2012 Yaacoub Arch
2012 Yaacoub Arch
2012 Yaacoub Arch
ECOLE DOCTORALE
DROIT ET SCIENCE POLITIQUE
Année : 2012
THESE
Salim YAACOUB
Le 8 décembre 2012
Directeur de thèse
M. le Professeur Nicolas FERRIER
Jury
M. Yvan AUGUET, Professeur à l’Université de Perpignan Via Domitia
Mme. Séverine CABRILLAC, Professeur à l’Université Montpellier I
M. Nicolas ERÉSÉO, Maître de conférences à l’Université de Strasbourg
M. Nicolas FERRIER, Professeur à l’Université Montpellier I
« La Faculté n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises
dans cette thèse ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur »
Dédicace
A mes sœurs
A mon frère
vous aime.
REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier tous ceux qui m’ont supporté et ont contribué, d’une manière
ou d’une autre, à la réalisation de ce travail de recherche, notamment Valorine TAWK.
Enfin, je salue de tout cœur ceux à qui je dois l’essentiel, tous les membres de ma
famille : Abdallah, Arzée, Céleste, Rami et Rita, pour leurs encouragements
incessants, pour la confiance et l’intérêt qu'ils ont accordé à mes études pour ma
réussite.
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS
Adde : ajouter
aff. : Affaire Ibid. : renvoie au même ouvrage cité dans la
AJDI : Actualité juridique de droit note précédente
immobilier Infra : ci-dessous
al.: Alinéa J.-Cl. : JurisClasseur (Encyclopédies)
art. : Article JCP : JurisClasseur périodique
AN : Assemblée nationale J.O. : Journal Officiel
Ass. plén. : Assemblée plénière JOUE : Journal officiel de l'Union
Bull. civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de européenne
cassation (chambre civile) Jurispr. : Jurisprudence
Bull. crim. : Bulletin des arrêts de la Cour Lettre distrib. : Lettre de distribution
de cassation (chambre criminelle) LGDJ : Librairie générale de droit et de
C. civ. : Code civil jurisprudence
C. com. : Code de commerce lib. : Libanais
C. consom. : Code de la consommation LPA : Les Petites affiches
C. trav. : Code du travail n° : Numéro
C.O.C : Code des obligations et des contrats Obs. : Observations
CA : Cour d'appel op. cit. : Opere citato (ouvrage précité)
Cah. dr. entr. : Cahiers de droit de ord. : Ordonnance
l'entreprise p. : Page
Cass. civ. : Cour de cassation chambre préf. : Préface
civile PUF : Presses universitaires de France
Cass. com. : Cour de cassation chambre Rapp. : Rapport
commerciale Rec. Baz : Recueil de jurisprudence de
Cass. crim. : Cour de cassation chambre Jamil Baz
criminelle Rec. Hatem : Recueil de jurisprudence de
Cass. soc. : Cour de cassation chambre Chahine Hatem
sociale Rép. civ. Dalloz : Dalloz (Encyclopédie)
CCI : Chambre de commerce internationale Rev. al Adl : Revue de justice du barreau
CE : Conseil d'État de Beyrouth
ch. : Chambre RJDA : Revue de jurisprudence de droit des
chron. : Chronique affaires
CJCE : Cour de Justice des Communautés RJL : Revue juridique libanaise
Européennes RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil
CNC : Conseil national de la consommation RTD com. : Revue trimestrielle de droit
Coll. : Collection commercial et de droit économique
Cons. conc. : Conseil de la concurrence s. : Suivant
Cons. const. : Conseil constitutionnel Sader : Bulletin Sader
Cons. prud'h. : Conseil des prud'hommes Sirey : Recueil Sirey
consom. : Consommation somm. : Sommaire
Contrats, conc. consom. : Contrats, Supra : ci-dessus
concurrence, consommation T. com. : Tribunal de commerce
D. : Dalloz (Recueil) t. : Tome
doctr. : Doctrine TGI : Tribunal de grande instance
éd. : Édition TI : Tribunal d'instance
fasc. : Fascicule vol. : Volume
Gaz. Pal. : Gazette du Palais
SOMMAIRE
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE
LA QUALIFICATION ALTERNATIVE DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DECRÉT-LOI N. 34/67
CONCLUSION GÉNÉRALE
INTRODUCTION
1
Ses relations avec l'Union Européenne sont privilégiées : il existe un accord d'association entre les
deux entités, appelé également partenariat euro-méditerranéen, qui prévoit notamment la création
d'une zone de libre-échange entre le Liban et l'Union Européenne à l'échéance 2014. Par le fait même,
le pays fut maintes fois envahi et conquis par pratiquement tous les peuples du bassin méditerranéen,
ainsi que par des tribus nomades qui remontèrent de la péninsule arabique.
2
Dès son indépendance et jusqu’à nos jours, le Liban a vécu beaucoup des guerres rendant son
économie déséquilibrée, et qui ont nécessité un fort rétablissent au niveau économique et sociale. La
guerre civile qui débute en 1975 a sapé tous les fondements de l'économie libanaise. Le pays a alors
connu un fort problème de concentration des activités économiques dans le grand Beyrouth : G.
CORM, Economie : «Malgré la guerre, les Libanais ont confiance dans leur système bancaire», Le
Temps, 2006.
3
Jusqu'à la moitié du XXe siècle, le Liban était encore largement un pays rural. Il se rapprochait par
exemple de la Suisse. Puis, avant la première guerre (1975-1990), le secteur des services commerciaux
s'était fortement développé au détriment de l'agriculture. Les produits agricoles des terres cultivables
suffisent à combler les besoins de la population, mais la spéculation du marché étranger a ouvert la
porte à une forte concurrence. Il n’est pas non plus un pays essentiellement industriel, étant donné
qu’il ne possède pas de matière première essentielle pour la viabilité contrôlée et dirigée d’un tel
secteur. Mais récemment la découverte de ressources gazières et pétrolières dans sa mer territoriale a
été annoncée.
4
Le Liban n’a pas une production suffisante pour pouvoir subvenir à ses besoins aussi bien
qualitativement que quantitativement. La production destinée à l’exportation demeure encore très
modeste, et en tout cas, insignifiante par rapport à l’ensemble de la vie économique libanaise. Par
conséquent, le Liban n’est pas simplement importateur pour ses propres besoins, il est aussi
importateur pour un grand nombre de pays du monde arabe et moyen oriental : M. MAHMASSANI,
La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 125.
5
En effet, environ 70% du revenu national était assuré par les secteurs de services, et dont les
rentrées rendaient excédentaire la balance de paiements et comblaient l'énorme déficit chronique de la
balance Commerciale : M. AOUAD, Situation et problèmes économiques, www.opuslibani.org.lb
6
C'est une économie de consommation qui se base surtout, sur l'importation, d'où un grand besoin
en devises étrangères, ce qui se répercute sur la valeur, de la monnaie nationale et la rend très sensible
aux fluctuations et aux crises, autant internes qu'externes. D'où un déficit chronique de la balance
-9-
qu’il a gagné une force d'impulsion depuis la fin des conflits dérangeant le pays. Une
grande majorité de la population est commerçante et c’est ainsi que le commerçant
libanais joue le rôle d’exportateur par rapport au reste des pays du Moyen-Orient. Il
exporte des produits qu’il a lui-même importés.
commerciale ; et, aussi, une très forte dépendance vis-à-vis de l'extérieur à la fois pour importer les
biens de consommation ou les matières premières, et pour exporter les produits agricoles ou industriels.
Le secteur commercial occupait, depuis les années cinquante la place la plus importante au sein de
l'économie libanaise. Sa contribution à la formation du revenu national dépassait 30%, c'est-à-dire
presque autant que la contribution des secteurs industriel et agricole réunis : J.-L. REIFFERS, F.
BLANC, N. GRAND, S. PALMERO, Profil pays Liban, Institut de la Méditerranée, France, Femise,
2005, p. 22.
7
E. SAMHABER, Histoire du commerce, Arthaud, 1963, p. 10.
8
La motivation première qui les pousse vers d'autres rivages reste cependant d'ordre commercial.
Citons par ex : les denrées alimentaires telles que le vin, l'huile ou les grains (blé, orge) dans leurs
amphores de forme caractéristique, rondes et ventrues, minerais de cuivre, d'argent et surtout d'étain
servant à la production du bronze ; des produits de luxe : animaux exotiques pour les cours royales tels
que les singes ou les crocodiles, pourpre, bois de cèdre, parfums et pierres précieuses qui sert de
monnaie d'échange avec les populations locales : P. ZALLOUA, Identifying Genetic Traces of
Historical Expansions: Phoenician Footprints in the Mediterranean,The American Journal of Human
Genetics, 2008.
9
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 4.
-10-
10
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, nº 1.
11
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, nº 2.
12
Préparée par les physiocrates qui ont proposé le passage de la subsistance à l’opulence, du
minimum de la conservation de l’existence au maximum de la jouissance : C. LARRERE, L’invention
de l’économie au XVIII siècle, PUF, 1992 ; Dans l’économie de pénurie où l’offre est inférieure à la
demande, la revente des produits est garanti et l’intermédiaire remplit une fonction de rapprochement
des produits des consommateurs. C’est avec le passage de l’économie de pénurie à l’économie
d’abondance où l’offre étant supérieure à la demande, que le distributeur remplit une fonction
primordiale : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., nº 2.
13
P. VERLEY, La révolution industrielle, Folio Histoire, 1997 : cité par D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., nº 2.
14
Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et l’exclusivité territoriale, th., Montpellier,
2010, p. 7.
15
Ph. LE TOURNEAU, Concession. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses
concessions. Fondement et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc.
1010, 2006, n° 38 et s. ; 2010, n° 148 et 151.
16
V. HEUZE, « Pratique des contrats internationaux », Dict. Joly, t. 1, livre 1, 1988, p. 5.
17
J.-M. LELOUP, Le partage de marché par les réseaux de vente et les réseaux de distribution, in :
Dix ans de droit de l’entreprise, 1978, nº 935, 956.
-11-
suite à l’intermédiation d’une tierce personne pouvant garantir la bonne moralité des
futures parties contractantes : « Entre deux familles alliées, la procédure de location
de terres est simplifiée car les parties concluent l’affaire directement. Mais s’il n’y a
pas d’alliance entre les parties, la demande doit être faite auprès d’un tiers qui leur
est allié. Ce tiers devient l’intermédiaire et entame les pourparlers pour le compte de
la partie qui est intéressée »18.
18
J. BOUGOUMA, La représentation commerciale dans les états de la C.E.A.O, th., Montpellier,
1992, nº 39.
19
S. PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
20
A. PIATIER, Traité sommaire de la distribution, par P. AVRIL, 1964, p. 9 ; J. ZLATIEV, Le
mécanisme de la vente, DUNOD, 1961 : cité par D. FERRIER, op. cit.
-12-
hommes ; si plus fondamentalement, tout est toujours solidaire de tout, alors les
intermédiaires sont partout »21.
7. Ainsi, comme nous l’avons dit, si le Liban n’est pas un pays producteur
mais consommateur, il faut bien alors des intermédiaires de commerce qui assurent
avec permanence la satisfaction des besoins de la population en matière de
consommation ; cela devait donner un élan particulier à la profession du représentant
commercial22 -sujet de notre étude-. Cette question d’intermédiation n’est pas propre
au Liban puisqu’elle se trouve aussi en France ; elle occupe une importance
particulière au Liban à cause de sa « situation » et de sa « fonction ». Dans le premier
cas, elle est dotée d’un sens passif et signifie « ce qui se trouve placé entre deux
autres termes »23, au propre ou au figuré. Ainsi parle-t-on d’une division, d’une
solution ou encore d’un parti intermédiaire. Dans le second, avec un sens actif, elle
vise en revanche « ce qui établit un lien entre deux autres termes »24.
21
LAVELLE, Dialectique du monde sensible, 1922 : cité par M. GUILLAUME-HOFNUNG, La
médiation, 2e éd. PUF, Paris, coll. Que sais-je ?, nº 2930, 2000, v. La médiation comme mode de
règlement des conflits dans la vie des affaires, LPA, 1999, nº 138.
22
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, op. cit., p. 25.
23
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 12.
24
A. LALANDE, Vocabulaire technique et critique de la philosophie, vol. 1, 5e éd., Paris, PUF,
coll., Quadrige, 1999, v. intermédiaire, p. 533.
25
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 12.
-13-
I. La définition d’intermédiaire
10. C'est dans le domaine économique29 que les intermédiaires ont pris une
importance considérable, en particulier dans le domaine des marchés à l'exportation.
Selon le critère économique, « serait véritablement un intermédiaire professionnel
extérieur à l’entreprise qui assurerait la jonction entre le commerçant et le tiers. En
somme l’intermédiaire n’est ni un salarié ni un point de vente du principal »30. En
effet, la difficulté n’est plus de produire, elle est désormais de vendre31. Dès lors,
l’intermédiaire s’interpose entre le principal et le tiers en occupant une position
centrale. Il apporte sa connaissance du pays et ses relations au niveau des grands
producteurs. La notion d’intermédiaire renvoie ici aux extrêmes du circuit
économique : l’intermédiaire relie le producteur au consommateur final ou encore
l’offre et la demande, ce lien étant de nature essentiellement économique32. A ce titre,
26
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 562.
27
Elle structure d’ailleurs bien d’autres discours. C’est ainsi par le recours au concept
d’intermédiaire que J. Le GOFF a rendu compte de la naissance du Purgatoire dans l’imaginaire
chrétien de l’au-delà. Or ce passage des systèmes dualistes à un système ternaire, loin de ne constituer
qu’une transformation anecdotique, traduit une véritable révolution mentale et sociale ; v. La naissance
du purgatoire, NRF, Gallimard, Bibliothèque des histoires, 1981, spéc, « Penser l’intermédiaire», p. 16
et s. ; v. D.-R. DUFOUR, Les mystères de la trinité, NRF, Gallimard, Bibliothèque des sciences
sociales, 1990 : cité par N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations
contractuelles, LGDJ, Paris, préf. C. JAMIN, 2007, nº 3.
28
Dictionnaire de l’Académie française, « intermédiaire ».
29
V. supra note 12.
30
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 44.
31
D. FERRIER, op. cit., nº 2.
32
J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants, concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011,
nº 955.
-14-
33
P. COUSI, G. MARION, Les intermédiaires du commerce, préf. M. GRENTE, LGDJ, Paris,
1963, n° 3 : « avant de parvenir à l’utilisation, la chose suit un circuit commercial compliqué et met en
action une foule d’intermédiaires aux statuts les plus divers ». Les auteurs parlent d’ailleurs
significativement des intermédiaires entre le fabricant et l’utilisateur ; A. De THEUX, Le droit de la
représentation commerciale, Etude comparative et critique du statut des représentants salariés et des
agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1,
1975, nº 15, p. 29, propose de définir l’intermédiaire, ou auxiliaire du commerce, comme « celui qui
dans le circuit commercial, rapproche d’une manière ou d’une autre le fabricant et le consommateur,
le vendeur et l’acheteur. Outre le représentant de commerce, il faut mentionner sous ce terme le
courtier, le concessionnaire, le commissionnaire…».
34
L. AMIEL-COSME, Les réseaux de distribution, préf. Y. GUYON, LGDJ, 1995, nº 1 : «
L’organisation de la distribution en réseau peut nécessiter la présence de plus ou moins
d’intermédiaires entre le fabricant et le distributeur » ; D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd.
LexisNexis, 2012, nº 1 : « La distribution est un acte intermédiaire défini tardivement en raison de sa
proximité, source de confusion, avec la production et la consommation ».
35
L’évolution historique du rôle de ces intermédiaires en droit des affaires est notamment retracée
par C. CHAMPAUD, Le droit des affaires, 5e éd., PUF, coll. « Que sais-je? », 1994, n° 1978, p. 100 et
s.
36
Le nombre, le statut et la fonction de ces intermédiaires varient selon le type de circuit envisagé :
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº 60.
37
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, nº 473 ; S.
PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
38
Instruction du 31 juill. 1992, BOI 3CA-92, nº 77.
-15-
39
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, op. cit., nº 46.
40
Le recours aux agents commerciaux est notamment recommandé aux PME du fait de la souplesse
et des moindres coûts et risques qu’ils représentent en comparaison des autres solutions : C.-C.
GUILLOT, T. FORSTERLING, Le droit des agents commerciaux, des représentants salariés et des
concessionnaires en république fédérale d’Allemagne, Gaz. Pal., 1982, 2, 83.
41
Cette distinction se rapproche de celle rencontrée entre contrat conclu à l’occasion de la
conclusion d’un contrat et contrat conclu dans le cadre de la conclusion d’un contrat : N. DISSAUX,
op. cit., nº 362, 534.
42
Soit toux ceux qui participent de la distribution de biens ou de services d’un producteur à
l’utilisateur final : Ph. GRIGNON, Le fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du
commerce, préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, nº 1.
43
R. BALDI, Le droit de la distribution commerciale dans l’Europe Communautaire, Bruylant,
Bruxelles, 1988, p. 12 : La distinction entre ces différents intervenants n’est pas toujours aussi nette
dans l’ensemble des systèmes juridiques. Seuls les pays de Civil Law opèrent une classification
-16-
classés dans la catégorie des intermédiaires économiques et sont groupés selon qu’ils
agissent pour le compte d'autrui ou qu’ils agissent pour leur propre compte. La
première catégorie constitue la catégorie de référence des intermédiaires, lesquels
apparaissent comme les représentants de leurs commettants, dans le cadre des
transactions auxquelles ils prennent part44 : un intermédiaire est regardé comme
agissant au nom d'autrui lorsqu'il met en relation deux personnes qui contractent entre
elles (intermédiaire courtier) ou lorsqu'il contracte personnellement avec le tiers
(intermédiaire mandataire). En ce sens, s’il est évident qu’on s’en fait une idée
précise, celle-ci reste confusément exprimée, le terme « intermédiaire » désignant
tantôt un simple représentant de fait45, tantôt un participant à la conclusion d’un
contrat pour autrui46.
tranchée. Dans les pays de Common Law, il n’existe pas de réelle règlementation en la matière. On doit
reconnaître que ces classifications structurelles telles qu’elles existent en pays de Civil Law ne
recueillent pas l’assentiment unanime de tous les auteurs. Ainsi certains auteurs opèrent une sous
distinction au sein même de la technique de coopération et d’exportation et opposent les techniques
contractuelles d’implantation par la commercialisation incluant les représentants de commerce, les
courtiers et les agents commerciaux, des techniques contractuelles d’implantation par la production
regroupant quant à elles la licence de brevet, le franchisage industriel et la cotraitance : Ph. Le
TOURNEAU, Les techniques contractuelles d’implantation à l’étranger, Gaz. Pal, 1994, p. 3 et s.
Quant à MM P.-A. GOURION et G. PEYRARD, Droit du commerce international, LGDJ, 1994, p. 68
et s., ils proposent une classification différente : la technique dite de coopération ou d’exportation se
subdivise en vente par intermédiaires incluant notamment les courtiers, les commissionnaires et agents
commerciaux. En revanche, selon ces mêmes auteurs, relèvent de la vente en coopération, les
groupements d’exportateur réalisés sous forme d’association, les GIE et les sociétés commerciales. Au-
delà des classifications opérées par la doctrine, force de constater que l’œuvre créatrice de la pratique
est foisonnante et dépasse parfois le cadre rigide fixé par les auteurs.
44
E. CRUVELIER, Taxes sur le chiffre d'affaires, D., 2012, nº 260.
45
Cass. com., 24 mai 1994 et 13 juin 1995, LPA, 1996, nº 84, p. 37 et s.
46
Après avoir écrit que le porte-fort à la différence d’un simple intermédiaire, s’est engagé
personnellement à l’égard de l’un des contractants à apporter l’adhésion de tiers au contrat, M.
DARGONE-LABBE ne craint pas d’utiliser la notion d’intermédiaire pour désigner l’ensemble des
personnes ayant mission de participer directement à la formation d’un contrat : Y. DARGONE-
LABBE, Vices du consentement et manœuvres dolosives émanant du représentant de l’une des parties
au contrat, Rép. Defrénois, 1996, I, art. 36399, p. 1206 et s.
47
E. CRUVELIER, op. cit., nº 263.
-17-
est purement transparente, ces intermédiaires constituent des personnes opaques entre
leur commettant et le client avec lequel ils traitent. Ainsi, les intermédiaires opaques
sont considérés comme étant des « acheteurs-vendeurs » des biens ou des services
pour lesquels ils s'entremettent48. Ce qui a été approuvé par M. BLAISE qui a
considéré les intermédiaires, des personnes physiques ou morales qui s’insèrent dans
le circuit de distribution entre le fabricant et le consommateur, et qui sont des
commerçants indépendants qui achètent et revendent pour leur propre compte49.
48
Ainsi, s'agissant de commissionnaires à la vente, ils sont considérés comme ayant acquis les biens
de leurs commettants avant de les revendre à leurs clients : X. DELPECH, Régime des intermédiaires
en opérations de banque et en services de paiements, D, 2012, nº 256.
49
J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants, concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011,
nº 973, note 1.
50
C'est au XIXe siècle que les agents commerciaux ont commencé à façonner le visage juridique
que nous leur connaissons aujourd'hui et ceci sous le double aspect de la licéité et de la qualification de
leur activité : J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, nº 2.
51
« L’entremise porte sur la circulation des produits. Le commerce étant la circulation des
produits, qui réside dans la l’ensemble des actes qui font avancer le produit jusqu’à ce qu’il soit arrivé
au consommateur. Il y a incontestablement dans tout commerce un fait d’entremise. Seulement on a eu
le tort de ne pas préciser sur quoi porte cette entremise » : E. THALLER, Courte étude sur les actes de
commerce, Annales de droit commercial français, étranger et international, 1895, p. 177-203, spéc., nº
9, cité par N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº
91.
-18-
17. Cependant, toute entreprise d’une certaine envergure, dans quelque branche
commerciale ou industrielle que ce soit, poste à travers le territoire, sur un nombre
plus ou moins grand de places, des représentants ayant mission de créer, d’entretenir
et d’accroître sa clientèle, de préparer ou de conclure pour elle des opérations. Les
firmes productrices étrangères gagnent alors à être représentées par un représentant
habile, qui, une fois habitué au marché de la production de la firme, essaye
d’augmenter au maximum ses profits en lui trouvant le plus grand nombre de marchés
aussi bien au Liban qu’ailleurs. C’est dire que le fait pour une personne d’agir par
substitution en replacement d’autrui est un phénomène universel et constant auquel
tout un chacun a un moment ou à un autre recouru53.
18. Exposons les articles cités dans les deux droits libanais et français pour
préciser la notion de chaque catégorie de personnes relevant de ce phénomène
d’intermédiation, et en particulier celle qui est le sujet de notre thèse : le représentant
commercial.
19. En droit romain, un autre aspect différent de celui revêtu actuellement pour
la représentation a été employé : c’est la formule de procuration par laquelle le
mandant exprimait sa volonté de constituer une autre personne comme son
représentant54. La procuration intégrait la notion de représentation. La conception de
la représentation, en droit romain, se caractérisait par deux traits : « elle était en
52
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 126.
53
La notion de représentation a dès lors interpellé les philosophes et les psychologues. De
nombreuses études ont été consacrées à ce thème et il nous est impossible içi de toutes les citer : C.
DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, op. cit., nº 3.
54
Le mandat, dans sa forme élaborée actuelle, était par exemple inconnu à Rome dont la position en
la matière est résumée par l'adage Alteri stipulari nemo potest : On ne peut stipuler en faveur d'un autre
: J.-L. HERZOG, Les agents commerciaux dans la Rome Antique, RTD com., 1965, p. 61.
-19-
premier lieu un acte à titre gratuit ; en second lieu, occasionnelle, elle consistait en
un service d’ami »55.
20. Plusieurs définitions spéciales56 ont été formulées qui renvoient au sens
classique définissant la représentation, comme étant l'objet d'une convention ou de la
loi qui règle l'effet par lequel une personne, le représentant, engage une personne dite
la personne représentée, au nom de laquelle la première a traité avec un tiers. Dans le
sens juridique, la représentation apparaît comme un mécanisme par lequel le
représentant -investi à ce titre d’un pouvoir conventionnel, légal ou judicaire-
accomplit, au nom et pour le compte du représenté, un acte juridique dont les effets se
produisent directement sur la tête de ce dernier57.
21. Dire qu’une personne (le représentant) en engage une autre (le représenté),
signifie deux choses : d’abord que la personne engage des effets juridiques, c'est dire
que l’on est en présence d’un acte du représentant et que la représentation ne
représente pas un fait mais un mécanisme juridique. Il n’y a représentation que si
l’intervenant collabore à ce qui est proprement juridique dans l’acte 58. C’est sur cette
distinction que repose toute la notion de représentation, car le représentant se
distingue de l’aide simple, précisément en droit romain, par cette circonstance que sa
coopération est de nature juridique. L’idée qui l’explique fait partie de la théorie
générale de l’acte juridique, car agir en représentation, c’est faire un acte au nom et
pour le compte d’autrui, en vertu d’un pouvoir.
55
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., nº 2.
56
M. Le FERME a considéré la représentation comme une profession qui consiste en la visite d'une
clientèle éventuelle ou acquise, à l'extérieur de l'entreprise, dans le but et au bénéfice de celle-ci, de
prendre ou provoquer des ordres ou commandes : H.-P. Le FERME, Représentation industrielle et
commerciale, 2e éd. Sirey, 1980, p. 3 ; Ainsi, M. le professeur DIDIER, a considéré que la
représentation se caractérise par le fait que les actes accomplis par une personne s’imputent de manière
dérogatoire à une autre que celle qui a agi : Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé, préf. Y.
LEQUETTE, LGDJ, 2000, nº 165 et s. ; A son tour, M. THIOYE a défini la représentation selon deux
axes : le premier issu de la conception réelle, où il l’a considérée comme le mécanisme par lequel une
personne agit par substitution, en remplaçant autrui ; le second issu de la conception fonctionnelle, où
la représentation ne désigne plus, ici, une opération matérielle, mais intervient plutôt dans
l’établissement d’un lien de droit, en tant que technique par laquelle le représentant se substitue au
représenté dans la passation d’un acte juridique : M. THIOYE, Droit des intermédiaires immobiliers,
2e éd., LexisNexis, 2012, nº 412 et s.
57
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 894.
58
Dans le même sens, Ph. DIDIER, op. cit., nº 167 : considère la représentation comme la
dissociation entre celui qui agit et celui qui supporte les effets juridiques de l’acte.
-20-
22. Ensuite, vu que ses effets ne l’affectent pas, mais vont être rattachés à une
autre personne, c'est dire que l’acte fait l’objet d’une imputation dérogatoire. Plus que
la représentation entendue comme un mécanisme d’imputation dérogatoire des effets
d’un acte juridique59, c’est donc la possibilité d’une relation tripartite qui, au fond,
distinguerait le mandat du louage. Le recours au concept de représentation ne serait
que le manteau technique de cette sorte de structure tridimensionnelle impliquée par
l’économie du contrat de mandat60.
59
M. STORCK, Essai sur le mécanisme de la représentation dans les actes juridiques, préf. D.
HUET-WEILLER, coll. BDP, LGDJ, t. 172, Paris, 1982, nº 44 et s., p. 40 et s.: imputation des effets
d’un acte juridique.
60
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 226.
61
L’émergence d’internet commence à s’imposer comme un véritable outil nécessaire dans une
politique de distribution et de contact avec la clientèle, permettant d’élargir la base de sa zone
d’intervention, et de toucher de nouveaux consommateurs : D. FERRIER, La distribution sur l’internet,
Cah. dr. entr., 2002, nº 12 et s.
62
Cet essor a certainement produit ses fruits en deux domaines : celui des spéculations et celui du
tourisme. D’une part, de nombreuses opérations portant sur des marchandises ont lieu à titre spéculatif,
à la lumière des prix internationaux. Les entreprises spécialisées ont leurs agents postes sur les marchés
principaux. Dans ce domaine, ce sont les moyens de communication qui sont le principal instrument de
travail, car en matière de spéculation, les opérations et transactions ont lieu sans besoin de déplacer la
marchandise. D’autre part, le tourisme a pris un tel développement vu que de très grosses entreprises
ont organisé dans la plupart des régions du monde, des agences qui assurent tous les services
nécessaires aux voyageurs, tels que les billets de voyage, les réservations dans les hôtels,
l’établissement de tout un programme d’agrément, etc… La concurrence, en ce domaine, repose entre
autres, sur les moyens de communication, étant donné que souvent les clients sont pressés, et n’aiment
avoir de rapports qu’avec une seule agence : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en
droit positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 13.
-21-
qu’une meilleure connaissance des marchés et leur bon contrôle sont assurés grâce à
la rapidité des communications.
24. La représentation n’est pas un simple travail qui peut être abordé par
n’importe quelle personne ayant « échoué » dans l’exercice d’un autre métier, comme
le dit M. Le FERME : « Il n’a rien réussi, il est maintenant représentant de
commerce »63. Car chaque domaine a besoin de son spécialiste et surtout dans le
domaine juridique où le commercial est une branche du droit privé. Nous pouvons
assimiler la représentation à la chirurgie médicale, où devant le développement des
maladies, la médecine progresse, et chaque cas nécessite alors une chirurgie adaptée ;
cas de la représentation commerciale qui est une branche spéciale de la représentation
en général, et face à la pluralité des situations et à l’évolution économique, le besoin
s’est fait jour du représentant commercial moyennant des connaissances
indispensables.
25. Ainsi, en droit privé positif français, la représentation est une institution
aujourd’hui particulièrement bien saisie. Selon CAPITANT, il y a représentation
« lorsqu’un acte juridique est accompli par une personne, pour le compte d’une
autre, dans les conditions telles que les effets se produisent directement et
immédiatement, sur la tête du représenté, comme si lui-même avant accompli
l’acte »64. Sa définition selon laquelle une personne, le représentant, est investie du
pouvoir de conclure un acte juridique dont les effets se produiront dans le patrimoine
d’une autre personne, le représenté, ne soulève plus guère de controverses. Ses
conditions et ses effets sont arrêtés. La typologie des cas de représentation,
conventionnelle, volontaire ou légale, est également classique, et la description
traditionnelle de l’évolution historique de l’institution, conçue par le code civil sur le
modèle du mandat avant que le droit moderne n’en voie l’archétype dans la
représentation des incapables, l’est tout autant65.
63
H.-P. Le FERME, op. cit., p. 4.
64
H. CAPITANT, Introduction à l’étude du droit, Paris, 3e éd., 1912, p. 365 : cité par N.
DISSAUX, op. cit. nº 380.
65
E. GAILLARD, La représentation et ses idéologies en droit privé français, Droits, 1987, p. 91 et
s. : « Ainsi perçue dans ses composantes idéologiques, la représentation apparaît beaucoup moins
paisible qu’on aurait pu le penser de prime à abord. Les individualistes acharnes, que n’effrayent par
-22-
les phénomènes de supériorité, comme sans doute les marxistes, soucieux d’exalter la lutte des classes,
spécialement dans l’entreprises, verront dans certains de représentation un luxe inutile, sinon un «
artifice idéologique », tandis que d’autres, plus soucieux d’harmonie et de pax sociale, fut-ce au prix
de certaines concessions aux pouvoirs en place, y verront peut-être une merveilleuse technique
d’apaisement des conflits. Il suffit à cette place de constater que la représentation n’est assurément pas
une institution neutre, indifférente aux grands courants de pensée qui traverse notre droit ».
66
J.-L. HERZOG, Les agents commerciaux dans la Rome Antique, op. cit. p .61 et s.
67
J.-J. CLAMAGERANT, Du louage d’industrie, du mandat et de la commission en droit romain,
dans l’ancien droit français et dans le droit actuel, Paris 1856 : cité par F. FOURNIER, L’agence
commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, nº 2.
68
A. De THEUX, Le droit de la représentation commerciale, Etude comparative et critique du
statut des représentants salariés et des agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit
Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1, 1975, nº 68 ; J. GRIMALDI d'ESDRA, La mission du
VRP, Rép. trav., 1996, chron. p. 1 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants, Placiers), Rép.
com. 2007, Ch.1, parag.1.
69
Sur les aspects philosophiques de la représentation : Revue Française de Théorie Juridique, Paris,
PUF, 1987, nº 6.
70
V. infra nº 209 et s.
-23-
29. Mais comme le succès d’une marque lancée sur un marché se mesure par le
volume des ventes ainsi que par le volume des rentrées, et, comme les firmes
productrices ainsi que tout commerçant recherchent le plus grand intérêt pécuniaire
souvent au détriment de certaines règles de bonne conduite, une tendance a été
remarquée chez certaines firmes à changer continuellement de représentant, rien que
pour une augmentation minime des ventes74. Une telle pratique, en principe, n’est pas
71
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, nº 3.
72
Les intermédiaires sont des personnes physiques ou morales qui s’insèrent dans le circuit de
distribution entre le fabricant et le consommateur, et qui sont des commerçants indépendants qui
achètent et revendent pour leur propre compte : J.-B. BLAISE, Droit des affaires, commerçants,
concurrence, distribution, 6e éd., LGDJ, 2011, nº 973, note 1 ; N. DISSAUX, La qualification
d’intermédiaire dans les relations contractuelles, op. cit., nº 66 et s.
73
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 126.
74
Ibid.
-24-
30. C’est notamment pour éviter une telle pratique et dans le but d’assurer une
garantie de protection pour le représentant commercial, que le législateur libanais est
intervenu pour assurer une certaine sécurité à cette catégorie de personnes, qui en fait
constitue l’un des principaux éléments de l’économie libanaise. Cette sécurité a fait
l’objet de plusieurs transformations sur le plan des textes régissant la matière.
31. Dès 1807, l’article 74 du Code de commerce français inscrivait les courtiers
et les agents de change dans la catégorie plus vaste des « agents intermédiaires »75. Un
siècle et demi plus tard, un arrêté du 5 novembre 1946 codifiait les règles applicables
aux « intermédiaires du commerce »76. Entre ces deux dates, le Code de commerce
libanais promulgué par le décret-loi N. 304 du 24 décembre 1942 établissait les
principes de la concurrence et envisageait certaines formes de l’entremise
commerciale, notamment le mandat commercial77, le courtage78 et la commission79.
75
Ce texte fut abrogé par l’ordonnance du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du Code
de commerce (Ordonnance nº 2000-912).
76
D. 1946, L., 453. Ce texte n’est plus en vigueur. Il est annulé par le Conseil d’Etat : CE, 30 avril
1948, JCP, 1948, II, 4401, note J. HEMARD.
77
Art. 272 C. com. lib.: « Le mandat est commercial quand il est relatif à des opérations
commerciales.
Il prend plus spécialement le nom de commission et est régi par les dispositions du chapitre suivant,
lorsque le mandataire doit agir en son propre nom ou sous un nom social pour le compte de son
commettant.
Quand le mandataire doit agir au nom du mandant, ses droit et ses obligations sont déterminés par
le livre VIII de la deuxième partie du code des obligations ».
-25-
32. Quelques années plus tard, et pour les raisons ci-dessus, le législateur
libanais a perçu la nécessité d’une règlementation qui organiserait le travail du
représentant commercial au Liban, déterminerait les éléments caractéristiques d’une
telle profession, et lui apporterait une certaine protection. Cette dernière se justifie
d’une manière indirecte par le fait que les dispositions du code pénal relatives à la
concurrence illicite ne suffisent pas à assurer une protection exemplaire81. C’est le
décret-loi N. 34/67 du 5 août 1967, modifié par la loi N. 39 du 6 février 1975 et le
décret-loi N. 73/83 du 9 septembre 1983, qui a réglé le régime juridique de la
représentation commerciale en identifiant les personnes aptes à bénéficier du statut de
représentant commercial. Il a prévu dans son article premier : « Le représentant
commercial est le mandataire qui, par sa profession habituelle et indépendante, et
sans être lié par un contrat de louage de services, entreprend des négociations pour
conclure des opérations, de vente, d’achat, de location ou de prestation de services, et
78
Art. 291 C. com. lib.: « Le courtage est un contrat par lequel une partie dite courtier, est
chargée moyennant une rémunération, soit d’indiquer à l’autre partie l’occasion de conclure une
convention, soit de lui servir d’intermédiaire pour la négociation d’un contrat.
Les règles du mandat sont, d’une manière générale, applicables au courtage ».
79
Art. 279 C. com. lib. : « Le commissionnaire, est celui qui se charge de conclure en son propre
nom, mais pour le compte de son mandant, des achats, des ventes et d’autres opérations commerciales
moyennant une commission ou une provision.
Les règles de mandat sont applicables au contrat de commission, sous réserve des dispositions du
présent chapitre ».
En revanche, en droit français nous trouvons dans le code de commerce français, l’article L.132-1
al.1 : « Le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un nom social pour le compte
d'un commettant ».
80
Art. 278 C. com. lib. : « Suivant l’état de subordination ou d’indépendance résultant des
conventions intervenue, les représentants de commerce doivent être considérés tantôt comme des
préposes, tantôt comme de simples mandataires.
Ils ont toujours droit toutefois, en cas de rupture même non abusive, du contrat, à l’observation du
délai de préavis d’usage, su du moins la représentation commerciale est leur unique profession.
Lorsqu’un mandataire représentant pour plusieurs maisons commerciales, a des locaux, un
personnel, une organisation et des frais généraux, c’est possible de le considérer comme un véritable
propriétaire d’un projet de représentation commerciale, il devient personnellement commerçant ».
81
La répression de la concurrence illicite et l’incrimination de son auteur sont soumises à des
conditions très rigoureuses relativement à l’imputabilité et à l’intention de l’auteur, de sorte que,
souvent, il est très difficile d’en apporter la preuve certaine qui autorise d’infliger la répression. Par
conséquent, de nombreux actes, en eux nuisibles aux commerçants et à l’économie, ne tombent pas
sous le coup de la loi pénale, ni même celui de la loi civile : v. infra nº 507 et s.
-26-
le cas échéant, se livre à ces activités au nom des producteurs ou des commerçants et
pour leur compte.
82
Modifié par le décret (n° 92-506) du 10 juin 1992, relatifs aux agents commerciaux, JORF n° 135
du 12 juin 1992, p. 7719.
83
Accompagnement peu après la première guerre mondiale en 1920 qui perdure au niveau culturels,
académiques, publiques, littéraires, scientifiques, sociales, juridiques… Soulignons dans ce dernier cas,
que l’on trouve une grande influence du droit français sur le droit libanais, puisque sa constitution
l’était. C’est avant son indépendance en 1943, se trouvant encore sous le mandat français, que fut
élaboré le brouillon de la constitution libanaise en 1926, devenu par la suite la constitution de la
république. Ce brouillon a été clairement inspiré de l’esprit de la troisième république française.
84
Le Code libanais a puisé aussi dans d'autres sources : conventions internationales, usages et autres
coutumes s'adaptant avec les particularités du milieu libanais. En réalité, l'emprunt n'est plus exclusif,
-27-
commercial85. Le code commercial libanais n'étant donc pas un « produit libanais »86,
d’où l’affirmation que la définition du représentant commercial libanais était inspirée
du droit français, car le décret-loi N. 34/67, à première vue, paraît être ressembler à
son homologue français. Il convient de souligner que malgré l’option de la langue
française, le style du Code libanais s’est distingué du style du Code français. Ainsi,
nous trouvons dans le Code libanais, des images, des explications et des « clauses
interprétatives » qui n’ont pas leurs équivalents dans le Code français. A l'instar du
Code français de 1807, le Code de commerce libanais constitue une législation
d'exception en ce sens qu'il régit seulement les actes de commerce et les
commerçants87.
35. Ce qui a été justifié postérieurement avec le décret-loi N. 34/67 par MM.
les professeurs FABIA et SAFA qui aient pensé que les deux constructions juridiques
n’étaient pas quasiment calqués l’une sur l’autre: « Contrairement à ce qui a été écrit,
le décret n'est pas un simple démarquage de textes législatifs venus d'autres pays.
Notamment, la protection qu'avait instituée le droit français était beaucoup plus
limitée, quant aux personnes et quant aux moyens, parce que dans bien des branches
le droit français est sous l’influence du droit communautaire (Selon J. DELORS président français de la
commission européenne cité par P. LEGER in l'Euro juge, Atelier nº 6, Quarantaine de la magistrature
ENM, 1999, 80% de la législation française serait d'origine communautaire) qui a commencé à
conquérir le Liban en vertu du Contrat d'Association de 2002 conclu avec l'Union Européenne (Cf. loi
nº 474, 12 déc. 2002, JO nº 68, 17 déc. 2002 p. 7389 et s.) et l'accord de libre-échange de 2006 (V. L nº
732, 15 mai 2006, J.O nº 26, 25 mai 2006, p. 2849 et s.) ; Les dispositions de la loi libanaise du 4
février 2005 sur la protection du consommateur et celle plus récente de la loi du 8 décembre 2006 sur le
dumping (J.O nº 60, 21 déc. 2006, p. 6664 et s.) en sont révélateurs.
85
Le Code de commerce libanais en 1850 qui n'était que la reproduction pure et simple du Code de
commerce français de 1807 d'avant la loi de 1867 sur les sociétés par actions. Ce Code a régi le Liban
pendant l'empire ottoman et jusqu'à la promulgation du Code de commerce libanais en vertu du décret
nº 304 du 24 décembre 1942 (J.O Lib. nº 4075 du 7 avril 1943). En effet, le Code de commerce libanais
est resté fidèle à la forme du Code de commerce français elle-même puisée , bien que maladroitement,
cette modélisation fut facilitée par la « réception » dix ans auparavant du Code napoléonien de 1804
débouchant alors sur la forme et la promulgation du Code des obligations et des contrats libanais en
date du 9 mars 1932 .
86
Le texte original du Code de Commerce libanais a été rédigé en langue française, en partie par G.
COHENDI (professeur à la faculté de droit de Lyon) et révisé par J. CHEVALIIER (directeur de
l'Ecole de droit de Beyrouth de 1946 à 1955), et porta les empreintes du modèle français : v. J.
DUCRUET, Université Saint-Joseph de Beyrouth, faculté de droit et des sciences politiques et
économiques, Livre d'or 1913-1993, p. 24, cité par F. NAMMOUR, Code de commerce: L’expérience
Libanaise, Colloque sur le bicentenaire du Code de commerce français organisé par le Laboratoire de
droit privé de la faculté de droit de l'Université Montpellier I, mai 2007.
87
Ch. SAFA, Droit commercial, maritime et aérien, in Le droit libanais, les systèmes de droit
contemporain XV, Institut de Droit comparé de Paris et de Lyon, LGDJ, 1963, t. 1, p. 285, nº 6.
-28-
les agents commerciaux en France ont depuis longtemps renoncé à se faire une
concurrence désastreuse et ont élaboré des contrats-types sauvegardant leurs
intérêts, qu'ils s'entendent pour imposer à leurs représentés. Cette voie paraissant
impossible au Liban, l'intervention du législateur y fut plus étendue, plus détaillée, et
présente à ce point de vue comme à d'autres une originalité incontestable. Toutefois,
il peut être établi qu'elle ne dépasse pas les limites de l'équité et ne heurte aucun
principe considéré comme d'ordre public international »88.
88
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, nº 2.
89
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, nº 573, 574.
90
Art. L. 7311-3 c. trav. : « Est voyageur, représentant ou placier, toute personne qui :
1° Travaille pour le compte d'un ou plusieurs employeurs ;
2° Exerce en fait d'une façon exclusive et constante une profession de représentant ;
3° Ne fait aucune opération commerciale pour son compte personnel ;
4° Est liée à l'employeur par des engagements déterminant : La nature des prestations de services
ou des marchandises offertes à la vente ou à l'achat ; La région dans laquelle il exerce son activité ou
les catégories de clients qu'il est chargé de visiter ; Le taux des rémunérations ».
91
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, nº 7.
-29-
92
D. DESURVIRE, La distribution commerciale en France et dans la communauté européenne,
LPA, 1989, nº 43.
93
Art. L.132-1 al.1 C. com.: « Le commissionnaire est celui qui agit en son propre nom ou sous un
nom social pour le compte d'un commettant ».
94
Art. L. 146-1 C. com. : « Les personnes physiques ou morales qui gèrent un fonds de commerce
ou un fonds artisanal, moyennant le versement d'une commission proportionnelle au chiffre d'affaires,
sont qualifiées de "gérants-mandataires" lorsque le contrat conclu avec le mandant, pour le compte
duquel, le cas échéant dans le cadre d'un réseau, elles gèrent ce fonds, qui en reste propriétaire et
supporte les risques liés à son exploitation, leur fixe une mission, en leur laissant toute latitude, dans le
cadre ainsi tracé, de déterminer leurs conditions de travail, d'embaucher du personnel et de se
substituer des remplaçants dans leur activité à leurs frais et sous leur entière responsabilité ».
95
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-30-
96
Al. 3 de l’art. 2 du décret-loi nº 34/67 : « La clause de représentation exclusive n’est opposable à
l’égard des tiers que si elle a été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre
du commerce ».
97
Art. 4 du décret-loi nº 34/67 : « Le contrat de représentation commerciale est considéré conclu
dans l’intérêt commun des parties contractantes.
Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre motif légitime,
permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité équivalente au
dommage subi et au gain manqué.
Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par l’arrivée
de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité évaluée par les
tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la marque de son
mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès,
le refus de son mandant de renouveler le contrat de représentation ».
-32-
43. Ces approches sont déduites des dispositions de l’article premier du décret-
loi N. 34/67, où le législateur impose que « le représentant commercial personne
physique doit être libanais et doit avoir un établissement commercial au Liban ; ainsi
que pour les représentants commerciaux personnes moraux que ce soient des sociétés
de personnes ou des sociétés à responsabilité limitée : Il faut que la majorité des
associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et
que celui qui a le droit de signer soit libanais. De même pour les sociétés anonymes :
Il faut que la majorité du capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des
membres du conseil d’administration ainsi que le directeur général ou la personne
déléguée par le président du conseil d’administration ou par le directeur général
pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».
98
Art. 5 du décret-loi nº 34/67 : « Nonobstant toute clause contraire, les tribunaux du lieu où le
représentant commercial exerce son activité sont compétents pour trancher les litiges naissant du
contrat de représentation commerciale ».
99
Cet avantage est concrétisé par le déplacement effectué par l’autre partie devant des juridictions
étrangères aux textes inconnus.
100
TI Beyrouth, Ch. com., décision nº 33/697, 15 déc. 1971, Rec. Hatem, vol. 113, p. 18 à 20.
101
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. de Lib.,
1972, p. 239.
102
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 1, n° 6.
-33-
44. Sur ce point précis, nous nous contenterons de ne pas entrer plus avant dans
le développement de cette question. Cette dernière en effet ne fait pas partie de notre
étude vu qu’elle ressort du droit international privé.
46. Cependant, vu que les lois adoptées en droit libanais sont restées
inchangées, elles sont non seulement d'inspiration française, mais parfois rédigées en
français103. C’est le cas de la jurisprudence, où fréquemment des décisions -alors que
l’arabe est la langue officielle- contiennent des passages de référence en français,
voire tirés d'ouvrage français104. C’est dire que le droit français a servi de base parfois
à la jurisprudence libanaise qui continue à prendre en considération. Il demeure la
source du droit libanais quand se présentent de nouveaux problèmes ou de nouveaux
litiges ; les juges libanais alors se référant à la jurisprudence française y trouvant
l’inspiration pour une solution105.
103
Par exemple, le Code de procédure civile libanais de 1933 est rédigé en français. Bien que le
Code de procédure civile ait été publié pour la première fois en arabe en 1983, l'expérience
jurisprudentielle et législative libanaise s'est largement inspirée du nouveau Code de procédure civile
français.
104
En droit commercial, le juge libanais pourra se référer à une jurisprudence antérieure soit, en
dehors ou contrairement à une telle jurisprudence, apporter une nouvelle solution fondée sur des
considérations tirées de l'équité et de la loyauté commerciale (Art. 6 C. com. lib). Cette disposition
consacre certes la prééminence de la loi comme source du droit commercial, mais elle consacre
également le courant doctrinal français de l'époque hostile à la méthode d'interprétation qui n'acceptait
d'autre fondement que la loi écrite excluant les précédents ou autorités, les usages non consacrés par la
loi, le sentiment de l'équité, l'idée de l'utilité générale (Art. 371 C.O.C).
105
Dans le même sens l'article 3 du Code de commerce libanais aux termes duquel : « A défaut de
toute disposition légale applicable, le juge pourra s'inspirer tant des précédents jurisprudentiels que
des exigences de l'équité et de la loyauté commerciale ».
-34-
47. Des divergences linguistiques et donc juridiques peuvent résulter entre les
textes français et arabes, dans ce cas, le texte français, considéré comme texte original
fera foi, sous condition de respecter l’intention du législateur libanais. Ce respect sera
traduit par une référence prudente et non aveugle au droit français, surtout lorsqu’il
s’agit de dispositions envisagées à la lumière des circonstances socio-économiques et
politiques pré-décrites. Image rencontrée souvent dans notre travail, vu la faiblesse de
références en droit libanais face à la richesse française. Ce qui nous a causé des
difficultés pour les démonstrations et les développements des sujets abordés.
49. Dans une recherche d’intelligence des règles de droit, des divergences de
forme en droit libanais par rapport au droit français apparaissent dans le domaine de la
représentation en matière commerciale. Ces divergences permettent au droit libanais
de s’inspirer de formes différentes pour résoudre ses problèmes juridiques complexes.
L’idée globale du décret-loi N. 34/67 ne désigne pas stricto sensu l’intermédiaire,
mais nous pousse à vérifier lequel mérite la protection dudit décret-loi. En d’autres
termes, le statut protecteur propre au représentant commercial s’applique-t-il à
d’autres agents commerciaux que le décret-loi ignorait ? Qu’en est-il des
caractéristiques de la protection du droit libanais issue du décret-loi N. 34/67 à l’égard
des autres intermédiaires de commerce ?
50. Pour pouvoir répondre à ces questions, il a fallu mettre en parallèle les deux
droits libanais et français afin de voir comment chaque droit résout la même situation
-35-
problématique et à défaut la solution propre à une situation unique. Nous allons suivre
une démarche classique consistant à rapprocher les notions de représentation
commerciale dans les deux pays. Ceci nécessite l’identification des éléments de
qualification pour chaque catégorie de personnes, afin de bénéficier des dispositions
du décret-loi N. 34/67. Il a fallu aussi reconnaître en quoi la notion du représentant
commercial dans les relations contractuelles pouvait être comprise dans un sens
suffisamment précis pour dépasser les paradoxes qu’elle soulève a priori ; et partant,
lui conférer une cohérence de nature à en faire le substrat d’une catégorie juridique106.
Comme le remarquait GENY, « pour qu’un phénomène sorte du chaos de la vie
sociale et obtienne les sanctions précises du droit, il faut, avant tout, qu’il soit
caractérisé par des traits, qui le mettent à part et l’érigent en institution
juridique »107.
52. Suivant ces approches, nous divisons notre étude en deux parties : la
première consistant à vérifier la qualification alternative du représentant commercial
au sens du décret-loi N. 34/67. Dans une seconde, nous relèverons les effets de la
protection du représentant commercial au sens dudit décret-loi.
106
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
préf. C. JAMIN, 2007, nº 46.
107
F. GENY, Science et technique en droit privé positif, Nouvelle contribution à la critique de la
méthode juridique, 3 partie: Elaboration technique du droit positif, Paris, Sirey, 1921, ch. 5, p. 167 et
s. :spéc. Sur le rôle des catégories réelles dans la technique du droit : cité par N. DISSAUX, ibid.
PREMIÈRE PARTIE
LA QUALIFICATION ALTERNATIVE
DU REPRÉSENTANT COMMERCIAL
AU SENS DU DÉCRET-LOI N. 34/67
-37-
108
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; CA
Versailles, 30 juin 2005, n° 02VE00459 : l’existence des missions de prospection ou d'assistance
technique et commerciale qui devaient donner lieu à des documents écrits, faisant état des analyses,
démarches ou études qu'aurait effectuées pour le compte de la redevable les sociétés mandatées par
elle, la société G. MARTINOT justifie la réalité d'une « entremise commerciale » effectuée par la
société Sicopar, entremise ayant permis l'obtention des marchés en contrepartie d'une commission et
qui, en raison de son caractère immatériel, n'avait pas nécessairement à donner lieu à l'établissement
d'études techniques ou de rapports d'exécution ; CA Paris, 2e Ch., 25 mars 1997, n° 95PA01501 : si
l'intéressé exerçait une activité d’« entremise commerciale » auprès d'une clientèle majoritairement
italienne, c'était pour le compte de la société Organisation Glorig ; CA Paris, 2e Ch., 27 sept. 2006, n°
04PA00566 : Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société François Sanchez et Associés a
pour objet social le conseil en recrutement de cadres et en ressources humaines ; que, comme l'indique
le ministre défendeur, elle est chargée, sur demande de sociétés françaises ou étrangères et en qualité
d'intermédiaire, de mettre en relation l'employeur et l'employé potentiels, après étude préalable et
travaux de recherche, notamment dans le secteur bancaire, des assurances, de l'industrie
agroalimentaire et du bâtiment ; qu'elle est rémunérée par les employeurs, dont elle doit être regardée
comme étant le mandataire, selon un pourcentage de la rémunération du salarié recherché ; qu'une telle
activité doit être qualifiée d'activité d’entremise, par nature commerciale, sans qu'il y ait lieu de
rechercher si cette activité pouvait par ailleurs être considérée comme commerciale en raison de
l'importance des moyens mis en œuvre ou de la spéculation sur le travail d'autrui.
109
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
2007, n° 46 et s.
110
Congrès conclut en Sept. 1965 dont le thème était « La représentation commerciale
internationale » où le rapporteur général M. Bernard De GRANRUT avait adressé aux juristes un
questionnaire très détaillé sur les différentes formes de la représentation et de la concession
commerciale en sept points : historique, définition, différentes catégories de la représentation, la
concession, le contentieux, droit international privé, la représentation et le droit des ententes. Et les
réponses à ce questionnaire étaient la base pour établir le rapport général en question. Dans ce même
sens, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 8.
-38-
C’est donc l’examen des conditions juridiques dans lesquelles le producteur peut
diriger son activité commerciale, même en dehors de son entreprise, qui doivent être
définies, et c’est en définitive l’existence d’un mandat plus ou moins étroit que nous
allons découvrir dans ces différentes catégories qui existent rarement en droit dans
les différentes législations, mais qui existent en fait, dans la plupart des pays »111.
111
V. le rapport général précité, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif Libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 8.
112
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 9.
-39-
57. A cet égard, une remarque d’ordre terminologique s’impose. En effet, les
personnes visées par le décret-loi N. 34/67 sont souvent nommées soit agents
113
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 24 et s.
114
V. infra n° 139.
115
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-40-
59. Le commerçant qui vend ce qu’il aurait acheté pour son propre compte, est
donc considéré comme représentant commercial au sens du deuxième alinéa de
l’article premier du décret-loi N. 34/67, sous réserve que le contrat lui confère la
qualité de « représentant » ou de « distributeur exclusif ». Ainsi, concernant le décret-
loi N. 34/67, la qualification d’intermédiaire commercial comme représentant
commercial n’oblige pas à réaliser des opérations commerciales sous le nom du
mandant et pour son propre compte, tant que ce représentant commercial jouit de
cette qualification, même s’il a conclu des affaires commerciales pour son propre
compte dans le cadre d’un contrat garantissant sa qualité de représentant ou de
distributeur exclusif.
116
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, éd. Sader, t. 2, 1988,
Art. 1er., n° 4.
117
Cass. com., 10 déc. 2003, RTD civ., 2004, p. 285, obs. J. MESTRE et B. FAGES ; cah. dr. entr.,
2004-3, p. 31, obs. Ph. GRIGNON.
118
M. MAHMASSANI, op.cit. p. 11.
-41-
60. Après cette analyse probante, il apparaît que le droit français détermine en
un article propre chaque catégorie de personnes, tandis que, selon les dispositions de
l’article premier du décret-loi N. 34/67, le législateur libanais a désigné trois
catégories de personnes pouvant bénéficier du statut de représentant commercial : le
mandataire agissant pour le compte d’autrui selon l’alinéa premier de l’article précité ;
le commerçant « représentant » et le commerçant « distributeur exclusif » agissant
pour leur propre compte - aux termes du deuxième alinéa.
61. Ceci nous permet de diviser notre première partie en deux titres successifs
suivant les dispositions de l’article premier du décret-loi N. 34/67 : le premier titre
sera relié à son alinéa premier concernant le représentant -mandataire qui agit pour le
compte d’autrui. Et le second titre sera relié à son deuxième alinéa concernant
le « commerçant », qui agit pour son propre compte en tant que « représentant » ou
bien « distributeur exclusif ». Ces champs d’études vont être étudiés en droit libanais
en comparaison avec le droit français : d’un côté, ce que ce dernier qualifie stricto
sensu de représentant ; de l’autre, ce qui ne correspond pas à un représentant.
TITRE PREMIER
63. De son côté, dans le premier alinéa de l’article 769 du Code de commerce,
le droit libanais définit le mandat, comme « le contrat en vertu duquel le mandant
délègue au mandataire le pouvoir d’exercer une affaire ou plusieurs affaires, ou de
conclure un acte ou un fait ou plusieurs actes et faits, sous condition de l’acceptation
du mandataire ». Et suite aux dispositions de l’article premier du décret-loi libanais
N. 34/67, nous trouvons que le représentant commercial est : « le mandataire qui, par
sa profession habituelle et indépendante, et sans être lié par un contrat de louage de
services, entreprend des négociations pour conclure des opérations, de vente,
d’achat, de location ou de prestation de services, et le cas échéant, se livre à ces
119
S. PERUZZETTO et C. DILOY, Intermédiaires, D., 2009, nº 1.
120
Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 1.
121
Cette définition est proche, bien que distincte, de celle qui est donnée par G. CORNU,
Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p. 634 ; V. aussi le nouveau C. civ.
du Québec, art. 2130, al. 1er : « Le mandat est le contrat par lequel une personne, le mandant, donne le
pouvoir de la représenter dans l’accomplissement d’un acte juridique avec un tiers, à une autre
personne, le mandataire qui, par le fait de son acceptation, s’oblige à l’exercer »: cité par Ph. LE
TOURNEAU, Mandat, op. cit., n° 3.
122
C. civ., art. 1984, al. 1er. – Certains arrêts reprennent textuellement cette formule : Cass. civ. 3e
Ch., 17 févr. 1999, Bull. civ., III, n° 40, D. 1999, IR 69.
123
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 2.
-44-
activités au nom des producteurs ou des commerçants et pour leur compte »; D’où un
point commun comme première conséquence aux deux définitions entre le mandataire
et le représentant commercial, où tous les deux concluent des actes pour leurs
mandants, c'est dire qu’ils agissent pour le compte d’autrui.
124
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 51 ; S. BRAUDO, Définition de mandat,
Dictionnaire du droit privé, www.dictionnaire-juridique.com, 2004.
125
Cass. com., 20 fév 2007, Bull. 2007, IV, n° 57 ; Cass. com., 26 mai 2009, pourvoi n° 08-13839,
Lechevin c/ Société Hadimo.
126
J.-L. GAZZANIGA, Mandat et représentation dans l’Ancien Droit, Droits, n° 6, 1987, p. 21et s.
127
J. DOMAT, Les lois civiles dans leur ordre naturel, t. 14, sect. 1 parag. 1 : cité par Ph. DIDIER,
De la représentation en droit privé, préf. Y. LEQUETTE, LGDJ, 2000, n° 60.
128
R.-J. POTHIER, Traité du mandat, 1781, article préliminaire : cité par Ph. DIDIER, op. cit., n°
60.
-45-
129
F. FOURNIER, La nature et le régime juridiques de l’agence commerciale, th., 1995, p. 161.
130
Depuis les travaux de la Glose, la tradition savante distingue trois catégories d’éléments
susceptibles d’influer sur la qualification d’un contrat: un élément est dit essentiel à la qualification si
l’on ne peut pas imaginer le contrat en cause sans lui (ainsi en est-il du prix dans la vente) ; il est dit
naturel s’il est présumé être présent mais peut être écarté par les parties au moyen d’une stipulation
expresse; il est dit accidentel s’il n’est présent que si les parties l’ont spécialement voulu: cité par Ph.
DIDIER, op. cit., n° 270.
131
Comme l’écrit M. TOMASIN dans une étude sur la distinction entre le mandat et le contrat de
travail: « La doctrine hésite depuis toujours entre deux conceptions différentes du mandat ; la
conception la plus étroite définissant le mandat comme un pouvoir donne au mandataire de
représenter le mandant et la conception plus large qui définit le mandat comme un contrat par lequel
le mandant confie au mandataire la gestion d’une ou plusieurs affaires pour agir à sa place et en son
nom »: D. TOMASIN, A la recherche d’une distinction entre mandat et contrat de travail, in Mél.
dédiés au Président M. DESPAX, Presses de l’université des sciences sociales de Toulouse, 2002, p.
203-237, spéc. n° 7, p. 209.
132
N. DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris,
2007, p. 103.
133
N. DISSAUX op. cit.
134
M. STORCK, Essai sur le mécanisme de la représentation dans les actes juridiques, préf. D.
HUET-WEILLER, coll. BDP, LGDJ, t. 172, Paris, 1982, p. 40 et s.
-46-
135
Ph. DIDIER, op. cit., n° 70 et s.
136
Ch. AUBRY et Ch. RAU, Droit civil français, par A. PONSARD et N. BDEJEAN de la BÂTIE,
t. 6, 7e éd., Litec, 1975, n° 164 ; A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et
commerciaux, 9e éd., Montchrestien, 2011, n° 911 ; F. COLLART DUTILLEUL et Ph.
DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D., 2011, n° 660.
137
Cass. com., 29 oct. 2002, RJDA, 2003, n° 132, relève, pour qualifier un contrat de mandat, que
l’intéressé bénéficie « d’une maîtrise de l’organisation de son entreprise ».
-47-
138
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 187.
139
A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et commerciaux, 9e éd.,
Montchrestien, 2011, n° 909.
-48-
PREMIER CHAPITRE
72. Une simple lecture comparative des deux textes permet de constater qu’ils
sont similaires à l’exception du mot « habituelle » dans le texte français d’une part, et
l’absence des « mandants industriels » ou « autres agents commerciaux » dans le texte
libanais d’autre part. En revanche, les mots « producteurs » et « industriels »
expriment une fonction économique. Le mot « producteurs » est particulièrement utile
pour reconnaître la qualification d'agent commercial à ceux qui opèrent pour le monde
agricole (agriculteurs, personnes physiques et personnes morales non
commerçantes)140 ou pour des artisans ayant une activité de production141. D’où un
tableau comparatif primaire avec les points essentiels suivant la première lecture des
deux textes :
140
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 28.
141
Il a été jugé que l'activité d'architecte d'intérieur-designer, qui ne relève pas d'une profession
réglementée et consiste à aménager des magasins, à réaliser des stands de salons et des décors de
vitrines ainsi qu'à créer des objets, constitue une activité économique impliquant la circulation de biens
et la fourniture de services, se rattache à celle de producteur au sens de l'article L. 134-1 du code de
commerce : Cass. com., 20 mars 2012, n° 11-15.287, D. 2012. Actu. 871, obs. E. CHEVRIER.
-49-
73. Développant le fond de chacun d’eux, afin de connaître les points communs
et les points de divergences, nous pouvons penser que, pour pouvoir jouir du statut de
représentant commercial libanais ou d’agent commercial français, il ne faut pas
seulement agir d’une manière indépendante mais encore professionnelle, après avoir
traité de manière permanente, sans être lié par un contrat de travail.
75. Deux points importants sont à relever dans ces articles français et libanais :
« à titre de profession permanente indépendante » et « sans autorisation ». Le principe
d’agissement de l’agent commercial est clairement et doublement exprimé. En effet,
pour justifier les traits caractéristiques de la qualification de l’agent commercial
français ou du représentant commercial libanais, chacun d’eux devait exercer son
activité à titre de profession habituelle indépendante, sans être lié par un contrat de
louages de services.
SECTION 1
142
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 473 et s., n° 17 ; Cass. com., 16
janv. 1968, JCP. 1968, 15551, II ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970,
p. 465, n° 1.
143
Les représentants mandataires ordinaires sont des représentants qui, bien que non liés par un
contrat de travail, ne remplissent pas toutes les conditions exigées pour bénéficier du statut des agents
commerciaux : F. FLICHY, Représentant de commerce, (Statut juridique, fiscal, et social du VRP), 14e
éd., Delmas, 2003, n° 125.
144
M. MAHMASSANI op. cit.
145
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
-52-
D’autre part, il n’est pas attaché exclusivement au service d’un seul représenté, il peut
cumuler la représentation de plusieurs commerçants, à la seule condition qu’il n’y ait
pas contradiction entre les objets des diverses représentations et qu’elles ne soient pas
concurrentielles l’une par rapport à l’autre146. En effet, l’agent commercial peut avoir
d’autres occupations à condition que celles-ci ne soient pas concurrentes ou
incompatibles avec l’objet de la représentation. Au surplus, il n’est même pas
nécessaire que l’intermédiaire agisse à titre de profession principale147.
79. De même, en droit français, l’agent commercial est un mandataire qui agit à
titre de profession indépendante…, cette qualité de mandataire professionnel s’est
affirmée durant toute la continuité du statut ordinaire de l’agent, au même titre que
son indépendance, ainsi que l’exprime parfaitement l’art. L. 134-1 C. com., tout en
précisant qu’il agit au nom et pour le compte du commettant. Il le représente en effet
au sens du droit civil : par conséquent, les opérations faites par l’agent produisent
leurs effets dans le patrimoine de ses mandants. C’est l’effet habituel de la
représentation148, et la conséquence de la condition d’exercice de l’agence
commerciale à titre de profession.
SECTION 2
149
Cass. com., 10 déc. 2003, arrêt n° 1811, pourvoi n° 01-11923 ; CA Paris, 12 mars 2003, Lettre
distrib., juin 2003 ; CA Montpellier, 4 fév. 2003, Lettre distrib., mars 2003 ; Cass. com., 3 oct. 2000,
pourvoi n° 97-19999.
150
Cass. com., 16 janv. 1968, JCP, 1968, 15551, II.
151
Art. 2, al. 1 du décret-loi n° 34/67: « Tout contrat passé après l’entrée en vigueur du présent
décret-loi, doit être constaté par écrit. Il peut être soit à durée déterminée soit à durée indéterminée ».
152
Art. 1, al. 1 du décret-loi n° 34/67.
-54-
153
Cass. com., 14 juin 2005, Docyan, n° 03-19150 : « La Cour d’appel qui a fait ressortit le
caractère indépendant du mandataire et celui permanent de son activité, a légalement justifié sa
décision ».
154
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 68.
155
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 52.
156
Art. L. 134-1 C. com.
157
Art. 1 al. 1 : « Le mandataire qui, à titre de profession habituelle et indépendante, sans être lié
par un contrat de louage de services, négocie et éventuellement conclut des achats, des ventes, des
locations ou des prestations de services, au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels ou de
commerçants ».
-55-
s’est inspiré de l’ancien texte français, où cette même expression était assez discutable
car l’idée de profession indique à elle seule déjà le caractère habituel de l’activité158.
85. D’une part, la condition de permanence ferait défaut s’il s’agit d’une
opération occasionnelle traitée entre l’agent et le mandant ; ainsi, le mandataire
occasionnel ne peut pas compter sur la protection apportée par le décret-loi N. 34/67
contre la rupture abusive du mandat par le représenté. D’autre part, la répétition
occasionnelle des opérations entre mandant et intermédiaire ne suffit point à conférer
à ce dernier la qualité de représentant commercial160.
86. Mais un problème se pose : quand peut-on admettre que des actes de
représentation constituent une profession habituelle ? Quel nombre d’opérations doit-
on considérer comme suffisant pour attribuer à leur auteur la qualification d’agent
commercial ? Il s’agit dans chaque cas particulier de l’appréciation d’un ensemble de
circonstances. En raison de l’analogie des dispositions de l’art. L. 121-1 C. com.:
« Sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur
profession habituelle », qui a son similaire en droit libanais suivant les dispositions de
l’art. 9 du Code de commerce161. Il ressort que la profession habituelle n’est pas
nécessairement la profession principale et peut n’avoir aucun rapport avec cette
158
J.-J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats- Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 22.
159
Cass. com., 16 janv. 1968, JCP, 1968, 15551, II et RTD com., 1968, 1119, J. HEMARD.
160
Cass. com., 16 oct. 1967, D. 1967, 751 ; Cass. com., 13 oct. 1959, Gaz. Pal., 1959, 2, 286 et
JCP, 1960, II, 11509, 1ere espèce, J. HEMARD.
161
Art. 9 C. com. Lib : Les commerçants sont les personnes dont la profession est d’effectuer des
opérations commerciales.
-56-
dernière162. L’agent libre sera donc soumis aux dispositions dudit article, s’il effectue
des actes de représentation à titre accessoire, à condition toutefois que ces opérations
soient répétées assez régulièrement. S’il en est autrement, l’intéressé ne sera pas agent
commercial mais simple mandataire.
88. Après avoir exposer ces deux modalités d’exercice de l’activité concernant
le professionnalisme et la permanence nécessaires pour l’acquisition de qualité de
représentant commercial, il reste une troisième modalité, la plus importante, celle de
l’indépendance, où à défaut de sa présence, le représentant sera soumis au droit du
travail en tant que salarié ou bien au statut de VRP.
162
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, Paris, 1967, p. 295.
163
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 52.
164
J. GUYENOT, VRP et agents commerciaux, Libr. du journal des notaires et des avocats Paris,
1975, n° 242 et s.
-57-
SECTION 3
165
L’application du droit social est subordonnée à la satisfaction de conditions traduisant la faible
autonomie du mandaitre : D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 157.
166
Idem.
167
Cass. Soc., 21 avr. 1988, Bull. V, p. 159.
-58-
donneurs d’ordres sont suffisants pour assurer son autonomie réelle168 : c’est la teneur
de l’exigence, ce sera notre premier paragraphe.
168
J. BOUDAUD, Les intermédiaires du commerce en droit français et mexicain, th., Montpellier,
2001, p. 187.
169
Cass. soc., 19 mai 1950, Bull. civ., 1950, III 289 ; Cass. soc., 20 mars 1956, Bull. civ., 1956, IV,
217 ; Cass. soc., 16 mars 1959, JCP 1959, 65206.
170
Faut-il définir un régime juridique pour ce que certains désignent comme la « parasubordination
» ? La question est posée, tant en France que dans le reste de l'Union européenne, de la reconnaissance
d'un régime de protection spécifique au profit de travailleurs qui ne sont ni des salariés ni à proprement
parler des travailleurs indépendants. La tâche est ardue, tant en raison des incertitudes des
qualifications que de la diversité des régimes appliqués aux différents professionnels concernés. La
construction d'un régime spécifique exige avant tout de déterminer un critère commun d'identification,
qui pourrait être trouvé dans la combinaison entre l'existence d'un rapport de pouvoir et la participation
du travailleur aux risques de l'activité : E. PESKINE, Entre subordination et indépendance : en quête
d'une troisième voie, Rev. trav. l, D, 2008, p. 371.
171
D. BIKOVA, Les spécificités en matière de représentation commerciale du droit bulgare par
rapport au droit français, th., Montpellier, 2009, n° 156.
172
Art. 3 al. 2 du décret-loi n° 34/67.
-59-
93. Pour déterminer s’il existe ou non un lien de subordination les juges se
fondent sur un ensemble d’éléments concordants. Par exemple, il a été jugé qu’il n’y
avait pas de lien de subordination pour un agent commercial dès lors qu’il prospectait
la clientèle à sa convenance, qu’il décidait librement de l’organisation et de la
fréquence de ses tournées sans être tenu de rendre compte, qu’il avait la possibilité
d’employer des préposés et le droit de représenter d’autres mandants, qu’il négociait
sous sa responsabilité propre et moyennant une rémunération à la commission des
opérations commerciales pour le compte du mandant174.
94. A l’opposé, il a été jugé que ne pouvait pas être qualifié d’agent
commercial une personne qui devait se présenter en tous lieux et en toutes
circonstances au nom du mandant et non sous son nom propre, obtenir l’approbation
du mandant sur les accords auxquels il parvenait avec un client, qui ne devait
collaborer exclusivement qu’avec le mandant qui mettait à sa disposition ses bureaux,
son secrétariat et sa publicité175. Cette liste de caractéristiques n’est pas exhaustive et
les juges peuvent tenir compte de tout élément factuel créant une dépendance
juridique et un contrôle de l’agent par le mandant. Il va de soi que des sanctions qui
seraient prises à l’encontre de l’agent pour non-respect d’obligations plaçant l’agent
sous la dépendance et le contrôle du mandant lèveraient tout doute sur la réalité du
lien de subordination. Toutefois, l’élément d’indépendance demeure un élément de
fait qui peut être prouvé par tous moyens.
173
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 467.
174
Cass. soc., 9 juin 1994, 91-18.618 ; A. De THEUX, Le statut européen du l’agent commercial,
Approche critique de droit comparé, Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 1992.
175
Cass. soc., 13 avr. 2005, 03-18.513.
176
E. TYAN, op. cit., p 466, n° 2.
-60-
intervalles très courts. Nous rappellerons que l’agent commercial français comme le
représentant commercial libanais, est un travailleur indépendant dont la profession est
caractérisée par l’absence d’un lien de subordination avec le commettant. En présence
d’un lien de subordination juridique, le contrat d’agent commercial est prévu devenir
un contrat de travail régi par le Code du travail. Nous citerons également qu’un lien
de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un
employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler
l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné177. D’où la
nécessité de traiter la sanction de l’exigence, ce sera notre deuxième paragraphe.
96. La législation française qui traite de l’agent commercial est précise : elle
propose son indépendance ou l’absence de subordination pesant sur lui. La loi du 25
juin 1991, codifie l’art. L. 134-1 C. com., n’hésite pas devant la redondance, elle
indique que l’agent exerce « à titre de profession indépendante, sans être lié par un
contrat de louage de services ». Cette répétition est reprise du décret du 23 décembre
1958, qui avait bien marqué la différence avec les représentants salariés. Ce qui
montre bien le maintien du droit français en ce qui concerne l’agence. L’agent
commercial est donc à son compte dans la vie économique. Il court les risques de son
activité pour en conserver le profit, libre de l’organisation de son entreprise comme de
ses activités.
177
CA Aix-en-Provence, Ch. 03 A, 26 nov. 2010, n° 09/22491 ; CA Rennes, Ch. sec. soc., 17 mars
2010, n° 08/06351 ; CA Versailles, Ch. 05, 30 avr. 2009, n° 08/00811 : « …Considérant qu'un lien de
subordination caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir
de donner des ordres, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements… » ; A. De
THEUX, Le statut européen du l’agent commercial, op. cit.
-61-
98. Il a toute liberté quant au choix de ses activités (B) : Il peut, en effet, agir
dans l'intérêt de plusieurs mandants, cependant dans la limite du respect de son
obligation de non concurrence. A la différence du VRP, l'agent commercial prend des
risques dans l'exercice de son activité et engage son patrimoine (ou celui de son
entreprise suivant la structure juridique qu'il choisit). Il a une personnalité
économique autonome exclusive du salariat. Comme tout entrepreneur, il peut
acquérir et transmettre les éléments d'actifs de son entreprise.
178
Contrat présenté par J.-M. LELOUP dans La distribution, cas n° 6 p.76. coll. « Cas pratiques du
droit des affaires », D., 1971, cité par J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 6e éd., Delmas, 2005.
179
G. LHUILLIER, Concurrence, RTD com., 1994 p. 645 ; CA Paris, 22 sept. 1993, 1ere Ch. Sect.
Concurrence, non publié (n° répertoire général : 93/141499), sur recours contre une décision 92-D-66
du Conseil de la concurrence en date du 8 déc. 1992.
-62-
100. En effet dans le cadre des missions qui lui sont confiées, l’agent dispose de
la plus large initiative personnelle pour accroître son audience et développer la
commercialisation des produits dont il a la charge. Il peut organiser tous les services
de nature à favoriser son action : prospection, marchandisage, informatisation des
statistiques commerciales, entreposage ; il est maître de son organisation des salariés
et des matériels qu’il met en œuvre180; il peut en particulier, devant des circonstances
imprévues et en l’absence d’instructions particulières, adapter son comportement en
fonction de la nouvelle situation181. Du reste, d’une façon générale, le titulaire d’un
pouvoir est investi de la capacité de trancher, par l’exercice de sa volonté, une
situation juridique et d’imposer à autrui la décision prise : « le titulaire du pouvoir est
bien le « décideur » que décrivent les économistes »182. Par exemple, la liberté est
laissée à un agent commercial quant à la fixation du prix, la détermination du délai de
livraison, ou quant aux autres modalités du contrat183, etc… De même, il peut adopter
les voies et les moyens qui lui paraissent les mieux adaptés à la mission confiée, par
exemple de recourir à l’internet184. Mais dès à présent, on constate deux aspects de la
liberté d’organisation qui sont les suivantes :
101. L’agent peut être une personne physique ou une personne morale, ce qui a
été indiqué expressément par la loi du 25 juin 1991 et l’art L. 134-1 al.1 C. com.:
« L’agent commercial… peut être une personne physique ou une personne morale »,
en organisant librement les moyens humains de son entreprise ; il y a là équivalence
avec le représentant commercial libanais qui peut être une personne morale ou une
180
J. THIEFFRY et C. GRANIER, Les contrats d’agence dans le droit de la distribution français et
communautaire: Gaz. Pal. 1992, 1, doctr., p. 258.
181
Ph. PETEL, Les obligations du mandataire, préf. M. CABRILLAC, Litec, 1988, n° 104.
182
E. GAILLARD, Le pouvoir en droit français, préf. G. CORNU, Economica, 1985, n° 216 ; V.
aussi sur le pouvoir, P. LOKIEC, Contrat et pouvoir : essai sur les transformations du droit privé des
rapports contractuels, préf. A. LYON-CAEN., LGDJ, 2004, n° 6 et s.
183
Cass. civ., 1ere Ch., 9 déc. 1997, Resp. civ. et assur. 1998, n° 99 ; Cass. civ., 1ere Ch., 6 juill.
2000, Bull. civ. I, n° 200, RJDA 2001, n° 23, mandat exprès d’aliéner et de consentir aux prix, charges
et conditions que le mandataire aviserait.
184
Art. L. 321-2, al. 2 C. com., le laisse entendre pour les ventes aux enchères publiques réalisées à
distance par un mandataire.
-63-
102. L’agent peut recruter librement son personnel, ce qui constitue une
prérogative évidente de tout chef d’entreprise. Les moyens humains résultant de la
liberté de choix de l’agent pour l’exécution de sa mission, sont bien évidemment
l’emploi de personnel salarié. Outre un personnel salarié, l’agent peut s’adjoindre des
collaborateurs, personnes physiques ou morales, ayant la qualité d’agent commercial,
comme l’alinéa premier de l’article premier de la loi du 25 juin 1991, le prévoit
expressément. Le mandant ne peut opposer un quelconque refus puisqu’il ne dispose
sur cette décision d’aucun droit d’ingérence. Le personnel est choisi selon les critères
de sélection définis par le mandant et, en considération de ses besoins, pour le
développement de son entreprise. Içi, se manifeste son autonomie face à son mandant
comme il est dit dans le deuxième alinéa du second article du décret N. 58-1345 du 23
décembre 1958 : « l’agent peut recruter ou employer sans autorisation, des sous-
185
Art. 1, al. 4 du décret-loi n° 34/67 : « Et si le représentant de commerce est une société, il faut :
a- Dans les sociétés de personnes et pour les sociétés à responsabilité limitée : que la majorité des
associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et que celui qui a le
droit de signer soit libanais.
b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la majorité du capital
appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du conseil d’administration ainsi que son
directeur général, ou que la personne déléguée par le président du conseil d’administration ou par le
directeur général pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».
186
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 1, n° 11 : En ce qui concerne les sociétés, autre que celles en participation, la
reconnaissance de la nationalité libanaise pour l’exercée de la profession d’agent commercial est
soumise à des conditions particulières à cette matière, exorbitantes du droit commun des sociétés, qui
sont détaillées aux alinéas 4 et du présent article dont les dispositions ne nécessitent pas de
commentaires ; TI Mont-Liban, décision nº 81 du 29 mai 1996, Rev. al Adl, 1998, p. 153.
187
Art. 1, al. 3 du décret-loi n° 34/67 : « A dater de l’entrée en vigueur du présent décret-loi, tout en
maintenant les droits acquis antérieurement et en tenant compte de la réciprocité que les représentants
commerciaux étrangers devront prouver, le représentant commercial doit être libanais et doit avoir un
établissement commercial au Liban ».
-64-
agents rémunérés par lui », tout en signalant, que cette caractéristique a été
mentionnée en droit libanais pour le représentant commercial et notamment dans le
troisième alinéa du troisième article du décret-loi N. 34/67.
188
Cass. civ. lib. 1ere Ch., arrêt préparatoire, n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21: « …le
commerçant qui achète des produits et les distribue en les vendant aux clients, en retirant un gain de la
différence de prix… » ; M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1,
1970, p. 147, n° 100. B, 2e condition : « Elles (les conditions du décret du 23 déc. 1958 et du décret du
22 août 1968) affirment le caractère indépendant de la profession de l’agent statuaire. Tout d’abord, il
peut effectuer des opérations commerciales pour son propre compte ; dans ce cas il est commerçant et
doit s’inscrire au registre commercial ».
189
CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et
l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p 89 et s.
-65-
du représentant ne nous parait pas faire obstacle à des stipulations qui réserveraient
un certain contrôle au représenté, telles que la stipulation imposant au représentant
l’obligation de rendre compte… de fournir des rapports… »190 .
190
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 467, n° 1306.
191
En droit français : l’agent peut accepter, sans autorisation préalable, la représentation d'autres
donneurs d'ordres (agent multicartes), y compris de concurrents de son mandant mais, dans cette
dernière circonstance, avec l'accord de ce dernier (art. L. 134-3 C. com.). Et, réciproquement, le
mandant peut pour le même territoire ou la même clientèle traiter avec d'autres agents ou intermédiaires
ou encore agir personnellement (vendre directement) : Cass. com., 25 mars 1974, n° 73-11.423, Bull.
civ., IV, n° 103 ; F.-X. LICARI, La notion d’agent commercial et l'indemnité de fin de contrat dans la
jurisprudence récente de la CEE, RLDC 2006, Chron. n° 2118 ; Ph. GRIGNON, Le fondement de
l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce, préf. D. FERRIER et J.-M.
MOUSSERON, Litec, 2000, n° 172 et s.
192
CA Rouen, Ch. des Urgences, 27 oct. 2009, n° 08/02653 : «…Attendu que ce contrat autorisait
Monsieur Daniel S. à recruter sans autorisation, des sous agents rémunérés par lui...» ; Cass. soc.,
Rejet 13 déc. 1973 n° 72-40.442, Bull. civ., Ch. Soc., n° 668, p. 615 : « …Dans l’exercice de la
profession d’agent commercial, ce dernier peut recruter des sous agents qui lui sont subordonnés… ».
193
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 304.
-66-
107. Les deux textes emploient des formulations quasiment similaires. Le texte
français désigne tacitement la condition d’obtention de l’accord pour l’acceptation de
nouvelle représentation concurrente à la principale, tandis que le texte libanais ne le
prévoit pas, à condition seulement que la deuxième représentation ne soit pas
concurrente ou en contradiction avec la précédente.
108. Nous voyons donc que le texte libanais propose un mode d’approche en
limitant la nouvelle représentation à l’objet de concurrence. C'est dire que l’objet de la
nouvelle représentation ne doit pas être concurrent ou en contradiction avec la
principale représentation, alors que le texte français a accepté cette solution à
condition que soit obtenue l’accord du mandant. En d’autres termes, l’agent
commercial peut accepter la représentation d’une entreprise concurrente s’il obtient
l’accord de son mandant, ce qui n’a pas été mentionné en droit libanais. Il s’est limité
à l’objet de concurrence comme condition d’acceptation de nouveaux mandats.
110. En revanche, il ne faut pas oublier que cette pluralité atteint une limite,
mieux énoncée dans le texte français que dans le texte libanais. Nous avons déjà
mentionné que l’art. L. 134-3 C. com., a bien autorisé l’agent à représenter plusieurs
mandants, avec une interdiction des représentations concurrentes sauf accord des
mandants concernés199. Cette limite du principe d’indépendance n’est pourtant que la
traduction d’une obligation de bonne foi200, inhérente au mandat commercial201.
194
Art. L. 134-1 C. com.
195
Art. L. 134-3 C. com.
196
Art. 1 du décret-loi Libanais n° 34/67.
197
J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 6e éd., Delmas, 2005, p. 45.
198
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 29.
199
Cass. com., 19 déc. 1995: Lettre distrib. 1996-3: sous réserve qu’ils ne soient pas concurrents.
200
Dans le concept de bonne foi, Encyclopédie Dalloz Droit Civil: Verbis Bonne Foi :
n°2 : La bonne foi est l’équivalent juridique de la bonne volonté morale.
n°3 : On s’accorde à reconnaître à cette notion deux fonctions principales, c’est d’une part la
loyauté exigée dans les actes juridiques…, c’est d’autre part la croyance erronée et excusable protégée
comme telle à l’équivalent d’un droit. (dénommée Guter Glaube).
n°27 : La bonne foi s’apprécie généralement au moment de l’acte irrégulier ou de l’origine de la
situation irrégulière dont on se prévaut.
-68-
111. Cette tactique a été suivie par M. ABOU EID dans son étude sur le décret-
loi N. 34/67, critiquant l’arrêt de la Cour d’appel de Beyrouth de 4 mai 1978 :
« Attendu qu’il est approuvé d’une part, que l’appelant représente toujours la
société « Tabaconi » et que la production de cette dernière est similaire de celle de la
société intimée « Fock et Fohl ». Et d’autre part, vu que l’appelant lors de la
conclusion du contrat de représentation n’a pas informé la société intimée qu’il
représente la société « Tabaconi », et que son excuse était que la société appelante ne
lui a rien demandé,
Attendu qu’il n’y a qu’un seul acheteur pour les produits, qu’il est donc normal
que si la société intimée avait eu connaissance que l’appelant représentait la société
« Tabaconi », elle ne lui aurait jamais octroyé la qualité de représentant, puisque la
gamme des produits de la société « Tabaconi » est plus vaste et diversifiée que sa
production ; que cette dernière n’est pas seulement une concurrente -puisqu’il n’y a
qu’un seul acheteur- mais qu’elle diminue beaucoup la circulation de ses produits, ce
qui est en contradiction avec l’intention des contractants lors de la conclusion du
contrat de représentation,
Attendu que le mandataire a le devoir d’informer son mandant sur toutes les
circonstances qui le conduise à modifier le mandat ou à se rétracter comme le
souligne l’article 787 Code des obligations et contrats libanais. L’appelant avait donc
le devoir d’informer la société lors de la conclusion du contrat, de sa représentation
à l’égard de la société « Tabaconi » et des problèmes de concurrence,
201
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 66.
-69-
Attendu que dans les circonstances présentes, il est demandé le rejet de l’action
de l’appelant, et expliciter que l’intimée a le droit de revendiquer la résiliation du
contrat de représentation »202.
112. Retournant aux faits exposés dans l’arrêt sujet de cette analyse, nous
constatons que l’appelant avait l’intention et la volonté de dissimuler sur la société
intimée « Fock et Fohl » sa situation comme représentant pour la société
« Tabaconi ». Et puisque ces informations sont considérées comme essentielles et
fondamentales par rapport à l’intimée -vu que la société tabaconi fabrique des
produits similaires-, il était conseillé à l’appelant d’informer cette dernière.
113. Ce qui nous conduit à dire que son refus d’énoncer ces informations n’est
pas une simple dissimulation, mais au contraire un acte de mauvaise foi, parce que la
société « Fock et Fohl » aurait aimé d’être alertée sur la nature et la qualité des
marchandises produites par la société « Tabaconi » que l’appelant représente ; elle
n’aurait jamais conclu contrat, du fait que cette représentation va lui causer des
dommages étant donné la faiblesse de la distribution de ses produits.
202
CA Beyrouth, 1ere Ch., n° 58/1969, arrêt n° 149 de 4 mai 1978, Albert Malek c/ Société Fock
et Fohl, Rev. al Adl, 1980, p. 124 à 127.
-70-
116. Si donc la dissimulation est du premier type, cas pardonnable, elle entre
dans le cadre du simple dol « Dolus bonus ». Mais si elle est du deuxième type -cas de
l’arrêt évoqué-, nécessitant déclaration vu l’importance du sujet masqué qui
influencera la volonté du contractant, elle sera alors considérée comme un dol
mauvais « Dolus malus ». Et le fait qu’elle soit pratiquée par le dissimulant, signifie
bien que ce dernier avait la volonté de ne rien révéler et l’intention de causer un
dommage à son cocontractant. Celui-ci devient donc responsable du dol206. En France,
la distinction entre ces deux types de dol n’a pas lieu d’être, vu que tout dol est
condamnable, étant donné que la répression du dol s’est même considérablement
203
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 1, 2004, art.
3, p. 18 et 19.
204
Art. 3 C. com. : « A défaut de toute disposition légale applicable, le juge pourra s’inspirer tant
des précédents jurisprudentiels que des exigences de l’équité et de la loyauté commerciale ».
205
R. JADAYEL, La dissimulation source de la responsabilité au niveau contractuelle et
délictuelle, Rev. al Adl, 1984, t. 4, p. 319 à 347.
206
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 3, p. 91.
-71-
alourdie avec l’atténuation de l’exigence de mauvaise foi illustrée par les nombreuses
espèces207.
118. Le législateur libanais n’a donc pas retenu que l’objet de la nouvelle
représentation était concurrente de la première et le représentant doit en référer à son
mandant ; le mot « se référer » exprimant prendre son accord, son avis, se réclamer…,
il y n’a pas alors adéquation entre les deux législations. En effet, l’article 3 du décret-
loi N. 34/67, devrait être plus précis, plus clair dans ses termes et devrait être modifié
comme en témoigne le texte français ; car cette restriction à la liberté de l’agent
consiste en une obligation de non-concurrence au bénéfice du mandant et du
représenté en signalant que ce dernier peut imposer au représentant commercial,
d’une façon claire et tacite, l’interdiction des actes de concurrence et
d’incompatibilité210.
207
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 436.
208
E. EID, Le fonds de commerce, t. 1, 1983, n° 79, p. 188.
209
P. BONNASSIES, Le dol dans la conclusion des contrats, th., Lille, 1955, p. 522: « …Le
contractant, qui exploite immoralement l’état… de ce contractant, commet un dol parce qu’il commet
un acte contraire à la bonne foi ».
210
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Documents Huvelin, éd. Université Saint
Joseph, t. 2, 1974, Art. 3, n° 3: « Le contrat d’agence précisera utilement l’interdiction faite à l’agent,
par le présent article, pour le cas d’incompatibilité ou de concurrence, il pourrait aller jusqu’à
interdire à l’agent, sauf agrément de la firme représentée, toute représentation d’une autre firme,
indépendamment du risque d’incompatibilité ou de concurrence ».
-72-
119. Revenons aux dispositions des deux textes libanais et français ; rien
n’indique que la profession de représentant ou d’agent doive être une profession
exercée à titre exclusif, comme c’est le cas pour le VRP. La représentation peut
parfaitement constituer, pour l’intermédiaire de commerce, une occupation secondaire
pourvu qu’elle soit matériellement habituelle, et, que, dans l’esprit du représentant,
elle constitue une profession entre autres ; cette solution a été affirmée en France, par
une réponse ministérielle à une question écrite211.
120. Ceci permet aux agents commerciaux d’exercer une autre activité que celle
qu’ils exercent au titre du contrat d’agence. S’il en est ainsi, le problème du cumul des
professions se pose tout en formant une manifestation normale de la liberté de
travailler et d’entreprendre212. Pour le résoudre, il faut faire la distinction entre le cas
où l’agent exerce une autre profession principale ou secondaire qui serait libre, et le
cas où le dit agent exerce une profession salariée en vertu d’un contrat de louage de
services :
121. Dans le premier cas, celui de cumul avec une ou plusieurs professions
libres, aucun problème ne se pose. Le cumul est parfaitement valable, à condition
qu’il n’y ait pas concurrence indue de la seconde activité avec l’objet de la
représentation, ce qui a été consacrée par la loi de 1991 dans son article 15, qui
permet que cette activité ne soit exercée qu’à titre accessoire213. En revanche, les
raisons de l’éventuelle exclusion du bénéfice de la qualité d’agent, quand l’activité
d’agent est l’accessoire d’un contrat écrit passé pour un autre objet, tiennent à la
volonté de ne pas perturber l’équilibre d’une opération de distribution, automobile214
en l’occurrence.
211
J.O. Deb. Parl. AN, n° 2153, 3 oct. 1959, p. 1689.
212
Sur la liberté d’entreprendre : Cons. Const. décision 81.132 du 16 1982, D., 1983, 169, note L.
HAMON ; J. MESTRE, Le conseil constitutionnel, la liberté d’entreprendre et la propriété, D. 1884,
chron.1 ; R. SAVY, La constitution des juges, D., 1983, Chron. 105: cité par J.-M. LELOUP, op cit., p.
46.
213
Art. L. 134-15 C. com.
214
AN Séance du 23 mai 1991, JOAN, p. 2233, 2238, 2239, note M. DOUBIN.
-73-
122. Il s’agit d’exclure du domaine de la loi ceux que l’on nomme « les agents
de marque automobile », qui sont des garagistes liées aux concessionnaires. En
contrepartie du panonceau de la marque et de l’appartenance au réseau de celle-ci, le
concessionnaire leur demande de vendre, en son nom et pour son compte, un quota
annuel de véhicules. C’est, dans ce cas particulier qui n’avait pratiquement jamais
provoqué de demande d’application du décret 1958 ou de la notion de mandat
d’intérêt commun, que le droit français s’est écarté de sa tradition qui ne recherchait
pas, pour qualifier un contrat d’agence commerciale, la part occupée par l’exécution
de ce mandat dans l’activité du professionnel215.
123. L’agence commerciale peut être exercée à titre accessoire d’une autre
activité, elle, principale. On jauge assez bien ici, l’indépendance de l’agent puisqu’il
lui est possible de n’exercer une autre activité qu’en appoint ou en complément. En
effet, l’exercice à titre accessoire de l’activité d’agent commercial donne un argument
de plus à cette analyse de l’indépendance de l’agent mais surtout, il dégage clairement
l’idée qu’un agent est libre face à son mandant et libre d’organiser son activité, son
entreprise, comme bon lui semble à condition de ne pas porter préjudice aux intérêts
du mandant.
124. Dans le second cas, celui de cumul avec une profession qui suppose un lien
de subordination : ces deux activités, que tout oppose en théorie quant à leur nature
juridique, peuvent être exercées de manière cumulative mais la doctrine s’accorde
pour considérer qu’il ne s’agit là que d’une tolérance216. Le cumul ne semble pas être
conforme à l’esprit de certains des textes régissant ces deux institutions. Mais à notre
avis, cette optique est erronée : lorsqu’une personne est liée par un lien de
subordination, elle l’est uniquement dans les limites du contrat de louage de services.
Et une fois le travail accompli et l’horaire expiré, le salarié préposé redevient libre, et
pourra effectuer tout travail en dehors de tout contrôle du commettant avec comme
215
Nous pouvons citer deux décisions de la chambre commerciale de la Cour de cassation relatives
à des litiges opposant des concessionnaires à des agents commerciaux: 18 fév. 2000, arrêt n° 194, sur
pourvoi 97-21.368 pour un contrat de 1986 rompu 1992, et 19 déc. 2000, arrêt n° 2133, sur pourvoi 98-
13.262 pour un contrat ayant existé du 15 sept. au 24 nov. 1988.
216
Notamment: J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 88 et J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, op. cit.
-74-
seule restriction le respect des exigences de bonne foi217 ; le préposé doit, en effet,
s’abstenir de toute activité qui pourrait, directement ou indirectement, nuire aux
intérêts du commettant.
125. Cela est d’autant plus vrai que l’activité de l’agent commercial est par
définition une activité indépendante. Et, à ce seul titre, l’agent qui serait lié à une
autre firme par subordination, pourra à sa guise s’organiser et organiser son travail de
représentation de sorte à ne pas nuire au commettant. Il convient en effet de
reconnaître que l’agent commercial a la possibilité d’exercer une activité salariée mais
que celle-ci ne peut porter sur une représentation comme dans le cas du VRP. Ce n’est
qu’avec ses mandants que l’agent ne peut pas être soumis à un contrat de travail. Au
regard du statut de VRP, l’activité d’agent commercial qui serait exercée avec celle de
VRP, ferait perdre à ce salarié le statut de VRP218. C’est ainsi qu’en application des
principes qui précédent, le cumul des professions de VRP et de représentant
commercial est en principe valable avec les réserves concernant les règles de non-
concurrence.
217
Art. 1134 C. civ.: « les conventions légalement formées … doivent être exécutées de bonne foi ».
218
Cass. soc., 8 nov. 1967, Bull. n° 701, p. 594 : un représentant qui ne recevait qu’à certaines
occasions des instructions précises du mandant, qui, au cours de ces dernières années d’activités, (…)
payait l’impôt de la patente et celui frappant les bénéfices des professions non commerciales et (…)
supportait, en outre, les cotisations de travailleur indépendant, n’est pas fondé prétendre avoir eu la
qualité de salarié en l’absence d’un lien de subordination à son employeur.
-75-
127. En conclusion, cette liberté de l’agent en fait un acteur très intéressant dans
les réseaux de distribution concentrant mandant, à la vente par exemple, services
périphériques à cette vente, multiplicité des relations avec les clients et les
producteurs. Il présente les avantages d’être le noyau d’un réseau de distribution, et
ceci aura pour effet de dynamiser ou d’améliorer les débouchés des produits ou les
services des mandants. Après avoir traité dans un premier paragraphe la spécificité de
l’indépendance juridique caractérisée par l’absence de lien de subordination, nous
devons dans un second paragraphe, vérifier les conséquences assorties du défaut
d’indépendance.
219
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 672 ; E. TYAN, Droit commercial,
Entremise commerciale, p. 467.
220
Ph. GRIGNON, Le fondement de l’indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce,
préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, n° 33 et s.
-76-
l’employeur des fruits du travail du salarié est, en effet, un des effets du contrat de
travail221.
129. Sur le plan juridique, le seul critère de distinction entre les statuts du
représentant commercial et du représentant de commerce, est l’existence ou non d’un
lien de subordination juridique : le représentant commercial exerce ses activités
librement, à l’inverse du représentant de commerce, qui est soumis à l’autorité du
représentant. Classiquement, le contrat de travail et le contrat de mandat (puisque la
représentation conventionnelle s’identifie au mandat en droit français) sont deux
contrats nommés qui se distinguent clairement. Le premier se caractérise par un lien
de subordination juridique, le second par une certaine indépendance du représentant.
221
Th. REVET, Rupture des contrats de dépendance et rupture du contrat de travail, Rev. Jur.de
l’Ile de France, t. 1, 1996.
222
P. ONDET, Le représentant de commerce, th., Poitiers, 1926, p. 29 : « Le représentant de
commerce est ou non mandataire selon qu’il a ou qu’il n’a pas le pouvoir de conclure une affaire au
nom de la maison dont il s’occupe ».
223
A. De THEUX, Le droit de la représentation commerciale, Etude comparative et critique du
statut des représentants salariés et des agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit
Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1, 1975, no 68 ; J. GRIMALDI d'ESDRA, La mission du
VRP, Rép. trav., 1996, chron. p. 1 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants, Placiers), Rép.
com., 2007, Ch.1, parag.1.
224
CA Paris, Ch. 22 A, 13 fév. 2008, n° 06/ 08646 : « La représentation implique la prospection
d’une clientèle à l'extérieur de l'entreprise ».
-77-
132. C’est la loi du 18 juillet 1937, qui a assimilé les représentants de commerce
à des salariés, dès qu’ils exercent leur activité dans des conditions déterminées229. Elle
a attribué aux représentants de commerce les termes génériques ou plus exactement,
la formule de voyageurs, représentants et placiers (VRP). Selon celle-ci, il y avait un
contrat de louage de service (contrat de travail) lorsque le VRP :
- Était lié à son employeur par des engagements déterminant la nature des
prestations de service ou la nature des marchandises offertes à la vente ou à l’achat, la
région dans laquelle il devait exercer son activité ou les catégories de clients qu’il
était chargé de visiter et le taux des rémunérations.
133. La loi du 18 juillet 1937 n’était pas d’ordre public et les parties pouvaient
donc l’écarter d’un commun accord en précisant dans le contrat que l’intéressé n’était
pas engagé en qualité de salarié, c'est dire de voyageur, représentant et placier, mais
225
H. FLICHY, Représentant de commerce, (Statut juridique, fiscal, et social du VRP), 14e éd.,
Delmas, 2003, n° 102.
226
La prospection est habituellement définie comme l'activité consistant à rechercher de manière
méthodique des clients potentiels. Pour le cas particulier du VRP, la prospection, en contrepartie de
laquelle le représentant ne peut se voir imposer de verser à l'employeur un prix représentant la valeur
de la clientèle qu'il sera chargé de visiter (Cass. soc. 3 oct. 2006, no 06-42.320), suppose une recherche
de clientèle selon certaines modalités.
227
CA Aix-en-Provence, Ch. 09 B, 8 nov. 2007, n° 06/03811 : « La représentation ne suppose pas
seulement la prospection de clientèle mais également la prise ainsi que la transmission de
commandes ».
228
CA Rennes, Ch. Des Prud’H, 08, 6 mai 2010, n° 08/00512 : « chaque contrat de travail a pour
objet la représentation, prospection de clientèle pour obtenir et transmettre des commandes, et fixe une
rémunération à la commission ».
229
M. DIJAN, Le représentant de commerce et La loi du 18 juill. 1937, th., Toulouse, 1941.
-78-
en qualité de mandataire. D’où une nouvelle loi du 7 mars 1957 intervenue pour
supprimer la possibilité d’écarter l’application du statut du VRP lorsque ses
conditions d’application sont remplies. Cette dernière loi a donné au statut de
représentant de commerce un caractère d’ordre public en précisant que les contrats
des représentants de commerce étaient, nonobstant toute stipulation contraire expresse
ou en leur silence, des contrats de travail, en ajoutant que l’absence de clause
interdisant soit l’exercice d’une autre profession, soit l’accomplissement d’opérations
commerciales personnelles ne peut faire obstacle à l’application des dispositions du
statut230.
230
H. FLICHY., Représentant de commerce, op. cit., n° 105.
231
L’équipe rédactionnelle de la Rev. Fiduciaire, Les VRP, éd. La villeguérin, 1998.
232
S. MAILLARD, Absence de lien de subordination et statut de VRP, D., 2009.
233
Cass. soc., 12 mars 1942, JCP 1942. II. 1952, note PAILLOT ; 3 déc. 1969, D., 1970. 184, 2e
espèce, note J.-J. DUPEYROUX ; 18 févr. 1976, Bull. civ.,V, n° 487 ; 4 janv. 1979, Bull. civ., V, n° 9
234
Cass. soc., 13 Janv. 2009, n° de pourvoi: 08-40157, Bull. V, 2009, n° 10.
235
Cass. soc., Rejet, 2 juin 2010, n° 08-43.525 ; CA Poitiers, Ch. soc., 22 sept. 2010, n° 07/02279.
-79-
par celui qui désire s’en prévaloir. Pratiquement, l’intéressé ne sera considéré comme
agent commercial que s’il est titulaire d’un contrat écrit et s’il a accompli les
formalités auxquelles sont astreints les agents commerciaux236.
138. En effet, le VRP est un employé qui touche un salaire déterminé suivant
son contrat de travail240. Il est soumis à son employeur en vertu d’un lien de
236
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, Paris, 1967, p. 299.
237
Cass. soc., Rejet 22 oct. 2008 n° 07-42.571 : « La représentation implique la prospection d’une
clientèle à l'extérieur de l'entreprise ».
238
Cass. soc., 5 janv. 1959, JCP, 1959, II, 11195 note BIZIERE ; Cass. com., 27 janv. 1959, Bull.,
III, 45.
239
J.- J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 18, p. 5.
240
CA Paris, PÔLE 06, Ch. 0412, oct. 2010, n° 09/00731 ; CA Paris, PÔLE 06 Ch. 08, 20 mai
2010, n° 08/09948 ; CA Poitiers, Ch. soc., 30 mars 2010, n° 08/04237 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 09
A, 21 janv. 2010, n° 08/01842 ; CA Grenoble, Ch. soc., 1 juill. 2009, n° 08/04022 : Cass. civ., Rejet,
-80-
139. Cette question au Liban ne se pose pas. Il y existe certes une catégorie244 de
VRP dont les membres ne jouissent pas d’un statut particulier. Ils sont purement et
simplement régis par les dispositions générales de la législation du travail, au même
titre que les salariés ordinaires employés dans n’importe quel domaine, et sans le
moindre traitement spécifique. Cependant, ces derniers, au Liban, jouissent
28 mai 2009, n° 08-16.143 ; CA Riom, 23 juin 2009, n° 08/02315 ; CA Bordeaux, Ch. soc., Sect. A,
avr. 2009, n° 07/04671.
241
Cass. soc., 5 janv. 1990, Bull. com., V, n° 7.
242
Cass. soc., 26 oct. 1982, Bull. com.,V, n° 154.
243
Sur la distinction entre le lien de subordination du salarié et la liberté du mandataire en droit
américain, v. W. SEAVY, The law of Agency, West Pub. Co., 1964, p. 8, n° 6 : cité par M.
MAHMASSANI op. cit.
244
En ce sens les articles suivants de la Loi du 23 sept. 1946 portant Code du travail Libanais, dans
sa teneur modifiée au 31 déc. 1993 et au 24 juill. 1996 :
Art. 3. Les salariés se répartissent en employés et en ouvriers: L'employé est tout salarié qui
accomplit un travail de bureau ou un travail non manuel ; L'ouvrier est tout salarié qui n'est pas de la
catégorie des employés. Quant aux stagiaires, provisoires ou journaliers, ils sont assimilés aux
employés s'ils accomplissent un travail confié normalement à des employés et ils sont assimilés aux
ouvriers s'ils accomplissent des travaux autres. Le stagiaire est tout salarié encore en formation et qui
n'a pas acquis dans sa profession la technique du salarié qualifié.
Art. 4. La corporation est un ensemble de salariés ou d'employeurs ou de maîtres-artisans qui font
partie d'une des catégories prévues à l'article suivant et groupés en associations selon les conditions
fixées au titre IV de la présente loi.
Art. 5. Les corporations se répartissent en quatre grandes catégories:
1) les corporations industrielles,
2) les corporations commerciales,
3) les corporations agricoles,
4) les corporations des professions libérales.
-81-
245
En ce sens l’article 57 de la Loi du 23 sept. 1946 portant code du travail Libanais, dans sa teneur
modifiée au 31 déc. 1993 et au 24 juill. 1996 : « Par salaire, on entend la rémunération de base
calculée au temps et encaissée par le salarié ainsi que les majorations et commissions ajoutées au
salaire de base » ; et l’article 68 du code de la sécurité sociale libanaise, mis en exécution et promulgué
par Décret n° 13955 du 26 sept. 1963 et modifié jusqu'au 31/12/1998 : « Le gain, servant de base au
calcul des cotisations, comprend le revenu total produit par l'emploi, y compris tous les éléments et
compléments et, notamment, la rétribution habituelle des heures de travail supplémentaires, les
rétributions habituelles versées par des tiers (pourboires), ainsi que les avantages en nature ».
246
Cass. com., 26 juin 1961, Bull. civ., 1961. III, 246 : La distinction du mandate et du louage de
services ; Cass. soc., 1 juin 1961, Bull. civ., 1961, IV, 473 ; Cass. soc., 28 avr. 1960, Bull. civ., 1960,
IV, 322 : La distinction VRP et agent commercial.
-82-
143. En second lieu, le VRP n’est pas un commerçant et ne peut se voir opposer
les règles du droit du commerce à l’occasion de l’exercice de ses activités ; il l’est
l’égal en ce sens du représentant en droit français, tandis que, le représentant
247
Comme élément de preuve de la condition de salarié, les clauses d’essai et de préavis retenues en
France par le conseil des Prud’hommes dans une décision infirmée par la Cour d’appel de Paris sur
contredit du requérant, par un arrêt du 3 fév. 1969, RTD civ., 1969, p. 1073, n° 13.
248
Cass. com., 22 mai 1967, Bull. civ., 1967, III, 189, mais cela n’empêche pas le représentant
commercial d’agir en exclusivité.
249
CA Nancy, 4 juin 1959, D, 1959, 373 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs, Représentants,
Placiers), Rép. com., 2007, op.cit. ; Cass. soc., 6 oct. 2010, n° 09-68.325.
250
Cass. soc., 23 mars 1953, D., 1953. 370 ; Cass. soc., 17 juin 1970, D., 1971. 165, note S.
DURETESTE.
251
Cass. soc., 17 mars 1970, D., 1970, somm. 152 ; Ph. GRIGNON, VRP (Voyageurs,
Représentants, Placiers), Rép. Com., 2010, Ch. 3, parag. 3.
-83-
144. En troisième lieu, le VRP agit toujours pour le compte de son employeur.
Sa mission se limite à recueillir uniquement les demandes, car il ne représente pas
l’employeur au sens juridique du terme bien qu’il soit appelé représentant du
commerce. En revanche, l’agent commercial si on l’appelle représentant commercial,
c’est qu’il représente juridiquement la firme productrice ; il peut traiter aussi bien
pour le compte et au nom de la firme représentée que pour son propre compte et en
son propre nom. Il peut tout aussi bien conclure les contrats avec la clientèle qu’il
aurait pu prospecter personnellement ou par l’intermédiaire de VRP travaillant à son
service.
252
Cass. com., 26 fév. 2008, n° de pourvoi : 06-20772 : « l'agent commercial, simple mandataire
qui n’a pas de clientèle propre, ne peut être titulaire d'un fonds de commerce, et n'a pas la qualité de
commerçant » ; CA Besançon, 22 oct. 2008, 08/ 1385, CA Paris, 25 juin 2008, 08/3132.
253
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 33.
-84-
147. En sixième lieu, le représentant commercial peut employer des VRP à son
service, car étant le mandataire de la firme représentée, il peut aussi agir pour son
compte et en son nom254. Mais cela ne veut pas dire que les VRP ainsi recrutés sont
embauchés directement par la firme représentée par l’agent, à moins que le contrat de
ce dernier avec celle-ci ne lui confère ce droit. En réalité, dans la majorité des cas,
l’agent en tant que gérant d’une entreprise indépendante, embauche les VRP ces
derniers devant être responsables devant lui uniquement. Par contre, les VRP,
n’agissant pas pour leur propre compte, et n’étant point indépendants dans
l’organisation de leurs activités, ne peuvent se faire assister par des VRP. Il résulte de
ce qui précède que lorsque le VRP, est en même temps représentant commercial de
firmes non concurrentielles de son employeur, il peut se faire assister par des VRP, et
même par des sous-agents255. Mais il ne pourra agir qu’en sa qualité d’agent, et en
254
CA Paris, 3 fév. 1969, cité par E. TYAN, op. cit.
255
Art. 3 du décret-loi libanais n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans
l’exercice des activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale
habituelle, et peut plus particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
-85-
148. En septième lieu, les instructions données au VRP par l’employeur sont
des ordres256 et il est tenu de les exécuter. Il doit augmenter la clientèle de son
employeur, mais il s’oblige aussi à garder le contact avec la clientèle antérieurement
formée par celui-ci. Il est tenu aux horaires de travail de son employeur et aux rendez-
vous pris par celui-ci auprès de ses clients. Le représentant commercial, par contre,
est libre dans la prospection de la clientèle ; les instructions à lui données ne sont
jamais des ordres257. D’un temps à l’autre, il rend simplement compte de sa gestion ;
il s’agit là de la caractéristique du statut de mandataire qui est principalement celui du
représentant. Cependant, il faut se garder de confondre intermédiaire du commerce
libre ou mandataire avec le représentant commercial, car si ce dernier est
obligatoirement libre, l’inverse n’est pas vrai.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs salaires
ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et dans
ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
256
J. HEMARD, RTD civ., 1966, p. 986, n° 11: la critique de la décision de la CA Colmar qui a
considéré le fait de recevoir des directives comme caractéristique du lien de subordination.
257
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 18 ; Cass. soc., 12 mars 1953, Bull.
civ., 1953, IV. 152 ; Cass. soc., 15 oct. 1953, Bull. civ., 1953, IV, 455.
-86-
DEUXIÈME CHAPITRE
LA TENEUR DE L’ACTIVITÉ
SECTION 1
153. Elle a un champ d’application plus étroit car l’agent commercial ne peut
conclure que certaines actes258 : c'est dire qu’il ne peut effectuer en droit français que
des opérations de vente ou d’achat de biens mobiliers ou de services ou des opérations
de location sur ces mêmes biens259. De même, le représentant commercial libanais ne
peut que conclure des achats, des ventes, des locations ou des prestations des
services260.
258
En d’autres termes, nous citons par exemple quelques actes exclus et qui n'entraient pas dans le
champ d’application du statut des agents commerciaux : « Les ventes de gazomètres réalisées avec son
intervention » : CA Lyon, Ch. civ., 01 A, 9 sept. 2010, n° 08/02259 ; « Les opérations sur les
immeubles » : B. BOULOC, Mandat, Mandataire, Cessation du contrat, com., 7 juill. 2004, D., 2004,
2230, obs. B. SAINTOURENS, RTD com., 2005 p. 162 ; « Les opérations de banque » : B. BOULOC,
Agent commercial, Statut légal, Intermédiaire en opérations de banque (non), RTD com., 2004, p. 587.
259
Art. L. 134-1 al.1 C. com.
260
Art. 1. al.1 décret-loi n° 34/67.
261
A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément d'appartenance du fonds, D., 2012,
Ch. 13, n° 182.
262
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 188 et s.
-88-
commerce par laquelle un mandataire est chargé de gérer un fonds, au nom et pour le
compte d'un mandant : ce sera notre deuxième paragraphe.
155. En revenant aux dispositions des deux textes libanais (art. 272 C. com. et s.)
et français (art. 1984 C. civ.), il s’avère que le mandataire libanais conclut des actes
ou des affaires sous condition de l’acceptation du mandataire, tandis que le
mandataire français « fait quelque chose ». Donc, en première déduction, apparaissent
la simplicité et la clarté du texte libanais face au texte français, où la notion de « faire
quelque chose » au nom de quelqu’un rappelle souvent celle d’un acte juridique263.
156. En outre, on entend par acte juridique, le mécanisme par lequel toute
manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit264. La plupart du
temps, la tâche confiée au mandataire n'est que ponctuelle ; elle consiste en
l'accomplissement d'un ou plusieurs actes juridiques isolés. En voici quelques
illustrations : crédit-bail265, pool bancaire266, société en formation267, caution268 dans
263
Il en découle selon AUBRY et RAU, que le mandat ne consiste pas faire des actes quelconques,
notamment des actes matériels, mais seulement des actes juridiques, pour le compte d’autrui : C.
AUBRY et C. RAU, Cours de droit civil français, par E. BARTIN, t. 6, 5e éd., LGDJ, Paris, 1920, p.
153 : cité par S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E.
JAYME, Litec, 2003 ; J. GHESTIN , M. BILLIAU , Traité de droit civil, Les obligations, les effets du
contrat, Paris, 1992, n° 793 : « En dépit du lien qui unit la représentation au mandat, la Cour de
cassation n’hésite cependant pas à admettre la qualification de mandat pour l’accomplissement de
simples actes matériels » ; Cass. civ., 19 fév. 1968, D., 1968, 393 : Doit être cassé l’arrêt qui pour
qualifier de contrat d’entreprise une convention intervenue entre les parties se fonde sur le fait que si
l’un avait donné à l’autre, « pouvoir… de confier la construction d’une maison à l’entrepreneur de son
choix, en précisant le type, le plan et le prix ». La Cour de cassation casse cet arrêt au motif qu’il s’agit
d’un pouvoir d’accomplir pour leur compte (les mandants) un acte juridique en l’espèce, plus que d’un
simple mandat grave et gratuit.
264
J. CARBONNIER, Droit civil, Les biens et les obligations, vol. 2, PUF, Quadrige, 2004, p. 1939
; Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.
cit., n° 181.
265
Mandat donné à un crédit-preneur d'acheter et de réceptionner au nom et pour le compte de
l'établissement de crédit-bail, dont la fonction est purement financière, le bien qui sera l'objet de la
location : CA Versailles, 6 mai 1997, D. aff. 1997, p. 1117.
266
Pouvoir spécial donné par écrit au chef de file d'un pool bancaire de déclarer les créances des
autres banques à la procédure collective du débiteur : Il s'agit d'une exigence maintes fois rappelée par
la Cour de cassation ; V. ainsi Cass. com., 16 oct. 2001, D., 2001, act. jurispr. p. 3275, obs. A.
-89-
la perspective d'une cession d'actions, mandat donné à une banque d'affaires 269 ou à
un dirigeant social270 de trouver un acquéreur.
157. Revenant aux dispositions des textes libanais (décret-loi N. 34) et français
(L. 134-1 C. com.), quant aux actes eux-mêmes que le représentant ou l'agent a
mission de négocier et éventuellement de conclure, ces articles en fournissent une
énumération très large. Les deux textes prévoient que l'activité s'étend à des achats,
des ventes, des locations ou des prestations de services.
158. Ce n'est pas uniquement pour le compte de vendeurs qu'agissent les agents
commerciaux. La qualité d'agent commercial est donc acquise à ceux qui recherchent
au nom et pour le compte d'autrui des fournisseurs de biens. Elle est également offerte
à ceux qui, agissant pour des fournisseurs ou des loueurs de services, recherchent des
prestataires ou des locataires. Sera agent commercial celui qui cherchera une clientèle
pour le compte d'une entreprise de location de matériel ; sera également agent
commercial celui qui recherchera des fournisseurs ou des loueurs de services pour le
compte de ses mandants, tel l'agent de publicité qui, pour le compte des
« annonceurs », recherche des « supports »271. La qualité d'agent commercial n'est
donc en rien limitée ni par l'objet des opérations négociées ou conclues ni par la
LIENHARD ; Ass. plén., 26 janv. 2001, JCP, E, 2001, n° 14, p. 617, note M. BEHAR-TOUCHAIS ;
RTD com., 2001, p. 508, obs. A. MARTIN-SERF ; RD bancaire et financier 2001, n° 66, note F.-X.
LUCAS ; Cass. com., 30 mars 1999 : Bull. Joly 1999, p. 764, note J.-J. DAIGRE ; Cass. com., 17 déc.
1996 : JCP E 1997, II, 941, note M. BEHAR-TOUCHAIS.
267
Mandat donné par des associés, dans les statuts ou par acte séparé, à l'un ou plusieurs d'entre eux
ou au gérant non associé qui a été désigné, de prendre des engagements pour le compte de la société en
formation. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que les modalités en soient précisées par le mandat,
l'immatriculation de la société au registre du commerce emportera reprise de ces engagements par
ladite société : D., n° 67-236, 23 mars 1967, art. 26. - C. com., art. L. 210-6.
268
Procuration donnée à un notaire de se porter caution des dettes d'une société : Cass. civ., 1ere
Ch., 7 nov. 2000, Bull. civ., I, n° 277 ; D. 2001, somm. p. 690, obs. L. AYNES ; Defrénois 2001, p.
256, note J.-L. AUBERT, précisant que l'annexion d'une telle procuration à l'acte authentique ne suffit
pas à la purger de ses vices au regard de l'article 1326 du code civil. - V. dans le même sens Cass. civ.,
1ere Ch., 19 juin 2001, D. 2001, à propos d'un mandat donné par télécopie.
269
CA Versailles, 23 févr. 2001, RJDA 2001, n° 1072.
270
Cass. com., 27 févr. 1996, Bull. civ., IV, n° 65 ; D., 1996, jurispr. p. 518, note Ph. MALAURIE ;
JCP, G, 1996, II, 22655, note J. GHESTIN ; JCP, E, 1996, II, 838, note D. SCHMIDT et N. DION.
271
Cass. com., 29 oct. 2002, Bull. civ., IV, n° 156, ce double mandat n'est pas interdit par l'article
20, L. "Sapin" n° 93-122, 29 janv. 1993, J.-Cl. Fasc. 4020.
-90-
159. Il est vrai que les circonstances de l'affaire pouvaient susciter interrogation :
Un contrat, signé entre une société produisant du vin de champagne et une société
ayant pour mission de commercialiser les champagnes produits, prévoyait que
certains clients seraient directement facturés par la société productrice et que la
société chargée de la commercialisation serait rémunérée par une commission
négociée au préalable avec la société productrice. Les juges du fond ont refusé de
retenir la qualification d'agent commercial pour la société chargée de la
commercialisation alors même que l'agent commercial est un professionnel
indépendant chargé de négocier des contrats pour le compte d'un tiers moyennant le
versement d'une commission (art. L. 134-1 C. com.)
160. Il est en effet relevé que les clients, acquéreurs des bouteilles de
champagne, formaient en réalité la clientèle personnelle de celui qui jouait le rôle
d'intermédiaire. Plusieurs éléments factuels sont à ce titre retenus : les acheteurs ont
toujours considéré dans leurs correspondances que le professionnel était un
distributeur, ce dernier se comportait comme un distributeur soucieux de préserver les
relations commerciales établies avec les clients ; il se considérait lui-même engagé par
les volumes commandés au point d'avoir recours à un autre fournisseur pour satisfaire
les commandes. Au connu de ces divers éléments, la Cour de cassation considère que
la Cour d'appel a pu valablement en déduire qu'il ne se comportait pas comme un
simple mandataire chargé de négocier et de conclure des contrats pour le compte d'un
272
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, Qualité d'agent, J.-Cl., Contrats-Distribution, Fasc.
3490, Cote : 11, 2004.
273
Cass. com., 10 juill. 2007, pourvoi n° 05-19.373, arrêt n° 945 F-P+B, D. 2007. AJ. 2158, obs. X.
DELPECH.
274
V. déjà en ce sens, Cass. com., 10 déc. 2003, D. 2004. AJ. 210, obs. E. CHEVRIER ; D. 2005.
Pan° 150, obs. D. FERRIER.
-91-
tiers. Une des observations suscitées par cette décision est relative à la prépondérance
confirmée du rôle du caractère personnel de la clientèle pour trancher la question de la
qualification de l'agent commercial275 .
275
V. F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, E. BLARY-CLEMENT, Droit commercial, 10e éd.,
Montchrestien, 2010, n° 263.
276
Dans le même sens : Cass. com., 26 févr. 2008, D., 2008. Jurispr. 2907, n° 06-20.772 note D.
FERRIER ; JCP, E, 2008, n° 22, p. 19, obs. N. DISSAUX ; JCP 2008. II. 10094, note D. MAINGUY ;
Contrats, conc. consom. 2008, n° 95, obs. MATHEY ; LPA 9 juill. 2008, note O. TIQUANT ; RJDA
2008, n° 901 ; E. CHEVRIER, Concurrence-Distribution, D., 2010 : La Cour régulatrice qui avait
rappelé que l'agent commercial, simple mandataire qui n'a pas de clientèle propre, ne peut être titulaire
d'un fonds de commerce et n'a pas la qualité de commerçant.
277
Cass. soc., 27 fév. 1973 : cité par M. MAHMASSANI, op. cit.
278
Cass. soc., 9 juin 1994, 91-18.618.
279
Cass. soc., 19 déc. 2000, 98-40.572, Bull. soc., 2000 V, n° 437, p. 337.
-92-
163. Le statut des agents commerciaux est d'ordre public. Or, si la loi n° 91-593
du 25 juin 1991 a expressément prévu, et encore dans un cas limité, la possibilité de
renoncer au statut d'agent commercial280, nulle disposition ne permet d'adhérer
volontairement au statut dès lors que l'activité du mandataire ne correspond pas à la
définition donnée de l'agent commercial par l'art. L. 134-1 C. com. Ainsi, la qualité
d'agent découle de la constatation d'un certain nombre de conditions de fond
permettant l'accès à la profession, la réglementation leur réservant alors le titre d' «
agent commercial » et l'application du statut protecteur légal281.
165. En effet, les parties n’ont aucun rôle dans la qualification et, si elles le font,
cette qualification ne sera jamais obligatoire aux juges qui, doivent rechercher eu
280
Art. L. 134-15 C. com. : « Lorsque l'activité d'agent commercial est exercée en exécution d'un
contrat écrit passé entre les parties à titre principal pour un autre objet, celles-ci peuvent décider par
écrit que les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la partie correspondant à
l'activité d'agence commerciale.
Cette renonciation est nulle si l'exécution du contrat fait apparaître que l'activité d'agence
commerciale est exercée, en réalité, à titre principal ou déterminant ».
281
E. CHEVRIER, Pas de rattachement volontaire au statut des agents commerciaux, D., 2004, p.
211.
282
Cass. com., 10 déc. 2003, D. 2004. AJ 211, obs. E. CHEVRIER, et 2005. Pan° 148, spéc. 150,
obs. D. FERRIER ; RTD civ., 2004. 285, obs. J. MESTRE et B. FAGES.
283
CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et
l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p. 89 et 90.
-93-
égard aux stipulations contractuelles mais aussi en fonction des modalités d'exécution
du contrat, quel est le véritable statut de la personne se présentant comme agent
commercial284 et doivent donner la vraie qualification au contrat en vertu des
dispositions de l’art. 370 du Code de procédure civil libanais, qui déclare clairement :
« C’est au juge de donner la vrai qualification juridique pour les faits et les actes en
questions, sans être restreint par celle menée par les parties »285.
167. Ainsi il a été jugé que la seule volonté des parties ne peut suffire à
soustraire un salarié au statut social (agent commercial, VRP ou autre) et les juges
doivent examiner les conditions de fait dans lesquelles s'exerce l'activité et qualifier la
relation contractuelle en fonction de celles-ci287 ; a l’opposé, l'acceptation d'un contrat
d'agent commercial ne peut interdire de demander la requalification du contrat initial
284
E. CHEVRIER, Pas de rattachement volontaire au statut des agents commerciaux, op. cit.
285
Code de Procédure civile entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 5, éd. 2005,
explication de l’art. 370 Code de procédure civile libanais.
286
Art. 2, al. 2 du décret-loi n° 34/67 de 5 août 1967.
287
CA Besançon, 26 sept. 2003 : Juris-Data n° 2003-234522 ; Dans le même sens : Cass. com., 10
déc. 2003, pourvoi n° 01-11.923, Juris-Data n° 2003-021538.
-94-
en contrat de travail288, avec une liberté contractuelle des parties de renoncer au statut
d'agent commercial289.
169. Certains auteurs290 ont considéré que l'inclusion des achats dans la liste des
opérations confiées à l'agent commercial constituait une extension anormale du
contrat d'agence qui empiéterait ainsi sur le contrat de courtage. Cette objection ne
nous semble pas décisive : l'agent n'est pas un courtier lié par un contrat durable, dont
le rôle, comme pour ce qui est de celui-ci, est de mettre en présence deux contractants
potentiels. La jurisprudence sur ce point est bien établie : « En l’absence notamment
de production de toutes prises d’ordres ou de commandes ou de conclusions de
contrats au nom et pour le compte du mandant, le contrat doit être bien qualifié de
courtage et ne réunit pas les conditions d’application du statut d’agent
commercial »291.
288
Cass. soc., 18 juill. 2001, pourvoi n° 97-42.784, Juris-Data n° 2001-011014.
289
Cass. com., 3 mars 2004, pourvoi n° 02-12.905, Juris-Data n° 2004-022751.
290
J. CATONI, La rupture du contrat d'agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, p. 65, n° 74. - J. GUYENOT, VRP et agents commerciaux, Libr. du
journal des notaires et des avocats 1975, p. 178, n° 321 ; Les agents commerciaux, LPA, 5 juill. 1974,
n° 13 ; J.-Ch. SEMA, Agents commerciaux, t. 1, Rép. com., n° 68.
291
Cass. com., 3 oct. 2000, n° pourvoi 97- 19999 ; Cass. com., 6 mars 2001, JCP, éd. E. 2001, n°
1818.
292
Cass. com., 7 juill. 2004, pourvoi n° 02-18.135 [FS-P+B], Juris-Data n° 2004-024593, Bull.
2004, IV, n° 147, p. 162 : « Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève que le contrat litigieux
exige de l'agent l'absence de condamnation interdisant la profession d'agent immobilier, lui donne
mandat de réaliser l'achat, la vente, l'échange d'immeubles ou l'achat, la vente du fonds de commerce,
de sorte que l'agent commercial prêtait de manière habituelle son concours à la conclusion de contrats
préliminaires à la vente, l'achat d'immeubles, du fonds de commerce ou de biens immobiliers et pouvait
-95-
171. Dans le même sens, « un agent qui, en vertu d'une convention passée avec
une société de louage de véhicules, a pour mission de développer l'activité
commerciale de la société auprès des hôtels, est rattaché à la direction régionale de
ladite société, doit établir chaque mois un rapport d'activité et un rapport de visites ;
alors qu'il bénéficie de la mise à disposition d'un bureau, d'un téléphone ainsi que
d'un véhicule de fonction, il ne dispose pas, fût-il régulièrement inscrit au registre des
agents commerciaux, de l'indépendance que requiert le statut. Lorsqu'en outre, il est
établi que la mission de cet agent, faute de n'avoir aucun pouvoir de conclure ou de
négocier des contrats et des commissions au nom et pour le compte de la société, ne
lui octroi qu’un rôle d'intermédiaire entre la société et les concierges des hôtels,
l'intéressé qui ne remplit aucune des conditions posées par l'article L. 134-1 précité
n'est pas fondé à revendiquer la qualité d'agent commercial »295.
même assister à l'authentification de ces opérations devant notaires tandis que sa rémunération était
fixée comme en matière d'opérations de marchands de biens ».
293
B. FAGES, Mandat commercial, J.-Cl. Contrats-Distribution, Fasc. 810, Cote : 05, 2004.
294
Cass. civ., 1ere Ch., 17 févr. 2011, D., 2011, Actu. 676, obs. Y. ROUQUET.
295
CA Versailles, 12e Ch., arrêt n° 157 du 29 mars 2001 : Gaz. Pal. 2002, somm. p. 142 : Aff.
Europcar : Le prétendu agent remettait des plaquettes d’informations sur les locations des véhicules à
des concierges d’hôtel afin de les inciter à faire louer par les clients ces véhicules ; l’agent ne
transmettait aucune commande, seuls les concierges le faisaient auprès du loueur. Vu qu’il a agi en
exécutant une mission d’intermédiaire sans négociation d’aucune condition des contrats, la Cour
d’appel l’a qualifié de courtier.
-96-
173. Sans ce choix exprès de la loi, la mission de l’agent commercial devrait être
qualifiée distributivement de mandat pour la passation d’actes juridiques par le
mandataire et de contrat d’entreprise dans l’hypothèse d’actes matériels299. La
réalisation d’actes matériels sur ordre d’une autre personne que l’exécutant est en
effet qualifiée de louage d’ouvrage ou de contrat d’entreprise300. Ce critère de
distinction demeure opérationnel. C'est lui, par exemple, qui permet de juger que n'a
pas la qualité de mandataire le commerçant qui exploite un emplacement dans un
grand magasin, avant le passage aux caisses, et se contente d'accomplir des actes
matériels de présentation de produits à l'exclusion d'actes juridiques de vente pour le
compte du magasin301.
296
G. EDELINE, La représentation commerciale, éd. Ejus, 1967, p. 300.
297
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 592.
298
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468, n° 1306.
299
J. HUET, Les principaux contrats spéciaux, 3e éd., LGDJ, 2012, n° 31124.
300
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit. n° 184 ; Cass. civ., 1, 19 fév. 1968, D. 1968.
301
Cass. com., 8 janv. 2002, Bull. civ., IV, n° 1 ; Contrats, conc., consom. 2002, comm. 87, note L.
LEVENEUR ; RTD civ., 2002, p. 323, obs. P.-Y. GAUTIER.
-97-
174. Nul doute que cette mission générale, hors la conclusion d’un contrat, -acte
juridique- réputé être un mandat, ne correspond pas à la nature classique de ce dernier.
Cette vision hétérodoxe du mandat n’a pu être reconnue que lorsque la loi au sens
large, c’est dire en l’occurrence le décret de 1958, en a décidé ainsi. Pourtant, la
jurisprudence requiert la réalisation d’actes juridiques : « L’agent peut ne pas
bénéficier du pouvoir de conclure les contrats et simplement en négocier les
conditions … mais il devra néanmoins accomplir des actes juridiques pour le compte
de ses mandants qui se trouvent ainsi engagés »302.
du fonds de commerce
302
Cass. com., 24 sept. 2003, Lettre distrib., nov. 2003, n° pourvoi: 02-12265.
303
Rapp. Cass. com., 1 juin 1993, Bull. civ., 1993, IV, n° 221 qui décide qu'en matière de
distribution de carburants effectuée sous le régime du mandat, la conservation par l'exploitant d'une
station-service des recettes provenant des ventes à la clientèle jusqu'à leur versement quotidien sur un
compte bancaire désigné par la compagnie pétrolière ne constitue pas, sauf stipulations contraires, un
contrat de dépôt au sein du contrat de mandat mais l'exécution même de ce dernier.
-98-
304
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban, p.
284.
305
Cass. com., 27 fév. 1973, D., 1974, p. 283, note J. DERRUPE.
306
Le statut de gérant mandataire du fonds de commerce, créé par la loi du 2 août 2008, n'a pas
atteint l'objectif de sécurité juridique que lui assignaient ses promoteurs soucieux d'éviter l'application
du droit social. Une confirmation en est donnée par la modification apportée à l'article L. 146-1 du code
de commerce par la loi n° 2010-853 du 23 juill. 2010 disposant que la clause « commerciale » du
contrat de gérance-mandat qui « précise... les normes de gestion et d'exploitation du fonds à respecter
et les modalités du contrôle susceptible d'être effectué par le mandant » n'est pas « de nature à
modifier la nature du contrat » : Lettre distrib., sept. 2010, note N. FERRIER.
-99-
compte du propriétaire), mais en tout état de cause c’est le propriétaire du fonds qui «
assume les risques et recueille les profits liés à cette exploitation »307.
307
N. FERRIER, Le statut de gérant- mandataire issu de la loi du 2 août 2005, LPA, 26 mai 2006,
n° 105, p.4 et s. ; le même auteur : Contrat de Gérance-Mandat: J.-CL. com., 2008, Fasc. 323 ; F.
LEMEUNIER, Fonds de commerce, Achat et vente, Exploitation et gérance, 16 éd., Delmas, 2004, n°
1201: l’auteur regroupe les contrats de gérance de fonds dans le cadre de trois catégories: gérance-
salariée, contrat de mandat, et celui de location-gérance. Dans le cadre de ce dernier, le gérant exploite
en son nom, pour son compte, à ses risques et périls. Dans le cadre du contrat de travail et mandat, le
gérant exploite pour le compte du propriétaire du fonds, aux risques et périls de ce dernier.
308
Art. 1 décret-loi n° 34/67 ; Art. L 134-1 C. com. ; Art. L. 146-1 C. com.
309
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit.
310
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, J.-Cl. Com., Fasc. 323, Cote : 04, 2008.
311
Ce que nous étudierons plus tard en détails.
312
Cass. com., 15 janv. 2008, n° 06-14.698, Lettre distrib., avr. 2008, où le statut d'agent
commercial est refusé à celui qui ne pouvait apporter aucune modification, de quelque nature que ce
soit, aux tarifs et conditions fixés par le mandat.
-100-
313
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, op.cit.
314
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D.,
2011, n° 678, pour qui la différence entre le gérant mandataire et l'agent commercial tenant à l'activité
de gestion du premier et de prospection du second n'est peut-être pas réelle.
315
N. FERRIER, Contrat de Gérance -Mandat, op.cit.
316
Rapp. Soc., 19 mai 2010, n° 09-40.103.
-101-
184. Après avoir évoqué l’agissement du gérant au nom du mandant, c'est dire
en révélant aux tiers sa qualité de mandataire et l'identité du mandant, il s’agit dans
une deuxième section, de rédiger l’agissement pour le compte d’autrui tout en
rappelant que celui qui est chargé seulement de négocier des contrats ou de prospecter
une clientèle pour le compte du propriétaire du fonds n'est pas un gérant mandataire
car il accomplit des actes matériels et non juridiques319.
317
Cass. soc., 8 juin 2010, n° 08-44.965, Sté B et B.
318
Cass. soc., 23 juin 2010, n° 09-40.093, Sté Babou.
319
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, op. cit.,
parag. 6, n° 639, note 3, pour qui la négociation d'un acte est la première marche de sa conclusion.
-102-
SECTION 2
320
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit. ; Dans le même sens : Cass. civ., 1ere Ch. Rejet,
15 janv. 1991, n° 88-15.413 : « l'agent d'affaires qui encaisse les loyers pour le compte du propriétaire
bailleur est un mandataire qui agit pour le seul compte du mandant sans avoir la propriété des fonds
qu'il détient » ; M. THIOYE, Manque de transparence de l'administrateur de biens et engagement
personnel à l'égard des tiers, AJDI, D., 2004 p. 746: « le fait que le mandataire agit au nom et pour le
compte de son mandant (les deux autres éléments résidant dans le fait que le mandataire accomplit des
actes juridiques et sans subordination). Le mandataire agit pour le compte du mandant, ce qui signifie
que c'est dans le patrimoine de ce dernier, sur sa tête, que se réalisent les effets de droit voulus par le
représentant ».
321
Art. L. 132-1 C. com. ; Cass. com., 3 mai 1965, Bull. civ., 1965, III, n° 280.
322
Cass. com., 10 juin 1969, Bull. civ., 1969, IV, n° 218 ; Cass. com., 10 févr. 1970, Bull. civ.,
1970, IV, n° 49 ; Cass. com., 20 févr. 2007, Juris-Data n° 2007-037690 ; Contrats. conc. consom. 2007,
comm. 145, obs. L. LEVENEUR.
323
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 112.
-103-
187. La qualité d'agent n'est donc pas incompatible avec l'exercice d'une activité
autre que celle de mandataire. Une même personne peut être, vis-à-vis d'un fabricant,
dans la situation d'agent commercial et, dans ses rapports avec un autre fabricant, dans
une situation d'acheteur et de revendeur324. D’une autre manière, il est vrai qu’en tant
qu'agent commercial, ce dernier n'agit pas pour son propre compte mais comme
mandataire325.
324
F.-J. PANSIER, Agents Commerciaux, op. cit.
325
Cass. soc., 28 avr. 1960, JCP CI 1962, II, 71010.
-104-
la conclusion d’un contrat, alors qu’en France et toujours à première lecture, nous
pouvons parler de la faiblesse du pouvoir de conclusion des contrats, en raison de
l’utilisation de l’adverbe « éventuellement ». C'est dire que l’agent n’est pas commis
pour conclure des contrats mais pour mener les actions nécessaires à la conclusion des
contrats326. Cette hypothèse de l’agent commercial avec la faiblesse du pouvoir de
conclure est la plus courante même dans le champ commercial. C’est ainsi que la
chambre de commerce international précise que cette alternative n’est pas habituelle
dans le commerce international327. D’où l’utilité de traiter l’exigence discutée du
pouvoir de conclure (B).
191. Au sens étroit, la négociation se limite à discuter les termes d’un contrat, au
sens large ce serait proposer l’adhésion à un contrat ; entre ces deux acceptions
pourraient intervenir plusieurs offres de contrat préétablies par le mandant entre
lesquelles devrait s’opérer le choix du client328. Le sens large devrait être retenu dès
lors que le mandant doit pouvoir fixer au moins un cadre de négociation,
particulièrement quand l’agent est habilité à conclure. L’absence de pouvoir de
conclure des contrats ne devrait pas faire obstacle à la qualification dès lors que la
notion de mandat est souvent entendue de manière large par la doctrine329 , la
jurisprudence330 et le législateur lui-même331.
326
J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 72: F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER,
2e éd. Litec, 2005, n° 194.
327
Contrat Modèle CCI de contrat d’agence commerciale, 1992, CCI, p. 2, note 13 relative à l’art.
33 du modèle contrat.
328
Rapp. Cass. com., 14 juin 2005, D. 2006, Pan.514, obs. D. FERRIER.
329
R. de QUENAUDON, J.-Cl. C. civ., art. 1984 à 1990, Fasc. 10 n° 32 : « Selon une conception
large peut -être plus conforme à la tradition le mandat n’implique pas une représentation parfaite mais
seulement une volonté de gérer l’affaire d’autrui » ; R.-J. POTHIER, Cours de droit civil français,
1871, p. 40, 410, cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 186.
330
Cass. com., 25 fév. 2003, n° 99-20147 : « assimile la simple présentation des produits à un
mandat » ; Cass. civ., 16 juin 1998, Bull. civ., II, n° 211 : « assimile une mission d’expertise à un
mandat » ; CA Paris, 9 juin 1995, Juris-Data 1995, 022849 : « considère le visiteur médical comme un
mandataire ».
-105-
192. Une décision jurisprudentielle assez récente est venue répondre à cette
question, tout en considérant que la mission de négociation de l’agent commercial
peut résulter de la simple prise de commandes332. La solution s’impose lorsque
l’intermédiaire remplit une fonction essentiellement technique, une activité
« d’assistance et de conseil » en se bornant à « transmettre les commandes »333, ou
une mission de prospection, d’assistance commerciale, de contrôle et de suivi des
expéditions, se limitant à des opérations matérielles334.
193. En outre, le simple pouvoir de négocier des contrats -principe exigé par la
loi-, c'est dire de négocier des actes juridiques auxquels intervient seul le mandant
pour son compte, passe au premier chef par la réalisation d’actes matériels
(rencontres, prise de contact, tournées, remise de documents commerciaux,
présentation des produits…)335. Cependant, la jurisprudence exige plus de l’agent
négociateur : il doit réaliser des actes juridiques lui-même pour le compte d’autrui
afin de bénéficier du statut protecteur336. L'intermédiaire qui ne représente pas le
mandant ne peut évidemment prétendre au bénéfice du statut d’agent commercial. Ce
sera le cas de l'intermédiaire qui se comporte comme un revendeur et non comme un
négociateur337; en l'occurrence, l'intermédiaire assurait lui-même la fourniture des
produits, n'hésitant pas à s'adresser à un concurrent du « mandant » pour satisfaire les
demandes.
331
Loi 2 janv. 1970, art. 5 et 6 en matière d’agence immobilière ; C. trav., art. L. 7121-11 en
matière d’agence artistique.
332
CA Paris, 14 mai 2009, n° 07/00621.
333
CA Versailles, Ch. 12, sect. 2, 8 févr. 2007, Euro Tech c/ Eagle Picher, JCP, E 2007. Somm.
2272 ; JCP, E 2007, 1706.
334
Cass. com., 20 mai 2008, Contrats, conc, consom, 2008, n° 179, D. 2009, pan 1893, obs. D.
FERRIER ; CA Paris, Ch. 5 B, 27 sept. 2007, SA Etam c/ Sté Turkay Tekstil, Juris-Data n° 2007-
348057.
335
F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 155 : « La négociation se caractérise par des actes matériels… » ; J.-J. HANINE,
Le contrat d'agent commercial en droit français et en droit italien, th., Paris II, 1977, p. 70 :
« L’activité des négociations de l’agent commercial est essentiellement matérielle ».
336
CA Limoges, Ch. civ., 31 mars 2011, n° 09/01679.
337
Cass. com., 10 juill. 2007, n° 05-19.373, Société F. Bonnet c/ Société Bacchus, Juris-Data n°
2007-040136 ; D. 2007. AJ. 2158, obs. X. DELPECH ; RTD com., 2008. 45, obs. B. SAINTOURENS.
-106-
195. Dans le même sens, il a été jugé : « La possibilité pour l'agent commercial
de négocier librement les contrats est souvent déterminante pour caractériser son
indépendance. Ainsi d'une société SFR qui a conclu avec une société RCE un "contrat
partenaire" pour deux ans renouvelable par tacite reconduction par période annuelle
sauf dénonciation aux modalités contractuellement prévues. Par ce contrat, la société
SFR confie à la société RCE la diffusion de services de radiotéléphonie et diverses
tâches liées à l'enregistrement des demandes d'abonnement. À la rupture du contrat,
le distributeur invoque l'existence d'un contrat d'agence commerciale. La Cour de
cassation rejette la qualification d'agent commercial aux motifs que l'agent
commercial est un mandataire indépendant chargé de négocier et, éventuellement, de
conclure des contrats au nom et pour le compte de son mandant ; l'arrêt constate que
la société RCE s'était engagée par contrat à n'apporter aucune modification, de
quelque nature que ce soit, aux tarifs et conditions fixés par la société SFR pour la
souscription des abonnements aux services, puis relève, procédant ainsi à la
recherche prétendument omise, que dans la pratique des parties, la seule
« négociation » alléguée par la société RCE n'avait pas été menée au nom et pour le
compte de la société SFR, mais pour son propre compte dans la mesure où elle
338
F. FOURNIER L’agence commerciale, op. cit p. 105 ; P. PUIG, La qualification du contrat
d’entreprise, préf. B. TEYSSIYE, éd. Panthéon Assas, 2002, n° 134 ; C. DILOY, Le contrat d’agence
commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE, LGDJ, 2000, n° 83.
339
C. civ., art. 1984, 1988 et 1998.
340
CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 8 déc. 2010, n° 10/05076 ; CA Amiens, Ch. 01, Sect. 02, 11 déc.
2008, n° 07/01102.
341
Cass. com., 12 oct. 2010, n° 09-69.771: en matière de promotion immobilière ; CA Versailles, 11
fév. 2010, n° 09-00396 ; Cass. com., 27 oct. 2009, D., 2011, pan° 548, obs. D. FERRIER ; CA Paris,
23 fév. 2006, JCP, G 2006, III, 10108, note Ph. STOFFEL-MUNCK ; Cass. com., 14 juin 2005, D,
2006, Pan. P. 514, obs. D. FERRIER.
-107-
revendait, en l'espèce, un matériel que lui avait vendu cette société ; qu'en l'état de ces
constatations, il résultait que la société RCE n'était investie d'aucun pouvoir de
négocier les contrats, la Cour d'appel [...] a exactement rejeté la prétention de cette
société au bénéfice du statut d'agent commercial »342.
196. En effet, la négociation peut être réalisée sous deux formes : soit par des
actes matériels343, préparatoires, qui devront être complétés par l’accord des parties
pour devenir des actes juridiques344, soit en constituant éventuellement des actes
juridiques quand une offre est sollicitée345. Il nous faut donc considérer qu'à défaut de
stipulation expresse l'agent commercial est censé avoir simplement le pouvoir de
négocier : c’est seulement s'il en a été investi expressément qu'il a le pouvoir de
conclure346, c'est-à-dire d’accomplir des actes juridiques pour le compte du
mandant347. Cependant, la vertu cardinale de la négociation, inscrite clairement dans
les deux textes français et libanais, permet de bénéficier du statut d’agent commercial
dans le droit français ou du statut de représentant commercial selon le décret-loi
libanais.
342
Cass. com., 15 janv. 2008, n° 06-14.698, FS-P+B, SA RCE c/ SA SFR : Juris-Data n° 2008-
042333 ; Contrats, conc. consom. 2008, comm. 68, obs. N. MATHEY.
343
La négociation consiste en un ensemble d’actes matériels ayant pour finalité d’amener le client à
contracter avec le commettant : S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et
allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 18 ; F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en
droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 155 : « La négociation se caractérise par des
actes matériels… ».
344
J. CATONI, La rupture du contrat d’agent commercial et le décret de 1958, préf. J.
GAULTHIER, Sirey, Paris, 1970, n° 72.
345
J.-M. LELOUP, JCP, éd. E., 1987, II, 15024, n° 10.
346
Suivant l’adverbe « éventuellement » découlant de l’art. L.134-1 C. com., l’agent commercial
aura pour le premier pas censé avoir le pouvoir de négocier afin qu’au bout d’un second pas puisse
conclure. Il s’agit de noter en ce sens que la jurisprudence n’a pas séparer ces deux pouvoirs l’un de
l’autre : CA Bordeaux, Ch. civ. 02, 6 oct. 2010, n° 09/04290 ; CA Versailles, Ch. 12, Sect. 01, 23 sept.
2010, n° 10/00775 : « l’agent n'avait pas le pouvoir de négocier ni d’ailleurs de conclure des contrats
de vente ou d'achat pour le compte de la société » ; CA Versailles, Ch. 12, Sect. 02, 6 mai 2010, n°
09/01049 ; CA Paris, 14 mai 2009, n° 07/00621 ; CA Paris, Ch. 18 C, 9 oct. 2008, n° 07/08504 ; CA
Paris, Ch. 18 C, 30 nov. 2007, n° 07/04487 ; CA Versailles, Ch. 17, 24 mars 2006, n° 05/00816 ; CA
Versailles, 29 mars 2001, n° 2000-1861 ; Cass. soc., Rejet, 25 janv. 1995, n° 90-45.796, Bull. 1995, V,
n° 40, p 29 ; Dans le même sens, G. BORENFREUND, La notion d'établissement distinct à la croisée
des chemins, Rev. trav., 2011, p. 24: « Plus précisément, le choix de confier ou non à son représentant,
à la tête de l'unité considérée, le pouvoir de négocier voire de conclure un accord collectif au sein de
l'établissement, pourrait devenir décisif ».
347
B. FAGES, Mandat Commercial, op.cit.
-108-
348
« La conclusion d’actes juridiques ne constitue qu’une activité accessoire au travail de
prospection, mission première de l’agent » : Ph. GRIGNON, Le fondement de l'indemnité de fin de
contrat des intermédiaires du commerce, préf. D. FERRIER et J.-M. MOUSSERON, Litec, 2000, n°
173. Certains la considèrent également comme « exceptionnelle » : A. De THEUX, Le droit de la
représentation commerciale, Etude comparative et critique du statut des représentants salariés et des
agents commerciaux, Centre interuniversitaire de Droit Comparé, péf. A. LAGASSE, Bruxelles, t. 1,
1975, n° 78 ; R. SAVATIER, Droit des affaires, 1962, p. 283 à 285 : cité par Ph. GRIGNON, Le
fondement de l'indemnité de fin de contrat des intermédiaires du commerce, note 644.
349
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 49.
350
L’obligation de prospection entraine l’agent à agir continuellement dans le but d’amener de
nouveaux clients à son commettant, à développer le volume de transactions et donc le chiffre d’affaires
réalisé avec les anciens clients ; il ne devra pas se contenter de maintenir les relations déjà constituées,
mais bien plus observer le marché qui lui a été dévolu, et être à l’écoute des exigences de sa clientèle :
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec,
2003, p. 20.
-109-
ne disposait pas, de façon permanente, d'un pouvoir de négocier des contrats au nom
et pour le compte du mandant : ce qui, -au vu des articles L. 134-1 et L. 134-4 du
Code de commerce- a conduit une jurisprudence à denier à ce mandataire la qualité
d'agent commercial351.
199. Donc, comme première déduction des deux textes, l’acte de conclusion des
contrats parait être volontaire en droit français sans être lié au pouvoir de négociation
qui, en droit libanais, peut conduire à la conclusion des actes. Sur cette assise, il s’agit
de noter que la conclusion ne suppose pas nécessairement une négociation, et la
négociation n’implique pas toujours une conclusion352 : Solution adoptée par la Cour
d’appel de Douai laquelle a considéré que « la mission d'agent commercial suppose,
en conséquence, un mandat de prospection de la clientèle du mandant par l'agent,
soit pour conclure un contrat, soit pour préparer cette conclusion par un travail de
négociation c'est-à- dire de discussion notamment sur le type de marchandises, la
quantité, le prix et les modalités de paiement au nom et pour le compte du mandant.
Cette mission correspond donc à la négociation prévue par l’article L. 134-1 du Code
de commerce sans qu'il soit nécessaire que l'agent ait un pouvoir pour conclure le
contrat lui-même, ce qui suffit à caractériser la mission de l'agent commercial au sens
de ce texte »353.
351
Cass. com., 27 avr. 2011, D., 2011, Actu. 1279 ; v. déjà Cass. com., 15 janv. 2008, D., 2008, AJ
350, obs. E. CHEVRIER ; RTD com., 2008, 495, obs. B. SAINTOURENS ; RTD civ., 2008, 299, obs.
B. FAGES.
352
D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., Litec, 2009, n° 185 et note 404 : « … Pourtant
l’agent commercial négocie sans forcément conclure » ; Cass. civ., 2 déc. 1997, JCP, G, 1998, IV, 157,
n° 1140.
353
CA Douai, Ch. 02 Sect. 02, 17 sept. 2009, n° 07/08370.
354
Cass. com., 18 nov. 2008, n° de pourvoi : 07-16751.
-110-
contrat355. Elle pourrait même être informelle et l'acceptation du mandant être tacite,
mais elle n'avantagerait aucune partie et ne mettrait pas à l'abri l'une d'elle contre la
mauvaise foi de l'autre.
Ici surgit une question d’importance : l’agent peut-il ne pas être habilité à
conclure des contrats au nom et pour le compte du mandant ?
201. Il semblerait que l’on doive répondre négativement, tout en admettant que
le pouvoir de conclure détenu par l’agent a -au sens strictement juridique-, un
caractère « accessoire », si l’on s’en tient de la définition de l’agent commercial en
droit français356 ; en droit libanais, ce pouvoir a un caractère « principal ». Ainsi, la
Cour d'appel de Paris allait dans le même sens en estimant que si la qualification
d’agent commercial ne requiert pas que ce dernier ait de manière permanente mission
de conclure des contrats au nom et pour le compte du mandant, elle suppose qu'il
puisse éventuellement conclure de tels contrats357. Dans le même sens, un arrêt
célèbre précise pareillement : « n'est pas un agent commercial la personne qui se
contente, au titre d'un contrat, de prospecter des clients, de transmettre les offres et
de remettre à son cocontractant les commandes passées, sans être autorisée pour
autant à conclure des contrats au nom et pour le compte de celui-ci et sans qu'il soit
prévu le versement d'une indemnité de clientèle en cas de rupture du contrat »358.
Ainsi il a été jugé que « n’est pas un agent commercial l’intermédiaire qui se borne à
présenter les conditions proposées par le mandant »359. Le principe serait alors que le
pouvoir de négociation se trouve nécessairement dans tous les contrats d’agence
355
B. FAGES, Mandat Commercial, J.-Cl. Contrats-Distribution, Fasc. 810, Cote : 05, 2004.
356
La majorité de la doctrine considère que ce pouvoir est exceptionnel : F.-X. LICARI, La
protection du distributeur intégré en droit français et allemand, op. cit ; Ph. LE TOURNEAU et alii,
Droit de la responsabilité et des contrats, 9e éd., Dalloz Action, 2012, n° 5531 ; D. FERRIER, op.cit,
n° 161 et 174 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 183 ; A. De THEUX, Le statut
européen de l’agent commercial, op. cit., n° 34 ; même auteur, Le droit de la représentation
commerciale, op. cit., n° 78 ; J.-J. HANINE, Agents commerciaux-Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-
Distribution, Fasc. 1230, 1991, n° 7.
357
CA Paris, 27 sept. 2007, 5e Ch., Juris-Data n° 2007- 348057 : N’est pas agent commercial celui
qui se voit refuser tout pouvoir de conclure.
358
CA Paris, 6 nov. 2007, n° 06-10396.
359
Cass. com., 27 oct. 2009, n° 08-16.623 ; Cass. com., 15 janv. 2008, D., 2008, act. Jurispr., 350,
obs. E. CHEVRIER.
-111-
202. En réalité, ce qui est demandé aux agents commerciaux, c’est de créer un
courant d’affaires363 et notamment, de maintenir et développer le volume des ventes
dans la clientèle existante et de prospecter tous les clients potentiels, c’est-à-dire
d’avoir apporté, créé ou développé une clientèle364. Le mandant attend de son agent
qu’il mette ses compétences et sa connaissance du marché au service de son
entreprise. Cette attente vise à permettre à l’entreprise du mandant d’être mise en
rapport avec des prospects. C’est là tout l’intérêt de la formule de l’agence
commerciale365. Il faut admettre que sa fonction primordiale est de susciter des offres
des clients potentiels de l’entreprise, ce qui constitue un acte juridique à ce titre366.
360
L’intermédiaire qui ne disposait pas de façon permanente du pouvoir de négocier n’est pas un
agent commercial : Cass. com., 27 avr. 2011, D., 2011, p. 1279.
361
V. supra n° 192.
362
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 186
363
CA Rennes, Ch. 01 B, 1 oct. 2010, n° 09/02272 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11 mars 2010, n°
08/03694 ; CA Lyon, Ch. civ., 01 B, 17 déc. 2009, n° 09/06347 ; Cass, com., 17 mars 2009, n° 08-
10.398 ; CA Orléans, Ch. Solennelle, 18 nov. 2008, n° 08/01089 : « Elle soutient qu'il ne démontre pas
remplir les conditions liées à l'octroi de l'indemnité de clientèle qui impliquent d'une part la création
d'un lien de fidélité entre l'acheteur et l'entreprise, et la constitution d'un courant d’affaires, d'autre
part :ce qui ne justifie pas du développement en nombre de la clientèle » ; CA Paris, Ch. 05 B, 6 nov.
2008, n° 05/20095 ; CA Paris Ch. 21 C, 6 mai 2008, n° 06/11172.
364
CA Riom, 11 mars 2008, n° 06/02817.
365
« L’esprit de l'agence commerciale... est essentiellement d'attirer une clientèle vers les produits
du mandant » : Contrats, conc. consom. 2011, Comm. 190, note N. MATHEY.
366
J.-M. LELOUP, JCP, éd E., 1987, II, 15024, n° 10.
367
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 63.
-112-
204. Il découle de ce qui précède que l’activité de négociation n’est pas unique,
elle est la règle (agent négociateur) ainsi que la possibilité de conclure l’exception
(agent contractant)369. Elle est constituée par une variété d’actions et d’opérations qui
ont toutes pour objet ou pour effet de mener à la même finalité : celle de la conclusion
d’un contrat370. Après avoir souligné la teneur de l’exigence pour le compte d’autrui
dans le premier paragraphe, il s’agit d’évoquer la portée de cette exigence dans un
deuxième paragraphe.
368
CA Rouen, Ch. 01 Cabinet 01, 11 avr. 2007, n° 05/04494.
369
S. MEGNIN, op. cit., n° 19.
370
F. FOURNIER, op. cit., p. 114.
-113-
206. De même, nous avons déjà vu que, s'il ne lui est demandé que d'accomplir
un ou plusieurs actes juridiques isolés, le mandataire que ce soit le représentant
commercial libanais ou l’agent commercial français, peut parfaitement s'en charger
dans le cadre d'une profession, à titre habituel et rémunéré, au service d'une pluralité
de mandants. Dans ce sens, il a été jugé que l’agent maritime peut se rapprocher du
représentant commercial au sens des articles 1 et 3 du contrat de représentation
commerciale du décret-loi N. 34/67 : « étant donné que par sa profession habituelle et
indépendante, il entreprend des négociations pour conclure des opérations de
location ou de prestation de services ; ainsi il est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale »372.
C'est ainsi que le contrat de mandat est l'un des instruments juridiques favoris de ceux
que l’on a coutume d'appeler les « agents d'affaires »373 ; il permet de désigner d'une
façon aussi générique qu'imprécise les professionnels s'occupant à titre habituel et
onéreux des affaires d'autrui.
371
F. FOURNIER, op. cit. p. 123.
372
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
373
J.-Cl. Fasc. 1160 et 1170 : cité par B. FAGES, Mandat Commercial, op.cit. ; Cette expression
fugacement évoquée dans le C. com., art. L. 110-1, al. 6.
374
Cf. L. HOGUET, n° 70-9, 2 janv. 1970 et D. n° 72-678, 20 juill. 1972. - J.-Cl. Fasc. 1180.
375
Cass. com., 29 oct. 2002 : Bull. civ. IV, n° 156, ce double mandat n'est pas interdit par l'article
20, L. "Sapin" n° 93-122, 29 janv. 1993. - J.-Cl. Fasc. 4020.
376
L. n° 92-645, 13 juill. 1992. - J.-Cl. Fasc. 800.
377
V. sur la protection du client L. n° 89-421, 23 juin 1989 et Recomm. CCA, n° 87-02. - J.-Cl.
Fasc. 850 et 1290.
-114-
378
C. trav., art. L. 762-3 à L. 762-12.
379
Sur l'analyse théorique de la représentation, v. Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé,
préf. Y. LEQUETTE, LGDJ, 2000, n° 206 et s.
380
Art. L. 132-1 C. com.
381
Art. 3 du décret-loi libanais n° 34 de 5 août 1967.
-115-
212. Suivant ces deux textes, une définition commune peut être proposée si l’on
considère le commissionnaire comme celui qui agit en son propre nom et pour le
compte d’autrui, dernier point où le représentant commercial libanais comme l’agent
commercial français se rejoignent, puisque tous les deux agissent pour le compte
d’autrui. Ainsi, une distinction terminologique peut être évoquée, concernant ces deux
textes, s’agissant du « nom social » par lequel le commissionnaire français peut agir
différemment du texte libanais qui ne spécifie pas ce détail dans cet article là, mais
était l’objet d’un autre article dans le Code de commerce libanais 382 ; il s’agit du
mandat commercial qui semble très proche du texte français tout en considérant, que
le mandat commercial prend le nom de commission lorsque le mandataire doit agir
en son propre nom ou sous un nom social pour le compte de son commettant. De
même, le texte libanais mentionne pour sa part une autre spécificité qui le distingue
du texte français, concernant l’existence d’une commission ou une provision pour le
382
Art. 272 C. com. : « Le mandat est commercial quand il est relatif aux opérations commerciales.
Il prend plus précisément le nom de la commission et est régi par les dispositions du chapitre
suivant, lorsque le mandataire doit agir en son nom propre ou sous un nom social pour le compte de
son commettant. Quand le mandataire doit agir au nom du mandant, ses droits et ses obligations sont
déterminés par le livre VIII de la deuxième partie du code des obligations ».
-116-
213. De même, l’acte d’« agir » dans le texte français a été moins bien défini et
spécifié que dans le texte libanais, car ce dernier mentionne le fait de « la charge de
conclure des achats, des ventes et d’autres opérations commerciales ». Par
conséquent, et parce que se trouve spécifiée d’une manière précise la qualité de
commissionnaire et son rôle de conclure des achats, des ventes et d’autres opérations
commerciales, nous pouvons en déduire qu’au niveau de la précision de la mission du
commissionnaire le texte libanais est plus clair et précis que le texte français qui
parait plus vague et général.
383
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 95 : « Le commissionnaire a droit à commission, constitué le plus souvent d’un
pourcentage sur le montant brut de l’opération et la valeur totale du marché » ; CA Paris, 27 nov.
1991, D., 1992, IR 72.
384
Au sens de l’article premier alinéa second du décret-loi n° 34/67 qui assimile au représentant
commercial l’intermédiaire qui agit pour son propre compte en vertu d’un contrat lui conférant une
certaine exclusivité.
-117-
216. Tandis que le commissionnaire conclut le contrat en son propre nom mais
pour le compte de son mandant ; ainsi si le commissionnaire achète des marchandises
pour le compte d’une autre personne, c’est comme s’il achète sous son propre nom
sans que le nom du mandant n’apparaisse pas dans le contrat. Ce qui aboutit à
l’acquisition par le commissionnaire des droits résultant du contrat, et l’engage envers
les personnes avec qui il traite385, comme si l’affaire le concernait personnellement386:
d’une autre manière, il sera interdit à la personne avec laquelle s’est engagé le
commissionnaire de porter plainte directement contre le commettant, de manière qu’il
sera impossible d’accepter l’inverse et de permettre au commettant de porter plainte
directe contre la personne qui a passé contrat avec le commissionnaire notamment
suivant les dispositions de l’art. 224 C.O.C : « Si le mandataire agit en son nom
propre alors que ce dernier est un faux, sans présenter le mandat qui lui est conféré,
il est interdit au tiers ayant passé contrat avec lui de porter plainte contre quelqu’un
d’autres, ainsi qu’aucune poursuite est faite contre ses tiers que par lui. Les règles du
mandat et de la représentation ne sera applicable que sur les relations entre le
mandataire passif et le mandant ».
385
Sujet à développer dans notre deuxième partie de cette étude concernant les effets de la
représentation commerciale.
386
Art. 280 C. com. Lib. ; TI Beyrouth, Ch. com., décision du 11 nov. 1973, Rec. Hatem, vol. 150,
p. 21 et 22.
-118-
217. En revenant aux dispositions de l’art. L. 132-1 C. com. dans son premier
alinéa, nous trouvons que le commissionnaire est un intermédiaire de commerce qui
agit en son nom mais pour le compte d'un commettant dans les limites du mandat qui
lui est conféré et pour les opérations qui lui sont confiées. Le cas échéant il apparaît
comme un mandataire indépendant387, en rappelant qu’une jurisprudence signale que
le commissionnaire n'est pas un mandataire388, sauf dans les relations internes
commettant-commissionnaire389. Cette solution semble être différente de celle du
droit libanais suivant le deuxième alinéa de l’article 279 C. com.390, assimilant au
commissionnaire la qualité d’un mandataire, pour qu’il puisse bénéficier du statut
protecteur du décret-loi N. 34/67, au sens de son alinéa premier de l’article premier,
avec certaines variantes dans les modalités d’exercice de ces activités.
387
Rapp. CA Versailles, 9 juin 2011, Concurrences 2011, n° 3, obs. D. FERRIER : reconnaît que la
mise à disposition de l’enseigne et de la marque n’influe pas sur la qualification du contrat de
commission et que le commissionnaire a une clientèle propre ; Cass. com., 29 juin 2010, Bull. civ.,
2010, IV, n° 114, D. 2011, pan. 548, obs. D. FERRIER ; CA Paris, 13 sept. 2006, D. 2007, pan° 1914,
obs. D. FERRIER., cassé par Cass. com., 26 fév. 2008 D. 2008, obs. D. FERRIER, au motif que le
commissionnaire était aux termes du contrat de commission un commerçant indépendant propriétaire
de son fonds de commerce. L’idée a été beaucoup discutée en doctrine où, plutôt l’avis général
considère que la commission est un mandat : R. RODIERE, Droit civil, Mandat, t. 3, n° 45 ; E.
THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à l'exclusion du droit maritime, par J.
PERCEROU, t. 1, suppl. 8e éd., Rousseau, 1936, n° 1102 ; MM. RIPERT et ROBLOT, ont assimilé le
commissionnaire comme un mandataire salarié : G. RIPERT et R. ROBLOT Traité de droits des
affaires, Du droit commercial au droit économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-
Lextenso, 2010, n° 157. Pour ces derniers la commission serait un mandat sans représentation parfaite :
avis adopté par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit.
388
Cass. com., 6 mars 2001, DMF 2001, p. 499, note D. AMMAR.
389
V. J.-Cl. Commercial, Fasc. 59, n° 4.
390
Art. 279, al. 2 C. com. lib. : « Les règles du mandat s’appliquent au contrat de commission avec
réserve des dispositions du présent chapitre ».
-119-
220. En définitive nous ne dirons pas avec MM. les professeurs FABIA et SAFA
que le commissionnaire bénéficierait du statut de représentant commercial s’il jouit
d’une certaine exclusivité394, car cette opinion se base sur le deuxième alinéa de
l’article premier du décret-loi N. 34 selon lequel l’élément d’exclusivité dans les
rapports du mandant et de l’intermédiaire peut provoquer l’application dudit décret-
loi. Nous dirons plutôt que les commissionnaires sont des représentants commerciaux
dans la mesure où ils agissent dans les mêmes conditions que le représentant
mandataire visé à l’alinéa premier dudit article. Solution opposée en France où
391
M.-P. DUMONT-LEFRAND, Op. cit.
392
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301 : « Les exceptions sont d’interprétations stricte », p. 196 : « La loi
spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
393
Art. 1, al. 2 du décret-loi libanais n° 34/67: « Est aussi considéré représentant commercial, le
commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un
contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique ».
394
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
-120-
221. Aussi bien il n’existe pas dans la loi française une précision analogue à
celle qui figure dans l’art. 279 al. 1. C. com. lib., définissant la commission comme
un contrat fait pour la conclusion d’opérations commerciales. Cela ne signifie certes
pas que des opérations non-commerciales ne peuvent être conclues par un mandataire
agissant en son nom propre pour le compte du mandant396. C'est en cela qu'il se
distingue du mandataire397. Le caractère des opérations objet du contrat de
commission s’apprécie dans la personne du commettant, dès lors qu’elles sont
accomplies pour son compte, qu’elles sont propres.
222. C’est le point de vue général398. Peu importe le caractère qu’elles peuvent
avoir quant à la personne du tiers cocontractant399. En conséquence, il y aura
commission au cas où les opérations à conclure sont commerciales 400 pour le
commettant, soit en tant qu’actes de commerce par nature soit par accessoire ; concept
adopté par M. le professeur TYAN : « Il n’y a contrat de commission, tel qu’il est
conçu par le Code de commerce libanais401 et auquel, seul, sont applicables les règles
particulières qui y sont prévues, que s’il a pour objet la conclusion d’opérations
commerciales »402. Aussi, n’y a-t-il pas lieu, en l’occurrence, de tenir compte de la
solution qui prévaut en droit français, selon laquelle il y a toujours commission même
si celle-ci porte sur des opérations civiles, telles que des ventes de produits du sol
pour le compte d’un agriculteur403.
395
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 473 et s.
396
Cass. soc., 5 mai 1971 n° 69-14.636, Bull. civ., V, n° 334, p. 282.
397
Cass. com., 2 nov. 1954, Gaz. Pal., 1955, 1, p. 5 ; JCP, G 1955, II, 8496
398
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité de droit commercial, 2e éd. Paris, 1891, t. 3, n° 419 :
cité par M. MAHMASSANI, op. cit. p. 56.
399
Cass. soc., Rejet, 9 juin 1994, n° 91-18.618.
400
Cass. com., Rejet, 9 fév. 2010 n° 08-20.504 ; CA Colmar, Ch. civ., 01 Sect. A, 1 sept. 2009, n° 1
06/03392 ; CA d'Agen, Ch. soc., 4 déc. 2001, n° 00/01476.
401
Art. 279 C. com. lib., al 1er.
402
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 479.
403
J. HAMEL et G. LAGARDE, I, 159, in fine ; E.D.Co, v. acte de commerce, n° 321.
-121-
223. Il n'est pas envisageable que le commissionnaire soit uniquement celui qui
agit en son propre nom dans la mesure où le texte précédent, dans son deuxième
alinéa, continue de qualifier de commissionnaire et de soumettre aux règles du mandat
celui qui agit au nom du commettant. Donc le critère permettant d'identifier un
commissionnaire est le double agissement de celui-ci en son propre nom et pour le
compte d'autrui et c’est ce qui a été consacré par la jurisprudence française404 ; il y a
divergence avec la solution libanaise sur ce point, quand se trouve adopté le seul
critère de l’agissement pour le compte d’autrui afin de le faire bénéficier de la
protection spéciale du décret-loi N. 34/67 prévu pour le représentant commercial
libanais.
404
CA Orléans, CT0344, 28 nov. 2007, n° 06/02893 ; Cass. com., 20 mai 1997, RJDA 10/1997, n°
1187 ; Cass. com., 3 janv. 1995, RJDA 4/1995, n° 425 ; 22 mai 1991, Bull. civ., IV, n° 173 ; 21 juin
1982 : Bull. civ., IV, n° 235, JCP G 1982, IV, 314 ; 10 févr. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Cass. com., 2
nov. 1954, Gaz. Pal. 1955, 1, 5.
405
J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle, 2e éd., Francis Lefèbvre, 1999, p. 203.
406
Ordonnance de CJCE du 10 fév. 2004, Aff. C. 85/03, publiée au JO, C 112, 10 mai 2003 et au
JO de l' UE, C 94/17, 17 avr. 2004 : Demande de décision préjudicielle du Polymeles Protodikeio
Athinon (Grèce): Mavrona & Sia OE c/ Delta Etaireia Symmetochon AE, ayant pour objet à obtenir
une décision à titre préjudiciel sur l'interprétation de la directive 86/653/CEE du Conseil, du 18 déc.
1986, relative à la coordination des droits des États membres concernant les agents commerciaux
indépendants (JO L 382, p. 17), dans le sens que « les personnes qui agissent pour le compte d'un
commettant, mais en leur nom propre, n'entrent pas dans le champ d'application de cette directive ».
407
V. Titre 2 de cette première partie.
-122-
b-1. L’exposé
408
Ph. DIDIER, De la représentation en droit privé, op.cit., p. 135.
409
Art. L. 212-1 C. consom.
-123-
229. Il a été révélé que la commission, plus qu’un simple contrat, est « un
véritable besoin du commerce international »410 . Pourtant, la commission met en
relation des intervenants dont le service commercial que rend le commissionnaire au
commettant ; soit en intervenant comme commissionnaire de vente, et permettant à un
producteur éloigné géographiquement de diffuser sa production sur la place où il
opère, en lui ouvrant ainsi un marché autrement impossible à atteindre411 ; soit en
intervenant comme commissionnaire d’achat, permettant au contraire à un
commerçant de s’approvisionner à une source à laquelle ce dernier aurait
difficilement accès.
410
F.M.B REYNOLDS, Agency, Theory and practice, 1978, p. 230 et s. : cité par Ph. DIDIER, De
la représentation en droit privé, op. cit., n° 112.
411
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 157 et s.
412
L’exposé des motifs de la loi du 23 mai 1863 réformant le gage commercial met en évidence que
la simplification des règles du gage commercial et l’extension du privilège du commissionnaire avait
pour but de répondre aux succès commerciaux anglais que l’on attribuait en partie à la facilité avec
laquelle les commissionnaires anglais pouvaient affier ce double service : cité par Ph. DIDIER, op.cit.,
n° 111 et s.
-124-
413
De l’italien del credere, qui signifie littéralement "de la confiance", forme lexicale adoptée par le
droit anglais où cependant elle n’apparaît que tardivement et par le biais des assurances maritimes.
414
Nous nous limitons à ce qui aide notre distinction afin de développer ce point-là dans notre
deuxième partie de notre étude.
-125-
Les devoirs et les droits du commissionnaire qui agit au nom d'un commettant
sont déterminés par le titre XIII du livre III du Code civil ».
415
J. HAMEL, Le contrat de commission- Etudes de droit commercial, D., Paris, 1949 ; Ph.
DIDIER, op.cit.
416
Manuscrit de la bibliothèque de Munich, Cod. Gall., n° 183, publié par Zeller dans la Z.H.R,
1918, p. 130, Livre V : Des consuls du Levant et des commissionnaires : il est dit, dans ce texte,
que « le commissionnaire est celui qui, faisant les affaires des autres, agit en son nom, et s’oblige ainsi
lui-même sans engager directement ses commettants » : cité par J. BOUDAUD, Les intermédiaires du
commerce en droit français et mexicain, th., Montpellier, 2001, n° 15.
-126-
Tant que la demanderesse concluait des contrats sous son nom propre et pour le
compte de la société défenderesse, le contrat de mandat en question constituait en
fait un contrat de commission soumis aux dispositions du mandat, au moins dans les
relations entre le commettant et le commissionnaire -conformément aux dispositions
des articles 279-280 du Code de commerce ; par la suite chacune des parties
contractantes aura le droit de mettre fin au contrat sans indemnisation »417.
417
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 718/747, du 23 nov. 1969, Compagnie de Construction et des
Annonces c/ Compagnie Krant Advertising limited, Rec. Hatem, 1970, vol. 113, p. 23 et s.
-127-
418
L’absence du nom et / ou de l’identité du représenté.
419
A. BENABENT, Droit civil, Les contrats spéciaux, civils et commerciaux, 9e éd.,
Montchrestien, 2011, n° 986.
420
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6 éd., Defrénois, 2012,
n° 538.
-128-
pour agir « au nom » et « pour le compte » de son mandant ? Ces deux conditions
sont-elles stipulées cumulativement?
241. La doctrine n’a pas tranché cette question. Avant d'aborder ce point, il est
utile de préciser la notion de « commission » : « c’est celle par laquelle le
commissionnaire travaille par une délégation du commettant, en son propre nom mais
pour le compte de son commettant »421. Cela est-il en contradiction avec le concept du
premier alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, lequel évoque l’exécution
des actes « au nom » et « pour le compte » du mandant ?
242. M. le professeur TYAN, a considéré que les deux conditions précitées sont
imposées cumulativement : « …D’une part, en effet, le texte indique, comme objet de
la représentation commerciale, les démarches en vue de la conclusion de contrats et
cette conclusion même, à titre cumulatif et non alternatif… » 422.
243. De leur côté, MM. les professeurs FABIA et SAFA, explicitant le décret-loi
N. 34/67, et particulièrement son article premier, ont considéré que : « …Dans cette
modalité, l’agent commercial opère tantôt en révélant au tiers son mandat et
l’identité de son mandat, tantôt il agit seul et en son nom propre … »424. Et en effet,
ils ont donc considéré le mandataire comme représentant commercial, même s’il a agi
en son propre nom, en lui permettant de bénéficier des dispositions du décret législatif
N. 34/67 du 5 août 1967.
421
Art. 279 C. com. lib.
422
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468.
423
E. TYAN, op. cit, p. 469 ; J. HEMARD, Les représentants commerciaux, RTD com., 1959, p
576, 586.
424
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
Art. 1er., n° 4.
-129-
Nous avons tendance à adopter le deuxième avis pour les raisons suivantes :
425
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 51.
426
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité de droit commercial, op. cit., n° 414 et 419 ; A.
WAHL, Précis théorique et pratique de droit commercial, n° 1343 ; E. TYAN, Droit commercial, éd.
Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 479.
-130-
articles, matériaux, titres ou actes commerciaux, le mandat sera une commission, que
le mandataire ait agi en son propre nom ou sous le nom de son mandant427.
248. Ce qui nous incite à dire que le critère n'est pas seulement d’agir « sous le
nom du mandant », comme il est reconnu ; la détermination de la commission peut
être liée à « la nature de la relation » entre les parties, à « la professionnalité » ou à
« la nature des actes » à accomplir, ce qui est également adopté comme justification
par M. MAHMASSANI : «… D’ailleurs, pour de nombreux auteurs, la seule
différence qui existe entre la commission et le mandat, réside dans la nature des actes
à accomplir et la personne du commissionnaire. En effet, l’objet de la commission
doit être des actes de commerce428 et le commissionnaire doit agir à titre
professionnel429. Or la représentation commerciale, bien que définie comme mandat,
consiste en actes de commerce devant être effectués par un intermédiaire de
commerce qui agit à titre de profession habituelle… »430.
427
Art. 272 C. com. Lib. ; E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à l'exclusion du
droit maritime, op. cit., n° 1110 et s.
428
Th. DUBAELE, Commerçant, Rép. com., 2004 ; D. HOUTCIEFF, Actes de commerce, Rép.
com., 2008 ; CA administrative Nantes, 1ere Ch., 17 avr. 2006, n° 03NT01332.
429
Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, t. 3, n° 419 ; A. WAHL, Précis théorique et pratique de
droit commercial, n° 1343 ; E. TYAN op cit. p. 49.
430
M. MAHMASSANI, op. cit., p 50.
-131-
251. Nous pouvons dire que le critère pour accorder le bénéficie des dispositions
du décret-loi N. 34/67 est « la relation et le lien » entre le mandant et son
mandataire : ce qui a été adopté par M. MAHMASSANI, « … Donc ce sont les liens
qui unissent l’intermédiaire au mandant, qui, seuls doivent être pris en considération
pour décider de l’attribution ou de refus de la qualité de représentation commerciale,
et, par conséquent, du bénéfice du décret-loi N. 34. Et, si ce sont uniquement ces liens
qui doivent être pris en considération, nous nous rendons compte que ces liens
demeurent pratiquement inchangés entre mandant et mandataire selon que ce dernier
ait agi en son propre nom ou au nom du mandant… »433
431
J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de droit commercial, t. 2, D., 1966, n°
1198, p. 285.
432
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous article 1er, n° 4.
433
M. MAHMASSANI, op. cit., p.50 ; J. HAMEL, G. LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de
droit commercial, D., 1966, t. 2, n° 1198.
-132-
nom » et « pour le compte » du mandant, ne sont pas deux conditions qui doivent
obligatoirement être réunies cumulativement. De toute évidence, le critère pour
l’identification du contrat comme contrat de représentation commerciale est le fait que
l’intermédiaire mandataire ait agi pour le compte de son mandant434.
434
Art. 1 du décret-loi n° 34/67 ; Art. 279 C. com. ; M. MAHMASSANI, op. cit. : « La condition
primordiale serait que l’intermédiaire ait agi pour le compte du commettant ».
435
V. supra n° 236.
436
M.-P. DUMONT-LEFRAND., Notion de contrat de commission, J.-Cl., Contrats-Distribution,
01 Juill. 2003.
437
Cass. com., 7 mai 1962, Bull. civ., III, n° 240 ; 15 juill. 1963, Bull. civ., III, n° 378.
-133-
438
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 109 : étant personnellement partie aux contrats qu’il conclut, le contrat conclu avec le
tiers n’étant pas réputé conclu par le donneur d’ordre, il est tenu personnellement des obligations
contractées à l’égard des tiers ; M.-P. DUMONT-LEFRAND, L’opération de commission, Litec, Paris,
2000, n° 626 : « Il a été toutefois proposé de distinguer entre les effets réels de l’opération de
commission, qui se produiraient directement dans le patrimoine du commettant, pendant que le
commissionnaire resterait personnellement lié sur le plan des effets obligatoires » ; F.
AUCKENTHALER, Commettant, commissionnaires à la vente : détermination du véritable titulaire de
la créance envers le tiers contractant, D. 1998, Chron., 53 ; Cass. com., 10 fév. 1970, D., 1970, 392.
439
J.-A. VAN HOUTTE, Les courtiers au moyen âge, Rev. historique de droit français et étrangers,
Sirey, 1936, p. 110 : cité par J. BOUDAUD, Les intermédiaires du commerce en droit français et
mexicain, th., Montpellier, 2001.
440
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
-134-
258. Les courtiers servaient alors d’intermédiaires dans les transactions en les
facilitant sans prendre part aux négociations, leur fonction étant de rapprocher les
parties. D’où, l’étude des divergences (a) entre les deux droits libanais et français,
ainsi que des ressemblances (b), afin de savoir si le courtier peut bénéficier des
dispositions du décret-loi N. 34/67.
260. La distinction est tout aussi nette entre le mandat civil et la représentation
commerciale libanaise dont l’objet est la conclusion d’un contrat, et le courtage dont
l’objet est seulement de favoriser la conclusion d’un contrat projeté par le donneur
d’ordres. Le courtier français n’est donc pas assimilable à un mandataire d’intérêt
commun442 ou à un agent commercial443, et s’éloigne du représentant commercial
441
Cass. com., 13 mai 2003 : Contrats, conc., consom. 2003, comm. 124, note L. LEVENEUR.
442
Le courtier est facilement révocable, Cass. civ., 7 juill. 1987: JCP G 1988, II, 20914, obs. J.
BIGOT, mais n’a pas droit à une indemnité analogue à celle d’un mandataire d’intérêt commun, même
s’il intervient régulièrement depuis longtemps pour le donneur d’ordres, CA paris 24 juin 1963: RTD
com., 1964, p. 607, obs. J. HEMARD ; CA Rennes, 9 juill. 1974, JCP G 1975, II, 17990, obs. R.
PLAISANT : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit.
443
Cass. com., 13 oct. 1959, JCP G 1960, II, 11509, note H.T ; Cass. soc., 16 oct. 1967, D.,1967, p.
751 et pourtant l’agent commercial négocie sans forcément conclure ; Cass civ., 2 déc. 1997, JCP G
1998, IV, 157, n° 1140: cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., op. cit.
-135-
261. En outre si les règles du mandat sont applicables, cela ne veut pas dire pour
autant que le contrat de courtage est soumis au même régime juridique que le
mandat ; le courtier peut, éventuellement, aller jusqu'à effectuer les négociations
devant aboutir au contrat, mais il ne pourra jamais atteindre la phase de la conclusion,
auquel cas, il deviendra soit commissionnaire, soit mandataire simple, selon les
modalités de conclusion du contrat444 ; ce qui le distingue du représentant commercial
libanais qui a la capacité de conclure. Ainsi, il a été décidé que le contrat, par lequel
le donneur d’ordres « mandate » une personne d’effectuer les contacts et négociations
nécessaires afin de vendre un bien fonds en contrepartie d’une commission, n’est pas
un contrat de mandat mais un contrat de courtage445.
263. Dans le courtage, le contrat est conclu directement entre les parties
(fournisseur et distributeur)447, sans que le courtier s’y trouve engagé448 ; il ne saurait
en particulier être garant de l’exécution des commandes passées par les
distributeurs449 sauf le cas d’existence d’une clause, d’où l’absence de « ducroire ».
Situation différente de celle du représentant commercial libanais ou de l’agent
commercial français, où tous les deux sont garants de leurs mandants avec l’existence
de convention ducroire. Egalement, le courtier sera indemnisé même si le contrat n’est
444
M. MAHMASSANI, op.cit. p. 277 et s.
445
CA Beyrouth, 5e Ch., arrêt n° 733, 13 juin 1962, RJL, 1962, p. 251.
446
Vente de récolte agricole, Ph. DEVESA, Courtage, J.-Cl., Contrats-Distribution, Fasc. 345, n°
14.
447
TGI Strasbourg, 29 sept. 1983: JCP E 1984, cah. dr. entr., n° 2, p. 11 ; Versailles, 14 avr. 1988 :
D. 1988, inf. Rap. p. 144.
448
Cependant le courtier peut être poursuivi pour contrefaçon : Cass. com., 27 fév. 1996: RTD
com., 1996, p. 679, obs. J. AZEMA.
449
Cass. com., 28 mai 1991, Bull. civ., IV, n° 196, p. 139 ; RTD civ., 1992, 86, obs. J. MESTRE.
-136-
pas conclu à condition que ses services aient été bénéfiques pour l’une ou l’autre
partie450.
266. Le courtier est un trait d’union se bornant à rapprocher des parties qui
concluront éventuellement une convention451. C’est en ce sens qu’il faut comprendre
les dispositions de l’article précité définissant le courtage par la mission du courtier à
savoir « indiquer à une partie l’occasion de conclure une convention »452.
450
CA Beyrouth, 3e Ch., arrêt n° 401, 31 mars 1971, Rev. al Adl, 1971, p. 466.
451
Cass. com., 3 fév. 1958, D. 1958, p. 433 ; RTD com., 1958, p. 810 ; Bull. civ., III, n° 56, 3 janv.
1967, D. 1967, p. 369, Bull. civ., III, n° 40 ; CA Montpellier, 25 mars 1953, S. 1954, 2, p. 14 ; D. 1953,
p. 469.
452
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
art. 291 note 2 ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1286 et 1287.
Dans le même sens: Cass. civ. lib. 1ere Ch., n° 46, 27 mars 2001, Rec. Sader 2001, p. 60 ; n° 26, 6 avr.
1962, RJL, 1962, p. 223.
-137-
b.1- L’exposé
453
Par conséquent, l’intermédiation suppose que le courtage porte sur les biens d’autrui et non pas
sur ceux du courtier : Cass. civ. Lib., 5e Ch., n° 41, 19 mars 2002, Rec. Sader, p. 400, 401.
454
CE, 6 juill. 1994, req. n° 116079.
455
Art. 295 C. com. : « Le courtier ne peut s’entremettre pour des personnes notoirement
insolvables ou dont il connaît l’incapacité ».
456
Ass. plén., 8 janv. 1993, JCP, G 1993, II, 22040, note Y. SAINT-JOURS : sans contrôle
hiérarchique, sans obligation de reddition de compte, sans quota ni secteur affecté, le courtier ne saurait
être affilié à la sécurité sociale. En retour, sa subordination au donneur d’ordres entraine requalification
du contrat en contrat de travail, Cass. soc., 12 mai 1948, Bull civ., III, n° 508 ; RTD com., 1949, p.
362, note J. HEMARD: liste des clients à démarcher fournie par le donneur d’ordre et reddition des
comptes exigée par lui: cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 272.
-138-
clientèle, pour son donneur d’ordre, mais qui, au contraire reçoit une liste de clients à
démarcher et doit rendre compte de son activité à intervalles réguliers, risque de ne
pas être considéré comme un courtier457.
457
Cass. soc., 12 mai 1984, op.cit.
458
Cass. soc., 26 fév. 1959, Bull. civ. IV, n° 307 ; Cass. soc., 8 nov. 1967, Bull. civ., IV, n° 701.
459
CE, 4e sous-sect., 13 nov. 1931, req. n° 17150, DUPONT 1932, p. 171.
460
CE, 9e sous-sect., 25 mars 1966, req. n° 67178, DUPONT 1966, p. 289.
461
Cass. com., 15 oct. 1996, JCP, 1997, 2e éd. G., p. 921, note F. POLLAND-DULIAN
462
V. infra n° 277 et s.
-139-
l’acte de courtage, étant commercial en droit libanais463 et français464, quel qu’en soit
l’auteur ou quel qu’en soit l’objet465, ne peut pas être accompli par ceux à qui la loi ou
le statut professionnel interdit d’accomplir des actes de commerce comme le
notaire466, l’avocat467, l’huissier. Nous ne pouvons pas, à cet égard, rétorquer que
l’objet du mandat doit obligatoirement être un acte juridique468, car en droit libanais,
l’objet du mandat peut, à titre principal, consister simplement en faits469.
463
L’article 6 du code de commerce libanais répute acte de commerce par sa nature
propre « l’entreprise de courtage ».
464
L’art. L 110-1 al. 7 C. com. déclare, entre autres, acte de commerce, toute opération de courtage.
465
Même lorsque son objet est civil, le courtage est considéré comme acte de commerce: vente de
récolte agricole, Ph. DEVESA, Courtage, J.-Cl. Contrats -distribution, Fasc. 345, n° 14, D. FERRIER,
Droit de la distribution, op.cit, n° 270.
466
Art. 38 de la loi libanaise n° 337 du 8 juin 1994.
467
Art. 15 de la loi libanaise du 11 mars 1970 relative à la réglementation de la profession d’avocat.
468
« L’élément qualifiant du contrat de mandat est la conclusion d’un plusieurs actes juridiques au
nom et pour le compte du cocontractant » : F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en
droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 155 ; J. HUET, Les principaux contrats
spéciaux, 3e éd., LGDJ, 2012, n° 31109 et s.
469
Art. 769 C.O.C, al. 1, dispose ce qui suit: « le mandat est un contrat par lequel le mandant
confie au mandataire qui accepte la charge de gérer une ou plusieurs affaires ou accomplir un ou
plusieurs actes ou faits ».
470
T. com. Seine, 14 mars 1894, Gaz. trib., 13 mai 1894: cité par D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., note 456.
471
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 188.
472
Lorsqu’il exerce bien sur l’activité de courtage à titre professionnel et donc habituel, art. L. 131-
1 et L. 131-5 C. com.
-140-
réitération professionnelle des opérations de courtage donne à celui qui les accomplit
de manière habituelle la qualité de commerçant473. Il effectue des actes de commerce
dans le cadre de sa mission qui consiste en le rapprochement des parties. Par contre, le
texte libanais est légèrement différent en prévoyant une conception subjective tout en
rejoignant la solution française.
473
Cass. com., 24 janv. 1984, Bull. civ., IV, n° 27, 3 avr. 1984, JCP, 1984, 4e éd., G., 184 ; Cass.
civ. lib., 14 nov. 1967, Rev. al Adl, 1968, p. 412.
474
Lorsqu’il exerce bien sur l’activité de courtage à titre professionnel et donc habituelle, art. L.
131-1 et L. 131-5 C. com.
475
Et aussi considéré représentant commercial, le commerçant qui…
476
Ph. DEVESA, L’opération de courtage: un groupe de contrats au service de la notion
d’entremise, préf. J.-M. MOUSSERON, Litec, 1993, n° 464.
477
J.-J. HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230,
1991, n° 39.
478
C. DILOY, Le contrat d’agence commerciale en droit international, préf. L. PEYREFITTE,
LGDJ, 2000, n° 54 et 55; D. FERRIER, Droit de la distribution, 5e éd., Litec, 2009, n° 270, note 404 :
-141-
tous moyens appropriés, les occasions de conclure des contrats, autrement dit, un
rôle de recherche de clientèle… »481.
279. Tandis que MM. les professeurs FABIA et SAFA, considèrent que le
courtier ne pourra prétendre jouir du statut de représentant que s’il agit avec
exclusivité482. Or, la condition d’exclusivité est une condition essentielle
supplémentaire que doivent remplir les personnes visées à l’alinéa second de l’article
premier du décret-loi N. 34/67. Et comme nous l’avons dit au sujet des
commissionnaires, elle n’est nécessaire que lorsqu’il s’agit d’intermédiaires du
commerce non-mandataires. Mais comme la qualité de courtier en tant que mandataire
est discutable en doctrine libanaise, c’est l’alinéa premier du même article qui lui
pourrait être applicable sans besoin d’exclusivité.
281. Mais à notre avis, il résulte des dispositions de l’alinéa premier du l’article
précité, que le sujet de la représentation commerciale peut être, soit la négociation
pour conclure des opérations de ventes ou d’achats, soit la négociation afin de
conclure des opérations de locations ou bien la négociation pour conclure des
opérations de prestations de services. C'est dire que le représentant négocie
l’opération et éventuellement la conclut, en mentionnant que le terme « négocie » de
l’article premier du décret-loi N. 34/67 a, quand même, une signification plus large
que ce même terme utilisé à l’article 291 du Code de commerce, puisqu’il est utilisé
afin de permettre son application à tout intermédiaire de commerce mandataire
agissant à titre de profession habituelle et réunissant les diverses autres conditions.
481
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, p. 468, n° 1306.
482
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit., n° 6.
483
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 53.
-143-
484
Cass. civ., n° 58, 28 mai 1964, RJL 1964, p. 922.
485
E. TYAN, op.cit., nº 1286 : « …le courtage est un mandat par lequel une personne…», et n°
1287 : « …on analyse généralement le courtage en un mandat… ».
486
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 107.
487
CA Lyon, 15 juin 1988, D. 988, IR 237 ; CA Reims, 12 juin 1985, RTD com., 1986, 292, obs. J.
HEMARD et B. BOULOC, Gaz. Pal., 111985, 2, 64, note J. ROZIER ; Cass. com., 21 déc. 1953, RTD
com., 1955, 377, obs. J. HEMARD.
488
« Si l’analogie peut paraitre en soi pertinente, elle ne peut être juridiquement fondée du fait
qu’elle méconnaîtrait alors la différence fondamentale entre l’agent commercial, lié à son commettant
par une relation d’affaire constante, alors que le courtier, même s’il n’intervient pas toujours de
manière seulement occasionnelle, mais parfois pendant une courte durée pour le compte de son
donneur, ne peut prétendre être considéré comme économiquement intégré à l’entreprise » : J.-J.
HANINE, Agents commerciaux- Qualité d’agent, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1230, 1991.
-144-
284. Mais en tant qu’intermédiaire dans les négociations, nous pouvons déduire
que le courtier participe à ces négociations pour le compte de son donneur d’ordre
sans la capacité de conclure le contrat490, ce qui a été précisé dans les dispositions du
courtage par l’article 293 du Code de commerce dans son troisième alinéa : « Le
courtier a droit à sa rémunération dès que les données qui les a présenté ou les
négociations qui les a effectué aboutissent à la conclusion du contrat ». En ce sens, il
faut comprendre le terme « négocie » comme visant toute démarche effectuée par le
courtier auprès du tiers relativement à l’affaire proposée, même si aucun accord n’a
pu être atteint avant l’intervention du commettant491.
285. A notre avis, cette capacité de négociation issue des dispositions l’art. 293
al.1 C. com. lib., est moins faible que celle du représentant commercial qui négocie
dans le vrai sens du mot, car elle est limitée à la discussion des offres des contrats. En
d’autres termes c’est une négociation qui reste sous la forme du contrat sans discuter
les détails tandis que celle dont jouit le représentant commercial est une négociation
qui peut englober le contenu du contrat et ses conditions afin d’aboutir parfois à une
conclusion. Donc le pouvoir de négociation pour le compte d’autrui est commun entre
les deux droits libanais et français, le courtier se bornant, à négocier les offres de
fournisseurs pour obtenir des conditions de vente intéressantes au profit des
distributeurs qui de leur côté sont libres de contracter492.
286. Par conséquent, nous dirons que le courtier libanais, du seul fait qu’il soit
commerçant et qu’il jouit d’une certaine exclusivité, en agissant à titre de profession
489
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 89 ; S.
MOUGHARBEL, Droit commercial Libanais, éd. Dar al Kitab, 2001 ; E. NASSIF, L’intermédiaire en
droit commercial, éd. Al Halabi, 1996.
490
Cass. com., 13 oct. 1959, Gaz. Pal.,1959, 2, 286.
491
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 55.
492
CA Bordeaux , Ch. civ., 05 n° 11/06411 - 07 déc. 2011 ; CA Nîmes, Ch. 02 B, n° 10/03525 - 01
déc. 2011 ; Cass. com., 27 oct. 2009, n° 08-16623 ; CA Poitiers, Ch. civ., 01, n° 08/02335 - 20
nov. 2009 ; J.-M. PARDESSUS., Cours de droit commercial, 6e éd., t. 1, Libr. de Jurisprudence de
TARLIER H., 1836, p. 77, numérisés.
-145-
289. Une distinction se fait avec d’autres intermédiaires mais pas toujours
évidente, où suivant les points communs on pouvait étendre le décret-loi N. 34/67 au
commissionnaire et au courtier. Après avoir développé ce premier titre, il s’agit
d’exposer dans un deuxième titre, la seconde image, accessoire, de l’article précité en
son deuxième alinéa, formée par « l’agissement pour son propre compte ».
TITRE SECOND
493
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
494
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301: « Les exceptions sont d’interprétations stricte » ; p. 196 : « La loi
spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
495
Adage classique juridique latin signifiant que l’exception est d’interprétation très stricte.
496
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de
pharmacie c/ Compagnie suisse Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 22.
497
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 170 : «
…l’extension apportée par l’alinéa second de l’article de l’article premier doit être interprétée
restrictivement ».
498
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 : « Vu
que le décret-loi de la représentation commerciale est un droit protecteur, imposant dans la pluparts
de ses dispositions. Il a pour objet d’une manière principale la protection du représentant commercial
contre l’abus des firmes productrices économiquement fortes ».
-149-
294. Analysons ce deuxième alinéa ; nous trouvons qu’il est une dérogation à la
définition générale du représentant commercial -mandataire agissant pour le compte
d’autrui- du fait qu’il introduit une nouvelle catégorie de personnes qui, tout en
agissant pour leur propre compte, bénéficient de la protection du décret-loi N. 34/67.
Ces personnes ayant la même caractéristique qui est la qualité commerciale. Cette
qualité est en lien avec la question de nationalité, qui toutes les deux marquent une
originalité en droit libanais ainsi que signalé dans les derniers alinéas de l’article
premier du décret-loi N. 34/ 67 ce qui suit:
499
Idée inspirée de la thèse de M. LICARI sur la protection du distributeur intégré en droit français
et allemand, où l’agent commercial est considéré par la doctrine allemande comme le prototype du
distributeur intégré : F.-X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand,
préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 23.
500
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
501
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 67.
-150-
b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la
majorité du capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du
conseil d’administration et son directeur général, ou que la personne déléguée par le
président du conseil d’administration ou par le directeur général pour toutes ou
certaines fonctions de direction, soient tous des libanais ».
502
M. MENJUCQ, Droit commercial et des affaires, 7e éd., LGDJ, 2011, p. 35 : « Comme
l’obtention d’une carte de commerçant étranger, sauf s’ils détenaient la carte de résident ou s’ils
bénéficiaient d’un traité international conclu entre l’Etat national et la France comme c’était le cas
pour les ressortissants de l’Union européenne et d’un certain nombre de pays d’Afrique
francophone » ; En d’autres termes, contrairement à son voisin libanais, le législateur français n’a pas
insisté sur l’obligation d’avoir la nationalité française pour la majorité des associés ou du capital ou du
gérant, puisque les associés en nom collectif et commandités ont la qualité des commerçants. Et attendu
que les étrangers en droit français peuvent être des commerçants sous certaines conditions, alors que la
question de nationalité citée par le droit libanais ne trouve pas de place en droit français, qui considère
même les sociétés nationalisées (La France a connu deux vagues de nationalisations: En 1945 : La
Banque de France, Crédit Lyonnais et les sociétés d’assurances… ; En 1982 : 5 sociétés industrielles,
39 banque de dépôt et 2 compagnies financières) comme commerçantes suivant leur qualification de
sociétés commerciales par la forme, qui généralement, ont conservé leur statut de sociétés anonymes et
-151-
297. La doctrine reste toutefois très partagée sur la question507. En l'état actuel la
jurisprudence a toujours persisté dans le refus de reconnaître à l’agent commercial la
restent soumises de point de vue de leur gestion, au Code de commerce (Cependant la loi du 26 juill.
1983 a instauré, dans les sociétés nationalisées et les EPIC, un régime de congestion, les représentants
du personnel siégeant dans les conseils d’administration et les conseils de surveillance).
503
E. TYAN, op.cit., p. 469, n° 1307 : est d’avis pour ne pas reconnaître au représentant
commercial la qualité de commerçant, à moins qu’il ne soit organisé en entreprise de représentation de
plusieurs maisons.
504
Art. L. 146-1 C. com.
505
Tenu au greffe du tribunal de commerce, prévue par l'art. 4 du décret n° 58-1345 du 23 déc.
1958. Ce registre spécial étant distinct du registre du commerce et des sociétés prévu par le décret n°
84-406 du 30 mai 1984.
506
CA Amiens, 17 fév. 1960, Gaz. Pal., 1960, 2. 18 ; Critique de J. HEMARD, RTD com., 1960, p.
623, n° 9. Dans cet arrêt, la Cour reconnaît la non-validité de la clause compromissoire étant donné que
le contrat n’est pas commercial, l’agent n’étant pas un commerçant. Cette décision est conforme à de
nombreuses autres décisions dont : CA Paris, 11 juin 1947, JCP, 1947, II, 3840 et s. 1949.2.27, note H.
SOLUS ; CA Lyon, 11 fév. 1952, D., 1952, 222 ; CA Paris, 29 juin 1956, JCP, 1956, II, 9524, note
MOTULSKY.
507
Pour certains auteurs, en effet, les agents commerciaux sont tous commerçants (d'après les droits
allemand, Belge et Néerlandais, des commerçants : K.-J. HOPT, L'entreprise et le droit européen,
quelques réflexions sur la réglementation européenne de l'activité et de l'organisation de l'entreprise,
Revue des sociétés, n° 2, 01/04/2001, p. 301.) car ils agissent, à la manière des commissionnaires et des
courtiers, en intermédiaires professionnels et indépendants ; ils peuvent, de surcroît, engager des sous-
agents (Cf. R. HOUIN et M. PEDAMON, Droit commercial, 9e éd., D., 1990, n° 625 et 627 ; Sans
doute, l'agent commercial ne passe pas d'actes juridiques en son nom personnel mais c'est aussi le cas
des courtiers qui ont pourtant la qualité de commerçant en vertu de l'art. 632 C. com. Et si la loi traite le
courtier de commerçant parce qu'il agit comme intermédiaire, de façon professionnelle et indépendante,
la même solution devrait être donnée pour les agents commerciaux dont le mode d'activité n'est pas sur
ce point différent (En ce sens J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, 573, n° 22).
Cette décision a été critiquée très lucidement par M. le professeur GUYON (Y. GUYON, Droit des
affaires, Droit commercial général et sociétés, 12e éd., Economica, t. 1, 2003, n° 812, p. 847 et s.). La
situation d'intermédiaire du commerce ne conduit pas forcément à l'attribution de la qualité de
commerçant agissant à titre de profession indépendante qui négocie et conclut éventuellement des
contrats pour le compte d'une ou plusieurs entreprises-mandantes. La qualité de mandataire, qui impose
-152-
qualité de commerçant508, sauf à établir qu'il exerce une activité commerciale à son
compte distincte de celle exercée au nom du producteur, du l'industriel ou du
commerçant le mandant509 : le cas échéant, il rejoint le représentant commercial -
commerçant suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67-
qui encore, peut effectuer des opérations commerciales pour son propre compte en
recueillant un gain résultant de la totalité du prix des produits vendus510.
la nature civile de sa profession, justifie que l'agent commercial ne soit pas non plus considéré comme
un commerçant, même si la solution ne s'est pas affirmée rapidement (Les conséquences de la nature
civile de la profession s'expriment dans les domaines administratif, fiscal et judiciaire) : J.-M.
LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 32.
508
CA Nîmes, Ch. soc., 25 janv. 2011, n° 10/03938 ; CA Nîmes, 18 nov. 2010, n° 09/05195 ; CA
Rennes, Ch. 02 com., 3 déc. 2008, n° 07/06832 ; CA Versailles, Ch. 06, 13 juin 2006, n° 05/05684 ;
CA Montpellier, Ch. 02 A, 9 mai 2006, n° 05/01344 ; Cass. com., 29 oct. 1979, Bull. civ., IV, n° 266 ;
Gaz. Pal. 1980.1.87, note J. DUPICHOT ; D. 1980.69 ; RTD com., 1980.814, obs. J. HEMARD ; JCP
1981.II.19591, note VINCENS ; CA Bordeaux, 13 nov. 1979, Gaz. Pal. 1980.2.672, note J.-
J. HANINE; CA Amiens, 17 févr. 1960, Gaz. Pal., 1960.2.18.
509
Un débat ancien qui s'est cristallisé sur la question de savoir si les agents commerciaux ont ou
non la qualité de commerçant : le juge de Montfort-sur-Meu a débouté l'administration fiscale au motif
qu'il n'était pas établi que l'intéressé, agent commercial, exerçait une activité commerciale pour son
propre compte, distincte de celle exercée au nom du l'industriel, du producteur ou du commerçant
l'ayant mandaté (TI Montfort-sur-Meu, 22 oct. 1990, n° XTIMM221090X, Recueil Dalloz 1992, p. 102
). Devant le silence des textes, certaines juridictions avaient retenu, par analogie de situation à l'égard
du courtier ou du commissionnaire, la qualification de commerçant de l'agent commercial, en tant
qu'intermédiaire professionnel, étroitement associé à la vie des affaires : CA Amiens, 13 juill. 1977,
JCP 1979. II. 19163, note J. HEMARD, RTD com., 1979.504, note J. HEMARD, et 1979.697, obs. J.
DERRUPPE.
510
L. MATAR, Encyclopédie du droit Commercial, éd., La société moderne du livre, t. 1, 2004, p.
227.
511
B. BOULOC et P.-L. CHATAIN, Un agent commercial, qui n’est pas commerçant de fait,
bénéficie de la loi n° 89-1010 du 31 déc. 1989, D., 1992, p. 102.
512
Th. DUBAELE, Commerçant, Rép. Com., 2004.
513
G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 156 ; B.
SAINTOURENS, Les nouvelles obligations déclaratives de l'agent commercial lors de sa demande
-153-
puisqu’il ne fait pas d’actes de commerce en son nom et pour son compte, c'est dire
qu'il n'achète pas les marchandises, ni ne reçoit la rémunération des ventes qu'il aura
effectuées, et ne s'engage pas pour le compte de l'entreprise. Mais au contraire il sera
rémunéré pour ses services et au taux des différents contrats conclus par l'entreprise
qui l'embauche ; en effet, son activité n’est donc pas commerciale mais civile514.
d'immatriculation, (Décr. n° 2007-750 du 9 mai 2007 relatif au registre du commerce et des sociétés et
modifiant le code de commerce, J.O 10 mai 2007), RTD com., 2007 p. 674 ; Y. SERRA, L'agent
commercial n’est pas un commerçant et il ne peut donc lui être opposé une clause attributive de
compétence au tribunal de commerce, D. 1996 p. 247.
514
Cass. com., 24 oct. 1995, Bull.1995, IV, n° 258, p. 238 ; n° 248, p. 228.
515
Cass. com., 6 mars 2001, JCP, 2001, p. 28, obs. Ph. GRIGNON.
516
J.-J. HANINE, L’agent commercial est-il un commerçant? Qualité d’agent, op.cit.
517
Ph. PETEL, Les agents commerciaux, Colloque du 20 avr. 1992 sur « La force de vente de
l’entreprise et le droit de travail, Institut d’Etude européennes et Internationales sur le travail, faculté de
Montpellier, Litec, 1992, cité par D. FERRIER op. cit. ; C. com., art. L. 134-1 à L. 134-17 ; anc.
L. no 91-593 du 25 juin 1991, D. 1991.276 ; J.-M. LELOUP, La loi du 25 juin 1991 relative aux
rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants ou le triomphe de l'intérêt commun, JCP,
éd. E, 1992. I. 105.
518
Cass. com., 26 fév. 2008, D., 2008, pan. p. 1296, note D. FERRIER, à propos d’un contrat de
commission-affiliation précise que la qualification d’agent commercial est incompatible avec celle de
commerçant indépendant car l’agent commercial n’a pas de clientèle attachée à son activité mais
intervient auprès de la clientèle du mandant.
-154-
301. Aussi, ne pouvons-nous imaginer cette qualité attribuée à une société civile
de fait ou de droit, à peine de porter atteinte aux intérêts des tiers qui contractent avec
elle. En revanche, l’activité de commercialité est concrétisée souvent et notamment,
suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 par « l’achat
pour revendre »519, qui, à son tour, est réalisé en vertu d’un contrat conférant la qualité
de représentant ou de distributeur exclusif unique. Deux catégories de personnes
forment les sujets de notre développement : soit le commerçant ayant la qualité de
représentant -ce sera notre premier chapitre-, soit le commerçant ayant la qualité du
distributeur exclusif -ce sera notre deuxième chapitre-.
519
L’acte le plus courant du commerce qui, par nature est visible dans le secteur de la distribution :
G. BERGER-WALLISER et A. MOES, Les conditions d'accès au marché français pour les opérateurs
économiques étrangers, non ressortissants communautaires, D., 2009, p. 669.
-155-
PREMIER CHAPITRE
LE COMMERCANT -REPRÉSENTANT-
520
Sur l'impossibilité de la preuve par tous moyens de la modification de la rémunération prévue
par un bon de commission, V. Cass. com., 24 oct. 1995, Bull. civ., IV, no 248, RTD com., 1996, 235,
obs. J. DERRUPPE ; sur la nullité d'une clause attributive de compétence au tribunal de commerce,
V. Cass. com., 24 oct. 1995, D., 1995, IR 247, D. Affaires 1995.197.
521
Ph. GRIGNON, Distribution, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 58 ; D. FERRIER, Concurrence-
Distribution, D., 2012 p. 578, n° 3 ; A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément
d'appartenance du fonds, D., 2012, Ch. 13, n° 171.
522
T. DJEDJE, Stratégie de développement pour une PME en restauration rapide, ESC Bordeaux -
MBA Commerce et Marketing 2008, B, n° 1 ; D. BASCHET, Le contrat de commission- affiliation,
www.acfranchise.tv/fr.
523
Y. SERRA, Agent Commercial, D., 1996, p. 247.
-156-
divergences des deux cas dans une première section, afin d’exposer dans une
deuxième les ressemblances qui pourront l’étendre au décret-loi N. 34/67.
-157-
SECTION 1
LES DIVERGENCES
304. Curieux contrat, pour lequel les recherches dans les banques de données de
jurisprudence ne donnent aucun résultat, comme s’il échappait au contentieux alors
que la pratique contractuelle montre que ce contrat est usuellement utilisé. De là, nous
trouvons la grande différence avec la représentation commerciale en droit libanais où,
un texte législatif spécial s’est prévu à ce titre.
524
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION», op.
cit.
525
La Fédération Française de la Franchise admet la compatibilité de ces contrats avec les contrats
de franchise pour autant, que le contrat respecte l’indépendance juridique et financière du
commissionnaire, ce qui suppose notamment une marge de manœuvre dans l’établissement des prix de
vente, prévoie une licence d’enseigne au commissionnaire, la communication d’un savoir-faire et d’une
assistance. Tout cela montre bien que l’on est assez proche du contrat de franchise.
526
R. BOUT, M. BRUSCHI, S. POILLOT-PERRUZETTO et M. LUBY, Droit économique, Lamy,
2005, n° 3896 : Exemple d’enseigne appliquant la commission-affiliation : Etam, Body One, Mango.
-158-
308. En d’autres termes, les contrats de l’affaire sont conclus pour le compte du
commettant. Cet élément est banal ; il ne permet en aucune façon de distinguer si la
convention est constitutive d’un contrat de mandat ou d’une opération de commission
puisque ce critère est commun à ces deux formes d’intermédiation, comme cela a déjà
été montré. La commission se trouve ainsi transplantée dans un domaine pour lequel
elle n'a pas été originairement conçue. Le commissionnaire traditionnel vend, de
manière ponctuelle, pour le compte d'un commettant dont le nom, en principe, n'est
pas révélé. Il est un intermédiaire opaque. Le commissionnaire-affilié, lui, est un
collaborateur permanent qui vend les produits d'une entreprise disposant d'une
enseigne nationale ou internationale, entreprise nécessairement portée à la
connaissance des acheteurs. Il est un intermédiaire transparent : solution différente du
celle du représentant commercial, commerçant ayant la qualité d’un représentant et
non d’un intermédiaire. La révélation du nom du commettant ne modifie pas, certes,
527
Art. 1101 c.civ. fr. : « Le contrat est une convention par laquelle une ou plusieurs personnes
s'obligent, envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose ».
528
Art. 165 C.O.C : « L’accord étant chaque union entre deux volontés afin de créer des effets
juridiques, et dans la mesure où il a pour but la construction de relations obligatoires, il est nommé
contrat ».
529
Cass. com., 20 mai 1997, RJDA 10/1997, n° 1187 ; Cass. com., 3 janv. 1995, RJDA 4/1995, n°
425 ; Cass. com., 22 mai 1991, Bull. civ., III, n° 173 ; Cass. com., 21 juin 1982, Bull. civ., IV, n° 235,
JCP G, 1982, IV, 314 ; Cass. com., 10 fév. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Cass. com., 3 mai 1965 Bull.
civ. III, n° 280 ; Cass. com., 3 mai 1965, Bull. civ., III, n° 280 ; Cass. com., 19 mars 1958, JCP 58, éd
G, IV, 66.
-159-
309. En outre, une autre distinction est utile : elle concerne la propriété des
produits vendus. Attendu que le commissionnaire-affilié n’acquiert pas la propriété
des marchandises qu’il s’occupe de commercialiser532, quand, le représentant
commercial au sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N.34/67,
acquiert la propriété des marchandises vendues, en tant que acheteur-revendeur
comme nous l’avons évoqués ci-haut. Sur cette base, plusieurs questions attirent notre
attention : Comment la personne désignée au deuxième alinéa de l’article premier va-
t-elle posséder deux qualités presque contradictoires : celle d’un commerçant et celle
d’un représentant ? Et le cas échéant, rejoint-elle la définition du premier alinéa en
tant que représentant? En d’autres termes, peut-on, en son nom et pour son compte,
vendre des produits en qualité de représentant ?
530
F. COLLART-DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 5e éd., D.,
2000, n° 667.
531
P. CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012, n° 107.
532
Cela confirme la thèse de la représentation réelle qui caractérise le contrat de commission. v. M.-
P. DUMONT-LEFRAND, L’opération de commission, préf. J.-M. MOUSSERON, Litec, Paris, 2000,
spéc. no 265 s. ; R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l'intermédiation, RTD com.,
2011, p. 215 : « Au regard du transfert de propriété des marchandises vendues, le commissionnaire est
totalement transparent puisque le commettant reste le propriétaire des marchandises ».
533
Dans l'intention de revendre : l'intention suffira, même si, par la suite, la revente n'a pas eu lieu.
Inversement, de même la revente ne constituera pas un acte de commerce si l'achat n'a pas été fait dans
l'intention de revendre: E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la
doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005 ; Sera acte de commerce
également, l'achat fait dans l'intention de louer ; E. EID et Ch. EID, Droit commercial, éd. Sader,
-160-
profession : en tant que métier, la recherche du gain pour vivre sera l’acte de volonté
essentielle.
311. Donc cet acte de commerce signalé dans le décret-loi N. 34/67, pèse sur la
qualité de « commerçant » devant celle de « représentant » muni d’un contrat.
L’essentiel est que la personne doit être un commerçant avant l’existence d’un certain
contrat lui conférant la qualité de « représentant ». Nous constatons que cette dernière
est secondaire et formelle devant la qualité de « commerçant ». En d’autres termes,
l’intention ambiguë du législateur est, en priorité, la recherche de la qualité de
« commerçant » pour l’octroi de la qualité de représentant commercial au sens du
deuxième alinéa de l’article premier, afin de savoir ensuite si l’activité de représentant
englobe totalement l’activité du vendeur.
Beyrouth, t. 1, 2007, p 156 ; F. ATOUI, Droit commercial, éd. Maison des sciences arabes, Beyrouth, t.
1, 1986, p. 86.
534
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION », in
mél. Ph. LE TOURNEAU, Rép. civ. Dalloz, 2007 : « Une telle transformation n’est pas de nature à
écarter le taux de litige mais simplement, en principe toujours, la lourdeur systématique de la charge
d’indemnisation ».
535
R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l'intermédiation, RTD com., 2011, p.
215.
-161-
SECTION 2
LES RESSEMBLANCES
536
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 39 : « ...Si l’agent commercial exerce son activité sous formes de société commerciale,
ce qui sera fréquemment le cas, il se verra alors bien entendu soumis aux règles du droit commercial ».
537
F. COLLART DUTILLEUL et Ph. DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9e éd., D.,
2011, n° 678 : « La nature civile de la profession d’agent serait donc imposée par la qualité de
mandataire de l’agent ».
538
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6 éd., Defrénois, 2012,
n° 538 ; D. FERRIER, La commission-affiliation : Charybde ou Scylla ? D., 2008 p. 2907 ; Cass. com.,
7 oct. 1997, JCP 1998, II, 10201, note O. LITTY.
539
On s'est parfois demandé si le privilège de l'article L. 132-2 pouvait bénéficier au
commissionnaire occasionnel. Certains l'ont nié, estimant que seul le commissionnaire professionnel
pourrait s'en prévaloir (Ch. LYON-CAEN et L. RENAULT, Traité De Droit Commercial., t. 3,
no 486 ; J. HEMARD, op. cit.). D'autres auteurs estiment que rien ne justifie une telle exclusion ; R.
PALLARD, Les Obligations du commettant et les garanties du commissionnaire, D., 1949 p. 137).
C'est d'ailleurs la solution retenue par la jurisprudence qui accorde le bénéfice du privilège à l'acte isolé
de commission, même s'il n'a pas le caractère commercial (Req. 14 juin 1877, DP 1878. 1. 475 ; CA
Agen, 8 juill. 1867, S. 1868. 2. 101).
540
F. AUQUE, La commission- affiliation, AJDI, 2001, p. 1059.
541
M. CABRILLAC, Remarques sur la théorie générale du contrat et les créations récentes de la
pratique commerciale, in Mél. Marty, Université des sciences sociales de Toulouse, 1978, p. 259.
542
A. LANVIN, Affiliation ou franchise ?, Franchise Magazine, fév. 1996, n° 132.
-162-
« Attendu qu’il ressort de l’examen des pièces versées aux débats que l’affilié agit
de manière autonome, que les ventes sont faites pour le compte de Chattawak, que
l’affilié encaisse le produit des ventes en versant ces montants sur un compte
bancaire ouvert au nom de Chattawak, que le tarif est établi par Chattawak, qu’une
exclusivité est instaurée, que les marchandises restent la propriété entière et exclusive
de Chattawak ; le tribunal dira que la société Chantal Pieri a reçu un mandat de
543
G. AMEDEE-MANESME, La politique des prix et la commission-affiliation : un juste équilibre
à trouver, D., aff., 1999,1160.
544
D. MAINGUY et J.-L. RESPAUD, A Propos du contrat « COMMISSION-AFFILIATION », in
mél. Ph. LE TOURNEAU, Rép. civ. Dalloz, 2007.
545
F.-L. SIMON, Théorie et pratique du droit de la franchise, éd. Joly, 2009, spéc. n° 19.
546
R. VABRES, La valorisation du fonds de commerce par l’intermédiation, RTD com., 2011, p.
215.
-163-
317. Dans cette affaire, un ancien affilié Chattawak, suite à la rupture du contrat
de commission-affiliation, avait demandé au juge la requalification dudit contrat en
contrat d'agence commerciale, l'enjeu étant l'obtention de l'indemnité de rupture
accordée à tout agent commercial pour un montant équivalent à au moins deux années
de commissions à hauteur de 145 000 euros. Par arrêt du 13 septembre 2006, la Cour
d'appel de Paris avait confirmé la requalification en invoquant les conditions de
forme: l'affilié ne communiquait que sous le nom de l'enseigne et sa raison sociale,
son numéro RCS ne figurant pas sur les tickets de caisse.
319. Or, par arrêt en date du 9 avril 2009547, la Cour d'appel de Paris a confirmé
la requalification du contrat en contrat d'agent commercial. L’un des motifs était que
les prix lui étaient imposés, absence du pouvoir de négocier qui pourtant en matière
d’agence commerciale écarte le statut. En effet, nonobstant la clause relevée par la
Cour de cassation, la Cour d'appel a jugé à l'occasion de son second arrêt : « Il résulte
des éléments versés aux débats et dont l'essentiel a été rappelé plus haut, que la
plupart des éléments susceptibles de composer le fonds de commerce appartenaient à
la société Chattawak ou étaient étroitement contrôlés par celle-ci, spécialement
l'enseigne, le matériel et le stock ».
547
Arrêt rendu sur renvoi après cassation 26 fév. 2008, pourvoi n° C-06. 20.772.
548
Cass. com., pourvoi n° 09-66773, 29 juin 2010.
-164-
549
J.-P. MAUBLANC, Notification de l'avis de la commission le jour de l'émission de l'avis de mise
en recouvrement et assimilation de l'exploitation de l'immeuble à un défaut d'intention de revendre,
AJDI, 2008 p. 603 ; I. NAJJAR, L'« ensemble contractuel » sur sa lancée..., D., 2005, p. 1105.
550
S. BERNARD, L'amusante « commission-affiliation » provoque la confusion, D., 2010, p. 687.
551
Ce litige et les arrêts de cour qui se succèdent depuis 2006 vous ont-ils amené à changer vos
pratiques sur le terrain avec vos commissionnaires-affiliés s’agissant des méthodes d’encaissement, de
-165-
323. Un agent commercial ne ferait pas moins ni mieux. Si nous voulons bien
admettre que la révélation du nom du mandant ne suffit pas à écarter la qualification
de commissionnaire, encore faut-il, pour que tout ceci soit un peu crédible, que les
consommateurs cocontractants puissent identifier celui qui est censé être le « vendeur
», agissant « en son propre nom » : solution identique de celle du représentant
commercial au sens du deuxième alinéa du décret-loi N. 34/67 qui, en tant que
commerçant, acquiert la qualité de « vendeur » après avoir entrepris de vendre ce
qu’il aura acheté. Mettre en avant la réalisation des opérations par le distributeur « en
son nom » pour en déduire la qualification de commissionnaire apparaît, dans le
contexte visé, comme relevant de l'incantation plus que de la démonstration. La Cour
d'appel de renvoi pourrait donc tout à fait répondre à cette demande de la Cour de
cassation sans devoir en inférer que l'on est bien en présence d'un véritable mandataire
au sens de l'article L. 132-1 du Code de commerce552.
facturation, voire de fixation des prix de vente en magasin ? Question posée au président de la société
Chattawak, S. CHOMARAT, Franchise-Magazine.com, 30 juin 2010.
552
D. FERRIER, Concurrence- Distribution, D., 2011, p. 540.
-166-
325. Alors que le fait qu’elle soit titulaire d’un bail commercial est un élément
essentiel pour déterminer si celle-ci avait la qualité de commerçant qu’un agent
commercial ne peut posséder. Contre la décision de la Cour d’appel, la Cour de
cassation556 rejette de nouveau la qualification d’agent commercial. Dans son arrêt,
elle souligne que « le fonds de commerce est une universalité de fait, qui peut
comprendre divers éléments, au nombre desquels cumulativement ou non, la clientèle,
le droit au bail, l’enseigne, le matériel, le stock, des marques, des licences ». Elle
ajoute que « la plupart des éléments susceptibles de composer le fonds de commerce
appartenaient à la société Chattawak ou étaient étroitement contrôlés par celle-ci,
spécialement l’enseigne, le matériel et le stock ».
553
A.-L. ALLAIN, Chattawak : l'affiliation sans contrefaçon, Franchise-Magazine.com, Succès et
Dérapages, publié le 12 mars 2008.
554
F. FARKAS, Affaire Chattawak : La Cour de cassation remet les pendules à l’heure dans son
arrêt du 29 juin 2010, www.franchise-land.com
555
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 89.
556
Cass. com., pourvoi n° 06-20772, 26 fév. 2008.
-167-
557
D. FERRIER, Requalification d'un commissionnaire-affilié en agent commercial : épilogue, D.
2009, p. 1942.
558
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 89 ; A.
KHEIR, Droit commercial Libanais, éd. La société moderne du livre, 1997.
559
Cette immatriculation n'a pas pour effet de conférer la qualité de commerçant pour l'agent
commercial français exerçant une profession indépendante. Dans la mesure où, comme dans l'espèce ici
rapportée, c'est la qualification d'agent commercial qui est déniée, l'intéressé devra alors requérir son
immatriculation au registre du commerce et des sociétés à titre de commerçant et se soumettre à toutes
les obligations attachées à cette qualification : B. SAINTOURENS, L'exploitation d'une clientèle
propre exclut la qualification d'agent commercial, RTD com., 2008 p. 45.
560
F. AUQUE, La commission-affiliation, AJDI, 2001, p. 1059 : « Juridiquement distinct du contrat
de franchise, le contrat de commission-affiliation soulève, au regard des notions du fonds de commerce
et de clientèle, des questions auxquelles ne peuvent pas être apportées les mêmes réponses. Le contrat
-168-
de commission est un acte préparatoire à d'autres conventions, en l'espèce des ventes, impliquant des
opérations à trois personnes : commettant, commissionnaire, acheteurs. Quelle que soit la conception
que l'on retienne du fonds, que l'on admette ou que l'on rejette l'idée d'une appartenance de la
clientèle, on doit reconnaître l'existence de relations d'affaires, actuelles ou potentielles, au sein de ce
rapport triangulaire, ce qui conduit à se demander laquelle ou lesquelles parmi ces trois catégories de
personnes constitue(nt) une clientèle pour l'autre ou pour les autres. La plupart des auteurs ne traitent
la question qu'indirectement, utilisant la notion de clientèle pour distinguer la commission du mandat
d'intérêt commun et déterminer dans quel cas l'intermédiaire a droit ou n'a pas droit à indemnité en
cas de rupture des relations contractuelles ». M. Didier FERRIER affirme ainsi : « Considérant, à
juste titre, que le commissionnaire, sauf à ne pas avoir cette qualité, est titulaire de la clientèle puisqu’
il masque, si ce n'est économiquement tout au moins juridiquement, le commettant aux yeux des tiers,
la jurisprudence refuse toute indemnisation au commissionnaire dans cette hypothèse » : D. FERRIER,
Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 269. Plus prudemment, Mme Marie-Pierre
Dumont relève que la clientèle est contractuellement liée au commissionnaire pendant la durée de sa
mission : M.-P. DUMONT, L'opération de commission, Litec, Paris, 2000, n° 813, puis conclut : « En
résumé, la jurisprudence refuse d'étendre les règles du mandat d'intérêt commun à la commission
parce qu'elle estime que les commissionnaires ne peuvent se prévaloir d'une clientèle commune
existant entre eux et leurs commettants dans la mesure où ils exploitent la clientèle pour le compte
d'autrui mais en leur propre nom ». La question de la clientèle est polluée, semble-t-il, par le débat sur
l'intérêt commun, concept qui renvoie à celui d'entreprise commune, de collaboration à la réalisation
d'une œuvre commune, mais pas à la notion, fréquemment mentionnée par les auteurs, de « clientèle
commune » : A. BRUNET, Clientèle commune et mandat d'intérêt commun, Etudes dédiées à A.
WEILL, D., p. 85 ; J. GHESTIN, Mandat d'intérêt commun, Mél. DERRUPPE, Litec, 1991, p. 105 ; La
Cour de cassation ne se prononce pas sur l'appartenance de la clientèle, pas plus qu'elle ne le fait
lorsqu'elle refuse une indemnité de rupture au commissionnaire, rappelant, au visa de l'ancien article 94
du Code de commerce, que, « en vertu du texte susvisé, les articles 1984 et suivants du Code civil ne
s'appliquent qu'à celui qui, à l'égard de la clientèle, agit au nom du commettant et non pas en son nom
» : Cass. com. 10 fév. 1970, Bull. civ., IV, n° 49 ; Le commissionnaire agit à l'égard de la clientèle, ce
qui ne signifie pas que cette clientèle soit sienne, le temps de la mission ou de manière irrévocable. La
propriété de la clientèle est peut-être un mythe ; l'appartenance de la clientèle, constituée en cas de
commission-affiliation par les acheteurs potentiels ou actuels des produits du commettant, est
certainement une erreur. Le commissionnaire-affilié, commerçant indépendant et propriétaire d'un
fonds de commerce, a pourtant bien dans son patrimoine une valeur, « valeur qui représente l'espoir de
maintenir le chiffre d'affaires réalisé au cours des mois précédents », selon la définition qui peut être
retenue de la clientèle : F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, Droit commercial, 6e éd., Montchrestien, 1999,
n° 297 ; De quoi, dès lors, est faite cette valeur ? De quasiment rien, répond un auteur, à propos des
diffuseurs de presse, pour lesquels « seuls le droit au bail et le mobilier d'exploitation peuvent [...] être
considérés comme constitutifs du fonds de commerce » : E. CADOU, La distribution de la presse.
Etude des contrats conclus dans le cadre de la loi du 2 avril 1947, LGDJ, 1998, n° 494 ; rien d'autre
pour le commissionnaire-affilié ? Rien : aucun des signes de ralliement des acheteurs des produits du
commettant, un contrat à durée déterminée et incessible, et, lorsqu'il est locataire, le droit au bail que
seule une décision ancienne et isolée a contesté à un commissionnaire à la vente : CA Bordeaux 18
déc.1948, JCP, G 1949.II.4706, note J. HEMARD.
-169-
561
M. TAHA, Les fondements du droit commercial, éd. Al-Halabi, Beyrouth, t. 1, 2005, p. 231.
562
V. Supra n° 308-309.
563
A. REYGROBELLET, L'autonomie de la clientèle, élément d'appartenance du fonds, D., 2012,
Ch. 13, n° 171.
-170-
564
B. SAINTOURENS, L'amusante « commission-affiliation » provoque la confusion, D., 2010, p.
687.
-171-
DEUXIÈME CHAPITRE
565
Ch. MALLAT, Comparative models of freedom of trade: The hurdle of Lebanese sole agency,
Centre d’études et de recherche de l’USJ, Liban, 2002.
566
« L’aspect économique de la représentation commerciale a primé aux dépens de sa définition
juridique » : M. NASR, Cours de droit commercial, éd. Université Libanaise, 1987- 1988, p. 333 ; S.
SALEH, La représentation commerciale, Rev. al Adl, 1968, fasc. 4, p. 78.
567
P. LASSEGUE, La politique commerciale au point de vente: tensions entre producteurs et
distributeurs par BRUGIER-VERREE, Economica, 1977: « par un paradoxe énorme et à peine
croyable les questions touchant à la distribution ont été jusqu’à une date récente tout à fait ignorée par
les économistes… ».
568
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 1.
569
Les termes distributions et distributeur sont parfois utilisés dans les textes juridiques mais n’ont
pas fait l’objet de définition légale, L. n° 89-1008, 31 déc. 1989, art. 12 : « Le gouvernement
-172-
représentera un rapport sur …les producteurs, commerce traditionnel, artisanat, grossiste, grande
distribution… » ; C. com., art. L. 441-7 : « Une convention écrite entre le fournisseur et le
distributeur » : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.
570
A prendre dans un sens économique et non au sens juridique de la représentation, Rapp. N.
DISSAUX, La qualification d’intermédiaire dans les relations contractuelles, LGDJ, Paris, 2007.
571
R. BALDI, Le droit de la distribution commerciale dans l’Europe communautaire, Bruylant,
Bruxelles, 1988, p. 11 ; M. De JUGLART, et B. IPPOLITO, L’acte de distribution serait un acte
intermédiaire situé entre la production et la consommation définitive des produits, Cours de droit
commercial, Montchrestien, 1988, t. 1, n° 76.
572
G. CORNU, Vocabulaire juridique, Association H. Capitant, 9e éd. PUF, 2011, p.
356 : « fonction économique consistant à assurer l’écoulement des produits du stade de la production à
celui de la consommation » ; S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements
opportunistes, Etude particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, p. 9 ;
M. BEHAR-TOUCHAIS, et G. VIRASSAMY, Les contrats de la distribution, LGDJ, 1999, n° 5 ; J.-
M. MOUSSERON, et alii, Droit de la distribution, préf. J. HEMARD, Librairies techniques, 1975, p. 8
et s.
573
Dictionnaire commercial, PUF, 1994, p. 247 : « Ensemble des activités qui s’exercent tout au
long du canal de distribution d’un bien ou d’un service vendu, entre le producteur ou le dernier
transformateur ou l’importateur et le consommateur ou l’utilisateur final de ce bien ou de ce
service » ; P. LASSEGUE , Manuel de la distribution, Fonctions-Structures-Evolution, Les cours de
Droit, 1977, Rapp.: « ensemble des activités qui s’exercent depuis le moment où le produit, sous sa
forme d’utilisation entre dans le magasin commercial du producteur ou du transformateur jusqu’au
moment où le consommateur en prend livraison », Assises nationales du commerce, cité par D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 3.
574
J. BEAUCHARD, Droit de la distribution et de la consommation, Thémis Dr. privé, PUF, 1996,
p. 21.
-173-
professeur FERRIER, issue des notions précédentes : la distribution peut être ainsi
définie comme « l’ensemble des opérations matérielles et juridiques qui permettent
de commercialiser des produits ou des services auprès de distributeurs et
consommateurs professionnels ou non professionnels »575. Sous l’angle juridique de la
distribution au sens large, il s’agit d’approcher la définition proposée pour le
représentant commercial suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi
N. 34/67 ; celui-ci exerce la commercialisation des produits achetés pour son propre
compte, toujours après avoir acquis la qualité de distributeur exclusif unique.
336. Cette qualité comporte deux caractéristiques qui nécessitent une analyse
séparée afin de bien comprendre la classification de ce représentant commercial
suivant ce deuxième alinéa : exclusif et unique. C’est là que se soulèvent les
questions. L’exclusivité comprend-elle les produits ou les personnes ? En d’autres
termes la distribution sera exclusive quant à des produits déterminés ou quant à
certaines personnes ? Le cumul de ces deux caractéristiques au bénéfice du statut de
représentant commercial est-il nécessaire? Pour répondre à ces questions, il nous faut
étudier dans deux sections différentes : l’exclusivité d’une part, -ce sera notre
première section- et d’autre part l’unicité -ce sera notre deuxième section-.
575
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 6.
-174-
SECTION 1
L’EXCLUSIVITÉ
338. Le terme est aujourd’hui courant et la doctrine s’accorde à penser qu’il vise
une obligation négative « obligation de ne pas faire », qui résulte d’une clause
d’exclusivité pratiquée dans plusieurs sortes de contrats tels que les contrats de
distribution, d’entreprise, de licence, et de sous-traitance582. La clause d’exclusivité
est, pour le professeur MOUSSERON, la clause en vertu de laquelle un opérateur «
576
S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, Etude
particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, p. 2.
577
Voltaire écrivait exclusiveté, qui sera ainsi répertorié, en 1812, par Boiste. En 1820, le mot
exclusivité apparaît sous la plume de Laveaux, dans Français moderne, t. 13, p. 127. Cf., not.: Trésor
de la langue française, 1980, t. 8, p. 412-413: cité par S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les
comportements opportunistes, op.cit.
578
Exclusif est emprunté au latin médiéval exclusivus (XIIIème) ; En 1960, le Dictionnaire
universel d’Antoine Furetière, définissait le mot exclure ainsi: refuser l’entrée ; s’opposer aux
prétentions de quelqu’un : cité par D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd.
Bruylant, 2008, p. 5.
579
Le Littré évoque encore le terme latin exclusio : « action d’exclure, de mettre hors. Méthode
d’exclusion », Hachette 2000, v. Exclusion. Au v. Exclusif, on lit « qui a la force d’exclure ». Sur
l’exclusivité, en général, P. GOURDON, L’exclusivité, préf. P. Le CANNU, LGDJ, 2006 ; O.
CACHARD, L’exclusivité, Ecrits rédigés en l’honneur de J. FOYER, Economica 2008, p. 215.
580
N. ERESEO, L’exclusivité contractuelle, préf. D. FERRIER, Litec, 2008, p. 5.
581
Le terme clause dérive également de claudere : ibid.
582
S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, op. cit., p. 2 ;
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 126 ; D. LEGEAIS,
Concession exclusive, J.-Cl. com. fasc. 307, nov. 2001.
-175-
339. Dans les contrats de distribution, l’exclusivité joue un rôle très important et
essentiel, puisque elle permet d’établir un courant d’affaires unique ou tout au moins
privilégié entre fournisseur et distributeur en limitant la possibilité, pour l’un ou pour
les deux, de traiter avec d’autres partenaires. Voyons dans un premier paragraphe la
teneur de l’exigence de l’exclusivité, pour en discuter, dans un deuxième, la portée au
regard des dispositions du décret-loi N. 34/67.
341. Dès le début du XIXe siècle, les fabricants ont pris conscience que leur
intérêt était d'attacher les consommateurs à la marque que portent leurs produits586.
C'est en fonction de cette préoccupation que s'est dessiné le cadre juridique de la
583
J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle, par P. MOUSSERON, J. RAYNARD, J.-B.
SEUBE, 4e éd., Francis Lefebvre, 2010, n° 672.
584
Y. MARDENALOM, Etude comparative des réseaux de distribution, th., Montpellier, 1999, p.
2.
585
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, op. cit., n° 21.
586
Selon M. LICARI, l’exclusivité de marque est définie comme suit : « De point de vue de l’intérêt
du fabricant à une distribution dynamique de ses produits et à la préservation de l’image de la marque
qu’il a construite, une clause obligeant le concessionnaire à distribuer exclusivement des produits de
la marque de son concédant est en principe efficace », F.-X. LICARI, La protection du distributeur
intégré en droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec, 2002, p. 449.
-176-
587
Dans le même sens, l’avis du M. LICARI qui considère que « Les clauses organisant une
exclusivité de marque, sont accordées au concessionnaire ou au franchisé », F.- X. LICARI, op. cit, p.
449.
588
TI Beyrouth, Ch. com. décision n° 721/492 du 23 déc.1969, op. cit., p. 26 au 33 ; Cass. com.,
19 déc. 1989, Bull. civ., IV, no 327, D. 1990, somm. 368, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 15 déc. 1992,
Bull. civ. IV, no 409 ; Cass. com., 10 janv. 1995, D. 1995, IR 43 ; Cass. com., Rejet 17 juill. 2001, D,
n° 99-17.251 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 04, 16 sept. 2009, D, n° 07/12211.
589
R. PLAISANT, Les contrats d’exclusivité, RTD com., 1964, p. 13, n° 17: Le contrat de
concession est celui comportant une double exclusivité, ou exclusivité bilatérale avec délimitation de
zones d’exclusivité ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, p. 461, n° 16 ; Y.
PICOD, Y. AUGUET, M. GOMY, Concurrence, Rép. com., fév. 2009 ; P. ARHEL, Accords de
distribution, Rép. Com, juin 2010.
590
CA Versailles, 9 avr. 1998, n° 1995-6501 ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD
com., 1963, 451, n° 24 : cité par M. PEDAMON et H. KENFACK, Droit commercial, Commerçant et
fonds de commerce, Concurrence et contrat de commerce, 3e éd., D., 2011, n° 775.
591
CE, communication de la commission n° 2000/C 291/01, Lignes directrices sur les restrictions
verticales, J.O C 291 du 13.10.2000, point 161- Rapp. Définition du règlement CE. n°1983-
83 : « accord par lequel une partie s’engage vis-à-vis de l’autre à ne livrer certains produits qu’à
-177-
A- Les divergences
celle-ci dans le but de la revente dans l’ensemble ou dans une partie définie du territoire du marché
commun » (art. 1).
592
Cass. civ., arrêt n° 12, 22 oct. 1962, Rec. Baz, 1962, p. 70.
593
F. SABIANI, Dossier 282, Dommages de travaux publics : mise en œuvre de l'indemnisation,
2010, Sect. 1, §2, 282.100 ; CA Versailles, 9 avr. 1998, n° 1995-6501 ; C. CHAMPAUD, op. cit., p.
457 et 458 ; J. HEMARD, Les agents commerciaux, op. cit, n° 80, 81, 82, p. 619, 620 ; CA Paris, 22
déc., 1966, JCP, 1967, II, 15085.
-178-
594
C. CHAMPAUD, op. cit., p. 461 ; R. PLAISANT , op. cit.
595
F.-X. LICARI, op.cit, p. 95 : « Ce résultat ne saurait satisfaire car, ainsi que l’écrivent MM.
MALAURIE et AYNES : ‘‘ il serait de bonne méthode de ne recourir à ce refus de qualification qu’à
titre subsidiaire, lorsqu’il est impossible de faire entrer le contrat dans une catégorie préexistante. En
fait, le recours à l’institution sui-generis n’est souvent qu’un refus paresseux d’analyse’’. Un tel écueil
doit donc être évité » ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, 451, 469.
596
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de
pharmacie c/ Compagnie suisse Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 26, n° 8.
597
J. HEMARD, Chronique à la RTD com., 1971, p. 159, n° 6, sur la distinction de la concession et
du mandat d’intérêt commun, à l’occasion de l’arrêt de la Cour de cass. du 13 mai 1970, Bull. civ.,
1970, IV. 144 et D. 1970, note J. GUYENOT. Cette solution s’explique parfaitement en droit français
étant donné que celui-ci réserve la qualité d’agent commercial aux seuls mandataires strictement et
exclusivement, c'est-à-dire, aux personnes agissant au nom et pour le compte du mandant, et non aux
commissionnaires et aux courtiers dont la représentation est imparfaite ; Guide de gestion RF, VRP et
agents commerciaux, Rev. fiduciaire, 2000.
-179-
opérations, par contre, les règles de la vente ne suffisent plus598. Il s’agit, en effet,
d’un contrat à exécution successive très comparable au mandat599 : Idée variée en
doctrine française où le contrat de concession successive prend plusieurs formes :
vente avec charges600, vente à monopole601, vente portant sur des livraisons
successives602, prestation de services603 et louage d’ouvrage604. En fait, le
concessionnaire des ventes désigné par une certaine firme pour une durée déterminée
ou indéterminée, représente la firme concédante dans le secteur concédé. Il s’agit
d’une représentation que M. SALEH appelle représentation économique605, et qui,
quelle que soit son appellation, participe de la notion de mandat.
598
Dans les arrêts de la C. cass. (13 mai et 27 oct. 1970), ce problème d’ensemble n’a pas été
envisagée étant donné que les discussions ont tourné autour de la qualification de chaque opération à
part. En l’occurrence, la Cour décida que le payement de commissions sur les ventes n’était pas
caractéristique de l’agence commerciale et ne pouvait ôter aux rapports des parties la qualification de
concession des ventes. D’ailleurs, si les tribunaux français, conformément à leur loi, refusent la qualité
d’agent commercial au concessionnaire exclusif des ventes, ils ont, quand même, essayé de pallier à cet
état, par la notion de mandat apparent : CA Poitiers, 3 nov. 1964, inédit, commenté par J. HEMARD,
RTD com., 1966, p. 107, n°8. D’autre part, un arrêt de la Cour d’Aix en Provence (31 oct. 1963, Gaz.
Pal. 1964, 1, 57 et JCP, 1964, II, 13647, note J. HEMARD ) a retenu la qualification de mandat pour un
contrat de concession exclusive des ventes en relevant les différents éléments qui lient le
concessionnaire au concédant, notamment l’exclusivité, la permanence, la limitation de la région
concédée, les limitations de prix…
599
S. SALEH, La représentation commerciale, Rev. al Adl, 1967, n° 4.
600
P. COULOMBEL, Les obligations spéciales de l’acheteur dans certaines ventes commerciales,
Etudes sur la vente, 1951, 319.
601
Cass. com., 9 juill. 1952, RTD com., 1953, 721, obs. J. HEMARD.
602
P. COUSI, G. MARION, Les intermédiaires du commerce, préf. M. GRENTE, LGDJ, Paris,
1963, n° 29.
603
J. Le CALVEZ, Evolution et rôle des clauses d’exclusivité : les aspects juridiques des
conventions de concession exclusive, th., Paris I, 1979, t. 1, 306 ; F. COLLART-DUTILLEUL et Ph.
DELEBECQUE, Contrats civils et commerciaux, 9 e éd., D., 2011, n° 936.
604
F.-X. LICARI , op.cit, p. 95 : « Un tel rattachement est généralement stigmatisé comme étant
trop commode, trop facile du fait du caractère lâche et accueillant de la définition de ce contrat perçu
comme une bonne à tout faire. Toutefois il a été relevé à juste titre que le recours à une telle
qualification, à condition d’en faire bon usage l’avantage d’éviter l’émergence trop facile de contrats
sui-generis ».
605
S. SALEH, Commercial Agency and Distributorship in the Arab Middle East: A Study in Shari'a
and Statute Law, Oct. 1, 1994.
-180-
606
M. ZOIA, L’incidence du droit communautaire sur les contrats spéciaux, th. Toulouse I, 1999,
n° 800.
607
CA Lyon, 20 fév. 2003, RJDA 2003, n° 1055 : Tout en montrant suivant divers éléments que le
contrat n’avait pas un caractère exclusif.
608
Ph. LE TOURNEAU, Concessions. Concession libre : la distribution sélective, J.-Cl. Contrats
distribution, fasc. 1020, 2010 (1re éd. 1981 ; 8e éd. avec M. Zoïa) n° 39 et s., qui affirme à tort que la
distribution sélective est borné aux produits techniques et luxueux.
609
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 24.
610
Cass. crim., 3 nov. 1982, JCP, 1983, I, 3108, obs., Ch. VILLEMART, cah. dr. entr., 1983, n° 1,
p. 16 : « Un contrat de distribution sélective est celui par lequel, d’une part, le fournisseur s’engage à
approvisionner dans un secteur déterminé un ou plusieurs commerçants qu’il choisit en fonction de
critères objectifs de caractère qualitatif, sans discrimination et sans limitation quantitative injustifiées,
et par lequel, d’autre part, le distributeur est autorisé à vendre d’autres produits concurrents » ; CA
Colmar, 19 mai 1983, PIBD, 1983, n° 333, III, 258 ; CA Paris, 8 juill. 1983, Gaz. Pal., 1983, 2, 566.
611
Lignes directrices sur les restrictions verticales, Communication 2010/C130/01 du 19 mai 2010,
JOUE, n° C 130, pt 174.
612
Ibid, pt, 169.
-181-
350. Il s'agit donc d'une formule plus souple que la distribution exclusive, et,
pour cette raison, préférée lorsque le fournisseur souhaite organiser la
commercialisation de ses produits de sorte que soient satisfaits uniquement certains
critères de qualité613. Elle apparaît, aussi, moins nocive pour le jeu de la concurrence
puisque l'absence d'exclusivité territoriale favorise la concurrence intramarque, c'est-
à-dire la concurrence entre les distributeurs qui ont été sélectionnés pour la
commercialisation des produits de la marque, tandis que l'absence d'exclusivité
d'achat favorise la concurrence intermarque, c'est-à-dire entre des fabricants ou des
marques concurrentes614.
B- Les ressemblances
351. Elle n’a pas été définie par le législateur. La définition du contrat de
concession provient de la circulaire Fontanet du 31 mars 1960615 relative à
l'interdiction des pratiques commerciales restreignant la concurrence : « une
convention liant le fournisseur à un nombre limité de commerçants auxquels il
réserve la vente d’un produit sous condition qu’ils satisfassent à certaines
obligations »616. En d’autres termes, la concession commerciale est un contrat liant
un fournisseur à un commerçant indépendant, auquel il réserve l'exclusivité de la
vente d'un produit dans un territoire déterminé617, à la condition qu'il accepte un
contrôle commercial, comptable, voire financier de son entreprise et parfois s'engage
à s'approvisionner, dans ce secteur, exclusivement chez le concédant618.
613
D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 112.
614
Ibid, n° 113.
615
O. MEVEL, Y. LERAY, XVIème Conférence Internationale de Management Stratégique : « Les
premiers résultats relatifs à l’application de la Loi Dutreil en France : une approche contractuelle au
travers du cas d’une centrale d’achat de la grande distribution alimentaire », Montréal, Juin 2007.
616
JO, Paris, 02-04-1960 p. 3048-3053.
617
Y. MAROT, www.apce.com (Agence pour la création d’entreprises), 2011.
618
Ph. BECQUE, Le contrat de concession exclusive en droit interne, th., Montpellier, 1985, p. 6.
-182-
619
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 55.
620
M. MAHMASSANI, op.cit., p. 54 et 55.
621
Ibid.
622
Proposition de loi n° 529, AN, seconde session ordinaire 1977-1978 du 1er juill. 1978 : cité par
Ph. BECQUE, op. cit., p. 6.
623
F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 98.
-183-
propre compte en tant que commerçants revendeurs624. Par conséquent, nous pouvons
expliciter les trois caractéristiques suivantes du contrat de concession exclusive :
354. 1) C’est un contrat impliquant une activité d’achat pour revendre, qui
apparaît ainsi comme l’acte type de distribution625: le concessionnaire agit en son
propre nom et pour son compte personnel en achetant les produits du fournisseur qu'il
revend à sa clientèle. Cette activité commerciale va se dérouler dans le cadre d'un
réseau de distribution en liant un fabriquant ou concédant, au concessionnaire,
commerçant indépendant revendeur qui va acheter les biens du fabriquant pour les
revendre626 : Même solution qu’en droit libanais concernant le distributeur exclusif au
sens du deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67 ; celui-ci a la
qualité d’un commerçant agissant pour son propre compte en tant que revendeur.
Ajoutons à cela que le concessionnaire détient donc la propriété des biens qu’il vend
en son nom et pour son propre compte ce qui serait exclu pour l’agent commercial.
C’est en fait un opérateur de commerce bien éloigné de l’agent commercial. Il est un
élément du circuit de distribution627.
624
C. CHAMPEAU, La concession commerciale, RTD com., 1963, p. 451.
625
M. PEDAMON, et H. KENFACK, Droit commercial, op. cit., n° 55 : « les activités de la
distribution…sont des activités commerciales par excellence ». Le commerce en France, 2007-2008,
INSEE références, p. 8 : Le secteur du commerce regroupe le entreprises dont l’activité principale est
l’achat pour la revente en l’état.
626
Le concessionnaire est un commerçant au titre de l’art. L.110-1 du code de commerce qui range
dans les actes de commerce l’achat pour revendre.
627
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 22.
628
La notion d'exclusivité territoriale selon le règlement d'exemption n° 4087/88 du 30 nov. 1988
permet au franchiseur d'accorder une exclusivité territoriale au franchisé en renonçant :
- à exploiter lui-même le concept sur le territoire concédé,
- à fournir les produits objet de la franchise à des utilisateurs finals ou à des revendeurs,
- à concéder une franchise à d'autres distributeurs que le franchisé.
Le règlement étend l'application de l'exemption à la franchise principale en autorisant « l'obligation
pour le franchisé de n'exploiter la franchise qu'à partir des locaux visés au contrat », ainsi que «
l'obligation pour le franchisé de s'abstenir de rechercher des clients hors du territoire visé au contrat
pour les produits ou services qui font l'objet de la franchise ». Ce texte exclut toutefois la protection
territoriale absolue puisque l'exemption ne s'applique pas aux contrats qui comprennent une obligation
-184-
pour le franchisé de ne pas fournir à l'intérieur du Marché commun les produits ou services faisant
l'objet d'accord de franchise des utilisateurs finals en fonction de leur résidence.
629
Conseil de la concurrence 2 juill. 1998 relatif au secret des affaires disponible sur le site Internet
du Conseil de la concurrence (www.conseil-concurrence.fr).
630
Cass. com., 20 fév. 2007, n° de pourvoi : 04-17752, D., 2007.
631
Cass. com., 26 janv. 1999, arrêt, n° 251, Rejet, Pourvoi n° 96-22. 457.
632
Il a été jugé que la clause dite «de clientèle» qui interdit au salarié, en cas de cessation du contrat
de travail, de contracter directement ou indirectement avec des clients de l'ancien employeur, même sur
sollicitation de leur part, c'est-à-dire sans manquement à son obligation de loyauté, est une clause de
non-concurrence, illicite en ce qu'elle est dépourvue de contrepartie financière et non limitée dans le
temps et l'espace : Cass. soc., 27 oct. 2009, Bull. civ., V, n° 232 ; CA Versailles, Ch. 05, n° 10/04122,
D., 02 fév. 2012.
633
Il est enseigné que l’exclusivité est de l’essence de la concession : C. CHAMPAUD, La
concession commerciale, RTD com., 1963, p. 451, à l’inverse, par exemple, de la franchise : Ph. LE
TOURNEAU, Les contrats de franchisage, 2e éd., Litec, 2007, n° 17 et 430 ; L’affirmation est à
nuancer puisque nous le pouvons concevoir une concession sans exclusivité : Ph. LE TOURNEAU,
Concessions. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses concessions. Fondement
et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc. 1010, 2006, n° 38 et s. et
noter que la répartition territoriale est usuelle en matière de franchise (sans en être une condition de
validité : Cass. com., 9 nov. 1993, Bull. civ., IV, n°403). Finalement, l’idée a une portée toute relative :
les juges doivent toujours interroger la volonté réelle des parties (Cass. com.. 9 fév. 1976, JCP, 1977,
II, n°18598, obs. J. HEMARD).
634
Cass. com., 22 janv. 1991, JCP E 1991, II, 201, note L. LEVENEUR.
-185-
concession devra être disqualifié635. Or, il s'agit là d'une condition de validité et d'un
critère d'existence du contrat de concession636, et nous la rencontrons fréquemment
dans les contrats de franchisage637 ou les contrats d’agence commerciale638.
358. Ainsi, il est bien requis que l’obligation imposée sur chacune des deux
parties, est réciproque643 et restrictive pour les deux ensembles, de façon qu’elle rende
impossible au vendeur de vendre les produits à quelqu’un d’autre que le distributeur
agréé. En d’autres termes, l'exclusivité territoriale oblige le fournisseur à ne pas livrer
les produits, dans le territoire concédé, à des revendeurs autres que le distributeur
635
Pour un exemple de disqualification en contrat d'agréation, v. Cass. com., 9 févr. 1976, JCP G
1977, II, 18598, note J. HEMARD : cité par Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et
l’exclusivité territoriale, th., Montpellier, 2010, p. 14.
636
D. LEGEAIS, Concession exclusive, J.-Cl. Comm. Fasc. 307, nov. 2001.
637
Il est, cependant, nécessaire de démontrer que les parties ont convenu d’une telle clause,
nullement nécessaire en la matière: Cass. com., 19 nov. 2002, cah, dr. ent. 2003/3, p. 23 obs. D.
MAINGUY.
638
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 419 et s.
639
V. Supra n° 342 où la concession exclusive est nommée distribution exclusive par le droit
communautaire.
640
« Le monopole du concessionnaire est restreint à une aire géographique déterminée, appelée
zone, territoire ou secteur de concession. Cette aire peut recouvrir un continent, un pays, une région,
un département, une ville, un quartier » : C. CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD com.,
1963, n° 11.
641
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 633.
642
Y. ABO ISMAIL, La commercialisation en ligne et l’exclusivité territoriale, th., Montpellier,
2010, p. 15.
643
Ce que nous traiterons postérieurement.
-186-
359. Va dans le même sens, l’avis de M. BECQUE dans sa thèse sur le contrat
de concession exclusive en droit interne646 où il a considéré que, si lors d’un contrat
de distribution, l’exclusivité est réciproque, il s’agit alors d’un contrat de concession
exclusive647 comportant une double exclusivité bilatérale avec délimitation de zone
d’exclusivité648. Mais, dans une version allégée, l’exclusivité territoriale peut n’être
qu’une « exclusivité d’enseigne »649 où le débiteur s’engage seulement à ne pas ouvrir
ou laisser ouvrir un point de vente dans le territoire désigné sans autre restriction à sa
liberté commerciale. En matière d’exclusivité territoriale de commercialisation, on
parle ainsi de « protection territoriale absolue »650 lorsque le contrat accorde au
créancier de l’exclusivité un monopole complet sur le territoire octroyé651.
644
D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 87.
645
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 677, 17 mai 1973, Rev. al Adl, 1973, p. 400.
646
Ph. BECQUE, op. cit.
647
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de concession, 2e éd., Litec, 2010, n° 26 et 27.
648
R. PLAISANT, op. cit. n° 17, p. 13 ; C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com.,
1963, p. 461, n° 13.
649
Dans le même sens, il y a aussi l’ «exclusivité d’implantation » : Cass. com., 14 mars 2006, D.,
2006, p. 1901, note H. KENFACK ; Comm. n° 99, p. 37, obs. H. LECUYER, JCP, 2006, I, 153, obs.,
M. GHAGNY.
650
Le glossaire des termes employés dans le domaine de la politique de concurrence de l’Union
européenne édité par la Commission définit la protection territoriale absolue comme « une pratique
exercée par des producteurs ou des fournisseurs concernant la revente de leurs produits et entraînant un
cloisonnement des marchés ou des territoires ».
651
Le respect des règles de concurrence conduit les parties à prévoir une clause plus douce,
engageant seulement le débiteur à interdire les ventes dites « actives » dans le territoire : il est alors
d’usage de parler d’exclusivité « renforcée ».
652
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n°648 : « L’exclusivité d’achat
était normalement une condition de validité de la concession en droit interne à l’époque où le refus de
la vente était pénalement condamné ».
-187-
653
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 81.
654
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
655
LPA, n° 237 du 28/11/2000, p. 22-30.
656
Du fait de son mode ancien de fabrication par fermentation basse exigeant une surveillance
constante en cave par un ouvrier du brasseur, qui devenait ensuite son distributeur exclusif en
contrepartie d’une aide pécuniaire : Sur l’origine de la clause d’exclusivité dans les contrats de bière,
Cf. note J. HEMARD, Traité théorique et pratique de droit commercial, t. 1, Les contrats
commerciaux, Sirey, 1953, p. 67. Différents travaux doctrinaux y ont été consacrés, P.
FALCIMAIGNE, Les conventions de fourniture exclusive en brasserie de la Région du nord de la
France, th., Paris, 1944 ; H. FORTIER, Conditions de validité de la clause d’exclusivité
d’approvisionnement imposé par les brasseurs aux débitants, th. Nancy, 1933 ; E. DEMONTES,
Clauses d’exclusivité d’approvisionnement, Rev. crit. 1932, p. 10 et s. ; J. MARCHAND, Des rapports
existants dans le Nord de la France entre brasseurs et débitants, th., Lille, 1930.
657
CA Aix-en-Provence, 8 juin 2000 : Juris-Data n° 2000-124286.
-188-
658
M. GRANIER, Le contrat de concession exclusive (Hermès), Montpellier I - Master I, Droit des
affaires, p. 68.
659
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 663.
660
V. infra n° 418 et s.
661
Le commerçant au sens du deuxième alinéa du décret-loi n° 34/67 vend ce qu’il achète : cet acte
se réalise par l’achat tout d’abord, pour la revente après qui sera la même notion de celle du
commissionnaire qui achète les produits qu’il revend pour son propre compte.
-189-
b- Avec la quasi-exclusivité
365. Il n’est pas rare qu’une clause mette à la charge d’une des parties une
obligation d’approvisionnement exclusif662 limitée à un pourcentage déterminé de ses
besoins en produits ou services contractuels. Elle se rencontre dans les contrats-cadres
d’approvisionnement, lorsque l’acheteur promet de n’acheter qu’auprès du
fournisseur ou de la personne qu’il désigne. Dès lors que le débiteur conserve une
partie plus ou moins importante de sa liberté d’approvisionnement, peut-on encore
parler d’exclusivité ? Cela pose le problème de la quasi-exclusivité663.
662
Sur cette clause, connue aussi sous « clause d’exclusivité d’approvisionnement » ou encore «
d’exclusivité d’achats » : note Ph. LE TOURNEAU, Exclusivités unilatérales, J.-Cl., Contrats-
Distribution, fasc. 1000, 8e éd. 2010. Ce type de clauses connaît de nombreuses déclinaisons, par
exemple, lorsque l’acheteur s’engage envers son contractant à acquérir les produits auprès d’un tiers
désigné. La promesse d’exclusivité se combine alors tout simplement avec une stipulation pour autrui :
Cass. com., 6 fév. 2007, n° 04-11718, inéd. ; de même, l’obligation d’exclusivité peut obliger non pas
nécessairement à revendre des produits acquis du fournisseur mais simplement des produits frappés de
sa marque (clause dite de mono-marquisme).
663
N. ERESEO, L’exclusivité contractuelle, préf. D. FERRIER, Litec, 2008, p. 120.
664
Ibid, n° 192.
665
S. LEBRETTON, L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, préf. M.
PEDAMON, Litec 2002.
666
D. BOSCO, Le contrat exclusif, th. Aix-Marseille, 2005, n° 7.
-190-
781-1, 2 du Code du travail puis L. 7321-2, qui s’applique aux personnes « dont la
profession consiste essentiellement à vendre des marchandises de toute nature qui
leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise,
lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par
cette entreprise et aux conditions et prix imposés par ladite entreprise » . Partant de
cette définition, et afin de distinguer avec le représentant commercial au sens du
deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67, ayant la qualité de
distributeur exclusif unique, nous pouvons dire ce qui suit :
368. Ce texte offre en effet le bénéfice du droit social plus précisément aux
personnes physiques667 dont la profession consiste « à vendre des marchandises de
toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une
seule entreprise ».
369. b.1) A première vue, cette spécification pour les personnes physiques ne
trouve pas d’homologue en droit libanais puisque le représentant commercial peut
être une personne physique ou morale668 ainsi que le précise le deuxième alinéa de
l’article premier : le distributeur a la qualité de commerçant que celui soit personne
physique ou morale.
370. b.2) Ainsi, le premier diffuseur pourrait être le producteur lorsqu’il vend
lui-même directement ses produits mais, le plus souvent, il fait appel à des opérateurs
spécialisés qui vont le représenter. Il en est ainsi des diffuseurs liés par un contrat de
travail669, ou par un contrat de mandat, par lequel le mandataire agit au nom et pour le
compte du mandant et spécialement dans cette catégorie, le mandataire exclusif pour
la vente. Et le cas échéant, nous trouvons ici une grande divergence entre le droit
libanais et français ; pour ce dernier, le mandataire exclusif est d’une part soumis au
667
CA Paris, 18 janv. 2000, D., 2001, somm., p. 297, obs. D. FERRIER : application possible au
gérant de la société « écran » ; Cass. soc., 22 mars 2006, D. 2007, pan° 1915 obs. D. FERRIER.
668
Art. 2 du décret-loi n° 34/67.
669
Des requalifications sont d’ailleurs possibles par application de l’article. L. 781-1 C. trav. cf. not.
: Cass. com., 21 oct. 1970, SA Prénatal c/ Haberkorn: Bull. civ., IV, p. 243 et s., n° 278. Dans cette
affaire, un arrêt de Cour d’appel avait déclaré compétent le conseil des prud’hommes, au motif que le
distributeur qui avait exclusivité de la vente dans un secteur déterminé, n’était qu’un agent de
distribution au service de Prénatal ; v. Cass. soc., 25 fév. 1998, SARL France acheminement c/ Robert:
D. 1998, Somm. Comm., p. 339, obs. D. FERRIER.
-191-
droit du travail670, lorsqu’il vend de manière exclusive ou quasi exclusive les produits
qu’il reçoit d’un mandant et, d’autre part, il est soumis aux règles gouvernant le
contrat de mandat lorsqu’il est consignataire671 parfois qualifié de dépositaire672 ; En
droit libanais il n’est pas soumis au droit de travail, mais bénéficie des dispositions du
droit commercial et notamment son décret-loi N. 34/67 qui lui donne une protection
spéciale après son assimilation à un représentant commercial au sens dudit décret.
372. b.4) L’activité doit consister dans la vente des produits fournis
exclusivement ou presque exclusivement par le mandant lui-même ou bien par des
fournisseurs agréés par ce dernier674 ou par une entreprise seule. Dans ce dernier cas,
la qualité de précision « unique » pour l’entreprise et l’exclusivité des produis fournis
rejoignent l’esprit du deuxième alinéa de l’article premier de décret-loi N. 34/67,
imposant la qualité de distributeur exclusif unique.
670
D’après la loi du 21 mars 1941 codifiée à l’article L. 7321-2 du code du travail prévoit
l’application du droit de travail aux personnes physiques « dont la profession consiste essentiellement à
vendre des marchandises ou denrées de toute nature…qui leur sont fournies exclusivement ou presque
exclusivement par une seule entreprise, industrielle ou commerciale…lorsque ces personnes exercent
leur profession dans un local fourni ou agrée par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par
ladite entreprise » ; Cass. soc., 22 mars 2006, D., 2007, pan° 1915, obs. D. FERRIER.
671
Y compris, lorsque les conditions sont remplis, les dispositions spéciales des articles L. 134-1 et
s. C. com. concernant les agences commerciaux, et les cas échéant toute autre convention corrélée au
mandat: franchise par exemple, Cass. soc., 25 fév. 1998, Lettre distrib. 1998-4 : cité par D. FERRIER,
Droit de la distribution, op. cit. ; Cass. soc., 1er mars 1973, JCP, CL 1975, 11754, note H.
MEYZONNADE ; L’activité de mandataire pouvant être couplée avec une seconde activité d’acheteur-
revendeur : Cass. com., 21 oct. 1970, Bull. civ., IV, n° 278.
672
La qualification de dépositaire utilisée par la pratique est discutable, dès lors que le contrat de
dépôt a pour objet la conservation de la chose en vue de la rendre au déposant (C. civ, art. 1915) et non
de la vendre.
673
C. trav. art. L.7321-2, modifié par la Loi n° 2009-526 du 12 mai 2009, art. 55 : « dont la
profession consiste…».
674
Cass. soc., 13 janv. 1972, JCP 1972, II, 17240 bis, La jurisprudence assimile à cette hypothèse
celle où les produits, autres que ceux du mandant, sont définis par ce dernier, Cass. soc., 8 juill. 1977,
Bull. civ., V, p. 383.
-192-
675
Cass. soc., 18 nov. 1981, D., 1983, p.243, note Y. SAINT-JOURS, référence à la subordination
économique.
676
Cass. soc., 3 fév. 1988, Bull. civ., V, n° 84.
677
« Est puni…le fait par toute personne d’imposer, directement ou indirectement, un caractère
minimal au prix de revente d’un produit ou d’un bien… ou à une marge commerciale » ; sur la sévérité
dont font preuve les juges dans l’application de ce texte.
678
D. BIKOVA, Les spécificités en matière de représentation commerciale du droit bulgare par
rapport au droit français, th., Montpellier, 2009, n° 96.
679
Y. CHALARON, Gérant des succursales, Rép. trav., 1997, n° 59 ; J.-F. CESARO, Gérants
mandataires de succursale, J.-Cl. Contrats-distribution, 2003, Fasc. 3560.
680
CA Paris, 14 juin 1982, JCP, G 1983, II, 19924, concl. C. Connen.
681
Cass. soc., 12 janv. 1983, Bull. civ, V, n° 14.
-193-
376. Ainsi le deuxième alinéa du l’article ci-dessus, dispose qu’il « est aussi
considéré comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son
propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la
qualité de représentant ou de distributeur exclusif unique », où l’élément essentiel
dans cette phase, est, pour le commerçant, de se voir reconnue la qualité de
représentant ou distributeur unique à titre exclusif. Et comme il est justifié, le
demandeur n’avait pas la qualité de représentant ou distributeur exclusif pour les
produits de la défenderesse dans la ville de Beyrouth, puisque cette dernière avait
passée contrat avec autres personnes pour vendre et distribuer ses produits. De plus, il
est mentionné que dans les contrats conclus avec le demandeur et celui passé avec les
autres personnes avec lesquels elle s’est engagée, qu’elle a droit de vendre de façon
directe ou indirecte, tous ses produits dans la zone citée, sans que le demandeur ou les
personnes nommées aient le droit, de présenter une opposition en ce sens ou même de
demander n’importe quelle indemnité.
682
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
683
Prix des ventes et leurs conditions, pourcentage de commission et organisation du loyer : tel la
station pour vente et la distribution de l’essence, huiles, lavages, graissage, et la présentation d’un
service complet pour les clients.
-195-
379. Attendu que cet accord n’obéit pas aux dispositions d’un contrat déterminé
par le législateur et n’entre pas dans le champ d’application des contrats nommés, de
telle sorte qu’il soit un des contrats innommés de l’article 175 C.O.C.684 ;
Attendu que dans le champ des contrats innommés, l’accord passé entre les
contractants forme la charte auxquelles ils obéissent, suivant les dispositions de
l’article 221 C.O.C. ;
Attendu que l’article 12 du contrat, conclu entre les deux parties, dispose que ce
dernier est établi pour une période indéterminée, et qu’il est permis à chacune des
parties de le résilier par l’envoi d’un préavis de trois jours, sous forme de lettre
recommandée, sans nécessité de prouver les causes de résiliation et sans qu’il y ait
droit pour chacune des parties de demander à l’autre n’importe quelle indemnité ;
684
TI Seine, 21 et 28 mars 1966, D. 1966, Somm. S.J., p. 91, n° 14690 ; R. RODIERE et C.
CHAMPAUD, S.J. 1966, 1ère partie, n° 1988 ; D. FERRIER, D. 1966, Chron., p. 55.
685
TI Beyrouth, décision n° 237/ 275 du 17 avr. 1969 contre « Mobil Oil », Rec. Hatem, vol. 113, p.
13 à 16.
-196-
381. Il résulte des faits de l’arrêt, que le demandeur confère à son contrat avec la
compagnie pétrolière « Mobil Oil » la qualité de représentation commerciale, tandis
que la défenderesse soutient qu’il y a formation d’un contrat de vente et d’achat
d’essence et d’huiles. Devant cette divergence de qualification, le tribunal de première
instance de Beyrouth en sa chambre commerciale, a considéré qu’il lui appartient de
donner au contrat sa vraie qualification au vu des articles et des engagements des
parties dans ce but précis.
686
Art. 370 C.P.C. lib. ; E. ABOU EID, Les procédures civiles entre le texte, la jurisprudence et la
doctrine, t. 5, l’explication de l’art 370, 2005 ; CA Versailles, Ch. 03, 21 déc. 2006, n° 05/06750 :
« Cependant, malgré cette qualification de contrat de sous-traitance, il appartient au juge de
rechercher la nature véritable de la convention passée entre les parties et de lui restituer le cas
échéant sa véritable qualification ».
687
Art. 366 C.O.C. : « il appartient au juge dans l’explication des actes juridiques, de recourir sur
l’intention du personne engagée (si l’obligation est unilatéral) ou bien sur la volonté des parties (s’il y
avait contrat), et non de rester river sur le sens littéral du texte» ; V. dans le même sens : A. RIEG, Le
rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 630 : « Les conventions doivent être
exécutées de bonne foi, cela signifie conformément à l’intention des parties et au but qu’elles se sont
proposés en contractant » ; Cass. soc., sans renvoi, 16 juin 2009, n° 08-42.261, Bull. 2009, n°
148 : « Il appartient au juge du fond d'interpréter le contrat en vue de lui donner son exacte
qualification, la volonté des parties, pas plus qu'une circulaire ministérielle ne pouvant faire échec à
l'application du statut protecteur attaché au contrat de travail » ; V. dans le même sens : CA Toulouse,
Ch. 04, Sect. 01, Ch. soc., 19 mars 2008, n° 07/00501 ; Cass., Ass. plén., Rejet, 19 déc. 2003, n° 01-
10.670, Bull. 2003, A. P. n° 7, p. 19 : « …le critère de la qualification étant la volonté des parties… ».
688
V. dans le même sens : A. RIEG, op. cit., p. 358 : « L’acte juridique, étant un substratum de
volonté, il est logique d’interpréter un contrat en recherchant la volonté qui a animé les contractants.
L’acte juridique étant le produit d’une ou plusieurs volontés, c’est nécessairement d’après l’intention
profonde des auteurs qu’il faut en apprécier les conséquences ».
-197-
Suivant ces dispositions, pouvons-nous dire que le Code a défini l’acte juridique
qui lie le propriétaire de la station pétrolière à la compagnie pétrolière ?
384. Nous avons déjà mentionné que, d’une part, la question de la qualification
de la relation contractuelle entre les parties de cet acte, nécessite le recours à la
volonté et l’intention des parties concrétisées dans les articles du contrat qui
détermine cette relation ; et d’autre part, la recherche de l’intention des contractants se
réalise lors de la rencontre de leurs volontés, c’est dire lors de la conclusion du
contrat. Ainsi, suivant l’article 366 C.O.C., le juge se renseigne sur cette intention
suivant la volonté commune des parties et non à partir du sens littéral du texte.
385. A ce titre, revenant à la décision sujet de ce débat, il est bien prouvé que le
tribunal n’a jamais parlé de l’intention des parties et de leurs volontés lors de la
conclusion du contrat, puisqu’il s’est basé sur le sens littéral du texte, c'est dire sur le
sens littéral des articles du contrat en énonçant que : « à la lumière des droits qui
appartiennent à chacune des parties contractantes et les obligations qui leurs
incombent, aboutissant à l’union de la personne citée par la compagnie pétrolière,
de façon qu’elle obéisse aux règlements de la compagnie nommée ». En d’autres
termes, il n’a pas appliqué les dispositions de l’art. 366 C.O.C. (intention et volonté
des contractants) et l’a violé une deuxième fois lorsqu’il s’est contenté du sens littéral
des articles du contrat, (en correspondance avec l’imposition de l’article 366 sur
l’écartement du sens littéral du texte), car l’attachement du propriétaire de la station
pétrolière à la compagnie pétrolière n’est pas réel puisque l’attachement signifie la
-198-
fusion totale et complète, ce qui n’est pas constaté dans la relation du propriétaire de
la station pétrolière avec la compagnie.
386. Le cas échéant, supposant la réalité de cette fusion, il n’y aurait jamais de
droits et d’obligations pour chacune des deux parties du contrat, et celui-ci devient
alors un contrat d’adhésion689 : toutes ces raisons ont rendu impossible pour le
tribunal la qualification du contrat comme contrat nommé.
387. Nous pensons que la question de l’« union » posée et adoptée par ce
tribunal ne peut être reçue. De même, le fait de dire que le propriétaire de la station
pétrolière « obéit aux règlements de la compagnie nommée (quant aux prix de vente et
de ses conditions, du pourcentage de commission et de l’organisation du loyer690,
outre l’exécution de son travail sous la marque, les couleurs et le nom de la
compagnie pétrolière) », ne constitue pas un motif pour considérer le contrat comme
un contrat innomé, comme l’a retenu le tribunal de première instance de Beyrouth,
mais au contraire, le motif sera la recherche des volontés des parties.
388. Ensuite, puisque le tribunal n’a pas respecté les normes juridiques citées
dans l’article 366 C.O.C., qu’il a opposé les principes d’interprétation des contrats
indiqués, qu’il se met alors en contradiction avec les dispositions juridiques prises en
considération ; il ne peut donc être reconnu ni accepté. Reste à se demander comment
il fallait qualifier ce contrat ?
389. Revenant aux faits de cette affaire, il est clair que le contrat conclu avec le
demandeur et la défenderesse a stipulé des droits et des obligations pour chacun
d’eux, et a donné au demandeur les produits de la compagnie défenderesse pour les
stocker et les vendre aux clients, sous conditions déterminées quant aux prix de vente,
outre la stipulation du montant de la commission sur la vente des produits appartenant
au propriétaire de la station : Solution presque similaire la quasi-exclusivité en droit
689
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 37.
690
Tel la station pour vente et la distribution de l’essence, huiles, lavages, graissage, et la
présentation d’un service complet pour les clients ; outre l’exécution de son travail sous la marque, les
couleurs et le nom de la compagnie pétrolière.
-199-
390. Il ressort de ces faits, que le demandeur achète les produits de la société
pétrolière (essences, huiles et graisses) afin de les vendre aux clients et offre les autres
691
La quasi-exclusivité n’a pas été retenue dans des espèces, ni satisfaite, qu’à partir de 66% de la
part exclusive de l’activité : D. FERRIER, Droit de la distribution, 5 éd. Litec, 2009, n° 158, dans un
rapport de deux tiers et pour un taux de 80% : La jurisprudence admet l’approvisionnement quai-
exclusif lorsque le gérant achète 80% des marchandises auprès d’une seule entreprise: Cass. soc., 7
juill. 1977, pourvoi n° 76-40686, Sté Natalys c/ Douville, Bull., n° 4801 ; CA Paris, 5e Ch., B., 2 nov.
1995, Sté Liverson c/ Sté Seris, Juris-Data nº 1995-023668 ; J.-M. MOUSSERON et R. FABRE, La loi
du 21 mars 1941: une loi en expansion? JCP, éd. E, 1978, cah. dr. entr., n° 2, p. 4 et s.: « La
jurisprudence parait établir la quasi-exclusivité autour de 80% » ; S. REGHNAULT, La tentation
d’autoritarisme de la loi DOUBIN, P. Aff. 10 janv., 2003, n° 8, p. 13: « lorsque le chiffre d’affaires
sous exclusivité est supérieur à 70 ou 80 % du chiffre d’affaires globale, le distributeur est en situation
de quasi-exclusivité ».
692
Le chiffre d’affaires peut se définit comme le montant des transactions réalisées par l’entreprise
avec les tiers dans le cadre de son activité professionnelle normale et courante et apparaît dans la vente,
travaux et prestations de services. La tendance est au gonflement artificiel de la partie de l’activité du
pompiste qui est exercée sous exclusivité (la distribution des hydrocarbures et parfois des lubrifiants)
par l’intégration dans le chiffre d’affaires du distributeur de sommes qui ne sont perçues que pour le
compte de l’Etat et du fournisseur ; les activités exercées hors exclusivité, parfois désignées par
l’expression secteur libre, se trouvant alors sous-estimées : Cass. com., 22 mars 2006, Ste Esso c/
Epoux X, pourvoi n° 05-42.233, Bull, V, n° 122, qui donne en ces termes la liste des activités du
secteur libre d’un pompiste de maque : « mille références de produits boutique (dont les pneus,
batteries, accessoires destines aux véhicules et tous produits à usage domestique, les produits
alimentaires et boissons, la restauration rapide), les prestations de lavage, graissage, pose,
réparations courantes, échanges de pièces et d’accessoires, et les lubrifiants non utilises dans la
station-service ».
693
Le bénéfice est la traduction, au cours d’un exercice comptable, de l’excédent des produits sur
les charges, ce qui a nécessairement pour conséquence d’exclure les sommes perçues pour le compte
d’autrui et l’ensemble des frais engagés dans le cadre de l’activité professionnelle où toute entreprise
que son survie économique y dépend.
694
Ce problème a soulevé un débat devant les tribunaux concernant l’assiette de la quasi-
exclusivité: D’une part, il a été intégré les sommes perçues soit au profit du trésor public ou bien au
profit du fournisseur pour le calcul du chiffres d’affaires. Tandis que d’autre part, il y avait une
division par l’acceptation et le refus du bénéfice réalisée par le distributeur.
695
Ph. DIDIER, A propos du contrat de concession : la station-service, D., 1966, chron. p. 55 : Sur
le cadre contractuel des relations entre pompistes et compagnies pétrolières ; R. RODIERE et C.
CHAMPAUD, A propos des pompistes de marque, les contrats de distribution intégrée et la marge
commerciale du distributeur, JCP, 1966, I, 1988 ; E. SHAEFFER, Le pompiste en station-service
partagé, JCP 1972, I, 2503. Adde: J. GHESTIN et B. DESCHE, La vente, LGDJ, 1990, n° 307.
-200-
391. Ainsi cette qualification et cette situation ne changent pas du fait que la
compagnie pétrolière a stipulé certaines conditions concernant les objets suivants : la
détermination de prix de vente du litre d’essence, ou du kilo d’huile, ou de la
maintenance des voitures, ou de la graisse : Il en est de même en cas de quasi-
exclusivité697 ; Et du fait qu’il est reconnu que le mandant peut stipuler de telles
conditions sans qu’il y ait contradiction avec sa liberté698.
696
Un arrêt a ainsi admis l’existence d’une quasi-exclusivité au motif que « l’activité principale de
la station-service était celle de distribution de carburant, les autres activités (ventes et prestations)
n’étaient exercées le plus souvent qu’à l’occasion de l’exercice de l’activité principale » : CA Amiens,
22 oct. 2003, Piaulet c/ Sté Esso, Juris-Data n° 2003-241404.
697
Cass. soc., 3 fév. 1988, Sté Esso c / CPAM Paris, Bull., v., n° 84 ; Cass. Ch. Réun, 23 juin 1966,
Bull. n° 2 qui relève au sujet d’un contrat de gérance de succursale que « par la convention litigieuse,
(la gérante) s’engageait à assurer la représentation exclusive des articles de la société PRENATAL
ainsi que la gérance de la succursale de BREST, et à se conformer aux prix, tarifs et conditions
imposes par ladite société… et se reconnaissait comptable à l’égard de la société du produit des
ventes et que celle-ci se réservait d’apprécier l’importance des stocks à fournir et d’opérer à tout
moment e contrôle de ces stocks et de la caisse… ; les clauses, suivant lesquelles (la gérante) n’était
placée dans aucun lieu de subordination vis-à-vis de la société et restait maître de son temps et de
l’organisation de son travail, se trouvaient en désaccord avec les autres clauses du contrat, et ne
modifiaient pas l’économie générale de la convention… ; l’arrêt attaqué, qui n’a pas dénaturé la
convention, a déduit, à bon droit, l’existence d’un lien de subordination d’employé à employeur, de
nature à rendre obligatoire l’affiliation de la (gérante) aux assurances sociales ».
698
Arrêt analysé au bout de notre étude : CA Liban Nord, arrêt du 24 juill. 1974, Société khalil
boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol. 159, p 89 à 92 ; E.
TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306, p. 467 : « Toutefois, la
règle de l’indépendance du représentant ne nous parait pas faire obstacle à des stipulations qui
réservaient un certain contrôle au représenté, telles que la stipulation imposant au représentant
l’obligation de rendre compte de ses démarches au représenté, de lui fournir des rapports périodiques
sur son activité » ; dans le même sens, M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 59 : « … Pour cela, le bénéfice du statut de représentant
commercial ne sera pas refusé au commerçant qui reçoit des directives de la maison représentée, des
documents publicitaires, ou à celui qui doit rendre compte périodiquement, même à intervalles très
courts ».
-201-
392. En vérifiant le contenu de cet alinéa, nous constatons que, d’une part les
conséquences entrevues peuvent concerner plusieurs activités que le représentant
commercial peut effectuer699 et d’autre part, que les stations pétrolières présentent des
multiservices pour leurs clients700.
393. Cependant l’offre de ces services se situe dans l’« objet » désigné par
l’article premier du décret-loi N. 34/67, qui relève du sujet « prestations de services »
parmi les activités effectuées par le représentant commercial701. De même, la
réception d’une commission, le cas échéant, entre dans le concept de la représentation
commerciale, puisque le représentant commercial, qui entreprend les actes désignés
par l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi N. 34/67, les exécutent à travers
le cadre de sa représentation commerciale en touchant par contre une commission702 :
Solution opposée à celle adoptée en cas de quasi-exclusivité où il a été jugé ce qui
suit : « Ayant retenu que les commissions tirées de la vente des carburants ne
représentaient qu’une faible partie des résultats bénéficiaires de la station-service,
dont l’essentiel provenait de l’activité d’une boutique de vente, qui n’était soumise à
aucune exclusivité d’approvisionnement ; elle a pu en déduire que l’activité de la
station-service ne consistait pas à vendre exclusivement ou presque exclusivement des
carburants fournis par le bailleur et, par-là, que les exploitants, qui n’étaient pas
699
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, p. 592 : « Les termes du décret
ouvrent un champ pratiquement illimité à l’activité des agents commerciaux ».
700
CA Montpellier, Ch. 01, D, 19 janv. 2011, n° 10/02131, aff. Totale : « Il était également prévu
que le locataire pouvait exercer l'activité de tous commerces et notamment celui de stations-service, de
distribution de produits pétroliers ou autres sources énergétiques avec prestation de tous services
(installation de lavage, graissage, logements destiné aux gérants, poste d'accès) et vente de tous
articles pouvant satisfaire les besoins des automobilistes ainsi que toutes activités commerciales
annexes ou complémentaires » ; CA Grenoble, Ch. civ., 01, 26 fév. 2008, n° 05/00994 : «…les
opérations de station-service (vidange, graissage) et les opérations d'entretien…, et la fourniture lors
des vidanges des lubrifiants… » ; CA Versailles, Ch. 06, 31 oct. 2006, n° 06/01508 : « …il exerçait
dans la station-service d’autres activités que la distribution de carburants… » ; Cass com., Cassation
partielle sans renvoi, 7 janv. 2004, n° 01-10.429 : « Attendu, d'une part, qu'ayant estimé que l'analyse
du préjudice ne se limite pas à la vente du carburant mais comprend l'exploitation de la station-service
dans toutes ses activités… » ; CA Lyon, 3 avr. 2003, n° 2001/06093.
701
E. TYAN, op. cit., p. 467 et 468: « Objet de la représentation – Les actes, objet de l’entremise
du représentant, peuvent être, comme le dit l’article premier du décret-loi n° 34/67, des opérations de
vente, achat, location, prestation de service…».
702
E. EID, Les contrats commerciaux et les opérations de banque, 1968, p. 180 et 191, art. 65.
-202-
395. Ainsi, toujours à partir des faits du jugement, le tribunal a considéré que
« l’utilisation de l’espace loué emporte l’usage d’une station pour la vente et la
distribution des essences, huiles, graissages et prestation de service complet pour les
clients »704, n’obéissait pas aux dispositions d’un contrat désigné par le législateur : ce
qui est en contradiction avec la réalité. Car celui qui effectue des opérations et des
actes juridiques, faisant de ces activités sa profession, et organise son travail à travers
d’une société, constituera par effet un fonds de commerce considéré comme l’outil du
projet commercial705. Le cas échéant, lorsque cette personne exerce des activités ou
des opérations comme celles organisées et nommées dans l’article premier du décret-
loi N. 34/67, elle sera considérée comme si elle exécutait les affaires d’une agence
commerciale qualifiée par représentation commerciale. Ce qui nous pousse à dire -
703
Cass. com., 22 mars 2006, M. Y. LEHANNEUR c/ Sté Carautoroutes, pourvoi n° 04- 43343.
704
V. dans le même sens : CA Montpellier, Ch. 01, D, 19 janv. 2011, n° 10/02131 : « … que la
société preneuse pourra édifier à ses frais sur les terrains loués toutes les constructions nécessaires à
l'exploitation de son commerce notamment des locaux à usage de stations-service, installation de
lavage, graissage, logements destiné aux gérants, poste d'accès… ».
705
Art. 278 C. com. lib. ; Art. 1 du décret-loi n° 34/67 ; CA, Aix-en-Provence, Ch. 08 A, 20 sept.
2007, n° 06/07560 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 04 C, 25 janv. 2007, n° 04/04651.
-203-
396. Tandis que le fait de mentionner que « l’exercice du travail sous la marque,
les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière », ne peut être considéré comme
motif pour écarter le contrat du cadre de la représentation commerciale. En vérité, la
marque, les affiches publicitaires, les couleurs et le nom de la compagnie pétrolière,
sont tous des logos ou enseignes que ces sociétés délèguent au propriétaire de la
station pétrolière. Ces enseignes, entrent dans la phase de la publicité de la compagnie
pétrolière d’une part, et d’autre part servent à distinguer les produits de cette dernière
des produits des autres compagnies pétrolières, puisque l’enseigne est la
dénomination sous laquelle, le commerce est exercé et connu du public706, que le
commerçant utilise pour distinguer des autres son fonds de commerce707.
397. A ce titre, le fait d’utiliser ces affiches sous le nom de la marque, les
couleurs et le nom de la compagnie, n’a pour but que d’attirer l’attention des clients
vers la société commerciale et les produits du représenté, et les conduire vers la
station pétrolière : ce qui est proche de l’activité de la société lorsqu’elle aboutit à
personnifier la qualité du commerce708. Sur cette base, nous ne pouvons considérer ses
affiches comme une forme d’excuse pour estimer que le contrat est innommé, et par
706
En France, l’enseigne est défini par l'article L. 581-3 du code de l'environnement ; V. dans le
même sens : P. ROUBIER, Propriété industrielle, t. 2, Sirey, 1954, p. 702, n° 297 : « L’enseigne est
essentiellement une désignation d’un établissement de commerce ou d’industrie apposée sur les locaux
où cet établissement est exploité. Elle sert à fixer l’attention de la clientèle d’une manière en quelque
sorte extérieure, et particulièrement frappante », cité par E. ABOU EID, Droit commercial entre le
texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2,
2005, p. 39.
707
Il est également un des éléments incorporels du fonds de commerce, et le prolongement du nom
commercial.
708
Cass. com., Anvers, 14 juill. 1902, Jurisp du port d’Anvers, 1902-1-320 : « …En général, une
enseigne est attachée à l’exploitation d’une industrie ou d’un fonds de commerce, dont elle constitue
un accessoire… », cité par E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la
doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 39 ; CA Paris, PÔLE 05,
Ch. 04, 20 oct. 2010, n° 08/10864 : « … l’enseigne Espace SFR pour l’exploitation de son fonds de
commerce… » ; CA Aix-en-Provence, Ch. 15 A, 28 mai 2010, n° 08/13455 ; CA Bordeaux, Ch. civ.
02, 1 déc. 2009, n° 09/02764 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 09, 12 nov. 2009, n° 09/12833 ; CA Versailles,
Ch. 16, 29 mai 2008, n° 07/07239 ; CA Paris, Ch. 03 A 4, sept. 2007, n° 06/14980.
-204-
398. En conclusion, après avoir exposé les ressemblances plus que les
divergences entre le distributeur exclusif au sens du décret-loi N. 34/67 et le
concessionnaire exclusif du droit français, en tant que tous les deux sont des
commerçants, revendeurs et agissent pour leur propre compte en vertu d’un contrat
nécessitant l’existence d’une exclusivité réciproque avec interdiction de vendre
d’autres produits concurrents709 ; il s’agit de vérifier dans un deuxième paragraphe la
portée de l’exigence de l’exclusivité au sens du deuxième alinéa de l’article premier
du décret-loi N. 34/67.
399. Le deuxième article du décret-loi N. 34/67 qui prévoit la possibilité pour les
parties d’insérer une clause d’exclusivité dans le contrat de représentation
commerciale710, ne prévoit pas la solution à donner à cette question de sorte qu’il faut
appliquer les règles générales du droit civil. En effet, entre parties, cette clause ne
peut être absolue sans violer la liberté civile contractuelle. En d’autres termes, les
parties s’engagent à respecter leurs obligations respectives résultant de la clause
d’exclusivité711, la plus importante étant celle du concédant, représentant ou
représenté, de ne pas commercer avec les produits objets de l’exclusivité dans le
secteur concédé, et durant la période entière de la concession. Elle doit être limitée
709
M. LICARI considère que les clauses de relatives à la distribution des produits concrétisées par
les stipulations d’exclusivité, sont généralement accompagnées d’une interdiction de concurrence: F.-
X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C. WITZ, Litec,
2002, p. 450.
710
Art. 2 (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975 et la loi n° 671 du 6/2/1998) : « Ce contrat de
représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité limitant la représentation à un
représentant unique ».
711
Idée à développer plus tard au cours de notre étude.
-205-
dans l’espace, et, surtout, dans le temps712, à peine de nullité, c’est que l’une des
parties au contrat de représentation commerciale ne pourra s’engager éternellement à
ne pas exercer le commerce objet de l’exclusivité713. Il s’agit donc, d’une atteinte à la
liberté civile contractuelle, puisque l’exclusivité doit permettre d'optimiser les efforts
voire rentabiliser les investissements714.
401. L’exclusivité est unilatérale si son débiteur est le seul engagé dans des liens
exclusifs716. L’hypothèse est fréquente, par exemple, dans les contrats
d’approvisionnement où seul l’acheteur supporte une obligation frappée d’exclusivité,
712
Une limite de dix ans est expressément prévue par les dispositions de l’article L. 330-1 C. com.
anciennement la loi du 14 octobre 1943 sur les conventions d’exclusivité portant sur des biens
meubles : CA Toulouse 4 mars 1968, Chronique de J. HEMARD relative à la RTD com., 1969, p. 790,
n° 9.
713
Cass. civ., n° 73 du 9 mars 1963, RJL, 1963, p. 677 : d’après cet arrêt une seule limitation
suffirait ; V. aussi Cass. com., 7 janvier 1969, JCP, 1969, II, 16121, et la chronique de M. HEMARD à
l’occasion de l’arrêt en question RTD com., 1970, p. 179 et 180, n° 5 : Dans cette espèce, la cour
confond entre la liberté publique du commerce et de l’industrie, et la liberté contractuelle qui est une
liberté civile. Elle dit en l’occurrence, que la seule limitation dans l’espace suffit pour nier l’article à la
liberté de commercer. Cependant, nous ne pensons pas devoir voir dans cette attitude de la cour que la
limitation dans le temps ne doit pas être une condition de validité de la clause d’exclusivité, étant
donné que dans l’espèce à elle soumise, il s’agissait d’un contrat à durée indéterminée qui peut être
résilié à tout moment.
714
D. FERRIER, La considération juridique du réseau, in Mél. offerts à Ch. MOULY, Litec, 1998,
p. 95 s., spéc. n° 19.
715
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 153 : tel que, par exemple, quarante ou cinquante ans pour un
commerçant qui en a cinquante ou soixante.
716
Ph. LE TOURNEAU, Exclusivités unilatérales, op. cit.
-206-
717
Sur la clause d’exclusivité dans le contrat de travail : R. VATINET , Les principes mis en preuve
par la jurisprudence relative aux clauses de non-concurrence en droit de travail, Droit social, 1998, p.
534 ; A. SUPIOT, Critique du droit du travail, PUF, 2007, coll., Quadrige.
718
Ph. LE TOURNEAU, Les contrats de franchisage, op.cit. n° 430 et s. ; N. NEFUSSY-LEROY,
Les clauses d’exclusivité dans le contrat de franchise, th., Nice, 1992 : cité par D. BOSCO,
L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd. Bruylant, 2008, p. 12.
719
D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, op.cit., p. 13.
720
Par exemple, l’acquéreur promet de n’acheter qu’au vendeur qui promet de ne vendre qu’à
l’acquéreur. Il est aussi possible que chacune des parties s’oblige à une exclusivité, mais que les deux
exclusivités ne se répondent pas: par ex., le fournisseur promet une exclusivité territoriale à l’acquéreur
qui promet de ne conclure aucun contrat d’entretien avec un tiers : nous pouvons parler d’obligations
d’exclusivités croisées.
-207-
n'est-il pas alors logique qu'il soit en même temps son mandataire et mandataire pour
d’autres entreprises concurrentes, puisque la description juridique de cette situation
lui donne la qualité d’un vendeur secondaire et non pas d’un mandataire
commercial.
Attendu qu’il n'y a pas d'influence sur la description de la relation entre les
parties, en tant que mandat commercial, suivant l’argumentation de la partie
demanderesse, le représentant a été mandataire pour autres entreprises concurrentes,
puisque il l’est permis au représentant commercial d’être mandataire pour plusieurs
mandants en même temps, comme l'indiquent les dispositions de l'art. 278, al 3. C.
com.
404. Sur le fond de l’arrêt précité, il semble qu'un différend soit survenu entre la
demanderesse et le représentant mentionné, sur la nature de la « qualification » du
travail effectué par ce dernier, et de savoir si le décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967, englobe dans sa protection, les personnes qui vendent les marchandises qu'ils
achètent en retirant leurs bénéfices de la différence des prix, sans qu'il y ait une
« exclusivité » de représentation et de distribution.
- Le représentant avait acheté ses marchandises et les avait vendues à des clients
en son nom propre et pour son propre compte, en retirant ses bénéfices de la
différence de prix.
721
Art. 272 C. com.: « … le mandataire doit agir en son nom propre ou sous un nom social pour le
compte de son mandant… ».
722
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt préparatoire n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21, p. 58.
-208-
406. Ce qui nous conduit à dire que le représentant n'était pas un agent
commercial pour la demanderesse, mais un « vendeur secondaire », ce qui ne lui
permet pas de bénéficier des dispositions du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967. Mais la Cour de cassation civile, en sa première chambre, et comme réponse à
la demande de l'appel et sa raison citée, a considéré que, l'agent commercial peut
travailler sous son propre nom ou sous le nom de son mandant. Et qu’il n’y a aucun
effet sur la description de la relation entre les deux parties, par le fait que le
représentant était un agent mandataire pour des entreprises autres que la société
demanderesse, puisque il est permis au représentant commercial d’être mandataire
pour plusieurs mandants en même temps, suivant les dispositions de l’art. 278, al 3. C.
com. lib.723 et l’art. 3 du décret-loi N. 34/67724, et pour cela la raison de cassation sera
rejetée.
723
Art. 278 al. 3 C. com. : « … Lorsqu’un mandataire représentant pour plusieurs maisons
commerciales, a des locaux, un personnel, une organisation et des frais généraux, c’est possible de le
considérer comme un véritable propriétaire d’un projet de représentation commerciale, il devient
personnellement commerçant ».
724
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement:
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle –ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs salaires
ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et dans ce
cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
-209-
408. Mais à notre avis, la décision prise par la Cour de cassation peut être
critiquée pour les raisons juridiques suivantes :
En retournant aux faits énumérés dans l’arrêt précité, nous constatons clairement
que le représentant achetait les produits et les outils de la société demanderesse et les
vendait en son nom propre et pour son propre compte en retirant son bénéfice de la
différence des prix. Mais il n’était pas un « distributeur exclusif » pour ces produits et
sa relation avec cette société ne se basait pas sur l’« exclusivité ». De fait, le
représentant avait exercé l'achat et la vente des outils commerciaux similaires aux
produits de la société demanderesse, mais fabriqué par d’autres entreprises.
409. Ce qui nous incite à dire que ce dernier n'était pas un mandataire suivant la
notion du premier alinéa de l’article premier du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août
1967, puisqu’il exerçait son travail sous son propre nom et pour son propre compte -
présomption de sa qualité de commerçant- ; de plus il n’était pas un « distributeur
exclusif » suivant la notion du deuxième alinéa du premier article du décret-loi
précité en raison de l’absence d’un contrat d’exclusivité. La relation qui le lie avec la
compagnie demanderesse n'est qu’une relation « distributeur-vendeur » pour les
produits de cette société.
725
Cass. civ. lib 15 mars 1973, op. cit.
726
Tout cela en lien avec les dispositions de l’art. 278, al. 3 C. com. lib., qui permet au mandataire
d’être représentant pour plusieurs clients en même temps. V. supra note 723.
-210-
412. En d’autres termes, l’exclusivité en ces formes est déduite des relations des
parties contractantes. C’est une condition nécessaire pour l’application des
dispositions du décret-loi libanais N. 34/67 du 5 août 1967 -Condition sine qua
non728- de manière que son absence amène à considérer l’intermédiaire du commerce
comme un « distributeur non-exclusif » ne bénéficiant pas de la protection du décret
législatif susmentionné, et en particulier du deuxième alinéa de l'article premier729.
727
M. MAHMASSANI, op. cit, p. 55 ; Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009,
Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492, 23 déc. 1969, Rec.
Hatem, vol. 113, p. 26 à 33.
728
Terme juridique latin signifiant « sans laquelle cela ne pourrait pas être ».
729
Voir dans le même sens : C. CHAMPAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, n° 12
: Bien que le distributeur agréé soit un commerçant, qui achète pour revendre, il se distingue
essentiellement du concessionnaire par le défaut d’exclusivité.
-211-
416. « Il résultait des faits que les deux parties avaient l’intention de désigner le
demandeur comme délégué et « distributeur non-exclusif » pour vendre les produits
de la société défenderesse, et que le contrat passé entre eux ne comportait pas un
article notant que le droit de distribution est exclusif et restrictif pour le seul
demandeur, et qu’il n’avait pas le droit de vendre des produits similaires à ceux de la
défenderesse.
730
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
731
Dans le même sens : C. CHAMPAUD, op. cit., p. 462.
732
Art. 2, al. 2 du décret-loi n° 34/67 : « Ce contrat peut comporter une clause limitant la
représentation à un représentant unique… ».
-212-
Attendu que si la défenderesse n’a pas utilisée son droit de faire distribuer ses
produits par une personne autre que le demandeur simultanément avec ce dernier,
cela ne veut pas dire qu’elle a renoncé à ce droit. Ainsi, il n’est pas possible de
considérer que l’accord des deux parties dépasse le cadre du contrat écrit et rejoint
l’article de l’« exclusivité » -contrairement au contenu du contrat- sauf s’il y avait des
éléments importants et suffisants ayant pour but de prouver que les deux parties en
avaient la volonté et que leur accord était assujetti à l’article de l’« exclusivité ».
Cependant, le cas échéant, rien n’indique que les parties avaient la volonté
d’assujettir leur relation à l’article de l’« exclusivité », différemment du contenu de
l’accord écrit passé entre eux. Ce qui, en effet, montre que la situation du demandeur
est incompatible avec les impositions du deuxième alinéa de l’article premier du
décret-loi N. 34/67, puisqu’il n’avait pas la qualité de représentant ou distributeur
unique à titre exclusif, mais qu’il avait la qualité de délégué ordinaire à la vente ou
de distributeur normal »733.
733
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 721/492, 23 déc. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 26 à 33.
734
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt préparatoire, n° 4, 15 mars 1973, Rec. Baz, n° 21, p. 58.
-213-
419. Comme la jurisprudence, la doctrine n’est pas d’accord sur ce sujet. Vu que
MM. les professeurs FABIA et SAFA considèrent que l’exclusivité est réciproque736,
alors que M. le professeur HATEM, considère que l’exclusivité est non réciproque737.
Où en sommes-nous de ces avis jurisprudentiels et de ces opinions doctrinales ?
735
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1974, Rec. Chahine, n° 150, p. 22 et 23.
736
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 6.
737
Ch. HATEM, Rec. Hatem, vol. 150, p. 24.
-214-
738
Art. 1102 C. civ. fr. et art. 169 C.O.C. lib.
739
Art. 1103 C. civ. fr. et art. 169 C.O.C. lib., al. 3.
740
Art. 366 C.O.C. lib.
-215-
424. Suivant ces deux textes, il est remarquable que le contrat qui lie le
représentant au représenté, et qui contient une clause d’exclusivité de représentation
ou de distribution, se classe parmi les contrats à titre onéreux. Et ce type de contrats
est stipulé en faveur des intérêts de toutes les parties qui toucheront des profits et des
avantages égaux741. En conséquence, lorsque le distributeur exclusif touche les
avantages de la distribution exclusive limitée à sa personne, ou à sa société ou à sa
compagnie, alors la nature de l’acte lui impose l’égalité des obligations et des
avantages, de telle manière qu’il s’engage à son tour par des obligations envers son
contractant. Tout cela est relatif à la création de l’équilibre des prestations résultant du
fait que l’acte est synallagmatique. Ainsi, si l’article 278 C. com. lib. en son deuxième
alinéa a permis au représentant commercial de représenter plusieurs firmes
commerciales, ceci est relié par la désignation constatée à l’article 3 du décret-loi N.
34/67, quand le texte spécial s’applique par opposition au texte général suivant
l’adage Specialia generalibus derogant742.
741
Art. 169 C.O.C. lib.
742
Principe Latin selon lequel, lorsque deux règles de droit sont applicables à une situation, l’une
générale et l’autre spéciale, c’est cette dernière qui se déroge et doit prévaloir.
743
Décision n° 05- D-32 du 22 juin 2005 du Conseil de la concurrence ; Cass. civ., 1ere Ch., 20 mai
2003 ; CA Paris, 1er mars 1957, Boulbès, 1957-2-9875.
744
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1974, op. cit.
745
L’art. 4 al. 1 du décret-loi nº 34/67 mentionne ce qui suit: « Le contrat de représentation
commerciale est réputé conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ». Ainsi l’art. 3 al. 2
-216-
426. Et s’il est reconnu que « si une seule partie se trouve engagée quand
l’autre n’est prévue soumise qu’à quelques obligations postérieurement, suivant des
conditions spéciales ou lors de l’exécution du contrat, alors ce dernier ne perd pas la
qualité de contrat non synallagmatique comme dans le prêt d’utilisation, le dépôt, le
gage » 746 ; Comme cette supposition est invalide dans le cas de représentation
commerciale exclusive, car l’article 3 du décret-loi N. 34/67, même s’il a donné au
représentant commercial le droit « d’accepter la représentation de nouveaux
mandants sans en référer à son mandant », conditionne que « l'objet de la nouvelle
représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue pas
une concurrence à celle-ci » .
dudit décret rappelle que « le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des activités de
sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement:… accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à
condition que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou
bien ne constitue pas une concurrence à celle-ci ».
746
Art. 168 C.O.C., al. 3.
747
TI Beyrouth, décision n° 443, 23 mai 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213-216.
748
Art. 4 al.1, décret-loi n° 34/67, V. dans le même sens en droit français : L'article L. 134-4 C.
com. ; CA Orléans, Ch. com., 25 nov. 2010, n° 10/01197 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 04, 22 sept. 2010,
n° 08/06616 ; CA Saint-Denis-de-la-Réunion, Ch. civ., 23 juill. 2010, n° 09/00941 ; CA Paris, PÔLE
05, Ch. 05, 1 juill.2010, n° 10/07894 ; CA Bordeaux, Ch. civ., 01 Sect. B, 18 mai 2010, n° 09/02649 ;
CA Angers, Ch. com., 8 avr. 2010, n° 09/00165 ; CA Paris, PÔLE 05, Ch. 05, 1 avr. 2010, n°
-217-
429. Cet équilibre dans les droits et les obligations indique bien la volonté du
législateur de conserver le même équilibre entre droits et obligations, et de considérer
la représentation commerciale exclusive comme contrat synallagmatique et réciproque
de la part des obligations et des droits, et à titre onéreux752 mis en faveur des parties
contractantes afin d’obtenir des avantages égaux. En revanche, il s’agit de rappeler
que la loi française n'interdit pas aux parties contractantes de stipuler une clause
d’exclusivité unilatérale ou bilatérale. Unilatérale, très fréquente (presqu'une clause de
style), par laquelle le mandant confie à son partenaire le monopole de la
représentation pour un territoire géographique spécifié ou pour une clientèle
déterminée. Bilatérale, plus rare, par laquelle l'agent s'engage de son côté à ne
représenter que ce mandant.
430. Cela dit, d’un autre côté, l’interprétation des relations obligatoires entre les
parties du contrat, nécessite la recherche de la volonté et de l’intention des
contractants comme le souligne l’article 366 C.O.C. : Solution adoptée par M.
09/07999 ; CA Caen, Ch. 01, Sect. civ. et com., 20 sept. 2007, n° 05/03722 ; Cass. com., Rejet, 22 févr.
2005, n° 03-12.753.
749
CA Limoges, Ch. civ., 16 sept. 2010, n° 08/01453 : Mandat d’intérêt commun, voir juger que la
révocation unilatérale du mandat était illégitime et abusive ; CA Basse-Terre, Ch. civ., 01, 16 mars
2009, n° 06/00854 ; CA Toulouse, Ch. 02, Sect. 02, 1 déc. 2009, n° 08/00966.
750
Art. 245 C.O.C.: « il n’est pas permis en principe de résilier les contrats que par l’accord de
tous ceux qui les ont créés… ».
751
B. BOULOC, Mandat d'intérêt commun, (Révocation, Conditions) RTD com., 1990, p. 249 :
« Le mandataire prétendait qu'en l'absence de tout préjudice subi par le mandant dans l'exécution du
mandat, le mandant ne pouvait pas révoquer le mandat ».
752
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 3, p. 31.
-218-
753
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif Libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 154.
754
La nature de l’exclusivité.
755
Cass. civ. 1ere Ch., 10 janv. 1974, op. cit.
756
V. en ce sens : A. RIEG, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 9 : « Il
apparaît artificiel, à l’heure actuelle, de rechercher la substance de l’acte juridique dans la seule
intention ou dans la seule déclaration. La véritable solution réside dans une conciliation contre la
puissance de la volonté individuelle et la sécurité des transactions. Intention et volonté de déclaration
sont des mots commodes pour désigner l’épanouissement de la volonté humaine aux prises avec le
besoin social de sécurité ».
-219-
SECTION 2
L’UNICITÉ
433. Le schéma qui se forme devant nous est le suivant : l’existence d’un contrat
contenant une clause d’exclusivité limitant la distribution par une personne unique,
précisée et déterminée. Pouvons-nous alors constater que l’obligation prend effet sur
la partie engagée seulement, ou bien la dépasse pour rejoindre l’autre partie
contractante afin d’équilibrer les obligations et les échanger757 comme nous venons le
démontrer ?
757
Il s’agit de signaler que nous ne voulons pas s’interroger sur les effets au fond, mais juste se
limiter à ce qui aide notre analyse.
758
G. VIRASSAMY, Les contrats de dépendance, préf. J. GHESTIN, th., LGDJ, 1986.
759
Contra CA Paris, 14 mai 1999, RJDA 1999, no 1198 : analysant toutes les obligations mises à la
charge de l'agent, et indiquant qu'elles n'affectent en rien son indépendance dans sa prospection, et
donc sa qualité.
-220-
760
CA Rennes, 1 déc. 1993, D., 1994. IR 127 : ce qui n'est pas le cas lorsque, comme en l'esp., le
mandant nomme un « animateur prescription » dans la zone.
761
CE, communication de la commission n° 2000/C 291/01, Lignes directrices sur les restrictions
verticales, JO. C 291 du 13.10.2000, pt. 161.
762
Le secteur géographique défini s’agit d’une zone d’exclusivité territoriale, les concurrents ne
peuvent pas intervenir sur le territoire des autres membres du réseau : Cass. com., 26 janv. 1999, arrêt,
n° 251, Rejet, Pourvoi n° 96-22. 457.
763
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 301 : « Les exceptions sont d’interprétations stricte » ; p. 196 : « La loi
-221-
441. Ce décret est venu nous aider à consolider notre analyse en ce que le
législateur impose la qualité d’exclusivité de produits à un seul distributeur, suivant
que l’attestation délivrée indique les spécificités de la convention de l’exclusivité
notamment :
spéciale, étant exceptionnelle, sera interprétée strictement, et ses lacunes seront comblées par un appel
au droit commun ».
764
Adage classique juridique latin signifiant que l’exception est d’interprétation très stricte.
765
Précisant les conditions d’application de l’article 40 du Code de budget général de l’année 1998,
lié à la redevance annuelle imposée sur les contrats de représentation commerciale.
-222-
- la nature des produits et des services ou même les travaux que la représentation
commerciale englobe, c'est dire qu’il s’agit de désigner et préciser les produits
concernés par l’exclusivité. En d’autres termes, l’exclusivité tombe sur certains
produits déterminés par leurs qualités, genres et types.
766
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 16 oct. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
767
TI Beyrouth, décision n° 443, 23 mai 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216.
-223-
768
TI Beyrouth, décision n° 459, 21 oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147.
769
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 677, 17 mai 1973, Rev. al Adl., 1973, p. 400 ; Cass. civ.,
1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Rec. Baz, nº 21, p. 167, 168.
770
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 48.
-224-
445. Issus d’une civilisation de commerçants, les libanais sont des entrepreneurs
hors pair. Malgré le risque politique inhérent, le Liban est un pays capable de se
reconstruire, d’innover, et de créer ; pays où des Libanais conservent leur esprit
d'initiative, leur créativité et leur tradition d'excellents commerçants pour exporter
leurs idées, leurs concepts, leurs produits771. Raison pour laquelle une association des
franchiseurs pour promouvoir et organiser le cadre juridique du développement des
savoir-faire libanais dans le monde, a été créée en Février 2007 avec l’aide de la
Fédération Française de la Franchise : c’est la « Lebanese Franchising Association ».
771
Des concepts purement Libanais, innovants et audacieux : Al Rifai, Patchi, Pain d’Or, La Maison
du Café, Rectangle Jaune, Najjar Gourmet, Crepaway, Daniel’s, Naï Lingerie, Casper & Gambini’s,
Eternity, Salmontini, Water Lemon, Café Blanc, Huashis, La Posta, Al Sultan Brahim, Kabab-ji, La
Tabkha, Wooden Bakery, Moulin d’Or, ABC…
772
Par l’effet de la législation anti-trust prohibant la vente directe des véhicules par les
constructeurs aux utilisateurs.
773
Né en 1871 aux Etats-Unis avec la marque « Singer », issu d’un mot français qui signifie être
libre de servitudes.
774
J.-M. LELOUP, La franchise - Droit et pratique, 4e éd., Delmas, 2004, p. 10.
775
Il faut signaler l’existence d’un texte réglementaire, qui impose aux franchises de faire état, à
l’intérieur et à l’extérieur de leur de leur établissement, de leur qualité d’entreprise indépendante: arrêté
du 21 fév. 1991, J.O. 1er mars 1991, 2963, expliqué par note de service du directeur général de la
DGCCRF n° 5724 du 21 mai 1991, BOCCRF 30 mai 1991, 154.
776
Règlement (4087/88/CE) modifié par le Règlement de 2790-1999 (JOCE 29 déc. 1999, L. 336-
21 à 25) complété des lignes directrices du 13 oct. 2000 sur les restrictions verticales.
-225-
777
JOCE, Règlement de la commission du 20 avr. 2010, L.102/1, concernant l'application de
l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories
d'accords verticaux et de pratiques concertées.
778
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 681.
779
L’activité elle-même peut être commerciale ou artisanale, Cass. com., 25 oct. 1994 : Lettre
distrib., 1995-1 : Le distributeur franchisé pour la pose d’ongles acryliques est un artisan, ou encore
civile: agence matrimoniale.
780
D. FERRIER, La franchise industrielle, JCP, E, 1989, CDE, n° 1.
781
CJCE, 28 janv. 1986, Pronuptia : Rec. CJCE 1986, I, p. 353 : « le franchiseur s’est installé dans
un marché comme un distributeur et a ainsi pu mettre au point un ensemble de méthodes
commerciales… qui ont fait son succès » ; CA Paris, 24 janv. 1975, PIBD 1975, 3, p. 323 : « le
franchiseur a un ensemble de méthodes commerciales de nature à fonder la réussite ».
782
Ph. MALAURIE, L. AYNES, P.-Y. GAUTIER, Les contrats spéciaux, 6e éd. Defrénois, 2012,
n° 838 et s.
783
J.-M. LELOUP, La franchise - Droit et pratique, 4e éd., Delmas, 2004, n° 235 : « Il n’y a pas de
franchise sans réussite réitérable ».
784
D. FERRIER, Le droit de distribution, op. cit., n° 683.
-226-
449. De ces points de vue, une franchise peut avoir pour objet : la fourniture des
services, la production et la vente d’un ou plusieurs biens. Mais il se peut, que les
franchises peuvent être classées selon l’ « objet » du système franchisé, c'est dire
selon la nature de l’opération que le franchiseur pratique avec succès et fait pratiquer
aux franchisés en conformité avec le système qu’il a mis au point, expérimenté et
conceptualisé792. Et par conséquent, la franchise peut être analysée en trois
catégories : les franchises de services, les franchises de production et les franchises de
distribution. Ces dernières les plus nombreuses en France, nous intéressent pour notre
785
Y. MAROT, Le droit de la Franchise, Mémento juridique, éd. Gualino, Paris, 2003, p. 27.
786
Règl. n° 2790-1999, art. 1, f, Lignes directives, pt. 198, Contrat Modèle de Franchise de la
chambre de commerce internationale, pub., ICC éd., 2000.
787
La franchise est une figure contractuelle plus moderne que la concession, elle repose sur des
valeurs incorporelles (savoir-faire) ; M. BEHAR-TOUCHAIS et G. VIRASSAMY, Les contrats de la
distribution, LGDJ, 1999, n° 1543.
788
Y. MAROT, Le droit de la Franchise, op. cit., p. 53.
789
M. BENNAMI, Le contrat de franchise et le redressement et la liquidation judiciaires, th.,
Université de Lausanne, 2003, n° 58 ; Ch. ZIMMER, Devenir franchisé ou lancer une franchise, 3e éd.
Vuibert, 2011, p. 41.
790
CA Amiens, Ch. com., 6 oct. 2000, RG n° 96/02089, Sté Scintelle, Bukowitz et Delaby c/ Sté
Radenne et UAP.
791
J.-M. LELOUP, La franchise, 4ème éd., op. cit., n° 111.
792
Idem, n° 201.
-227-
comparaison et ont pour objet la distribution d’un bien ou d’une collection de biens.
Et il se peut, que le franchiseur soit diffuseur en injectant un produit dans le circuit de
distribution sans être lui-même producteur793.
793
Ibid.
794
C. CHAMPAUD, Le droit des affaires, 5e éd., PUF, coll. « Que sais-je? », 1994, n° 1978, p. 103
et s.
795
J.-M. LELOUP, La franchise, 4e éd., op. cit., p. 10.
796
They have provided an additional method of exploitation of their product, they have gone direct
into the retail market….: M. MENDELSOHN, The guide to Franchising, 3rd éd., Pergamon Press 1982,
p. 35.
797
CA Pau, Ch. 02, Sect. 01, 26 avr. 2007, n° 06/02285 ; CA Grenoble, Ch. com., 7 mai 2008, n°
06/03778 ; CA Agen, Ch. com., 12 nov. 2007, n° 07/00100 ; F. FRANCK, L'équilibre des réseaux de
franchise de parfumerie de luxe : d'un équilibre menacé à l'équilibre nécessaire, D. 2002, p. 793.
-228-
Attendu que, dans le cadre de l’Union Européenne, comme il est connu que
toute discrimination fondée sur la nationalité est interdite ;
798
CA Pau, Ch. 02, Sect. 01, 27 avr. 2009, n° 08/00203 ; L. GIMALAC, Le contrat d'intégration
révélé par les actions en comblement et en extension du passif (art. 180 et 182 de la loi du 25 janv.
1985 sur les entreprises en difficultés), RTD com., 1999, p. 601.
799
Art. 2 dudit décret.
800
Y. MAROT, Prolongements de l'arrêt de la Chambre commerciale du 10 fév. 1998 sur
l'information précontractuelle en matière de contrat de franchise, (des conséquences beaucoup plus
importantes qu'on pouvait le croire), D., 1999, p. 431.
801
CA Grenoble, Ch. com., 11 fév. 2010, n° 08/02585 ; CA Versailles, Ch. 14, 16 sept. 2009, n°
08/07686 ; CA Paris, Ch. 05 A, 21 janv. 2009, n° 06/11392 ; CA Paris, Ch. 05 A, 13 fév. 2008, n°
05/20435 ; CA Paris, Ch. 05 A, 31 oct. 2007, n° 05/23349 ; CA Paris, Ch. 05 A, 30 mai 2007, n°
06/01862 ; CA Toulouse, Ch. 02, Sect. 02, 20 juin 2006, n° 05/03200.
802
CA Douai, Ch. 02, Sect. 02, 20 janv. 2011, n° 08/09574.
803
Cass. com., 25 oct. 1994, Contrats, conc. consom. 1995, comm., n° 2.
804
CA Rouen, Ch. de la proximité, 2 avr. 2009, n° 08/01005 ; CA Rennes, Ch. 07, 30 sept. 2009, n°
07/05729.
805
J.-M. LELOUP, La franchise, 4e éd., op. cit., p. 13.
-229-
457. D’une manière générale, la franchise peut être définie comme un contrat du
droit commercial par lequel un commerçant dit « le franchiseur », concède à un autre
commerçant dit « le franchisé », le droit d'utiliser tout ou partie des droits incorporels
lui appartenant (nom commercial, marques, licences), généralement contre le
versement d'un pourcentage sur son chiffre d'affaires ou d'un pourcentage calculé sur
ses bénéfices.
458. Sur cette assise, vu que le franchisé est un commerçant agissant pour son
propre compte -qualité commune en droit français et libanais- ; cette qualité le
rapproche du distributeur unique au sens du deuxième alinéa de l’article premier du
décret-loi N. 34/67 en tant que commerçant agissant pour son propre compte en vue
d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ; il se différencie toutefois par :
806
TI Beyrouth., décision n° 28/96 du 30/1/92, Rev. al Adl, 2002, n° 3.
-230-
807
F.- X. LICARI, La protection du distributeur intégré en droit français et allemand, préf. C.
WITZ, Litec, 2002, p. 117. Il s’agit de noter que, M. LICARI considère le contrat de franchise comme
un contrat d’entreprise ou une forme atypique du contrat de louage d’ouvrage, puisque le pouvoir de
contrôle et de direction du maitre y est très aigu, alors que dans la forme idéale-typique du louage
d’ouvrage de telles prérogatives sont absentes ou faibles.
808
L’exclusivité est nécessaire à la qualification du contrat de représentation commerciale au sens
du décret-loi n° 34/67 comme nous allons le montrer postérieurement.
809
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 703 : L’exclusivité
territoriale est moins justifiée par la protection de l’investissement du franchisé, qu’imposée par la
réitération de la réussite par le franchisé. Cependant le règlement n° 487/1988 exemptait la réservation
de territoire au profit des franchises, au motif qu’elle était indispensable pour protéger leur
investissement : Règl. n° 487/1988, art. 2, a, et consid 10 ; Dans le même sens, CA Paris, 16 déc. 1992,
D. 1995, somm. p. 78, obs. D. FERRIER.
810
Cass. com., 19 nov. 2002, Gilde Aurore c/ Duhoo, D., 2003 p. 2427, obs. D. FERRIER ; CA
Paris, 5e Ch. A, 12 janv. 1994, Adeve c/ Ada, Juris-Data n° 020468 ; Cass. com., 16 janv. 1990, D.,
1990, Somm., p. 369 ; Cass. com., 28 janv. 1980, JCP, 1981, II, 19533, note J. AZEMA.
-231-
clause d’exclusivité811, qui n’est jamais le cas pour la distribution exclusive du droit
libanais, ni pour la concession exclusive du droit français.
Attendu que la cause illicite ou illégale, est celle contraire à l’ordre public, aux
bonnes mœurs et aux dispositions obligatoire de la loi,
811
L. AMIEL-COSME, Les réseaux de distribution, préf. Y. GUYON, LGDJ, 1995, n° 14 à 17.
-232-
Attendu que la cause de passer contrat est le motif personnel qui engage la partie
contractante à construire le contrat,
Attendu que le motif qui a porté les producteurs du sel à conclure la convention
citée ci-haut, est le fait de limiter la distribution et la liquidation du sel marin entre
eux comme assurance pour leurs propres intérêts…
La Cour après en avoir évalué, trouve dans cette convention ce qui viole la règle
d’offre et de demande dans le marché du commerce au motif de la poursuite de la
partie demanderesse par le procureur général suivant les dispositions de l’art. 658 C.
pén., relié à la concurrence déloyale, et par contre la cause du contrat sera illicite
face à son contradiction avec l’ordre public »812.
812
TI Liban Nord, décision n° 504, 24 déc. 1970, Rec. Hatem, vol. 150, p. 20, 21.
-233-
ses bureaux ou ses dépôts pour des raisons illicites afin de retirer un bénéfice, ne
constitue pas un résultat normal pour la règle d’offre et de demande ».
- Est considéré ententes licites, celles qui aboutissent à la prévention des abus de
la concurrence, à la réglementation des prix de vente, et à la liquidation des produits.
- Est considéré ententes illicites, et par contre prohibées, celles qui aboutissent à la
lutte contre la concurrence et d’avoir le contrôle du marché par la collection des
matériaux ou produits afin de hausser leur valeur et affaiblir la règle d’offre et de
demande.
466. L’idée maitresse découlant de cet arrêt, est le motif qui a porté les
producteurs du sel à conclure la convention avec la partie défenderesse, aboutissant à
l’exclusivité de la distribution et la liquidation du sel dans leur intérêt commun. Mais
le tribunal, a adopté le critère d’entente pour arriver à cette solution. En réalité, le
critère juridique qui permet de distinguer les ententes professionnelles licites de celles
illicites, est le critère de « validité » et non celui d’entente ; solution admise par M.
BLAISE : « …Mais il est unanimement reconnu que cette exigence de la loi permet
813
CA Paris, 12 déc. 1996, JCP, éd. E, 1997. II. 953, note M. BEHAR-TOUCHAIS.
814
E. EID, Les actes de commerces, commerçants et fonds de commerce, 1992, p. 314.
-234-
de distinguer les ententes licites de celles qui tombent sous le coup de la disposition
pénale. Il s’agit donc d’un critère de validité et non d’existence de l’entente »815.
468. En effet, inutile de rappeler que tout monopole n’est pas considéré
illicite817 : Raison pour laquelle, il s’agit de chercher le but et l’objet des conventions
815
J.-B. BLAISE, Le statut juridique des ententes économiques, préf. R. ROBLOT, Litec, 1964, p.
172.
816
Ibid.
817
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1, 1970, p. 344, n°
179 : « Par contre, sont valables les conventions ou ententes intervenues en application d’un texte
légale (par exemple dans le secteur agricole relatives aux mesures d'adaptation aux situations de
crises pour résorber la surcapacité pour rétablir l'équilibre du marché et stabiliser les prix : Décret. nº
96-500, 7 juin 1996, relatif aux accords entre producteurs agricoles et entreprises concernant des
mesures d'adaptation à des situations de crise, JO nº 134, 11 juin 1996) ou celles ayant pour but le
développement économique (rationalisation) » ; CA Versailles, 29 mars 2001, n° 1998-3896 ; M.
GERARD, Les modes de gestion des services publics locaux en Allemagne et le problème de
l’ouverture à la concurrence, RFDA 1995, p. 462 ; Y. GUENZOUI, Entente et contrat : le trouble
notionnel, RTD com., 2006 , p. 273 : « L'on peut, en effet, appréhender ce processus de rapprochement
dans l'entente comme la perte d'autonomie, d'indépendance chez les acteurs économiques,
rapprochement impliquant donc un abandon progressif de la liberté commerciale. L'identification de
ces étapes, condensées dans ce processus, nous permettra dès lors de déceler le seuil distinguant les
ententes illicites des ententes licites » ; l'article 81, paragraphe 1er, du traité de Rome (ex-article 85)
interdit tout accord entre entreprises qui a pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de
fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun : « Sont incompatibles avec le marché
commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et
toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui
ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à
l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à:
a) fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de
transaction,
b) limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les
investissements,
c) répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement,
d) appliquer, à l'égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations
équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence,
-235-
conclues pour éviter le monopole et par la suite la sanction. Si l’objet est licite la
sanction sera évitée, tel le fait de se grouper pour obtenir l’unification des prix de
fabrication afin d’en empêcher l’avilissement818, ou bien le fait de non déterminer une
hausse factice des prix, mais de faire cesser l’avilissement que leur a fait subir la
concurrence locale819. Mais s’il apparaît que les ententes professionnelles aboutissent
à la réduction de la concurrence ou son annulation en faveur de l’intérêt personnel ou
commun des contractants, seront considérées illicites, à cause de leur violation du
principe de la liberté du commerce et de l’industrie820 et par contre contraire à l’ordre
public.
469. L’article L. 420-1 C. com. du doit français821 va dans le même sens ainsi
que l’avis doctrinal de MM. De JUGLART et IPPOLITO : « Sont prohibées toutes
ententes, conventions, coalitions soit ayant pour effet d’empêcher, de restreindre ou
de fausser le libre jeu de la concurrence822, ou bien ayant pour objet d’instaurer une
discipline collective de comportement sur le marché823 en modifiant les conditions
normales824; non seulement sont interdites les ententes « horizontales » entre
producteurs ayant la même activité, mais aussi les « intégrations verticales » entre
producteurs et agents commerciaux, ou revendeurs qui se traduisent par les « clauses
d’exclusivité » »825.
470. Une question nous interroge en revenant aux faits de l’arrêt précité : Le
contenu de la convention et son but à limiter la distribution et la commercialisation du
sel sur la côte libanaise par une seule personne, constituent-ils un monopole au sens
du décret-loi N. 32/67 ?
471. M. ABOU EID a répondu à cette question dans son étude sur la
représentation commerciale au sens du décret-loi N. 34/67, en analysant cette affaire;
il pose la question suivante: la partie demanderesse était-elle seule propriétaire de
l’extraction et de la production du sel marin au Liban ?
821
D'autres clauses ont été déclarées illicites, sur le fondement de la prohibition des ententes
empêchant, aux motifs qu'elles restreignaient ou faussaient le jeu de la concurrence sur un marché
pertinent (C. com., art. L. 420-1).
822
En faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient ou de vente, ou en favorisant une hausse
artificielle des prix, ou en entravant le progrès technique, ou en limitant l’exercice de la libre
concurrence par d’autres entreprises, par exemple les ententes entre entreprises pour fixer un tarif
commun, se repartir des quotas de fabrication ou géographiquement la clientèle : M. MALAURIE-
VIGNAL, L’abus de la position dominante, LGDJ, 2002, n° 16 et s. ; G. CANIVET et C.
CHAMPALAUNE, La notion de marché dans la jurisprudence de la chambre commerciale, financière
et économique de la Cour de cassation, Mél. P. BEZARD, Montchrestien 2002, p. 257 et s. ; L.
BIDAUD, La délimitation de marché pertinent en droit français de la concurrence, Litec, 2001, p. 78 ;
B. de BELVAL, Essai sur la notion juridique de marché, th., Lyon 3, 2000, n° 85.
823
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la concurrence interne et européen, 5e éd., D., 2011, n°
147 et s. ; M. PEDAMON et H. KENFACK, Droit commercial, Commerçant et fonds de commerce,
Concurrence et contrat de commerce, 3e éd., D., 2011, n° 618 et s.
824
A. BALLET, L’exclusivité et le réseau de distribution, th., Montpellier, 2005, n° 67.
825
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Cours de droit commercial, vol. 1, 11e éd., Montchrestien,
1995, p. 179 et s.
-237-
« - Si cette production est la seule au Liban, il est permis de dire que l’exclusivité
de la distribution et de la commercialisation du sel par la partie défenderesse,
constitue un monopole illicite. Le cas échéant, le but de cette exclusivité sera un objet
personnel, au terme duquel les contractants aboutissent à la réduction de la
concurrence et de la liberté de commerce et d’industrie.
- Mais si cette production existait sur toutes les côtes libanaises, et non limitée à
la partie demanderesse, on ne peut pas parler de monopole. Le cas échéant, on peut
dire que les propriétaires de l’extraction du sel ont limité la distribution au nord du
Liban à la partie défenderesse, et par la suite seront applicables les dispositions du
décret-loi N. 34/67 liés à la représentation commerciale sans aucun dommage à la
liberté de commerce ».
472. De tout ce qui précède, nous pouvons déduire d’après cet avis doctrinal que
nous suggérons de suivre une idée essentielle à la rédaction de la clause d’exclusivité
dans le contrat de représentation commerciale, au terme de laquelle, le commerçant
acquiert la qualité de distributeur exclusif unique. C'est dire qu’il faut toujours
chercher le but pour lequel la convention d’exclusivité sera conclue, de façon qu’elle
soit toujours licite et non dans l’intérêt personnel des parties.
-238-
826
CA Paris, 29 juin 1960, Gaz. Pal. 1960, 2, 200.
-239-
827
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 201.
828
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 463.
DEUXIÈME PARTIE
478. Comme les règles de formation des contrats, les règles générales relatives
aux effets des contrats s’appliquent, en principe, aux effets du contrat de
représentation commerciale. Antérieurement à 1967, c’est dire, avant l’entrée en
vigueur du décret-loi N. 34, c’était le droit commun des contrats qui s’appliquait
s’agissant des clauses d’exclusivité. Le principe de l’effet relatif des contrats était la
règle primordiale par excellence qui s’appliquait. La situation, alors, était très
semblable à la situation actuelle du droit français en la matière et ce, en vertu du
principe de la force obligatoire des contrats et les règles du mandat832. Nous ne
étendrons pas, pour le moment, sur les détails de ces règlementations, car, afin
d’éviter des redites, il en sera question à l’occasion de chaque élément qui sera étudié
ci-après, et ce, à titre de comparaison pouvant mieux mettre en valeur les buts
véritables et l’esprit du droit libanais en matière.
829
La relation commerciale est en effet comprise au sens large comme une « relation
professionnelle », peu important qu'elle soit ou non commerciale. Elle doit être entendue aussi comme
« une notion économique et non juridique » : CA Paris, 20 janv. 2011, n° 10/1509 ; On mesure en effet
le fossé qui sépare un agent exerçant tout seul sur un territoire déterminé de l’agent organisé en société
anonyme, actif à l’échelle d’un pays : J.-M. LELOUP Agents commerciaux, 2001, n° 103, cité par S.
MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec,
2003, n° 246.
830
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 97.
831
La protection d’une catégorie de personnes mise en place par une législation concerne tous les
membres de cette catégorie : S. MEGNIN, idem.
832
Cass. civ. n° 63 du 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, RJL,
1963, p. 957 ; CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill., 1965, p. 818.
-242-
479. C’est ainsi que, d’une part, les rapports des parties entre elles sont régis par
les termes de leurs contrats qui ne seraient pas contraires aux dispositions impératives
du décret-loi N. 34/67, et ce, en vertu du principe de la force obligatoire des
contrats833. D’autre part, les rapports des parties à l’égard des tiers seront régis par le
principe de l’effet relatif des contrats834.
833
Suivant l’art. 1134 C. civ.: « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui
les ont faites ; Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes
que la loi autorise ; Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Art. 221 C.O.C. : « Les contrats
établis d’une manière légale sont obligatoires pour les contractants, et doit se comprendre, s’expliquer
et s’exécuter selon la bonne foi, l’équité et la coutume ».
834
Art. 1165 C. civ.: « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C. : « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne, c’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
835
P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors réseau,
(A propos des affaires Leclerc-parfumerie), D., 1990, p. 43 : Pour des clauses d'exclusivité territoriale
de vente : Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199 ; Pour une clause d'approvisionnement
exclusif : Cass. com., 11 oct. 1971, Bull. civ. IV, n° 237 ; D. 1972.120.
836
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4, p. 1550 ; Juge d’exécution Al Maten,
décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860 ; Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct.
1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168.
-243-
Elle a exigé leur information par voie d’inscription au registre du commerce, bien que
la protection assurée aux tiers par ce registre soit contestable837.
481. Cependant, ce n’est pas à dire que le décret-loi N. 34/67 a réglé tous ces
problèmes. S’il en a réglé certains, tel que l’affirmation du principe de l’opposabilité
de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers, il a, par contre, totalement ignoré les
effets de cette exclusivité dans les rapports des parties entre elles : ce sera le sujet de
notre premier titre. Un second titre sera consacré à la vérification de la négligence de
nombreux aspects afférents aux rapports des parties avec les tiers, notamment la
délimitation de la portée de l’exclusivité ainsi que la valeur de l’inscription.
837
Idée que nous reprendrons en détail à l’occasion de l’étude de la valeur de l’inscription en
question.
TITRE PREMIER
482. Les rapports des parties entre elles sont régis par les termes de leurs
contrats qui ne seraient pas contraires aux dispositions impératives du décret-loi N.
34/67, et ce, en vertu du principe de la force obligatoire des contrats. C’est ainsi que
tous les effets entre les parties découlent du droit commun du contrat où les règles
générales relatives aux effets des contrats s’appliquent, le cas échéant nous n’y
revenons pas car ce qui nous intéresse c’est qui est spécifique au décret-loi N. 34/67.
483. Toutefois si ce sont les règles de la force obligatoire des contrats qui
s’appliquent dans les rapports entre les parties, cela ne veut pas dire qu’il suffit de s’y
référer pour établir le régime des conventions d’exclusivité dans les rapports des
parties à un contrat de représentation commerciale. Ce dernier bénéficie d’un régime
juridique protecteur tout aussi particulier que sa nature : Solution suivie par M. le
professeur FERRIER quand il confirme que le régime de l’agence commerciale,
inspiré par le souci de protéger le mandataire dans sa relation avec le mandant, ne
relève pas essentiellement du droit des contrats838. A ce titre, aucune divergence de
principe n’existe entre droit libanais et français, mais il existe toujours, des
divergences de détails qui ne sont pas susceptibles de modifier les grandes lignes
d’une étude à cet égard. Ces détails seront mentionnés en temps opportun et
développés uniquement dans la mesure où ils permettront une meilleure description
de l’état du droit libanais.
838
M. FERRIER considère qu’en plus de l’application du droit des contrats, il y aura lieu parfois à
l’application du droit de la concurrence pour protéger aussi les fournisseurs ou les agents concurrents et
cela suite à l’importance du rôle joué par l’agent commercial dans la diffusion des produits : D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 197.
-246-
485. D’autre part, une telle exclusivité est depuis longtemps présentée comme
caractéristique des réseaux de distribution839 et les obligations d'exclusivité sur
lesquelles elle repose comme fondamentales840. Dans les rapports entre les parties,
elle impose au cocontractant bénéficiaire de s’abstenir d’effectuer toute transaction du
genre couvert par l’exclusivité. Elle prend la forme d’une atteinte à la liberté
d’entreprendre qui en constitue l’aspect majeur et le plus classique du principe de la
liberté du commerce et de l’industrie. L’atteinte est purement conventionnelle. Cet
aspect le mieux protégé, normalement par sa consécration constitutionnelle841, est
aussi le plus limité par les pouvoirs publics842.
839
B. TEYSSIE, Les groupes de contrat, préf. J.-M. MOUSSERON, LGDJ 1975, t. 139, p. 108 :
cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE- LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 1.
840
J.-M. LELOUP, Le partage de marché par les réseaux de vente et les réseaux de distribution,
Dix ans de droit de l'entreprise, éd. Librairies techniques, 1978, p. 956 : cité par N. FERRIER, L.
SAUTONIE- LAGUIONIE, idem.
841
La liberté d’entreprendre a été reconnue par le Conseil Constitutionnel comme s’imposant au
législateur, CE Sect., 23 oct. 1981, Ministre de l’économie c/ Société Sagmar : « la liberté du
commerce ne s’exerce que dans les limites fixées par la loi ». Elle a une valeur supérieure à celle de la
loi et des limitations peuvent lui être apportées à la condition qu’elles soient d’origine législative : CE,
22 mars 1991, Association fédérale des nouveaux consommateurs et Société Tousalon.
842
La liberté d’entreprendre peut être soumise aux contraintes de l’ordre public. En effet, la
sécurité, la salubrité, la tranquillité ou la santé publique (CE, 25/11/94, Ministère d’Etat, Ministère de
l’intérieur et de l’Aménagement du territoire : fermeture d’une boucherie-charcuterie) permettent aux
autorités de police de réglementer l’exercice des professions dans la mesure où cette activité risque d’y
porter atteinte. Sa réglementation doit tenir compte des circonstances de temps et de lieu et être
strictement justifiée par les menaces que son exercice comporte pour l’ordre public : J. AURELIE et C.
ZYLBERBOGEN, Le CE et la liberté du commerce et de l’industrie, publié sur site Internet
www.droitfil.free.fr
-247-
PREMIER CHAPITRE
L’EXCÉCUTION DU CONTRAT
843
La représentation commerciale n’étant pas une forme sui-generis de l’entremise commerciale, ce
sont les règles générales du mandat qui s’appliquent au cas de silence du décret-loi n° 34/67 régissant
la représentation commerciale : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif
libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 278.
844
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
-248-
mandat d'intérêt commun en jugeant que « lorsque le mandat a été donné dans
l'intérêt du mandant et du mandataire, il ne peut pas être révoqué par la volonté de
l'une ou l'autre des parties, mais seulement de leur consentement mutuel, ou pour une
cause légitime reconnue en justice ou enfin, suivant les clauses et conditions
spécifiques dans le contrat »845.
490. Au sens du décret-loi N. 34/67, il s’agit, soit d’un mandant ou soit d’une
distribution exclusive846. L’article quatre indique que « le contrat de représentation
commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ».
En effet, si, normalement, en vertu d’un mandat ordinaire, le mandataire doit exécuter
l’acte objet du mandat dans l’intérêt du mandant847, cette exécution devrait être plus
sévèrement mesurée lorsque cette même opération est aussi faite par le représentant
dans son propre intérêt, ou si le représenté a accordé la représentation au représentant
dans l’intérêt de ce dernier848.
491. De son côté, l'article L. 134-4 du Code de commerce français affirme les
principes directeurs de l'exécution du contrat par une progression bien construite.
L'alinéa premier recopie textuellement l'article 3, alinéa 1er, du décret du 23
décembre 1958 ancien : « Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et
leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties ». Il s’agit en premier
lieu de l’intérêt de la partie représentée, ensuite de l’intérêt du représentant à l’essor
de l’entreprise par création et développement de la clientèle849. Celui-ci est d’un
intérêt certain : il consiste principalement dans l’exercice professionnel850 de la
845
Cass. civ., 11 févr. 1891, DP 1891.1.197 ; V. aussi Cass. req. 8 avr. 1857, DP 1858.1.134 ; 6
janv. 1873, DP 1873.1.116 ; Cass. civ., 13 mai 1885, DP 1885.1.350 : cité par J.-M. LELOUP, Agent
commercial, D., 2012, n° 3.
846
Art. 1 du décret-loi n° 34/67.
847
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 141.
848
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 310.
849
Cass. civ., 13 mai 1885, DP 1885, I, p. 350, S. 1887, I, p. 220, première décision publiée, elle
concernait un mandat de gestion d’immeuble : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.
note. 143.
850
T. com., Rouen commenté par J. HEMARD, sans aucune autre référence à la RTD com., 1961,
p. 663, n° 11 : Dans cette espèce, une firme productrice d’huiles fait mandat au représentant de stocker
et de manier ses huiles. Ces derniers ne prospectant pas de clientèle, le tribunal considéra qu’il n’y
avait point intérêt commun.
-249-
851
Peu important que seul le mandant ait un droit sur la clientèle : Cass. com., 24 nov. 2009, n° 08-
19.596.
852
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 179.
853
Etant donné que dans le contrat de mandat en vue de la diffusion, chaque opération profite aux
deux parties contrairement au mandat traditionnel où le mandataire intervient de manière altruiste dans
le seul intérêt du mandant : idem.
854
A la différence du mandat où le mandataire intervient en principe de manière ponctuelle pour le
mandant, les opérations dans ce cas sont appelées à se répéter. Par ex. : Le diffuseur mandataire trouve
intérêt dans la constitution, en fait d’une clientèle à répétition des opérations pour lesquelles il traite, A.
BENABENT, Le contrat d’intérêt commun, LPA 7 déc. 1990, n° 147, p. 22. Application aux diffuseurs
de presse : Cass. com., 20 fév. 2007, Contrats, conc. consom, 2007, L. LEVENEUR.
855
C. civ. art. 1831-1 : mandat d’intérêt commun dans la promotion immobilière ; art. 1833 C. civ.
en matière de société ; Ph. GRIGNON, Le concept d’intérêt commun dans le droit de la distribution,
Mél. CABRILLAC, Litec, 1999, p. 127 ; T. HASSLER, L’intérêt commun, RTD com., 1984, p. 581.
856
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 47.
857
Suivant les dispositions de l’al.1 de l’art. 1 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial
est le mandataire qui…
858
Comme nous l’avons déjà montré plusieurs reprises, le décret-loi n° 34/67 ne prétend pas
résoudre tous les problèmes, et répondre à toutes les questions susceptibles de résulter de la
représentation commerciale qui consiste dans l’exercice permanent, indépendant et professionnel d’une
activité à titre de mandataire, commissionnaire, courtier ou concessionnaire. Les règles générales du
code de commerce, des obligations et des contrats continueront à régir respectivement, chacune des
catégories de la représentation commerciale, à côté des dispositions, en majorité impératives, du décret-
-250-
494. Pour cela, une première section sera consacré aux obligations du
représentant envers le représenté. Dans une deuxième, il s’agira des obligations du
représenté envers le représentant. Le tout dans le cadre de la représentation
commerciale suivant le décret-loi N. 34/67, tout en vérifiant les obligations
communes à tous les représentants commerciaux et ceux qui en sont propres en tant
que mandataires.
loi n° 34/67. Mais dans tous les cas, les règles du mandat seront toujours applicables à toutes ces
catégories, d’abord parce que les contrats de commission et de courtage constituent des formes
particulières du mandat, ensuite, s’agissant de la concession, pour les raisons énoncées à la première
partie. C’est pourquoi, seules les obligations des parties particulières à la représentation commerciale
comme forme complexe de l’entremise commerciale seront traitées dans cette section.
859
J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 15.
860
V. Titre 2, Chapitre2 de la 1e partie : Le commerçant ayant la qualité de distributeur exclusif
unique. Il a été jugé qu’ « un concessionnaire exclusif des ventes est réputé un mandataire d’intérêt
commun car il visitait la clientèle, signalait au fabricant l’usage irrégulier de sa marque… » : CA
Lyon, 29 janv. 1964, D., 1965, 185, note R. PLAISANT.
-251-
SECTION 1
861
Distribution exclusive : C’est que les dispositions du code de commerce relatives aux
commissionnaires et aux courtiers déclarent expressément les règles du mandat civil et commercial
applicables aux rapports de ceux-ci avec le commettant ou le donneur d’ordre d’une part. D’autre
part, la notion de représentation économique et la continuité des rapports résultant de l’exclusivité
permet d’étendre les principales obligations du mandataire au concessionnaire qualifié de
représentant commercial suivant les dispositions de l’alinéa 2 de l’article 1 du décret-loi n° 34/67: M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 301.
862
Au cours de la première partie de notre étude suivant les dispositions de l’alinéa premier de
l’article premier du décret-loi n° 34/67.
863
Art. 1991 C. civ. : « Le mandataire est tenu d'accomplir le mandat tant qu'il en demeure chargé,
et répond des dommages-intérêts qui pourraient résulter de son inexécution.
Il est tenu de même d'achever la chose commencée au décès du mandant, s'il y a péril en la
demeure ».
864
D’après l’art. 786 C.O.C. cette obligation doit être entendue plus rigoureusement si la
représentation commerciale est un mandat salarié ainsi qu’un mandat d’intérêt commun : J.
HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 39 et s.
865
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, n° 176.
866
Cass. com., 2 déc. 1992, Bull. civ., IV, n° 298.
867
Art. L. 134-4 C. com. al. 3 : « L'agent commercial doit exécuter son mandat en bon
professionnel » ; Ce qui entraine alors le respect de certains devoirs, comme le devoir de renseignement
notamment : CA Paris, 1e juill. 1992, D., 1993, 79 ; CA Paris, 11 janv. 1994, JCP, éd., E., 1994, Pan.,
463.
-252-
sont les principes directeurs, combinés avec les usages professionnels et les règles du
Code civil relatives au mandat, qui gouvernent les obligations de chaque partie.
498. Le mandataire doit informer le mandant sur les diligences accomplies dans
l’exécution de la mission qui lui a été confiée870, et, plus précisément, sur le
déroulement et les résultats de cette mission871. En d’autres termes, l’objet de
l'obligation d'informer est ce qui est nécessaire au mandant pour donner des
instructions à l'agent, permettant ainsi une exécution convenable du contrat d'agence
qui les unit872. Ce qui emporte l’obligation de fournir les renseignements utiles873 sur
la situation du marché : information sur la commercialisation de nouveaux produits,
sur l’apparition d’un nouveau fournisseur….874. Il en est ainsi, aussi de l’obligation du
868
V. Supra 1e partie, n° 191 et s.
869
Lorsque c’est le cas, elle est encadrée par les instructions auxquelles l’agent doit se conformer
strictement, (suivant l’art. 1989 C. civ. aux termes duquel le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce
qui est porté dans son mandat) sauf lorsque des adaptions doivent être opérées pour assurer la suite
nécessaire et le préliminaire obligatoire de l’acte dont il est chargé ou pour protéger les intérêts du
mandant : Ph. PETEL, Le contrat de mandant, D., 1994, p. 51.
870
Les informations données au mandant se classent le plus souvent dans les rubriques : diligences
de l'agent, résultats de ces diligences, souhaits de la clientèle, état du marché, actions de la
concurrence : J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
871
En France, cette obligation ne saurait être trop lourde sous peine de requalification du contrat
d’agence commercial en contrat de VRP, voire en contrat de travail : D. FERRIER, Droit de la
distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 210 (compte rendu hebdomadaire incompatible avec
l’indépendance de l’agent : Cass. com., 20 fév. 1959, Bull. civ., 1959, IV, n° 227).
872
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
873
Art. L. 134-4 C. com., vise de manière large l’information, il s’agit d’une disposition
impérative : « Les rapports entre l'agent commercial et le mandant sont régis par une obligation de
loyauté et un devoir réciproque d'information » ; art. L. 134-16 C. com. ; Rapp. D. 1958, art.
1 : « L’agent commercial doit communiquer à son mandant toute information nécessaire à l’exécution
de son contrat » : cité par D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., note 230.
874
L’agent qui bénéfice d’une réelle compétence au regard du marché sur lequel il intervient peut
être en raison de cette obligation amené à participer à l’élaboration de la politique commerciale du
mandant. Ainsi dans les contrats concernant des marchés étrangers où des exigences règlementaires
liées à la normalisation des produits et des incertitudes commerciales liées au contexte économique
-253-
nécessitent l’adaptation des produits, l’agent est tenu de signaler les normes applicables aux produits
voire de conseiller des prix adaptés au marché : D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 210.
875
Le décret du 10 juin 1992 a inséré dans le décret du 23 déc. 1958 un texte d'application de
l'article 4 de la loi : « L'agent commercial doit communiquer à son mandant toute information
nécessaire à l'exécution de son contrat ».
876
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 55.
877
Ibid., n° 47.
878
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306, p. 467.
879
Art. 1993 C. civ. : « Tout mandataire est tenu de rendre compte de sa gestion, et de faire raison
au mandant de tout ce qu'il a reçu en vertu de sa procuration, quand même ce qu'il aurait reçu n'eût
point été dû au mandant ».
-254-
501. Si le contrat d’agence commerciale entraine bien entendu pour les deux
parties un certain nombre d’obligations, l’élément essentiel reste que celles-ci doivent
être exécutées dans le respect de la bonne foi et de la loyauté dans les rapports
réciproques entre contractants. Sur ce point, rappelons que la notion de bonne foi
nécessite un approfondissement. En droit français, cette notion reste un concept
relativement étroit, car la doctrine comme la jurisprudence ne retiennent qu’une
approche subjective en accordant une place fondamentale à l’intention qui anime une
partie lors de son acte880. Elle renvoie d’un côté au principe de loyauté dans
l’exécution des conventions tel que posé à l’article 1134, al. 3 C. civ.881, mais peut
également signifier d’un autre côté la croyance erronée et légitime d’une personne en
l’existence ou non d’un fait ou d’un droit882. Ce concept est consacré par le deuxième
alinéa du troisième article du décret-loi N. 34/67883, qui manifeste l’obligation d’être
attaché au principe de l’équité et de la loyauté commerciale884 prévu dans le troisième
article du Code de commerce libanais885.
502. Ce devoir de loyauté constitue une véritable notion « cadre »886, qui coiffe
l’ensemble des obligations des parties. Ainsi, il ne suffit pas pour une partie de
remplir ses obligations à l’égard de l’autre, encore faut-il qu’elle les remplisse
loyalement, c’est dire de la manière la plus avantageuse pour l’autre partie. Le contrat
880
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME.,
Litec, 2003, n° 217.
881
Art. 1134 C. civ. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ».
882
S. MEGNIN, idem. ; Ph. LE TOURNEAU, Bonne foi, Rép. civ. Dalloz, 2e éd. 2009 (avec M.
POUMAREDE ; 1ere éd. 1996), n° 2 et s.
883
Art. 3. al. 2 décret-loi n° 34/67 : « Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice
des activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut
plus particulièrement:
Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition que
l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue
pas une concurrence à celle –ci ».
884
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, l’art. 3, p. 90 et s.
885
Art. 3 C. com. : « A défaut de toute disposition légale applicable, le juge pourra s’inspirer tant
des précédents jurisprudentiels que des exigences de l’équité et de la loyauté commerciale ».
886
Y. PICOD, Le devoir de loyauté dans l’exécution du contrat, préf. G. COUTURIER, Paris,
LGDJ, 1989, n° 70 et s.
-255-
d’agence est une œuvre commune, dans lequel les parties sont étroitement liées887, et
met en place un rapport continu d’obligation qui exige le respect d’une exécution
loyale des obligations de chaque partie. L’agent doit remplir sa mission au mieux des
intérêts de son commettant, pour ensuite pouvoir prétendre à sa rémunération888 ; pour
cela, le commettant doit assurer à son agent les conditions de travail les plus
performantes pour l’aider à exécuter le plus efficacement sa mission889. Dès lors,
l’encadrement de ces obligations par la notion de bonne foi et de loyauté est
incontournable. Si la loi890 et la jurisprudence891 françaises ont repris la référence à la
loyauté nécessaire entre les parties, ce principe n’apparaît pas dans le décret-loi
libanais. Mais en tout cas, cette exigence de loyauté commande, en principe, une
obligation de non concurrence (paragraphe 1) et une obligation de garantie
(paragraphe 2) et justifie parfois une obligation d’exclusivité892. Obligations qui
incombent au représentant commercial et qui ne découlent plus de la nature juridique
du mandat, mais plutôt de l’organisation professionnelle du représentant suivant
l’article 3 du décret-loi N. 34/67893.
887
Ce qui renvoie à la conception du mandat d’intérêt commun pour les deux droits libanais et
français dans lequel les parties collaborent à une finalité commune.
888
L’art. 134-2 C. com. exige que l’agent exécute son mandat en bon professionnel et l’article 1 du
décret-loi n° 34/67 dispose que le représentant commercial par sa profession habituelle doit agir…
889
Cass. com., 24 nov. 1998, JCP, éd E. 1999, 1242, note C. JAMIN.
890
L’art. 134-2 C. com. : Les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une
obligation de loyauté…
891
Un célèbre arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation a illustré ce principe en
considérant que de simples doutes émis publiquement par l’agent commercial sur l’honnêteté et la
compétence du mandant caractérisaient un manquement à l’obligation de loyauté et justifiaient la
cessation des relations contractuelles : Cass. com., 17 mars 1998, Lamy affaires, n° 289. Cela rejoint le
sens généralement rattaché en France à la bonne foi, qui caractérise le comportement loyal et honnête
des parties : P. JOURDAIN, La bonne foi dans la formation du contrat, Rapport français : Travaux de
l’association H. Capitant, t. 13, 1992, 121.
892
D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., n° 206.
893
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
-256-
504. Vu que cette obligation trouve source dans l’article 3 précité du décret-loi
N. 34/67, son origine dérive du principe de la liberté du commerce et de l’industrie, et
ses applications pratiques, telles que définies par les usages de l’exercice honnête du
commerce895. Cette règle est énoncée à l'article L. 134-3 selon laquelle l'agent « ne
peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses
mandants sans accord de ce dernier » est dans la droite ligne de la qualification du
contrat d'agence.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
894
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 53.
895
En droit communautaire le règlement nº 330/2010 et les lignes directrices qui l'accompagnent
distinguent plusieurs types d'accords de distribution dont les accords stipulant une obligation d'achat
exclusif, également qualifié de « mono-marquisme » ou d'« obligation de non-concurrence ».
-257-
A- La teneur
506. Interdire tout acte de concurrence quelle qu’en soit l’amplitude : question
qui a été sujet de nombreuses discussions. S’il fallait s’en tenir à la définition de la
concurrence condamnable en matière de représentation commerciale, le législateur
n’aurait pas pris soin d’y consacrer un article spécial du décret-loi N. 34/67. Le fait
qu’il ait envisagé le problème à nouveau montre son intention d’interdire aux
représentants tout acte de concurrence, à titre de condition pour le bénéfice du statut
prévu. Deux ordres de justifications confirment la nécessité de l’obligation de non-
concurrence qui incombe au représentant à l’égard du représenté. Le premier ordre de
justification s’attache à la nature des rapports qui lient le représentant et le représenté
(a). Le second s’attache au mécanisme d’exécution du contrat de représentation
commerciale (b).
507. Rappelons que ce lien est celui d’intérêt commun896. Ce dernier accordé au
représentant doit mieux veiller aux intérêts du représenté en s’abstenant d’effectuer
tout acte de nature à lui porter préjudice897. C’est cet intérêt commun existant entre le
représenté et le représentant qui impose à ce dernier de s’abstenir d’effectuer tout acte
concurrentiel quelle qu’en soit la nature898. C’est à ce titre, en fin de compte, que
l’obligation de non-concurrence s’impose au représentant. Cette notion explique, par
ailleurs, pourquoi toute concurrence est prohibée, et non seulement, celle revêtant un
caractère illicite. En effet, la concurrence illicite est sanctionnée dans les rapports des
896
Suivant l’art. 4. du décret-loi n° 34/67, (modifié suivant le décret 9639 du 6/2/1975) : Le contrat
de représentation commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des parties contractantes ;
Art. L. 134-4 C. com., al. 1 : « Les contrats intervenus entre les agents commerciaux et leurs mandants
sont conclus dans l'intérêt commun des parties ».
897
CA Poitiers, Ch. civ., 02, 18 janv. 2011, n° 07/00003 ; C. CHAMPAUD, D. DIDIER, Associé
minoritaire, Salarié démissionnaire, Création d'une entreprise concurrente, Obligation générale de
non-concurrence (non). Réparation du préjudice (non), D., 2010.
898
Selon la jurisprudence, il résulte de cet intérêt commun que le mandat emporte une obligation de
non-concurrence de plein droit à la charge du mandataire : Cass. com., 16 mars 1993, D., 1994, p. 224,
note Y. PICOD, ce qui n’exclut pas la possibilité pour le mandataire de représenter un autre mandant
non concurrent du premier : D. FERRIER, Droit de la distribution, op.cit., note 159.
-258-
899
En effet, la répression de la concurrence illicite et l’incrimination de son auteur est soumises à
des conditions très rigoureuses relativement à l’imputabilité et à l’intention de l’auteur, de sorte que,
souvent, il est très difficile d’en apporter la preuve certaine qui autorise d’infliger la répression. Par
conséquent, de nombreux actes, en eux nuisibles aux commerçants et à l’économie, ne tombent pas
sous le coup de la loi pénale, ni même celui de la loi civile : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 139.
900
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 173.
901
A. BRUNET, Clientèle commune et contrat d’intérêt commun, Etudes dédiées à A. WEILL, D.,
1983, p. 85 et s.: l’auteur fonde la reconnaissance d’un contrat d’intérêt commun sur l’existence d’une
clientèle commune.
902
Le mandataire d’intérêt commun diffuse de manière habituelle des produits ou services au nom
et pour le compte du mandant en prospectant une clientèle et en recueillant des commandes : D.
FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 175. Dans le même sens, il a été jugé que le diffuseur
d’abonnements téléphoniques qui ne conclut pas de contrat au nom et pour le compte du fournisseur
n’est pas un mandataire d’intérêt commun : Cass. com., 21 juin 2011, Contrats, conc. consom. 2011,
comm. 190, obs. N. MATHEY.
903
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME,
Litec, 2003, p. 172.
-259-
904
Par l’exigence du principe de loyauté ; S. LEBRETON, L’exclusivité contractuelle et les
comportements opportunistes, Etude particulière aux contrats de distribution, préf. M. PEDAMON,
Litec, 2002, n° 160 et s.
905
Art. 3 du décret-loi n° 34/67 : Le représentant commercial est indépendant dans l’exercice des
activités de sa représentation et dans l'organisation de son activité commerciale habituelle, et peut plus
particulièrement :
1 - Effectuer des opérations commerciales pour son propre compte.
2 - Accepter la représentation de nouveaux mandants sans en référer à son mandant à condition
que l'objet de la nouvelle représentation ne soit pas en contradiction avec la première ou bien ne
constitue pas une concurrence à celle-ci.
3 - Nommer des représentants à lui ou employer des salariés subordonnés qui paye leurs
salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants. Et
dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations respectives, soit aux
dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
906
Résultant de la concurrence interdite qui est à distinguer de la concurrence déloyale. La
concurrence interdite sanctionne la violation d’une règle et recouvre deux situations. Si la règle violée
est légale, la concurrence est dite « illégale ». Si elle a une origine contractuelle, telle par exemple la
violation d’une clause de non concurrence, elle prend le nom de concurrence « anti-contractuelle » : Y.
PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 40.
907
La violation, en effet, de cette obligation constitue une faute grave de nature à priver le
représentant de l’indemnité de rupture : CA Douai, 21 oct. 1966, Gaz. Pal., 1967, 2 e sem. p.14, n° 7.
-260-
510. Cela résulte des termes explicites de l’article 3 en question : son deuxième
alinéa, interdit l’acceptation de représentations nouvelles dont l’objet est simplement
en contradiction avec celui de la première représentation, ou bien constitue une
concurrence à celle-ci. Il ressort, a priori, de ce texte que tout acte de concurrence est
absolument prohibé. Un regard vers les dispositions du Code pénal, sur ce point nous
aide pour le prouver909.
511. Tout l’intérêt de ces dispositions porte sur le sens qu’il faut donner à l'objet
de la nouvelle représentation pour qu’il ne soit pas en contradiction avec la première
ou bien ne constitue pas une concurrence à celle-ci. L’idée de concurrence a son
siège, non dans la nouvelle représentation elle-même, mais bien dans les produits
qu’elle fabrique et distribue, sur le marché sur lequel elle intervient 910. Ce sont,
comme en droit de la concurrence, les marchés de produits ou la marque qui sont pris
en considération et non l’entreprise concurrente en tant que telle, par référence au
caractère substituable ou non des produits911. L’expression employée par le législateur
français est en ce sens un peu courte912 puisqu’il s’est basé sur l’expression
« entreprises concurrentes »913, tandis que le législateur libanais a suivi une notion
plus large et claire en conditionnant que l'objet de la nouvelle représentation ne soit
pas en contradiction avec la première ou bien ne constitue pas une concurrence à
celle-ci.
908
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, op. cit., n° 41.
909
Au Liban, le droit de la concurrence n'existe presque pas. En effet, il n'existe que quelques textes
éparpillés concernant par exemple la concurrence frauduleuse (art. 714 du code pénal), la concurrence
déloyale et le parasitisme (on se base sur la faute art. 122 du C.O.C), la spéculation frauduleuse (art. 73
du décret-loi n° 73 du 9-9-1983) et l'art. 14 du décret-loi n° 73 du 19-9-1983 annulant les monopoles
qui nuisent à la concurrence et condamnant les auteurs du délit à une amende et à un emprisonnement
de 6 mois à 3 ans.
910
CA Beyrouth, Ch. 1, n° 58/ 1969, arrêt n° 149 de 4 mai 1978, Albert Malek c/ Société Fock et
Fohl, Rev. al Adl, 1980, p. 124 à 127.
911
Y. PICOD, La réciprocité de l’obligation de loyauté et d’information entre le mandant et l’agent
commercial, D., 2002, somm., p. 1263, citant un arrêt de la CA Paris du 8 mars 2001.
912
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 312.
913
Art. L. 134-3 C. com. : « l'agent commercial ne peut accepter la représentation d'une entreprise
concurrente de celle de l'un de ses mandants sans accord de ce dernier ».
-261-
512. C’est dire que deux éléments sont indispensables pour l’acceptation de
nouvelles représentations par le représentant : la non contradiction de l’objet
commercial et la non concurrence de ce dernier avec la première représentation. Par
cela, le législateur libanais a bien précisé, que c’est l’objet de la concurrence qui ne
doit pas être concurrent en soi-même et non pas l’entreprise en tant que telle comme
indiqué en droit français914. En effet, le législateur, n’ayant pas réglé les modalités de
l’exclusivité, ni apporté une exigence particulière à ce sujet, a entendu en laisser la
libre détermination aux parties.
914
L’appréciation du caractère concurrent des produits en cause sera parfois délicate, la directive
européenne de 1986 se réfère de manière souple à leur « type » (art. 20-2) : D. FERRIER, Droit de la
distribution, op.cit., n° 207.
915
Sur ce point le Doyen ROUBIER a opéré une classification des actes de concurrence déloyale
qui dégage quatre sortes de déloyauté : la confusion dans l’esprit du public (l’imitation des produits ou
des signes distinctifs d’un concurrent), le dénigrement de l’entreprise concurrente, la désorganisation
interne d’une entreprise rivale, la désorganisation générale du marché : P. ROUBIER, Le droit de la
propriété industrielle, t. 1, Sirey, 1952, n° 110. Par la suite, M. SAINT-GAL a ajouté l’hypothèse du
parasitisme, qui sanctionne le comportement d’un commerçant n’étant pas nécessairement en
concurrence avec une autre personne : Y. SAINT-GAL, Concurrence déloyale et concurrence
parasitaire, RIPIA, 1956, p. 37 ; Protection et défense des marques de fabrique et concurrence
déloyale, 5e éd., Delmas, 1982. L’élément constant de toutes ces hypothèses tient à la souplesse du
fondement technique utilisé : l’art. 1382 C. civ.
916
CA Caen, 28 oct. 1966, Gaz Pal., 1967, 1 er sem., p. 12, n° 10 : Dans cette espèce, il est
expressément prévu que « l’agent commercial qui est lie à son mandant par un contrat conforme au
décret du 23 déc.1958 n’est pas tenu de déclarer ses autres mandants si aucune obligation n’est
formulée en ce sens ».
917
Cass. com., 26 mars 1966, Bull. civ., IV, 154.
918
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 171.
-262-
919
CA Paris, 9 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001.
920
La réciprocité de l’obligation de loyauté et d’information entre le mandant et l’agent
commercial, Y. PICOT, D., 2002, somm., p. 1263, citant un arrêt de la CA Paris du 8 mars 2001 ; F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., p. 171.
921
CA Paris, 6 fév. 2002, Juris-Data n° 181850 ; Cass. com., 19 nov. 1996, JCP, éd. E., 1997, pan
30.
922
CA Paris, 22 janv. 2002, Juris-Data n° 181709.
923
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., p. 172.
924
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 312.
925
Le trouble peut résulter de l’affaiblissement ou de la banalisation de l’image de la marque d’un
producteur, de nature à affecter la rentabilité des investissements qu’il a réalisés : D. FERRIER, Droit
de la distribution, op. cit. n° 440 ; L’article 115-17,7 C. consom., punit de 2 ans d’emprisonnement et
d’une amende de 37500 € le fait de mentionner sur un produit la présence dans sa composition d’un
autre produit bénéficiant d’une appellation d’origine lorsque cette mention détourne ou affaiblit la
réputation de l’appellation concernée : Cass. com., 30 janv. 1996, D. 1997, 232, obs. Y. SERRA :
-263-
516. L’intention du législateur ayant été telle, l’article 3, et, par conséquent,
l’obligation de non-concurrence doivent être largement interprétés. En effet, non
seulement les nouvelles représentations concurrentielles sont prohibées, mais tout acte
à cet égard, et quelle qu’en soit la valeur, l’est, car si le représentant peut faire des
opérations commerciales indépendantes, celles-ci ne doivent nullement être
concurrentielles au représenté.
517. Au surplus, bien que l’alinéa 2 de l’article 3 ne prohibe que les nouvelles
représentations concurrentielles, la prohibition doit s’étendre à tous les actes pouvant
être entrepris par le représentant en dehors de l’objet de la représentation. Cela
découle de l’esprit du décret-loi N. 34/67 et de l’intention du législateur, car, si celui-
ci est tenu d’accorder des avantages certains au représentant commercial, ces
avantages sont la contrepartie des restrictions imposées à celui-ci même, au titre de la
non-concurrence, et en vue de l’exécution de la bonne foi du contrat de
représentation. S’il en était autrement, tout représentant commercial aurait pu frauder
la loi en prétendant que l’ensemble des opérations concurrentielles par lui effectuées
l’ont été non à titre de représentation, mais plutôt, à titre d’opérations indépendantes.
banalisation d’un message publicitaire ; CA Paris, 11 fév. 1989, D.1995, somm, p. 96, obs. J.-J.
BRUST: banalisation d’une marque et diminution de son prestige ; V.-M. NUSSENBAUM, Evaluation
du préjudice de marque, Le cas particulier de l’atteinte à l’image de marque, JCP, E, 1993, I, 303.
926
D’un point de vue français, il a été relevé que cela détruirai alors la finalité du contrat d’agence
commerciale, qui repose sur la notion d’intérêt commun, car la déloyauté est ce qui crée, à l’issue du
cocontractant, une divergence d’intérêt commun : J.-M. LELOUP, JCP., éd. E., 1992, chron° 105, n°
27 ; La jurisprudence n’hésite d’ailleurs pas à étendre cette solution à tout mandant d’intérêt commun
lorsque les conditions d’application de la loi sur les agents commerciaux ne sont pas réunies : Cass.
com., 16 mars 1993, D. 1994, somm. 224, obs. Y. PICOD ; Ph. GRIGNON, Le concept d’intérêt
commun dans le droit de la distribution, Mél. CABRILLAC, Litec, 1999, p. 127.
-264-
n’est pas non plus absolue puisqu’elle disparaît au moment où le mandant autorise la
représentation d’autres entreprises concurrentes928. De même, selon la jurisprudence,
cette interdiction disparaît lorsque l’agent a informé son mandant et que ce dernier ne
s’est opposé à la représentation concurrente929.
B- La portée
927
CA Paris, 9 oct. 2001, Lettre distrib., 2001, 11 ; Art. L. 134-3 C. com. : « l'agent commercial ne
peut accepter la représentation d'une entreprise concurrente de celle de l'un de ses mandants sans
accord de ce dernier ».
928
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, p. 170.
929
Cass. com., 25 juin 2002, n° pourvoi 99-20.063, arrêt n° 1233 : la représentation concurrente est
admise « en l’absence de contestation des affirmations de l’agent selon lesquelles le mandant
connaissait » le lien concurrent.
930
Cass. soc., n° 09-68.537, D., 28 sept. 2011 ; CA Rennes, n° 11/02250, D., 27 sept. 2011 ; CA
Toulouse, Ch. 02 Sect., 02, D., n° 09/03958, 21 juin 2011.
931
L’acceptation pourrait selon la jurisprudence être tacite : CA Bordeaux, 4 déc. 1969, Gaz. Pal.,
1970, 1, p. 27.
932
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous art. 3, n° 7.
-265-
521. Dans ce cas, l’exclusivité demeure, et il ne pourra pas être dit que les
parties ont convenu, par ladite autorisation, d’abroger la clause d’exclusivité. Le
représentant ne pourra pas s’en prévaloir pour accueillir d’autres représentations.
Pareillement la firme représentée ne pourra s’en prévaloir pour refuser au représentant
les avantages constituant la contrepartie de l’exclusivité, ou même lui nier la qualité
de représentant commercial et le priver ainsi des dispositions du décret-loi N. 34/67.
522. Mais, bien entendu, une telle solution s’applique uniquement lorsque la
clause d’exclusivité est rédigée en termes généraux, vu que la distribution exclusive
postule la désignation d’un seul distributeur pour un territoire donné ou une clientèle
définie934. Il en est différemment lorsque les parties conviennent de modalités
particulières relativement à l’objet de la représentation ou au secteur d’opération.
Dans le premier cas, il peut être convenu que l’exclusivité se limite à une catégorie
déterminée de produits, comme, par exemple, la catégorie des produits industriels935 ;
le représentant garde alors le droit d’obtenir d’autres représentations comme le
vêtement. Dans le second cas, relatif au secteur protégé, le représentant s’engage à ne
représenter, dans le secteur en question, que son co-contractant. Mais, il garde le droit
de représenter toutes autres firmes exerçant ailleurs. C’est ainsi que, si l’exclusivité
est limitée au Liban, le représentant ne pourra représenter au Liban que sa firme co-
933
Surtout aux deux catégories de personnes suivant les alinéas 1 (représentant mandataire) et 2
(commerçant représentant) de l’article 1 du décret-loi n° 34/67.
934
J. VOGEL et L. VOGEL, Aspects économiques des relations fournisseurs-distributeurs, Le droit
de la concurrence et le droit de la distribution prennent-ils suffisamment en compte l’analyse
économique des restrictions verticales ? Rev. conc., s, 1-2011, n° 41.
935
D. FERRIER, Concurrence-Distribution, D., 2012, p. 577, n° 2 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 01
B, n° 10/05877, D., 09 déc. 2010 ; CA Paris, Ch. 05 B, n° 08/14160, D., 21 juill. 2008 ; CA Versailles,
Ch. 01, Sect. n° 01 - 05/04367, D., 08 juin 2006.
-266-
523. Il a été jugé dans l’ensemble qu’« une clause de non concurrence est en
principe licite et ne doit être annulée que dans la mesure où elle porte atteinte à la
liberté du travail en raison de son étendue dans le temps, dans l’espace et quant à la
nature de l’activité exercée. La restitution devant être appréciée en fonction de ces
trois critères. En conséquence, est justifiée la décision refusant d’annuler une telle
clause interdisant à un représentant toute concurrence pendant les cinq années
commençant à courir à compter de la rupture du contrat dans un rayon de 500 km à
vol d’oiseau d’une ville déterminée, dès lors qu’il est constaté que l’intéressé, n’étant
pas spécialiste pouvait, malgré cette interdiction temporaire, entreprendre une
représentation de produits différents, ou continuer à exercer son activité ancienne sur
une portion nettement délimitée du territoire français »937.
936
Au demeurant, il a été jugé que l’agent commercial est souvent autorisé à distribuer des produits
concurrents en limitant cette possibilité, de nature que la nouvelle activité ne soit pas de nature à
affecter l’exécution des autres missions précédentes qui lui ont déjà été confiées : CA Paris, 9 oct.
2001, Lettre distrib., 2001-11 ; P. CRAHAY, Guide des contrats internationaux d’agence et de
concession de vente, Bruxelles, 1989, 63 ; Dans le même sens, en droit communautaire le distributeur
sélectionné doit évidemment être libre de « prospecter la clientèle, établir des succursales, entretenir
des dépôts dans n'importe quel État membre », puisqu'il n'existe pas d'exclusivité territoriale au profit
des autres distributeurs sélectionnés comme d'ailleurs à son profit : Décis. no 77/100 de la Commission,
21 déc. 1976, JOCE, no L 30, 2 févr. 1977, Junghans, pt 29. Ainsi constitue une restriction de
concurrence tombant sous le coup de l'article 101, § 1er, l'interdiction faite à un distributeur sélectionné
établi dans un État membre mais chargé de commercialiser les produits dans un territoire situé hors de
l'Union européenne de revendre directement ou de réexporter ces produits dans l'Union Européenne :
CJCE, 28 avr. 1988, Javico, aff. C-306/96, Rec. I. 1983.
937
Cass. com., 20 mars 1973, n° 72-10.760, Bull. com., n° 127, p. 111.
938
CA Colmar, 5 nov. 1958, D. 1959. 183, note P. VOIRIN.
939
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 207 ; S. MEGNIN, Le
contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME., Litec, 2003, n° 321 et s.
-267-
cette obligation justifierait la rupture du contrat sans indemnité940 ou, peut constituer
un élément contribuant à la reconnaissance d’une faute grave privative d’indemnité941.
940
Cass. com., 7 juill. 1993, n° 82-12.271, Bull. civ. IV, n° 209, p. 182, RTD com. 1994, p. 104 ;
Cass. com., 21 juin 1967, n° 66-11.426, Bull. civ. III, n° 259, p. 250 : Sur l’interdiction contractuelle
faite à un agent commercial de représenter un matériel concurrent « présentant les mêmes
caractéristiques techniques que celui vendu » par l’autre mandant. Le premier mandant avait alors
demandé au mandant de choisir entre les deux représentations. Cette concurrence entraine légitimement
la résiliation sans indemnité du contrat de mandat commercial pour le mandataire qui avait violé
l’interdiction contractuelle de représenter du matériel présentant les mêmes caractéristiques techniques
que celui vendu par son mandant.
941
T. com., Pau, 23 juin 1999, Lettre distrib., 1999.
942
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2, 1988,
sous art. 3, n° 6.
943
v. 1e partie, titre 1, Ch. 2, sect. 2 (L’action au nom d’autrui).
-268-
firme, c’est qu’il violerait l’obligation par lui contractée auparavant à l’égard de la
première firme en lui retirant la clientèle en question à son profit.
527. Une conséquence très importante en découlera alors, les clauses des
contrats de représentation imposant au représentant de traiter tous les produits même à
venir de la firme représentée, doivent être considérées comme inefficaces chaque fois
que les nouveaux produits sont concurrentiels à une autre firme représentée. Cela peut
paraître contradictoire avec la possibilité pour les parties de convenir d’une clause
d’exclusivité en faveur de l’une ou de l’autre d’entre elles. En réalité, cette
inefficacité proviendrait du caractère potestatif de la faculté ainsi accordée à la firme
représentée. Cependant, si cette clause était assortie de limitation permettant au
représentant de ne plus être à la merci de la volonté exclusive du représenté, elle serait
alors valable. Il en serait ainsi des clauses interdisant au représentant de représenter
des firmes produisant un genre déterminé de produits. En tout cas, les juges du fond,
en ce domaine, jouissent d’un pouvoir d’appréciation considérable, étant donné que la
preuve du caractère potestatif simple ou pure requiert un examen minutieux des
circonstances, examen ressortissant de la souveraineté du juge. Ce pouvoir que
possède le juge pour former sa conviction dénote qu’il ne s’agit point là d’une
condition imposée par le législateur de manière non fondée.
944
Art. 2 : Ce contrat de représentation commerciale peut contenir une clause d’exclusivité stipulant
la garantie du représentant envers ceux avec lesquels il contracte pour le compte de son représenté
(ducroire), Art. 3 : Le représentant commercial peut … nommer des représentants à lui ou employer
des salariés subordonnés qui paye leurs salaires ou leurs commissions et qui n'auront de relations
qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants.
945
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 238.
-269-
d’informer son commettant des clients dont la situation financière pourrait poser
problème. Il commettra une faute grave s’il traite une affaire avec un client reconnu
insolvable946, en supportant les dommages-intérêts subi par son entreprise, alors que
son commettant disposera d’un motif de rupture du contrat d’agence sans
indemnité947.
946
La responsabilité civile du commettant a pour but unique de protéger les tiers et le Trésor public
contre l'insolvabilité de l'auteur de l'infraction, et non de décharger celui-ci dans une mesure
quelconque de la responsabilité qui lui incombe : Cass. crim., 11 juill. 1978, Bull. crim., n° 231.
947
Par contre, si une fois ces renseignements transmis, le commettant décide de conclure l’affaire
avec ce client, que celui-ci ne s’exécute pas, la perte qui peut en découler sera supportée par le
commettant, alors que le risque pour l’agent se limitera à la perte de sa commission sur cette affaire.
Toutefois, il existe une possibilité pour le commettant de faire transférer ce risque sur son agent à
travers une convention spéciale que l’on appelle « ducroire » : S. MEGNIN, Le contrat d’agence
commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 195 ; Il a été relevé que le
recours à une telle clause s’est raréfié du fait de l’essor de l’assurance-crédit et des bureaux de
renseignements commerciaux : J.-M. LELOUP, Agents commerciaux, 2001, note 1 sous n° 810.
948
Le commissionnaire qui a reçu un relevé de compte le constituant débiteur en vertu de la
convention de ducroire, et l'a accepté sans protester, doit être considéré comme ayant reconnu
l'existence de cette convention : CA Aix-en-Provence, 23 nov. 1937, DH 1938. 105 : cité par P.
CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012.
949
Ainsi, selon les usages de la place de Marseille, le commissionnaire vendeur est toujours
ducroire dans les ventes de sucre : CA Aix-en-Provence, 29 avr. 1866, Rec. Marseille 1866. 1. 148. Les
usages en vigueur dans les relations entre support de publicité, agent de publicité et annonceur
attribuent, sauf convention contraire, à l'agent de publicité le double rôle de commissionnaire ducroire
du support et de conseil de l'annonceur : Cass. com., 5 mars 1969, Bull. civ., IV, n° 88 ; CA Paris, 15
nov. 1968, Quot. Jurispr. 1969. 6 ; et, en matière de presse, pour un dépositaire distributeur : CA
Rennes, 9 juill. 1974 : cité par P. CHAUVEL, Commissionnaire, D., 2012.
950
A. WAHL, Précis théorique et pratique de droit commercial, 1922, Sirey, n° 1351. Cette
opinion se trouve confortée par une décision de la Cour de cassation : Req. 6 mars 1935, S. 1935. 1.
210 où on objecte cependant, en général, que le cautionnement est un contrat accessoire qui garantit un
engagement principal. Or, dit-on, il n'y a pas de « contrat principal » entre le tiers et le commettant : le
commissionnaire est seul obligé envers ce commettant, qui n'a pas d'action directe contre le tiers
débiteur : P. CHAUVEL, Commissionnaire, op. cit.
-270-
530. Souvent stipulée dans les contrats passés par les intermédiaires
commerciaux, la clause de ducroire ne revêt pas toujours la même signification dans
l'esprit des parties. Ainsi, le commissionnaire supportant une obligation de résultat en
recherchant sa pleine exécution au profit du commettant956. Mais le plus souvent, il ne
supporte que l’obligation de mettre en œuvre les moyens nécessaires à la diffusion des
produits sans pour autant garantir leur vente et leur paiement957. Cette responsabilité
atténuée s’aggrave quand l’agent commercial doit supporter les conséquences de
l’inexécution du contrat par le client et donc les risques de la réussite de l’opération
conclue pour le compte du mandant958. Cas identique de celui qui se porte fort de
l'exécution d'un engagement par un tiers ; dans ce cas il se contraint accessoirement à
l'engagement principal souscrit par le tiers devant satisfaire, si le tiers ne s'exécute pas
lui-même959.
951
S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en droit français et allemand, op. cit., p. 195.
952
Le commissionnaire ducroire répond purement et simplement de l'inexécution, dès l'arrivée du
terme et sans bénéfice de discussion : E. THALLER, Traité élémentaire de droit commercial à
l'exclusion du droit maritime, par J. PERCEROU, t. 1, suppl. 8e éd., Rousseau, 1936, n° 1128 ; L.
LACOUR et J. BOUTERON, Précis de droit commercial, t. 1, 3e éd., D., 1925, n° 948 : cité par P.
CHAUVEL, Commissionnaire, op. cit.
953
CA Douai, 2 déc. 1999: BICC 1 août 2000, n° 1003.
954
Cass. civ., 1ere Ch., 25 janv. 2005, Bull. civ., I, n° 43 ; D., 2005. IR 387 ; JCP 2006. II. 10021,
note Ph. SIMLER ; Defrénois 2005. 908, obs. J. HONORAT ; Contrats, conc. consom. 2005, n° 81,
note L. LEVENEUR ; RTD civ., 2005. 391, obs. J. MESTRE et B. FAGES.
955
Cass. com., 17 juill. 2001, Contrats, conc. consom. 2001, n° 170, note L. LEVENEUR.
956
Cass. com., 6 janv. 1981, Bull. civ., 1981, IV, n° 4, JCP, G. 1982, II, 19829, note J. HEMARD.
957
Cass. com., 18 nov.1969, Bull. civ., 1969, IV, n° 343.
958
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 238.
959
Cass. com., 18 déc. 2007, JCP 2008. 1. 152, n° 13, obs. Ph. SIMLER ; Banque et droit
2008/118, p. 43, note N. RONTCHEVSKY et F. JACOB.
-271-
960
Cass. com., 22 oct. 1996, Bull. civ. IV, n° 246, p. 213, Defrénois, 1997.330, obs. Ph.
DELEBECQUE , Contrats, conc. consom. 1997, n° 21, obs. L. LEVENEUR ; D., 1998, 511, note
ARLIE D.- Rapp. BEAUCHARD J., Droit de la distribution et de la consommation, Thémis Dr. privé,
PUF, 1996, p. 158 : estime que le ducroire ne saurait garantir la force majeur, Cass. com., 22 oct. 1996,
JCP, G, 1997, I, 4033, n° 12, note Ph. SIMLER.
961
Cass. com., 6 janv. 1981, Bull. civ., IV, n° 4, p. 4 ; JCP 1982.II.19829, note J. HEMARD.
962
M. VIVANT, Convention de ducroire, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc., n° 955 ; Sur la nature
juridique de ducroire : D. HENNEBELLE, La spécificité de la nature juridique du ducroire
d’intermédiaire, JCP, E, 2000, 1366.
963
M. CABRILLAC, C. MOULY, S. CABRILLAC, PH. PETEL, Droit des sûretés, 9e éd.,
LexisNexis, 2010, n° 450 ; Ph. SIMLER et Ph. DELEBECQUE, Droit civil, Les sûretés, la publicité
foncière, 1995, n° 11 ; F. GORE, Le commissionnaire ducroire, Etudes sur la commission, préf. J.
HAMEL, 1949, p. 307 ; (Ceci étant, la Haute juridiction réserve cependant la possibilité
conventionnelle de limiter la portée de cet engagement, et notamment de la cantonner à la simple
garantie des clients notoirement insolvables. Mais tel n'était pas manifestement le cas en l'espèce
puisque, aussi bien, les deux clauses de l'acte avaient clairement vocation à vivre en parallèle, l'une
invitant l'agent à se défier des clients de ce type et l'autre mettant beaucoup plus largement à sa charge
l'engagement de couvrir les impayés de ceux dont il avait obtenu l'engagement pour le compte de son
mandant. Simplement est-il permis de penser que cette dernière stipulation a quand même vocation à
être privée d'effet dans le cas particulier où c'est le bénéficiaire du ducroire qui est à l'origine de
l'inexécution qu'il veut faire garantir par l'intermédiaire : J. MESTRE, La portée de la clause de
ducroire, RTD civ., 1997, p. 653.
964
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 205, 238.
-272-
salariés subordonnés qui paye leurs salaires ou leurs commissions et qui n'auront de
relations qu'avec lui à l'exclusion de ses mandants »965.
965
Cet article a comme similaire en droit français, l’art. 2, al. 2 du décret 1958 qui prévoyait que
l’agent « peut recruter….des sous-agents rémunérés par lui ».
966
J. HEMARD, Les agents commerciaux, op.cit., n° 50 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Code de
commerce annoté, op cit., sous art. 3, n° 11 ; Les sous-agents, par conséquent sont rémunérés par le
représentant de ses propres commissions : Cass. soc., 15 mars 1957, Bull. civ., 1957, IV, 283.
967
Ph. LE TOURNEAU, Responsabilité (en général), Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 195.
968
Selon le professeur VINEY, l'art. 1384, al. 5, ne vise pas le commettant en tant qu'individu mais
comme le représentant « de l'unité économique qu'il dirige » : Cass. com., D. 1994.124, note G.
VINEY.
969
En droit privé, le débiteur est responsable des faits des personnes qui participent à l'exécution de
ses obligations contractuelles. Il existe ainsi un principe général de responsabilité contractuelle du fait
d'autrui : les représentés sont contractuellement responsables du dommage causé par leurs représentants
dans l'exécution de l'obligation contractuelle du représenté : Ph. TERNEYRE, Responsabilité
contractuelle, D., 2012, n° 303.
970
C'est pourquoi, par exemple, la vengeance personnelle du fonctionnaire chargé de l'exécution du
contrat à l'égard du titulaire du contrat et ayant pour conséquence un manquement aux obligations
contractuelles, entraîne toujours la responsabilité contractuelle de l'administration dont relève ce
fonctionnaire (CE 12 juill. 1955, Bizet, Lebon 415) : Ph. TERNEYRE, op. cit., n° 305.
971
Conformément à la théorie classique du mandat, et malgré l'exception jurisprudentielle du
mandat tacite, les mandataires de l'administration sont contractuellement irresponsables du fait de
l'exécution des contrats qu'ils ont passés pour le compte de l'administration ; seule l'administration
-273-
a- L’existance de sous-contrat
mandante est considérée comme contractante et donc, comme seule obligée à la dette : Ph.
TERNEYRE, op. cit., n° 300.
972
« En sa qualité d’agent commercial mandataire, l’agent jouit de l’indépendance propre à tout
chef d’entreprise dans l’organisation de son activité » : Contrat présenté par LELOUP dans La
distribution, cas n° 6, p. 76. coll. « Cas pratiques du droit des affaires », D., 1971, cité par J.-M.
LELOUP, Agent commercial, D., 2012.
973
Art. 1384, al. 5 C. civ. : « On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son
propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des
choses que l'on a sous sa garde : Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs
domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés » ; Les auteurs
contemporains sont quasiment unanimes à affirmer que la responsabilité du commettant est une
responsabilité indirecte. C'est le fait dommageable du préposé qui permet d'engager la responsabilité du
commettant. Celui-ci ne répond que du fait d'autrui et non de son propre fait à travers le fait d'autrui. Sa
-274-
celle de la représentation pure et simple. Celle-ci peut avoir lieu soit à titre de mandat
(commission ou courtage), soit à titre de concession des ventes. C’est le cas du
représentant général pour une région donnée qui nomme des sous-agents ou des
distributeurs exclusifs dans les différentes localités de la région dans laquelle il
exerce975.
537. L’intérêt de ces sous-contrats est ainsi résumé par M. LELOUP : « ils
favorisent la spécialisation, préparent des regroupements d'agences ou la constitution
de sociétés. Ils permettent la couverture du marché national par des agents à
l’importation, dénommés souvent agents généraux, et agissant localement par des
sous-agents »976. Il faut, cependant, se garder de ne pas confondre la désignation d’un
sous-agent avec la faculté de substitution d’un tiers issue des articles 1994 du Code
civil français977 et 783 du Code des obligations et contrats libanais978. Alors que dans
la seconde il y a transmissibilité979 et cession du mandat980, dans la sous-agence il n’y
responsabilité est commandée uniquement par la responsabilité du préposé, à laquelle elle vient se
superposer, dans la mesure où le commettant est plus apte à supporter la réparation du dommage et
cela, bien sûr, dans l'intérêt exclusif de la victime : F. BENAC-SCHMIDT, C. LARROUMET,
Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 12 ; CA Paris, PÔLE 05 Ch. 06, n° 05/08045, D., 23 juin
2011.
974
C’est un usage constant depuis de nombreuses années et notamment depuis l’arrêté du 5 nov.
1946 (art. 45 paru au JO du 13 nov. 1946, p. 9576) et le contrat-type du 26 oct. 1954 (art. 2. al. 2) : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 284 et s. ; J. NERET,
Le sous-contrat, LGDJ, 1979, n° 287.
975
Idée identique du celle de l’agent commercial qui peut faire référence à des sous-agents
commerciaux qui interviennent sous son nom et pour son compte : Art. L 134-1 C. com.
976
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D, 2012, n° 54.
977
Art. 1994 C. civ : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion :
1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un.
2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait
choix était notoirement incapable ou insolvable.
Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est
substituée ».
978
Art. 783 C.O.C : « le mandataire qui n’a pas le mandat, sera responsable de son substitué, et
sera questionné sur ses travaux personnels.
Et si le mandat lui a été conféré, ne sera responsable sauf s’il a choisi une personne qui ne remplit
pas les qualités demandées pour le mandat, ou sauf si avec un bon choix, a donné à son sous-agent des
instructions qui ont été cause au préjudice ou s’il a négligé son observation lorsqu’il était utile ».
979
Ph. PETEL, Les obligations du mandataire, th. Montpellier, 1987, p. 192, n° 302.
980
Le professeur MOUSSERON nomme cession de position contractuelle : « c’est-à-dire comme
l’opération par laquelle un partenaire contractuel…convient avec un opérateur…, demeuré
-275-
539. Développons plus loin notre analyse. Nous dirons que l’obligation de
garantie du représentant commercial s’étend à tous les actes commis par toute
personne désignée par lui à quelque titre que ce soit984. L’énumération du paragraphe
3 de l’article 3 du décret-loi N.34/67 n’est pas limitative. Le fait d’avoir visé les sous-
agents l’est à titre de sévérité pour dire que la garantie est maintenue dans ce cas,
jusqu’alors étranger à la relation, le transfert de l’ensemble des dettes et des créances produites par
un contrat donné qui le lie à une autre personne… »: J.-M. MOUSSERON, Technique contractuelle,
2e éd, Francis Lefèbvre, 1999, n° 489 et s.
981
L’idée de substitution étant inspirée de la notion d’autonomie du mandataire qui suppose que le
mandataire demeure responsable de l’activité de son substitué. Donc il répond des actes de ce sous-
mandataire auprès du mandataire initial quand il n’a pas reçu une autorisation expresse du mandant : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 286 et 288.
982
Avec les réserves quant à l’étendue des pouvoirs du représentant principal.
983
L’agent commercial sera responsable à l’égard du mandant des actes du sous-agent, sauf si le
mandant a autorisé la sous-agence, mais dans ce cas l’agent engagera encore la responsabilité à l’égard
du mandant s’il n’exerce pas une surveillance normale sur les actes du sous-agent substitué : Cass. civ.
29 mai 1980, Bull. civ., I, n° 163. C'est sur le fondement de la confiance dans le préposé et qui est
assumée par le commettant envers les tiers, que celui-ci est tenu d'une obligation de garantir, aux
victimes des dommages causés par le préposé, la réparation à laquelle elles ont droit : F. BENAC-
SCHMIDT, C. LARROUMET, Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 30.
984
La jurisprudence met en œuvre une responsabilité contractuelle du fait d'autrui, par laquelle elle
déclare que le commissionnaire doit répondre du transporteur qu'il s'est substitué et dans la mesure
même où celui-ci est responsable : Cass. com., 2 févr. 1999, pourvoi n° F 96-17.915 ; Cass. com., 7
juill. 1998, Bull. civ., IV, n° 222 ; Cass. com., 3 oct. 1989, JCP 1990, II, n° 21423 ; D. 1990, Jurispr. p.
81, concl. Jeol, et Somm. p. 269, obs. M. REMOND-GOUILLOUD ; Cass. com., 16 juin 1981, D.
1981, IR p. 543, obs. B. MERCADAL ; Cass. com., 6 févr. 1973, JCP 1973, II, n° 17501, note R.
RODIERE.
-276-
quand bien même l’article 783 du Code des obligations et des contrats l’écarte985.
Mais, encore faut-il, pour cela, que le représentant, lui-même, ait désigné les
personnes dont il répond, et que celles-ci n’aient eu aucun rapport avec le représenté.
985
Art. 783 C.O.C. : « Le mandataire qui n’a pas le mandat, sera responsable de son substitué, et
sera questionné sur ses travaux personnels.
Et si le mandat lui a été conféré, ne sera responsable sauf s’il a choisi une personne qui ne remplit
pas les qualités demandées pour le mandat, ou sauf si avec un bon choix, a donné à son substitué des
instructions qui ont été cause au préjudice ou s’il a négligé son observation lorsqu’il était utile ».
986
CA Lyon, 3e Ch., 11 fév. 2000, Juris-Data, n° 151457.
987
Vu l’absence du mécanisme de la représentation qui suppose un pouvoir conféré par un contrat,
par la loi ou par le juge ; Il ne peut jouer que lorsqu'il s'agit d'actes juridiques : F. BENAC-SCHMIDT,
C. LARROUMET, Responsabilité des commettants, D., 2011, n° 7.
988
Si le mandataire initial n’a pas reçu l’autorisation de se substituer un tiers dans la gestion, il reste
responsable vis-à-vis du mandant de la bonne fin de la mission et de son exécution conforme au contrat
de mandat initial : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit. n° 290. Tandis que trois conditions
existant, sont dégagées par la jurisprudence pour écarter la responsabilité du commettant : Le préposé a
agi sans autorisation (Cass. civ., 2e Ch., 11 avr. 1986, Bull. civ., II, n° 48 ; Cass. crim., 21 mars 1989,
Bull. crim., n° 142) - Le préposé a agi à des fins étrangères à ses attributions (Cass. civ., 2e Ch., 28
févr. 1996, Bull. civ., II, n° 53 ; Cass. civ., 2e Ch., 22 janv. 1997, D., 1997, IR 53, Bull. civ., II, n° 21) -
Connaissance par la victime de l'abus de fonctions (Cass. civ., 2e Ch., 29 mai 1996, Bull. civ. II, n°
118, D. 1996, IR 151 ; Cass. civ., 2e Ch., 24 juin 1998, Bull. civ., II, n° 225 ).
-277-
989
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 299.
990
D. ALEXANDRE, Mandat, J.-Cl. civ., fasc., 1, art. 1991 à 2002, n° 64 ; Ph. PETEL, Les
obligations du mandataire, th., op. cit., n° 333 ; J. NERET, Le sous-contrat, th. Paris, LGDJ, 1979, n°
287 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., p. 164.
991
Cass. civ., 20 mai 1980, Bull. civ., I, n° 163 ; Cass. civ., 23 fév., 1983, Bull. I., n° 73, D., 1983,
481, note P. COUVRAT.
992
Ce devoir de surveillance peut s’accompagner d’un devoir d’assistance : fourniture des éléments
propres à la réalisation de la mission : Cass. civ., 16 nov. 1977, Bull., I., n° 423.
993
À cet égard, il faut faire les précisions suivantes : Le fait que le représenté ait imposé au
représentant un nombre déterminé de sous-agents, tout en lui laissant la liberté de les choisir, et, de les
superviser dans les conditions ci-dessus, n’exonère point le représentant de l’obligation de garantie.
D’autre part, même le fait d’avoir choisi les sous-agents en question, maintien l’obligation de garantie à
l’égard du représenté si les personnes ainsi choisies n’ont eu de rapports juridiques ou matériels
qu’avec le représentant. Mais, bien entendu, le représentant doit avoir gardé, pour cela, l’entière liberté
de les révoquer. En effet, la raison d’être qui détermine de telles conditions de l’obligation de garantie,
en marque les caractères particuliers : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit
positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 315.
994
Cass. civ., 1ere Ch., 10 janv. 1979, Bull. civ., I, n° 17.
-278-
a- Le caractère dérogatoire
544. D’abord, d’après l’article 782 du Code des obligations et des contrats, « le
mandataire ne peut se substituer à une autre personne pour l’exécution du mandat,
sauf, dans les cas suivants : 1- Si le mandant l’a vraiment autorisé, 2- Si l’accord sur
ce droit est issu de la nature ou des circonstances du travail, 3- Si le mandat est
général et absolu ». Donc, d’après l’article en question, le principe est la non-
substitution. En contrepartie, en vertu du décret-loi N. 34/67, le principe est la
possibilité d’une forme de sous contrat, et l’exception l’interdiction. Le texte de
l’article 3 à cet égard n’étant pas impératif.
995
De sorte qu'à la responsabilité contractuelle du commissionnaire envers le commettant du fait du
substitué peut s'adjoindre une responsabilité contractuelle pour faute personnelle du commissionnaire
du fait du mauvais choix effectué : D. AMMAR, De l'étendue de la garantie du commissionnaire
envers le commettant du fait du substitué, D., 1999, p. 427.
996
Cass. civ., 23 fév. 1983, D., 1983, p. 481, note P. COUVRAT ; Dans le même sens l’art. 1994 C.
civ. : « Le mandataire répond de celui qu'il s'est substitué dans la gestion :
1° quand il n'a pas reçu le pouvoir de se substituer quelqu'un.
2° quand ce pouvoir lui a été conféré sans désignation d'une personne, et que celle dont il a fait
choix était notoirement incapable ou insolvable.
-279-
l’article 3 précité, le représentant répond des actes du sous-agent dans tous les cas, à
l’exception de cas où le sous-contractant aurait eu des rapports avec le représenté. Or
d’après l’article 783, lorsque la substitution est autorisée, le principe est la non-
garantie étant donné que « le mandataire ne sera responsable sauf…. », c’est dire si
certaines conditions en sont réunies, la garantie s’impose comme exception. Alors que
d’après l’article 3 en question, le principe est celui de la garantie bien que
l’autorisation de nommer des sous-agents soit légale, c’est dire que la non-garantie
est l’exception.
b- Le caractere excessif
Dans tous les cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est
substituée ».
997
Sachant que le code civil permet cette substitution même lorsque le mandant ne l’a pas autorisée,
le mandataire originaire sera responsable des actes de son substitué. Cependant il ne l’admet pas quand
le mandant a interdit cette substitution : F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e
éd., Litec, 2005, n° 287.
998
Dans le même sens, il a été jugé que le mandant ne peut traiter directement avec un sous-agent :
Cass. civ., 10 janv. 1979, Bull. civ., I, n° 17.
-280-
pouvoir agir directement contre eux comme étant les auteurs du préjudice à lui causé
par leur fait. En réalité, les dispositions de l’article 3 interdisent uniquement le recours
direct des sous-agents du représentant contre le représenté, si les conditions de
l’obligation de garantie telles que définies ci-dessus sont réunies999 : Solution opposée
au droit français où il a été jugé que le sous-agent peut agir directement contre le
mandant pour obtenir le paiement des avances, frais, rémunérations1000.
999
Le recours, par contre, par la voie indirecte est valable. Il en est ainsi lorsque le représentant
principal n’ayant pas acquitté les sous-agents leur dû, omet de réclamer ses propres dûs au représenté :
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit. art. 3, n° 12.
1000
Cass. civ., 27 déc. 1960, D., 1961, p. 491, note J. BIGOT ; Cass. com., 5 oct. 1993, Bull. civ.,
IV, n° 320.
1001
Cet article trouve un similaire en droit français avec l’art. 1994, al. 3 C. civ. : « Dans tous les
cas, le mandant peut agir directement contre la personne que le mandataire s'est substituée ».
1002
Sur la nécessité d’un agrément du substitué dans ce cas, M. NERET considère que la possibilité
de substitution va à l’encontre du principe d’intuitu personae : J. NERET, Le sous-contrat, th. Paris,
LGDJ, 1979, n° 85 ; M. LE TOURNEAU considère à ce sujet qu’il s’agit d’une anomalie : Ph. Le
TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 239.
-281-
SECTION 2
552. C’est ainsi que nous retrouverons d’une part, dans un premier paragraphe,
l’obligation du représenté de fournir tous les moyens nécessaires devant permettre au
représentant l’exercice de la représentation ; ces derniers résultent des dispositions des
règles du mandat prévues au Code des obligations et contrats libanais et au Code civil
français1005. En effet, au moment où la firme consent à accorder l’exclusivité au
représentant, elle s’engage directement à ne fournir les produits ayant fait l’objet de
1003
Cass. com., 20 févr. 2007, Bull. civ., IV, n° 52 ; D. 2007. AJ 795, obs. E. CHEVRIER ; JCP
2007. IV. 1657 ; Contrats, conc. consom. 2007, n° 121, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; Lettre
distrib., 2007, p. 2.
1004
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1005
Le mandant ne doit pas gêner l’agent commercial dans l’exécution de la mission, suite à
l’obligation de loyauté prévue par l’article L. 134-4 C. com.
-282-
1006
L'exclusivité territoriale oblige le fournisseur à ne pas livrer les produits, dans le territoire
concédé, à des revendeurs autres que le distributeur exclusif : D. FERRIER, Accords de distribution,
D., 2011, n° 87.
1007
Dans les domaines de la commission et du courtage, ces obligations se traduisent
respectivement par les obligations de verser la commission et le courtage, et celles de traiter avec le
contractant du courtier. Les mandataires, commissionnaires et courtiers disposent, pour cela, des divers
privilèges et moyens de sûreté pour obtenir l’exécution par le commettant de ses obligations : M.
MAHMASSANI, op.cit., p. 279.
1008
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 63.
1009
Suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi n° 34/67 : « Est aussi considéré
comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour son propre compte de vendre ce
qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de représentant ou de distributeur
exclusif unique ».
-283-
de la représentation
555. D’après les règles du mandat, prévues au Code des obligations et contrats
libanais et au Code civil français, le mandant, en contractant avec le mandataire,
s’engage à offrir tous les moyens nécessaires pour permettre au mandataire
l’exécution de son mandat1010. Tout comme le mandataire, le représentant commercial
est tenu au respect de sa mission et doit s’y conformer, vu le véritable lien qui unit la
représentation commerciale à la qualification de mandant.
556. Cette obligation du représenté se traduit dans son application pratique par
une série d’obligations individuelles et accessoires, dont l’énumération et la
règlementation dépend exclusivement des parties. Cependant, parmi ces obligations,
deux apparaîssent comme caractéristiques de la représentation commerciale. D’une
part, il s’agit d’une série d’obligations imposant au représenté d’adopter une attitude
positive (A), et d’effectuer certaines prestations, afin de permettre l’exercice de la
représentation en somme de « faire quelque chose »1011. Il s’agit, notamment, des
divers services que le représenté serait appelé à accorder au représentant 1012. D’autre
part (B), il s’agit des obligations imposant au représenté d’adopter une attitude
négative, une obligation de ne pas faire, celle de s’abstenir d’effectuer certains actes,
notamment la concurrence, de nature à entraver l’exécution normale de la
représentation1013.
1010
Le mandant ne doit pas gêner l’agent commercial dans l’exécution de la mission, suite à
l’obligation de loyauté prévue par l’article L. 134-4 C. com.
1011
Le mandant doit donner à l’agent commercial les moyens de développer fructueusement son
activité pour la diffusion des produits : D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis,
2012, n° 213.
1012
Le cas échéant des échantillons de produits ainsi que les informations nécessaires à l’exécution
du contrat, notamment les conditions de vente et les données du marché dont il aurait connaissance :
Art. L. 134-4 C. com., art. L. 134-16 C. com.
1013
Le mandant ne doit pas évidemment désigner d’autres agents commerciaux dans le territoire
confié en exclusivité au mandataire : CA Paris, 17 janv. 1995, somm. p. 260, obs., Y. SERRA ; M.-F.
NICOLAS-MAGUIN, Le mandat exclusif, D., 1979, chron. p. 265.
-284-
A- L’obligation de faire
557. C’est un domaine où la volonté des parties est maîtresse cause d’absence de
précision à cet égard dans le décret-loi N. 34/67. Il dépendra de l’habileté du
représentant d’obtenir du représenté l’engagement d’effectuer le plus grand nombre
de prestations et d’actes tendant à faciliter et à garantir l’exercice de la
représentation1014. C’est ainsi que l’article 4 de la directive européenne de 1986, qui a
d’abord déterminé le contenu de l’obligation du mandant d’un agent commercial :
1014
S’agissant des facilités auxquelles s’engage le représenté, et dont la détermination est laissé à la
volonté des parties, il faut mentionner surtout la littérature destiné à la publicité. Il s’agit de toute
brochure, renseignement ou autre tendant à mieux faire connaître les produits objets de la
représentation : E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 24.
1015
Directive 86/653/CEE du Conseil du 18 déc. 1986 relative à la coordination des droits des États
membres concernant les agents commerciaux indépendants, J.O. n° L 382 du 31/12/1986, p. 0017 –
0021.
-285-
559. Ces principes ont été modifiés par l’art. L. 134-4 al. 2 C. com., précisant
que « les rapports entre l’agent commercial et le mandant sont régis par une
obligation de loyauté et un devoir réciproque d’information…. Le mandant doit
mettre l’agent commercial en mesure d’exécuter son mandat ». En d’autres termes,
mettre l'agent commercial en mesure d'exécuter son mandat, c'est lui permettre de
connaître les produits ou services qui font l'objet du contrat, et de convaincre les
clients potentiels1016. Cette dernière se justifie d’un côté, par le devoir que supporte le
mandant d’informer le mandataire des obstacles qu’il pourrait rencontrer avec certains
clients, de façon de recentrer son activité sur des clients moins douteux 1017. Et de
l’autre côté, par le devoir d’obligation visé par le mandant à l’agent pour lui permettre
de créer un courant d’affaires1018. Il s’agit d’un devoir coopératif de loyauté et de
confiance utile à une issue favorable de la mission1019.
1016
La « documentation utile » que le mandant doit remettre à l'agent (Décr. 23 déc. 1958, art. 2,
mod. par Décr. 10 juin 1992) a cette double finalité. Il faut que l'agent puisse informer la clientèle à
l'aide des supports habituels de la communication commerciale (brochures, catalogues, échantillons,
notices techniques). Il faut que l'agent soit lui-même informé par le mandant, notamment sur la
technologie des produits nouveaux à l'égard desquels le mandant a une véritable obligation
d'enseignement. L'article 2 précité revêt également un caractère impératif : J.-M. LELOUP, Agent
commercial, D, 2012, n° 59.
1017
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 104.
1018
CA Rennes, Ch. 01 B, 1 oct. 2010, n° 09/02272 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11 mars 2010,
n° 08/03694 ; CA Lyon, Ch. civ, 01 B, 17 déc. 2009, n° 09/06347 ; Cass. com., 17 mars 2009, n° 08-
10. 398.
1019
Ne pas connaître le particularisme de cette obligation dans le contrat d’agence commerciale en
tant que telle, aurait, en premier lieu, l’effet de rendre inopérants de nombreux contrats de mandat où le
mandant ne souscrirait pas à son obligation d’information du mandataire et, en second lieu, remettrait
en cause la nécessité d’un rapport de confiance entre les parties en les remettant en cause la
communauté d’intérêts qui les lie, qui correspond, pour le mandant, à l’avantage de placer un homme
de confiance ou de compétence à la tête d’une mission particulière et, pour le mandataire, soit au fait de
rendre service, soit à l’espérance de tirer quelque profit de son action pour le commettant : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 83.
-286-
1020
Le mandant doit fournir les moyens nécessaires à l’agent commercial pour réaliser sa mission.
Ces moyens consistent dans l’information du mandataire, dans la fourniture d’instructions, de
renseignements et de documents : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 59 ; C’est ainsi
qu’il incombera au représenté de répondre à toutes les demandes de renseignements concernant les
produits rentrant dans la représentation et sans lesquelles l’exercice par le représentant de ses activités
serait rendu impossible. Il en est ainsi des délais de fabrication et de livraison, des quantités disponibles
lorsque le contrat n’aurait pas déterminé par avance un chiffre minimum des ventes. Il en est ainsi aussi
de certains renseignements concernant les caractéristiques des produits eux-mêmes : H. HADATHI,
Cours de droit des obligations et des contrats, Usek, 2002, p. 112.
1021
Cette responsabilité découle du fait que le mandant s’abstenant de mettre le mandataire en
mesure de réaliser à sa mission, en ne lui ayant pas fourni les informations, les documents ou les
instructions nécessaires à la bonne exécution de sa tâche : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.
cit., n° 82 ; Il pourra être sanctionné s’il intervient directement dans le territoire confié à l’agent, même
en l’absence d’exclusivité : CA Versailles, 7 juill. 1999, RJDA, 1999, n° 1203 ; « Le mandant devra se
soumettre à ces obligations, sous peine de contrevenir, d’une part aux dispositions du code civil
concernant l’exécution des conventions de bonne foi et l’obligation générale de loyauté entre les
parties » : art. 1134, al. 3, C. civ.
1022
Comme par exemple, le refus de fournir des échantillons et documentation : J. CATONI, La
rupture du contrat d’agence commerciale et le décret de 1958, préf. J. GAULTHIER, Paris, 1970, n°
121. Cette opinion a été discutée en doctrine, étant donné que le représenté ne pourra y être obligé s’il
n’y s’est pas engagé expressément au contrat de représentation. Cela se comprend parfaitement à la
lumière aussi bien des règles du mandat que de celles de la représentation commerciale. D’autre part, le
représentant, en tant que mandataire, représente le mandant, donc, fait ce qu’aurait fait le mandant. Or,
il n’est pas indispensable pour le producteur de distribuer des échantillons et documentations. Ainsi,
c’est le représenté qui fixe l’objet de la représentation et son étendue. Il peut, parfaitement, ne pas y
inclure la distribution d’échantillons ; et au cas de silence du contrat, il faut interpréter dans le sens qui
ne ferait pas dire aux parties ou à l’une d’elles ce qu’elles n’ont point voulu dire. Par conséquent, nous
considérons qu’au cas de silence du contrat, le représenté ne peut être réputé avoir révoqué la
représentation à ses torts, pour la simple raison qu’il aurait refusé de fournir documents et échantillons
au représentant : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du
Liban, 1972, p. 281 et 282. Dans le sens opposé, M. FOURNIER considère que ce manque d’obligation
aurait pour résultat non pas de provoquer la caducité du contrat pour défaut d’objet ou son annulation
pour impossibilité de réaliser l’objet contractuel mais d’engager la responsabilité contractuelle du
mandant : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 82.
1023
F. FOURNIER, op. cit., n° 81.
-287-
1024
Cass. com., 24 nov. 1998, D. 1999, IR, p. 9.
1025
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 81.
1026
Ces dernières sont celles qui doivent permettre à l’agent de promouvoir son produit et d’en
présenter les avantages et les caractéristiques particulières notamment sur les nouvelles techniques et
sur les nouveaux produits : J.-M. LELOUP, JCP, éd. E., 1987, I, 15024, n° 19, p. 495.
1027
Il s’agit de remboursement des frais du mandataire et de son indemnisation pour les pertes qu’il
a subies à l’occasion de l’exécution de la mission : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n°
59.
1028
L’application pratique de cette obligation prend deux formes différentes selon qu’il s’agit de
représentation commerciale à base de mandat ou de représentation commerciale à base de concession
des ventes. Lorsqu’il s’agit à base de mandat, le représentant est réputé agir au nom et pour le compte
du représenté. Il ne peut, en principe, refuser d’exécuter et d’honorer les engagements acceptés par le
représentant : J. HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 59. Dans le même sens, il a
été jugé que le représenté est même tenu d’assurer le service après-vente lorsqu’il s’agit de produits
hautement techniques et spécialisés : Cass. com., 7 janv. 1969, JCP., 1969, II, 16121 ; Lorsqu’il s’agit
de représentation commerciale à base de concession des ventes, le représentant achète du représenté,
puis revend aux tiers pour son propre compte les produits ainsi achetés. Son avantage réside dans
l’exclusivité dont il jouit, selon laquelle il est seul à pouvoir acheter ces produits en question, et par
conséquent, de pouvoir seul revendre ces produits sur le marché concédé. Dans ce cas, l’obligation du
représenté est celle de vendre au représentant les quantités qu’il aurait commandées : M.
MAHMASSANI, op. cit., p. 288.
1029
Sous peine de subir le préjudice de perdre la clientèle, ainsi que les bénéfices qu’il escomptait
recueillir. Dans ce cas, si la mauvaise exécution par le représenté se répétait, de manière à lui donner un
caractère fautif, le représenté pourrait être réputé avoir résilié le contrat de représentation à ses torts,
-288-
a- L’obligation de non-concurrence
566. En contrepartie, les juridictions ont pris l'habitude d'intégrer ces principes
dans la motivation de leurs décisions en soulignant par exemple que « la liberté de la
concurrence reste, dans une économie libérale, le principe fondamental des rapports
commerciaux, chaque commerçant ou industriel ayant la possibilité d'attirer à lui la
clientèle de ses concurrents sans que cela puisse lui être reproché.… »1034 ; ou bien en
affirmant que le « principe fondamental de la liberté du commerce permet de
s'attacher les clients d'un concurrent sans que soit engagée la responsabilité de
l'instigateur du déplacement ainsi opéré, aucune clientèle ne pouvant, en toute
hypothèse, faire l'objet d'un droit privatif…»1035. Ces principes sont confirmés tout
aussi clairement par la Commission des Communautés européennes lorsqu'elle
indique que « l'achalandage et la clientèle d'une entreprise ne sont protégés par
aucun droit absolu. Ils représentent plutôt une position concurrentielle de pur fait qui
1032
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 290 ; Le vendeur d'un fonds de commerce a l'obligation de
s'abstenir de tout acte de nature à détourner la clientèle du fonds cédé. En dépit d'une clause de non-
concurrence n'interdisant à une société cédante de faire concurrence à une société cessionnaire que sur
le territoire français, et pendant une période de trois ans, la cédante s'oblige nécessairement à garantir
l'effectivité de la cession et la totalité de son fonds de commerce et s'interdit d'attirer vers elle son
ancienne clientèle implantée tant en France que dans les autres pays d'Europe et aux Etats-Unis : CA
Rouen, 25 mai 2000, D., n° 1995/321.
1033
Cette obligation est facile à sanctionner lorsque la représentation a été accordée au représentant
commercial avec exclusivité pour un territoire donné. Dans ce cas, toute transaction passé par le
représenté, directement ou indirectement, dans le secteur concédé en exclusivité constitue une violation
par le représenté de l’obligation de non-concurrence : Cass. com., 9 mars 1970, Bull. civ., 1970, IV, 84,
dans cette espèce, la Cour de cassation retient la responsabilité d’un producteur qui avait accordé une
concession à un commerçant avant l’expiration de la concession exclusive accordée auparavant à un
autre commerçant dans le même secteur : C. CHAMPEAU, La concession commerciale, RTD com.,
1963, n° 53.
1034
CA Amiens, 7 mai 1974, D., 1975. 263, note J.-C. FOURGOUX.
1035
CA Paris, 9 juin 1999, D., 2000, Somm. 325, obs. Y. AUGUET.
-290-
est exposée à tout moment aux attaques de tiers concurrents »1036. A ce titre, il s’agit
de rappeler que l’application de ces principes est traditionnellement sous la réserve «
de respecter les usages loyaux du commerce »1037.
568. Cependant, une distinction, à cet égard, s’impose entre droit français 1041 et
droit libanais1042. En effet, en France, cette obligation n’est pas absolue1043 où s’est
1036
Décis. Comm. CE 26 juill. 1976, Reuter c/ BASF, JOCE, n° L 254.
1037
Cass. com., 1 juin 1999, n° 97-15.421, D., 2000, Somm. 325, obs. Y. AUGUET ; CA Paris, 8
nov. 1996, D. 1997. Somm. 241, obs. Y. SERRA ; CA Paris, 5 mars 1987, D., 1988, Somm. 180, obs.
Y. SERRA.
1038
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 24 ; TI Beyrouth, Ch. com.,
décision n° 721/492 du 23 déc. 1969, Bureau de développement de pharmacie c/ Compagnie suisse
Geigy, Coll. Hatem, vol. 113, p. 22 ; J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité de vente, RTD com.,
1963, n° 15 et s.
1039
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 242.
1040
En ce sens, N. KOCH, et G. MARENCO, L’article 85 et les contrats d’agence, CDE 1987, n° 6,
p. 604- Rapp. Dir. 18 déc. 1986, JOCE, L. 382, 31 déc.1986, art. 20 admettant une obligation de non-
concurrence pendant un délai de deux ans après la fin du contrat.
1041
R. PLAISANT, Les contrats d’exclusivité, RTD com., 1964, n° 11. Cependant, à cet égard, la
législation française a pris une certaine orientation économico-sociale que nous ne pouvons aborder
pour ne pas sortir de notre sujet ; J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité, op. cit., n° 3 et s., à
l’occasion du décret du 24 juin 1958 sur le refus de vente, J.O. 25 juin, et son interprétation par la
circulaire Fontanet du 31 mars 1960, J.O. 2 avr. 1960, p. 3048 et D. 1960. L. 124, ainsi que du Traité
de Rome sur le droit européen des ententes et la liberté du commerce comme moteur de l’économie.
-291-
1042
En effet, pour certains produits, en France, le commerçant n’est pas libre dans le choix de la
clientèle. Pour cela, et dans tous les cas où la représentation porte sur des produits touchés par la
législation relative au refus de vente, la convention d’exclusivité ne pourra recevoir application et
exécution. Elle sera, plutôt, nulle comme ayant un objet illicite. Au Liban, par contre, comme une telle
législation n’existe pas, chacun est libre de vendre ou de ne pas vendre, dans la mesure où sa publicité
ne constitue pas une véritable pollicitation : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en
droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 161.
1043
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 639.
1044
Il est, dans ce cas, passible des responsabilités civile et pénale pour refus de vente : Y. PICOD,
Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 251 ; P. ARHEL, Transparence
tarifaire et pratiques restrictives, D., 2012, n° 259.
1045
Comm. CE 20 sept., 2000, Opel, JOCE, n° L. 59, 28 fév.2001 : amende de 43 millions d’euros ;
TPICE, 6 juill. 2000, VW, Rec., TPICE, 2000, II, p. 2707 : amende de 90 millions d’euros.
1046
Cass. crim., 21 mars 1972, D. 1973, p. 677, note T. LVAINER ; CJEC 20 juin 1978, Tepea,
Rec, CJCE, 1978, I, p. 1391.
1047
Il ne s’agit pas, dans ce cas, d’analyser l’attitude de cet importateur parallèle et ses rapports
avec les parties étant donné qu’il en sera question au second chapitre du présent titre.
1048
Ch. FABIA, Les conventions d’exclusivité, Commerce du Levant, n° 22, 1962, p. 9 et s. ; J.-M.
MOUSSERON, EDL, 1964, p. 291 et s.
-292-
1049
L’obligation de garantie en question est une obligation de résultat du second degré, et c’est ce
qui lui donne un caractère précaire. Cette précarité résulte du fait que la firme représentée ne peut être
tenue responsable du seul fait qu’une concurrence a pu se produire dans le secteur de l’exclusivité : M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p.
162.
1050
Elle devrait par exemple, aviser toute personne du secteur en question qui s’adresserait à elle
directement, de contacter le représentant de la place : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 291.
1051
Cass. com., 3 déc. 1963, RTD com., 1964, p. 375, n° 7 : Dans cette espèce, le représenté avait,
en cours d’exécution du contrat de représentation, invité la clientèle du représentant, par voie de
circulaire, à s’adresser désormais, à lui exclusivement. Le caractère illicite d’une telle concurrence, par
conséquent, en ressort.
1052
En contrepartie, elle redevient responsable pour les dommages ultérieurs causés au représentant
si elle omet de prendre les mesures susceptibles de mettre fin à la concurrence. La firme représentée ne
garantit pas la réparation du préjudice de plein droit. Ce n’est donc, pas le résultat qui déterminera sa
situation. Ce sont les moyens déployés par elle et les mesures prises qui, comparés au résultat,
détermineront la responsabilité. La firme représentée est réputée avoir exécuté son obligation de
garantie en question si elle prouve qu’elle a pris tous les mesures possibles pour éviter la concurrence :
M. MAHMASSANI, op.cit., p. 162.
1053
Cass. com., 9 mars 1970, Bull. civ., 1970, IV, 84 : Dans cette espèce, la Cour de cassation
retient la responsabilité d’un producteur qui avait accordé une concession à un commerçant avant
l’expiration de la concession exclusive accordée auparavant à un autre commerçant dans le même
secteur.
-293-
1054
Sa responsabilité peut se traduira par la naissance pour le représentant, d’un droit aux
commissions qui lui seraient revenues si la transaction en question avait eu lieu par son intermédiaire :
CA Grenoble, 8 oct. 1969, JCP, 1970, II, 16339, note J. HEMARD ; ceci forme une règle élémentaire
du calcul des éléments du préjudice subi en matière d’entremise commerciale.
1055
CA Rennes, 23 déc. 1965, commenté par J. HEMARD, RTD com., 1966, p. 634 n° 4 : Dans
cette espèce, le concédant avait agi contre un tiers commerçant qui avait violé l’exclusivité du
concessionnaire exclusif et a obtenu gain de cause ; CA Paris, 23 oct. 1964, RTD com., 1965, p. 155,
n° 9 : la firme représentée a retiré la représentation au mandataire qui empiétait sur le domaine d’un
autre représentant exclusif.
1056
Dans le cas d'un agent entravé dans son action par les ventes parallèles d'un client du mandant,
la Cour de cassation a décidé que le mandant devait prendre les mesures concrètes permettant à l'agent
commercial de pratiquer des prix concurrentiels proches de ceux pratiqués pour les ventes parallèles :
Cass. com., 24 nov. 1998, RTD civ., n° 1999.646, obs. P.-Y. GAUTIER.
1057
CA Paris, 8 mars 2001, D. 2002, somm. 1263, obs. Y. PICOD ; 10 janv. 1994, D. 1995, somm.
208, obs. Y. SERRA; 17 janv. 1995, D. 1995, somm. 260, obs. Y. SERRA.
1058
Juge unique Beyrouth, décision n° 241 du 14 fév. 1958, Rec. Hatem, vol. 33, p. 34, n° 2
1059
Cass. com., 4 juin 2002, n° 00-14.688, D., 2003, somm. 904, obs. Y. PICOD ; CA Versailles,
28 oct. 1999, D. 2000, somm. 317, obs. M.-L. IZORCHE.
1060
Cass. com., 16 mars 1993, n° 91-11.194, Bull. civ., IV, n° 109, D., 1994, somm. 224, obs. Y.
PICOD.
-294-
de manière abusive
1061
Cass. com., 19 déc. 1989, Bull. civ., IV, n° 327, D. 1990, somm. 368, obs. D. FERRIER ; 10
janv. 1995, D. 1995, IR 43.
1062
L'accord de fourniture exclusive est défini dans les Lignes directrices comme celui par lequel le
fournisseur est tenu de vendre les produits contractuels uniquement ou principalement à un seul
acheteur à l'intérieur du marché européen. La Commission précise que pour les biens ou services
intermédiaires, la fourniture exclusive est souvent appelée « fourniture industrielle », et invite à
distinguer l'accord de fourniture qui relève des accords de distribution en général et l'accord de
fourniture industrielle qui porte sur des produits entrant dans la fabrication de produits finis et
correspond plutôt à un accord de production : D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 21.
1063
Le règlement no 330/2010 interdit la stipulation d'un engagement de non-concurrence post-
contractuelle à la charge du distributeur (Règl. art. 5-1, b, annulant « toute obligation directe ou
indirecte interdisant à l'acheteur, à l'expiration de l'accord, de fabriquer, d'acheter, de vendre ou de
revendre des biens ou des services) : D. FERRIER, Accords de distribution, D., 2011, n° 21.
1064
La modification des prix peut ne pas être l’ouvre fantaisiste du représenté, mais dictée par des
impératifs touchants aux prix sur le marché international, ou pour d’autres motifs réputés légitimes par
les usages du commerce : Cass. com., 29 avr. 1969, Bull. civ., 1969, IV, 141.
-295-
1065
C’est en certain s’agissant du représentant concessionnaire des ventes qui a acheté pour un prix
déterminée : CA Paris, 5 juill. 1967, RTD com., 1968, p. 108 et D., 1967, 730.
1066
Cass. com., 14 mars 1995, arrêt n° 546, pourvoi n° 93-14.760.
1067
Cette possibilité est ouverte par la stipulation d’un mandat indicatif ou d’une clause dite de
survente autorisant l’agent commercial à négocier d’un prix supérieur à celui fixé par le mandant ;
Cass. com., 24 nov. 1998, Bull civ., IV, n° 277 : au motif qu’il n’était pas établi que le mandant avait
pris des mesures concrètes pour permettre au mandataire de pratiquer des prix concurrentiels proches
de ceux de ces mêmes produits vendus dans le cadre de ventes parallèles, Rapp. Cass. com., 3 nov.
1992, Bull civ., IV, n° 338 ; Solution excessive, en l’espèce, car le revendeur s’approvisionnait auprès
du mandant à des prix très intéressants grâce à une centrale d’achat : F. FOURNIER, L’agence
commerciale, op.cit., n° 81.
1068
CA Paris, 27 juin 1997, D., 1998, somm. p. 336, obs. D. FERRIER ( Hydrocarbures).
-296-
578. Cette rémunération peut prendre les formes suivantes : D’abord, celle d’une
somme forfaitaire payable périodiquement1075 quel que soit le volume et le nombre
1069
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd. Litec, 2005, n° 580.
1070
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 214.
1071
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 63.
1072
Art. 793 C.O.C. al. 1 : « le mandant doit payer au mandataire tout ce qui a dépensé d’argent et
tout ce qui a payé comme frais dans le but de l’exécution du mandat. Et s’il a droit à un salaire, il doit
le payer indépendamment du résultat du travail sauf le cas de faute du mandataire ».
1073
Art. L. 134-5 C. com. : « Tout élément de la rémunération variant avec le nombre ou la valeur
des affaires constitue une commission au sens du présent chapitre.
Les articles L. 134-6 à L. 134-9 s'appliquent lorsque l'agent est rémunéré en tout ou partie à la
commission ainsi définie.
Dans le silence du contrat, l'agent commercial a droit à une rémunération conforme aux usages
pratiqués, dans le secteur d'activité couvert par son mandat, là où il exerce son activité. En l'absence
d'usages, l'agent commercial a droit à une rémunération raisonnable qui tient compte de tous les
éléments qui ont trait à l'opération ».
1074
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 580.
1075
Cette forme est connue en France comme une rémunération fixe : Rapp. J.-J. HANINE,
Distribution, Agents commerciaux, J.-Cl., fasc. 1240, n° 57, p. 12, pour qui cette rémunération
serait « l’indice d’un rapport de subordination vis-à-vis du mandant… ».
-297-
des opérations traitées par le représentant1076. Elle peut ensuite, prendre la forme de
commissions proportionnelles à la valeur des opérations traitées 1077 par
l’intermédiaire du représentant1078. Le cas échéant, la commission est due et devient
immédiatement exigible une fois que le représentant a conclu l’opération1079 et sans
qu’il soit besoin que le représenté ait obtenu l’exécution intégrale des opérations du
tiers contractant1080 : Solution proche de celle suivie en droit français où l’agent
commercial n’est payé qu’à partir du moment où le contrat avec le client est venu à
exécution complète1081, « ou devrait l'avoir exécuté en vertu de l'accord conclu avec le
tiers ou bien encore dès que le tiers a exécuté l'opération »1082, même si la mission n’a
pas eu de résultats dès lors que le mandataire l’a entreprise avec tous les moyens
utiles à sa bonne fin1083. Ainsi, dans l'exemple d'une vente, la commission est acquise
1076
Il s’agit de noter que le paiement d’une somme forfaitaire périodique à titre de rémunération
n’est pas incompatible avec le statut de représentant commercial et ne transforme pas la relation des
parties en louage de services, étant donné que ce n’est pas le mode de calcul pour la qualification des
parties entres elles qui compte. Contrairement en France, l’agent commercial n’étant alors pas
rémunéré en fonction des résultats pourraient être assimilé à un salarié si les conditions de ses
interventions sont fixées et contrôlées par le mandant : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit.,
n° 234.
1077
La commission est en fonction du nombre ou de la valeur des affaires conclues grâce à l’agent :
Art. L. 134-5 C. com.
1078
Il a été jugé que la rémunération est proportionnelle au chiffres d’affaires ou au bénéficie
réalisé : CA Paris, 23 avr. 1968, Gaz. Pal., 1968, 2, p. 136.
1079
Solution favorable à l’agent commercial mise par l’article L. 134-9 C. com., en disposant qu’il a
droit à une commission dès lors que le mandant ou le client a exécuté l’opération ; Cass. com., 27 janv.
1959, Bull. civ., 1959, III, 45 ; Cass. com., 13 fév. 1961, III, 71 : Dans cette espèce, la Cour a reconnu
au représentant un droit aux commissions pour les commandes faites par lui avant la rupture de son
contrat mais qui n’ont pas encore été livrées. Elle lui a même reconnu ce droit, dans le même cas, si la
rupture a eu lieu avant que toute commande ne soit effectuée, mais alors que des clients s’étaient
inscrits auprès de lui en vue d’une prochaine commande. Telle solution que nous approuvons
pleinement, se fonde sur la notion de clientèle, celle-ci étant devenu la propriété du représentant du seul
fait de son inscription auprès de lui.
1080
En application des dispositions de l’art. 285 C. com. lib. : « Sous réserves des dispositions de
l’article précèdent, la commission est due par cela seul que l’opération a été conclue et alors même
que le tiers n’exécuterait pas les obligations assumées par lui, à moins que cette inexécution se résulte
d’une faute du commissionnaire ».
1081
L’art. L. 134-9 C. com., retient une solution favorable à l’agent commercial en disposant qu’il a
droit à une commission dès lors que le mandant ou le client a exécuté l’opération ; Cass. com., 31 mars
1992, RJDA, 1992, n° 817 : clause prévoyant que les commissions seraient dues uniquement sur les
affaires menées à bonne fin.
1082
Art. L. 134-9 C. com.
1083
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit. n° 67. Cette règle peut d’ailleurs être reprochée
de celle de la gestion d’affaires dans l’hypothèse d’un commissionnaire-priseur : Cass. civ., 1ere Ch.,
23 mars 1982, Bull. civ., I., n° 119.
-298-
au moment où le client aurait dû payer si le mandant avait livré à bonne date 1084.
Enfin, la rémunération peut consister dans le cumul des deux formes précédentes.
580. Sur cette construction, la recherche en droit français a été plus développée
en distinguant entre deux situations donnant droit à une commission1086 : Cas des
opérations conclues pendant la durée du contrat d’agence et le cas des opérations
conclues après la fin de ce contrat. Pendant la durée du contrat d’agence, l’agent
commercial a droit à une commission pour tout contrat conclu par son
intermédiaire1087. Dans le même sens, lorsque l’agent est chargé avec ou sans
exclusivité1088, d’un territoire ou d’une clientèle spécifique définie comme un
1084
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 67.
1085
Art. L. 134-5 C. com. : « Dans le silence du contrat, l'agent commercial a droit à une
rémunération conforme aux usages pratiqués, dans le secteur d'activité couvert par son mandat, là où
il exerce son activité. En l'absence d'usages, l'agent commercial a droit à une rémunération
raisonnable qui tient compte de tous les éléments qui ont trait à l'opération » ; art. 795 C.O.C. : « Si la
rémunération n’est pas prévu, elle sera désignée selon l’usage pratiqué dans le lieu où le mandat a été
conclu, si non selon les circonstances ».
1086
Art. L. 134-6 C. com. : « Pour toute opération commerciale conclue pendant la durée du
contrat d'agence, l'agent commercial a droit à la commission définie à l'article L. 134-5 lorsqu'elle a
été conclue grâce à son intervention ou lorsque l'opération a été conclue avec un tiers dont il a obtenu
antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre.
Lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé, l'agent
commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée du
contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe ».
1087
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 216 : commissionnement
direct.
1088
Cass. com., 23 janv. 2007, D. 2007, 439, obs. E. CHEVRIER ; CDE 2007, n° 3, p. 53, obs. M.
BOURDEAU.
-299-
581. Après la fin du contrat, l’agent commercial peut encore prétendre à une
commission dans la mesure où les contrats conclus entre le mandant et le tiers sont les
fruits des diligences qu’il avait mises en œuvre1094. Toutefois, le droit à commission
s’éteint si le contrat entre le mandant et le tiers n’est pas exécuté du fait d’une
circonstance non imputable au mandant, telle qu’un cas de force majeur ou
l’inexécution fautive du tiers1095.
582. Dans ce premier chapitre, nous avons exposé les causes de protection du
représentant commercial dans l’exécution du contrat de représentation commerciale,
1089
Art. L. 134-6, al. 2 C. com ; Cass. com., 8 déc. 2009, Bull. civ., 2009, IV, n° 159 ; D., 2011,
pan. 548, obs. D. FERRIER : Pas de limitation précise du secteur.
1090
Il en va autrement des contrats conclus par un tiers, centrale d’achat ou revendeur par exemple,
sans intervention du mandant, CJEC, 17 janv. 2008, Contrats, conc. consom. 2008, n° 67, obs. N.
MATHEY, D. 2009, pan. 2893, obs. D. FERRIER.
1091
C.J.R., 12 déc. 1996, D. 1997.438, note J.-M. LELOUP.
1092
Lorsque le client est une central d’achat, sont prises en compte les opérations portant sur les
produits commandés et livrés dans l’entrepôt de la central même s’ils sont ensuite fournis à des points
de vente d’adhérents situés hors du territoire : Cass. com., 3 mars 2009, D., 2009, pan. 2893obs. D.
FERRIER.
1093
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 216 : commissionnement direct ou indirect ;
Cass. com.. 8 déc. 2009, Agence commerciale : indemnité de rupture et rappel de commissions n° 08-
17.749, D, note E. CHEVRIER ; CA Rennes, Ch. 02 com., 10/00198, 24 mai 2011. Le
commissionnement indirect est munis des termes de l'alinéa 2 de l'article L. 134-6 du code de
commerce, « lorsqu'il est chargé d'un secteur géographique ou d'un groupe de personnes déterminé,
l'agent commercial a également droit à la commission pour toute opération conclue pendant la durée
du contrat d'agence avec une personne appartenant à ce secteur ou à ce groupe » ; étant entendu que
cette disposition ne lie pas le droit à commission de l'agent à l'existence en sa faveur d'une clause de
représentation exclusive : Cass. com., 23 janv. 2007, Bull. civ., IV, n° 5 ; BICC 15 mai 2007, p. 68, et
les obs. ; D. 2007. Chron. C. cass. 1308, obs. R. SALOMON, et AJ 439, obs. E. CHEVRIER ; RTD
com., 2007. 588, obs. B. BOULOC ; JCP E 2007, n° 50, p. 21, note M. FAURE-ABBAD ; Contrats,
conc. consom. 2007, n° 68, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; RJDA 2008, n° 260 ; RLDA mars 2007,
38, note E. BACCICHETTI.
1094
Art. L. 134-7 C. com. ; Cela concerne en premier lieu, les commandes reçues par le mandant ou
par l’agent commercial avant la cessation du contrat mais exécutées après la cessation. Et en second
lieu, les opérations qui seraient principalement dues à son activité au cours du contrat et se trouveraient
conclus dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat : D. FERRIER, Droit de la
distribution, op. cit., n° 216.
1095
Art. 794 C. com. lib et art. L.134-10 C. com ., art L. 134-16 C. com.
-300-
DEUXIÈME CHAPITRE
L’EXTINCTION DU CONTRAT
1096
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 1, p. 86.
-302-
1097
E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 1, 1968, n° 147.
1098
L'appareil administratif veille à ce que, une fois que l'agence a été violée ou non-renouvelée, un
agent subséquent serait tenue solidairement responsable avec le directeur de l'étranger pour le montant
de l'indemnité décrétée par le tribunal. Dans certains pays du Golfe, le ministère du Commerce ou d'un
comité spécialisé refuse l'enregistrement d'un nouvel agent pour autant que la résiliation de l'agence
précédente n'a pas été totalement réglée.
1099
Cass. com., 28 mai 2002, Bull. civ., IV, n° 91 ; D. 2003. Somm. 459, obs. Ph. DELEBECQUE.
1100
Comme nous l’avons indiqué précédemment, que le droit français a servi de base pour le droit
libanais. Le cas échéant, le décret-loi n° 34/67 a inspiré quelques, ses dispositions du décret n°58-1345
du 23 déc. 1958 relatif aux agents commerciaux qui a cité dans son article 3 : « Les contrats intervenus
entre les agents commerciaux et leurs mandants sont conclus dans l'intérêt commun des parties.
Leur résiliation par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute du mandataire, ouvre droit
au profit de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité compensatrice du préjudice
subi ».
-303-
quant aux modalités d’application de l’article 8101101 alinéa premier du Code des
obligations et des contrats, en disposant ce qui suit : « Le mandant peut, quand bon lui
semble, révoquer le mandat. Toute clause contraire est sans effet, tant entre les
parties qu’à l’égard des tiers. La stipulation d’un salaire n’empêche pas le mandant
de faire usage de ce droit ».
1101
Art. 810 C.O.C. al. 2: « Cependant, lorsque le mandat a été donné dans l’intérêt du mandataire
ou celui d’un tiers, le mandant ne peut le révoquer sans l’assentiment de la partie dans l’intérêt de
laquelle le mandat a été donné ».
1102
D’après l’article 808 C.O.C., les causes d’extinction du mandat sont: l’accomplissement de
l’affaire pour laquelle le mandat a été donné, l’avènement de la condition résolutoire ou l’avènement
du terme déterminé pour le mandat, la révocation du mandataire par le mandant, la renonciation du
mandataire au mandat, le décès du mandataire ou du mandant, le changement d’état des parties ou de
l’une d’elles, l’impossibilité d’exécution résultant d’une cause indépendante de la volonté des
contractants ; Art. 2003 C. civ. : Le mandat finit : par la révocation du mandataire, par la renonciation
de celui-ci au mandat, par la mort, la tutelle des majeurs ou la déconfiture, soit du mandant, soit du
mandataire.
-304-
589. Raison pour laquelle nous nous contenterons d’exposer dans une première
section, les causes de résiliation suivant les dispositions du décret-loi N. 34/67, qui
trouveront application d’après le principe d’intérêt commun. Toutefois, la
réglementation de la rupture volontaire du contrat de représentation commerciale,
bien qu’expressément déclarée comme découlant du caractère d’intérêt commun de ce
mode d’entremise, en réalité dépasse les conséquences normales de la notion de
mandat d’intérêt commun1105, et notamment, en ce qui concerne le calcul de
l’indemnité. Des conséquences qui découlent de ces causes de résiliation concernant
l’indemnité des différents préjudices résultant des dispositions dudit décret-loi, feront
l’objet d’une seconde section.
1103
Parmi les causes involontaires d’extinction du mandat, nous citons le décès du représentant ou
du représenté, et le changement d’état de l’un d’eux. Ces causes s’expliquent par le caractère intuitu
personae de ce dernier. Mais leur application au contrat de représentation commerciale sera marquée
par l’effacement de l’intuitu personae qui marque les rapports des parties : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p. 322. Une remarque à
citer concernant le droit français, dès lors que la loi ne distingue pas entre les causes de décès de l'agent
commercial, qui constitue l'événement objectif à l'origine de la rupture du contrat, le suicide d'un agent
commercial ne peut exclure le droit à indemnisation de ses ayants droit : Cass. com., 23 nov. 2010, D.
2010. Actu. 2906, obs. E. CHEVRIER.
1104
Mutatis mutandis est une locution latine, signifiant littéralement : « Ce qui devait être changé
ayant été changé », et que l'on pourrait traduire de façon plus actuelle par : « Une fois effectués les
changements nécessaires ».
1105
V. supra nº 64, 489 et s.
-305-
SECTION 1
D’où l’utilité de traiter dans cette première section chacune de ces causes
séparément, pour en étudier les conséquences qui en découlent dans une deuxième.
1106
Mme LEBRETON a préféré la notion d’ « intérêt de la relation contractuelle d’exclusivité » au
lieu de celle d’ « intérêt commun », car de toute façon, il ne peut être question d’invoquer la
reconnaissance d’une qualification juridique autonome fondée sur l’intérêt commun : S. LEBRETON,
L’exclusivité contractuelle et les comportements opportunistes, Etude particulière aux contrats de
distribution, préf. M. PEDAMON, Litec, 2002, n° 66.
1107
Dans la notion d’intérêt commun, ce n’est pas que chacun ait respectivement son propre intérêt
dans le contrat, mais plutôt que les deux parties partage le même intérêt, c’est-à-dire la même finalité
qui découle de la bonne exécution de ce contrat : S. MEGNIN, Le contrat d’agence commerciale en
droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, n° 126. De cette finalité a été inspiré la
résiliation du contrat de représentation commerciale et le droit à indemnité au représentant.
1108
Seules les causes affectées par l’intérêt commun seront applicables à la représentation
commerciale.
-306-
592. Cette faute si elle existait, élimine toute indemnité prévue par l’article 3 du
décret-loi N. 34/67. Elle a été cité anciennement par le décret N. 58-1345 du 23
décembre 1958 relatif aux agents commerciaux dans son article 3 : « La résiliation
par le mandant, si elle n'est pas justifiée par une faute du mandataire, ouvre droit au
profit de ce dernier, nonobstant toute clause contraire, à une indemnité
compensatrice du préjudice subi ». Mais, aussi bien qu’en France1109 qu’au Liban, les
textes demeurent silencieux sur la nature de la faute en question où aucune
spécification n’est donnée pour savoir le poids et l’étendue de cette faute 1110. En
d’autres termes, la simple faute est-elle suffisante ou doit-elle être lourde ? La simple
négligence tient-elle lieu de faute ?
593. Il a été jugé en France que la faute doit avoir certaine gravité pour qu’elle
puisse entrainer la rupture du contrat de représentation sans versement d’indemnité au
représentant1111. Cette idée a servi de base pour le projet loi qui a été débattu au
parlement avant la mise en vigueur par le décret-loi N. 34/67. En effet, d’après ce
projet loi, le représenté ne pouvait être exonéré de l’indemnité du contrat de
représentation que si le représentant avait commis une faute lourde1112. Or le texte
actuel omet cette exigence en la remplaçant simplement par « la faute du représentant
ou tout autre motif légitime ». Cela veut dire qu’il était dans l’intention du législateur
libanais de ne priver le représentant de l’indemnité que dans les cas extrêmes où une
faute lourde est commise. Exigence sévère et contradictoire avec la liberté du
1109
Art. L. 134-13 C. com. : « La réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due dans les cas
suivants : La cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l'agent commercial ».
1110
CA Paris, 30 janv. 1965, note J. HEMARD, RTD com., 1965, p. 925, n° 11.
1111
CA Lyon Ch. civ., 01 B, 10/06385, 10 janv. 2012 ; CA Paris, PÔLE 05 Ch. 05, 09/20562, 08
déc. 2011 ; CA Aix-en-Provence, Ch. 02, 11/06500, 23 nov. 2011 ; CA Douai 21 oct. 1966, Gaz. Pal.,
1967, 2e semestre, p.14, n° 7 ; CA Douai 23 avr. 1966, Gaz. Pal. 1967, 1e semestre, p. 12, n° 8 : seule
la faute grave de l’agent commercial peut dispenser le mandant de l’obligation à lui imposée par le
décret du 23 déc. 1958 ; T. com., Seine 28 fév. 1952, Gaz. Pal., 1952, 2, 62.
1112
La faute justifiant le refus d’indemnité devraient être, sinon lourde, du moins bien précise et
caractérisée : Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd.
Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 2.
-307-
commerce : Solution qui n’est pas en conformité avec les articles 786 et 790 du Code
des obligations et contrats libanais, qui prévoient que la responsabilité du mandataire
doit être rigoureusement appréciée lorsqu’il est salarié, de sorte que, s’agissant de la
représentation, la faute simple du représentant doit être retenue pour justifier la
révocation sans indemnité.
Attendu que la faute résulte d’un agissement négligeable comme le fait d’omettre
le recours contre l’autre partie après que les deux parties auront commencé la
négociation des conditions du contrat, ou du fait d’une rupture non justifiée des
négociations, ou du fait de s’abstenir de conclure le contrat sans motif légitime après
avoir guider l’autre partie au stade de la conclusion du contrat »1115.
595. C’est ainsi que la baisse du chiffre d’affaires du représenté est un préjudice
valable1116. Et si cette baisse est imputable au représentant par preuve d’une
1113
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 367.
1114
Ce préjudice doit consister dans une faute tellement grave qu’elle menacerait les intérêts du
représenté si les liens de représentation devaient être maintenus. En effet, une faute, quelque grave
qu’elle soit, commise occasionnellement, ne devraient pas entrainer la résiliation en entier du contrat
sans indemnité de rupture : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 366.
1115
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4, p. 1550.
1116
Cass. com., 11 juin 2002, n° pourvoi 99-20.360, arrêt n° 1138.
-308-
596. La Cour de cassation indique dans une formule synthétique que « seule la
faute grave qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et
rend impossible le maintien du lien contractuel, est privative de l'indemnité
compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat d'agence commerciale
et qu'il appartient au mandant de rapporter la preuve d'une telle faute»1120. En
premier lieu, on entend par faute, tout acte positif, toute commission ou toute
négligence effectuée par le représentant en violation des lois et règlements.
Notamment, il s’agit pour le représentant de la violation des obligations qui lui
incombent en vertu du décret-loi N. 34/67, des obligations convenues par les parties
au contrat1121, et des autres règles légales et coutumières régissant la profession1122.
En effet, le défaut d'immatriculation ne pourra être considéré comme une faute grave
au sens de l'art. L. 134-12 C. com. privative du droit à indemnité de rupture1123. Il a
été jugé que c’est une faute grave de la part de l'agent de représenter une entreprise
1117
Cass. civ., Ch. 4, arrêt du 18/10/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 3, p. 1138 : « L’insuffisance de
l’effort nécessaire pour assurer la continuité du contrat constitue la faute, en raison d’échec à
respecter les obligations contractuelles et par la suite la responsabilité de résilier le contrat » ; CA
Montpellier, 7 janv. 1999, Lettre distrib., juin 1999 : « Tant le défaut d’activité injustifié que l’absence
d’explications données au mandant sur cette inactivité, caractérisent la faute de l’agent commercial et
justifie la rupture du contrat ».
1118
CA Paris, 30 janv. 1965, RTD com., 1965, p. 925, n° 11: D’après cet arrêt, l’insuffisance du
chiffre d’affaires ne constitue pas une faute.
1119
CA Paris, 5e Ch., Sect. A, 11 fév. 2004, RG n° 2001/14955.
1120
Cass. com., 15 oct. 2002, Sté Marcel Lenne, Contrats, conc. consom., fév. 2002, comm., p. 12.
1121
CA Paris, 22 juin 1964, RTD com., 1964, p. 813, n°7, note J. HEMARD : Dans cette espèce, la
Cour, bien qu’elle alloue quand même une indemnité au concessionnaire, relève que celui-ci a violé ses
obligations contractuelles et que, pour cette raison l’indemnité devrait être très faible. Et, dans ce cas,
la responsabilité du concédant a été retenue pour ledit faible montant parce qu’il avait résilié le contrat
en quarante-huit heures, qui, malgré les agissements du concessionnaire, est une période très brève qui
engage la responsabilité.
1122
La Cour de cassation a retenue comme faute grave, la perte de confiance issue d’un agent qui
n’a pas informé loyalement son mandant que le concurrent de ce dernier venait de prendre une
participation majoritaire dans son capitale : Cass. com., 30 nov. 2004, n° pourvoi 02-17414.
1123
Cass. com., 15 oct. 2002, Contrats, conc., consom. 2003, n° 19, obs. L. LEVENEUR ; Lettre
distrib. déc. 2002, p. 2.
-309-
1124
CA Montpellier, 16 janv. 1991, ibid., n° 0613 ; CA Grenoble, 4 avr. 1991, Juris-Data, n°
041428 ; Cass. com., 21 juin 1967, Bull. civ., III, n° 259.
1125
Cass. com., 4 juill. 2000, Deliencourt c/ Sté Sièges d'Argentat, Journagence juill. 2001, p. 2.
1126
Est négligence continue, le fait de ne pas répondre aux lettres, de ne pas prendre les diligences
nécessaires auprès des clients défaillants, la visite de la clientèle de manière insuffisante : CA Paris, 23
oct. 1964, RTD com., 1965, p. 155 n° 9, note J. HEMARD ; Ainsi il a été jugé pour que la négligence
continue soit assimilée à la faute grave, que la société ait avisé le représentant d’ajuster son
comportement : CA Paris, 30 janv. 1965, RTD com., 1965, p. 925, n° 11.
1127
L’insuffisance du personnel du représentant ne justifie pas une rupture sans indemnité sur le
fondement de la faute du représentant: M. MAHMASSANI, op. cit., p. 368.
1128
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659.
-310-
pour les intérêts du représenté1129. Le cas échéant, la tolérance n’efface pas la gravité
de cette faute1130.
600. A la lumière de tout ce qui précède, nous constatons que les tribunaux
disposent de très vastes pouvoirs en la matière1133. C’est à eux d’apprécier l’ampleur
du préjudice subi, la nature du comportement qui est à l’origine de ce préjudice, de la
gravité d’un tel comportement1134 au cas où il s’agirait d’un comportement fautif1135.
1129
La faute grave sera constituée par des manquements caractérisées tels que : Vente des produits
concurrents sans accord du mandant : Cass. com., 24 mai 2011, n° 10-16.969, com. 25 sept. 2007,
Contrats, conc. Consom, 2008, n° 5 p. 19, obs. N. MATHEY ; Refus d’appliquer les méthodes de
revente du mandant : Cass. com., 29 nov. 1971, Bull. civ., IV, n° 287 ; Défaillance dans la prospection
de la clientèle : Cass. com., 6 janv. 1975, RTD com., 1976, p. 185, obs. J. HEMARD ; Insuffisance
dans la fourniture d’informations au mandat : Cass. com., 3 janv. 1991, RJDA, 1991, 2, n° 112.
1130
CA Bordeaux, Ch. soc., Sect. A, n° 09/07307, D., 29 mars 2011 ; CA Versailles, Ch. 17, n°
10/03050, D., 26 oct. 2011 ; CA Douai, n° 11/00097 D., 28 oct. 2011.
1131
La faute grave de représentant est toujours appréciée de manière restrictive par la jurisprudence,
car elle le prive de la protection légalement prévue en fin de contrat : D. FERRIER, Droit de la
distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 223.
1132
Il convient de distinguer la faute grave justifiant la privation d'indemnité de rupture du simple
manquement aux obligations contractuelles justifiant la rupture du contrat : Cass. com., 21 juin 2011,
JCP, E, 2011, n° 1607, note N. MATHEY, RJDA, 2011, n° 1020.
1133
Pour déterminer si un agent commercial a droit, lors de la rupture du contrat d'agence, à
l'indemnité compensatrice légalement prévue, il appartient au seul juge, et non à la convention des
parties, de qualifier de faute grave les faits qui lui sont soumis : Cass. com., 28 mai 2002, Bull. civ., IV,
n° 91 ; D., 2003. Somm. 459, obs. Ph. DELEBECQUE ; JCP E 2002, n° 51-52, p. 2063, note V.
PERRUCHOT-TRIBOULET ; RTD civ., 2002. 833, obs. P.-Y. GAUTIER ; RTD com., 2003, 158,
obs. B. BOULOC; Dr. et patr. oct. 2002, p. 102, obs. P. CHAUVEL ; LPA 3 juill. 2003, obs. J.
ETNER.
1134
La faute grave étant toujours appréciée strictement, en faveur de l'agent : D. FERRIER,
Concurrence-Distribution, D., 2012 p. 577.
-311-
MM. Les professeurs FABIA et SAFA, considèrent que les juges ne devraient pas
retenir comme telle la moindre erreur, le moindre manque de diligence d’un agent
ancien et qui s’était montré productif1136. En effet, nous dirons que la faute devra être
appréciée selon les circonstances particulières de l’espèce1137.
602. Dans ces deux décisions, le tribunal en question émet expressément cette
opinion. Nous citerons, cependant, un passage particulièrement significatif du chaque
décision afin de vérifier la conformité du motif légitime avec les dispositions de
l’article 4 du décret-loi N. 34/67 :
1135
Par contre, le maintien de la relation, après reproche de comportements fautifs de l'agent,
démontre que ceux-ci n'étaient pas aux yeux du mandant constitutifs d'une faute grave : Cass. com., 10
mai 2011, n° 10-17.952 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n°
34/67, 2e éd. Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 3.
1136
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, op. cit., sous art. 4, n° 2.
1137
Cass. civ. lib., nº 8 du 15 fév. 2001, Rev. Cassandre 2001, p. 159.
-312-
603. Plus tardivement, le même tribunal n’a pas pris en considération de manière
directe la réorganisation des réseaux comme motif légitime : « Attendu que la
réorganisation de ses représentations par la firme représentée ne constitue pas le
motif légitime prévue à l’alinéa 2 de l’article 4 de la loi sur la représentation
commerciale, sauf si la nécessité d’une telle réorganisation résulte d’un motif
légitime du fait du représentant. C’est-à-dire d’une baisse du chiffre d’affaires du fait
de la violation par le représentant des obligations qui lui incombent en vertu des
articles 785 et 786 C.O.C., de sorte que ladite baisse serait due à la mauvaise gestion
du représentant, à sa faute ou sa négligence, et non à des causes extérieures à sa
volonté telles que les conditions économiques ou la concurrence d’autres firmes
productrices…»1139.
604. Avant d’analyser les conséquences qui découlent de ces deux décisions, il
s’agit de savoir qu’est-ce qu’on entend par motif légitime au sens du décret-loi N.
34/67 ?
1138
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
1139
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 468/144, 3 juill. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 10 à 12.
1140
M. MAHMASSANI considère le cas échéant qu’il s’agisse d’une impossibilité d’exécution de
l’ensemble des obligations réciproques relatives à la représentation ou des obligations principales. Il ne
s’agit pas là de l’impossibilité d’exécution d’une ou de plusieurs opérations, non plus de l’impossibilité
provisoire d’exécution de la représentation commerciale. Il faut qu’il s’agisse d’une impossibilité
permanente ou apparemment permanente. En effet, le représentant, s’il exécute régulièrement ses
obligations, devrait pouvoir reprendre au représentant sa maitrise de sa clientèle, ou si la reprise de la
représentation dans les mêmes conditions se révélait aptes cette longue période au détriment du
représenté. Cette impossibilité d’exécution ne doit pas d’ailleurs être imputable au représenté, c’est-à-
dire, elle ne doit pas avoir été provoqué par la faute ou la négligence du représenté, alors qu’il aurait
pu en prévoir les conséquences. Il en est ainsi lorsque le représenté a effectué un u plusieurs actes qui
ont entrainé l’impossibilité d’exécution de la représentation en entier : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 372.
-313-
606. D’autre part, il est conclu dans l’intérêt commun des parties. C’est dire que
si la représentation est conclue dans l’intérêt du représentant, elle est aussi, conclue
dans l’intérêt du représenté. Le motif légitime peut de même provenir du représentant
ou du représenté. Sur cette assise, si l’intérêt du représenté est affecté par les causes
1141
Cass. com., 9 fév. 1971, JCP, G, 1972, II, 17064, note J. HEMARD ; CA Paris, 20 avr. 1972,
D., 1973, somm., p. 105.
1142
Cet élément n’a point la même ampleur qu’il a s’agissant du mandat, vu que ce dernier, en
principe, est un contrat conclu intuitu personae. Dans ce contrat, c’est la personne même du mandataire
qui est déterminante pour le mandant, de sorte que le mandat devrait s’éteindre chaque fois que le
mandataire n’est plus ou change d’état, la raison déterminante ayant disparu. C’est ainsi que le mandat
prend fin si le mandataire décède ou s’il subit un changement d’état : M. MAHMASSANI, La
représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 323 ; Art. 292 C.O.C. et art. 1237 C.
civ. ; TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 405/1504, 8 nov. 1970, Rec. Hatem, vol. 113, p. 21 et 22.
1143
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 4, n° 5. Soulignons à ce titre que ceci devrait être applicable dans les cas prévus à
l’alinéa premier de l’article premier du décret-loi n° 34/67, identifiant le représentant commercial
comme mandaitre, puisque l’art. 808 C.O.C. prévoit l’extinction du mandat au cas de décès du
mandataire : « Le décès ou le changement d’état du mandant éteint le mandat du mandataire principale
et celui qu’il s’est substitué sauf :
-Lorsque le mandat a été conféré dans l’intérêt du mandataire ou dans l’intérêt d’un tiers.
-Lorsqu’il a pour objet un fait à accomplir après la mort »
1144
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 335 :
« Il s’agit pour les juges du fond de voir, d’abord, dans chaque cas particulier, quel avait été le motif
déterminant des parties. S’ils remarquent que l’intuitu personae a été prépondérant, ils confirment la
résiliation sans indemnité. Si d’autres éléments prépondérants existent, la transmissibilité serait
prononcée, si ces éléments n’ont pas fait défaut ». L’appréciation de l’élément d’intuitu personae en
question doit se faire au moment de la conclusion du contrat de représentation commerciale, autrement
on ferait échec aux règles de droit qui interdisent la révision des contrats pour imprévision.
-314-
légiférées par la loi, rien n’interdit de considérer le contrat résilié sans que soit imposé
une indemnité de représenté contre le représentant suivant le motif légitime annoncé à
l’article 4 du décret-loi N. 34/671145. Dans ce sens, il a été jugé que, « la modification
unilatérale de la nature du contrat ayant pour objet de remplacer le représentant par
une tierce personne ou d’introduire une autre pour participer à l’exécution du contrat
de représentation commerciale, peut aboutir à l’imperfection dans l’exécution du
contrat et constitue le motif légitime permettant au représenté la rupture dudit contrat
sans indemnité »1146.
608. Pour ce qui est du premier arrêt cité ci-dessus1149, nous remarquons que le
représenté n’impute aucune faute au représentant dans l’exécution de la
représentation. En revanche, il a justifié sa résiliation du contrat par un motif
personnel relié à sa propre situation, ayant pour objet la réorganisation de ses réseaux
et de ses mandataires dans la méditerranée. Le tribunal considère que les motifs
inspirés par le représenté, ne justifie absolument pas, la résiliation de la relation
contractuelle sans indemniser le représentant commercial ; si aucune faute de ce
dernier n’est prouvée ou si aucun motif légitime justifie la résiliation du contrat. Sur
1145
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 4, p. 101 : cette solution au Liban, est
plus conforme au caractère d’intérêt commun qu’elle ne l’est en France. En effet, en France, avant le
décret de 1958, ce sont les règles générales du mandat d’intérêt commun qui s’appliquent. Selon ces
règles, ce mandat peut être révoqué par le mandant pour un motif légitime. Par contre, sous le régime
du décret en question, seule la faute du représentant est reconnue comme exonératoire, le motif ne
jouant plus.
1146
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 405/1504, 8 nov. 1970, Rec. Hatem, vol. 113, p. 21 et 22.
1147
Cass. soc., 16 déc. 1948, JCP., 1948, III, 1132 : La force majeure est un événement exceptionnel
auquel on ne peut faire face. Cet événement doit présenter trois caractéristiques : Il doit être irrésistible,
extérieur et imprévisible. Ainsi, la force majeure est étroitement encadrée.
1148
CA Mont Liban, n° 5, 7 janv. 1963, RJL, 1963, p. 514.
1149
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 7/881, 2 janv. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 8 à 10.
-315-
ce point, notons que le motif basé sur l’idée de la réorganisation des mandats, des
services ou des projets, a été refusé par la majorité de la jurisprudence française1150, et
a été source d’indemnisation en cas de contrats à durée indéterminée1151.
610. Dans le second arrêt1152, nous remarquons que la firme représentée a résilié
le contrat de représentation commerciale, à raison de l’existence d’un motif légitime,
qui se résume par la baisse du chiffre d’affaires dans le marché libanais1153. En plus ce
motif légitime trouve justification par sa volonté dans la réorganisation et le
1150
CA Toulouse, Ch. 04 Sect. 01, Ch. soc., 09/01933, 28 avr. 2010 ; Attendu d’autre part, que la
Cour a pu considérer comme intervenue sans cause légitime la rupture de ce mandat, la prétendue
réorganisation de l’entreprise invoquée par lui ne pouvant constituer une cause légitime de révocation
dudit mandat : Cass. com., 8 oct. 1969, Dalloz-Sirey 1970, 1e espèce, p. 143 ; Il est à bon droit décidé
qu’ayant le caractère de mandat d’intérêt commun, le contrat liant un agent commercial à une
entreprise, ne peut être unilatéralement résilié sans motif légitime, et qu’il y a lieu de faire droit à
l’action en dommages-intérêts de l’agent, alors que l’employeur n’établit l’existence d’aucun motif
pouvant justifier la rupture du contrat par sa seule volonté, et que la réorganisation de ses services, dont
il fait état à l’appui de sa décision, ne constitue pas une cause légitime de cessation du mandat que
comporte le contrat de l’agent commercial : Cass. com., 26 fév., 1958, D., 1958, p. 541 ; Il est à bon
droit décidé qu’ayant le caractère de mandat d’intérêt commun, le contrat liant un agent commercial à
une entreprise, ne peut être unilatéralement résilié sans motif légitime, et qu’il u a lieu de faire droit à
l’action en dommages-intérêts de l’agent, alors que l’employeur n’établit l’existence d’aucun motif
pouvant justifier la rupture du contrat par sa seule volonté, et que la réorganisation de ses services, dont
il fait état à l’appui de sa décision, ne constitue pas une cause légitime de cessation du mandat que
comporte le contrat de l’agent commercial : Cass. com., 21 fév. 1958, 2e espèce, D., 1958, p. 541 ; En
l’absence de motif légitime, la réorganisation des services, qui constitue un droit incontestable pour un
chef d’entreprise et peut entrainer la cessation du contrat de louage de services sous certaines
conditions, ne constitue pas une cause légitime de cassation du mandat que comporte le contrat d’agent
commercial : CA Paris, 28 et 31 janv. 1953, D., 1953, p. 617.
1151
La rupture d’un contrat à durée déterminée pour réorganisation du réseau de distribution du
mandant emporte droit à indemnité : Cass. com., 14 oct. 1997, RJDA 3/98, n° 279 ; Cass. com., 22 mai
1975, Bull., IV, n°134 : le contrat prévoyait un droit de modifier le secteur attribué mais n’autorisait
pas son amputation unilatérale et substantielle sans observation d’un préavis.
1152
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 468/144, 3 juill. 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 10 à 12.
1153
En France, il a été jugé que la baisse des chiffres d’affaires suscitées n’est pas suffisante à
prouver à l’insuffisance d’activité : Cass. com., 11 juin 2002, n° pourvoi 99-20.360, arrêt n° 1138.
-316-
611. Sur cette assise, le tribunal a considéré que la réorganisation des services de
vente et de distribution pour cause de baisse du chiffre d’affaires n’est pas une cause
de révocation sans indemnité et ne constitue pas un motif légitime1154. En d’autres
termes, la révocation sans indemnité d’un représentant pour baisse du chiffre de
ventes qui ne lui est pas imputable ne constitue pas le motif légitime, si cette baisse
est due à un fait imputable au représenté. Mais en revanche, si la baisse du chiffre
d’affaires était le résultat des circonstances économiques et financières, extérieures à
la volonté du représentant, il y aurait motif légitime une fois que les limites de la perte
atteintes : Solution adoptée par la jurisprudence1155 et la doctrine1156.
612. Dans ces arrêts, le tribunal, comme nous pouvons le voir, examine le fait
qui lui est soumis, à la lumière du comportement personnel du représentant, pour dire
qu’il s’agit d’un motif légitime. Il constate, en effet, l’absence de faute du
représentant, et conclut qu’il n’y avait pas motif légitime. La source de cette attitude
est que le tribunal a voulu se fonder sur des références françaises 1157 alors que le droit
français et la loi française sont différents en la matière, étant donné que la faute du
1154
S’agissant de la réorganisation par le représenté de ses services de distribution et de vente, il
faut noter qu’il s’agit là de mesure internes étrangères aux rapports avec le représentant, étant donné
qu’elles visent non à corriger et à éviter des fautes commises par le représentant, mais à accroître le
chiffre d’affaires. Cette réorganisation peut prendre plusieurs formes : il s’agit, parfois d’une répartition
nouvelle des zones de représentation, de l’annulation de certaines autres zones pour inefficacité. Il peut
s’agir aussi d’une association de sociétés entre elles uniquement dans le but d’avoir un service de
distribution et de vente : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais,
op. cit, p. 375.
1155
Des motifs admissible pour légitimer la résiliation ou le non-renouvellement du contrat : Le
changement de gérance, ou de composition de conseil d’administration non agrée par la firme
représentée, la cessation du fonds de commerce de l’agent, ou sa mise en gérance libre, ou son apport
en société sans l’agrément de la firme représentée, ou enfin la déclaration en faillite de l’agent: Cass.
civ., arrêt n° 27, 29 mars 1973, Rev. al Adl, 1973, p. 325 ; T. com., Beyrouth, décision n° 555 du 10
oct. 1974, Rev. al Adl, 1975, p. 321.
1156
Parmi les motifs autre que la faute de l’agent admissibles pour légitimer la résiliation ou le non-
renouvellement du contrat : la dissolution d’une société ou sa transformation en un type offrant un de
moindres garanties à la firme représentée : Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce
annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl, t. 2, 2004, sous art. 4, n° 5.
1157
La réorganisation de son entreprise ne permet pas au mandant une résiliation sans indemnité : J.
HEMARD, Les agents commerciaux, RTD com., 1959, n° 71, p. 614.
-317-
613. Cette solution du droit libanais qui retient le motif légitime étranger au
comportement du représentant et non-imputable au représenté, est parfaitement
compatible avec les principes du droit et d’équité. En effet, le fait que le motif
légitime soit retenu comme cause de résiliation du contrat de représentation
commerciale sans indemnité, est de nature à sauvegarder relativement 1159 la liberté
contractuelle des parties, notamment lorsqu’il s’agit d’un contrat à durée
indéterminée. Mais, quand même, le système libanais à cet égard, sauvegarde mieux
la liberté contractuelle que le droit français qui a juste retenu la faute de l’agent 1160,
puisqu’il prend soin de prévoir le motif légitime à côté de la faute comme fin de non-
recevoir à l’action de ce dernier en réclamation de l’indemnité de rupture.
614. Le tribunal du commerce de Beyrouth dans ces deux arrêts a considéré que
le motif légitime doit résulter du fait du représentant commercial. Il a adopté l’avis
des MM. les professeurs FABIA et SAFA, qui dans leur commentaire du décret-loi
expliquent que le motif légitime doit être apprécié à la lumière du comportement du
représentant1161. Ce sur quoi nous ne sommes pas d’accord avec ces deux avis
doctrinaux et jurisprudentiels pour les deux raisons suivantes :
1158
Seule la faute de l’agent exclut le droit à indemnité, et celui-ci reste ouvert même si par ailleurs
la résiliation du mandat peut être justifiée par une cause légitime : idem.
1159
Nous disons relativement, car normalement en vertu de la liberté contractuelle, tout contrat
conclu pour une durée indéterminée doit pouvoir être résilié à tout moment.
1160
Cette notion en France, de motif légitime, ne pourra être retenue que lorsque l’intermédiaire n’a
pas la qualité d’agent commercial, si, du moins, il est lié au commettant par un mandat d’intérêt
commun : Cass. civ., 16 fév. 1970, Bull. civ., 1970, IV, 55 ; Cass. com., 8 oct. 1969, JCP, 1970, II,
16339.
1161
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op.cit., sous art. 4, n° 10 : « …le respect de
l’esprit du présent décret-loi, qui est de ne priver l’agent de l’indemnité méritée par son activité
antérieure que si le motif de rupture provient de lui.. ».
-318-
Paragraphe 3 : Le terme
617. L’article 808 alinéa 2, du Code des obligations et contrats dispose que le
mandat cesse de plein droit par l’avènement de la condition résolutoire ou
l’évènement du terme qui y a été ajouté. En d’autres termes, le contrat convenu pour
une durée déterminée prend nécessairement et naturellement fin à l’arrivée du terme
stipulé. Si l’on applique la deuxième condition de cet article au contrat de
représentation commerciale, on devrait dire que la cessation de la représentation aurait
lieu sans indemnité, malgré le défaut de la faute du représenté ou du motif légitime,
lorsque la durée prévue par les parties prend terme. Une telle solution n’est alors pas
possible à la lumière du texte particulier à la représentation commerciale, notamment
l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 puisqu’il prévoit qu’: « Aussi, il
appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par
l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès
apparent dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du
1162
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit, p. 371.
1163
Art. 4, al. 1 du décret-loi n° 34/67.
-319-
nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation».
1164
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 497.
1165
Dans cette hypothèse, le professeur MOUSSERON avait proposé une formule indiquant que
dans le cas d’une fin liée à l’exécution normale du contrat ( échéance du terme extinctif affectant un
contrat à durée déterminée) : la réparation devrait correspondre, le cas échéant à l’indemnisation des
investissements recommandés par le mandant non amortis et réparation du préjudice tenant à une faute
accompagnant pareille extinction : J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl. n° 5, p.
28, n° 10.
1166
Cass. com., 13 nov. 2003, JCP, éd. E, pan. n° 2.
1167
Cass. com., 9 oct. 1990, JCP, éd. E, 1991. II. 211, note J.-J. HANINE.
1168
Cass. com., 28 mars 1995, arrêt n° 693, D., pourvoi n° 93-16.747.
-320-
dudit décret1169 nous permet néanmoins de lui trouver un sens approchant. Cette
analyse est l’exception à la règle stipulant que les textes spéciaux sont interprétés
d’une manière stricte suivant l’adage : Exceptio est strictissimae interpretationis1170.
Le texte dispose que « l’a empêché d’en tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son
mandant de renouveler le contrat de représentation ». C’est dire que le refus de
renouvellement du contrat par le représentant a pour objet ou but, d’une manière ou
d’une autre, de priver le représentant d’en tirer le gain résultant du succès réalisé. En
d’autres termes, le non-renouvellement forme un obstacle au représentant en faveur de
son droit à une indemnité en fin du contrat, ce qui le rapproche du caractère abusif.
Ainsi il a été jugé que « la rupture des négociations et la signature du contrat avec un
tiers après plusieurs promesses à la conclusion, constitue un acte abusif dans
l’utilisation de sa liberté née de la bonne foi et de l’usage commercial »1171. En effet,
si l’abus peut être caractérisé par l’absence de faute grave présidant au non-
renouvellement, il peut l’être de manière plus évidente lorsque le mandant tente
d’imposer de nouvelles conditions pour le contrat renouvelé et que l’agent s’y
refuse1172.
1169
Art. 4, al. 3 : « Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat
prend fin par l’avènement de son terme, et nonobstant toute clause contraire, le droit de réclamer une
indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la
promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché
d’en tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation ».
1170
Adage classique juridique latin qui signifie que l’exception est d’interprétation très stricte.
1171
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4 p. 1550.
1172
Cass. com., 27 oct. 1998, Lettre distrib. 1999-1: L’indemnisation de l’agent est admissible au
cas de non-renouvellement mais parce que le non-renouvellement était abusif.
1173
F. DEKEUWER-DEFOSSEZ, E. BLARY-CLEMENT, Droit commercial, 10e éd.,
Montchrestien, 2010, n° 437 ; J.-M. LELOUP, Agent commercial, Rép. trav., 1994, n° 70.
-321-
C. com., il peut être rompu à tout moment, sous la seule réserve d’un préavis, sauf
force majeure ou faute grave1174.
1174
Art. L134-11 C. com. : « Lorsque le contrat d'agence est à durée indéterminée, chacune des
parties peut y mettre fin moyennant un préavis.
La durée du préavis est d'un mois pour la première année du contrat, de deux mois pour la
deuxième année commencée, de trois mois pour la troisième année commencée et les années suivantes.
En l'absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin d'un mois civil.
Ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d'une faute grave de
l'une des parties ou de la survenance d'un cas de force majeure ».
1175
CA Pau, Ch. 02 Sect. 01, 09/00847, 14 juin 2010 ; A. REYGROBELLET, Partie 7 Fonds de
commerce, Location-gérance du fonds de commerce, D., 2010, Dossier 792 ; J.-M. MOUSSERRON,
Technique contractuelle, par P. MOUSSERON, J. RAYNARD, J.-B. SEUBE, 4e éd. Lefebvre, 2010,
n° 553 et s. ; Cass. com., 13 nov. 2003, D., 2003, p. 3047, obs. E. CHEVRIER ; cah. dr. entr., 2004,
p.33, obs. Ph. GRIGNON, RTD com., 2004, p. 365, obs. B. BOULOUC.
1176
Cass. civ., 1ere Ch., 15 nov. 2005, n° 02-21366 : « En l’absence de précision de durée, le
contrat à durée déterminée devient un contrat à durée indéterminée et peut alors être résilié à tout
moment par chacune des parties » ; J. HEMARD, obs. RTD com., 1964, p. 136, n° 136: le contrat à
durée déterminée devient à durée indéterminée après plusieurs renouvellement si aucune limite à la
tacite reconduction n’est stipulée. Cependant, cela n’est pas reconnu par certaines décisions : Cass. 10
fév. et 5 nov. 1960, D. 1961, 249 ; Cass. soc., 14 nov. 1963, JCP, 1964, 13471.
1177
Cass. com., 23 oct. 1990, D., arrêt n° 1214.
1178
CA Versailles, Ch. 12, sect. 1, 15 juin 2000, RG n° 99/04079.
1179
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 221 ; J. MESTRE, B.
FAGES, Proroger ou renouveler, RTD civ., 2003, p. 498 ; Cass. com., 9 juill. 2002, n° 00-22.512, D.,
-322-
2002, 2735 ; RJDA 2003, n° 54 ; Cass. com., 14 janv. 2003, n° 00-11.781, D. 2003.2304, note H.
KENFACK.
-323-
SECTION 2
624. Nous avons remarqué ci-dessus, que l’extinction avait lieu normalement
sans aucune obligation particulière à la charge du représenté, notamment le versement
d’une indemnité de rupture au profit du représentant. Mais, rien n’empêche que,
d’autres conséquences soient susceptibles d’en découler, même les cas qui entrainent
une indemnité au profit du représentant. Pour cela, nous traiterons des conséquences
générales dans une première analyse (Parag. 1), puis dans une deuxième, il sera
question du cas particulier, le plus courant, de l’indemnité de rupture (Parag. 2).
1180
Il s’agit à cet égard, surtout des rapports des parties avec les sous-agents que le représentant
aurait désignés pour les besoins de sa profession. Les problèmes avec les autres tiers ne posent pas de
problèmes particuliers, à cet égard et relevons de la section suivante.
1181
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, op. cit., sous art. 2, n° 11.
1182
Art. 1134 C. civ. : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont
faites ; Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi
autorise ; Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; Art. 221 C.O.C. : « les contrats établis d’une
manière légale sont obligatoires pour les contractants, et doit se comprendre, s’expliquer et s’exécuter
selon la bonne foi, l’équité et la coutume ».
-324-
626. Il est d’autres conséquences dont nous citons les deux principales : Il s’agit
pour chaque partie de restituer à l’autre les effets qui lui appartiennent demeurées par
devers elle1183, pour qu’ensuite s’opère entre elle un règlement de comptes général1184.
Le plus souvent, le cas de restitution porte sur la marchandise invendue demeurée
auprès du représentant, au moment de la survenance de l’extinction du contrat de
représentation.
1183
Il est une pratique dans le domaine de la représentation commerciale, en vertu de laquelle le
représenté souvent fournit au représentant différents documents, notamment, des fiches de clients
antérieurs à l’entrée en jeu du représentant, du matériel publicitaire, des prospectus, des échantillons,
des bureaux et des matériaux…. : M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif
libanais, op. cit., p. 391 et 392.
1184
Notamment la clôture du compte courant existant entre elles. C’est ainsi que le représenté devra
verser au représentant tous les arriérés des commissions qui lui sont dues, et que le représentant, à son
tour, doit restituer au représenté toutes sommes qui reviennent à ce dernier d’opérations conclues par
l’intermédiaire du premier pour le compte du dernier : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 395.
1185
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., 2012 LexisNexis, n° 589.
1186
Cass. com., 22 mars 1982, Bull. civ., 1982, IV, n° 115: condamnation pour concurrence
déloyale dans les mêmes circonstances. Le distributeur s’exposerait aux sanctions de l’abus de
confiance au cas de détournement ou d’atteinte portée à l’objet prêté, art. 314-1 C. pénale : « L'abus de
confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un
bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou
d'en faire un usage déterminé. L'abus de confiance est puni de trois ans d'emprisonnement et de
375000 euros d'amende » ; Cass. crim, 11 mars 1964, JCP, G, 1964, IV, 22 : condamnation pour
contrefaçon du distributeur qui avait stocké des produits concurrents dans les cuves prêtées par le
fournisseur.
1187
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 589.
-325-
1188
J. RAYNARD, La restitution dans les contrats de distribution, La cessation des relations
d’affaires, PU Aix, 1997, p. 179 ; Cass. com., 13 mai, 1975, JCP, Cl, 1975, I, 4631.
1189
Les pétroliers ayant prêté les cuves de stockage et les installations de tirage des carburants
entendaient faire jouer une clause stipulant leur restitution en nature, pour obliger le pompiste à
supporter les frais comme les conséquences de cette restitution et les dissuader ainsi de mettre fin au
contrat ou de ne pas en accepter le renouvellement : D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n°
590. Cette clause de restitution en nature a été finalement annulée, mais sur le terrain du droit de la
concurrence au motif qu’elle participait d’une entente (art. L. 420-1 C. com.), en imposant
indirectement aux distributeurs la poursuite des relations contractuelles avec le fournisseur et en
limitant ainsi la fluidité du marché des distributeurs entre les fournisseurs alors qu’elle n’était
nullement essentielle à l’équilibre du contrat liant fournisseurs et revendeurs : Cons. Conc. 29 sept.
1987, JCP, CDE, n° 6, obs. F. PEROCHON, puis Cons. Conc. Déc. n° 90-D-39, 23 oct. 1990 : BOCC
30 nov. 1990, prononçant des amendes contre les fournisseurs qui n’avaient pas supprimé cette clause.
1190
Sur le fondement des articles 544, 1134, 1875 et 1244 du code civil, Cass. com., 25 oct. 1983,
CDE, 1984, 2 ; Cass. com., 29 juin 1985, Bull. civ., 1985, IV, n° 43.
1191
Cette marchandise consiste aussi bien dans l’objet principal de la représentation que dans les
produits accessoires telles que les pièces de rechange lorsqu’il s’agit de la vente de voitures : Cass.
com., 13 fév. 1961, Bull. civ., 1961, III, 71.
1192
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 4, n° 14 : « on estime que la reprise du stock constituée chez l’agent
concessionnaire peut être imposée à la firme représentée, d’abord si elle est prévue au contrat, et dans
les conditions déterminées par celui-ci, ensuite, et même si elle n’est pas prévue, s’il apparaît que dans
la commune intention des parties, les achats de l’agent pour la constitution du stock étaient liés à
l’existence et au maintien de la concession, ces achats se trouvant ainsi, implicitement, mais
nécessairement, affectés d’une condition résolutoire réalisée par la fin du contrat, quelle qu’en soit la
cause ».
1193
T. com., Seine, 25 juin 1962, RTD com., 1963, p. 620, n° 10 ; CA Paris, 12 oct. 1966, RTD
com., 1966, p. 984, n° 6 ; Cass. com., 22 janv. 1969, JCP, 1969, II, 16066, note J. HEMARD ;
-326-
de représentation commerciale
Cependant, il en est autrement lorsque les stocks invendus ont été commandés après la notification de
la résiliation et pendant la durée du préavis. Dans ce cas, il n’y pas lieu à restitution étant donné que,
dans ce cas le représentant est en mesure de limiter ses commandes après de justes prévisions : T. com.,
Seine 19 déc. 1963, commenté J. HEMARD, RTD com., 1964, p. 373, n° 4 ; Dans le même sens, M.
CABRILLAC, D., 1964, chron. p. 181 ; Toutefois, des décisions ont refusé de reconnaître une telle
obligation à la charge du concédant : Cass. com., 16 fév. 1970, Bull. civ., 1970, IV, 59 ; CA Paris, 10
oct. 1963, JCP, éd. CI, n° 72907, mais ce dernier arrêt reconnaît un droit à indemnité au
concessionnaire de ce chef.
1194
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p.1659 : « Le préjudice matériel se concrétise notamment par ce qui a été supporté comme
frais pour la promotion des produits et sa diffusion, ainsi que ce qui a été subi de gain manqué ».
-327-
632. Dans le même sens, il a été jugé qu’« en ouvrant son site Internet de
réservation directe et en empêchant ainsi les agents de remplir leur fonction en vue
du développement de la marque, et en les privant de la rémunération sur le chiffre des
ventes réalisées par Internet, alors que, de son côté, l'agent, lié par la clause
d'exclusivité figurant au contrat, était dans l'impossibilité de compenser ce manque à
gagner par la distribution de produits concurrents, la société n'a pas respecté le
principe d'exécution de bonne foi du contrat de mandat d'intérêt commun la liant à
ses agents »1195.
633. La finalité de cet article est de limiter les hypothèses où le mandant pourra
mettre fin au contrat, permettant ainsi de toute façon, de le contraindre à payer le prix
de son désengagement de la relation contractuelle. Cet article relatif à la rupture du
contrat de représentation, prévoit que l’indemnité doit être égale au préjudice subi par
le représentant et le gain manqué de ce dernier. Or, le préjudice subi par le
représentant et le gain par lui manqué peuvent être souvent la perte de la rémunération
escomptée, et dont il aurait pu profiter du fait des agissements du représenté. Cette
obligation d’indemnisation du représentant concerne le remboursement des frais
encourus par celui-ci et la réparation du préjudice éventuellement subi à l’occasion de
l’exercice de la représentation1196. En d’autres termes, et sauf disposition contraire,
seuls les frais encourus par le représentant et les préjudices subis par ce dernier pour
la conclusion d’une opération déterminée, incombent au représenté, à condition qu’ils
n’aient pas été provoqués par le représentant dans une opération risquée.
1195
T. com., Bobigny, 29 janv. 2008, D., 2008, AJ 474, obs. C. MANARA ; Gaz. Pal. 2008. 1050,
obs. J.-B. GOUACHE ; RJDA 2008, n° 872.
1196
Il s’agit des frais et préjudices normaux qui résultent ordinairement de l’exécution du contrat
par le représentant à titre de mandataire, commissionnaire, courtier ou concessionnaire exclusif des
ventes. Sachant que tous autres frais ou préjudices subis en vue de la promotion du chiffre d’affaires du
fonds appartenant au représentant, même en relations avec l’objet de la représentation demeurent à la
charge du seul représentant : M. MAHMASSANI, op. cit., p. 294.
-328-
A- Le fondement de l’indemnité
636. Nous remarquons que le législateur français a apporté des modifications sur
le décret de 1958 en éliminant l’expression « nonobstant toute clause contraire », qui
continue à exister jusqu’à nos jours dans le décret-loi N. 34/67. Par ces modifications,
le législateur français s’est éloigné des principes du droit civil et a sensiblement remis
en cause la conception classique de l’indemnisation de l’agent1198. Par-là, cette
dernière se voit conférer un caractère d’autant plus automatique qu’elle est bien
souvent, en pratique accouplée à l’idée de préjudice. Cette indemnité marque
l’originalité du contrat de la représentation commerciale vu qu’elle est due malgré
1197
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl 2008, p. 1144 : « Attendu que la vérification
de la réalisation des conditions nécessaires pour indemniser le représentant commercial contre le non-
renouvellement du contrat de représentation lors de l’avènement de son terme, est une question du fait
dont son évaluation incombe aux juges du fond sans aucun contrôl de la Cour de cassation ».
1198
F. FOURNIER, L’agence commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 492 : « Etant
donné que le droit de l’indemnisation compensatrice du préjudice est le fruit d’une adaptation des
règles du droit civil, et notamment celles applicables au mandat ».
-329-
tout clause contraire du contrat1199. Elle est due à partir de la date de la résiliation en
raison du principe de l’effet déclaratif1200. Elle consiste dès lors en une véritable
menace sur le mandant, que sa responsabilité soit ou non en cause dans l’issue du
contrat1201. En effet, les modalités de cette indemnité dépendront du fondement qui lui
est attribué.
1199
Un arrêt de la Cour de cassation française (Com. 26 nov. 1959, Bull. civ., 1959, IV, 946) est
venu dire que le représenté pouvait désigner un représentant d’abord pour une période d’essai, et qu’à
l’issue de cette période, si un contrat définitif est conclu, aucun droit à indemnité n’est dû.
1200
Art. 559 C.P.C. : Les effets d’un jugement revient à la date de la réclamation devant les
tribunaux ; Art. 247 C.O.C. : La résiliation donne fin au contrat à partir de la date de sa réalisation.
D’où le jugement de résiliation est notamment déclaratif suivant le principe de l’art. 559 C.P.C. Juge
d’exécution Al Maten, décision n° 145/2006 du 29/3/2006 ; Dans le même sens : Cass. com., 17 mars
1982, Bull. civ. IV n° 97 ; Cass, civ., 1ère Ch., 20 Déc. 1982, Juris-Data n° 002786.
1201
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 493.
1202
E. TYAN, op. cit., p. 473, n° 1312 ; M. MAHMASSANI, op. cit., p. 394- 400 ; Ch. FABIA et P.
SAFA, Code de commerce annoté, t. 2, 3e éd. Sader 1988, Décret-loi n° 34/67, art. 4 n° 19.
1203
Cass. com., 23 avr. 2003, JCP, éd. E, jurisp, 1792, Lettre distrib., mai 2003 ; CA Douai, 2e Ch.,
15 mars 2001, JCP, éd. E, jurisp, 1861.
1204
Ph. PETEL, Colloque du 20 avr. 1992 sur La force de vente de l’entreprise et le droit de travail,
Institut d’Etude européennes et Internationales sur le travail, faculté de Montpellier, Litec, 1992 : « le
préjudice ainsi définie suppose que le contrat fasse l’objet d’une rupture et non d’une expiration
prévue à l’avance ».
1205
Cass. com., 25 juin 2002, n° pourvoi 99- 20959, Contrats - Concurrence - Consommation, nov.
2002, p. 12 : « l’indemnité de fin de contrat n’est pas une indemnité de clientèle, établie en fonction de
la clientèle créée ou apportée mais une indemnité réparant le préjudice causé par la cessation des
relations contractuelles » ; CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001 : « contrairement à
l’indemnité de clientèle du VRP, l’indemnité de rupture de l’agent commerciale n’implique pas que
celui-ci ait crée ou apportée la clientèle » ; Cass. com., 17 juill. 2001, arrêt n° 1485, n° pourvoi 99-
11.852 ; CA Bordeaux, 12 fév. 1969, Gaz. Pal, 1969, 2, 288 : cet arrêt prévoit expressément que
-330-
l’indemnité de rupture du contrat d’agence commerciale est la compensation d’un préjudice subi et non
le prix d’une clientèle.
1206
CA Bourges, 1e Ch., 8 déc. 1998, n° 1146 : « Le préjudice est principalement constitué de la
perte des commissions auxquelles l’agent pouvait raisonnablement prétendre dans la poursuite de son
mandant ».
1207
J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl. n° 5 : « Le préjudice que subit
l’agent à l’occasion de la cessation du contrat, correspond à la privation d’avantages ».
1208
Cass. com., 19 mars 2002, pourvoi n° 99-21.439, arrêt n° 648.
1209
J.-M. MOUSSERON, J.-J. BURST, N. CHOLLET, Ch. LAVABRE, J.-M. LELOUP et A.
SEUBE, Droit de la distribution, Librairies techniques, 1975, p. 358, n° 455 : « Il faut donc qu’il y ait
une perte d’une clientèle existante précédemment constituée aux risques de représentant » ; N.
CATALA, J. AARON, Le personnel et les intermédiaires de l’entreprise, Librairies techniques, 1971,
p. 213, n° 326.
1210
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 504.
1211
J.-M. MOUSSERON, J.-J. BURST, N. CHOLLET, Ch. LAVABRE, J.-M. LELOUP et A.
SEUBE, Droit de la distribution, Librairies techniques, 1975, p. 512, n° 396 et 397 : « L’agent perd le
bénéficie de la clientèle attachée à la représentation d’une entreprise ».
1212
A. De THEUX, Le statut européen de l’agent commercial, Approche citrique de droit comparé,
Facultés universitaires Saint Louis, Bruxelles, 1992, p. 182, n° 130.
-331-
des commissions »1213. Ensuite, il a été jugé que l’indemnité résulte de la perte des
ressources tirées de la clientèle1214.
1213
Cass. com., 20 mars 1972, JCP, éd. G, 1973, II, 17297.
1214
Cass. com., 28 mai 2001, arrêt n° 1046 : « Loin de se borner à fixer le préjudice conformément
à un usage, l’arrêt a justifié son évaluation par une appréciation concrète et détaillée en retenant que
le préjudice résulte de la perte des ressources tirées de la clientèle, établie par le revenu imposable ».
1215
CA Montpellier, Ch. 02, 24 nov. 2009, D., n° 08/04383.
1216
Contrat modèle ICC d’agence commerciale, 2002, 2e éd., art. 21.1 A.
1217
Art. 4, al. 3, du décret-loi n° 34/67 : « Aussi, il appartient au représentant commercial, même
au cas où le contrat prend fin par l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de
réclamer une indemnité évaluée par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent
dans la promotion de la marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a
empêché de tirer le bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation ».
-332-
1218
Dans la plupart de temps, il s’agit de désigné un expert pour l’évaluation du préjudice subi
prenant naissance au moment même de la rupture du contrat.
1219
L’agent commercial qui ne prouve pas de préjudice, son indemnité est un enrichissement sans
cause au détriment du mandant : F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 508 ; M.
MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit.. p. 398 ;
L’enrichissement sans cause qui est sanctionnée par l'action "de in rem verso", appartient à la catégorie
des quasi-contrats. L'action est admise lorsque le patrimoine d'une personne s'est enrichie au détriment
d'une autre et que l’appauvrissement corrélatif qui en est résulté ne trouve sa justification, ni dans une
convention ou une libéralité, ni dans une disposition légale ou réglementaire : Ch. FILIOS,
L'enrichissement sans cause en droit privé français interne et vues comparatives, th. Lille II, 1999.
1220
Cass. civ. 1ere Ch., 25 fév. 2003, Bull. 2003, I, n° 55, p. 42, RTD civ., avr.-juin 2003, n° 2, p.
297-298, note J. MESTRE et F. BERTRAND : Parmi les conditions de l’enrichissement sans cause, il
y a celle où une autre personne ait subi un appauvrissement, une perte financière réelle ou un manque à
gagner ou une perte réalisée.
1221
T. com. Paris, 15 oct. 2001, Lettre distrib., déc. 2001.
1222
CA Lyon, 28 fév. 2002, Juris-Data , n° 174712.
1223
L’indemnité de clientèle des VRP correspond parfaitement à la condition de professionnels de
ces derniers. Ils bénéficient en effet, de toutes les prestations sociales de la législation du travail, y
compris l’indemnité du chômage, au cas où il aurait lieu. Par contre, s’agissant de la représentation à
base de rapports d’indépendance entre le représenté et le représentant, la conception d’indemnité de
clientèle s’avère déplacée et inefficace, étant donné que le représentant établit son commerce à ses frais
et périls, il supporte souvent seul les couts de la publicités et autres…Or, étant un commerçant libre, il
ne pourrait profiter de toutes les prestations dont profitent les VRP, de sorte que le préjudice ainsi subi
-333-
pour le compte du représenté qui en devient le seul ayant droit et propriétaire afin de
pouvoir bénéficier d’une indemnité1224. Tandis que le représentant « agent », bien
qu’il agisse au nom et pour le compte du représenté, prospecte la clientèle et
l’augmente à son propre profit et à celui de son propre fonds de commerce. En effet,
la rupture du contrat de représentation n’est pas de nature à transférer en aucun cas la
propriété de la clientèle du représentant au représenté1225.
642. De ce qui précède, nous pouvons déduire que le législateur libanais a fait
état des sources françaises pour le fondement de l’indemnité du représentant
commercial libanais. Cet usage conjugué est le fondement de l’indemnité liée au
dommage subi pour l’agent commercial et le fondement de l’indemnité liée à la perte
de la clientèle pour les VRP. C’est dire que le représentant commercial libanais
profite des deux types d’indemnités citées ci-dessus ; le cas échéant, l’idée de cumuler
l’indemnité compensatrice du préjudice subi et une indemnité de clientèle a été
écartée en France1226.
643. Le décret-loi N. 34/67 a visé dans son quatrième article les conditions
d’indemnité relatif au représentant commercial nonobstant toute clause contraire. Il
645. D’une part, le représentant doit avoir « abouti à un succès apparent dans la
promotion de la marque de son mandant, ou à l’augmentation du nombre de ses
clients ». Mais, ce sont des termes non-rigoureux, car il est difficile de trouver une
juste mesure pour la promotion d’une marque, ou pour la reconnaissance du nombre
exact d’une clientèle. Par conséquent, il s’agit là, d’une question de fait laissée à
l’appréciation des juges du fond, qui devraient examiner toutes les circonstances
portées à leur connaissance par les parties concernant le sujet. Ils prendront
notamment en considération, le chiffre d’affaires de la firme représenté pour le même
marché avant et après l’entrée en jeu du représentant, le volume et l’ampleur de la
publicité qu’il a effectuée ainsi que le taux d’augmentation du chiffre d’affaires relevé
de manière périodique1228.
646. D’autre part, une seconde sous-condition doit aussi être réalisée pour ouvrir
le droit au représentant de réclamer une indemnité de non-renouvellement. Il s’agit
pour le représenté d’avoir refusé de renouveler le contrat, alors que le représentant n’a
pas eu le temps de profiter de l’augmentation de clientèle, et de la promotion de la
1227
V. supra n° 592 et s.
1228
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 18/10/2007, Rev. al Adl 2008, t. 3, p. 1138.
-335-
marque obtenue par ses soins1229. Cela donc, suppose une augmentation réelle, c’est
dire la preuve certaine que le représentant aurait été en mesure d’en profiter1230.
647. Les deux conditions précitées doivent être réunies, une seule ne suffit pas.
La preuve de la réalisation des conditions nécessaires pour l’indemnité n’est pas aisée,
il s’agira d’une tâche assez délicate qui demandera du juge du fond beaucoup de
réalisme1231. Dans ce sens, la jurisprudence libanaise a pu s’interroger sur les
dispositions de l’alinéa 3 de l’article 4 du décret-loi N. 34/67 suite à un arrêt de la
Cour d’appel de Beyrouth, qui a soulevé la question de non-renouvellement du contrat
de représentation commerciale malgré l’augmentation du chiffre d’affaire effectué par
le représentant :
1229
Cass. com., 20 mai 1969, Bull. 1969, 4, 182, et D., 1969, 649 : « La résiliation a eu pour effet
de le priver, au moment où ils commençaient à devenir rémunérateurs des résultats qu’il était en droit
d’atteindre de ses efforts et frais de prospection ».
1230
Il en est ainsi, chaque fois qu’une firme représentée a profité de campagnes publicitaires très
coûteuses menées par le représentant avec succès, avant qu’il n’ait pu récupérer ses frais et effectuer les
bénéfices escomptés de ladite campagne, pour lui retirer la représentation et l’accorder à un autre
représentant à qui elle imposerait sa marque bien lancée et promue.
1231
Cass. civ., Ch. 4, arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl 2008, p. 1144 : « Attendu que la vérification
de la réalisation des conditions nécessaires pour indemniser le représentant commercial contre le non-
renouvellement du contrat de représentation lors de l’avènement de son terme, est une question du fait
dont son évaluation incombe aux juges du fond sans aucun control de la Cour de cassation…».
-336-
Attendu que la nette différence entre les ventes des années successives manifeste
que l’activité du représentant a abouti à une augmentation du chiffre d’affaires ainsi
qu’à la promotion des brochures,
649. Suivant cet arrêt, nous constatons que la Cour d’appel, une fois vérifiée
d’une part l’existence d’un succès dans l’activité du représentant concrétisé par la
différence résultant des ventes successives, et de l’autre que la représentée l’a
empêché d’en tirer profit, a attribué une indemnité en faveur du représentant muni du
non-renouvellement du contrat après son déchéance, malgré le succès de la vente par
le représentant commercial. Cependant, notre attention est attirée par ce fait non
évoqué par la Cour : le représentant considère le non-renouvellement du contrat de
représentation commerciale lors de la survenance de son terme, comme résiliation de
celui-ci.
650. Ce fait est abordé en France avec le décret de 1958. Il a été jugé que la
survenance du terme d'un contrat à durée déterminée n'est pas une résiliation et
n'ouvrait pas droit à indemnité au profit de l'agent1233. Cette jurisprudence a été
critiquée au nom de la fraude à la loi et au nom de l'intérêt commun pour opérer une
transition vers la loi du 25 juin 19911234, par un arrêt de la Cour de cassation qui
retient que « selon l’article L. 134-12 du Code de commerce, la cessation du contrat
d’agent commercial, même à durée déterminée, donne à l’agent droit à réparation du
préjudice résultant de la perte pour l’avenir des revenus tirés de l’exploitation de la
clientèle commune »1235.
1232
CA Beyrouth, Ch. civ., 2e ass., arrêt n° 218, 13 avr. 1983, Rec. Hatem, vol. 183, p. 424 à 428.
1233
Cass. com., 24 avr. 1974, D., 1975, 765, note V. DELAPORTE ; 7 mars 1977, JCP, 1979, II,
19072, note J.-J. HANINE.
1234
J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, 71.
1235
Cass. com., 23 avr. 2003, Lettre distrib., mai 2003, note Ph. GRIGNON ; Agence commerciale :
droit à indemnité et cessation avant terme du contrat à durée déterminée, D., 2003, p. 1362, note E.
CHEVRIER.
-337-
651. Par conséquent, faut-il voir dans ces dispositions une atteinte au caractère
impératif de l’alinéa 2 du même article1236 ? C’est-à-dire la conclusion du contrat à
durée déterminée peut-elle constituer un biais pour détourner la règle impérative selon
laquelle la résiliation ne peut avoir lieu, en principe, sans indemnité1237 ? Il ne le
semble pas, car si, au bout de la première période contractuelle, les conditions de
l’octroi de l’indemnité de non-renouvellement ne sont pas réunies, nous pouvons
penser à la possibilité d’existence du motif légitime de rupture, en application de
l’alinéa 2 du même texte. En ce sens l'indemnisation de l'agent commercial est
provoquée par la cessation du contrat, elle est donc due aussi bien pour un contrat à
durée déterminée venu à échéance que pour un contrat à durée indéterminée1238 :
« cela mettra un terme à la jurisprudence qui déniait à l’agent tout droit à indemnité
en cas de non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée »1239.
1236
Art. 4, al. 2 du décret-loi n° 34/67 : « Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute
du représentant ou autre motif légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de
réclamer une indemnité équivalente au dommage subi et au gain manqué ».
1237
Dans le cas de l’agence commerciale, la loi de 1991 est cependant passée outre la notion de
préjudice pour assurer à l’agent une indemnisation automatique de l’agent en fin du contrat : F.
FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., n° 571.
1238
Art. L. 134-12, al. 1er C. com. ; Cass. com.., 28 mai 2002, Arkopharma e.a. c/ Gravier,
Journagence 14 oct. 2002, p. 2.
1239
J.-J. HANINE, Les rapports entre les agents commerciaux et leurs mandants, LPA, n° 122, 11
oct. 1992, p. 18, n° 22.
1240
CA Beyrouth, 11/6/2007, Rev. al Adl, 2007, p. 1108.
-338-
653. En effet, même si toutes les conditions sont réunies, l’indemnité sera refusé
au représentant si le représenté ne renouvelle point le contrat pour une faute suffisante
commise par le représentant, ou pour un motif légitime qui répond à la définition que
nous avons établie précédemment. Solution divergente de celle en droit français où ,
« contrairement à la solution aujourd’hui retenue par le juge, le non-renouvellement
d’un contrat d’agence commerciale à durée déterminée ne devrait donc pas emporter
droit à réparation au profit de l’agent, sauf pour le préjudice tenant à une faute
commise par le mandant à l’occasion du non-renouvellement »1242. Toutefois, quelles
que soient les circonstances, l’indemnité de rupture est la conséquence suprême de
tout acte de résiliation ou de non-renouvellement, aux cas où les conditions de la
cessation du contrat sans indemnité ne sont pas réunies. Mais en droit français, l'agent
commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai
d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits1243 ;
alors qu’une telle exigence ne se retrouve pas en droit libanais.
C- Le montant de l’indemnité
1241
Cass. civ., 4e Ch., arrêt n° 12/12/2008, Rev. al Adl, 2008, p. 1144.
1242
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 229.
1243
Al. 2, art. L. 134-12 C. com.
-339-
1244
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « Le préjudice moral se caractérise par la surprise du représentant de la
résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans le marché commercial et à sa réputation économique ».
1245
Ibid : « Attendu que les indemnités résultant de la résiliation englobent en plus du préjudice
moral caractérisé par la surprise du représentant de la résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans
le marché commercial et à sa réputation économique, un préjudice matériel sera retenu, concrétisé
notamment par ce qui a été supporté comme frais pour la promotion des produits et sa diffusion, ainsi
que ce qui a été subi de gain manqué ».
1246
Cass. com., 25 juin 2002, RJDA, 12/02/ n° 1260 ; CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov.
2001 : « contrairement à l’indemnité de clientèle du VRP, l’indemnité de rupture de l’agent
commerciale n’implique pas que celui-ci ait crée ou apportée la clientèle ».
1247
F. FOURNIER, L’agence commerciale, op. cit., n° 510.
1248
Cass. com., 23 avr. 2003, pourvoi n° 01-15639, arrêt n° 643 ; Dans le même sens, D. FERRIER,
L’indemnisation de l’agent commercial au terme du contrat, D., 2003, somm. p. 2883 ; Cass. com., 23
avr. 2003, D. 2003, p. 1362, note E. CHEVRIER.
1249
T. com., Mont Liban, décision n° 86/105, 30/12/1986.
-340-
1250
CA Beyrouth, Ch. civ., 2e ass., arrêt n° 218, 13 avr. 1983, Rec. Hatem, vol. 183, p. 424 à 428.
1251
Cass. com., 6 fév. 1996, RJDA 4/96, n° 492 : « C’est à tort que l’arrêt limite le montant de
l’indemnité allouée à la société LIMATRAP au montant des commissions que cette dernière aurait
perçues entre la date de la résiliation du contrat et la date d’expiration de celui-ci, son préjudice
comprenait également les conséquences de sa perte d’activité et qu’elle devait en outre être indemnisée
pour avoir augmenté la cliente de son mandant ».
1252
CA Versailles, 15 sept. 2000, BRDA 21/100, n° 10.
1253
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit., p. 408.
1254
J.-M. MOUSSERON, JCP, éd. E, cah. dr. entr., 1992, suppl., n° 5, p. 28, n° 10.
-341-
1255
CA Lyon, 8 sept. 1995, JCP, éd. G, IV, 836 ; Dans le même sens, T. com., Paris, 5 juill. 2000,
Juris-Data, n° 122734.
1256
Cass. com., 5 avr. 2005, D., 2005, obs. E. CHEVRIER, incluant les sommes perçues au titre
d’une activité logistique ; Cass. com., 12 fév.1985, arrêt n° 189 : la Cour indique que la valeur de deux
années de commissions est suffisante en ce domaine.
1257
Le chiffre d’affaires antérieur est très important comme indicative, où il a été alloué une
indemnité très modérée en se fondant sur le fait que le mandataire lui-même reconnaissait que ses
efforts pour accroître le volume des affaires traitées restaient vains et qu’il n’avait aucun espoir de voir
augmenter le chiffre de ses commissions : CA Douai, 27 sept. 1963, Gaz. Pal., 1964, 1, 128, obs. J.
HEMARD, RTD com., 1964, p. 375, n° 7.
1258
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit. p. 101 ; F. FOURNIER, L’agence commerciale,
op. cit. p. 288 ; J.-M. LELOUP, Agent commercial, D., 2012, n° 1205 et s. ; J. THIEFFRY, La
distribution des produits à l’étranger, RTD com., 1985, 730.
1259
CA Lyon, 3e Ch. civ., 7 nov. 2002, Juris-Data n° 194736 : « Cet usage ne s’impose pas aux
juridictions, la mesure de l’indemnité étant celle du préjudice subi » ; CA Paris 5e Ch., 20 janv.
1995 : « Aucune disposition législative ou règlementaire n’impose le versement de deux années de
commissions à titre d’indemnité de rupture d’un contrat d’agent commercial » ; CA Bordeaux, 4 déc.
1969, Gaz Pal., 1970, 1, 27 ; CA Paris, 13 fév.1964, Gaz. Pal. 1964, 1, 333 : Cet arrêt non seulement ne
reconnaît aucune force obligatoire à la coutume en question, mais aussi s’élève contre une telle
application pour dire qu’il faudrait uniquement se référer au préjudice subi ; Cependant pour M.
HEMARD, cet usage serait intéressant à défaut d’éléments d’évaluation du préjudice : J. HEMARD,
RTD com., 1964, p. 608, n° 13.
1260
CA Paris, 20 janv. 1995, D., 1997, somm., p. 52, obs. D. FERRIER.
1261
CA Lyon, 28 fév. 2002, Juris-Data n° 174712 ; CA Paris 28 juin 2002, Juris-Data n° 188811 ;
CA Nîmes, 6 déc. 2001, Juris-Data n° 176652 ; CA Paris 5 juill. 1975, LPA 24 déc. 1975 : alloue trois
-342-
années de commissions ; CA Bordeaux 12 fév. 1969, Gaz. Pal., 1969, 2, 288 ; Cass. com., 26 fév. 1958,
Gaz. Pal., 1958, 1, 348, D., 1958, 541.
1262
Cass. req. 29 oct. 1930, DH 1930.554 : cité J.-M. LELOUP, Agent commercial, D, 2012, n° 86
1263
Contrat modèle ICC d’agence commerciale, 2002, 2e éd., art. 21.2.
1264
Cass. civ., 4e Ch., arrêt du 8/11/2007, Rev. al Adl, 2008, t. 1, p. 227.
1265
D. FERRIER, Droit de la distribution, op. cit., n° 231. A fortiori les modalités d’un paiement
anticipé et le cas échéant fractionne de la somme qui serait due à la rupture du contrat : Contra Paris, 15
oct. 2009, n° 07/09671, Sté Valéo.
1266
Cass. com., 14 oct. 1974, Bull. civ., IV, n° 244.
1267
CA Montpellier, 11 juill. 2001, Lettre distrib., oct. 2001 : « Le montant de l’indemnité est réduit
au motif que la prospection de clientèle en faveur d’entreprises concurrentes était de nature à minorer
le préjudice à la rupture subi par l’agent ».
1268
CA Paris, 3 oct. 2001, Lettre distrib., nov. 2001 : « L’indemnité de rupture de l’agent
commercial doit donc être calculée sur la base de la totalité de sa rémunération, l’évaluation se faisant
-343-
notre avis, le droit des parties de prévoir d’avance le mode de calcul de l’indemnité,
devrait s’exercer sous le contrôle du juge qui garde plein pouvoir pour augmenter la
somme ou la réduire.
662. Sur cette assise, M. le professeur TYAN considère que cette disposition
s’applique à l’ensemble de l’article 4, c’est dire aussi bien pour les contrats à durée
indéterminée que pour les contrats conclus pour une durée déterminée, considérant
qu’il n’y a lieu de distinguer entre les deux modalités1270. A l’opposé MM. les
professeurs FABIA et SAFA considèrent que cet alinéa ne vise que l’alinéa précèdent,
à savoir celui qui traite du non-renouvellement1271. Solution suivie par M.
MAHMASSANI qui a considéré que, « par application de ce quatrième alinéa, les
tribunaux libanais doivent pouvoir tenir compte des préjudices subis sur tous les
marchés libanais et étrangers pour le calcul de l’indemnité ; et ce chaque fois qu’ils
sont en présence de la rupture d’un contrat à durée déterminée ou indéterminée, alors
qu’ils ne doivent tenir compte que du marché libanais lorsqu’il s’agit du non-
renouvellement d’un contrat à durée déterminée »1272.
663. A notre avis, le texte est tacite par la désignation de l’alinéa 3 et non
l’ensemble de l’article 4. Il restreint la compétence des tribunaux libanais1273, en cas
de rupture du contrat aux pertes subies sur le marché libanais. C’est comme si le
législateur, dans ce cas particulier, avait adopté le critère de nationalité pour la
détermination du tribunal compétent1274. En d’autres termes, le législateur libanais a
entendu interdire au représentant muni d’un contrat à durée déterminée de réclamer
auprès des tribunaux libanais, une indemnité de rupture qui tiendrait compte des
marchés non-libanais. Mais avec l’annulation de l’alinéa 4 en question, nous pensons
que cette modification a été voulue pour ouvrir la porte à la plus forte indemnisation
du préjudice subi sur tous les marchés où la représentation s’exerce et non seulement
sur le territoire libanais.
664. Vu que cet alinéa, est lié au précèdent pour lequel le fondement de
l’indemnité découle de l’idée de clientèle et de promotion de la marque1275, nous
constatons que le législateur libanais a attaché cette indemnité à la clientèle libanaise.
Après sa suppression, cette indemnité demeure accessible pour toutes les clientèles
hors le territoire libanais, de façon à mieux couvrir le représentant commercial en
augmentant sa chance de hausser le montant de l’indemnité. C’est dire qu’il y a là une
mesure de protection élargie pour le représentant commercial doté par une large
indemnité pour perte subie, que le contrat soit conclu au Liban ou à l’étranger. En
effet, nous pouvons en déduire que le législateur a autorisé le représentant à réclamer
auprès des tribunaux libanais, l’indemnité tenant compte de tous les marchés inclus
dans la représentation, et non seulement du marché libanais.
1273
Attendu qu’en principe, le représentant commercial est libanais, et exerce ses activités au Liban
suivant les dispositions de l’article premier du décret-loi n° 34/67 , et attendu que suivant l’article 5
dudit décret-loi : « Nonobstant toute clause contraire, les tribunaux du lieu où le représentant
commercial exerce son activité sont compétents pour trancher les litiges naissant du contrat de
représentation commerciale», nous pouvons déduire que le législateur a voulu désigner la compétence
des tribunaux libanais.
1274
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. de Lib.,
1972, p. 239.
1275
V. supra n° 630 et s.
-345-
665. Les effets entre les parties sont régis d’une manière globale par les
dispositions du droit commun, en ce que chacun des parties aura des obligations
envers l’autre. Des dispositions spéciales prévues par le décret-loi montrent leur
impact surtout à l’égard du représentant commercial bénéficiaire de la clause
d’exclusivité. Ce dernier jouit d’une certaine protection réalisée par une indemnité qui
lui est incombe nonobstant toute clause contraire : Si d’une part le contrat a été résilié
par le représenté sans faute du représentant ou autre motif légitime ; si d’autre part
son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la marque de son
mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le
bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de
représentation.
666. Après avoir traité dans un premier titre des relations des parties entre elles
quant à la structure de leurs obligations et les conséquences qui en découlent, voyons
maintenant dans un second, les effets du contrat de la représentation commerciale par
rapport aux tiers en fonction de l’exclusivité issue du décret-loi N. 34/67.
TITRE SECOND
1276
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1277
Art. 1165 C. civ. : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C: « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne. C’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
1278
R. WINTGEN, Etude critique de la notion d'opposabilité, Les effets du contrat à l'égard des
tiers en droit français et en droit allemand, préf. J. GHESTIN, LGDJ, 2004, n° 178.
-348-
conventions puisqu'il ne s'agit pas, en principe, d'obliger les tiers mais simplement de
leur en imposer le respect1279.
669. Tel qu’il est consacré par l’article 1165 du Code civil, le principe de la
force obligatoire a été formulé par POTHIER, qui le justifiait par l’idée que la volonté
ne peut produire d’effets qu’à l’égard de ceux qui l’ont exprimée1280. En droit romain,
de nombreuses solutions sont justifiées par l’idée, à la fois plus générale et plus
restreinte, que ce qui a été fait entre les uns ne doit pas détériorer la situation juridique
des autres1281. Toutes ces solutions sont consacrées sans la moindre référence à un
principe général selon lequel le contrat ne produirait d’effets qu’entre les parties.
Quant à l’adage « res inter alios acta aliis nec nocet nec prodest »1282, il a
vraisemblablement été formulé au XIXe siècle par les commentateurs du Code civil.
1279
D. FERRIER, Concurrence-Distribution : pan. 2005, D., 2006 ; J. GHESTIN, C. JAMIN et M.
BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 678, spéc. n° 724 ; F. BERTRAND,
L'opposabilité du contrat aux tiers, th., Paris II, 1979.
1280
R.-J. POTHIER, Cours de droit civil français, 1871, p. 40, 410 : cité par R. WINTGEN, Etude
critique de la notion d'opposabilité, op. cit.
1281
Le droit romain admet en revanche que l’on puisse améliorer la condition juridique d’un tiers,
tout en interdisant, néanmoins, la stipulation pour autrui.
1282
Locution latine signifiant qu'un contrat ne peut pas affecter négativement les droits d'un tiers.
1283
Cass. civ., 14 févr. 1984, Bull. civ., I, n° 601. L'arrêt commenté s'inscrit dans cette doctrine,
qu'il vient prolonger puisqu'il approuve les juges du fond d'avoir fait « application du principe
d'opposabilité des conventions aux tiers ».
-349-
1284
M. BILLIAU, J. MOURY, Opposabilité du contrat aux tiers et responsabilité de ceux-ci envers
les parties : une application au contrat d’édition, D., 2001.
1285
Comp. P. ANCEL, Force obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, n°
53, p. 806-807.
-350-
PREMIER CHAPITRE
1286
J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU , op. cit., n° 724 ; F. TERRE, Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 490.
1287
P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors
réseau, (A propos des affaires Leclerc-parfumerie), D., 1990 p. 43 : Pour des clauses d'exclusivité
territoriale de vente : Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199 ; Pour une clause
d'approvisionnement exclusif : Cass. com., 11 oct. 1971, Bull. civ., IV, n° 237 ; D. 1972.120.
-351-
SECTION 1
DE LA SIMPLE CONNAISSANCE
1288
R. WINTGEN, Etude critique de la notion d'opposabilité, Les effets du contrat à l'égard des
tiers en droit français et en droit allemand, préf. J. GHESTIN, LGDJ, 2004, n° 164 : Considérant que
l'opposabilité n'est pas un principe juridique en ce qu'il n'a qu'une vertu descriptive, l'auteur conteste
l'existence d'un devoir général des tiers de ne pas porter atteinte au contrat. Parmi ses arguments, il
retient que « les intérêts des tiers, leur liberté et leur sécurité juridique, s'opposent à ce que les parties
puissent leur imposer le respect de tout ce qu'elles peuvent valablement stipuler entre elles. La
conciliation des intérêts en présence requiert une appréciation circonstanciée et une protection
adaptée des tiers ».
1289
J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf. D. MARTIN, LGDJ, 1984, n° 7.
1290
T. com., Caen 14 janv. 1959, cité par C. CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD
com., 1963, n° 63, note 3, où d’après cet arrêt, la publicité suffisante, parfois, peut servir à prouver la
connaissance ; La publicité contient toujours une part d’information, ne serait-ce que pour faire
connaître l’existence du produit ou du service : Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S.
ROBINNE, V. VALETTE-ERCOLE, Droit de la consommation, Tout le Droit, Ellipses, 2008, p. 109.
1291
L'essentiel de la critique de R. WINTGEN (v. Supra note 1288) tombe s'il est distingué, comme
l'a établi notamment M. Duclos entre le principe de l'opposabilité et son efficience : « il importe peu
[...] que le débiteur ait lui-même transgressé ou scrupuleusement respecté son propre engagement.
Affirmer le contraire serait minimisé dans cette matière le rôle de l'opposabilité du droit personnel,
pour ne voir dans la responsabilité du tiers qu'une conséquence de sa prétendue « complicité » avec le
débiteur. Si la personne tierce est fautive, c'est qu'elle doit s'abstenir de toute entrave aux créances
d'autrui du fait de leur opposabilité » : J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf.
D. MARTIN, LGDJ, 1984, n° 172, p. 199- Solution retenue par L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La
fraude paulienne, préf. G. WICKER, LGDJ, 2008, vol. 500, n° 195 s., spéc., n° 204.
-352-
675. Il n’en est pas moins utile de s’inspirer de solutions admises de longue date
en d’autres domaines, que ce soit celui de la propriété industrielle ou en particulier
celui des clauses de non-concurrence. S’agissant de la propriété industrielle, deux
règlements sur la marque communautaire indiquent ce qui suit concernant
l’opposabilité aux tiers : « Toutefois, avant son inscription, un tel acte est opposable
1292
V. en ce sens : CA Paris, 22 juin 1960, Gaz. Pal., 1960, II. 200 et JCP, 1960, II, 857, note A.
CHAVANNE ; La Cour de Paris a retenu la responsabilité d’un tiers ayant violé l’exclusivité d’un
concessionnaire exclusif ayant fait l’objet d’une large publicité : CA Paris, 9 avr. 1962, note R.
PLAISANT, n° 10, note 10.
1293
La jurisprudence admet en effet que, sous certaines conditions, les contrats de concession
exclusive (Cass. crim., 11 juill. 1962, BRANDT, D., 1962, 497, Rapp. COSTA ; S. 1962.219, note J.
ROBERT ; 22 oct. 1964, BRUNEL, D., 1964, 753, note J. - L. C. ; JCP 1965.II.14160, note J.
HEMARD ; 21 mars 1972, Seneclauze, Bull. crim., n° 292 ; D., 1973, 677, note T. IVAINER ; JCP
1972.II.17222, note P. L.), puis l'existence de réseaux de distribution sélective (Cass. crim., 3 nov.
1982, LAVIN, Bull. crim., n° 238 ; D. 1983.IR.211, obs. C. GAVALDA et L. de LEYSSAC ; Gaz.
Pal., 1982, 2, 658, note J.-P. MARCHI), puissent justifier le refus de vente en rendant les marchandises
indisponibles. Sur les effets de la clause d’exclusivité à l’égard des tiers à la lumière de la nouvelle
législation sur le refus de vente : J. GUYENOT, Les conventions d’exclusivité de la vente, RTD com.,
1963, p. 529 et s. ; J. ROBERT, De l’opposabilité des contrats d’exclusivité, D., 1963, p. 189 : cité par
P. JOURDAIN, op. cit., p. 43.
1294
S’agissant des droits français et libanais antérieur à 1967, la solution s’identifie par les règles de
la liberté du commerce et de l’industrie. En effet, d’après ce principe, la concurrence est licite. Elle est,
plus encore, une caractéristique du système libéral qui consacre la liberté du commerce et de
l’industrie. Et ce n’est qu’au moment où elle devient illicite, c’est-à-dire, lorsqu’elle tend à nuire aux
intérêts du représentant exclusif, qu’elle devient alors sanctionnée et prohibée : M. MAHMASSANI,
op. cit.
1295
A. BALLET, L’exclusivité et le réseau de distribution, th, 2005, Montpellier, n° 561 : « …. Le
tiers ne doit alors ni accomplir un acte susceptible de porter atteinte aux prévisions des parties, ni
pouvoir bénéficier indirectement des efforts comme des investissements déployés par le promoteur du
réseau et par ses membres. Cela s’oppose pourtant au principe selon lequel chacun a le droit de
développer une activité concurrente ».
-353-
aux tiers qui ont acquis des droits sur la marque, le dessin ou modèle communautaire
enregistré après la date de cet acte, mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de
l'acquisition de ces droits »1296 .
677. En revanche, dans une affaire jugée en 20061300, il a été posé par la Cour de
cassation que le bailleur d’un local commercial qui a promis une exclusivité à l’un de
ses locataires doit faire respecter la clause par ses autres locataires, à qui il avait
pourtant concédé un droit concurrent. Or, dans cette affaire, ces derniers n’avaient pas
eu connaissance de l’exclusivité concédée préalablement, leur activité concurrente
n’était donc pour eux pas fautive1301. En posant que le bailleur devait faire respecter
l’exclusivité promise, la Cour de cassation sacrifiait donc les intérêts des tiers de
bonne foi au nom de la force obligatoire de l’exclusivité. En outre, concrètement,
nous ne voyons guère comment le bailleur peut imposer aux tiers de cesser de faire
concurrence au titulaire de l’exclusivité. La Cour de renvoi n’a d’ailleurs pas fait
1296
Propriété industrielle, Deuxième partie : Règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil du 26 fév.
2009, sur la marque communautaire (JOUE L 78 du 24 mars 2009), art. 23 et Règlement (CE) n°
6/2002 du 12 déc. 2001, sur la marque communautaire, art. 33 : D., misent à jour le 8/5/2012.
1297
CA Aix, 2e Ch., 20 déc. 2002, Bull. d’Aix 2002-2, p. 291, obs. D. BOSCO : « Sanction de
l’employeur malgré la production d’une attestation écrite du salarié en ce sens qu’aucune obligation
de non-concurrence n’était à sa charge ».
1298
Cass. com., 18 déc. 2001, D., 2003, Somm., p. 1029, obs. Y. PICOD ; CA Versailles 29 juin
2001, Somm., p. 234, obs. Y. PICOD ; CA Paris, 10 janv., 2001, D., 2001, Somm. p. 1311, obs. Y.
SERRA.
1299
Cass. com., 18 déc. 2001, préc.
1300
Cass. civ., 3e Ch., 4 mai 2006, JCP, 2006, II, n° 10119, note O. DESHAYES ; JCP, 2006, DT
éd. E, p. 1780, n° 2504, obs. J. RAYNARD ; RTD civ., 2006, p. 554, obs. J. MESTRE, et B. FAGES ;
Administrer 2006, n° 390, p. 45 obs. J.-D. BARBIER ; RDC, 2006, p. 1154, obs. J.-B. SEUBE, RDC,
2007, p. 267, obs. D. MAZEAU et p. 295, obs. G. VINEY.
1301
CA de la Cour de renvoi après cassation, Paris, 16e Ch. B., 27 sept. 2007, Juris-Data, n° 2007-
343444.
-354-
mystère de son hostilité à cette idée que le bailleur doit faire respecter l’exclusivité
aux tiers de bonne foi1302.
678. L’examen des faits de l’espèce litigieuse pourrait, le cas échéant, inciter le
juge à y déceler une connaissance par le tiers de l’exclusivité d’autrui1303. Le tiers, en
ce domaine, doit respecter la clause d’exclusivité, et s’y conformer s’il vient à en
connaître l’existence et ce, dans les limites de l’opposabilité simple résultant du
principe de l’effet relatif du contrat1304. Le distributeur automobile qui sollicite la
conclusion d’un contrat de concession auprès d’une marque renommée ne peut-il être
présumé connaître l’exclusivité territoriale du concessionnaire situé dans le même
département que lui1305 ? Le médecin qui réalise un acte relevant de la spécialité de
l’un de ses confrères exerçant dans la même clinique peut-il raisonnablement ignorer
l’exclusivité dont celui-ci bénéficiaire ? Dans ces situations, et dans bien d’autres
encore1306, le tiers doit ou devrait connaître l’existence des droits d’autrui. M.
LELOUP justifie ce devoir de s’informer, en considérant qu’en tant qu'entrepreneur
indépendant, le distributeur n'est pas un consommateur : « le franchisé est un
entrepreneur, il ne peut se comporter comme un animal encagé à qui on apporte de la
1302
D’après l’arrêt, l’exécution d’une condamnation sanctionnant la violation d’un premier contrat
ne peut avoir aucune influence sur les obligations d’un tiers à ce contrat dans l’exécution d’un
deuxième contrat sans mettre des obligations nouvelles à la charge de ce tiers et contrevenir à l’effet
relatif des conventions. La Cour observe à juste titre que le bailleur « ne dispose dès lors d’aucun
moyen de contraindre la société (tiers) de cesser son activité si celle-ci refuse ; que dans ce cas, la
clause d’exclusivité consentie (au locataire) se résoudra en dommages-intérêts ».
1303
Cass. com., 7 juill. 2004, Loi DOUBIN : le distributeur doit-il se renseigner ?, n° 02-15.950 (n°
1164 FS-P+B), D., 2004, p. 2229.
1304
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 195.
1305
Rapp. Paris, 22 juin 1960, JCP, 1960, II, 11857, note A. CHAVANNE : « Les contrats
d’exclusivité sont en principe bien connus de tous les professionnels d’une branche déterminée ». Au
sujet d’un contrat de franchise : CA Paris, 5e Ch. B., 22 nov. 2007, SAS Prodim c/ Soc. Francap, Juris-
Data n° 2007-356526 (Selon l’arrêt, en sa qualité de grossiste approvisionnant très habituellement les
commerces de proximité, le fournisseur ne pouvait ignorer que les contrats de franchise comportent au
moins l’obligation de ne pas adhérer à une autre organisation, quelle que soit son importance, pendant
la durée du contrat).
1306
L’agent immobilier qui obtiendrait un droit de représentation au sujet d’un bien pour lequel il
est d’usage de solliciter un droit exclusif, l’employeur qui embaucherait un salarié bien connu dans le
secteur professionnel, le locataire qui ne pouvait ignorer l’exclusivité consentie à un concurrent situé
dans la galerie commerciale : cité par D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, préf. Ch. PRIETO, éd.
Bruylant, 2008.
-355-
679. Sur ces raisonnements, une question posée par les professeurs FERRIER et
SAUTONIE- LAGUIONIE, attire notre analyse : La connaissance du réseau suffit-
elle à établir l'élément moral de la faute du distributeur parallèle1308 ? En d’autres
termes, la simple connaissance de la clause d’exclusivité constitue l’élément moral
nécessaire pour engager la responsabilité des tiers ?
680. MM. les professeurs FABIA et SAFA ne sont pas de cet avis et considèrent
que « l’inscription au registre du commerce est une formalité essentielle et qu’aucune
autre formalité ou circonstance, ni une circulaire, ni la connaissance démontrée chez
les tiers, ne saurait permettre d’invoquer l’exclusivité à son encontre »1309. De même,
M. Eid, a considéré que si le représentant exclusif a omis l’inscription au registre du
commerce, la clause d’exclusivité à l’égard des tiers ne sera pas opposable même s’ils
ont eu connaissance par un autre moyen1310. Tandis que la jurisprudence libanaise a
considéré qu’il suffit de prouver la simple connaissance par le tiers importateur de
l’exclusivité pour engager sa responsabilité : « il suffira que le bénéficiaire apporte la
preuve de la connaissance par le tiers de l’existence de l’exclusivité pour que la
responsabilité de ce dernier soit engagée »1311.
1307
J.-M. LELOUP, La franchise, Delmas 2000, n° 953.
1308
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 10.
1309
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 10.
1310
E. EID, Les actes de commerces, les commerçants et le fonds de commerce, éd. Bakhos, 1992,
p. 313.
1311
Cass. Lib. 7e Ch., arrêt n° 41, 8/2/2001 ; Juge de référé Beyrouth, décision n° 151, 2007, Rev. al
Adl, 2007 ; TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 152, 5/4/2001, Rev. al Adl, 2001.
1312
La pratique désigne le marché de la distribution parallèle par l’expression de marché gris : M.
TOUCHAIS-BEHAR, La protection du réseau de distribution, Aspects Contemporains du droit de la
distribution, Montchrestien, 1996, p. 53.
-356-
683. Cette preuve peut être apportée par tout moyen, à condition qu’elle rende
certain le fait à prouver. Il peut s’agir d’une notification adressée au concurrent en
1313
Cass. com., 25 avr. 2001, Bull. civ., IV, n° 77.
1314
Cass. com., 9 oct. 2001, Contrats, conc. consom., 2002, comm. 8, obs. M. MALAURIE-
VIGNAL.
1315
V. ainsi, en cas de fraude paulienne, où l'intention frauduleuse du tiers contractant, qui suppose
sa conscience du préjudice causé au créancier, sera parfois déduite de sa qualité. V. par ex., pour la
qualité de conjoint du débiteur : Cass. com., 1er mars 1994, Bull. civ., IV, n° 81 ; D. 1994. Somm. 215,
note E. FORTIS ; Defrénois, 1994. 1118, obs. D. MAZEAU, où la Cour a retenu que l'épouse du
débiteur ne pouvait pas ignorer la fraude de son mari et avait « nécessairement conscience de
l'opération et des fins poursuivies ».
1316
Cass. com., 10 mai 2000, cah. dr. entr., 2001, n° 2, p. 28, obs. J.-L. RESPAUD ; CA Limoges,
28 oct. 1997, BICC 1er avr. 1998, p. 24.
1317
CA Paris, 16 avr. 1991, D. 1992, Somm. p. 391, obs. D. FERRIER.
1318
CA Paris, 23 mars 1993, D. 1995, Somm. p. 75, obs. D. FERRIER.
1319
Cass. com., 21 févr. 1978, Bull. civ., IV, n° 73.
1320
Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ., III, n° 199.
1321
En ce sens, CA Paris, 18 avr. 2008, n° 07/04360, SARL PMC Distribution c/ SAS Pacific
Création ; TGI Paris, 9 juill. 2008, n° RG 03/04457, SA Christian Dior Couture c/ Sté Bazar Chic.
-357-
personne. Ou bien d’une publicité suffisante faite par les voies d’information
publiques avec la preuve que celle-ci est parvenue au concurrent qui a violé
l’exclusivité en personne. Cependant, la simple apparence ne suffit pas1322.
L’exclusivité de fait non plus. Le représentant doit prouver avec certitude que son
concurrent avait eu la connaissance de l’exclusivité, que celle-ci était insérée à un
contrat de représentation commerciale, et que, enfin, cette exclusivité répondait aux
conditions du décret-loi N. 34/67. Mais, si la preuve de la connaissance par le tiers de
l’existence de la représentation exclusive peut être faite par tout moyen 1323, elle est,
toutefois, difficile à apporter. Il faut la preuve que la publicité telle que décrite plus
haut est parvenue au concurrent en personne. Donc, il faut la preuve d’une
connaissance effective.
1322
La simple possibilité de connaissance ne suffit pas, sauf certains cas de concessionnaires
collègues qui connaissent le marché et la publicité y relative : T. com., Caen, 14 janv., 1959, cité par C.
CHAMPEAUD, La concession commerciale, RTD com., 1963, n° 63, note 3.
1323
Cass. com., 12 mars 1963, D., 1963, J. 367, note J. ROBERT.
1324
Partant de là, aussi bien la jurisprudence a décidé que les tiers, en ce domaine, doivent respecter
la clause d’exclusivité, et s’y conformer s’ils viennent à en connaître l’existence et ce, dans les limites
de l’opposabilité simple résultant du principe de l’effet relatif du contrat : E. ABOU EID, Droit
commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 2, 2005, La représentation commerciale,
le décret-loi n° 34/67, art. 2, p. 24 et s.
1325
Le contenu de l'art. L. 442-6, I, 6° C. com., qui sanctionne la tierce complicité en cas de
distribution parallèle, pourrait a priori faire douter de la condition de la responsabilité du distributeur
parallèle vu sa connaissance du réseau auquel la revente parallèle peut porter atteinte. Le texte vise le
fait « de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau
faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles
applicables du droit de la concurrence ». La connaissance du réseau ou la conscience de l'atteinte au
réseau ne figurent pas dans les conditions requises par ce texte : N. FERRIER, L. SAUTONIE-
LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 10
et s.
-358-
685. Mais, il faut alors, pour que la simple connaissance suffise, que le
revendeur se soit adressé au concédant de l’exclusivité ou à un distributeur auquel le
concédant a expressément interdit de vendre dans la région de l’exclusivité1327. Mais,
si le revendeur s’est adressé en dehors de la zone déterminée, même en connaissant
l’existence de l’exclusivité, le principe de l’effet relatif du contrat s’opposerait à
retenir sa responsabilité1328. Dans ce cas, une intention de fraude1329 serait
indispensable pour retenir la responsabilité pour violation de l’exclusivité1330. A ce
titre, une formule utilisée par la jurisprudence depuis 1983 considérant que : le fait de
commercialiser dans un territoire exclusif des produits en dépit des droit d’exclusivité
dont bénéficie, à la connaissance même du revendeur, le concessionnaire, ne constitue
pas, en lui-même1331, une faute1332.
1326
Parfois, l'intérêt des tiers est même jugé prépondérant, ce qui conduira à limiter l'opposabilité du
contrat : Ibid.
1327
M. PLAISANT parle de la connaissance notoire de l’exclusivité : Les contrats de l’exclusivité,
RTD com., 1964, n° 11 ; J. GUYENOT, op. cit., n° 25 et s. ; CA Douai 26 janv. 1961, RTD com.,
1961, p. 906, n° 11 ; CA Paris, 22 juin 1960, RTD com., 1960, p. 873, n° 10 ; Cass. com., 12 mars
1963, D., 1963, n° 367, note J. ROBERT ; CA Beyrouth, n° 1197, 14 mai 1965, Rec. Hatem, vol. 60,
p. 31, n° 2 ; CA Beyrouth, n° 1299, 30 juin 1959, RJL, 1959, p. 263 ; Juge unique Beyrouth, n° 732, 21
avr. 1961, RJL, 1961, p. 689, Rec. Hatem, vol. 46, p. 28, n° 1.
1328
Cass. civ., n° 67 du 3 mai 1947, RJL, 1967, p. 560 : Dans cette espèce, il est strictement fait
application du principe de l’effet relatif du contrat qui impose aux tiers uniquement le respect du
contrat. En effet, il reconnaît la validité des activités d’un importateur parallèle tant que celui-ci ne
s’est pas adressé directement au cocontractant du représentant exclusif ou à un distributeur à qui le
fabricant a interdit de vendre dans la zone de l’exclusivité. Voir aussi : CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill.
1965, RJL, 1965, p. 818 ; Cass. civ. n° 115 du 23 oct. 1969, RJL, 1970, p. 418 ; TI Beyrouth n° 2561
du 14 déc. 1961, Rec. Hatem, vol. 50, p. 24, n° 3 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, Rec. Hatem,
vol. 52, p. 22, n° 2 ; TI Beyrouth, n° 742 du 16 mai 1956 ; TI Beyrouth, n° 1311 du 15 mai 1964, Rec.
Hatem, vol. 59, p. 21, n° 2.
1329
L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La fraude paulienne, préf. G. WICKER, LGDJ, 2008, vol. 500,
n° 215 et s.
1330
Il en serait ainsi lorsque l’importateur achète du concédant avec engagement de ne pas vendre
dans la région concédée en exclusivité, puis viole cet engagement en vendant à un prix notoirement
inférieur au prix du représentant exclusif de manière à lui causer un lourd préjudice : TI Beyrouth n°
742 du 16 mai 1956 ; Il en serait de même aussi si l’importateur parallèle a fait usage de manœuvres
frauduleuses en collusion avec son vendeur en vue de nuire au représentant exclusif : Cass. civ., n° 115
du 23 oct. 1969, RJL, 1970, p. 418.
1331
C’est-à-dire en l’absence des actes de concurrence déloyale, Cass. com., 19 oct. 1999, Bull. civ.,
1999, IV, n° 168 ; Cass. com., 26 janv. 1999, JCP, E, 1999, CDE, n° 2, p. 25, obs. D. FERRIER ; Cass.
com., 13 janv. 1998 et 10 fév. 1998, D., 1998, p. 331, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 9 juil. 1996, D.
-359-
687. Nous venons de traiter d’une simple application d’un principe reconnu par
la loi, celui de l’opposabilité à l’égard des tiers de l’exclusivité insérée dans le contrat
de représentation commerciale, et ce, malgré le principe de l’effet relatif du contrat, et
celui de la liberté du commerce et de l’industrie. Mais, d’après l’alinéa 3 de l’article 2
1997, somm. p. 56, obs. D. FERRIER : « un opérateur qui n’est ni revendeur agrée du réseau du
constructeur, ni intermédiaire mandaté peut se livrer à une activité d’importation parallèle et de
revente indépendante de véhicules neufs de cette marque ».
1332
Cass. com., 16 fév. et 12 juil. 1983, D. 1984, 5489, note D. FERRIER.
1333
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 4.
1334
Solution identique au droit libanais suivant le célèbre arrêt de la Cour de cassation libanaise,
1ere Ch. civ., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168 :
« n’importe qui, achetant des produits de l’extérieur pour les vendre dans le territoire désigné pour la
commercialisation de ces produits par le distributeur exclusif, sera responsable contre le représentant
commercial de la violation de l’exclusivité. Peu importe l’originalité des produits importés, que ce soit
de la société représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat de
représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant ».
1335
CA Paris, 7 nov. 2001, Lettre distrib, 2001-12: Présentation de factures émises par une société
de façade ; Cass. com., 27 oct. 1992, D. 1992. 505, note A. BENABENT, Adde com. 4 déc. 2001: « il
appartient à l'opérateur ayant acquis des véhicules neufs pour les revendre de faire la preuve qu'il les
a régulièrement acquis sur un réseau parallèle ou auprès d'un autre concessionnaire ».
1336
D. FERRIER, La liberté du commerce et de l'industrie, in R. CABRILLAC, M.-A. FRISON-
ROCHE et Th. REVET (dir.), Libertés et droits fondamentaux, 13e éd., D., 2007, p. 711 et s. ; Ph. LE
TOURNEAU, Concessions. Distribution et réseaux de distribution. Inventaire des diverses
concessions. Fondement et protection des réseaux de distribution, J.-Cl. Contrats-Distribution, fasc.
1010, 2010, n° 148 et 151 ; P. JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers
revendeurs hors réseau, D. 1990. Chron. 43 s., spéc. n° 8 ; G. VIRASSAMY, La connaissance et
l'opposabilité, in Les effets du contrat à l'égard des tiers, LGDJ, 1992, p. 132 s., spéc. n° 38.
1337
J. GHESTIN, Ch. JAMIN et M. BILLIAU, op. cit., n° 736 in fine ; P. JOURDAIN, art. préc.
spéc., n° 8.
-360-
SECTION 2
DE LA PUBLICITÉ
1338
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 46.
1339
Art. 1165 C. civ : « Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne
nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 » ; Art. 225
C.O.C. : « En principe, le contrat ne produit ses effets à l’égard d’une tierce personne. C’est-à-dire
qu’il n’acquit à cette dernière des droits ou le rend débiteur. Le contrat a un effet relatif qui est limité
entre les contractants ou ceux qui ont reçus les droit de ces derniers d’une manière générale ».
1340
Idem.
1341
Ce problème a été abordé par M. FABIA qui a recherché le fondement du droit reconnu au
bénéficiaire de la convention d’exclusivité, vis-à-vis des tiers. Il compare ce droit au droit légal,
comme le droit de propriété qui est opposable à tous. Mais, il note immédiatement que les droits réels
ont été consacrés par des dispositions légales, et qu’un droit réel ne pouvait exister sans l’intervention
du législateur. Cependant, il admet qu’une telle qualification puisse être donnée au droit en question si
le législateur intervenait pour en déclarer l’opposabilité absolue : Ch. FABIA, Les conventions
d’exclusivité, Commerce du Levant, vol. 22, 15 juin 1962, p. 11.
-362-
1342
Cass. civ., n° 63 du 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560 ; CA Beyrouth, n° 1295, 5 sept. 1963, RJL,
1963, p. 957 ; CA Beyrouth, n° 1295, 22 juill. 1965, p. 818.
1343
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 2, n° 3 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Les conventions d’exclusivité, Commerce du
Levant, vol. 22, 15 juin 1962, p. 3, n° 9.
1344
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, op. cit. p. 175,
adde v. introduction de notre étude.
1345
En remplissant les conditions de l’al.2 de l’art. 2 du décret-loi n° 34/67 : M. MAAMARI, Cours
de droit commercial -Les actes de commerce, commerçant et fonds de commerce- USEK, 2004 ; E.
ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation
commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 86 ; Ch. MALLAT, Comparative models of freedom
of trade: The hurdle of Lebanese sole agency, Centre d’études et de recherche de l’USJ, Liban, 2002.
1346
R. NASNAS, président d'Axa Moyen-Orient et président du conseil économique et social du
Liban, déclare ce qui suit : C’est justement « grâce aux banquiers, aux hommes d'affaires et aux
industriels restés à leurs postes que l'économie libanaise avait survécu aux quinze ans de guerre entre
1975-1990 » : L. LUTAUD, Le Figaro, 21 juill. 2006.
-363-
692. Il est intéressant de noter que l’article 2 du décret-loi N. 34/67 prévoit que
la clause d’exclusivité est opposable à l’égard des tiers uniquement si elle est inscrite
au registre du commerce. En revanche, un projet loi qui n’a jamais eu naissance a été
proposé pour la modification de cet article par la suppression de la publicité et par
effet l’opposabilité1347. Ce projet-loi a été refusé, cause de la contradiction de son
objet à l’intérêt public. En d’autres termes, il n’était pas dans le but de supprimer le
monopole, protéger les consommateurs, garantir la nature et la qualité, et organiser la
transportation et la concurrence1348. Cette observation faite attire notre attention sur le
poids de la publicité dans le décret-loi N. 34/67 sujet de cette section.
694. Cela ne veut nullement dire qu’au Liban, l’enregistrement est devenu une
condition fondamentale et indispensable de cet effet de l’exclusivité, mais qu’il fait
1347
Projet-loi de 30 janv. 2004 concernant la modification du décret-loi n° 34/67 :
« Article 1 : Seront annulés les deux alinéas 3 et 4 de l’article 2 du décret-loi n° 34/67 ( la
représentation commerciale ) et remplacées par le texte qui suit : la clause d’exclusivité n’est
opposable aux tiers.
Article 2 : Ce projet loi sera publié au journal officiel et sera mis en vigueur après 4 ans de sa
publication ».
1348
J.O du janv. 2004, p. 21.
1349
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 200.
-364-
naitre sa protection1350. Sur cet acquis une distinction trouve lieu afin de vérifier la
valeur de la publicité dans l’opposabilité de la clause d’exclusivité au regard du
décret-loi N. 34/67, comme une condition essentielle dans la teneur de l’exigence
(Parag. 1) ou une condition indispensable dans la sanction de l’exigence (Parag. 2).
A- Le contenu de l’inscription
Voyons les formes approuvées et suivies d’une manière générale devant les
tribunaux libanais ainsi que l’exception à certains produits.
1350
E. EID et Ch. Eid, Droit commercial, éd. Sader, Beyrouth, t. 1, 2007, p 223.
-365-
a- L’exposé
696. Aucune forme particulière pour l’inscription n’est imposée par le législateur
libanais. L’usage des termes sacramentels et autres n’est pas du tout requis. La forme
de l’inscription a été précisée suivant des normes et des modèles approuvés par le
Ministère. Cependant, certaines mentions relatives au contenu sont exigées à titre de
validité, bien que non-visées directement par la loi. C’est le décret-loi N. 3417 émis
le 20/7/20001351, qui s’est interrogé d’une manière indirecte au contenu de
l’inscription, en précisant dans l’alinéa 3 de son article 4, les conditions d’application
de l’article 40 du Code de budget général de l’année 1998, lié à la redevance annuelle
imposée sur les contrats de représentation commerciale: « Lors de chaque paiement
de redevance annuelle, le représentant commercial reçoit du ministère de l’économie
et du commerce, une attestation qui sera valide devant tous les types d’organismes
concernés, affichant :
1351
J.O. du 20 juill. 2000.
1352
En France de nouvelles obligations déclaratives ont survenu par le décret du 9 mai 2007 relatif
au registre du commerce et des sociétés complète l'article R. 134-5 du code de commerce (anc. Décr.
du 23 déc. 1958, art. 4-1) relatif aux obligations déclaratives de l'agent commercial lors de sa demande
d'immatriculation. Ces déclarations nouvelles portent, le cas échéant, sur la déclaration d'insaisissabilité
-366-
697. Il s’agit, notamment, des précisions qui doivent se retrouver pour former
valablement la clause d’exclusivité elle-même : les produits1353 et la zone d’exercice
de l’exclusivité qui doit être bien précisée1354. Il ne peut être pallié au silence de la
clause à cet égard. Celle-ci dans ce cas est nulle comme rendant incertaine l’étendue
de la liberté du commerce et de l’industrie des tiers qui ne peut leur être totalement
retirée, mais qui peut uniquement l’être partiellement. Obligatoirement aussi,
l’inscription doit clairement désigner le nom et la profession1355 du représentant
bénéficiaire de l’exclusivité1356.
698. Par contre, d’autres mentions ne sont pas exigées à peine de nullité. Mais, il
est de l’avantage du bénéficiaire de les prévoir. Prenons l’exemple de M.
MAHMASSANI, s’agissant de la marchandise ou de l’objet de la représentation : à
défaut de précision à cet égard, il faut dire que la notion même de représentation
impose la solution selon laquelle l’objet de celle-ci englobe la totalité des activités du
représenté1357. En d’autres termes, le représentant ne représente pas une marque, ou
un produit, ou des marchandises. Il représente la personne physique ou morale auteur
de cette marque ou producteur des marchandises, et en général, maître des activités
diverses qui forment son commerce. Mais, là où les choses se compliquent et tournent
au détriment du représentant, c’est lorsque celui-ci retrouve des commerçants qui
représentent le même co-contractant, et ce, antérieurement ou postérieurement à sa
représentation1358. Dans ce cas, le représenté peut toujours exciper du fait que le
de sa résidence principale, prévue par l'article L. 526-1 du code de commerce issu de la loi du 1 er août
2003 sur l'initiative économique, ainsi que l'identité de son conjoint, si celui-ci souhaite bénéficier du
statut du conjoint collaborateur (Décr. n° 2007-750 du 9 mai 2007, JO 10 mai).
1353
V. annexe II : Enregistrement du contrat de représentation commerciale, ou agence exclusive :
parmi les documents demandés « L’accord entre l’entreprise locale et l’entreprise étrangère ou une
copie conforme datée en mentionnant exclusivement les matières ou les produits inclus dans le champ
d’exclusivité…».
1354
Suivant le décret n° 3417/2000, idem, dans son article 4, alinéa 3 ; S. MEGNIN, Le contrat
d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 55 : « Un accord
entre les parties sur l’idée d’attribution d’un territoire à un agent commercial, doit apparaître
clairement et de manière non équivoque ».
1355
V. annexe III : Demande d'enregistrement d'un contrat de représentation commerciale.
1356
Suivant le décret n° 3417/2000, idem, dans son article 4, alinéa 3.
1357
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 177.
1358
Idem.
-367-
représentant mécontent n’avait pas obtenu la totalité de ses activités, mais une partie
seulement, ce qui est parfaitement possible ; dans ce cas, alors, il devient difficile
pour le représentant de prouver l’étendue de sa représentation, et, il faudra, pour cela
rechercher quelle était l’intention des parties1359, à travers les correspondances entre
eux, et tous indices de nature à permettre et faciliter une telle recherche1360.
1359
CA Versailles, 11 mai 2006, Lettre distrib., nov. 2006, p. 2 ; CA Lyon, 20 févr. 2003, RJDA
2003, n° 1055 ; Lettre distrib., oct. 2003, p. 2, Comp. ; Cass. com., 3 juill. 2001: RJDA 2002, n°
35 : « En l'absence d'écrit non équivoque, en raison de la règle de la liberté de la preuve entre
commerçants, il incombe, d'une part, à la partie qui s'en prétend bénéficiaire de rapporter la preuve de
la clause d'exclusivité et il appartient, d'autre part, à la juridiction saisie d'apprécier le caractère
suffisant des éléments qui lui sont soumis pour établir, à partir de la commune intention des parties,
l'existence d'une obligation d'approvisionnement pour le distributeur auprès du fournisseur ».
1360
Art. 366 C.O.C. : « Il appartient au juge dans l’explication des actes juridiques, de recourir sur
l’intention du personne engagée (si l’obligation est unilatéral) ou bien sur la volonté des parties (s’il y
avait contrat), et non de rester river sur le sens littéral du texte» ; CA Liban Nord, arrêt du 24 juill.
1974, Société khalil boulos et ses fils c/ Société de l’oxygène et l’acétylène au Liban, Rec. Hatem, vol.
159 ; A. RIEG, Le rôle de la volonté dans l’acte juridique, th., LGDJ, 1961, p. 358 : « L’acte juridique,
étant un substratum de volonté, il est logique d’interpréter un contrat en recherchant la volonté qui a
animé les contractants. L’acte juridique étant le produit d’une ou plusieurs volontés, c’est
nécessairement d’après l’intention profonde des auteurs qu’il faut en apprécier les conséquences ».
-368-
rattache1361. En effet, nous avons montré, ci-dessus, que l’exclusivité protégée était
celle accordée au commerçant intermédiaire jouissant de la qualité du représentant
commercial. Nous avons montré aussi que le texte en question était un texte
d’exception qui, à ce titre, devrait être appliqué limitativement et sur interprétation
restrictive1362. Par conséquent, il est normal de considérer que seule l’exclusivité dans
la représentation commerciale peut produire des effets à l’égard des tiers de manière
absolue, par voie d’inscription au registre du commerce. Il en résulte que l’existence
du rapport de représentation commerciale tel que définie par l’article premier du
décret-loi N. 34/67 est une condition préalable pour la reconnaissance de l’effet
résultant de l’inscription au registre du commerce1363. Il apparaît donc, que
l’inscription de la totalité du contrat de représentation commerciale devient nécessaire
pour que le tiers concerné par la publicité en question puisse être en mesure de
vérifier si la condition préalable d’existence du rapport de représentation commerciale
est effectivement réalisée1364.
701. Après avoir vu que la loi a prévu l’obligation de citer les marchandises
incluent dans le champ d’exclusivité, il s’agit de s’interroger sur la question des
qualités des marchandises. Est-ce que toutes les marchandises sont susceptibles d’être
commercialisés ou bien trouve-t-on quelques restrictions ?
1361
V. Annexe IV : Demande d’attestation en vertu de l’accomplissement d’inscription d’un contrat.
1362
V. le Titre 2 de la 1ère partie de cette étude.
1363
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 4.
1364
V. Annexe III : La demande d'enregistrement d'un contrat de représentation commerciale.
1365
Affaire renvoyée à l'Office du boycott d'Israël : V. Annexe II : Le mécanisme de déroulement
du fichier, son délai d'achèvement et les frais prévus.
-369-
703. Le droit français ne les a pas nommés tacitement comme son voisin
libanais, qui, dans les alinéas de l’article 2 du décret-loi N. 34/67 a mentionné ce
qui suit :
707. Ainsi, un décret N. 3339 daté du 6/4/1992, est venu désigner les produits
qui ne sont pas considérés comme accessoires ou complémentaires, et dont la clause
d’exclusivité ne produit pas effets, en précisant ce qui suit :
1366
M. MAHMASSANI, Proche Orient, Etudes juridiques, janv. 1975, déc. 1977, p. 167, 4e parag.
-372-
711. « C’est ainsi que les tiers ne peuvent sans engager leur responsabilité
entrer en contrat avec la firme représentée sans l’intermédiaire du représentant, car
si l’exclusion ne produit plus d’effet à l’égard des tiers, elle continue à produire des
effets entre les parties et demeure opposable aux tiers »1367.
714. Mais une fois l’importation par les sociétés coopératives commencée,
celles-ci se sont trouvées face à la représentation commerciale et son décret-loi N. 34/
67, notamment par l’exception marquée sur les produits de « consommation privée »
qui sont hors l’application de la clause d’exclusivité citée par le troisième alinéa du
deuxième article du décret-loi susmentionné. Précisément, elles ont été interrompues
parce que la détermination de la notion « consommation privée » n’a pas vu le jour
car le comité désigné par décret pris en Conseil des Ministres selon la loi de 1975, n’a
pas été formé et le décret n’a pas été émis par le Conseil des Ministres.
1367
Idem, 5e parag.
1368
Entretien passé par M. N. AL ASSAAD avec le Président du Parlement Libanais, publié dans
le journal « Al-Safir », 18 fév. 2002.
-373-
715. Sur cette base, un texte d'un projet-loi a été lancé en proposant la
suppression du terme « consommation privée ». Dans ce but, une session
parlementaire s’est rassemblée le 26 mai 1988, au cours de laquelle un débat
parlementaire s’est déroulé ; il en est venu à dire que « le problème est plus grave que
nous le pensions, nous avons donc reporté à plus tard l’examen du projet-loi et nous
avons demandé au gouvernement de former ledit comité et de publier le décret ».
1369
Cité par le journal officiel du parlement libanais daté de 13 janv. 2002.
-374-
a- Le moment de l’inscription
720. Par ailleurs, l’article 31 du Code de commerce libanais prévoit que, « dans
tous les cas où il n’est pas fixé de délai particulier par les articles qui le précèdent,
l’inscription devrait se faire dans le délai d’un moins à partir de la date du titre ou de
l’acte devant être publié ». Il n’est pas question d’appliquer ce texte au cas de la
représentation exclusive pour dire que l’inscription doit avoir lieu dans le mois
suivant la conclusion de l’accord d’exclusivité. En effet, l’article 31 en question ne
concerne que le cas où l’inscription est obligatoire et ne dépend pas de la volonté de
l’obligé, donc, uniquement le premier cas visé par l’article 22. C’est une obligation
qui, si elle n’est pas remplie, donne lieu à des sanctions. Or, dans notre cas, il en est
différemment, étant donné que l’inscription est simplement un devoir accordé au
1370
L’art. 22 C. com.: « Le registre du commerce permet au public de recueillir des renseignements
complets sur toutes les maisons de commerce et les fonds de commerce fonctionnant dans le pays.
Il est aussi, quand la loi le déclare expressément, un instrument de publicité destiné à rendre
opposables aux tiers les mentions qui y sont contenues ».
1371
E. ABOU EID, Droit de commerce entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, t. 1, 2004,
art. 22, p. 113 et s.
1372
En raison même de son influence, elle fait l’objet de multiples règlementations contraignantes
avec des régimes spéciaux tenant à la nature du produit ou service : alcool, tabac, crédit…. Ou aux
conditions de diffusion : P. et F. GREFFE, La publicité et la loi, préf. M. LEVY, Litec, 11e éd., 2009 ;
Cass. crim., 14 oct. 1998, JCP, G, 1999, II, 10066, note Ph. CONTE.
-375-
721. Son inobservation ne pourra se traduire que par une éventuelle privation du
droit de se prévaloir de l’exclusivité : Situation à mettre en parallèle avec le fait que le
bénéfice du statut d’agent commercial n’est plus assujetti à la formalité
d’immatriculation au registre spécial des agents commerciaux1376, mais se trouve
toujours requise à titre informatif et comme mesure de police1377. Par conséquent,
cette durée imposée d’office à l’art. 31 C. com., ne concerne pas notre cas. Il en
résulte que le représentant commercial peut, à tout moment, effectuer cette inscription
en payant une redevance annuelle de somme de cinq cents milles livres libanaises,
quitte à ce que celle-ci produise des effets seulement à partir de ce moment1378.
1373
Antérieurement en France, pour pouvoir bénéficier du statut d’agent commercial, l’agent devait
être immatriculé à un registre spécial : Art. 4, al. 2 Décret 1985. L’immatriculation au dit registre était
une obligation, sous peine d’amende (contravention de 5 e classe) : F. FOURNIER, L’agence
commerciale, préf. D. FERRIER, 2e éd., Litec, 2005, n° 476.
1374
« Cette loi n’a pas subordonné l’application du statut d’agent commercial à l’accomplissement
d’une quelconque formalité administrative » : Cass. com., 7 juill. 2004, Bull. civ., IV, n° 146.
1375
Il en résulte un élargissement de l’application territoriale du dispositif, que la jurisprudence
avait déjà anticipé en supprimant l’exigence de l’inscription pour les agents commerciaux domiciliés à
l’étranger : Cass. com., 19 nov. 1997, D., Affaires, 1997, p. 77 ; Depuis un décret n° 2010-1310 du 2
nov. 2010, les agents commerciaux domiciliés à l’étranger, sans établissement en France et qui
n’exercent que temporairement et occasionnellement leur activité en France, sont dispensés de
l’immatriculation ; F. FOURNIER, L’agence commerciale, op.cit., p. 94 ; S. MEGNIN, Le contrat
d’agence commerciale en droit français et allemand, préf. E. JAYME, Litec, 2003, p. 18.
1376
CA Caen, Ch. 01 Sect. civ., et com., 09/03367, 03 mars 2011 ; CA Bordeaux, Ch. civ., 02,
09/04270, 11 janv. 2011 ; Cass. com., 7 juill. 2004, Lettre distrib., sept. 2004 ; CA Paris, 14 mai 1999,
RJDA, 11/99, n° 1198.
1377
Cass. com., 7 juill. 2004, Défaut d'immatriculation des agents commerciaux, n° 02-17.107 (n°
1125 F-P+B), D., 2004, p. 2228 ; Le décret 1958 sanctionne d’une amende de la 5e classe les
déclarations inexactes (art. 11), l’omission ou le retard d’immatriculation, de modification ou de
radiation (art. 12), et d’une amende de la 3e classe l’omission sur les documents professionnels des
lieux et numéro d’immatriculation (art. 13).
1378
Juge de référé Beyrouth, décision n° 443, 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216 ; TI
Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
-376-
avoir pour effet de rendre l’exclusivité caduque, ou signifier une renonciation à celle-
ci, de sorte que l’inscription ne devient plus efficace1379? Il faut catégoriquement
répondre par la négative, car le non-usage d’un droit ne le fait pas perdre à son auteur
qui demeure libre d’en déterminer les moments d’exercice et d’abstention de manière
discrétionnaire1380 : Solution suivi par le juge du référé du Beyrouth, qui a considéré
que « le défaut d’enregistrement n’aboutit pas à perdre l’exclusivité, en signalant que
c’est l’ancienneté de l’usage qui tient compte de la propriété de la marque
enregistrée ou de l’exclusivité »1381.
723. Ainsi, la Cour de justice des communautés européennes va plus loin dans ce
sens où elle a considéré que « l’absence d’inscription ne doit pas porter atteinte à la
protection de l’agent commercial dans sa relation au mandat »1382. Dans le même
sens, vient la solution suivie pour les commerçants, où le défaut d’immatriculation ne
fait pas tomber la qualité du commerçant1383. Ainsi, il a été jugé que « le défaut
d’immatriculation au registre spécial des agents commerciaux prévu par l’article 4
du décret 1958 interdit seulement au mandataire de bénéficier des avantages
particuliers prévus par ce décret »1384. Mais cette décision est sans valeur
1379
En outre, l'immatriculation des agents commerciaux sur un registre spécial tenu au greffe du
tribunal de commerce (prévue par art. R. 134-6 C. com.), n'est plus une condition d'application du
statut ; elle ne conserve qu'une valeur administrative de « police professionnelle » : Cass. com., 7 juill.
2004, n° 02-17.107, Bull. civ., IV, n° 146 ; RJDA 2004, n° 134 ; D. 2004. 2228. Elle peut s'effectuer
par voie électronique (art. R. 134-13 C. com.,). Cependant, la Cour de cassation a jugé que l'article L.
134-16 du code de commerce, réputant non écrite toute clause contraire à certaines dispositions du
statut des agents commerciaux, n'interdit pas aux parties de subordonner la prise d'effet du contrat à
l'immatriculation de l'agent au registre spécial : Cass. com., 8 juill. 2003, Bull. civ., IV, n° 116. Quoi
qu'il en soit, ce contrat restait et reste consensuel, et peut se prouver par tout moyen : Cass. com., 19
janv. 1993, Bull. civ., IV, n° 11 ; Cass. com., 25 juin 2002, Bull. civ., IV, n° 110.
1380
Ph. LE TOURNEAU, Mandat, Rép. civ. Dalloz, 2012, n° 76.
1381
Juge de référé de Beyrouth, décision n° 151, 2007, Rev. al Adl, 2007.
1382
CJCE, 6 mars 2003, Rec. CJCE I, 2371.
1383
Cette solution objective, et quelque peu rassurante, est aujourd'hui remise en cause de manière
indirecte ; M. MAAMARI, Cours de droit commercial -Les actes de commerce, commerçant et fonds
de commerce- USEK, 2004 ; Th. DUBAELE, Commerçant, D., 2011 : La qualification de commerçant
suppose l'accomplissement d'actes de commerce, qui doivent alors s'effectuer suivant des conditions
matérielles déterminées.
1384
Cass. com., 13 nov.1990, D., 1990, IR, p. 279.
-377-
actuellement étant donné que la formalité d’immatriculation est sans conséquence sur
le bénéfice du statut d’agent commercial1385.
724. En d’autres termes, d’une part, c’est la pratique des actes commerciaux qui
donne la qualité au commerçant et d’autre part, c’est l’antériorité de l’utilisation de
l’exclusivité qui prouve et vérifie son acquisition1386. Mais il s’agit de signaler que le
non versement de la redevance annuelle 500.000 L.L dans un délai de deux mois à
compter de la date d'échéance de celle-ci, apporte l'annulation de l'enregistrement
conformément à l'article 4, alinéa 2 du décret 3417 du 20/7/20001387.
b- Le lieu de l’inscription
1385
Cass. com., 7 juill. 2004, Lettre distrib., sept. 2004.
1386
Cass. Lib. Ch. 7, arrêt n° 41, 8/2/2001 ; TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 152, 5/4/2001, Rev. al
Adl, 2001 : « Ce qui est important est qu’il revient à chaque demandeur de prouver l’ancienneté de la
marque dans la durée antérieure au dépôt…c’est l’antériorité de l’usage qu’il faut prendre en
considération au cas où le dépôt d’une certaine marque n’est pas fait… » ; Cass. civ. lib, 5e Ch., arrêt
n° 20, 8/2/2000, éd. Sader, p. 333.
1387
Art. 4, al. 2 du décret 3417 du 20/07/2000 : « Une somme de 500.000 L.L doit être versée
comme taxes dans un délai de deux mois à compter de la date d'échéance de la redevance annuelle,
sous peine d'annulation de l'enregistrement ».
1388
Arrêt n° 2385, du 17/1/1924, art. 53, modifié par la loi du 31/1/1946, J.O.
-378-
726. Mais, aucune autre précision n’est faite, quant au registre auquel il faudrait
se référer. En effet, il existe un registre auprès de chaque tribunal de commerce au
Liban, c’est-à-dire huit registres, un par « mohafazah »1391. Cependant, d’après les
articles 22 et suivants du Code de commerce, relatifs au registre du commerce,
l’inscription doit se faire au registre du tribunal dans le ressort duquel le représentant
a son centre d’activités, ou son principal établissement1392 ; en effet, il est normal que
le représentant dont l’exclusivité englobe le territoire du lieu où il a son centre,
effectue l’inscription, d’abord, dans ce lieu1393.
1389
En France, le registre spécial des agents commerciaux a été institué par le décret n° 58-1345 du
23 déc. 1958 (D. 1959.132), précisé pour l'Alsace-Moselle par le décret n° 64-29 du 10 janv. 1964 (D.
1964.74), remanié par un décret n° 68-765 du 22 août 1968 (D. 1968.268) et complété par un arrêté du
même jour (J.O 17 sept.).
1390
Cass. com., 19 nov. 1996, JCP, éd. E., 1997, Pan. 30.
1391
La Mohafazah est une division administrative (Administration territoriale) dont l’équivalent en
France serait la région. Elle est généralement divisée en plusieurs Caza (Qada’a) dont son équivalent en
France serait le département. Chacune des Mohafazah est dirigée par un Mohafez nommé par décret
pris en conseil des ministres, titre qui correspond au grade de préfet en France : Le registre des
transporteurs et des loueurs est tenu par le préfet de région (Décr. 1999, art. 1er). Le nombre de
Mohafazah est passé de cinqt à huit par la loi 522 du 16 juill. 2003.
1392
Idée identique au droit français, Art. R. 134-6 C. com.: Les agents commerciaux se font
immatriculer, avant de commencer l'exercice de leurs activités, sur un registre spécial tenu au greffe du
tribunal de commerce dans le ressort duquel ils sont domiciliés. Ils produisent à cet effet une
déclaration dont un récépissé leur est délivré ; Art. R123-32 : « Dans le mois qui précède la date
déclarée du début de l'activité commerciale et, au plus tard, dans le délai de quinze jours à compter de
la date du début de cette activité, toute personne physique ayant la qualité de commerçant demande
son immatriculation au greffe du tribunal dans le ressort duquel est situé :
1° Soit son principal établissement ;
2° Soit, dans les cas prévus aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 123-10, son local
d'habitation ;
3° Soit, à défaut d'établissement ou de local d'habitation déclaré dans les cas prévus à l'article L.
123-10, sa commune de rattachement au sens des articles 23 et s. ».
1393
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 13 ; E. TYAN, Droit commercial, éd. Libr. Antoine, Beyrouth, t. 2, 1970, n° 1306
; Décr. Fr. 1999, art. 1 et 5 : Les entreprises doivent s'inscrire dans la région où est situé leur siège ;
concernant les entreprises étrangères établies en France, le lieu d'inscription est celui de leur
établissement principal : C. SCHIMITTER, Transports routiers de marchandises, D., mai 2007, sept.
2011, n° 67.
-379-
728. D’une part, le registre est tenu par ordre des établissements, chacun ayant
son numéro. Une recherche peut éventuellement avoir lieu à partir du nom du
commerçant. Or, comment un commerçant peut-il savoir, pour une marque donnée, si
elle a ou n’a pas un représentant exclusif ? Doit-il pour cela consulter tous les dossiers
se chiffrant en milliers, depuis que le registre en question existe surtout avec le
manque du système informatique qui facilite et simplifie la liaison entre les divers
registres de chaque Caza.
729. D’autre part, si l’inscription dans un registre produit ses effets sur tout le
territoire libanais, il faudrait, pour le commerçant à supposer la première difficulté
surmontée, parcourir tout le territoire libanais, et consulter tous les registres qui y
existent. En effet, il n’existe aucune coordination, ni communication entre les divers
registres des différents Cazas. Il n’y a pas d’échange de renseignements ou
d’informations susceptibles de permettre à un commerçant de Caza de Beyrouth par
exemple, de connaître ceux qui en auraient besoin et les renseignements qui
l’intéresseraient, chez lui, mais qui seraient inscrits aux divers registres des autres
Cazas.
1394
CA Beyrouth, Ch. 3, arrêt n° 9/2008, Rev. al Adl, 2008.
1395
TI Beyrouth, 3e Ch., décision n° 266 du 29/10/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 3 : « Attendu que la
doctrine et la jurisprudence libanaise se mettent d’accord sur l’antériorité de l’utilisation comme
principe déclaré en droit libanais, pour l’acquisition du droit de propriété de la marque commerciale.
Le rôle de l’inscription se limite à la déclaration du droit non pas sa mise en place » ; TI Mont Liban
12/7/2004 : « …à condition que l’utilisation soit public et continue ».
-380-
731. Cette inscription secondaire est venue pour éviter le recours aux différents
registres du commerce des différents Cazas, puisqu’il n’y a qu’un seul registre pour
l’unique ministère: idée proche qu’en France, où existe un registre spécial tenu pour
les agents commerciaux, distinct du registre du commerce1396. Mais comme il n’existe
pas sur ce point de règlementation particulière de l’exclusivité en France, il n’est pas
fait usage de ce registre spécial pour la protection de l’effet de la clause d’exclusivité
à l’égard des tiers1397. L’inscription au ministère de l’économie et du commerce a
rendue aux effets qui en résultent de la matière leur juste dimension et valeur, et nous
favorisons une avancée technologique d’Internet et d’informatique afin de diminuer le
déplacement des gens et faciliter leur travail, sachant que la rapidité est l’élément
fondamental du commerce1398. Une réforme en ce sens est souhaitable, malgré que
cette inscription a simplifiée un peu le problème de renseignements puisque le
ministère est devenu un centre général de référence pour tout le Liban.
1396
Art. R. 134-6 C. com. : « Les agents commerciaux se font immatriculer, avant de commencer
l'exercice de leurs activités, sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce dans le
ressort duquel ils sont domiciliés. Ils produisent à cet effet une déclaration dont récépissé leur est
délivré ».
1397
CA Versailles, 15 sept. 2011, D., 09/00224.
1398
En France, les déclarations relatives à l'immatriculation des agents commerciaux, à la
modification de leur situation ou à la cessation de leur activité peuvent désormais être effectuées par
voie électronique, dès lors qu'elles peuvent être transmises et reçues par cette voie (Décr. du 23 déc.
1958, art. 10-1 nouv. réd. Décr. n° 2005-77 du 1er févr. 2005, art. 42, J.O, 2 févr.).
-381-
733. Mais vu que le législateur libanais a voulu apporter une protection absolue
au réseau de distribution du représentant commercial, il lui en a fait bénéficier même
en dehors de l’inscription de cette exclusivité, étant donné que l’inscription de cette
clause n’est pas pour prouver son existence mais pour la déclarer et la publier afin de
la rendre opposable aux tiers1400. Par cette publication résultant de l’inscription, le
représentant commercial garantit mieux son droit à l’exclusivité1401, et à défaut il
appartient au représentant d’apporter la preuve des éléments nécessaires pour la
rendre opposable et interdire aux tiers de participer à la violation des obligations
contractuelles des parties.
1399
Néanmoins les juges exigent en pratique la preuve de la connaissance par le revendeur de
l’interdiction, ce qui est conforme au principe d'opposabilité : Cass. com., 9 oct. 2001, Contrats, conc.
consom. 2002. comm. 8, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
1400
CA Beyrouth, Ch. 3, arrêt n° 9/2008, Rev. al Adl, 2008.
1401
Trois idées sous-tendent en permanence le RCS: sécurité, publicité et transparence : P. BEDER,
Registre du commerce et des sociétés, D., 2012, n° 2.
-382-
tiers par ce registre soit contestable ; vu que l’étude au Liban, de l’effet de la clause
d’exclusivité en dehors de l’inscription est intéressante à plus d’un égard. D’où
l’utilité d’exposer ce cas (A) pour en savoir sa portée sur le décret-loi N. 34/67 (B).
A- L’exposé
736. Le décret-loi N. 34/67 est une législation spéciale qui ressort du Code de
commerce général. Il est venu résoudre une question privée rattachée à la
représentation commerciale. Vu qu’en principe, les textes spéciaux sont interprétés
d’une manière stricte suivant l’adage : Exceptio est strictissimae interpretationis1402,
cette interprétation stricte de ce texte spécial aboutit à son application de manière
impérative1403.
737. Tout ce qui est omis par le législateur dans le texte spécial nécessite le
recours au texte général pour se renseigner, vu que l’interprétation stricte n’élimine
1402
Adage classique juridique latin qui signifie que l’exception est d’interprétation très stricte.
1403
E. ABOU EID, Code de procédure civile entre le texte et la jurisprudence et la doctrine,
Interprétation de l’article 4, t. 1, éd. 2002, p. 13 et 14 pour l’interprétation des textes spéciaux et
exceptionnels ; Dans le même sens F. HERMAN, Rép. Dr.fr., Verbis Lois et décrets, 1898, Légion
d’Honneur-Lyon, 2e tirage 1924, Paris, Sirey, t. 26, n° 359 : « L’un des procédés d’interprétation les
plus surs est, sans contredit, celui qui résulte du rapprochement du texte à interpréter et des autres
dispositions légales relatives à la même matière ou à des matières analogues », cité par E. ABOU EID,
Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La représentation commerciale, le
décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 5, p. 134.
-383-
739. Attendu que l’article 2 du décret-loi N. 34/67 n’a pas cité tacitement
l’obligation d’une deuxième publication de la clause d’exclusivité en cas de
renouvellement du contrat mais a imposé l’obligation d’inscription de la clause
d’exclusivité du contrat principal ; attendu que cet article appartient à une loi spéciale
qui demande son interprétation d’une manière rigoureusement stricte : il sera utile aux
tribunaux de la traiter dans le même sens, puisqu’il est défendu de distinguer là où le
1404
T. com., Beyrouth, décision n° 268, 29 avr. 1971, Rev. al Adl 1971, p. 714.
1405
J. CARBONNIER, Droit civil, Introduction, Les personnes, La famille, l’enfant, le couple, vol.
1, PUF, Quadrige, 2004, p. 196.
1406
Idem, p. 301.
1407
Contrairement à ce que l’on serait tenté de croire, c’est la loi spéciale qui a le plus de force :
elle est plus solide, étant mieux définie. Dans un premier sens, qui est quantitatif, la loi spéciale (lex
specialis) s’oppose à la loi générale en ce qu’elle régit seulement une fraction de l’objet de celle-ci, elle
traite de l’espèce et non de genre. Dans un second sens, qui est qualitatif, la loi spéciale s’oppose à la
loi générale, représentant le droit commun, comme l’exception au principe : Idem., p. 82 et 83, n° 22.
-384-
législateur ne le fait pas, conformément à l’adage : Ubi lex non distinguit, nec nos
distinguere debemus1408.
740. Cette notion résulte de la théorie suivant laquelle il est interdit dans les
textes de lois spéciaux d’élargir l’interprétation, cas du bail et de la location
gérance1409, notamment la gérance libre, qui ont un caractère exceptionnel1410. Là
encore cette question a été évoquée avec une divergence d’avis en cas de tacite
reconduction de la location-gérance : d’un côté, la répétition de publication est
obligatoire1411, c’est dire qu’il faut publier de nouveau le contrat de gérance libre -
renouvelé tacitement- vu qu’il forme un nouveau contrat1412. De l’autre côté, il n'y a
pas lieu de renouveler la publication du contrat1413, avis stable pour la
jurisprudence1414. Sur cette différence, les deux professeurs FABIA et SAFA, ont
1408
Adage classique juridique latin signifiant que là où la loi ne distingue pas, nous non plus ne
devons pas distinguer.
1409
Lorsque le locataire-gérant continue son exploitation, après l'échéance du terme, sans qu'un
nouveau contrat ait été conclu, il y a tacite reconduction au sens de l'article 1738 du code civil. Le
premier contrat prend fin à son échéance et il se forme tacitement un nouveau contrat au contenu
rigoureusement identique au précédent mais qui est à durée indéterminée. Ce texte ayant été écrit pour
le bail d'immeuble, mais la jurisprudence s'est clairement prononcée pour l'extension ; et ce, que celle-
ci ait été prévue par le bail (Cass. com., 11 juill. 1967, Bull. civ., III, n° 289) ou non (Cass. com., 7
juill. 1966, Bull. civ., III, n° 350 ; D. 1966. Jurispr. 555 ; JCP 1966, II, 14842, note J. NECTOUX ;
RTD com., 1966. 908, n° 7, obs. A. JAUFFRET).
1410
Trib. Baux Baabda, décision n° 349 du 14/11/1960 ; F. ABI RACHED, Annexe des Baux, t. 1,
p. 367.
1411
Par la tacite reconduction du contrat, un nouveau contrat nait par l’application de l’art. 8 de la
loi de 1956, qui ne distingue pas entre la première location et les autres successives : J. HAMEL, G.
LAGARDE et A. JAUFFRET, Traité de droit commercial, D., 1966, t. 2, p. 55 ; R. SAVATIER, Sem.
Jur., 1964 -2-13780. Ces avis doctrinaux se sont basés sur la protection des droits des tiers, notamment
les créanciers du locataire-gérant : E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence
et la doctrine, La représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, art. 2, p. 71.
1412
CA Paris, 22 oct. 1962, D., 1963, p. 49 ; T. com., Nice, décision du 25 oct. 1960, Sem. Jur., 2-
2316. En revanche, les choses se compliquent sur le terrain du bail commercial où une jurisprudence
constante de la troisième chambre civile considère que la tacite reconduction n'emporte pas formation
d'un nouveau contrat... : Cass. civ., 3e ch., 10 févr. 1975, Bull. civ., III, n° 70 ; 23 juin 1981, Gaz. Pal.
1982. I. 52 ; 18 mars 1998, Bull. civ., III, n° 63.
1413
A. REYGROBELLET, Partie 7, Fonds de commerce, Location-gérance du fonds de commerce,
D., 2010, Dossier 792 ; M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien, t. 1,
1970, p. 446, n° 237 A : « C’est à l’expiration de la durée généralement brève de 1 à 3 ans que la
location-gérance prend fin, mais le contrat peut se renouveler par tacite reconduction, sans qu’il soit
nécessaire d’effectuer une nouvelle publicité » ; Le renouvellement par tacite reconduction du contrat
de location-gérance n’impose pas une nouvelle publicité par voie de déclaration modificative : Adde,
Registre du commerce, D., 2e éd., n° 52.
1414
La Cour d’Aix, a tracé les lignes primaires de l’avis stable de la jurisprudence actuelle en
considérant que : seul le contrat conclu au début de la location-gérance, à l’exclusion des accords
-385-
741. A première lecture, nous constatons que ces deux professeurs ont mis en
rapport la modification apportée au contrat avec l’opposabilité de la clause
d’exclusivité ; de manière qu’il faille mentionner le renouvellement ou la prorogation
au registre du commerce afin de pouvoir tenir l’opposabilité de cette clause par
rapport aux tiers. Nous pensons que cette idée s’attache à la continuité de la publicité
et son principe d’opposabilité. Nous critiquons cette pensée sur deux points : Sous son
aspect général, puisque les professeurs FABIA et SAFA n’ont pas séparé la
« prorogation » du « renouvellement »1416, ils l’ont mise au même niveau dans le cas
de l’obligation d’une nouvelle inscription. Alors que la prorogation de contrat
correspond simplement à l'allongement conventionnel de la durée d'un contrat à durée
déterminée ; le renouvellement s'agit d'un nouveau contrat dont le contenu peut être
différent ou non du contrat initial1417. Par ailleurs, le législateur libanais n’a pas
mentionné dans le texte du décret-loi N. 34/67, le terme « prorogation », mais il s’est
ultérieurs des parties destinées à maintenir le locataire-gérant en place, était visé par l’art. 8 de la loi du
20 mars 1956, texte dérogatoire au droit commun et devant par suite recevoir une interprétation
restrictive : CA Aix, 9 déc. 1964, Gaz. Pal., 1964, 1- 329 ; Arrêt confirmé en cassation : « Attendu que
les articles 2 et 8 de la loi du 20 mars 1956 qui imposent l’obligation de publier le contrat de location-
gérance n’imposent pas, en cas de tacite reconduction du contrat, une nouvelle publicité ; aucune
modification n’étant dans ce cas intervenue dans la nature de l’exploitation ni dans la personne de
l’exploitant depuis la publication initiale » : Cass. com., 7 juill. 1966, D. 1966, p. 555 ; Dans le même
sens était l’avis de la Cour d’appel de Paris : Aucune modification n’étant intervenue dans
l’exploitation ou dans la personne du gérant, et alors que ce dernier continuait à être inscrit au registre
du commerce, les formalités de publicité n’avaient pas à être renouvelées : CA Paris, 29 mai 1964,
Sem., Jur., 1966-2-14842.
1415
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, art. 22, n° 8.
1416
V. supra n° 617 et 618.
1417
Cass. civ., 1e Ch., 15 nov. 2005, n° 02-21366, Prorogation, reconduction, ou renouvellement de
contrat : un peu d’ordre s'il vous plait ! : « La prorogation de contrat correspond simplement à
l'allongement conventionnel de la durée d'un contrat à durée déterminée. La prorogation doit donc
être prévue par avenant, lequel détermine la nouvelle échéance du contrat et, le cas échéant, de
nouvelles modalités juridiques. Tandis que le terme "renouvellement" vient du latin novus ou novellus
(nouveau). Il s'agit d'un nouveau contrat dont le contenu peut être différent ou non du contrat initial.
Le renouvellement peut être tacite ou exprès tant que son principe est prévu par un accord exprès des
parties, notamment dans le contrat initial ».
-386-
742. Nous abordons ces thèmes pour en dire que, les effets résultants de
« prorogation » ou « renouvellement » ne sont pas les mêmes, et n’aboutissent pas au
même résultat1418. En d’autres termes, l’avis doctrinal des professeurs FABIA et
SAFA s’il doit être pris en considération, le sera en cas de renouvellement du contrat
à durée déterminée par tacite reconduction. Le cas échéant un nouveau contrat est né,
et doit obéir aux dispositions qui règlent le contrat original, notamment l’inscription
au registre du commerce1419. Tout en rappelant, sur ce point, que le non-
renouvellement d’inscription au registre spécial des agents commerciaux ne saurait
suffire à lui retirer la qualité d'agent commercial1420.
1418
Cass. civ., 3e Ch., 5 juin 2002, n° 00-20.806, D., 2002, 2471, obs. Y. ROUQUET ; JCP 2003,
éd., E. n° 807, note M. KEITA ; CA Versailles, 5 déc. 2002, RJDA 2003, n° 417.
1419
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 1, 17/2/1972, Drambawi c /Chams, Rec. Baz, nº 20, p. 105.
1420
CA Paris, Ch. 05 A5, déc. 2007, D., n° 05/22422.
1421
L’art. 22 C. com. : « Le registre du commerce permet au public de recueillir des renseignements
complets sur toutes les maisons de commerce et les fonds de commerce fonctionnant dans le pays.
Il est aussi, quand la loi le déclare expressément, un instrument de publicité destiné à rendre
opposables aux tiers les mentions qui y sont contenues ».
1422
E. ABOU EID, Droit de commerce entre le texte, la jurisprudence et la doctrine, explication de
l’art. 22, t. 1, 2004, p. 113.
-387-
question, et n’a pas voulu l’obligation d’une deuxième publication, il sera interdit
d’imposer cette dernière sous peine de considérer le contrat inopposable aux tiers.
744. C’est dire, en dehors des cas exceptionnels cités par des textes juridiques,
que le défaut d’enregistrement ne donne pas le droit à autrui de s’inspirer du principe
de l’inopposabilité du contrat. C’est ainsi que MM. les professeurs FABIA et SAFA
justifient notre pensée en considérant que « sauf disposition particulière de la loi,
l’inscription au registre du commerce n’a pas la valeur d’une publicité légale, ni ne
saurait dispenser d’une des autres mesures de publicité légalement requises ; hors les
cas exceptionnels prévus par la loi, l’omission de l’enregistrement ne permet pas aux
tiers d’invoquer l’inopposabilité de l’acte »1423. Reprenons cette dernière phrase :
l’omission de l’enregistrement ne permet pas aux tiers d’invoquer l’inopposabilité de
l’acte, nous en déduisons la réciproque suivante : en cas de défaut d’inscription, la
clause d’exclusivité reste opposable.
745. Par conséquent, si une situation de fait est capable de produire des effets, il
est plus logique de lui reconnaître ces effets s’il est prouvé que si elle est simplement
présumée. D’ailleurs, une telle solution n’est pas incompatible avec un système de
publicité, étant donné que le système de publicité, qui nous intéresse tend à faciliter la
preuve d’éléments reconnus valides antérieurement à l’inscription1424. En réalité, la
publicité résultant de l’inscription produit un effet absolu qui exclue toute preuve
contraire, même évidente. A défaut d’inscription, cette preuve sera admise. En effet, il
faut noter sur ce point, que l’omission d’inscription de la clause d’exclusivité n’efface
pas le droit du représentant commercial ni à cette exclusivité, ni à la protection issue
1423
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 128, mars 1971, sous art. 2, n° 10.
1424
Le système de publicité du registre foncier, du moins en matière de renseignements dont la
publicité est laissée à la discrétion du commerçant. En effet, s’agissant du registre foncier, les actes ne
sont pas valables, même entre les parties, que s’ils ont été dûment enregistrés. Au surplus, même dans
ce cas, les actes devant être enregistrés au registre foncier produisent des effets en dehors de toute
inscription, au cas d’intention de nuire de la part des parties ou des tiers. Il en est ainsi conformément à
la jurisprudence libanaise abondante, à cet égard, concernant la nullité de la seconde vente d’un même
immeuble effectuée malgré la connaissance de l’existence de la première vente non-enregistrée avec
intention de nuire.
-388-
d’elle1425. Ce qui veut dire que la publicité n’est pas un élément indispensable pour
l’opposabilité de la clause d’exclusivité vu qu’elle produit effets en dehors de toute
inscription et sa violation par autrui engage sa responsabilité. Mais, la situation se
complique quand il sera demandé au représentant un fait prouvant que la protection
de ces droits est assurée. Voyons la portée de la qualité « indispensable » comme
condition de la publicité de la clause d’exclusivité.
B- La portée
1425
Dans le même sens, il a été jugé que le non renouvellement d’inscription au registre spécial des
agents commerciaux, ne saurait suffire à lui retirer la qualité d'agent commercial : CA Paris, Ch. 05 A
5, déc. 2007, D., n° 05/22422.
1426
Sujet traiter au cours de notre premier chapitre, mais on peut les citer de façon à éclairer notre
chemin de travail : En premier lieu, se trouver affectée l'obligation d'exclusivité qui interdit à chaque
distributeur sélectionné de revendre à des distributeurs non sélectionnés (art. L. 442-6-I, 6° C. com.).
En deuxième lieu, se trouver affectée l'obligation d'exclusivité qui interdit au promoteur du réseau de
fournir des tiers non sélectionnés et lui impose de tout mettre en œuvre pour assurer l'étanchéité de son
réseau : N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, op. cit.
1427
L. MAUGER-VILPEAU, Le revendeur non agréé, D., 2000, p. 341 : un concurrent qui profite
des avantages du réseau sans en supporter les contraintes.
1428
Cass. com., 12 juill. 1993, Bull. civ., IV, n° 295 ; Cass. com., 15 mars 1994, Bull. civ., I, n° 108.
-389-
1429
CA Paris, 3 sept. 2010, n° 08/12822, CCE 2010, n° 110, obs. A. DEBET ; Contrats, conc.
consom. 2010. comm. 247, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; JCP G 2010. 1111, note J. HUET, qui
retient, sur le fondement de l'article L. 442-6-I, 6° du code de commerce, la responsabilité civile de la
société Ebay, au motif que de nombreuses ventes de parfums de marque réalisées par l'intermédiaire du
site portaient une atteinte illicite aux réseaux de distribution sélective mis en place par les enseignes de
parfumeurs. En l'espèce, la violation des réseaux par la société Ebay, n'est pas directe, puisqu'elle n'est
pas venderesse des produits litigieux, mais seulement indirecte, en ce qu'elle favorise, par son site
d'enchère, la violation des réseaux par des annonceurs : cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE-
LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, op. cit., n° 110.
1430
CA Paris 22 oct. 1991, D., 1992, somm., p. 394, obs. D. FERRIER ; Cass. com., 13 mars 1979,
D., 1981, 1, note Y. SERRA.
1431
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 615 : le distributeur doit
être tenu de ne pas revendre à des distributeurs non sélectionnés (ventes hors réseau).
1432
Sur le fondement d’une faute délictuelle - art. 1382 C. civ : Tout fait quelconque de l'homme,
qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; Dans le même
sens, G. RIPERT et R. ROBLOT, Traité de droits des affaires, Du droit commercial au droit
économique, par L. VOGUEL, t. 1, vol. 1, Paris, 19e éd., LGDJ-Lextenso, 2010, n° 788.
1433
F. TERRE., Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis
Dalloz, 2009, n° 494 ; B. STARCK, H. ROLAND et L. BOYER, Droit civil, Les obligations, Contrat,
6e éd., Litec, 1998, n° 1487 s.
-390-
toute personne qui violerait l’exclusivité ainsi enregistrée1434. Ainsi, à plus forte
raison, la preuve certaine de cette mauvaise foi devait pouvoir produire le même effet,
où ne serait pas logique que, si cette situation est réellement prouvée vraie, elle ne
puisse pas être opposable.
1434
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, p. 37.
1435
Idem.
1436
Cass. civ., 5 déc. 2000, RJDA, 2001, n° 440 ; CA Paris, 29 oct. 1992, D., 1995, somm. p., 75,
obs. D. FERRIER.
1437
CA Paris, 22 sept. 1992, D. 1995, somm. p. 78, obs. D. FERRIER ; Rapp. Douai, 6 oct. 1992,
D. 1995, somm. p. 75, obs. D. FERRIER: Responsabilité contractuelle d’un franchiseur engagée pour
fourniture d’informations inexactes.
1438
V. art. 1147 et 1148 C. civ. Reste au débiteur à établir que l'inexécution est due au fait du tiers.
Si ce fait est constitutif d'une force majeure, le débiteur sera exonéré. Dans le cas contraire, il engagera
sa responsabilité vis-à-vis du fournisseur, mais pourra agir contre le tiers, obtenant ainsi une sorte «
d'exonération partielle indirecte » : J. FLOUR, J.-L. AUBERT et E. SAVAUX, Droit civil, Les
obligations, t. 3, Le rapport d'obligation, 7e éd., Paris, Sirey, D., 2011, n° 215.
-391-
752. En effet, la réunion de deux éléments est suggérée pour que la distribution
parallèle soit sanctionnée sur la base de la violation par le distributeur parallèle de son
devoir d'inviolabilité des contrats constitutifs du réseau : un élément intentionnel, à
savoir la connaissance du réseau par le tiers distributeur, un élément matériel, à savoir
la participation à la violation de ses obligations par l'un des membres du réseau1441.
753. Nous venons de traiter dans cette deuxième section d’un cas qui, à notre
avis, est l’exception à l’exception. Le décret-loi étant un texte spécial, exceptionnel,
visant l’opposabilité à l’égard des tiers par l’inscription de la clause d’exclusivité,
l’exception en sera celle de défaut d’inscription de cette clause. Question que
retrouvent souvent les tribunaux libanais vu la différence d’avis entre la doctrine et la
jurisprudence. La réponse relève du pouvoir de l’appréciation fondamentale des juges
en la matière et leur manière d’interpréter les textes spéciaux.
754. Par ailleurs, le fait que l’appréciation de la faute ne doit plus avoir lieu
selon la distinction entre importateurs s’étant adressé en dehors de la zone déterminée
-aux marchés internationaux- pour retenir la responsabilité dans le premier cas, et la
rejeter dans le second. Le premier cas peut simplement servir à agir aussi contre le
représenté pour la violation de son obligation contractuelle résultant de la convention
d’exclusivité.
755. Mais s’agissant de l’importateur qui a acheté d’un distributeur qui lui a
interdit la distribution dans la zone protégée, et l’a fait malgré l’interdiction1442, nous
pensons que le représentant aurait le loisir d’agir soit par l’action en responsabilité
1439
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, p. 37.
1440
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 13.
1441
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, op. cit., n° 9.
1442
M. MAHMASSANI, op. cit., p. 211.
-392-
1443
L. MAZEAU et A. TUNC, Traité de la responsabilité, t. 3, R.I.D comparé, 1961 n° 144.
-393-
DEUXIÈME CHAPITRE
758. Il est certain que, d’après ce principe, le contrat ne peut imposer des
obligations aux tiers ; il peut, uniquement, leur rendre les obligations qui en découlent
simplement opposables. Il s’agit d’une exception pure et simple au principe de l’effet
1444
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 4.
1445
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 632.
1446
F. DEBOISSY, G. WICKER, Droit du contrat et droit du marché, éléments pour une
problématique, RDC, 2006, 1329.
1447
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, op. cit., n° 6.
1448
D. FERRIER, Concurrence-Distribution : pan. 2005, D., 2006 ; J. GHESTIN, C. JAMIN et M.
BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 678, spéc. n° 724 ; Comp. P. ANCEL, Force
obligatoire et contenu obligationnel du contrat, RTD civ., 1999, n° 53, p. 806-807.
-394-
relatif du contrat1449 en vue d’assurer une protection absolue. Cependant il n’en est
pas de même en France1450, où une flexibilité apparaît au niveau du concept de
l’opposabilité du réseau de distribution aux tiers, qui a connu un regain d'actualité
avec le développement de la vente par Internet1451.
1449
La relativité étant considéré par rapport à l’étendue des droits conférés par le représenté à son
représentant exclusif. Selon le principe de l’effet relatif du contrat, un contrat ne profite pas aux tiers
sauf le cas de la stipulation pour autrui, expressément excepte par l’article 1165 C. civ. et ne leur nuit
pas. Il ne peut ainsi faire naitre un droit ou une obligation sur leur tête et ils ne peuvent ni être
contraints à exécuter le contrat, ni en réclamer eux même l’exécution : A. BALLET, L’exclusivité et le
réseau de distribution, op.cit., n° 561.
1450
CA Rennes, 23 déc. 1965, RTD com., 1966, p. 634, n° 4 : Dans cette espèce, le concédant avait
agi contre un tiers commerçant qui avait violé l’exclusivité du concessionnaire exclusif et a obtenu gain
de cause, note J. HEMARD.
1451
Se trouvent notamment visés les revendeurs hors réseau qui n'ont aucun point de vente physique
et distribuent exclusivement par Internet. L'examen du droit positif révèle en effet la sévérité de la
sanction de ceux que l'on désigne comme pure players, où la vente exclusive sur Internet par un
revendeur non agréé qui est, en elle-même, condamnée : N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE,
La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 40 et s. ; Tel serait
par exemple le cas si des distributeurs vendaient par Internet sans disposer de magasins physiques (pure
players) » : Cons. conc. 29 oct. 2008, n° 08-D-25, pt. 81 : « La possibilité d'acheter les produits sur
Internet apporte en effet aux consommateurs un service supplémentaire par rapport à l'achat dans les
magasins physiques : commander et acheter les produits à distance, sans limitation de temps.
L'utilisation d'Internet facilite également l'accès à l'information sur les produits et permet aux
consommateurs de procéder à des comparaisons de prix ».
1452
Cass. com., 21 févr. 1978, Bull. civ., IV, n° 73 ; Cass. com., 16 mars 1965, Bull. civ. III, n° 199.
1453
J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 736,
p. 788 pour qui la solution confère en fait un droit exclusif et absolu ; F. TERRE., Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 494 qui évoquent une
situation juridique absolue ; G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd.,
LGDJ, 1995, n° 206 in fine qui évoque la reconnaissance de la « pleine et entière opposabilité de ce
type d'accord ».
-395-
SECTION 1
761. Ainsi, comme en droit commun, mais de façon plus manifeste dans un
contexte de libre commerce et de libre concurrence, l'opposabilité du contrat a pour
limite les droits opposables des tiers. Dans les rapports avec les tiers, il s’agit d’une
atteinte légale à la liberté des tiers d’exercer librement le commerce, car, bien qu’elle
résulte d’une convention entre les parties au contrat de représentation commerciale,
c’est la loi qui confirme cet effet à l’égard des tiers, de sorte qu’en fin de compte,
c’est la loi -ou plutôt le décret-loi N. 34/67- qui apporte cette limite à la liberté de la
concurrence. Aspect non consacré du principe de la liberté du commerce et de
l’industrie, qui semble de mieux en mieux assuré sous l’influence du droit
communautaire1455, malgré l’entrave que représente toujours l’interventionnisme
public local1456.
1454
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 6.
1455
L’art. 86 du Traité d’Amsterdam modifiant le traite sur l’Union Européen, les traités instituant
les communautés européennes et certains actes connexes (ex-article 90 du traité de Rome) prévoit que
« les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils
accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux
règles du présent traité, notamment à celles prévues aux articles 12 et 81 à 89 inclus », relative au droit
de la concurrence, J.O n° C 340 du 10 nov. 1997.
Le droit communautaire contribue donc à la libre concurrence et à la liberté du commerce et de
l’industrie (qui prend une valeur au moins supra-législative). Mais d’une façon générale le droit de la
concurrence a tendance à s’imposer de plus en plus aux autorités publiques, comme en témoigne la
récente jurisprudence du Conseil d ’Etat qui rend applicable l’ordonnance de 86 sur les prix et la
concurrence applicable aux activités de production, de distribution et de services des personnes
-396-
762. Par conséquent, l'opposabilité des droits des tiers apparaît ainsi comme une
limite à la liberté contractuelle des parties : libres de contracter, les parties ne sont pas
libres de créer un contrat dont l'effet nuirait aux droits des tiers1457. Rechercher
l’étendue des effets de l’inscription de la clause d’exclusivité revient à en tracer les
limites. Cette délimitation relativement aux rapports du représentant et des tiers doit
nécessairement se faire « rationae loci »1458 et « rationae tempori »1459.
763. Nous avons montré plus hauts que le représentant commercial devait
enregistrer son exclusivité au registre du commerce auprès du tribunal dans le ressort
duquel il a son principal établissement et exerce son activité. Mais, ici, il s’agit de
savoir quel est l’espace territorial auquel s’étend l’effet de cette inscription. C’est-à-
dire, si le représentant ayant une exclusivité pour la totalité du territoire libanais a
inscrit son exclusivité au registre du commerce de Beyrouth, étant donné que son
principal établissement se trouve à Beyrouth, ce représentant peut-il, à partir de cette
inscription empêcher un commerçant d’un autre Caza1460 d’écouler des marchandises
identiques à celles objet de l’exclusivité à Beyrouth ?
764. Il semble qu’il faille répondre par l’affirmative. L’inscription produit effet
au moins, sur tout le territoire constituant le ressort du tribunal de commerce, auprès
duquel se trouve le registre sur lequel a eu lieu l’inscription, et certainement après
765. Après tout, s’il n’a d’établissement qu’à Beyrouth, il ne peut inscrire qu’à
Beyrouth puisqu’il n’aurait pas de dossier ailleurs, mais il peut avoir une inscription
sur le registre spécial du Ministère de l'économie et du commerce. Il en résulte donc,
deux conséquences : d’une part, si le commerçant a plusieurs établissements, même
non principaux, il devra effectuer, pour être mieux protégé, une inscription au registre
de chacun de ses établissements, en plus de l’inscription au registre du Ministère de
l'économie et du commerce. D’autre part, l’inscription faite au registre spécial du
Ministère de l'économie et du commerce, produit ses effets sur tout le territoire
libanais.
766. Cela dit, une question nous interroge : Un commerçant représentant une
firme qui traite d’une marque déterminée, enregistre sa représentation de ladite
marque au registre du commerce pour la totalité du territoire libanais. Peut-on alors le
considérer comme seul autorisé d’introduire au Liban les produits portant cette
1461
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et
168.
1462
V. annexe II et III.
1463
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 14.
-398-
marque, de sorte que le tiers commerçant qui aurait introduit cette même marque
engagerait la responsabilité à base de la violation de l’exclusivité ?
767. Pour illustrer le sens de cette question, et la réponse qu’il faut y donner,
nous citons un célèbre arrêt de la jurisprudence libanaise :
Attendu que le principe de la relativité des contrats défini par l’article 225
C.O.C., ne s’applique pas à cette affaire, vu que le contrat de représentation
commerciale est inscrit au registre du commerce et qu’il est opposable aux tiers par
l’application du dernier alinéa du deuxième article du décret-loi N. 34/67 qui dispose
tacitement que la clause d’exclusivité n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a
été dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du
commerce,
-399-
Alors la société X sera protégée par les dispositions du décret-loi N. 34/67 pour
l’exécution du contrat de représentation commerciale conclu avec la société
Hollandaise, et qui restreint à la société X l’importation des produits Philips et ses
commercialisations au Liban »1464.
769. En d’autres termes, n’importe qui, achetant des produits de l’extérieur dans
le but de les vendre sur le territoire désigné pour la commercialisation de ces produits
par le distributeur exclusif, sera responsable pour la violation de son devoir
d’inviolabilité. Peu importe la source des produits importés, que ce soit de la société
représentée ou d’une de ses branches dans un autre pays, tant que le contrat de
représentation est enregistré au registre commercial du pays du représentant1466. Une
1464
Cass. civ., 1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et
168.
1465
D. FERRIER, La considération juridique du réseau, Mél. offerts à Ch. MOULY, Litec, 1998, p.
95 s., spéc. n° 19.
1466
Juge de référé Beyrouth, décision n° 459, 21oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147 :
« Attendu que le contrat de représentation exclusive inscrit selon les normes au registre du commerce,
est opposable aux tiers, et il protège le représentant contre l’importation des produits possédant leur
représentation, que ce soit l’importation faite de l’usine représentée ou de n’importe autre origine. Et
le fait de dire avec la partie défenderesse que la représentation exclusive ne l’est pas opposable
puisque elle a acheté les produits outre le pays d’origine, forme une fraude contre l’application des
dispositions du décret-loi de représentation commerciale. Ce sera possible pour n’importe quel
personne à travers un tiers dans un tiers pays, d’importer les produits inclus par la représentation
exclusive. Ce qui bloque les dispositions du décret-loi de la représentation commerciale. En effet, le
-400-
exception à ce principe a été évoqué en doctrine : « cas où l’accord existant entre les
deux firmes productrices, firme mère et firme agissant sous licence, vise à ce que la
firme secondaire qui produit selon sa propre formule utilise la marque de la firme
principale avec signe distinctif ; dans ce cas, l’importateur n’est réputé avoir commis
aucune violation d’exclusivité »1467.
770. En effet, l’une des conséquences de l’opposabilité à l’égard des tiers d’une
clause d’exclusivité, se traduit par l’interdiction d’importer les mêmes marchandises
que celles que le représentant commercial exclusif représente et distribue sur le
territoire désigné1468 ; en considérant que la représentation commerciale et la
distribution exclusive touchent le domaine des libertés, notamment, la liberté du
commerce et de l’industrie1469. Cependant, si le contrat de représentation exclusive ne
crée pas d’obligation à la charge des tiers, en revanche il constitue un fait juridique
qui leur est opposable1470 et rendrait condamnable la commercialisation des produits
par un distributeur qui n’est pas sélectionné ou tout au moins qui n’est pas
fait d’importer les produits inclus dans la représentation même si d’un autre pays, constitue une
concurrence déloyale qui subit des préjudices pour l’autre partie ».
1467
« Mais, si l’accord en question vise à permettre à la firme secondaire de produire selon la
formule de la firme mère et sous la marque de celle-ci, dans ce cas, l’importateur qui serait fourni
auprès de la firme secondaire est réputé violé l’exclusivité. Il en est de même quand le représentant
acquière l’exclusivité de la firme secondaire dument habilitée pour cela par la firme mère. L’accord
peut avoir visé à donner à la firme secondaire le droit de fabriquer selon la formule de la maison mère,
mais sans autorisation d’utiliser le même nom : c’est le cas courant des fabriques d’automobiles qui
créent des filiales ou autres dans différents pays, et les marques, alors portent des noms très proches
l’un de l’autre pour marquer qu’il s’agit d’une marque originairement unique. Dans ce cas,
l’importateur de la seconde firme n’est réputé avoir violé l’exclusivité du représentant de la firme
mère, car les deux productions doivent, sur le terrain juridique être réputées totalement différentes » :
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban, 1972, p.
185.
1468
E. ABOU EID, Droit commercial entre le texte et la jurisprudence et la doctrine, La
représentation commerciale, le décret-loi n° 34/67, t. 2, 2005, p. 46 ; CA Beyrouth, 3e Ch. civ., arrêt
du 29/9/1994, Rev. al Adl, 1994, p. 93.
1469
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, Décret-loi n° 34/67, Le commerce
du Levant, vol. 87, nov. 1967 : « On estime d’autre part que l’exécution régulière de la formalité
d’inscription confère désormais au bénéficiaire de l’exclusivité le droit d’invoquer celle-ci. C’est donc
en connaissance de cause que le législateur adopte la forme de protection de l’exclusivité sans faire de
distinction quant à la provenance des marchandises, la jurisprudence libérale dont ces importateurs
avaient profité avant l’institution d’une publicité légale de l’exclusivité ne saurait plus être maintenue
depuis cette institution, dans le cas où cette publicité sera régulièrement faite ».
1470
M. GRIMALDI, Le contrat et le tiers, Mél. Ph. JESTAZ, D., 2006, p. 163 ; G. VINEY, Traité
de droit civil, Introduction à la responsabilité, op. cit., p. 206 ; Cass. com., 18 oct. 1994, D., 1996, p.
311, note I. KRIMMER.
-401-
sélectionnable1471. Solution retenue en cas de revente d’un produit que l'on sait
distribuer par les seuls intermédiaires agréés par le fabricant engendrerait une
désorganisation du réseau de distribution de l'entreprise rivale. Ces solutions avaient
l'avantage de préserver l'avenir des réseaux et d'assurer la pérennité de la distribution
intégrée confrontée aux exigences du droit de la concurrence1472.
772. Par conséquent, si le tiers importateur est responsable, c’est qu’il s’agit-là
d’une responsabilité pour violation d’une obligation légale qui crée une obligation de
1471
D. FERRIER, Le droit de la distribution, 6e éd., LexisNexis, 2012, n° 632.
1472
CA Paris, 28 avr. 1988, D., 1989, Somm. 198, obs. J.-J. BURST ; CA Versailles, 4 mars 1987
et CA Paris, 24 mars 1987, D., 1988, Somm. 211, obs. Y. SERRA.
1473
A. AWADA, Les effets de l’inscription au registre du commerce, Rev. des avocats, 4e année, n°
5, 2011, P. 37. Dans le même sens, l’avis de M. MAHMASSANI.
1474
Ch. FABIA et P. SAFA, Précis du Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 2e éd. Béryl,
t. 2, 2004, sous art. 2, n° 4 ; Ch. FABIA et P. SAFA, Précis de droit commercial libanais, art. 2 du
décret-loi n° 34, Commerce du Levant, vol. 87, nov. 1967, n° 12.
1475
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Lib.,
1972, p. 196.
-402-
résultat, et ce, en connaissance de cause1476. Etant connu que cette violation constitue
la sanction d’une obligation incombant à toute personne, celle de consulter le registre
du commerce crée à cet effet, spécialement pour renseigner les tiers. La solution
rendue par la Cour de Paris dans une affaire Vitasport en témoigne, où la faute d’un
agent immobilier avait été retenue pour avoir conduit son mandant à signer un projet
de bail commercial sans avoir vérifié l’existence d’une clause d’exclusivité au profit
d’un autre locataire d’un centre commercial1477. La faute était constituée parce que de
telles clauses sont d’un usage courant1478.
773. Dans ce cas, une distinction se manifeste, selon que la distribution est
opérée par Internet (c’est-à-dire en utilisant Internet comme un moyen de
communication -vente passive-) ou sur Internet (c’est-à-dire en utilisant un site
virtuel)1479. Précisons d'abord que l'utilisation de l’Internet pour vendre ou pour faire
de la publicité ne peut être en soi interdite que si elle est objectivement justifiée par la
nature des produits1480, mais c'est la vente exclusive sur Internet par un revendeur non
agréé qui est, en elle-même, condamnée1481. Tout au plus, le fournisseur peut-il
imposer des normes de qualité pour l'utilisation du site Internet, comme il le ferait
pour un magasin, une annonce publicitaire ou une action promotionnelle en général ?
1476
Il paraît évident que le distributeur parallèle qui connaît l'existence des contrats constitutifs du
réseau ne peut ignorer que sa revente parallèle est nuisible aux membres du réseau : N. FERRIER, L.
SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, op. cit.,
n° 12 ; V. dans le même sens, Rapp. G. VINEY, op. cit., n° 207-3, qui retient, s'agissant du droit
commun de la responsabilité du tiers complice, que « la connaissance du contrat et la réalisation
consciente d'actes qui entravent son exécution suffisent à établir la faute du tiers ».
1477
CA Paris, 16e Ch., A, 29 nov. 2004, J-D, n° 2004-268854.
1478
D. BOSCO, L’obligation d’exclusivité, op.cit. p. 457.
1479
D. FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 616.
1480
Lignes directrices à l'occasion de l'adoption du règlement du 20 avr. 2010, JOCE, n° C 130, pt.
51 : « En principe tout distributeur doit être autorisé à utiliser Internet pour vendre ses produits » ; M.
MARTINEZ-LOPEZ, Distribution sélective et Internet, Competition Policy Newsletter, juin 2001, n°
2, p. 7 s ; Conf. par TPICE, 12 déc. 1996, aff. T- 19/92, Leclerc c/ commission, Rec. TPICE 1996, II, p.
1851, pt. 131 ; Rapp. L’appréciation favorable à l’interdiction de la vente par correspondance de
produits parfumants, Comm. CE, déc. n° 92/33, 16 déc. 1991, JOCE n° L. 12, 18 janv. 1992, aff.
IV/33.242, Yves Saint Laurent, pt. 30.
1481
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution parallèle à l'épreuve de
l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 43.
-403-
1482
Le distributeur exclusif peut vendre à des clients situés hors de la zone qui lui a été attribuée,
mais seulement de façon passive (le fait de satisfaire à des demandes non sollicitées, émanant de clients
individuels). En revanche, le fournisseur pourrait lui interdire de se livrer à des ventes actives (le fait de
prospecter des clients hors de la zone d'exclusivité attribuée à un distributeur) : Règlement n°
1400/2002 de la Commission européenne du 31 juill. 2002, art. 4-b.
1483
CA Paris, 18 avr. 2008, Europe juin 2008, comm., 209, obs. L. IDOT ; CA Paris, 5 sept. 2003,
Comm. com. électr. 2004, n° 19, obs. P. STOFFEL-MUNUCK ; Solution rigoureuse car le distributeur
hors réseau peut en principe librement commercialiser les produits dans un point de vente physique : D.
FERRIER, Droit de la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, note 422.
1484
Lignes directrices à l'occasion de l'adoption du règlement du 20 avr. 2010, JOCE, n° C 130.
1485
P. ARHEL, Application du droit de la concurrence à la distribution automobile, LPA, 16 juill.
2004.
-404-
Internet »1486. Cette solution a fait l’objet d’une question préjudicielle à La Cour de
justice. Celle-ci a jugé que la clause imposant au distributeur de ne vendre les
produits que « dans un point de vente matérialisé et individualisé » et interdisant ainsi
la commercialisation sur Internet, constitue une « restriction de concurrence par
objet »1487.
776. Sur cet acquis, M. le professeur FERRIER soulève des interrogations étant
donné que la solution est abrupte au regard de l'exigence non respectée par la Cour
d'un « examen concret » de l'atteinte à la concurrence1488. D'une part, peut-on
considérer que l'interdiction de la commercialisation sur Internet ne doit pas
bénéficier de l'exemption catégorielle1489 parce qu'elle restreint les ventes actives et
passives alors que bien d'autres modalités de commercialisation sont utilisables1490 ?
1486
CA Paris, 29 oct. 2009, Pierre Fabre Dermo-Cosmétique, n° 08/23812.
1487
C'est-à-dire condamnable indépendamment de l'appréciation de son effet anticoncurrentiel, si
l'examen concret de son contenu comme de sa finalité, ainsi que du contexte juridique et économique
dans lequel elle s'inscrit, fait apparaître qu'elle n'est pas justifiée au regard des propriétés des produits
en cause. En l’occurrence, la cour relève que le respect de l'image du produit ne pouvant pas, en lui-
même, constituer une justification de l’exclusion de sa commercialisation sur Internet car la
préservation de cette image ne constitue pas en général un objectif légitime pour restreindre la
concurrence : CJUE, 13 oct. 2011, aff. C 439/03, JCP, G, 2011, 1430, note D. FERRIER ; D. 2011.
2590, obs. E. CHEVRIER ; Contrats, conc. consom. 2011. Comm. 257, obs. M. MALAURIE-
VIGNAL, et Comm. 263, obs. G. DECOCQ ; J.-L. LESQUINS et L. FERCHICHE, Les ventes sur
Internet dans le cadre de la distribution sélective, JCP E, 2011. 544.
1488
D. FERRIER, Concurrence-Distribution, D., 2012, p. 577 ; De même a considéré que la vente
exclusive sur Internet pose la question de la prise en charge des gouts de constitution du réseau et du
parasitisme et peut être source de distorsion de concurrence entre distributeurs : D. FERRIER, Droit de
la distribution, 6e éd. LexisNexis, 2012, n° 631.
1489
Règl. UE n° 330/2010, art. 4 : Restrictions retirant le bénéfice de l'exemption par catégorie -
restrictions caractérisées : L'exemption prévue à l'article 2 ne s'applique pas aux accords verticaux qui,
directement ou indirectement, isolément ou cumulés avec d'autres facteurs sur lesquels les parties
peuvent influer, ont pour objet:
c) de restreindre les ventes actives ou les ventes passives aux utilisateurs finals par les membres
d'un système de distribution sélective qui agissent en tant que détaillants sur le marché, sans préjudice
de la possibilité d'interdire à un membre du système d'exercer ses activités à partir d'un lieu
d'établissement non autorisé;
1490
« Il appartient au promoteur d'un réseau de distribution sélective d'apporter la démonstration
que la commercialisation au moyen d'un site Internet contrevient expressément aux obligations
souscrites par le distributeur. Dès lors que les documents contractuels ne faisaient aucune référence
aux modalités, probablement trop récentes, de commercialisation par un serveur en ligne des produits
concernés et qu'il est seulement fait mention que le distributeur s'engageait à « tout faire pour
développer les ventes », il faut considérer que le moyen Internet immatériel s'ajoute aux modalités
traditionnelles mises en place par le distributeur dans son officine et conformes aux exigences du
fournisseur relatives à la matérialité du lieu de vente » : Ordonnance rendue par T. com. Pontoise, La
-405-
777. Dans un premier temps, la Cour de justice estime alors que l'accord de
distribution sélective stipulant une telle clause ne saurait bénéficier de l'exemption par
catégorie applicable aux restrictions verticales1492. Mais en conclusion, elle admet que
l'accord pourrait toutefois bénéficier d'une exemption individuelle (art. 101, § 3,
TFUE) dans la mesure évidemment où serait établi un bilan économique positif. Il
résulte de ce qui précède que la clause d’exclusivité produit des effets à l’égard des
tiers de manière absolue, uniquement dans la mesure où le droit du bénéficiaire est
dûment absolu 1493; et, dans ce cas, l’importateur parallèle est responsable pour
violation de l’exclusivité quelle que soit l’origine de sa fourniture1494.
vente, par un distributeur agréé, des produits contractuels sur un site Internet est-elle licite ? D., 1999,
n° XTCP150499X, p. 725.
1491
Règl. UE n° 330/2010, art. 4, c, op. cit.
1492
Règl. UE n° 330/2010 du 20 avr. 2010 concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du
traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) à des catégories d'accords verticaux et de
pratiques concertées.
1493
J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU , Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 736,
p. 788 pour qui la solution confère en fait un droit exclusif et absolu ; F. TERRE, Ph. SIMLER et Y.
LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz, 2009, n° 494 qui évoquent une
situation juridique absolue ; G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd.,
LGDJ, 1995, n° 206 in fine qui évoque la reconnaissance de la « pleine et entière opposabilité de ce
type d'accord ».
1494
TI Beyrouth, décision n° 459, 21 oct. 1974, Rec. Hatem, vol. 160, p. 146 et 147 ; Cass. civ.,
1ere Ch., arrêt n° 50, 25 oct. 1973, Kouyoumji c/ Philips, Rec. Baz, n° 21, p. 167 et 168.
-406-
780. Ainsi dans le même sens, cas d’une compagnie bénéficiaire d’une clause de
représentation d’exclusive, suivant un contrat inscrit au registre commercial et auprès
de l’office pour la protection de la propriété commerciale et industrielle dans le
Ministère de l’économie et du commerce, qui a pu protéger ses droits contre une
compagnie concurrente ayant inscrit son contrat de représentation exclusive
postérieurement à la date d’inscription du premier contrat. La Cour a jugé que « c’est
le premier contrat inscrit proprement selon les dispositions du décret-loi N.34/67, qui
est opposable aux tiers et produits effets dès la date de son inscription et sa
publication au registre du commerce. Le deuxième contrat n’est opposable aux tiers
qu’à partir de son inscription et non à partir de la date de sa conclusion »1496.
781. Cependant, cette solution doit être nuancée. En effet, une personne peut
avoir obtenu l’exclusivité d’une certaine marque alors qu’un commerçant tiers avait
déjà commandé une certaine quantité de marchandises de cette même marque, mais
ne l’a pas encore reçue, ou l’a reçue mais ne l’a pas complétement écoulée. Faut-il,
pour cela, l’empêcher d’écouler cette marchandise à l’intérieur du territoire protégé
par l’exclusivité, pour la seule raison que le représentant a réussi à enregistrer avant
de laisser au commerçant qui a fait la commande le temps d’écouler cette
marchandise ?
1495
TI Beyrouth, Ch. com., décision n° 123/1488, 1969, Rec. Hatem, vol. 113, p. 16 à 18.
1496
Juge de référé Beyrouth, décision n° 443, 1983, Rec. Hatem, vol. 180, p. 213 à 216.
-407-
783. S’agissant de la durée des effets de l’inscription, il faut dire qu’en principe,
l’inscription au registre du commerce de la convention d’exclusivité rattachée à un
contrat de représentation commerciale demeure valable et continue à produire ses
effets tant que dure l’efficacité de la clause d’exclusivité et celle du contrat de
représentation commerciale pour lequel elle sert de modalité. C’est ainsi que
l’inscription d’un contrat à durée indéterminée continuera à produire ses effets aussi
longtemps que le contrat lui servant de base continuera à régir les rapports des parties
1497
V. supra n° 688-735 et s.
1498
Juge d’exécution Al Maten, décision n° 110 du 30/3/2009, Rev. al Adl, 2010, t. 2, p. 860.
1499
Y. PICOD, Plaidoyer pour une consécration législative de la concurrence déloyale, Mél. Y.
SERRA, D., 2006, p. 360 s., spéc. p. 368.
-408-
1500
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
1972, p. 189.
1501
Il a été jugé que « le contrat prévoyant un renouvellement par tacite reconduction pour une
durée déterminée ne saurait recevoir la qualification de contrat conclu pour une durée indéterminée ;
qu'ayant constaté la stipulation prévoyant le renouvellement du contrat par tacite reconduction pour une
durée déterminée puis considéré que le fait que le contrat prévoyait une reconduction annuelle
expresse sans donner de limitation du nombre de renouvellement, les prorogations possibles à l'infini
étant de nature à caractériser l'existence d'un contrat à durée indéterminée sans préciser en quoi cette
circonstance eu égard aux termes clairs et précis de la clause permettait de qualifier le contrat comme
étant renouvelé pour une durée indéterminée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au
regard des articles 1134 du code civil et L. 134-11 du code de commerce » : Cass. com., 13 nov. 2003,
n° 02-10.448 (1532 FS-P), Agent commercial : qualification d'un CDD avec tacite reconduction
illimitée, D., 2003, p. 3047.
1502
Juge de référé Beyrouth, décision n° 10 juin 1986, Aff. Skayem c/ Boudikyan et Yemezian sarl.,
Rec. Baz, 1987.
1503
V. supra note 1417.
1504
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 37.
1505
L’art. L. 134-11 C. com., précise cependant qu’un contrat à durée déterminée qui continue à être
exécuté par les parties après son terme est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée ; J.
HEMARD, observations RTD com., 1964, p. 136, n° 136 : Le contrat à durée déterminée devient à
durée indéterminée après plusieurs renouvellement si aucune limite à la tacite reconduction n’est
stipulée ; Cependant, cela n’est pas reconnu par certaines décisions : Cass. 10 fév. et 5 nov., 1960, D.,
1961, 249 ; Cass. soc., 14 nov. 1963, JCP, 1964, 13471.
-409-
1506
CA Paris, 20 févr. 2008, inédit, RG n° 05/02241 ; Cass. com., 29 janv. 2008, pourvoi n° 06-
13.462.
1507
Ch. FABIA et P. SAFA, Code de commerce annoté, Décret-loi n° 34/67, 3e éd. Sader, t. 2,
1988, sous art. 2, n° 11.
-410-
SECTION 2
789. Nous sommes devant une responsabilité délictuelle pour violation d’une
exclusivité considérée efficace à l’égard des tiers. Il s’agit bien, là, d’une
responsabilité délictuelle, et non d’une responsabilité contractuelle parce que le tiers
responsable n’a point été partie au contrat. Ensuite, étant donné que le tiers qui viole
l’exclusivité n’est pas responsable de la violation d’une obligation contractuelle, mais
1508
J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001, n° 738.
1509
La responsabilité est solidaire chaque fois qu’un tiers sollicite et obtient la représentation d’une
firme en connaissant l’existence d’une autre représentation : Cass. civ., n° 21 du 8 nov. 1965, RJL,
1966, p. 622.
1510
J. FROSSARD, La distinction des obligations de moyens et des obligations de résultat, préf. R.
NERSON, th., LGDJ, 1965, p. 241, n° 417.
-411-
1511
En droit français, art. 1382 C. civ. « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un
dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
1512
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S. ROBINNE, V. VALETTE-
ERCOLE, Concurrence interdite - Concurrence déloyale et parasitisme, pan. 2005-2006, 07/12/2006
-412-
par des comportements qui mettent en péril la concurrence en tant que telle, la
déloyauté ne reposant plus exclusivement sur des critères propres à la morale des
affaires »1513. En réalité, ce n'est pas le détournement de clientèle en lui-même qui est
sanctionné par l'action en concurrence déloyale, mais les moyens déloyaux utilisés
pour parvenir à cette fin1514. De nombreux arrêts subordonnent d'ailleurs la
responsabilité du tiers qui contracte en méconnaissance des droits d'autrui à sa
connaissance de ceux-ci1515 : « Toute personne qui, avec connaissance, aide autrui à
enfreindre les obligations contractuelles pesant sur elle, commet une faute délictuelle
à l'égard de la victime de l'infraction »1516. En revanche, d'une façon générale, nul
n'est tenu de s'informer sur l'existence de droits incompatibles avec les actes qu'il
entend conclure1517.
793. Les deux autres éléments, préjudice et lien de causalité, résultent d’une
simple constatation de faits. Le préjudice1518 consiste dans la commission du
représentant perdue du fait de l’importateur pour la quantité importée, ainsi que dans
le manque à gagner pour la même quantité, où a été jugé que « le préjudice matériel
se concrétise notamment par ce qui a été supporté comme frais pour la promotion
des produits et sa diffusion, ainsi que ce qui a été subi de gain manqué »1519. De
même, il a été jugé que « le préjudice pour la société mandante est caractérisé par le
fait de n'avoir pas tiré le profit des importants investissements qu'elle justifie... avoir
fait en matière de publicité et de promotion de ses programmes immobiliers »1520. Il
s’agit aussi du préjudice moral, éventuellement subi notamment par rapport à sa
1513
Y. SERRA, L'évolution de l'action en concurrence déloyale en droit français, in Mélanges
Dutoit, Genève, 2002, Libr. Droz, p. 287 s ; Concurrence déloyale, Rép. com., 2005, n° 94.
1514
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, Concurrence déloyale, D., 2012, n° 24.
1515
V. J. GHESTIN, C. JAMIN et M. BILLIAU, préc., n° 745.
1516
Cass. com., 13 mars 1979, D. 1980, Jurispr. p. 1, note Y. SERRA.
1517
V., par ex., en matière de cession Dailly, Cass. com., 12 janv. 1999, Bull. civ., IV, n° 8 ; Adde,
S. GINOSSAR, Liberté contractuelle et respect des droits des tiers, émergence du délit civil de fraude,
LGDJ, 1963, n° 11, p. 24.
1518
V. supra n° 630 et s.
1519
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « le préjudice n’est nécessairement une perte causée au représenté, mais peut
consister en un gain manqué ».
1520
CA Aix-en-Provence, 2e Ch., 7 nov. 2005, Juris-Data n° 2005-292527.
-413-
réputation1521. Dans le même sens vient l’arrêt de l’assemblée plénière : « Attendu que
le préjudice matériel résulte par la perte de la représentation exclusive, dont elle a
subi des énormes efforts pour la qualifier en premier parmi d’autres. Cette perte a
des effets négatifs sur son patrimoine financier, ainsi que sur sa réputation et sa place
dans son entourage et dans le secteur commercial libanais ; ce qui forme l’élément
morale de ce préjudice et par la suite constitue un préjudice de la perte de chance
concrétisée par une chance sérieuse de gagner un profit futur en plus de ce qu’elle a
supportée comme frais du dossier »1522.
1521
CA Beyrouth, 9e Ch. civ., arrêt n° 1173, 7/8/2008, Aff. Cadbury International Limited, Rev. al
Adl, 2008, p. 1659 : « le préjudice moral se caractérise par la surprise du représentant de la
résiliation, et par l’atteinte à sa situation dans le marché commercial et à sa réputation économique ».
1522
Ass. plén., arrêt n° 351 du 10/3/2009, Rev. al Adl, t. 4 p. 1550.
1523
C'est ce qu'affirme la Cour d'appel de Paris, à propos d'un dénigrement largement avéré,
caractérisé par des propos dénigrants sur Internet tenu par un bijoutier à l'égard de son concurrent. Le
préjudice « s'infère nécessairement de ce dénigrement ainsi caractérisé qui est en effet générateur d'un
trouble commercial résultant d'une atteinte à l'image », sans qu'il n'y ait lieu de démontrer une baisse
de chiffre d'affaires consécutive aux pratiques dénoncées : CA Paris, 29 juin 2006, 5e Ch. B, n°
04/17068 ; Cass. com., 14 juin 2000, RJDA 2000, n°1195 : le préjudice s’infère nécessairement de
l’acte déloyal.
1524
M. MALAURIE-VIGNAL, Droit de la concurrence interne et européen, 5e éd., D., 2011, n°
300 ; L. VOGEL, Droit français la concurrence, Lawlex, 2006, n° 20 ; Y. AUGUET, Droit de la
concurrence, Tout le Droit, Ellipses, 2002, p. 57.
1525
Y. PICOD, Y. AUGUET, N. DORANDEU, M. GOMY, S. ROBINNE, V. VALETTE-
ERCOLE, Concurrence interdite - Concurrence déloyale et parasitisme, pan. 2005-2006, 07/12/2006 ;
Y. SERRA, Concurrence déloyale, Rép. Com., n° 94.
1526
Ph. LE TOURNEAU, Parasitisme, J.-Cl. Concurrence consommation, fasc. 277 et 228, 4e éd.
2010 (1re éd. 1995), n° 14 ; M. CHAGNY, Droit de la concurrence et droit commun des obligations,
préf. J. GHESTIN, D., 2004, n° 514.
1527
G. CANIVET, Exposé introductif général in Conquête de la clientèle et droit de la concurrence,
Gaz. Pal., 2001, 2, doctr. 1650.
-414-
1528
Juge unique civil, décision du 17/12/2009, Rev. al Adl, 2010. t. 2, p. 796.
1529
CA Beyrouth, 3e Ch. civ., arrêt du 29/9/1994, Rev. al Adl, 1994, p. 93 : « La Cour juge
l’interdiction d’introduire des marchandises fausses ou contrefaites de la marque Teffal sur le
territoire libanais, vu qu’il appartient au seul représentant commercial de ces produits de les importer
et les commercialiser au Liban. L’intégration de ces faux produits dans le marché libanais constitue
une tacite violation de ses droits découlant de la représentation exclusive ».
1530
Cass. com., 21 mars 1989, Bull. civ., IV, n° 98 ; D., 1989, 427, note A. BENABENT.
1531
L’art. L. 442-6, I, 6° C. com. conforte l’exigence en sanctionnant le fait: « de participer
directement ou indirectement à la violation de l’interdiction de revente hors réseau faite au
distributeur lié par un accord de distribution sélective(…) exempté au titre des règles applicables au
droit de la concurrence ».
1532
CA Paris 17 fév. 1993 et Cass. com., 27 oct. 1992 : D., 1995, somm. p. 83, obs. D. FERRIER.
1533
G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, 2e éd., LGDJ, 1995, n° 24 ;
Celle-ci résultant seulement de circonstances particulières : En effet, il ne doit pas agir en raison de la
concurrence déloyale ou de la contrefaçon car à défaut sa responsabilité civile pourra être engagée : P.
JOURDAIN, Les réseaux de distribution et la responsabilité des tiers revendeurs hors réseaux, D.
1990, p. 43. Citons par ex : l’achat des marchandises dans des conditions illicites ou frauduleuses
(Cass. com., 27 oct. 1992, Bull. civ., 1992, IV, n° 322), la revente des produits dans des conditions
illicites : revente à perte (CA Paris, 24 mars 1987, D., 1987, p. 107) ou dans des conditions déloyales :
atteinte à l’image de la marque par le caractère dévalorisant de la commercialisation des produits (Cass.
com., 24 mai 2011, Contrats, conc. consom. 2011, comm. 188, obs. M. MALAURIE-VIGNAL ; CA
Paris, 22 sept. 2004, D. 2005, pan. P. 149, obs. D. FERRIER ; CJCE, 4 nov., 1997, Dior, Rec. CJCE,
1997, I, p. 6034 : « le revendeur non agréé ne peut utiliser la marque des produits qu’il commercialise
-415-
797. Une fois de plus, à cet égard, nous affirmons que l’inscription au registre du
commerce n’est pas une condition préalable pour retenir une responsabilité
quelconque. Toute exclusivité non-enregistrée peut aussi bien servir de fondement
à la responsabilité en question. Cependant, la seule condition préalable à la sanction
de l’opposabilité qui doit être prouvée, est celle de l’existence à la base, d’un contrat
de représentation commerciale auquel se rattacherait la clause, ainsi que la
connaissance du tiers de l’existence de ce contrat. Le rôle de l’intention regagne son
importance à l’occasion de la responsabilité pénale.
hors réseau dans un voisinage qui risquerait d’amoindrir gravement l’image que le titulaire a réussi à
créer de sa marque » ; J.-M. MOUSSERON, Detchema ou le rêve avili, JCP, E, 1985, CDE, n° 3) ; La
contrefaçon supposant des faits distincts, en dernier lieu : Cass. com., 4 oct. 2011, Contrats, conc.
consom. n° 6, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
1534
V. Cass. com., 24 mars 1998, Bull. civ., IV, n° 111 ; D., 1999, Somm., p. 113, obs. R.
LIBCHABER.
-416-
intérêts d’un concurrent par des moyens contraires aux lois, aux usages ou à
l’honnêteté professionnelle »1535.
799. L’acte frauduleux doit comporter deux éléments: l'élément matériel qui
forme la méthode frauduleuse, celle non-conforme aux coutumes, aux usages
commerciaux, aux bonnes mœurs, et aux bonnes relations entre les commerçants ;
l’élément moral dont le principal objet est d’avoir le contrôle sur le marché et de
capter exclusivement les clients1536. En effet, pour que l’acte soit considéré comme
illicite, il est prévu qu’il soit incombé à la personne auteur et qu’il le commis avec sa
connaissance de l’illégalité de ce qu’il fait, comme indication sur sa mauvaise foi
supposée1537.
800. L’élément majeur est ici celui de l’intention. Il ne suffit pas que la violation
de l’exclusivité ait eu lieu. Il faut aussi qu’elle ait eu lieu avec une intention
particulièrement frauduleuse en vue de nuire au représentant exclusif. Cette intention
de nuire se traduit parfois par le détournement de clientèle qui peut constituer un
agissement frauduleux. C’est « le fait d’une personne ou d’une entreprise qui
détourne ou tente de détourner la clientèle d’une autre entreprise ou encore s’efforce
de nuire aux intérêts de cette entreprise par des moyens contraire aux lois ou aux
usages professionnels »1538. Dans le même sens, il a été jugé qu’ « avec une
motivation quasi identique à propos d'un détournement de clientèle suite au départ
d'un salarié. La Cour de cassation considère que les transferts de dossiers concernant
quatre clients d'un cabinet d'expertise comptable à un autre s'étaient effectués en
méconnaissance des règles de déontologie de la profession d'expert-comptable, ce qui
suffisait à établir que de tels agissements étaient constitutifs de concurrence
déloyale »1539.
1535
M. De JUGLART et B. IPPOLITO, Droit commercial, éd. Montchrestien t. 1, 1970, p. 344, n°
181.
1536
TI Beyrouth, 3e Ch. civ., décision n° 1080, 28/1/1998, Rev. al Adl, 1999, t. 3 et 4, p. 465.
1537
Idem.
1538
TGI Paris, 4 nov. 1992, PIBD, 1993, 539, III, 180.
1539
Cass. com., 12 juill. 2011, n° 10-25.386, D. 2011. 2782, note A. ROBERT ; Contrats, conc.
consom. 2011, n° 221, obs. M. MALAURIE-VIGNAL.
-417-
1540
En effet, nul ne peut prétendre avoir des droits acquis sur une clientèle malgré la notion fictive
de propriété de la clientèle : Cass. civ., n° 69, 3 mai 1967, RJL, 1967, p. 560.
1541
M. MAHMASSANI, La représentation commerciale en droit positif libanais, Libr. du Liban,
Beyrouth, 1972, p. 169 : « Mais, si un représentant concédant de l’exclusivité pour une certaine
marque s’est fourni auprès d’une autre fabrique, comment savoir que les personnes qui ont traité avec
lui pour les produits illicitement représentés auraient traité pour le même volume s’agissant la
première marque, surtout que les nouveaux produits sont censés être différents de nature des premiers
pour ne pas leur être concurrentiels, conformément aux dispositions de l’article 3 du décret-loi
n°34/67 ».
1542
TI Mont Liban, 3e Ch., décision n° 23, 30/10/2000, Rev. al Adl, 2001, p. 220 : « La protection
traditionnelle pour le viol du nom commercial et de la marque commerciale, se représente par l’action
de la concurrence illicite, basée sur les principes de la responsabilité délictuelle, qui suppose le viol
ou la contrefaçon du nom commercial dans une activité commercial similaire ou identique ».
1543
L'appréciation de la mauvaise foi du déposant d'une marque communautaire, Arrêt rendu par
Cour de justice des Communautés européennes, 1ere Ch., 11 juin 2009, n° C-529/07.
1544
Règlement CE n° 40-94 du 20 déc. 1993, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli AG/ Franz
Hauswirth GmbH, art. 51, D., 2009 p. 2396.
-418-
conduit à la création de confusion dans l'esprit du consommateur. Dès lors, aux fins
d'apprécier l'existence de la mauvaise foi, il convient également de prendre en
considération l'intention du tiers au moment du dépôt de la demande d'enregistrement.
Ainsi, l'intention d'empêcher un tiers de commercialiser un produit peut, dans
certaines circonstances, caractériser la mauvaise foi du demandeur. Tel est notamment
le cas lorsqu'il s'avère, ultérieurement, que le demandeur a fait enregistrer en tant que
marque communautaire un signe sans intention de l'utiliser, uniquement en vue
d'empêcher l'entrée d'un tiers sur le marché.
803. Sur ces faits, le droit libanais, tant dans la doctrine que la jurisprudence1545,
différencie deux types de concurrence :
804. En effet, la mauvaise foi n’est pas une condition d’existence dans
l’infraction de la concurrence déloyale ; solution justifiée par un célèbre arrêt de la
1545
Cass. civ., 5e chambre, arrêt n° 20 du 23/8/2008, éd. Sader, Rev. al Adl, 2009 : « Attendu que
les articles 97 et 98 du décret N° 2385 du 17/1/1924 (Relié au règlement des droits des propriétés
commerciales et industrielles publié au J.O. 1924) forment la base juridique pour l’action en
concurrence déloyale. Et après que l’article 97 a précisé les deux cas de concurrence déloyale,
l’article 98 a distingué entre l’action tendant à obliger le concurrent d’arrêter la concurrence ou bien
l’acte préjudiciable, et l’action dont l’objet est l’obtention d’une indemnité.
Attendu que l’article 97 du décret N° 2385, n’a pas désigné la concurrence déloyale d’une manière
précise, mais il a noté qu’est considéré concurrence déloyale :
- Chaque dérogation pour ce décret, manquée d’une des conditions pour pouvoir appliquer les
sanctions citées dans le sixième titre,
- Chaque acte donnant aux tribunaux la liberté d’y juger et d’évaluer, dont il leur apparaît comme
une concurrence illégale.
Attendu que la doctrine et la jurisprudence ont défini la concurrence déloyale en supposant que le
commerçant ou l’industriel, commis une faute professionnelle qui s’exprime par la dérogation aux
principes de loyauté et d'intégrité imposés dans le commerce et dans les relations entre les
commerçants, cherchant des profits déloyaux par l’attirance des clients communs entre lui et le projet
qui a subi cette concurrence ».
1546
CA Beyrouth, 1ere Ch. civ., arrêt n° 916 du 13 juin 1968, Rec. Hatem, vol. 82, p. 57 à 59, n° 3.
-419-
jurisprudence libanaise dont nous reprenons les importantes citations pour consolider
les traces de notre analyse :
Attendu que le travail avec l'intention de frauder est le moyen le plus important de
la concurrence illicite et conduit à la création de confusion dans l'esprit du
consommateur comme cela a été expliqué ci-dessus.
Attendu que la confusion créée par la similitude entre les marques dans l’esprit
des clients, pourrait fournir un bénéfice à la défenderesse et un préjudice à la
demanderesse.
1547
TI Beyrouth, 3e ch. civ., décision n° 1080, du 28/1/1998, Rev. al Adl, 1999, t. 3 et 4, p. 465.
Dans le même sens, Cass. com., 18 avr. 1958, D., 1959, p. 81 : « Il n’est pas exigé que la faute soit
intentionnelle, ni même qu’il ait imprudence, la simple constatation de la violation d’un devoir
professionnel suffit ».
1548
Cass. civ., 5e ch., arrêt n° 20 du 23/8/2008, éd. Sader, Rev. al Adl, 2009.
1549
« Le parasite s'insère dans le sillage économique d'une entreprise, afin de tirer profit, sans
bourse délié, de ses efforts et de sa réputation. Il moissonne là où il n'a pas semé. On parle alors
d'agissements parasitaires… » : Y. GUYON, Droit des affaires, Entreprises en difficultés,
-420-
806. Il n’est pas nécessaire de s’y attarder. Les règles du droit pénal spécial
particulières à chaque infraction s’appliquent en totalité. Cependant, remarquons-nous
que l’inscription au registre du commerce de la représentation commerciale exclusive
ne crée qu’une présomption de mauvaise foi des tiers, et que celle-ci ne suffit pas à
provoquer une responsabilité pénale. Il découle de cette même disposition que le
moment pertinent aux fins de l'appréciation de l'existence de la mauvaise foi du tiers
est celui du dépôt, par l'intéressé, de la demande d'enregistrement1551.
807. D’après ce qui précède, nous remarquons que les effets résultant de
l’inscription, dans leur portée et leur étendue, découlent principalement de
l’opposabilité de la clause d’exclusivité elle-même. Une différence marquée entre les
régimes de l’exclusivité existants respectivement en France et au Liban. Cette
différence résulte d’un pas positif effectué par le législateur libanais, celui de
l’organisation de la publicité officielle de la convention d’exclusivité, et la
détermination des effets qui en résultent. Par conséquent, il apparaît que la différence
principale entre droit français et droit libanais en matière d’exclusivité se situe au
niveau de la situation juridique des tiers, personnes réputées étrangères au contrat de
représentation commerciale. En effet, lorsqu’une personne en représente une autre,
elle ne peut user, pour le compte de la personne représentée de droits que celle-ci ne
possède pas.
redressement judiciaire, faillite, 9e éd. Economica, t. 2, 2003, p. 862, n° 852. Pour M. Saint-Gal,
l’usurpation de la réputation d’autrui est le fait de se référer, sans s’adresser à la même clientèle, à une
marque ou à toute autre forme de propriété industrielle ou intellectuelle créée par un tiers et
particulièrement connue et ce à l’effet de tirer profit de sa renommée : Y. SAINT-GAL, Concurrence
déloyale, Concurrence parasitaire, agissements parasitaires: RIPLA 1956, n° 25/26, p. 37.
1550
TI Mont Liban, 3e ch., décision n° 23, 30/10/2000, Rev. al Adl, 2001, p. 220.
1551
L'appréciation de la mauvaise foi du déposant d'une marque communautaire, Arrêt rendu par
Cour de justice des Communautés européennes, 1ere Ch., 11 juin 2009, n° C-529/07.
-421-
808. Il est admis que l'opposabilité d'un contrat fait peser sur les tiers une
obligation de respecter la situation née du contrat, ce qui se traduit par une obligation
de ne pas faire1552 ou encore une obligation passive1553 et correspond au « devoir de
toute personne de tenir compte de ce qui existe en dehors d'elle et de s'abstenir
éventuellement d'y porter atteinte »1554. Le plus souvent, il est retenu que
l'opposabilité du contrat met à la charge des tiers un devoir d'inviolabilité1555. Ce
devoir d'inviolabilité conduit à une limitation de la liberté contractuelle des tiers
puisqu'ils sont tenus de ne pas porter atteinte à la situation contractuelle en s'associant
à la violation contractuelle d'une partie au contrat ou même en agissant de telle sorte
que l'utilité du contrat soit compromise pour les parties1556.
1552
F. TERRE., Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil, Les obligations, 10e éd., Précis Dalloz,
2009, n° 490 ; J. GHESTIN , Ch. JAMIN et M. BILLIAU, Les effets du contrat, 3e éd., LGDJ, 2001,
n° 730 ; Ph. MALAURIE, L. AYNES et Ph. STOFFEL-MUNCK, Les obligations, 5e éd., Defrénois,
2011, n° 793 ; J. GHESTIN, Les effets du contrat à l'égard des tiers, comparaisons franco-belges,
LGDJ, 1998, n° 9.
1553
Y. FLOUR, L'effet des contrats à l'égard des tiers en droit international privé, th., Paris II,
1977, n° 37. Rapp. S. GINOSSAR, Droit réel, propriété et créance, élaboration d'un système rationnel
des droits patrimoniaux, LGDJ, 1960, et son analyse de l'obligation passive universelle appliquée aux
droits de créance qui traduit le devoir imposé aux tiers « de ne rien faire pour aider le débiteur à se
dérober de son engagement » : cité par N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, La distribution
parallèle à l'épreuve de l'opposabilité du réseau, RTD civ., 2011, n° 7.
1554
J. DUCLOS, L'opposabilité, Essai d'une théorie générale, préf. D. MARTIN, LGDJ, 1984, n°
2-3.
1555
G. VINEY, Traité de droit civil, Introduction à la responsabilité, op.cit., n° 202 ; F.
BERTRAND, L'opposabilité du contrat aux tiers, th., Paris II, 1979, n° 137.
1556
N. FERRIER, L. SAUTONIE-LAGUIONIE, idem.
-422-
810. Et d’autre part, ce principe assure l’opposabilité à l’égard des tiers en les
faisant respecter la situation juridique issue du contrat, en vue d’assurer une large
protection au représentant commercial. Cette protection est le fruit d’une publicité
suite à une inscription de la clause d’exclusivité au registre du commerce,
accompagnée par des sanctions en cas d’atteintes. En général, les droits subjectifs sont
protégés de façon préventive par l’inefficacité de l’exercice du droit par un tiers. Cette
protection peut être complétée de diverses manières et notamment par une interdiction
de porter atteinte à la substance du droit, sanctionnée par la responsabilité délictuelle.
Une telle protection est néanmoins une simple faculté pour l’ordre juridique, elle n’est
pas imposée par la nature du droit subjectif.
1557
« L'effet relatif des contrats n'interdit pas aux tiers d'invoquer la situation de fait créée par les
conventions auxquelles ils n'ont pas été parties, si cette situation de fait leur cause un préjudice de
nature à fonder une action en responsabilité délictuelle » : Cass. com., 11 janv. 2005, D. 2006. Somm.
512, obs. D. FERRIER.
CONCLUSION GÉNÉRALE
-424-
811. Nous avons montré que pour pouvoir bénéficier du statut de représentant
commercial libanais ou d’agent commercial français, il ne faut pas seulement agir
d’une manière indépendante mais encore professionnelle, après avoir traité de
manière permanente, sans être lié par un contrat de travail ou de louages de services.
Partant de là, le législateur libanais a cherché à règlementer le statut de certains
intermédiaires de commerce. Il a fait preuve d’un certain esprit de création mais par
inspiration du droit français, en étendant la protection du décret-loi N. 34/67 à
d’autres personnes que le représentant.
814. Cependant, le représentant est investi d'une mission le plus souvent durable,
par laquelle il est chargé de négocier, et éventuellement de conclure des contrats de
vente, d'achat, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte
d'autrui. C’est dire qu’il est appelé à accomplir des actes dont le bénéfice direct va à
son mandant. Le cas échéant, il devrait avoir normalement la qualité pour conclure
des actes juridiques au nom et pour le compte des mandants. C’est dire que
-425-
l’intermédiaire qui ne négocie pas ne peut pas prétendre au bénéfice du statut d’agent
commercial.
815. Ce dernier jouit d’un statut particulier qui définit plus ou moins
rigoureusement ses droits et obligations vis-à-vis de l’entreprise représentée et des
tiers. C’est que la qualité d'agent découle de la constatation d'un certain nombre de
conditions de fond permettant l'accès à la profession, la réglementation leur réservant
alors le titre d'« agent commercial » et l'application du statut de protecteur légal. En
réalité, l'application du statut du représentant commercial ou d'agent commercial ne
dépend ni de la volonté des parties exprimée dans le contrat, ni de la dénomination
qu'elles ont donnée à leurs conventions, mais des conditions dans lesquelles l'activité
est effectivement exercée.
après avoir acquis la qualité d’un représentant ou d’un distributeur exclusif unique
suivant le deuxième alinéa de l’article premier du décret-loi N. 34/67. Le représentant
commercial, au Liban, n’est donc pas simplement le mandataire, mais aussi le
distributeur exclusif.
819. Cependant, en tant que mandataire, puisque telle est la qualification retenue
par le droit positif français, apparaisse la différence avec le droit libanais puisque
l'agent commercial ne peut avoir la qualité de commerçant. Or, une analyse différente
de la nature juridique du contrat d'agence a conduit parfois à retenir principalement la
conception du contrat d'entreprise. Ainsi, l'article 4 du décret du 22 décembre 1958
imposait aux agents commerciaux l'immatriculation préalable à leurs activités sur un
registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce de leur domicile. Mais la loi
du 25 juin 1991, codifiée sous les articles L 134-1 et suivants du Code de commerce,
intervenue pour transposer dans le droit interne la directive européenne du 18
décembre 1986, ne reprend pas l'obligation d'immatriculation : élément indispensable
pour l’opposabilité en droit libanais.
822. Cela résulte ensuite des conditions de l’opposabilité aux tiers de la clause
d’exclusivité subordonnée en droit libanais à son inscription. Ceci se traduit par une
protection particulière accordée au représentant commercial de nationalité libanaise.
Cette dernière présente un privilège au représentant commercial. Ce qui a été vérifié à
plusieurs reprises par l’interrogation du législateur sur la nationalité libanaise du
représentant commercial ainsi que sur la nécessité de l’exercice du travail au Liban en
faveur des commerçants du pays. De même, une compétence territoriale a été mis en
faveur du représentant libanais, en qualifiant les tribunaux libanais compétents
lorsqu’un libanais est partie au litige et de manière générale lors d’un litige subi par
un représentant commercial notamment libanais exerçant ses activités au Liban; ce
qui présente le représentant commercial libanais en avantage à l’agent commercial
français.
1558
Libre traduction de l’auteur de la langue arabe
-430-
La Représentation Commerciale
Décret-loi N. 34 issue le 5/8/ 1967
Est aussi considéré comme représentant commercial, le commerçant qui entreprend, pour
son propre compte de vendre ce qu’il aura acheté en vertu d’un contrat lui donnant la qualité de
représentant ou de distributeur exclusif unique.
A dater de l’entrée en vigueur du présent décret-loi, tout en maintenant les droits acquis
antérieurement et en tenant compte de la réciprocité que les représentants commerciaux étrangers
devront prouver, le représentant commercial doit être libanais et doit avoir un établissement
commercial au Liban.
a- Dans les sociétés de personnes et pour les sociétés à responsabilité limitée : que la
majorité des associés soit des libanais, que la majorité du capital appartienne à des libanais et que
celui qui a le droit de signer soit libanais.
b- Dans les sociétés anonymes : que leurs actions soient nominatives, que la majorité du
capital appartienne à des libanais, et que les deux tiers des membres du conseil d’administration
ainsi que son directeur général, ou que la personne déléguée par le président du conseil
d’administration ou par le directeur général pour toutes ou certaines fonctions de direction, soient
tous des libanais.
Tout contrat de représentation commerciale qui sera conclu après l’entrée en vigueur du
présent décret-loi devra être établi par écrit. Et pourra être pour une période déterminée ou
indéterminée.
-431-
La clause de représentation exclusive n’est opposable à l’égard des tiers que si elle a été
dument publiée par le représentant par voie d’inscription au registre du commerce, elle n’est pas
applicable pour les produits alimentaires à l’exception des produits de consommation spéciale
qui seront déterminés par décret pris en Conseil des Ministres après consultation d’une comité
qui sera composée du Directeur Général de l’Economie et du Commerce, d’un représentant de la
chambre Syndicale des Représentants de Commerce au Liban, d’un représentant de la Fédération
Nationale Générale des Sociétés Coopératives, d’un représentant de la Confédération Générale
des Travailleurs, et d’un représentant de la chambre de Commerce et d’Industrie. Ce comité sera
désigné par décret pris en Conseil des Ministres.
Une redevance annuelle de somme 500,000 L.L cinq cents milles livre libanaise, sera versée
contre chaque contrat de représentation commerciale inscrit au Ministère d’économie et de
commerce.
Article 3
mandants. Et dans ce cas, ces représentants secondaires seront soumis, selon leurs situations
respectives, soit aux dispositions du présent décret-loi soit à celles du code du travail.
Le contrat de représentation commerciale est considéré conclu dans l’intérêt commun des
parties contractantes.
Par conséquent sa résiliation par le mandant sans faute du représentant ou autre motif
légitime, permet à ce dernier, nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité
équivalente au dommage subi et au gain manqué.
Aussi, il appartient au représentant commercial, même au cas où le contrat prend fin par
l’arrivée de son terme, et nonobstant toute clause contraire, de réclamer une indemnité évaluée
par les tribunaux, et ce, si son activité a abouti à un succès apparent dans la promotion de la
marque de son mandant ou à l’augmentation du nombre de ses clients, et l’a empêché de tirer le
bénéfice de ce succès, le refus de son mandant de renouveler le contrat de représentation
c- Pour toute société contre laquelle a été rendu un jugement non exécuté.
2- Les deux mentions suivantes peuvent être portées sur le feuillet de toute société :
a- La mention d’une action en justice qui lui est intenté en vertu du décret-loi n 34 du 5-
8-1967 et de ses amendements qui sera inscrite dès la présentation de l’assignation dont une
copie sera notifié au Ministère de l’économie et du commerce (le registre spécial).
du commerce spécial, sous l’obligation, durant les 3 mois à dater du prononcé d’un jugement
irrévocable contre cette société en vertu du décret -loi n 34 du 5-8-1967 et de son amendement,
de choisir entre :
4- Il sera interdit à la société contre laquelle a été rendu un jugement irrévocable d’être
représentée au Liban tant qu’elle n’exécute pas elle-même le jugement rendu ou tant que son
nouveau représentant ne l’a pas exécuté en conservant son droit de recours contre elle.
Article 5
Article 6
Le présent-décret-loi doit être publié au Journal Officiel et ses dispositions sont applicables
aux contrats passés avant son entrée en vigueur, que ce soient écrits ou prouvés par tout autre
moyen admis selon la législation antérieure.
Annexe I
-434-
République Libanaise
Ministère de l'Economie et du Commerce
Direction Générale de l'Economie et du Commerce
Administration du Commerce - Département des Entreprises
Annexe II
-436-
Demandeur : ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. de la nationalité ... ... ... ... ... ... ... ... ...
... .. résident ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ......................... .
Rue ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. propriétaire……………………..
Téléphone ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... qui pratique le
commerce…………………………………………………………………..
vous demande d’enregistrer le contrat de représentation commerciale émis par
l’entreprise... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ......... de la nationalité... ... ... ... ... ... ...
………….... ... ... .. ayant son établissement à…………………………………...et qui
pratique le commerce ou l’industrie
…………………………………………………………………………………………………
….. ………………………………………………………………………
comme les seuls représentants de cette entreprise au Liban, en espérant d'enregistrer cela
au registre spécial et nous donnant l’attestation demandée, sachant que ce
contrat est enregistré auprès du registre du commerce le ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ..........
sous le n ° ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. sous la réserve des droits découlant de
l'application de l'article 15 du décret législatif n.83/73
Cordialement,
Signature du demandeur ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ..
Annexe III
-437-
Date:……
Demandeur: ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...
Avec respect
La signature du demandeur: ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ...
Annexe IV
-438-
Annexe V
-439-
Pièces jointes:
- Une copie de la précédente attestation
Annexe V
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-441-
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-479-
INDEX ALPHABÉTIQUE
(Les chiffres renvoient aux numéros des paragraphes)
I
F
Faute : 41, 117, 593, 602, 613, 614, Immatriculation : 237, 721
616, 618, 632, 686 - défaut : 597, 724, 726, 738
- d’un agent immobilier : 773 Importations parallèles : 772
- délictuelle : 792, 793 Indemnisation : 609, 659, 817
- distributeur parallèle : 810 - d’agent : 619, 622, 637, 640, 652
- élément morale : 680 - de représentant : 634, 652, 654, 657
- et préjudice : 595, 795 - préjudice : 664
- grave : 525, 529, 587, 594, 596, 597 Indemnité : 41, 593, 818, 823
598, 600, 619, 620, 621, 653 - calcul : 146, 590, 634, 639, 655 et s.
- lourde : 594 - de clientèle : 136, 202, 638, 640,
- professionnelle : 599 642, 643, 665
- qualification : 656, 672, 788, 791, - de non-renouvellement : 641, 647 et
792, 796 s
Frais : 548, 555, 576, 633, 793 - de rupture : 318, 525, 595, 597, 600,
Franchise : 13, 445,448, 602, 614, 625, 654, 658, 664
- de distribution : 452 Indépendance : 70, 74, 110, 313
- définition : 447, 449, 450, 457, 458 - agent : 80, 96, 99, 123, 169 436
- et exclusivité : 402, 461 - courtier : 269 et s., 287
Force obligatoire : - et franchise : 460
- des contrats : 479 et s., 568, 626, - représentant : 97, 104 et s., 126 et s.,
668 et s., 678 215, 476, 501, 813
Fonds de commerce : 313, 327, 396, - VRP : 92, 94, 136, 138
642 Inexécution
- commission-affiliation : 303, 319, - du contrat : 530, 558, 583, 597
330 - fautive du tiers : 581
- et représentation commerciale : 177 Inopposabilité : 744
- exploitation : 178, 179 - réseau : 686
- gérant-mandataire : 297 Insolvabilité : 231
- gestion : 154, 175 Intention de nuire : 800, 803
- vente : 170, 207 Intérêt commun : 41, 249, 346, 362,
431, 491, 503
- mandat d’ : 64, 186, 428, 489, 572,
596
- et représentation commerciale : 423,
G 428, 490, 507, 589, 591, 606, 616
Intermédiaire : 89, 91, 193, 220, 290,
312, 327, 495, 531, 580, 700, 770, 801
- commissionnaire : 215, 230
Garantie : 30, 232, 358, 362, 438, 547 - courtier : 13, 256 et s., 274, 282 et s.
- ducroire : 530 et s. - définition : 9, 14
Gérant-mandataire : 38, 184, 297 · sens commerciale : 11, 12
· sens économique : 10
- distributeur : 411
- du commerce : 5, 7, 31, 49 et s.,
119, 137, 148, 166, 186, 200, 209, 214,
-483-
219, 238, 248, 298, 352, 412, 473, 474, - définition : 62, 81, 89, 191, 206, 346
530, 811, 819 - et représentation : 66, 68, 70, 129,
- et distribution : 334 240, 812
- local : 12, 28 - permanent : 87, 492
- occasionnel : 314 - rupture du : 85
- opaque : 14, 308 - sans représentation : 67
- professionnel : 2, 78, 82, 161, 528 Mandataire : 89, 194, 197, 281, 545,
- qualification : 814 555, 562
- représentant : 27, 59, 186, 205, 252, - agent commercial : 33, 79, 140, 181,
570, 578 185, 198, 206, 298
- transparent : 308 - commissionnaire : v. ce mot
- VRP : 36, 136, 144 - courtier : v. ce mot
Intermédiation : 4, 308, 312, 334, 824 - français : 155
- notion : 8, 53 - indépendant : 217
Internet : 23, 100, 632, 731, 747, 758, - libanais : 155
773 et s. - ordinaire : 77, 540
Intuitu personae : 249, 363, 548, 605 - représentant commercial : 32, 55,
56, 60 et s., 77, 81, 147, 220, 240, 244,
290 et s., 577, 627
- simple : 77
Manœuvre : 89
L - Immorale : 117
Marché : 17, 29, 202, 229, 267, 465,
492, 511, 515, 570, 574, 645, 717, 799
Liberté du commerce et de - libanais : 28, 597, 610, 661 et s.
l’industrie : 468, 504, 507, 509, 687, - parallèle : 795
770 Mauvaise foi : 113, 116, 200, 748,
Liquidation : 1, 463, 785 749, 750, 751, 771, 798 et s., 806
Location-gérance : 177, 178, 740
Louage de services : v. Contrat
Loyauté : 362, 493, 499, 502, 551,
559, 817
- commerciale : 111, 114, 5011
- contractuelle : 436 N
Prescription : 374
O Procuration : 19, 62, 65
Produits de luxe : 342, 349
Promesse : 619
Obligation : 94, 154, 172, 203, 283, - porte-fort : 530
351, 357, 374, 378, 385, 399, 420, 433, Prorogation : 662, 741, 742, 783
488, 493 et s., 77 Publicité : 95, 158, 183, 645, 673,
- d’approvisionnement exclusif : 365, 683, 690 et s., 719, 727, 730, 741 et s.,
401 771, 782, 807
- d’informer : 498
- de bonne foi : v. ce mot
- de faire : 557 et s.
- de garantie : 528 et s., 569
- de loyauté : v. ce mot Q
- de ne pas modifier les prix de
manière abusive : 574
- de non-concurrence : 98, 118, 142, Quasi-exclusivité : 365 et s., 389, 391,
427, 503 et s, 565, 570, 572, 676 393
- de rémunération : 576
- de rendre compte : 89, 104, 126, 500
- de résultat : 530, 570
- ducroire : 531
- négative : de ne pas faire : 338, 362, R
556, 564 et s., 751
- passive : 808
Opposabilité : 480, 667 et s. Reconduction tacite : 195, 621, 622,
- absolue : 759 738, 740, 742, 784
- inconditionnelle : 732 Redevance : 440, 696, 708, 721, 724
Ordre public : 83, 133, 163, 181, 468 Refus : 102, 113
- économique : 691 - de qualification : 183, 297, 313
- international : 35 - de renouveler le contrat : 619, 630,
652, 665, 741
- de vente : 674
Rémunération : 93, 104, 132, 212,
283, 632
P - agent commercial : 298, 502, 576
- courtier : 283
- franchise : 446
- notion : 578, 579
Pluralité de mandats : 106 et s.
- VRP : 145
Pouvoir : 20, 27, 62, 63, 68, 100, 459,
Renouvellement : 739 et s., 783,
487, 527, 547, 586, 634, 660, 753,
Représentant commercial : 7, 30,
- de conclure : 25, 171, 174, 190, 196
252, 293, 539, 665, 733, 757, 770
et s.
- commerçant : 310, 323 et s., 333,
- de donner des ordres et des
533
directives : 95
- définition : 32, 43, 172
- de négocier : 191 et s., 319
- et agent commercial : 34, 36, 40, 42,
- du contrôle : 139
49, 73, 90, 126, 138, 140, 179, 206,
- public : 485
212, 260, 271, 277, 576
- représentatif : 275
-485-
REMERCIEMENTS .................................................................................................. 4
LISTE DES PRINCIPALES ABRÉVIATIONS ....................................................... 5
SOMMAIRE .............................................................................................................. 6
INTRODUCTION ..................................................................................................... 7
I. La définition d’intermédiaire ............................................................................... 13
II. La représentation et la notion du représentant commercial................................ 18
III. Les difficultés rencontrées ................................................................................ 33
IV. La problématique et l’annonce du plan ............................................................ 34
Le recours à l’intermédiation est pour les fabricants et fournisseurs un mode privilégié de commercialisation,
favorisant le recours à la représentation commerciale. Cette dernière occupe, notamment, une place prépondérante
dans la distribution internationale à travers surtout le mécanisme du mandat et de la commission. Est alors apparu, tant
en droit français qu’en droit libanais, la nécessité de protéger celui qui contribue au développement de la clientèle
d’autrui. Au Liban, un statut du représentant commercial a ainsi été créé par le décret-loi N. 34/67 sur le modèle
français de l’agent commercial. Mais le droit libanais est allé plus loin que son inspirateur puisqu’il a étendu la protection
à d’autres que le représentant commercial stricto sensu et, en particulier, le distributeur exclusif unique. L’étude se
propose d’analyser le statut libanais de représentant commercial au sens du décret-loi par une mise en perspective
avec le droit français.
The use of mediation is the preferred mode of marketing for both manufactures and suppliers resulting in the synthetic
use of the commercial representation. The latter occupies a preponderant place in international distribution especially
via the mechanism such as mandate and commission. From this grew the need in both French and Lebanese law, to
protect the parties who expand the client base on behalf of others parties. In Lebanon, a legal status was created for the
sales representative by decree-law N. 34/67 modelled on the french commercial agent. However, lebanese law went
further than its source of inspiration by exceeding the legal cover to include parties beyond the sales representative
stricto sensu and most significantly, the sole distributor of exclusive product. The purpose of this study is to analyze the
legal status in Lebanon of the sales representative as understood by the decree-law in comparison with its French legal
equivalent.
Discipline :
Mots-clés :
Agent commercial - Décret-loi N. 34/67 - Distributeur exclusif - Droit français - Droit libanais - Exclusivité –
Indemnité - Publicité - Représentant commercial
Laboratoire :