Affaires CAMES, La Vérité Par Les Faits
Affaires CAMES, La Vérité Par Les Faits
Affaires CAMES, La Vérité Par Les Faits
L’« Affaire des co-directions frauduleuses de Lomé » implique les Professeurs Dodzi
Kokoroko, Président de l’Université de Lomé et Dandi Gnamou, Juge à la Cour suprême
du Bénin. Cette affaire est relative à l’inscription de Mme Gnamou comme Professeur
Titulaire du CAMES. Que s’est-il passé ?
En principe, pour être inscrit sur les Listes d’aptitude aux fonctions de Professeur Titulaire,
le CAMES a imposé des conditions de temps (trois ans au moins dans les fonctions
de Maître de conférences), de publication (Trois articles au moins) et d’encadrement
(avoir dirigé au moins une thèse dans son Etablissement d’origine ou à défaut avoir co-
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dirigé au moins deux thèses dans une ou des Universités étrangères). Mais les textes du
CAMES précisent que l’on n’est autorisé à se prévaloir de co-direction qu’à 3 conditions
cumulatives à savoir, d’abord, que s’il n’existe pas d’école doctorale dans son Université
d’origine, ensuite, que la co-direction s’entend dès la première année d’inscription du
Doctorant en thèse et enfin, que la co-direction est sanctionnée par la signature d’une
convention de co-direction qui lie les deux Universités de provenance des co-directeurs ;
cette convention est déposée en plusieurs exemplaires dans les structures en charge de
la coopération des différentes Universités d’origine des co-directeurs.
Elle joue sur le fait que depuis la création des Universités publiques au Bénin, l’organisation
des Ecoles doctorales a toujours relevé des attributions des Universités et non du Ministère.
Ce n’est qu’à partir de 2012 que le Ministère de tutelle a décidé de les prendre en charge.
Ce qui fut fait une première fois en 2012 à la faveur de l’Arrêté N°2012-714/MESRS/CAB/DC/
SGM/DRFM/DGES/R-UAC/R-UP/SA du 31 décembre 2012 portant création, attributions,
organisation et fonctionnement des Ecoles et formations doctorales dans les Universités
nationales du Bénin et une deuxième fois en 2014, à la faveur de l’Arrêté N°745-2014/
MESRS/CAB/DC/SGM/DRFM/DGES/R-UAC/R-UP/R-UPA/SA du 29 décembre 2014.
Par ailleurs, même si par extraordinaire, elle soutenait que l’école doctorale de la Faculté
de droit et de science politique de l’Université d’Abomey-Calavi n’existait que depuis
2014, ce qui est une hérésie, encore fallait-il qu’elle apporta la preuve, d’une part, qu’elle
co-dirigeait ces thèses depuis la première année d’inscription en thèse des doctorants
togolais et, d’autre part, que ces co-directions ont été sanctionnées par des conventions
de co-direction dûment signées et déposées au sein des structures en charge de les
conserver. Or même là, les deux Professeurs mis en cause sont accusés de tricherie. Sur
la première condition, Madame Gnamou ne pouvait la remplir car pour être directeur
ou codirecteur d’une thèse, il faut être nécessairement Maitre de conférences ; elle ne
devint Maître de conférences qu’en 2013. De plus, pour être codirecteur, il faut l’être dès
la première année d’inscription.
La réalité qui fragilise le Président de l’Université de Lomé est que, contrairement aux
pièces délivrées à Madame Gnamou, les deux doctorants togolais se sont inscrits en
première année de thèse en 2008-2009 pour M. SAGBA Kossi et en 2011-2012 pour M. KINI
Efoé Koffi. Dans ces conditions, Madame Gnamou ne pouvait donc être leur co-directrice
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ni dès la première année ni à la deuxième année d’inscription puisqu’elle ne devient
Maître de conférences Agrégée qu’en novembre 2013. Elle n’était encore qu’assistante au
moment de l’inscription en première année de thèse des deux doctorants. De surcroît, à
ce jour, aucune convention de co-direction entre les Universités de Lomé et d’Abomey-
Calavi au sujet des deux thèses querellées n’est disponible dans les structures en charge
de la coopération.
Telles sont les charges qui pèsent sur Kokoroko et Gnamou dans le dossier des codirections
frauduleuses. Mais s’il ne s’agissait que de cela, on pourrait encore regarder si cela est
tolérable.
Mais là où les deux professeurs ont franchi le rubicond, c’est qu’ils ont été amenés, dans
une stratégie de défense devant la Commission d’éthique et de déontologie du CAMES, à
faire du faux et usage de faux et nous ne donnerons ici qu’un seul exemple. En effet, pour
faire croire que Madame Gnamou a dirigé les thèses controversées dès la première année,
conformément aux exigences du CAMES, Monsieur Kokoroko, Président de l’Université
de Lomé, a dû commettre une série de faux. Il a fait établir à Mme Gnamou, sa protégée,
de faux « certificats d’inscription en thèse de doctorat », signés le 09 Février 2018 de la
main de la Secrétaire générale de la Présidence de l’Université, Madame Akossiwa M.
E. Mensah Attoh. Il s’agit d’actes doublement faux parce que non seulement, ce sont des
actes établis sur papier sans entête, même pas sur entête de la Présidence de l’Université
de Lomé mais en plus et surtout parce qu’il ne revient pas à la Secrétaire générale de la
Présidence de l’Université de Lomé de délivrer de pareils documents : à l’Université de
Lomé, la délivrance de tels actes relève de l’attribution exclusive de la Direction des affaires
académiques et de la scolarité (DAAS). C’est préoccupant qu’un Président d’Université
et un juge à la Cour suprême s’adonnent avec autant de légèreté à la manipulation de
pièces administratives. Nous révèlerons dans les tous prochains jours d’autres pièces
administratives manipulées et d’autres actes faux que les deux Professeurs ont commis
pour tromper la vigilance du CAMES et obtenir au profit de Mme Gnamou, le grade de
Professeur Titulaire.
Pour finir, l’affaire dite des « codirections frauduleuses de Lomé » relève, d’une part, de
manquements aux textes du CAMES doublés, d’autre part, de faux et usage de faux. Mais
si ces manquements ont pu échapper aux deux rapporteurs qui ont instruit le dossier de
Madame Gnamou en 2018, pour des raisons à déterminer, il est surtout surprenant que
le collège des Professeurs titulaires en charge d’évaluer le dossier en plénière, ne s’en est
pas aperçu d’autant plus que le dossier avait fait l’objet d’une âpre discussion lors de la
session des Recteurs et Présidents d’Université tenue à Niamey. C’est donc à croire, au
regard des résultats, qu’il existerait au sein du Jury droit et sciences politiques, un
« réseau de passeurs clandestins » qui se croirait au-dessus des textes et du CAMES
lui-même.
En ce qui concerne l’affaire dite « Affaire plagiat de Salami », elle implique Ibrahim
Salami et Philippe Noudjènoumé, deux Professeurs béninois. Dans cette affaire, Philippe
Noudjènoumé accuse Ibrahim David Salami qui lui a succédé dans les fonctions de
Chef de département de droit public de la Faculté de droit et de science politique de
l’Université de Cotonou d’avoir non seulement volé sur son poste d’ordinateur de chef
de département dont il a hérité le fichier de son cours de droit administratif qu’il a
préparé et travaillé plus de dix ans durant, mais aussi et surtout de l’avoir publié sous
son nom sans son accord. Voilà donc les faits.
A l’appui, le Professeur Noudjènoumé dit tenir les preuves. Il brandit un premier ouvrage
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portant le seul nom du Professeur Salami, un autre ouvrage reproduit avec cette
fois-ci les noms du Professeur Noudjénoumé, le vrai auteur de l’ouvrage et celui du
Professeur Salami comme co-auteur. Les deux ouvrages parus la même année et à la
même édition. Monsieur Noudjènoumé qui a comparu devant la Commission d’éthique
et de déontologie à Ouagadougou aurait également produit à ses pairs l’original du cours
de droit administratif qu’il fait depuis 10 ans et qui est reproduit dans l’ouvrage plagié.
Dans ce dossier les Professeurs Adama Kpodar de l’Université de Kara et Meledje Djedjro
de l’Université d’Abidjan ont décidé d’entrer en intelligence pour bloquer l’inscription
du Professeur Ismaïla Madior Fall comme Professeur Titulaire. Pour parvenir à leur
honteuse fin, les deux Professeurs titulaires désignés en 2014 pour évaluer le dossier
du Sénégalais, ont produit des rapports aux contenus similaires. Le plus alarmant est
qu’ils ont produit contre toute attente, deux rapports comportant les mêmes phrases,
les mêmes paragraphes, les mêmes formules et reproduisant comme des copies
certifiées conformes, virgules et fautes y comprises. Cet état de chose indique que les
deux Professeurs Kpodar et Meledje se sont concertés et que l’un a écrit son rapport
qu’il a fait reprendre par le second par le jeu informatique du copier-coller. Alors qu’en
principe, les instructeurs n’ont pas le droit de se concerter au sujet des dossiers qu’ils
instruisent. Ils ne sont même pas censés se communiquer les noms des candidats dont
ils sont chargés d’instruire les dossiers.
Voici, là aussi, les accusations qui pèsent contre le Professeur Kpodar du Togo et le
Professeur Mélèdje de la Côte d’Ivoire. Ils devraient s’en expliquer devant la Commission
et prouver leur bonne foi. Mais, comme les Professeurs Dodzi Kokoroko, Dandi Gnamou
et Ibrahim David Salami, Kpodar et Meledje ont eux aussi choisi de se cacher derrière
l’écran de fumée « violation de la procédure », pour ne pas affronter leurs contradicteurs
qui affirment détenir les preuves de leurs forfaits.
Ces 5 Professeurs avaient ainsi l’occasion de présenter leur version, de confondre leurs
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accusateurs et de laver leur honneur. Au lieu de cela, à la surprise générale, ils ont
accepté de faire le déplacement de Ouagadougou aux frais du CAMES, mais au moment
d’accomplir la mission, ils prétextent de vices de procédure pour se débiner.
Voilà les comportements qui altèrent l’image du CAMES et dont les Avocats se pavanent
sur les plateaux de télévision et dans les studios radio, écrivent dans quelques journaux
et réseaux sociaux à la recherche d’une légitimité perdue de leurs clients : qu’ils cessent
de donner ce spectacle dans l’intérêt supérieur du CAMES, de son label et de son image.
A Ouagadougou, lors des auditions devant la Commission, seuls les Professeurs Dodzi
Kokoroko et Dandi Gnamou auraient comparu le premier jour. Mais tous les autres mis
en cause, pourtant présents à Ouagadougou ont refusé d’être écouté. En refusant de
comparaître, leurs avocats ont avancé des subterfuges tirés de la violation de règles de
procédure ou encore des droits de la défense.
Or, tout le monde sait, et eux les premiers, que la procédure devant les instances chargées
de l’éthique et de la déontologie n’a jamais été la même que celle de la justice d’Etat. Ce qui
importe le plus dans la justice éthique et de déontologie, c’est de savoir si l’acte incriminé
a été effectivement posé par son auteur. Les procédures, de même que les circonstances
dans lesquelles l’acte a été posé importent moins, même si la Commission en tient
compte dans une certaine mesure. Il en a toujours été ainsi devant le Conseil supérieur de
la Magistrature pour les Magistrats, des Conseils de l’ordre pour les Médecins, les Avocats,
les Huissiers, les Notaires et aussi des Enseignants du supérieur : les procédures devant
ces instances n’ont jamais été les mêmes que devant le juge judiciaire ou administratif.
Inutile de rappeler qu’il existe en gros trois types de justice, la justice d’Etat dite
traditionnelle, la justice d’éthique et de déontologie et la justice transitionnelle et
que les procédures devant ces trois types de justice n’ont jamais été les mêmes. Il est
donc surprenant que les Professeurs Kokoroko et consorts, tous Professeurs de droit
l’ignorent et refusent de comparaître devant une instance disciplinaire dont ils arborent
pourtant fièrement et pompeusement les grades.
De même, aux accusations de fond, ils ne répondent que par des arguments de
subjectivité. Quand on n’est pas jaloux d’eux, - alors même qu’ils n’ont encore rien fait de
leur vie qui inspire la jalousie -, ils font appel à des arguments relevant de la vie privée de
leurs collègues.
Enfin sur le faux fuyant des 5 Professeurs et contrairement à l’alibi de vice de procédure
que brandit l’Avocat, les 5 Professeurs mis en cause ont bel et bien été informés de ce
qui leur est reproché. Le CAMES leur aurait fait savoir en même temps qu’il en informe
les Recteurs ou Présidents des Universités dont ils sont originaires et les Ministres en
charge de l’Enseignement supérieur de leur pays. Certains parmi eux ont même envoyé
au CAMES leur mémoire en défense. Comment peuvent-ils avoir fait ça s’ils n’avaient
été informés des faits qui leur sont reprochés. C’est à se demander si les Professeurs en
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question ont tout dit à leur Avocat ou si c’est l’Avocat qui a choisi cette ligne de défense
en pensant que personne ne viendrait le contrarier.
Le CAMES, c’est un label d’excellence ; on ne peut donc y obtenir des grades par la faveur
et encore moins, on ne doit pas en faire un instrument de règlement de comptes et
d’humiliation des enseignants qui font les efforts qui leur sont pourtant demandés. Se
comporter ainsi qu’ils le font, défier les organes du CAMES, refuser de se soumettre à ses
règles et à ses instances, c’est fragiliser l’institution et salir son image du CAMES.
La leçon de cette série d’affaires est là. Quelles que soient les responsabilités que
l’on exerce, quelles que soient les relations politiques dont on peut se vanter avec le
pouvoir dans son pays, la communauté universitaire ne peut accepter qu’un groupe
d’enseignants se croit au-dessus des textes, défie frontalement les organes du CAMES
et mette en péril un label d’intégration régionale.
K. N. TCHALI