Le Crapaud, Corbière LL Rédigée
Le Crapaud, Corbière LL Rédigée
Le Crapaud, Corbière LL Rédigée
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Introduction
Tristan Corbière, poète français de la seconde moitié du 19ème s. Légèrement postérieur à
Baudelaire qu’il a forcément lu.
Les Amours jaunes : unique recueil publié en 1873 à compte d’auteur et passé
complètement inaperçu à l’époque. Révélé par Paul Verlaine ds son essai sur Les Poètes
maudits. Le titre est un clin d’œil aux Amours de Ronsard, ms affublé du qualificatif jaune >
couleur du rire amer (« rire jaune »), du cocufiage, de la lâcheté, des maladies du foie >
dérision ; les amours ne st pas sacrées ms empruntes de mesquinerie, de tromperie.
Corbière, maladif (atteint de tuberculose) et laid > malheureux en amour, le poète va mettre
toute son amertume ds ses vers.
Le Crapaud évoque l’animal rencontré à l’occasion d’une promenade en compagnie,
vraisemblablement, d’une femme. Le poème va ns le présenter, peu à peu, comme une
sorte de double de Corbière.
Structure
Sonnet à l’envers ms qui semble en partie respecter certaines règles de cette forme fixe.
On a d’abord les quatrains, puis les tercets (à l’inverse du schéma classique). Retournement
ms effet de chute ménagé.
Rimes embrassées ds les quatrains ms avec 4 rimes au lieu des 2 traditionnelles.
Rimes suivies ds 1er tercet et embrassées ds second tercet.
Poème en octosyllabes (alors que sonnet traditionnel en alexandrins)
ð Volonté de rompre ac la tradition tt en maintenant la forme fixe d’origine et ses
effets.
Plan :
1. Un cadre spatio-temporel énigmatique, v.1 à 3
2. Dévoilement progressif du crapaud, v.4 à 14
- Identité d’abord imprécise (v. 4 à 6)
- Identité ensuite dévoilée (v. 7 à 10)
- Un double du poète (v.11 à 14)
Problématique
Comment Corbière clame-t-il ici sa singularité identitaire et poétique ?
Analyse
1. Un cadre spatio-temporel énigmatique, v.1 à 3
Premier quatrain à la syntaxe déroutante. 3 phrases nominales, juxtaposées ; ponctuation
étonnante : points de suspension, v.1; tiret, vers 2 (dialogue ?). Lecteur plongé dans un
univers étrange ; l’accès au sens n’est pas facilité par la forme. Rythme haché. Sorte de
pointillisme descriptif. Atmosphère plus suggérée que véritablement décrite (impressions
visuelles et auditives), donc a priori symbolique. Atmosphère pesante (sans air ; plaque ;
découpures). Impression de claustration associée à l’idée de souffrance ms sans aucun
lyrisme. Paysage étouffant, funèbre, angoissant. Atmosphère paradoxale également, car
deux antithèses (chant vs sans air, ie silencieuse ? + métal clair vs vert sombre). Ambivalence
du décor bi-chromatique, propre à une nuit éclairée par la lune.
Paysage typique du romantisme ms traitement original par Corbière : volonté, chez lui, de se
placer en rupture avec ce mouvement, et surtout avec le topos littéraire de la promenade
amoureuse au clair de lune, puisqu’on va se rendre compte, par la suite, que le poète n’est
pas seul ms partage ce moment avec une femme.
Conclusion
Sonnet original tant dans la forme (sonnet renversé, retenue voire grande économie de
style) que dans le thème (un animal repoussant). Traitement tout aussi singulier et
provocateur du topos romantique de la promenade au clair de lune.
Volonté d’élever le laid au rang du beau et d’appeler le lecteur à se défaire d’un regard
superficiel sur les choses et les êtres.
Autoportrait en creux du poète : malgré son physique disgracieux, le mépris et la solitude
auxquels les autres (et notamment la femme) le condamnent, il reste un être supérieur par
ses qualités artistiques et intellectuelles.
Corbière, plus radicalement que Baudelaire peut-être dans L’Albatros, revendique ici sa
différence, sa singularité, son originalité.