1920
- Droit civil français, par PONSARD A. et DEJEAN de la BÂTIE N., t. 6, 7e éd.,
Litec, 1975

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- Droit de la concurrence, Tout le Droit, Ellipses, 2002

AUGUET Y., DORANDEU N., GOMY M., ROBINNE S., VALETTE-ERCOLE


V.
- Droit de la consommation, Tout le Droit, Ellipses, 2008

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- Le droit français de la concurrence, Paris, PUF, 1981.

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- Le droit de la distribution commerciale dans l’Europe communautaire, Bruylant,
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- Droit de la distribution et de la consommation, Thémis Dr. privé, PUF, 1996

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- Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999

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- Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et commerciaux, 9e éd., Montchrestien,
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- Droit économique, Lamy, 2005

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- Contrat Modèle de Franchise., ICC éd., 2000
- Contrat modèle ICC d’agence commerciale, 2e éd., 2002

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- Droit commercial, 6e éd. Montchrestien, 1999

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- Les lois civiles dans leur ordre naturel, t. 14

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- Rép. Dr.fr., Verbis Lois et décrets, 1898, Légion d’Honneur-Lyon, 2e tirage 1924,
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- Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009

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- Traité élémentaire de droit commercial à l'exclusion du droit maritime, par J.
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- L'enrichissement sans cause en droit privé français interne et vues comparatives,
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- La nature et le régime juridiques de l’agence commerciale, Thèse, 1995
- L’agence commerciale, préf. FERRIER D., 2e éd., Litec, 2005

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- La distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf.
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- Le pouvoir en droit français, préf. CORNU G., Economica, 1985

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fraude, LGDJ, 1963

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- L’exclusivité, préf. Le CANNU P., LGDJ, 2006

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- Le commissionnaire ducroire, Etudes sur la commission, préf. HAMEL J., 1949

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- Le contrat de concession exclusive (Hermes), Montpellier - Master I, Droit des
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- La publicité et la loi, préf. LEVY M., éd. Litec, 11e éd., 2009

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- Le fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce, préf.
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- La franchise - Droit et pratique, 4e éd., Delmas, 2004
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- Fonds de commerce, Achat et vente, Exploitation et gérance, 16 éd., Delmas, 2004

LE TOURNEAU Ph.
- Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010
- Les contrats de franchisage, 2e éd., Litec, 2007

LICARI F.- X.
- La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. WITZ C.,
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LOKIEC P.
- Contrat et pouvoir : essai sur les transformations du droit privé des rapports
contractuels, préf. LYON-CAEN A., LGDJ, 2004

MAILLOT D.
- La place du principe de la liberté du commerce et de l’industrie en droit
administratif français, th., Paris, 1964

MALAURIE-VIGNAL M.
- L’abus de la position dominante, LGDJ, 2002

MARCHAND J.
- Des rapports existants dans le Nord de la France entre brasseurs et débitants,
Thèse, Lilles, 1930

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- Etude comparative des réseaux de distribution, Thèse, Montpellier, 1999

MAUGER-VIELPEAU L.
- Les ventes aux enchères publiques, préf. GAUTIER P.-Y., Economica, 2002

MAURICE R.
- Le commissaire-priseur et les ventes publiques de meubles, préf. ROBERT A.,
LGDJ, 1971

MEGNIN S.
- Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. JAYME E.,
Litec, 2003

MOUSSERON M.-J.
- Technique contractuelle, 2e éd., Francis Lefebvre, 1999
- Technique contractuelle, par MOUSSERON P., RAYNARD J., SEUBE J.-B., 4e éd.
Francis Lefebvre, 2010
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NEFUSSY-LEROY N.
- Les clauses d’exclusivité dans le contrat de franchise, Thèse, Nice, 1992

NERET J.
- Le sous-contrat, Thèse, Paris, LGDJ, 1979

ONDET P.
- Le représentant de commerce, Thèse, Poitiers, 1926

PALLARD R.
- Les obligations du commettant et les garanties du commissionnaire, D., 1949

PETEL Ph
- Le contrat de mandant, D. 1994
- Les obligations du mandataire, Thèse, Montpellier, 1987
- Les obligations du mandataire, préf. CABRILLAC M., Litec, 1988

PICOD Y.
- Le devoir de loyauté dans l’exécution du contrat, préf. COUTURIER G., Paris,
LGDJ, 1989

PUIG P.
- La qualification du contrat d’entreprise, préf. TEYSSIYE B., éd. Panthéon Assas,
2002

RIEG A.
- Le rôle de la volonté dans l’acte juridique, Thèse, LGDJ, 1961

ROBERT J.
- De l’opposabilité des contrats d’exclusivité, D., 1963

SAINT-GAL Y.
- Protection et défense des marques de fabrique et concurrence déloyale, 5e éd.,
Delmas, 1982

SAUTONIE- LAGUIONIE L.
- La fraude paulienne, préf. WICKER G., LGDJ, 2008, vol. 500

STORCK M.
- Essai sur le mécanisme de la représentation dans les actes juridiques, Paris, LGDJ,
coll. BDP, t. 172, préf. HUET-WEILLER D., 1982

TEYSSIE B.
- Les groupes de contrat, préf. MOUSSERON J.-M., LGDJ, 1975

THIOYE M.
- Droit des intermédiaires immobiliers, 2e éd., LexisNexis, 2012
-452-

VATINET R.
- Les principes mis en preuve par la jurisprudence relative aux clauses de non-
concurrence en droit de travail, Droit social, 1998

VIRASSAMY G.
- Les contrats de dépendance, préf. GHESTIN J., Thèse, LGDJ, 1986

WINTGEN R.
- Etude critique de la notion d'opposabilité, Les effets du contrat à l'égard des tiers en
droit français et en droit allemand, préf. GHESTIN J., LGDJ, 2004

ZIMMER Ch.
- Devenir franchisé ou lancer une franchise, 3e éd. Vuibert, 2011

ZOIA M.
- L’incidence du droit communautaire sur les contrats spéciaux, Thèse, Toulouse I,
1999

III- ARTICLES, CHRONIQUES ET RAPPORTS


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- Mandat, J.-Cl. civ., fasc., 1, art. 1991 à 2002, n° 64

ALLAIN A-L
- Chattawak : l'affiliation sans contrefaçon, Franchise-Magazine.com, Succès et
Dérapages, publié le 12 mars 2008

AMEDEE-MANESME G.
- La politique des prix et la commission-affiliation : un juste équilibre à trouver, D.,
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AMMAR D.
- De l'étendue de la garantie du commissionnaire envers le commettant du fait du
substitué, D., 1999, p. 427

ANCEL P.
- Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ. 1999, n° 53, p. 806-
807

ARHEL P.
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- Application du droit de la concurrence à la distribution automobile, LPA 16 juill.
2004
- Transparence tarifaire et pratiques restrictives, D., 2012, n° 259
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AUCKENTHALER F.
- Commettant, commissionnaires à la vente : détermination du véritable titulaire de la
créance envers le tiers contractant, D. 1998, Chron., 53

AUQUE F.
- La commission-affiliation, AJDI, 2001

AURELIE J. et ZYLBERBOGEN C.
- Le CE et la liberté du commerce et de l’industrie, www.droitfil.free.fr

BASCHET D.,
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- Registre du commerce et des sociétés, D., 2012, n° 2

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- Le contrat d’intérêt commun, LPA 7 déc. 1990, n° 147, p. 22

BENAC-SCHMIDT F., LARROUMET C.


- Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 12

BERGER-WALLISER G. et MOES A.
- Les conditions d'accès au marché français pour les opérateurs économiques
étrangers, non ressortissants communautaires, D., 2009, p. 669

BERNARD S.
- L'amusante « commission-affiliation » provoque la confusion, D., 2010, p. 687

BILLIAU M., MOURY J.


- Opposabilité du contrat aux tiers et responsabilité de ceux-ci envers les parties : une
application au contrat d’édition, D., 2001

BORENFREUND G.
- La notion d'établissement distinct à la croisée des chemins, Rev. Dr. trav. 2011, , p.
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BOULOC B. et CHATAIN P.-L.


- Un agent commercial, qui n’est pas commerçant de fait, bénéficie de la loi n° 89-
1010 du 31 déc. 1989, D., 1992, p. 102

BOULOC B.
- Agent commercial, Statut légal, Intermédiaire en opérations de banque (non), RTD
com., 2004, p. 587
- Mandat d'intérêt commun, (Révocation, Conditions) RTD com., 1990, p. 249

BRUNET A
- Clientèle commune et contrat d’intérêt commun, Etudes dédiées à WEILL A., D.,
1983, p. 85 et s.
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BURDEAU G.
- Des libertés publiques, 1961, p. 256-357

CABRILLAC M.
- Remarques sur la théorie générale du contrat et les créations récentes de la pratique
commerciale, in Mél. Marty, Université des sciences sociales de Toulouse, 1978, p.
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CACHARD O.
- L’exclusivité, Ecrits rédigés en l’honneur de Jacques FOYER, Economica 2008, p.
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CANIVET G. et CHAMPALAUNE C.
- La notion de marché dans la jurisprudence de la chambre commerciale, financière
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- Exposé introductif général in Conquête de la clientèle et droit de la concurrence,
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- Gérants mandataires de succursale, J.-Cl. Contrats-distribution, 2003, Fasc. 3560

CHALARON Y.
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Cass. com., 17 déc. 1996 : JCP E 1997, II, 941.
Cass. Ass. plén., 26 janv. 2001 : JCP E 2001, n° 14, p. 617.

BENABENT A.
Cass. com., 21 mars 1989, Bull. civ. IV, n° 98; D. 1989. 427.
Cass. com. 27 oct. 1992, D. 1992. 505.

BIGOT J.
Cass. civ. 27 déc. 1960, D., 1961, p. 491.
Cass. civ., 7 juill. 1987: JCP G 1988, II, 2091.

BIZIERE.
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Cass. civ., 23 fév., 1983, D., 1983, p. 481.

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DELAPORTE V.
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Cass. com., 22 oct. 1996, Defrénois, 1997.330.
Cass. com., 28 mai 2002. D. 2003. Somm. 459.

DELPECH X.
Cass. com. 10 juill. 2007, n° 05-19.373, Société F. Bonnet c/ Société Bacchus, D.
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DUPEYROUX J.-J.
Cass. soc. 3 déc. 1969, D. 1970. 184, 2e espèce.

DUPICHOT J.
Cass. com. 29 oct. 1979, Gaz. Pal. 1980.1.87.

DURETESTE S.
Cass. soc. 17 juin 1970, D. 1971. 165.

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somm. p. 75.
CA Paris, 29 oct. 1992, D. 1995, somm. p. 75
CA Paris, 16 déc., 1992, D. 1995, somm. p.78.
CA Paris 17 fév. 1993 et Cass. com., 27 oct. 1992 : D., 1995, somm. P. 83.
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Cass. com. 10 déc. 2003, D. 2005. Pan° 148, spéc. 150.
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Cass. com., 11 janv. 2005, D. 2006. Somm. 512
Cass. com., 14 juin 2005, D. 2006, Pan. P. 514.
Cass. soc., 22 mars 2006 : D. 2007, pan° 1915.
CA Paris, 13 sept. 2006, D. 2007, pan° 1914.
CJEC, 17 janv. 2008, D. 2009, pan. 2893.
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Cass. com. , 20 mai 2008, D. 2009, pan 1893.
Cass. com., 3 mars 2009, D. 2009, pan. 2893.
Cass. com., 27 oct. 2009, D. 2011, pan° 548.
Cass. com., 8 déc. 2009, D. 2011, pan. 548.
Cass. com., 29 juin 2010, D. 2011, pan. 548.
CA Versailles, 9 juin 2011, Concurrences 2011, n° 3.
CJUE, 13 oct. 2011, aff. C 439/03, JCP, G, 2011, 1430.

GAVALDA C. et LUCAS de LEYSSAC C.


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Cass. com., 14 mars 2006, JCP, 2006, I, 153.

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Cass. com., 27 févr. 1996, JCP G 1996, II, 22655.

GRIGON Ph.
Cass. com., 6 mars 2001, JCP, 2001, p. 28.
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C. cass. 13 mai 1970, D. 1970.

FAGES B.
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CA Amiens, 7 mai 1974, D. 1975. 263.

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Cons. const. décision 81.132 du 16 1982, D.1983, 169.

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CA Paris 22 juin 1964, RTD com., 1964, p. 813, n° 7.
CA Paris 23 oct. 1964, RTD com., 1965, p. 155 n° 9.
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Cass. com., 7 janvier 1969, RTD com., 1970, p. 179 et 180, n° 5.
Cass. com., 22 janv. 1969, JCP, 1969, II, 16066.
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Cass. civ., 3e Ch., 5 juin 2002, n° 00-20.806, JCP 2003.éd., E. n° 807, note

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LELOUP J.-M.
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Cass. com., 22 janv. 1991 : JCP E 1991, II, 201.
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Cass. com., 17 juill. 2001: Contrats, conc. consom. 2001, n° 170.
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Cass. com., 15 oct. 2002, Contrats, conc., consom. 2003, n° 19.
Cass. com., 13 mai 2003 : Contrats, conc., consom. 2003, comm. 124.
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LIENHARD A.
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MALAURIE Ph.
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MALAURIE-VIGNAL M.
Cass. com., 9 oct. 2001, Contrats, conc., consom. 2002. comm. 8.
Cass. com. 23 janv. 2007, Contrats, conc., consom. 2007, n° 68,
Cass. com., 20 févr. 2007, JCP 2007. IV. 1657; Contrats, conc., consom. 2007, n°
121
CA Paris, 3 sept. 2010, n° 08/12822, Contrats, conc., consom. 2010. comm. 247.
Cass. com., 24 mai 2011, Contrats, conc. Consom. 2011, comm. 188.
Cass. com., 12 juill. 2011, n° 10-25.386, Contrats, conc., consom. 2011, n° 221.
Cass. com., 4 oct. 2011, Contrats, conc. Consom. n° 6.

MARCHI J. - P.
Cass. crim., 3 nov. 1982, Gaz. Pal. 1982.2.658.

MARTIN-SERF A.
Ass. plén., 26 janv. 2001 : RTD com., 2001, p. 508.

MATHEY N.
Cass. com., 15 janv. 2008, n° 06-14.698, Contrats, conc. consom. 2008, comm. 68.
CJEC, 17 janv. 2008 : Contrats, conc. consom. 2008, n° 67.
Cass. com., 26 févr. 2008, CCC 2008, n° 95.
Cass. com., 24 mai 2011, n° 10-16.969, com., 25 sept. 2007, Contrats, conc. Consom
2008, n° 5 p. 19.
Cass. com., 21 juin 2011, JCP, E 2011, n° 1607 ; Contrats, conc. Consom. 2011,
comm. 190.

MAZEAU D.
Cass. com., 1er mars 1994, Defrénois, 1994. 1118..
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006, RDC, 2007, p. 267
-471-

MERCADAL B.
Cass. com., 16 juin 1981, D. 1981, IR p. 543.

MESTRE J.
Cass. com., 28 mai 1991, RTD civ. 1992, 86.

MESTRE J. et FAGES B.
Cass. com., 10 déc. 2003, RTD civ. 2004, p. 285.
Cass. civ., 1ere Ch., 25 janv. 2005, RTD civ. 2005. 391.
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006, RTD civ, 2006, p. 554

MESTRE J. et BERTRAND F.
Cass. civ., 1ere Ch., 25 fév. 2003, RTD civ., avr.-juin 2003, n° 2, p. 297-298.

MEYZONNADE H.
Cass. soc., 1er mars 1973, JCP, CL 1975, 11754.

MOTULSKY.
CA Paris 29 juin 1956, JCP, 1956, II, 9524.

NECTOUX J.
Cass. com., 7 juill. 1966, JCP 1966, II, 14842.

PAILLOT
Cass. soc. 12 mars 1942, JCP 1942. II. 1952.

PERRUCHOT-TRIBOULET V.
Cass. com., 28 mai 2002, JCP E 2002, n° 51-52, p. 2063

PICOD Y.
Cass. com., 16 mars 1993, n° 91-11.194 , D. 1994, somm. 224.
CA Paris, 8 mars 2001, D. 2002, somm. 1263.
CA Versailles, 29 juin 2001, D. Somm., p. 234.
Cass. com., 18 déc. 2001, D., 2003, Somm., p. 1029.
Cass. com., 4 juin 2002, n° 00-14.688, D. 2003, somm. 904.

PLAISANT R.
CA Lyon, 29 janv. 1964, D., 1965, 185.
CA Rennes, 9 juill. 1974, JCP G 1975, II, 17990.

POLLAND-DULIAN F.
Cass. com., 15 oct. 1996, JCP 1997, 2e éd. G., p. 921.

RAYNARD J
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006 , JCP, 2006, DT éd. E, p. 1780, n° 2504.

REMOND-GOUILLOUD M.
Cass. com. 7 juill. 1998, D. 1990, Somm. p. 269.
-472-

RESPAUD J.-L.
Cass. com., 10 mai 2000, Cah. dr. entr. 2001, n° 2, p. 28.

ROBERT A.
Cass. com. 12 juill. 2011, n° 10-25.386, D. 2011. 2782.

ROBERT J.
Cass. com., 12 mars 1963, D., 1963, n° 367.

RODIERE R.
Cass. com., 6 févr. 1973, JCP 1973, II, n° 17501.

ROUQUET Y.
Cass. civ., 3e ch., 5 juin 2002, n° 00-20.806, D., 2002, 2471.
Cass. civ., 1ere Ch., 17 févr. 2011, D. 2011. Actu. 676

ROZIER J.
CA Reims, 12 juin 1985, Gaz. Pal. 111985, 2, 64.

SAINT-JOURS Y.
Cass. soc., 18 nov. 1981, D., 1983, p.243.
Ass. plén., 8 janv. 1993: JCP G 1993, II, 22040.

SAINTOURENS B.
Cass. com., 10 juill. 2007, n° 05-19.373, Société F. Bonnet c/ Société Bacchus, RTD
com., 2008. 45.
Cass. com., 15 janv. 2008, RTD com., 2008, 495.

SALOMON R.
Cass. com., 23 janv. 2007, D. 2007. Chron. C. cass. 1308.

SCHMIDT D. et DION N.
Cass. com., 27 févr. 1996 : JCP E 1996, II, 838.

SERRA Y.
Cass. com., 13 mars 1979, D. 1980, Jur. p. 1.
CA Versailles, 4 mars 1987 et CA Paris, 24 mars 1987, D. 1988. Somm. 211.
CA Paris, 5 mars 1987, D. 1988. Somm. 180.
CA Paris, 10 janv. 1994, D. 1995, somm. 208.
CA Paris, 17 janv. 1995, D. 1995, somm. 260.
Cass. com., 30 janv., 1996, D. 1997, 232.
CA Paris, 8 nov. 1996, D. 1997. Somm. 241.
CA Paris, 10 janv., 2001, D., 2001, Somm. p. 1311.

SEUBE J.-B.
Cass. civ, 3e Ch., 4 mai 2006, RDC, 2006, p. 1154, obs.
-473-

SIMLER Ph.
Cass. com., 22 oct. 1996, JCP, G, 1997, I, 4033, n° 12.
Cass. civ., 1ere Ch., 25 janv. 2005, JCP 2006. II. 10021.
Cass. com., 18 déc. 2007, JCP 2008. 1. 152, nº 13.

SOLUS H.
CA Paris 11 juin 1947, JCP, 1947, II, 3840 et s. 1949.2.27.

STOFFEL-MUNUCK P
CA Paris, 5 sept. 2003, Comm. com. électr. 2004, n° 19.
CA Paris, 23 fév. 2006, JCP G 2006, III, 10108.

TIQUANT O.
Cass. com., 26 févr. 2008, LPA 9 juill. 2008.

VILLEMART Ch.
Cass. crim., 3 nov. 1982, JCP, 1983, I, 3108.

VINCENS
Cass. com., 29 oct. 1979, JCP 1981.II.19591.

VINEY G.
Cass. com., D. 1994. 124.
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006, RDC, 2007, p. 295, obs.

VOIRIN P.
CA Colmar, 5 nov. 1958, D. 1959. 183.

V- SITES INTERNET

www.acfranchise.tv/fr
www.apce.com
www.conseil-concurrence.fr
www.dalloz.fr
www.dictionnaire-juridique.com
www.droitfil.free.fr
www.franchise-land.com
www.legifrance.gouv.fr
-474-

BIBILIOGRAPHIE LIBANAISE
I- OUVRAGES GENERAUX, TRAITÉS, MANUELS
ABOU EID E.
- Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 1, 2004
- Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation
commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005

ATOUI F.
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- Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988
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II- OUVRAGES SPECIAUX, MONOGRAPHIES, THESES


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Mediterranean, The American Journal of Human Genetics, 2008

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- C.E. nº 67 du 22 décembre 1947, RJL., 1967, p. 98.
- TI Beyrouth, décision n° 742 du 16 mai 1956
- CA Beyrouth, n°1299, 30 juin 1959, RJL, 1959 p. 263 ;
- Trib. Baux Baabda, décision n° 349 du 14/11/1960, ABI RACHED F.,
Annexe des Baux, t. 1, p. 367.
- Juge unique Beyrouth, n° 732, 21 avr. 1961, RJL, 1961, p. 689, Rec. Hatem,
vol. 46, p. 28, n°1
- TI Beyrouth décision, n° 2561 du 14 déc. 1961, Coll. Hatem, vol. 50, p. 24, n°
3
- CA Beyrouth, 5e Ch., arrêt n° 733, 13 juin 1962, RJL, 1962, p. 251
- Cass. Civ., arrêt n° 12, 22 oct. 1962, Rec. Baz, 1962, p.70
- CA Mont Liban, n° 5, 7 janv. 1963, RJL, 1963, p. 514
- Cass. civ., n° 73 du 9 mars 1963, RJL, 1963, p. 677
- CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, Rec. Hatem, vol. 52, p. 22, n° 2, p. 957
- TI Beyrouth n° 1311 du 15 mai 1964, Rec. Hatem, vol. 59, p. 21, n° 2
- Cass. civ. n° 58, 28 mai 1964, RJL, 1964, p. 922
- CA Beyrouth, n° 1197, 14 mai 1965, Rec. Hatem, vol. 60, p. 31, n° 2
- CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill. 1965, RJL, 1965, p. 818
- Cass. civ., n° 21 du 8 nov. 1965, RJL, 1966, p. 622
- Cass. civ., n° 63 du 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560
- Cass. civ., n° 69, 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560
- Cass. civ., Lib., 14 nov. 1967, Rev. al Adl, 1968, p. 412
- CA Beyrouth, 1ere Ch. civ., arrêt n° 916 du 13 juin 1968, Rec. Hatem, vol. 82,
p. 57 à 59, n° 3 ;
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113,
p. 8 à 10.
-477-

- Arrêt nº 267 du 16 avril 1969 du Conseil d’Etat, RJL., 1969, p. 389,


- TI Beyrouth, décision n° 237/ 275 du 17 avr. 1969 contre « Mobil Oil », Rec.
Hatem, vol. 113, p. 13 à 16
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 468/144, 3 juill. 1969, Rec. Hatem, vol.
113, p. 10 à 12.
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 1488/123, 16 oct. 1969, Rec. Hatem, vol.
113, p. 16 à 18.
- Cass. civ. n° 115 du 23 oct. 1969, RJL, 1970, p.418
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 718/747, du 23 nov. 1969, Compagnie de
Construction et des Annonces c/ Compagnie Krant Advertising limited, Rec.
Hatem, 1970 Ch., n° 113, p. 23 et s.
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de
développement de pharmacie c/ Compagnie suisse Geigy, Coll. Hatem, vol.
113. p. 22
- TI Beyrouth, Ch. Com., décision n° 405/1504, 8 nov. 1970, Rec. Hatem, vol.
113, p. 21 et 22
- TI Liban Nord, décision n° 504, 24 déc. 1970, Rec. Hatem , vol. 150, p. 20,
21
- CA Beyrouth, 3e Ch., arrêt n° 401, 31 mars 1971, Rev. al Adl, 1971, p. 466
- Trib. com., Beyrouth, décision n° 268, 29 avr. 1971, Rev. al Adl 1971, p. 714
- TI Beyrouth, Ch. com. décision nº 33/697, 15 déc. 1971, Rec. Hatem, vol. 113,
p. 18 à 20
- Cass. civ. 1ere Ch., décision n° 1, 17/2/1972, Drambawi c /Chams, Rec. Baz,
t. 20, p. 105
- Cass. civ. Lib, 1ere Ch., arrêt préparatoire, n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz., n°
21, p. 58
- Cass. civ., arrêt n° 27, 29 mars 1973, Rev. al Adl, 1973, p. 325
- TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 677, 17 mai 1973, Rev. al Adl., 1973, p.
400
- Cass. civ, 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz,
n° 21, p. 167 et 168
- TI Beyrouth, Ch. com., 11 nov. 1973, Rec. Hatem, vol. 150, p. 21 et 22.
- Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1974, Rec. Chahine, n° 150, p. 22 et 23
- CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil boulos et ses fils c/
Société de l’oxygène et l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159
- Trib. com. Beyrouth, n°555 du 10 oct. 1974, Rev. al Adl, 1975, p. 321
- Juge de référé Beyrouth, décision n° 459, 21oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160,
p. 146 et 147
- CA Beyrouth, 1ere Ch., n° 58/ 1969, arrêt n° 149 de 4 mai 1978, Albert
Malek c/ Société Fock et Fohl, Rev. al Adl, 1980, p. 124 à 127.
- CA Beyrouth, Ch. Civ., 2e ass., arrêt n° 218, 13 avr. 1983, Rec. Hatem, n°
183, p. 424 à 428.
- TI Beyrouth, décision n° 443, 23 mai 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 -216
- Juge de référé Beyrouth, décision n° 10 juin 1986, Aff. Skayem c/ Boudikyan
et Yemezian sarl., Rec. Baz., 1987.
- T. com., Mont Liban, décision n° 86/105, 30/12/1986
- TI Beyrouth., arrêt n° 28/96 du 30/1/92, Rev. al Adl, 2002, n°3
- CA Beyrouth, 3e Ch. civ., arrêt du 29/9/1994, Rev. al Adl, 1994, p. 93
-478-

- TI Beyrouth, 3e Ch. civ., décision n° 1080, du 28/1/1998, Rev. al Adl, 1999, t.


3 et 4, p. 465
- Cass. civ. Lib, 5e Ch., arrêt n° 20, 8/2/2000, éd. Sader, p. 333
- TI Mont Liban, 3e Ch., décision n° 23, 30/10/2000, Rev. al Adl, 2001, p. 220
- Cass. civ. lib. 1ere Ch., n° 46, 27 mars 2001, Rec. Sader 2001, p. 60; n° 26, 6
avr. 1962, RJL 1962, p.
- TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 152, 5/4/2001, Rev. AL Adl, 2001
- Cass. Lib. Ch.7, arrêt n° 41, 8/2/2001
- Cass. civ. Lib., 5e Ch., n° 41, 19 mars 2002, Rec. Sader, p. 400, 401.
- TI Mont Liban, décision du 12/7/2004
- Juge d’exécution Al Maten, décision n° 145/2006 du 29/3/2006
- Juge de référé, Beyrouth, décision n° 151, 2007, Rev. al Adl, 2007
- Cass. civ., 4e Ch., arrêt du 8/11/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 1, p. 227
- Cass. civ., 4e Ch., arrêt du 18/10/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 3, p. 1138
- CA Beyrouth, 11/6/2007, Rev. al Adl, 2007, p. 1108
- CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International
Limited, Rev. al Adl, 2008, p.1659 :
- Cass. civ. 5e Ch., arrêt n° 20 du 23/8/2008, éd. Sader, Rev. al Adl, 2009
- CA Beyrouth, Ch. 3, arrêt n° 9/2008, Rev. Al Adl, 2008
- Cass. civ., Ch.4, arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl 2008, p. 1144
- Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010,
t. 2, p. 860
- Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4 p. 1550.
- TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 266 du 29/10/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 3
- Juge unique civil, décision du 17/12/2009, Rev. al Adl, 2010. t. 2, p. 796

V- SITES INTERNET

www.economy.gov.lb
www.justice.gov.lb
www.lp.gov.lb
www.opuslibani.org.lb
-479-

INDEX ALPHABÉTIQUE
(Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes)

A Autorisation : 74, 75, 92, 97, 102,


106, 142, 513 et s., 540, 545,

Abus : 464, 574


Abusif : 41, 85, 292, 546, 554, 564,
574, 618, 619
Accord B
- de courtage : 267
- de distribution : 437, 777
Acte Bail commercial : 325, 677, 740, 772
- juridique : 20 et s., 62, 67, 155, 156, Bilan économique : 777
174, 175, 202, 203, 249, 259, 271, 383 Bonne foi : 110, 114, 124, 501 et s.,
- de concurrence : 506, 509, 510, 804 517, 557, 619, 632, 677, 750, 782
Action : 100, 203, 236, 288, 310, 747,
773, 788
Arbitrage : 756
Agent
- commercial : C
· définition : 33, 36, 39, 71, 74,
79, 83, 95, 99, 101, 125, 140,
150 et s., 201, 407 Capacité : 100, 228, 232, 261, 284,
· en droit communautaire : 557, 285, 794
723 Caution : 156, 529
· et commissionnaire : 212, 224, Cession
321, 323 - d’actions : 156
· et courtier : 169, 260, 275 - du mandat : 537
· et indemnité : 618, 635 et s., Cessation
· et mandat : 87, 90, 172, 179, - d’agence commerciale : 596, 639,
224, 250, 302, 557, 574 650 et s.
- de représentation : 548, 617
· et représentation : 205
Clause
· qualification : 72 et s., 80, 86,
- d’exclusivité : 231, 345, 364, 366,
94, 102, et s., 128, 144, 151 et
399, 402, 424, 430, 435 et s., 443, 472,
s., 164 et s., 173, 180, 193 et s.,
520, 550, 583, 625, 665, 709
257, 292, 313, 318, 319, 325,
326, 528, 721, 742 · définition : 338, 522
· et franchise : 460
· rémunération : 547, 576, 580
- mandataire : 180 et s. · et monopole : 465
- maritime : 206 · et opposabilité : 480, 481, 667,
- immobilier : 170, 207, 772 671 et s., 692 et s., 731 et s.,
Approvisionnement : 198, 315, 360 et 744, 757, 770 et s., 782, 807
s., 401, 450, 686, 751, 774, 809,
-480-

· inscription : 672, 680, 695, - Qualification : 313, 318, 321, 322,


718, 727, 730, 737, 745, 753, Commissionnaire : 77, 152, 228, 231,
757, 762, 788, 810, 821 242, 250, 531
· renouvellement : 738 et s., 743 - à l’achat : 230
· territoriale : 356 - à la vente : 230, 374
- de non-concurrence : 523, 572, - Définition : 38, 212, 213, 216 et s.,
Clientèle : 224, 234, 235, 251, 315
· d’agent commercial : 158, 160, - Qualification : 187, 215, 218, 224,
161, 175, 197, 199, 202, 329, 225, 229, 236, 240, 247, 248, 255, 262,
580, 637 et s., 655 271, 308, 322, 324, 378
· d’entreprise : 17, 26, 448, 491, Concession : 346
· de VRP : 136, 144, 148, 172, - de vente : 341, 347
637, 641, 642 - en droit communautaire : 343
- exclusive : 342, 344, 347, 349
· détournement : 570, 792, 798 et
- successive : 348
s.
Concurrence
· développer : 12, 64, 161, 172,
- déloyale : 463, 481, 562, 672, 792,
179, 197, 202, 362, 491, 637 et
793, 795, 799, 801, 804, 805, 806
s.
- illicite : 32, 507, 804
· du commissionnaire : 324 - intermarque : 350
· du commissionnaire-affilié : - locale : 469
324, 326 Conflit : 1, 147, 166, 181, 226
· du courtier : 268 Contemplatiodomini : 27, 68, 69, 210,
· du représentant : 508, 526, 562, 239
565, 570, 631, 640, 641, 646, Contrat
652, 655, 664 - d’agence commerciale : 66, 502
· du réseau : 13, 437 · non-renouvellement : 655
· indemnité : 136, 201, 637 et s. · qualification : 313, 317, 578
· prospecter : 36, 93, 130, 154, - de commission : 187, 219, 222 et s.,
179, 184, 197, 199, 201, 508, 232 et s., 249, 309, 315, 316, 331, 537
565, 638 - de concession : 341, 343, et s., 352,
Commerce international : 5, 12, 190, 356, 357, 360, 448, 573, 679
229, 639, 659 - de courtage : 169, 261, 270
Commission : - de louage de services : 32, 63, 71,
- agent Commercial (Rémunération) : 96, 120, 124
93, 160, 213, 581, 582 - de représentation commerciale :
- commissionnaire (Rémunération) : 207, 400, 426, 444, 479, 484, 590, 673,
212 684, 701, 762, 784, 799, 808
- commissionnaire- · conclusion : 51, 485, 589
affilié (Rémunération) : 303, 308 · définition : 177, 584
- contrat de : v. contrat · non-renouvellement : 648 et s.
- et mandat commercial : 213, 219,
· qualification : 253, 375, 396,
246 et s., 255
398, 421, 424, 429, 460, 473,
- représentant
490, 606, 626, 769
Commercial (Rémunération) : 146,
· rupture : 41, 611, 614
388, 390, 579, 580, 597, 660, 794
- de travail : 73, 92, 95, 103, 125,
- représentation imparfaite : 211
128, 129, 132, 138, 168, 183, 184, 271,
Commission-affiliation : 332
371, 374
- Définition : 225, 303, 306, 308, 316,
-481-

Courant d’affaires : 173, 202, 339, - parallèle : 682, 753


579, 654 - sélective : 341, 350,776, 778
Courtier : 13, 77, 169, 275, 299, 495 Dol : 111, 116, 117
- et représentant : 256 et s. Ducroire : 232, 233, 264, 530 et s.,
- notion : 31, 265 et s., 270, 272, 283,
285
- qualification : 259, 261, 268, 270,
280, 284, 286
E

Entrepreneur : 98, 446, 679


D Entremise : 8, 9, 16, 27, 31, 53, 57,
173, 258, 378, 498, 552, 590, 668
Ententes : 470
Dénigrement : 794 - et monopole : 464, 465
Dépendance - horizontales : 470
- économique : 373, 374, 393 - illicite : 464, 467
- juridique : 94 - licite : 464, 466
Dépôt : 302, 316, 331, 427, 464, 627, - professionnelles : 469
725, 802, 806 Exclusivité : 167, 337, 349, 366, 400,
Désorganisation du réseau de 413, 478, 514, 523, 551, 571, 678, 700,
distribution : v. réseau de distribution 782
Diffusion : 3, 5, 89, 195, 203, 331, - absolue : 142
342, 530, 584, 744, 794 - contrat d’ : 334, 481, 568, 574, 755
Discrimination : 42, 453 - d’approvisionnement : 361 et s., 394
Dissimulation : 111 et s. - d’enseigne : 360
Distributeur - de clientèle : 357
- exclusif : 58 et s., 293, 302, 334, - de fourniture : 356, 364
336 350, 355, 359, 364, 368, 373, 377, - de produits : 439, 442, 444, 748,
381, 409, 416, 425, 432, 439, 444, 454, 760
475, 488, 578 - et commissionnaire : 221
· définition : 434, 455, 769 - et concessionnaire : 342, 346, 347
- parallèle : 674, 748, 753, 760, 810 - et courtier : 280, 287
· et faute : 680, 687, - et opposabilité : 481, 482, 672, 673,
· et mauvaise foi : 752 693, 694, 701, 736, 739, 742, 758, 771,
- sélectif : 350, 749, 796 788
Distribution :13, 15, 113, 203, 337, - notion : 338
433, 471, 513, 525, 567,585, 611, 628, - réciproque : 360, 361, 364, 378,
755, 771 399, 419, 420
· notion : 335, 336 - territoriale : 350, 351, 352, 356,
- et réseau : 127, 258, 332, 341, 355, 357,
358, 683, 734, 747, 759, 761, 771 - unilatérale : 402, 430
- exclusive : 337, 342, 344, 349, 351, 360, 461, 679, 727, 764
358, 375, 412, 423, 425, 428, 438, 448, Equité : 35, 114, 502, 614, 641
461, 467, 491, 523, 555, 771
- et franchise : 450, 451
· définition : 343
- par internet : 77
-482-

I
F

Faute : 41, 117, 593, 602, 613, 614, Immatriculation : 237, 721
616, 618, 632, 686 - défaut : 597, 724, 726, 738
- d’un agent immobilier : 773 Importations parallèles : 772
- délictuelle : 792, 793 Indemnisation : 609, 659, 817
- distributeur parallèle : 810 - d’agent : 619, 622, 637, 640, 652
- élément morale : 680 - de représentant : 634, 652, 654, 657
- et préjudice : 595, 795 - préjudice : 664
- grave : 525, 529, 587, 594, 596, 597 Indemnité : 41, 593, 818, 823
598, 600, 619, 620, 621, 653 - calcul : 146, 590, 634, 639, 655 et s.
- lourde : 594 - de clientèle : 136, 202, 638, 640,
- professionnelle : 599 642, 643, 665
- qualification : 656, 672, 788, 791, - de non-renouvellement : 641, 647 et
792, 796 s
Frais : 548, 555, 576, 633, 793 - de rupture : 318, 525, 595, 597, 600,
Franchise : 13, 445,448, 602, 614, 625, 654, 658, 664
- de distribution : 452 Indépendance : 70, 74, 110, 313
- définition : 447, 449, 450, 457, 458 - agent : 80, 96, 99, 123, 169 436
- et exclusivité : 402, 461 - courtier : 269 et s., 287
Force obligatoire : - et franchise : 460
- des contrats : 479 et s., 568, 626, - représentant : 97, 104 et s., 126 et s.,
668 et s., 678 215, 476, 501, 813
Fonds de commerce : 313, 327, 396, - VRP : 92, 94, 136, 138
642 Inexécution
- commission-affiliation : 303, 319, - du contrat : 530, 558, 583, 597
330 - fautive du tiers : 581
- et représentation commerciale : 177 Inopposabilité : 744
- exploitation : 178, 179 - réseau : 686
- gérant-mandataire : 297 Insolvabilité : 231
- gestion : 154, 175 Intention de nuire : 800, 803
- vente : 170, 207 Intérêt commun : 41, 249, 346, 362,
431, 491, 503
- mandat d’ : 64, 186, 428, 489, 572,
596
- et représentation commerciale : 423,
G 428, 490, 507, 589, 591, 606, 616
Intermédiaire : 89, 91, 193, 220, 290,
312, 327, 495, 531, 580, 700, 770, 801
- commissionnaire : 215, 230
Garantie : 30, 232, 358, 362, 438, 547 - courtier : 13, 256 et s., 274, 282 et s.
- ducroire : 530 et s. - définition : 9, 14
Gérant-mandataire : 38, 184, 297 · sens commerciale : 11, 12
· sens économique : 10
- distributeur : 411
- du commerce : 5, 7, 31, 49 et s.,
119, 137, 148, 166, 186, 200, 209, 214,
-483-

219, 238, 248, 298, 352, 412, 473, 474, - définition : 62, 81, 89, 191, 206, 346
530, 811, 819 - et représentation : 66, 68, 70, 129,
- et distribution : 334 240, 812
- local : 12, 28 - permanent : 87, 492
- occasionnel : 314 - rupture du : 85
- opaque : 14, 308 - sans représentation : 67
- professionnel : 2, 78, 82, 161, 528 Mandataire : 89, 194, 197, 281, 545,
- qualification : 814 555, 562
- représentant : 27, 59, 186, 205, 252, - agent commercial : 33, 79, 140, 181,
570, 578 185, 198, 206, 298
- transparent : 308 - commissionnaire : v. ce mot
- VRP : 36, 136, 144 - courtier : v. ce mot
Intermédiation : 4, 308, 312, 334, 824 - français : 155
- notion : 8, 53 - indépendant : 217
Internet : 23, 100, 632, 731, 747, 758, - libanais : 155
773 et s. - ordinaire : 77, 540
Intuitu personae : 249, 363, 548, 605 - représentant commercial : 32, 55,
56, 60 et s., 77, 81, 147, 220, 240, 244,
290 et s., 577, 627
- simple : 77
Manœuvre : 89
L - Immorale : 117
Marché : 17, 29, 202, 229, 267, 465,
492, 511, 515, 570, 574, 645, 717, 799
Liberté du commerce et de - libanais : 28, 597, 610, 661 et s.
l’industrie : 468, 504, 507, 509, 687, - parallèle : 795
770 Mauvaise foi : 113, 116, 200, 748,
Liquidation : 1, 463, 785 749, 750, 751, 771, 798 et s., 806
Location-gérance : 177, 178, 740
Louage de services : v. Contrat
Loyauté : 362, 493, 499, 502, 551,
559, 817
- commerciale : 111, 114, 5011
- contractuelle : 436 N

Négociation : 26, 67, 130, 154, 170,


179, 180, 190 et s., 203, 261, 264, 278,
M 281et s., 493, 497, 619
Non-renouvellement : 415, 618, 619,
621, 640 et s., 651, 653, 655, 662
Mandat : 53, 56, 156, 170, 207, 261, Nullité : 399, 698
271, 283, 487, 586, 657, 725, 816 Absolue : 462, 467
- civil : 194, 302
- classique : 152
- commercial : 31, 110, 126, 166,
212, 218, 236
- d’agent commercial : v. ce mot
- d’intérêt commun : v. ce mot
-484-

Prescription : 374
O Procuration : 19, 62, 65
Produits de luxe : 342, 349
Promesse : 619
Obligation : 94, 154, 172, 203, 283, - porte-fort : 530
351, 357, 374, 378, 385, 399, 420, 433, Prorogation : 662, 741, 742, 783
488, 493 et s., 77 Publicité : 95, 158, 183, 645, 673,
- d’approvisionnement exclusif : 365, 683, 690 et s., 719, 727, 730, 741 et s.,
401 771, 782, 807
- d’informer : 498
- de bonne foi : v. ce mot
- de faire : 557 et s.
- de garantie : 528 et s., 569
- de loyauté : v. ce mot Q
- de ne pas modifier les prix de
manière abusive : 574
- de non-concurrence : 98, 118, 142, Quasi-exclusivité : 365 et s., 389, 391,
427, 503 et s, 565, 570, 572, 676 393
- de rémunération : 576
- de rendre compte : 89, 104, 126, 500
- de résultat : 530, 570
- ducroire : 531
- négative : de ne pas faire : 338, 362, R
556, 564 et s., 751
- passive : 808
Opposabilité : 480, 667 et s. Reconduction tacite : 195, 621, 622,
- absolue : 759 738, 740, 742, 784
- inconditionnelle : 732 Redevance : 440, 696, 708, 721, 724
Ordre public : 83, 133, 163, 181, 468 Refus : 102, 113
- économique : 691 - de qualification : 183, 297, 313
- international : 35 - de renouveler le contrat : 619, 630,
652, 665, 741
- de vente : 674
Rémunération : 93, 104, 132, 212,
283, 632
P - agent commercial : 298, 502, 576
- courtier : 283
- franchise : 446
- notion : 578, 579
Pluralité de mandats : 106 et s.
- VRP : 145
Pouvoir : 20, 27, 62, 63, 68, 100, 459,
Renouvellement : 739 et s., 783,
487, 527, 547, 586, 634, 660, 753,
Représentant commercial : 7, 30,
- de conclure : 25, 171, 174, 190, 196
252, 293, 539, 665, 733, 757, 770
et s.
- commerçant : 310, 323 et s., 333,
- de donner des ordres et des
533
directives : 95
- définition : 32, 43, 172
- de négocier : 191 et s., 319
- et agent commercial : 34, 36, 40, 42,
- du contrôle : 139
49, 73, 90, 126, 138, 140, 179, 206,
- public : 485
212, 260, 271, 277, 576
- représentatif : 275
-485-

- et commissionnaire : v. ce mot - limitée : 43, 294, 531


- et courtier : v. ce mot - pénale : 798 et s.
- et indépendance : v. ce mot. Restitution : 523, 626 et s.
- et VRP : 37, 125, 137, 142 et s. Revendre hors réseau : 748, 795
- historique : 26 Révocation : 428, 487, 586, 588
- indemnité : v. indemnisation - sans indemnité : 593, 607, 611
- qualification : 54 et s., 77, et s., 102, - unilatérale : 249
151, 185 et s., 285, 294, 308, 393, 394,
406, 414, 473, 476, 493, 521, 555, 700
Représentation : 86, 404, 417, 435,
508, 571, 574, 691, 698, 700, 766, 787
- civile : 58, 64,
- commerciale : 23, 77, 81, 278, 281, S
295, 399, 420, 433, 460, 716, 730, 749,
768
- concurrente : 107, 110, 427, 504 et Savoir-faire : 28, 315, 445, 447, 459,
s., 516 et s. 460, 824
· et entremise commerciale : 27, Sous-contrat : 536, 537
53, 257, 551, 667 Stipulation pour autrui : 755
· extinction : 588, 591 Stocks : 302, 312, 315, 319, 325
· non-renouvellement : v. ce mot
· notion : 81, 176, 205, 252, 332,
346, 395, 421 et s., 473, 477,
489, 490, 583, 590, 605, 625
· résiliation : 610, 613
· révocation : 586 V
· rupture : 41, 589, 593, 631,
633, 641
- conventionnelle : 475, 812 Vente : 109, 127, 132, 153, 173, 183
- définition : 20, 21, 53, 64, 65 - à la boule de neige : 788
- économique : 347 - active : 415, 774
- en droit romain : 19 - fonds de commerce : v. ce mot
- et mandat : 66 et s., 104, 166, 182, - par internet : 758, 773
248, 260, 475, 515, 617 - passive : 414, 416, 774
- imparfaite : 27, 209 Voyageurs représentant placier
- parfaite : 210 (VRP) : 13, 55, 98, 119
Réseau de distribution : 3, 127, 340, - clientèle : 637, 642
354, 357, 437, 451, 561, 733, 760, 774 - définition : 132, 136, 138
- désorganisation : 770 - et agent : 128, 137, 299
- opposabilité : 684, 758 - et représentant commercial : v. ce
Responsabilité : 93, 227, 270, 524, mot
530, 541, 546, 560, 562, 594, 607, 625 - statut : 36, 125, 133, 135, 138, 139
- civile : 790 et s.
- contractuelle : 533, 583, 637, 748,
788, 789
- délictuelle : 594, 748, 755, 789, 796,
810
- des tiers : 674, 679, 680, 684, 711,
735, 745, 751, 788, 792, et s.
-486-

Zone : 4, 12, 357, 376, 437, 697


- d’exclusivité territoriale : 355, 359,
438, 442, 598, 685
TABLES DES MATIÈRES
(Les chiffres renvoient aux numéros des pages)

REMERCIEMENTS .................................................................................................. 4
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS ....................................................... 5
SOMMAIRE .............................................................................................................. 6

INTRODUCTION ..................................................................................................... 7
I. La définition d’intermédiaire ............................................................................... 13
II. La représentation et la notion du représentant commercial................................ 18
III. Les difficultés rencontrées ................................................................................ 33
IV. La problématique et l’annonce du plan ............................................................ 34

PREMIÈRE PARTIE - LA QUALIFICATION ALTERNATIVE DU


REPRÉSENTANT COMMERCIAL AU SENS DU DÉCRET-LOI N. 34/67 ..... 36

TITRE PREMIER - L’AGISSEMENT POUR AUTRUI....................................... 42

PREMIER CHAPITRE - LES MODALITÉS DE L’ACTIVITÉ .......................... 48

SECTION 1 - L’AGISSEMENT À TITRE PROFESSIONNEL ........................... 51


SECTION 2 - L’AGISSEMENT À TITRE PERMANENT................................... 53
SECTION 3 - L’AGISSEMENT À TITRE INDÉPENDANT ............................... 57
Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence ................................................................... 60
A- La liberté d’organiser son entreprise ................................................................. 61
B- La liberté de choisir son activité ........................................................................ 64
a- La pluralité des mandats ..................................................................................... 66
b- Le cumul des professions ................................................................................... 72
Paragraphe 2 : La sanction de l’exigence ............................................................... 75
DEUXIÈME CHAPITRE - LA TENEUR DE L’ACTIVITÉ ................................ 86
SECTION 1 - L’ACTION AU NOM D’AUTRUI ................................................. 87
Paragraphe 1 : La nature des actes .......................................................................... 88
-488-

Paragraphe 2 : L’étendue des actes - la gestion du fonds de commerce ................. 97


SECTION 2 - L’ACTION POUR LE COMPTE D’AUTRUI ............................. 102
Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence ................................................................. 103
A- L’exigence certaine du pouvoir de négocier .................................................... 104
B- L’exigence discutée du pouvoir de conclure ................................................... 108
Paragraphe 2 : La portée de l’exigence. ................................................................ 112
A- Distinction du représentant commercial du commissionnaire ........................ 114
a- Les divergences entre le représentant commercial et le commissionnaire ...... 117
b- Les ressemblances entre le représentant commercial et le commissionnaire .. 122
b-1. L’exposé ....................................................................................................... 122
b-2. Le commissionnaire relève-t-il du décret-loi N. 34/67 ? .............................. 125
B- Distinction du représentant commercial du courtier ....................................... 133
a- Les divergences entre le représentant commercial et le courtier ..................... 134
b- Les ressemblances entre le représentant commercial et le courtier ................. 136
b.1- L’exposé ........................................................................................................ 137
b. 2- Le courtier relève-t-il du décret-loi N. 34/67 ? ............................................. 141
Conclusion du premier titre ................................................................................... 146

TITRE SECOND - L’AGISSEMENT POUR SON PROPRE COMPTE ............ 147

PREMIER CHAPITRE - LE COMMERCANT -REPRÉSENTANT- ................ 155

SECTION 1 - LES DIVERGENCES ................................................................... 157


SECTION 2 - LES RESSEMBLANCES ............................................................. 161
DEUXIÈME CHAPITRE - LE COMMERCANT -DISTRIBUTEUR EXCLUSIF
UNIQUE- ............................................................................................................... 171
SECTION 1 - L’EXCLUSIVITÉ.......................................................................... 174
Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence ................................................................. 175
A- Les divergences ............................................................................................... 177
a- Par rapport au concessionnaire exclusif............................................................ 177
b- Par rapport au distributeur sélectif.................................................................... 180
B- Les ressemblances ............................................................................................ 181
a- Avec la concession exclusive ........................................................................... 181
b- Avec la quasi-exclusivité .................................................................................. 189
-489-

Paragraphe 2 : La portée de l’exigence ................................................................. 204


A- La nécessité d’une exclusivité ......................................................................... 206
B- La nature de l’exclusivité : réciproque ou non ? .............................................. 212
SECTION 2 - L’UNICITÉ.................................................................................... 219
Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence ................................................................ 224
Paragraphe 2 : La portée de l’exigence ................................................................. 231
Conclusion du deuxième titre ................................................................................ 238
Conclusion de la première partie ........................................................................... 239

DEUXIÈME PARTIE - LES EFFETS DE LA PROTECTION DU


REPRÉSENTANT COMMERCIAL AU SENS DU DECRÉT-LOI N. 34/67 .... 240

TITRE PREMIER - LES EFFETS ENTRE LES PARTIES ................................ 244

PREMIER CHAPITRE - L’EXCÉCUTION DU CONTRAT ............................. 247

SECTION 1 - LES OBLIGATIONS DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL .. 251


Paragraphe 1 : L’obligation de non-concurrence .................................................. 256
A- La teneur .......................................................................................................... 257
a- La nature des rapports liant le représentant au représenté ................................ 257
b- Le mécanisme d’exécution du contrat de représentation.................................. 258
B- La portée .......................................................................................................... 264
Paragraphe 2 : L’obligation de garantie - ducroire ............................................... 268
A- Les conditions de l’obligation de garantie ....................................................... 273
a- L’existance de sous-contrat .............................................................................. 273
b- L’absence du rapport avec le representé........................................................... 276
B- Les caractères de l’obligation de garantie ........................................................ 277
a- Le caractère dérogatoire.................................................................................... 278
b- Le caractere excessif ......................................................................................... 279
SECTION 2 - LES OBLIGATIONS DU REPRÉSENTÉ .................................... 281
Paragraphe 1 : L’obligation de permettre l’exercice de la représentation ............ 283
A- L’obligation de faire ......................................................................................... 284
B- L’obligation de ne pas faire ............................................................................. 288
a- L’obligation de non-concurrence ...................................................................... 289
-490-

b- L’obligation de ne pas modifier les prix ........................................................... 294


de manière abusive ................................................................................................. 294
Paragraphe 2 : L’obligation de rémunération ....................................................... 295
DEUXIÈME CHAPITRE - L’EXTINCTION DU CONTRAT ........................... 301
SECTION 1 - LES CAUSES D’EXTINCTION .................................................. 305
Paragraphe 1 : La faute du représentant ................................................................ 306
Paragraphe 2 : Le motif légitime .......................................................................... 311
Paragraphe 3 : Le terme ........................................................................................ 318
SECTION 2 - LES CONSÉQUENCES D’EXTINCTION .................................. 323
Paragraphe 1 : Les conséquences générales.......................................................... 323
Paragraphe 2 : L’indemnité de la rupture du contrat ............................................ 326
de représentation commerciale .............................................................................. 326
A- Le fondement de l’indemnité ........................................................................... 328
B- Les conditions de l’indemnité .......................................................................... 333
C- Le montant de l’indemnité ............................................................................... 338
Conclusion du premier titre ................................................................................... 345

TITRE SECOND - LES EFFETS À L’ÉGARD DES TIERS .............................. 346

PREMIER CHAPITRE - LES CONDITIONS D’OPPOSABILITÉ ................... 350

SECTION 1 - LE PRINCIPE TENANT À L’EXIGENCE DE LA SIMPLE


CONNAISSANCE ................................................................................................. 351
SECTION 2 - LA DÉROGATION TENANTE À L’EXIGENCE DE LA
PUBLICITÉ ........................................................................................................... 361
Paragraphe 1 : La teneur de l’exigence ................................................................. 364
A- Le contenu de l’inscription .............................................................................. 364
a- L’exposé............................................................................................................ 365
b- L’exception -Les produits non concernés- ...................................................... 368
B- Les modalités de l’inscription .......................................................................... 373
a- Le moment de l’inscription ............................................................................... 374
b- Le lieu de l’inscription ...................................................................................... 377
Paragraphe 2 : La sanction de l’exigence ............................................................ 381
A- L’exposé .......................................................................................................... 382
B- La portée .......................................................................................................... 388
-491-

DEUXIÈME CHAPITRE - LES CONSÉQUENCES DE L’OPPOSABILITÉ ... 393


SECTION 1 - L’OBLIGATION POUR LES TIERS DE RESPECTER
L’EXCLUSIVITÉ .................................................................................................. 395
Paragraphe 1 : L’étendue dans l’espace ................................................................ 396
Paragraphe 2 : L’étendue dans le temps ............................................................... 405
SECTION 2 - LA SANCTION DU NON-RESPECT DES CONTRATS
D’EXCLUSIVITÉ PAR LES TIERS .................................................................... 410
Paragraphe 1 : La responsabilité civile ................................................................. 411
Paragraphe 2 : La responsabilité pénale................................................................ 415
Conclusion du second titre ..................................................................................... 421
Conclusion de la deuxième partie .......................................................................... 422

CONCLUSION GÉNÉRALE ................................................................................ 423


ANNEXES ............................................................................................................. 429
BIBILOGRAPHIE GÉNÉRALE ........................................................................... 440
INDEX ALPHABÉTIQUE .................................................................................... 479
TABLES DES MATIÈRES ................................................................................... 487
Vu et permis d’imprimer
Montpellier, le

Le Président de l’Université Montpellier I


Philippe AUGE
Résumé en français :

Le recours à l’intermédiation est pour les fabricants et fournisseurs un mode privilégié de commercialisation,
favorisant le recours à la représentation commerciale. Cette dernière occupe, notamment, une place prépondérante
dans la distribution internationale à travers surtout le mécanisme du mandat et de la commission. Est alors apparu, tant
en droit français qu’en droit libanais, la nécessité de protéger celui qui contribue au développement de la clientèle
d’autrui. Au Liban, un statut du représentant commercial a ainsi été créé par le décret-loi N. 34/67 sur le modèle
français de l’agent commercial. Mais le droit libanais est allé plus loin que son inspirateur puisqu’il a étendu la protection
à d’autres que le représentant commercial stricto sensu et, en particulier, le distributeur exclusif unique. L’étude se
propose d’analyser le statut libanais de représentant commercial au sens du décret-loi par une mise en perspective
avec le droit français.

Titre et résumé en anglais :

THE STATUS OF THE SALES REPRESENTATIVE IN LEBANESE LAW: INSPIRING BY THE


FRENCH MODEL OF LEGAL PROTECTION AND TAKING IT FURTHER

The use of mediation is the preferred mode of marketing for both manufactures and suppliers resulting in the synthetic
use of the commercial representation. The latter occupies a preponderant place in international distribution especially
via the mechanism such as mandate and commission. From this grew the need in both French and Lebanese law, to
protect the parties who expand the client base on behalf of others parties. In Lebanon, a legal status was created for the
sales representative by decree-law N. 34/67 modelled on the french commercial agent. However, lebanese law went
further than its source of inspiration by exceeding the legal cover to include parties beyond the sales representative
stricto sensu and most significantly, the sole distributor of exclusive product. The purpose of this study is to analyze the
legal status in Lebanon of the sales representative as understood by the decree-law in comparison with its French legal
equivalent.

Discipline :

Droit privé et Sciences criminelles

Mots-clés :

Agent commercial - Décret-loi N. 34/67 - Distributeur exclusif - Droit français - Droit libanais - Exclusivité –
Indemnité - Publicité - Représentant commercial

Laboratoire :

CENTRE DU DROIT DE L'ENTREPRISE - 39 Rue de l'Université - 34060 Montpellier- Cedex 2

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