La GRH Et Ses Parties Prenantes: Yves-Frédéric Livian, Professeur Émérite, IAE - Université Lyon II
La GRH Et Ses Parties Prenantes: Yves-Frédéric Livian, Professeur Émérite, IAE - Université Lyon II
La GRH Et Ses Parties Prenantes: Yves-Frédéric Livian, Professeur Émérite, IAE - Université Lyon II
Différents acteurs peuvent être recensés et apparaissent dans le schéma. L'entreprise n'est pas
totalement définie, elle est le résultat des interactions entre les acteurs, l'action n'est pas univoque, il
n'y a pas forcément consensus. Parmi ces différents acteurs, nous pouvons repérer, d'une part, les
acteurs dotés d'un pouvoir de décision, formalisant des stratégies, soit par leur position hiérarchique
ou leur rapport avec les autorités de tutelle et, d'autre part, les acteurs qui conseillent ou exécutent,
mais ne participent pas directement au processus de décision, mais qui sont chargés de la mise en
œuvre de ces décisions.
Il est également nécessaire d'effectuer une distinction entre la direction générale et la fonction RH,
d'abord parce que cette fonction RH ne fait pas forcément partie de la direction générale, mais aussi
parce qu'elle peut avoir ses intérêts propres et qu'elle cherche à faire partager à la direction générale.
La fonction RH permet parfois de soutenir des projets spécifiques ou de participer à un effort de
conviction. Par ailleurs, les représentants du personnel sont à distinguer du personnel. Ils expriment
des avis qui peuvent être en accord ou en décalage avec les opinions individuelles ou collectives du
personnel et cette représentation peut se faire de manière très diverse en allant de l'organisation de
l'arbre de Noël jusqu'à des situations où le comité d'entreprise intervient de manière beaucoup plus
ambitieuse.
Reprenons les dynamiques de chacun de ces acteurs internes.
Les directions générales
Les politiques et les pratiques de GRH sont très différentes selon les natures et la composition de la
direction. C'est vrai notamment dans les organisations privées selon la composition des directions
générales. La nature de cette direction varie en fonction de la structure du capital. Ainsi, nous pouvons
analyser la situation de la PME de nature familiale avec un dirigeant doté de l'intégralité du pouvoir de
décision. C'est dans ces structures que l'on peut trouver des pratiques de GRH très informelles, mais
parfois très innovantes. On trouve également dans cette catégorie des dirigeants qui ne
s'embarrassent pas forcément de préoccupations liées à la GRH en adoptant une attitude paternaliste
ou en commettant des abus de pouvoir.
À côté de ce type d'organisation, on peut trouver de moyennes entreprises avec un capital peu réparti,
organisations peu médiatisées et qui développent des politiques fondées sur une fidélité ou
ancienneté avec une attention portée aux compétences. Au sein de la grande entreprise, souvent
cotée en bourse, avec un fort turn-over des cadres dirigeants soumis à la pression des marchés
financiers et donc peu à même de développer des politiques de long terme. Les objectifs de la GRH
sont alors la flexibilité, avec la mise en place d'outils tels que les entretiens ou les politiques de
rémunération individualisée.
Cette amorce de typologie pourrait être complétée par d'autres formes d'organisations telles que les
entreprises publiques qui développaient des politiques fondées sur les statuts ou la bureaucratie et qui
recherchent aujourd'hui des politiques beaucoup plus managériales afin de moderniser leurs
pratiques. On voit bien au travers de cette énumération rapide qu'il y a des modèles très différents
suivant le type de direction générale. La répartition du pouvoir influence la nature des politiques de
GRH mises en œuvre.
L'encadrement (les cadres)
C'est un acteur de plus en plus flou et la catégorie est de plus en plus éclatée. L'encadrement est lui-
même composé de groupes très divers selon les diplômes, le sexe, l'âge ou les projets. Les politiques
sont alors développées autour d'une individualisation répondant à ces fortes disparités. Certains
membres vont chercher à jouer un rôle essentiel auprès des salariés dont ils ont la responsabilité,
d'autres au contraire vont intervenir uniquement par obligation en estimant que leur destinée est
ailleurs. La composition de l'encadrement, son engagement, sa capacité à intervenir dans le
processus de décision sont autant d'éléments déterminants.
Ces caractéristiques sont essentielles et influencent la nature des outils mis en œuvre, parce que
l'encadrement aura à utiliser ces outils (par exemple pour évaluer les salariés), mais également parce
qu'ils leur seront appliqués (dans leur propre évaluation). Les membres de l'encadrement sont de plus
en plus chargés de la gestion du personnel. Ce mouvement accompagne une certaine
décentralisation. Une décentralisation des responsabilités a eu lieu dans de nombreuses entreprises,
à tel point qu'un collègue a publié un ouvrage intitulé "Tous DRH" ! Ce sont les cadres qui recrutent,
font des propositions d'augmentation, gèrent (bien ou mal) les carrières. De ce fait, la dimension
personnelle de ces cadres joue un rôle certain : le style personnel de l'individu aura une répercussion
sur la qualité de son management, en dehors même de la politique officielle de l'entreprise.
Le rôle du DRH central est ainsi modifié et une multitude de cadres (chefs de services) assument tout
ou partie de la fonction GRH. La fonction est donc de plus en plus partagée et a un visage
extrêmement différent, selon la taille des entreprises et le rôle de l'encadrement. Cette variété
empêche la comparaison des outils mis en œuvre dans cette fonction. Cette fonction a évolué, pour
certains (optimistes) elle est de plus en plus stratégique, pour d'autres (pessimistes) elle devient de
plus en plus soumise à des pressions économiques fortes avec des marges de manœuvre qui se
réduisent.
La "fonction RH" n'existe, on le sait, qu'à partir d'une certaine taille d'entreprise. Quand elle existe de
manière autonome, elle est "partagée" avec l'encadrement. Bien sûr, son importance et son rôle
varient grandement, depuis le chef de personnel polyvalent de la PME locale jusqu'aux trois cents
spécialistes de la DRH Europe d'un grand groupe mondial ! C'est une fonction de plus en plus visible,
de plus en plus prestigieuse, de plus en plus "stratégique" diront les optimistes, mais aussi soumise à
des pressions politiques fortes.
Les représentants du personnel
Ils sont très inégalement représentés ou actifs (50% des établissements n'ont aucun représentant du
personnel) et ils vont de la puissante commission paritaire de la fonction publique qui influence
fortement les promotions jusqu'à des comités d'entreprise concentrés sur des activités annexes. Cette
influence affecte le choix des outils en fonction de leur implication. La gestion des compétences a
parfois été laissée de coté par ces représentants. Mais, cette implication se développe. Ainsi, certains
syndicats développent des analyses de l'entretien professionnel en indiquant aux salariés comment le
préparer ou comment s'y préparer.
Le personnel
Le personnel, quant à lui, est traversé par les évolutions et contradictions de la société en général. Il
devient de plus en plus difficile de prévoir ses comportements dans une société à fort individualisme
L'actionnaire
Quand on regarde le tableau de ces acteurs, le fait nouveau est incontestablement ce que certains ont
appelé le retour de l'actionnaire, pour les entreprises faisant appel au marché financier. Vous
connaissez le processus : des fonds d'investissement, devenus actionnaires, exigent une rentabilité
de 15/20 % par an. Cela aura comme conséquence (pour aller vite) de faire recentrer l'entreprise sur
ses activités les plus rentables, de développer la flexibilité de l'emploi et de développer la
rémunération variable. L'irruption de cet acteur aura aussi des conséquences sur les autres acteurs :
la direction est jugée sur ses résultats, l'encadrement est évalué, la fonction RH est orientée vers la
mise en œuvre de changements. Les représentants du personnel, quant à eux, peuvent parfois
répondre en faisant appel à des experts économiques en cas de menaces sur l'emploi.
Cette "orientation actionnaire" est très forte dans les entreprises liées au marché financier et leur fait
adopter des pratiques de GRH assez voisines. Cette influence exercée par les actionnaires explique
les stratégies de recentrage sur les métiers en gardant les activités rentables et en sous-traitant les
activités annexes. Ces stratégies affectent directement la GRH d'abord parce que la recherche de
résultat est observée à tous les niveaux avec le développement d'indicateurs et de pratiques
d'évaluation, parce que la flexibilité est renforcée et également parce la rémunération variable
s'accroît. Le développement de cet acteur influence donc le comportement des autres acteurs. En
général, l'emploi est considéré comme une variable d'ajustement, l'encadrement est de plus en plus
jugé sur les résultats.
Les acteurs externes