Programme de Radio Rurale 2008 - 04 LA MICROFINANCE

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Programme de Radio Rurale

2008/04

LA MICROFINANCE
Le CTA est financé par
l’Union Européenne

Le Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA) a été créé en 1983


dans le cadre de la Convention de Lomé entre les États du Groupe ACP (Afrique,
Caraïbes, Pacifique) et les pays membres de l’Union européenne. Depuis 2000, le
CTA exerce ses activités dans le cadre de l’Accord de Cotonou ACP-CE.

Le CTA a pour mission de développer et de fournir des services qui améliorent


l’accès des pays ACP à l’information pour le développement agricole et rural, et
de renforcer les capacités de ces pays à produire, acquérir, échanger et exploiter
l’information dans ce domaine.

La Radio rurale
La radio demeure, malgré l’essor des nouvelles technologies de l’information, l’un
des outils de communication parmi les plus importants dans les communautés
rurales ACP.

Le CTA a commence à soutenir la radio rurale en 1991. Depuis, chaque année,


une série de packs de radio rurale (PRR) est produite. Chaque pack concerne un
sujet spécifique, du stockage des récoltes aux petits ruminants en passant par le
manioc et la fertilité des sols. Le choix des sujets dépend des suggestions de nos
partenaires ACP. 62 packs sont disponibles. Chaque pack comprend du matériel
radio sur le sujet concerné, des interviews sur cassette ou CD, une transcription
des interviews et un dossier d’introduction pour le présentateur, des documents
complémentaires et un questionnaire pour les utilisateurs afin de recueillir leur
commentaires.

Vous pouvez trouver la plupart des packs sur le site web des PRR,
http://ruralradio.cta.int/.

CTA
Postbus 380
6700 AJ Wageningen
Pays-Bas

Site Web : www.cta.int

Le CD peut être utilisé dans un lecteur de CD normal mais il contient


également, sous forme de fichier PDF, les scripts des émissions et autres
documents écrits ainsi que le questionnaire de feedback.
Programme de Radio Rurale

2008/04

LA MICROFINANCE

ACP-EU Centre technique de coopération agricole et rurale (CTA)


Postbus 380, 6700 A J Wageningen, Pays-Bas
Tél (31) (0) 317 467100 - Fax (31) (0) 317 460067
http://www.cta.int

produit pour le CTA par WRENmedia


Fressingfield, Eye, Suffolk, IP21 5SA, R.-U.
Tél (44) (0) 1379 586787 - Fax (44) (0) 1379 586755
CTA
Programme de radio rurale - 2008/04

La microfinance
Fiche technique
Introduction 1
Sujets traités dans cette série d’émissions 2
Comment utiliser cette série d’émissions 8
Aspects non traités dans cette série d’émissions 10
Sites web et articles en ligne 11
Bibliographie 13

1. La microfinance, une panacée contre la pauvreté ? 7’38 15


Un microcrédit octroyé au bon moment peut permettre à un ménage
pauvre de décoller mais de nombreuses critiques ont été formulées.

2. Les caisses communautaires : solidarité et sécurité de placement 5’45 19


Pour les petites commerçantes des marchés, les tontines ne sont pas toujours
la solution idéale et les caisses communautaires sont plus sûres.

3. Les mutuelles : l’intéressement des membres 7’40 21


Dans les mutuelles, le capital détenu appartient aux membres et ils en sont
aussi les gestionnaires. Nous découvrons l'une de ces mutuelles au Bénin.

4. Un produit phare : le crédit « warrantage » 5’17 25


Une technique de crédit où l’agriculteur offre sa récolte en gage du
remboursement d’un prêt sollicité pour financer le début du cycle
de production.

5. Une innovation : le « linkage banking » 5’49 27


Une innovation qui consiste à « lier » (link) le système bancaire et les
groupements féminins. L'un des principes essentiels est un compte pour
un client mais avec plusieurs bénéficiaires : les membres du groupement.

6. Un partenariat original entre la microfinance et les producteurs 7’35 29


Face à la pénurie de crédit, les organisations paysannes peuvent offrir
elles-mêmes un crédit ou mettre en place un partenariat avec une institution
de microfinance existante comme avec la CCI au Cameroun.

7. D'autres innovations en microfinance : les crédits pèlerinage et


scolarité 3’32 33
La microfinance diversifie de plus en plus ses services en proposant des
transferts d’argent, des assurances ou des crédits nommément
destinés à un usage spécifique : c’est le cas de la MECREF au Niger.

8. La formation, un outil essentiel de bonne gouvernance 5’18 35


Les clients des institutions de microfinance sont souvent analphabètes et
éprouvent des difficultés à gérer leurs crédits. Il leur est donc proposé
des formations qui contribuent aussi au bon fonctionnement de l’institution.

9. Fonds de garantie et cautions solidaires, tout le monde y gagne 5’59 39


Il est dans l’intérêt des paysans de s’organiser pour obtenir un prêt et
l’établissement d’un fonds de garantie créé par les membres du groupe
fera une impression favorable auprès de l’institution de microfinance.

10. Le rôle de l’Etat : établir une réglementation plus stricte 6’32 41


Malgré la libéralisation du secteur de la microfinance, l’Etat a toujours un
rôle capital à jouer : il lui revient d’assainir un secteur où la
réglementation n’existe pas ou n’est pas appliquée.
CTA

Programme de radio rurale – 2008/04

La microfinance

FICHE TECHNIQUE

Introduction
La plupart des paysans des pays en développement sont exclus des systèmes
bancaires. Les taux de bancarisation du monde agricole ne dépassent pas 5 ou
6% en Afrique ou en Asie du Sud. Malgré la forte contribution du secteur agricole
dans le PIB des pays en voie de développement les plus pauvres, l’offre de
services financiers aux agriculteurs est encore très insuffisante.

Dans les pays de l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest africaine), une
étude sur le financement du monde rural réalisée en 2000 montre que seulement
14% de l’offre globale de crédit va au secteur agricole. Un trait marquant est que
92% de cette offre provient du secteur commercial, loin devant les banques de
développement (5%) et les institutions de microfinance (3%), dont l’offre est
essentiellement concentrée sur le crédit à court terme (Lesaffre, 2000).

La microfinance : de quoi s’agit-il ?


Pour beaucoup, et pour le grand public en particulier, la microfinance se confond
avec le microcrédit. Elle désigne les dispositifs permettant d’offrir de très petits
crédits (microcrédits) à des familles très pauvres pour les aider à exercer des
activités productives ou génératrices de revenus et développer ainsi leurs très
petites entreprises.

Mais avec le temps et le développement de ce secteur particulier de la finance


partout dans le monde (y compris dans les pays développés), la microfinance
s’est élargie pour inclure désormais une gamme de services plus étendue :
épargne, assurance, transfert d’argent, s'adressant aussi à une clientèle plus
vaste. Dans ce sens, la microfinance ne se limite plus aujourd’hui à l’octroi de
microcrédits aux pauvres mais consiste bien à fournir un ensemble de produits
financiers à tous ceux qui sont exclus du système financier classique ou formel.

Le client type des services de microfinance est une personne dont les revenus
sont faibles et qui n’a pas accès aux institutions financières formelles faute de
pouvoir remplir les conditions exigées par ces institutions (documents
d’identification, garanties, dépôts minimaux, etc.). Il mène généralement une
petite activité génératrice de revenus dans le cadre d’une entreprise familiale de
faible envergure. Dans les zones rurales, ce sont souvent de petits paysans ou
des personnes possédant une petite activité de transformation alimentaire ou un
petit commerce. Dans les zones urbaines, la clientèle est plus diversifiée : petits
commerçants, prestataires de services, artisans, vendeurs de rue, etc. Ils sont
généralement désignés par le terme de microentrepreneurs et la plupart d'entre
eux travaillent dans le secteur informel ou non structuré. C’est donc aux individus
qui composent ce segment de marché exclu ou mal servi par les institutions
financières classiques (banques, assurances) que s’adresse la microfinance. Mais
au cours des cinq dernières années, les institutions de microfinance ont

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La microfinance
commencé à « recruter » des clients différents, tels que des petits fonctionnaires,
notamment en zone urbaine.

Il existe quatre « courants » ou catégories d’institutions impliquées dans la


microfinance :
• Le premier, d’inspiration plus coopérative, met en place ou renforce des
organisations populaires où les microentrepreneurs sont à la fois épargnants
et emprunteurs du système. Sa spécificité est de vouloir construire des
institutions en se basant sur leurs bénéficiaires. Il s’agit des mutuelles et des
caisses communautaires.
• Le second consiste à transformer des banques existantes pour que leur
activité cible les microentrepreneurs.
• Le troisième engage des ONG ayant pour vocation de servir elles-mêmes
d’intermédiaires financiers. On a ainsi vu la création d’ONG de
microfinancement qui, après s’être procuré des fonds par des donations ou
des emprunts, octroyaient elles-mêmes des crédits aux microentrepreneurs.
Dans ce dernier cas, l’accent a surtout été mis sur l’octroi de crédit car la
collecte de l’épargne est généralement interdite aux ONG.
• Depuis une dizaine d’années à peine, il existe aussi des cas de banques
privées à vocation commerciale qui, pour des raisons de stratégie propre, se
sont orientées vers la microfinance.

Sujets traités dans cette série d’émissions


1. Le pour et le contre de la microfinance
Dans l’interview n°1 « La microfinance, une panacée contre la pauvreté ? », il est
surtout question des critiques que suscite de plus en plus la microfinance, pour
contrecarrer un peu la ferme croyance de nombreux économistes, à savoir que la
microfinance permettrait de guérir pratiquement tous les maux et de vaincre la
pauvreté.

Il est certain qu’en augmentant leurs revenus, les microcrédits donnent aux
pauvres la possibilité de démarrer une activité alors que les banques dites
« classiques » refusent de prêter. Par là même, la microfinance encourage
l’entreprenariat. Mais comme l’explique l’expert interrogé dans l’interview No 1,
les institutions de microfinance demandent de plus en plus de garanties, comme
un titre foncier, ce qui est difficile en région rurale.

De plus les taux d’intérêt sont élevés alors que les taux de rémunération de
l’épargne sont faibles : fournir des services financiers à des personnes à revenus
modestes revient cher, particulièrement en proportion des montants des
transactions concernées. Mais les alternatives de prêt dont disposent les couches
les plus pauvres – prêteurs sur gages, usuriers du secteur financier informel -
sont beaucoup plus pénalisantes : les taux d'intérêt dans le secteur informel
peuvent atteindre 20% par jour pour certains vendeurs sur le marché.

Pour les avocats inconditionnels de la microfinance, elle constitue un puissant


instrument d’émancipation et de changement social en permettant aux femmes,
en particulier, de devenir des agents économiques du changement ; les revenus
générés par leur activité contribuent aux revenus des ménages, et par là même à
la sécurité alimentaire, à l'éducation des enfants et à la prise en charge des soins
de santé. Mais c’est sans compter sur le poids des traditions, surtout dans les
zones rurales où les femmes ne peuvent pas obtenir de prêts sans l’autorisation
de leurs maris et où l’avaliseur exigé est souvent le mari lui-même !

Il existe aussi de nombreux problèmes au niveau du remboursement : comme


tout crédit, le microcrédit doit être remboursé. Il nécessite donc au niveau de

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La microfinance
l’emprunteur une bonne capacité de remboursement, une aptitude qui bien
entendu s’amoindrit si la personne est très pauvre, sans revenus fiables pour lui
permettre de rembourser un prêt. C'est d'autant plus vrai si, comme c’est le cas
en région rurale, la garantie est la prochaine récolte et que celle-ci est mauvaise.
L'octroi d'un prêt à de tels individus risque alors plutôt d’aggraver leur situation
d’endettement et de pauvreté.

Les mesures d’accompagnement, telles qu'une formation minimum, sont


rarement prévues pour accompagner les prêts. Or s’il s’agit de gens très pauvres,
ils sont souvent analphabètes et ne sauront pas forcément gérer le prêt ni la
nouvelle activité ; ils ne réussiront en définitive qu’à s’endetter davantage.

Enfin, la microfinance en situation d’urgence ne marche que très rarement :


victimes d’inondations ou d’autres catastrophes naturelles, réfugiés fuyant les
conflits, chômeurs, ce sont autant de types d’individus se trouvant dans des
situations de précarité que les gouvernements et les organisations internationales
ont tenté d’aider par le microcrédit depuis que celui-ci a été présenté comme un
excellent outil de réduction de la pauvreté. Il est cependant très rare que les
programmes de microcrédit conçus pour ce type de situation fonctionnent : ils
enregistrent des taux d’impayés ou de non remboursement très élevés car
l’utilisation dirigée et descendante de la microfinance pour résoudre des défis de
développement dans des situations où la base de la subsistance des populations
est détruite ne marche pas. Comme le dit l’expert interviewé, « Il faut d’abord
s’assurer que les gens sont stables sur le plan social avant de commencer un crédit ».

2. Les mutuelles de crédit et d’épargne et les caisses communautaires


Il s’agit des institutions les plus courantes et ce sont celles auxquelles on pense
immédiatement lorsqu’on parle de microfinance. Elles appartiennent à la première
catégorie décrite plus haut, le « courant coopératif » appelé aussi « institutions
de microfinance de type mutualiste » : ce sont des organisations dont les clients
sont également les propriétaires et elles font l’objet de deux interviews dans cette
série : l’interview n°2 « Les caisses communautaires : solidarité et sécurité de
placement » et l’interview n°3 « Les mutuelles : l’intéressement des membres ».

Comme on l’apprend dans ces deux interviews venant l’une du Mali (interview
n°2) et l’autre du Bénin (interview n°3), les clients-propriétaires de ces
institutions sont unis par des liens particuliers : ils vivent dans la même région,
sont employés par la même entreprise ou ont la même activité, appartiennent à
la même collectivité ou ont d’autres affinités. Les membres disposent des mêmes
droits de vote, indépendamment des parts de capital qu’ils détiennent. Ces
institutions offrent des prêts mais il est intéressant de noter que dans les deux
cas, pour ces mini-entrepreneurs, le fait de disposer d’un endroit sûr où déposer
son argent et de pouvoir épargner de façon régulière est tout aussi important car
cela leur permet de réduire les risques et de planifier leurs investissements.
Comme le dit le directeur de la mutuelle interrogé dans l’interview n°3 : « Au lieu
de laisser l’argent dans un trou ou dans une bouteille ou bien pour éviter la
disparition par le vol ou par incendie, cette population à la base préfère venir
placer l’argent chez nous ».

Dans les deux interviews, on apprend aussi que les problèmes auxquels sont
confrontés ces institutions sont identiques, même si la base de la clientèle est
sensiblement différente : de petits paysans et commerçants pour la mutuelle
béninoise (interview n°3) et des femmes du marché pour la caisse
communautaire bamakoise (interview n°2). Ces problèmes sont essentiellement
une demande de crédit supérieure à la disponibilité financière de ces institutions,
le manque d’éducation de base des membres qui provoquent souvent des
carences en gouvernance et des impayés relativement fréquents. Dans les deux

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La microfinance
interviews, il est intéressant de relever qu’étant donné qu’il s’agit d’institutions de
proximité qui reposent sur une organisation sociale élargie au sein d’une
communauté où tout le monde se connaît, les problèmes de remboursement se
résolvent grâce à des mécanismes de pression sociale ou bien des structures
informelles présentes au sein de la communauté.

3. Les innovations et les produits phares en matière de microfinance


Les institutions de microfinance offrent traditionnellement une gamme de produits
assez restreinte, en général un seul type de prêt qui permet aux membres d’
emprunter un montant compris entre trois et cinq fois le solde de leur compte
d’épargne. Comme cette offre n’est pas suffisamment souple pour répondre aux
divers besoins de crédit des membres (nécessité pour un entrepreneur de
financer son fonds de roulement à court terme ou pour un petit producteur
d’acheter des intrants agricoles, par exemple), de nombreuses institutions de
microfinance ont entrepris de diversifier leurs produits et d’innover. Cette série
vous propose donc quatre interviews passant en revue certains aspects
innovants de la microfinance : « Un produit phare : le crédit « warrantage »
(interview n°4) , « Une innovation : le « linkage banking » (interview n°5), « Un
partenariat original entre la microfinance et les producteurs » (interview n°6) et
« D'autres innovations en microfinance : les crédits pèlerinage et scolarité »
(interview n°7). Voyons dans le détail ce que contiennent ces interviews.

• Le crédit « warrantage » (interview n°4)


En 1999, le Projet Intrants de la FAO avait entamé au Niger une expérience de
financement des intrants à partir du « warrantage » des récoltes, ou crédit
garanti par un stock. Il s'agit d'une technique de crédit (en anglais « inventory
credit » : littéralement, crédit sur inventaire) qui se base sur une garantie
constituée par un stock de produits agricoles susceptible d’augmenter en valeur.

La technique adoptée notamment par la mutuelle ASUSU, dont on peut entendre


le directeur dans l’interview n°4, consiste à aider le petit producteur, à travers
l’organisation de producteurs à laquelle il appartient, à commercialiser plus tard
et à meilleur prix ses produits agricoles tout en disposant de liquidités (crédits)
pour subvenir à ses besoins ou développer une activité rentable juste après la
récolte. En bénéficiant du différentiel de prix entre la période de récolte et la
période de soudure, le producteur acquiert ainsi la capacité financière d'acheter
au comptant des intrants, sans altérer le maigre budget du ménage. Cette
disponibilité financière permet aussi, pour les organisations de producteurs, de
structurer la demande en intrants en la rendant solvable, prévisible et groupée.

En général l’institution de microfinance exige un entreposeur agréé pour


conserver les récoltes mais de plus en plus, au Niger, le « warrantage » repose
sur la « détention communautaire » : les producteurs réunis en organisations
pysannes (OP) stockent une partie de leur production dans un magasin approprié
qui leur appartient. Le producteur individuel n’a pas accès directement au crédit
de stockage en «warrantage » car c’est son OP qui emprunte auprès de
l’Institution de microfinance et qui sous-distribue le crédit à ses membres.
Ensuite l’institution financière vérifie la quantité, la qualité et le mode
d’entreposage des produits stockés par l’OP et ses membres ainsi que les normes
du magasin (capacité, salubrité et sûreté), consulte les prix sur le marché et
octroie à l’OP un crédit d’un montant équivalant à 80 % de la valeur du stock.

L’OP partage alors le crédit ainsi reçu entre ses membres en fonction de la
contribution de chacun au stock mis en garantie. Chaque paysan reçoit donc
l’argent de sa récolte comme s’il l’avait vendue -mais il ne l’a pas vendue.
L’opération de crédit de stockage en « warrantage » est dite « nouée ». Avec cet
argent, le paysan peut financer une activité génératrice de revenus ou une

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La microfinance
dépense sociale. Quelques mois après, le producteur rembourse son crédit et
l’institution libère le stock qui, entre temps, a augmenté de valeur. L’opération est
alors « dénouée ». Le crédit se noue au moment où les prix sont au plus bas et se
dénoue au moment où les prix ont augmenté significativement. L’opération dure
généralement quelques mois (trois à six mois) et se situe entre deux cycles
saisonniers de production agricole.

Il faut noter que malgré les avantages que présente le « warrantage », son
développement ne dépend pas seulement de la simple volonté des principaux
acteurs ; il reste encore, dans le contexte de la pauvreté, tributaire d’appuis
extérieurs (besoins croissants en formation, en infrastructures
de stockage et en financement).

• Le « linkage banking » (interview n°5)


C’est une innovation mise au point par l’AFRACA (Association africaine de crédit
rural et agricole) qui regroupe des banques centrales, des banques commerciales,
des banques agricoles, des institutions de microfinance et des programmes
nationaux qui sont impliqués dans le financement du développement agricole et
rural en Afrique.

Le « linkage banking » est également un mot d’origine anglaise qui signifie lien,
un lien qui est établi entre le système bancaire et les groupements
d’autopromotion féminins. Il se traduit par un couplage entre le crédit et
l’épargne dans ses trois dimensions : l’épargne immédiate, l’épargne libre et
l’épargne échelonnée. Le « linkage » repose sur le principe d'un compte et d'un
client avec plusieurs bénéficiaires (les membres du groupement). Cette formule
signifie que la banque n’a qu’un seul interlocuteur, le groupement.

Au Sénégal, la CNCAS (Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal) a lancé


son programme Linkage en 2003. Mais ce programme n’est pas exclusivement
réservé à l’agriculture et aux populations rurales. Le « linkage » finance
également des activités de commerce général ou d’artisanat aussi bien en ville
qu’à la campagne. De plus les hommes ne sont pas à proprement parler exclus de
ce système. Certes, le « linkage banking » s’adresse plus particulièrement aux
femmes mais ceci est tout simplement dû au fait, comme le précise la personne
interviewée, que « les femmes étaient traditionnellement la population exclue du
système bancaire, donc c’est une porte qui devrait permettre à cette couche de la
population d’accéder à des services financiers ; mais si, dans une zone rurale,
nous constatons qu’au sein d’un groupe il y a des hommes, nous ne les faisons
pas sortir du groupe pour éviter de créer des distorsions sur le plan social » .

• Partenariat entre microfinance et producteurs (interview n°6)


On assiste de plus en plus à des alliances stratégiques entre les acteurs de la
microfinance traditionnels et les secteurs agricole, financier ou agro-industriel,
mais également avec d’autres acteurs comme les banques, les organisations de
producteurs ou encore les secteurs privé et public. Il s’agit donc de nouveaux
partenariats dont les règles sont souples et évoluent tout le temps.

Ainsi, au Cameroun, la CCI, ou Caisse Communautaire de Crédit, a adopté une


stratégie qui limite ses risques financiers tout en garantissant aux producteurs de
maïs l’accès aux intrants et à un marché stable : la CCI identifie les filières
agricoles rentables et sélectionne en fonction de cela les partenaires qui vont
contribuer au système et lui apporter sa crédibilité (fournisseurs d’intrants,
prestataires de services, transformateurs, etc.). La ligne de crédit n’est pas
versée directement à l’emprunteur mais les services rendus comme l’assistance
technique et l’accès aux intrants sont directement facturés à la CCI qui sera
remboursée au moment de la vente de la récolte.

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La microfinance
• Des crédits spécifiques : pèlerinage et scolarité (interview n°7)
Il s’agit dans cette interview de simples exemples de crédits ciblés sur un usage
spécifique, l’un pour le pèlerinage à la Mecque et l’autre pour payer la scolarité
des enfants. Ce qu’il faut remarquer ici, c’est que ces crédits sont donc accordés
pour des dépenses et non pas pour des activités génératrices de revenus comme
c’est quasiment toujours le cas pour les crédits accordés par les mutuelles ou les
caisses mutualistes. Malheureusement le journaliste n'a pas cherché à savoir ce
qui a motivé cette déviation de la norme et poussé cette mutuelle à accepter de
financer ce genre de crédits.

4. La formation
Cet aspect un peu en marge de la microfinance proprement dite est pourtant très
important car il favorise la transparence et la crédibilité des institutions ; il est
traité dans l’interview n°8 « La formation : un outil essentiel de bonne
gouvernance » et il est aussi mentionné en détail dans l’interview n°2 « Les
caisses communautaires : solidarité et sécurité de placement » par la présidente
d'une telle caisse, qui reconnaît que la formation des employées de son
établissement laisse sérieusement à désirer.

Dans les coopératives d’épargne et de crédit, mutuelles villageoises, caisses


communautaires ou populaires, beaucoup de clients sont analphabètes et
éprouvent donc des difficultés à gérer leurs crédits. Pour pallier à cette difficulté,
ces institutions offrent des formations simples à leurs épargnants et leurs
membres. C’est le sujet de l’interview n°8. Les épargnants tirent profit de ces
formations et en plus, les taux de remboursement sont généralement bien
meilleurs quand la personne qui emprunte a un minimum de connaissances en
gestion, comptabilité et planification financière.

Les formations plus poussées sont pratiquement inexistantes car elles coûtent
très cher et sont donc au-dessus des moyens des caisses communautaires. Elles
ne s’adressent plus aux clients mais aux conseils d’administrateurs, aux bureaux
exécutifs et au personnel de ces institutions qui est composé de bénévoles issus
des membres et élus par eux mais le plus souvent dépourvus de la formation
nécessaire en gestion. À mesure que se développent ces institutions, il ne suffit
plus de simplement tenir un cahier de caisse ou un registre de recettes et de
dépenses, il faut réaliser des opérations plus complexes et risquées qui
nécessitent des gestionnaires professionnels.

De plus les réseaux de coopératives d’épargne et de crédit des pays en


développement ne sont pas encore supervisés et réglementés comme ils
devraient l’être par les pouvoirs publics, ce qui permettrait de repérer, d’éviter et
de résoudre nombre des problèmes communs à ces institutions. Les organismes
publics chargés de superviser les coopératives d’épargne et de crédit sont
souvent les mêmes que ceux qui s’occupent des coopératives non financières,
comme les coopératives agricoles ou de vente, par exemple. Ces organismes
publics n’ont ni les compétences financières ni l’indépendance politique requises
pour surveiller efficacement ces intermédiaires financiers.

5. Fonds de garantie et caution solidaire pour les organisations


paysannes
Face au vide laissé par le désengagement de l’Etat, les organisations paysannes
(OP) ont mis au point des stratégies d’accès aux services financiers. Parmi elles,
la stratégie d’alliance avec une institution de microfinance est souvent la voie
privilégiée adoptée mais dans la pratique, l’interaction entre OP et institution de
microfinance s’avère difficile : les contraintes de rentabilité imposent aux
institutions de microfinance d’appliquer des taux « élevés » par rapport à la

PRR 2008/04 6
La microfinance
rentabilité des activités agricoles financées et cela constitue l’une des principales
pierres d'achoppement du dialogue entre les institutions de microfinance et les
OP.

Si une organisation de producteurs parvient à mettre en place un fonds de


garanties bas sur un cautionnement solidaire, il est certain que ceci
impressionnera favorablement l’institution de microfinance, comme on peut le
constater dans l’interview n°9 « Fonds de garantie et cautions solidaires, tout le
monde y gagne ». L’interview propose deux exemples, l’un au Cameroun, l’autre
en République centrafricaine.

On parle beaucoup de « caution solidaire » en microfinance car les organisations


de producteurs en font beaucoup usage : le groupe qui se porte caution peut être
appelé à payer à la place de l'emprunteur dès que ce dernier est défaillant. De
plus, lorsque plusieurs personnes sont cautions solidaires, elles garantissent
ensemble le créancier et chacune d'entre elles est engagée pour le tout. Pour
l’institution de microfinance, la socialisation du risque est une excellente affaire
puisqu’elle aboutit à reporter ce risque et une partie du suivi des crédits sur le
groupe de caution solidaire. Beaucoup des paysans réunis au sein d'une OP feront
donc tout pour qu’un mauvais payeur ne compromette pas l’accès au crédit du
groupe : ils paieront la dette à la banque et exerceront les pressions sociales
nécessaires à l’intérieur de leur groupe de caution mutuelle pour récupérer la
dette.

Mais les limites de ce système sont très vite atteintes. Par exemple, si la
défaillance ne vient pas d’une mauvaise volonté, mais d’une impossibilité réelle
de rembourser par suite de mauvaise récolte (matériel d’irrigation tombé en
panne, par exemple), il faut alors que le groupe obtienne de la banque
l’annulation de la dette ou son report sur l’année suivante. Si ces facilités ne sont
pas obtenues, la dette est « socialisée ». Le groupe rembourse à la place de celui
qui est défaillant. Ceci se traduit par une perte de revenus, provisoire ou
définitive, pour l’ensemble du groupe. Si ces défaillances sont trop nombreuses,
elles font éclater le groupe.

6. Le rôle de l’Etat
Jusqu’au début des années 80, les gouvernements estimaient généralement de
leur devoir et de leur responsabilité de prendre une part active au financement du
développement, en conduisant par exemple de vastes programmes de crédit pour
les populations défavorisées et en particulier rurales. En fait il existe très peu
d’exemples où le crédit distribué aux pauvres par l’Etat ait été vraiment un
succès. On a donc assisté à la fermeture des banques publiques de
développement et à la libéralisation du secteur puisque la tendance consiste à ne
plus intervenir directement mais plutôt à faire appel à des opérateurs privés
spécialisés en microfinance.

Mais la libéralisation de ce secteur, outrancière dans certains cas, a conduit à un


manque de réglementation et donc à la pagaille. Les états s’efforcent maintenant
de rectifier le tir un peu partout en Afrique, et notamment au Bénin où a été
réalisée l’interview n°10 « Le rôle de l’Etat : établir une réglementation plus
stricte ». Une nouvelle loi y est discutée en ce moment même par les
parlementaires béninois pour assainir le secteur et resserrer la vis. C’est ainsi que
dans ce pays a été créé un Ministère de la microfinance et qu'il y existe un
consortium de praticiens, une sorte d’association professionnelle qui donne du
sérieux à l’activité, mais rien n’oblige les institutions à en faire partie.

PRR 2008/04 7
La microfinance
Comment utiliser cette série d’émissions
Comme toujours, les interviews que nous vous proposons ne sont que des
exemples de ce qui se fait dans certains pays et sur certains aspects de la
question mais la série n’est pas exhaustive. Nous vous recommandons donc de
compléter ces interviews par des informations plus spécifiques à votre contexte
local ou par d’autres interviews ou débats sur certains aspects qui peuvent ne pas
être traités ici.

1. Le pour et le contre de la microfinance


La question ici est de savoir si, comme l’affirment beaucoup de partisans et
notamment beaucoup d’experts de la Banque mondiale, l’usage des microcrédits
est vraiment le meilleur moyen de combattre la pauvreté. Cette interview est un
bon point de départ pour un débat à organiser en studio car elle traite de
nombreux aspects de cette question. Cependant, pour une question de temps
essentiellement, l’interview proposée traite surtout des critiques formulées contre
l’usage excessif de la microfinance comme panacée pour tous les maux des
pauvres et comme solution au développement. Dans un débat organisé sur les
ondes de votre station, il conviendrait donc d’avoir des partisans de la
microfinance et des exemples d'endroits où elle a vraiment fait une énorme
différence mais aussi d’inviter des experts qui peuvent parler des limites de la
microfinance et des difficultés que connaît ce domaine à l’heure actuelle. Toute la
série se fait l'écho de ces deux aspects qui ne sont pas aussi contradictoires qu’il
y paraît au premier abord car l'excès est bien dans l’affirmation que la
microfinance est une panacée et non pas dans l’assertion qu'elle peut être source
de grands progrès.

2. Les mutuelles de crédit et d’épargne et les caisses communautaires


Il existe littéralement des centaines de ces mutuelles, caisses communautaires,
caisses villageoises dans chacun de vos pays. Il n'est donc pas nécessaire d'en
interviewer davantage que celles des deux interviews proposées, qui se
concentrent sur leurs caractéristiques, leur raison d’être et leur création, ainsi que
sur les principales difficultés auxquelles elles sont confrontées. Mais c’est dans ce
dernier domaine que ces deux interviews pourraient certainement être
complétées car en fait ces difficultés sont mentionnées tout au long de la série
(carences de la gouvernance, réglementation et supervision inadaptées, offre de
produits restreinte, financement extérieur dommageable) et une interview
récapitulative décrivant aussi les solutions possibles serait intéressante et utile à
vos auditeurs.

Une autre interview de complément pourrait porter sur les grands principes sur
lesquels devrait se fonder la mise en place d’une initiative de microfinance pour
garantir sa réussite. Il serait intéressant que l'interview d'un expert en
microfinance à ce sujet apporte les réponses suivantes :
• Cibler les plus pauvres ;
• Mobiliser l’épargne (les clients sont plus concernés et engagés dans les
initiatives de leur institution s’il s’agit de leur propre argent et non de
ressources extérieures) ;
• Etablir des taux d’intérêt réalistes et donc plus élevés que les taux des
banques commerciales car l'administration de nombreux microprêts est
coûteuse, mais il est nécessaire d’expliquer cela aux membres ;
• Faire une étude de faisabilité avant la mise en route pour connaître la
population-cible, l’économie locale, les coûts de transport pour les agents
et l’importance de la zone à couvrir ;
• Simplifier et décentraliser au maximum les opérations et les procédures
administratives et éviter les paperasseries inutiles (grâce aux ordinateurs
….quand c’est possible !) ;

PRR 2008/04 8
La microfinance
• Cibler les femmes : ce sont elles les plus pauvres, leur taux de
remboursement est bien plus élevé et elles utilisent les prêts à des fins
altruistes beaucoup plus que les hommes ;
• Evaluer le fonctionnement de l’institution de façon régulière, ce qui évite
de continuer dans l’erreur et améliore le produit final et la confiance des
usagers ;
• Investir dans la formation en gestion, comptabilité et marketing tout
spécialement, ce qui améliore la confiance des clients ;
• Eviter de dépendre de fonds extérieurs : ces fonds peuvent aider au
démarrage mais l’institution doit devenir autosuffisante par souci
d’efficacité et d’autonomie.

3. Les innovations et les produits phares en matière de microfinance


C’est sur cet aspect particulier que votre apport personnel peut être très utile
pour compléter la série. Il existe de nombreux produits spécifiques dans votre
pays particulier et si vous pouviez faire quelques recherches sur Internet, vous
pourriez prendre connaissance de ce qui se fait dans certains pays anglophones,
comme par exemple la microfinance par téléphone portable, au Kenya, qui
permet à une personne d'acheter des liquidités « électroniquement » (= par sms
sur son portable) à la Centrale Vodafone qui déduit la somme de son compte et
crédite le compte du bénéficiaire de la somme achetée, ce dont il est informé
également par sms. Tout se passe par téléphone portable et la personne n’a donc
besoin ni d’avoir un compte en banque ni de liquide puisqu'elle crédite son
compte auprès d’agents de la compagnie mère qui passent de village en village.
C’est le même principe en fait que les cartes de téléphone qu’on peut acheter
partout en Afrique mais là il s’agit de transferts d’argent à un individu ou un
service de l’Etat.

Le crédit « warrantage », qui se pratique au Niger et dont il est question dans


l’interview n°4, est traité de façon très succincte. Elle mériterait d'être complétée
car ces crédits de stockage en « warrantage » existent dans d’autres pays avec
certaines adaptations. Il y a d’autre part beaucoup d’aspects qui ne sont pas
traités dans l’interview proposée, par exemple le fait que ces crédits s’appliquent
surtout aux céréales qui peuvent se conserver aisément ; il faudrait donc trouver
comment les adapter aux produits périssables mais de gros rapport : de plus en
plus, en effet, les produits des cultures de rente (niébé, souchet, sésame, poivron
sec, oignon…) prennent de l’ampleur dans les stocks de « warrantage », à cause
de leur forte valeur marchande, de l’existence de nombreux débouchés
d’écoulement, du fort différentiel de prix observé pour la plupart de ces produits,
malgré quelques problèmes techniques de production pour certains (conservation
pour l’oignon) et/ou de stockage pour d’autres (oignon, niébé…).

L’aspect formation des personnes responsables n’est pas non plus traité, ni les
difficultés qui peuvent surgir pour trouver un financement pour construire le
magasin de stockage des récoltes garantissant le prêt. En effet il conviendrait de
mentionner que dès la création des prêts « warrantage », la FAO avait prévu
d’accompagner et de formaliser le développement de ce type de crédit en
concevant des modules de formation et en assurant le suivi-évaluation d’un grand
nombre d’opérations. Elle était donc parvenue à déceler les dérives possibles et
avait proposé de nouvelles règles appropriées, jusqu’à l’élaboration et l’édition
d’un guide en la matière, présentant quelques règles et recommandations.
L’interview d’un expert de la FAO sur ce sujet serait particulièrement
intéressante.

Dans les interviews que vous pourriez faire concernant les crédits destinés à un
emploi particulier (pèlerinage, scolarité, épargne pour l’habitat, etc.), il faudrait
savoir comment l’institution de microfinance s'assure que cet argent est employé

PRR 2008/04 9
La microfinance
à cet effet. Cette question n'est pas traitée dans l’interview proposée dans cette
série or il est connu que certains crédits sont détournés à des fins sociales, pour
les enterrements ou les dots, par exemple. Les institutions de microcrédit exigent
donc de plus en plus de garanties pour éviter ce genre de détournements. D’autre
part, la plupart des mutuelles et caisses exigent que les crédits soient utilisés
pour des activités génératrices de revenus ; on peut donc se demander ce qui
pousse certaines autres institutions à accepter des crédits ayant tout à fait
d’autres buts.

4. La formation
Cet aspect est traité de façon sommaire dans la série et porte sur la formation de
base des clients. Il serait intéressant de le compléter en traitant des formations
plus sophistiquées qui sont généralement financées par des organismes
internationaux : il conviendrait d'inviter un représentant d’un de ces organismes
et de lui demander exactement en quoi consiste la formation offerte ; cela serait
d’un grand intérêt pour les auditeurs.

5. Fonds de garantie et caution solidaire pour les organisations


paysannes
Un débat qui réunirait en studio les représentants de plusieurs organisations
paysannes pour comparer la façon dont elles ont réussi, ou non, à constituer un
fonds de garantie, les difficultés rencontrées et les solutions trouvées, serait sans
doute l’occasion de discussions fort animées et passionnantes. Pour maintenir un
équilibre, il conviendrait d’inviter aussi quelques représentants des institutions de
microfinance car elles se verraient sans aucun doute critiquées publiquement et il
est indispensable de leur donner un droit de réponse.

6. Le rôle de l’Etat
Là aussi, c’est une interview complémentaire qu’il convient de faire car les
législations particulières à chaque pays sont toutes en pleine évolution. Faire le
point avec un député et un représentant du Ministère de tutelle aiderait les
auditeurs à savoir où ils en sont et ce qu’il faut attendre de l’Etat.

Autres aspects non couverts dans cette série d’émissions


Vous pouvez envisager de couvrir ces sujets en complément à cette série :
Pour les deux premiers aspects, il faut en effet se rappeler que la microfinance
représente de nos jours bien plus que l’accord d’un simple crédit.
• La microassurance
Consulter :
http://www.microfinance.lu/comas/media/introduction.pdf
http://www.institut-thomas-more.org/showNews/179
http://www.institut-thomas-more.org/pdf/121_fr_NoteITM11Fr.pdf

• Les envois de fonds/ transferts d’argent


Consulter :
http://www.esf.asso.fr/portail/IMG/Rapport_RFM_SC1_fr.pdf

• L’histoire de la microfinance
La microfinance a déjà une longue histoire depuis ses débuts au
Bangladesh avec la Grameen Bank mais aussi avec sa renaissance dans
les pays développés en passant par les multiples tontines en Afrique : des
leçons peuvent être tirées de ces différentes expériences.
Consulter :
http://www.globalenvision.org/library/4/1051/

PRR 2008/04 10
La microfinance
Sites web et articles en ligne
Il existe littéralement des centaines de sites et de liens en ligne sur la
microfinance. En voici quelques-uns parmi les plus incontournables :

www.lamicrofinance.org
Le portail francophone de la microfinance, reflétant les problématiques, intérêts
et expériences propres. Le portail offre un accès unique et convivial aux
informations francophones de la microfinance : des actualités aux savoirs, en
passant par les outils pratiques, les expériences, les événements, les emplois du
secteur, le portail est conçu pour répondre au besoin d'informations centralisées
des acteurs francophones de la microfinance.

http://www.microfinancegateway.org/
Ce site est une collaboration entre le CGAP (le groupe consultatif d'assistance aux
plus pauvres) et ELDIS, un portail de développement basé à l'institut d'études
internationales du Sussex (Grande-Bretagne). Il est l'équivalent anglophone du
site précédent. Son objectif est d'être un centre d'information sur la microfinance,
qui soit également un lieu d'échanges d'idées et de ressources entre les acteurs.

http://www.microfinance-platform.eu/
L'objectif principal de ce site est de faciliter les échanges d'information et de
promouvoir la coopération entre les différents acteurs européens impliqués dans
la microfinance dans les pays en développement. Le réseau compte aujourd'hui
86 membres qui incluent des banques et des institutions financières, des
organismes publics, des ONG, des agences de conseil, des chercheurs et
universités. Un certain nombre de groupes de travail permettent des échanges et
la production de travaux communs à différents acteurs européens (épargne des
migrants, innovations en finance rurale, performances sociales, etc.).

http://www.cerise-microfinance.org/presentation/index.htm
Le réseau CERISE a été initié en 1998 par quatre organismes français travaillant
en appui aux institutions de microfinance dans les pays du Sud : le CIDR (Centre
international de développement et de recherche , le CIRAD (Centre de
coopération internationale en recherche agronomique pour le développement,
Montpellier), le GRET (Groupe de recherche et d'échanges technologiques, Paris)
et l'IRAM (Institut de recherches et d'applications des méthodes de
développement, Paris). Le CNEARC a rejoint CERISE en 2004.

http://www.ilo.org/public/french/employment/finance/index.htm
Site du BIT (Bureau international du travail), une agence des Nations-Unies qui
traite des questions relatives au travail : création d'entreprise, emplois,
migrations, intégration sociale, etc. On trouve sur le site des articles, documents
de discussion, comptes rendus d'ateliers sur les activités de la SFU : facteurs
sexospécifiques et microfinance, fonds de garanties, ressources des migrants,
sécurisation des prêts, microfinance en pays post-conflit, etc. Le BIT appuyant le
travail du PASMEC, on trouve également des informations sur les bases de
données en microfinance en Afrique de l'Ouest.

http://www.capaf.org
Le CAPAF (Programme de renforcement des CAPacités des IMF en Afrique
Francophone) veut renforcer les capacités des prestataires privés nationaux pour
satisfaire durablement la demande croissante de formation et d'assistance
technique des IMF en Afrique francophone. Le CAPAF est une initiative conjointe
du CGAP et du Ministère français des affaires étrangères. Il propose un ensemble
de publications et d'outils pratiques qui peut intéresser le public.

PRR 2008/04 11
La microfinance
http://www.did.qc.ca/
Développement international Desjardins (DID) est une société canadienne
spécialisée dans l'appui technique et l'investissement dans le secteur de la finance
communautaire dans les pays en développement et en émergence. DID appuie
actuellement des organisations dans une vingtaine de pays d'Afrique, d'Amérique
latine, des Antilles, d'Asie, d'Europe centrale et de l'Est.

http://www.esf.asso.fr/
Le Forum Finances et Développement est développé, alimenté et animé par
l’association Epargne Sans Frontière, avec l’appui financier du Ministère des
affaires étrangères. Des rubriques thématiques : microfinance, mésofinance,
assurance et microassurance, co-développement, systèmes financiers et
boursiers, dette, puissance publique et développement, vous fournissent des
outils, des ressources et des informations.
http://www.fao.org/ag/ags/subjects/fr/ruralfinance/index.html
On trouve sur ce site de la FAO des informations sur « Micro-banker », un logiciel
conçu pour automatiser les opérations bancaires dans les IMF, des publications
(téléchargeables) de l'initiative conjointe FAO/GTZ sur le financement de
l'agriculture, des bibliographies sur le financement rural et des publications de la
FAO sur ce sujet, à commander.

http://www.planetfinance.org
PlaNet Finance est une Organisation internationale à but non lucratif (créée en
1998), dont l'objectif est de contribuer au développement du secteur de la
microfinance. Pour cela PlaNet Finance soutient les institutions de microfinance en
renforçant leurs capacités, en participant à leur évaluation, à leur rating et à leur
refinancement. PlaNet Finance a quatre pôles autonomes spécialisés, présentés
sur le site : le pôle Technologies, le pôle Savoirs, le pôle Rating et le pôle
Financement.

http://microfinancement.cirad.fr
Ce site spécialisé sur le thème du microfinancement est mis en œuvre par le
GRET et le CIRAD. Son objectif est de faciliter l'échange d'informations en
microfinance. Le site propose un certain nombre de documents de référence
classés par thème, un répertoire d'organismes, des fiches analytiques sur une
dizaine d'IMF, un glossaire français/anglais et la traduction française d'outils du
CGAP sur les systèmes d'information, audits, plans de développement des IMF.

http://www.interaide.org/pratiques/pages/urbain/credit/credit.htm
Pratiques est un réseau d'échanges d'idées et de méthodes pour des actions de
développement. La capitalisation porte sur différents thèmes d'actions de ces
ONG (social, santé, éducation, emploi, etc.) et en particulier sur les activités
d'épargne-crédit. Sur ce dernier thème, différentes fiches d'expériences, des
synthèses de rencontres et des outils peuvent être téléchargés. On trouve aussi
une brève bibliographie commentée et une page de liens.

www.sosfaim.be (Belgique) et www.sosfaim.org (Luxembourg)


Ces deux ONG sœurs travaillent depuis de nombreuses années dans le domaine
de la microfinance et appuient les démarches de partenaires engagés dans ce
secteur en Afrique. Comme tout outil de développement, la microfinance doit être
interrogée dans ses finalités, ses modalités et ses conditions de mise en œuvre.
C'est dans cet esprit que SOS Faim publie notamment " Zoom Microfinance ",
téléchargeable en français sur le site de SOS Faim Belgique.

PRR 2008/04 12
La microfinance
Bibliographie

L'assurance et les institutions de microfinance


Guide technique - CF Churchill - 2004 – International Labour Organisation

Quelle microfinance pour l’agriculture des pays en développement ?


Synthèse du colloque organisé par FARM - Solène Morvant-Roux, février 2008

De la Finance Informelle à la microfinance


Michel Lelart. Editions des Archives contemporaines (2005)

La microfinance en questions
Marc Labie. Editions Luc Pire (1999)

Manuel de microfinance. Une perspective institutionnelle et financière


Joana Ledgerwood. Banque mondiale (1999)

Le rationnement du crédit dans les pays en développement


Anne Joseph. Editions L'Harmattan

Questions clés en matière de microfinance et orientations pour l'avenir


Sylvain Larivière, Frédéric Martin et François Ethier.
Université de Laval, Belgique (1998)

Banquiers aux pieds nus : la microfinance


Jean Michel Servet. Edition Odile Jacob (2006)

Le guide de la microfinance. Microcrédit et épargne pour le


développement
Sébastien Boyé, Jérémy Hajdenberg, Christine Poursat et Maria Nowak
(Préfacier). Edition d'Organisation (2006)

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La microfinance
PRR 2008/04 14
La microfinance
La microfinance
« La microfinance, une panacée contre la pauvreté ? »

Introduction suggérée
« La microfinance est un des meilleurs moyens d’aider les pauvres à sortir de la
pauvreté ». C’est une déclaration qu’on entend beaucoup de nos jours dans les
milieux politiques et économiques et les institutions internationales en ont même
fait une quasi-panacée. Mais est-ce vraiment le cas ? Il arrive souvent en effet
qu'un microcrédit octroyé au bon moment puisse permettre à un ménage pauvre
de « démarrer » une microentreprise alors que les banques dites « classiques »
refusent de lui accorder un prêt. La microfinance peut donc permettre, en créant
des entreprises viables, d’encourager l’entreprenariat. De plus la microfinance
peut constituer un puissant instrument d’émancipation et de changement social
en permettant en particulier aux femmes de devenir des agents économiques du
changement. Pourtant la microfinance et les institutions qui la pratiquent ont fait
l’objet de beaucoup de critiques dans les cinq ou six dernières années, comme
l’exigence de garanties pour des populations qui ne peuvent les fournir ou des
taux d’intérêt très élevés. Alors qu’en penser ? Quelques éléments de réponse
avec Nazaire Sado, un expert-consultant béninois en microfinance qui répond aux
questions d’Euloge Aidasso.

Début de la bande : « Les structures de microfinance, c’est vrai, exigent de plus en…»
Fin de la bande : «…parce que sur la base de quoi elles vont prendre des garanties ? »
Durée de la bande : 7’38
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Sado Les structures de microfinance, c’est vrai, exigent de plus en plus de
garanties mais elles sont vraiment moins exigeantes que les banques :
Quand on dit microfinance, ce n’est pas seulement les petits crédits, 100
000 francs, 200 000 francs, 50 000 francs. Pour ce type de crédit, on peut
se passer de garanties réelles mais il faut dire aujourd’hui qu’il y a
certaines structures de microfinance qui donnent jusqu’à quarante millions;
donc dans ces conditions on ne peut pas appliquer les mêmes règles c’est-
à-dire éviter totalement de prendre des garanties réelles et ceux qui n’ont
pas accès aux banques, ce n’est pas seulement les plus pauvres ou les
pauvres qui n’ont pas accès aux banques, il y a d’autres agents
économiques qui, bien qu’ils aient les capacités qu’il faut, n’ont pas accès
aux banques parce que justement ces banques demandent par exemples
des garanties qui ne sont pas souvent disponibles. Lorsqu’on prend par
exemple les titres fonciers que les banques demandent en général comme
garanties, ces titres fonciers n’existent pas parce qu’à peine 10% des
terres sont immatriculées. Or les structures de microfinance essayent de
s’adapter à la situation et n’exigent pas souvent de titres de propriété
appelés titres fonciers mais peuvent exiger des titres comme la convention
de vente simple.

Aidasso Au même moment, on entend dire que les taux d’intérêt sont élevés alors
que les taux de rémunération de l’épargne sont faibles…

Sado Quand on compare, il faut dire que le taux le plus élevé est celui du
secteur informel qui peut aller jusqu’à 10% par jour, ce qui fait 300% par
mois et lorsqu’on prend les structures de microfinance, ce taux est de 2%
au plus par mois, donc le taux de crédit est de 24% par an et quand on
prend l’épargne, elle est rémunérée environ à 3 ou 4 % ; donc ce
différentiel-là, permet de faire face aux charges, c'est-à-dire les coûts
d’approche, et les structures de microfinance dépensent beaucoup parce

PRR 2008/04 15
La microfinance
que pour placer 10 000 francs de crédit, ce sont les mêmes énergies qu’on
dépense pour placer 200 000 francs de crédit par exemple. Donc la
structure de microfinance est vraiment obligée d’augmenter le taux du
crédit par rapport au crédit parce que des études ont montré que ce n’est
pas la rémunération de l’épargne qui intéresse en premier lieu le pauvre
mais c’est plutôt le fait d’accéder au placement de son argent auprès d’une
structure de microfinance qui l’intéresse en premier lieu.

Aidasso Il y a aussi le problème du remboursement. Dans le monde rural, il y a les


aléas climatiques …

Sado J’aimerais préciser que la microfinance est d’origine rurale, hein, c’est né
en milieu rural d’abord mais on constate aujourd’hui que la microfinance
s’urbanise de plus en plus, c'est-à-dire quitte ce milieu rural pour des
raisons bien précises : en venant dans les milieux périurbains ou dans les
villes, il y a beaucoup plus de monde, les gens ont des revenus un peu plus
élevés donc la structure de microfinance recrute souvent des petits
fonctionnaires comme clients. C’est pour équilibrer ses charges que la
structure de microfinance est obligée de quitter le milieu rural où il y a
tellement d’aléas comme vous-même vous venez de le dire, la peste des
animaux par exemple, tout ça fait que vraiment les structures de
microfinance ne financent pas véritablement aujourd’hui le monde rural.
Pour que les structures de microfinance puissent ajuster leurs taux
d’intérêt afin que ces derniers puissent être supportés par les activités
rurales, il faut nécessairement qu’il y ait des appuis au niveau de la
puissance publique qui seule a les moyens de faire en sorte que dans le
milieu rural, là où il y a de hauts risques, on puisse vraiment amoindrir
suffisamment ces risques-là.

Aidasso Les autorités font de la microfinance un outil de changement social,


notamment au niveau des femme,s mais il y a aussi le poids de la tradition
dans les pays africains qui fait que cela pose véritablement un problème,
d’abord par rapport à l’octroi de crédits et surtout par rapport au
remboursement.

Sado Il faut dire que les femmes … c’est vrai, il y a le poids des traditions, il faut
que le mari soit informé du crédit que vous prenez, tout ça … Il y a des
maris qui vont jusqu'à voler l’argent de leurs femmes pour les empêcher
de développer des activités génératrices de revenus. Donc effectivement il
y a ce poids-là mais il faut dire que les structures de microfinance sont
vraiment conscientes de cela et souvent prennent les dispositions qu’il faut
pour diminuer ces pesanteurs …

Aidasso L’autre aspect aussi c’est le coté de la formation. En principe ces


institutions de microfinance, après avoir accordé des prêts, devraient
s’assurer que ceux qui bénéficient de ces crédits sont à même de mener à
bien les activités pour lesquelles les crédits ont été accordés mais ce n’est
souvent pas le cas.

Sado C'est-à-dire, ce n’est même pas après la mise en place des crédits qu’il
faut faire la formation, c’est avant … pour s’assurer que les fonds qui
seront mis en place seront bien gérés par le pauvre qui prend le crédit
mais il y a une contingence fondamentale à ce niveau, c’est que les
formations coûtent de l’argent donc tout ça, là, vient augmenter le coût du
crédit. Les structures de microfinance, ayant de plus en plus de difficultés à
équilibrer leurs charges parce que faisant face à énormément de dépenses
liées aux coûts d’approche, ont des problèmes pour financer ce genre de
formation. Et justement c’est cet aspect qui doit être financé par les
puissances publiques mais il faut dire que les structures de microfinance en
général, avant de placer les crédits, essayent de faire de leur mieux :
d’abord elles donnent une rapide formation pour s’assurer que le système
de caution solidaire est bien maîtrisé par les femmes, deuxièmement elles
donnent une formation légère pour s’assurer que, bon, les femmes

PRR 2008/04 16
La microfinance
maîtrisent la comptabilité élémentaire, recettes, dépenses et puis solde
pour dégager un revenu, économiser quelque chose pour pouvoir
rembourser deux semaines ou un mois après ; donc il y a une formation
rapide pour s’assurer du retour de l’argent mais ce n’est souvent pas une
formation très dosée parce que ça coûte de l’argent et les structures de
microfinance en général n’ont pas suffisamment de moyens pour faire face
aux besoins réels en matière de formation de ces groupes-cibles.

Aidasso Il y a ce qu’on appelle aussi la microfinance en situation d’urgence, c'est-à-


dire quand il y a des catastrophes naturelles, quand il y a par exemple des
inondations, le cas des chômeurs, des réfugiés et consorts. Est-ce que
vous avez connaissance de ces cas, de ces systèmes de microfinance ?

Sado On croit que la microfinance peut régler tous les problèmes, or la


microfinance ne peut vraiment opérer efficacement que lorsqu’il y a
vraiment une base minimum. Lorsqu’on est dans un cas d’urgence, je ne
vois pas pourquoi il faut introduire la microfinance. Il faut d’abord s’assurer
que les gens sont stables sur le plan social avant de commencer le crédit.
Souvent les puissances publiques et même les organismes internationaux,
tels que les Nations Unies, pensent que bon, les réfugiés, il faut leur
donner du crédit pour qu’ils puissent créer des activités génératrices de
revenus, en ignorant que ces réfugiés sont dans un autre pays et, étant
dans un autre pays, leur fragilité augmente et les structures de
financement ne les acceptent pas parce que sur la base de quoi, elles vont
prendre des garanties ? Fin de la bande

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La microfinance
PRR 2008/04 18
La microfinance
La microfinance
« Les caisses communautaires : solidarité et sécurité de placement »

Introduction suggérée
On associe souvent la microfinance traditionnelle avec la création d’une tontine
entre femmes. Mais pour de nombreuses petites commerçantes des marchés
africains, les tontines exigent souvent trop d’argent chaque semaine ou chaque
mois. Il existe donc un autre niveau informel, basé sur la solidarité et la
souplesse de fonctionnement, à savoir de petites caisses communautaires qui
n’ont pas de statuts officiels mais où les femmes peuvent disposer d’un endroit
sûr pour déposer leur argent, épargner de façon régulière de toutes petites
sommes tout en recevant des intérêts (contrairement aux tontines traditionnelles)
et emprunter en évitant les taux exorbitants des usuriers. Une telle caisse
communautaire créée de façon informelle est la Caisse Djigui Sigui, au marché de
Médine à Bamako, au Mali. Sa présidente répond aux questions de Mamounia
Coulibaly.

Début de la bande : « Je suis Madame Sanogo, Adjamoui Sanogo. Je suis …»


Fin de la bande : «…ça tue le commerce des femmes ! »
Durée de la bande : 5’45
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Sanogo Je suis Madame Sanogo, Adjamoui Sanogo. Je suis commerçante de mère
en fille et j’ai fait mes premiers pas au marché, je n’ai pas fait beaucoup
d’école et je suis la présidente d’une caisse microfinance, aujourd’hui
agréée par l’Etat, qui a débuté comme caisse communautaire entre nous,
les femmes, qui avons pu avoir des magasins, qui avons pu avoir des
grands étals pour appuyer les entrepreneurs qui venaient et qui avaient
besoin de petites sommes. On a cotisé, chacune des femmes a cotisé
10 000 francs CFA et avec 10 000 francs CFA, on a donné les crédits à à
peu près une dizaine de femmes, de 25 000. On faisait le crédit à des
jeunes femmes qui venaient au marché, qui n’avaient pas de fonds. Et il y
avait des jeunes filles aussi qui venaient, les recalées des écoles. Alors les
grossistes leur donnaient à crédit les marchandises pour aller détailler. Bon
il y en avait qui se révoltaient, qui ne venaient pas rembourser les
grossistes. Alors on s’est réuni, on a dit, bon, on va créer une caisse.
Maintenant au lieu qu’on leur donne des marchandises à crédit, elles
viennent à la caisse, elles prennent l’argent à crédit et maintenant elles
vont payer les marchandises au comptant et c’est comme ça qu’on a
commencé. Et il y a une ONG qui s’est intéressée au projet en 93, ils ont
su que nous faisions cette caisse communautaire-là, ils nous ont
encouragées et on a commencé avec une somme de 250 000 CFA comme
ça avec les cotisations de nous-mêmes et jusqu’à cinq, six millions.

Coulibaly Et combien de temps il vous a fallu pour mettre en place la caisse ?

Sanogo Bon, on n’avait pas eu l’idée de chercher un agrément et de faire une


caisse officialisée, quoi. Sinon, quand vous comptez 1992 à 2004, c’est à
peu près quinze ans après qu’on a cherché l’agrément pour être reconnu
par l’Etat comme caisse de microfinance, ce qu'on appelle aujourd’hui
caisse de microfinance. Bon maintenant il y a beaucoup de caisses mais
nous, notre caisse on a commencé en 92. Au moins il nous a fallu une
dizaine d’apprentissages d’abord. On a été formé dans le tas … Il est vrai
qu’ un fonctionnaire peut venir gérer la caisse, un financier peut venir
gérer la caisse mais c’est nous, les femmes, qui connaissons quels sont les
produits qui existent dans cette période-là et quels sont les produits
périssables. C’est pour cela qu'avec notre caisse, on n’a pas eu de

PRR 2008/04 19
La microfinance
problèmes pendant tout ce temps-là. On a eu des petits problèmes avant
mais on a su les corriger et la caisse n’a jamais eu de difficultés de
paiement et jusqu'à aujourd’hui on est en train de faire des crédits et on
tourne aujourd’hui à plus de 50 millions de CFA.

Coulibaly Et quelles sont les valeurs traditionnelles qui ont prévalu à la mise en place
de la caisse, avant même que ça ne soit officiel ?

Sanogo Les tontines, ça c’est les grandes commerçantes qui pouvaient rentrer là
dedans. Maintenant faire crédit avec intérêt, les tontines ne faisaient pas
les intérêts et nous avons commencé à faire du crédit. On donnait le crédit
à 5% parce que c’était notre argent et les femmes étaient invitées à venir
payer et sinon vous étiez invitée dans les assemblées générales et la
femme était vraiment dénigrée dans les assemblées générales jusqu'à ce
qu’elle évite de venir et une délégation partait alors la voir chez elle. C’est
comme ça qu'on a pu faire marcher notre caisse. Et il y a un suivi de près,
la fiche qui est devant moi, ça c’est le suivi de près. Alors le suivi de près,
chaque semaine il y a un compte rendu. Chaque lundi, les gens du suivi de
près se réunissent pour rendre compte de ce que l’emprunteur du crédit a
fait de ce que on lui a donné comme argent et si le crédit est bien géré et
si elle a utilisé vraiment le montant dans son entreprise et comment ça a
marché ou ça n’a pas marché. Comme ça nous avant que l’argent ne soit
perdu à 100 %, on trouve des gens expérimentés pour s’occuper d’elle. Ça
c’est le suivi de près.

Coulibaly Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées en mettant en place
cette caisse-là?

Sanogo Il y avait des manques de formation parce que nous on n’était pas formé
pour gérer une caisse. Avant d’avoir une expérience comme aujourd’hui,
on avait besoin vraiment d'une telle formation. Alors on a eu à bénéficier
de quelques formations des élues de la caisse et des formations aussi des
personnels de la caisse et on avait ce problème-là. Et certaines formations,
ça coûte très cher. On a besoin vraiment de caissières bien expérimentées,
bien formées en gestion, en tenue de caisse et en informatique mais on n’a
pas les moyens.

Coulibaly Quelles sont les ambitions de la caisse ?

Sanogo Notre ambition est de couvrir le Mali avec cette caisse qui prête à coût
moindre aux femmes et qui est gérée par les femmes et créée par les
femmes. Nous nous connaissons entre nous et c’est pour cela qu'on a fait
cette caisse-là parce que nous ne voulons pas prêter à un taux trop
exorbitant parce que tout le monde dit que la microfinance ça demande
beaucoup de gestion mais nous, nous voudrions que notre caisse soit
gérée comme nous l’entendons et qu’on n’ait pas à faire trop de frais là-
dessus et pour ça, il faut que les femmes elles-mêmes, les élues et les
adhérentes de la caisse soient les gestionnaires de la caisse. Et comme ça
on va payer moins de frais et les crédits n’auront pas à coûter beaucoup
d’intérêts parce que trop d’intérêts sur les crédits, ça tue le commerce des
femmes ! Fin de la bande

PRR 2008/04 20
La microfinance
La microfinance
« Les mutuelles : l’intéressement des membres »

Introduction suggérée
Il existe plusieurs « courants » ou catégories d’institutions impliquées dans la
microfinance. Parmi elles la première catégorie est d’inspiration plus coopérative
car elle met en place ou renforce des organisations populaires où les
microentrepreneurs sont à la fois épargnants et emprunteurs du système. Elles
portent différents noms selon le pays : mutuelles d’épargne et de crédit, caisses
populaires, banques villageoises, caisses villageoises, coopératives d’épargne et
de crédit, mais leur spécificité est toujours la même : le capital détenu appartient
aux membres. Dans cette interview nous allons rencontrer Monsieur Ahomagnon
Venance, directeur d’une de ces mutuelles, la MEPEC ou Mutuelle d’épargne et de
prêts pour l’épanouissement communautaire, située à Tankpé dans
l’arrondissement de Godomey, dans le sud du Bénin. Il répond aux questions de
Félix Houinsou.

Début de la bande : «Notre activité principale ici c’est la collecte …»


Fin de la bande : «…est supérieure à notre disponibilité financière. »
Durée de la bande : 7’40
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Ahomagnon Notre activité principale, ici, c’est la collecte des épargnes et l'octroi de
prêts à la population. Pour l’épargne, il y a plusieurs produits : nous avons
l’épargne à vue, c'est-à-dire que ce qu'on dépose, on peut venir le
chercher à tout moment, le placement aussi que nous appelons compte
bloqué dans notre jargon ordinaire et nous avons aussi les tontines
journalières que chaque membre peut venir déposer, ne serait-ce que 100
francs, 200 francs etc. Nous avons la tontine hebdomadaire, ça là c’est par
semaine, nous avons la tontine mensuelle et c’est ces épargnes que nous
collectons pour consentir des prêts à nos sociétaires.

Houinsou Est-ce que vous pouvez nous dire comment est née l’initiative de création
de cette mutuelle d’épargne ?

Ahomagnon C’est dans les villes que l’on constate qu’il y a beaucoup de banques, il y a
beaucoup d’institutions financières et les villages sont oubliés donc c’est
pour cela que nous constituons un petit groupe et nous avons réfléchi et
nous avons dit, ben, la population à la base n’a pas la possibilité
d’épargner un peu de sous dans une institution. Donc à partir de là, nous
avons fait des recherches et nous avons mis en place cette institution
financière qui permet à la population de venir placer ne serait-ce que 2
000, 3 000 francs, etc. La population, la plupart, la majorité est
analphabète donc on permet à ces analphabètes-là de placer quelques
sous et d’avoir un petit crédit pour leurs activités génératrices de revenus.

Houinsou A vous entendre parler, on a l’impression que votre clientèle est constituée
essentiellement de ruraux ?

Ahomagnon Non, nous avons commencé avec les ruraux d’abord et c’est avec ces gens
là que nous évoluons … Au lieu de laisser l’argent dans un trou ou bien
dans une bouteille ou bien pour éviter la disparition par le vol ou par
incendie, cette population à la base préfère venir placer l’argent chez nous.

Houinsou Est-ce que c’est un capital constitué seulement par les sociétaires ou c’est
un capital octroyé par l’Etat ?

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La microfinance
Ahomagnon Actuellement c’est un capital constitué par les membres, les sociétaires.
L’Etat nous a donné l’autorisation de faire mais l’Etat n’a pas de
placements.

Houinsou Pour être membre de la MEPEC, quelles sont les conditions d’adhésion à
remplir ?

Ahomagnon Pour être membre, c’est facile parce que comme nous travaillons avec la
population rurale, nous ne sommes pas trop exigeants en matière de toute
chose. C’est la confiance. Donc il suffit seulement d’avoir trois photos
d’identité, 1 000 francs pour l’adhésion, 2 000 francs de part sociale, donc
en conclusion il faut 3 000 francs avec trois photos. Si vous avez une carte
d’identité, c’est un atout mais si vous n’avez pas de carte d’identité, nous
avons nos systèmes pour bien vous connaître avant l’ouverture du compte
et vous donnez l’adresse complète et c’est tout.

Houinsou Est-ce que votre institution applique des taux d’intérêt beaucoup plus
compétitifs que ceux appliqusé par les autres prestataires de
microfinance ?

Ahomagnon Notre taux est inférieur à un taux général mais dans un pays on n’est pas
très libre de pratiquer le taux que nous voulons. Il y a un seuil donc nous
pratiquons le taux que l’Etat décide.

Houinsou Si je suis membre de votre mutuelle et que je souhaite avoir du crédit,


vous pouvez me dire les conditions que je dois remplir avant que vous
m’octroyez ce crédit ?

Ahomagnon Pour avoir du crédit dans notre institution, c’est très simple. Dans un
premier temps, il faut être d’abord membre, c'est-à-dire adhérer, avoir son
livret et faire un peu de mouvement, avoir les 20% de ce que tu veux
passer et on va étudier le dossier avant de vous donner le crédit et si le
montant est un peu élevé, nous exigeons aussi des garanties parce que
nous ne voulons pas avoir trop d’impayés parce que nous sommes très
exigeants pour le remboursement. Le remboursement c’est notre point
fort. Quand l’argent est parti, l’argent doit revenir.

Houinsou Un client qui est membre de votre mutuelle d’épargne et qui veut avoir des
prêts, quel est le montant maximum qu’il peut demander ?

Ahomagnon Ça dépend de l’évolution de l’institution : si l’institution a beaucoup


d’argent et que l’institution ne fait pas de prêts, l’institution ne peut pas
supporter ses charges parce que c’est avec les intérêts que nous
supportons les charges de notre institution, donc une institution qui ne fait
pas de prêts, c’est une institution qui ne va pas évoluer donc nous n’avons
pas un plafond fixe. Nous savons que nous commençons à partir de 20 000
francs pour les petits commerçants mais pour le plafond, nous évoluons en
fonction de notre disponibilité financière et quand un client est crédible,
plus il paye le crédit antérieur, plus on lui accorde de l’argent.
Actuellement nous pouvons passer jusqu’à cinq millions, dix millions pour
un individu.

Houinsou Avant d’octroyer ces crédits à vos clients, est-ce que vous prenez le soin
de leur demander à quoi serviront les fonds parce qu’il y en a certains,
pour cause de décès, ils ne viennent pas faire des crédits pour aller faire
les obsèques de leurs parents ou encore pour aller doter des femmes ?

Ahomagnon Non, en matière de crédit, on est encore éducateur : ceux qui veulent
prendre du crédit, on les sensibilise, on fait des séances d’animation, on
leur donne le temps de poser beaucoup de questions sur leurs activités et
quand quelqu’un choisit une activité donnée, on lui dit les conséquences de
cette activité. Sinon une activité mal choisie entraîne des impayés,

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La microfinance
entraîne des retards d’abord et des impayés. Nous leur parlons beaucoup
des crédits à risque parce qu'il ne s’agit pas de prendre des crédits pour
aller prendre des produits prohibés, il ne s’agit pas de prendre des crédits
pour aller doter une femme, il ne s’agit pas d’aller prendre du crédit pour
aller faire l’enterrement de façon exagérée. Notre argent c’est pour des
activités génératrices de revenus.

Houinsou Alors pour le recouvrement de ces crédits, quelles sont les conditions que
vous offrez à vos clients ?

Ahomagnon Le remboursement varie selon les clients. Il y a des clients qui décident de
rembourser par cinq jours, des clients qui décident de rembourser de façon
hebdomadaire et d’autres mensuellement. Ça dépend de la distance, ça
dépend du taux, ça dépend du montant, ça dépend aussi de l’activité donc
cinq jours, hebdomadaire ou mensuel.

Houinsou Pour le recouvrement de vos créances, dites-nous un peu comment vous


procédez.

Ahomagnon Oui, c’est le domaine le plus difficile parce qu’il y a des femmes qui vont
prendre l’argent, des fois c’est des cas de force majeure, maladie, vol ou
incendie … Pour ces cas-là c’est difficile de recouvrer le montant mais nous
essayons… Nous ne pardonnons pas puisque dans ce domaine quand vous
prenez l’argent de la population, que vous octroyez des prêts et que vous
n’êtes pas en mesure de faire le recouvrement, c’est que votre institution
ne va pas trop durer. Effectivement il y a des cas sociaux. Même s’ils ne
respectent pas l’échéance, toujours est-il que l’argent est remboursé parce
qu’avant de prendre l’argent chez nous, vous avez des témoins. Si vous
êtes femme, votre mari doit être impliqué dedans, votre mari doit être
votre avaliseur, c'est-à-dire votre témoin. Et quand vous êtes mari aussi,
votre femme peut être votre avaliseur ou bien un ami peut être votre
avaliseur.

Houinsou En dehors de ce problème de recouvrement, quels sont les autres


problèmes auxquels la MEPEC est souvent confrontée ?

Ahomagnon Il y a des clients qui sont très crédibles et ces clients-là demandent une
somme donnée que notre institution n’est pas en mesure de satisfaire donc
la demande de crédit est supérieure à notre disponibilité financière. Fin de
la bande

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La microfinance
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La microfinance
La microfinance
« Un produit phare : le crédit « warrantage »

Introduction suggérée
La plupart des institutions financières (microfinance ou banques) ne sont pas en
général très disposées à accorder aux organisations paysannes des prêts
remboursables à la récolte à cause des risques d’échec des productions dus aux
aléas climatiques ou de ce qui est perçu comme une culture de non-
remboursement des crédits. Pourtant il existe au Niger une solution innovante,
efficace, viable et pérenne, tenant compte des préoccupations bancaires de
garantie des crédits mais également des faibles capacités des producteurs et de
leurs besoins de financement. Il s’agit du crédit « warrantage », une technique
venant du mot anglo-saxon « warrant », garantie. C’est une technique de crédit
qui se base sur une garantie constituée par un stock de produits agricoles
susceptibles d’augmenter en valeur : elle donne à tout agriculteur la possibilité
d’offrir sa récolte en gage du remboursement d’un prêt sollicité pour financer le
début du cycle de production suivant, ou toute autre activité productive agricole,
l'élevage notamment. Cette technique a été introduite au Niger par la FAO et a
été adaptée par plusieurs institutions de microfinance dont la mutuelle ASUSU.
Son directeur, Monsieur Moutari Issoufou, nous donne davantage de détails sur
cette technique innovante, au micro de Moumouni Hamado.

Début de la bande : « Le crédit « warrantage » est un crédit …»


Fin de la bande : «…seuls problèmes que nous avons rencontrés. »
Durée de la bande : 5’17
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Moutari Le crédit « warrantage » est un crédit que nous octroyons aux
organisations paysannes et donc nous pensons qu’il peut avoir deux
objectifs essentiels : le premier c’est d’abord d'aider les organisations
paysannes, en période de soudure, pour pouvoir avoir de quoi non
seulement satisfaire leurs besoins alimentaires au niveau de leurs ménages
mais également avoir les semences qui vont leur permettre de faire les
premiers semis. Et comment cela se traduit ? Cela se traduit par le crédit
que nous leur plaçons mais en période de récolte. Et là intervient le
deuxième objectif : on permet aux organisations paysannes d’avoir du
crédit et donc de ne pas brader leur production agricole à la récolte. Nous
essayons à travers nos agents qui sont sur le terrain de discuter avec les
organisations paysannes. Donc par rapport à leur activité, ils essayent
d’évaluer leur production et nous leur octroyons un crédit de 75% de la
valeur de leur production.

Hamado Quel est le montant que vous leur allouez ?

Moutari Bon, les montants varient : on a des crédits « warrantage » que nous
octroyons de 2 millions et jusqu’à 10 millions, et l’intérêt que nous
demandons c’est un intérêt de 10% après l’écoulement de la production en
période de soudure. En période de soudure, pourquoi, parce que c’est
seulement à cette période-là que les prix sont carrément le double ou le
triple du prix qui est donné à la récolte ; et on pense que ça peut
permettre non seulement de soulager les organisations paysannes à
travers la disponibilité en termes de céréales mais également à travers les
intérêts qui sont générés parce que si vous vendez par exemple la « tia »,
qui est une mesure locale, si vous la vendez à la période de récolte à cent
francs, ce qui est sûr c'est qu'en période de soudure, elle va coûter 200 ou
300 francs. Donc du coup il y a un intérêt net qui se dégage et là, ça

PRR 2008/04 25
La microfinance
permet aux organisations paysannes d’avoir leur production, de ne pas la
brader mais aussi de la revendre et d’avoir des revenus qui leur
permettent de subvenir à d’autres besoins.

Hamado Mais vous, en retour, vous gagnez quoi ?

Moutari C’est un crédit qui n’a pas de risques. Il n’a pas de risques dans la mesure
où nous vendons … enfin du moins l’organisation paysanne vend sa
production et directement nous nous remboursons. Le risque est moindre
et c’est en cela que nous voulons vraiment développer ce type de crédit
parce que nous l’avons expérimenté jusqu’à présent au niveau de deux
régions du pays mais nous comptons de plus en plus le développer et
essayer de le vulgariser aussi dans les autres régions.

Hamado Alors qu’est-ce qu’un paysan ou du moins un groupement paysan qui veut
vraiment obtenir ce genre de crédit, qu’est-ce qu’il doit faire ?

Moutari Une organisation qui souhaiterait ce crédit d’abord doit avoir son
agrément. En dehors de l’agrément, avoir au niveau de sa commune ou de
son village d’intervention au moins un local qui puisse abriter la production
une fois que le crédit lui a été placé. Donc la condition, il faut
nécessairement que l’organisation paysanne soit agréée et qu’elle réponde
aux exigences et aux règlements mis en place par l'ASUSU et aussi qu'elle
accepte le principe d’épargner parce que nous faisons de l’épargne aussi,
c'est de plus en plus un produit phare, et nous comptons aussi à travers
cette épargne mobiliser des fonds pour pouvoir satisfaire les besoins d’une
clientèle sans cesse croissante.

Hamado Les paysans apprécient le crédit « warrantage » ?

Moutari Oui, les paysans l’apprécient bien parce que je vais vous donner juste un
exemple assez concret : la semaine passée, j’étais à Maradi et j’étais allé
visiter des organisations qui ont bénéficié de notre crédit, dont notamment
des organisations qui avaient bénéficié du crédit « warrantage » et tout de
suite le chef du village qui m’a accueilli m’a dit : « Ah, vous nous avez
sauvé, Monsieur ! ». Je n’ai pas compris, moi il ne me connaissait pas … Il
me dit : « C’est vous qui donnez le crédit, non ? On a bénéficié durant
deux années de crédit « warrantage » et cette année avec le dénouement
de notre production, nous avons pu solder des crédits que nous n’avons
pas pu solder depuis presque huit ans ». Donc vous voyez un peu
l’ampleur réellement des avantages que les gens tirent de ce type de crédit
« warrantage ».

Hamado Le crédit « warrantage » est bien apprécié mais tout de même il a des
contraintes, quelles sont les contraintes ?

Moutari Oui la contrainte essentielle est que d’abord il faut un suivi assez régulier.
Ce n’est pas toujours évident parce que nous travaillons de concert avec
des partenaires techniques, notamment les agents de Intrants-FAO et ce
n’est pas toujours qu’ils sont disponibles pour le suivi. Ça c’en est une.
Maintenant de deux, il est bien vrai que nous avons formé nos agents
également dans le cadre de ce suivi mais il y a des aspects techniques qui
manquent et donc nous pensons qu’avec le suivi normalement régulier des
services techniques, ce problème peut trouver sa solution. Donc
essentiellement, jusqu’ici en tous cas par rapports aux tests que nous
avons fait sur les deux ans, c’est jusqu’ici les seuls problèmes que nous
avons rencontrés. Fin de la bande

PRR 2008/04 26
La microfinance
La microfinance
« Une innovation : le « linkage banking »

Introduction suggérée
Le « linkage banking » est une innovation mise au point par l’AFRACA,
l’Association africaine de crédit rural et agricole. Dans la microfinance, le
« linkage » c’est le lien qu’il y a entre le système bancaire et les groupements
d’autopromotion féminins. Le « linkage » repose sur le principe d'un compte et
d'un client avec plusieurs bénéficiaires (les membres du groupement). Cette
formule signifie que la banque n’a qu’un seul interlocuteur, le groupement. Au
Sénégal, la CNCAS (Caisse nationale de crédit agricole du Sénégal) a lancé son
programme linkage en 2003 et a maintenant prêté à 360 groupements pour un
montant de 920 millions de francs CFA. Madame Mariame Diop est chef de la
microfinance à la CNCAS et nous en dit plus sur les principes du « linkage
banking ». Elle répond aux questions de Hyppolite Dossou-Yovo.

Début de la bande : « Le « linkage banking » vient du concept « linkage »...»


Fin de la bande : «…et après entre eux, ils gèrent le problème.»
Durée de la bande : 5’49
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Diop Le « linkage banking » vient du concept « linkage » qui est un concept
anglo-saxon et qui consiste à créer des liens entre le système bancaire et
les organisations de promotion féminine et des liens entre l’épargne et le
crédit. C’est une approche qui permet donc de faciliter l’accès des
populations rurales traditionnellement exclues du système bancaire
classique aux services financiers. Le « linkage », dans son approche, vise
à atteindre un nombre assez important de femmes mais à travers une
seule relation clientèle donc dans le principe, on a un compte bancaire et
plusieurs bénéficiaires. Ça permet de régler le problème du coût d’accès
aux services financiers parce que si les cibles devaient individuellement
ouvrir des comptes au niveau du système bancaire et monter des dossiers
pour accéder aux crédits, le coût du crédit serait extrêmement cher pour la
cible mais également pour la banque. L’approche un client-plusieurs
bénéficiaires permet donc de régler le problème du coût du crédit et de
faciliter l’accès de la cible aux services financiers.

Dossou-Yovo Pourquoi avoir exclu les hommes du système ?

Diop Parce que nous sommes partis du principe que les femmes étaient
traditionnellement la population exclue du système bancaire donc c’est une
porte qui devrait permettre à cette couche de la population d’accéder à des
services financiers ; mais si dans une zone rurale, nous constatons qu’au
sein d’un groupe il y a des hommes, nous ne les faisons pas sortir du
groupe pour éviter de créer des distorsions sur le plan social et de toutes
les façons, dans ces zones d’intervention également, il y a des hommes qui
bénéficient des services traditionnels du crédit agricole. Le « linkage »
également vise les femmes parce que simplement, nous sommes partis
d’un constat qu’on a eu, un constat très heureux, que la population
féminine en général respectait ses engagements vis-à-vis du système
bancaire.

Dossou-Yovo Vous offrez trois formules de couplage du crédit et de l’épargne. Cela


détermine-t-il le profil des groupements qui peuvent avoir accès à ces
crédits ?

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La microfinance
Diop Le « linkage » n’exclut aucune cible-femme, aucune activité pourvu que ce
soit une activité lucrative et qu’elle soit également une activité licite.
Maintenant, dans l’approche, on peut arriver dans une zone d’intervention,
si dans ces zones-là on se rend compte qu’il y a des groupements qui ont
été formés, que des femmes sont en activité, on va les aider à renforcer
cette activité-là. Dans la démarche « linkage » il y a trois formules : la
première formule c’est que le groupement est déjà en activité, il a déjà des
notions en épargne et en crédit, il a déjà un certain fonds qu’il peut
déposer en apport personnel, 20% …On ne parle même pas d’apport
personnel, on parle d’épargne parce qu’on couple l’épargne et le crédit et à
à partir de ce moment-là ce groupe peut accéder immédiatement au crédit.
Les 20% sont placés dans un compte d’épargne, rémunérés aux conditions
du marché, au taux de 3,5% l’année. Et le crédit est accordé sur une durée
qui dépend de l’activité qui est exercée. En général c’est des crédits sur un
an avec des possibilités de remboursement au mois ou bien des
remboursements semestriels ou bien des remboursements in fine. Et il y a
également des possibilités de différer, tout dépend également de l'activité
qui est exercée, vraiment on est très souple. On peut également avoir une
autre formule, celle d’un groupement qui vient de se constituer, qui n’a pas
encore de notions en épargne et en crédit, là on va accompagner le
groupement pour mettre en place un processus qui va permettre aux
membres du groupe d’épargner soit mensuellement soit
hebdomadairement et elles vont se cotiser et l’argent va être versé dans le
compte bancaire. Et lorsque ce groupement aura atteint le montant de
20%, il va bénéficier du crédit. L’autre option c’est le groupe qui prend
l’option de dire « écoutez, on est un groupe, une partie a pu accumuler
l’épargne nécessaire, cette partie va accéder au crédit en attendant que
l’autre partie puisse rassembler son épargne ».

Dossou-Yovo Quels sont les problèmes de remboursement que vous avez rencontrés
dans le recouvrement des crédits accordés ?

Diop En fait sur le « linkage banking », c’est une approche très souple qui part
du principe de la solidarité des membres. A part l’épargne préalable qui
représente 20 % du montant du prêt, il n’y a pas d'autre garantie sur le
crédit. Donc nous essayons de développer le système de la caution
solidaire au sein des membres. C’est un principe en général qui marche
très fort en milieu rural. En milieu urbain, ça ne se vérifie pas toujours et
nous avons eu à constater ça. Et le principe veut qu’on mette en place un
système d’éducation. Ça veut dire que l’agent de crédit qui est en contact
avec cette population-là développe une certaine éducation au bénéfice de
cette population pour qu’elle puisse mettre en place un système d’épargne
périodique. Donc indépendamment de l’apport qui est bloqué au départ, il
y a un système d’épargne mensuel ou hebdomadaire qui est étalé selon les
habitudes du groupe et qui est plus ou moins orienté vers la banque et
dans l’approche « linkage », l’agent de crédit éduque le bureau du
groupement à tenir deux cahiers : un cahier pour le suivi individuel du
crédit et un autre cahier pour le suivi individuel de l’épargne collectée. Et
ça, ça permet d’avoir une transparence dans la gestion des fonds du
groupe et ça permet également de pouvoir plus tard faire face à des
désagréments qui pourraient subvenir dans l’exploitation de l’emprise
individuelle d’une des membres. En général quand il y a des difficultés, les
gens s’arrangent pour rembourser l’argent entre eux. Ils ont toujours les
systèmes de tontines, ils ont les systèmes d’épargne au niveau de
l’institution et après entre eux, ils gèrent le problème. Fin de la bande

PRR 2008/04 28
La microfinance
La microfinance
« Un partenariat original entre la microfinance et les producteurs »

Introduction suggérée
La question de l’accès aux services financiers est cruciale pour les paysans mais
les organisations paysannes sont confrontées à de réelles difficultés face à une
offre financière inexistante ou prudente à leur égard. Pour faire face à cette
situation de pénurie de l’offre, les organisations paysannes ont élaboré deux
stratégies principales d’accès aux services financiers : soit elles offrent elles-
mêmes le service de crédit, soient elles construisent un partenariat avec une
institution de microfinance existante. C’est le cas au Cameroun où la CCI, Caisse
communautaire de crédit, a signé plusieurs conventions avec des paysans en vue
de l’achat d’intrants. Les seuls mécanismes existants jusqu'à présent pour le
financement des intrants sont en effet peu viables (fonds de roulement, banques
d’intrants, crédit de campagne agricole…) ou sont usuriers comme les prêts
accordés à des taux élevés de 50 à 100 %. Ces crédits contribuent à
l’endettement et à la paupérisation du producteur. Il s’agissait donc de trouver
une autre solution comme l’explique le directeur de la CCI, Monsieur Hamadou
Bouba, au micro de Charles N’forgang.

Début de la bande : «Tout part d’une convention qu’on signe… »


Fin de la bande : «… besoin des financements orientés dans le secteur social. »
Durée de la bande : 7’35
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Bouba Tout part d’une convention qu’on signe avec une commune, donc ces
paysans ou alors ce groupe de paysans est identifié et après son
identification, il est répertorié, il est fiché et il peut donc bénéficier de notre
appui dans le domaine des microcrédits.

N’forgang Oui, dans la présente espèce, vous avez appuyé quelle catégorie de
producteurs ?

Bouba Dans la présente espèce, nous avons appuyé des producteurs de maïs.

N’forgang Oui, comment est-ce que cela s’est passé ? Est-ce qu'ils s’étaient
constitués en groupe de producteurs ou l’appui s’est-il fait de manière
individuelle ?

Bouba Donc l’appui s’est fait au niveau de chaque famille parce que la vraie
agriculture de développement est une agriculture familiale. Ça veut dire
que le microcrédit est octroyé à une famille qui dispose d’un hectare de
terrain aménagé et mis à la disposition du processus.

N’forgang En quoi consiste ce microcrédit-là ? Est-ce de la semence ou de l’argent


frais qu’on met à la disposition des paysans ?

Bouba On ne met pas de l’argent, des espèces, entre les mains des paysans, on
leur donne plutôt des intrants. Donc ça règle un certain nombre de
problèmes parce qu’on s’est rendu compte que dans certains programmes,
on donne de l’argent et puis le paysan va faire autre chose. Alors on a dit,
non, il vaut mieux donner au paysan des intrants en fonction de son
hectare, en fonction de l’espace disponible. Donc en l’occurrence, pour le
maïs, il s’agissait de remettre vingt kilogrammes de semences à chaque
famille qui disposait d’un hectare de terrain.

N’forgang Et comment se passe la récolte ?

PRR 2008/04 29
La microfinance
Bouba Donc, disons que comme la première année nous avons dit que nous allons
travailler de manière endogène, ça veut dire que nous allons améliorer la
qualité de sa semence et nous allons améliorer sa technique culturale.
Donc ce processus endogène nous amène à dire aux paysans que vous
allez récolter comme par le passé. Ça veut dire que vous allez vous
occuper de la récolte, vous allez égrainer, vous allez sécher ; on leur
distribue encore des sacs mais sinon ils sèchent de manière traditionnelle
comme ils le faisaient par le passé, en se disant que bon, à la deuxième
phase, on va peut-être passer à l’amélioration des intrants, à
l’augmentation des intrants tels que les engrais ou les pesticides, ainsi de
suite et autres et puis construire des cribs pour leur permettre de sécher et
tout ça. Mais pour la première phase le système est vraiment endogène.

N’forgang Une fois que ce maïs est récolté, comment se passe la commercialisation ?

Bouba Donc la CCI encore … en utilisant ce que nous appelons les approches
collaboratrices de développement centralisé participatives qui consistent à
mettre un ensemble d’acteurs ensemble, la CCI contacte un opérateur
économique qui accepte déjà de préfinancer la commercialisation, c'est-à-
dire qui achète sur le terrain et qui revend à une autre structure.

N’forgang Et quels sont les avantages pour les producteurs ?

Bouba Bon pour le producteur, le premier avantage c’est déjà l’assurance que son
produit sera vendu parce qu’on dit généralement « pour produire, il faut
vendre ». Or la CCI, en l’insérant dans un processus de développement
durable, lui a déjà trouvé un marché donc ça veut dire qu’il est déjà sûr
que tout ce qu’il va produire, il va le vendre. Ça c’est le premier avantage.
Le deuxième avantage c’est qu’il bénéficie d’une assistance pointue et
assidue, que ce soit dans le domaine de son organisation personnelle ou
dans le domaine du microcrédit ; cela pour dire que bon, lorsque la CCI va
vers lui, il est déjà certain que sa vie va changer parce qu'on lui apporte ce
qu’il a toujours recherché : les moyens de booster sa production.

N’forgang Qu’est-ce que la CCI gagne dans ce type de partenariat ?

Bouba Bon… en fait pour la CCI, c’est déjà des clients parce que la CCI fabrique
sa clientèle. Donc au lieu de rester à attendre les clients sur place, non, la
CCI crée des clients. Donc en fait pour la CCI c’est un système de
distribution de microcrédits parce que l’objet premier d’une structure
financière comme celle-ci, c’est la distribution des microcrédits. Or pour
éviter les crédits impayés, des processus compliqués en zone urbaine peut-
être, on s’est dit, pourquoi ne pas créer notre propre clientèle avec qui
nous avons au moins une garantie de remboursement à 97% voire 99% ?

N’forgang Oui, c’est là que je voulais en venir, est-ce qu’il y a une véritable souplesse
au niveau des remboursements et au niveau des taux d’intérêts et est-ce
que ces taux sont véritablement à la portée des paysans ?

Bouba Oui, ces taux sont à la portée des paysans puisque les taux que nous
appliquons, que nous avons appliqués pour la première année étaient de
2,5% par mois. Est-ce que c’est à la portée du paysan ? Pour l’instant, il
n’y a pas mieux sur le terrain mais si nous avions un prêt ou un
financement modéré ou dérisoire, on l’appliquerait sur le terrain. Mon
objectif c’est de ramener le taux à un 1,5% tous les mois puisqu'il s'agit de
microcrédits cycliques. Donc ils peuvent être renouvelés une, deux, trois
fois par an. Donc c’est circonscrit dans le temps et dans l’espace et je me
dis, le prix est compétitif.

N’forgang Oui, est-ce qu’un tel partenariat, un tel appui peut également s’étendre à
d’autres produits à l’instar des produits de rente tels que le café et le
cacao ?

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La microfinance
Bouba Oui, en fait nous venons de signer une convention avec une fédération de
producteurs de cacao pour essayer d’étendre l’expérience à ce type de
produits parce que dans la zone, c’est vrai, nous avons financé le maïs,
mais les premières cultures dans la zone restent le cacao et le café. Et
nous allons étendre le même processus à d’autres types de cultures : nous
pensons aux arachides, à booster la production du coton, des produits
comme les oignons, le haricot. Donc voilà à peu près les cultures que nous
ciblons en zone septentrionale.

N’forgang Votre établissement de microfinance, la CCI, s’adapte aujourd’hui aux


besoins des populations. Quels sont généralement les besoins des paysans,
des producteurs que vous appuyez ?

Bouba Bon, les besoins des paysans, c’est de plus en plus des microcrédits et des
microcrédits diversifiés. C'est-à-dire que le paysan s’attend à … si lors
d’une campagne agricole, il est financé au niveau du maïs, il s’attend à
être financé au niveau du cacao, il s’attend à être financé pour le bananier-
plantain ; donc on a constaté au bout d’un cycle de financement qu'il tend
maintenant à dire, bon, voilà, j’ai besoin par exemple du microcrédit pour
le téléphone. Donc comme ils ont le réseau au village, ils vous disent, on a
besoin du microcrédit pour le téléphone, est-ce que vous ne pouvez pas
nous l’accorder, comme ça vous allez prélever à la fin du processus ou à la
fin d’un cycle de microcrédit. Donc ils ont besoin de financements orientés
vers le secteur productif et ils ont besoin de financements orientés vers le
secteur social. Fin de la bande

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La microfinance
PRR 2008/04 32
La microfinance
La microfinance
« D’autres innovations en microfinance : les crédits pèlerinage et
scolarité »

Introduction suggérée
La microfinance ne se limite plus aujourd’hui à l’octroi de microcrédits aux plus
pauvres mais aussi à la fourniture d’un ensemble de produits financiers très
diversifiés à tous ceux qui sont exclus du système financier classique ou formel :
c’est ainsi qu’on voit des institutions offrir maintenant des services tels que les
transferts d’argent et la microassurance. Mais ces services sont cependant encore
assez rares et certaines institutions préfèrent diversifier leurs services en
accordant un prêt spécifique destiné à un usage particulier. C’est le cas de la
MECREF, une mutuelle féminine au Niger, qui accorde des crédits à ses membres
pour partir en pèlerinage ou payer la scolarité des enfants. Sa présidente,
Madame Katangué Mariama, répond aux questions de Moumouni Hamado.

Début de la bande : « C’est une promotion qu’on a voulu mettre en place …»


Fin de la bande : «…donc ça va de 500 000 à cinq millions. »
Durée de la bande : 3’32
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Katangué C’est une promotion qu’on a voulu mettre en place, au moment où le
pèlerinage arrive, donc il y a des femmes qui veulent y aller et elles n’ont
pas assez d’argent donc c’est pourquoi on a instauré le crédit pèlerinage ;
donc ça permet aux femmes vraiment d’aller faire leurs prières dans les
lieux saints, soit la femme prend un crédit pour acheter son billet et
subvenir à ses besoins là-bas, soit c’est un complément, elle a déjà son
billet et c’est un complément qu’elle voudrait.

Hamado Généralement quel est le taux qui est alloué à la femme ?

Katangué Bon le taux qui est alloué à la MECREF, c’et un taux pour tout le monde
donc on a à la MECREF un taux dégressif de 20% qui, quand il est converti
en taux linéaire, il va dans la proportion de 11,26 ou 11,27 %.

Hamado Jusqu'à quel montant êtes-vous limité ?

Katangué Bon … on peut donner jusqu’à cinq millions ?

Hamado Quelles sont les conditions?

Katangué Bon les conditions … d’abord il faut être membre de la MECREF depuis au
moins trois mois. Ensuite, quand c’est un premier crédit, vous donnez 30%
du montant que vous voulez et ensuite vous donnez une garantie de 70%
en matériel. Donc peut-être c’est un acte de cession ou bien une
concession, etc.

Hamado Mais quel type de femmes peut bénéficier du crédit pèlerinage ?

Katangué Les femmes salariées, les femmes aussi qui font le commerce et les
femmes entrepreneurs aussi. En tous cas n’importe quelle femme parce
que ça dépend de la solvabilité de la femme en fait, donc n’importe quelle
femme, il n’y a pas de spécificité.

Hamado Que ce soit la femme du milieu urbain ou la femme du milieu rural ?

Katangué Oui, que ce soit urbain ou rural, elle peut bénéficier de ce crédit suivant sa
solvabilité donc … elle peut auprès de ses autres amies dire que vraiment,

PRR 2008/04 33
La microfinance
son problème, voila comment elle l’a résolu ; donc pour la MECREF, ça
donne une certaine crédibilité et ça fait que la MECREF vraiment s’agrandit
et ça permet aux autres gens de venir parce que pour nous, qu’est-ce
qu’on veut, on veut arriver à une autonomisation de la femme. Et vraiment
la MECREF est là pour les femmes parce que c’est une banque qui a été
créée par les femmes et pour les femmes.

Hamado Madame, vous avez le crédit pèlerinage et vous avez aussi le crédit
scolarité. En quoi consiste ce crédit ?

Katangué Au moment de la rentrée scolaire, un peu avant la rentrée scolaire, le


crédit scolarité permet aux mamans d’inscrire leurs enfants vraiment à
l’école parce que vous savez que maintenant la scolarité, elle est payante
donc ça permet à la mère d’inscrire son enfant, de ne pas avoir l’enfant là
à la maison à ne rien faire. Et des fois même les hommes n’ont pas accès à
certains crédits et vous voyez donc la mère elle a accès … Donc vraiment
c'est pour la famille, pour le mari et la mère et des fois même, ce n’est
même pas des femmes mariées, c’est des femmes divorcées et les enfants
sont avec elles, elles supportent toutes les charges … et même s’il y a le
mari, de toutes façons quand on partage les dépenses, je crois que c’est
une très bonne chose mais il y a une spécificité pour la scolarité parce que
pour les femmes salariées qui ont domicilié leurs salaires à la MECREF,
elles n’ont pas besoin de garanties pour avoir leur crédit et vraiment ça les
satisfait beaucoup et il y en a beaucoup qui adhèrent à ce crédit-là.

Hamado Quel est le montant alloué ?

Katangué Bon, le montant il est toujours le même parce vous savez, il y a des
femmes qui veulent inscrire leurs enfants… elles cherchent des bourses
pour les enfants et elles veulent les inscrire à l’extérieur donc ça va de 500
000 à cinq millions. Fin de la bande

PRR 2008/04 34
La microfinance
La microfinance
« La formation, un outil essentiel de bonne gouvernance »

Introduction suggérée
Beaucoup de clients des institutions de microfinance sont analphabètes et ont
donc des difficultés à gérer leurs crédits. Pour pallier à cette difficulté, ces
institutions offrent souvent des formations simples à leurs épargnants et à leurs
membres. Non seulement cela profite à ces épargnants mais les taux de
remboursement sont généralement bien meilleurs quand la personne qui
emprunte a un minimum de connaissances en gestion, en comptabilité et en
planification financière. Mais ces formations sont très chères et certains
épargnants n’en voient pas l’utilité. Alors en quoi consistent ces formations ? Voici
la réponse de Madame Djamila Soré, formatrice à la MEFED, la Mutuelle femme et
développement, au Burkina, au micro d’Adama Zongo.

Début de la bande : « Nous travaillons beaucoup avec le secteur informel …»


Fin de la bande : «…institutions plus grandes que la MEFED ».
Durée de la bande : 5’18
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Soré Nous travaillons beaucoup avec le secteur informel : c’est surtout des
bénéficiaires qui ne sont pas allés à l’école, qui ne savent pas lire et écrire
donc c’est souvent très difficile de gérer leur activité. C’est dans ce sens
que les différentes formations sont faites pour simplifier les choses et pour
leur permettre de mieux comprendre la gestion même des activités, la
simple façon de tenir un cahier de caisse, un cahier de stocks, etc.

Zongo Dites-nous, quel contenu de formation dispensez-vous à ces clients-là ?

Soré Nous avons dispensé une formation sur la gestion du crédit. Il y a aussi
une formation sur la gestion d’une organisation, comment le trésorier doit
tenir son cahier, comment le secrétaire de l’association doit tenir son
cahier, comment rédiger les procès-verbaux, comment l’association peut
mettre en place un plan d’action pour pouvoir avoir des petits
financements…

Zongo Mais est-ce qu’on peut avoir un peu plus de détails sur le contenu de la
formation ? Vous avez parlé de cahiers, quels sont les éléments de ce
cahier de gestion ?

Soré Bon, c’est des outils de gestion qu’une association peut avoir. On peut
prendre l'exemple du registre des membres. On leur donne un cahier
grand format ou bien petit format, avec des différents tracés, les numéros
d’ordre, les adhérents de l’association, noms, prénoms et s'il y a des
cotisations … Souvent il y a différents types d’activités : on sépare les
activités de transformation, tel groupe fait uniquement ça, tel autre groupe
fait l’élevage, tel groupe …

Zongo Mais vous avez dit que vous avez affaire à des gens qui ne sont pas allés à
l’école, alors comment se fait … dans quelle langue ou bien comment se
fait cette formation ?

Soré Bon, en général la formation se fait dans la langue locale de l'endroit où


nous la dispensons. Donc quand nous arrivons là-bas sur place, ça se
décide en fonction de la langue qu’on parle. On trouve quelqu’un qui fait la
traduction.

Zongo Sur quelle base est élaboré le contenu d’une formation ?

PRR 2008/04 35
La microfinance
Soré Bon, on a des modules déjà que nous préparons à notre niveau.

Zongo Parlez-nous d’un module en exemple.

Soré Prenons par exemple le module de gestion des associations : le contenu


c’est d’abord de savoir combien de responsables il faut dans une
association, quel type de responsables, des responsables en quoi,
responsables de ceci, de cela … et qui est habilité à faire quoi ; et on
explique un peu quel est le rôle de chaque responsable, le rôle du
trésorier, le rôle du secrétaire…

Zongo Alors combien de sessions de formation sont offertes ? Je veux dire au


cours d’une année, un membre peut recevoir combien de formations ?

Soré Bon, on essaye d’avoir le maximum de membres, que cela ne soit pas
toujours la même personne. Même dans les associations, ils peuvent être
100 comme ça, donc on essaye de voir pour qu'au moins … même si les
100 n’obtiennent pas la formation, qu'au moins la moitié la reçoit, que ce
ne soit pas toujours les mêmes personnes qu’on nous envoie. On a souvent
dit ça au président des associations, que ça ne doit pas tout le temps être
le président ou le secrétaire, les trois personnes du bureau qui viennent
tout le temps …

Zongo Quelles sont les difficultés que vous rencontrez autour des formations que
vous offrez ?

Soré La grande difficulté c’est la prise en charge des bénéficiaires. En général,


ils disent : nous, nous laissons nos activités pour venir suivre vos
formations, nous perdons quelque chose quelque part, la compensation se
fait comment ? Souvent on dit, il y a la pause café ou déjeuner, souvent ça
ne les intéresse pas, ils nous disent « on n’a pas envie de ça, il faut nous
donner les sous de la pause café, de la pause déjeuner ». Souvent c’est le
défaut des associations, alors qu'il faut se mettre ensemble pour aller
prendre l’argent, ils n’ont aucune vision, aucun point commun…

Zongo Comment est-ce que vous constatez que la formation apporte


effectivement quelque chose de concret dans la conduite de leurs
activités ?

Soré Après, quand on va pour l’évaluation, on voit la manière dont ils gèrent
maintenant l’activité, la manière dont ils s’organisent pour mener l’activité
ensemble, on ne laisse pas ça à deux ou trois personnes de l’association,
tout le monde y met du sien pour que ça fonctionne… Parce qu’il y a
souvent la caution solidaire du groupe : si une seule personne est
défaillante dans le groupe, le reste est obligé de supporter la personne qui
est défaillante donc on leur fait comprendre qu’ils sont obligés de se mettre
tous ensemble pour mieux organiser leurs activités.

Zongo Vou,s en tant que formatrice, vous estimez que vous êtes vraiment utile
aux membres de votre institution ?

Soré On espère, on espère … Même si on arrive à toucher une seule personne


c’est déjà quelque chose. Ce n’est souvent pas évident, ce n’est souvent
pas facile de faire passer les messages. Souvent les gens se demandent ce
qu’ils vont avoir immédiatement avec cette formation, ce n’est pas
toujours évident … Ils viennent aux formations du fait que quelque temps
après, ils vont avoir du crédit, souvent c’est ça … et si après le crédit ne
suit pas, ils sont découragés. Après quand on lance une formation, ils
disent « bon, nous ça ne nous intéresse pas » parce qu'ils ne voient pas
loin, mais juste à coté d'eux ; ce n’est souvent pas évident mais il y a en a
qui sont partis de rien, aujourd’hui qui ont des PME, des petites entreprises

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La microfinance
qui marchent bien, qui sont en train de nous laisser pour aller vers
d’autres institutions plus grandes que la MEFED. Fin de la bande

PRR 2008/04 37
La microfinance
PRR 2008/04 38
La microfinance
La microfinance
« Fonds de garantie et cautions solidaires, tout le monde y gagne »

Introduction suggérée
On le sait, l’union fait la force et les paysans ont tout intérêt à s’organiser et à se
mettre ensemble pour obtenir plus facilement des prêts. Cela s’avère
particulièrement le cas pour l’établissement d’un fonds de garantie que
demandent souvent les institutions de microfinance. Ces dernières sont plus à
l’aise pour garantir le fonds constitué par un groupement que par un individu
seul. Ces fonds de garantie peuvent provenir d’un financement extérieur ou d’une
société de cautionnement mutuel créée par les membres du groupe. Dans les
deux cas, un fonds de garantie est une preuve de sérieux qui créera une
impression favorable auprès de l’institution de microfinance, comme l’explique au
micro de Charles N’forgang Monsieur David Kengne, expert consultant en
microfinance à Douala, au Cameroun.

Début de la bande : «Dans un premier temps il faut déjà que le groupe …»


Fin de la bande : «…obtenir toutes les conditions au crédit sans problèmes. »
Durée de la bande : 5’59
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Kengne Dans un premier temps il faut déjà que le groupe soit structuré et fixer des
règles transparentes de gestion. Bon après tout ça donc, les membres
peuvent mettre en place un fonds de garantie. Il y a beaucoup de bailleurs
de fonds à travers le monde qui ne demandent que ces groupements pour
les appuyer : il y a pratiquement plus de 90 fonds de garantie à travers le
monde. S’ils sont organisés et qu’ils s’adressent à un bailleur de fonds de
ce genre et ce fonds est mis en place au sein d’une banque ou bien au sein
d’un établissement de microfinance pour garantir les crédits accordés aux
producteurs, le bailleur est plus à l’aise en garantissant la production de
personnes organisées alors que s’ils venaient individuellement, il ne serait
pas pressé de le faire. Deuxièmement ces groupements peuvent
constituer une société de cautionnement mutuel et créer un fonds auquel
chaque membre contribue, c'est-à-dire que chaque mois, chaque membre
donne 1000 francs, 1000 francs, 1000 francs… Après peut-être un an, on
aura environ deux millions ou trois millions de francs … OK ? … Ces trois
millions de francs, on va les déposer dans une banque ou dans un
établissement de microfinance. La microfinance ayant eu ce fonds de
cautionnement mutuel de trois millions de francs, sachant que vous êtes
organisés, après une expérience de peut-être un an ou de deux ans de
travail en groupe, je ne vois pas comment dans cette situation, l'institution
elle-même ne sera pas pressée de vous accorder le crédit. Alors elle vous
accordera le crédit à des taux préférentiels et à des conditions
raisonnables. Vous allez vous entendre avec l’IMF qui, voyant ces trois
millions de francs, vous donnera un crédit sur un an. L’IMF, sachant que
vous êtes organisé, peut facilement vous accorder quatre à cinq fois les
trois millions de francs c'est-à-dire qu’on vous accordera un crédit de
quinze millions de francs à rembourser sur un an et vous répartirez ces
quinze millions de francs entre les membres du groupe. Chacun travaille
sous le contrôle du groupe. Vous organisez le remboursement à la caisse
sous le contrôle du groupe parce que le véritable problème c’est que c’est
bien beau d’accorder cinq à dix fois le crédit par apport aux sommes
déposées mais il faudrait que vous puissiez rembourser parce que si vous
ne remboursez pas, ça bloquera l’accès d’autres groupes. Alors que si vous
réussissez, la banque fait de vous un exemple pilote et peut démultiplier
cette expérience dans d’autres localités où elle est installée.

PRR 2008/04 39
La microfinance
N’forgang Oui mais est-ce qu’on a des exemples, est-ce que ce type de partenariat a
pu faire tache d’huile dans un des pays africains ?

Kengne Oui, il y a deux expériences : au Nord-Cameroun et en République


Centrafricaine. Au Nord-Cameroun, il y a le Fonds P.P.T.E. qui a accordé
une subvention à un groupement. Le groupement, ayant trouvé que ce
montant était petit pour financer ses activités, est allé se présenter dans
une banque de microfinance, a déposé ce fonds et a demandé à la banque
de considérer ce fonds comme un fonds de garantie qui va rester de façon
permanente au sein de l’institution. Le groupement en question a montré,
a prouvé à la microfinance qu’il est structuré, qu’il a au moins un an et
demi d’expérience de fonctionnement de groupe et qu’il est encadré par
des gens assez élevés sur le plan communautaire : l’institution de
microfinance a mis en place une ligne de crédit allant jusqu'à 80 millions
parce que le fonds était de 20 millions de francs. Ils vont donc prendre
jusqu'à 80 millions de francs donc pratiquement quatre fois le fonds de
garantie. Et ça leur permet de fonctionner très bien, je les ai visités et le
groupement s’organise pour suivre les activités de ses membres et suit
aussi les remboursements au niveau de l’institution de microfinance.
Quand il y a un retard d’un jour, l’institution de microfinance informe le
groupement et le groupement fait pression sur le membre qui rembourse.
Ça c’est le cas du Nord-Cameroun. Le cas de la République Centrafricaine,
c’est un fonds de garantie de 15 millions de francs qui a été mis en place
par une ONG italienne pour permettre aux paysans qui faisaient pousser
les arachides de les transformer avant de les vendre, pour leur permettre
d’augmenter leur capacité de production. Ils n’ont pas besoin de beaucoup
d’argent, hein, les femmes prennent le crédit de 50 000, de 20 000 francs
et remboursent sur quatre mois, six mois et ça marche très bien.

N’forgang Et dans ce cas, les échéances de remboursement sont aussi calquées sur le
rythme de la production et de la récolte ?

Kengne Bon, les gens remboursent en fonction de la récolte. Tu ne peux pas


prendre un crédit sur deux mois pour faire une production qui va durer
trois mois, ça ne peut pas marcher, il y aura un impayé. On augmente un
mois sur la durée de la production jusqu'à la récolte. Donc si ce produit est
prévu, de sa culture jusqu’à sa récolte, sur quatre mois, le remboursement
est prévu sur cinq mois.

Nforgang Oui, Monsieur Kengne, n’y a-t-il pas quelque chose que vous souhaiteriez
ajouter à l’intention de nos auditeurs du monde rural qui ont effectivement
des difficultés d’accès au crédit ?

Kengne Qu’ils s’arrangent pour se mettre en groupe parce que ce n’est que l’union
qui fait la force. Tant que vous travaillez dans votre petite portion de terre,
seul, sans contact avec un autre, ca ne marchera jamais. Se mettre en
groupe ne veut pas dire forcément que vous allez louer une portion de
terre pour cultiver ensemble, récolter et partager le fruit, non ! Vous
pouvez vous mettre en groupe mais chacun garde sa portion de terre :
celui qui est paresseux récolte petit, celui qui est travailleur récolte grand
mais il faut vous mettre en groupe et quand vous vous êtes mis en groupe,
vous fixez des règles de gestion transparente du groupe, vous apprenez à
mettre l’intérêt général au-dessus de l’intérêt individuel. Quand ces
conditions sont réunies, vous pouvez constituer une force solidaire de
négociation pour obtenir toutes les conditions au crédit sans problèmes. Fin
de la bande

PRR 2008/04 40
La microfinance
La microfinance
« Le rôle de l’Etat : établir une réglementation plus stricte pour le
secteur »

Introduction suggérée
Jusqu’au début des années 80, les gouvernements estimaient généralement de
leur devoir et de leur responsabilité de prendre une part active au « financement
du développement », en conduisant par exemple de vastes programmes de crédit
pour les populations défavorisées, rurales en particulier. Mais devant les échecs
répétés de ces programmes, on a assisté à la fermeture des banques publiques
de développement et à la libéralisation du secteur de la microfinance. Pourtant
l’Etat a toujours un rôle capital à jouer face à la microfinance, un rôle
d’assainissement d'un secteur où la réglementation, actuellement, soit n’existe
pas soit n’est pas appliquée. Stanislas Dalmeida est Chef de service à la Cellule
de surveillance des structures financières décentralisées au Bénin et il nous en dit
plus au micro d’Euloge Aidasso.

Début de la bande : « Oui, le rôle de l’Etat en matière de microfinance …»


Fin de la bande : «…les impayés, ce qui crée la mauvaise gouvernance. »
Durée de la bande : 6’32
Annonce de fin : Cette émission vous était proposée par le CTA.

Transcription
Dalmeida Oui, le rôle de l’Etat en matière de microfinance a surtout été constaté
dans les années 90 après la déconfiture des banques - les banques
commerciales et la banque de développement- et l’on a éprouvé la
nécessité de créer des institutions de microfinance pour pallier un peu à
cette insuffisance. C’est ainsi que dans les années 90, l’engouement a pris
au niveau national : nous avons vu naître des institutions de microfinance
dans toutes les contrées du pays et il s’est avéré nécessaire que l’Etat
réglemente cette activité ; pratiquement une nouvelle loi sera bientôt sur
la table de nos parlementaires…

Aidasso Alors pourquoi une nouvelle loi ?

Dalmeida Une nouvelle loi parce que l’ancienne avait des insuffisances. Elle était faite
seulement pour les institutions mutualistes de crédit alors qu’au niveau des
institutions de microfinance, nous avons des associations, nous avons des
ONG, nous avons des sociétés.

Aidasso Parlant toujours de la réglementation, est-ce que vous avez pu mesurer le


degré de succès et l’efficacité de la réglementation actuelle ?

Dalmeida Oui … comme toute loi, il y a des institutions qui n’arrivent pas à la
respecter et qui existent en marge de la réglementation.

Aidasso Il y a des établissements qui s’installent sans remplir les formalités


d’usage ?

Dalmeida Bien sûr ! Sans les remplir, sans venir déposer leur dossier d’autorisation
ici.

Aidasso Alors ils collectent les fonds …

Dalmeida Ils collectent l’épargne des contribuables et exercent en marge de la


réglementation : c’est ce que nous ne voulons pas.

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La microfinance
Aidasso Mais comment se fait-il que ces institutions s’installent sans que vous le
sachiez ? Il n’y a pas un contrôle en amont ?

Dalmeida Non, vous savez, lorsque vous avez votre argent, vous avez un capital, un
petit capital, vous installez quelque chose et vous appelez les gens pour
dire, : « ah, je fais du crédit ». Lorsque la population entend qu’ils vont
octroyer du crédit quelque part, elle est intéressée et vous collectez son
épargne. Mais pour le moment, nous ne pouvons pas nous opposer à
l’installation mais on demande aux gens de se mettre en règle, de
constituer les dossiers pour venir exercer en accord avec la
réglementation…

Aidasso Vous donnez deux ans. Pourquoi ne pas fermer systématiquement ces
institutions, pourquoi donner deux ans pour que les gens se mettent en
règle ?

Dalmeida Oui, parce vous savez, il y a des gens qui ont pris du crédit chez eux, il y a
des gens qui ont déposé de l’épargne, il y a des gens qui ont pris du crédit.
En fermant automatiquement, ça crée un problème. Nous avons estimé
qu’en deux ans, les crédits seraient déjà venus à leur terme, les gens
auraient déjà su que cette institution n’est pas autorisée, ils auraient pris
leur épargne …

Aidasso Alors ça veut dire que c’est pratiquement la pagaille et que l’Etat n’arrive
pas à superviser tout ça ?

Dalmeida Non, nous supervisons. En fait nous avons 205 institutions de microfinance
autorisées sur près de 700 qui exercent. Vous voyez qu’il y en a 500 qui
exercent en marge de la réglementation. Nous envoyons des équipes sur le
terrain pour d’abord sensibiliser, faire ce recensement et sensibiliser, c'est
ce à quoi nous nous attelons.

Aidasso Alors actuellement, dans ce contexte, comment est-ce que vous voyez le
rôle de l’Etat ? Quel est le nouveau rôle que l’Etat doit jouer alors?

Dalmeida L’Etat est en train, aujourd’hui, avec la création du Ministère de la


microfinance et du Fonds national de la microfinance, avec les outils
comme le microcrédit aux plus pauvres, avec la surveillance, nous
estimons que l’Etat est en train de faire beaucoup actuellement. Il y a deux
ans on n’était pas à ce niveau-là. Aujourd’hui on peut mesurer le rôle de
l’Etat qui a pris ce secteur comme un secteur vital qui constitue un levier
pour le développement de notre pays.

Aidasso Il n’y a pas longtemps, il y a eu une rencontre qui a été organisée sur le
secteur de la microfinance au Bénin. Qu’est-ce que ça a donné
véritablement ?

Dalmeida Nous avons analysé les causes profondes des difficultés du secteur, à
savoir les impayés, c'est-à-dire là où le problème se pose. Les impayés,
qu’est-ce qui cause ces impayés ? Nous avons 24 milliards d’impayés dans
le pays, ce qui fait un taux de créance en souffrance de 10%,
contrairement à la norme qui est de 5%. Donc vous voyez qu’on a dépassé
la norme et les vraies causes c’est le peu de professionnalisme qui
caractérise le secteur, surtout les agents de crédit : avant qu’un crédit soit
en impayé, certainement on peut voir qu’il est mal monté. Donc nous
avons sensibilisé les gens sur les dispositifs à prendre pour un bon crédit et
ensuite il y a la gouvernance dans certaines institutions : vous n’êtes pas
sans savoir qu’il y a des institutions qui se portent très mal aujourd’hui …
Nous avons attiré l’attention sur la mauvaise gouvernance car il fallait que
les dirigeants comprennent. Voilà les deux facteurs qui ont fait l’objet de
recommandations au cours de ce symposium.

PRR 2008/04 42
La microfinance
Aidasso Est-ce qu'il ne faudrait pas créer des associations professionnelles que
l’Etat pourrait superviser et qui pourraient véritablement assainir un peu le
milieu ?

Dalmeida Non, il y a une association de praticiens, le consortium Alafia qui quand


même joue son rôle, vous savez, mais toutes les institutions ne sont pas
membres du consortium. C’est ce qui fait que peut être vous avez des
brebis galeuses.

Aidasso Est-ce que quelque part ce n’est pas aussi la réglementation qui n’est pas
incitative et qui ne permet pas aux gens de se conformer, alors ils
préfèrent rester dans l’informel ?

Dalmeida Non, la réglementation est même plus incitative…

Aidasso Comment ?

Dalmeida C’est la première fois que l'on exerce sans payer l’impôt …

Aidasso Il n’y a pas d’impôts à payer ?

Dalmeida Il n’y a pas d’impôts à payer ! C’est seulement peut-être les pièces …
Lorsqu’on parle de casier judiciaire des dirigeants, lorsqu’on parle de plan
d’affaires, lorsqu’on parle de manuel de procédures comptable et
financière, je parlais de la professionnalisation …les gens n’arrivent pas à
faire ce manuel-là et s’adressent peut-être à des cabinets qui leur
reviennent un peu cher. C’est pourquoi nous avons souhaité que la
Direction générale de la promotion de la microfinance qui a été créée
puisse accompagner ces IMF qui n’ont pas les moyens de s’adresser à un
cabinet et les aider petit à petit à se mettre en règle. Mais ce que nous,
nous faisons, nous faisons des missions de conseil et d’appui, nous
relevons les lacunes, nous faisons des constats et nous disons ce qu’il faut
faire.

Aidasso Et à grands traits, les lacunes se résument à quoi ?

Dalmeida Oui, en fait les lacunes c’est la gouvernance, les institutions, les conseils
d’administration qui ne se réunissent pas, les contrôles internes qui ne se
font pas, les dossiers de crédit qui sont mal montés, ou qui sont montés
avec un peu de favoritisme …Et voilà un peu ce qui crée les impayés, ce
qui crée la mauvaise gouvernance. Fin de la bande

PRR 2008/04 43
La microfinance

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