Electromagnetisme 1 PDF
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FEYNMAN
électromagnétisme 1
FeynmanILeightonlSands
DUNOD
L'édition originale de eet ouvrage a été publiée aux États-Unis
par Addison-Wesley Publishing Company, Ine., Reading,
Massaehussetts, sous le titre
Note de l'éditeur
Afin de réaliser cette édition en format de poche, nous avons
utilisé des documents originaux ayant servi pour la précédente
édition bilingue. Ceci explique pourquoi certaines pages
ne finissent pas en fin de ligne.
G.DELACÔTE
Professeur de Physique
Université Paris VII
avril 1979
iv
Préface de Feynman
Voici les cours de physique que j'ai donnés l'année dernière et l'année précédente
aux élèves de première et de deuxième année de l'université de Caltech. Ces cours ne rap-
portent pas mots pour mots ce qui fut dit - ils ont été édités quelquefois dans leur
intégralité et quelquefois un peu moins. Ces leçons ne forment qu'une partie du cours
complet. Tout le groupe des 180 étudiants se rassemblait dans une grande salle de cours,
deux fois par semaine, pour écouter ces cours et puis se divisait en petits groupes de 15
à 20 étudiants dans des sections de travaux dirigés sous la direction d'un assistant. Il y
avait de plus une séance de laboratoire une fois par semaine.
Le problème particulier que nous avons essayé de résoudre avec ces leçons était de
maintenir l'intérêt des étudiants, très enthousiastes et assez brillants, qui venaient de
sortir des écoles secondaires et rentraient à Caltech. Ils avaient entendu beaucoup de
choses sur les aspects intéressants et excitants de la physique - la théorie de la relativité,
la mécanique quantique et d'autres idées modernes. Après avoir suivi deux années de nos
cours précédents, beaucoup se seraient sentis découragés parce qu'on ne leur aurait pré-
senté que très peu d'idées modernes grandes et nouvelles. Ils auraient étudié les plans
inclinés, l'électrostatique, etc., et au bout de deux ans cela est passablement ridicule. Le
V
problème était de savoir si, oui ou non, nous pouvions faire un cours qui pourrait ménager
les étudiants les plus en avance et les plus enthousiastes en maintenant leur enthousiasme.
Les cours qui suivent ici ne sont pas du tout considérés comme un survol, mais sont
très sérieux. J'ai pensé les adresser à ceux qui étaient les plus intelligents de la classe et
je fis en sorte, dans la mesure du possible, que même l'étudiant le plus intelligent ne fut pas
capable de saisir complètement tout ce qui se trouvait dans les cours - en suggérant un
développement des idées et des concepts dans diverses directions s'écartant de la prin-
cipale ligne d'attaque. Pour cette raison, j'ai essayé avec beaucoup d'attention de rendre
les énoncés aussi précis que possible, d'indiquer dans chaque cas l'endroit où les équations
et les idées trouvaient leur place dans l'ensemble de la physique et comment- lorsqu'ils
en apprendraient davantage - les choses se modifieraient. J'ai pensé également que pour
de tels étudiants, il est important d'indiquer ce qu'ils doivent - s'ils sont suffisamment
intelligents - être capables de comprendre par déduction de ce qui a été dit précédem-
ment et ce qui est introduit comme quelque chose de nouveau. Lorsque de nouvelles
idées apparaissaient, j'ai essayé soit de les déduire, quand on pouvait le faire, ou d'ex-
pliquer que c'était une nouvelle idée qui ne s'exprimait pas en fonction des choses qu'ils
avaient apprises jusqu'alors, qu'on ne pouvait pas la démontrer - mais qu'elle était
simplement ajoutée.
Pour le début de ces cours, j'ai supposé que l'étudiant connaissait certaines choses en
science lorsqu'il sortait de l'école secondaire - des choses telles que l'optique géomé-
trique, les idées de chimie élémentaire, etc. Je n'ai pas vu qu'il y ait de raison particulière
pour faire les cours dans un ordre défini au sens où je ne me serais pas permis de men-
tionner uni: chose jusqu'au moment où je serais prêt à la discuter en détail. Il y a de nom-
breuses références à des choses à venir, sans discussions complètes. Ces discussions plus
complètes venajent plus tard,< lorsque la préparation était plus avancée. Des exemples
en sont les discussions de l'induction et des niveaux d'énergie qui sont introduits une
première fois d'une manière très qualitative et sont plus tard dévefoppés plus complète-
ment.
En même temps que je m'efforçais d'intéresser les étudiants les plus actifs, je voulais
également prendre soin de ceux pour lesquels les applications marginales et ces feux d'ar-
tifices supplémentaires sont simplement inquiétants et dont on ne peut attendre qu'ils
apprennent la totalité du matériau dans chaque leçon. Pour de tels étudiants, je souhai-
tais qu'il y ait au moins un noyau central, une ossature, qu'ils puissent acquérir. Même
s'ils ne comprenaient pas tout dans une leçon, j'espérais qu'ils ne se décourageraient pas.
Je ne m'attendais pas à ce qu'ils comprennent tout, mais seulement les caractéristiques
centrales et les traits les plus directs. Il fallait bien sûr une certaine intelligence de leur
part pour voir quels sont les théorèmes centraux, les idées centrales et quelles sont les
issues latérales plus avancées et les applications qu'ils pouvaient ne comprendre que dans
le~ années à venir.
J'ai rencontré une difficulté sérieuse en donnant ces cours: selon la manière dont le
cours était donné, il n'y avait aucune expression en retour venant des étudiants vers celui
qui donnait le cours, pour indiquer comment les leçons étaient assimilées. Ceci est en effet
une difficulté très sérieuse etje ne sais pas effectivement quelle est la qualité de ces cours.
L'ensemble était essentiellement une expérience. Et si je devais le refaire je ne le ferais
pas de la même manière - j'espère que je n'aurai pas à le refaire! Je pense, cependant, que
les choses se sont bien passées, pour autant que la physique soit concernée, durant la
première année.
Pendant la deuxième année je ne fus pas aussi satisfait. Dans la première partie du
vi
cours traitant de l'électricité et du magnétisme, je n'a!. pu considérer aucune manière
réellement unique ou différente de les traiter -,n'impocte quelle autre manière qui serait
particulièrement plus excitante que la manière habituel,e de présentation. Aussi je pense
que je n'ai pas apporté beaucoup dans ces cours sur l'élj!ctricité et le magnétisme. Je pen-
sais initialement continuer à la fin de la deuxième année après l'électricité et le magné-
tisme, en donnant quelques cours supplémentaires sur les propriétés des matériaux, mais
essentiellement en insistant sur des choses telles que les modes fondamentaux, les solu-
tions de l'équation de diffusion, les systèmes vibratoires, les fonctiol\s orthogonales, etc.,
développant les premières étapes de ce qu'on appelle habituellement «les méthodes
mathématiques de la physique». A y repenser, je considère que si je devais le refaire, je
reviendrais à cette idée initiale. Mais comme il n'était pas prévu que je donnerais à nou-
veau ces leçons, on suggéra que cela serait une bonne idée que d'essayer - de présenter
une introduction de la mécanique quantique - ce que vous trouverez au volume 3.
Il est parfaitement clair que les étudiants qui s'orienteront vers la physique peuvent
attendre jusqu'à leur troisième année pour étudier la mécanique quantique. D'un autre
côté l'argument fut avancé quç nombreux étaient les étudiants dans notre cours qui
étudiaient la physique comme un bagage qui pourrait servir de complément à leurs pré-
occupations fondamentales dans d'autres domaines. Et la manière habituelle de traiter
la mécanique quantique rensJ ce sujet presque inaccessible pour la plus grande partie des
étudiants, parce qu'il leur faut trop longtemps pour l'apprendre. De plus, dans ses appli-
cations réelles, spécialement dans ses applications les plus complexes telles que dans les
techniques électriques et la chimie - le mécanisme complet de l'approche par l'équation
différentielle n'est pas effectivement utilisé. Aussi j'ai essayé de décrire les principes de
mécanique quantique d'une manière qui ne nécessite pas que l'on connaisse d'abord les
mathématiques des équations différentielles partielles. Je pense que, même pour un phy-
sicien, c'est une chose intéressante à essayer - que de présenter la mécanique quantique
de cette manière renversée - pour plusieurs raisons qui peuvent être apparentes dans les
cours eux-mêmes. Cependant je pense que l'expérience, dans la partie de mécanique quan-
tique, ne fut pas complètement un succés - pour une large part parce que je n'ai pas eu,
à la fin, suffisamment de temps (j'aurais dû, par exemple, faire trois ou quatre cours en
plus, de manière à traiter plus complètement des sujets tels que les bandes d'énergie et
la dépendance spatiale des amplitudes). De plus je n'avais jamais auparavant présenté ce
sujet de cette manière, ce qui fait que l'absence de réaction en retour fut particulièrement
sérieuse. Je pense maintenant que la mécanique quantique devrait être enseignée plus
tardivement. Il se peut que j'aie un jour la chance de le refaire. Alors je le ferai correctement.
La raison pour laquelle il n'y a pas de cours sur la manière dont on résoud les pro-
blèmes est qu'il y avait des sections de travaux dirigés. Bien que j'ai mis dans trois cours,
en première année, ce qu'il faut savoir pour résoudre les problèmes, ceci n'est pas inclus
ici. Il y avait également un cours sur Je guidage par inertie qui se situe certainement après
les cours sur les systèmes en rotation mais qui fut malheureusement omis. Les cinquième
et sixième cours sont en réalité dus à Matthew Sands, car j'étais absent à cette époque.
La question est bien sûr de savoir coinment cette expérience a réussi. Mon propre
point de vue - qui cependant ne semble pas être partagé par la plus grande partie des
personnes qui ont travaillé avec les étudiants - est pessimiste. Je ne pense pas que j'ai réel-
lement bien travaillé avec les étudiants. Lorsque je considère la manière dont la majorité
des étudiants traitaient les problèmes aux examens, je pense que le système est un échec.
Bien entendu, mes amis m'ont fait remarquer qu'il y avait une ou deux douzaines d'étu-
diants qui - d'une manière très surprenante - comprenaient presque tous les cours
et qui étaient très actifs, travaillant avec le contenu de ces leçons et se préoccupant des
vil
divers points d'une manière intéressée et passionnée. Ceux-ci ont maintenant, je le pense,
un bagage fondamental de première qualité en physique - et ils sont après tout ceux
auxquels je désirais m'adresser. Mais alors, « la puissance de l'instruction est rarement
de grande efficacité à l'exception de ces dispositions heureuses où elle est pratiquement
superflue» (Gibbons).
Toutefois je ne désirais laisser aucun étudiant complètement en arrière, comme peut-
être je l'ai fait. Je pense qu'une manière par laquelle nous pourrions aider davantage les
étudiants, serait de faire plus d'efforts pour développer un ensemble de problèmes qui
permettraient d'élucider certaines des idées dans les cours. Les problèmes donnent une
bonne occasion d'utiliser les matériaux des leçons et de rendre plus réalistes, plus com-
plètes et plus ancrées dans les esprits, les idées qui ont été exposées.
Je pense cependant qu'il n'y a aucune solution à ce problème d'éducation autre que
de réaliser que Je meilleur enseignement ne peut être obtenu que lorsqu'il y a une relation
directe et individuelle entre un étudiant et un bon professeur- une situation dans laquelle
l'étudiant discute les idées, pense sur les choses et parle des choses. Il est impossible d'en
apprendre beaucoup simplement en assistant à un cours ou même simplement en fai-
sant les problèmes qui sont demandés. Mais à notre époque moderne nous avons telle-
ment d'étudiants à enseigner qu'il nous faut essayer de trouver quelques substituts à
l'idéal. Peut-être mes cours pourront-ils apporter une certaine contribution. Peut-être,
ça et là où se trouvent en nombre restreint des enseignants et des étudiants, pourront-ils
tirer un peu d'inspiration ou quelques idées de ces cours. Peut-être ,auront-ils du plaisir
à les lire et à y réfléchir ou à essayer de pousser plus loin le développement de certaines
de ces idées.
RICHARD P. FEYNMAN
vili
Introduction
Pendant quelque quarante ans, Richard P. Feynman concentra sa curiosité sur les
travaux mystérieux du monde de la physique, et plia son intelligence à chercher à
mettre de l'ordre dans son chaos. Il a maintenant consacré deux années de son
habileté et de son énergie à son Cours de Physique pour étudiants débutants.
Il a distillé pour eux l'essence de son savoir et il a créé afin qu'ils puissent
espérer saisir une image de l'univers des physiciens. Il a apporté à ces cours la
clarté de son brillant esprit, l'originalité et la vitalité de son abord et l'enthousiasme
contagieux de sa parole.
ix
sujets s'efforce de donner un aperçu de tout l'ensemble complexe des phénomènes
auxquels le sujet peut conduire. Ces quatre chapitres peuvent bien être sautés sans
dommage, car ils ne constituent absolument pas une préparation nécessaire au
volume III.
Le dernier quart, à peu prés, de la seconde année, a été consacré à une introduction
à la mécanique quantique. C'est la matière du troisième volume.
Dans cet enregistrement des cours de Feynman, nous avons souhaité faire mieux
que transcrire ce qui avait été dit. Nous espérions faire de la version écrite un
exposé aussi clair que possible des idées sur lesquelles les cours magistraux étaient
basés. Pour certains des cours, ceci pouvait être fait avec seulement des additifs
mineurs au texte de la transcription originale. Pour d'autres cours, il a été nécessaire
de refaire, de réarranger le texte. Nous avons éprouvé parfois le besoin d'ajouter
quelque chose de nouveau pour augmenter la clarté ou pour équilibrer la présentation.
Nous avons bénéficié sans arrêt de l'aide continuelle et de l'avis du Professeur
Feynman.
La traduction de plus d'un million de mots prononcés, en un texte cohérent,
en un temps limité. est une tâche formidable, en particulier quand cela s'accompagne
de nombreuses autres tâches coûteuses qui proviennent de la mise en route d'un cours
nouveau - préparation de la division en leçons et des réunions d'étudiants, élaboration
d'exercices et de sujets d'examen, leurs corrections, et ainsi de suite. De nombreuses
mains - et de nombreux cerveaux - furent mis à contribution. Dans certains cas,
nous avons été capables, je crois, de rendre une image fidèle - ou un portrait retouché
avec délicatesse - du Feynman original. Dans d'autres cas nous sommes tombés
bien loin de cet idéal. Nos succès sont dus à tous ceux qui nous ont aidés. Les
défaillances, nous les regrettons.
Comme il est expliqué dans l'avant-propos du tome I, ces cours n'étaient qu'un
aspect d'un programme mis en route et supervisé par le « Physics Course Revision
Committee» (R.B. Leighton, Chairman, H.V. Neher, and M. Sands) à l'Institut
technologique de Californie, et financé par la Fondation Ford. En plus, les personnes
suivantes, J. Blue, G.F. Chapline, M.J. Clauser, R. Dolen, H.H. Hill, and A.M. Title,
ont aidé sous un aspect ou sous un autre la préparation du texte de ce second volume.
D'autres y ont contribué indirectement par leur œuvre, T.K. Caughey, M.L. Clayton,
.f.B. Curcio, J.B. Hartle, T.W.H. Harvey, M.H. Israel, W.J. Karzas, R.W. Kavanagh,
R.B. Leighton, J. Mathews, M.S. Plesset, F.L. Warren, W. Whaling, C.H. Wilts, and
B. Zimmerman. Le professeur Gerry Neugebauer a contribué à tous les aspects de
notre tâche avec une diligence et un dévouement bien au-delà des impératifs du
devoir.
L'histoire de la physique que vous allez trouver ici n'aurait cependant pas
existé sans l'habileté extraordinaire et le travail de Richard P. Feynman.
MAITHEW SANDS
Mars 1964
X
Table des niatières
Chapitre 1 Électromagnétisme
1-1 Forces électriques . . . . . . . . . 1
1-2 Champs électrique et magnétique . . . 5
1-3 Caractéristiques des champs de vecteurs 6
1-4 Les lois de l'électromagnétisme 8
1-5 Que sont les champs? . . . . . . . 14
1-6 L'électromagnétisme dans la science et la technologie l5
4-1 Statique . . . . . . . . 53
4-2 Loi de Coulomb: superposition 55
4-3 Potentiel électrique 58
4-4 E=-V<f> ........ . 61
4-5 Le flux de E . . . . . . . . 62
4-6 Théorème de Gauss; la divergence de E 66
4-7 Champ d'une sphère chargée . . . .
68
4-8 Lignes de champ; surfaces équipotentielles
69
5-1
L'électrostatique c'est le théorème de Gauss, plus 72
5-2
Équilibre dans un champ électrostatique 72
5-3
Équilibre en présence de conducteurs 74
5--4
Stabilité des atomes . . . . . 75
Le champ d'une charge linéique
5-5 76
5--6
Plan chargé; deux plans chargés 77
Sphère· chargée; couche sphérique
5-7 79
5-8
Le champ dû à une charge ponctuelle est-il exacte-
ment en 1/r2 ? . . . . . . . . . . . . 80
5-9 Les champs d'un conducteur . . . . . 84
5-10 Le champ dans une cavité d'un conducteur 85
xii
Chapitre 7 Le champ électrique: exemples divers (suite)
7-1 Méthodes dê calcul du champ électrostatique 111
7-2 Champs à deux dimensions; fonctions
d'une variable complexe 113
7-3 Oscillations des plasmas 118
7-4 Particules colloïdales dans un électrolyte 121
7-5 Le champ électrostatique d'une grille . 124
Chapitre 13 Magnétostatique
xiv
Chapitre 15 . Le potentiel-vecteur
XV
Chapitre 20 Solutions des équations de Maxwell dans le vide
20-1 Ondes dans le vide; ondes planes 348
20-2 Ondes à trois dimensions . 358
20-3 Imagination scientifique 360
20-4 Ondes sphériques . . . . 363
Chapitre 21 Solutions des équations de Maxwell en
présence de charges et de courants
21-1 Lumière et ondes électromagnétiques . . . . . 368
21-2 Ondes sphériques issues d'une source ponctuelle 370
21-3 La solution générale des équations de Maxwell . 372
21-4 Champs d'un dipôle oscillant . . . . . . . . 374
21-5 Les potentiels d'une charge en mouvement;
solution générale de Liénard et Wiechert . 380
21-6 Les potentiels d'une charge se déplaçant à
vitesse constante, formule de Lorentz . 384
Index alphabétique 388
xvi
I
Electrwmagnétisnw
2
partie devrait repousser les autres. Pourquoi, alors, n'éclate-t-il pas? Mais l'électron
a-t-il des « parties »? Peut-être devrions-nous dire que l'électron est un point et que les
forces électriques agissent seulement entre différentes charges ponctuelles, si bien que
l'électron n'agit pas sur lui-même. Peut-être. Tout ce que nous pouvons dire est que la
question de savoir ce qui maintient la cohésion de l'électron a provoqué de nombreuses
difficultés dans la tentative d'élaborer une théorie complète de l'électromagnétisme.
La question n'a jamais reçu de réponse. Nous reviendrons encore sur ce sujet dans de
prochains chapitres.
a alpha l' nu
{3
'Y r
beta
gamma 0
~ - xi (ksi)
omicron
0 Li delta 7r II pi
f epsilon p rho
r zeta (}' ~ sigma
1/ eta T tau
e e theta V 'f upsilon
iota cp <I> phi
K kappa X chi (khi)
À A lambda ,,, '1t psi
µ, mu w Q omega
Comme nous l'avons vu, nous devrions nous attendre à ce que ce soit une combinaison
des forces électriques et des effets quantiques qui détermine la structure détaillée des
matériaux, et par conséquent, leurs propriétés. Certains matériaux sont durs, d'autres
sont mous. Certains sont « conducteurs » de l'électricité - parce que leurs électrons
sont libres de se déplacer; d'autres sont des « isolants » - parce que leurs électrons sont
liés rigidement à des atomes individuels. Nous verrons un peu plus tard l'origine de
certaines de ces propriétés, mais ceci est un sujet très compliqué, aussi commencerons-
nous par considérer les forces électriques seulement dans des cas simples. Nous
commencerons par ne traiter que les lois de l'électricité- y compris le magnétisme, qui est
en réalité une partie du même sujet.
Nous avons dit que la force électrique, comme une force de gravitation, décroît
comme l'inverse du carré de la distance des charges. Cette relation est appelée la loi de
Coulomb. Mais ce n'est pas précisément vrai quand les charges sont en mouvement
- les forces électriques dépendent aussi des mouvements des charges d'une façon com-
pliquée. Nous appelons force magnétique une partie de la force qui s'exerce entre des
charges en mouvement. C'est vraiment un aspect d'un effet électrique. C'est pourquoi
nous appelons le sujet « électromagnétisme ».
Il existe un principe général important qui permet de traiter les forces électro-
magnétiques d'une façon relativement simple. On trouve, expérimentalement, que la force
qui agit sur une charge donnée - quelque soit le nombre des charges existantes ou la
manière dont elles se déplacent - dépend seulement de la position de cette charge
3
donnée, de la vitesse de cette charge, et de la valeur de cette charge. On peut écrire la
force F agissant sur une charge q se déplaçant à la vitesse v sous la forme
d[
-d mv
2 2 112 ] = F = q(E
t (1 - V /c )
+ v X B). (1.2)
Ainsi, si E et B sont donnés, nous pouvons trouver les mouvements. Maintenant, nous
avons besoin de savoir comment sont produits les champs E et B.
L'un des principes simplificateurs les plus importants sur la façon dont les champs sont
produits est le suivant: supposons qu'un certain nombre de charges, se déplaçant d'une
certaine manière, produise un champ Ei. et qu'un autre ensemble de charges produise un
champ E 2 • Si les deux ensembles de charges sont en place au même instant, (conservant
les mêmes positions et mouvements que lorsqu'ils étaient considérés séparément),
alors le champ produit est juste la somme
(1.3)
Ce fait est appelé le principe de superposition des champs. Il s'applique aussi aux champs
magnétiques.
Ce principe signifie que si nous connaissons la loi selon laquelle les champs électrique
et magnétique sont produits par une charge unique se déplaçant de façon arbitraire,
nous connaissons complètement toutes les lois de l'électrodynalnique. Si nous voulons
connaître la force qui s'exerce sur la charge A, nous devons seulement calculer les
champs E et B produits par chacune des charges B, C, D, etc., puis additionner les
champs E et B dus à toutes les charges pour trouver les champs, et à partir d'eux, les
forces agissant sur la charge A. Si seulement il s'était avéré que le champ produit par une
charge unique était simple, ceci serait la façon la plus nette de décrire les lois de
l'électrodynamique. Nous avons déjà donné une description de cette loi (chapitre 28,
Vol. I) et elle est, malheureusement, plutôt compliquée.
Il s'avère que la forme sous laquelle les lois de l'électrodynamique sont les plus simples,
n'est pas celle à laquelle vous pourriez vous attendre. Donner une formule pour la force
qu'exerce une charge sur une autre, n'est pas ce qu'il y a de plus simple. Il est vrai que si
les charges sont immobiles la
4
loi de force coulombienne est simple, mais quand les charges sont en mouvement les
relations sont compliquées, entre autres, par les retards et par les effets de l'accélération.
En conséquence, nous ne souhaitons pas présenter l'électrodynamique seulement à
partir des lois de forces qui s'exercent entre les charges; nous trouvons qu'il est plus
commode d'adopter un autre point de vue - celui qui apparemment rend le plus facile
le maniement des lois de l'électrodynamique.
Suivant cette idée, nous associons à tout point (x, y, z) de l'espace, deux vecteurs E et B,
qui peuvent varier avec le temps. Les champs électrique et magnétique sont alors consi-
dérés comme des fonctions vectorielles de x, y, z, et t. Puisqu'un vecteur est caractérisé
par ses composantes, chacun des champs E (x, y, z, t) et û (x, y, z, 1) représente trois
fonctions mathématiques de x, y, z et t.
C'est précisément parce que E (ou 8) peut être défini en tout point de l'espace qu'on
l'appelle un « champ ». Un « champ» est toute grandeur physique qui prend une valeur
différente en tout point de l'espace. La température, par exemple, est un champ - dans
ce cas, un champ scalaire - que nous écrivons T (x, y, z). La température pourrait aussi
varier avec le temps et nous dirions que le champ de température est fonction du temps,
et nous écririons T (x, y, z, t). Un autre exemple est le « champ des vitesses » d'un
liquide en écoulement. Nous écrivons v (x, y, z, t) pour la vitesse du liquide en chaque
point de l'espace à l'instant t. C'est un champ vectoriel.
Revenons aux champs électromagnétiques - bien qu'ils soient produits par des charges
selon des formules compliquées-, ils ont la propriété caractéristique importante suivante:
les relations entre les champs en un point et leurs valeurs en un point voisin sont très simples.
Avec seulement quelques relations de ce genre écrites sous forme d'équations différen-
tielles nous pouvons décrire complètement les champs. C'est sous la forme de telles
équations que les lois de l'électrodynamique sont le plus simplement écrites.
Il y a eu de nombreuses inventions pour aider l'esprit à se représenter le comportement
des champs. La plus correcte est aussi la plus abstraite: nous considérons tout simplement
les champs comme des fonctions mathématiques de la po!)ition et du temps. Nous
pouvons aussi essayer de donner une image du champ en traçant des vecteurs en beaucoup
de points de l'espace, chacun d'eux donnant l'intensité et la direction du champ en ce
point. C'est ce qu'illustre la Fig. 1-1. Nous pouvons pourtant aller plus loin et tracer
des lignes qui sont en tout point tangentes aux vecteurs - qui, pour ainsi dire, suivent les
flèches et enregistrent
5
la direction du champ. Quand nous faisons cela, nous perdons la trace des modules des
vecteurs, mais nous pouvons garder la trace de l'intensité du champ en traçant les lignes
espacées quand le champ est faible, et serrées quand il est fort. Nous adoptons la conven-
tion selon laquelle le nombre de lignes par unité de surface, compté sur la normale aux
lignes, est proportionnel à l'intensité du champ. Ceci n'est évidemment qu'une approxima-
tion et il faudra en général, que de temps en temps de nouvelles lignes prennent naissance
de façon à en garder un nombre en rapport avec l'intensité du champ. Le champ de la
Fig. 1-1 est représenté par les lignes de champ de la Fig. 1-2.
-
- --
- ---
.,A'
6
par l'aire de cette surface. Pour une surface fermée quelconque, l'écoulement total
- ou flux - est le produit de la moyenne de la composante de la vitesse dirigée vers
l'extérieur, par l'aire de la surface:
Dans le cas d'un champ électrique, nous pouvons définir mathématiquement quelque
chose de semblable à un écoulement, et là encore nous l'appelons le flux, mais
évidemment ce n'est pas l'écoulement d'une substance, car le champ électrique n'est pas
la vitesse de quelque chose. Il apparaît cependant que la grandeur mathémàtique qui est
la moyenne de la composante normale du champ a encore un sens utile. Nous parlerons
donc, du flux électrique - défini aussi par l'Eq. (1.4). Enfin, il est aussi utile de parler de
flux, non seulement à travers une surface fermée, mais à travers toute surface limitée.
Comme précédemment, le flux à travers une telle surface est défini comme le produit de
la moyenne de la composante normale d'un vecteur par l'aire de la surface. Ces idées
sont illustrées sur la Fig. 1-3.
Il y a une seconde propriété d'un champ de vecteurs qui se rapporte à une courbe
plutôt qu'à une surface. Supposons encore que nous considérions un champ de vitesses,
qui décrit l'écoulement d'un liquide. Nous pourrions nous poser cette question intéres-
sante: le liquide circule-t-il? Par ceci nous voulons dire: y a-t-il un mouvement de rotation
global le long d'une boucle? Supposons qu'à un instant donné on solidifie le liquide
partout sauf dans un tube de section constante, qui forme une boucle fermée comme sur
la Fig. 1-4. A l'extérieur du tube le liquide s'arrête, mais à l'intérieur du tube il peut
continuer à se déplacer grâce à son impulsion - c'est-à-dire si l'impulsion dans un sens est
plus grande que dans le sens inverse, dans le tube. Définissons une grandeur, appelée la
circulation, comme le produit de la vitesse résultante du liquide dans le tube, par sa
circonférence. Nous pouvons de nouveau étendre cette idée et définir la «circulation »
pour tout champ de vecteurs (même quand il n'y a rien qui se meut). Pour tout champ de
vecteurs, la circulation le long <lune courbe fermée imaginaire quelconque est définie
comme la moyenne de la composante
7
(b)
\
1
1
1
1
1
1
1
1
1
1
(c).. - - .
Fig. 1--4. (a) Le champ de vitesse dans
un liquide. Imaginons un tube de section
uniforme qui suit une courbe fermée arbi-
traire comme dans (b). Si le liquide était
soudainement solidifié partout excepté à
l'intérieur du tube, le liquide du tube
circulerait comme on le voit dans (c).
Vous pouvez voir que cette définition donne un nombre qui est vraiment proportionnel
à la vitesse de circulation dans le tube solidifié à un instant donné, décrit ci-dessus.
Avec seulement ces deux notions - flux et circulation - nous pouvons décrire d'un seul
coup toutes les lois de l'électricité et du magnétisme. Il se peut que vous ne compreniez
pas immédiatement le sens des lois, mais elles vous donneront une idée de la façon
dont la physique de l'électromagnétisme sera finalement décrite.
8
où E0 est une constante convenable. (La constante E0 est généralement lue« epsilon-zéro ».)
S'il n'y a pas de charges à l'intérieur de la surface, même s'il y a des charges au voisinage
extérieur de la surface, la moyenne de la composante normale de E est nulle, donc, il n'y a
pas de flux total à travers la surface. Pour montrer la puissance de ce genre d'énoncé, nous
pouvons montrer que l'Eq. (1.6) est équivalente à la loi de Coulomb, à condition seule-
ment d'ajouter que le champ dû à une charge unique possède la symétrie sphérique. Pour
une charge ponctuelle, nous traçons une sphère centrée sur la charge. Alors la composante
normale moyenne est exactement l'intensité de E en tout point, puisque le champ doit
être radial et avoir même intensité en tout point de la sphère. Notre règle nous dit
alors que le produit du champ à la surface de la sphère, par l'aire de la sphère -c'est-à-dire,
le flux sortant - est proportionnel à la charge intérieure. Si nous augmentons le rayon
de la sphère, l'aire augmente comme le carré du rayon. Le produit de la composante
normale moyenne par l'aire de la sphère doit toujours être égal à la même charge
intérieure, et ainsi, le champ doit décroître comme l'inverse du carré de la distance
- nous obtenons un« champ en l/r2 ».
La constante c 2 qui figure dans l'Eq. (1.9) est le carré de la vitesse de la lumière. Elle
apparaît parce que le magnétisme est en réalité un effet relativiste de l'électricité. La
constante e0 a été introduite pour permettre le choix d'une unité d'intensité de courant
commode.
Les équations (1.6) à (1.9) jointes à l'Eq. (1.1) sont toutes les lois de l'électro-
dynamique*. Comme vous vous en souvenez, les lois de Newton étaient très simples à
écrire, mais elles conduisaient à des tas de conséquences compliquées et il nous fallut
longtemps pour apprendre à les connaître toutes. Les lois dont nous nous occupons
maintenant, ne sont pas tout à fait aussi simples à écrire, ce qui signifie que leurs consé-
quences seront plus élaborées et il nous faudra beaucoup de temps pour les formuler
toutes.
* Nous devons seulement ajouter une remarque au sujet de certaines conventions pour le signe
de la circulation.
B
(de l'aimant)
Vers
la borne
Nous pouvons illustrer quelques-unes des lois de l'électrodynamique par une série
de petites expériences qui montrent qualitativement les relations entre les champs élec-
trique et magnétique. Vous avez expérimenté le premier terme del'Eq. (1.1) en vous pei-
gnant, aussi nous ne le montrerons pas. On peut faire voir le second terme de l'Eq. (1.1)
en faisant passer un courant dans un fil tendu au-dessus d'un aimant droit, comme le
montre la Fig. 1-6. Le fil se déplace quand le courant est établi à cause de la force
F = qv x B Quand un courant passe, les charges à l'intérieur du fil se déplacent, donc
elles ont une vitesse v, et le champ magnétique dû à l'aimant exerce sur elles une force
qui a pour effet de pousser le fil d'un côté.
Quand le fil est poussé vers la gauche, nous pourrions nous attendre à ce que l'aimant
soit poussé vers la droite. (Autrement, nous pourrions mettre le tout dans un wagon et
avoir un système propulsif qui ne conserve pas l'impulsion!) Bien que la force soit trop
petite pour que le mouvement de l'aimant soit visible, un système magnétique plus
sensible, comme l'aiguille d'une boussole, montre ce mouvement.
Comment le fil pousse-t-il l'aimant? Le courant dans le fil produit lui-même un champ
magnétique qui exerce des forces sur l'aimant. En accord avec le dernier terme de
l'Eq. (1.9), un courant doit avoir une circulation de 8-dans ce cas, les lignes de champ de B
sont des cercles entourant le fil comme l'indique la Fig. 1-7. C'est le champ B qui est
responsable de.la force qui s'exerce sur l'aimant.
L'équation (1.9) nous dit que, pour un courant donné dans le fil, la circulation de B
est la même pour toute courbe qui entoure le fil. Pour des courbes - disons des cercles -
qui sont plus éloignées du fil, la circonférence est plus grande, donc la composante
tangentielle de B doit décroître. Vous voyez que nous devons nous attendre à ce que B
décroisse Ilnéairement avec la distance à un long fil rectiligne.
Donc, nous venons dire qu'un courant dans un fil produit un champ magnétique, et
que, quand il y a un champ magnétique, il y a une force sur le fil où circule le courant.
Alors, nous pourrions aussi nous attendre à ce que, si nous produisons un champ avec un
fil parcouru par un courant, il exerce une force sur un autre fil parcouru aussi par un
courant.
10
Fig. 1-7. Le champ magnétique du fil
exerce une force sur l'aimant.
"'
Fig. 1-8. Deux fils, parcourus par des
courants, exercent des forces l'un sur l'autre.
Q Bobi"' do fil
11
Ceci peut être montré en prenant deux fils tendus comme l'indique la Fig. 1-8. Quand les
courants sont de même sens, les deux fils s'attirent, mais quand les courants sont de sens
contraire, ils se repoussent.
En bref, les courants électriques, comme les aimants, créent des champs magnétiques.
Mais, à propos, qu'est-ce qu'un aimant? Si les champs magnétiques sont produits
par des charges en mouvement, n'est-il pas possible que le champ magnétique dû à un
morceau de fer soit réellement le résultat de courants? C'est bien le cas. Nous pouvons
remplacer l'aimant droit de notre expérience par une bobine de fil, comme sur la Fig. 1-9.
Quand un courant circule dans la bobine - comme dans Je fil tendu au-dessus d'elle - nous
observons un mouvement du fil exactement comme avant, quand nous avions un aimant
au lieu d'une bobine. En d'autres termes, le courant dans la bobine imite un aimant.
Il apparaît donc qu'un morceau de fer agit comme s'il contenait un courant qui circulerait
en permanence. Nous pouvons en fait considérer les aimants comme des courants
permanents dans les atomes de fer. La force agissant sur l'aimant, Fig. 1-7, est due au
second terme de l'Eq. (1.1).
D'où proviennent les courants? Une réponse possible serait: du mouvement des
électrons sur les orbites atomiques. En fait, ce n'est pas Je cas pour le fer, quoique ce le soit
pour certaines substances. En plus du mouvement orbital dans un atome, un électron
pivote aussi autour de son propre axe - de façon quelque peu semblable à la rotation
de la Terre sur elle-même - et c'est le courant dû à ce pivotement qui donne naissance
au champ magnétique dans le fer. (Nous disons « quelque peu semblable à la rotation
de la Terre «car le problème est si profondément quantique que les idées classiques
ne décrivent vraiment pas si bien les choses.) Dans la plupart des substances, certains
électrons pivotent dans un sens, et d'autres dans l'autre, si bien que le magnétisme s'an-
nule, mais dans le fer - pour une raison mystérieuse que nous discuterons plus tard -
plusieurs des électrons pivotent avec Jeurs axes parallèles, et telle est l'origine du magné-
tisme.
Puisque les champs des aimants proviennent des courants, nous n'avons donc aucun
terme supplémentaire à ajouter aux Eq. (1.8) ou (1.9) pour tenir compte des aimants.
Nous prenons simplement tous les courants, y compris les courants dus aux électrons qui
pivotent, et ainsi, la loi est exacte. Remarquons aussi que l'Eq. (1.8) exprime Je fait
qu'il n'y a pas de «charges» magnétiques analogues aux charges électriques qui appa-
raissent dans le second membre de l'Eq. (1.6). On n'en a jamais trouvé.
Le premier terme du membre de droite de l'Eq. (1.9) a été découvert théoriquement
par Maxwell et possède une grande importance. Il dit que dçs champs électriques variables
produisent des effets magnétiqu-es. En fait, sans ce terme, l'équation n'aurait aucun sens,
puisque sans lui il ne pourrait pas y avoir de courants dans des circuits non fermés.
Mais de tels courants existent, comme nous pouvons le voir dans l'exemple suivant.
Imaginons un condensateur fait de deux plateaux. On le charge avec un courant qui cir-
cule vers un plateau et s'éloigne de l'autre, comme le montre la Fig. 1-10. Nous traçons
une courbe C autour d'un des fils, puis une surface de bord C qui coupe le fil, comme la
surface S 1 de la figure. D'après l'Eq. (1.9) la circulation de B le long de C est donnée par
le courant dans le fil (multiplié par c2). Mais que devient-elle si nous prenons au lieu de S1'
une surface différente S 2 en forme de bol et qui passe entre les plateaux du condensateur,
en ne coupant jamais le fil? Il n'y a certainement aucun courant à travers cette surface.
Mais évidemment, changer simplement la position d'une surface imaginaire, ne va
certainement pas changer un champ magnétique réel! La circulation de
12
B doit être ce qu'elle était avant. Le premier terme du second membre de l'Eq. (1.9)
donne bien en fait, combiné au second terme, le même résultat pour les deux surfaces S 1
et S 2 • Pour S 2, la circulation de B est donnée par la variation par unité de temps, du flux
de E régnant entre les plateaux du condensateur. Et il se trouve que le champ variable E
est relié au courant justement par la relation qu'il faut pour que l'Eq. (1.9) soit vérifiée.
Maxwell vit que cette relation était nécessaire, et il fut le premier à écrire l'équation com-
plète.
Avec le dispositif de la Fig. 1-6 nous pouvons démontrer une autre loi de l'électro-
magnétisme. Nous déconnecton~ les extrémites du fil de la batterie et nous les relions à
un galvanomètre qui nous indique quand un courant passe dans le fil. Quand nous
·poussons le fil de côté dans le champ magnétique de l'aimant, nous observons un courant.
Un tel effet est simplement une autre conséquence de l'Eq. (1.1)- les électrons du fil subis-
sent la force F = qv x B. Les électrons ont une vitesse dans la direction et le sens du
déplacement du fil, puisqu'ils se déplacent avec le fil. Ce v avec un B vertical dû à l'aimant,
produit une force sur les électrons dirigée le long du fil, qui met les électrons en mouve-
ment vers le galvanomètre.
13
1-5 Que sont les champs?
Nous allons maintenant faire quelques remarques sur notre façon d'envisager ce sujet.
Vous pouvez penser: « toutes ces histoires de flux et de circulations sont bien abstraites.
II y a des champs électriques en tout point de l'espace, et puis, il y a ces «lois». Mais
que se passe-t-il réellement? Pourquoi ne pouvez-vous l'expliquer, par exemple, par ce
qui se passe réellement entre les charges. » Et bien, cela dépend de vos préjugés. Beaucoup
de physiciens disaient que l'action à distance, sans intermédiaire, était inconcevable.
(Comment pouvaient-ils trouver une idée inconcevable, alors qu'elle avait déjà été
conçue?) Ils disaient: «voyez, les seules forces que nous connaissons sont celles de
l'action directe d'un morceau de matière sur un autre. Il est impossible qu'il puisse
y avoir une force sans quelque chose qui la transmette!» Mais que se passe-t-il vraiment
quand nous étudions «l'action directe» d'un morceau de matière en contact avec
un autre? Nous découvrons que ce n'est pas un morceau en contact avec un autre:
ils sont légèrement séparés, et il y a des forces électriques agissant à une échelle minuscule.
Ainsi nous trouvons que nous allons expliquer la soi-disant action directe de contact
en faisant appel aux forces électriques. Ce n'est certainement pas raisonnable d'insister
sur le fait qu'une force électrique doit ressembler à la vieille notion familière de force
musculaire qui pousse ou qui tire, puisqu'il se trouve que les forces musculaires vont être
interprétées comme des forces électriques! La seule question raisonnable est de se deman-
der quel est le moyen le plus commode pour d'écrire les effets électriques. Certains
préfèrent les représenter comme une interaction à distance entre charges, et utiliser une loi
compliquée. D'autres se passionnent pour les lignes de champ. Ils ne font que tracer des
lignes de champ et pensent qu'écrire des E et des Best trop abstrait. Les lignes de champ,
cependant, sont seulement une manière grossière de décrire un champ, et il est très
difficile de donner les lois quantitatives correctes directement en termes de lignes de
champ. De plus, les idées sur les lignes de champ ne contiennent pas le principe fondamen-
tal de l'électrodynamique, à savoir le principe de superposition. Même si nous connais-
sons l'allure des lignes de champ pour un ensemble de charges, et l'allure pour un autre
ensemble, nous n'avons aucune idée sur l'allure des lignes de champ obtenues quand les
deux ensembles de charges sont présents simultanément. Du point de vue mathématique
par contre, la superposition est facile - nous additionnons simplement les deux vecteurs.
Les lignes de champ ont l'avantage de donner une image vivante, mais elles ont aussi
des inconvénients. L'interaction directe est une façon de voir qui a de grands avantages
quand il s'agit de charges électriques au repos, mais a de grands inconvénients quand il
s'agit de charges en mouvement rapide.
La meilleure façon est d'utiliser l'idée abstraite de champ. Que ce soit abstrait est bien
malheureux mais nécessaire. Les tentatives pour essayer de représenter le champ élec-
trique comme le mouvement des roues d'un engrenage, ou par des lignes de champ,
ou comme des tensions dans une certaine substance, ont coûté plus d'efforts aux
physiciens qu'il n'en aurait fallu simplement pour donner les réponses exactes au
problème de l'electrodynamique. Il est.intéressant de noter que les équations correctes
du comportement de la lumière dans les cristaux avaient été trouvées par McCullough en
1843. Mais on lui a dit:« oui, mais il n'existe pas de substance réelle dont les propriétés
mécaniques puissent satisfaire ces équations, et puisque la lumière est une oscillation qui
doit vibrer dans quelque chose, nous ne pouvons pas croire à cette histoire d'équations
abstraites. »Si les gens avaient eu l'esprit plus ouvert, ils auraient pu croire aux équations
exactes du comportement de la lumière bien plus tôt qu'ils ne le firent.
14
En ce qui concerne le champ magnétique, nous pouvons faire la remarque suivante:
supposons que nous ayons finalement réussi à dresser un tableau du champ magnétique
au moyen de certaines lignes, ou de roues d'engrenage en mouvement dans l'espace.
Alors, essayons d'expliquer ce qui se passe quand deux charges se déplacent dans l'espace,
parallèlement et avec la même vitesse. Comme elles sont en mouvement, elles se com-
portent comme deux courants et elles ont un champ magnétique associé (comme les
courants dans les fils de la Fig. 1-8). Un observateur qui se déplacerait avec les deux
charges, cependant, verrait ces deux charges comme stationnaires et diraif qu'il n'y a pas
de champ magnétique. Les « roues d'engrenage» ou les « lignes» disparaissent quand
on se déplace avec l'objet! Tout ce que nous avons réussi à faire est d'inventer un nouveau
problème. Comment les roues d'engrenage, peuvent-elles disparaître?! Les gens qui
tracent des lignes de champ se heurtent aux mêmes difficultés. Non seulement il n'est pas
possible de dire si les lignes de champ se déplacent ou non avec les charges - mais elles
peuvent disparaître complètement dans certains systèmes de coordonnées.
Ce que nous disons donc, c'est que le magnétisme est réellement un effet relativiste.
Dans le cas que nous venons de considérer, dès deux charges qui se déplacent
parallèlement, nous devons nous attendre à des corrections relati ;istes sur le mouvement,
avec des termes de l'ordre de v2/c 2 • Ces corrections doivent correspondre à la force
magnétique. Mais que dire de la force qui s'exerce entre les deux fils dans notre expérience
(Fig. 1-8)? Là, la force magnétique est la seule force. Elle n'avait pas l'air d'une
«correction relativiste». De plus, si nous évaluons les vitesses des électrons dans le fil,
(vous pouvez faire cela vous-mêmes), nous trouvons que leur valeur moyenne le long
du fil est eviron 0,01 centimètre par seconde. Ainsi v2/c 2 vaut environ 10-25 • Sûrement
une « correction » négligeable. Mais non! Quoique la force magnétique soit dans ce cas
10-25 fois la force électrique « normale» qui s'exerce entre les électrons en mouvement,
rappelons-nous que les forces électriques« normales» ont disparu en raison de l'équilibre
électrique presque parfait - car les fils ont le même nombre de protons et d'électrons.
L'équilibre est bien plus précis que 1/1025 et le petit terme relativiste que nous appelons
la force magnétique est le seul qui reste. Il devient le terme dominant.
C'est la compensation presque parfaite des effets électriques qui a permis d'étudier les
effets relativistes (c'est-à-dire le magnétisme) et de découvrir les équations correctes
- à l'ordre v2/c2 - bien que les physiciens n'aient pas su que c'était cela qui se passait.
Et c'est pourquoi, quand la relativité fut découverte, les lois de l'électromagnétisme
n'eurent pas besoin d'être changées. Contrairement aux lois de la mécanique, elles étaient
correctes à la précision de v2/c 2 près.
15
découvrirent une série de phénomènes nouveaux qui étaient en réalité des aspects de
ces effets de l'ambre ou de l'aimant. Maintenànt nous comprenons que les phénomènes
d'interaction chimique, et finalemement de la vie elle-même, doivent être compris dans
le cadre de l'électromagnétisme.
En même temps que se développait la compréhension de l'électromagnétisme,
des possibilités techniques qui défiaient l'imagination des générations précédentes
apparaissaient: il devint possible d'envoyer des signaux par télégraphe sur de longues
distances, et de parler à quelqu'un à des kilomètres de distance sans aucune connection
entre les deux, et de commander des systèmes d'une puissance énorme - une immense
turbine hydraulique reliée par des filaments sur des centaines de kilomètres à un moteur
qui tourne en liaison avec la turbine - plusieurs milliers de dérivations - dix mille moteurs
à dix mille endroits différents, faisant marcher les machines des usines et des maisons -
tous tournant grâce à la connaissance des lois de l'électromagnétisme.
Aujourd'hui nous mettons en application des effets encore plus subtils. Les forces
électriques, aussi énormes qu'elles soient, peuvent aussi êtr-e très petites, et nous pouvons
les contrôler et les utiliser de mille façons. Nos instruments sont si sensibles que nous
pouvons dire ce que fait un homme, par la façon dont il agit sur les électrons d'une fine
tige métallique, à des centaines de kilomètres. Tout ce que nous avons à faire est d'utiliser
la tige, comme une antenne pour un récepteur de télévision!
Une longue revue de l'histoire de l'humanité - faite sur, disons, dix mille ans à partir
de maintenant - montrera sans le moindre doute que la découverte par Maxwell des
lois de l'électrodynamique est l'événement le plus important du 19e siècle. La
guerre de Sécession fera preuve d'une pâle insignifiance provinciale comparée à cet
événement scientifique important de la même décennie.
16
Calcul df/férentfel des champs de vecteurs
17
la physique parce qu'ils perdent de vue la physique. Ils disent: «Vous voyez, ces
équations différentielles - les équations de Maxwell - c'est toute l'électrodynamique;
les physiciens reconnaissent qu'il n'y a rien qui ne soit contenu dans ces équations.
Ces équations sont compliquées, mais après tout, ce ne sont que des équations
mathématiques et si je les comprends mathématiquement dans tous les coins, je
comprendrais la physique dans tbus les coins». Seulement ça ne marche pas comme ça.
Les mathématiciens qui étudient la physique avec une telle conception -et il y en a eu beau-
coup - n'apportent généralement qu'une faible contribution à la physique et, en fait, peu
de chose aux mathématiques. Ils échouent parce que les situations physiques réelles dans
le monde réel sont si complexes qu'il est nécessaire d'avoir une compréhension beaucoup
plus large des équations.
Ce que signifie en fait comprendre une équation - c'est-à-dire plus qu'au sens stricte-
ment mathématique - a été décrit par Dirac. Il a dit: « Je comprends ce que signifie une
équation si j'ai le moyen de comprendre les caractéristiques de sa solution sans la
résoudre effectivement ». Ainsi si nous avons le moyen de savoir ce qui doit se passer dans
des circonstances données sans résoudre effectivement les équations, nous« comprenons»
alors les équations, telles qu'elles s'appliquent à ces circonstances. L'intelligence de la
physique est une chose imprécise, tout à fait différente des mathématiques, mais
absolument nécessaire à un physicien.
Habituellement, on fait un cours tel que celui-ci en développant graduellement les
notions physiques - en partant de cas simples et en continuant par des cas de plus en plus
compliqués. Ceci exige que vous oubliiez continuellement ce que vous avez appris
auparavant - des choses qui sont vraies dans certains cas, mais qui ne sont pas vraies en
général. Par exemple, la« loi »qui dit que la force électrique dépend du carré de la distance
n'est pas toujours vraie. Nous préférons la démarche opposée. Nous préférons prendre
d'abord les lois complètes et, revenant en arrière, les appliquer à des cas simples tout en
développant chemin faisant les concepts physiques. Et c'est ce que nous allons faire.
Notre approche est totalement opposée à l'approche historique dans laquelle on déve-
loppe le sujet en fonction des expériences qui ont fourni les informations. Mais la physique
a été développée pendant ces deux cents dernières années par quelques personnes très
ingénieuses, et comme nous n'avons qu'un temps limité pour acquérir nos connais-
sances, nous ne pouvons pas étudier tout ce qu'ils ont fait. Une des choses que
nous aurons malheureusement tendance à perdre de vue dans ce cours, c'est le développe-
ment historique et expérimental. Nous espérons que vous pourrez combler quelques-
unes de ces lacunes au laboratoire. Vous pourrez aussi voir ce que nous sommes obligés
de laisser de côté en lisant !'Encyclopédie Britannique qui contient d'excellents historiques
sur l'électricité et sur d'autres domaines de la physique. Vous trouverez aussi des
renseignements historiques dans de nombreux manuels d'électricité et de magnétisme.
18
propriétés mathématiques des champs de vecteurs. C'est d'une très grande importance
non seulement pour l'électromagnétisme mais aussi pour toutes sortes de domaines de la
physique. Tout comme le calcul différentiel et intégral ordinaire, le calcul différentiel
vectoriel est très important pour toutes les branches de la physique. Abordons le sujet.
~~ ~ ~-...w-. ~ Q..,... ~
c.~.;,.,...,.~
.... ~~IUI)/~
......
E .,,.,.., &: o-~-Ê .
t.,.~ ~~~-
- E
~~Q...~?~('.
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w z .,,,...
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l 71.
"'
Quelques résultats de l'algèbre des vecteurs sont donnés ci-dessous. Nous supposons
que vous les connaissez déjà.
A x B = vecteur (2.2)
(A X B), = A,,811 - A 11 B,,
(A X B),, = A 11 B, - A.B11
(A X B)11 = A.B,, - A,,B,
AXA=O (2.3)
A (A X B) = 0 (2.4)
A (B X C) = (A X B) · C (2.5)
19
Nous utiliserons aussi les deux égalités suivantes déduites du calcul différentiel:
i:Jf i:Jf i:Jf
tlf(x, y, z) = i:Jx !lx + iJy tly + iJz tlz, (2.7)
(2.8)
La première équation (2.7) n'est bien entendu vraie qu'à la limite où ~z, ~Y et M
tendent vers zéro.
Le champ physique le plus simple est un champ scalaire. Par champ, vous vous en
souvenez, nous entendons une grandeur qui dépend de la position dans l'espace. Par
champ scalaire nous désignons simplement un champ qui est caractérisé en chacun de ses
points par un seul nombre - un scalaire. Bien entendu ce nombre peut varier au cours du
temps, mais nous n'avons pas à nous en inquiéter pour le moment. Nous parlerons de
l'aspect du champ à un instant donné. Coinme exemple de champ scalaire, considérons
un bloc solide de matériau qui a été chauffé en certains points et refroidi en d'autres, de
sorte que la température varie d'un point à un autre d'une manière compliquée. La
température sera alors une fonction de x, y, et z, coordonnées de position dans l'espace,
mesurées dans un système de coordonnées rectangulaires. La température est un champ
scalaire.
y
Une façon de se représenter un champ scalaire est d'imaginer des« contours» qui sont
des surfaces imaginaires passant par tous les points en lesquels le champ prend la même
valeur, tout comme sur une carte les lignes de niveau joignent des points ayant même
altitude. Dans le cas d'un champ de température les contours sont appelés «surfaces
isothermes» ou isothermes. La figure 2-1 illustre un champ de températures et montre
comment varie T en fonction de x et y quand z = O. On a tracé plusieurs isothermes.
Il existe aussi des champs de vecteurs. L'idée est très simple. On se donne un vecteur
en chaque point de l'espace. Ce vecteur varie de point en point. Considérons par exemple
un corps en rotation. La vitesse du matériau qui constitue le corps en tout point est un
vecteur
20
fonction de la position du point (Fig. 2-2). Comme second exemple, considérons le
flux de chaleur dans un bloc de matériau. Si la température dans le bloc est élevée en un
point et basse en un autre, il y aura propagation de la chaleur des points chauds vers les
points froids. La chaleur se propagera dans des directions différentes dans des parties
différentes du bloc. Le flux de chaleur est une quantité directionnelle que nous appellerons
h. Sa grandeur mesure la quantité de chaleur qui s'écoule. Des exemples de vecteurs flux
de chaleur sont donnés sur la Fig. 2-1.
y
21
Fig. 2-4. Le flux de chaleur à travers
ô.a 2 est le même qu'à travers ô.a,.
On peut définir le vecteur h d'une autre façon - en fonction de ses composantes. Nous
nous demandons quelle est la quantité de chaleur qui traverse une petite surface faisant
un angle quelconque avec la direction de propagation. Sur la Fig. 2-4 nous montrons une
petite surface Aa 2 inclinée par rapport à la surface Aa 1, qui est perpendiculaire à la direc-
tion de propagation. Le vecteur unité o est normal à la surface Aa2 • L'angle entre o e
et h est le même que l'angle que font les surfaces entre elles (puisque h est normal à
Aa 1). Quel est maintenant le flux de chaleur par unité de surface qui traverse Aa 2 ? Le
flux à travers Aa 2 est le même qu'à travers Aa1 ; seules les aires sont différentes. En fait,
Aa 1 = Aa2 cos 8. Le flux de chaleur à travers Aa2 est
tl] tlJ
··-·- = - cos 8· = h · n. (2.10)
t.a 2 fla 1
Interprétons cette équation :-Je flux de chaleur (par unité de temps et unité de surface)
à travers un élément de surface quelconque, dont Je vecteur unité de la normale est n,
est donné par h · n. Nous pourrions dire également: la composante du vecteur flux de
chaleur perpendiculaire à l'élément de surface Aa 2 est h · o. Nous pouvons, si l'on veut,
considérer que ces énoncés définissent h. Nous appliquerons les mêmes concepts à
d'autres champs de vecteurs.
Lorsque les champs varient au cours du temps nous pouvons décrire leurs variations
en donnant Jeurs dérivées par rapport au temps. Nous voulons décrire de la même façon
les variations en fonction de la position parce que-nous nous intéressons, par exemple,
à la relation qui existe entre la température en un certain point et la température en un
point voisin. Comment allons-nous prendre la dérivée de la température par rapport à la
position? Différencierons-nous la température par rapport à x? Ou par rapport à y, ou z?
Les lois physiques utiles sont indépendantes del' orientation du système de coordonnées.
Elles doivent donc être écrites sous une forme telle que leurs deux membres soient ou
des scalaires ou des vecteurs. Qu'est-ce que la dérivée d'un champ scalaire, oT/ox par
exemple? Est-ce un scalaire, ou un vecteur, ou quoi? Ce n'estni un scalaire, ni un vecteur,
comme vous pouvez facilement le constater, car si nous avions pris un axe des x différent,
oT/ox aurait certainement pris une valeur différente. Mais attention: nous avons trois
dérivées possibles: oT/ox, oT/oy,
22
et BT/az. Puisqu'il y a trois sortes de dérivées et que nous savons qu'il faut trois nombres
pour former un vecteur, ces trois dérivées sont peut-être les composantes d'un vecteur:
Bien entendu, il n'est généralement pas vrai que trois nombres quelconques constituent
un vecteur. Cela n'est vrai que si, lorsque l'on effectue une rotation du système de
coordonnées, les composantes du vecteur se transforment entre elles de façon correcte.
Aussi est-il nécessaire d'examiner comment se transforment ces dérivées lors d'une rota-
tion du système de coordonnées. Nous montrerons que (2.11) est effectivement un vecteur.
Les dérivées se transforment bien de façon cprrecte lorsque l'on effectue une rotation du
système de coordonnées.
Nous pouvons voir cela de plusieurs Jttçons. Un moyen est de poser une question dont
la réponse est indépendante du systènyt'de coordonnées, et d'essayer d'exprimer la réponse
sous une forme « invariante». Par exemple, si S = A · B, et si A et B sont des vecteurs,
nous savons - parce que nous l'avons prouvé au chapitre 11 du Vol. 1 - que S est un
scalaire. Nous savons que S est un scalaire sans chercher s'il change lorsque l'on change
le système de référence. Il ne le peut pas, parce que c'est le produit scalaire de deux vecteurs.
De même, si nous savons que A est un vecteur, et que nous avons trois nombres BI> 8 2 ,
et B 3 , et que nous avons démontré que
A,,8 1 + AyB 2 + A,Ba = S, (2.12)
où S garde la même valeur pour tout système de coordonnées, nous pouvons dire alors
que les trois nombres 81> B2, 8 3 doivent être les composantes Bv By, B, d'un certain
vecteur B.
Considérons maintenant le champ de température. Supposez que nous prenions deux
points P1 et P2 , séparés par un petit intervalle L'1R. La température en P 1 est T1 et T2 en P2 ,
et leur différence est L'1T = T2 - T 1• Les températures en ces points physiques réels, ne
dépendent certainement pas des axes que nous choisissons pour mesurer les coordonnées.
En particulier, L'1T est un nombre indépendant du système de coordonnées. C'est un
scalaire.
Si nous choisissons un système d'axes convenable, nous pouvons écrire T1 = 'Jî.x, y, z)
et T 2 = 'Jî.x + L'1x, y + L'1y, z + L'1z), où~. !1y, et L'1z sont les composantes du vecteur L'1R
(Fig. 2-5). Si l'on se rappelle l'Eq. (2.7), on peut écrire
aT ôT aT
l:l.T = ax l:l.x + ay l:l.y + az l:l.z. (2.13)
1
1
' 1
'\ 1Ay
'\ 1
')I
,;,,."'6Z
23
Le premier membre de l'Eq. (2.13) est un scalaire. Le second membre est la somme de
trois produits de ôx, ~y, et&, qui sont les composantes d'un vecteur. On en déduit que
les trois nombres
ôT ôT ôT
ÔX' ôy' ÔZ
sont aussi les composantes x, y, et z d'un vecteur. Nous écrivons ce nouveau vecteur à
l'aide du symboleVT. Le symbole V{appelé «del») •est un~ renversé, et doit nous
rappeler la différentiation. Les gens lisent VT de diverses façons: «delta T», ou« gradient
de T», ou« grad T»;
gradT = VT = ( _ ôT , ôT
_,_ ôT) · * (2.14)
ÔX ôy ÔZ
En utilisant cette notation, nous pouvons récrire l'Eq. (2.13) sous une forme plus
compacte
t:,.T = VT·t:,.R. (2.15)
En clair, cette équation dit que la différence de température entre deux points voisins est
le produit scalaire du gradient de Tet du vecteur déplacement qui joint ces deux points.
La forme de l'Eq. (2.15) illustre aussi clairement la preuve donnée ci-dessus que VT est
un vecteur.
Peut-être n'êtes-vous pas encore convaincus? Montrons-le donc d'une manière
différente. (Bien que si vous faites attention, vous pourrez voir que c'est en fait la même
démonstration, sous une forme plus verbeuse!) Nous allons montrer que les composantes
de VT se transforment de la même façon que les composantes de R. S'il en est ainsi,
vT est un vecteur d'après la définition d'un vecteur que nous avons donnée au chapitre 11
du Vol. I. Nous prenons un nouveau système d'axes x', y', z', et dans ce nouveau système
nous calculons ôT/ôx', a T/ô y', et ôT/ôz'. Pour rendre les choses un peu plus simples, nous
posons z = z', de sorte que nous pouvons négliger la coordonnée z. (Vous pourrez traiter
vous-mêmes le cas le plus général.)
Nous prenons un système x'y' faisant un angle 8 avec le système xy, comme dans la
Fig. 2-6(a). Pour un point (x, y) les coordonnées dans le nouveau système sont
VT = i ôT + J ôT + k ôT.
ôx ôy ôz·
• N.d.T. Appelé aussi «nabla».
24
(0)
,, (b)
t:.T = -
aT t:.x, + --
ar t:.y ,. (2.21)
ax' ay'
ar aT aT . (2.26)
- cos 0 - - - sm O.
ax ax' ay'
Cette équation dit que aT/ax s'obtient à· partir de ar;ax' et de aT/oy', tout comme x se
déduit de x' ety' dans l'Eq. (2.18). aT/ax est donc la composante x d'un vecteur. Le même
type de raisonnement montrerait que aTja y et oT/az sont des composantes y et z. V Test
donc sans conteste un _vecteur. C'est un champ vectoriel dérivé du champ scalaire T.
25
2-4 L'opérateur V
Nous pouvons maintenant faire quelque chose d'extrêmement amusant et ingénieux
- et caractéristique des choses qui rendent belles les mathématiques. Le raisonnement
que nous avons fait pour montrer que grad T, ou 'VT, est un vecteur, ne dépendait pas du
champ de scalaire que nous différenciions. Tous les arguments seraient les mêmes si l'on
remplacait T par un champ scalaire quelconque. Puisque les équations de transformation
sont les mêmes quoi que nous différencions, nous pouvons tout aussi bien omettre le T
et remplacer l'Eq. (2.26) par l'équation symbolique
éJ éJ éJ •
ôx = ôx' cos 8 - ôy' sm 8. (2.27)
Nous laissons, comme dit Jeans, les opérateurs« affamés de différencier quelque chose».
Puisque les opérateurs différentiels eux-mêmes se transforment comme les composantes
d'un vecteur, nous pouvons les appeler composantes d'un vecteur opérateur. Nous
pouvons écrire
V= (éJx~.~.i.).
ôy ôz
(2.28)
qui signifie, bien entendu,
V=~.
11 ôy
V
•
= i_.
ôz (2.29)
éJ
T-, (2.30)
ÔX
qui n'est pas un nombre, mais qui est encore une sorte d'opérateur. Cependant, d'après
l'algèbre des vecteurs, nous pourrions encore appeler TV un vecteur.
Multiplions à présent V par un scalaire de l'autre côté, de sorte que nous ayons le
produit (VT). Dans l'algèbre ordinaire
TA =AT, (2.31)
mais nous devons nous rappeler que l'algèbre des opérateurs est un peu différente de
l'algèbre ordinaire des vecteurs. Avec les opérateurs nous devons toujours conserver le
bon ordre, de façon à ce que les opérations aient le sens voulu. Vous n'aurez aucune
difficulté si vous vous.souvenez que l'opérateur V obéit tout simplement aux mêmes con-
ventions que la notation différentielle. Ce qui doit être différencié doit être placé à droite
de V. L'ordre est important.
Gardant en tête ce problème d'ordre, nous comprenons que TVsoit un opérateur,
mais le produitVT n'est plus un opérateur affamé; l'opérateur est complètement satisfait.
C'est en effet un vecteur physique ayant un sens. Il représente la vitesse à laquelle Tvarie
dans l'espace. La composante x de VT indique avec quelle vitesse Tchange dans la direc-
tion des x. Quelle est la direction du vecteur V T? Nous savons que la vitesse de variation de
26
T dans une direction quelconque est la composante de V T dans cette direction (voir
Eq. 2.15). On en déduit que la direction de VT est celle dans laquelle il a la plus grande
composante - en d'autres termes, la direction dans laquelle T varie le plus rapidement.
Le gradient de Ta la direction de la pente la plus raide en montant (en n.
2--5 Opérations avecV
Pouvons-nous faire d'autres opérations algébriques à l'aide de l'opérateur vectoriel V?
Essayons de le combiner à un vecteur. Nous pouvons combiner deux vecteurs en faisant
un produit scalaire. Nous pourrions effectuer les produits
(un vecteur ·V, ou V · (un vecteur).
Le premier ne signifie encore rien, puisque c'est encore un opérateur. Ce qu'il pourrait
finalement vouloir dire dépend de ce sur quoi il est fait pour opérer. Le second produit
est un certain champ scalaire. (A· Best toujours un scalaire).
Essayons le produit scalaire de V avec un champ vectoriel que nous connaissons,
par exemple h. Nous l'écrivons en fonction des composantes:
(2.32)
ou
v . h = oh,. + oh + oh, .
11
(2.33)
ox oy oz
Cette somme est invariante lors d'une transformation des coordonnées. Si nous devions
choisir un système différent (indiqué par des primes), nous aurions *
Comme nous l'avons fait pour V T, nous pouvons attribuer une signification physique
à V· h. Nous remettrons cependant cela à plus tard.
* Nous concevons h comme une quantité physique qui dépend de la position dans l'espace, et
non pas strictement comme une fonction mathématique de trois variables. Lorsque l'on
«différencie» h par rapport à x, y et z, ou par rapport à x', y' et z', on doit tout d'abord exprimer
l'expression mathématique de h en fonction des variables appropriées.
27
Tout d'abord, nous voulons voir quelle cuisine on peut encore faire avec l'opérateur
vectoriel V. Que penser d'un produit vectoriel? Nous devons nous attendre à ce que
V x h = un vecteur. (2.37)
C'est un vecteur dont nous pouvons écrire les composantes en utilisant les règles
habituelles relatives au produit vectoriel (voir Eq. 2.2):
(V X h), = 'ilxhu - 'ilyh, = ahy - ~hx. (2.38)
ax . ay
De même,
VT = grad T = un vecteur,
V ·h = div h = un scalaire,
V x h = rot h = un vecteur.
En utilisant ces combinaisons, nous pouvons décrire les variations spatiales des champs
d'une façon commode - d'une façon qui est générale, en ce sens qu'elle est indépendante
du choix des axes.
A titre d'exemple de l'utilisation de notre opérateur différentiel V, nous allons écrire
un ensemble des équations vectorielles qui décrit les mêmes lois de l'électromagnétisme
que nous avons énoncées au chapitre l. On les appelle les équations de Maxwell.
Équations de Maxwell
(1) V·E=p_
€0
(2) VXE= aB
aï (2.41)
(3) ·~"B=O
(4) c2 v x B = aE +L
at €0
où p (rho), «densité de charge électrique», est la charge par unité de volume, et j, «la
densité de courant électrique», est la charge qui s'écoule à travers une surface unité en
une seconde. Ces quatre équations renferment la théorie classique complète du champ
électromagnétique. Vous voyez quelle forme élégamment simple nous pouvons obtenir
avec notre nouvelle notation!
28
2-6 L'équation différentielle de la propagation de la chaleur
Donnons un autre exemple de loi physique écrite en notation vectorielle. Ce n'est pas
une loi exacte, mais pour de nombreux métaux et un grand nombre d'autres substances
conductrices de la chaleur, elle est très bien vérifiée. Vous savez que si vous prenez une
plaque de matériau et que vous chauffez une de ses faces à la température T 2 et que vous
refroidissez l'autre jusqu'à la température T1, la chaleur s'écoule dans le matériau de
T2 vers T1 [Fig. 2-7(a)]. Le flux de chaleur est proportionnel à la surface A des faces
et à la différence de température. Il est aussi inversement proportionnel à d, épaisseur de
la plaque. (Pour une différence de température donnée, plus la plaque est mince et plus
le flux de chaleur est grand.) Soit J l'énergie thermique qui traverse la plaque par unité
de temps, nous écrivons
(2.42)
(b)
Si l'aire de la petite lame est 6.A, le flux de chaleur-Par unité de temps est
LlA
tlJ =KAT-, (2.43)
As
où Af est l'épaisseur de la lame. Mais nous avons défini plus haut M/t:i.A comme étant
la grandeur de h, dont la direction est celle du flux de chaleur. Le flux de chaleur sera dans
le sens de T1 + L1 T vers Tl> et sera donc perpendiculaire aux isothermes, comme le montre
la Fig. 2-7(b). D'autre part, L1 T/Lls n'est autre que le taux de variation de T en fonction de
la position. Et puisque la variation de position est perpendiculaire aux isothermes,
notre t:i.T/& est le taux maximum
29
de variation. C'est donc la grandeur de V T. Puisque le sens de v Test opposé à celui de h,
nous pouvons écrire (2.43) sous forme d'équation vectorielle:
h = -KVT. (2.44)
{Il faut un signe moins parce que la chaleur s'écoule en« descendant» les températures.)
L'équation (2.44) est l'équation différentielle de la conduction de la chaleur dans les
matériaux. Vous voyez que c'est une véritable équation vectorielle. Les deux membres
sont des vecteurs si K est un nombre. C'est la généralisation pour des cas arbitraires de la
relation particulière (2.42) relative à une plaque rectangulaire. Nous apprendrons plus
tard à écrire toutes sortes de relations de physique élémenU.ire telles que (2.42) sous forme
de notation vectorielle plus sophistiquée. Cette notation est utile non seulement parce
qu'elle fait paraître les équations plus simples mais aussi parce qu'elle montre plus
clairement le contenu physique de ces équations sans se référer à un système d'axes de
coordonnées choisi arbitrairement.
(a) V· (VT)
(b) V X (VT)
(c) V(V · h) (2.45)
(d) V· (V X h)
(e) V X (V X h)
A X (AT) = (A X A)T = 0,
puisque A x A est toujours nul.· Nous aurions aussi
Nous pouvons voir comment l'on arrive à cette équation si l'on utilise pour une fois
les composantes:
[V X {VT)], = V.,(VT)v - V11 {VT).,
8 (iJT)
= iJx iJy -
iJ
iJy
(iJT)
iJx '
(2.47)
qui est égale à zéro (d'après l'Eq. 2.8). Il en est de même pour les autres composantes.
Ainsi donc, V x (V'J) = 0, pour une distribution quelconque de température - en fait,
pour une fonction scalaire quelconque.
30
Prenons maintenant un autre exemple. Voyons si nous pouvons trouver autre chose
d'égal à zéro. Le produit scalaire d'un vecteur par un produit vectoriel, contenant ce
vecteur, est nul :
A· (A X B) =O. (2.48)
parce que A x B est perpendiculaire à A, et donc n'a pas de composante dans la direc-
tion de A. La même combinaison apparaît dans (d) de (2.45), de sorte que nous avons
Il est à nouveau facile de montrer que c'est nul en faisant les opérations avec les
composantes.
Nous allons maintenant énoncer deux théorèmes mathématiques que nous ne démon-
trerons pas. Ce ~ont des théorèmes très intéressants et très utiles à connaître pour des
physiciens.
Dans un problème physique, nous trouvons fréquemment que le rotationnel d'une
certaine quantité - du champ de vecteurs A par exemple - est nul. Mais nous avons vu
(Eq. 2.46) que le rotationnel d'un gradient est égal à zéro, ce qui est facile à retenir si l'on
se rappelle comment opèrent les vecteurs. Cela pourrait bien vouloir dire alors que A est
le gradient d'une certaine quantité, puisque son rotationnel est alors nécessairement nul.
Le théorème intéressant est que si le rotationnel de A est nul, A est toujours le gradient
de quelque chose - il existe un certain champ scalaire 1f1 (psi) tel que A est égal à grad lfl.
En d'autres termes, nous avons le
THÉORÈME:
Si V X A 0
il existe un
tel que A = Vi/I."' (2.50)
Il existe un théorème semblable lorsque la divergence de A est nulle. Nous avons vu dans
l'Eq. (2.49) que la divergence du rotationnel de quelque chose est toujours nulle. Si vous
rencontrez un champ de vecteurs D pour lequel div D est nulle, vous pouvez en conclure
que D est le rotationnel d'un certain champ vectoriel C.
THÉORÈME:
Si V·D = 0
il existe un c
tel que D=VXC. (2.51)
En étudiant les combinaisons possibles de deux opérateurs V, nous avons trouvé que
deux d'entre elles donnent toujours zéro. Étudions maintenant èelles qui ne sont pas nulles.
Considérons la combinaison V (V1) qui était la première de notre liste. En général, elle
n'est pas nulle. Nous écrivons les composantes:
VT = 'ilxT + V T + V,T.
11
31
d'où
V· (VT) = 'il,,('il_,T) + 'ily{'i1 T) + 'il,('il,T)
11
aT
2
ô T 2 2
éJ T
axz + ayz -t' azz ' (2.52)
ce qui. en général, doit être égal à un certain nombre. C'est un champ scalaire.
Vous voyez que nous n'avons pas besoin de garder les parenthèses, mais que nous
pouvons écrire, sans aucun risque de confusion,
Nous considérons V2 comme un nouvel opérateur. C'est un opérateur scalaire. Parce qu'il
apparaît souvent en physique, on lui a donné un nom spécial - le Laplacien.
a2
•
Laplacien = 'il
2
= -
àx 2
+ -aya22 + -azaz2 · (2.54)
Puisque le Laplacien est un opérateur scalaire, nous pouvons le faire agir sur un
vecteur - nous entendons par cela effectuer la même opération sur chaque composante
en coordonnées rectangulaires:
'i1 2 h = ('i1 2 h:r;, v 2h11 , v 2 h,).
Étudions encore une possibilité: V x (V x h), qui était (e) dans la liste (2.45). Le
rotationnel du rotationnel peut s'écrire d'une manière différente si l'on utilise l'égalité
vectorielle (2.6):
A X (B X C) = B(A · è) - C(A · B). (2.55)
Pour utiliser cette formule, nous remplaçons A et B par l'opérateur V et nous posons
C = h. Si nous faisons cela, nous obtenons
Attendez une minute! Il y a quelque chose de faux. Les deux premiers termes sont de bons
vecteurs (les opérateurs sont rassasiés), mais le dernier terme ne ressemble à rien. C'est
encore un opérateur. La difficulté vient de ce que nous n'avons pas suffisamment fait
attention à l'ordre correct de nos termes. Si cependant vous regardez à nouveau
l'Eq. (2.55), vous voyez que vous auriez pu tout aussi bien écrire
L'ordre des termes paraît meilleur. Faisons maintenant notre substitution dans (2.56).
Nous obtenons
V X (V X h) = V(V · h) - (V· V)h. (2.57)
Cette forme paraît bonne. Elle est effectivement correcte, comme vous pouvez le vérifier
en calculant ses composantes. Le dernier terme est le Laplacien, de sorte que nous
pouvons tout aussi bien écrire
V X (V X h) = V(V · h) - 'i1 2h. (2.58)
32
Nous avons èu quelque chose à dire sur toutes les combinaisons de notre liste de
doubles V, sauf sur (c), V (V· h). C'est un champ vectoriel possible, mais il n'y a rien de
particulier à en dire. 'Ce n'est qu'un certain champ vectoriel qui peut apparaître occa-
sionnellement.
Il sera pratique de résumer nos conclusions dans un tableau:
(a) V · (VT) = V2T = un champ scalaire
(b) V X (VT) = 0
(c) V(V · h) =
un champ vectoriel
(2.59)
(d) V · (V X h) = 0
(e) V X (V X h) = V(V . h) - V 2/t
(f) (V· V)h = V2 h = un champ vectoriel
Vous peuvez remarquer que nous n'avons pas essayé d'inventer un nouvel opérateur
vectoriel ( Vx V). Voyez-vous pourquoi?
2-8 Pièges
Nous avons appliqué nos connaissances sur l'algèbre des vecteurs ordinaires aux cal-
culs avec l'opérateur V. Nous devons cependant faire attention car il est possible de
s'égarer. Il y a deux pièges que nous signalerons, bien qu'ils ne se présentent pas dans ce
cours. Que diriez-vous de l'expression suivante, qui fait intervenir les deux fonctions
scalaires 1f1 et </>(phi):
(Vl/t) X (V<t>)?
Vous pourriez être tentés de dire: cela doit être nul parce que c'est comme
(Aa) X (Ab),
qui est nul parce que le produit vectoriel de deux vecteurs égaux A x A est toujours nul.
Mais dans notre exemple les deux opérateurs V ne sont pas égaux! Le premier agit sur
une fonction If/; l'autre agit sur une fonction différente,</>. De sorte que, bien que nous les
représentions par le même symbole V, il faut les considérer comme deux opérateurs
différents. La direction de V 1f1 dépend manifestement de la fonction If!, si bien qu'elle ·
ne sera pas parallèle à V</>.
(Vl/t) X (V</>) -;é 0
Nous n'aurons heureusement pas à utiliser de telles expressions. (Ce que nous avons dit
ne change pas le fait que V x V 1f1 = 0 pour un champ scalaire quelconque, parce qu'ici
les deux V agissent sur la même fonction.)
Le piège numéro deux (que nous ne rencontrerons pas non plus dans notre cours)
est le suivant: les règles que nous avons esquissées ici sont simples et élégantes tant que
l'on utilise des coordonnées rectangulaires. Par exemple, si nous avons V 2h et que nous
voulons sa composante x, c'est
2 2 2
(V 2h ),. = ( a + -;-;;
-a-;; a + a--;;
a) hx = V2h,,. (2.60)
X- vY" Z"
33
La même expression ne serait pas valable si nous cherchions la composante radiale de
V2h. La composante radiale de V2h n'est pas égale à V2 hr- La raison en est que, lorsque nous
avons affaire à l'algèbre des vecteurs, les directions des vecteurs sont toutes parfaitement
définies. Mais quand nous avons affaire aux champs vectoriels, leurs directions sont
différentes en des points différents. Si nous essayons de décrire un champ vectoriel, par
exemple, en coordonnées polaires, ce que nous appefons la direction « radiale » varie de
point en point. Nous pouvons ainsi avoir un tas d'ennuis lorsque nous nous mettons à
différencier les composantes. Par exemple, même dans le cas d'un champ vectoriel con-
stant, la composante radiale varie de point en point.
Il est habituellement plus sûr et plus simple de s'en tenir à des coordonnées
rectangulaires et d'éviter ainsi les difficultés, mais il y a une exception utile à signaler:
puisque le Laplacien V2 , est un scalaire, nous pouvons l'écrire dans le système de
coordonnées que nous voulons (par exemple en coordonnées polaires). Mais puisque
c'est un opérateur différentiel, nous devons l'utiliser seulement avec des vecteurs dont
les composantes ont des directions fixes - ce qui veut dire des coordonnées rectangulaires.
Nous exprimerons donc tous nos champs vectoriels en fonction de leurs composantes
x, y et z lorsque nous écrirons nos équations différentielles vectorielles en fonction des
composantes.
34
3
Nous avons vu au chapitre 2 qu'il y avait plusieurs façons de prendre les dérivées des
des champs. Les unes donnent des champs de vecteurs; les autres donnent des
champs scalaires. Bien que nous ayons développé différentes formules, tout le chapitre 2
pourrait être résumé en une seule règle: les opérateurs a/ax, a;ay, et a/az, sont les trois
composantes d'un opérateur vectoriel V. Nous aimerions maintenant saisir davantage
la signification des dérivées des champs. Nous comprendrons alors mieux ce que
représente une équation relative à un champ de vecteurs.
Nous avons déjà discuté du sens de l'opération gradient (Vagissant sur un scalaire).
Maintenant nous passons au sens des opérations divergence et rotationnel. L'interpréta-
tion de ces grandeurs est plus aisée en considérant certaines intégrales vectorielles et les
équations qui relient de telles intégrales. Ces équations ne peuvent, malheureusement,
être obtenues à partir de l'algèbre vectorielle par une simple substitution, donc vous devrez
les apprendre comme quelque chose de nouveau. Parmi ces formules intégrales, l'une
est pratiquement insignifiante, mais les deux autres ne le sont pas. Nous les démontrerons
et expliquerons leurs conséquences. Les équations que nous allons étudier traduisent
vraiment des théorèmes mathématiques. Elles seront utiles, non seulement pour inter-
préter le sens et le contenu de la divergence et du rotationnel, mais aussi pour établir des
théories physiques générales. Ces théorèmes mathématiques sont à la théorie des champs
ce qu'est le théorème de la conservation de l'énergie à la mécanique des particules.
Des théorèmes généraux comme ceux-ci sont importants pour une plus grande compré-
hension de la physique. Vous trouverez cependant qu'ils ne sont pas très utiles pour
résoudre des problèmes - sauf dans les cas les plus simples. Il est toutefois merveilleux
de penser qu'au début de notre sujet il y aura de nombreux problèmes simples
35
(2)
(2)
(2)
THÉORÈME 1.
1/1(2) - 1/1(1) = (Vl/I) · ds. (3.1)
/ (!)
le long de 1
L'intégrale est l'intégrale curviligne, prise entre (1) et (2) le long de la courbe I', du produit
scalaire de V 'I' - un vecteur - par ds - un autre vecteur, qui est un élément de la courbe I'
(dirigé de [l] vers [2]).
Tout d'abord, revoyons ce qu'il faut entendre par intégrale curviligne. Considérons
une fonction scalaire/(x, y, e), et la courbe I'joignant deux points(!) et (2). Nous mar-
quons sur la courbe différents points que nous joignons par des segments rectilignes,
comme on le voit sur la Fig. 3-2. Chaque segment a pour longueur As;, où i est un indice
qui vaut 1, 2, 3... Par l'intégrale curviligne
(2)
! (1)
fds
le long der
36
nous entendons la limite de la somme
L,f; tl.s;,
où fi est la valeur de la fonction pour le ième segment. La valeur limite est ce vers quoi
tend la somme quand nous augmentons de plus en plus le nombre de segments (de façon
raisonnable, de sorte que le plus grand Lis; - 0).
L'intégrale dans notre théorème, Eq. (3.1), a la même signification, bien qu'elle soit
écrite un peu différemment. A la place def, nous avons un autre scalaire, la composante de
Vl/f dans la direction de Lis. Si nous écrivons (Vl/f)1 pour cette composante tangentielle,
il est clair que
(V!/t)1 t:..s = (V!/t) · t>.s. (3.2)
L'intégrale qui figure dans l'Eq. (3.1) signifie la somme de tels termes.
Maintenant voyons pourquoi l'Eq. (3.1) est vraie. Au chapitre 1 nous avons montré
que la composante de V 1/1 le long d'un petit déplacement tiR était le taux de variation
de 1f1 dans la direction de VR. Considérons le segment L1s qui va de(!) au point a, Fig. 3-2.
Selon notre définition,
où évidemment, (Vl/f) 1 est le gradient calculé sur le segment L1s1, et (Vl/f) 2, le gradient calculé
sur le segment L1s 2 • Si nous ajoutons les Eq. (3.3) et (3.4), nous obtenons
Nous voyons que, si nous continuons à sommer de tels termes, nous arrivons à
Le premier membre ne dépend pas de la manière dont nous choisissons nos intervalles
- si (1) et (2) sont toujours les mêmes - de sorte que nous pouvons prendre la limite
du second membre. Nous avons ainsi démontré l'Eq. (3.1).
Nous pouvons voir d'après notre démonstration que, de même que l'égalité ne dépend
pas de la façon dont nous choisissons les points a, b, c .. ., de même elle ne dépend pas
de ce que nous choisissons comme courbe r joignant(!) à (2). Notre théorème est exact
pour toute courbe joignant(!) à (2).
Une remarque sur l'écriture: nous verrons qu'il n'y a pas d'ambiguïté possible si nous
écrivons, par commodité
(V!/t) · ds = V!/t · ds. (3.7)
37
3-2 Flux d'un champ vectoriel
Surface
fermée S
n
Soit da l'aire d'un élément de surface. Ce symbole représente une différentielle à deux
dimensions. Si, par exemple, la surface était dans le plan xy, nous l'écririons
da= dx(ly.
Plus tard, nous aurons à considérer des intégrales de volume, pour lesquelles il faudra
prendre un petit cube comme élément de volume. Ainsi quand nous écrirons dV, cela
signifiera
dV = dxdydz.
Certains préfèrent écrire d 2a au lieu de da pour se rappeler que c'est en quelque sorte
une quantité du second ordre. Ils écriraient aussi d 3 Vau lieu de dV. Nous utiliserons la
notation la plus simple, en admettant que vous pouvez vous rappeler qu'une aire a deux
dimensions et qu'un volume en a trois.
La quantité de chaleur sortant de l'élément de surface da est le produit de l'aire par
la composante de h normale à l'élément de surface. Nous avons déjà défini n comme le
vecteur unitaire de la normale à la surface, orientée positivement vers l'extérieur de celle-ci
(Fig. 3-3). La composante utile de h est donc
hn = Il• n. (3.9)
38
Pour avoir la quantité totale de chaleur sortant d'une surface quelconque nous sommons
les contributions dues à tous les éléments de surface. En d'autres termes nous intégrons
(3.10) sur toute la surface:
Nous allons aussi appeler cette intégrale de surface« le flux de h à travers la surface».
A l'origine le mot flux signifiait écoulement, si bien que l'intégrale de surface représente
bien l'écoulement de h à travers la surface. Nous pouvons encore dire: h est le vecteur
«densité de courant» de l'écoulement de chaleur et son intégrale de surface est
l'intensité totale du courant de chaleur dirigé vers l'extérieur de la surface; c'est-à-dire,
l'énergie calorifique par unité de temps (joules par seconde).
Nous aimerions généraliser cette notion au cas où le vecteur ne représente pas
l'écoulement de quelque chose; par exemple, il pourrait s'agir du champ électrique.
Nous pouvons certainement encore intégrer la composante normale du champ électrique
sur une surface. Et bien que ce ne soit pas l'écoulement de quelque chose, nous l'appelle-
rons encore le« flux». Nous dirons
Flux de E à travers la surface S = fs E · n da. (3.12)
Nous généralisons ainsi le sens du mot« flux» et l'appliquons à «l'intégrale de surface
de la composante normale » d'un vecteur. Nous utiliserons aussi la même définition,
quand la surface considérée ne sera pas fermée comme ici.
Revenant sur le cas particulier de la propagation de la chaleur, considérons le cas
où il y a conservation de la chaleur. Par exemple, imaginons une substance qui, après
avoir été chauffée initialement, ne fournit ni n'absorbe plus aucune énergie calorifique.
Alors, s'il y a propagation de la chaleur vers l'extérieur d'une surface fermée, la quantité
de chaleur contenue à l'intérieur du volume limité par cette surface doit décroître. Donc,
dans le cas où il doit y avoir conservation de la chaleur, nous écrirons que
r h. n da
Js
= - dQ'
dt
(3.13)
39
Fig. 3-4. Un volume V contenu dans la surface S
est séparé en deux parties par une «coupure• suivant la
surface s,•. Nous avons maintenant le volume V,
Coupure enfermé dans la surface S, =S,+S,b et le volume v.
enfermé dans la surface s.=s.+s,•.
Flux à travers S 1 =
Jsa
f C · n da + JBab C · n1 da, (3.14)
f C · n1 da = - f C · n2 da. (3.16)
Jsab Jsab
Et si enfin nous ajoutons les Eq. (3.14) et (3.15), nous voyons que la somme des flux à
travers S1 et S 2 est exactement égale à la somme de deux intégrales qui, prises ensemble,
donnent le flux à travers la surface d'origine S = Sa + Sb.
Nous voyons que le flux à travers la surface extérieure complète S peut être considéré
comme la somme des flux à travers les deux parties en lesquelles on avait divisé le volume
initial. Nous pouvons encore subdiviser ainsi - en coupant V1 en deux parties, par
exemple. Et nous voyons que les mêmes raisonnements s'appliquent. Ainsi quelle que soit
la façon dont on divise le volume d'origine, il doit être vrai en général que le flux sortant
de la surface extérieure, qui est l'intégrale considérée, est égal à la somme des flux sortant
de tous les petits volumes intérieurs.
3-3 Flux sortant d'un cube; théorème de Gauss
Considérons maintenant le cas particulier d'un petit cube* et établissons une formule
intéressante pour le flux sortant. Considérons un cube dont les arêtes sont parallèles
aux axes comme sur la Fig. 3-5. Supposons que les coordonnées du sommet le plus
proche de l'origine
40
,µx.z,!.>_ - l#.- - - - (~~ V •)
~·~·
,,,.,
soient x, y, z. Soit '1x la longueur du cube dans la direction des x, Ay la longueur dans la
direction des y et Az la longueur dans la direction des z. Nous voulons calculer le flux d'un
champ de vecteur C sortant de la surface du cube. Pour ce calcul nous allons faire la
somme des flux à travers chacune des six faces. Considérons d'abord la face marquée
l sur la figure. Le flux sortant de cette face est la composante de C suivant l'axe des x,
changée de signe et intégrée sur l'aire de cette face. Ce flux est
- f C.,dydz.
Puisque nous considérons un petit cube nous pouvons prendre comme valeur approchée
de cette intégrale le produit de la valeur de C,, au centre de la face - point que nous
appelons l'aire de la face, Ay Az:
Flux sortant de l = - C..,(l) &y Ill'.
De plus, ex (1) et ex (2) sont légèrement différents. Si Ax est assez petit, nous pouvons
écrire
C..,(2) = C..,(l) + aa; ÂX.
Il y a évidemment encore d'autres termes, mais ils comporteront (A~) et des puissances 2
Flux sortant de l et 2 =
ac., Ax Ay Az.
7iX
La dérivée doit être calculée au centre de la face 1, c'est-à-dire au point
[x, y+ (Ay/2), z + (Az/2)]. Mais à la limite d'un cube infinitésimal, nous commettons
une erreur négligeable en la calculant au sommet (x, y, z).
41
En appliquant le même raisonnement à chacune des autres faces prises deux à deux,
nous aurons
Flux sortant de 3 et 4 = ac11 Ax Ay Az
ay
et
Flux sortant de 5 et 6 = aa~· Ax Ay Az.
Le flux total à travers toutes les faces est la somme de ces termes. Nous trouvons que
f c·
cube
n da =
·
(ac=·+
ax
ac
ay
11 + ac.) Ax A Az
az · y '
Nous venons de démontrer que le flux sortant de la surface d'un cube infirytésimal est
égal au produit de la divergence du vecteur par le volume du cube. Nous comprenons
maintenant la« signification» de la divergence d'un vecteur. La divergence d'un vecteur
au point Pest le flux - 1'« écoulement» vers l'extérieur de C - par unité, de volume, au
voisinage de P.·
Nous avons établi une relation entre la divergence de Cet le flux de Ç sortant de chaque
volume élémentaire. Pour tout volume fini, nous pouvons utiliser la propriété démontrée
plus haut - à savoir que le flux total sortant d'un volume est la somme des flux sortant
de chacune de ses parties. Nous pouvons ainsi intégrer la divergence sur le volume
entier. Et ceci nous conduit au théorème suivant: l'intégrale de la composante normale
de tout vecteur prise sur une surface fermée quelconque peut aussi être écrite comme
l'intégtale de la divergence du vecteur prise sur le volume limité par la surface. Ce
théorème est appelé, le théorème de Gauss.
THÉORÈME DE GAUSS.
fs C·nda = fv V· CdV, (3.18)
42
Mais ceci doit être égal au taux de décroissance de la quantité de chaleur dans le cube.
Si q est la quantité de chaleur par unité de volume, la quantité de chaleur contenue dans
le cube est qD. V, et le taux de décroissance de la quantité de chaleur est
- !!_
dt
(q llV) = - dq llV
dt .
(3.20)
Comparant (3.19) et (3.20), nous voyons que
dq
- dt= V. h. (3.21)
Tenant compte de (3.21), on trouve que l'intégrale du membre de droite est justement
- dQ/dt, et l'on retombe bien sur l'Eq. (3.13).
Considérons maintenant un autre cas. Imaginons un bloc de matière dans lequel est
percé un tout petit trou où se produit une réaction chimique qui produit de la chaleur.
Ou bien nous pourrions imaginer qu'il y a des fils qui aboutissent à une petite résistance
chauffée par un courant électrique. Nous supposerons que la chaleur est pratiquement
produite en un point et nous appellerons W l'énergie libérée par seconde en ce point.
Nous supposerons que dans tout le reste du volume, il y a conservation de la chaleur,
et que la chaleur est produite depuis assez longtemps pour que maintenant la température
ne varie plus nulle part. Le problème qui se pose est le suivant: comment se présente le
vecteur flux de chaleur h en différents points du métal? Quelle est la quantité de chaleur
qui s'écoule en chaque point?
Nous savons qu'en intégrant la composante normale de h sur une surface fermée
entourant la source, nous aurons toujours W. Toute la chaleur engendrée au point source
doit s'écouler à travers la surface, puisque nous avons supposé que nous sommes en
régime permanent. Nous sommes devant le problème difficile de trouver un champ de
vecteurs qui, intégré sur une surface quelconque, donne toujours W. Nous pouvons
cependant trouver le champ facilement en prenant une surface un peu particulière.
Prenons une sphère de rayon R, centrée sur la source, et admettons que la chaleur se
propage radialement (Fig. 3-6). Notre intuition nous dit que h doit être radial, si le bloc
de matière est grand et si nous ne nous approchons pas trop des bords, et doit avoir même
valeur en tout point de la sphère. Vous voyez que pour trouver la réponse nous complétons
nos mathématiques par un peu de divination, qu'on appelle couramment «intuition
physique».
43
Fig. 3-6. Dans la région voisine d'un
point source de chaleur, l'écoulement de
chaleur est radial et dirigé vers l'extérieur.
l'intensité de h et qu'elle est constante. L'aire sur laquelle nous intégrons est 4nR2 • Nous
avons alors
fs Il · n da = h · 41!'R
2
(3.23)
(où h est l'intensité de h). Cette intégrale doit être égale à W, quantité de chaleur produite
par unité de temps au point source. Nous obtenons
w
h = 41!'R2'
ou
(3.24)
où, comme toujours, e, est un vecteur unitaire radial. Notre résultat montre que h a une
intensité proportionnelle à W et varie comme l'inverse du carré de la distance à la source.
(Rappelons que cette relation est approchée, mais que l'approximation est très bonne
pour certains corps tels que les métaux.) Elle est seulement applicable, évidemment,
dans les régions .du matériau où il n'y a ni source ni absorption de la chaleur.
Nous avons établi plus haut une autn:: relation, l'Eq. (3.21), valable quand il y a
conservation de la chaleur. Si nous combinons cette équation avec (3.25), nous obtenons
- dq = V · h = - V · (K VT),
dt
ou
dq = K V . VT = K 'il 2T, (3.26)
dt
44
où K est une constante. Rappelons que q est la quantité de chaleur contenue dans l'unité
de volume et que V · V= V 2 est l'opérateur laplacien
a2 a2 a2
v2 = ôx2 + ôy2 + (Jz2 •
Si maintenant nous faisons une hypothèse supplémentaire, nous obtenons une équation
très intéressante. Supposons que la température du corps est proportionnelle à la quantité
de chaleur contenue dans l'unité de volume - c'est-à-dire que le corps a une chaleur spéci-
fique bien définie. Quand cette hypothèse est valable (comme c'est souvent le cas) nous
pouvons écrire
ou
dQ <IF (3.27)
dt = Cv dt.
(3.28)
Nous trouvons que le taux de variation de Tavec le temps - en tout point- est proportion-
nel au Laplacien de T, qui est la dérivée seconde de T par rapport aux coordonnées spa-
tiales. Nous avons une équation différentielle - en x, y, z, et t - pour la température T.
L'équation différentielle (3.28) est appelée l'équation de diffusion de la chaleur.
On l'écrit souvent
(3.29)
45
une autre grandeur liée au vecteur et montrer qu'elle est reliée au rotationnel. Cette fois-ci,
nous calculons ce que l'on appelle la circulation d'un champ de vecteurs. Soit C un
champ de vecteurs quelconque, prenons sa composante Je long d'une courbe, et calculons
l'intégrale de cette composante tout Je long d'une boucle complète. Cette intégrale est
appelée la circulation du champ vectoriel Je long de la boucle. Nous avons déjà vu l'inté-
grale curviligne de 't" l/f au début de ce chapitre. Maintenant nous opérons de la même
manière pour un champ vectoriel quelconque C.
Boucler
c
Il faut remarquer que cette intégrale est prise en faisant tout le tour de la courbe, et non
pas entre deux points comme nous l'avions fait'plus haut. Le petit cercle qui figure sur le
signe intégrale rappelle qu'il faut prendre l'intégrale sur tout le tour. Cette intégrale est
appelée la circulation du champ vectoriel le long de la courbe r. C'est l'étude de la
circulation d'un liquide qui est à l'origine de ce nom. Mais le nom - comme pour le flux -
s'applique par extension, à tout champ vectoriel même quand il n'y a pas« circulation»
matérielle.
(1)
Enjouant le même jeu que pour le flux, nous pouvons montrer que la circulation le long
d'une boucle est la somme des circulations le long de deux boucles partielles. Supposons
que nous coupions notre courbe de la Fig. 3-7 en deux boucles, en joignant les deux
points (1) et (2) pris sur cette courbe par une autre courbe qui la traverse comme sur la
Fig. 3-8. Nous avons maintenant deux boucles r 1et r 2. I'1est faite de ra qui est la partie
de la courbe origine à gauche de (1) et (2), et de rab• le« raccourci». r 2est faite du reste
de la courbe originale et du raccourci.
46
La circulation le long de r 1est la somme d'une intégrale le long de ra et le long de I'ab·
De même la circulation le long de r 2 est la somme de deux parties, l'une le long de r b
et l'autre le long de rab· L'intégrale le long de rab aura, pour la courbe r 2le signe opposé
à celui qu'elle a pour r1> car le sens de parcours est opposé - nous devons prendre nos
deux intégrales curvilignes avec le même « sens » de rotation.
En suivant le même type de raisonnement qu'auparavant, nous voyons que la somme
des deux circulations donnera exactement l'intégrale curviligne le long de la courbe
originale r. Les parties dues à rab se compensent. La circulation le long de la première
partie, plus la circulation le long de la seconde partie égalent la circulation le long de la
courbe extérieure. Nous pouvons continuer le processus de découpage de la boucle
originale en un nombre quelconque de petites boucles. Quand nous sommons les
circulations le long des petites boucles, les parties le long des tronçons adjacents
s'annulent toujours, si bien que la somme est équivalente à la circulation le long de la
boucle originale unique.
47
7
T
3
c., c
ô;y i.
l(x,'f)
1..
l
/YI.
c
cX
2
vecteur C ne change qu'à peine le long de chaque côté du carré. (L'hypothèse est d'autant
meilleure que le carré est plus petit, aussi nous parlons en réalité de carrés infinitésimaux.)
Partant du point (x, y) - le point gauche inférieur sur la figure - nous tournons dans le
sens indiqué par les flèches. Le long du premier côté - marqué (1) - la composante
tangentielle est ex (1) et la distance est ~X. La première partie de l'intégrale este (1) ~.
Le long du second côté, nous obtenons e11 (2) ~y. Le long du troisième, nous avons
- ex (3) ~ et le long du quatrième - e11 (4) ~y. Les signes moins sont nécessaires
car nous voulons la composante tangentielle dans le sens du parcours. L'intégrale cur-
viligne complète est alors
On pourrait penser qu'à notre approximation la différence est zéro. Cela est vrai en
première approximation. Nous pouvons être plus précis, cependant, et tenir compte de
la variation de ex. Si nous faisons cela, nous écrirons
Si nous remontions à un ordre d'approximation plus élevé cela introduirait des termes
en (~y) 2 , mais comme nous allons ensuite envisager la limite quand ~y- 0, de tels
termes peuvent être négligés. En portant (3.33) dans (3.32), nous trouvons
48
De même, pour les deux autres termes de la circulation, nous pouvons écrire
(3.35)
( ac
ax
11 _ ac.,) .:lx .:ly
ay '
(3.36)
ce qui est intéressant, car les deux termes entre parenthèses sont justement la composante
suivant Oz du rotationnel. De plus, nous remarquons que .:lx Ay est l'aire de notre carré.
Donc nous pouvons écrire notre circulation (3.36) sous la forme
(V X C).fla.
Mais la composante suivant Oz représente en fait, la composante normale. à l'élément
de surface. Nous pourrons, par conséquent, écrire la circulation le long d'un carré
différentiel sous une forme vectorielle invariante:
f C · ds = (V X C)n .:la = (V X C) · n .:la. (3.37)
Notre résultat est le suivant: la circulation de tout vecteur C le long d'un carré
infinitésimal est le produit de la composante normale à la surface du rotationnel de C
par l'aire du carré.
c
THÉORÈME DE STOKES.
(3.38)
49
(2)
Nous devons aborder maintenant la convention de signes. Sur la Fig. 3-10 l'axe des z
pointe vers vous dans le cas d'un système d'axes « habituel », c'est-à-dire formant un
trièdre direct. Quand nous avons calculé notre intégrale curviligne avec un sens« positif»
de rotation, nous avons trouvé que la circulation était égale à la composante suivant Oz
de V x C. Si nous avions tourné dans l'autre sens nous aurions trouvé le signe contraire.
Alors, comment saurons-nous choisir dans le cas général, le sens positif de la composante
« normale» de V x C? La normale « positive » doit toujours être reliée au sens de
rotation, comme sur la Fig. 3-1 O. Ce sens est indiqué dans le cas général sur la Fig. 3-11.
Un moyen de se souvenir de cette relation est d'appliquer« la règle de la main droite».
Si vous placez les doigts de votre main droite le long de la courbe I', le bout des doigts dans
le sens positif de ds, alors votre pouce indique le sens positif de la normale à la surface S.
50
sont confondus, notre théorème 1, Eq. (3.8), nous indique que l'intégrale curviligne est
nulle:
f vq, · ds = O.
boucle
Appliquons le théorème de Stokes; nous en concluons que
f V X (Vq,) da = 0
sur toute surface. Mais si l'intégrale est nulle sur toute surface, la quantité sous le signe
intégrale doit être nulle. Donc
V X (Vq,) = 0, toujours.
Nous avons montré ce même résultat au paragraphe 2-7 par l'algèbre vectorielle.
Examinons maintenant le cas particulier d'une petite boucle I' que nous emplissons
d'une grande surface S, comme on le voit sur la Fig. 3-13. Nous voudrions voir, en fait,
ce qui se passe quand la boucle se réduit à un point de telle sorte que le bord de la surface
disparaît- la surface devient une surface fermée. Si le vecteur C est partout fini, l'intégrale
curviligne le long de I' dit tendre vers zéro à mesure que la boucle rapetisse - l'intégrale
est, en gros, proportionnelle à la circonférence de I', qui tend vers zéro. Selon le théorème
de Stokes, l'intégrale de surface de (V x C)n doit aussi s'annuler. De quelque façon que
ce soit, en fermant la surface nous introduisons des contributions qui annulent ce qu'il y
avait avant. Donc nous avons un nouveau théorème:
J (V X C)n da = O. (3.39)
toute surface
fermée
Or ceci est intéressant, car nous disposons déjà d'un théorème relatif à l'intégrale de
surface d'un champ vectoriel. Une telle intégrale de surface est égale à l'intégrale de
volume de la divergence du vecteur d'après le théorème de Gauss (Eq. 3.18). Le
théorème de Gauss appliqué à V x C, s'écrit
51
et ceci est vrai pour n'importe quel champ vectoriel C. Puisque l'Eq. (3.41) est vraie pour
tout volume, il doit encore être vrai qu'en tout point, la quantité sous le signe intégrale est
nulle. Nous avons
V · (V X C) = 0, toujours
Mais ceci est le même résultat que celui obtenu par l'algèbre vectorielle au paragraphe 2-7.
Nous commençons à voir comment tout ceci se tient.
3-8 Résumé
Résumons ce que nous venons de trouver en calcul vectoriel. Voici les points essentiels
des. chapitres 2 et 3 :
l. Les opérateurs a/ax, a/ay, et f!/az peuvent être considérés comme les composantes
d'un opérateur vectoriel V et les formules qui se déduisent de l'algèbre vectorielle en
traitant cet opérateur comme un vecteur sont exactes:
V= (i.,.i_,i.).
ax ay az
2. La différence des valeurs d'un champ scalaire en deux points est égale à l'intégrale
curviligne de la composante tangentielle du gradient de ce scalaire le long de n'importe
quelle courbe, prise entre le premier et le second point:
(2)
"1(2) - 1/1(1) =
1 (!)
tout courbe
Vi/I • ds. (3.42)
J C · n da = J V · C dV. (:3.43)
surface volume
fermée intérieur
J C · ds = J (V X C) · n da. (3.44)
bord ry surfa.ce
52
Electrostatique
4-1 Statique
Nous allons commencer maintenant notre étude détaillée de la théorie de l'électro-
magnétisme. Tout l'électromagnétisme est contenu dans les équations de Maxwell.
Equations de Maxwell:
V·E=f!_, (4.1)
Eo
aB
VXE=-at' (4.2)
aE .
c2 V X B = -
at + L,
Eo
(4.3)
V ·B =O. (4.4)
Les situations que décrivent ces équations peuvent être très compliquées. Nous allons
considérer d'abord des situations relativement simples, et apprendre à les manier avant
d'en attaquer de plus compliquées. L'une des circonstances les plus faciles à traiter est
celle dans laquelle rien ne dépend du temps. C'est le cas statique. Toutes les charges
sont fixées de façon permanente dans l'espace, ou bien si elles se déplacent, elles se
déplacent comme un courant continu dans un circuit (de sorte que pet j sont constants).
Dans ces conditions, tous les termes des
53
107
EoC2 = -411'
1
- - ,,,. 9 X 109
411'Eo
[E 0 ] = coulomb /newton·mètre
2 2
équations de Maxwell qui sont des dérivées du champ par rapport au temps sont nuls.
Dans ce cas, les équations de Maxwell deviennent:
Electrostatique:
V ·E = !!._, (4.5)
Eo
V XE= O. (4.6)
M agnétostatique:
V X B = j (4.7)
Eoc2,
V ·B =O. (4.8)
Vous remarquerez une chose intéressante dans cet ensemble de quatre équations.
Il peut être séparé en deux paires. Le champ électrique E n'apparaît que dans les deux
premières, et le champ magnétique B n'apparaît que dans les deux autres. Les deux champs
ne sont pas reliés entre eux. Cela signifie que I'électricité et le magnétisme sont des
phénomènes distincts aussi longtemps que les charges et les courants sont statiques.
L'interdépendance de E et B n'apparaît que lorsqu'il y a des changements dans les
charges ou les courants, comme quand on charge un condensateur ou quand on déplace
un aimant. Ce n'est que s'il y a des changements suffisamment rapides, de sorte que
les dérivées par rapport au temps dans les équations de Maxwell deviennent importantes,
que E et B dépendent l'un de l'autre.
Maintenant, si vous regardez les équations de la statique, vous allez voir que l'étude
des deux sujets, que l'on appelle électrostatique et magnétostatique, est idéale pour
apprendre les propriétés mathématiques des champs de vecteurs. L'électrostatique
est un parfait exemple de champ à -rotationnel nul et à divergence donnée. La magnéto-
statique est un parfait exemple de champ à divergence nulle et à rotationnel donné. La façon
la plus courante - et vous pensez peut-être la plus satisfaisante - de présenter la théorie
de l'électromagnétisme est de commencer par l'électrostatique et ainsi d'étudier la
divergence. La magnétostatique et le rotationnel sont abordés après. Pour finir,
l'électricité et le magnétisme sont réunis. Nous avons choisi de commencer par la théorie
complète du calcul vectoriel. Nous allons l'appliquer maintenant au cas particulier de
l'électrostatique, le champ E étant donné par la première paire d'équations.
Nous allons commencer par les situations les plus simples, celles dans lesquelles les
positions de toutes les charges sont spécifiées. Si nous n'avions qu'à étudier l'électro-
statique à ce niveau (comme nous
54
le ferons dans les deux prochains chapitres}, la vie serait simple - en fait elle serait presque
insignifiante. Tout peut s'obtenir à partir de la loi de Coulomb et de quelques intégrations,
comme vous allez le voir. Dans de nombreux problèmes électrostatiques réels, cepen-
dant, on ne sait pas initialement où sont les charges. On sait seulement qu'elles se sont
réparties d'une façon qui dépend des propriétés de la matière. Les positions que prennent
les charges dépendent du champ E, qui à son tour dépend de la position des charges.
Alors les choses peuvent se compliquer. Si, par exemple, un corps chargé est mis près d'un
conducteur ou d'un isolant, les électrons et les protons dans le conducteur ou l'isolant
vont se déplacer. On peut connaître une partie de la densité de charge p dans l'Eq. (4.5),
celle qui provient de la charge qu'on a apportée; mais il peut y en avoir une autre partie
qui provient des charges qui se sont déplacées dans le conducteur. Et il faut tenir compte
de toutes les charges. On peut aboutir à des problèmes assez subtils et intéressants. Ainsi,
bien que ce chapitre soit consacré à l'électrostatique, il ne couvrira pas les parties les plus
belles et les plus subtiles du sujet. Il ne traitera que de cas dans laquelle on peut supposer
que les positions de toutes les charges sont connues. Naturellement vous devez être
capables de traiter ce cas avant d'essayer d'aborder les autres.
Il serait logique d'utiliser les Eq. (4.5) et (4.6) comme point de départ. Il va être
cependant plus commode de commencer ailleurs, puis de revenir à ces équations. Les
résultats seront équivalents. Nous allons commencer par une loi dont nous avons déjà
parlé, appelée la loi de Coulomb, qui dit qu'entre deux charges au repos il s'exerce une
force directement proportionnelle au produit des charges et inversement proportionnelle
au carré de leur distance. La force est dirigée suivant la ligne qui joint les charges.
Loi de Coulomb:
(4.9)
F, est la force sur la charge q" e 12 est le vecteur unitaire dans la direction de q2 vers q"
et r 12 est la distance entre q1 et q2 • La force F 2 sur q2 est égale et opposée à F 1 •
La constante de proportionnalité, pour des raisons historiques, s'écrit 1/4 1u0. Dans le
système d'unités que nous utilisons, - le système M K S -elle est définie comme étant 10-7
fois le carré de la vitesse de la lumière. Et comme la vitesse de la lumière est approximative-
ment 3 x 108 mètres par seconde, la constante est approximativement 9 x 109 , et il se
trouve que l'unité est le newton-mètre2 par coulomb2 ou le volt-mètre par coulomb.
(par définition)
9 (4.10)
9.0 X 10 (résultat expérimental).
Unité: newton-mètre2/coulomb 2 ,
ou volt-mètre/coulomb.
55
Quand il y a plus de deux charges en présence - les seuls cas réellement intéressants -
il faut ajouter à la loi de Coulomb un autre fait: la force sur une charge quelconque est la
somme vectorielle des forces de Coulomb exercées par chacune des autres charges.
Ce fait porte le nom de «principe de superposition». C'est là toute l'électrostatique.
La loi de Coulomb combinée avec le principe de superposition, il n'y a rien d'autre. Les
équations (4.5) et (4.6)- les équations de l'électrostatique - ne disent rien de plus et rien
de moins.
Quand on applique la loi de Coulomb, il est commode d'introduire l'idée de champ
électrique. On dit que le champ E(l) est la force par unité de charge sur q 1 (due à toutes
les autres charges). En divisant l'Eq. (4.9) par q1> on a, pour une autre charge en plus deq1>
E(l) = - - ~2 e 12 •
1
(4.11)
4?rEo r 12
Ainsi, on considère que E(l) décrit quelque chose qui se rapporte au point (1) même si q1
n'est pas là - en supposant' que toutes les autres charges gardent les mêmes positions.
On dit: E(l) est le champ électrique au point (1).
Le champ électrique E est un vecteur, de sorte que l'Eq. (4.11) représente en réalité
trois équations - une pour chaque composante. En écrivant explicitement la composante
x, l'Eq. (4.11) signifie
E (
"' Xi. Yi. Zi
) q2
= 4?rEo [(x1 - x2) 2 +
Xi - X2
(y1 - Y2) 2 + (z1 - z2)2]3t 2 '
(
4· 12 )
E(l) = """
LI - -1 -fq, e1;. (4.13)
; 4 ?rEo r1 j
(4.14)
etc.
Il est souvent commode d'ignorer le fait que les charges se présentent en paquets comme
les électrons et les protons, et de les considérer comme étalées continûment - ce qu'on
appelle une« distribution». Ça va aussi longtemps qu'on ne s'intéresse pas à ce qui se
passe à une trop petite échelle. On décrit une distribution de charge par une « densité de
charge», p (x, y, z). Si la charge dans un petit volume AV2 situé au point (2) est Aq2 ,
p est défini par
(4.15)
56
Fig. 4-1. Le champ électrique E au
point (1 ), dO à une distribution de charge,
s'obtient en intégrant sur la distribution.
Le point (1) pourrait aussi se trouver à
l'intérieur de la distribution.
Pour utiliser la loi de Coulomb avec une telle description, on remplace les sommes
des Eq. (4.13) ou (4.14) par des intégrales sur tous les volumes contenant des charges.
On a alors
É(l) = _I_
41f'Eo
f p(2)e1 2 dV2.
rf 2 (4.16)
tout
l'espace
Certains préfèrent écrire
ru
e12 = - ·
'12
E(I) = _I_
41f'Eo
f p(2)r 1 2 dV2.
rf 2
(4.l?)
tout
J'espace
Quand on veut calculer quelque chose avec ces intégrales, il faut habituellement les écrire
explicitement en détail. Pour la composante x de chacune des Eq. (4.16) ou (4.17) on
aurait
(4. 18)
Nous n'allons pas beaucoup utiliser cette formule. Nous ne l'écrivons ici que pour
souligner le fait que nous avons complètement résolu tous les problèmes d'électrostatique
dans lesquels on connaît la position de toutes les charges. Les charges étant données, quels
sont les champs? Réponse: calculez cette intégrale. Il n'y a ainsi plus rien à dire sur le
sujet, ce n'est plus qu'une question de calcul d'intégrales compliquées à trois dimensions
strictement un travail p6ur machine à calculer!
Avec nos intégrales, nous pouvons trouver les champs produits par une couche de
charges, par une ligne chargée, par une couche sphérique de charges, ou par toute dis-
tribution donnée. Il est important de se rendre compte, au moment où nous allons tracer
des lignes de champ, parler de potentiels ou calculer des divergences, que nous avons déjà
la réponse ici. La question est simplement qu'il est quelquefois plus facile de deviner la
valeur d'une intégrale à l'aide d'une astuce que de la calculer effectivement. Pour deviner,
il faut apprendre toutes sortes de
57
choses étranges. Dans la pratique, il pourrait être plus facile de ne pas essayer d'être
intelligent et de calculer toujours directement les intégrales au lieu d'être si malin. Nous
allons cependant essayer d'être malins à ce sujet. Nous allons continuer en discutant
quelques autres aspects du champ électrique.
où Fest la force électrique sur la charge en tout point, et ds est la différentielle du vecteur
déplacement le long du chemin. (Voir Fig. 4-2).
Un chemin
. Il est plus intéressant, pour ce que nous nods proposons de faire, de considérer le
travail qui serait fait pour transporter une unité de charge. La force sur la charge est alors
numériquement la même que le champ électrique. Soit W (unité) le travail accompli dans
ce cas contre les forces électriques; nous écrivons
En général, ce qu'on obtient avec ce genre d'intégrale dépend du chemin suivi. Mais si
l'intégrale de (4.19) dépendait du chemin suivi de a à b, on pourrait reèueillir du travail
de la part du champ en transportant la charge de a vers b le long d'un certain trajet,
puis en revenant vers a par un autre trajet. On irait vers b par le trajet pour lequel West le
plus petit et on reviendrait par l'autre, recueillant plus de travail qu'on en aurait fourni.
Il n'y a, en principe, rien d'impossible dans le fait de récolter de l'énergie de la part
d'un champ. Nous rencontrerons d'ailleurs des champs pour lesquels c'est possible.
Ce pourrait être dû au fait que lorsque vous déplacez une charge, vous produisez des forces
sur l'autre partie de la« machine». Si la« machine »se déplace dans le sens opposé à la
force, elle perd de l'énergie, maintenant ainsi constante l'énergie
58
totale de l'univers. Cependant, en électrostatique, il n'existe pas de telle« machine ».Nous
savons ce que sont les forces de réaction sur les sources du champ. Ce sont les forces de
Coulomb sur les charges responsables du champ. Si les autres charges ont une position
fixe - comme on le suppose en électrostatique seulement - ces forces de réaction ne
peuvent exercer aucun travail sur elles. Il n'y a pas moyen d'obtenir d'elles de l'énergie -
pourvu, bien sûr, que le principe de conservation de l'énergie soit valable en électro-
statique. Nous pensons bien qu'il est valable, mais nous allons montrer qu'il découle de
la loi de force de Coulomb.
(0)
Considérons d'abord ce qui se passe dans le champ dû à une seule charge q. Supposons
que le point a est à la distance r 1 de q, et le point b à r 2 • Apportons maintenant de a vers b
une charge différente, qu'on appellera la charge «d'épreuve», et que nous prendrons
égale à l'unité. Commençons par le trajet le plus facile à calculer. Nous transportons
notre charge d'épreuve d'abord le long d'un arc de cercle, puis le long d'un rayon,
comme le montre la partie (a) de la Fig. 4-3. Pour ce trajet particulier, c'est un jeu d'enfant
de trouver le travail accompli (autrement nous ne l'aurions pas choisi). D'abord il n'y a
pas du tout de travail accompli sur le trajet de a vers a'. Le champ est Fadial (d'après la loi
de Coulomb), il est donc à angle droit de la direction du mouvement. Ensuite, sur le trajet
de a' à b, le champ est dans la direction du mouvement et varie comme 1/r2 • Ainsi le travail
effectué sur la charge d'épreuve, quand on l'a amenée de a vers b, serait
(4.20)
Prenons maintenant un autre trajet facile. Celui, par exemple, représenté sur la partie (b)
de la Fig. 4-3. Il est fait d'un petit arc de cercle, puis d'un petit morceau de rayon, puis à
nouveau d'un arc de cercle, puis d'un morceau de rayon, et ainsi de suite. Sur les parties
circulaires, on ne travaille pas. Sur les parties radiales, il faut seulement intégrer l/r 2 •
Le long du premier tronçon radial, on intègre de ra' à ra"• puis le long du tronçon radial
suivant der a' à ra"• et ainsi de suite. La somme de toutes ces intégrales a la même valeur
qu'une seule intégrale directement de ra à rb. On trouve le même résultat pour ce trajet
que pour le premier trajet qu'on avait essayé. Il est clair qu'on obtiendrait la même
réponse pour n'importe quel trajet fait d'un nombre arbitraire de morceaux de la même
sorte.
Et pour des trajets curvilignes? Aurions-nous obtenu le même résultat? Nous avons
discuté ce point précédemment dans le chapitre 13 du Vol. I. Utilisant les mêmes
arguments qu'alors,
59
Fig. 4-4. Le travail accompli en suivant
W(P - b} • ;{b)
un trajet quelconque de a vers b est l'opposé
0
du travail accompli en allant d'un point
• quelconque P0 vers a, plus le travail en
allant de P 0 vers b.
W(P - a) •;(a)
0
on peut conclure que le travail accompli en transportant une charge unité de a à b est
indépendant du trajet suivi.
W (unité)}
=-
lb E·ds.
a-+ b trajet
quelconque
Comme le travail accompli ne dépend que des extrémités, il peut être représenté par la
différence entre deux nombres. On peut voir cela de la façon suivante. Choisissons un
point de référence P0 et convenons d'évaluer notre intégrale en utilisant un trajet qui
passe toujours par le point P0 • Soit <I> (a) le travail accompli contre le champ en allant du
point P 0 au point a, et soit<I> (b) le travail accompli en allant du point P 0 au point b (Fig. 4-4).
Le travail pour aller vers le point P0 à partir de a (sur le trajet allant vers b) est l'opposé
de if> (a), de sorte que
Comme on ne rencontre jamais que la différence des valeurs de la f.onction <I> aux deux
points, on n'a pas vraiment besoin de spécifier la position de P0 • Mais une fois qu'on
a choisi un point de référence, un nombre <I> est déterminé pour tout point de l'espace;
.pest alors un champ de scalaires. C'est une fonction de x, y, z. On appelle cette fonction
scalaire le potentiel électrostatique en un point quelconque.
Potentiel électrostatique:
q,(P) = -1P Po
E ·da. (4.22)
Par commodité, nous prendrons souvent le point de référence à l'infini. Pour une
charge unique à l'origine, d'après l'Eq. (4.20), le potentiel <I> est alors donné en tout
point (x, y, z) par:
q 1
q,(x,y, z) = - - - . (4.23)
4 ?rEo r
Le champ électrique de plusieurs charges peut s'écrire comme la somme des champs
électriques créés par la première, la seconde, la troisième, etc. Quand on intègre la somme
pour trouver le potentiel on obtient une somme d'intégrales. Chacune des intégrales est le
potentiel dû à l'une des charges. On en conclut que le potentiel <f> dû à plusieurs charges
est la somme des potentiels dus à toutes les charges individuelles. Il existe
60
aussi un principe de superposition pour les potentiels. En utilisant le même genre de rai-
sonnement que celui grâce auquel nous avons trouvé le champ électrique dû à un groupe
de charges et à une distribution de charges, nous pouvons obtenir les formules donnant
le potentiel rp au point que nous appelons (l):
1/1(1) = _t_
4n-Eo
J p(2) dV2.
ru
(4.25)
Rappelons que le potentiel <fi a une signification physique: c'est l'énergie potentielle
qu'aurait une charge unitaire si on l'amenait au point considéré de l'espace à partir d'un
point de référence.
4--4 E= -Vrp
Pour quoi faire, ce rp? Les forces sur les charges sont données par E, le champ électrique.
L'intérêt est que E s'obtient facilement à partir de <fi - c'est en effet aussi facile que de
prendre une dérivée. Considérons·deux points, l'un en x et l'autre en (x + dx), mais tous
deux ayant le même y et le même z, et cherchons quel travail on effectue quand on
transporte une charge unitaire du premier point à lautre. Le trajet se fait le long de la ligne
horizontale de x jusqu'à x + dx. Le travail effectué est la différence de potentiel entre
les deux points:
&/>
AW = l/>(X + ÂX, y, z) - l/>(X, y, z) = éJx Ax.
AW = -fE·da = -E:Ax.
On voit que
&fi (4.26)
E.,=-ax·
Cette équation est la forme différentielle de l'Eq. (4.22). Tout problème de charges données
peut se résoudre en calculant le potentiel par (4.24) ou (4.25) et en utilisant (4.27) pour
obtenir le champ. L'équation (4.27) est aussi en accord avec ce qu'on a trouvé par le calcul
vectoriel: que pour tout champ scalaire <fi
(4.28)
D'après l'Eq. (4.25) le potentiel scalairecp est donné par une intégrale à trois dimensions
similaire à celle que nous avions pour E. Y a-t-il un avantage à calculerrp
61
plutôt que E? Oui. Il n'y a qu'une intégrale pour <f>, tandis qu'il y a trois intégrales pour E
- parce que c'est un vecteur. De plus, l/r est en général un peu plus facile à intégrer que
x/r3. Il se trouve dans beaucoup de cas pratiques qu'il est plus facile de calculer<f>, puis
d'en chercher le gradiqnt pour trouver le champ électrique, que d'évaluer les trois
intégrales pour E. C'est simplement une question pratique.
Il existe aussi une signification physique plus profonde du potentiel<f>. Nous avons
montré que E de la loi de Coulomb est obtenu à partir de E = - grad <f>, quand <f> est
donné par (4.22). Mais si E est égal au gradient d'un champ scalaire, on sait par le calcul
vectoriel que le rotationnel de E doit s'annuler:
V XE= O. (4.29)
fE· ds = 0
pour tout trajet. Nous avons vu au chapitre 3 que pour un tel champ, V x E doit être nul
partout. Le champ électrique en électrostatique est un exemple de champ irrotationnel.
Vous pouvez vous exercer au calcul vectoriel en montrant que V x E est nul d'une façon
différente - en calculant les composantes de V x E pour le champ créé par une charge
ponctuelle, tel qu'il est donné par l'Eq. (4.11 ). Si vous trouvez zéro, le principe de super-
position vous dit que vous obtiendriez zéro pour le champ de toute distribution de
charge.
Nous devons souligner un point important. Pour une force radiale quelconque le
travail effectué est indépendant du chemin suivi, et il existe un potentiel. Si vous y réflé-
chissez, tout le raisonnement que nous avons fait plus haut pour montrer que l'intégrale
représentant le travail était indépendante du chemin suivi, ne dépendait que du fait que la
force due à une charge unique était radiale et à symétrie sphérique. Il ne dépendait pas
du fait que la fonction de la distance était en l/r 2 - il aurait pu y avoir n'importe quelle
fonction der. L'existence d'un potentiel, et le fait que le rotationel de E est nul, ne viennent
en fait que de la symétrie et de la direction des forces électrostatiques. A cause de cela,
l'Eq. (4.28) - ou (4.29) peut ne contenir qu'une partie des lois de l'électricité.
4-5 Le flux de E
Nous allons maintenant déduire une équation de champ qui dépend spécifiquement et
directement du fait que la loi de force est en l/r2 • Le fait que le champ varie en raison
inverse du carré de la distance semble, à certains, être «tout naturel», parce que «c'est
ainsi que les choses se propagent à partir d'un point». Prenez une source lumineuse:
la quantité de lumière qui traverse une surface découpée par un cône dont le sommet
est à la source, est la même, quelle que soit la distance à laquelle la surface est placée.
Il faut qu'il en soit ainsi s'il doit y avoir conservation de l'énergie lumineuse. La quantité
de lumière par unité de surface - l'intensité - doit varier en raison inverse de la surface
découpée par le cône, c'est-à-dire comme l'inverse du
62
carré de la distance à la source. Le champ électrique devrait certainement varier comme
l'inverse du carré de la distance pour la même raison! Mais« la même raison »n'existe pas
ici. Personne ne peut çiire que le champ électrique mesure la propagation de quelque chose
comme la lumière, qui doit être conservée. Si nous avions un « modèle » du champ
électrique dans lequel le vecteur champ électrique représenterait la direction et la vitesse
- disons le courant - d'espèces de petites « balles» qui s'envoleraient, et si notre modèle
demandait que ces balles se conservent, qu'aucune ne puisse disparaître après qu'elle ait
été «tirée» par une charge, alors nous pourrions dire qu'on peut «voir» que la loi en l/r2
est nécessaire. D'un autre côté, il y aurait nécessairement une façon mathématique
d'exprimer cette idée physique. Si le champ électrique était semblable à l'émission de
balles se conservant, il varierait en raison inverse du carré de la distance et nous serions
capables de décrire ce comportement par une équation - ce qui est purement
mathématique. Il n'y a pas de mal à penser de cette façon, à condition de ne pas dire que
le champ électrique est fait de balles, mais de bien comprendre que nous utilisons un
modèle pour nous aider à trouver le traitement mathématique correct.
Supposons, en effet, que nous imaginions pour un instant que le champ électrique
représente bien l'écoulement de quelque chose qui est conservé - partout. sauf sur les
charges. (li faut qu'il parte de quelque part!) Nous imaginons que cet écoulement, quel
qu'il soit, sort d'une charge vers l'espace alentour. Si E était le vecteur d'un tel
écoulement (comme h l'est pour la propagation de la chaleur), il varierait en l/r2 près
d'une source ponctuelle. Nous allons maintenant utiliser ce modèle pour trouver le
moyen d'établir la loi de l'inverse carré, d'une façon plus profonde ou plus abstraite,
plutôt que de dire simplement« inverse carré». (Vous devez vous demander pourquoi
nous voulons éviter l'énoncé direct d'une loi aussi simple et pourquoi, au lieu de cela,
introduire furtivement la même chose d'une façon différente. Patience! Cela va se
révéler utile.)
/
/ //
// ,.,.
// .....:::::.- ,,,..
4"//...- Fig. 4-5. Le flux sortant de E à travers
;,..,-....-
<i1',.,. la surface S est nul.
Charge ponctuelle
être nul. C'est ce qu'on obtient si par le« débit» sortant de cette surface nous entendons
l'intégrale de surface de la composante normale de E - c'est-à-dire le flux de E. Sur les
faces radiales, la composante normale est nulle. Sur les faces sphériques, la composante
normale En est précisément
63
/
/
/
/
/,.., Fig. 4-6. Le flux sortant de E à travers
Gr...... la surface S est nul.
Charge ponctuelle
égale au module de E - avec Je signe moins pour la plus petite face et Je signe plus pour la
plus grande. Le module de E décroît comme l/r2, mais J'aire de la surface est propor-
tionnelle à r2 , de sorte que le produit est indépendant der. Le flux de E à travers la face a
est exactement compensé par le flux à travers la face b. Le flux total qui sort de S est nul,
ce qui signifie que pour cette surface
fs En da= O. (4.30)
Montrons maintenant que les deux surfaces terminales peuvent être inclinées par
rapport au rayon sans changer l'intégrale (4.30). Bien que ce soit vrai en général, il est
seulement nécessaire, pour notre propos, de montrer que c'est vrai quand les surfaces
terminales sont petites, de sorte qu'elles sont vues sous un petit angle depuis la source
- en fait sous un angle infiniment petit. Dans la Fig. 4-6 nous montrons une surface S
dont les « côtés » sont radiaux, mais dont les « bouts » sont inclinés. Les surfaces termi-
nales ne sont pas petites sur la figure, mais vous imaginez la situation pour de très petites
surfaces terminales. Le champ E sera alors suffisamment uniforme sur toute la surface
pour qu'on puisse n'utiliser que sa valeur au centre. Quand on incline la surface d'un
angle 8, l'aire est multipliée par Je facteur l/cos 8. Mais la composante de E normale
à la surface En, est divisée par le facteur cos 8. Le produit EnLla est inchangé. Le flux
sortant à travers toute la surface S est encore nul.
Il est maintenant facile de voir que le flux sortant d'un volume fermé par n'importe
quelle surface S doit être nul. Tout volume peut être considéré comme fait de morceaux,
comme ceux de la
64
Fig. 4-6. La surface sera complètement divisée en paires de surfaces terminales, et comme
les flux entrant et sortant de ces faces terminales se compensent par paires, le flux total
sortant de la surface.va être nul. L'idée est illustrée par la Fig. 4-7. Nous obtenons
le résultat tout à fait général que le flux total de E sortant de n'importe quelle surface S
dans le champ d'une charge ponctuelle est nul.
Mais attention! Notre démonstration n'est valable que si la surface S n'entoure pas
la charge. Qu'arriverait-il si la charge ponctuelle était à I'intérieur de la surface? Nous
pourrions encore diviser notre surface en paires de surfaces limitées par des rayons
passant par la charge, comme le montre la Fig. 4-8. Les flux à travers les deux surfaces
sont encore égaux - pour les mêmes raisons que précédemment - sauf que maintenant
ils ont le même signe. Le flux sortant d'une surface qui entoure une charge n'est pas nul.
Alors que vaut-il? On peut le trouve~ par une petite astuce. Supposons qu'on« enlève»
la charge de l'« intérieur» en entourant la charge par une petite surface S' totalement
intérieure à la surface primitive S, comme le montre la Fig. 4-9. Le volume contenu entre
les deux surfaces Set S' ne contient plus de charge à l'intérieur. Le flux total sortant de ce
volume (y compris celui à travers S') est nul, pour les raisons que nous avons données
ci-dessus. Ces raisons nous montrent, en fait, que le flux entrant dans le volume à travers S'
est le même que le flux sortant à travers S.
Surface
s
On peut choisir la forme qu'on veut pour S'; prenons donc une sphère centrée sur la
charge, comme dans la Fig. 4-10. On peut alors facilement calculer le flux à travers elle.
Si le rayon de la petite sphère est r, la valeur de E partout sur sa surface est
1 q
41TEo °;:2'
65
Fig. 4-1 O. Le flux à travers une surface
sphérique contenant une charge ponctuelle
q est q/ Eo.
et est toujours dirigée normalement à la surface. On trouve le flux total à travers S'
en multipliant cette composante normale de E par la surface:
1
Flux à travers la surface S' = ( -- 2
4?TEo r
!l) (41Tr 2
) = !lEo , (4.31)
nombre qui ne dépend pas du rayon de la sphère! On sait alors que le flux sortant de S
est aussi q/Eo - valeur indépendante de la forme de S tant que la charge q est intérieure.
f E" da
toute surface S
= 10-q; . q hors de S
Eo
, q dans S
(4.32)
Revenons à notre analogie avec des «balles» et voyons si elle a un sens. Notre théorème
dit que le flux total de balles à travers une surface est nµl si la surface ne contient pas
le fusil qui tire les balles. Si le fusil est contenu dans une surface, quelles qu'en soient la
grandeur et la forme, le nombre de balles qui passent à travers est le même - il est déterminé
par la cadence à laquelle les balles sont tirées par le fusil. Tout cela semble très raisonnable
pour des balles qui se conservent. Mais est-ce que ce modèle nous apporte quelque chose
de plus que ce qu'on obtient en écrivant simplement l'Eq. (4.32)? Personne n'a réussi à
faire faire à ces balles autres chose que de donner cette loi unique. Après quoi, elles ne
produisent rien d'autre que des erreurs. C'est pourquoi on préfère aujourd'hui représenter
le champ électromagnétique de façon purement abstraite.
66
Le flux, si les déux charges sont présentes, est le flux dû à une des charges plus le flux dû
à l'autre charge. Si les charges sont toutes les deux à l'extérieur de S, le flux à travers S est
nul. Si q1 est à l'intérieur de S mais q2 à l'extérieur, la première intégrale donne q/€fJ et
la seconde donne zéro. Si la surface contient les deux charges, chacune donne sa
contribution et on a le flux (q 1 + q2)/E0. La règle générale est évidemment que le flux total
sortant d'une surface fermée est égal à la charge totale intérieure, divisée par Eo.
Notre résultat est une importante loi générale du champ électrostatique, dite théorème
de Gauss.
THÉORÈME DE GAUSS: f En da
somme des charges intérieures
= ------~-----
Eo
(4.34)
surface
fermée S
ou
f
surface
fermée S
E · n da = Qint ,
Eo
(4.35)
ou
Qint = I: q;. (4.36)
intérieur de S
Si on décrit la répartition des charges dans l'espace à l'aide d'une densité de charge p,
on peut considérer que chaque élément de volume dV contient une charge « ponctuelle »
pdV. La somme sur toutes les charges est alors l'intégrale
Notre démonstration montre que le théorème de Gauss vient du fait que l'exposant dans
la loi de Coulomb est exactement deux. Un champ en l/r3, ou n'importe quel champ en
*
1/rn avec n 2, ne donnerait pas le théorème de Gauss. Ainsi le théorème de Gauss
n'est qu'une expression, sous une forme différente, de la loi de Coulomb donnant les forces
entre deux charges. En fait, on peut aller dans l'autre sens: à partir du théorème de Gauss,
on peut déduire la loi de Coulomb. Les deux sont parfaitement équivalents tant qu'on
garde à l'esprit le fait que les forces entre charges sont radiales.
Nous aimerions maintenant écrire le théorème de Gauss à l'aide de dérivées. Pour cela,
nous appliquons le théorème de Gauss à une surface cubique infiniment petite. Nous avons
montré au chapitre 3 que le flux de E à travers un tel cube est V · E fois le volume dV du
cube. La charge à l'intérieur de dV, par définition de p, est égale à p dV, de sorte que le
théorème de Gauss donne
pdV
V·EdV= - ,
ou Eo
V·E=f!_· (4.38)
Eo
La forme différentielle du théorème de Gauss est la première de nos équations fondamen-
tales du champ électrostatique, Eq. (4-5). Nous avons montré que les deux équations de
l'électrostatique, Eq. (4.5) et (4.6), sont équivalentes à la loi de force de Coulomb. Nous
allons maintenant considérer un exemple d'utilisation du théorème de Gauss. (Nous
verrons plus tard de nombreux autres exemples.)
67
4-7 Champ d'une sphère chargée
Un des problèmes difficiles que nous avons rencontré, lorsque nous avons étudié la
théorie de l'attraction gravitationnelle, a été de montrer que la force produite par une
sphère solide de matière est la même à la surface de la sphère que si toute la matière était
concentrée au centre. Pendant plusieurs années, Newton ne rendit pas publique sa théorie
de la gravitation parce qu'il ne pouvait pas être sûr que ce théorème était vrai. Nous avons
démontré ce théorème au chapitre 13 du Vol. I en calculant le potentiel à l'aide d'une
intégrale et en trouvant ensuite la force gravitationnelle à l'aide du gradient. Nous
pouvons maintenant démontrer le théorème d'une façon très simple. Seulement, cette
fois-ci nous démontrerons le théorème correspondant pour une répartition sphérique
uniforme de charge électrique. (Puisque les lois de l'électrostatique sont les mêmes que
celles de la gravitation, la même démonstration pourrait être faite pour le champ de
gravitation.)
/ - -........ E
I p'I("°"
Di"rib'"" i'~
de charge\. ~ :·.~''""' deGauss
Fig. 4-11. Utilisation du théorème de
Le théorème de Gauss nous dit que ce flux est égal à la charge totale Q de la sphère
(divisée par E0 ):
ou
1 Q,
E= ___ (4.39)
41!"Eo r2
ce qui est la même formule que celle que nous aurions trouvée pour une charge
ponctuelle Q. Nous avons résolu le problème de Newton plus facilement qu'en calculant
l'intégrale. C'est, bien entendu, une fausse facilité. Cela vous a pris du temps d'arriver à
comprendre le théorème de Gauss, vous pouvez donc penser que vous n'avez en fait pas
gagné de temps. Mais lorsque vous aurez de plus en plus utilisé le théorème, cela deviendra
Rayant. C'est une question d'efficacité.
68
4-8 Lignes de champ; surfaces équipotentielles
Nous voudrions donner maintenant une description géométrique du champ électro-
statique. Les deux lois de l'électrostatique (le flux est proportionnel à la charge intérieure,
et le champ électrique est le gradient d'un potentiel), peuvent aussi être représentées
géométriquement. Nous illustrerons ceci par deux exemples.
Lignes de
champ de E
Constante
- \
Fig. 4-12. Lignes de champ et surfaces équipotentielles pour une charge ponctuelle
positive.
Prenons d'abord le champ d'une charge ponctuelle. Dessinons des lignes dans la direc-
tion du champ - lignes qui sont toujours tangentes au champ, comme dans la Fig. 4-12.
Ces lignes sont appelées lignes de champ. Elles indiquent partout la direction du vecteur
champ électrique. Mais nous voulons aussi représenter la grandeur de ce vecteur.
Nous pouvons adopter comme règle que l'intensité du champ électrique sera représentée
par la« densité » des lignes. Par densité des lignes nous entendons le nombre de lignes par
unité d'aire à travers une surface perpendiculaire aux lignes. Avec ces deux règles nous
pouvons avoir une image du champ électrique. Pour une charge ponctuelle, la densité
des lignes doit décroitre en l/r 2 • Mais l'aire d'une surface sphérique perpendiculaire aux
lignes à une distance radiale r quelconque, augmente comme r2, donc si on garde toujours
le même nombre de lignes pour toutes les distances à la charge, la densité restera propor-
tionnelle à l'intensité du champ. Nous pouvons
69
garantir qu'il y a le même nombre de lignes à chaque distance si nous insistons sur le fait
que les lignes sont continues - que depuis le moment où une ligne commence à partir de la
charge, elle ne finit jamais. En termes de lignes de champ, le théorème de Gauss dit que les
ligiies ne doivent commencer qu'aux charges plus et ne doivent s'arrêter qu'aux charges
moins. Le nombre de lignes qui quittent une charge q doit être égal à q/e 0 •
Nous pouvons maintenant trouver une image géométrique semblable pour le
potentiel <f>. La façon la plus facile de représenter le potentiel est de dessiner des surfaces
sur lesquelles</> est constant. Nous les appelons surfaces équipotentielles - surfaces d'égal
potentiel. Quelle est alors la relation géométrique entre les surfaces équipotentielles et les
lignes de champ? Le champ électrique est le gradient du potentiel. Le gradient dans
la direction laquelle le potentiel varie le plus rapidement, et est par conséquent
perpendiculaire à une surface équipotentielle. Si E n'était pas perpendiculaire à la surface,
il aurait une composante sur la surface. Le potentiel changerait sur cette surface, mais
alors ce ne serait pas une équipotentielle. Les surfaces équipotentielles doivent donc être
partout à angle droit des lignes du champ électrique.
Fig. 4-13. Lignes de champ et équipotentielles pour deux charges ponctuelles égales et
opposées.
70
Pour une charge ponctuelle unique, les surfaces équipotentielles sont des sphères
centrées sur la charge. Nous avons montré sur la Fig. 4-12 l'intersection de ces sphères
avec un plan passant par la charge.
Comme second exemple, considérons le champ au voisinage de deux charges égales,
une positive et une négative. Il est facile de trouver le champ. Le champ est la super-
position des champs de chacune des deux charges. Nous pouvons donc prendre deux
représentations comme sur la Fig. 4-12 et les superposer · impossible! Nous aurions
des lignes de champ se traversant les unes les autres, et cela n'est pas possible parce que E
ne peut pas avoir deux directions au même point. L'inconvénient de la représentation
par les lignes de champ est maintenant évident. Par des raisonnements géométriques
il est impossible d'analyser d'une façon très simple comment sont les nouvelles lignes.
A partir de deux représentations indépendantes, nous ne pouvons pas obtenir la représen-
tation combinée. Le principe de superposition, principe simple et profond au sujet des
champs électriques, n'a pas, dans l'image des lignes de champ, une représentation facile.
L'image des lignes de champ a cependant son utilité; aussi il peut être intéressant de
dessiner cette image encore dans un autre cas, celui d'une paire de charges égales et oppo-
sées. Si nous calculons les champs à partir de l'Eq. (4. 13) et les potentiels à partir de (4.23),
nous pouvons dessiner les lignes de champ et les équipotentielles. La figure 4-13 montre le
résultat. Mais nous avons dû résoudre d'abord le problème mathématiquement!
Quantité Unité
F newton
Q coulomb
L mètre
W joule
p ,...., QI L3 coulomb/mètre3
l/fo,...., FL2/Q 2 newton-mètre2/coulomb 2
E,...., F/Q newton/coulomb
</> ,,._, W/Q joule/coulomb = volt
E,...., <Pl L volt/mètre
l/fo,...., EL2/Q volt-mètre/coulomb
71
Application du théorème de Gauss
72
cela ne changerait pas le résultat.) La force agissant sur la charge positive est nulle. Mais
est-ce que l'équilibre est stable? Est-ce que la charge reviendrait à sa position d'équilibre
si elle en était légèrement écartée? La réponse est non.
Il n'y a aucun point d'équilibre stable dans aucun champ électrostatique sauf juste au
même point qu'une autre charge. Nous allons voir pourquoi, en appliquant le théorème
de Gauss. Tout d'abord, pour qu'une charge soit en équilibre en un point donné P0 ,
le champ doit être nul. Ensuite, pour que cet équilibre soit stable, il faut qu'en écartant
la charge de P0 dans n'importe quelle direction, il y ait une force de rappel de sens
opposé à celui du déplacement. Le champ électrique en tous les points voisins doit être
dirigé vers le point P0 • Mais ceci est en désaccord avec le théorème de Gauss, s'il n'y a pas
de charge en P 0 , comme il est facile de voir.
,'\ .. --;-.
Fig. 5-1. Si P 0 était une pos1t1on
,' P. ..--: d'équilibre stable pour une charge positive,
1 _..,, O • , _ Surface imaginaire
le champ électrique au voisinage de P 0
I(__ j _..'1 entourant P0
serait partout dirigé vers P 0 •
Soit une petite surface imaginaire entourant P0 comme sur la Fig. 5-1. Si le champ élec-
trique en tout point voisin est dirigé vers P 0 , l'intégrale de surface de la composante
normale n'est certainement pas nulle. Pour le cas de la figure, le flux à travers la surface
doit être un nombre négatif. Mais, d'après le théorème de Gauss on sait que le flux à
travers une surface est proportionnel à la charge intérieure totale. S'il n'y a pas de charge
en P 0 , le champ que nous avons imaginé n'obéit pas au théorème de Gauss. Il est impos-
sible d'équilibrer une charge positive placée dans l'espace vide, en un point où il n'y a pas
une certaine charge négative. Une charge positive peut être en équilibre si elle est placée
au sein d'une distribution négative de charges. Bien entendu, la distribution de charges
négatives devrait être maintenue en place par des forces autres que les forces électriques!
Ce résultat a été obtenu pour une charge ponctuelle. La même conclusion reste-t-elle
valable pour un arrangement compliqué de charges maintenues les unes par rapport
aux autres dans des positions fixes, avec des baguettes, par exemple? Envisageons le
problème pour deux charges égales fixées aux deux extrémités d'une tige. Est-il possible
que cette combinaison soit en équilibre dans un champ électrostatique quelconque?
La réponse est encore non. La force totale qui s'exerce sur la tige ne peut être une force de
rappel pour des déplacements dans toutes les directions.
Soit Fla force totale s'exerçant sur la tige dans une position quelconque - Fest alors
un champ de vecteurs. En faisant le même raisonnement que plus haut, nous concluons
que dans une position d'équilibre stable, la divergence de F doit être un nombre négatif.
Mais la force totale s'exerçant sur la tige est le produit de la première charge par le champ
au point où elle est située, plus le produit de la seconde charge par le champ au point
où elle est située: ·
(5.1)
La divergence de F est donnée par
V · F = q 1 (V · E i) + q 2 (V · E 2).
73
Si chacune des deux charges q1 et q2 est dans l'espace vide, V · E1 et V· E2 sont toutes
deux nulles et V· Fest nulle - et non pas négative, comme cela est nécessaire à l'équilibre.
Vous pouvez vous assurer qu'une extension du raisonnement précédent, montre
qu'aucune combinaison rigide d'un nombre quelconque de charges ne peut avoir une
position d'équilibre stable dans un espace vide où règne un champ électrostatique.
Mais nous n'avons pas montré que l'équilibre est impossible s'il existe des pivots ou
d'autres contraintes mécaniques. Comme exemple, considérons un tube creux dans
lequel une charge peut aller et venir librement, mais ne peut se déplacer latéralement.
Il est très facile maintenant de construire un champ électrique qui, aux extrémités du
tube pointe vers l'intérieur à condition qu'il puisse pointer latéralement vers l'extérieur,
près du centre du tube. Il suffit de disposer des charges positives aux deux extrémités du
tube, comme sur la Fig. 5-2. Il peut maintenant y avoir une position d'équilibre quoique la
divergence de E ne soit pas nulle. La charge, évidemment ne serait pas en équilibre stable
pour les mouvements latéraux, s'il n'y avait pas les forces « non-électriques » provenant
des parois du tube.
74
des charges qui jouent le rôle de support par des moyens convenables. Nous savons qu'une
tige debout dans un champ de gravitation est instable, mais ceci ne prouve pas qu'elle ne
peut-être tenue en équilibre sur le bout d'un doigt. De même, une charge peut être
maintenue en un point par des champs électriques si ceux-ci sont variables. Mais non par
un système passif - c'est-à-dire statique.
Sphère positive
,,; uniformément chargée
Charge négative
concentrée au centre
On suggéra d'abord que la charge positive d'un atome pourrait être distribuée uniformé-
ment dans une sphère, et que les charges négatives, les électrons, seraient au repos à
l'intérieur de la charge positive, comme on le voit sur la Fig. 5-3. Ce fut le premier
modèle atomique, proposé par Thomson. Mais Rutherford tira de l'expérience de
Geiger et Marsden la conclusion que les charges positives devaient être beaucoup plus
concentrées, dans ce qu'il appela le noyau. Il fallut abandonner le modèle statique de
Thomson. Rutherford et Bohr suggérèrent alors que l'équilibre pouvait être dynamique,
avec les électrons décrivant des orbites, comme on le voit sur la Fig. 5-4. C'est le mouve-
ment orbital qui empêcherait les électrons de tomber sur le noyau. Nous connaissons déjà
au moins une difficulté présentée par cette conception. Avec un tel mouvement les
électrons seraient accélérés (en raison du mouvement circulaire) et par conséquent,
rayonneraient de l'énergie. Ils perdraient l'énergie cinétique nécessaire pour se maintenir
sur une orbite et tomberaient en spirale .vers le noyau. Encore instable!
Électrons négaufs
sur des orbites planétaires
75
La stabilité des atomes est maintenant expliquée dans le cadre de la mécanique
quantique. Les forces électrostatiques attirent l'électron aussi près que possible du noyau,
mais l'électron est obligé de se maintenir étalé sur une certaine région de l'espace dont les
dimensions sont données par le principe d'incertitude. S'il était confiné dans un trop petit
espace, il y aurait une grande incertitude sur son impulsion. Mais ceci signifie qu'il aurait
une grande énergie moyenne - qu'il utiliserait pour échapper à l'attraction électrique.
Le résultat final est un équilibre électrique, pas tellement différent de celui imaginé par
Thomson - seulement, c'est la charge négative qui est étalée (car la masse de l'électron
est beaucoup plus petite que la masse du proton).
76
Selon le théorème de Gauss, le flux total de E sortant de la surface est égal ·à ia charge
intérieure divisée par e0 • Puisque Je champ est supposé être normal à la surface, la com-
posante normale est l'intensité du champ, soit E. Soit r le rayon du cylindre. Choisissons
sa hauteur égale à l'unité de longueur par commodité. Le flux à travers la surface cylin-
drique est égal au produit de E par l'aire de la surface qui est 2nr. Le flux sortant des
deux faces terminales est nul car le champ électrique est tangent à ces faces. La charge
totale intérieure à cette surface est Â., car la longueur de la ligne qu'elle contient est égale
à l'unité. Le théorème de Gauss donne
E · 27rr = À/Eo,
E = _ À__
(5.2)
27re 0 r
<9
·!IL, j__ E,
Surface de Gauss
~
plan chargé uniformément peut être calculé
par application du théorème de Gauss à une
boîte imaginaire.
""
77
intensité) des deux côtés du plan. Cette fois-ci nous choisirons comme surface de Gàuss
une boîte rectangulaire qui coupe le plan comme sur la Fig. 5-6. Les deux faces parallèles
au plan ont même aire, soit A. Le champ est normal à ces faces, et parallèle aux quatr.e
autres. Le flux total est le produit de Epar l'aire de la première face, plus le produit de E
par l'aire de la face opposée - sans contributiÔn de la part des quatre autres faces. La
charge totale contenue dans la boîte est a A. Égalant le flux à la charge intérieure, nous
avons
aA
EA + EA = - ,
Eo
d'où
(5.3)
+
+
(a)
+ -
+ E
(b) + -E
(c) + +E
78
Le problème de deux plans parallèles avec des densités de charges égales et opposées,
+a et - a, est aussi simple si nous admettons encore que l'espace extérieur est complète-
ment symétrique. Soit en superposant deux solutions relatives à un seul plan, soit en
construisant une «boîte de Gauss» qui contienne les deux plans, on peut facilement voir
que le champ est nul à fextérieur des deux plans (Fig. 5-7a). En considérant une boîte
qui contienne seulement l'un ou l'autre des plans, comme en (b) ou (c) de la figure, on
peut voir que le champ entre les deux plans doit être double de celui dû à un plan unique.
Le résultat est le suivant
Nous avons déjà (au chapitre 4) appliqué le théorème de Gauss pour trouver le champ
à l'extérieur d'une région sphérique uniformément chargée. La même méthode peut
aussi nous donner le champ en des points intérieurs à la sphère. Par exemple, ce calcul
peut nous permettre d'obtenir avec une bonne approximation le champ à l'intérieur
d'un noyau atomique. Bien que les protons dans le noyau se repoussent les uns les
autres, ils sont répartis dans le volume du noyau presque uniformément en raison des
forces nucléaires intenses.
.., .. -;.
Fig. 5-8. Le théorème de Gauss peut
servir à calculer le champ à l'intérieur d'une
sphère uniformément.chargée.
79
La charge à l'intérieur de cette surface de Gauss est le produit du volume par p, soit
D'après le théorème de Gauss, il s'ensuit que l'intensité du champ est donnée par
E = J!!...
3Eo
(r < R). (5.7)
Nous voyons que cette formule donne le bon résultat pour r = R. Le champ électrique
est proportionnel au rayon et est dirigé suivant le rayon vers l'extérieur.
Les raisonnements que nous venons de développer pour une sphère uniformément
chargée sont encore applicables à une mince couche sphérique chargée. En admettant
encore que le champ est partout radial et à symétrie sphérique, on trouve tout de suite
par application du théorème de Gauss que le champ à l'extérieur de la couche est le même
que celui d'une charge ponctuelle, tandis qu'à l'intérieur il est nul. (Une surface de Gauss
à l'intérieur de la couche ne contiendra aucune charge).
80
Si la surface de la sphère est uniformément chargée, la charge Aq portée par chaque
élément de surface est proportionnelle à son aire, donc
Aq2 Aa2
Aq1 = Aa1.
La loi de Coulomb nous indique que les intensités des champs produits en P par ces
deux éléments de surface sont dans le rapport
E2 q2/r~ =
E 1 = qi/rf l.
81
observation à Priestley, celui-ci suggéra qu'il devait être lié à une loi en l/r2, puisque
l'on savait déjà qu'une couche sphérique de matière ne produisait aucun champ de gravi-
tation en son intérieur. Mais ce n'est que dix-huit ans plus tard que Coulomb mesura
cette dépendance en l/r2 , et Je théorème de Gauss vint encore plus tard.
(al
Sphère
creuse
chargée
(b)
Ceci nous amène à une question intéressante; Avec quelle précision connaissons-nous
cette loi de Coulomb dans différentes conditions? Les expériences que nous venons de
décrire mesurent la dépendance du champ par rapport à la distance, pour des distances
de quelques dizaines de centimètres. Mais, que se passe-t-il pour les distances existant
à l'intérieur d'un atome - dans l'atome d'hydrogène, par exemple, - où nous pensons
que l'électron est attiré par Je noyau suivant la même loi de l'inverse du carré? Il est vrai
que la mécanique quantique doit être appliquée pour déterminer le comportement
mécanique de l'électron, mais la force en jeu est la force électrostatique habituelle.
Quand on formule ce problème, l'énergie potentielle de l'électron doit être une fonction
connue de la distance au noyau, et la loi de Coulomb donne un potentiel qui varie
comme l'inverse de la distance, à la puissance un. Avec quelle précision cet exposant
est-il connu pour de si petites distances? D'après les résultats de
82
mesures très soignées faites en 1947 par Lamb et Retherford sur les positions relatives
des niveaux d'énergie de l'hydrogène, nous savons qu'à l'échelle atomique - c'est-à-dire,
pour des distances de l'ordre de un angstrôm (10-8 centimètre), - l'exposant est encore
exact à un milliardième près.
La précision de la mesure de Lamb-Retherford fut possible là encore, grâce à un
«accident» physique. Deux des états de l'atome d'hydrogène doivent correspondre à
des énergies presques égales seulement si le potentiel varie exactement comme l/r. On
fit une mesure du très faible écart d'énergie en trouvant la fréquence w des photons
émis ou absorbés dans la transition d'un état à l'autre, et en calculant la différence
d'énergie par AE = hw. Les calculs montrèrent que AE aurait été notablement différent
de ce qui était observé si l'exposant dans la loi de force en l/r 2 différait de 2 de plus
d'un milliardième.
Ce même exposant est-il exact pour des distances encore plus petites? Grâce à des
mesures en physique nucléaire on a trouvé qu'il y avait des forces électrostatiques à des
distances typiquement nucléaires - soit environ l0- 13 centimètre - et qu'elles varient
encore approximativement comme l'inverse du carré. Nous en verrons quelques preuves
dans un chapitre ultérieur. La loi de Coulomb est, nous le savons, encore valable - au
moins à une certaine approximation, pour des distances de l'ordre de 10-13 centimètre.
Que se passe-t-il pour 10-14 centimètre? Ce domaine peut être étudié en bombardant
des protons avec des électrons de très grande énergie, et en observant comment ils sont
diffusés. Les résultats à ce jour semblent indiquer que la loi n'est plus exacte à ces dis-
tances. La force électrique paraît être 10 fois trop faible à des distances inférieures à
10-14 centimètre. A cela il y a deux explications possibles. L'une, c;est que la loi de
Coulomb n'est plus applicable à d'aussi petites distances; l'autre, c'est que nos objets,
les électrons et les protons, ne sont pas des charges ponctuelles. Peut-être, l'électron
ou le proton, ou tous les deux, sont-ils en quelque sorte étalés. La plupart des physiciens
préfèrent admettre que. la charge du proton est étalée. Nous savons que les protons
interagissent fortement avec les mésons. Ceci implique qu'un proton peut de temps en
temps exister sous forme d'un neutron, entouré d'un méson n+. Une telle configuration
agirait - en moyenne - comme une petite sphère chargée positivement. Nous savons que
le champ dû à une sphère chargée ne varie pas comme l/r2 jusqu'au centre. Il est très
probable que la charge du proton est étalée, mais la théorie des pions est encore très
incomplète et c'est peut-être la loi de Coulomb qui n'est plus valable aux très petites
distances. La question est ouverte.
Un point encore: la loi de l'inverse du carré est vraie à des distances de l'ordre du mètre
et à 10-10 m aussi; mais le coefficient l/4nt 0 rest-t-il le même? La réponse est oui; au
moins à la précision de 15 millionièmes.
Revenons maintenant à un problème important sur lequel nous avons glissé quand
nous avons parlé de la vérification expérimentale du théorème de Gauss. Vous avez
pu vous demander comment l'expérience de Maxwell, ou de Plimpton et Laughton,
avait pu donner une pareille précision, si le conducteur sphérique dont ils se servaient
n'était pas une sphère parfaite? Une précision de un milliardième est vraiment un exploit
et vous pouvez bien vous demander s'ils ont pu faire une sphère avec une pareille préci-
sion. Il y a évidemment des petites irrégularités dans toute sphère réelle, et s'il y a des
irrégularités, celles-ci ne produiront-elles pas des champs à l'intérieur? Nous allons
montrer maintenant qu'il n'est pas nécessaire d'avoir une sphère parfaite. On peut
en effet, montrer qu'il n'y a pas de champ à l'intérieur d'une surface conductrice fermée
83
de forme quelconque. En d'autres termes, les expériences dépendaient de l/r 2 , mais
n'avaient rien à voir avec le fait que la surface soit une sphère (si ce n'est qu'il est plus
facile de calculer ce que seraient les champs dans une sphère si Coulomb s'était trompé),
donc nous abordons ce sujet maintenant. Pour montrer ceci, il faut connaître certaines
propriétés des conducteurs électriques. ·
84
A fextérieur d'wz conducteur:
E = !!..., (5.8)
eo
où a est la densité superficielle locale de charge.
Surface de Gauss
85
Fig. 5-12. Quel est le champ à l'inté-
rieur d'une cavité vide dans un conducteur
de forme quelconque 7
Ce qui se passe réellement, bien sûr, c'est que deux charges égales et de signe con-
traire de la surface intérieure vont se déplacer jusqu'à se rencontrer et se compenser
complètement. Nous pouvons montrer qu'elles doivent se compenser complètement
d'après la loi sur la circulation de E qui est toujours nulle (électrostatique). Supposons
qu'il y ait des charges en certains endroits de la surface interne. Nous savons qu'il devrait
y avoir des charges égales et opposées quelque part ailleurs. Alors toute ligne de E
devrait partir des charges positives et se terminer sur les charges négatives (puisque
nous considérons seulement le cas où il n'y a pas de charges libres dans la cavité). Imagi-
nons alors une boucler qui traverse la cavité le long d'une ligne de champ d'une charge
positive vers une charge négative, et revient à son point de départ à travers le conducteur
(comme sur la Fig. 5-12). L'intégrale le long d'une telle ligne de champ de la charge
positive vers la charge négative ne serait pas nulle. L'intégrale à travers le métal est
nulle puisque E =O. Nous aurions donc
f E · ds ;é O???
Mais l'intégrale curviligne de E le long d'une boucle fermée dans un champ électro-
statique est toujours nulle. Donc il ne peut y avoir aucun champ à l'intérieur de la
cavité vide, ni aucune charge sur la face interne.
Il faut bien remarquer une réserve importante que nous avons faite. Nous avons
toujours dit «à l'intérieur d'une cavité vide». Si l'on dispose certaines charges en des
points fixés de la cavité - comme sur un isolant ou sur un petit conducteur isolé du
conducteur principal - alors, il peut y avoir des champs dans la cavité. Mais alors ça
n'est plus une cavité «vide».
Nous venons de voir que si une cavité est entièrement entourée d'un conducteur
aucune distribution statique de charges à l'extérieur ne peut jamais produire de champs
à l'intérieur. Ceci explique le principe du «blindage» d'un équipement électrique, que
l'on réalise en le plaçant dans une boîte métallique. On peut appliquer les mêmes raison-
nements pour montrer qu'aucune distribution statique de charges à l'intérieur d'un
conducteur fermé ne peut produire de champs à l'extérieur. Le blindage fonctionne
dans les deux sens! En électrostatique - mais non pas dans des champs variables - les
champs, de part et d'autre d'une couche conductrice fermée sont complètement indé-
pendants.
86
Maintenant nous voyons pourquoi il a été possible de vérifier avec tant de précision
la loi de Coulomb. Peu importe la forme de la couche creuse utilisée. Elle n'a pas
besoin d'être sphérique; elle pourrait tout aussi bien être cubique! Si le théorème de
Gauss est exact, le champ à l'intérieur est nul. Maintenant vous comprenez aussi pour-
quoi il n'est pas dangereux de s'asseoir à l'intérieur de la partie portée à haute tension
d'un générateur van de Graaff d'un million de volts, sans craindre une décharge - tout
ceci grâce au théorème de Gauss.
87
6
(6.1)
V XE= O. (6.2)
En fait, on peut combiner ces deux équations en une seule. D'après la seconde équa-
tion, nous savons tout de suite que nous pouvons décrire le champ comme étant le
gradient d'un scalaire (voir section 3-7):
E = - vq,. (6.3)
88
Nous pouvons, si nous le voulons, décrire complètement tout champ électrique
particulier à l'aide de son potentiel if>. Nous obtenons l'équation différentielle à laquelle
if> doit satisfaire en substituant l'Eq. (6.3) dans (6.1),
(6.4)
La divergence du gradient de if>, c'est la même chose que '1 2 agissant sur if>:
~ 2 él2
V · Vif> = V2ef> =~
ôx 2
+~
ôy 2
+ __±
ôz 2
• (6.5)
où p(2) est la densité de charge, dV2 l'élément de volume au point (2), et r 12 la distance
entre les points (1) et (2). La résolution de l'équation différentie/le (6.6) se réduit à une
intégration dans l'espace. Il faut noter tout spécialement la solution (6.7), car on
rencontre en physique beâucoup de cas qui conduisent à des équations telles que
89
Nous n'allons pas écrire la formule pour le champ électrique, mais nous pouvons
toujours le calculer dès que nous avons le potentiel. Nous avons donc résolu le problème
de deux charges.
P(K,)',Z)
Il existe un cas particulier important dans lequel les deux charges sont très proches
l'une de l'autre - ce qui veut dire que nous ne nous intéressons aux champs qu'à des
distances des charges grandes par rapport à leur séparation. Nous appelons une telle
paire de charges un dipôle. Les dipôles se rencontrent très souvent.
Une antenne «dipôle» peut souvent être représentée par deux charges séparées par
une petite distance - si nous ne nous intéressons pas au champ trop près de l'antenne.
(Nous nous intéressons habituellement à des antennes avec des charges en mouvement;
les équations de la statique ne s'appliquent pas réellement, mais pour certaines appli-
cations elles constituent une approximation adéquate.)
Plus importants, peut-être, sont les dipôles atomiques. S'il existe un champ électrique
dans un matériau quelconque, les électrons et les protons sont soumis à des forces oppo-
sées et sont déplacés les uns par rapport aux autres. Dans un conducteur, vous vous en
souvenez, certains électrons se déplacent vers la surface, de sorte que le champ à l'inté-
rieur devient nul. Dans un isolant les électrons ne peuvent se déplacer très loin; ils sont
rappelés en arrière par l'attraction des noyaux. Ils se déplacent cependant un petit peu.
Donc, bien qu'un atome, ou une molécule, reste neutre dans un champ électrique externe,
il se produit une très faible séparation entre les charges positives et négatives et il appa-
raît un dipôle microscopique. Si nous nous intéressons aux champs créés par ces dipôles
atomiques au voisinage d'objets de dimensions ordinaires, nous avons normalement
affaire à des distances grandes par rapport à la séparation des paires de charges.
Dans certaines molécules les charges sont séparées, même en l'absence de champs
externes, à cause de la forme de la molécule. Dans une molécule d'eau, par exemple, il
y a une charge négative résultante sur l'atome d'oxygène et une charge positive résultante
sur chacun des deux atomes d'hydrogène, qui ne sont pas disposées de façon symétrique
mais comme sur la Fig. 6-2. Bien que la charge de la molécule entière soit nulle, il y a une
distribution de charge avec un peu plus de charge négative d'un côté et un peu
90
Fig. 6-2. La molécule d'eau H 2 0. Les
atomes d'hydrogène ont un peu moins que
leur compte du nuage électronique; l'oxy-
gène un peu plus.
plus de charge positive de l'autre. Cette disposition n'est certainement pas aussi simple
que celle de deux charges ponctuelles, mais vu de loin, le système se comporte comme
un dipôle. Comme nous le verrons plus Join, le champ à grande distance n'est pas
sensible aux petits détails.
Étudions donc le champ créé par deux charges opposées séparées par une petite
distance d. Si d devient égale à zéro, les deux charges sont l'une sur l'autre, les deux
potentiels s'annulent et il n'y a pas de champ. Mais si elles ne sont pas exactement l'une
sur l'autre, nous pouvons obtenir une bonne approximation du potentiel en développant
les termes de (6.8) en série de puissances de la quantité d (en utilisant le développement du
binôme). En ne gardant que les termes du premier ordre en d, nous pouvons écrire
(z - ~ 2
de sorte que
(z - ~ + x +
2
2
y
2
"" 7
2
- zd
2
= 7 ( 1- ~~ •
et
1 1 1(1 zcl\- 1' 2
v[z - (d/2)]2 + x2 + y2 ""v'r2[1 - (zd/r2)] ""r - r2}
En utilisant à nouveau le développement du binôme pour [1 - (zd/r 2 )]- 112 - et en
négligeant les termes d'ordre supérieur à deux - nous obtenons
1 (1 +1-z~
- -·
r 2 r2
De même,
1 1(1
v'Cz + (d/2)J2 + x2 + y2 "" r
La différence de ces deux termes donne pour le potentiel
1 z
f/>(x,y,z) = -411"Eo
- 3 qd.
r
(6.9)
Le potentiel, et par conséquent le champ qui en est la dérivée, est proportionnel à qd,
produit de la charge par la distance. Ce produit est la définition du
91
moment dipolaire des deux charges, que nous désignerons par p (ne pas confondre avec
la quantité de mouvement!):
p = qd. (6.10)
L'équation (6.9) peut aussi s'écrire sous la forme
l p cos 8
t/>(x, y, z) = -4- - - 2- , (6.11)
11'Eo r
e, e
puisque z/r = cos où est l'angle déterminé par l'axe du dipôle et le rayon vecteur
du point (x, y, z) - voir Fig. 6-1. Le potentiel d'un dipôle décroît en l/r2 dans une
direction donnée par rapport à l'axe (tandis que pour une charge ponctuelle il varie en
l/r). Le champ électrique E créé par un dipôle décroîtra donc en 1/r3.
p
Nous pouvons mettre notre formule sous forme vectorielle si nous appelons p le
vecteur dont la grandeur est p et dont la direction est celle de l'axe du dipôle, orienté
de q _ vers q+· Alors
p cos 8 = p · e., (6.12)
où er est le vecteur unité radial (Fig. 6-3). Nous pouvons aussi représenter le point
(x, y, z) par r. D'où
raz) = - 3z
2
ôt/> p ô ( p ( I )
- ÔZ = - 4'11'Eo ÔZ 411'Eo ra - -,S ,
ou E _ _p__ 3 cos 2 8 - (6.14)
• - 4'11'Eo ,a
Les composantes x et y sont
p 3zx E = _]!__ 3zy .
E., = ----·
4'11'Eo r6 " 411'Eo r6
92
Ces deux relations peuvent se combiner de façon à donner une composante dirigée
perpendiculairement à l'axe z, que nous appellerons composante transversale E_,_ :
3
E.J.. = v'E2
"'
+ E211 = _!!_ z v'x2 + y2
47rEo r3 ·
ou
E.J.. = _!!_ 3 cos Osin O•
(6.15)
411'Eo r3
La composante transversale E_,_ est située dans le plan xy et s'éloigne de l'axe du dipôle.
Le champ total est, bien entendu, égal à
E = v'~ +Bi.
93
D'autre part, si vous essayez de calculer la divergence d'un vecteur, au lieu de regarder
l'expression V· E et de vous demander ce que c'est, n'oubliez pas qu'on peut toujours
la développer sous la forme
aE., + aE + aE• .
11
ax ay az
Si vous pouvez alors obtenir les composantes x, y, et z du champ électrique et les
différencier, vous aurez la divergence. Il semble souvent que l'on ait le sentiment de faire
quelque chose d'inélégant - impliquant une sorte de défaite - en développant des compo-
santes; et que d'une façon ou d'une autre il devrait toujours y avoir le moyen de tout faire
à l'aide des opérateurs vectoriels. Cela ne présente souvent aucun avantage. Quand nous
rencontrons pour la première fois une catégorie particulière de problèmes, il est habi-
tuellement utile d'écrire les composantes, de façon à être sûrs que nous comprenons ce
qui se passe. Il n'y a rien d'inélégant à mettre des nombres dans des équations, et rien
d'inélégant à substituer des dérivées à de jolis symboles. En réalité, faire cela dénote
souvent une certaine habileté. Bien entendu lorsque vous publiez un article dans une
revue spécialisée, cela a meilleure allure - et l'on comprendra plus facilement - si vous
écrivez tout sous forme vectorielle. De plus, cela économise de la place.
Nous voudrions faire remarquer quelque chose d'assez amusant sur la formule du
dipôle, Eq. (6.13). On peut aussi écrire le potentiel sous la forme
If>= __ l_p·v(!).
47rEo r
(6.16)
' e,
-;:a= -'2'
tf>o = g_.
r
(Laissons tomber le facteur 1/4ne0 pour faire cette démonstration; nous le remettrons
à la fin.) Si nous déplaçons maintenant la charge + q d'une distance Az, le potentiel
en P variera un peu, disons, d'une quantité A<P+· Combien vaut AY/J+? Eh bien, ce n'est
que la quantité dont
94
z
t/>+ = 'l. -
r
i.('l.) ~.2
âz r
(6.17)
_i_
âz
(!) qd.
r
"'= -vG)-qd.
95
C'est la même chose que l'Eq. (6.16), si nous posons qd = p, et si nous réintroduisons le
terme l/4nE 0 • En examinant cela d'une autre façon, nous voyons que le potentiel d'un
dipôle, Eq. (6.13), peut s'écrire sous la forme
.P = -p · V4>o, (6.20)
dans laquelle<Po= l/411Eo" est le potentiel créé par une charge ponctuelle unité.
Bien que nous puissions toujours trouver le potentiel créé par une distribution connue
de charges à l'aide d'une intégration, il est quelquefois possible de gagner du temps en
trouvant la réponse à l'aide d'une astuce. Par exemple, on peut souvent faire usage du
principe de superposition. Si l'on nous donne une distribution de charges qui peut être
réalisée par la superposition de deux distributions pour lesquelles le potentiel est déjà
connu, il est facile de trouver le potentiel cherché en ajoutant tout simplement les deux
potentiels connus. Le calcul de (6.20) en est un exemple, en voici un autre.
Supposons que nous ayons une surface sphérique portant une distribution super-
ficielle de charges qui varie comme le cosinus de l'angle polaire. L'intégration pour cette
distribution est assez compliquée. Mais, chose surprenante, une telle distribution peut
être analysée par superposition. En effet, imaginez une sphère présentant une densité
volumique uniforme de charge positive, et une autre sphère chargée avec une égale
densité volumique uniforme de charge négative, superposées initialement de façon à
constituer une sphère neutre - c'est-à-dire, non chargée. Si on déplace alors légèrement
la sphère positive par rapport à la sphère négative, le corps de la sphère non chargée
doit rester neutre, mais il apparaîtra d'un côté une petite charge positive et sur le côté
opposé une certaine charge négative, ainsi que le montre la Fig. 6-6. Si le déplacement
relatif des deux sphères est petit, la charge résultante est équivalente à une charge
-o
superficielle (sur une surface sphérique), et la densité superficielle de charges est propor-
tionnelle au cosinus de l'angle polaire.
00
----=~
+ -
----- - -
-- (c} Fig. 6--6. Deux sphères uniformément
(a) + (b} chargées, superposées avec un léger déca-
lage, sont équivalentes à une distribution
superficielle non uniforme de charge.
Si nous voulons maintenant le potentiel créé par cette distribution, nous n'avons pas
besoin de faire une intégration. Nous savons que le potentiel créé par chacune de ces
sphères chargées est - pour des points à l'extérieur des sphères - le même que celui créé
par une charge ponctuelle. Les deux sphères déplacées sont identiques à deux charges
ponctuelles; le potentiel n'est autre que celui d'un dipôle.
De cette façon vous pouvez montrer qu'une distribution de charges sur une sphère de
rayon a avec une densité superficielle de charge
<T = <To cos()
crée à l'extérieur de la sphère un champ qui n'est autre que celui d'un dipôle de moment
411"<ToQ3
p = -3-·
96
On peut aussi montrer qu'à l'intérieur de la sphère le champ est constant, et a la valeur
E = !!.2._.
3Eo
Si B est l'angle formé avec la direction positive de l'axe des z, le champ électrique à
l'intérieur de la sphère est dans la direction négative de l'axe des z. L'exemple que nous
venons de considérer n'est pas aussi artificiel qu'il pourrait le paraître; nous le rencon-
trerons à nouveau dans la théorie des diélectriques.
Nous pouvons considérer notre objet comme une assemblée de charges ponctuelles
q1 dans une certaine région limitée, comme le montre la Fig. 6-7. (Nous pourrons, plus
tard, remplacer qi par pdV, si nous le voulons.) Supposons que chaque charge q1 soit
située à une distance d1 d'une origine choisie quelque part au milieu du groupe de
charges. Quel est le potentiel en un point P situé à une distance R, R étant beaucoup
plus grand que la distance d1 maximum? Le potentiel créé par toute la collection est
donné par
<f>= -
1
- . -
L:
q; (6.21)
4'1!'Eo r;·
'
où r1 est la distance de P aux charges q, (la longueur du vecteur R- d1). Si maintenant
la distance des charges au point P, point d'observation, est énorme, on peut remplacer
chacun des r1 par R. Chaque terme devient égal à qtf R, et nous pouvons mettre l/R en
facteur devant la somme. Ce qui nous donne le résultat simple
1 1 Q (6.22)
<f> = 4'1!'Eo RL q; = 4'1!'EoR '
97
où Q n'est autre que la charge totale de !;objet. Nous voyons ainsi que, pour des points
suffisamment loin d'un amas quelconque de charges, cet amas se comporte comme une
charge ponctuelle. Le résultat n'est pas trop surprenant.
Mais que se passe-t-il s'il y a des charges positives et des charges négatives en nombre
égal? La charge totale Q de l'objet est alors nulle. Ceci n'est pas un cas inhabituel; en
effet, comme nous le savons, les objets sont généralement neutres. La molécule d'eau
est neutre, mais les charges ne sont pas toutes localisées en un point, de sorte que si nous
étions suffisamment près nous pourrions voir quelques-uns des effets produits par les
charges distinctes. Nous avons besoin d'une meilleure approximation que (6.2) pour
exprimer le potentiel créé par une distribution quelconque de charges dans un objet
neutre. L'équation (6.21) est encore valable, mais nous ne pouvons plus poser r; = R.
Nous avons besoin d'une expression plus précise de ri. Si le point P est situé à une
grande distance, r; différera de R, à une excellente approximation près, d'une quantité
égale à la projection de d sur R, comme on peut le voir sur la Fig. 6-7. (Vous devez
imaginer que Pest en réalité beaucoup plus loin que cela n'est représenté sur la figure.)
En d'autres termes, si er est le vecteur unité de la direction de R, notre nouvelle approxi-
mation pour r 1 sera
(6.23)
En fait ce que nous voulons c'est l/r;, qui, puisque d1 < R, peut s'écrire dans notre
approximation sous la forme
En substituant cette expression dans (6.21), nous voyons que le potentiel est
q, = -1-
471"Eo
(QR + L:. q·' d··e
- _,__ + ...) •
R2
r (6.25)
'
Les points de suspension désignent les termes de degré plus élevé en d/R, que nous avons
négligés. Ceux-ci, tout comme ceux que nous avons déjà obtenus, sont les termes succes-
sifs du développement en série de Taylor de l/r; au voisinage de l/R en puissances de
d1/R.
Le premier terme de (6.25) est ce que nous avons obtenu précédemment; il disparaît
si l'objet est neutre. Le second terme varie en l/R 2 , comme dans le cas d'un dipôle. En
effet, si nous définissons
p = Y.:,q;d; (6.26)
comme une propriété de la distribution de charge, le second terme du potentiel (6.25)
est
1 p · er (6.27)
</> = 471"Eo }[2 '
c'est précisément le potentiel d'un dipôle. La quantité p est appelée moment dipolaire de
la distribution. C'est une généralisation de notre précédente définition, et elle se réduit
à celle-ci dans le cas particulier de deux charges ponctuelles.
Notre conclusion est que, suffisamment loin d'un paquet de charges quelconque, qui est
neutre dans son ensemble, le potentiel est un potentiel dipolaire. Il décroît en l/R 2 et
varie comme cos (J - et sa grandeur dépend du moment dipolaire de la distribution de
98
charge. C'est pour ces raisons que les champs dipolaires sont importants, puisque le cas
simple d'une paire de charges ponctuelles est tout à fait rare.
La molécule d'eau, par exemple, a un moment dipolaire assez important. Les champs
électriques qui résultent de ces moments sont responsables d'un certain nombre de
propriétés importantes de l'eau. Pour de nombreuses molécules, C0 2 par exemple, le
moment dipolaire disparaît à cause de la symétrie de la molécule. Pour celles-ci nous
devons développer avec encore plus de précision, ce qui donne dans le développement du
potentiel un terme de plus qui décroît en l/R3 , et qui est appelé potentiel quadrupolaire.
Nous étudierons de tels cas plus tard.
Nous en avons maintenant fini avec les cas que nous voulions développer, dans lesquels
la distribution des charges est connue dès le départ. Cela a été un problème sans complica-
tions sérieuses, mettant en jeu au plus quelques intégrations. Nous abordons maintenant
un type de problèmes entièrement neuf, la détermination des champs au voisinage des
conducteurs chargés.
Supposez que nous nous trouvions dans le cas où une charge totale Q est placée sur un
conducteur quelconque. Nous ne serons pas capables maintenant de dire où se trouvent
exactement les charges. Elles vont se répartir d'une certaine façon sur la surface. Comment
pourrons-nous savoir comment sont distribuées les charges sur la surface? Elles doivent se
distribuer de façon à ce que le potentiel de la surface soit constant. Si la surface n'était
pas une équipotentielle, il existerait un champ électrique à l'intérieur du conducteur, et les
charges continueraient à se déplacer jusqu'à ce qu'il s'annule. On peut résoudre de la façon
suivante le problème général de ce type. Nous devinons une distribution de charges et
nous calculons le potentiel. Si le potentiel se révèle être constant en tout point de la surface,
le problème est terminé. Si la surface n'est pas une équipotentielle, c'est que nous avons
imaginé une mauvaise distribution de charges, et nous devons en deviner une nouvelle
- meilleure, espérons-le! Cela peut continuer indéfiniment, à moins que nous ne nous
montrions judicieux dans le choix de nos hypothèses successives.
99
6-7 La méthode des images
Nous avons trouvé, par exemple, Je champ créé par deux charges ponctuelles. La
figure 6-8 montre quelques-unes des lignes de champ et des surfaces équipotentielles que
nous avons obtenues par Je calcul au chapitre 5. Considérons à présent la surface
équipotentielle A. Supposons que nous donnions à une mince feuille de métal une forme
telle qu'elle s'emboîte exactement sur cette surface. Si nous la plaçons exactement sur la
surface et que nous ajustons son potentiel à la valeur convenable, personne ne pourra
savoir qu'elle est là, parce que rien n'aura changé.
Mais attention! Nous avons en fait résolu un nouveau problème. Nous avons un cas
dans lequel la surface d'un conducteur courbe, ayant un potentiel donné, est placée près
d'une charge ponctuelle. Si la feuille métallique que nous avons placée sur la surface
équipotentielle se refenne finalement sur elle-même (ou, en pratique, si elle s'étend suf-
fisamment Join), nous nous trouvons dans une situation du type considéré dans la section
5-10; c'est-à-dire que notre espace est divisé en deux régions, une à l'intérieur et l'autre à
l'extérieur d'une couche conductrice fennée. Nous avons vu que les champs dans les deux
régions étaient tout à fait indépendants l'un de l'autre. Nous devons donc avoir Je même
champ à l'extérieur de notre conducteur courbe quoi qu'il y ait à l'intérieur. Nous
pouvons même remplir tout l'intérieur avec un matériau conducteur. Nous avons donc
trouvé les champs dans Je cas de la Fig. 6-9. Dans J'espace à l'extérieur du conducteur Je
champ est identique à celui créé par deux charges ponctuelles, comme dans la Fig. 6-8.
A l'intérieur du conducteur, il est nul. De plus - comme cela doit être - le champ juste à
l'extérieur du conducteur est nonnal à la surface.
Nous pouvons ainsi calculer les champs de la Fig. 6-9 en calculant le champ dû à q et à
une charge ponctuelle imaginaire - q placée en un point convenable. La charge ponctuelle
que nous «imaginons» derrière la surface conductrice est appelée charge image.
Dans les livres, vous pouvez trouver de longues listes de solutions pour des conducteurs
en fonne d'hyperboloïde et pour d'autres choses qui paraissent compliquées, et vous vous
demandez comment quelqu'un a pu un jour trouver ces fonnes terribles. Elles ont été
trouvées en revenant en arrière! Quelqu'un a résolu un problème simple avec des charges
données. Puis il a vu qu'une certaine surface équipotentielle apparaissait sous une
nouvelle forme, et il a écrit un article dans lequel il a montré que Je champ à l'extérieur de
cette forme particulière pouvait être décrit d'une certaine façon.
100
Fig. 6-9. Le champ à l'extérieur d'un
conducteur ayant la forme de l'équipoten-
tielle A de la Fig. 6-8.
A cela nous devons ajouter le champ électrique produit par la charge image négative.
Ceci double simplement la composante normale (et compense toutes les autres), de sorte
que la densité de charge cr en tout point de la surface est
2aq
u(p) = EoE(p) = - 47r(a2 + p2)3/2 (6.29)
101
I
\ I !
\
1 I /'
\ \ Plaque /
\ \ \ conductrice "" -
\ \\11/1/"'
' '-.. 111 11 1 /
', \\11 / /
- - -
.....
..... .......
-
'-..
-Charge image: - - -
'
\ 1/ /
\\ 1 / / -
..... ~~,,..
-
-
-
- . . . . 111 ...
,..- -- / /11111' \ ...... -
/ / I \'-..
/ / I 1111\,'..._
\ \
/ / fjl\\,
I
/ ' I i\ ' \ ' '
\ \
\ \
\
Fig. 6-10. Le champ créé par une charge au voisinage d'une surface conductrice plane,
trouvé par la méthode des images.
Une intéressante vérification de notre travail consiste à intégrer cr sur toute la surface.
Nous trouvons que la charge induite totale est - q, çomme cela doit être.
Une question de plus: s'exerce-t-il une force sur la charge ponctuelle? Oui, parce qu'il
y a attraction par la charge superficielle négative induite sur la plaque. Maintenant que
nous connaissons les charges superficielles (à partir de l'Eq. [6.29]), nous pourrions
calculer à l'aide d'une intégrale les forces qui s'exercent sur notre charge ponctuelle
positive. Mais nous savons aussi que la force agissant sur la charge positive est exactement
la même que celle qui existerait s'il y avait la charge négative image à la place de la plaque,
puisque les champs au voisinage sont les mêmes dans les deux cas. La charge ponctuelle
subit une force attractive vers la plaque dont la grandeur est
l
F= ___ 2
q_,
(6.30)
47rEo (2a)2
Nous avons trouvé la force beaucoup plus facilement qu'en intégrant sur toutes les charges
négatives.
102
6-9 Charge ponctuelle au .voisinage d'une sphère condùctrice
Outre le plan, quelles autres surfaces permettent une solution simple? La forme la plus
simple après le plan, c'est la sphère. Cherchons les champs existant autour d'une sphère
métallique avec une charge ponctuelle q à côté, comme sur la Fig. 6-11. Nous devons
chercher un cas physique simple qui fournit une sphère pour surface équipotentielle.
Si nous examinons les problèmes que des gens ont déjà réso\us, nous voyons que quelqu'un
a remarqué que le champ créé par deux charges ponctuelles inégales a une équipontentielle
qui est une sphère. Ah! ah! Si nous choisissons l'emplacement d'une charge image
- et trouvons la bonne valeur de la charge - nous pourrons peut-être faire coïncider la
surface équipotentielle avec notre sphère. En effet, on peut le faire avec la recette suivante.
Supposez que vous vouliez que la surface équipotentielle soit une sphère de rayon a
ayant son centre à la distance b de la charge q. Placez une charge image de grandeur
q' = - q (a/b) sur la ligne qui joint la charge au centre de la sphère, et à la distance
a2/b du centre. La sphère sera au potentiel zéro.
La raison mathématique découle du fait que la sphère est le lieu des points dont les
distances à deux points fixes sont dans un rapport constant. En se reportant à la Fig. 6-11,
le potentiel créé en P par q et q' est proportionnel à
q q'
~
r1
+ --
r2
.
Le potentiel sera donc nul pour tous les points tels que
ou
_ <{.
q
103
peut répondre facilement à toutes ces questions. Nous pouvons toujours ajouter une
charge ponctuelle q" au centre de la sphère. La sphère reste encore une équipotentielle par
superposition; seule la valeur du potentiel sera changée.
Si nous avons, par exemple, une sphère conductrice qui initialement n'est pas chargée
et est isolée de tout autre chose, et que nous approchions d'elle une charge ponctuelle q,
la charge totale de la sphère restera zéro. On trouve la solution en utilisant une charge
image q' comme précédemment, mais, en ajoutant, en outre, une charge q" au centre de la
sphère, telle que
a (6.32)
q" = -q' = b q.
Les champs partout à l'extérieur de la sphère sont donnés par la superposition des champs
créés par q, q', et q". Le problème est résolu.
Nous pouvons voir maintenant qu'il existe une force attractive entre la sphère et la
charge ponctuelle q. Elle n'est pas nulle, bien qu'il n'y ait pas de charges sur la sphère
neutre. A quoi est due l'attraction? Lorsque vous approchez une charge positive d'une
sphère conductrice, la charge positive attire les charges négatives sur le côté le plus proche
d'elle et laisse des charges positives sur la surface du côté éloigné. L'attraction des charges
négatives est plus grande que la répulsion due aux charges positives; il y a donc une attrac-
tion résultante. Nous pouvons trouver la grandeur de l'attraction en calculant la force
qu'exerce sur q les champs créés par q' et q". La force totale est la somme de la force
d'attraction entre q et une charge q' = - (a/b)q, à la distance b - (a 2/b), et de la force
répulsive entre q et une charge q" = (a/b)q, à la distance b.
Ceux que l'on amusait dans leur enfance avec la boîte de levure qui a sur son étiquette
l'image d'une boîte de levure, qui a sur son étiquette l'image d'une boîte de levure, qui a ...
pourront s'intéresser au problème suivant. Deux sphères égales, l'une ayant une charge
totale + Q et l'autre une charge totale - Q, sont disposées à une certaine distance l'une
de l'autre. Quelle est la force qui s'exerce entre elles? On peut résoudre le problème avec
un nombre infini d'images. On remplace tout d'abord en première approximation chaque
sphère par une charge placée en son centre. Chacune de ces charges aura une charge image
dans l'autre sphère. Les charges images auront des images, etc., etc., etc. La solution est
comme l'image sur la boîte de levure - et ça converge assez vite.
104
Fig. 6-12. Un condensateur plan.
(Vous verrez que quelquefois les gens utilisent V pour le potentiel, mais nous, nous
avons choisi d'utiliser <J>.)
La différence de potentiel V est le travail nécessaire par unité de charge pour transporter
une petite charge d'une plaque à l'autre, de sorte que
q d
V=Ed=-d=-Q (6.33)
Eo EoA '
où + Q est la charge totale de chacune des plaques, A l'aire des plaques et d leur distance.
Nous voyons que la tension est proportionnelle à la charge. Une telle proportionnalité
entre V et Q se rencontre pour deux conducteurs quelconques dap.s l'espace, s'il y a une
charge positive sur l'un et une charge négative égale sur l'autre. La différence de potentiel
entre eux - c'est-à-dire la tension - est proportionnelle à la charge. (Nous supposons
qu'il n'y a pas d'autre charge au voisinage.)
Pourquoi cette proportionnalité? Simplement le principe dé superposition. Supposons
que nous connaissions la solution pour un ensemble de charges, et qu'ensuite nous
superposions deux solutions identiques. Les charges sont doubles, les champs sont
doubles, et le travail effectué pour amener une charge unité d'un point à l'autre est aussi
double. La différence de potentiel entre deux points quelconques est donc proportionnelle
aux charges. En particulier, la différence de potentiel entre les deux conducteurs est pro-
portionnelle à la charge qu'ils portent. Certains au début ont écrit l'équation de propor-
tionnalité dans l'autre sens. C'est-à-dire qu'ils ont écrit
Q =CV,
* Certaines personnes pensent qu'il faudrait employer les mots« capacitance »et« capaciteur »,
à ta place de« capacité» et de« condensateur». Nous avons décidé d'utiliser la vieille terminologie,
parce qu'on l'entend encore plus couramment dans les laboratoires de physique - même si elle
n'est pas dans les manuels!
105
Fig. 6-13. Le champ électrique au voi-
sinage des bords de deux plaqÜes parallèles.
compliqué qui peut, cependant, être résolu à l'aide de techniques que nous ne décrirons
pas maintenant. Le résultat d'un tel calcul est que la densité de charges augmente un peu
au voisinage du bord des plaques. Ceci veut dire que la capacité des plaques est un peu
plus élevée que celle que nous avons calculée. [On obtient une très bonne approximation
pour la capacité en utilisant l'Eq. (6.34) mais en prenant pour l'aire A la surface que l'on
obtiendrait si les plaques étaient agrandies artificiellement d'une longueur égale aux
3/8 de la distance entre les plaques.]
Nous n'avons parlé que de la capacité de deux conducteurs. Quélquefois les gens parlent
de la capacité d'un objet unique. Ils disent, par exemple, que ia capacité d'une sphère
de rayon a est 4nEo(l. Ce qu'ils imaginent, c'est que l'autre armature est une autre sphère
de rayon infini - que lorsqu'il y a une charge + Q sur la sphère, la charge opposée - Q,
se trouve sur une sphère infinie. On peut aussi parler de/ capacité lorsqu'il y a trois
conducteurs ou plus; nous discuterons cela plus tard.
Supposons que nous voulions avoir un condensateur de très grande capacité. Nous
pourrions obtenir une grande capacité en prenant une très grande surface et une très
petite séparation. Nous pourrions mettre du papier ciré entre des feuilles d'aluminium
et rouler le tout. (Si nous le scellons dans de la matière plastique, nous avons un conden-
sateur typique du type radio.) Que vaut-il? Il est bon pour emmagasiner des charges.
Si nous essayons d'emmagasiner des charges sur une boule, par exemple, son potentiel
augmente rapidement à mesure que nous la chargeons. Il peut même devenir si élevé
que les charges commencent à s'échapper dans l'air avec des étincelles. Mais si nous
mettons la même charge sur un condensateur dont la capacité est très grande, la tension
développée aux bornes du condensateur sera faible.
Pour de nombreuses applications dans les circuits électroniques, il est utile d'avoir
quelque chose qui peut absorber ou fournir de grandes quantités de charges sans grande
variation de potentiel. Un condensateur (ou« capaciteur »)fait justement cela. Il existe
aussi de nombreuses applications dans les instruments électroniques et dans les calcula-
trices où l'on utilise un condensateur pour obtenir une variation donnée de tension en
réponse à une variation particulière de charge. Nous avons vu une application semblable
au chapitre 23, Vol. I, où nous décrivions les propriétés des circuits résonnants.
106
t'o ""
36
11' ~ 10, farad/mètre ·1
A partir de la définition de C, nous voyons que son unité est un coulomb/volt. Cette
unité s'appelle aussi un farad. En examinant l'Eq. (6.34), nous voyons que l'on peut
exprimer les unités de Eo en farad/mètre, ce qui est l'unité la plus couramment utilisée.
Les valeurs typiques de condensateurs vont de un micro-microfarad ( = 1 picofarad)
à quelques millifarads. Les petits condensateurs de quelques picofarads, sont utilisés dans
les circuits accordés en haute fréquence, et l'on rencontre des condensateurs qui vont
jusqu'à des centaines ou des milliers de microfarads dans les filtres des alimentations
électriques. Une paire de plaques, d'un centimètre carré de surface et distantes d'un milli-
mètre, a une capacité d'environ un microfarad.
Un -moyen de voir que le champ est le plus intense sur les parties d'un conducteur où
le rayon de courbure est le plus faible, est de considérer la combinaison d'une grosse
sphère et d'une petite sphère reliées par un fil, comme l'illustre la Fig. 6-15. C'est une
version
107
Fil Fig. 6-15. Le champ d'un objet pointu
peut être représenté en première approxi-
mation par celui de deux sphères au même
potentiel.
6-20
quelque peu idéalisée du conducteur de la Fig. 6-14. Le fil n'aura qu'une faible influence
sur les champs à l'extérieur; il est là pour maintenir les sphères au même potentiel.
Maintenant, laquelle des boules a le champ le plus grand à sa surface? Si la boule de gauche
a un rayon a et porte une charge Q, son potentiel est environ
"11
1
= ---·
Q
41!'Eo a
(Bien entendu la présence de l'une des boules change la distribution sur l'autre, de sorte
que les charges n'ont pas réellement la symétrie sphérique ni sur l'une ni sur l'autre. Mais
si nous ne nous intéressons qu'à une estimation des champs, nous pouvons utiliser le
potentiel d'une charge sphérique.) Si la boule la plus petite, dont le rayon est b, porte la
charge q, son potentiel est à peu près
"12 = ._l_g_,
41!'Eo b
Mais.p 1 = <f> 2 , donc
D'autre part, le champ à la surface (voir Eq. 5.8) est proportionnel à la densité super-
ficielle de charges, qui est à peu près la charge totale divisée par le carré du rayon. Nous
obtenons
(6.35)
Le champ est donc plus grand à la surface de la petite sphère. Les champs sont inversement
proportionnels aux rayons.
Ce résultat est techniquement très important, parce que l'air peut cesser d'être isolant
si le champ électrique est trop grand. Ce qui arrive, c'est qu'une charge libre (électron ou
ion), quelque part dans l'air est accélérée par le champ, et que si le champ est très grand,
la charge peut acquérir, avant de frapper un autre atome, une vitesse suffisante pour lui
permettre d'arracher un électron à cet atome. Ce qui a pour résultat de créer de plus en
plus d'ions. Leur mouvement forme une décharge, ou étincelle. Si vous voulez porter un
objet à un potentiel élevé et qu'il ne se décharge pas par des étincelles dans l'air, vous
devez vous assurer que la surface est lisse, de sorte qu'il n'y ait pas d'endroit où le champ
soit anormalement grand.
108
6--12 Le microscope à émission de champ
Il existe une application intéressante du champ électrique extrêmement élevé qui
entoure toute protubérance aiguë sur un conducteur chargé. Le microscope à émission de
champ dépend pour son fonctionnement du champ élevé créé sur une pointe métallique
aiguë*. Il est construit de la façon suivante. Une très fine aiguille, ayant une extrémité
dont le diamètre est d'environ 1.000 angstrôms, est placée au centre d'une sphère de verre
dans laquelle on a fait le vide (Fig. 6-16). La surface intérieure de la sphère est recouverte
d'une mince couche conductrice d'un matériau fluorescent, et l'on applique une différence
de potentiel très élevée entre la couche fluorescente et l'aiguille.
Examinons d'abord ce qui se passe quand l'aiguille est négative par rapport à la couche
fluorescente. Les lignes de champ sont fortement concentrées sur la pointe aiguë. Le
champ électrique peut être aussi élevé que 40 millions de volts par centimètre. Dans des
champs aussi intenses, des électrons sont arrachés de la surface de l'aiguille et accélérés
par la différence de potentiel entre l'aiguille et la couche fluorescente. Lorsqu'ils attei-
gnent celle-ci, ils provoquent une émission lumineuse, tout comme dans un tube image
de télévision.
Les électrons qui arrivent en un point donné de la surface fluorescente sont, avec une
excellente approximation, ceux qui quittent l'autre extrémité de la ligne de champ radiale,
car les électrons se déplacent le long de la ligne de champ allant de la pointe à la surface.
Nous voyons ainsi sur la surface une sorte d'image de la pointe de l'aiguille. Plus précisé-
ment, nous voyons une image de l'émissivité de la surface de l'aiguille - qui représente
la facilité avec laquelle les électrons peuvent quitter la surface de la pointe métallique.
Si la résolution était suffisamment élevée, on pourrait espérer distinguer les positions des
atomes individuels à l'extrémité de l'aiguille. Avec des électrons, cette résolution n'est pas
possible pour les raisons suivantes. D'abord, il y a la diffraction quantique des électrons
qui brouille les images. Ensuite, à cause de leurs mouvements à l'intérieur du
109
Fig. 6-17. Image produite par un
microscope à émission de champ. (Due à
l'obligeance de Erwin W. Mueller, « Research
Professer» de physique, Université de
l'Ëtat de Pennsylvanie.)
métal les électrons ont une petite vitesse initiale transversale lorsqu'ils quittent l'aiguille,
et cette composante transverse aléatoire de la vitesse contribue à rendre l'image floue.
La combinaison de ces deux effets limite la résolution à 25 A ou à peu près.
Si, cependant, nous inversons la polarité et introduisons une petite quantité d'hélium
gazeux dans l'ampoule, il est possible d'atteindre des résolutions beaucoup plus élevées.
Lorsqu'un atome d'hélium entre en collision avec la pointe de l'aiguille, le champ intense
qui y règne dépouille d'un électron l'atome d'hélium, et le laisse chargé positivement.
L'ion hélium est ensuite accéléré vers l'extérieur le long d'une ligne de champ aboutissant
à l'écran fluorescent. Comme les ions hélium sont beaucoup plus lourds que les
électrons, les longueurs d'ondes quantiques sont beaucoup plus petites. Si la température
n'est pas trop élevée, l'effet des vitesses thermiques est aussi plus faible que dans le cas
de l'électron. Avec moins de brouillage de l'image, on obtient une photo de la pointe beau-
coup plus fine. Il a été possible d'obtenir des grossissements de 2.000.000 de fois avec le
microscope à émission de champ à ions positifs - grossissement qui est dix fois meilleur
que celui qui est obtenu avec le meilleur microscope électronique.
La Fig. 6-17 donne un exemple des résultats que l'on a obtenus avec un microscope
à champ ionique, utilisant une aiguille de tungstène. Le centre d'un atome de tungstène
ionise un atome d'hélium à une vitesse légèrement différente de celle des espaces entre les
atomes de tungstène. La figure formée par les tâches sur l'écran fluorescent montre la
disposition des atomes individuels sur la pointe de tungstène. La raison pour laquelle les
taches forment des anneaux peut se comprendre si on se représente une grande boîte
de boules empaquetées dans une structure rectangulaire, représentant les atomes dans le
métal. Si vous découpez dans cette boîte une section approximativement sphérique,
vous verrez les anneaux caractéristiques de la structure atomique. Le microscope à champ
ionique a fourni à l'homme le moyen de voir les atomes pour la première fois. C'est une
performance remarquable, si l'on considère la simplicité de l'instrument.
110
Le cham,p électrique : eœem,ples divers (suite)
Ce chapitre est la suite de notre étude des caractéristiques des champs électriques dans
divers cas particuliers. Nous décrirons tout d'abord quelques méthodes plus élaborées
pour résoudre des problèmes avec des conducteurs. On ne doit pas s'attendre à pouvoir
maîtriser dès maintenant ces méthodes plus avancées. Cependant il peut être intéressant
d'avoir une idée des types de problèmes que l'on peut résoudre en utilisant des techniques
qui pourront être apprises dans des cours plus avancés. Nous considérerons ensuite deux
exemples dans lesquels la distribution de charge n'est ni fixée, ni transportée par un con-
ducteur, mais au lieu de cela déterminée par quelque autre loi de la physique.
Comme nous l'avons vu au chapitre 6, le problème du champ électrostatique est
fondamentalement simple lorsque la distribution des charges est déterminée; il demande
seulement l'évaluation d'une intégrale. Lorsque des conducteurs sont présents, il se pré-
sente cependant des complications parce que la distribution de charges sur les conducteurs
n'est pas initialement connue; la charge doit se répartir à la surface du conducteur d'une
façon telle que le conducteur soit une équipotentielle. La solution de tels problèmes
n'est ni directe, ni simple.
Nous avons étudié une méthode indirecte de résolution de tels problèmes, dans laquelle
nous calculons les équipotentielles pour une certaine distribution donnée de charges
et nous remplaçons l'une d'entre elles par une surface conductrice. Nous pouvons de
cette façon dresser un catalogue de solutions particulières pour des conducteurs en forme
de sphères, de plans, etc. L'utilisation des images, décrite au chapitre 6, est un exemple
de méthode indirecte. Nous en décrirons une autre dans ce chapitre.
Si le problème à résoudre n'appartient pas à la ~atégorie des problèmes pour lesquels
nous pouvons construire des solutions par la méthode indirecte, nous sommes obligés
de résoudre le problème
11 1
par une méthode plus directe. Le problème mathématique de la méthode directe est la
solution de l'équation de Laplace,
V2tf> = 0, (7.1)
avec la condition que q, doit prendre une valeur constante convenable sur certaines fron-
tières- les surfaces des conducteurs. Les problèmes qui consistent à résoudre une équation
différentielle avec certaines conditions aux limites sont appelés problèmes aux limites.
Ils ont fait l'objet d'études mathématiques considérables. Dans le cas de conducteurs
ayant des formes compliquées, il n'existe pas de méthode analytique générale. Même un
problème simple tel que celui d'une boîte métallique cylindrique chargée, fermée à ses
deux extrémités - une boîte de bière - présente des difficultés mathématiques redoutables.
On ne peut le résoudre qu'approximativement, en utilisant des méthodes numériques.
Les seules méthodes générales de résolution sont numériques.
Il y a quelques problèmes pour lesquels l'Eq. (7.1) peut être résolue directement. Par
exemple, le problème d'un conducteur chargé, ayant la forme d'un ellipsoïde de révolu-
tion, peut être résolu à l'aide de fonctions spéciales connues. On peut obtenir la solution
pour un disque mince en faisant devenir l'ellipsoïde infiniment plat. On peut obtenir
de la même façon la solution pour une aiguille en faisant devenir l'ellipsoïde infiniment
allongé. Il faut cependant insister sur Je fait que les seules méthodes directes d'application
générale sont les méthodes numériques.
On peut aussi résoudre les problèmes aux limites par des mesures sur des analogues
physiques. L'équation de Laplace se présente dans de nombreux cas physiques différents:
dans la propagation de la chaleur en régime permanent, dans l'écoulement irrotationnel
d'un fluide, dans l'écoulement d'un fluide dans un milieu étendu, et dans la déformation
d'une membrane élastique. Il est fréquemment possible de réaliser un modèle physique
qui est analogue au problème électrique que nous voulons résoudre. On peut déterminer
la solution du problème auquel on s'intéresse en mesurant une quantité analogue con-
venable sur le modèle. Un exemple de la technique analogique est l'utilisation de la cuve
électrolytique pour la résolution des problèmes à deux dimensions en électrostatique.
Ça marche parce que l'équation différentielle pour le potentiel dans un milieu conducteur
uniforme est la même que dans le vide.
Dans de nombreux cas, les variations des champs physiques dans une direction sont
nulles ou peuvent être négligées devant les variations dans les deux autres directions.
De tels problèmes sont dits à deux dimensions; le champ dépend seulement de deux
coordonnées. Par exemple, si nous disposons un long fil chargé le long de l'axe des z,
pour des points pas trop éloignés du fil le champ électrique dépend de x et y, mais pas de z;
le problème est à deux dimensions. Puisque dans un problème à deux dimensions à /ôz = 0,
l'équation pour t/J dans l'espace libre est
(7.2)
Parce que l'équation à deux dimensions est relativement simple, il existe un domaine
étendu de conditions dans lesquelles on peut la résoudre analytiquement. En effet, il existe
une technique mathématique indirecte très puissante, fondée sur un théorème concernant
les fonctions d'une variable complexe, et que nous allons décrire maintenant.
112
7-2 Champs à deux dimensions; fonctions d'une variable complexe
ou
F(3) = 1/3 3 ,
ou
F('IJ) = 3 log 3,
et ainsi de suite.
Étant donnée une fonction particulière F(3), nous pouvons substituer 3 = x + iy, et
nous obtenons une fonction de x et y ..:. avec une partie réelle et une partie imaginaire.
Par exemple,
3 2 = (x + iy) 2 = x 2 - y 2 +
2ixy. (7.3)
Toute fonction F(3) peut s'écrire sous forme d'une somme d'une partie purement
réelle et d'une partie purement imaginaire, chaque partie étant une fonction de x et y:
où U(x,y) et V(x,y) sont des fonctions réelles. Ainsi de toute fonction complexe F(3) on
peut déduire deux nouvelles fonctions U(x,y) et V(x,y). Par exemple, F(3) = 32 nous
donne les deux fonctions
U(x, y) = x 2 - y 2, (7.5)
et
V(x, y) = 2xy. (7.6)
av au (7.8)
ax = - ·ay.
113
On en déduit immédiatement que chacune des fonctions U et V satisfait l'équation de
Laplace:
a2 u a2 u
ax2 + ay2 = 0, (7.9)
a2v o (7.10)
8x2 + a2v
ôy2 .
Ces équations sont visiblement vraies pour les fonctions de (7.5) et (7.6).
Ainsi, partant d'une fonction ordinaire quelconque, nous pouvons arriver à deux
fonctions U(x,y) et V(x,y), qui sont toutes deux des solutions de l'équation de Laplace à
deux dimensions. Chaque fonction représente un potentiel électrostatique possible. Nous
pouvons choisir une fonction F(3) quelconque et elle devrait représenter un certain
problème de champ électrique - en réalité, deux problèmes, puisque U et V représentent
toutes deux une solution. Nous pouvons écrire autant de solutions que nous le voulons
- en fabriquant tout simplement des fonctions - puis nous n'avons plus qu'à trouver le
problème qui va avec chaque solution. Cela peut paraître·marcher à reculons, mais c'est
une approche possible.
Par exemple, voyons quel problème physique nous donne la fonction F(3) = 32 • Nous
en déduisons les deux fonctions potentielles de (7.5) et (7.6). Pour voir à quel problème
se rapporte la fonction U, nous cherchons les surfaces équipotentielles en posant U = A,
A étant une constante:
x2 - y2 =A.
114
C'est l'équation d'une hyperbole équilatère. Pour différentes valeurs de A, nous obtenons
les hyperboles représentées sur la Fig. 7-1. Lorsque A = 0, nous obtenons le cas particulier
des deux bissectrices passant par l'origine.
etc. E etc.
Le champ électrique est proportionnel à sa distance à l'axe. Ce fait est utilisé pour con-
struire des appareils (appelés lentilles quadrupolaires) qui sont utiles pour focaliser des
faisceaux de particules (voir section 29-9). On obtient généralement le champ désiré en
utilisant quatre électrodes en forme d'hyperboles, comme le montre la Fig. 7-3. En ce
qui concerne les lignes de champ électrique de la Fig. 7-3, nous avons simplement copié
sur la Fig. 7-1 l'ensemble des courbes en pointillé qui représentent V= constante.
Nous avons une prime! Les courbes V= constante sont orthogonales aux courbes
U constante à cause des équations (7.7) et (7.8). Chaque fois que nous choisissons une
fonction F(3), nous obtenons à partir de U et V à la fois les équipotentielles et les lignes
115
Fig. 7-3. Le champ dans une !en.tille
quadrupolaire.
de champ. Et vous vous souviendrez que nous avons résolu l'un ou l'autre des deux pro-
blèmes, selon que nous avons appelé équipotentielles l'un ou l'autre des ensembles de
courbes. Comme second exemple, considérons la fonction
F(l!) = vf3. (7.11)
Si nous écrivons
où
p = v;~ + y2
et
tan 8 = y/x,
alors
F(l!) = Pt12eie12
= p
112
(cos~+ isin ~),
d'où
(x2 + y2)11~ + x]112 . [(x2 + y2)112 _ x]112
F(?J) = [ 2 +' 2 . (7.12)
1 16
---
Il
-
Fig. 7-4. Courbes à U(x, y) et V(x, y)=
constante, tirées de l't:q. (7.12).
qui donne le champ créé par l'analogue à deux dimensions d'un dipôle électrique, c'est-
à-dire, deux droites parallèles chargées avec des signes différents, très proches l'une de
l'autre.
~--~~~~+--+-~~~~~----
Plaque mise à la terre
Nous ne développerons pas davantage le sujet dans ce cours, mais soulignons bien que,
quoique la technique de la variable complexe soit souvent puissante, elle reste limitée aux
problèmes à deux dimensions; et aussi que c'est une méthode indirecte.
117
7-3 Oscillations des plasmas
Nous allons considérer maintenant quelques problèmes physiques dans lesquels le
champ n'est déterminé ni par les charges sur les surfaces conductrices ni par des charges
fixes, mais par une combinaison de deux phénomènes physiques. En d'autres termes,
le champ sera gouverné par deux ensembles d'équations: (1) les équations de l'électro-
statique reliant les champs électriques à la distribution de charges, et (2) une équation
d'un autre domaine de la physique qui détermine les positions ou les mouvements des
charges en présence des champs.
Le premier exemple que nous étudierons est un problème de dynamique dans lequel
le mouvement des charges est gouverné par les lois de Newton. Un exemple simple
d'un tel cas se présente dans un plasma, qui est un gaz ionisé composé d'ions et d'électrons
libres distribués dans une région de l'espace. L'ionosphère - couche supérieure de l'atmo-
sphère- est un exemple d'un tel plasma. Les rayons ultraviolets émis par le soleil arrachent
des électrons aux molécules de l'air, créant ainsi des électrons libres et des ions. Dans un
tel plasma, les ions positifs sont beaucoup plus lourds que les électrons, de sorte que nous
pouvons négliger le mouvement des ions par rapport à celui des électrons.
Soit n0 la densité d'électrons dans l'état d'équilibre non perturbé. Cela doit être aussi
la densité d'ions positifs, puisque le plasma est électriquement neutre (lorsqu'il n'est pas
perturbé). Nous supposons maintenant que les électrons sont un peu écartés de leur
position d'équilibre et nous nous demandons ce qui se passe. Si la densité des électrons
dans une région augmente, ils vont se repousser et tendre à revenir à leur position d'équi-
libre. A mesure que les électrons se déplacent vers leur position d'équilibre initiale, ils
emmagasinent de l'énergie cinétique, et au lieu de venir pour rester au repos dans leur
position d'équilibre, ils vont au-delà de leur but. Ils vont osciller sur place. Le cas est
semblable à celui des ondes acoustiques, pour lesquelles la force de rappel est la pression
du gaz. Dans un plasma, la force de rappel est la force électrique qui agit sur les électrons.
Pour simplifier la discussion, nous ne nous occuperons que d'un cas dans lequel les
déplacements ont tous lieu dans une direction unique, x par exemple. Supposons que les
électrons initialement en x soient, à l'instant t, déplacés de leur position d'équilibre d'une
petite quantité s(x,t). Puisque les électrons ont été déplacés, leur densité variera, en général
On calcule facilement la variation de densité. En se rapportant à la Fig. 7-6,
118
on voit que les électrons contenus initialement entre les deux plans a et b se sont déplacés
et sont maintenant contenus entre les plans a' et b'. Le nombre d'électrons qui étaient
contenus entre a et b est proportionnel à noAx; le même nombre est maintenant contenu
dans l'espace dont la largeur est Ax +As. La densité est devenue
n = no-6x no (7.16)
L1x + L1s 1 + (L1s/L1x)
Si la variation de densité est faible, nous pouvons écrire [en utilisant le développement du
binôme pour (1 + E)-1]
n = no ( 1 - :i) · (7.17)
Nous supposons que les ions positifs ne se déplacent pas de façon appréciable (à cause de
leur plus grande inertie), de sorte que leur densité reste égale à n0 • Chaque électron
porte la charge - q •• de sorte que la densité de charge moyenne en tout point est donnée
par
p = - (n - no)q.,
ou
(7.18)
Si le problème est effectivement à une dimension (et s'il n'y a pas d'autre champ que
celui dü aux déplacements des électrons), le champs électrique E a une composante
unique Ex. L'Eq. (7.19), jointe à (7.18), donne
(7.20)
qui est une force de rappel proportionnelle aux déplacements s de l'électron. Ceci nous
conduit aux oscillations harmoniques des électrons. L'équation du mouvement d'un
électron déplacé est
(7.23)
119
Nous voyons que s variera harmoniquement. Sa variation avec Je temps sera en
cos wt, ou, - en utilisant la notation exponentielle du Vol. I -
(7.24)
w2p (7.25)
2
e 2 = _!k_ = 2.3068 X 10- 28 newton·mètre 2• (7.26)
411"€0
(7.27)
qui est la forme que vous trouverez dans la plupart des ouvrages.
Nous avons donc montré qu'une perturbation dans un plasma donnait naissance à
des oscillations libres des électrons autour de leur position d'équilibre avec la fréquence
naturelle wP, qui est proportionnelle à la racine carrée de la densité d'électrons. Les
électrons d'un plasma se comportent comme un système résonnant, tels que ceux que
nous avons décrits au chapitre 23 du Vol. I.
Cette résonance naturelle d'un plasma a quelques effets intéressants. Par exemple, si
l'on essaie de faire propager une onde radio dans l'ionosphère, on s'aperçoit qu'elle ne
peut y pénétrer que si sa fréquence est plus élevée que celle du plasma. Dans Je cas con-
traire Je signal est réfléchi. Nous devons utiliser des fréquences élevées si nous voulons
communiquer avec un satellite dans l'espace. D'autre part, si nous voulons communi-
quer avec une station radio située au-dessous de l'horizon, nous devons utiliser des
fréquences plus basses que la fréquence du plasma, de façon à ce que le signal soit
réfléchi vers la terre.
Un autre exemple intéressant d'oscillations de plasma se présente dans les métaux.
Dans un métal, nous avons un plasma enfermé d'ions positifs et d'électrons libres. La
densité n0 est très élevée, si bien que wP l'est aussi. Mais il est encore possible d'observer
les oscillations des électrons. En effet, d'après la mécanique quantique, un oscillateur
harmonique ayant une fréquence naturelle wP possède des niveaux d'énergie qui sont
séparés par la quantité d'énergie hmP. Si donc on envoie des électrons à travers, par
exemple, une feuille d'aluminium, et si l'on fait des mesures très soignées de l'énergie
des électrons de l'autre côté, on peut s'attendre à constater que les électrons cèdent
quelquefois l'énergie hwP au plasma. C'est en effet ce qui se passe. On observa expéri-
mentalement pour la première fois en 1936 que des électrons ayant des énergies allant
de quelques centaines à quelques milliers d'électrons-volts
120
perdaient de l'énergie par sauts lors de leur diffusion ou de leur passage à travers une
mince feuille de métal. L'effet ne fut pas compris jusqu'en 1953 lorsque Bohm et
Pines* montrèrent que le phénomène pouvait s'expliquer par des excitations quanti-
fiées des oscillations du plasma dans le métal.
- !!_. (7.28)
Eo
En supposant qu'il existe un tel potentiel rp(x), comment se distribueraient les ions
sous l'action de ce potentiel? Cela, nous pouvons le déterminer à l'aide des principes de
la mécanique statistique. Notre problème ensuite sera de calculer rp de façon à ce que la
densité de charges résultante fournie par la mécanique statistique satisfasse aussi (7.28).
D'après la mécanique statistique (voir chapitre 40, Vol. I), des particules en équilibre
thermique dans un champ de forces sont distribuées de telle sorte que la densité n de
particules en x est donnée par
(7.29)
•Pour quelques travaux récents et une bibliographie, voir C. J. Powell et J. B. Swann, Phys.
Rev. 115, 869 (l 959).
121
Nous supposons que les ions portent une seule charge électronique, positive ou néga-
tive. A la distance x de la surface d'une particule colloïdale, un ion positif aura une
énergie potentielle qe'l>(x), de sorte que
U(x) = q,cp(x).
La densité d'ions positifs, n+ , est alors
n+(x) = noe-q,-t(x)/k1',
En général on résout cette équation facilement [en multipliant les deux membres par 2
(dq,/dx), et en intégrant par rapport à x], mais pour garder le problème aussi simple que
possible, nous ne considérerons ici que le cas limite dans lequel les potentiels sont petits,
ou la température T élevée. Le cas où q, est petit correspond à une solution diluée. Dans
ces cas l'exposant est petit, et nous pouvons faire l'approximation
(7.32)
Remarquez que cette fois le signe du second membre est positif. Les solutions q, ne sont
pas oscillatoires, mais exponentielles.
La solution générale de l'Eq. (7.33) est
(7.34)
avec
(7.35)
Les constantes A et B doivent être déterminées par les conditions imposées par le
problème. Dans notre cas, B doit être nulle; sinon le potentiel deviendrait infini pour x
grand. Nous avons donc
(7.36)
122
Fig. 7-7. La variation du potentiel au
voisinage de la surface d'une particule
colloïdale. D est la longueur de Debye.
00"-------o,l..-----..J.,.----__::J30::======~x
Le potentiel décroît d'un facteur l/e toutes les fois que la distance augmente de D,
ainsi que le montre le graphe de la Fig. 7-7. Le nombre D s'appelle la longueur de Debye,
et constitue une mesure de l'épaisseur de la gaine ionique qui entoure dans un électrolyte
une particule chargée de grande dimension. L'équation (7.36) dit que la gaine s'amincit
quand la concentration des ions (n0) augmente ou quand la température décroît.
La constante A de l'Eq. (7.36) s'obtient facilement lorsque l'on connaît la charge
superficielle <J sur la particùle colloïdale. Nous savons que
q
E,. = Ex(O) = -Eo · (7.37)
Mais E est aussi le gradient de c/> :
E,,(O)
a<1>1
= - ax o = + 75A ' (7.38)
d'où nous tirons
o-D (7.39)
A=-·
Eo
En substituant ce résultat dans (7.36), nous trouvons (en faisant x = 0) que le potentiel
de la particule colloïdale est
o-D (7.40)
c/>(O) = - ·
Eo
Vous remarquerez que ce potentiel est le même que la différence de potentiel qui existe
entre les plateaux d'un condensateur dont les plateaux sont distants de D et qui a une
densité superficielle de charge <J.
Nous avons dit que les particules colloïdales restent séparées à cause de la répulsion
électrique. Mais nous voyons maintenant que le chBII).p à faible distance de la surface
d'une particule est réduit par la gaine ionique qui s'amasse autour d'elle. Si les gaines
deviennent suffisamment fines, les particules ont une bonne chance de s'entrechoquer.
Elles vont alors
123
se coller, et le colloïde va se coaguler et précipiter. A partir de notre analyse, nous
comprenons pourquoi ajouter suffisamment de sel à un colloïde le fait précipiter. Le
Le procédé s'appelle« floculer un colloïde».
Un autre exemple intéressant est l'effet d'une solution saline sur des molécules de
protéine. Une molécule de protéine est une longue chaîne compliquée et flexible d'acides
aminés. La molécule porte des charges diverses, et il arrive quelquefois qu'il y ait une
charge totale, disons négative, distribuée le long de la chaîne. A cause de la répulsion
mutuelle des charges négatives, la chaîne de protéine est maintenue tendue. De même,
si d'autres chaînes similaires de molécules sont présentes dans la solution, elles seront
maintenues séparées par les mêmes effets répulsifs. Nous pouvons, par conséquent,
avoir une suspension de molécules en chaîne dans un liquide. Mais si nous ajoutons du
sel au liquide nous changeons les propriétés de la suspension. A mesure que l'on ajoute
du sel à la solution, faisant ainsi décroître la distance de Debye, les chaînes de molécules
peuvent se rappro_cher, et peuvent aussi s'enrouler sur elles-mêmes. Si l'on ajoute suffi-
samment de sel à la solution, les chaînes de molécules vont précipiter. Il existe de nom-
breux effets chimiques de ce type qui peuvent s'expliquer par les forces électriques.
- X
!.-a -i Fig. 7-8. Surfaces équipotentielles au-
dessus d'une grille régulière de fils chargés.
Si nous considérons le champ à grande distance au-dessus du plan des fils, nous avons
un champ électrique constant, tout comme si les charges étaient uniformément réparties
sur un plan. A mesure que nous approchons de la grille, le champ commence à dévier du
champ uniforme que nous avons trouvé à grande distance de la grille. Nous aimerions
savoir à quelle distance de la grille nous devons être pour voir des variations appréciables
de potentiel. La figure 7-8 est un croquis grossier des équipotentielles à diverses
124
distances de la grille. Plus nous approchons de la grille, et plus les variations sont impor-
tantes. Si nous nous déplaçons parallèlement à la grille, nous voyons que le champ
fluctue périodiquement.
Nous avons vu (chapitre 50, Vol. I) que toute quantité périodique peut être exprimée
sous forme d'une somme d'ondes sinusoïdales (théorème de Fourier). Voyons si nous
pouvons trouver une fonction harmonique qui satisfasse nos équations du champ.
Si les fils sont dans le plan xy et sont disposés parallèlement à l'axe des y, nous pouvons
essayer des termes du type
27rnX
q,(x, z) = Fn(z)cos - -, (7.41)
a
où a est l'écartement des fils et n le rang de l'harmonique. (Nous avons supposé que les
fils sont longs, de sorte qu'il n'y a pas de variation avec y.) Une solution complète pourra
être constituée par une somme de tels termes pour n = 1, 2, 3,. ..
Pour que ce soit un potentiel acceptable, cette solution doit satisfaire l'équation de
Laplace dans la région au-dessus des fils (où il n'existe pas de charges). C'est-à-dire que,
azq, azq,
ax 2 + az 2 = o.
En essayant cette forme pour rp dans (7.41), on voit que
0, (7.42)
1
ou que Fn(z) doit satisfaire
(7.43)
Nous devons donc avoir
(7.44)
où
a
zo = 27rn. (7.45)
Nous avons trouvé que s'il existe une composante de Fourier du champ d'harmonique
n, cette composante décroîtra exponentiellement avec une distance caractéristique z0 =
a/2nn. Pour le premier harmonique (n = 1), l'amplitude diminuera d'un facteur e- 271
(ce qui est une forte décroissance) chaque fois que nous augmenterons z d'une quantité
égale au pas de la grille a. Les autres harmoniques diminuent encore plus rapidement à
mesure que nous nous éloignons de la grille. Nous voyons que si nous nous trouvons à
une distance de seulement quelques multiples de a de la grille, le champ est très voisin
d'un champ uniforme, c'est-à-dire que les termes oscillatoires sont petits. Il restera tou-
jours, bien sur, 1'« harmonique zéro».
<Po = -Eoz
pour donner le champ uniforme à une distance z grande. Pour avoir une solution
complète, nous combinons ce terme avec une somme de termes tels que (7.41) avec
Fn tiré de (7.44). Les coefficients An
125
doivent être ajustés de façon à ce que la somme totale, quand on la différencie, donne
un champ électrique qui corresponde à la densité de charge ..1. des fils de la grille.
La méthode que nous venons de développer peut être utilisée pour expliquer pourquoi
le blindage électrostatique à l'aide d'un grillage est souvent aussi efficace qu'avec une
feuille métallique solide. Sauf à une distance du grillage égale à quelques fois l'espace-
ment des fils, les champs à l'intérieur d'un grillage fermé sont nuls. Nous voyons pourquoi
des écrans de cuivre - plus légers et meilleur marché que des feuilles de cuivre - sont
souvent utilisés pour protéger des équipements électriques sensibles des champs extérieurs
perturbateurs.
126
Energie électrostatf,que
8-1 L'énergie électrostatique des charges. 8--4 Énergie électrostatique dans les noyaux
La sphère uniformément chargée
8-5 Énergie dans le champ électrostatique
8-2 L'énergie d'un condensateur. Forces
s'exerçant .sur des conducteurs chargés 8--6 L'énergie d'une charge ponctuelle
(8.1)
Nous savons aussi, d'après le principe de superposition, que si plusieurs charges sont
en présence, la force totale qui agit sur l'une quelconque des charges est la somme des
forces dues aux autres. Il s'ensuit, par conséquent, que l'énergie totale d'un système
formé par plusieurs charges est la somme des termes dus à l'interaction mutuelle de
chacune des paires de charges. Si q1 et q1
127
0 0
0 0
0 0
oqi 0
0 0
' 0' ' ,tJ
r·· 0
0
' ' Fig. 8-1. L'énergie électrostatique d'un
système de particules est la somme des
0 0 '
' 'oq·J énergies électrostatiques de toutes les
paires.
0 0
0
sont deux quelconques des charges et r, la distance entre elles (Fig. 8-1), l'énergie de
1
cette paire en particulier est
(8.2)
L'énergie électrostatique totale U est la somme des énergies de toutes les paires de
charges possibles:
u -- "L.J 471'EQ1'··
q;q; . (8.3)
11 toutes les pair~
Si nous avions une distribution de charges caractérisée par une densité de cliarges p, la
somme dans l'Eq. (8.3) serait, évidemment, à remplacer par une intégrale.
Nous nous intéresserons à deux aspects de cette énergie. L'un est I'application du
concept d'énergie aux problèmes électrostatiques; l'autre est I'éva/uation de l'énergie de
différentes manières. Il est quelquefois plus facile de calculer le travaJ accompli dans
un cas particulier que d'évaluer la somme dans l'Eq. (8.3), ou l'intégrale correspon-
dante. A titre d'exemple, calculons l'énergie nécessaire pour réunir des charges dans
une sphère avec une densité uniforme. Cette énergie est exactement le travail accompli
pour réunir les charges à partir de l'infini.
Imaginons que nous construisions cette distribution sphérique de charges en super-
posant une succession de minces couches sphériques d'épaisseur infiniment petite. A
chaque stade du processus, nous réunissons une quantité de charges et la plaçons sur
une mince couche comprise entre r et r + dr. Nous continuons le processus jusqu'à ce
que nous arrivions au rayon final a (Fig. 8-2). Si Q r est la charge de
-
R dq
128
la sphère quand ,elle a été construite jusqu'au rayon r, le travail accompli pour lui
apporter une charge dQ est
dU • QrdQ. (8.4)
47rEa"
(8.5)
(8.6)
8-2 L'énergie d'un condensateur. Forces s'exerçant sur des conducteurs chargés
Nous considérons maintenant l'énergie nécessaire pour charger un condensateur. Si
on a pris la charge Q sur l'un des conducteurs d'un condensateur et qu'on l'a placée sur
l'autre, la différence de potentiel entre eux est
(8.8)
129
Prenant V dans l'Eq. (8.8), nous écrivons
dU = QdQ ·
c
Ou en intégrant depuis la charge zéro jusqu'à la charge finale Q, nous avons
1 Q2
U= ïc· (8.9)
En se rappelant que la capacité d'une sphère conductrice (par rapport à l'infini) est
Caph~re = 47rE()O,
nous pouvons immédiatement tirer de l'Eq. (8.9) l'énergie d'une sphère chargée,
1 Q2
u= ---·
2 47rEoa
(8.l l)
Ceci est évidemment aussi l'énergie d'une mince couche sphérique de charge totale Q
et c'est exactement les 5/6 de l'énergie d'une sphère uniformément chargée, Eq. (8.7).
Considérons maintenant des applications de l'idée d'énergie électrostatique. Posons-
nous les questions suivantes: quelle est la force entre les armatures d'un condensateur?
Ou, quel est le couple par rapport à un axe quelconque d'un conducteur chargé en
présence d'un autre ayant une charge opposée? Il est facile de répondre à de telles ques-
tions en utilisant notre résultat de l'Eq. (8.9) relatif à l'énergie électrostatique d'un
condensateur en même temps que le principe des travaux virtuels (chapitres 4, 13 et
14, Vol. 1).
Utilisons cette méthode pour déterminer la force entre les armatures d'un condensa-
teur plan. Si nous imaginons que l'espacement entre les armatures est augmenté d'une
petite quantité Az, le travail mécanique accompli par l'extérieur pour déplacer les
armatures est
AW = Ftiz, (8.12)
où Fest la force entre les armatures. Ce travail doit être égal à la variation d'énergie
du condensateur.
D'après l'Eq. (8.9), l'énergie du condensateur était à l'origine
1 Qll
U= 2c"
AU= 1
2 Q2 A( C · 1) (8.13)
130
Égalant (8.12) et (8.13), nous avons
(8.14)
(8.15)
La force, évidemment, résulte d'une attraction des charges sur les armatures, mais nous
voyons que nous n'avons pas à nous occuper en détail de la façon dont elles sont distri-
buées; tout ce dont nous avons besoin est exprimé par la capacité C.
Il est facile de voir comment l'idée s'étend à des conducteurs de n'importe quelle
forme, et pour d'autres composantes de la force. Dans l'Eq. (8.14), nous remplaçons
F par la composante que nous cherchons, et nous remplaçons tu par un petit déplace-
ment dans la direction correspondante. Ou bien, si nous avons une électrode mobile
autour d'un axe et que nous voulons connaître le couple r, nous écrivons le travail
virtuel sous la forme
AW = rAfJ,
où 1:1.(} est un petit déplacement angulaire. Évidemment, 1:1.(1/C) doit être la variation
de l/C qui correspond à /:iB. Nous pourrions, de cette façon, trouver le couple agissant
sur les armatures mobiles dans un condensateur variable du type représenté sur la
Fig. 8-3.
(8.16)
De l'Eq. (8.14) nous déduisons que la force entre les armatures est
Q2
F = 2EoÀ. (8.17)
131
Regardons l'Eq. (8.17) d'un peu plus près et voyons si nous pouvons expliquer com-
ment la force prend naissance. Si pour la charge sur une des armatures nous écrivons
Q = oA,
l'Eq. (8.17) peut s'écrire aussi
1 O'
F=-Q-·
2 Eo
Eo = !!_'
Eo
nous avons
(8.18)
On devinerait immédiatement que la force agissant sur une des armatures est la
charge Q sur cette armature, multipliée par le champ agissant sur la charge. Ce qui est
étonnant, c'est que nous obtenons un facteur !. La raison en est que E0 n'est pas le
champ sur les charges. Si nous supposons que la charge sur la surface de l'armature
occupe une mince couche, comme le montre la Fig. 8-4, le champ va varier de zéro à
la limite intérieure de la couche, à E0 , dans l'espace extérieur à l'armature. Le champ
moyen agissant sur les charges de la surface est E0 /2. C'est la raison pour laquelle il y a
le facteur un demi dans l'Eq. (8.18).
Couche de charge
superficielle a
IEI
Fig. 8-4. Le champ à la surface d'un
conducteur varie de zéro à Eo~a/Eo quand
on traverse la couche de charge super-
ficielle
Vous pouvez remarquer qu'en calculant le travail virtuel, nous avons supposé que la
charge du condensateur était constante - qu'il n'était pas relié électriquement à d'autres
objets, et que par suite sa charge totale ne pouvait changer.
Supposons que nous ayions imaginé que le condensateur était maintenu à une diffé-
rence de potentiel constante pendant que nous faisions le déplacement virtuel. Nous
aurions alors pris
U = !CV 2
132
et à la place de l'Eq. (8.15) nous aurions eu
FAz = ·W 2 ÂC,
ce qui donne une force égale en grandeur à celle de l'Eq. (8.15) (parce que V= Q/C),
mais de signe opposé! La force entre les armatures du condensateur ne change sûrement
pas de signe quand on le déconnecte de la source qui le charge. Nous savons aussi que
deux armatures de charges électriques opposées doivent s'attirer. Le principe du travail
virtuel a été incorrectement appliqué dans le second cas - nous n'avons pas tenu compte
du travail accompli sur la source qui charge le condensateur. C'est-à-dire que pour
garder le potentiel constamment égal à V quand la capacité change, une charge VAC
doit être apportée par une source. Mais cette charge est fournie à un potentiel V, de
sorte que le travail accompli par le système électrique qui maintient constant le poten-
tiel est V2 AC. Le travail mécanique F Az plus ce travail électrique V2 AC constituent
ensemble la variation de l'énergie totale !V2 AC du condensateur. Ainsi F Az vaut
- !V2 AC, comme précédemment.
133
Si notre image du système est correcte, nous devons être capables de la vérifier en
nous posant la question suivante: combien faudrait-il d'énergie pour éloigner tous ces
ions les uns des autres - c'est-à-dire pour séparer complètement le cristal en ions?
Cette énergie devrait être égale à la chaleur de vaporisation de NaCI, plus l'énergie
nécessaire à dissocier les molécules en ions. L'énergie totale pour séparer NaCl en ions
est déterminée par l'expérience, c'est 7,92 électron-volts par molécule. Utilisant la
conversion
1 ev = 1.602 X 10- 19 joule,
Les physico-chimistes préfèrent prendre pour unité d'énergie la kilocalorie, qui vaut
4.190 joules, de sorte qu'un eV par molécule vaut 23 kilocalories par mole. Un
chimiste dirait alors que l'énergie de dissociation de NaCl est
W = 183 kcal/mole.
= - 2e2
a
(1 - !2 + !3 - !4 + .. ·) . (8.19)
134
La série converge lentement, de sorte qu'il est difficile de l'évaluer numériquement, mais
on sait qu'elle vaut ln 2. De sorte que
2e 2 e2
U1 = --ln2 -1.386 - . (8.20)
a a
Il y a quatre telles lignes: au-dessus, au-dessous, devant et derrière. Puis il y a les quatre
lignes qui sont les plus proches en diagonale, etc., etc.
Si on fait ce travail patiemment pour toutes les lignes, puis si on en fait la somme, on
trouve que le total général est
e2
u= -l.747 - ,
a
ce qui est seulement un peu plus que ce que nous avions obtenu dans (8.20) pour la
première ligne. Utilisant e2/a = 5,12 eV, on trouve
U = -8.94ev.
Notre réponse est environ 10% au-dessus de l'énergie observée expérimentalement.
Cela montre que notre idée, que l'ensemble du réseau est maintenu par des forces
électriques coulombiennes, est fondamentalement correcte. C'est la première fois que
nous avons obtenu une propriété spécifique d'une substance macroscopique à partir de
la connaissance de la physique atomique. Nous en ferons beaucoup plus, plus tard. La
science qui cherche à comprendre le comportement des matériaux à l'aide des lois du
comportement atomique est appelée la physique du solide.
Maintenant, que dire de l'erreur dans notre calcul? Pourquoi n'est-il pas exactement
correct? C'est à cause de la répulsion entre des ions à faible distance. Ce ne sont pas des
sphères parfaitement rigides, de sorte que lorsqu'elles sont proches les unes des autres,
elles sont en partie aplaties. Elles ne sont pas très molles, si bien qu'elles ne s'aplatissent
qu'un peu. Un peu d'énergie sert cependant à les déformer, et quand les ions sont séparés,
cette énergie est libérée. L'énergie effectivement nécessaire pour séparer les ions est un
peu inférieure à l'énergie que nous avons calculée; la répulsion aide à surmonter
l'attraction électrostatique.
Existe-t-il une façon de tenir compte de cette contribution? Nous pourrions le faire
si nous connaissions la loi qui régit la force répulsive. Nous ne sommes pas prêts pour
analyser le mécanisme de répulsion, mais nous pouvons nous faire une idée de ses
caractéristiques à partir de certaines mesures macroscopiques. A partir de la mesure de
la compressibilité du cristal, il est possible d'obtenir une idée quantitative de la loi de
répulsion entre les ions et par conséquent d'obtenir sa contribution à l'énergie. On a
trouvé de cette façon que cette contribution doit être la fraction 1/9,4 de la contribution
due à l'attraction électrostatique, avec évidemment un signe opposé. Si on retranche
cette contribution de l'énergie purement électrostatique, on obtient 7,99 eV pour
!'énergie de dissociation '
135
par molécule. C'est beaucoup plus proche du résultat des observations, 7,92 eV, mais
pas encore en parfait accord. Il y a une chose de plus dont nous n'avons pas tenu compte:
c'est l'énergie cinétique des vibrations du cristal. Si une correction est faite pour tenir
compte de cet effet, on obtient un très bon accord avec la valeur expérimentale. Les
idées émises sont donc correctes, la majeure contribution à l'énergie d'un cristal tel que
NaCl est de nature électrostatique.
Ce qu'on veut dire par «aussi compliquée qu'il est possible de l'être» c'est que cette
force dépend d'autant de choses que possible.
Premièrement cette force n'est pas une simple fonction de la distance entre deux
protons. A grande distance il y a attraction, mais à plus courte distance il y a répulsion.
La fonction de la distance est compliquée et encore imparfaitement connue.
Deuxièmement, cette force dépend de l'orientation du spin du proton. Les protons
ont un spin et deux protons quelconques en interaction peuvent avoir leurs moments
angulaires de mêmes sens ou de sens opposés. Et la force est différente quand les spins
sont parallèles et quand ils sont antiparallèles, comme en (a) et (b) sur la Fig. 8-6. La
différence est très grande; ce n'est pas un petit effet.
Troisièmement, la force est considérablement différente quand la séparation entre
les protons se trouve dans la direction parallèle à leurs spins, comme en (e) et en (d)
de la Fig. 8-6 et lorsque la séparation est dans la direction perpendiculaire aux spins,
comme en (a) et (b).
Quatrièmement, la force dépend, comme c'est le cas en magnétisme, de la vitesse des
protons, mais beaucoup plus qu'en magnétisme. Et cette force dépendant de la vitesse
n'est pas un effet relativiste; elle est grande même à des vitesses très inférieures à celle de
la lumière. De plus, cette partie de la force dépend d'autres choses que de la grandeur
de la vitesse. Par exemple, quand un proton se déplace près d'un autre proton, la force
est différente quand le mouvement orbital a la même direction de rotation que le spin,
comme en (e) de la Fig. (8-6) et quand il a la direction opposée à celle de la rotation,
comme en (t). C'est ce qu'on appelle la partie «spin-orbite» de la force.
136
a b
c d
137
5.03
4.46
2.14
2.00
Fig. 8-7. Les niveaux d'énergie de 8 11
et de C11 (énergies en MeV). L'état fon-
damental de C11 est 1,982 MeV plus haut
que celui de B 11 •
B" 1.982- c"
des énergies; il n'existe cependant pas encore de théorie générale complète de tels
niveaux d'énergie nucléaires.
Si on remplace un des neutrons dans Bn par un proton, on obtient le noyau d'un isotope
du carbone, en. Les énergies des seize états excités les plus bas de en ont aussi été
mesurées; elles sont représentées dans la moitié droite de la Fig. 8-7. (Les lignes en
pointillé indiquent des niveaux pour lesquels les renseignements expérimentaux sont
douteux.)
En regardant la Fig. 8-7, on est frappé par la similitude entre les schémas des niveaux
d'énergie dans les deux noyaux. Les premiers états excités sont à peu près à 2 MeV
au-dessus des niveaux fondamentaux. Il existe un grand hiatus d'environ 2,3 MeV
jusqu'au deuxième état excité, puis un petit saut de 0,5 MeV seulement jusqu'au troi-
sième niveau. Entre le quatrième et le cinquième niveau, à nouveau un grand saut,
mais entre le cinquième et le sixième une séparation minuscule de l'ordre de 0,1 MeV.
Et ainsi de suite. Après le dixième niveau environ, la correspondance semble se perdre,
mais elle peut encore se voir si les niveaux sont étiquetés par leurs autres caractéristiques
de définition - par exemple, par leur moment angulaire, ou par la façon dont ils perdent
leur excès d'énergie.
La similitude surprenante du diagramme des niveaux d'énergie de B11 et C 11 n'est
sûrement pas une simple coïncidence. Elle doit révéler une loi physique. Elle montre, en
effet, que même dans un système compliqué comme l'est un noyau, remplacer un
neutron par un proton ne change pas grand-chose. Ceci peut seulement signifier que les
forces neutron-neutron et pn::>ton-proton doivent être presque identiques. C'est seule-
ment alors que nous pouvons nous attendre à ce que les configurations
138
nucléaires avec cinq protons et six neutrons soient les mêmes que celles avec six protons
et cinq neutrons.
Remarquez que les propriétés de ces deux noyaux ne nous apprennent rien sur la
force neutron-proton; il y a le même nombre de combinaisons neutron-proton dans
les deux noyaux. Mais si nous comparons deux autres noyaux, tels que C 14 qui a six
protons et huit neutrons et N 14 qui en a sept de chaque, nous trouvons une correspon-
dance semblable des niveaux d'énergie. Nous pouvons donc conclure que les forces p-p,
n-n, et p-n sont identiques dans toute leur complexité. Il existe un principe inattendu
dans les lois des forces nucléaires. Bien que la force entre chaque paire de particules
nucléaires soit très compliquée, la force entre les trois différentes paires possibles est
la même.
Mais il existe quelques petites différences. Les niveaux ne correspondent pas exacte-
ment; l'état fondamental de en a une énergie absolue (sa masse) qui est supérieure de
1,982 MeV au niveau fondamental de Bn. Tous les autres niveaux sont également plus
élevés, en énergie absolue, d'une même quantité. De sorte que les forces ne sont pas
exactement égales. Mais nous savons très bien que les forces complètes ne sont pas
exactement égales; il existe une force électrique entre deux protons parce que tous deux
ont une charge positive, tandis qu'entre deux neutrons il n'existe pas une telle force
électrique. Peut-être peut-on expliquer la différence entre Bn et en par le fait que
l'interaction électrique des protons est différente dans les deux cas? Peut-être même
que les minimes différences qui subsistent entre les niveaux sont dues à des effets
électriques? Comme les forces nucléaires sont tellement plus grandes que les forces
électriques, les effets électriques ne doivent avoir qu'un faible effet perturbateur sur les
énergies des niveaux.
Pour vérifier cette idée, ou plutôt pour chercher quelles sont les conséquences de
cette idée, considérons d'abord la différence entre les énergies des états fondamentaux
des deux noyaux. Pour prendre un modèle très simple, nous supposerons que les noyaux
sont des sphères de rayon r (à déterminer), contenant Z protons. Si nous considérons
qu'un noyau est analogue à une sphère avec une densité uniforme de charge, nous devons
nous attendre à ce que l'énergie électrostatique (d'après l'Eq. 8.7) soit
U = ~ (Zq.)2' (8.22)
5 471'Eor
où q. est la charge élémentaire du proton. Comme Z vaut cinq pour Bn et six pour C11,
leurs énergies électrostatiques devraient être différentes.
Cependant, avec un si petit nombre· de protons, l'Eq. (8.22) n'est pas tout à fait
correcte. Si on calcule l'énergie électrique entre toutes les paires de protons, considérés
comme des points qu'on suppose répartis à peu près uniformément dans toute la
sphère, on trouve que dans l'Eq. (8.22) la quantité 'Z2 devrait être remplacée par
Z(Z - 1) et qu'ainsi l'énergie est
Si nous connaissions le rayon r, nous pourrions utiliser (8.23) pour trouver la différence
d'énergie électrostatique entre B11 et C 11 • Mais faisons le contraire, utilisons au lieu de
cela la différence d'énergie observée pour calculer le rayon, en supposant que la diffé-
rence d'énergie est d'origine entièrement électrostatique.
139
Ceci n'est cependant pas tout à fait vrai. La différence d'énergie de 1,982 MeV entre les
états fondamentaux de Bll et Cil comprend l'énergie au repos - c'est-à-dire l'énergie
mc 2 - de toutes les particules. En passant de B" à C", on remplace un neutron par un
proton, qui a une masse plus petite. Ainsi une partie de cette différence d'énergie est
la différence entre les énergies au repos d'un neutron et d'un proton, qui est de 0,784 MeV.
Ainsi la différence, qu'il faut expliquer par l'énergie électrostatique, excède 1,982 MeV;
elle vaut
l.982 + 0.784 = 2.786 Mev.
Utilisant cette énergie dans l'Eq. (8.23) pour Je rayon de B11 ou de Cil on trouve
Est-ce que ce nombre signifie quelque chose? Pour Je voir, il faudrait Je comparer
avec une autre détermination du rayon de ces noyaux. Par exemple, on peut faire une
autre mesure du rayon d'un noyau en regardant comment il diffuse des particules
rapides. A partir de telles mesures on a trouvé que la densité de matière dans tous
les noyaux est pratiquement la même, c'est-à-dire que leurs volumes sont proportionnels
au nombre de particules qu'ils contiennent. Si on désigne par A le nombre de protons
et de neutrons dans un noyau (nombre qui est très approximativement proportionnel
à sa masse), on trouve que le rayon est donné par
(8.25)
où
ro = 1.2 X 10- 13 cm. (8.26)
A partir de ces mesures, on trouve que Je rayon d'un noyau de B11 (ou de C11) doit être
r = (1.2 X 10- 13)(11) 113 = 2.7 X 10- 13 cm.
En comparant ce résultat avec (8.24), on voit que notre hypothèse que la différence
d'énergie entre Bll et C11 est électrostatique est vraiment bonne; l'écart n'est que
d'environ 15% (ce n'est pas mal pour notre premier calcul de physique nucléaire!).
La raison de l'écart est probablement la suivante. D'après la conception actuelle des
noyaux, un nombre pair de particules nucléaires - dans le cas de B11 , cinq neutrons et
cinq protons - forme une sorte de cœur; quand on ajoute une particule supplémentaire
à ce cœur, elle tourne autour, à l'extérieur, de façon à former un nouveau noyau sphérique,
au lieu d'être absorbée. S'il en est ainsi, nous aurions dû prendre une énergie électro-
statique différente pour le proton additionnel. Nous devons prendre l'excès d'énergie
de Cil par rapport à B" exactement égal à
140
est les 5/6 de (8.24), ce qui est en bien meilleur accord avec ce qui a été directement
mesuré.
On peut tirer deux conclusions de cet accord. L'une est qu'il apparaît que les lois
électriques sont valables à des dimensions aussi petites que 10- 13 cm. L'autre est que
nous avons vérifié cette coïncidence remarquable que les parties non électriques des
forces entre proton et proton, neutron et neutron, et proton et neutron sont toutes
égales.
U = !
2
f p(~)p( ) 2 dV dV.
411"Eof'12
tout re:.pa.;e
1 2 (8.27)
Remarquez le facteur ! qui a été introduit parce que dans l'intégrale double sur dV1
et dV2 , nous avons compté toutes les paires d'éléments de charge deux fois. (Il n'existe
pas de façon commode d'écrire une intégrale en ne tenant compte de chaque paire qu'une
seule fois.) Notons ensuite que l'intégrale sur dV2 dans (8.27) est exactement le potentiel
en (1). C'est-à-dire
f _eQ2_ dV2
41T"Eo1'12
= q,(l),
(8.28)
u= q1<1>(l) = q1 411";~12
141
ou
Il existe aussi une raison physique pour laquelle nous avons absolument besoin de
pouvoir dire où est localisée l'énergie. D'après la théorie de la gravitation, toute masse
est source d'attraction gravitationnelle. Nous savons aussi, par E = mc 2 que la masse et
l'énergie sont équiv~lentes. Toute énergie est, par conséquent, source de force de gravita-
tion. Si nous ne pouvions pas localiser toute l'énergie nous ne pourrions pas localiser
toute la masse. Nous ne saurions pas dire où sont localisées les sources du champ de gravi-
tation. La théorie de la gravitation serait incomplète.
Si nous nous restreignons à l'électrostatique, il n'y a vraiment aucun moyen de dire
où est localisée l'énergie. Les équations de Maxwell complètes de l'électrodynamique nous
donnent bien plus de renseignements (bien que, même là, la solution ne soit pas à stricte-
ment parler unique). Nous reprendrons par conséquent cette question en détail dans
un prochain chapitre. Nous allons vous donner maintenant seulement le résultat pour le
cas particulier de l'électrostatique. L'énergie est localisée dans l'espace, là où règne le
champ électrique. Cela semble raisonnable, car nous savons que lorsque des charges sont
accélérées, elles rayonnent des champs électriques.
142
Nous aimerions dire que lorsque de la lumière ou des ondes se propagent d'un point à
l'autre, elles transportent leur énergie avec elles. Mais il n'y a pas de charges dans les
ondes. Donc nous voudrions localiser l'énergie là où se trouve le champ électromagnétique
et non sur les charges d'où il provient. Nous décrivons ainsi l'énergie, non pas en fonction
des charges, mais en fonction des champs qu'elles produisent. Nous pouvons, en effet,
montrer que l'Eq. (8.28) est numériquement égale à
U = ~ f E·EdV. (8.30)
Nous pouvons ensuite interpréter cette formule en disant que quand un champ électrique
est présent, il existe dans l'espace une énergie dont la densité (énergie par unité de volume)
est
(8.31)
Pour montrer que l'Eq. (8.30) est en accord avec nos lois de l'électrostatique, nous
commençons par introduire dans l'Eq. (8.28) la relation entre p et </> que nous avons
obtenue au chapitre 6:
Nous obtenons
(8.32)
En décrivant les composantes de la quantité sous le signe somme, nous voyons que
~ +~
ay2 + ~
2 2 2 )
<J>V2<1> = </> ( ax2 az2
(a.p) (~~r + :z ("' ~~) - (~~r
2
a ( </> a.p)
ax ax - ax + aya ( </> a.p)
()y
V·(</> V</>) - (V</>)· (V</>). (8.33)
143
Notre intégrale pour l'énergie est alors
Nous évaluons l'intégrale de surface dans le cas où la surface s'éloigne à l'infini (ainsi
les intégrales de volume deviennent des intégrales sur tout l'espace), en supposant que
toutes les charges sont situées à distance finie. La façon simple de procéder est de prendre
une surface sphérique de rayon R énorme et dont le centre est à l'origine des
coordonnées. Nous savons que lorsque nous sommes très loin de toutes les charges,
tp varie comme l/R et 't"tpcomme l/R 2 • (Les deux vont décroître encore plus vite avec R si
la charge totale de la distribution est nulle.) Comme la surface de la grande sphère
augmente comme R 2 , on voit que l'intégrale de surface décroît comme (l/R)(l/R 2 )R 2 =
(l/R) quand le rayon de la sphère augmente. Ainsi, si on intègre sur tout l'espace (R-w ),
l'intégrale de surface tend vers zéro et on a
Nous voyons qu'il nous est possible de représenter l'énergie d'une distribution quelconque
de charge comme étant l'intégrale d'une densité d'énergie localisée dans le champ.
E = - q -2·
47rEor
Ainsi la densité d'énergie à la distance r de la charge est
Nous pouvons prendre pour élément de volume une couche sphérique d'épaisseur dr
et de surface 4nr 2 • L'énergie totale est
U = !"'
r=O
q2 q2 l
87rEor 2 dr = - 87rEo r
1r=oo
r=O
0
(8.36)
La limite à r = w ne présente pas de difficulté. Mais pour une charge ponctuelle nous
sommes sensés intégrer à partir der = 0, ce qui nous donne une intégrale infinie. L'équa-
tion
144
(8.35) dit qu'il y a une quantité infinie d'énergie dans le champ d'une charge ponctuelle,
bien que nous soyons partis avec l'idée qu'il n'y avait d'énergie qu'entre des charges
ponctuelles. Dans notre formule de départ pour l'énergie d'une collection de charges
ponctuelles (Eq. 8-3) nous n'avons inclus aucune énergie d'interaction d'une charge avec
elle-même. Ce qui s'est produit, c'est que quand on est passé à une distribution continue
de charges dans l'Eq. (8.27), on a compté l'énergie d'interaction de chaque charge
infiniment petite avec toutes les autres charges infiniment petites. Le même compte est
inclus dans l'Eq. (8.35), de sorte que lorsqu'on l'applique à une charge ponctuelle finie,
on inclut l'énergie qui aurait été nécessaire pour assembler cette charge à partir de mor-
ceaux infiniment petits. Vous remarquerez qu'en fait nous aurions obtenu aussi ce résultat
dans l'Eq. (8.36) si nous avions utilisé notre expression (8.11) pour l'énergie d'une sphère
chargée et fait tendre son rayon vers zéro.
Nous devons en conclure que l'idée de localisation de l'énergie dans le champ est
incompatible avec l'hypothèse de l'existence de charges ponctuelles. Une façon de se
tirer de cette difficulté serait de dire que les charges élémentaires tel un électron, ne sont pas
des points mais sont en réalité de petites distributions de charge. Nous pourrions aussi
bien dire qu'il y a quelque chose de faux dans notre théorie de l'électricité aux courtes
distances, ou dans l'idée de la conservation locale de l'énergie. Il y a des difficultés de
toute façon. Ces difficultés n'ont jamais été surmontées; elles existent encore à ce jour. Un
peu plus tard, quand nous aurons discuté quelques idées supplémentaires, telle que
la quantité de mouvement dans un champ électromagnétique, nous rendrons compte
plus complètement de ces difficultés fondamentales dans notre compréhension de la
nature.
145
9
146
--
+~V.- --
-----
+~.Y - -
!_?0.2_V _ _
lE • IOOV/m
0 -
7 / 7 7 / / /S;ll
(b)
Sol
(a)
Liaison
avec le sol l _____ _,.:-Plateau métallique
_ _ _ ,1 Plateau B
/;(:~~;a~~)""'°'~,"""',""",'°"/"""/~/=////
7 7 7 7 - 7 soi' ' 7 7 7 7 7 7 7 7 7
Sol
(a) (b)
Fig. 9-2. (a) Un plateau métallique relié au sol aura la même charge superficielle que la
terre. (b) Si le plateau est recouvert par un conducteur relié au sol, il n'aura pas de charge
superficielle.
147
Ayant suggéré comment on peut mesurer le champ électrique dans l'atmosphère, nous
allons maintenant continu.er à le décrire. Les mesures montrent, avant tout, que le champ
continue à exister, mais devient plus faible, quand on s'élève vers de hautes altitudes.
A environ 50 kilomètres, le champ est très petit, et ainsi, la plus grande partie de la varia-
tion de potentiel (l'intégrale de E) a lieu aux basses altitudes. La différence de potentiel
totale de la surface de la terre au sommet de l'atmosphère est d'environ 400.000 volts.
+
- AIR
IONS_:- -
+
Pour vérifier cette théorie, certains physiciens montèrent une expérience dans des
ballons pour mesurer l'ionisation de l'air (Hess, en 1912) et découvrirent que c'était
le contraire qui était vrai - l'ionisation par unité de volume augmentait avec l'altitude!
(L'appareillage ressemblait à celui de la Fig. 9-3. Les deux plateaux étaient chargés
périodiquement au potentiel V. En raison de la conductivité de l'air, les plateaux se
déchargeaient lentement; le taux de décharge était mesuré à )'électromètre.) Ce fut un
résultat des plus mystérieux - la découverte la plus sensationnelle de toute l'histoire de
l'électricité atmosphérique. Si sensationnelle en effet, qu'elle ouvrit un domaine
entièrement nouveau
148
- les rayons cosmiques. L'électricité atmosphérique elle-même demeura moins sensation-
nelle. L'ionisation était évidemment produite par quelque chose qui venait d'ailleurs
que de la terre: l'étude de cette source mena à la découverte des rayons cosmiques. Nous
ne discuterons pas maintenant les rayons cosmiques, sauf pour dire qu'ils entretiennent
le stock d'ions. Bien que les ions soient continuellement éliminés de nouveaux ions sont
constamment créés par les particules des rayons cosmiques venant d'ailleurs.
Pour être précis, il faut dire qu'en plus des ions constitués de molécules, il y a d'autres
sortes d'ions. De minuscules déchets, comme des grains de poussière extrêmement fins,
flottent dans l'air et se chargent. On les appelle quelquefois des« noyaux». Par exemple,
quand une vague se brise dans la mer, de petits morceaux d'écume sont projetés dans l'air.
Quand une de ces gouttes s'évapore, elle laisse un cristal infinitésimal de NaCl qui flotte
dans l'air. Ces minuscules cristaux peuvent alors capter des charges et devenir des ions;
on les appelle des « gros ions ».
Les petits ions - ceux formés par les rayons cosmiques - sont les plus mobiles. Parce
qu'ils sont si petits, ils se déplacent rapidement dans l'air - à une vitesse d'environ 1 cm/s
dans un champ de 1OO volts/mètre, ou 1 volt/cm. Les ions les plus gros et les plus lourds se
déplacent beaucoup plus lentement. On voit que s'il y a beaucoup de« noyaux »,ils vont
capter les charges des petits ions. Alors, comme les « gros ions » se déplacent très lente-
ment dans un champ, la conductivité totale diminue. La conductivité de l'air est par
conséquent très variable puisqu'elle est très sensible à la quantité de « saletés » qu'il y
a dedans. Il y a beaucoup plus de telles saletés sur le sol - où le vent peut balayer la
poussière et où l'homme apporte toutes sortes de pollutions dans l'air - que sur l'eau.
Il n'est pas surprenant que d'un jour à l'autre, d'un moment à l'autre, d'un endroit à
l'autre, la conductivité au voisinage de la surface de la terre varie énormément. Comme,
en gros, le même courant descend des hautes altitudes en différents endroits, et comme la
conductivité varie au voisinage de la terre, il en résulte une variation du gradient de
potentiel qu'on observe dans un endroit donné à la surface de la terre.
La conductivité de l'air due au mouvement des ions augmente aussi rapidement avec
l'altitude, pour deux raisons. D'abord, l'ionisation qui provient des rayons cosmiques
augmente avec l'altitude. Deuxièmement, comme la densité de l'air diminue, le libre
parcours moyen des ions augmente, de sorte qu'ils peuvent aller plus loin dans le champ
électrique avant de subir une collision, d'où il résulte une augmentation rapide de la
conductivité quand on s'élève.
Bien que la densité du courant électrique dans l'air ne soit que de quelques micro-
microampères par mètre carré, il y a vraiment beaucoup de mètres carrés à la surface de
la terre. Le courant électrique total qui atteint la surface de la terre à chaque instant est
pratiquement constant et égal à 1.800 ampères. Ce courant, évidemment, est « positif»
il apporte des charges plus à la terre. On dispose ainsi d'une tension de 400.000 volts avec
un courant de 1.800 ampères - une puissance de 700 mégawatts!
Avec un si fort courant descendant, la charge négative du sol devrait être vite déchargée.
En fait, il ne faudrait environ qu'une demi-heure pour décharger toute la terre. Mais le
champ électrique atmosphérique a déjà duré plus d'une demi-heure depuis sa découverte.
Comment est-il entretenu? Qu'est-ce qui entretient la tension? Et entre quoi et la terre?
De nombreuses questions se posent.
La terre est négative et le potentiel dans l'air est positif. Si vous montez suffisamment, la
conductivité est si grande, qu'il n'y a plus aucune chance pour
149
50000m- _+ - - -
•Courant
' 401,000
VOLTS
! "'10-•2
Amps/ m2
Niveau de la mer. 1
7r-J7-o'--7,..._,7,_--,7r--,7-7-,--,7-7.,.--c7~7-r-- Fig. 9--4. Conditions électriques typi-
Surfacc de la terre ques dans une atmosphère dégagée.
que le potentiel varie horizontalement. L'air, à l'échelle des temps dont nous parlons,
devient effectivement conducteur. Cela se passe à une hauteur voisine de 50 km. Cela n'est
pas aussi haut que ce qu'on appelle 1'« ionosphère» où se trouvent un très grand nombre
d'ions produits photoélectriquement par le soleil. Néanmoins, pour nos discussions
sur l'électricité atmosphérique, l'air devient suffisamment conducteur à environ 50 km
pour qu'on puisse imaginer qu'on a pratiquement une surface parfaitement conductrice
à cette hauteur, de laquelle descend le courant. Notre image de la situation est montrée
sur la Fig. 9-4. Le problème est: comment est-ce que la charge positive y est maintenue?
Comment est-elle pompée et ramenée vers le haut? Parce que si elle descend sur la terre,
il faut bien qu'elle soit pompée vers le haut d'une façon ou d'une autre. Ce fut l'une des
plus grandes énigmes de l'électricité atmosphérique pendant un bon moment.
E(V/m)
12
110
10
Chaque élément d'information que l'on peut acquérir, devrait donner un indice ou,
au moins, en dire quelque chose. Voici un phénomène intéressant: si l'on mesure le
courant, (qui est plus stable que le gradient de potentiel) au-dessus de la mer par exemple,
ou dans des conditions choisies avec soin, et si l'on fait très soigneusement une moyenne
afin de se débarrasser des irrégularités, on découvre qu'il y a encore une variation quoti-
dienne. La moyenne de nombreuses mesures au-dessus des océans varie avec le temps
en gros comme le montre la Fig. 9-5. Le courant varie d'environ + 15 %, et il tst maximum
à 7 heures du soir à Londres. Ce qu'il y a d'étrange là dedans, c'est qu'en quelque endroit
que l'on mesure le courant, - dans l'océan Atlantique, l'océan Pacifique ou l'océan
Arctique - il est maximum quand les horloges de Londres indiquent 7 heures du soir!
Partout dans le monde le courant atteint son maximum à 7 heures du soir, heure de
Londres, et son minimum à 4 heures du matin, heure de Londres. En d'autres termes,
il dépend du temps absolu sur la terre et non du temps local au lieu d'observation. D'un
certain côté, ce n'est pas mystérieux;
150
c'est en accord avec notre idée qu'il existe une très grande conductivité latérale au sommet,
ce qui empêche les variations locales de la différence de potentiel entre le sol et le
sommet. Toute variation de poteritiel devrait être à l'échelon du monde entier, comme
c'est le cas effectivement. Ce qu'on sait maintenant, par conséquent, c'est que la tension
à la surface « supérieure » augmente et diminue de 15 %en fonction du temps absolu sur
la terre.
Il y a environ 300 orages par jour sur toute la terre et nous pouvons les considérer
comme des batteries pompant l'électricité vers la couche supérieure et maintenant la
différence de potentiel. Tenez compte alors de la géographie de la terre - il y a des
orages l'après-midi au Brésil, des orages tropicaux en Afrique, et ainsi de suite. On a
estimé la charge qu'apporte la foudre .qui frappe sur le monde entier à chaque instant,
et - il est peut-être inutile de le dire - ces estimations s'accordent plus ou moins avec
les mesures de la différence de potentiel: l'activité orageuse totale est maximum sur
toute la terre quand il est environ 7 heures du soir à Londres. Cependant, les estimations
d'orages sont très difficiles à faire et elles ont été faites seulement après que l'on ait su
que la variation devait avoir lieu. Tout cela est très difficile, car nous n'avons pas assez
d'observations sur les mers et sur toutes les parties du monde pour connaître avec préci-
sion le nombre d'orages. Mais les gens qui estiment qu'ils« s'y prennent bien» trouvent
qu'il y a vers 100 éclairs par seconde dans le monde entier avec un maximum de l'activité
vers 19 heures, heure de Greenwich.
151
I
f
j!
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f;
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/
152
Fig. 9-7. Une cellule d'orage dans les
premiers stades de son développement.
f""L'"""-.,,,,,,.._"""'""-""""=~=~ ~, - ' - = ""'- [Rapport de l'U.S. Department of Com-
Echelle horizontale L'.::_J Pluie merce Weather Bureau, Juin 1949.]
Echelle du vecteur 15 30
représentant le courant 'L'U . Neige
représentent la neige, et les points, la pluie, mais, comme les courants d'air ascendants
sont assez forts et les gouttes assez petites, la neige et la pluie ne tombent pas à ce stade.
Ceci est le stade initial, mais pas encore l'orage proprement dit - en ce sens que rien ne
se produit au sol. En même temps que l'air chaud s'élève, il y a un entraînement de l'air
venant des côtés, point important et négligé pendant des années. Ainsi, ce n'est pas
seulement l'air du dessous qui s'élève, mais aussi une certaipe quantité d'air venant des
côtés.
Pourquoi l'air s'élève-t-il ainsi? Comme vous le savez, quand on monte en altitude,
l'air devient plus froid. Le sol est chauffé par le soleil et le re-rayonnement de chaleur
vers le ciel provient de la vapeur d'eau, haut dans l'atmosphère; donc aux grandes
altitudes, l'air est froid - très froid - tandis que plus bas il est chaud. Vous pouvez dire:
«alors c'est très simple. L'air chaud est plus léger que l'air froid; par suite, le système est
mécaniquement instable et l'air chaud monte». Bien entendu, si la température est
différente à différentes hauteurs, l'air est thermodynamiquement instable. Abandonné à
lui-même pendant un temps infiniment long, tout l'air finirait par atteindre la même
température. Mais il n'est pas abandonné à lui-même; le soleil brille toujours (pendant
le jour). Donc le problème n'est pas en réalité celui de l'équilibre thermodynamique,
mais de l'équilibre mécanique. Supposez que nous portions - comme dans la Fig. 9-8 -
la température de l'air en fonction de la hauteur au-dessus du sol. Dans des conditions
ordinaires nous devrions obtenir une décroissance le long d'une courbe comme la
courbe (a); à mesure que la hauteur augmente, la température baisse. Comment l'atmo-
sphère peut-elle être stable? Pourquoi l'air chaud du dessous ne s'élève-t-il pas tout
simplement dans l'air froid? La réponse est celle-ci: si l'air montait, sa pression baisserait,
et si nous considérons une certaine masse d'air qui monte, elle se détendrait adiabatique-
ment. (Il n'y aurait pas d'apport ni de perte de chaleur, car pour les grandes dimensions
considérées ici, la chaleur n'a pratiquement pas le temps de se propager.) Ainsi la masse
d'air se refroidirait
153
\
\
\
\
\
\e Fig. 9-8. Température atmosphérique.
(a) Atmosphère statique; (b) refroidisse-
' ment adiabatique de l'air sec: (c) refroidisse-
ment adiabatique de l'air humide; (d) air
humide mélangé à de l'air ambiant.
ALTITUDE
en montant. Un tel processus adiabatique donnerait une relation température-hauteur
représentée par une courbe telle que (b) de la Fig. 9-8. Tout air montant serait plus froid
que le milieu dans lequel il pénètre. Ainsi il n'y a pas de raison pour que l'air chaud de
dessous s'élève; s'il s'élevait, il se refroidirait à une température plus basse que celle de
l'air qui se trouve à l'altitude qu'il atteindrait; il serait plus lourd que cet air-là et ne
demanderait qu'à redescendre. Par très beau temps, avec très peu d'humidité, la tempé-
rature de l'atmosphère décroît en fonction de l'altitude avec un certain gradient,
généralement plus faible que le «gradient stable maximum» qui est représenté par la
courbe (b). L'air est en équilibre mécanique stable.
D'autre part si nous considérons une masse d'air contenant beaucoup de vapeur d'eau,
qui est entraînée vers le haut dans l'air, sa courbe de refroidissement adiabatique sera
différente. A mesure qu'elle se détend et se refroidit, la vapeur d'eau qu'elle contient
va se condenser, et l'eau en se condensant va libérer de la chaleur. L'air humide, par
conséquent, ne se refroidit pas tout à fait autant que l'air sec. Donc si de l'air plus
humide que la moyenne commence à s'élever, sa température va suivre une courbe
telle que (c) dans la Fig. 9-8. Il se refroidira un peu, mais sera encore plus chaud que l'air
environnant au même niveau. Si nous avons une région d'air humide et chaud et si
quelque chose fait démarrer son mouvement ascendant, il se trouvera toujours plus
léger et plus chaud que l'air qui l'environne et il continuera à monter jusqu'à ce qu'il
atteigne des hauteurs considérables. Tel est le mécanisme qui fait s'élever l'air dans une
cellule d'orage.
Pendant de nombreuses années la cellule d'orage était tout simplement expliquée de
cette façon. Mais ensuite des mesures montrèrent que la température du nuage à diffé-
rentes hauteurs était loin d'être aussi élevée que l'indique la courbe (c). La raison est la
suivante: à mesure que la« bulle» d'air humide monte, elle entraîne de l'air environnant
et est refroidie par lui. La courbe de la température en fonction de la hauteur ressemble
davantage à la courbe (d), qui est beaucoup plus proche de la courbe initiale (a) que de la
courbe(c).
Après que les courants de convection que l'on vient de décrire se soient formés, la
coupe d'une cellule orageuse apparaît comme sur la Fig. 9-9. Nous avons ce qu'on
appelle un orage «mûr». Il y a un courant ascendant très rapide qui, à ce stade-là,
s'élève jusqu'à environ 10.000 à 15.000 mètres - quelquefois même beaucoup plus. Les
fronts d'orage avec leur condensation, montent verticalement hors de la masse générale
des nuages, emportés par un courant
154
Fig. 9-9. Une cellule d'orage mûre.
[Rapport de l'U.S. Department of Com-
merce Weather Bureau, Juin 1949.]
ascendant qui atteint d'ordinaire des vitesses de 100 km/heure. A mesure que la vapeur
d'eau est entraînée vers le haut et qu'elle se condense, elle forme de minuscules gouttes
qui sont rapidement refroidies à des températures inférieures à 0°. Elles devraient geler,
mais ne gèlent pas immédiatement - elles sont «surgelées». L'eau et d'autres liquides
sont couramment refroidis bien au-dessous de leur point de congélation avant de cristal-
liser, s'il n'y a pas de« germes» présents pour amorcer le processus de cristallisation. Ce
n'est que s'il y a un petit corps étranger, tel qu'un minuscule cristal de NaCl, que la
goutte d'eau va se prendre en un petit morceau de glace. Alors l'équilibre est tel que les
gouttes d'eau s'évaporent et que les cristaux de glace croissent. Ainsi, en un certain
point il y a une rapide disparition de l'eau et une rapide formation de glace. De même,
il peut y avoir des collisions directes entre les gouttes d'eau et la glace, au cours desquelles
l'eau surgelée adhère aux cristaux de glace, ce qui provoque sa cristallisation immédiate.
Donc, à un certain point du développement du nuage, il y a une accumulation rapide
de grosses particules de glace.
Quand les particules de glace sont assez lourdes, elles commencent à tomber à travers
l'air qui s'élève - elles deviennent trop lourdes pour être soutenues par le courant
ascendant. A mesure qu'elles descendent, elles entraînent un peu d'air avec elles et
donnent naissance à un courant descendant. Et, chose surprenante, il est facile de voir
qu'une fois le courant descendant amorcé, il va se maintenir de lui-même. Maintenant
l'air se dirige de lui-même vers le bas!
Remarquez que la courbe (d) de la Fig. 9-8 relative à la distribution réelle de tempéra-
ture dans le nuage n'a pas une aussi forte pente que la courbe (c), relative à l'air humide.
Donc, si de l'air humide tombe, sa température s'abaissera comme la pente de la courbe
(c) et descendra au-dessous de la température du milieu, s'il tombe assez bas, comme
155
l'indique la courbe (e) de la figure. A ce moment, il est plus dense que le milieu et continue
de descendre rapidement. Vous direz: «c'est le mouvement perpétuel. Vous prétendez
d'abord que l'air doit monter et quand il est en haut, vous prétendez tout aussi bien
que l'air doit descendre». Mais ce n'est pas le mouvement perpétuel. Quand la situation
est instable et que l'air chaud doit monter, alors évidemmenr quelque chose doit rem-
placer cet air chaud. Il est également vrai que l'air froid qui descend devrait remplacer
énergétiquement l'air chaud. Mais vous comprenez bien que cet air qui descend n'est pas
celui qui se trouvait là auparavant. Les arguments de tout à l'heure selon lesquels un
certain nuage, sans être entraîné, montait puis redescendait, étaient une sorte de casse-
tête. Il nous fallait la pluie pour maintenir le courant descendant, argument qui est
difficilement convaincant. Dès que vous comprenez qu'il y a une. masse d'air initial
mélangée à l'air ascendant, le raisonnement thermo-dynamique montre qu'il peut y
avoir une descente de l'air froid qui était, à l'origine, à haute altitude. Ceci explique
l'image de l'orage actif représentée sur la Fig. 9-9.
Quand l'air descend, la pluie commence à tomber du bas de l'orage. De plus, l'air
relativement froid se répand quand il arrive à la surface de la terre. Ainsi juste avant que
la pluie ne vienne, il y a un petit vent froid qui nous avertit de l'arrivée de l'orage.
Dans l'orage lui-même il y a des bouffées d'air rapides et irrégulières, il y a une énorme
turbulence dans le nuage, et ainsi de suite. Mais à la base nous avons un courant ascen-
dant, puis un courant descendant - en général un processus très compliqué.
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Sorlcq_ ·,·.': ·-2'':~'.:,~/'..'.,};~,~~'~-,~I~~!. ~~ ~1-~~~\_,~,. --~.- 'v.·~--~-'
Echelle horizontale o 112 1 • Ptu_ie
'Echelle du-veeteur re- ~ ·Neige
~présentant le courant UJO ··Cristaux de glace
156
La cellule apparaît comme sur la Fig. 9-10. Le courant ascensionnel s'arrête car il n'y a
plus assez d'air chaud pour le maintenir. La précipitation vers le bas continue un certain
temps, les dernières petites gouttes d'eau tombent et tout devient de plus en plus
calme - bien qu'il reste des petits cristaux de glace en haut dans l'air. Comme les vents
à haute altitude soufflent dans des directions différentes, le sommet du nuage se répand
généralement en forme d'enclume. La cellule atteint la fin de sa vie.
+ + +
+
+ +
Centre des +
charges
positives
(---------·IOC
Centre des
charges Direction du mouvement
négatives + -
>-----<----------1-----------oc
+ +
+
Gradient du potentiel
par temps normal
Domaine
Petit centre de charges
de pluie
positives dans une
région de forte pluie
Fig. 9-11. La répartition des charges électriques dans une cellule d'orage mOre.
(Rapport de l'U.S. Department of Commerce Weather Bureau, Juin 1949.]
La charge du bas du nuage est assez grande pour produire des différences de potentiel
de 20, ou 30, ou même 100 millions de volts entre le nuage et la terre - bien plus impor-
tantes que les 0,4 millions de volts entre le «ciel» et le sol dans une atmosphère
157
claire. Ces hautes tensions rendent l'air conducteur et créent des arcs électriques gigan-
tesques. Quand la décharge se produit les charges négatives du bas de l'orage sont
apportées sur la terre par la foudre.
Nous allons maintenant décrire plus en détail ce qui caractérise la foudre. Tout
d'abord il y a de grandes différences de potentiel, si bien que l'air devient conducteur.
Il y a des éclairs entre une partie d'un nuage et une autre partie d'un nuage, ou entre un
nuage et un autre nuage, ou entre un nuage et la terre. Dans chacune des décharges
indépendantes - c'est-à-dire, dans chaque éclair que vous pouvez voir - il y a une
charge transportée d'environ 20 ou 30 coulombs. Une question qui se pose est la
suivante: combien de temps faut-il au nuage pour régénérer les 20 ou 30 coulombs qui
sont emportés par un éclair? On peut le voir en mesurant, loin d'un nuage, le champ
électrique produit par le moment dipolaire du nuage. Dans de telles mesures, on observe
une décroissance brutale du champ au moment où la foudre éclate, puis un retour
à la valeur initiale suivant une loi exponentielle, avec une constante de temps qui est
légèrement différente selon les cas, mais qui est de l'ordre de 5 secondes. Il faut seulement
5 secondes à un orage pour reconstituer sa charge après un éclair. Ceci ne signifie pas
nécessairement qu'un nouvel éclair va se produire exactement toutes les S- secondes,
car évidemment la géométrie est changée, et ainsi de suite. Les éclairs se produisent
plus ou moins irrégulièrement, mais ce qui est important, c'est qu'il faut environ
5 secondes pour reconstituer les conditions initiales. Ainsi il y a un courant d'à peu près
4 ampères dans la machine génératrice de l'orage. Ce qui signifie que tout modèle fait
pour expliquer comment un orage engendre son électricité doit être une source pleine
de «jus» - ce doit être un mécanisme puissant et rapide.
Avant d'aller plus loin nous allons considérer quelque chose qui est presque certaine-
ment hors de propos, mais cependant intéressant, car cela montre l'effet d'un champ
électrique sur des gouttes d'eau. Nous disons que cela est peut-être hors de propos, car
il s'agit d'une expérience que l'on peut faire au laboratoire avec un courant d'eau, pour
montrer les effets assez forts du champ électrique sur des gouttes d'eau. Dans un orage
il n'y a pas de courant d'eau; il y a un nuage de glace en formation et de gouttes d'eau.
Aussi le problème des mécanismes en action dans un orage n'a probablement
158
rien à voir avec ce que l'on peut observer dans la simple expérience que nous allons
décrire. Si nous prenons un petit ajutage relié à un robinet d'eau et que nous le dirigions
presque verticalement vers le haut, comme sur la Fig. 9-12, l'eau sortira suivant un fin
courant qui finira par se rompre en une pluie de fines gouttelettes. Si nous introduisons
un champ électrique normalement au courant, près du robinet (en approchant une
baguette chargée, par exemple) la force du courant va changer. Avec un champ élec-
trique faible nous verrons que le courant se brise en un plus petit nombre de grosses
gouttes. Mais si nous appliquons un champ plus intense, le courant se brise en beaucoup,
beaucoup de fines gouttelettes - plus petites qu'avant.* Avec un champ électrique faible,
il y a une tendance à empêcher la rupture du courant en gouttes. Avec un champ plus
intense cependant, il y a une tendance accrue à la division en gouttes.
Nous voudrions décrire deux théories qui ont été créées pour rendre compte de la
séparation des charges dans un orage. Toutes les théories s'appuient sur l'idée qu'il doit
y avoir une certaine charge sur les particules de la précipitation et une charge différente
dans l'air. Alors, grâce au mouvement des particules de la précipitation - l'eau ou la
glace - dans l'air, il y a séparation des charges électriques. La seule question est donc:
comment débute l'électrisation des gouttes? Une des plus anciennes théories est appelée
la théorie de la «goutte brisée». Quelqu'un a découvert que si une goutte d'eau se brise
en deux parties dans un courant d'air, il y a une charge positive sur l'eau et une charge
négative dans l'air. Cette théorie de la goutte brisée présente plusieurs inconvénients
parmi lesquels le plus grave est que le signe est faux. En outre, dans un grand nombre
d'orages de la zone tempérée qui comportent des éclairs, les effets de précipitation à
haute altitude se produisent dans la glace, et non dans l'eau.
A partir de ce que nous venons de dire, nous remarquons que si nous pouvions ima-
giner une raison pour que la charge soit différente en haut et en bas d'une goutte et si
nous pouvions aussi trouver
• Un moyen commode d'observer la taille des gouttes est de laisser le courant tomber sur une
grande plaque métallique mince. Les plus grosses gouttes font un bruit plus fort.
159
une raison pour que les gouttes dans un courant d'air de grande vitesse se brisent en
deux parties inégales - une grande devant et une plus petite derrière, à cause du mouve-
ment dans l'air ou d'autre chose - alors nous aurions une théorie. (Différente de toute
théorie connue!) Alors les petites gouttes ne tomberaient pas dans l'air aussi vite que les
grosses, en raison de la résistance de l'air, et nous aurions réalisé une séparation des
charges. Vous voyez donc qu'il est possible de cuisiner toutes sortes de possibilités.
Goutte qui tombe
Une des théories les plus ingénieuses, qui est beaucoup plus satisfaisante à de nom-
breux égards que la théorie de la «goutte brisée» est due à C. T. R. Wilson. Nous la
décrirons, comme le fit Wilson, en nous référant à des gouttes d'eau, mais le même
phénomène s'appliquerait aussi à la glace. Imaginons une goutte d'eau tombant dans
un champ électrique d'environ 100 volts par mètre vers la terre chargée négativement.
La goutte aura un moment électrique dipolaire incfuit - le bas de la goutte étant positif,
le haut négatif, comme cela est représenté sur la Fig. 9-13. Et aussi, il y a dans l'air les
«noyaux» dont nous avons parlé plus haut - les gros ions au mouvement lent. (Les ions
rapides n'ont pas d'effet important ici.) Imaginons qu'en tombant, une goutte s'approche
d'un gros ion. Si cet ion est positif, il est repoussé par le bas de la goutte, chargé positive-
ment, et est chassé. Donc il ne se fixe pas à la goutte. Si cet ion cependant venait à
s'approcher du haut de la goutte, il pourrait se fixer sur la partie supérieure négative.
Mais puisque la goutte tombe dans l'air, il se produit un courant d'air par rapport à
elle, qui se dirige vers le haut et qui en éloigne les ions si leur mouvement dans l'air est
assez lent. Ainsi les ions positifs ne peuvent pas non plus se fixer en haut de la goutte.
Ceci, comme vous le voyez, s'appliquerait seulement aux ions lents et gros. Les ions
positifs de ce type ne se fixeront ni devant, ni derrière la goutte qui tombe. D'autre
part, quand une goutte s'approche de gros ions lents négatifs, ceux-ci sont attirés et
capturés. La goutte va acquérir une charge négative - le signe de cette charge ayant
été déterminé par la différence de potentiel initiale sur toute la terre - et nous obtenons
bien là le bon signe. La charge négative va être amenée vers le bas du nuage par les
gouttes, et les ions positifs qui sont laissés en arrière vont être soufflés vers le haut du
nuage par les divers courants ascensionnels. La théorie paraît assez satisfaisante, et au
moins elle donne le signe exact. De même elle ne dépend pas de la présence de gouttes
liquides. Nous verrons, en étudiant la polarisation d'un diélectrique, que des morceaux
de glace donneront le même résultat. Il apparaîtra sur eux aussi des charges positives
et négatives à leurs extrémités quand ils sont placés dans un champ électrique.
160
Il reste cependant certains problèmes, même avec cètte théorie. D'abord, la charge
totale mise en jeu dans un orage est immense. Après un court moment la réserve de _gros
ions serait épuisée. Aussi Wilson et d'autres durent supposer qu'il y a des sources supplé-
mentaires de gros ions. Dès que la séparation des charges commence, des champs
électriques très intenses prennent naissance, et dans ces grands champs il peut y avoir
des endroits où l'air devient ionisé. S'il y a un point portant une charge élevée, ou tout
autre petit objet comme une goutte, celui-ci peut concentrer le champ assez-pour provo-
quer une« décharge à aigrette». Quand il y a un champ électrique assez intense - disons
qu'il est positif - les électrons tombent dans le champ et vont acquérir une très grande
vitesse entre les collisions. Leur vitesse sera telle qu'en heurtant un ·autre atome ils lui
arracheront des électrons, et laisseront des charges positives derrière eux. Ces nouveaux
électrons sont accélérés eux aussi et entrent en collision avec d'autres électrons. Ainsi
se produit une sorte de réaction en chaîne ou d'avalanche, et il y a une rapide accumu-
lation d'ions. Les charges positives sont laissées près de leurs positions initiales, si
bien que l'effet total est de distribuer la charge positive en un point, dans une région
autour de ce point. Alors bien entendu, il n'y a plus de champ intense et le processus
s'arrête. Telle est la caractéristique d'une décharge à aigrette. Il est possible que les
champs deviennent assez intenses dans le nuage pour produire un peu de décharge à
aigrette; il peut y avoir aussi d'autres mécanismes, une fois que la chose a commencé,
pour produire une forte ionisation. Mais personne ne sait exactement comment cela se
passe. Donè, l'origine de la foudre n'est vraiment pas complètement comprise. Nous
savons qu'elle provient ges orages. (Et nous savons évidemment que le tonnerre provient
de la fouâre - de l'énergie thermique libérée par la décharge.)
9-6 La foudre
La première mise en évidence de ce qui se passe dans un éclair fut obtenue sur des
photographies prises avec un appareil tenu à la main et auquel on imprimait un mouve-
ment de va-et-vient, l'obturateur étant maintenu ouvert, et en visant l'endroit où l'éclair
était attendu. Les premières photographies obtenues de cette façon montrèrent claire-
ment que les éclairs sont constitués en général de multiples décharges le long du même
chemin. Plus tard, on mit au point l'appareil« Boys», composé de deux lentilles montées
aux deux extrémités du diamètre d'un disque en rotation rapide. L'image donnée par
chaque lentille se déplace sur la pellicule - l'image est étalée en fonction.du temps. Si
par exemple l'éclair se répète, il y aura deux images côte à côte. En comparant les
images des deux lentilles, il est possible de déceler les détails de la succession des éclairs.
La Fig. 9-14 montre une photographie prise avec un appareil «Boys».
161
Fig. 9-14. Photographie d'un éclair
prise avec un appareil «Boys». [D'après
Schonland, Malan et Collens, Proc. Roy.
Soc. London, Vol. 152 (1935) .]
162
Fig. 9-15. La formation d'un «pré-
7 +7 /+ /+/+/+/ +7~/-t/+/ +/+ curseur».
Terre
Le courant dans un éclair est d'environ 10.000 ampères à son maximum, et il trans-
porte environ 20 coulombs.
Mais nous n'en avons pas encore fini. Après un temps, de peut-être quelques centièmes
de seconde, quand l'éclair de retour a disparu, un autre précurseur descend. Mais,
cette fois-ci, il n'y a pas de pauses. On l'appelle le «précurseur obscur» et il descend
tout le long - de haut en bas d'un seul coup. Il descend à toute vapeur, exactement sur
l'ancienne trace, car il y reste assez de débris pour que ce chemin soit le plus facile. Le
nouveau précurseur est de nouveau plein de charges négatives. A l'instant où il touche le
sol- zing ! - il se produit un éclair de retour s'élevant directement le long du chemin. Vous
voyez donc la foudre éclater encore, et encore, et encore. Il arrive qu'elle n'éclate qu'une
ou deux fois, ou bien cinq ou dix fois- on l'a même vue éclater jusqu'à 42 fois sur le même
chemin - mais toujours en succession rapide.
Quelquefois les choses se compliquent encore davantage. Par exemple, après l'une de
ses pauses, le précurseur peut donner naissance à une branche, en avançant de deux pas
à la fois-· tous deux vers le sol, mais dans des directions un peu différentes, comme on le
voit sur la Fig. 9-15. Ce qui se passe alors, dépend du fait que l'une des branches atteigne
ou non le sol nettement avant l'autre. Si c'est le cas, l'éclair de retour brillant (de charges
négatives se déversant dans le sol) remonte le long de la branche qui touche le sol, et
quand, sur sa route vers le nuage, il atteint et dépasse l'embranchement, un éclair bril-
lant semble descendre le long de l'autre branche. Pourquoi? Parce que les charges néga-
tives se déversent (dans le sol), et c'est ce qui rend l'éclair lumineux. Ces charges se
déplacent à partir du sommet de la branche secondaire, vidant des tronçons successifs
de plus en plus longs de cette branche, de sorte que l'éclair semble circuler vers le bas
de la branche, en même temps qu'il s'élève vers le nuage. Si cependant, il arrive que l'une
de ces branches supplémentaires atteigne le sol presqu'en même temps que le précurseur
principal, il peut quelquefois arriver que le précurseur obscur du second éclair emprunte
la
163
.j. + /
Fig. 9-16. L'éclair de retour remonte le
long du chemin tracé par le précurseur.
seconde branche. Alors vous voyez le premier éclair principal se produire à un endroit et
le second, à un autre. C'est une variante de l'idée initiale.
Notre description est également trop simplifiée pour la région très proche du soL
Quand le précurseur arrive à moins d'une centaine de mètres du sol, il y a des indices
qu'une décharge s'élève du sol à sa rencontre. Il est probable que le champ devient
assez intense pour que se produise une décharge en aigrette. Si par exemple il y a un
objet pointu, tel qu'un immeuble ayant une pointe sur le toit, alors quand le précurseur
descend, près de cette pointe, les champs sont si intenses qu'une décharge s'amorce de
la pointe et s'élève vers le guide. La foudre tend à frapper un tel point.
On savait apparemment depuis très longtemps, que la foudre frappe les objets élevés.
Il y a une citation d'Artabane, le conseiller de Xerxès, qui conseille son maître sur un
projet d'attaque contre les Grecs - pendant la campagne de Xerxès pour placer le
monde connu tout entier sous le pouvoir des Perses. Artabane dit: «vois comme la
divinité frappe de la foudre les animaux qui sont de grande taille sans permettre qu'ils
en fassent parade, tandis qu'elle n'en veut nullement aux petits; vois comme elle lance
ses traits contre les édifices les plus hauts et les arbres les plus élevés». Puis il en
explique la raison: «or la divinité aime rabaisser tout ce qui s'élève.»
164
10
Les diélectriques
165
Le fait expérimental est que si nous plaçons un morceau de matière isolante telle que
du plexiglas ou du verre entre les plateaux, nous trouvons que la capacité est plus élevée.
Ceci signifie, évidemment, que la tension est plus faible pour la même charge. Mais la
diffÙence de potentiel est l'intégrale du champ électrique à travers le condensateur,
nous devons donc en conclure qu'à l'intérieur du condensateur, le champ électrique
est diminué alors même que les charges sur les plateaux restent inchangées.
~~~±-7±-'l~=ri-
166
fo; mais la distance sur laquelle nous avons à intégrer pour obtenir la tension (la diffé-
rence de potentiel) est diminuée. La tension est
V = !!_ (d - b ).
Eo
L'équation qui en résulte pour la capacité est semblable à l'Eq. (10.1) avec (d-b) à la
place de d:
EoÂ
(10.3)
C = d[I - (b/d)]
La capacité est multipliée par un facteur qui dépend de (b/d), fraction du volume qui est
occupée par le conducteur.
Ceci nous donne un modèle évident pour ce qui arrive avec un diélectrique - c'est-
à-dire qu'à l'intérieur de la matière diélectrique il y a de nombreuses petites couches de
matière conductrice. L'ennui, avec un tel modèle, c'est qu'il contient un axe particulier,
la normale aux couches, alors que la plupart des diélectriques n'ont pas un tel axe.
Cette difficulté peut cependant être éliminée si on suppose que tous les isolants con-
tiennent de petites sphères conductrices séparées les unes des autres par de l'isolant,
comme le montre la Fig. 10-3. L'existence de la constante diélectrique est expliquée par
l'effet des charges qui seraient induites sur chaque sphère. Ceci est l'un des plus anciens
modèles physiques des diélectriques utilisés pour expliquer le phénomène observé par
Faraday. Plus précisément, on supposait que chacun des atomes de la matière était un
conducteur parfait, mais isolé des autres. La constante diélectrique K devait dépendre
de la fraction d'espace qui était occupée par les sphères conductrices. Ce n'est cependant
pas le modèle utilisé aujourd'hui.
167
------
•+
Dans un champ électrique, le noyau sera donc attiré dans un sens et les électrons dans
l'autre. Les orbites des électrons, ou leur figure ondulatoire (ou toute autre image utilisée
en mécanique quantique) seront quelque peu déformées comme le montre la Fig. 10-4;
le centre de gravité des charges négatives sera déplacé et ne coïncidera plus avec la
charge positive du noyau. Nous avons déjà discuté de telles distributions de charges. Si
on regarde avec un peu de recul, une telle configuration neutre est équivalente en
première approximation à un petit dipôle.
Il semble raisonnable, si le champ n'est pas trop énorme, que la valeur du moment
dipolaire induit soit proportionnelle au champ. Cela signifie qu'un champ faible déplacera
un petit peu les charges et qu'un champ intense les déplacera davantage - et proportion-
nellement au champ - à moins que le déplacement devienne trop grand. Pour le reste de
ce chapitre, le moment dipolaire sera supposé exactement proportionnel au champ.
Nous allons supposer maintenant que dans chaque atome il y a des charges q séparées
par une distance ô, de sorte que qô est le moment dipolaire par atome. (Nous utilisons ô
parce que nous avons déjà utilisé d pour la distance entre les plateaux.) S'il y a N atomes
par unité de volume, il y aura un moment dipolaire par unité de volume égal à Nqô.
Ce moment dipolaire par unité de volume sera représenté par un vecteur, P. Il est
inutile de dire qu'il aura la direction des moments dipolaires individuels, c'est-à-dire
la direction de la séparation ô entre les charges.
P = Nqô. (10.4)
En général, P variera de place en place dans le diélectrique. Cependant, en tout point
de la matière, Pest proportionnel au champ électrique E. La constante de proportionna-
lité, qui dépend de la facilité avec laquelle les électrons se déplacent, va dépendre de la
nature des atomes qui se trouvent dans le matériau.
168
Ce qui déterminera effectivement la façon dont se comporte cette constante de pro-
portionnalité, jusqu'à quel point elle est constante pour des champs très grands et ce
qui se passe à l'intérieur de différents matériaux, nous en discuterons plus tard. Pour
l'instant, nous supposerons simplement qu'il existe un mécanisme par lequel un moment
dipolaire est induit, qui est proportionnel au champ électrique.
...~ _--_-_-_---_-_-__--------=-----=-----=---_-_--_-_-_--_-_-_---"_.): =*
li dans un champ uniforme. Les charges
positives sont déplacées de ô par rapport
aux charges négatives.
Cette charge peut se calculer comme suit. Si A est l'aire du plateau, le nombre
d'électrons qui apparaissent à la surface est le produit de A par N, le nombre par unité
de volume, et par le déplacement c5 que nous supposons ici perpendiculaire à la surface.
La charge totale s'obtient en multipliant par la charge électronique qe. Pour obtenir
la densité superficielle de charge de polarisation induite sur la surface, on divise par A.
La valeur de la densité superficielle de charge est
<Tpo1 = Nq. 8.
Mais ceci est exactement égal au module du vecteur polarisation P, Eq. (10.4):
<Tpo1 =P. (10.5)
E = O!ibre - P. (10.7)
Eo
Cette équation ne nous dit pas ce qu'est le champ électrique, sauf si nous connaissons P.
Mais nous supposons ici que P dépend de E - qu'il est en fait proportionnel à E. Cette
proportionnalité s'écrit habituellement
P = XEoE. (10.8)
qui nous donne le facteur 1/(1 +x) par lequel le champ est réduit.
La tension entre les plateaux est l'intégrale du champ électrique. Comme le champ
est uniforme, cette intégrale est le produit de Epar la distance des plateaux d. Nous avons
V = Ed = O'Jibre d
Eo(l + X)
La charge totale sur le condensateur est O'Iibre A, de sorte que la capacité définie par
(10.2) devient
c = EoA(l + X) = KEo . (10.10)
d d
Nous avons expliqué les faits observés. Quand un condensateur est rempli par un
diélectrique, sa capacité est multipliée par le facteur
K = 1 +X, (10.11)
qui est une propriété du matériau. Notre explication ne sera évidemment pas complète
tant que nous n'aurons pas expliqué - comme nous le ferons plus tard - comment se
produit la polarisation atomique.
170
Considérons maintenant quelque chose d'un petit peu plus compliqué - le cas où la
polarisation P n'est pas partout la même. Comme nous l'avons noté précédemment, si
la polarisation n'est pas constante, nous devons en général nous attendre à trouver une
densité de charge dans le volume, parce qu'il peut y avoir plus de charge qui entre
d'un côté d'un petit élément de volume que de charge qui en sort de l'autre côté.
Comment trouver la charge gagnée ou perdue par un petit volume?
Calculons d'abord la charge qui traverse une surface imaginaire quand la matière
est polarisée. La charge qui traverse une surface est P fois l'aire si la polarisation est
normale à la surface. Évidemment, si la polarisation est tangente à la surface, aucune
charge ne la traverse.
Avec les mêmes raisonnements que ceux que nous avons déjà utilisés; il est facile
de montrer que la charge qui traverse n'importe quel élément de surface est propor-
tionnelle à la composante de P normale à la surface. Comparez les Fig. 10-6 et 10-5.
Vous voyez que l'Eq. (10.5) doit s'écrire, dans le cas général
O'pol = P · n. (10.12)
Nous pouvons attribuer LiQpol à une distribution de charge volumique avec la densité
et ainsi
Ppol
171
Fig. 10-7. D'une polarisation non uni-
forme P peut résulter une charge totale à
l'intérieur d'un diélectrique.
Nous obtenons une sorte de théorème de Gauss qui relie la densité de charge d'un
morceau de diélectrique polarisé au vecteur polarisation P. Vous pouvez vous rendre
compte qu'il est en accord avec le résultat que nous avons obtenu pour la charge super-
ficielle de polarisation ou pour le diélectrique dans un condensateur plan. En utilisant
l'Eq. (I0.15) avec la surface de Gauss de la Fig. 10-1, l'intégrale de surface donne PD.A,
et la charge intérieure est CTpoJb.A et on trouve encore a= P.
Comme on l'a fait en électrostatique pour le théorème de Gauss, on peut mettre l'Eq.
(I0.15) sous forme différentielle - en utilisant le théorème mathématique de Gauss:
j8
P·nda = fv V ·PdV.
On trouve
Pval = -V· P. (10.16)
S'il existe une polarisation non uniforme, sa divergence donne la densité de charge
apparaissant dans la matière. Il faut insister sur le fait qu'il s'agit d'une densité de
charge parfaitement réelle; nous ne l'appelons «charge de polarisation» que pour nous
rappeler la façon dont elle est apparue.
p est ici la densité de toutes les charges électriques. Comme il n'est pas facile de garder
la trace des charges de polarisation, il est commode de séparer p en deux parties.
Appelons encore Ppol les charges dues aux polarisations non uniformes et Plibre toutes
les autres.
172
est habituellement la charge qu'on apporte sur les conducteurs, ou en des endroits
P!ibre
connus de l'espace. L'équation (10.17) devient alors
= Plibre. (10.18)
Eo
L'équation pour le rotationnel de E n'est évidemment pas modifiée:
V XE= O. (10.19)
Par conséquent, les Eq. (10.18) et (10.19) s'écrivaient sous une forme apparemment
très simple:
V· D = Plibre V XE= O. (10.22)
Peut-on les résoudre? Seulement dans le cas où on donne une troisième équation pour
la relation entre D et E. Quand l'Eq. (10.8) est valable, cette relation est
173
où " est encore une autre constante pour décrire la propriété des corps diélectriques. On
l'appelle la «permittivité». (Vous voyez maintenant pourquoi nous avons t 0 dans nos
équations, c'est la« permittivité du vide».) Évidemment,
Nous considérons aujourd'hui ces questions d'un autre point de vue, à 5avoir que
nous avons des équations plus simples dans le vide, et que si nous voulons expliciter
dans chaque cas toutes les charges, quelle que soit leur origine, les équations sont tou-
jours correctes. Si nous ·voulons séparer certaines charges par commodité, ou parce que
nous ne voulons pas entrer dans les détails, nous pouvons alors, si nous le voulons,
écrire nos équations sous toute autre forme commode.
Un autre point doit être souligné. Une équation telle que D. tE est un essai de
description d'une propriété de la matière. Mais la matière est compliquée et, en fait,
une telle équation n'est pas correcte. Par exemple, si E devient trop grand, D n'est plus
proportionnel à E. Pour certaines substances, la proportionnalité cesse d'être vraie avec
des champs relativement faibles. D'autre part, la «constante» de proportionnalité peut
dépendre de la vitesse de variation E en fonction du temps. Ce genre d'équation est par
conséquent une sorte d'approximation, comme la loi de Hooke. Ce ne peut être une
équation essentielle et fondamentale. Par contre, nos équations fondamentales pour E,
(10.17) et ( 10.19), représentent ce que nous comprenons le plus complètement et le plus
profondément de l'électrostatique.
et V XE= O. (10.26)
Si maintenant on considère que K est partout le même, les deux dernières équations
peuvent s'écrire
Plibre
V · (KE) et V X (KE) = O. (10.27)
fo
Nous avons par conséquent les mêmes équations pour KE et pour E0 , elles ont donc
la solution KE = E0 . En d'autres termes, le champ est partout 1/K fois plus petit
174
que lorsqu'il n'y a pas de diélectrique. Comme la différence de potentiel est la circula-
tion du champ, le potentiel est divisé par le même facteur. Comme on a pris les mêmes
charges sur les électrodes du condensateur dans les deux cas, l'Eq. (10.2) nous apprend
que la capacité, dans le cas d'un diélectrique partout uniforme, est multipliée par le
facteur K.
Demandons-nous quelle serait la force entre deux conducteurs chargés dans un diélec-
trique. Nous considérons un liquide diélectrique qui est homogène partout. Nous
avons vu précédemment qu'une façon d'obtenir la force est de différencier l'énergie par
rapport à la distance convenable. Si les conducteurs ont des charges égales et opposées,
l'énergie U = Q2/2C où C est leur capacité. En utilisant le principe du travail virtuel,
toute composante est obtenue par différentiation; par exemple,
F = - aU = - gz !_ (_!_). (10.28)
"' ax 2 ax C
Comme le diélectrique multiplie la capacité par un facteur K, toutes les forces se trouvent
divisées par le même facteur.
Il faut insister sur un point. Ce que nous avons dit n'est vrai que si le diélectrique est
liquide. Tout mouvement de conducteµrs plongés dans un diélectrique solide change les
conditions de tension mécanique du diélectrique et altère ses propriétés électriques,
tout en produisant une variation d'énergie mécanique dans le diélectrique. Déplacer les
conducteurs dans un liquide ne change pas le liquide. Le liquide est déplacé mais ses
caractéristiques électriques sont inchangées.
Un grand nombre de vieux livres d'électricité commencent par dire que la loi «fonda-
mentale» est celle de la force entre deux charges
(10.29)
point de vue qui ne convient pas du tout. Pour commencer, cette loi n'est pas vraie en
général; elle n'est vraie que dans un monde rempli de liquide. Deuxièmement, elle
dépend du fait que K est une constante, ce qui n'est qu'approximativement vrai pour
la plupart des matériaux réels. Il vaut bien mieux commencer par la loi de Coulomb
pour des charges dans le vide, qui est toujours valable (pour des charges stationnaires).
Que se passe-t-il dans un solide? C'est un problème très difficile qui n'a pas été résolu,
parce qu'en un sens il est indéterminé. Si vous mettez des charges à l'intérieur d'un
diélectrique solide, il y a beaucoup de sortes de pressions et de tensions. Vous ne pouvez
pas traiter le travail virtuel sans faire intervenir aussi l'énergie mécanique nécessaire
pour comprimer le solide, et c'est un sujet difficile, de façon générale, que de faire une
distinction définie entre les forces électriques et les forces mécaniques dues au matériau
solide lui-même. Heureusement, personne en fait n'a jamais besoin de connaître la
réponse à la question posée. On peut quelquefois vouloir savoir quelle sera la valeur
des tensions qui vont s'exercer dans un solide, et ça on peut le calculer. Mais c'est
beaucoup plus compliqué que le résultat simple que nous avons obtenu pour les liquides.
Dans la théorie des diélectriques, il se pose un problème étonnamment compliqué, qui
est le suivant: pourquoi un objet chargé attire-t-il des petits morceaux de diélectrique?
Quand vous vous peignez
175
par temps sec, votre peigne est capable d'attirer de petits morceaux de papier. S'il vous
est arrivé de réfléchir à ce problème, vous avez probablement supposé que le peigne
porte une charge et que le papier porte la charge opposée. Mais au départ, le papier est
électriquement neutre. Il ne possède aucune charge et pourtant il est attiré. Il est vrai
que parfois le papier se soulève jusqu'à atteindre le peigne et puis s'en sépare, immédiate-
ment repoussé après qu'il l'ait ·touché. La raison en est évidemment que lorsque le
papier touche le peigne, il y ramasse quelques charges négatives et qu'alors les charges
semblables se repoussent. Mais cela ne répond pas à la question posée initialement.
Pourquoi le papier commence-t-il par se diriger vers le peigne?
Comme le montre la Fig. 10-8, un diélectrique est toujours poussé d'une région où le
champ est faible vers une région où le champ est plus grand. Effectivement, on peut
montrer que pour de petits objets la force est proportionnelle au gradient du carré du
champ électrique. Pourquoi dépend-elle du carré du champ? Parce que les charges de
polarisation induites sont proportionnelles aux champs, et pour des charges données
les forces sont proportionnelles au champ. Cependant, comme nous venons de le dire,
il n'y aura de force résultante que si le carré du champ varie d'un point à l'autre. Ainsi la
force est proportionnelle au gradient du carré du champ. La constante de proportion-
nalité dépend, entre autres, de la constante diélectrique de l'objet, et elle dépend aussi
de la forme et des dimensions de l'objet.
Il y a un problème lié à ceci, dans lequel la force sur un diélectrique peut être évaluée
d'une manière tout à fait précise. Soit un condensateur plan avec une plaque diélectrique
dont une partie seulement est placée entre les plateaux, comme le montre la Fig. 10-9,
il existe une force qui dirige la plaque vers l'intérieur. L'examen détaillé de la force est
compliqué; elle dépend de la non-uniformité du champ près des bords du diélectrique et
des plateaux. Cependant, si
176
Conducteur
F---
au v -ac .
+-'-
2
(10.30)
"' - ÔX 2 ÔX
Nous n'avons plus qu'à trouver comment la capacité varie en fonction de la position de
la plaque diélectrique.
Soit L la longueur totale des plateaux, W leur largeur, d l'épaisseur du diélectrique
et l'espace entre les plateaux, et x la longueur dont le diélectrique a été enfoncé. La
capacité est le rapport de la c;harge libre totale sur les plateaux à la tension entre les
plateaux. Nous avons vu plus haut que pour une tension donnée V la densité super-
ficielle de charges libres est KE0 V/d. La charge totale sur les plateaux est donc
Q = KE~V xW + E~ (L - x)W,
EoW
C = d (Kx +L - x). (10.31)
D'après (10.30), nous avons
V2 EoW
F,, = 2 d (K - 1). (10.32)
Seulement cette équation n'est pas particulièrement utile, sauf s'il se trouve que vous
avez besoin de connaître la force en de telles circonstances. Nous voulions seulement
montrer que la théorie de l'énergie peut souvent être utilisée pour éviter d'énormes
complications quand on calcule les forces sur des matériaux diélectriques - comme
cela aurait été le cas ici.
Notre discussion de la théorie des drnectriques ne concernait que les phénomènes
électriques, en admettant que le diélectrique avait une polarisation proportionnelle au
champ électrique. Quand on a compris l'origine des constantes diélectriques d'un point
de vue atomique, on peut utiliser les mesures électriques des constantes diélectriques en
diverses circonstances pour en tirer des informations détaillées sur la structure atomique
ou moléculaire. Cet aspect sera partiellement traité dans le prochain chapitre.
177
Il
( 11. 1)
Nous avons déjà discuté l'application de cette équation; maintenant nous devons
discuter le mécanisme par lequel la polarisation prend naissance quand il y a un champ
électrique à l'intérieur d'un matériau. Nous commencerons par l'exemple le plus simple
- la polarisation des gaz. Mais même les gaz présentent déjà des complications: il y en a
de deux types. Les molécules de certains gaz, comme l'oxygène dont la molécule est
formée d'une paire symétrique d'atomes, n'ont pas de moment dipolaire permanent.
Mais les molécules de certains autres, comme la vapeur d'eau (dont la molécule est
formée d'un arrangement non symétrique d'atomes d'hydrogène et d'oxygène) sont
porteuses d'un moment dipolaire électrique permanent. Comme nous l'avons fait
remarquer aux chapitres 6 et 7, il y a dans la molécule de vapeur d'eau une charge
moyenne positive sur les atomes d'hydrogène et une négative sur ceux d'oxygène. Du
fait que le centre de gravité des charges négatives et le centre de gravité des charges posi-
tives ne coïncident pas, la
178
(o}
~0
Fig. 11-1. (a) Une molécule d'oxygène
charges·- avec un moment dipolaire nul. (b) La
Centre des molécule d'eau a un moment dipolaire
charges + permanent p 0 .
(b)
179
Le premier terme est le produit de la masse de l'électron par son accélération et le second
est une force de rappel, alors que le membre de droite est la force due au champ élec-
trique extérieur. Si le champ électrique varie avec la fréquence w, l'Eq. (11.2) admet
comme solution
q,E
X= ' (11.3)
m(w~ - wZ)
qui a pour fréquence de résonance w = ro0 • Quand nous avons trouvé cette solution
précédemment, nous l'avons interprétée en disant que ro0 était la fréquence à laquelle
la lumière (dans le domaine optique ou ultraviolet suivant les atomes) était absorbée.
Pour notre propos cependant, nous nous intéressons seulement au cas des champs
constants, c'est-à-dire, à w = 0, donc nous pouvons négliger le terme d'accélération
dans (11.2) et nous trouvons que le déplacement est
q.E
X=--· (11.4)
mw~
Ceci nous montre que le moment dipolaire p d'un atome unique est
q;E
p = q,x = - - . (11.5)
mw~
Dans cette théorie le moment dipolaire p est vraiment proportionnel au champ élec-
trique.
On écrit en général (11.6)
p = aEoE.
(Ici encore Eo est introduit pour des raisons historiques.) La constante a est appelée la
polarisabilité de l'atome et a les dimensions de L3. C'est une mesure de la facilité avec
laquelle on peut induire un moment dipolaire dans un atome par un champ électrique.
Comparant (11.5) et (11.6) notre simple théorie nous donne
q~ 4?re 2
Cl.=
mw 2 ·
(11. 7)
Eomw~ 0
S'il y a N atomes par unité de volume, la polarisation P - moment dipolaire par unité
de volume - est donnée par
P = Np = NaeoE. (11.8)
K - 1 = _!_ = Na (11.9)
EoE
ou, tenant compte de (11. 7),
K-1 (11.10)
180
A partir de l'Eq. (11.9) nous devrions prévoir que la constante diélectrique K des différents
gaz dépend de la densité du gaz et de la fréquence w 0 de son absorption optique.
Notre formule est, évidemment, seulement une très grossière approximation, car dans
l'Eq. (11.2) nous avons choisi un modèle qtii ne tient pas compte des complications de
la mécanique quantique. Par exemple, nous avons supposé qu'un atome avait une seule
fréquence de résonance, alors qu'en fait il y en a plusieurs. Pour calculer proprement la
polarisabilité a des atomes nous devons appliquer la théorie quantique complète, mais
les idées classiques exposées ci-dessus nous donnent une approximation raisonnable.
Voyons si nous pouvons déterminer l'ordre de grandeur exact de la constante diélec-
trique de certaines substances. Essayons sur l'hydrogène. Nous avons déjà (chapitre 38,
Vol. I) évalué que l'énergie nécessaire pour ioniser un atome d'hydrogène devait être
approximativement
(li.li)
Pour évaluer la fréquence propre w 0 nous pouvons poser cette énergie égale à hw0 -
énergie d'un oscillateur atomique de fréquence propre ûJo. Nous obtenons
1 me 4
Wo ""'Ïha ·
Si nous portons maintenant cette valeur de w 0 dans l'Eq. ( 11. 7), nous trouvons pour la
polarisabilité électronique
a ""' 16?T'[!:2 J. (11.12)
Nous voyons que notre théorie est presque exacte. Nous ne pouvons nous attendre à
mieux, car les mesures ont bien sûr été faites sur de l'hydrogène normal qui comprend
des molécules diatomiques et non des atomes uniques. Nous ne devons pas être surpris
que la polarisation des atomes dans une molécule ne soit pas exactement égale à celle
des atomes séparés. L'effet moléculaire, cependant, n'est pas vraiment important. Un
calcul quantique exact de a pour les atomes d'hydrogène donne un résultat d'environ
12 %plus élevé que (11.12) (le 16 n est changé en 18 n), et par suite prévoit une constante
diélectrique un peu plus proche de celle qu'on observe. En tout cas il est clair que notre
modèle de diélectrique est franchement bon.
Une autre preuve de notre théorie consiste à essayer l'Eq. (11.12) sur des atomes
dont la fréquence d'excitation est plus élevée. Par exemple il faut environ 24,5 volts pour
arracher un
181
électron de l'atome d'hélium, au lieu des 13,5 volts nécessaires à l'ionisation de l'atome
d'hydrogène. Nous devrions donc nous attendre à ce que la fréquence d'absorption Wo
de l'hélium soit environ le double de celle de l'hydrogène et qu'a en soit le quart. Nous
prévoyons que
vous voyez donc que nos prévisions grossières s'avèrent être du bon ordre de grandeur.
Nous avons donc compris ce qu'était la constante diélectrique d'un gaz non polaire,
mais seulement qualitativement, car nous n'avons pas encore appliqué une théorie
atomique correcte du mouvement des électrons atomiques.
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~
' 1 Po
{b)
182
ne se produit pas ainsi. Aux températures et pour des champs électriques ordinaires les
collisions des molécules dans leur agitation thermique les empêchent de s'aligner com-
plètement. Mais il demeure un certain alignement global, et donc, une certaine polarisa-
tion (voir Fig. 11-2). La polarisation qui se produit peut être calculée par les méthodes
de mécanique statistique que nous avons décrites au chapitre 40 du Vol. 1.
E
+q\(I)
d-q (2) Fig. 11-3. L'énergie d'un dipôle Po
dans un champ E est -p 0 . E.
Pour appliquer cette méthode nous devons connaître l'énergie d'un dipôle dans un
champ électrique. Considérons un dipôle de moment p0 dans un champ électrique,
comme sur la Fig. 11-3. L'énergie de la charge positive est q\b(l), et l'énergie de la
charge négative est - q<t>(2). Ainsi l'énergie du dipôle est
(l l.16)
Pour les températures et les champs ordinaires, l'exposant est petit, aussi pouvons-nous
faire une approximation en développant l'exponentielle:
183
Nous pouvons trouver n0 en intégrant (11.17) sur toutes les directions; le résultat doit
être N, nombre total de molécules par unité de volume. La valeur moyenne de cose sur
toutes les directions est nulle, donc l'intégrale est égale au produit de n0 par l'angle solide
total 4n. Nous obtenons
N
no=-· (11.18)
47r
Nous voyons d'après (11.17) qu'il y aura plus de molécules parallèles au champ
(cose= 1) que d'antiparallèles (cose= -1). Donc, dans tout petit volume contenant
beaucoup de molécules, il y aura un moment dipolaire total par unité de volume - c'est-
à-dire une polarisation P. Pour calculer P, nous devons avoir le vecteur somme de tous
les moments moléculaires par unité de volume. Puisque nous savons que le résultat sera
dans la direction de E, nous n'avons qu'à sommer les composantes suivant cette direc-
tion (les composantes normales à E donneront une somme nulle):
K- (11.21)
184
K'-1
0.004 I
+./
;'
0003 /
/
/
/
0.002
/
/
/
0.001 /
/
Fig. 11-4. Mesures expérimentales de
O~~~-,,~~~~~...,,.,,~~~~
o 0.001 0.002 0003 la constante diélectrique de la vapeur
1/T (oK-1) d'eau à différentes températures.
185
électronique. Mais dans une substance dense, P peut être grande, et le champ agissant
sur un atome individuel sera influencé par la polarisation des atomes qui l'entourent.
La question est la suivante: quel est le champ électrique agissant sur un atome indi-
viduel?
Imaginons que le liquide soit disposé entre les armatures d'un condensateur. Si les
armatures sont chargées, elles produisent un champ électrique dans le liquide. Mais il y a
aussi des charges dans les atomes individuels, et le champ électrique total E est la somme
de ces deux effets. Ce champ électrique réel varie très rapidement d'un point à un autre
du liquide. Il est très intense à l'intérieur des atomes - particulièrement tout près des
noyaux - et relativement faible entre les atomes. La différence de potentiel entre les
armatures du condensateur est l'intégrale curviligne de ce champ total. Si nous ne tenons
pas compte des variations locales du champ, nous pouvons envisager un champ élec-
trique moyen E qui vaut exactement V/d. (C'est le champ que nous avons considéré
dans le chapitre précédent.) Nous devons considérer ce champ comme la moyenne sur
une région contenant de nombreux atomes.
(a) ( c)
Vous pourriez penser qu'un atome «moyen» dans une position «moyenne» devrait
sentir ce champ moyen. Mais ce n'est pas aussi simple, comme nous allons Je montrer
en considérant ce qui se passe dans des cavités d'un diélectrique de formes différentes.
Par exemple, imaginons que nous découpions une fente dans un diélectrique polarisé,
la fente étant parallèle au champ, comme dans la partie (a) de la Fig. 11-5. Puisque
nous savons que V x E = 0, l'intégrale curviligne de E le long d'une courbe, I', telle que
celle de la partie (b) de la figure, doit être nulle. Le champ à l'intérieur de la fente doit
donner une contribution qui annule exactement celle du champ à l'extérieur. Par consé-
quent, le champ E0 qui se trouve réellement au centre d'une longue fente étroite est égal
à E, champ électrique moyen dans le diélectrique.
Maintenant considérons une autre fente dont les côtés suivant la grande dimension
sont perpendiculaires à E, comme dans la partie (c) de la Fig. 11-5. Dans ce cas, le
champ E0 dans la fente n'est pas le même que E car des charges de polarisation appa-
raissent sur les faces. Si nous appliquons Je théorème de Gauss à
186
une surface S tracée comme en (d) de la figure, nous trouvons que le champ E0 dans la
fente est donné par
p
Eo = E + -,
Eo
(l l.22)
où E est encore le champ électrique dans le diélectrique. (La surface de Gauss contient
la charge superficielle de polarisation O"pol =P.) Nous avons mentionné au chapitre 10
que EoE + P est souvent appelée D, donc EoEo = D 0 est égal à D dans le diélectrique.
Au début, dans l'histoire de la physique, quand on croyait qu'il était très important
de définir chaque grandeur par une expérience directe, on fut enchanté de découvrir
qu'il était possible de définir ce que l'on appelait E et D dans un diélectrique sans avoir
besoin d'aller se promener entre les atomes. Le champ moyen E est numériquement égal
au champ E0 que l'on pourrait mesurer dans une fente taillée parallèlement au champ.
Et le champ D pourrait être mesuré en trouvant E 0 dans une fente taillée perpendicu-
lairement au champ. Mais de toute façon, personne ne les mesure jamais ainsi et ce
n'était donc là qu'un de ces trucs philosophiques.
Pour la plupart des liquides qui n'ont pas une structure trop compliquée, on pourrait
s'attendre à ce qu'un atome se trouve en moyenne, et avec une bonne approximation,
entouré d'autres atomes, à peu près comme s'il était dans une cavité sphérique. Et nous
devrions nous demander: «quel serait le champ dans cette cavité sphérique?» Nous
pouvons le trouver en remarquant que si nous découpons une cavité sphérique dans une
substance uniformément polarisée, nous ne faisons rien d'autre que de retirer une sphère
d'une substance polarisée. (Nous devons imaginer que la polarisation est «solidifiée»
avant de découper la cavité.) D'après le principe de superposition cependant, le champ
à l'intérieur du diélectrique, avant d'avoir retiré la sphère, est la somme des champs dus
à toutes les charges extérieures au volume sphérique, plus les champs dus aux charges
intérieures à la sphère polarisée. C'est-à-dire que, en appelant E le champ dans le
diélectrique uniforme, nous pouvons écrire
E= Ecavité + Esphère• (11.23)
où Ecavité est le champ dans la cavité et Esphère ·est le champ dans une sphère uniformé-
ment polarisée (voir Fig. 11-6). Les champs dus à une sphère uniformément polarisée
sont représentés sur la Fig. 11-7. Le champ électrique à l'intérieur de la sphère est uni-
forme et sa valeur est
p
Esphère = - J7ï (11.24)
Tenant compte de (11.23) nous obtenons
p
Ecavité = E + );O (11.25)
187
Champ d'un dipôle à l'extérieur
Le champ dans une cavité sphérique est plus grand que le champ moyen, d'une quantité
égale à P/3E 0 • (La cavité sphérique donne un champ qui est au tiers entre les champs
dans des fentes perpendiculaire et parallèle au champ.)
ou
Na
P= (Na/3) EoE. (11.27)
l
188
(11.29). Par exemple, la constante diélectrique du sulfure de carbone à 0 °C est 1,0029,
Or, la densité du gaz se détermine facilement et celle du liquide figure dans des tables
de constantes. A 200 C, la densité du CS 2 liquide est 381 fois plus grande que celle du
gaz à OO C. Ce qui veut dire que N est 381 fois plus grand dans le liquide que dans le gaz,
de sorte que - en faisant l'approximation que la polarisabilité atomique du sulfure de
. carbone ne change pas quand celui-ci est liquéfié - Na pour le liquide est égal à 381 fois
0,0029, soit 1,11. Remarquons que le terme Na/3 donne 0,4, quantité non négligeable.
D'après ces valeurs, nous prévoyons une constante diélectrique de 2,76, qui est en assez
bon accord avec la valeur observée de 2,64.
Dans le tableau 11-1 nous donnons quelques valeurs expérimentales concernant diffé·
rentes substances (tirées du Handbook of Chemistry and Physics), avec les valeurs de la
constante diélectrique calculées par l'Eq. (11.28) selon la méthode que nous venons de
décrire. L'accord entre valeurs observées et calculées est encore meilleur pour l'argon et
!'oxygène que pour le CS 2- mais moins bon pour le tétrachlorure de carbone. Au total l'Eq.
(11.28) fournit de bons résultats.
Tableau 11-1
Calcul des constantes diélectriques des liquides à partir de
la constante diélectrique du gaz
Gaz
Liquide
189
11-6 Les diélectriques solides
Considérons maintenant les solides. Le premier point important concernant les solides
est qu'il peut y avoirune polarisation permanente-qui existe même en l'absence d'un champ
électrique. On peut donner comme exemple une substance comme la cire, qui contient de
longues molécules possédant un moment dipolaire permanent. Si l'on fait fondre de la cire
et qu'on lui applique quand elle est liquide un champ électrique intense, de façon que les
moments dipolaires s'alignent partiellement, ils se maintiendront ainsi quand le liquide
se solidifiera. La substance solide possède une polarisation permanente, qui se maintient
même en l'absence de champ. Un tel solide est appelé un électret.
Un électret possède des charges de polarisation permanentes à sa surface. C'est l'analogue
électrique de l'aimant. Il n'est pas aussi utile cependant, parce que les charges libres de l'air
sont attirées à sa surface, et annulent finalement les charges de polarisation. L'électret est
« déchargé » et il n'.y a plus de champs extérieurs visibles.
0®® 0 0 0®œ 0
®<f! (j)(j) ®ŒI
8 G
©<!>©©
0 0©© 0©©
®GJ
190
Cela ressemble tout à fait au cas des liquides. Certains cristaux possèdent aussi des dipôles
pouvant tourner, "et la rotation de ces dipôles contribuera aussi à K. Dans les cristaux
ioniques tels que NaCl il y a aussi une polarisabilité ionique. Le cristal est un damier d'ions
positifs et négatifs, et dans un champ électrique les ions positifs sont déplacés dans un sens,
les ions négatifs dans l'autre; il y a un mouvement relatif résultant des charges plus et
moins, et donc une polarisation volumique. Nous pourrions évaluer l'ordre de grandeur
de la polarisabilité ionique à partir de la connaissance de la rigidité des cristaux de sel,
mais nous n'aborderons pas ce sujet ici.
191
Pour calculer la polarisation d'une substance solide, nous devons d'abord chercher
quels sont les champs locaux qui règnent dans chaque cellule unité. Nous devons y inclure
les champs dus à la polarisation elle-même, tout comme nous l'avons fait pour le cas
d'un liquide. Mais un cristal n'est pas un liquide homogène, donc nous ne pouvons pas
prendre pour le champ local ce que nous obtiendrons dans une cavité sphérique. Si on le
calcule pour un cristal, on trouve que le facteur 1/3 de l'Eq. (11.24) devient légèrement
différent, mais pas très éloigné de 1/3. (Pour un cristal cubique simple, il est exactement
1/3.) Nous admettrons par conséquent, et dans une première discussion que ce facteur
est 1/3 pour BaTi03 •
Quand nous avons écrit l'Eq. (11.28) vous vous êtes peut-être demandé ce qu'il
adviendrait si Na était supérieur à 3. Il semblerait que K devienne négatif. Mais ceci ne
peut certainement pas être exact. Voyons ce qui se passerait si on augmentait progressive-
ment a dans un cristal donné. A mesure que a devient plus grand, la polarisation devient
plus grande, produisant un champ local plus intense. Mais un champ local plus intense
polarisera davantage chaque atome, intensifiant davantage encore les champs locaux.
Si les atomes« fournissent» suffisamment, le processus se poursuit; il y a comme une
sorte d'effet rétroactif qui fait croître la polarisation sans limite-à condition que la polari-
sation de chaque atome augmente proportionnellement au champ. La condition de
«divergence» se réalise quand N.a = 3. La polarisation ne devient pas infinie,
évidemment, car la proportionnalité entre le moment induit et le champ électrique n'a plus
lieu aux champs élevés, de sorte que nos formules ne sont plus valables. Ce qui se passe
alors, c'est que le réseau« se referme» avec une polarisation interne très intense et qu'il
a lui-même engendrée.
Dans le cas de BaTi03, il y a aussi, en plus de la polarisation électronique, une
polarisation ionique assez importante que l'on suppose être due aux ions titane qui
peuvent se déplacer légèrement à l'intérieur du réseau cubique. Le réseau s'oppose à de
grands déplacements, donc, quand le titane s'est un peu déplacé, il est bloqué et il
s'arrête. Mais la cellule du cristal possède alors un moment dipolaire permanent.
Dans la plupart des cristaux, on atteint en fait cette situation-là à toutes les tempéra-
tures. Mais le point très intéressant dans le cas du titane de baryum, c'est que cette con-
dition est si précaire que si on diminue un tout petit peu Na, il se débloque. Puisque N
décroît quand la température croît - à cause de la dilatation thermique - nous pouvons
faire varier Na en faisant varier la température. En dessous de la température critique,
il est juste bloqué, aussi est-il facile - en appliquant un champ extérieur - de modifier
la polarisation et de la bloquer dans une direction différente.
Voyons si nous pouvons analyser ce qui se passe plus en détail. Appelons Tc la tempéra-
ture critique à laquelle Na est exactement égal à 3. Quand la température croît, N diminue
un peu à cause de la dilatation du réseau. Mais comme la dilatation est petite nous
pouvons dire que près de la température critique
où fJ est une constante, petite, du même ordre de grandeur que le coefficient de dilatation
thermique, soit environ 10- 5 à 10-6 par degré C. Puis, portant cette relation dans
l'Eq. (11.28), nous obtenons
3 - fJ(T - Tc)
K - l
{J(T - Tc)/3
192
Puisque nous avons admis que P(T-Tc) était faible devant l'unité, nous pouvons appro-
cher cette formule par
9
K - l = f3(T - Tc) (11.31)
Cette relation est exacte, évidemment seulement pour T>Tc. Nous voyons que juste
au-dessus de la température critique K est énorme. C'est parce que Na est très voisin de 3
qu'il y a un effet multiplicatif fantastique, et la constante diélectrique peut facilement
atteindre 50.000 ou 100.000. Elle est aussi très sensible à la température. Pour un
accroissement de la température, la constante diélectrique décroît comme l'inverse de la
température, mais à la différence du cas d'un gaz dipolaire, pour lequel K - 1 varie
comme l'inverse de la température absolue, pour les corps ferroélectriques, elle varie
comme l'inverse de la différence entre la température absolue et la température critique
(cette loi est appelée loi de Curie-Weiss).
Quand nous abaissons la température jusqu'à la température critique, que se passe-t-il?
Imaginons un réseau de cellules unité comme celui de la Fig. 11-9, nous voyons qu'il est
possible de choisir des chaînes d'ions suivant des rangées verticales. L'une d'elles est
constituée d'ions oxygène et titane en alternance. Il y a d'autres rangées composées d'ions
baryum ou d'ions oxygène, mais l'espacement le long de ces rangées est plus grand. Nous
construisons un modèle simple pour reproduire cette configuration en imaginant,
comme on le voit sur la Fig. 11-IO(a), une série de chaînes d'ions. Le long de ce que nous
appellerons la chaîne principale, la distance entre les ions est a qui est la moitié de la con-
stante du réseau; la distance latérale entre deux chaînes identiques est 2a. Il y a des chaînes
moins denses entre deux que nous négligerons pour l'instant. Pour rendre l'analyse un peu
plus facile, nous allons aussi supposer que tous les ions d'une chaîne principale sont
identiques. (Ce n'est pas une simplification très grave parce que tous les effets importants
vont tout de même apparaître. C'est un des trucs de la physique théorique. On résout
d'abord un problème différent parce qu'il est plus facile de faire les calculs pour la
première fois - puis quand on comprend comment les choses se passent, alors il est temps
d'introduire toutes les complications.)
r--2a-1
1·+
Q
• t t t
L_Î t f +
t • t t ~
f t t* +
t • t + ~
Fig.11-10. Modèle d'un ferroélectri-
(a} (b)
que: {a) correspond à un antiferroélectrique,
et {b) à un ferroélectrique normal.
193
Tentons de voir maintenant ce qui se passerait avec notre modèle. Nous supposons
que le moment dipolaire de chaque atome est pet nous voulons calculer le champ sur l'un
des atomes de la chaîne. Nous devons trouver la somme des champs dus à tous les autres
atomes. Calculons d'abord le champ dû à tous les dipôles d'une seule chaîne verticale;
nous parlerons des autres chaînes plus tard. Le champ à la distancer d'un dipôle dans la
direction de son axe est donné par
2p
E = 47rEo ra. (11.32)
Sur un atome donné, les atomes équidistants de part et d'autre donnent des champs dans
la même direction, donc pour toute la chaîne, nous obtenons
Il n'est pas trop difficile de montrer que si notre modèle était un cristal cubique - c'est-
à-dire si les chaînes identiques étaient seulement distantes de a - le nombre 0,383 serait
remplacé par 1/3. En d'autres termes, si les rangées suivantes étaient distantes de a, elles
contribueraient seulement pour - 0,050 unité dans notre somme. Cependant, la chaîne
principale voisine que nous considérons est distante de 2a et, comme vous vous en
souvenez d'après le chapitre 7, le champ dû à une structure périodique décroît exponen-
tiellement en fonction de la distance. Donc, ces rangées contribuent pour beaucoup moins
que - 0,050 et nous pouvons très bien igu-01enoutes les autres rangées.
Il est nécessaire maintenant de trouver quelle doit être la polarisabilité a pour que le
processus diverge. Supposons que le moment induit p de chaque atome de la chaîne soit
proportionnel au champ, comme dans l'Eq. (11.6). Nous obtenons le champ polarisant
sur l'atome à partir de Echaîne.par application de l'Eq. (11.32). Nous avons donc les deux
équations
P = o:EoEchaîne
et
0.383 p
Echaîne = Q3 Eo ·
avec E et p tous deux finis. Ainsi, si u a la valeur de a 3/0,383, une polarisation permanente
engendrée par son propre champ s'établira. Cette égalité critique doit être atteinte pour le
titanate de baryum exactement à la température critique T" (Remarquez que siu était plus
grand que la valeur critique pour des faibles champs, il décroîtrait pour des champs plus
intenses, et à J'équilibre, cette même égalité que nous venons de trouver se réaliserait.)
Pour BaTi03 , la distance a est 2 x 10-s cm, donc nous devons prévoir que u = 21,8 x
10- 24 cm 3 • Nous pouvons comparer cette valeur avec les polarisabilités connues des
atomes individuels. Pour l'oxygène, u = 30,2 x 10- 24 cm 3 ; nous sommes sur la bonne
voie!
194
Pour le titane, a= 2,4 x 10-24 cm3 ; c'est plutôt faible. Pour utiliser notre modèle, nous
devrions sans doute prendre la moyenne. (Nous pourrions de nouveau construire une
chaîne avec des atomes différents en alternance, mais le résultat serait à peu près le
même.) Ainsi a (moyen) = 16,3 x 10- 24 cm3 , ce qui n'est pas assez grand pour produire
une polarisation permanente.
Mais attendez un instant! Nous n'avons jusqu'ici ajouté que les polarisabilités électro-
niques. Il y a aussi une polarisabilité ionique due au déplacement de l'ion titane. Tout ce
qu'il nous faut, c'est une polarisabilité ionique de 9,2 x 10- 24 cm3 • (Un calcul plus précis
avec une chaîne d'atomes alternés montre qu'il faudrait en réalité 11,9 x I0-24 .) Pour
comprendre les propriétés de BaTi03 , nous devons supposer qu'une telle polarisabilité
ionique existe.
Pourquoi l'ion titane dans le titanate de baruym doit-il avoir une polarisabilité ionique
aussi grande, on l'ignore. De plus, pourquoi à température plus basse se polarise-t-il
suivant la diagonale du cube aussi bien que suivant la diagonale de la face du cube,
cela non plus n'est pas clair. Si nous calculons la taille réelle des sphères sur la Fig. 11-9
et si nous nous demandons si le titane a un peu de jeu dans la boîte formée par les atomes
d'oxygène voisins - ce qu'on pourrait souhaiter, pour qu'il puisse facilement se
déplacer - nous trouvons juste le contraire. Il est très serré. Les atomes de baryum eux
ont un peu de jeu, mais si l'on suppose que ce sont eux qui se déplacent, cela ne marche
pas. Vous voyez donc que le sujet n'est pas clair du tout; il y a encore des mystères
que nous voudrions bien éclaircir.
Revenant à notre modèle simple de la Fig. 11-lO(a), nous voyons que le champ dû à une
chaîne tendrait à polariser la chaîne voisine en sens inverse, ce qui signifie que chaque
chaîne serait refermée sur elle-même, 11?-ais qu'il n'y aurait pas de moment permanent par
unité de volume!(Il n'y aurait pas d'effets électriques extérieurs,mais il y a quand même
certains effets thermodynamiques que l'on pourrait observer.) De tels systèmes existent
et sont appelés anti-ferroélectriques. Donc ce que nous venons d'expliquer est en réalité
un anti-ferroélectrique. Le titanate de baryum, cependant, est en réalité disposé comme
sur la Fig. 11-lO(b). Les chaînes oxygène-titane sont toutes polarisées dans le même sens
parce qu'il y a des chaînes d'atomes intermédiaires entre elles. Quoique les atomes de ces
chaînes ne soient pas très polarisables, ou soient très denses, ils seront un peu polarisés
dans la direction anti-parallèle à celle des chaînes oxygène-titane. Les faibles champs
produits sur la chaîne oxygène-titane voisine la forceront à se mettre parallèle à la pre-
mière. Donc BaTi0 3 est réellement ferroélectrique et ceci grâce aux atomes intermédiaires.
Vous pouvez vous demander: «mais alors, et l'effet direct entre les deux chaînes
0-Ti?» Rappelez-vous cependant que cet effet décroît exponentiellement en fonction
de la distance; l'effet d'une chaîne de forts dipôles à la distance de 2a peut être moindre
que l'effet d'une chaîne de faibles dipôles à la distance a.
Ceci termine notre étude, assez détaillée, sur nos connaissances actuelles des constantes
diélectriques des gaz, des liquides et des solides.
195
1.2
Analogies électrostatiques
12--1 Les mêmes équations admettent les 12--5 Écoulement irrotationnel d'un fluide;
mêmes solutions écoulement autour d'une sphère
12--2 La propagation de la chaleur; une 12---0 Éclairement: l'éclairement uniforme
source ponctuelle près d'une frontière d'un plan
plane infinie
12--7 L'«unité profonde» de la nature
12--3 La membrane tendue
196
que tout en apprenant l'électrostatique, nous avons simultanément appris un grand
nombre d'autres sujets. Nous allons voir que les équations de l'électrostatique appa-
raissent à bien d'autres endroits en physique. Par une traduction directe des solutions,
(bien sûr les mêmes équations mathématiques doivent avoir les mêmes solutions) il est
possible de résoudre certains problèmes dans d'autres domaines avec la même facilité
- ou la même difficulté - qu'en électrostatique.
Les équations de l'électrostatique sont, nous le savons
V XE= O. (12.2)
(Nous considérons les équations de l'électrostatique avec diélectriques pour avoir le cas
le plus général.) La même physique peut être exprimée sous une autre forme mathé-
matique:
E = - V</>, ( 12.3)
V. (K Vcp) = _ Plibre. (12.4)
Eo
197
La vitesse à laquelle la chaleur est engendrée ou absorbée en différents points, dépend
évidemment du problème. Supposons par exemple qu'il y ait une source de chaleur à
l'intérieur de la substance (peut-être une source radioactive, ou bien une résistance
chau.ffée par un courant électrique). Soit s l'énergie calorifique produite, par unité de
volume et par seconde, par cette source. Il peut y avoir aussi des pertes (ou des gains)
d'énergie thermique transformées en d'autres énergies internes dans le volume. Si u est
l'énergie interne par unité de volume, - du/dt sera aussi une «source» d'énergie
calorifique. Nous avons alors,
(12.5)
Nous n'allons pas discuter dans l'immédiat, l'équation complète selon laquelle les
grandeurs évoluent avec le temps, puisque nous faisons une analogie aveo l'électro-
statique, où rien ne dépend du temps. Nous considérons seulement les problèmes station-
naires de propagation de la chaleur dans lesquels des sources constantes créent un état
d'équilibre. Dans ces cas,
V ·h = s: (12.6)
Il est nécessaire évidemment, d'avoir une autre équation qui décrira comment la chaleur
s'écoule en différents points. Dans de nombreuses substances, le courant de chaleur est à
peu près proportionnel au gradient de la température: plus grande est la différence de
température, plus intense est le courant de chaleur. Comme nous l'avons vu, le vecteur
courant de chaleur est proportionnel au gradient de la température. La constante de pro-
portionnalité K, caractéristique de la substance, est appelée la conductivité thermique.
h = -KVT. (12.7)
Si les propriétés de la substance varieot d'un point à un autre, alors K = K(x, y, z),
fonction du point. '[L'équation (12.7) n'est pas aussi fondamentale que (12.5), laquelle
exprime la conservation de l'énergie calorifique, puisque la première repose sur une
propriété particulière de la substance.] Si maintenant nous portons l'Eq. (12. 7) dans
l'Eq. (12.6), nous obtenons
V· (KVT) = -s, (12.8)
qui est exactement de la même forme que (12.4). Les problèmes stationnaires de
propagation de la chaleur et les problèmes d'électrostatique sont les mêmes. Le vecteur
courant de chaleur h correspond à E et la température T correspond à q,. Nous avons déjà
remarqué qu'une source de chaleur ponctuelle crée un champ de température qui varie
comme I/r et un courant de chaleur qui varie comme l/r2. Ceci n'est rien de plus qu'une
traduction des énoncés de l'électrostatique, qui disent qu'une charge ponctuelle produit
un potentiel qui varie comme l/r et un champ électrique qui varie comme l/r2• Nous
pouvons, en général, résoudre des problèmes statiques de chaleur aussi facilement que des
problèmes d'électrostatique.
Considérons un exemple simple. Soit un cylindre de rayon a à la température T1,
maintenue constante grâce à un générateur de chaleur dans le cylindre. (Ce pourrait être,
par exemple, un fil parcouru par un courant, ou bien un tuyau avec de la vapeur qui se
condense à l'intérieur.) Le cylindre est entouré d'une enveloppe concentrique d'un
isolant de conductivité K. Soit b le rayon extérieur de l'enveloppe, et
198
T 2 la température maintenue constante de l'extérieur (Fig. 12-la). Nous voulons trouver
la vitesse à laquelle la chaleur sera perdue par le fil, ou le tuyau, ou quoi que ce soit placé
au centre. Soit G la quantité totale de chaleur perdue par une longueur L du tube - c'est
ce que nous cherchons.
D'après la symétrie, nous savons que h dépend seulement de la distance au centre. Donc
nous enfermons le tùyau dans un cylindre de Gauss de longueur Let de rayon r. D'après
le théorème de Gauss, nous savons que l'écoulement de chaleur h multiplié par l'aire
2nrL de la surface, doit être égal à la quantité totale de chaleur engendrée à l'intérieur, et
que nous avons appelée G:
G
27rrLh = G ou h= -· (12.9)
21f'rL
h = -KVT,
199
En intégrant depuis r = a jusqu'à r = b, nous obtenons
G
T2 - T1 = - 27rKL ln ab . (12. Il)
Q = 27reoL(<1>1 - </>2) .
ln (b/a)
Les problèmes sont les mêmes, et ils admettent les mêmes solutions. A partir de ce que
nous savons en électrostatique, nous pouvons connaître aussi la quantité de chaleur per-
due par un tuyau isolé.
Considérons un autr1,; exemple de propagation de la chaleur. Supposons que nous
voulons connaître la propagation de la chaleur au voisinage d'une source ponctuelle de
chaleur située un peu au-dessous de la surface de la terre, ou près de la surface d'un grand
bloc métallique. La source de chaleur considérée, pourrait être une bombe atomique
qui a explosé sous terre, et constitue une source intense de chaleur, ou bien, cela pourrait
être une petite source radioactive à l'intérieur d'un bloc de fer - il y a bien des possibilités.
Nous traiterons le problème idéal d'une source ponctuelle de chaleur, d'intensité G
à la distance a au-dessous de la surface d'un bloc infini d'une substance homogène de
conductivité thermique K. Et nous négligerons la conductivité thermique de l'air à
l'extérieur de la substance. Nous chercherons à déterminer la distribution de température
sur la surface du bloc. Comment est-il chaud juste au-dessus de la source et en différents
points de sa surface?
Comment faire? Cela ressemble à un problème d'électrostatique avec deux diélectriques
différents de part et d'autre d'un plan infini. Ah! C'est peut-être l'analogue d'une source
ponctuelle près de la surface de séparation d'un diélectrique et d'un conducteur, ou
quelque chose de ce genre. Voyons ce qui se passe près de la surface. La condition physique
est que la composante normale de h soit nulle sur la surface, puisque nous avons admis
qu'il n'y avait pas d'écoulement de chaleur à l'extérieur du bloc. Nous devrions nous
demander: dans quel problème d'électrostatique avons-nous la condition que la
composante normale du champ électrique E (qui est l'analogue de h) soit nulle sur une
surface? Dans aucun!
Voilà une des choses que nous devons examiner attentivement. Pour des raisons physi-
ques, il peut y avoir certaines restrictions aux conditions mathématiques qui apparaissent
dans un sujet quelconque. Donc, si nous avons analysé l'équation différentielle seule-
ment pour certains cas limités, nous avons pu omettre certaines solutions qui peuvent
apparaître dans d'autres conditions physiques. Par exemple, il n'y a pas de substance dont
la constante diélectrique soit nulle, alors que le vide a bien une conductivité thermique
nulle. Il n'y a donc pas d'analogue électrostatique pour un isolant thermique parfait.
Cependant, nous pouvons encore utiliser les mêmes méthodes. Nous pouvons essayer
d'imaginer ce qui se passerait si la constante diélectrique était nulle. (Bien sûr la
constante diélectrique n'est jamais nulle dans aucun cas réel. Mais nous pourrions avoir
le cas d'une substance avec une constante diélectrique très élevée,
200
de manière à pouvoir négliger la constante diélectrique de l'air à l'extérieur.)
Températur:~
de surface
Fig. 12-2. L'écoulement de la chaleur
et les isothermes près d'une source ponc-
tuelle de chaleur à la distance a en dessous
0 Q Q p de la surface d'un bon conducteur ther-
mique. On a fait figurer une source image
à l'extérieur du matériau.
(Ceci, évidemment, est simplement l'analogue de <P = q/4nE 0r.) La température, pour une
source ponctuelle et la source image, est
(12.14)
201
Cette formule nous donne la température partout dans le bloc. Quelques surfaces
isothermes sont tracées sur la Fig. 12-2. On a montré aussi les lignes de champ de h qui
s'obtiennent à partir de h = KVT.
A l'origine nous cherchions la distribution de la température sur la surface. Pour un
point de la surface à la distance p de l'axe, r 1 = r2 = yp 2 + a2 , donc
1 2G
T(surface) = K -;::::::::==::;:: (12.15)
4 1l' y1p2 + a2
On a représenté aussi cette fonction sur la figure. Naturellement, la température est plus
élevée juste au-des.sus de la source qu'en des points éloignés. C'est un genre de problème
que les géophysiciens ont souvent à résoudre. Nous voyons maintenant que c'est le même
genre de choses que nous avons déjà résolu en électricité.
Il s'exerce des forces dans la feuille parce qu'elle est tendue. Si nous faisions une petite
entaille quelque part, les deux bords de l'entaille se sépareraient (voir Fig. 12-4). Il y a
donc dans la feuille, une tension superficielle analogue à la tension unidimensionnelle
d'une corde tendue. Nous définirons l'intensité de la tension superficielle r, comme la
force par unité de longueur juste nécessaire à maintenir côte à côte les deux bords d'une
entaille, telle que l'une de celles représentées sur la Fig. 12-4.
Regardons maintenant ce qui·se passe dans une coupe verticale de la membrane. Elle
se présente comme une courbe, comme celle de la Fig. 12-5. Soit u le déplacement vertical
202
Fig. 12-4. La tension superficielle r
d'une feuille de caoutchouc tendue est la
force par unité de longueur, normale à une
ligne.
Feuille
-~
ax
(r au) l:i.x;
ax
alors
a
l:i.F = ax (T au) l:i.x l:i.y.
ax
203
Les forces agissant sur les deux autres côtés contribuent aussi à la forceLiF; la résultante
est évidemment.
a ( T ax
tJ.F = [ ax au) + aya ( T au)]
ay tJ.x tJ.y. (12.16)
Les déformations du diaphragme sont dues à des forces extérieures. Soit/la force par
unité de surface dirigée vers le haut agissant sur la feuille (une sorte de« pression») et due
aux forces extérieures. Quand la membrane est en équilibre (cas statique), cette force
doit être équilibrée par la force interne que nous venons de calculer, Eq. (12.16). Ce qui
donne
tJ.F
!= tJ.xtJ.y
L'Eq. (12.16) peut alors s'écrire
f = - V · (T Vu), (12.17)
où V est ici, évidemment, l'opérateur gradient à deux dimensions (a;ax, a/ay). Nous avons
l'équation différentielle reliant u(x, y) aux forces appliquées f(x, y) et à la tension
superficielle r(x, y), qui peut en général varier d'un point à un autre de la feuille. (Les
déformations pour un corps élastique à trois dimensions obéissent aussi à des équations
analogues, mais nous nous limiterons au cas à deux dimensions.) Nous nous occuperons
seulement du cas où la tension r est constante sur toute la feuille. Nous pouvons alors
écrire pour l'Eq. ( 12.17),
(12.18)
Nous avons là encore une équation qui est la même qu'en électrostatique! - seulement
cette fois-ci elle est limitée à deux dimensions. Le déplacement u correspond à <P et f/r
correspond à p/e 0 • Donc tout ce que nous avons trouvé concernant des couches planes
infinies chargées, ou des fils parallèles intiniment longs, ou des cylindres chargés, est
directement applicable à la membrane tendue.
Supposons que nous soulevions la membrane en certains points à une certaine
hauteur, c'est-à-dire que nous fixions la valeur de u en différents points. C'est l'analogue
d'un potentiel défini aux points correspondants dans le cas électrique. Ainsi, par exemple,
nous pouvons créer un« potentiel »positif en soulevant la membrane avec un objet dont
la section droite a la forme du cylindre conducteur correspondant. Par exemple, si nous
soulevons la membrane avec une tige circulaire, la surface prendra la forme représentée
sur la Fig. 12-6. La hauteur u est la même que le potentiel électrostatique q, d'une tige
cylindrique chargée. Elle décroît comme log (l/r). (La pente, qui correspond au champ
électrique E, décroît comme l/r.)
204
Fig. 12-6. Coupe d'une feuille de
caoutchouc tendue et poussée vers le haut
par une tige circulaire. La fonction u(x, y)
est la même que la potentiel électrique
cp(x, y) près d'une longue tige chargée.
dans le cas électrique. L'analogie a même été poussée plus loin. Si des petites balles sont
placées sur la membrane, leur mouvement correspond à peu près à celui des électrons
dans le champ électrique correspondant. On peut réellement observer les « électrons »qui
se meuvent sur leurs trajectoires. Cette méthode a été utilisée pour mettre au point la
géométrie compliquée de beaucoup de tubes photomultiplicateurs, (tels que ceux utilisés
pour les compteurs à scintillation, et celui utilisé pour régler les phares des Cadillac).
La méthode est toujours en usage mais la précision est limitée. Pour des travaux plus
précis, il vaut mieux déterminer les champs par des méthodes numériques, utilisant les
grandes calculatrices électroniques.
12-4 La diffusion des neutrons; une source sphérique uniforme dans un milieu
homogène
Prenons un autre exemple qui donne le même genre d'équation, se rapportant cette
fois à la diffusion. Au chapitre 43 du Vol. 1, nous avons traité de la diffusion des ions
dans un gaz unique, et d'un gaz dans un autre. Prenons cette fois un exemple différent
- la diffusion des neutrons dans une substance comme le graphite. Nous avons choisi le
graphite (une forme pure du carbone) parce que le carbone n'absorbe pas les neutrons
lents. Les neutrons sont libres d'y circuler. Ils suivent une ligne droite sur plusieurs
centimètres en moyenne, avant d'être diffusés par un noyau et déviés dans une autre
direction. Donc si nous avons un grand bloc - de plusieurs mètres de côté - les neutrons
initialement en un point, vont diffuser vers d'autres points. Nous voulons trouver une
description de leur comportement moyen - c'est-à-dire de leur propagation moyenne.
aN (12.19)
Jx = - Dax
-'
1
D =
3 1v.
205
L'équation vectorielle de J est
J = -DVN. (12.20)
Le nombre de neutrons par unité de temps qui s'écoulent à travers une surface élémen-
taire da est J · n da (où, comme toujours, n est le vecteur unitaire de la normale). Le courant
total sortant r:fun élément de volume est alors (suivant le raisonnement gaussien habituel)
V · J dV. Cet écoulement va produire une diminution, avec le temps, du nombre de
neutrons dans AV, à moins que des neutrons ne soient créés dans AV (par un procédé
nucléaire quelconque).· S'il y a des sources dans le volume qui engendrent S neutrons par
unité de temps dans l'unité de volume, alors le courant total sortant de AV sera égal à
(S - aN/at)AV. Nous avons alors
àN
V·J=S--· (12.21)
àt
àN
V· (-D VN) = S - - · (12.22)
àt
Dans le cas statique - où aN/at = 0 - nous retrouvons encore une fois l'Eq. (12.4)!
Nous allons pouvoir nous servir de nos connaissances d'électrostatique pour résoudre
des problèmes sur la diffusion des neutrons. Donc, résolvons-en un. (Vous pouvez penser:
pourquoi faire un problème, alors que nous les avons tous faits en électrostatique? Nous
pouvons le faire plus vite cette, fois parce que nous avons fait les problèmes d'électro-
statique!)
'-. ""',""'""'"'··-,>'
Vect~ur~urant de'\ 1.
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Graphite
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·K
~
( o) ( b) Fig. 12-7. (a) Des neutrons sont pro-
duits uniformément dans une sphêre de
rayon a contenue dans un grand bloc de
graphite, et diffusent vers l'extérieur. On
trouve la densité des neutrons N en· fane -
tian de r, distance au centre de la source.
(b) Le cas électrostatique analogue: une
sphère uniformément chargée, où N corres-
pond à <f> et J correspond à E.
206
Imaginons un bloc d'une substance dans laquelle sont engendrés des neutrons - disons
pal'. fission de l'uranium - uniformément dans une région sphérique de rayon a (Fig. 12-7).
Nous voudrions savoir: quelle est la densité des neutrons partout? Dans quelle mesure
la densité des neutrons, dans la région où ils sont engendrés, est-elle uniforme? Quel est
le rapport des densités de neutrons au centre et à la surface de la région où ils sont
engendrés? II est facile de répondre. La densité de la source S0 remplace la densité de
charge p, donc ce problème est le même que celui d'une sphère avec une densité de
charge uniforme. Trouver N revient à trouver le potentiel <fi. Nous avons déjà calculé
les champs à l'intérieur et à l'extérieur d'une sphère chargée uniformément; nous pouvons
les intégrer pour avoir le potentiel. A l'extérieur, le potentiel est Q/4neor, la charge totale Q
étant donnée par 4na3p/3. Donc
pas
</>extérieur = - - · (12.23)
3 Eor
Pour les points à l'intérieur, le champ est dû seulement à la charge Q(r) intérieure à la
sphère de rayon r, Q(r) = 4nr3p/3, donc
E = E.... (12.24)
3eo
Le champ croît linéairement avec r. En intégrant E pour avoir <fi, nous obtenons
pr2
</iintérieur = - - +constante.
6 Eo
Pour le rayon a,<fiintérieur doit être égal à </iextérieur donc il faut que la constante soit
égale à pa 2/2€ 0 • (Nous admettons que <fi est nul loin de la source, ce qui correspond à N
nul pour les neutrons.) Par suite,
2 2
(3a
</i intérieur =
p
3Eo T ' - 2r ) · (12.25)
Nous connaissons tout de suite la densité des neutrons dans notre autre problème. La
réponse est
Sa3 (12.26)
N extérieur = Dr •
3
et
N intérieur = 3t ( ~ Ç) ·
3 2
- (12.27)
207
Il y a de nombreux cas en physique où la diffusion joue un grand rôle. Le mouvement
des ions dans un liquide, ou des électrons dans un semi-conducteur, obéissent à la même
équation. Nous retrouvons toujours et toujours les mêmes équations.
V· V= 0.
Bon! Nous voilà de nouveau en électrostatique (sans charges); ceci est en effet la
même chose que V· E =O. Mais non! L'électrostatique n'est pas seulement V· E =O.
C'est une paire d'équations. Une seule équation ne nous en dit pas assez; nous avons
besoin d'une équation supplémentaire. Pour coller exactement avec l'électrostatique,
nous devrions avoir aussi que rot v est nul. Mais ceci n'est pas vrai en général pour les
liquides réels. Dans la plupart des liquides, il apparaîtra en général une certaine
circulation. Donc, nous devons nous restreindre au cas où il n'y a pas de circulation du
fluide. Un tel écoulement est souvent appelé irrotationnel. Quoi qu'il en soit, si nous faisons
toutes ces hypothèses, nous pouvons imaginer pour un fluide le cas d'un écoulement
analogue à l'électrostatique. Donc nous poserons
V· V= 0 (12.28)
et
V X v = 0. (12.29)
Nous insistons bien sur le fait que les circonstances dans lesquelles l'écoulement d'un
liquide obéit à ces équations sont loin d'être la majorité, mais il y en a quelques-unes. Ce
doit être des cas où l'on peut négliger la tension superficielle, la compressibilité et la
viscosité, et pour lesquels nous pouvons admettre que l'écoulement est irrotationnel.
Ces hypothèses sont si rarement valables pour de l'eau réelle que le mathématicien
John von Neumann disait que ceux qui examinent les Eq. (12.28) et (12.29) étudient de
« l'eau sèche»! (Nous reprendrons plus en détail le problème de l'écoulement d'un fluide
dans les chapitres 40 et 41.)
208
Puisque VX u = 0, la vitesse de« l'eau sèche »peut s'écrire comme le gradient d'un certain
potentiel:
(12.30)
Quel est le sens physique de 'I'? Il n'y en a aucun de bien utile. On peut écrire la vitesse
comme un gradient tout simplement parce que l'écoulement est irrotationnel. Et par
analogie avec l'électrostatique, on appelle 'If le potentiel des vitesses, mais il n'est pas en
rapport avec l'énergie potentielle comme l'est f>. Puisque la divergence de v est nulle,
nous avons
(12.31)
Le potentiel des vitesses 'Il obéit à la même équation différentielle que le potentiel électro-
statique dans un espace vide (p = 0).
Envisageons un problème d'écoulement irrotationnel et voyons si nous pouvons le
résoudre par les méthodes que nous avons apprises. Soit le problème d'une balle
sphérique tombant dans un liquide. Si elle tombe trop lentement, les forces de viscosité,
que nous négligeons, seront très importantes. Si elle tombe trop vite, de petits' tourbillons
(turbulence) se produiront dans son sillage et il y aura une certaine circulation de l'eau.
Mais si la balle ne tombe ni trop vite, ni trop lentement, il est plus ou moins vrai que
l'écoulement de l'eau satisfera nos hypothèses, et nous pourrons décrire le mouvement
de l'eau par nos équations simples.
ll
Il est commode de décrire ce qui se passe dans un référentiel lié à la sphère. Dans ce
référentiel, nous nous posons la question: comment l'eau s'écoule-t-elle autour d'une
sphère au repos, quand l'écoulement au loin est uniforme? C'est-à-dire, quand loin de
la sphère, l'écoulement est partout le même. L'écoulement près de la sphère sera tel qu'il
est représenté par les lignes de courant sur la Fig. 12-8. Ces lignes, toujours parallèles à v,
correspondent aux lignes de champ électrique. Nous voulons trouver une description
quantitative du champ des vitesses, c'est-à-dire, une expression de la vitesse en tout
point P.
Nous pouvons calculer la vitesse à partir du gradient de 'If, nous calculerons donc
d'abord le potentiel. Nous voulons un potentiel qui satisfasse l'Eq. (12.31) partout, et
aussi
209
les deux restrictions suivantes: (!) il n'y a pas d'écoulement dans la région sphérique
intérieure à la balle, et (2) l'écoulement est constant au loin. Pour satisfaire (1), la
composante de v normale à la surface de la sphère doit être nulle. Cela signifie que
àl/f/àr est nulle pour r =a. Pour satisfaire (2), nous devons avoir àl/f/àz = v0 en tous
points où r > a. A proprement parler, il n'y a pas de cas électrostatique correspondant
exactement à notre problème. H correspond en réalité à placer une sphère de constante
diélectrique nulle dans un champ électrique uniforme. Si nous avions cherché la solution
du problème d'une sphère de constante diélectrique K dans un champ uniforme, alors en
faisant K = 0 nous aurions immédiatement la solution de ce problème.
o. (12.32)
Il y a dans notre problème un nouveau type de conditions aux limites, pas celle qui
impose à </>d'être constant sur la surface, mais celle qui impose à à<P/àr d'être constant.
Ceci est un peu différent. Il n'est pas facile d'avoir la réponse immédiatement. Tout
d'abord, sans sphère,</> serait égal à - Eoi. Alors E serait orienté suivant la direction des z
et aurait l'intensité E0 constante partout. Or, nous avons analysé le cas d'une sphère
diélectrique polarisée uniformément à l'intérieur, et nous avons trouvé que le champ
à l'intérieur d'une telle sphère polarisée est uniforme, et à l'extérieur, il est le même
que celui d'un dipôle ponctuel situé au centre. Donc, parions que la solution cherchée
est la superposition d'un champ uniforme et du champ d'un dipôle. Le potentiel créé par
un dipôle est (chapitre 6) pz/4ne0 r3. Ainsi nous admettons que
pz
</> = -E0 z +-
47re- ·
0 r3
(12.33)
Puisque le champ dû au dipôle décroît comme l/r3, au loin nous avons juste le champ E 0 •
Le champ que nous avons deviné satisfera bien la condition (2) ci-dessus. Mais, que pren-
drons-nous pour valeur du moment du dipôle p? Pour le trouver il faut tenir compte de
l'autre condition sur</>, Eq. (12.32). Nous devons dériver</> par rapport à r, mais évidem-
ment à(} constant; il est donc plus commode d'exprimer d'abord</> en fonction der et(}
plutôt qu'en fonction de z et r. Puisque z = r cos B, nous obtenons
0
</> = -EorcosO + -pcos
4 1T'Eor2 •
(12.34)
210
Celle-ci doit être nulle pour r = a quel que soit O. Ceci sera vérifié si
p = -27rE 0 a 3 Eo. (12.36)
Remarquez bien que si les deux termes de l'Eq. (12.35) n'avaient pas eu la même dépen-
e,
dance en il n'aurait pas été possible de choisir p de telle manière que (12.35) devienne
nulle pour r = a quel que soit l'angle. Le fait que ce soit possible montre que nous avons
deviné juste en écrivant l'Eq. (12.33). Évidemment quand nous avons deviné la solution,
nous savions ce que nous faisions: nous savions qu'il nous faudrait un autre terme qui
(a) satisfasse V2 </> = 0 (tout champ réel le vérifierait), (b) dépende de cos e, et (c) devienne
nul pour r grand. Le champ du dipôle est le seul qui vérifie ces trois conditions.
Appliquant (12.36), notre potentiel est
3
<P = -É0 cos IJ (r + ;r 2) • (12.37)
1/1 = -v 0 cos IJ (r + 3
;r 2) • (12.38)
211
zl
1
1
1
+- - - In= r\-Cos8
1 p
1 8 Fig. 12-9. L'éclairement In d'une sur-
face est l'énergie rayonnée par unité de
temps qui tombe sur l'unité d'aire de la
surface.
à une charge ponctuelle de valeur 4nE 0S. Sachant cela, nous voyons que pour une
distribution quelconque de sources lumineuses, nous pourrons trouver la réponse en
résolvant le problème électrostatique correspondant. Nous calculons la composante
verticale sur le plan du champ électrique dû à une distribution de charges de la même
façon que pour les sources lumineuses*.
Soit l'exemple suivant: nous voulons que la surface d'une table soit éclairée d'une façon
très uniforme, pour réaliser une certaine expérience. Nous disposons de longs tubes
fluorescents qui rayonnent uniformément suivant leur longueur. Nous pouvons éclairer
la table en disposant les tubes fluorescents de façon régulière sur le plafond, qui est à la
hauteur z au-dessus de la table. Quel est le plus grand écart b entre deux tubes consécutifs
qu'il faut admettre pour que l'éclairement de la surface soit uniforme à, par exemple,
un millième près? Réponse; (1) trouver le champ électrique dû à une grille de fils
distants de b, chacun étant chargé uniformément; (2) calculer la composante verticale
du champ électrique; (3) trouver la valeur de b pour que les ondul~ions du champ ne
soient pas supérieures à un millième. /
Au chapitre 7 nous avons vu que le champ électrique dû à une grille de fils chargés
pouvait être représenté comme une somme de termes, dont chaèun donnait une
variation sinusoïdale du champ avec une période égale à b/n, où n est un entier.
L'amplitude de chacun de ces termes est donnée par l'Eq. (7.44):
Nous n'avons à considérer que n = 1, tant que nous voulons seulement le champ en des
points pas trop proches de la grille. Pour une solution complète il faudrait déterminer
les coefficients A 71 ce que nous n'avons pas encore fait (quoique ce soit un calcul facile).
Puisque nous n'avons besoin que de A 1 , nous pouvons estimer que sa valeur est, en gros,
celle du champ électrique moyen. Le facteur exponentiel nous donnera alors directement
la variation relative de l'amplitude. Si nous voulons que ce facteur soit égal à 10-3 , nous
trouvons que b doit être égal à 0,91 z. Si nous espaçons les tubes d'une quantité égale
aux 3/4 de
* Puisque nous parlons de sources incohérentes dont les intensités s'ajoutent toujours linéaire-
ment, les charges électriques analogues auront toujours le même signe. D'autre part, notre
analogie ne s'applique qu'à l'énergie lumineuse tombant sur une surface opaque, donc nous ne
devons inclure dans notre intégrale que les sources qui éclairertt la surface (et, naturellement,
aucune source située au-dessous de la surface!).
212
la distance au plafond, le facteur exponentiel vaut alors 1/4000, et nous avons un
coefficient de sécurité de 4, donc nous sommes franchement sûrs d'avoir un éclairement
constant à un millième près. (Un calcul exact montre que A 1 est en réalité le double du
champ moyen, donc la réponse exacte sera b = 0,8z.) Il est un peu surprenant que
pour un éclairement aussi uniforme, la séparation permise pour les tubes soit si grande.
Cependant, une question se pose sûrement à la fin d'une telle discussion: pourquoi
les équations relatives à ces différents phénomènes sont-elles si semblables? Nous pourrions
dire: «c'est l'unité profonde de la nature». Mais qu'est-ce que cela signifie? Que
pourrait vouloir dire pareille proposition? Cela pourrait signifier simplement que les
équations sont semblables pour différents phénomènes; mais alors, bien sûr, nous
n'avons donné aucune explication.« L'unité profonde» pourrait signifier que tout est fait
de la même matière, et par conséquent obéit aux mêmes équations. Cela paraît une bonne
explication, mais réfléchissons. Le potentiel électrostatique, la diffusion des neutrons,
l'écoulement de la chaleur-traitons-nous là de la même matière? Pouvons-nous vraiment
imaginer que le potentiel électrostatique est physiquement identique à la température, ou à
la densité de particules? Il est certain que q, n'est pas exactement la même chose que l'éner-
gie thermique des particules. Le déplacement d'une membrane n'est certainement pas la
même chose qu'une température. Pourquoi alors y a-t-il« une unité profonde»?
Une observation plus poussée de la physique de ces nombreux sujets, montre en fait
que les équations ne sont pas vraiment identiques. L'équation que nous avons trouvée
pour la diffusion des neutrons n'est qu'une approximation, valable seulement pour des
distances grandes devant le libre parcours moyen. En regardant de plus près nous verrions
les neutrons individuels se déplacer dans différentes directions. Certainement le
mouvement d'un neutron individuel est quelque chose de tout à fait différent de la
variation douce que nous avons obtenue en résolvant l'équation différentielle. L'équation
différentielle est une approximation, parce que nous avons admis que les neutrons étaient
également répartis dans I'espace.
Est-il possible que ceci soit la clé du problème? Que ce qui est commun à tous les phéno-
mènes c'est l'espace, le cadre dans lequel est placée la physique? Tant que les choses
varient de façon raisonnablement douce dans l'espace, ce qui sera important, ce seront
les variations des grandeurs avec la position dans l'espace. C'est pourquoi nous obtenons
toujours une équation avec un gradient. Les dérivées doivent apparaître sous forme
d'un gradient ou d'une divergence; comme les lois de la physique sont indépendantes
de la direction, elles doivent pouvoir s'exprimer sous forme vectorielle. Les équations de
l'électrostatique sont les équations vectorielles les plus simples qui ne contiennent que les
dérivées des grandeurs par rapport aux coordonnées d'espace. Tout autre problème
simple - ou toute simplification d'un problème compliqué doit ressembler à un
problème d'électrostatique. Ce qui est commun à tous nos problèmes, c'est qu'ils font
intervenir !'espace et que nous avons imité ce qui est en fait un phénomène compliqué
par une équation différentielle simple.
213
Ceci nous conduit à une autre question intéressante. La même chose n'est-elle pas
vraie aussi pour les équations del' électrostatique? Ne seraient-elles correctes, elles aussi,
que comme une imitation adoucie d'un monde microscopique en réalité bien plus
compliqué? Serait-il possible que le monde réel soit fait des petits X-ons qui ne pourraient
être vus qu'à des distances très petites? Et que dans nos mesures nous observions toujours
les choses à une si grande échelle, que nous ne pouvons voir ces petits X-ons, et c'est
pourquoi nous obtenons les équations différentielles?
Notre théorie de l'électrodynamique pour l'instant la plus complète, a en vérité ses
difficultés aux très petites distances. Il est donc possible, en principe, que ces équations
soient des versions adoucies de quelque chose. Elles paraissent exactes aux distances
allant jusqu'à 10- 14 cm, mais alors elles commencent à sembler fausses. Il est possible
qu'il y ait un « mécanisme» sous-jacent encore à découvrir, et que les détails d'une
complexité sous-jacente soient cachés sous les équations simplifiées comme c'est le cas
dans la diffusion« adoucie» des neutrons. Mais personne n'a encore formulé une théorie
qui marche dans ce sens.
Il est même assez curieux de voir que (pour des raisons que nous ne comprenons pas
du tout) la relativité jointe à la mécanique quantique, telles que nous les connaissons,
semblent empêcher l'invention d'une équation fondamentalement différente de l'Eq.
(12.4), qui ne conduise pas, en même temps, à une contradiction. Pas simplement un
désaccord avec l'expérience, mais une contradiction interne. Telle que, par exemple,
la prédiction que la somme des probabilités de tous les événements possibles ne serait pas
égale à l'unité, ou que les énergies pourraient dans certains cas être des nombres
complexes, ou tout autre idiotie de ce genre. Personne jusqu'ici n'a élaboré une théorie
de l'électricité, dans laquelle V2 q, = - p/Eo est considérée comme une approximation
« adoucie» d'un mécanisme sous-jacent, et qui ne conduü.e pas en fin de compte à une
absurdité. Mais, devons-nous ajouter, il est vrai aussi que l'hypothèse suivant laquelle
V2<P = - p/Eo est valable à toutes les distances, aussi petites soient-elles, conduit à ses
propres absurdités (l'énergie électrique d'un électron est infinie) - absurdités dont
personne ne sait encore s'affranchir.
214
18
Magnéwstatique
215
Fig. 1.3-1. La composante dépendant
de la vitesse de la force agissant sur une
charge en mouvement est normale à v et
à la direction de B. Elle est aussi propor-
tionnelle à la composante de v normale à B.
soit à v sine.
La force magnétique est facilement mise en évidence en approchant un aimant droit
d'un tube à rayons cathodiques. La déviation du faisceau d'électrons montre que la pré-
sence de l'aimant produit des forces agissant sur les électrons, normalement à la direction
de leur mouvement, comme nous l'avons décrit au chapitre 12 du Vol. I.
L'unité de champ magnétique B est évidemment un newton-seconde par coulomb-
mètre. La même unité est aussi un volt-seconde par mètre 2• On l'appelle aussi le weber
par mètre carré.
j · n AS, (13.2)
Aq = pv · n AS At.
La charge par unité de temps est alors pv · nAS, d'où nous tirons
j = pv. (13.3)
216
....
''
'''
'\
1
I
Fig. 13-2. Si une distribution de char-
ges, de densité p, se déplace à la vitesse v,
la charge qui traverse 1'1S par unité de temps
est pv · nl'1S.
(13.5)
(voir Fig. 13-3).
\_{" j
j~§~Î
Fig. 13-3. L'intensité / du courant à
SURFACES J
travers la surface S est j. ndS.
f
surface
j . n dS = -fi(Q intérieure)
(13.6)
fermée
217
Fig. 13-4. L'intégrale de j · n sur une
surface fermée est la variation par unité de
fermée
temps de la charge totale Q à l'intérieur de
s la surface.
Qintérieure = fV
P dV. (13.7)
intérieur à S
(Fig. 13-Sa). S'il y a N charges par unité de volume, le nombre contenu dans un petit
volume L1 V de ce fil est NA V. La force magnétique totale AF agissant sur le volume A V
est la somme des forces agissant sur les charges individuelles, soit,
218
- I
(al
-I
Fig. 13-5. La force magnétique agis-
sant sur un fil parcouru par un courant est
la somme des forces agissant sur chaque
charge en mouvement.
(b)
Alors, nous pouvons appeler jA le vecteur courant 1 dans le fil. (Son module est l'inten-
sité du courant dans le fil, sa direction celle du fil.) Il s'ensuit que
• Nous verrons plus tard, cependant, que de telles hypothèses ne sont en général pas correctes
pour les forces électromagnétiques!
219
que si un courant circule dans un fil, ce fil lui-même engendre un champ magnétique.
Des charges en mouvement, donc, créent un champ magnétique. Nous allons maintenant
tenter de découvrir les lois suivant lesquelles ces champs sont créés. La question qui se
pose est la suivante: étant donné un courant, quel champ magnétique produit-il? La
réponse à cette question fut déterminée expérimentalement par trois expériences critiques
et un raisonnement théorique brillant donné par Ampère. Nous passerons sous silence
ce développement historique intéressant et nous dirons tout simplement qu'un grand
nombre d'expériences ont démontré la validité des équations de Maxwell. Nous
les prenons comme point de départ. Si nous laissons tomber dans ces équations les
termes comprenant des dérivées par rapport au temps, nous obtenons les équations de la
magnétostatique:
V·B = 0 (13.12)
et
(13.13)
Ces équations ne sont valables que si toutes les densités de charge électrique sont cons-
tantes et tous les courants continus, de sorte que les champs électriques et magnétiques
ne varient pas avec le temps - tous les champs sont «statiques».
Nous pouvons remarquer qu'il est plutôt dangereux de penser qu'il existe une chose
telle qu'une situation magnétique statique, car après tout, il doit bien exister des courants
pour créer un champ magnétique - et les courants ne peuvent provenir que de charges
en mouvement. La « magnétostatique » est donc une approximation. Elle est relative à
une situation dynamique d'un type spécial, avec de grands nombres de charges en
mouvement, que nous pouvons assimiler à un flux continu de charges. C'est seulement
alors que nous pouvons parler d'un vecteur densité de courant j qui ne varie pas avec le
temps. Le sujet devrait s'appeler plus précisément l'étude des courants continus. En
admettant que tous les champs sont constants, nous laissons tomber les termes en
aE/at et oB/at dans les équations de Maxwell, Eq. (2.41), et nous obtenons les deux
équations (13.12) et (13.13) ci-dessus. Remarquons aussi que, puisque la divergence du
rotationnel d'un vecteur est nécessairement nulle, l'Eq. (13.13) implique que V· j =O.
Ceci n'est vrai, d'après l'Eq. (13.8), que si op/ot est nulle. Mais il doit bien en être ainsi
si E ne varie pas avec le temps, et nos hypothèses sont cohérentes.
La condition V · j = 0 signifie que nous ne pouvons avoir que des charges qui décrivent
des trajets qui se referment sur eux-mêmes. Elles peuvent, par exemple circuler dans
des fils qui forment des boucles complètes, appelées circuits. Les circuits peuvent, évi-
demment, contenir des générateurs ou des batteries qui entretiennent la circulation des
charges. Mais ils ne peuvent contenir de condensateurs qui se chargent ou se déchargent.
(Plus tard, bien sûr, nous développerons cette théorie de manière à tenir compte des
champs dynamiques, mais pour l'instant nous voulons nous intéresser au cas plus
simple des courants continus.)
Considérons maintenant les Eq. (13.12) et (13.13) et voyons ce qu'elles signifient. La
première nous dit que la divergence de B est nulle. En comparant cette équation avec
son analogue électrostatique, qui dit que V· E = p/E 0, nous pouvons en conclure qu'il
n'y a pas d'analogue magnétique à une charge électrique. Il n'y a pas de charges magné-
tiques d'où les lignes de champ de B pourraient sortir. Si nous pensons en termes des
«lignes de champ» du vecteur B, celles-ci ne peuvent jamais partir, ni jamais s'arrêter.
Alors d'où viennent-elles? Les champs magnétiques «apparaissent» en présence de
courants; leur rotationnel est proportionnel à la densité de courant. Partout où il y a des
courants, il y a des lignes de champ magnétique formant
220
des boucles autour des courants. Puisque les lignes de B ne commencent pas ni ne
finissent, elles se refermeront souvent sur elles-mêmes, en boucles fermées. Mais il peut
y avoir aussi des cas compliqués où les lignes de champ ne sont plus de simples boucles
fermées. Mais quoi qu'elles fassent, elles ne divergent jamais à partir de points. On n'a
jamais découvert de charges magnétiques, donc V· B =O. Tout ceci n'est pas vrai
seulement en magnétostatique, ceci est toujours vrai- même pour les champs dynamiques.
Le lien entre le champ B et les courants est contenu dans l'Eq. (13.13). Ici nous avons
une nouvelle situation, qui est très différente de l'électrostatique où nous avions
V x E x O. Cette équation exprimait que l'intégrale curviligne de E le long de toute
courbe fermée était nulle:
f
boucle
E · ds O.
Nous avons obtenu ce résultat à partir du théorème de Stokes, selon lequel l'intégrale
le long de toute courbe fermée de tout champ de vecteurs est égale à l'intégrale de surface
de la composante normale du rotationnel du vecteur (prise sur une surface quelconque
s'appuyant sur la courbe fermée). En appliquant le même théorème au champ magné-
tique, et en utilisant les symboles qui figurent sur la Fig. 13-6, nous obtenons
J B · ds
Jr = J s
(V X B)- n dS. (13.14)
L'intégrale de j, d'après (13.5), est l'intensité totale I du courant qui traverse la surface S.
Puisque pour des courants continus, le courant à travers S est indépendant de la forme
de S, tant que celle-ci est limitée par la courbe I', on parle couramment du «courant
à travers
221
la boucle I'». Nous avons alors une loi générale: la circulation de B le long d'une courbe
fermée quelconque est égale au courant l à travers la boucle, divisé par e0c2 :
J B . ds = l à travers r . (13.16)
J'r Eoc 2
Cette loi - appelée le théorème d' Ampère - joue en magnétostatique le même rôle que le
théorème de Gauss en électrostatique. Le théorème d' Ampère seul ne détermine pas B
à partir des courants; il faut, en général, tenir compte aussi de V · B =O. Mais comme
nous allons le voir dans le paragraphe suivant, il peut suffire pour déterminer le champ
dans certaines conditions présentant des symétries simples.
13-5 Le champ magnétique d'WJ fil rectiligne et d'WJ solénoïde; courants atomiques
f B · ds = B · 27rr.
Le courant total à travers la boucle n'est rien d'autre que le courant l dans le fil, donc
l
B · 27rr = ,
EoC 2
222
ou
2/
B= 47TEoc2 r. (13.17)
B = _1_ 2/ X e, . (13.18)
47re 0c 2 r
Nous avons séparé le facteur l/4ne0 c2, car il apparaît souvent. Il est bon de se rappeler
qu'il vaut exactement 10-1 (dans le système MKS), puisque l'on définit l'unité d'intensité
de courant, l'ampère, à partir d'une équation du type (13.17). A un mètre d'un courant
d'urr ampère, le champ magnétique est de 2 x 10- 1 webers par mètre carré.
Puisqu'un courant crée un champ magnétique, il exercera une force sur un fil voisin,
parcouru aussi par un courant. Dans le chapitre 1, nous avons décrit une façon simple
de mettre en évidence les forces entre deux fils parcourus par des courants. Si les fils
sont parallèles, chacun d'eux est normal au champ B créé par l'autre; les fils doivent don~
s'attirer ou se repousser. Quand les courants ont le même sens, les fils s'attirent; quand
les courants sont de sens contraire, les fils se repoussent.
.
r-L~ r .
r __ ...,.... ___ ...,
I
f.t' .......•.......... l ... ·,·. ~i
1
11 ""'" 1 1
1
1 111
1 1
Be 111
Lignes de champ de B
Prenons un autre exemple qui peut être traité par le théorème d'Ampère, à condition
d'y ajouter quelques connaissances sur le champ. Supposons que nous ayons une longue
bobine de fil enroulé en spirales jointives, comme le montre la coupe sur la Fig. 13-8.
Une telle bobine s'appelle un solénoide. On observe expérimentalement, que pour un
solénoïde très long par rapport à son diamètre, le champ à l'extérieur est trè~ petit par
rapport au champ à l'intérieur. Tenant compte de ce seul fait et du théorème d' Ampère,
nous pouvons calculer l'intensité du champ à l'intérieur.
Puisque le champ est localisé à l'intérieur (et a une divergence nulle), les lignes de
champ doivent être parallèles à l'axe, comme on le voit sur la Fig. 13-8. Dans ce cas,
nous pouvons appliquer le théorème d'Ampère à la «courbe» rectangulaire I', tracée
sur la figure. La boucle s'étend sur uhe longueur Là l'intérieur du solénoïde, où le champ
est, disons 8 0 , puis tourne à angle droit, et revient par l'extérieur où le champ est négli-
geable. L'intégrale
223
curviligne de B pour cette courbe est simplement B0 L, et elle doit être égale à l/e 0c2
fois l'intensité totale du courant à travers I', qui est NI s'il y a N tours de fil sur la longueur
L. Nous avons
NI
BoL = Eoc2.
Ou bien, en appelant n le nombre de tours par unité de longueur du solénoïde (c'est-
à-dire, n = N/L), nous obtenons
ni (13.19)
Bo = Eoc2.
La matière est très complexe quand on la regarde d'un point de vue fondamental
- comme nous l'avons vu lors de l'étude des diélectriques. Afin de ne pas interrompre
cet exposé, nous attendrons un peu plus tard pour développer en détail les mécanismes
internes des substances magnétiques comme le fer. Vous devrez donc admettre, pour
l'instant, que tout le magnétisme est créé par des courants et que dans un aimant perma-
nent il existe des courants internes permanents. Dans le cas du fer, ces courants
résultent de la rotation des électrons autour de leur propre axe. Chaque électron possède
un tel spin qui équivaut à la circulation d'un petit courant. Bien sûr, un seul électron ne
crée pas un champ magnétique bien intense, mais un morceau ordinaire de matière
contient des milliards et des milliards d'électrons. Normalement, les spins sont orientés
dans toutes les directions, si bien qu'aucun effet global
224
n'en résulte. Mais le miracle fait que dans de très rares substances, comme le fer, une
grande partie des électrons pivotent avec leurs axe,.,; orientés tous dans la même direction
- pour le fer, deux électrons de chaque atome prennent part à ce mouvement collectif.
Dans un aimant droit, il existe un grand nombre d'électrons pivotant tous autour de la
même direction, ce qui, nous le verrons, est au total équivalent à un courant circulant
à la surface de l'aimant. (Ceci est tout à fait analogue à ce que nous avons trouvé pour
les diélectriques - un diélectrique uniformément polarisé est équivalent à une distribu-
tion superficielle de charge.) Ce n'est donc pas par accident qu'un aimant droit est équi-
valent à un solénoïde.
QI-) Vo
q
s s'
' - p_ ::-- - - ~- _p~ - - - - - p:_ - -
- L - P+- -
101
/ v+sO V-• V
lb}
1
--
v+ • -v
V
v'_•O
Fig. 13-1 O. L'interaction d'un fil parcouru par un courant et d'une particule de charge q,
représentée dans les deux référentiels. Dans le référentiel S (partie a), le fil est au repos;
dans le référentiel S' {partie b), la charge est au repos.
225
Dans le référentiel S, il est clair qu'il s'exerce une force magnétique sur la particule.
Cette force est dirigée vers le fil, donc si la charge se déplaçait librement, nous la verrions
s'incurver vers le fil. 1'..fais dans le référentiel S' il ne peut y avoir de force magnétique
agissant sur la particu!e puisque sa vitesse est nulle. Reste-t-elle donc là où elle est?
Allons-nous observer des phénomènes différents dans les deux systèmes? D'après le
principe de relativité, nous devrions aussi voir la particule se rapprocher du fil dans S'.
Essayons de comprendre pourquoi il en est bien ainsi.
Revenons sur la description atomique d'un fil parcouru par un courant. Dans un
conducteur normal, comme le cuivre, les courants électriques sont dus au mouvement
de certains des électrons négatifs - appelés électrons de conduction - tandis que les
charges positives du noyau et le reste des électrons restent immobiles au sein du matériau
conducteur. Soit p_ la densité des électrons de conduction et v leur vitesse dans S. La
densité des charges au repos dans S est P+ qui doit être égale à moins p_, puisque nous
considérons un fil non chargé. Ainsi il n'existe pas de champ électrique à l'extérieur du
fil et la force agissant sur la particule en mouvement est simplement
F = qv 0 X B.
Appliquant le résultat trouvé dans l'Eq. (13.18) pour le champ magnétique à la dis-
tance r de l'axe d'un fil, nous en tirons que la force appliquée à la particule est dirigée
vers le fil et a pour intensité
2/qvo
F = 4'lre c2
0
• -,- •
Appliquant les Eq. (13.4) et (13.5), on peut écrire le courant/ sous la forme p_vA où A
est l'aire d'une section du fil. Alors
2qp_ÂVVo
F = 4'l!'e 0 c2 • r (13 .20)
Nous pourrions poursuivre cette démonstration dans le cas général où v et v0 sont des
vitesses arbitraires, mais il sera tout aussi bien de s'intéresser au cas particulier où la
vitesse v0 de la particule est la même que la vitesse v des électrons de conduction. Nous
écrivons donc v0 = v, et l'Eq. (13.20) devient
F = _q_ p.....A v2 . (13.21)
2'l!'Eo r c2
Voyons maintenant ce qui se passe dans S' où la particule est au repos et où le fil
se déplace (vers la gauche sur la figure) à la vitesse v. Les charges positives qui se
déplacent avec le fil, vont créer un champ magnétique B' au point où se trouve la parti-
cule. Mais la particule est maintenant au repos, donc il n'y a pas de force magnétique
agissant sur elle! S'il doit s'exercer une force sur la particule, celle-ci ne peut être due
qu'à un champ électrique. Il faut donc que ce soit le fil en mouvement qui ait créé un
champ électrique. Mais il ne peut le faire que s'il apparaît chargé - c'est donc qu'un fil
neutre parcouru par un courant, apparaît chargé quand il est mis en mouvement.
Approfondissons ceci. Essayons de calculer la densité de charge dans le fil dans S'
à partir de ce que nous savons dans S. On pourrait penser a priori qu'elles sont les
226
mêmes; mais nous savons que les longueurs sont différentes entre Set S' (voir chapitre 15,
Vol. I), donc les volumes aussi. Et comme les densités dépendent du volume occupé par
les charges, les densités seront différentes aussi.
Avant de pouvoir préciser les densités de charges dans S', nous devons voir ce que
devient la charge électrique d'un groupe d'électrons quand les charges se déplacent.
Nous savons que la masse apparente d'une particule est multipliée par 1/ yl - v!/c2.
Est-ce qu'il en est de même pour sa charge? Non! Les charges sont toujours les mêmes,
en mouvement ou non. Sinon nous n'observions pas toujours que la charge totale se
conserve.
Prenons un bloc d'une substance, disons conductrice, initialement neutre. Puis chauf-
fons-la. Comme les électrons ont des masses différentes de celles des protons, les vitesses
des électrons et des protons vont varier de quantités différentes. Si la charge d'une
particule dépendait de la vitesse de la particule qui la porte, les charges des électrons
et des protons ne se compenseraient plus dans le bloc chauffé. Un bloc se chargerait
donc quand on le chauffe. Comme nous l'avons vu précédemment, une très petite
variation relative de la charge de tous les électrons du bloc donnerait naissance à des
champs électriques énormes. Un tel effet n'a jamais été observé.
De même, nous pouvons remarquer que la vitesse moyenne des électrons dans la
matière dépend de sa composition chimique. Si la charge d'un électron variait avec sa
vitesse, la charge totale d'un bloc d'une certaine substance varierait dans une réaction
chimique. Encore une fois, un calcul facile montre que même une toute petite variation
de la charge avec la vitesse produirait des champs énormes dans le cas des réactions
chimiques les plus simples. Un tel effet n'a jamais été observé, et nous concluons que la
charge électrique d'une particule unique est indépendante de son état de mouvement.
Ainsi la charge q d'une particule est une grandeur scalaire invariante, indépendante du
référentiel. C'est-à-dire que dans un référentiel quelconque, la densité de charge d'une
distribution d'électrons est simplement proportionnelle au nombre d'électrons par
unité de volume. Nous n'avons donc qu'à nous préoccuper du fait que le volume peut
changer en raison de la contraction relativiste des longueurs.
Appliquons alors ces idées à notre fil en mouvement. Si nous prenons une longueur L 0
de fil, dans lequel règne une densité de charge p0 relative aux charges stationnaires, il
contiendra une charge totale Q = p0 L 0 A 0 • Si l'on observe les mêmes charges en mouve-
ment, à la vitesse v dans un autre référentiel, elles seront contenues dans un bloc de
substance ayant une longueur plus courte
L = Lov'l - v2/c2, (13.22)
mais ayant la même aire A 0 (puisque les dimensions transversales par rapport au mouve-
ment sont inchangées). Voir Fig. 13-11.
Si nous appelons p la densité des charges dans le référentiel où elles sont en mouve-
ment, la charge totale Q sera pLA 0 • Elle doit être égale aussi à p 0 L 0 A 0 , puisque la charge
est la même dans tous les systèmes, de sorte que pL = p0 L 0 , ou, d'après (13.22),
p = Po (13.23)
v'l - v2/c 2
227
(bl
=<:
Ç :.
I"" L' ,
aire A
o v
Fig. 13-11. Si une distribution de particules chargées au repos a la densité de charge p 0 ,
les mêmes charges auront une densité p=p 0 / v'1 -v 2 /c 2 quand on les voit d'un référentiel
de vitesse relative v.
p' - --::::::::P:::::+=:;=
+- vl - v2 /c 2
(13.24)
Les charges négatives sont au repos dans S'. Elles ont donc leur «densité au repos»
p0 dans ce référentiel. Dans l'Eq. (13.23) p0 = p', parce qu'elles ont la densité p' _quand
le fil est au repos, c'est-à-dire dans le référentiel S où les charges négatives ont une
vitesse v. Pour les électrons de conduction, nous avons alors
p = p'_ (13.25)
- vl - v2/c2
ou
p'_ = P-Vl - v2 /c 2 • (13.26)
Maintenant nous pouvons voir pourquoi il y a des champs électriques dans S' - parce
que dans ce référentiel, la densité de charge totale dans le fil p' est
v2/c2
(13.27)
p' = P+ Vl - v2/c2
Notre fil en mouvement est chargé positivement et va créer un champ électrique E' au
point extérieur où se trouve la particule immobile. Nous avons déjà résolu le problème
électrostatique d'un
228
cylindre uniformément chargé. Le champ électrique à la distance r de l'axe du cylindre
est
2
p' A P+Av / c 2
E' = - ::---'--'--;:=:::::==:;:::::::; (13.28)
27T'EQI' - 27reorvl - v2;c2
La force qui s'exerce sur la particule chargée négativement est dirigée vers le fil. Nous
avons au moins une force orientée dans la même direction, quel que soit le point de vue
adopté; la force électrique dans S' a la même direction que la force magnétique dans S.
L'intensité de la force dans S' est
Comparant ce résultat pour F avec notre résultat pour F dans l'Eq. (13.21), nous
voyons que les intensités des deux forces sont presque identiques quel que soit le point
de vue. En fait,
F
F' = (13.30)
vl - v2/c2
donc, pour les petites vitesses que nous avons considérées jusqu'ici, les deux forces sont
égales. Nous pouvons dire que tout au moins pour les petites vitesses, nous comprenons
que le magnétisme et l'électricité sont« deux façons de voir la même chose».
Mais les choses vont encore mieux que cela. Si nous tenons compte du fait que les
forces aussi se transforment quand on passe d'un système à un autre, nous trouvons que
les deux façons de voir ce qui se passe conduisent en fait au même résultat physique
quelle que soit la vitesse.
Une façon de voir cela est de poser une question comme: quelle sera la quantité de
mouvement transversale de la particule après que la force ait agi pendant un certain
temps? Nous savons d'après le chapitre 16 du Vol. 1 que la quantité de mouvement
transversale d'une particule doit être la même dans les référentiels S et S'. Soit .1· la
coordonnée transversale, nous voulons comparer tJ.pY et !:J.p;,. Utilisant l'équation
relativiste du mouvement F = dp/dt, nous prévoyons qu'après le temps L1t notre particule
aura, dans le système S, une quantité de mouvement transversale L1py donnée par
Nous devons évidemment comparer tJ.pY et !:J.p~ pour des intervalles de temps M et
L1t' correspondants. Nous avons vu au chapitre 15, Vol. 1 que les intervalles de temps
relatifs à la particule en mouvement sont plus longs que ceux comptés dans le système
de la particule au repos. Puisque notre particule est initialement au repos dans S', nous
prévoyons, pour de petits Lit que
f).t'
/).t = --;::====
yl - v /c 2 2
(13.33)
229
et tout marche bien ainsi. De (13.31) et (13.32) nous tirons,
Si nous avions choisi encore un autre système de coordonnées, nous aurions trouvé
un mélange différent des champs E et B. Les forces magnétiques et électriques sont une
partie d'un seul phénomène physique - les interactions électromagnétiques entre parti-
cules. La division de cette interaction en parties électriques et magnétiques dépend
énormément du référentiel choisi pour la description. Mais une description électro-
magnétique complète est invariante; l'électricité et le magnétisme, considérés, ensemble,
sont en accord avec la relativité d'Einstein.
Puisque les champs électriques et magnétiques apparaissent différemment mélangés
suivant le référentiel choisi, nous devons être prudents dans notre façon de considérer
les champs E et B. Par exemple, si nous pensons aux «lignes de champ» de E ou B,
nous ne devons pas leur attacher une trop grande réalité. Ces lignes peuvent disparaître
si nous essayons de les observer dans un système de coordonnées différent. Par exemple,
dans le système S' il y a des lignes de champ électrique, que nous ne trouvons pas, «se
déplaçant devant nous avec la vitesse v dans le système S». Dans le système Sil n'y a
aucune ligne de champ électrique! Par suite, cela n'a aucun sens de dire: quand je déplace
un aimant, il emporte son champ avec lui, de sorte que les lignes de champ de B se
déplacent aussi. Il n'y a pas moyen, en général, de donner un sens à l'idée de «la vitesse
d'une ligne de champ en mouvement». Les champs sont le moyen pour nous de décrire
ce qui se passe en un point de l'espace. En particulier E et B nous renseignent sur les
forces qui agiront sur une particule en mouvement. La question «quelle est la force
exercée sur une charge par un champ magnétique en mouvement?» ne signifie rien de
précis. La force est donnée par les valeurs de E et B au point où se trouve la charge, et
la formule (13.1) ne doit pas être modifiée si la source de E ou B se déplace (ce sont les
valeurs de E et B qui seront modifiées par le mouvement). Notre description mathéma-
tique concerne uniquement les champs considérés comme fonction de x, y, z, et t par
rapport à un certain système d'inertie.
230
Nous parlerons plus tard «d'une onde des champs électriques et magnétiques se propa-
geant dans l'espace», comme par exemple une onde lumineuse. Mais c'est comme si
nous parlions d'une onde qui se propage le long d'une corde. Nous ne voulons pas dire
alors, qu'une partie de la corde se déplace dans la direction de l'onde, nous voulons dire
que le déplacement de la corde se produit d'abord à un endroit, et plus tard à un autre.
De même, dans une onde électromagnétique, !'onde se propage, mais l'intensité des
champs varie. Donc par la suite quand nous - ou quelqu'un d'autre - parlerons d'un
champ «en mouvement» vous devrez l'interpréter comme une façon courte et élégante
de décrire un champ qui varie dans certaines conditions.
p = Po
v'l - v2;c2
231
Grâce à ces équations nous pouvons relier les charges et les courants dans un référen-
tiel à ceux dans un autre. Considérant les charges et les courants dans un des référentiels,
nous pouvons résoudre le problème électromagnétique dans ce référentiel, par appli-
cation des équations de Maxwell. Le résultat que nous obtiendrons pour les mouvements
des particules sera le même quel que soit le référentiel choisi. Nous reviendrons plus tard
sur les transformations relativistes des champs électromagnétiques.
V ·B = 0,
232
14
14-1 Le potentiel vecteur 14-5 Le champ créé par une petite boucle;
le dipôle magnétique
14-2 Le potentiel vecteur de courants
connus 14--6 Le potentiel vecteur d'un circuit
14-3 Un fil rectiligne 14-7 La loi de Biot et Savart
14-4 Un long solénoïde
Dans ce chapitre nous continuons notre étude des champs magnétiques associés à des
courants permanents - objet de la magnétostatique. Le champ magnétique est relié aux
courants électriques par nos équations de base
V·B = 0, (14.1)
c2 v X B = l . (14.2)
Eo
Nous voulons maintenant résoudre ces équations mathématiquement d'une manière
générale, c'est-à-dire, sans exiger aucune symétrie spéciale et sans deviner. Nous avons
vu qu'en électrostatique il existe une méthode simple de calcul des champs lorsque les
positions de toutes les charges électriques sont connues: on calcule simplement le poten-
tiel scalaire q, en intégrant sur les charges - comme dans l'Eq. (4.25). Si l'on veut ensuite
le champ électrique, on l'obtient à partir des dérivées de<f>. Nous allons montrer mainte-
nant qu'il existe une méthode analogue pour calculer le champ magnétique B lorsque l'on
connaît la densité de courant j de toutes les charges en mouvement.
En électrostatique nous avons vu qu'il était possible (parce que le rotationnel de E
était toujours nul) de représenter E comme le gradient d'un champ scalaire<f>. Maintenant
le rotationnel de B n'est pas toujours nul, et il n'est donc pas possible, en général, de le
représenter comme un gradient. Cependant, la divergence de B est toujours nulle, et
cela veut dire que nous pouvons toujours représenter B comme le rotationnel d'un autre
champ vectoriel. En effet, comme nous l'avons vu dans la section 2-8, la divergence d'un
rotationnel est toujours nulle. Nous pouvons donc toujours relier B à un champ que
nous appellerons A par la relation
B =V X A. (14.3)
233
Ou, en écrivant les composantes,
B, = (V X A) = oA 11 _ oA:. .
• ox oy
V · B = V · (V X A) = O.
q,' = q, + c.
Le nouveau potentiel c/J' donne les mêmes champs électriques, puisque le gradient VC
est nul; </Jet c/J' représentent la même physique.
Nous pouvons, de même, avoir différents potentiels vecteurs A qui donnent les
mêmes champs magnétiques. Encore une fois, puisque l'on obtient B à partir de A
par différentiation, ajouter une constante à A ne change rien de physique. On a même
plus de latitude pour A. Nous pouvons ajouter à A tout champ qui est le gradient d'un
certain champ scalaire, sans changer la physique. Nous pouvons montrer cela de la
façon suivante. Supposons que_.nous avons un champ A qui donne correctement le
champ magnétique B dans uve 'certaine situation réelle, et demandons-nous dans quels
cas un nouveau potentiel vecteur A' donnera le même champ B par substitution dans
(14.3). A et A' doivent alors avoir le même rotationnel:
B = V X A' = V X A.
Donc
V X A' - V X A = V X (A' - A) = O.
Mais si le rotationnel d'un vecteur est nul, il faut qu'il soit égal au gradient d'un certain
champ scalaire, soit If/, de sorte que A' - A= V 1f1. Ce qui veut dire que si A est un
potentiel vecteur satisfaisant pour un problème, pour tout If!,
234
Nous pouvons toujours faire cela sans changer B. Ceci .parce que, bien que A et A'
aient le même rotationnel, et donnent le même B, ils n'ont pas besoin d'avoir la même
divergence. En effet, V· A'= V· A+ V2 1f1, et par une choix convenable de If/ nous
pouvons donner à V · A' la valeur que nous voulons.
Que devons-nous choisir pour V · A? Le choix doit être fait de façon à avoir la plus
grande commodité mathématique possible et dépendra du problème que nous faisons.
En magnétostatique, nous ferons le choix simple
V ·A= O. (14.6)
(Plus tard, lorsque nous aborderons l'électrodynamique, nous changerons notre choix.)
La définition complète* de A est donc, pour le moment, V x A= B et V· A= O.
Pour nous familiariser avec le potentiel vecteur, étudions tout d'abord ce qu'il vaut
pour un champ magnétique uniforme B0 • En prenant l'axez dans la direction de B0 , nous
devons avoir
Bx
oA, aA 11
ay 0,
Tz
ôA,, oA,
B11 = -oz - -ax 0, (14.7)
oA 11 ai,,=
B, = a-x- Bo.
Âx = -yBo, A 11 = 0, A,= O.
Une combinaison linéaire de ces deux solutions est encore une autre solution:
* Notre définition ne détermine pas encore A d'une manière unique. Pour avoir une détermi-
nation unique, il faudrait aussi dire quelque chose sur le comportement du champ A pour
certaines limites, ou à grande distance. Il est quelquefois pratique, par exemple, de choisir ur
champ qui tend vers zéro à grande distance.
235
De plus, la grandeur de A est proportionnelle à vx2 + y2 et, par conséquent, à r1 • A
peut donc s'écrire simplement (pour notre champ uniforme)
A= !B X r'.. (14.9)
Le potentiel vecteur A a la grandeur Br'/2 et tourne autour de l'axe des z comme on le
voit sur la Fig. 14-1. Si, par exemple, le champ B est le champ axial à l'intérieur d'un
solénoïde, le potentiel vecteur circule dans le même serts que les courants du solénoïde.
On peut obtenir le potentiel vecteur d'un champ uniforme d'une autre façon. On
peut relier la circulation de A le long d'une boucle fermée r à l'intégrale de surface de
V x A par le théorème de Stokes, Eq. (3.38):
fr A · ds = J (V X A) . n da.
(14.10)
à l'intérieur de r
Mais l'intégrale du second membre est égale au flux de B à t'.avers la boucle, de sorte que
f A· ds = 27rr'A = 7rr' 2 B.
236
Nous obtenons, comme précédemment,
Br'
A 2'
Dans l'exemple que nous venons de donner, nous avons calculé le potentiel vecteur
à partir du champ magnétique, ce qui est le contraire de ce que l'on fait normalement.
Dans des problèmes compliqués il est habituellement plus facile de calculer le potentiel
vecteur, puis d'en déduire le champ magnétique. Nous allons maintenant montrer
comment cela peut être fait.
c 2 V X (V X A) = j_ . (14.12)
Eo
V· Vef> = - p_ (14.13)
Eo
était à l'électrostatique.
Notre équation (14.12) pour le potentiel vecteur ressemble même encore plus à celle
que nous avons établie pour 1fJ si nous récrivons V x (V x A) en utilisant l'identité vecto-
rielle (2.58):
V X (V X A) = V(V ·A) - \7 2A. (14.14)
Puisque nous avons choisi de faire V· A= 0 (et vous voyez maintenant pourquoi), l'Eq.
(14.12) devient
(14.15)
j.
(14'.16)
- Eoc 2 ·
2 p
V'<f>=--· (14.l 7)
Eo
Tout ce que nous avons appris sur le calcul des potentiels lorsque p est connu, peut
être utilisé pour le calcul de chacune des composantes de A lorsque l'on connaît j !
237
Nous avons vu au chapitre 4 qu'une solution générale pour l'équation de l'électro·
statique (14.17) est
et de même pour Ay et A,. (La figure 14-2 vous rappellera nos conventions pour r12 et dV2 .)
Nous pouvons rassembler les trois solutions sous forme vectorielle
(Vous pouvez vérifier si vous voulez, en différenciant directement les composantes, que
cette intégrale A satisfait ~ · A = 0 tant que V · j = 0, ce qui, comme nous l'avons vu,
doit arriver pour les courants permanents.)
Nous avons donc une méthocte générale de calcul des champs magnétiques créés par
les courants permanents. Le principe est: la composante x du potentiel vecteur créé par
une densité de courant j est identique au potentiel électrique <f> qui serait créé par une
densité de charge p égale àJxf c2 - et de même pour les composantes y et z. (Ce principe
ne marche qu'avec des composantes dans des directions fixes. La composante« radiale »
de A ne se déduit pas de la même façon de la composante « radiale» de j, par exemple.)
A partir du vecteur densité de courant j, nous pouvons donc trouver A en utilisant
l'Eq. (14.19)-c'est-à-dire que nous calculons chacune des composantes de A en résolvant
trois problèmes d'électrostatique imaginaires pour des distributions de charges
P1 = ixfc 2 , p 2 = }y/c2, et p3 = j,/c 2 • Nous obtenons ensuite B en prenant diverses
dérivées de A pour avoir V· A. C'est un tout petit peu plus compliqué que pour l'électro-
statique mais c'est la même idée. Nous allons maintenant illustrer la théorie en calculant
le potentiel vecteur dans quelques cas particuliers.
238
14-3 Un fil rectiligne
A titre de premier exemple, nous allons à nouveau calculer le champ créé par un fil
rectiligne - problème que nous avons résolu dans le dernier chapitre en utilisant l'Eq.
(14.2) et quelques considérations de symétrie. Nous prenons un long fil rectiligne de
rayon a, parcouru par un courant permanent /. Contrairement à la charge d'un conduc-
teur dans le cas de l'électrostatique, un courant permanent dans un fil est uniformément
distribué à travers toute la section du fil. Si nous choisissons nos coordonnées comme
sur la Fig. 14-3, le vecteur densité de courantj a seulement une composante z. Sa grandeur
est
. I
}z = 1fa2 (14.20)
à l'intérieur du fil, et zéro à l'extérieur.
Puisque jx et jy sont toutes deux nulles, nous avons tout de suite
A,,= 0, Ây =o.
Pour obtenir A., nous pouvons utiliser la solution trouvée pour le potentiel électro·
statique q, d'un fil ayant une densité uniforme de charge p = j./c2• Pour des points à
l'extérieur d'un cylindre chargé infini, le potentiel électrostatique vaut
où r' = v'x 2 + y2 et À. représente la charge par unité de longueur, na2p. Âz doit donc
valoir
2·
A, = - 7rO 7• ln r'
27rEoc 2
pour les points à l'extérieur d'un long fil parcouru par un courant uniforme. Puisque
na2jz = !, nous pouvons aussi écrire
I
A.= - -2 lnr'. (14.21)
2 7rEoC
239
Nous pouvons maintenant trouver B à partir de (14.4). Il n'y a que deux des six dérivées
qui ne soient pas nulles. Nous obtenons
B.,= -- 1
-~Inr'
. 2m: c2 ày
= I y
- 27l"E 0c2 r'2 '
(14.22)
0
Bu = -I22;;-nr
àl, (14.23)
7l"EoC uX
B, =O.
Nous obtenons le même résultat que précédemment: B tourne autour du fil, et a pour gran-
deur
l 21
B=---· (14.24)
47!"EoC2 r'
Tout comme nous avons défini une «densité superficielle de charge» u, nous
définissons ici une « densité superficielle de courant » J égale au courant par unité de
longueur à la surface du solénoïde (qui n'est autre, bien entendu, que la valeur moyenne
de j multipliée par l'épaisseur de l'enroulement mince). Le module de J est ici, ni. Ce
courant de surface (voir Fig. 14-4) a pour composantes:
240
Nous voulons tout d'abord calculer Ax pour des points à l'extérieur du solénoïde.
Le résultat est le même que pour le potentiel électrostatique à l'extérieur d'un cylindre
ayant une charge superficielle
u = u 0 sin tf>,
avec a0 = Jfc 2 • Nous n'avons pas encore calculé une telle distribution de charge, mais
nous avons fait quelque chose de semblable. Cette distribution de charges est équivalente
à deux volumes cylindriques chargés, l'un positif et l'autre négatif, présentant un petit
décalage de leurs axes dans la direction y. Le potentiel d'une telle paire de cylindres
est proportionnel à la dérivée par rapport à y du potentiel d'un cylindre unique
uniformément chargé. Nous pourrions calculer la constante de proportionnalité, mais
ne nous en inquiétons pas pour le moment.
Le potentiel d'un cylindre chargé est proportionnel à ln r'; le potentiel de la paire est
donc
- - -(} (- Kr'y)
(} (Kr'X)
B z -- -âx 2
-
&y 2
2
l
= K
2x
( r'2 - -,:li + r'2l - F2y2) = O.
Ainsi le champ magnétique à l'extérieur d'un solénoïde très long est effectivement nul,
même si le potentiel vecteur ne l'est pas.
Nous pouvons vérifier notre résultat par comparaison avec quelque chose d'autre que
nous savons: la circulation du potentiel vecteur le long du solénoïde doit être égale au
flux du vecteur B à travers la spire (Eq. 14.11). La circulation est égale à A · 2nr' ou, puis-
que A = K/r', la circulation est 2nK. Remarquez qu'elle est indépendante der'. C'est
exactement ce que cela serait s'il n'y avait pas de champ B à l'extérieur, parce que le flux
est égal à la grandeur de B à fintérieur du solénoïde, multipliée par na 2• C'est le même
pour tous les cercles de rayon r' >a. Nous avons établi dans le dernier chapitre que le
champ à l'intérieur est égal à nl/E0 c2 , de sorte que nous pouvons déterminer la
constante K:
2 ni
2nK = 7ra - - ,
Eoc2
241
ou
nla 2
K = - -2·
2E 0 c
11
/
,
wt-- - :
- .... '
1
Nous pouvons maintenant soulever une question intéressante. Supposons que nous
placions un court morceau de fil W perpendiculairement à l'axe du cylindre, allant de
l'axe à l'extérieur du cylindre, et fixé au cylindre de façon à ce qu'il tourne avec lui,
comme sur la Fig. 14-5. Ce fil se déplace dans un champ magnétique, de sorte que les
forces v x B feront se charger les extrémités du fil (elles se chargeront jusqu'à ce que le
champ E, dû aux charges, équilibre la force v x B). Si le cylindre porte une charge
positive, l'extrémité du fil au voisinage de l'axe aura une charge négative. En mesurant
la charge à l'extrémité du fil, nous pourrions mesurer la vitesse de rotation du système.
Nous aurions un « compteur de vitesse angulaire»!
242
Mais vous vous demandez peut-être: «que se passe-t-il si je me place dans le système
de référence du cylindre tournant? Il n'y a alors qu'un cylindre chargé au repos, et je sais
que les équations de l'électrostatique disent qu'il n'y aura pas de champ électrique à
l'intérieur, donc qu'il n'y aura pas de forces poussant les charges vers le centre. Il doit donc
y avoir quelque chose de faux ». Mais il n'y a rien de faux. Il n'existe pas de« relativité de
rotation ». Un système en rotation n'est pas un système galiléen, et les lois de la physique
y sont différentes. Nous devons nous assurer que nous utilisons les équations de
l'électromagnétisme uniquement dans des systèmes d'inertie.
Ce serait bien si nous pouvions mesurer la rotation absolue de la terre à l'aide d'un
cylindre chargé de ce type, mais malheureusement l'effet est beaucoup trop faible pour
être mis en évidence même avec les instruments les plus précis actuellement utilisables.
z
y
b,'
'
a+;z+::;cs;+:c+~!~+::c+~+:"'/ Fig. 14--7. La distribution de ix dans la boucle de
lx- courant de la Fig. 14--6.
Nous considérons tout d'abord une boucle rectangulaire, et nous choisissons nos
coordonnées comme l'indique la Fig. 14-6. Il n'y a pas de courants dans la direction z,
donc A, est nul. Il y a des courants dans la direction x, sur les deux côtés de longueur a.
Dans chaque branche, la densité de courant (et le courant) sont uniformes. La solution
pour A., est donc identique au potentiel électrostatique créé par deux barres chargées
(voir Fig. 14-7). Puisque les barres ont des charges opposées,
243
le potentiel électrique qu'elles créent à grande distance serait simplement le potentiel
d'un dipôle (section 6-5). Au point P de la Fig. 14-6, le potentiel serait
Le moment dipolaire est orienté vers les y négatifs, de sorte que le cosinus de l'angle enire
R et p est égal à - y/R (où y désigne la coordonnée de P). Nous avons donc
l Àab y
q, = - 47!'Eo R2 R ·
Nous obtenons Ax en remplaçant simplement À par l/c 2 :
/ab y
Âx = - 41T'Eoc2 R3 ·
(14.30)
Le module de A est proportionnel à !ab, qui est le produit du courant par l'aire de la
boucle. Ce produit s'appelle le moment magnétique dipolaire (ou, souvent, tout simple-
ment,« moment magnétique») de la boucle. Nous le désignons parµ:
µ=/ab. (14.32)
244
Le potentiel vecteur créé par une petite boucle plane de forme quelconque (cercle, triangle,
etc.) est aussi donné par les Eq. (14.30) et (14.31) à condition de remplacer !ab par
245
Fig. 14-9. Dans un fil fin jdV est iden-
tique à Ids.
Pour un fil fin nous pouvons écrire l'élément de volume sous la forme
dV = Sds,
où S est l'aire de la section du fil et ds l'élément de longueur du fil. En fait, puisque le
vecteur ds a la même direction que j, comme le montre la Fig. 14-9 (et nous pouvons
supposer que j est constant à travers une section droite quelconque), nous pouvons écrire
une équation vectorielle:
jdV = jSds. (14.37)
MaisjS n'est autre que ce que nous appelons le courant I dans un fil, de sorte que notre
intégrale (14.19) pour le potentiel vecteur devient
(voir Fig. 14-10). (Nous supposons que I est le même tout le long du circuit. S'il y a
plusieurs branches avec des courants différents, nous devons, bien entendu, utiliser la
valeur de I appropriée pour chaque branche.)
De nouveau, nous pouvons caléuler les champs à partir de (14.38), soit en intégrant
directement, soit en résolvant les problèmes électrostatiques correspondants.
246
Comme nous l'avons vu, calculer cette intégrale - il y a en fait trois intégrales, une pour
chaque composante - demande plus de travail que de calculer l'intégrale pour Je potentiel
et d'en prendre Je gradient.
Il existe une intégrale semblable qui lie le champ magnétique aux courants. Nous
avons déjà une intégrale"pour A, Eq. (14.19); nous pouvons obtenir une intégrale
pour B en prenant le rotationnel des deux membres:
B(I) = V X A(l) = V X [ -
1
471'"Eoc 2
-f 2
j( )dV2 ]
r12
• (14.39)
Nous devons maintenant faire attention: l'opérateur rotationnel signifie que l'on prend
la dérivée de A(l), c'est-à-dire qu'il agit uniquement sur les coordonnées (x" y 1, z1).
Nous pouvons mettre l'opérateur V x sous Je signe somme à condition de nous rappeler
qu'il n'agit que sur les variables d'indice 1, qui, bien sûr, n'apparaissent que dans
(14.40)
_l f [1 ~ (J_) -
471'"Eoc 2 . ' éJy1 r12
j ~ (J_)] dV2
Y éJz1 r12
(14.41)
__1_J [·
47rE
0
c2 J.
Y1 - Y2 _ . z1 - z2]dv
r3
12
111 , 3 2·
12
j X r12 j X e12
---;:ç = ~·
On pourra trouver les résultats correspondants aux autres composantes, de sorte que nous
avons
B(l) = _ l_
47rEoc2
f j(2) X
r212
e1 2 dV.
2 (14.42)
247
formule qui permet d'obtenir directement le champ magnétique créé par des fils parcourus
par des courants.
Vous pouvez vous demander: «quel est l'avantage du potentiel vecteur si nous
pouvons calculer B directement avec une intégrale vectorielle? Après tout, A aussi
implique trois intégrales! » A cause du produit vectoriel, les intégrales pour B sont
habituellement plus compliquées, comme on le voit sur l'Eq. (14.41). De plus, puisque
les intégrales pour A sont identiques à celles de l'électrostatique, nous pouvons les
connaître déjà. Nous verrons enfin que dans des domaines théoriques plus avancés,
(en relativité, dans des formulations avancées des lois de la mécanique, comme le principe
de moindre action que nous discuterons plus tard, et en mécanique quantique) le potentiel
vecteur un rôle important.
248
16
Le potentiel-'fYecteur
15-1 Les forces agissant sur un circuit fermé parcouru par un courant; l'énergie d'un dipôle
Dans le chapitre précédent nous avons étudié le champ magnétique créé par un petit
circuit rectangulaire parcouru par un courant. Nous avons trouvé que c'est un champ
dipolaire, de m01µent dipolaire
µ = !A, (15.l)
µ=!An,
249
z
X
Fig. 15-1. Un circuit rectangulaire par-
couru un courant/ est placé dans un champ
uniforme B (orienté suivant Oz). Le moment
du couple agissant sur le circuit est
r=µx B où µ=/ab est le moment magné-
tique.
r = µ.Bsin 8.
Bien que nous ayons établi que le moment du couple était donné par l'Eq. (15.2) seulement
dans un cas très particulier, nous verrons que ce résultat est valable pour un petit circuit
de forme quelconque. Rappelez-vous que nous avons trouvé le même genre de relation
pour le couple exercé sur un dipôle électrique:
,,. = p XE.
Examinons maintenant l'énergie mécanique de notre circuit. Puisqu'il y a un couple,
l'énergie dépend évidemment de l'orientation. D'après le principe des travaux virtuels,
le moment du couple est égal à la variation d'énergie par unité d'angle, ce qui permet
d'écrire
dU = -rd8.
Posant r = - µB sin 8, et intégrant, nous pouvons écrire l'énergie
(Le signe est négatif parce que le couple tend à aligner le moment sur le champ; l'énergie
est minimum quand µ et B sont parallèles.)
Pour des raisons que nous discuterons plus tard, cette énergie n'est pas l'énergie totale
d'un circuit. (Nous n'avons pas, en particulier, tenu compte de l'énergie nécessaire
250
pour maintenir le courant dans le circuit.) Nous appellerons donc cette énergie Urnec,
pour nous rappeler qu'elle n'est qu'une partie de l'énergie. De même, puisque de toutes
façons nous laissons de côté une partie de l'énergie, nous pouvons poser la constante
d'intégration égale à zéro dans l'Eq. (15.3). Nous récrivons donc l'équation:
Ici encore, elle correspond à ce que nous avions trouvé pour un dipôle électrique:
U = -p·E. (15.5)
Cependant, l'énergie électrostatique U de l'Eq. (15.5) est la véritable énergie alors que
Umec de l'Eq. (15.4) ne l'est pas. On peut, cependant, s'en servir pour le calcul des forces
par application du principe des travaux virtuels, en supposant que le courant dans le
circuit - ou au moins µ - est maintenu constant.
Nous pouvons montrer que pour notre petit circuit rectangulaire, Umec correspond
aussi au travail mécanique effectué pour amener le circuit dans le champ. La résultante qui
s'exerce sur le circuit est nulle seulement dans un champ uniforme; dans un champ non
uniforme il y a bien une résultante des forces agissant sur un circuit. Quand on a introduit
le circuit dans une région où règne un champ, on a dû traverser des zones où le champ
n'était pas uniforme, et l'on a dû fournir un certain travail. Pour simplifier les calculs
nous imaginerons qu'on amène le circuit dans le champ, son moment restant parallèle
au champ. (On peut le faire tourner pour l'amener dans sa position finale, une fois qu'il
est en place.)
Imaginons que nous voulions déplacer le circuit, dans la direction des x - vers une
région de champ plus intense - et que le circuit soit orienté comme l'indique la Fig. 15-2.
Nous partons d'un lieu où le champ est nul, et nous intégrons le produit de la force par le
déplacement en amenant le circuit dans le champ.
Calculons d'abord le travail effectué sur chaque côté séparément, puis prenons la
somme (plutôt que d'ajouter les forces avant d'intégrer). Les forces agissant sur les
côtés 3 et 4 sont normales au déplacement, on ne fournit donc aucun travail contre elles.
La force agissant sur le côté 2 est IbB(x) suivant l'axe des x, et pour trouver le travail effec-
tué contre la
251
force magnétique, il faut l'intégrer depuis un certain x où le champ est nul, disons
x = - oo, jusqu'à x 2 sa position actuelle:
W2 = -
! "'• F dx
_., 2 = !"'•
-lb _., B(x) dx. (15.6)
W1 = -
!"'' F dx
_., 1 f"''
= lb _., B(x) dx. (15.7)
Pour calculer chacun de ces intégrales, nous devons savoir comment B(x) varie avec x.
Mais remarquez que le côté 1 suit exactement le côté 2, de sorte que son intégrale contient
presque tout le travail effectué sur le côté 2. En fait, la somme de (15.6) et (15.7) est
exactement
W = -lb B(x) dx.
!."''"'• (15.8)
Mais si nous sommes dans une région où B est à peu près le même sur les côtés 1 et 2,
nous pouvons écrire l'intégrale sous la forme
où B est le champ au centre du circuit. L'énergie mécanique totale que nous avons
fournie est donc
Umeo = W = -/ab B = -µ.B. (15.9)
Le résultat est en accord avec l'expression de l'énergie écrite dans l'Eq. (15.4).
Nous aurions évidemment trouvé le même résultat si nous avions ajouté les forces
agissant sur le circuit avant d'intégrer pour trouver le travail. Soit B1 le champ sur le
côté 1 et B2 le champ sur le côté 2, la résultante des forces dans la direction x est
Si le circuit est «petit», c'est-à-dire si B, et B2 ne sont pas trop différents, nous pouvons
écrire
qui est bien encore égal à - µB. Seulement nous voyons maintenant pourquoi la force
agissant sur un petit circuit parcouru par un courant est proportionnelle à la dérivée
du champ magnétique, comme on s'y attendait d'après
F., ÀX = -liUmeo =-li(-µ- B). (15.ll)
252
Notre résultat est alors le suivant: bien que Umec = - µ. · B ne contienne pas, forcé-
ment toute l'énergie du système-c'est une espèce truquée d'énergie-on peut quand même
lui appliquer le principe des travaux virtuels pour trouver les forces agissant sur des
circuits parcourus par des courants continus.
Vous pouvez penser: mais la force agissant sur les électrons dépend de la vitesse
à laquelle se déplace le fil; si ce mouvement est assez lent, peut-être cette énergie électrique
sera-t-elle négligeable. Il est vrai que la puissance électrique fournie est proportionnelle
à la vitesse du fil, mais l'énergie totale fournie est aussi proportionnelle au temps.
Donc, l'énergie électrique totale est proportionnelle au produit de la vitesse par le temps,
c'est-à-dire au déplacement. On fournit le même travail électrique pour un déplacement
donné dans un champ.
Considérons un segment de fil de longueur unité, parcouru par un courant I et se dépla-
çant dans une direction normale à lui-même et au champ magnétique B à la vitesse v fil·
Les électrons vont prendre une vitesse d'ensemble Vensemble le long du fil à cause du
courant. La composante de la force magnétique agissant sur chaque électron dans la
direction du courant est q • Vfil B. Donc, la puissance électrique fournie est Fvensemble=
(q • Vfil B)vensemble· S'il y a N électrons de conduction par unité de longueur du fil, la
puissance électrique totale fournie est
253
Mais Nq e v ensemble = /, intensité du courant dans le fil, donc
d~~lec = lvm B.
Or, puisque le courant est maintenu constant, les forces agissant sur les électrons
de conduction ne leur communiquent pas d'accélération; l'énergie électrique n'est pas
fournie aux électrons mais à la source qui maintient le courant constant.
Mais remarquons que la force agissant sur le fil est IB, donc /Bvfil est aussi la puissance
mécanique fournie au fil, dUmec/dt = !Bvm. Nous en concluons que le travail mécanique
fourni au fil est juste égal au travaîl électrique fourni à la source de courant, donc
l'énergie du circuit est une constante!
Ceci n'est pas une coïncidence, mais une conséquence de la loi que nous connaissions
déjà. La force totale agissant sur chaque charge du fil est
La puissance est
S'il n'y a pas de champs électriques il ne reste que le second terme, qui est toujours nul.
Nous verrons plus tard, que des champs magnétiques variables produisent des champs
électriques, donc notre raisonnement ne s'applique qu'à des fils qui se déplacent dans des
champs magnétiques constants.
Comment se fait-il alors que le principe des travaux virtuels nous donne la bonne
réponse? Parce que nous n'avons toujours pas considéré l'énergie totale du monde.
Nous n'avons pas inclus l'énergie des courants qui créent le champ magnétique d'où
nous partons.
Imaginons un système complet tel que celui dessiné sur la Fig. 15-3a, dans lequel
nous déplaçons notre circuit parcouru par Je courant / 1 dans le champ magnétique 8 1
créé par le courant / 2 qui circule dans une ~obine. Or, le courant / 1 du circuit crée lui aussi
un certain champ magnétique B2 là où se trouve la bobine. Si Je circuit se déplace,
le champ B2 va
bl li
a··-~@ l
e,
1 Ctrc t
lez /7~~ r, -
lz
(a) ÎÏ (b)
Fig. 15-3. Recherche de l'énergie d'un petit circuit dans un champ magnétique.
254
varier. Comme nous le verrons dans le chapitre suivant, un champ magnétique variable
engendre un champ E, et ce champ E fournira du travail aux charges de la bobine.
Il faudra donc aussi tenir compte de cette énergie dans notre bilan de l'énergie totale.
Nous pourrions attendre le chapitre suivant pour déterminer ce nouveau terme de
l'énergie, mais nous pouvons aussi voir ce qu'il sera en appliquant le principe de relativité
de la manière suivante. Quand nous approchons le circuit de la bobine fixe nous savons
que son énergie électrique est exactement égale et opposée au travail mécanique effectué.
Donc
Umec + Uelec(circuit) = O.
Supposons maintenant que nous regardions ce qui se passe d'un autre point de vue,
d'après lequel le circuit est au repos et la bobine est déplacée vers lui. La bobine se déplace
alors dans le champ créé par le circuit. Les mêmes arguments nous donneraient
Umec + Veiec(bobine) = O.
L'énergie mécanique est la même dans les deux cas puisqu'elle est due à la force qui
s'exerce entre les deux circuits.
La somme des deux équations donne
L'énergie totale de tout le système est évidemment la somme des deux énergies électriques
et de l'énergie mécanique comptée une seule fois. Nous avons donc
L'énergie totale du monde est réellement moins Umec· Si nous voulons la véritable éner-
gie d'un dipôle magnétique, par exemple, nous devons écrire
Uiotale = + µ, · B.
Ce n'est qu'en posant la condition que tous les courants sont constants que nous pouvons
n'utiliser qu'une partie de l'énergie, Umec (qui est toujours la véritable énergie changée de
signe), pour déterminer les forces mécaniques. Dans un problème plus général, il faudrait
faire bien attention de compter toutes les énergies.
Nous avons vu un cas analogue en électrostatique. Nous avons montré que l'énergie
d'un condensateur était Q2/2C. Quand nous appliquons le principe des travaux virtuels
pour calculer la force qui s'exerce entre les deux plateaux du condensateur, la variation
d'énergie est égale au produit par Q2/2 de la variation de l/C. Soit,
(15.14)
Supposons maintenant qu'il faille calculer le travail à fournir pour déplacer deux con-
ducteurs dans des conditions différentes: leur différence de potentiel est maintenue
constante. Nous pouvons alors obtenir les bonnes réponses pour la force à partir du
principe des travaux
255
virtuels à condition d'introduire un artifice. Puisque Q = CV, l'énergie est réellement
!CJl2. Mais si nous définissons une énergie artificielle égale à - !CJl2, le principe des
travaux virtuels peut être appliqué pour déterminer les forces, en posant que la variation
de l'énergie artificielle est égale au travail mécanique, à condition, nous insistons bien,
que la tension soit maintenue constante. Alors
2 2
LlUmec = Â ( - -cv2- ) = - 2v LlC, (15.15)
ce qui est bien la même Eq. que (15.14). Nous obtenons le résultat exact, bien que nous
ayons négligé le travail fourni par le système électrique pour maintenir la tension
constante. Encore une fois, cette énergie électrique est double de l'énergie mécanique et de
signe contraire.
Ainsi, si nous calculons artificiellement, sans· tenir compte du fait que la source de
potentiel doit fournir un certain travail pour maintenir les tensions constantes, nous
obtenons la bonne réponse. Ceci est tout à fait analogue au cas de la magnétostatique.
Nous pouvons trouver l'énergie d'un circuit de forme quelconque en imaginant qu'il est
formé de petits circuits. Soit un fil ayant la forme de la courbe I' de la Fig. 15-4. Par cette
courbe nous faisons passer une surface S, et sur cette surface nous traçons un grand
nombre de petits circuits, chacun d'eux pouvant être considéré comme plan. Si nous
faisons circuler le courant I dans chacun de ces petits circuits, il en résultera la même
chose qu'un courant I circulant le long de I', puisque les courants s'annuleront le long
de toutes les lignes intérieures à I'. Physiquement, le système des petits courants est
indiscernable du circuit original. L'énergie doit aussi être la même, et est donc égale à la
somme des énergies des petits circuits.
Si l'aire de chaque petit circuit est Aa, son énergie est /AaBn, où Bn est la composante
normale à L1a. L'énergie totale est
U = .:E IBn Aa.
256
Passant à la limite de circuits infinitésimaux, la somme devient une intégrale, et
(15.17)
Il (V X A) · n da Itr A · ds,
= (15.18)
où ds est l'élément de courbe le long der. Nous avons donc l'énergie d'un circuit de forme
quelconque:
U = I t
circuit
A ·ds. (15.19)
(15.20)
Cette formule correspond au résultat que nous avons trouvé pour l'énergie électro-
statique:
(15.21)
Ainsi nous pouvons, si nous le voulons, considérer A comme une sorte d'énergie
potentielle des courants en magnétostatique. Malheureusement cette idée n'est pas très
utile, car elle ne s'applique qu'aux champs statiques. En fait, aucune des équations
(15.20) et (15.21) ne donne l'expression exacte de l'énergie quand les champs varient
avec le temps.
15--4 B contre A
Dans ce paragraphe nous allons discuter des problèmes suivants: le potentiel-vecteur
est-il simplement un moyen utile pour faire des calculs - comme le potentiel scalaire est
utile en électrostatique - ou bien, le potentiel-vecteur est-il un champ « réel »? Est-ce que
ce n'est pas le champ magnétique qui est le champ « réel », parce qu'il est responsable
de la force agissant sur une particule en mouvement? Disons tout d'abord que
l'expression« un champ réel »n'a pas beaucoup de sens. Pour une raison: vous ne sentez
sans doute pas que le champ magnétique soit très « réel » de toute façon, car la notion
même de champ est plutôt abstraite. Vous ne pouvez pas avancer la main et sentir le champ
magnétique. De plus, la valeur du champ magnétique n'est pas très bien définie; en
choisissant un système de coordonnées mobile convenable, par exemple, vous pouvez
faire disparaître le champ magnétique qui existait en un certain point.
257
Ce que nous entendons ici par un champ« réel »est ceci: un champ réel est une fonction
mathématique que nous utilisons pour éviter la notion d'action à distance. Si nous avons
une particule chargée au point P, elle est affectée par les autres charges localisées à une
certaine distance de P. Un moyen de décrire l'interaction est de dire que les autres charges
créent certaines conditions - quoi que cela puisse être - au voisinage de P. Si nous connais-
sons ces conditions, que nous décrivons par la donnée des champs électriques et magné-
tiques, nous pouvons déterminer complètement le comportement de la particule - sans
autre référence à la façon dont ces conditions ont été créées.
En d'autres termes, si ces autres charges ont été modifiées d'une certaine façon, mais si
les conditions en P décrites par les champs électriques et magnétiques en P demeurent
les mêmes, alors le mouvement de la charge sera aussi le même. Un champ « réel » est
un ensemble de nombres que nous caractérisons de telle sorte que ce qui se passe en un point
dépend seulement des nombres en ce point. Nous n'avons pas besoin d'en savoir plus sur
ce qui se passe ailleurs. C'est dans ce sens que nous discuterons si le potentiel-vecteur est
un champ« réel ».
Vous pouvez vous étonner du fait que le potentiel-vecteur n'est pas unique - qu'il peut
être modifié par addition du gradient d'un scalaire quelconque, sans que les forces agissant
sur des particules en soient modifiées. Cependant ceci n'a rien à voir avec le problème
de la réalité dans le sens dont nous parlons. Par exemple, le champ magnétique est, en un
certain sens, modifié par une variation relativiste (comme le sont aussi E et A). Mais
nous ne nous préoccupons pas de ce qui se passe si on peut faire varier le champ de cette
façon. En réalité, cela ne change absolument rien; cela n'a rien à voir avec la question de
savoir si le potentiel-vecteur est vraiment un champ« réel »pour décrire les effets magné-
tiques, ou s'il est juste un outil mathématique utile.
</>(l) = -
1
-f
47rEo
2
p( ) dV2.
r12
(15.22)
A partir de ce</>, nous tirons les trois composantes de Epar trois opérations différentielles.
Ce procédé est en général plus facile à manier que d'évaluer les trois intégrales dans la
formule vectorielle
E(l) = _t_
4m:o
J p(2~e12 dV2.
r 12
(15.23)
D'abord, parce qu'il y a trois intégrales; et ensuite parce que chaque intégrale est en géné-
ral un peu plus difficile.
Les avantages sont bien moins évidents en ce qui concerne la magnétostatique. L'inté-
grale pour A est déjà une intégrale vectorielle:
A(I) = _ t_
47rEoc 2
f j(2) dV 2
r12
, (15.24)
c'est-à-dire, bien sûr, trois intégrales. De même, quand nous prenons le rotationnel de A
pour avoir B, nous avons six dérivées à effectuer et à combiner deux à deux. On ne voit
donc pas dans l'immédiat
258
si cette méthode est réellement plus facile dans la plupart des problèmes que de calculer B
directement à partir de
B(I) = _I_
47re 0 c 2
f j(2) X
rr 2
e12 dV 2 • (15.25)
Il est souvent plus difficile, pour des problèmes simples, d'utiliser le potentiel-vecteur,
pour les raisons suivantes. Supposons que nous nous intéressons au champ B uniquement
en un point, et que le problème possède une bonne symétrie - disons que nous cherchions
le champ en un point de l'axe d'un anneau de courant. En raison de la symétrie, nous pou-
vons facilement obtenir Ben calculant l'intégrale de l'Eq. (15.25). Mais, si nous devions
calculer A en premier, nous devrions calculer B à partir des dérivées de A, nous devons
donc connaître A en tous les points voisins du point qui nous intéresse. Et la plupart de ces
point sont en dehors de l'axe de symétrie, donc l'intégrale qui donne A devient
compliquée. Dans le problème de l'anneau, par exemple, il nous faudrait utiliser des
intégrales elliptiques. Dans de tels problèmes, il est clair que A n'est pas très utile. Il est
vrai que dans de nombreux problèmes complexes il est plus facile de travailler avec A,
mais il serait difficile de prétendre que cette facilité technique justifie que l'on vous fasse
apprendre un champ vectoriel de plus.
Nous avons introduit A parce qu'il a vraiment une signification physique importante.
Il n'est pas seulement lié aux énergies des courants, comme nous l'avons vu dans le
paragraphe précédent, mais il est aussi un champ physique« réel »au sens que nous avons
décrit plus haut. En mécanique classique, il est clair que nous pouvons écrire la force
agissant sur une particule sous la forme
F = q(E +v X B), (15.26)
de sorte que, les forces étant données, tout est déterminé dans le mouvement. Dans toute
région où B = 0, même si A n'est pas nul, comme à l'extérieur d'un solénoïde, il n'y a
pas d'effet discernable de A. C'est pourquoi pendant longtemps on a pensé que A
n'était pas un champ « réel ». Cependant, il s'est avéré qu'il existe des phénomènes
relevant de la mécanique quantique qui prouvent que le champ A est en fait un champ
« réel »au sens où nous l'avons défini. Dans le paragraphe suivant, nous vous montrerons
comment ça marche.
259
qui s'exerce entre eux. Personne ne dérive jamais l'énergie pour trouver l'allure de la
force. Dans ce paragraphe nous allons voir comment les potentiels vecteurs et scalaires
interviennent en mécanique quantique. En fait, c'est justement parce que la quantité de
mouvement et l'énergie jouent un rôle fondamental en mécanique quantique, que A et</>
fournissent le moyen le plus direct d'introduire les effets électromagnétiques dans les
descriptions quantiques.
X
0 = !!.. (15.27)
;i,.
Comme d'habitude, posons X= À/2n, où ). est la longueur d'onde des variations dans
l'espace de l'amplitude de probabilité. Pour simplifier, nous considérerons seulement
des valeurs de x bien
260
inférieures à L; nous pouvons alors poser
a=~ d
L
et
xd
ô (15.28)
IY..'
Quand x est nul, oest nul; les ondes sont en phase et la probabilité est maximum. Quand
ô vaut n, les ondes sont en opposition de phase, elles interfèrent destructivement et la
probabilité est minimum. Nous obtenons ainsi la fonction ondulante pour l'intensité
des électrons.
Nous voudrions maintenant énoncer la loi qui, en mécanique quantique, remplace
la loi de force F = qv x B. Ce sera la loi qui détermine le comportement des particules
quantiques dans un champ électromagnétique. Puisque ce qui se passe est déterminé
par des amplitudes, la loi doit nous indiquer comment les influences magnétiques
affectent les ondes; nous ne parlons plus de l'accélération d'une particule. La loi est la
suivante: la phase de l'amplitude pour arriver par une trajectoire quelconque varie en
présence d'un champ magnétique d'une quantité égale au produit de l'intégrale du
potentiel-vecteur le long de la trajectoire, par la charge de la particule divisée par la
constante de Planck. Soit,
S'il n'y avait pas de champ magnétique, la phase aurait une certaine valeur à l'arrivée.
S'il existe un champ magnétique n'importe où, la phase de l'onde qui arrive est accrue de
l'intégrale de l'Eq; (15.29).
Bien que nous ne nous en servions pas dans cette discussion, mentionnons que l'effet
d'un champ électrostatique est de produire une variation de la phase donnée par l'inté-
grale sur le temps du potentiel ~calaire <P changée de signe:
Ces deux expressions sont valables non seulement pour les champs statiques, mais
ensemble, elles donnent le résultat exact pour n'importe quel champ électromagnétique,
statique ou dynamique. Voilà la loi qui remplace F = q (E + v x B). Cependant, nous
ne considérerons maintenant qu'un champ magnétique statique.
Supposons qu'il existe un champ magnétique dans l'expérience des deux fentes.
Nous cherchons la phase d'arrivée sur l'écran des deux ondes dont les trajets passent
par les deux fentes. Leur interférence détermine la position des maximums de la proba-
bilité. Soit <1>1 la phase de l'onde le long de la trajectoire (1). Si <1> 1 (B = 0) est la phase en
l'absence de champ magnétique, quand on introduit le champ, la phase devient
<1>1 = <l>1(B = 0) +~
"
f (1)
A · ds. (15.30)
261
De même la phase pour la trajectoire (2) est
Cette équation nous indique comment le champ magnétique modifie le mouvement des
électrons; grâce à elle nous pouvons déterminer les nouvelles positions des maximums
et minimums d'intensité sur l'écran.
Avant de le faire, cependant, soulevons un point important et intéressant. Vous vous
rappelez que la fonction potentiel-vecteur comporte un certain arbitraire. Deux fonc-
tions potentiel-vecteur différentes A et A', dont la différence est le gradient d'une fonction
scalaire V l/f, représentent toutes deux le même champ magnétique, puisque le rotationnel
d'un gradient est nul. Elles fournissent donc la même force classique qv x B. Mais si en
mécanique quantique, les effets dépendent du potentiel-vecteur, laquelle des multiples
fonctions A possibles est correcte?
La réponse, c'est que le même arbitraire sur A continue d'exister en mécanique
quantique. Si dans l'Eq. (15.33) nous changeons A en A'= A+ Vl/f, l'intégrale de A
devient
f (1-2)
A' · ds = f
(1-2)
A · ds + f (1-2)
Vl{t · ds.
L'intégrale de V l/f est prise sur le contour fermé (l-2), mais l'intégrale de la composante
tangentielle d'un gradient le long d'un contour fermé est toujours nulle, d'après le
théorème de Stokes. Donc, A et A' donnent tous deux les mêmes différences de phase,
et les mêmes effets quantiques d'interférence. Dans les deux théories, classique et
quantique, c'est seulement le rotationnel de A qui intervient; n'importe quelle fonction
A choisie, pourvu que son rotationnel soit correct, conduit à la solution physique
oorrecte.
La même conclusion est évidente en utilisant les résultats du paragraphe 14-1. Nous
avons trouvé là que l'intégrale curviligne de A le long d'une courbe fermée est égale
au flux de B à travers cette courbe, et qui est ici le flux entre les chemins (!) et (2).
L'équation (15.33) peut alors s'écrire
Ô=Ô (B=O)+ 1[flux de B entre (1) et (2)], (15.34)
li
où le flux de B est, comme toujours, l'intégrale de surface de la composante normale de
B. Le résultat dépend seulement de B, et donc seulement du rotationnel de A.
262
Maintenant, puisque nous pouvons écrire le résultat aussi bien en fonction de B qu'en
fonction de A, vous pouvez être tentés de penser que B se comporte bien comme un
champ« réel» et qu'on peut toujours considérer A comme une construction artificielle.
Mais la définition du champ «réel» que nous avons proposée à l'origine était basée
sur l'idée qu'un champ réel n'agit pas sur une particule à distance. Nous pouvons,
cependant, donner un exemple où Best nul - ou tout au moins aussi petit que l'on veut -
en tout point où il y a une chance de trouver les particules, de sorte qu'il n'est pas possible
de le considérer comme agissant directement sur elles.
Vous vous rappelez que pour un long solénoïde parcouru par un courant, il y a un
champ B à l'intérieur mais pas à l'extérieur, tandis qu'il y a des tas de A qui circulent
tout autour à l'extérieur, comme sur la Fig. 15-6. Si nous créons une situation où les
électrons se trouvent uniquement à l'extérieur du solénoïde - seulement là où existe A -
il y aura encore une influence sur le mouvement, d'après l'Eq. (15.33). Du point de vue
classique, c'est impossible. Du point de vue classique, la force ne dépend que de B;
pour savoir que le solénoïde est parcouru par un courant, la particule doit le traverser.
Mais du point de vue quantique, vous pouvez trouver qu'il existe un champ magnétique
à l'intérieur du solénoïde, en circulant tout autour - sans jamais vous en approcher!
Supposons qu'on place un très long solénoïde de petit diamètre juste derrière la paroi
et entre les deux fentes, comme sur la Fig. 15-7. Le diamètre du solénoïde doit être bien
plus petit que la distance d entre les deux fentes. Dans ces conditions, la diffraction des
électrons par les deux fentes ne donne aucune probabilité appréciable pour les électrons
de s'approcher du solénoïde. Quel sera l'effet produit sur notre expérience d'interférence?
Comparons la situation avec et sans courant dans le solénoïde. Si nous n'avons pas
de courant, nous n'avons ni B ni A et nous obtenons la première figure de diffraction
pour l'intensité des électrons sur l'écran. Si nous mettons le courant dans le solénoïde
et créons un champ B à l'intérieur, il y a un A à l'extérieur. Il se produit un déplacement
dans la différence de phase qui est proportionnel à la circulation de A à l'extérieur du
solénoïde, ce qui
263
Solénoïde
Lignes de champ de B
Fig. 15-7. Un chamµ magnétique peut agir sur le mouvement des électrons même s'il
n'existe que dans des régions où la probabilité de trouver les électrons est aussi petite que
l'on veut.
entraîne un déplacement de la figure des maximums et minimums vers une nouvelle posi-
tion. En fait, puisque le flux de B à l'intérieur est constant pour une paire quelconque
de trajets, il en est de même de la circulation de A. En chaque point d'arrivée, il y a la
même variation de la phase; ceci correspond à un déplacement de toute la figure en x,
d'une certaine quantité, disons x 0 , qu'il est facile de calculer. L'intensité maximum se
produit là où la différence de phase entre les deux ondes est nulle. Appliquant l'Eq.
(15.32) ou l'Eq. (15.33) pour ô et l'Eq. (15.28) pour ô (B = 0), nous obtenons
ou
Xo = - !::_
d
X <j_
h
f
(1-2)
A · ds, (15.35)
La figure avec le solénoïde en place doit être* comme on l'a représentée sur la Fig. 15-7.
Tout au moins ce sont les prévisions de la mécanique quantique.
Précisément cette expérience a récemment été réalisée. C'est une expérience très très
difficile. Comme la longueur d'onde des électrons est si petite, l'appareil d'observation
des interférences doit être de toute petite taille. Les fentes doivent être très rapprochées
l'une de l'autre, ce qui implique un solénoïde excessivement petit. Or, dans certaines
circonstances, des cristaux de fer peuvent pousser en forme de filaments très longs et
microscopiquement fins, appelés «poils» (ou « whiskers »). Quand ces «poils» de fer
sont aimantés, ils se comportent comme de minuscules solénoïdes, et ils ne créent aucun
champ à l'extérieur sauf près des extrémités. L'expérience d'interférence des électrons
fut réalisée avec un tel poil placé entre les deux fentes, et l'on observa bien le déplace-
ment prévu de la figure.
* Si Je champ B sort du plan de la figure, le flux tel que nous l'avons défini est négatif et x 0 est
positif.
264
Au sens que nous avons défini, donc, le champ A est «réel». Vous allez peut-être
dire: «mais il y avait un champ magnétique». Il y en avait un, mais rappelez-vous notre
première idée - un champ est «réel» s'il est ce qu'il faut savoir au point où se trouve la
particule, pour déterminer son mouvement. Le champ B dans le poil agit à distance.
Si nous ne voulons pas décrire son influence comme une action à distance, nous devons
utiliser le potentiel-vecteur.
Ce sujet possède une histoire intéressante. La théorie que nous venons de décrire
était connue dès le début de la mécanique quantique en 1926. Le fait que le potentiel-
vecteur figure dans l'équation d'onde de la mécanique quantique (appelée équation de
Schrôdinger) était évident du jour même où on l'écrivit. Tous ceux qui tentèrent, l'un
après l'autre, de le remplacer par le champ magnétique observèrent que cela ne pouvait
être fait d'aucune manière facile. Ceci apparaît aussi clairement sur notre exemple des
électrons qui se meuvent dans une région où ne règne aucun champ et sont néanmoins
affectés. Mais, comme en mécanique classique A ne semblait pas avoir d'importance
particulière, et comme de plus il pouvait être changé par addition d'un gradient, on
répétait toujours que le potentiel-vecteur n'avait pas de sens physique immédiat - que
c'étaient seulement les champs électriques et magnétiques qui étaient «corrects», même
en mécanique quantique. Il paraît étrange rétrospectivement, que personne n'ait songé
à discuter cette expérience avant 1956, quand Bohm et Aharanov furent les premiers
à la suggérer, et rendirent toute la question claire comme de l'eau de roche. C'était
depuis toujours impliqué par la théorie, mais personne n'y avait fait attention. Ainsi
beaucoup de gens furent plutôt choqués quand la question fut posée. C'est pourquoi
quelqu'un a pensé que cela valait la peine de faire l'expérience pour voir si c'était exact,
bien que la mécanique quantique, à laquelle on croyait depl_1is tant d'années, ait donné
une réponse sans équivoque. Il est intéressant de noter comment un problème comme
celui-ci peut être dans l'air pendant trente ans, mais continuer à être ignoré à cause de
certains préjugés sur ce qui a ou n'a pas de sens.
Poursuivons cette analyse un peu plus loin. Nous allons établir le lien entre la formule
de la mécanique quantique et la formule classique - pour montrer pourquoi, en regardant
les choses à une échelle assez grande, tout se passe comme si les particules étaient sou-
mises à une force égale à qv x le rotationnel de A. Pour passer de la mécanique quantique
à la mécanique classique, nous devons considérer des cas où toutes les longueurs d'onde
sont très petites devant les distances sur lesquelles les conditions extérieures, comme les
champs, varient de façon appréciable. Nous ne démontrerons pas le résultat dans toute
sa généralité, mais seulement dans un cas très simple, pour montrer comment cela
marche. Reprenons la même expérience des deux fentes. Mais au lieu d'introduire le
champ magnétique seulement dans une minuscule région comprise entre les fentes, nous
imaginons un champ magnétique qui s'étend sur une région plus étendue derrière les
fentes, comme sur la Fig. 15-8. Prenons le cas idéal où le champ magnétique est uni-
forme dans une bande étroite de largeur w, petite devant L. (Il est facile de le réaliser;
l'écran peut être placé aussi loin qu'on le veut.) Pour calculer le déplacement de la
phase, nous devons prendre les deux intégrales de A le long des deux trajectoires (1) et
(2). Elles diffèrent, comme nous l'avons vu, simplement par le flux de B entre les deux
trajets. A notre approximat10n, le .flux est Bwd. La différence de phase relative aux deux
trajets est alors
o(B 0) + *
Bwd. (15.37)
265
r-t-W
•': ·.:
~" : .·.
1 •••
·., · a 1
I
~-:_:.... d ·_.,·. --- /
........ " - - - -.t.. ....!_-/:~ - 2
gnes de champ de B
.
Un tel déplacement est équivalent à une déviation d'un petit angle a (voir Fig. 15-8) de
toutes les trajectoires, où
ÂX Jt.
a= y = h qBw. (15.39)
Or, du point de vue classique, nous savons qu'une étroite bande de champ magné-
tique dévie aussi les trajectoires d'un petit angle, disons a', comme sur la Fig. 15-9 (a).
Quand les électrons pénètrent dans le champ magnétique, ils sont soumis à une force
transversale qv x B qui dure pendant le temps w/v. La variation de leur quantité de
mouvement transversale est juste égale à cette impulsion, donc
ÂPx = qwB. (15.40)
La déviation angulaire [Fig. 15-9 (b)] est égale au rapport de cette quantité de mouve-
ment transversale à la quantité de mouvement totale p. Nous obtenons
1
a =ÂPx
-=
qwB. (15.41)
p p
266
Fig. 15-9. Déviation d'une particule à
la traversée d'une bande de champ magné-
tique .
. ,•.
Lignes de champ de B
at.'
~Pver.
' ·. . . . . • • • • • 1
Nous pouvons comparer ce résultat à l'Eq. (15.39) qui donne la même grandeur,
calculée par la mécanique quantique. Mais le lien entre la mécanique classique et la
mécanique quantique est le suivant: une particule de quantité de mouvement p corres-
pond à une amplitude quantique qui varie avec la longueur d'onde %=fz/p. Tenant
compte de cette égalité, a et a' sont identiques; les calculs classiques et quantiques
conduisent au même résultat.
A partir de cette analyse, nous voyons pourquoi le potentiel-vecteur qui figure expli-
citement en mécanique quantique crée une force classique qui ne dépend que de ses
dérivées. En mécanique quantique, c'est l'interférence entre deux chemins voisins qui
importe; il se trouve toujours que les effets dépendent seukment de combien varie le
champ A d'un point à un autre, et donc, seulement des dérivées de A et non pas de sa
valeur elle-même. Néanmoins, le potentiel-vecteur A (joint au potentiel scalaire <fi qui
l'accompagne) paraît donner la description la plus directe d.: la physique. Ceci devient
de plus en plus apparent à mesure qu'on pénètre plus à fond dans la théorie quantique.
Dans la théorie générale de l'électrodynamique quantique, on considère les potentiels
vecteur et scalaire comme les grandeurs fondamentales d'un ensemble d'équations
qui remplacent les équations de Maxwell: E et B disparaissent doucement de l'expres-
sion moderne des lois physiques; ils sont remplacés par A et</>.
267
Tableau 15-1
Faux en général (vnli seuJement en statique) Toujours vrai
aB
't' XE• 0 - V XE• - aï lloi de Faraday)
E •-V<? E• -V<>-~
a1
pour les conducteurs. E = 0, ~=constante. Q~cv dans un c.onductcur, E ..::rée des .:ourants.
B •\X A
• J
c·v X B - -
•o
(théorème d'Ampère) -
2
c 't' X B = j_
,.
+~
a1
B(I) • - 1-
4,.,oe2
J j(Zl X'" dV2
'12
r ,., -
avec
-
J
toCa
1 avec
;•A _ ..1.. a'A •
ca 012 -
}
eocl
·A+~
1 2
V· .4 - 0
l c v
ai
- o
1 ( p(2)
4>(1)=- -dV2
4:irto .: r12
<;1(1, 1) - _.!..._
41-eo
J p(l, r) dV2
r12
J
et
1 2 A(l,I) "'_1_ / }(2,t') dV,
A(I) • - -. j( ) dV2
4?ftoc 41 r12 <tteocl r12
avec
r' -1-~
c
U = t J /XP dV f
+ t 1 · A dV U• /( !!'Q
'ïE·E+TB· B) dV
«OC
'
Les équations précédées de la ftêche {-)sont les équations d~ Ma'(well.
268
Bien que nous ayons commencé ce cours en présentant les équations complètes et
correctes de l'électromagnétisme, nous avons tout de suite commencé par en étudier
certaines parties incomplètes - parce que c'était plus facile. Il y a un grand avantage
à débuter par la théorie plus simple des champs statiques, pour passer seulement plus
tard à la théorie plus compliquée qui englobe les champs dynamiques. Il y a moins de
nouvelles choses à apprendre à la fois, et vous avez ainsi le temps de développer vos
muscles intellectuels en vue d'une tâche plus lourde.
Mais procéder ainsi présente le danger qu'avant d'arriver à la fin de l'histoire, les
vérités incomplètes apprises en cours de route peuvent s'enraciner et être prises pour
toute la vérité - que vous pouvez confondre ce qui est vrai, et ce qui est seulement vrai
quelquefois. C'est pourquoi nous donnons dans le tableau 15-1 un résumé des formules
importantes que nous avons rencontrées, en séparant celles qui sont vraies en général
de celles qui sont vraies en statique et fausses en dynamique. Ce résumé nous montre
aussi, en partie, où nous allons, puisque en traitant la dynamique nous allons développer
en détail ce que nous pouvons seulement énoncer ici sans démonstration.
Il est sans doute utile de faire quelques remarques au sujet de ce tableau. Remarquez,
d'abord. que nos équations de départ sont les équations vraies - là nous ne vous avons
pas trompés. La force électromagnétique (souvent appelée la force de Lorentz)
F = q (E + v x B) est vraie. C'est seulement la loi de Coulomb qui est fausse, à n'utiliser
qu'en statique. Les quatre équations de Maxwell relatives à E et B sont vraies aussi.
Les équations que nous avons appliquées en statique sont fausses, évidemment, puisque
nous avons laissé tomber tous les termes comportant des dérivées par rapport au temps.
Le théorème de Gauss, V· E = p/t 0 , demeure, mais le rotationnel de E n'est pas nul
en général. Donc E ne peut pas être toujours égalé au gradient d'un scalaire - le potentiel
électrostatique. Nous verrons qu'il existe toujours un potentiel scalaire, mais que c'est
une grandeur variable avec le temps qui doit être utilisé en même temps que les poten-
tiels-vecteurs pour fournir une description complète du champ électrique. Les équations
auxquelles obéit ce nouveau potentiel scalaire sont nécessairement nouvelles aussi.
Nous devons encore abandonner l'idée que E est nul dans les conducteurs. Quand les
champs varient, les charges des conducteurs n'ont pas, en général, le temps de se réar-
ranger pour annuler le champ. Elles sont mises en mouvement, mais n'atteignent jamais
l'équilibre. Le seul énoncé général est le suivant: les champs électriques dans les conduc-
teurs créent des courants. Donc, dans des champs variables, un conducteur n'est pas
une équipotentielle. Il s'ensuit que la notion de capacité n'a plus un sens précis.
Puisqu'il n'y a pas de charges magnétiques, la divergence de B est toujours nulle.
Donc B peut toujours être égalé à V x A. (Tout ne change pas!) Mais B n'est pas engendré
seulement par les courants: V x Best proportionnel à la densité de courant plus à un
nouveau terme 8E/8t. Cela veut dire que A est relié aux courants par une nouvelle
équation. Il est aussi relié à <f>. Si nous profitons de notre liberté pour choisir V ·A à
notre convenance, les équations pour A et</> peuvent s'arranger pour prendre une forme
simple et élégante. Nous imposons donc la condition que c 2V · A= - b<f>/bt, et les équa-
tions différentielles pour A et <f> s'écrivent comme sur le tableau.
Les potentiels A et </> peuvent toujours être calculés par intégration sur les courants
et les charges, mais pas par les mêmes intégrales qu'en statique. Le plus merveilleuse-
ment du monde, cependant, les intégrales vraies ressemblent à celles de la statique, avec
seulement une petite modification, physiquement séduisante.
269
Quand nous intégrons pour trouver les potentiels en un point, disons au point(!) de la
Fig. 15-10, nous devons utiliser les valeurs de j et p au point (2) à un instant antérieur
t' = t - r12 /c. Comme vous pourriez vous y attendre, les effets se propagent du point (2)
au point (1) à la vitesse c. Avec ce petit changement, on peut résoudre le problème des
champs créés par des courants et des charges variables, car une fois que nous connais-
sons A et <P, nous obtenons B à partir de V x A, comme avant, et E à partir de
-V<t>-'&A/ôt.
( 1, t)
Remarquez enfin que certains résultats - par exemple, que la densité d'énergie dans
un champ électrique est EoE2/2 - sont vrais aussi bien en électrodynamique qu'en
statique. Ne vous égarez pas à penser que ceci est le moins du monde «naturel». La
validité de toute formule démontrée dans le cas statique doit être redémontrée entière-
ment dans le cas dynamique. Un exemple contraire est l'expression de l'énergie électro-
statique en fonction de l'intégrale de volume.de p<f>. Ce résultat n'est vrai qu'en statique.
Nous verrons tous ces sujets plus en détail en temps voulu, mais il sera peut-être bon
de garder à l'esprit ce résumé, afin que vous sachiez ce que vous pouvez oublier et ce que
vous devez vous rappeler comme étant toujours vrai.
270
l6
Courants induits
271
un champ magnétique dans deux entrefers. De part et d'autre de chaque entrefer se
trouvent un pôle nord et un pôle sud, comme le montre la figure. Une bobine de cuivre
rectangulaire est disposée avec un côté dans chaque entrefer. Quand on fait passer un
courant dans la bobine, il circule dans des directions opposées dans les deux entrefers;
les forces sont donc aussi opposées, produisant ainsi un couple sur la bobine, autour de
l'axe qu'on a représenté. Si la bobine est montée sur un axe de façon à pouvoir tourner,
elle peut être couplée avec des poulies ou des engrenages et peut fournir µn travail.
On peut utiliser la même idée pour fabriquer un instrument sensible pour des mesures
électriques. Dès que la loi de force fut découverte, la précision des mesures électriques
fut considérablement accrue. D'abord, le couple d'un tel moteur peut être beaucoup
augmenté pour un courant donné, en faisant faire au courant plusieurs tours au lieu d'un
seul. Ensuite, la bobine peut être montée de façon à tourner avec un couple très faible
- en faisant reposer son axe sur des supports très délicats en pierres précieuses, ou en
suspendant la bobine par un fil très fin ou par une fibre de quartz. Ainsi un courant
excessivement faible fera tourner la bobine, et pour de petits angles la rotation sera
proportionnelle au courant. La rotation peut être mesurée en collant une aiguille sur la
bobine ou, pour les instruments les plus délicats, en attachant un petit miroir à la bobine
et en regardant le déplacement de l'image sur une échelle. De tels instruments sont
appelés galvanomètres. Les voltmètres et les ampèremètres marchent d'après le même
principe.
Les mêmes idées peuvent être appliquées à une grande échelle pour fabriquer de gros
moteurs pour la production de puissance mécanique. On peut faire tourner la bobine
toujours dans le même sens en arrangeant les connexions qui vont à la bobine de telle
sorte qu'elles soient inversées à chaque demi-tour par des contacts installés sur l'axe.
Le couple a ainsi toujours la même direction. Les petits moteurs à courant continu
sont faits exactement de cette manière. Les moteurs plus gros, à courant continu ou
alternatif, sont souvent fabriqués en remplaçant l'aimant permanent par un électro-
aimant, alimenté par la source de puissance électrique.
Lorsqu'ils eurent compris que les courants électriques créent des champs magnétiques,
les gens suggérèrent immédiatement que d'une manière ou d'une autre, les aimants
pouvaient aussi créer des champs électriques. Diverses expériences furent tentées.
Par exemple, deux fils furent disposés parallèlement l'un à l'autre et l'on fit passer un
courant dans l'un des deux dans l'espoir de trouver un courant dans l'autre. L'idée était
que le champ magnétique pouvait en quelque sorte entraîner les électrons le long du
second fil, en donnant une loi telle que: « les semblables préfèrent se déplacer de façons
semblables». Avec les plus grands courants que l'on pouvait obtenir, et avec le galvano-
mètre le plus sensible pour détecter un courant, le résultat fut négatif. De gros aimants
placés près des fils ne produisirent non plus aucun effet observable. Finalement, Faraday
découvrit en 1840 le fait essentiel qui manquait jusqu'alors - que les effets électriques
n'existent que lorsqu'il y a quelque chose qui varie. Si l'un des fils d'une paire est
parcouru par un courant variable, un courant est induit dans l'autre, ou si l'on déplace
un aimant au voisinage d'un circuit électrique, il y a un courant. On dit que des
courants sont induits. Ce fut l'effet d'induction découvert par Faraday. Cet effet trans-
forma le sujet plutôt ennuyeux des champs statiques en un sujet dynamique très
passionnant, avec une gamme énorme de phénomènes merveilleux. Ce chapitre est
consacré à la description qualitative de quelques-uns d'entre eux. Comme nous le
verrons, on tombe rapidement dans des situations passablement compliquées qui sont
difficiles à analyser quantitativement dans tous leurs détails. Mais aucune importance;
notre but principal dans ce chapitre est tout d'abord de vous faire faire connaissance
avec les phénomènes mis en jeu. Nous en entreprendrons l'analyse détaillée plus tard.
272
Nous pouvons aisément comprendre une caractéristique de l'induction magnétique
à partir de ce que nous savons déjà, bien que cela ait été inconnu du temps de Faraday.
Cela vient de la force v x B agissant sur une charge en mouvement qui est proportionnelle
à sa vitesse dans un champ magnétique. Supposons que nous ayons un fil qui passe au
voisinage d'un aimant, comme le montre la Fig. 16-2, et que nous connections les
extrémités du fil à un galvanomètre. Si nous déplaçons le fil devant l'extrémité de
de l'aimant, l'aiguille du galvanomètre se déplace.
L'aimant crée un certain champ magnétique vertical, et lorsque nous poussons le fil.
perpendiculairement au champ, les électrons du fil sont soumis à une force transversale
- à angle droit du champ et de la direction du déplacement. La force pousse les électrons
le long du fil. Mais pourquoi cela fait-il bouger le galvanomètre, qui est si loin de la force?
Parce que, lorsque les électrons qui subissent la force magnétique essaient de se déplacer,
ils poussent - par répulsion électrique - les électrons un peu plus loin dans le fil; ceux-ci,
à leur tour, repoussent les électrons un peu plus loin, et ainsi de suite sur une grande
distance. C'est une chose stupéfiante.
Cela parut si· stupéfiant à Gauss et à Weber - qui les premiers construisirent un
galvanomètre - qu'ils essayèrent de voir jusqu'à quelle distance les forces iraient dans.le
fil. Ils tendirent un fil d'un bout à l'autre de leur ville. M. Gauss, à une extrémité, connecta
les fils à une pile (les piles étaient connues avant les générateurs) et M. Weber regardait
bouger l'aiguille du galvanomètre. Ils avaient un moyen pour produire des signaux à
grande distance: c'était le début du télégraphe! Bien entendu, cela n'a rien à voir directe-
ment avec l'induction - cela concerne la façon dont les fils transportent les courants,
que les courants soient créés par induction ou non.
Supposons maintenant que dans le dispositif de la Fig. 16-2 nous laissions le fil tout
seul et que nous déplacions l'aimant. Nous voyons encore un effet sur le galvanomètre.
Comme le découvrit Faraday, déplacer l'aimant sous le fil- dans un sens - a le même effet
que déplacer le fil au-dessus de l'aimant - dans l'autre sens. Mais lorsque l'on déplace
l'aimant, nous n'avons plus
273
de force v x B agissant sur les électrons du fil. C'est le nouvel effet que découvrit Faraday.
De nos jours, nous pourrions espérer comprendre cela à l'aide du raisonnement de
relativité.
Nous comprenons déjà que le champ magnétique d'un aimant provient de ses
courants internes. Nous nous attendons donc à observer le même effet si, à la place
de l'aimant de la Fig. 16-2, nous utilisons une bobine de fil dans lequel il y a un courant.
Si nous déplaçons le fil devant la bobine, il y aura un courant qui traversera le galvano-
mètre, et aussi si nous déplaçons la bobine devant le fil. Mais il y a maintenant quelque
chose de plus excitant: si nous faisons varier le champ magnétique de la bobine non pas
en la déplaçant, mais en faisant varier son courant, il y a de nouveau un effet dans le
galvanomètre. Par exemple, si nous avons une boucle de fil près d'une bobine, comme
dans la Fig. 16-3, et si nous les maintenons fixes toutes les deux, mais que nous coupons
le courant, il y a une impulsion de courant dans le galvanomètre. Lorsque nous
rebranchons la bobine, le galvanomètre dévie dans l'autre sens.
Pile
Fig. 16-3. Une bobine parcourue par un
courant produit un courant dans une seconde
bobine si la première bobine est déplacée ou
si son courant varie.
Galvanomètre
Toutes les fois que le galvanomètre, dans une situation telle que celle de la Fig. 16-2,
ou de la Fig. 16-3, est parcouru par un courant, il y a une poussée résultante sur les
électrons du fil, dans une direction le long du fil. Ils peuvent être poussés dans des sens
différents en différents points, mais il y a une poussée plus grande dans un sens que dans
l'autre. Ce qui compte c'est la poussée intégrée le long du circuit complet. Nous appelons
cette poussée intégrée résultante la force électromotrice (en abrégé f.é.m.) du circuit.
Plus précisément, la f.é.m. est définie comme la force tangentielle par unité de charge
dans le fil intégrée sur toute la longueur du circuit complet. La découverte complète
faite par Faraday était que des f.é.m. peuvent être engendrées dans un fil de trois
façons différentes: en déplaçant le fil, en déplaçant un aimant au voisinage du fil, ou en
faisant varier le courant dans un fil voisin.
Considérons à nouveau la machine simple de la Fig. 16-1, seulement maintenant,
au lieu de faire passer un courant à travers le fil pour le faire tourner, faisons tourner la
spire à l'aide d'une force extérieure, par exemple avec la main ou avec une turbine à eau.
Lorsque la bobine tourne, ses fils se déplacent dans le champ magnétique et nous
trouverons une f.é.m. dans le circuit de la bobine. Le moteur devient un générateur.
274
Dans la bobine du générateur il y a une f.é.m. induite due à son déplacement. La
grandeur de la f.é.m. est donnée par une règle simple découverte par Faraday. (Nous
allons simplement énoncer la règle maintenant et nous attendrons quelque temps avant
de l'examiner en détail.) Cette règle dit que lorsque le flux magnétique qui traverse
la boucle (ce flux est la composante normale de B intégrée sur la surface de la boucle)
varie au cours du temps, la f.é.m. est égale au taux de variation du flux. Nous appellerons
cela la «règle du flux». Vous voyez que lorsque la bobine de la Fig. 16-1 tourne,
le flux qui passe à travers elle change. Au départ un certain flux la traverse dans un sens;
lorsque la bobine a tourné de 180<> le même flux la traverse dans l'autre sens. Si nous faisons
tourner la bobine d'une manière continue, le flux est d'abord positif, puis négatif, puis
positif et ainsi de suite. Le taux de variation du flux doit aussi alterner. Il y a donc une
f.é.m. alternative dans la bobine. Si nous connectons les deux extrémités de la bobine
à des fils extérieurs par des contacts glissants - appelés balais - (ainsi les fils ne se tordent
pas) nous avons un générateur de courant alternatif.
Ou bien, nous pouvons aussi nous arranger, avec des contacts glissants, pour que,
après chaque demi-tour, les connexions entre les extrémités de la bobine et les fils
extérieurs soient inversées, de sorte que lorsque la f.é.m. s'inverse, les connexions
s'inversent aussi. Les impulsions de f.é.m. vont donc toujours créer des courants de même
sens dans le circuit extérieur. Nous avons ce que l'on appelle un générateur de courant
continu.
La machine de la Fig. 16-1 est soit un moteur soit un générateur. On montre élégamment
la réciprocité entre moteur et générateur en utilisant deux« moteurs» à courant continu
identiques et à aimant permanent, dont les bobines sont connectées par deux fils de
cuivre. Lorsque l'on fait tourner mécaniquement l'arbre de l'un, il devient générateur
et fait fonctionner l'autre comme un moteur. Si l'on fait tourner l'arbre du second, il
devient le générateur et fait fonctionner le premier comme un moteur. Nous avons donc
là un exemple intéressant d'une nouvelle sorte d'équivalence de la nature: moteur et
générateur sont équivalents. L'équivalence quantitative n'est pas en fait complètement
accidentelle. Elle est liée à la loi de la conservation de l'énergie.
Un autre exemple de système qui peut fonctionner soit pour engendrer des f.é.m. soit
pour répondre à des f.é.m., est le récepteur d'un téléphone ordinaire - c'est-à-dire un
« écouteur». Le premier téléphone de Bell était constitué de deux« écouteurs »de ce type
reliés par deux longs fils. Le principe de base est donné sur la Fig. 16-4. Un aimant
permanent crée un champ magnétique dans deux « armatures » en fer doux et dans un
diaphragme mince qui se meut sous l'effet de la pression sonore. Lorsque le diaphragme
se déplace, il fait varier la grandeur du champ magnétique dans les armatures. Donc un
fil enroulé autour de l'une des armatures verra le flux qui le traverse varier lorsqu'une
onde sonore frappera le diaphragme.
Mince disque de fer i Pression du son
Booine de cuivre
275
Il y a donc une f.é.m. dans la bobine. Si les extrémités de la bobine sont connectées à un
circuit, il s'établit un courant qui est une représentation électrique du son.
Si les extrémités de la bobine de la Fig. 16-4 sont connectées à l'aide de deux fils à un
autre gadget identique, des courants variables traverseront la seconde bobine. Ces
courants créeront un champ magnétique variable et exerceront une attraction variable
sur le diaphragme de fer. Le diaphragme vibrera et produira des ondes sonores à peu
près semblables à celles qui faisaient bouger le diaphragme original. A l'aide de quelques
morceaux de fer et de cuivre la voix humaine se transmet sur des fils!
(Le téléphone domestique moderne utilise un récepteur comme celui que nous venons
de décrire mais utilise une invention perfectionnée qui fournit un émetteur plus puissant.
C'est le « microphone à pastille de carbone », qui utilise la pression sonore pour faire
varier le courant électrique fourni par une pile.)
Générateur
de courant altef)latif
276
La f.é.m. varie dans la bobine (b) avec une fréquence qui est, bien entendu, la même que
celle du premier générateur. Mais le courant dans la bobine (b) peut être plus grand
ou plus petit que le courant dans la bobine (a). Le courant dans la bobine (b) dépend de
la f.é.m. induite et de la résistance ainsi que de l'inductance du reste de son circuit. La
f.é.m. peut être inférieure à celle du générateur si, par exemple, il y a peu de variation
de flux. Ou bien la f.é.m. dans la bobine (b) peut être rendue beaucoup plus grande que
celle du générateur en donnant de nombreuses spires à la bobine (b), puisque dans un
champ magnétique donné le flux qui passe à travers la bobine est alors plus grand.
(Ou si vous préférez considérer cela d'un autre point de vue, la f.é.m. est la même dans
chacune des spires et, puisque la f.é.m. totale est la somme des f.é.m. des spires prises
séparément, de nombreuses spires en série créent une grande f.é.m.)
Une telle combinaison de deux bobines - avec en général des feuilles de fer disposées
pour guider les champs magnétiques - s'appelle un transformateur. Elle peut « trans-
former» une f.é.m. (appelée aussi une «tension») en une autre.
Il y a aussi des effets d'induction dans une bobine unique. Par exemple, dans le dispositif
de la Fig. 16-5, il y a un flux variable non seulement dans la bobine (b) qui allume la lampe,
mais aussi dans la bobine (a). La variation de courant dans la bobine (a) crée un champ
magnétique variable dans elle-même et le flux de ce champ varie continuellement, de
sorte qu'il y a une f.é.m. d'auto-induction dans la bobine (a). Il y a une f.é.m. agissant sur
un courant quelconque lorsque ce courant est en train de créer un champ magnétique
- ou en général, lorsque son champ varie d'une façon ou d'une autre. Cet effet s'appelle
l'auto-induction.
Lorsque nous avons donné la «règle du flux» d'après laquelle la f.é.m. est égale au
taux de variation du flux lié, nous n'avons pas spécifié le sens de la f.é.m. Il y a une règle
simple, appelée loi de Lenz, qui donne le sens dans lequel va la f.é.m.: la f.é.m. tend à
s'opposer à toute variation de flux. C'est-à-dire que le sens d'une f.é.m. induite est toujours
tel que si un courant devait circuler dans le sens de la f.é.m., il produirait un flux de B
qui s'opposerait à la variation de B qui crée la f.é.m. On peut utiliser la loi de Lenz pour
trouver le sens de la f.é.m. dans le générateur de la Fig. 16-1, ou dans l'enroulement du
transformateur de la Fig. 16-3.
En particulier, s'il y a un courant variable dans une bobine unique (ou dans un fil
quelconque), il existe une f.é.m. «de réaction» dans le circuit. Cette f.é.m. agit sur les
charges s'écoulant dans la hohine (a) de la Fig. 16-5 de façon à s'opposer à la variation
du champ magnétique et a donc le sens qui s'oppose à la variation du courant. Elle
s'efforce de maintenir le courant constant; elle est opposée au courant quand le courant
croît, et a le sens du courant quand il diminue. Un courant dans une auto-inductance
présente de «l'inertie», parce que les effets d'induction téndent à maintenir le débit
constant, tout comme l'inertie mécanique tend à-maintenir constante la vitesse d'un
~ct. .
Tout gros électro-aimant aura une grande auto-inductance. Supposez qu'on ait con-
necté une batterie à la bobine d'un gros électro-aimant, comme dans la Fig. 16-6, et que
l'on ait établi un champ magnétique intense. (Le courant atteint une valeur permanente
déterminée par la tension de la batterie et la résistance du fil de la bobine.) Mais supposez
maintenant que nous essayions de déconnecter la batterie en ouvrant l'interrupteur.
Si nous avions réellement ouvert le circuit, le courant tendrait rapidement vers zéro,
et créerait du coup une f.é.m. énorme. Dans la plupart des cas, cette f.é.m. serait
suffisamment grande pour amorcer un arc entre les contacts de l'interrupteur. La haute
tension qui apparaîtrait pourrait aussi endommager l'isolement de la bobine - ou vous-
mêmes, si vous êtes celui
277
Fig. 16-6. Circuit d'un électro-aimant.
La lampe permet le passage du courant
quand l'interrupteur est ouvert, évitant
l'apparition de f.é.m. excessives.
Interrupteur
Lampe
qui ouvre l'interrupteur! C'est pour ces raisons que les électro-aimants sont habituelle-
ment reliés à un circuit tel que celui de la Fig. 16-6. Lorsque l'on ouvre l'interrupteur,
le courant ne varie pas rapidement mais reste constant et s'écoule plutôt à travers la lampe,
poussé par la f.é.m. créée par l'auto-inductance de la bobine.
Anneau conducteur
1 Vers un générateur
Bobine 1 de courant aiternatif
1
--~---/-~~~~
Interrupteur
278
Si au lieu de l'anneau nous plaçons un disque d'aluminium ou de cuivre sur l'extrémité
de !'électro-aimant de la Fig. 16-7, il est également repoussé-; des courants induits cir-
culent dans la matière du disque et, de nouveau, créent une répulsion.
Un effet intéressant d'origine semblable, se produit avec une feuille d'un conducteur
parfait. Dans un« conducteur parfait», il n'y a pas de résistance quel que soit le courant.
Si donc on y crée des courants, ils peuvent continuer à y circuler indéfiniment. En effet,
la plus petite f.é.m. engendrerait un courant arbitrairement grand - ce qui signifie en
réalité qu'il ne peut pas y exister de f.é.m. du tout. Toute tentative pour faire passer un
flux magnétique dans une telle feuille engendre des courants qui créent des champs B
opposés - tous avec des f.é.m. infinitésimales, donc sans flux entrant.
279
Si le conducteur de la Fig. 16-8 n'est pas tout à fait parfait, il existera une certaine
résistance à la propagation des courants de Foucault. Les courants vont avoir tendance
à s'évanouir et l'aimant se posera doucement. Les courants de Foucault dans un
conducteur imparfait ont besoin d'être entretenus par une f.é.m., et pour que l'on ait
une f.é.m. on doit faire varier le flux. Le flux du champ magnétique pénètre graduellement
dans le conducteur.
Dans un conducteur normal, il n'y a pas seulement des forces répulsives dues aux
courants de Foucault; il peut aussi y avoir des forces latérales. Par exemple, si nous
déplaçons un aimant latéralement le long d'une surface conductrice les courants de
Foucault créent une force d'entraînement car les courants induits s'opposent à la variation
de la position du flux. De telles forces sont proportionnelles à la vitesse et sont semblables
à des forces de viscosité.
280
Courants de Foucault
L'allure des courants de Foucault dans le pendule de cuivre est indiquée sur la
Fig. 16-11. L'intensité et la géométrie des courants sont extrêmement sensibles à la forme
de la plaque. Si par exemple, on remplace la plaque de cuivre par une plaque présentant
plusieurs fentes étroites, telle que celle de la Fig. 16-12, les effets des courants de
Foucault sont brutalement réduits. Le pendule oscille dans le champ magnétique avec
seulement une faible force retardatrice. La raison en est que les courants dans chacune des
sections du cuivre ont moins de flux pour les pousser, de sorte que les effets de la résistance
de chacune des boucles sont plus importants.
281
Les courants sont plus faibles et l'entraînement moindre. Le caractère visqueux de la force
apparaît encore plus clairement si l'on place une feuille de cuivre entre les pôles de
l'aimant de la Fig. 16-10 et si on la libère ensuite. Elle ne tombe pas; elle ne fait que
descendre doucement. Les courants de Foucault opposent une forte résistance au
mouvement - tout comme la force visqueuse dans du miel.
Si au lieu d'entraîner un conducteur devant un aimant, nous essayons de le faire
tourner dans un champ magnétique, il apparaîtra un couple résistant dû aux mêmes
effets. Si au contraire, nous faisons tourner un aimant - un pôle remplaçant l'autre -
au voisinage d'une plaque conductrice, ou d'un anneau, l'anneau est entraîné; les courants
dans l'anneau créent un couple qui tend à faire tourner l'anneau avec l'aimant.
Un champ exactement comme celui d'un aimant tournant peut être réalisé à l'aide
d'enroulements disposés comme sur la Fig. 16-13. Nous prenons un tore de fer (c'est-
à-dire un anneau de fer, comme un doughnut*) et nous y bobinons six enroulements.
Si nous envoyons un courant, comme indiqué dans la partie (a), dans les enroulements (1)
et (4), il y aura un champ magnétique dans la direction donnée sur la figure. Si maintenant
nous faisons passer le courant dans les enroulements (2) et (5), le champ magnétique sera
dirigé dans une nouvelle direction, comme le montre la partie (b) de la figure. En
continuant le processus, nous obtenons la suite de champs, représentée sur le reste de la
figure. Si nous procédons sans à-coups, nous obtenons un champ magnétique« tournant».
Nous pouvons facilement obtenir la suite voulue de courants en connectant les enroule-
ments à une ligne électrique triphasée, qui fournit justement une telle suite de courants.
On obtient un courant« triphasé» à l'aide d'un générateur en utilisant le principe de la
Fig. 16-1, si ce n'est qu'il y a trois boucles fixées ensemble sur le même arbre de manière
symétrique - c'est-à-dire qu'il y a un angle de 120° d'une boucle à la suivante. Lorsqu'on
fait tourner les enroulements en bloc, la f.é.m. est maximum dans l'un, puis dans le suivant,
et ainsi de suite suivant une suite régulière. Le courant triphasé présente de nombreux
avantages pratiques. L'un d'entre eux est la possibilité de réaliser un champ magnétique
tournant. On met facilement en évidence le couple exercé sur un conducteur par un
282
Fig. 16-14. Le champ tournant de la
Fig. 16-13 peut être utilisé pour produire
un couple sur un anneau conducteur.
champ tournant de ce type, en plaçant un anneau de métal sur une table isolante juste au-
dessus du tore, comme le montre la Fig. 16-14. Le champ tournant fait tourner l'anneau
autour d'un axe vertical. Les éléments de base représentés ici sont tout à fait semblables
à ceux mis _en jeu dans un gros moteur triphasé à induction du commerce.
-
(0) lb)
1Aimant à courant alternatif
'lUJJ:W.WUW"
283
déplacerait continuellement de la région non masquée vers la région masquée. Les champs
variables interagissent alors avec les courants de Foucault du disque et créent le couple
qui s'exerce sur lui.
284
Quelque part sortant du mélange de fer et de cuivre, quelques pièces spéciales en cuivre.
Le barrage, la turbine, le fer, le cuivre, tout est là pour créer quelque chose de spécial
dans quelques barres de cuivre - une f.é.m. Les barres de cuivre vont alors un peu plus
loin, et s'enroulent plusieurs fois autour d'un autre morceau de fer dans un transforma-
teur; leur travail est alors fait.
Mais autour de ce même morceau de fer s'enroule un autre câble de cuivre qui n'a
aucune connexion directe avec les barres venant du générateur; il n'a fait que subir une
influence parce qu'il passait auprès d'elles - pour recueillir leur f.é.m. Le transformateur
transforme l'énergie à tension relativement basse exigée pour une réalisation efficace
du générateur; en de très hautes tensions qui sont ce qu'il y a de mieux pour assurer une
transmission efficace de l'énergie électrique, sur de longs câbles.
Et tout doit être énormément efficace - il ne peut pas y avoir de gaspillage, ni de perte -
Pourquoi? L'énergie d'une métropole passe là-dedans. Si l'on en perdait une petite frac-
tion - un ou deux pour cent - pensez à l'énergie abandonnée! Si on laissait un pour cent
de la puissance dans le transformateur, cette énergie devrait être évacuée d'une manière
ou d'une autre. Si elle apparaissait sous forme de chaleur, elle ferait rapidement fondre
le tout. Il y a, bien sûr, quelques petites pertes, mais il suffit de quelques pompes qui font
circuler de l'huile dans un radiateur pour empêcher le transformateur de chauffer.
Du barrage de Boulder partent quelques douzaines de tiges de cuivre - de longues,
longues, longues tiges de cuivre, ayant peut-être l'épaisseur de votre poignet, et qui
s'étirent sur des centaines de kilomètres dans toutes les directions. De petites tiges de
cuivre, transportant la puissance d'une rivière géante. Puis les tiges se partagent pour
faire encore plus de tiges ... puis elles vont vers d'autres transformateurs ... quelquefois
vers de gros générateurs qui recréent le courant sous une autre forme ... quelquefois vers
des moteurs qui tournent pour de grosses industries ... \WS d'autres transformateurs ...
puis cela se divise et s'éparpille encore ... jusqu'à ce que. finalement, la rivière s'étende
sur toute la ville - faisant tourner les moteurs, produisant de la chaleur, de la lumière,
faisant fonctionner les gadgets. C'est le miracle des lumières chaudes venant d'une
rivière froide située à plus de 600 kilomètres - tout cela fait avec des morceaux de cuivre
et de fer disposés d'une façon spéciale. Gros moteurs pour laminoirs, ou minuscules
moteurs pour fraise de dentiste. Milliers de petites roues, qui tournent en réponse à la
rotation de la grande roue du barrage de Boulder. Arrêtez la grande roue, et toutes les
roues s'arrêtent; la lumière s'éteint. Elles sont réellement reliées.
Il y a cependant plus encore. Les mêmes phénomènes qui prennent la puissance fan-
tastique de la rivière et la répandent à travers la campagne, jusqu'à ce que quelques
gouttes de la rivière fassent tourner la fraise du dentiste, ces mêmes phénomènes inter-
viennent dans la construction d'instruments extrêmement fins ... dans la détection de
quantités de courant incroyablement petites ... dans la transmission des voix, de la
musique, et des images ... dans les calculatrices ... dans des machines automatiques
d'une précision fantastique.
Tout cela est possible grâce à des constructions soigneusement conçues de cuivre et
de fer - à des champs magnétiques efficacement produits ... à des blocs de fer de 6 pieds*
de diamètre, tournant avec des jeux de 1/16 de pouce* ... à des proportions de cuivre
soigneusement calculées pour un rendement maximum ... à des formes étranges qui
toutes servent un but, comme la courbe du barrage.
285
Si un archéologue futur découvre le barrage de Boulder, nous pouvons penser qu'il
admirera la beauté de ses lignes. Mais les explorateurs de quelques grandes civilisations
futures regarderont aussi les générateurs et les transformateurs et diront: «remarquez
que toutes les pièces de fer ont une forme magnifiquement efficace. Réfléchissez à la
pensée qui s'est logée dans chacune de ces pièces de cuivre!»
C'est là la puissance de l'art de l'ingénieur, et la conception soigneuse de notre techno-
logie électrique. On a créé dans le générateur quelque chose qui n'existe nulle part
ailleurs dans la nature. Il est vrai qu'il existe des forces d'induction en d'autres endroits.
Il y a sûrement en certains endroits autour du soleil et des étoiles des effets d'induction
électro-magnétique. Le champ magnétique terrestre est peut-être aussi (bien que cela
ne soit pas certain) entretenu par quelque chose d'analogue à un générateur électrique
qui agit sur des courants circulant à l'intérieur de la terre. Mais on n'a nulle part mis
ensemble des pièces dont certaines peuvent se déplacer, pour créer de la puissance
électrique, comme cela est réalisé dans le générateur - avec une grande efficacité et
une grande régularité.
Vous pensez peut-être que faire des projets de générateurs électriques n'est plus un
sujet intéressant, que c'est un sujet mort parce que tous les générateurs ont été inventés.
Des générateurs ou des moteurs quasi parfaits peuvent être sortis d'un tiroir. Même
si c'était vrai, on pourrait admirer cette magnifique réalisation: un problème résolu
presque jusqu'à la perfection. Mais il reste autant de problèmes inachevés. Même les
générateurs et les transformateurs reposent des problèmes. Il est vraisemblable que tout
le domaine des basses températures et des supraconducteurs sera bientôt appliqué au
problème de la distribution du courant électrique. Avec un facteur complètement nou-
veau dans le problème, de nouveaux projets optimum devront être créés. Les réseaux
électriques de l'avenir ressembleront peut-être peu à ceux d'aujourd'hui.
Vous voyez qu'il existe un nombre infini d'applications et de problèmes qu'on peut
aborder en étudiant les lois de l'induction. L'étude des projets d'appareillages élec-
triques est en soi un travail de toute une vie. Nous ne pouvons pas aller très loin dans
cette direction, mais nous devrions avoir conscience du fait qu'en découvrant la loi de
l'induction nous avons brusquement relié notre théorie à un énorme développement
pratique. Nous devons cependant laisser ce sujet aux ingénieurs et aux spécialistes de
la recherche appliquée dont le travail consiste à mettre au point les détails des applica-
tions particulières. La physique n'apporte que la base - les principes de base qui
s'appliquent, peu importe à quoi. (Nous n'avons pas complètement fini de traiter la
base, nous avons encore à considérer en détail les propriétés du fer et du cuivre. La
physique a quelque chose à dire sur eux, comme nous allons le voir un peu plus loin.)
286
Les lois de l'induction
rc·I .
"L ...· " \
(0)
• °(b : •
_/..
287
sa surface est variable. Supposons qu'on place la boucle dans un champ magnétique
uniforme, le plan du U étant normal au champ. D'après la règle, quand on déplace la
barre, il doit apparaître dans la boucle une f.é.m. proportionnelle à la variation par
unité de temps du flux à travers la boucle. Cette f.é.m. va produire un courant dans la
boucle. Nous admettrons que la résistance du fil est assez grande pour que les courants
soient faibles. Nous pourrons alors négliger tout champ magnétique créé par ce courant.
Le flux à travers la boucle est wLB, donc la «règle du flux» nous donne pour la
f.é.m. - que nous écrivons 0 -
dL
0 = wB dt = wBv,
0 = wvB,
ce qui est bien le même résultat que celui obtenu à partir de la variation de flux.
Le raisonnement que nous venons de faire peut être étendu à n'importe quel cas où il
y a un champ magnétique fixe et où l'on déplace des fils. On peut montrer en général,
que pour n'importe quel circuit dont les éléments se déplacent dans un champ magné-
tique fixe, la f.é.m. est la dérivée du flux, indépendamment de la forme du circuit.
D'un autre côté, que se passe-t-il si la boucle est immobile et le champ magnétique
variable? Nous ne pouvons pas tirer du même raisonnement la réponse à cette question.
Ce fut la découverte - expérimentale - .de Faraday que la «règle du flux» est toujours
correcte, quelle que soit la raison pour laquelle varie le flux. La force agissant sur des
charges électriques est donnée en toute généralité par F = q (E + v x B); il n'y a aucune
force nouvelle spéciale «due aux champs magnétiques variables». Toutes les forces
agissant sur des charges au repos, dans un fil immobile proviennent du terme E. Les
observations de Faraday conduisirent à la découverte d'une nouvelle loi reliant les
champs électriques et magnétiques: dans une région où le champ magnétique varie
avec le temps, des champs électriques prennent naissance. C'est ce champ électrique
qui conduit les électrons le long du fil - et est donc responsable de la f.é.m. dans un
circuit immobile quand il y a un flux magnétique variable.
La loi générale du champ électrique associé à un champ magnétique variable est
aB
VXE=--· (17.1)
at
C'est ce que nous appellerons la loi de Faraday. Elle fut découverte par Faraday, mais
fut écrite pour la première fois sous forme différentielle par Maxwell, comme l'une de
ses équations. Voyons comment cette équation conduit à la «règle du flux» pour les
circuits.
On peut écrire cette loi, sous forme intégrale, par application du théorème de Stokes
j E · ds (V X E)- n da = -
lr =
J{s J{s aB
at
· n da
'
(17.2)
288
où, comme toujours, r est une courbe fermée quelconque, et S une surface quelconque
s'appuyant sur r. Ici, rappelez-vous, r est une courbe mathématique fixe dans l'espace,
et S une surface fixe. Ensuite, la dérivée par rapport au temps peut être sortie de
l'intégrale, ce qui donne
{ E · ds = -fi ·i B · n da
En appliquant cette relation à une courbe r qui suit un circuit conducteur .fixe, nous
retrouvons la «règle du flux». L'intégrale dans le premier membre est la f.é.m., et celle
du second membre est, changée de signe, la variation par unité de temps du flux à travers
le circuit. Donc, l'Eq. (17.1) appliquée à un circuit fixe est équivalente à la «règle du
flux».
Donc la «règle du flux» - selon laquelle la f.é.m. dans un circuit est égale à la variation
par unité de temps du flux magnétique à travers le circuit - s'applique aux variations de
flux dues, soit à des variations du champ, soit à un déplacement du êircuit, (soit aux
deux). Les deux possibilités - «circuit mobile» ou «champ variable» - ne se distinguent
pas dans l'énoncé de la règle. Cependant pour expliquer cette règle, nous sommes partis
de deux lois tout à fait distinctes dans les deux cas - v x B pour le «circuit mobile» et
v x E = - aB/at pour le «champ variable».
Nous ne connaissons aucun autre exemple dans toute la physique, où, pour com-
prendre réellement un principe général aussi simple et précis, il faille une analyse en
termes de deux phénomènes différents. D'ordinaire on trouve qu'une aussi belle généra-
lisation provient d'un principe profond unique sous-jacent. Néanmoins, dans le cas
présent, il ne semble pas y avoir aucune implication profonde de ce genre. Nous
devons comprendre la« règle» comme résultant des effets combinés de deux phénomènes
tout à fait séparés.
Nous devons considérer la «règle du flux» de la façon suivante. En général, la force
par unité de charge est F/q = E + v x B. Dans des fils mobiles, il y a la force due au
second terme. Il y a aussi un champ E, s'il se produit quelque part une variation du
champ magnétique. Ce sont des effets indépendants, mais la f.é.m. le long d'une boucle
de ce fil est toujours égale à la variation, par unité de temps, du flux magnétique à travers
cette boucle.
289
Fig. 17-2. Quand le disque tourne il
apparaît une f.é.m. due à vx B, mais sans
variation du flux.
Galvanomètre
·- ..... 1' .·
.,1 pi'.- .- J
'-
,_ -
1
Considérons l'exemple opposé, un cas assez rare, dans lequel le flux à travers un
«circuit» (toujours au sens de région où sont les courants) varie, mais où il n'y a pas
de f.é.m. Imaginons deux plaques métalliques, dont les bords sont légèrement arrondis,
comme sur la Fig. 17-3, placées dans un champ magnétique uniforme perpendiculaire
à leurs surfaces. Chaque plaque est reliée à l'une des bornes d'un galvanomètre comme
le montre la figure. Les plaques sont en contact en un point P, fermant ainsi le circuit.
Si l'on fait basculer les plaques d'un petit angle, le point de contact vient
290
en P'. Si on imagine que le «circuit» se referme dans les plaques suivant les lignes en
pointillé tracées sur la figure, le flux magnétique à travers ce circuit varie considérable-
ment quand on fait basculer les plaques d'avant en arrière. Cependant ce balancement
peut être effectué, par de très petits mouvements, de sorte que v x B est très petit et
qu'il n'y a pratiquement pas de f.é.m. La «règle du flux» ne s'applique pas ici. On
doit l'appliquer à des circuits dans lesquels le matériau du circuit demeure le même.
Quand le matériau du circuit varie, il faut revenir aux lois fondamentales. Les deux lois
fondamentales qui conduisent toujours aux résultats physiques corrects sont
àB
VXE=-iiï·
.y
• Lignes de champ de B
Comme exemple de l'effet d'un tel champ électrique induit, nous allons maintenant
considérer le mouvement d'un électron dans un champ magnétique variable. Imaginons
un champ magnétique qui, en tout point d'un plan, est dirigé suivant une verticale,
comme sur la Fig. 17-4. Le champ magnétique est produit par un électro-aimant, mais
nous n'entrerons pas dans ces détails. Pour notre exemple nous imaginerons que le
champ est symétrique par rapport à un certain axe, c'est-à-dire que l'intensité du champ
magnétique dépendra seulement de sa distance à l'axe. Le champ magnétique varie
aussi avec
291
le temps. Imaginons un électron qui se déplace dans ce champ sur un cercle de rayon
constant et centré sur l'axe du champ. (Nous verrons plus tard comment on peut réaliser
ce mouvement.) A cause du champ magnétique variable, il va y avoir un champ électrique
E tangent à l'orbite électronique, qui va pousser l'électron sur le cercle. Ce champ
électrique, en raison de la symétrie, aura la même valeur en tout point du cercle. Si le
rayon de l'orbite électronique est r,' l'intégrale curviligne de E le long de l'orbite est
égale à la variation par unité de temps du flux magnétique à travers le cercle. L'intégrale
curviligne de E est juste égale à son intensité multipliée par la circonférence du cercle,
2nr. Le flux magnétique s'obtiendra en général par une intégration. Pour l'instant
nous désignerons par Bmoyen le champ magnétique moyen à l'intérieur du cercle; alors
le flux est le produit de ce champ magnétique moyen par l'aire du cercle. Nous aurons
Comme nous supposons que r est constant, E est proportionnel à la dérivée par
rapport au temps du champ moyen:
E = dBmoy
!__ (17.4)
2 dt
L'électron subira la force électrique qE et sera accéléré par elle. En nous rappelant que
l'équation du mouvement correcte du point de vue relativiste, dit que la dérivée de la
quantité de mouvement est proportionnelle à la force, nous obtenons
dp
qE= - · (17.5)
dt
Nous avons supposé que pour l'orbite circulaire, la force électrique agissant sur un
électron était toujours dirigée dans le sens du mouvement, de sorte que sa quantité de
mouvement totale augmente suivant l'Eq. (17.5). Combinant les Eq. (17.5) et (17.4),
nous en déduisons la relation entre la variation de la quantité de mouvement et la varia-
tion du champ magnétique moyen:
dp qr dJJmoy
TTt. (17.6)
dt
292
convenablement, maintiendra le mouvement de l'électron sur son orbite supposée.
Dans le bêtatron, cette force transversale oblige l'électron à se déplacer sur une orbite
circulaire de rayon constant. Nous pouvons calculer la valeur à donner au champ magné-
tique sur l'orbite, en appliquant de nouveau l'équation relativiste du mouvement, mais
cette fois-ci, pour la composante transversale de la force. Dans le bêtatron (voir Fig. 17-4),
B est normal à v, de sorte que la force transversale est qvB. Ainsi. la force est égale à
la dérivée de la composante transversale de la quantité de mouvement Pt:
dpt
qvB = -· (17.8)
dt
dpt
dt= wp, (17.9)
293
l'Eq. (17.6) n'est plus valable à de si hautes énergies, car elle ne tient pas compte du fait
que la particule perd de l'énergie par rayonnement d'énergie électromagnétique (le
rayonnement appelé synchrotron, discuté au chapitre 36, Vol. I). C'est pour ces raisons
que l'accélération des électrons jusqu'aux plus hautes énergies - plusieurs milliards
d'électron volts - est réalisée au moyen d'une machine différente appelée synchrotron.
17-4 Un paradoxe
Nous allons maintenant vous décrire un paradoxe apparent. Un paradoxe est une
situation qui fournit une certaine réponse quand on l'analyse d'une certaine façon, et
une autre réponse quand on l'analyse d'une autre façon, ce qui nous laisse dans l'embar-
ras pour savoir ce qui doit se passer réellement. Évidemment, en physique il n'y a jamais
de paradoxes réels, car il n'y a jamais qu'une seule réponse exacte; tout au moins
pensons-nous que la nature n'agit que d'une seule façon (de la bonne, naturellement).
Donc, en physique, un paradoxe n'est qu'une confusion dans notre propre compré-
hension. Voici notre paradoxe.
Sphères métalliques
chargées
Imaginons que nous construisons un appareil comme celui de la Fig. 17-5. Un disque
circulaire mince en matière plastique est fixé par d'excellents roulements sur un arbre
concentrique, de sorte qu'il peut tout à fait librement tourner autour de cet axe. Une
bobine de fil ayant la forme d'un court solénoïde centré sur l'axe de rotation est placée
sur le disque. Ce solénoïde est parcouru par un courant continu I fourni par une petite
pile montée aussi sur le disque. Un certain nombre de petites sphères métalliques isolées
les unes des autres et du solénoïde par la matière plastique du disque, sont disposées
près du bord et sont uniformément espacées le long de la circonférence. Chacune de
ces petites sphères conductrices porte la même charge électrostatique Q. L'état de cet
ensemble est stationnaire et le disque est au repos. Supposons maintenant que par
accident - ou grâce à un arrangement préalable - le courant dans le solénoïde soit
interrompu, sans aucune intervention de l'extérieur. Tant que le courant passait, il y
avait un flux magnétique à travers le solénoïde plus ou moins parallèle à l'axe du
disque. Quand le courant est interrompu, ce flux doit s'annuler. Ceci produira par
conséquent un champ électrique induit qui circulera le long
294
de cercles centrés sur l'axe. Les sphères chargées sur le périmètre du disque subiront
toutes un champ électrique tangent au périmètre du disque. Cette force électrique a le
même sens pour toutes les charges et produira donc un couple résultant sur le disque.
A partir de ce raisonnement nous devrions nous attendre à ce que le disque se mette en
rotation dès que le courant dans le solénoïde disparaît. Si nous connaissions le moment
d'inertie du disque, le courant dans le solénoïde, et les charges des petites sphères, nous
pourrions calculer la vitesse angulaire résultante.
Mais on pourrait aussi raisonner d'une autre façon. Partant du principe de conserva-
tion du moment cinétique, nous pourrions dire que le moment cinétique du disque tout
équipé est initialement nul, donc, le moment cinétique de l'ensemble doit rester nul.
Il ne doit pas y avoir de rotation quand le courant est arrêté. Quel est le raisonnement
correct? Le disque tournera-t-il, oui ou non? Nous vous laisserons réfléchir à cette
question.
Nous devons vous avertir que la réponse exacte ne dépend d'aucun facteur secondaire,
tel que la position asymétrique de la batterie par exemple. En fait, vous pouvez imaginer
un cas idéal, par exemple: le solénoïde est fait d'un fil supra conducteur parcouru par
un courant. Une fois que le disque a été soigneusement mis au repos, on laisse la
température du solénoïde s'élever lentement. Quand la température du fil atteint la
température de transition entre la supraconductivité et la conductivité normale, le
courant dans le solénoïde s'annule à cause de la résistance du fil. Le flux, comme avant,
s'annulera, ce qui engendrera un champ électrique autour de l'axe. Nous devons aussi
vous prévenir que la solution n'est pas simple, et que' ce n'est pas non plus un truc. Quand
vous l'aurez trouvée, vous aurez découvert un principe import;mt de l'électromagnétique.
BScos O. (17.13)
295
d6
Charge
Si la bobine tourne avec la vitesse angulaire uniforme w, () varie avec le temps suivant
() = wt.
Dans chaque spire de la bobine il y aura une f.é.m. égale à la vitesse de variation de ce
flux. Si la bobine a N tours de fil, la f.é.m. totale sera N fois plus grande, donc
d
8 = -Ndt(BScoswt ) =NB wsmwt. s . . (17.14)
Si nous amenons les fils reliés au générateur jusqu'à un point, à une certaine distance
de la bobine en rotation, où le champ magnétique est nul, ou tout au moins ne varie pas
avec le temps, le rotationnel de E dans cette région sera nul et nous pourrons définir un
potentiel électrique. En fait, si le générateur ne débite aucun courant, la différence de
potentiel V entre les deux fils sera égale à la f.é.m. dans la bobine en rotation. C'est-à-dire
La différence de potentiel entre les fils varie comme sin wt. Une différence de potentiel
qui varie ainsi est appelée une tension alternative.
Comme il y a un champ électrique entre.les fils, ils doivent être chargés électriquement.
Il est clair que la f.é.m. du générateur a fait sortir certaines charges en excès sur le fil
jusqu'à ce que le champ électrique qu'elles créent soit assez intense pour contre-
balancer exactement la force d'induction. Vu de l'extérieur du générateur, les deux fils
apparaissent comme s'ils avaient été chargés électrostatiquement sous la différence de
potentiel V, et comme si l'on faisait varier la charge avec le temps pour produire une
différence de potentiel alternative. Il y a aussi une autre différence par rapport à
l'électrostatique. Si nous relions le générateur à un circuit extérieur qui permet le passage
du courant, nous trouvons que la f.é.m. ne permet pas aux fils de se décharger, mais
continue de leur fournir des charges tant que circule le courant, tendant à maintenir
toujours les fils sous la même différence de potentiel. En fait, si le générateur est relié à un
circuit dont la résistance totale est R, le courant dans le circuit sera proportionnel à la
f.é.m. du générateur et inversement proportionnel à R. Comme la
296
--
I
Générateur R
alternatif
f.é.m. varie en fonction du temps suivant une loi sinusoïdale, il en est de même du
courant. On a un courant alternatif
6 Vo .
1= R = R smwt.
On a représenté le schéma d'un tel circuit sur la Fig. 17-7.
Nous pouvons voir aussi que la f.é.m. détermine l'énergie fournie par le générateur.
Chaque charge du fil reçoit une puissance égale à F · v, où F est la force agissant sur la
charge, et v sa vitesse. Soit n le nombre de charges mobiles par unité de longueur du fil;
la puissance fournie à chaque élément du fil ds est
F· vnds.
Pour un fil, v est toujours dirigé le long de ds, ce qui permet de récrire la puissance sous la
forme
nvF · ds.
La puissance totale fournie à tout. le circuit est l'intégrale de cette expression le long
de la boucle fermée:
Puissance = f nvF · ds. (17.15)
Or, rappelez-vous que qnv est l'intensité I du courant, et que l'on a défini la f.é.m.
comme l'intégrale de F/q le long du circuit. Nous obtenons le résultat
Puissance fournie par le générateur = 61. (17.16)
La puissance mécanique qu'il faut fournir pour maintenir la bobine en rotation est le
produit de la vitesse angulaire w par le couple:
297
Comparant cette équation avec l'Eq. (17.14) nous voyons que la puissance mécanique
nécessaire pour faire tourner la bobine contre les forces magnétiques est juste égale à
01, puissance électrique fournie par la f.é.m. du générateur. Toute l'énergie mécanique
dépensée dans le générateur apparaît comme énergie électrique dans Je circuit.
Comme autre exemple de courants et de forces créés par une f.é.m. induite, analysons
ce qui se passe dans le dispositif décrit au paragraphe 12, et représenté sur la Fig. 17-1.
Deux fils parallèles et une tige transversale pouvant glisser dessus, sont placés dans un
champ magnétique uniforme normal au plan des fils parallèles. Admettons que le« fond »
du U (la partie gauche sur la figure) soit fait en fils de grande résfstance, tandis que les
deux fils latéraux sont faits d'un bon conducteur comme le cuivre- nous n'avons pas alors,
à nous préoccuper de la variation de la résistance du circuit quand la tige transversale se
déplace. Comme précédemment, la f.é.m. du circuit est
0 = vBw. (17.19)
1 = ~ = vBw. (17.20)
R R
Ce courant va créer une force magnétique sur la tige transversale, qui est proportionnelle
à sa longueur, à l'intensité du courant et au champ magnétique, telle que
F = Blw. (17.21)
(17.22)
Nous voyons que la force est proportionnelle à la vitesse de la tige transversale. Le sens
de la force, vous le voyez facilement, est opposé à celui de la vitesse. Une telle force,
«proportionnelle à la vitesse», qui ressemble à une force de viscosité, se rencontre chaque
fois que des courants induits sont créés par des conducteurs en mouvement dans un
champ magnétique. Les exemples de courants de Foucault que nous avons cités dans
le chapitre précédent, créaient aussi des forces agissant sur les conducteurs et propor-
tionnelles à la vitesse du conducteur, bien que de tels cas conduisent en général à des
distributions de courant compliquées et difficiles à analyser.
II est souvent commode, quand on réalise des systèmes mécaniques, d'avoir des forces
d'amortissement proportionnelles à la vitesse. Les forces dues aux courants de Foucault
fournissent l'un des moyens les plus pratiques pour obtenir une telle force fonction de la
vitesse. Un exemple d'application d'une telle force est réalisé dans le classique wattmètre
domestique. Dans le wattmètre un disque d'aluminium fin tourne entre les pôles d'un
aimant permanent. Le disque est entraîné par un petit moteur électrique dont le couple
est proportionnel à la puissance consommée par l'installation électrique de la maison.
Les forces dues aux courants de Foucault dans le disque créent une force résistante
proportionnelle à la vitesse. A l'équilibre, la vitesse est par conséquent proportionnelle
à la puissance électrique consommée. Au moyen d'un compteur fixé sur le disque,
298
on enregistre le nombre de tours du disque. Le relevé indique l'énergie totale consommée,
c'est-à-dire le nombre de wattheures utilisés.
Remarquons aussi que, d'après l'Eq. (17.22), la force due à des courants induits
- c'est-à-dire la force due à tout courant de Foucault - est inversement proportionnelle
à la résistance. La force sera d'autant plus grande que la conductivité du matériau sera
meilleure. La raison en est évidemment qu'une f.é.m. crée un courant plus intense si la
résistance est plus faible, et des courants plus intenses représentent des forces méca_niques
plus grandes.
Nous voyons aussi sur nos formules comment l'énergie mécanique est transformée
en énergie électrique. Comme plus haut, l'énergie électrique fournie à la résistance
du circuit est le produit e !. La puissance développée en déplaçant la tige conductrice est
le produit de la force agissant sur la tige par sa vitesse. D'après l'Eq. (17.21) pour la force,
la puissance mécanique est
dW v2 B 2 w 2
dt= - R - ·
Nous voyons qu'elle est bien égale au produit 1:/tiré des Eq. (17.19) et (17.20). Ici enc9re,
le travail mécanique apparaît sous formé d'énergie électrique.
Nous allons maintenant étudier un cas où il y a des bobines fixes mais des champs
magnétiques variables. Quand nous avons décrit la production de champs magnétiques
par des courants, nous n'avons considéré que le cas de courants continus. Mais tant que
les courants varient lentement, le champ magnétique sera, à chaque instant, très voisin
du champ magnétique d'un courant continu. Nous admettrons, dans ce paragraphe,
que les courants varient toujours assez lentement pour qu'il en soit bien ainsi.
Sur la Fig. 17-8, on a représenté deux bobines disposées de telle sorte qu'elles montrent
le principe de fonctionnement d'un transformateur. La bobine 1 est faite d'un fil
conducteur enroulé suivant un long solénoïde. Autour de cette bobine - et isolée de cette
bobine - est enroulée la bobine 2, faite d'un petit nombre de tours de fil. Si l'on fait passer
un courant dans la bobine 1, nous savons qu'un champ magnétique va être créé à
l'intérieur de cette bobine. Ce champ traverse aussi la bobine 2. Quand on fait varier le
courant dans la bobine 1, le flux magnétique varie aussi et une f.é.m. est induite dans la
bobine 2. Calculons cette f.é.m. induite.
Nous avons vu au paragraphe 13-5 que le champ magnétique à l'intérieur d'un long
solénoïde est uniforme et que son intensité est
B = _l_ N1/1,
(17.23)
Eoc 2 I
où N 1 est le nombre de spires dans la bobine 1, / 1 le courant qui y circule, et l sa longueur.
Soit S l'aire de la section droite de la bobine, alors le flux de B est le produit de son
intensité par S. Si la bobine 2 possède N 2 spires, ce flux traverse la bobine N 2 fois. Par
suite l'a f.é.m. dans la bobine 2 est
dB
-NoS-· (17.24)
- dt
299
Fig. 17-8. Un courant dans la bobine 1
crée un champ magnétique à travers la
bobine 2.
La seule grandeur qui varie avec le temps dans l'Eq. (17.23) est 11 • La f.é.m. est donc
donnée par
N1N2S d11 (17.25)
82 = - E c21 dt ·
0
Nous voyons que la f.é.m. dans· la bobine 2 est proportionnelle à la dérivée, par rapport
au temps, de l'intensité du courant dans la bobine 1. Le coefficient de proportionnalité,
qui est essentiellement un facteur géométrique des deux bobines, est appelé inductance
mutuelle, et est désigné en général par A 21 • L'Eq. (17.25) s'écrit alors
(17.26)
Imaginons maintenant que nous fassions passer un courant dans la bobine 2: que
deviendra la f.é.m. dans la bobine 1? Il faudrait calculer le champ magnétique, qui est
partout proportionnel au courant 12 • Le flux à travers la bobine 1 dépendrait de la
géométrie, mais serait proportionnel au courant 12 • La f.é.m. dans la bobine 1 serait,
par suite, encore proportionnelle à dl2 /dt: nous pouvons écrire
(17.27)
Le calcul de.fi 12 serait plus difficile que le calcul effectué pour A 21 • Nous ne l'aborderons
pas maintenant car nous verrons un peu plus loin dans ce chapitre que.,# 12 est nécessaire-
ment égal àA21·
Puisque pour toute bobine, le champ qu'elle crée est proportionnel au courant qui la
parcourt, on obtiendrait le même genre de résultat pour n'importe quelle paire de bobines
de fil. Les équations (17.26) et (17.27) auraient la même forme; seules les constantes.fi21
et A 12 seraient
300
différentes. Leurs valeurs dépendraient des formes et des positions relatives des
bobines.
Supposons que nous voulions calculer l'inductance mutuelle de deux bobines quel-
conques - comme celles de la Fig. 17-9. Nous savons que l'expression générale de la
f.é.m. dans la bobine 1 peut s'écrire
81 = - _dd
t
f(1)
B · n da,
où B est le champ magnétique et où l'intégrale doit être prise sur une surface s'appuyant
sur le circuit!. Nous avons vu au paragraphe 14-1 qu'une telle intégrale de surface de B
peut être reliée à une intégrale curviligne du potentiel-vecteur. En particulier,
1(1)
B·nda = 1
lcl)
A ·ds 1 ,
81 = _ !!_
dt
i(!)
A· ds1. (17.28)
Admettons alors que le potentiel-vecteur sur le circuit 1 soit dû aux courants du circuit 2.
On peut alors l'écrire sous la forme d'une intégrale curviligne le long du circuit 2:
(17.29)
où 12 est le courant dans le circuit 2 et r12 est la distance de l'élément du circuit ds 2 au point
du circuit où l'on calcule le potentiel-vecteur. (Voir Fig. 17-9.) En combinant les
Eq. (17.28) et (17.29), nous pouvons exprimer la f.é.m. dans le circuit 1 par une intégrale
curviligne double:
81
= _ _ 1_ !!_ 1 1 12 ds2. dsi
47rEoc 2 dt lc1) lc2) r12 ·
301
Dans cette équation les intégrales sont toutes calculées sur des circuits immobiles. La
seule grandeur variable est Je courant / 2 qui ne dépend pas des variables d'intégration.
On peut donc la faire sortir des intégrales. Et la f.é.m. s'écrit
où Je coefficienL# 12 est
mr 12 -
-
. l ff ds2 . ds1
- 47reoc 2 o> <2> ~ •
(17.30)
Nous voyons sur cette intégrale que Jf12 dépend seulement de la géométrie du circuit.
Il dépend d'une sorte de séparation moyenne des deux circuits, la moyenne étant
pondérée Je plus lourdement quand deux segments pris sur les deux bobines sont
parallèles. Cette équation peut être appliquée au calcul de l'inductance mutuelle de deux
circuits de forme quelconque. Elle montre aussi que l'intégrale relative à Jt 12 est
identique à l'intégrale relative à Jf 21 • Nous venons donc de montrer que ces deux
coefficients sont identiques. Pour les systèmes formés de deux bobines seulement,
on représente souvent les coefficients Jf 12 et Jf21 par le symbole.,# sans indices, qu'on
appelle simplement l'inductance mutuelle:
17-7 Auto-inductance
Dans notre étude des forces électromotrices induites dans les deux bobines des
Fig. 17-8 et 17-9, nous n'avons considéré que le cas où le courant parcourait une seule
des deux bobines. S'il y a des courants dans les deux bobines simultanément, le flux
magnétique à travers l'une ou l'autre des bobines sera la somme des deux flux qui
existeraient séparément, car le principe de superposition s'applique aux champs
magnétiques. La f.é.m. dans l'une ou l'autre des bobines sera, par suite, proportionnelle,
non seulement à la variation du courant dans l'autre bobine, mais aussi à la variation du
courant dans la bobine elle-même. Ainsi, la f.é.m. totale dans la bobine 2 s'écrira*
(17.31)
De même la f.é.m, dans la bobine 1 dépendra non seulement des variations du courant
dans la bobine 2, mais aussi des variations de son propre courant:
(17.32) -
•Le signe de .ft 12 et A 21 dans les Éq. (17.31) et (17.32) dépend des choix arbitraires pour les
sens positifs du courant dans les deux bobines.
302
Les coefficients A 22 etA 11 sont toujours des nombres négatifs. On a l'habitude d'écrire
mî11 = -.Ci. ml:22 = -oC2, (17.33)
où.sf1 et.sf2 sont appelés les auto-inductances des deux bobines.
La f.é.m. d'auto-induction existera, évidemment, même si nous n'avons qu'une seule
bobine. Toute bobine prise isolément aura une auto-inductance 9?. La f.é.m. sera propor-
tionnelle à la dérivée du courant qui y circule. Pour une bobine seule, on adopte d'ordi-
naire, la convention selon laquelle la f.é.m. et le courant sont comptés positivement s'ils
ont même sens. Avec cette convention, nous pouvons écrire pour la f.é.m. d'une seule
bobine
e = -oe -dl
dt
. (17.34)
Le signe moins indique que la f.é.m. s'oppose à la variation du courant - on l'appelle sou-
vent une « f.é.m. de réaction ».
t
(a)
- \
:!,~,,\,,,,,
F
303
particule*. Voir Fig. 17-lO(b). Nous pouvons dresser le tableau de correspondance
suivant.
Particule Bobine
F (force) 1"' (différence de potentiel)
v (vitesse) l (intensité du courant)
'((déplacement) q (charge)
F= mdv 1"'=.#/
dt dt
mv (quantité de mouvement) fi'[
!mv 2 (énergie cinétique) !fi'P (énergie magnétique)
Nous pouvons le voir plus en détail de la façon suivante. Comme nous l'avons trouvé
dans l'Eq. ( 1"! .16), la puissance électrique fournie par les forces induites est le produit de la
force électromotrice par l'intensité du courant:
dW
dt= 81.
Remplaçons t! par son expression en fonction du courant, tirée de l'Eq. (17.34), nous
obtenons
dW dl
- = -J!,f-· (17.36)
dt dt
Intégrons cette équation, nous trouvons que l'énergie nécessaire à une source extérieure
pour surmonter la f.é.m. dans l'auto-inductance, pendant que s'établit le courantt (énergie
qui doit être égale à l'énergie emmagasinée, U) est
(17.37)
* Ceci n'est pas, entre parenthèses, la seule façon d'établir une correspondance entre les
grandeurs mécaniques et électriques.
t Nous négligeons toute perte d'énergie sous forme de chaleur, due au passage du courant
dans la résistance de la bobine. De telles pertes nécessitent une énergie supplémentaire fournie
par la source, mais ne modifient pas l'énergie qui passe dans l'inductance.
304
Par suite l'énergie emmagasinée dans une inductance est !2 12.
En appliquant les mêmes raisonnements à une paire de bobines telles que celles de
la Fig. 17-8 ou 17-9, nous pouvons montrer que l'énergie électrique totale du système
est donnée par
(17.38)
En effet, partant de I = 0, dans les deux bobines, nous pourrions d'abord établir le cou-
rant 11 dans la bobine I, en laissant 12 = O. Le travail fourni est juste !21/ 12 • Mais ensuite
en établissant le courant 12 , nous ne fournissons pas seulement !22/l contre la f.é.m.
dans le circuit 2, mais aussi un terme supplémentaire .fi/112 qui est l'intégrale de la
f.é.m. [Jt(dl2 /dt)] dans le circuit 1 multipliée par le courant / 1, maintenant constant,
parcourant ce circuit.
Si maintenant nous voulons déterminer la force entre deux bobines quelconques
parcourues par les courants / 1 et / 2, nous pourrions, a priori, penser appliquer le principe
des travaux virtuels, en prenant la variation de l'énergie de l'Eq. (17.38). Nous devons
nous rappeler, évidemment, qu'en changeant les positions relatives des deux ·bobines, la
seule grandeur qui varie est l'inductance mutuelle.fi. Nous pourrions alors écrire l'équa-
tion des travaux virtuels sous la forme
Mais cette équation est fausse, car, nous' l'avons vu précédemment, elle ne tient compte
que de la variation d'énergie des deux bobines, et non pas de la variation d'énergie des
deux sources qui maintiennent les courants constants et égaux à / 1 et / 2 • Nous pouvons
maintenant comprendre que ces sources doivent fournir de l'énergie contre les f.é.m.
induites dans les bobines, au cours de leurs déplacements. Si nous voulons appliquer
correctement le principe des travaux virtuels, nous devons aussi tenir compte de ces
énergies. Comme nous l'avons vu cependant, nous pouvons abréger et appliquer le
principe des travaux virtuels en nous souvenant que l'énergie totale est l'opposé de ce
que nous avons appelé, Umw « l'énergie mécanique». Nous pouvons alors écrire pour la.
force
-F A.x = ÂUmec = -t:i.U. (17.39)
L'Eq. (17.38) de l'énergie d'un système de deux bobines peut servir à démontrer une
inégalité intéressante qui existe entre l'inductance mutuelle vit et les auto-inductances
2 1 et 2 2 des deux bobines. Il est clair que l'énergie de deux bobines doit être positive. Si
nous partons de courants nuls dans les bobines, et faisons croître ces courants jusqu'à
certaines valeurs, nous avons accru l'énergie du système. Sinon, les courants, spontané-
ment, augmenteraient en cédant de l'énergie au reste de l'univers - ce qui est bien
improbable! Or, notre équation de l'énergie, Eq. (17.38), peut tout aussi bien s'écrire
sous la forme:
(17.40)
305
Ceci n'est qu'une transformation algébrique. Cette expression doit toujours être positive
quelles que soient les valeurs de 11 et 12 • En particulier, elle doit être positive, si 12 prend la
valeur particulière
(17.41)
Mais avec cette valeur pour l'intensité / 2 , le premier terme de l'Eq. (17.40) est nul.
Si l'énergie doit être positive, le dernier terme de (17.40) doit être plus grand que zéro.
Nous avons la condition
(17.42)
(17.43)
La constante k est appelée le coefficient de couplage. Si presque tout le flux de l'une des
bobines traverse la seconde bobine, le coefficient de couplage est voisin de un; nous disons
que le «couplage est rigide ». Si les bobines sont éloignées ou disposées de telle sorte
qu'un très faible flux mutuel les traverse, le coefficient de couplage est voisin de zéro et
l'inductance mutuelle est très petite.
Pour calculer l'inductance mutuelle de deux bobines, nous avons établi, Eq. ( 17 .30), une
formule qui est une intégrale curviligne double le long des deux circuits. Nous pourrions
penser que la même formule pourrait s'appliquer au calcul de l'auto-inductance d'une
bobine unique, en effectuant les deux intégrales curvilignes le long de la même bobine.
Mais ça ne marche pas ainsi, car en intégrant le long des deux.bobines, le dénominateur
r 12 de l'intégrant va devenir nul quand les deux éléments viennent se confondre au même
point. L'auto-inductance calculée ainsi est infinie. La raison en est que cette formule
est une approximation valable seulement si les sections des fils des deux circuits sont
petites devant la distance d'un circuit à l'autre. Il est clair que cette approximation ne
s'applique plus à une seule bohine. Et en fait. il est vrai que l'inductance d'une bobine
unique tend logarithmiquement vers l'infini quand le diamètre de son fil devient de plus
en plus petit.
Nous devons donc trouver un autre moyen de calculer l'auto-inductance d'une bobine
unique. Il est nécessaire de tenir compte de la distribution des courants à l'intérieur du fil,
car la taille du fil est un paramètre important. Par conséquent, nous ne cherchons plus
l'inductance d'un « circuit », mais l'inductance d'une distribution de conducteurs. La
façon la plus simple de trouver cette inductance est
306
sans doute de partir de l'énergie magnétique. Nous avons établi, au paragraphe 15-3, une
expression de l'énergie magnétique d'une distribution de courants stationnaires:
(17.44)
( 17.45)
Nous nous attendons évidemment à ce que l'inductance soit un nombre qui dépend
seulement de la géométrie du circuit et non du courant l dans le circuit. La formule de
l'Eq. (17.45) conduira effectivement à ce résultat, car l'intégrale de cette équation est
proportionnelle au carré de l'intensité - l'intensité figure une fois dans j et encore une fois
dans le potentiel-vecteur A. L'intégrale divisée par P dépendra de la géométrie du circuit,
mais non de l'intensité du courant !.
L'Eq. (17.44) pour l'énergie d'une distribution de courant peut être écrite sous une
forme tout à fait différente, qui est parfois plus pratique pour les calculs. De plus, comme
nous le verrons, c'est une forme importante parce qu'elle est plus générale. Dans l'équation
de l'énergie, Eq. (17.44), A etj peuvent tous deux être reliés à B, de sorte que nous pouvons
espérer exprimer l'énergie en fonction du champ magnétique - tout comme nous avons
pu relier l'énergie électrostatique au champ électrique. Commençons par remplacer
j par E 0 c2 V ><: B. Nous ne pouvons pas remplacer A aussi facilement puisque B = V x A
ne peut être inversé pour avoir A en fonction de B. Néanmoins nous pouvons écrire
U = eo;-
2
f (V X B) · A dV. (17.46)
Ce qui est intéressant, c'est que - en faisant quelques restrictions - cette intégrale s'écrit
aussi
U = Ei
2
f
B · (V X A) dV. (17.47)
Pour le voir, nous explicitons en détail un terme caractéristique. Par exemple, le terme
(V x B),A, qui figure dans l'intégrale de l'Eq. (17.46). En écrivant les composantes,
nous avons
(Il y a évidemment encore deux intégrales du même type.) Nous intégrons alors le
premier terme par rapport à x - intégration par parties. C est-à-dire que
f 7JX
.aBy A z dX = ByAz - f aA,
By 7JX dx.
307
Admettons que notre système - les sources et les champs - soit fini, de sorte qu'à de
grandes distances tous les champs tendent vers zéro. Alors, si les intégrales sont étendues
à tout l'espace, la valeur prise par le terme ByAz aux extrémités de l'intervalle sera nulle.
Il ne nous reste plus que des termes tels que By(aA,/ax) lesquels sont évidemment une
partie de By/ V x A)y, donc de B.( V < A). Si vous explicitez les cinq autres termes, vous
verrez que l'Eq. (17.47) est bien équivalente à l'Eq. (17.46).
Mais alors nous pouvons remplacer (V x A) par B, et obtenir
U = -r f E · E dV. (17.49)
Une des raisons pour insister sur ces deux formules de l'énergie est que bien souvent,
elles sont plus pratiques à appliquer. Il arrive une chose encore plus importante: les deux
expressions (17.48) et (17.49) demeurent vraies pour des champs dynamiques (quand E et
B varient avec le temps), alors que les autres formules que nous avons données pour les
énergies électriques ou magnétiques ne sont plus valables - elles ne s'appliquent qu'à
des champs statiques.
Si nous connaissons le champ magnétique B créé par une bobine unique, nous pouvons
calculer l'auto-inductance en ·égalant l'expression de l'énergie (17.48) à !fi' /2. Voyons
comment on procède en cherchant l'auto-inductance d'un long solénoïde. Nous avons
déjà vu que le champ magnétique à l'intérieur d'un solénoïde était uniforme et que B
à l'extérieur est nul. L'intensité du champ à l'intérieur est B = nl/E0c2 , où n est le nombre
de spires de l'enroulement par unité de longueur, et I l'intensité du courant. Si le
rayon de la bobine est r et sa longueur L (nous prenons L très grand de façon à pouvoir
négliger les effets de bout, c'est-à-dire L >> r), le volume intérieur est nr 2 L. L'énergie
magnétique est donc
U = Eoc2 B2. (Vol) = -n2/2 2L
2z 7rr '
2 EoC
ce qui est égal à !fi' /2. Soit,
.c (17.50)
308
IS
18 1 Équations de Maxwell
Dans ce chapitre nous revenons à l'ensemble complet des quatre équations de
Maxwell que nous avons pris comme point de départ au chapitre 1. Jusqu'à maintenant,
nous avons étudié les équations de Maxwell pièce à pièce; il est temps d'ajouter un dernier
morceau et de tout réunir. Nous aurons alors l'histoire complète et correcte pour des
champs électromagnétiques qui peuvent varier avec le temps, de n'importe quelle façon.
Tout ce qui est dit dans ce chapitre, en contradiction avec quelque chose qui a été dit
plus tôt, est vrai et ce qui a été dit plus tôt est alors faux - parce que ce qui a été dit plus tôt
s'appliquait à des situations spéciales telle celle, par exemple, des courants constants ou
des charges fixes. Bien que nous ayons pris beaucoup de précautions pour souligner
les restrictions toutes les fois que nous écrivions une équation, il est facile d'oublier
toutes les spécifications et d'apprendre trop bien les équations fausses. Nous sommes
prêts maintenant à dire toute la vérité, sans spécifications (ou presque).
Les équations de Maxwell complètes sont écrites dans la table 18-1, en langage ordinaire
ainsi qu'avec des symboles mathématiques. Le fait que les mots soient équivalents aux
équations devrait maintenant vous être familier - vous devriez être capable de traduire
d'une forme à l'autre, dans les deux sens.
La première équation - la divergence de E est la densité de charge divisée par Eo -
est vraie en général. Dans des champs dynamiques aussi bien que dans des champs stati-
ques, la loi de Gauss est toujours valable. Le flux de E à travers n'importe quelle surface
fermée est proportionnel à la charge intérieure. La troisième équation est la loi générale
correspondante pour les champs magnétiques. Comme il n'y a pas de charges
magnétiques, le flux de B à travers toute surface fermée est toujours nul. La deuxième
équation, le rotationnel de E égale - 88/at, est la loi de Faraday et a été discutée dans
les deux derniers chapitres. Elle aussi est toujours vraie. La dernière équation apporte
quelque chose de nouveau. Nous n'en avons vu jusqu'à maintenant que la partie qui
concerne les courants constants. Dans ce cas, nous avons dit que le rotationnel de B vaut
Je 0 c2 , mais l'équation générale correcte comporte un terme nouveau qui a été découvert
par Maxwell.
309
iJt
\'-'.U.""U.1'1LJ.V.1J U'-' ~ n,, .1vu5 u UUÇ ..... VUlLJÇ J.~JlJ.J.ÇÇJ= -dt \llUA Ut:: .D d Llii:lVC:l~ Id \;U
2
IV. c V X B = _j_
EO
+ iJE
Ot
2
c (circulation de B le long d'une courbe fermée) =courant à travers la courb
~ ~
Conservation de la charge
[
. op
V 'J = - àt (ftux do oourant à trav<rn uno '"''"" f<nné<) - (durrgo int<rio=il
Loi de force
F = q(E + v X B)
Loi du mouvement
d mv
dt (p) = F, où Ji = -;::::=== (loi de Newton, modifiée par Einstein)
VI - v2/c2
Gravitation
F = -G m1m2 e
r2 r
Jusqu'au travail de Maxwell, les lois de l'électricité et du magnétisme que l'on connais-
sait, étaient celles que nous avons étudiées du chapitre 3 au chapitre 17. En particulier,
l'équation que l'on connaissait pour le champ magnétique de courants constants n'était
que
(18.1)
Maxwell commença par considérer ces lois connues et par les exprimer sous forme
d'équations différentielles, comme nous l'avons fait ici. (Bien que la notation V n'ait pas
encore été inventée, c'est surtout à Maxwell qu'on doit d'avoir fait apparaître pour la
première fois l'importance des combinaisons de dérivées que nous appelons aujourd'hui
rotationnel et divergence.) Il remarqua alors qu'il y avait quelque chose de bizarre dans
l'Eq. (18.1). Si on prend la divergence de cette équation, le premier membre est nul
parce que la divergence d'un rotationnel est toujours nulle. Cette équation entraîne
donc que la divergence de j est nulle aussi. Mais si la divergence de j est nulle, le flux total
du courant sortant d'une surface fermée est également nul.
Le flux du courant sortant d'une surface fermée est la diminution de la charge intérieure
à cette surface. Ceci ne peut certainement pas être nul en général parce que nous savons
que les charges peuvent être déplacées d'un endroit à un autre. L'équation
V ·j = (18.2)
a, en fait, presque été notre définition de j. Cette équation exprime la loi très
fondamentale que la charge électrique se conserve - tout écoulement de charge doit
provenir d'une source. Maxwell se rendit compte de cette difficulté et proposa de l'éviter
en ajoutant Je terme aE/a t au second membre de l'Eq. (18.1); il obtint alors la quatrième
équation de la table 18-1:
}• aE
IV. c
2
v X B -- -
Eo
+ -·
éJt
Il n'était pas encore habituel au temps de Maxwell de raisonner avec des champs
abstraits. Maxwell discuta ses idées à J'aide d'un modèle dans lequel le vide était
semblable à un solide élastique. Il essaya aussi d'expliquer le sens de sa nouvelle équation
à l'aide de ce modèle mécanique. Il rencontra beaucoup d'opposition pour faire accepter
sa théorie, d'abord à cause du modèle, et ensuite parce qu'il n'y avait pas, au début, de
justification expérimentale. Nous comprenons mieux aujourd'hui que ce qui compte ce
sont les équations elles-mêmes et non pas le modèle utilisé pour les obtenir. Nous ne
pouvons que nous demander si les équations sont vraies ou fausses. La réponse s'obtient
en faisant des expériences, et d'innombrables expériences ont confirmé les équations de
Maxwell. Si nous retirons l'échafaudage qu'il utilisa pour le construire, nous nous aperce-
vons que le magnifique édifice de Maxwell tient tout seul. Il a réuni toutes les lois de l'élec-
tricité et du magnétisme en .une théorie complète et magnifique.
Montrons que le terme supplémentaire est exactement ce qu'il faut pour surmonter la
difficulté découverte par Maxwell. En prenant la divergence de son équation (TV dans la
table
311
18-1), on doit trouver que la divergence du second membre est nulle:
. aE
V .1-
E'o
+ V .-
ot = O. (18.3)
Dans le second terme, on peut inverser l'ordre des dérivations par rapport aux
coordonnées et au temps, de sorte que l'équation peut s'écrire
V ·j + Eo fi V ·E = O. (18.4)
Mais la première équation de Maxwell dit que la divergence de E vaut p/•o· Portant cette
égalité dans l'Eq. (18.4) nous retrouvons l'Eq. (18.2) que nous savons être vraie.
Inversement, si nous admettons les équations de Maxwell - et nous le faisons parce que
personne n'ajamais trouvé une expérience qui soit en désaccord avec elles -nous devons
conclure que la charge est toujours conservée.
Les lois de la physique n'apportent pas de réponse à la question:« qu'arrive-t-il si une
charge est brusquement créée en ce point - quels effets électromagnétiques sont
produits? » Aucune réponse ne peut être fournie parce que nos équations disent que cela
n'arrive pas. Si cela devait arriver, nous aurions besoin de lois nouvelles, mais nous ne
pouvons dire ce qu'elles seraient. Nous n'avons pas eu l'occasion d'observer comment se
comporte un monde dans lequel la charge ne se conserve pas. D'après nos équations, si
vous placez brusquement une charge en un point, il a fallu que vous l'y apportiez de
quelque part. Dans ce cas, nous pouvons dire ce qui arrive.
Quand nous avons ajouté un terme nouveau à !'équation qui donne le rotationnel de E,
nous avons trouvé que toute une classe nouvelle de phénomènes se trouvait décrite. Nous
allons voir que le petit additif de Maxwell à l'équation pour V x B a également des
conséquences qui vont très loin. Nous ne pourrons en atteindre que quelques-unes dans
ce chapitre.
Cherchons maintenant le champ magnétique produit par les courants dans ce cas.
Supposons qu'on trace une courbe fermée r sur une sphère de rayon r, comme indiqué
sur la Fig. (18-1).
312
E
I
E Fig. 18-1. Quel est le champ magné-
I
tique d'un courant à symétrie sphérique?
Il passe un courant à travers cette courbe, on peut donc s'attendre à trouver un champ
magnétique circulant dans la direction indiquée.
Mais nous sommes déjà en difficulté. Comment B peut-il avoir une direction particulière
sur la sphère? Un choix différent der nous aurait amené à conclure que sa direction devait
être exactement l'opposée de celle indiquée. Alors comment peut-il y avoir une circulation
de B autour des courants?
Nous sommes sauvés par l'équation de Maxwell. La circulation de B ne dépend pas
seulement du courant total à travers r mais aussi de la vitesse avec laquelle le flux élec-
trique à travers cette courbe varie en fonction du temps. Il faut que ces deux parties
se compensent exactement. Voyons si ça marche.
Le champ électrique en fonction du rayon r doit être Q(r)/4iu 0 r2 - pour autant que la
charge soit distribuée symétriquement, comme nous l'avons supposé. Il est radial et sa
vitesse de variation est donc
àE àQ
(18.6)
Tt = 47l"Eor 2 Tt ·
Comparant ceci à l'Eq. (18.5), on voit que pour tout rayon
àE j.
Tt = (18.7)
Eo
Dans l'Eq. IV, les deux termes de source s'annulent et le rotationnel de Best toujours nul.
Il n'y a pas de champ magnétique dans notre exemple.
Comme second exemple, eonsidérons le champ magnétique d'un fil utilisé pour charger
un condensateur plan (voir Fig. 18-2). Si la charge Q sur les plateaux varie en fonction
du temps (mais pas trop vite), le courant dans les fils est égal à dQ/dt. Nous nous atten-
drions à ce que ce courant produise un champ magnétique qui encercle le
313
Courber S1
~--~-----------~-~
Il '' 't //
•• I\11 (0)
'
''
(b)
fil. Près du fil le courant doit certainement produire le champ magnétique habituel - il ne
peut dépendre de l'endroit où va le courant.
Supposons que l'on prenne une courbe I'1 qui soit un cercle de rayon r, comme indiqué
sur la partie (a) de la figure. La circulation du champ magnétique devrait être égale au
courant l divisé par t 0 c2 • Nous avons
27rrB = l (18.8)
~oc 2 •
C'est ce que nous obtiendrions pour un courant stationnaire, mais c'est également correct
avec l'additif de Maxwell, parce que si nous considérons la surface plane S intérieure au
cercle, il n'y a pas de champ électrique dessus (en supposant que le fil soit un très bon
conducteur). L'intégrale de surface de aE/at est nulle.
Supposons, cependant, que nous déplacions lentement la courbe I' vers le bas. Nous
obtenons toujours le même résultat jusqu'à ce que nous arrivions au niveau des plateaux
du condensateur. Le courant I devient alors nul. Le champ magnétique disparaît-il?
Cela serait tout à fait bizarre. Voyons ce que dit l'équation de Maxwell pour la courbe I'2
qui est un cercle de rayon r dont le plan passe entre les plateaux [Fig. 18-2(b)). La circula-
tion de B autour de I'2 est 2nrB. Ceci doit être égal à la dérivée par rapport au temps du
flux de E à travers la surface plane circulaire S2 • Ce flux de E, nous le savons par la loi
de Gauss, doit être égal à l/t 0 multiplié par la charge Q de l'un des plateaux. Nous avons
c2 27rrB = !!....
dt
(i?.) ·
Eo
(18.9)
C'est très pratique. C'est le même résultat que celui que nous avons trouvé dans
l'Eq. (18.8). En intégrant sur le champ électrique variable on obtient le même champ
magnétique qu'en intégrant sur le courant dans le fil. Naturellement, c'est justement
cela que dit l'équation de Maxwell. Il est facile de voir qu'il doit toujours en être ainsi
en appliquant les mêmes raisonnements aux deux surfaces S 1 et s; limitées par le même
cercle I'1 de la Fig. 18-2(b). A travers S 1 il y a le courant/, mais pas de flux électrique.
A travers s;, il n'y a pas de courant, mais un flux électrique variant à la vitesse l/t 0 • On
obtient le même B en utilisant l'Eq. IV avec l'une ou l'autre surface.
314
A ce point de notre discussion sur le nouveau terme de Maxwell, vous pouvez avoir
l'impression qu'il n'ajoute pas grand-chose - qu'il met seulement les équations en ordre
pour qu'elles correspondent à ce que nous attendons déjà. Il est vrai que si nous ne considé-
rons que J'Eq. IV en elle-même, rien de particulièrement nouveau n'en sort. L'expression
« en elle-même» a cependant beaucoup d'importance. Le petit changement qu'a
opéré Maxwell dans l'Eq. IV, quand cette dernière est combinée avec les autres équations,
produit réellement beaucoup de choses qui sont nouvelles et importantes. Avant d'enta-
mer ces questions nous aimerions cependant parler plus de la table 18-1.
315
une coordonnée, nous aurons un problème à une dimension. La situation est représentée
sur la Fig. 18-3. Nous avons une nappe de charges localisées sur le plan yz. La nappe
est d'abord au repos, puis on lui donne instantanément une vitesse u dans la direction y,
et elle continue à se déplacer à cette vitesse. Vous pourriez vous inquiéter d'avoir une
telle accélération« infinie», mais cela n'a pas réellement d'importance; imaginez simple-
ment que la vitesse est très rapidement portée à la valeur u. Nous avons ainsi brusque-
ment un courant superficiel J (J est le courant par unité de largeur dans la direction z).
Pour que le problème reste simple, nous supposons qu'il y a aussi une nappe stationnaire
de charges de signe opposé sur le plan yz, de façon à ce qu'il n'y ait pas d'effet électro-
statique. De plus, bien que sur la figure nous ne montrions que ce qui arrive dans une
région finie, nous imaginons que la couche s'étend à l'infini dans les directions ±y et ±z.
En d'autres termes, nous avons une situation dans laquelle il n'existe aucun courant et
puis brusquement il y a une nappe uniforme de courant. Qu'est-ce qui va se passer?
Nappe de charge
1
-------~--
---vt ,,,1 Fig. 18-3. Une nappe infinie de charge
est brusquement mise en mouvement paral-
x•x 0
lèlement à elle-même. Des champs magné-
tiques et électriques se propagent à partir
·de la nappe, à une vitesse constante.
Eh bien, quand il existe une nappe de courant dans la direction des y positifs, il
apparaît, comme nous le savons, un champ magnétique qui a la direction des z négatifs
pour .\· > 0 et la direction opposée pour x < O. Nous pourrions obtenir la valeur de B
en utilisant le fait que la circulation du champ magnétique doit être égale au courant
divisé par e0 c2 . Nous obtiendrions B = J/2eoc 2 (car le courant l dans une bande de
largeur w est Jw et la circulation de B est 2Bw).
Ceci nous donne le champ près de la nappe - pour x petit - mais comme nous
supposons que la nappe est infinie, nous devons nous attendre à ce que le même raisonne-
ment nous donne le champ plus loin pour de plus grandes valeurs x. Cela signifierait
cependant qu'au moment où l'on établit le courant, le champ magnétique varie partout
brusquement de la valeur zéro à une valeur finie. Mais attendez! Si le champ magnétique
varie brusquement, il doit produire des effets électriques énormes. (Dès lors qu'il change,
il y a des effets électriques.) Ainsi, parce que nous avons mis en mouvement la nappe de
charges, nous créons un champ magnétique variable et par conséquent des champs
électriques doivent être créés. Si des champs électriques prennent naissance, ils doivent
partir de zéro et prendre une autre valeur.
316
Il existera un iJE/iJt qui apportera sa contribution, en même temps que le courant J, à
la production du champ magnétique. Ainsi il y a un grand mélange entre les diverses
équations, et il faut essayer de trouver la solution pour tous les champs à la fois.
En regardant les seules équations de Maxwell, il n'est pas facile de voir directement
comment on peut résoudre le problème. Nous allons donc d'abord vous donner la solu-
tion et vérifier ensuite qu'elle satisfait bien les équations. La réponse est la suivante: le
champ B que nous avons calculé est effectivement produit au voisinage immédiat de la
nappe de courant (pour x petit). Il doit en être ainsi, parce que si on trace un tout petit
contour autour de la nappe, il n'y a pas de place pour qu'un flux électrique passe à travers.
Mais plus loin - pour x plus grand - le champ B est nul, au début. Il reste nul pendant
un moment, et puis brusquement il s'établit. En bref, on établit le courant et le champ
magnétique à son voisinage immédiat apparaît et prend la valeur constante B; puis
l'apparition de B s'étend à partir de la région source. Après un certain temps, il existe
un champ magnétique uniforme partout jusqu'à une certaine valeur de x, et un champ
nul au-delà. Par raison de symétrie, il s'étend dans les deux directions plus et moins x.
BouE
(0)
BouE
v(t-T>---!
(b)
Fig. 18-4. (a) La grandeur de B (ou
de E) en fonction de x au temps t après
BouE lt-------f-et--· V ;:
que la nappe de charge ait été mise en
mouvement. (b) Les champs pour une
nappe de charge mise en mouvement, dans
la direction des y négatifs à t= T. ( c) La
f..- T ---! somme de (<i) et (b).
(C)
317
mais que pour un moment nous appellerons simplement v. Un graphique des grandeurs
de E et de Ben fonction de x au temps t, est donné par la Fig. 18-4 (a). En se reportant à
la Fig. 18-3, au temps t, on voit que la région comprise entre x= ±vt est «remplie»
par les champs mais que ceux-ci ne sont pas encore arrivés au-delà. Nous insistons sur
le fait que nous avons supposé que la nappe de courant et, par conséquent, les champs
E et B, s'étendent à l'infini dans les deux directions y et z. (Ne pouvant pas dessiner une
nappe infinie, nous n'avons montré que ce qui arrive dans une région limitée.)
X 1
Nappe xl:lxlxJ
de courant
X 1 j X 1 ~Î X X 1
li
t
1
1,. 1 x J x vt -x -+--x-1....,--_,.,...Vflf
X=O X"Xo
v
z
Fig. 18-5. Fig. 18-3 vue d'en haut.
Nous allons analyser maintenant quantitativement ce qui arrive. Pour le faire, nous
allons regarder deux vues en coupe, une vue d'en haut, le long de l'axe des y, comme
le montre la Fig. 18-5, et une vue de côté en regardant dans la direction des z négatifs,
comme le montre la Fig. 18-6. Supposons qu'on commence par la vue de côté. Nous
voyons monter la nappe des charges: le champ magnétique est dirigé vers la feuille pour
-r- x et s'éloigne de la feuille pour - x, et le champ électrique est dirigé vers le bas -
dans tout l'intervalle x = ± vt .
•y
..j". B~
X X X
1
') E
J X Il X
X X Il X
·rL
Nappe
X X X X
de courant
X X X /t
1 .
•
0
1· X X
vt ~~~__.~..___,.,r--vât
X X
llo Fig. 18-6. Fig. 18-3 vue de côté.
Voyons si de tels champs sont compatibles avec les équations de Maxwell. Dessinons
d'abord un de ces contours qu'on utilise pour calculer une intégrale curviligne, par
exemple le rectangle I'2 de la Fig. 18-6. Vous remarquerez que l'un des côtés du rectangle
est dans la région
318
où il y a des champs, mais un autre côté se trouve dans la région que les champs n'ont
pas encore atteinte. Il existe un flux magnétique à travers ce contour. S'il change, il
doit y avoir une f.é.m: le long du contour. Si le front d'ondes se déplace, nous aurons un
flux magnétique variable, parce que la surface où règne B augmente progressivement à
la vitesse v. Le flux à travers r 2 est B fois la portion d'aire intérieure à r 2 où règne un
champ magnétique. La vitesse de variation du flux, puisque B a une valeur constante,
est B fois la vitesse de variation de la surface. La vitesse de variation de la surface est
facile à calculer. Si la largeur du rectangle I'2 est L, la surface, dans laquelle B existe,
varie de LvAt pendant le temps At. (Voir Fig. 18-6.) La vitesse de variation du flux est
donc BLv. D'après la loi de Faraday, ceci doit être égal à l'intégrale curviligne de E le
long de I'2 , qui est précisément EL. On a l'équation
E = viJ. (18.10)
De sorte que si le rapport E/ B est v, les champs que nous avons imaginés satisferont
l'équation de Faraday.
Mais ce n'est pas la seule équation; nous avons l'autre équation ,reliant E et B:
c2 V X B = j_
eo
+ iJE
iJt
· (18.11)
Pour appliquer cette équation, nous regardons la vue d'en haut de la Fig. 18-5. Nous
avons vu que cette équation nous donnera la valeur de B près de la nappe de courant.
D'autre part, pour tout contour dessiné hors de la nappe mais en arrière du front d'ondes,
le rotationnel de Best nul, j aussi et E ne varie pas, de sorte que l'équation y est correcte.
Regardons maintenant ce qui arrive pour la courbe r 1 qui coupe le front d'ondes,
comme le montre la Fig. 18-5. Dans ce cas, il n'y a pas de courants, de sorte que
l'Eq. (18.11) peut s'écrire - sous forme intégrale -
c
2
i 1
B · ds = fi f
intérieur r 1
E · n da. (18.12)
Mais minute! Nous avons trouvé deux conditions différentes pour le rapport E/B.
Est-ce qu'un champ tel que celui que nous avons décrit peut réellement exister? Il
n'existe, évidemment, qu'une vitesse v pour laquelle ces deux équations sont vérifiées,
c'est v = c. Le front d'ondes doit se déplacer à la vitesse c. Nous avons un exemple
dans lequel l'influence électrique d'un courant se propage avec une certaine vitesse c.
319
Demandons-nous maintenant ce qui se passe si on arrête brusquement le mouvement
de la nappe chargée après qu'il ait duré un court instant T. On peut voir ce qui va se
passer à l'aide du principe de superposition. Nous avions un courant qui était nul et
qui brusquement a été établi. Nous connaissons la solution dans ce cas. Nous allons
maintenant ajouter un autre système de champs. Nous prenons une autre nappe chargée
et brusquement nous la mettons en mouvement, dans la direction opposée, avec la même
vitesse, seulement au bout d'un temps T après la mise en route du premier courant. Le
total des deux courants ensemble est d'abord nul, puis il est établi pendant un temps T,
puis il est à nouveau nul - parce que les deux courants s'annulent. Nous avons une
«impulsion» carrée de courant.
Le nouveau courant négatif produit les mêmes champs que le courant positif, seule-
ment avec tous les signes opposés, et, évidemment, en retard de T. Un front d'ondes
se propage à nouveau à la vitesse e. Au temps t il a parcouru la distance x = ± e (t - T),
comme le montre la Fig. 18-4 (b). Nous avons ainsi deux «blocs» de champs, s'étendant
à la vitesse e, comme dans les parties (a) et (b) de la Fig. 18-4. Les champs combinés
sont comme sur la partie (c) de la figure. Les champs sont nuls pour x > et, ils sont
constants (avec les valeurs que nous avons trouvées ci-dessus) entre x = c (t- T) et
x =et, et à nouveau nuls pour x < e (t - 7).
Bref, nous avons un petit morceau de champ - un bloc d'épaisseur eT - qui a quitté
la nappe de courant et qui se propage de lui-même à travers l'espace. Les champs ont
«décollé»; ils se propagent librement à travers l'espace, en n'étant plus connectés
d'aucune façon avec la source. La chenille est devenue papillon!
Comment ce paquet de champs électriques et magnétiques peut-il s'entretenir? La
réponse est la suivante: par les effets combinés de la loi de Faraday, V x E = -aB/at,
et du nouveau terme de Maxwell, e2 V x B = aE/at. Ils ne peuvent s'empêcher de s'entre-
tenir mutuellement. Supposez que le champ magnétique vienne à disparaître. Il y aurait
un champ magnétique variable qui produirait un champ électrique. Si ce champ élec-
trique essayait de s'en aller, le champ électrique variable recréerait à nouveau un champ
magnétique. Ainsi en jouant entre eux perpétuellement - par la transformation réci-
proque d'un champ en l'autre - ils doivent continuer pour toujours. Il leur est impossible
de disparaître*. Ils s'entretiennent mutuellement dans une sorte ç!e danse - l'un créant
l'autre, le second créant le premier - en se propageant à travers l'espace.
Nous avons une onde qui quitte la source matérielle et s'éloigne à la vitesse e, qui
est la vitesse de la lumière. Mais revenons u1 moment en arrière. D'un point de vue
historique, on ne savait pas que le coefficient e des équations de Maxwell était aussi la
vitesse de propagation de la lumière. II y avait seulement une constante dans les équa-
tions. Nous l'avons appelée e dès le commencement, parce que nous savions ce qu'elle
allait finalement être. Nous avons pensé qu'il n'était pas raisonnable de vous faire
apprendJe les formules avec une constante différente puis de revenir en arrière pour
substituer e partout où il le fallait. Cependant, du
* Pas tout à fait. Ils peuvent être« absorbés» s'ils arrivent dans une région où il y a des charges.
Par cela nous voulons dire que d'autres champs peuvent être produits quelque part et en se super-
posant à ces champs les «annulent» par interférence destructive (voir chapitre 31, Vol. 1).
320
point de vue de.l'électricité et du magnétisme, nous n'avons fait que prendre au départ
deux constantes, E0 et c2, qui apparaissent dans les équations de l'électrostatique et de la
magnétostatique:
V·E=l!_ (18.14)
Eo
et
(18.15)
Maxwell a réalisé une des grandes unifications de la physique. Avant lui, il y avait la
lumière, et il y avait l'électricité et le magnétisme. Ces deux derniers avaient été unifiés
par les travaux expérimentaux de Faraday, Oersted, et Ampère. Puis, brusquement, la
lumière cessa d'être «quelque chose d'autre», mais fut seulement de l'électricité et du
magnétisme sous cette nouvelle forme - des petits morceaux de champs électriques et
magnétiques qui se propagent par eux-mêmes à travers l'espace.
Nous avons attiré votre attention sur quelques-unes des caractéristiques de cette
solution spéciale, qui se trouvent cependant être vraies pour n'importe quelle onde
électromagnétique: le champ magnétique est perpendiculaire à la direction du mouve-
ment du front d'ondes; de même, le champ électrique est perpendiculaire à la direction
du mouvement du front d'ondes; et les deux vecteurs E et B sont perpendiculaires entre
eux. De plus, le module du champ électrique E est égal à c fois le module du
321
champ magnétique B. Ces trois faits- que.les deux champs sont transversaux par rapport
à la direction de propagation, que B est perpendiculaire à E, et que E = cB - sont vrais
en général pour toute onde électromagnétique. Notre cas particulier est bien choisi - il
montre tous les caractères principaux des ondes électromagnétiques.
a
V X E = - ât V X A.
Comme nous pouvons dériver d'abord par rapport au temps ou par rapport à l'espace,
nous pouvons aussi écrire cette équation
VX(E + aA)
àt = 0. (18.17)
Nous voyons que E + àA/éJt est un vecteur dont le rotationnel est égal à zéro. Par consé-
quent, ce vecteur est le gradient de quelque chose. Quand nous étions en électrostatique,
nous avions V x E = 0, et nous avions décidé que E lui-même était le gradient de quelque
chose. Nous l'avions pris comme le gradient de - rp (le signe moins pour des raisons
techniques). Nous faisons la même chose pour E + oA/àt; nous posons
aA
E+-=-V"' (18.18)
at 'I'•
Nous utilisons le même symbole </> pour que, dans le cas de l'électrostatique où rien ne
change avec le temps et où le terme éJA/at disparaît, E soit notre ancien - V<f>. L'équation
de Faraday peut ainsi s'écrire sous la forme
E = -V</> - 7Ji ·
aA (18.19)
322
Nous avons déjà résolu deux des équations de Maxwell et nous avons trouvé que
pour décrire les champs magnétiques E et B nous avons besoin de quatre fonctions
potentielles: un potentiel scalaire </> et un potentiel vecteur A qui consiste évidemment en
trois fonctions.
Maintenant que A détermine une partie de E, aussi bien que B, qu'arrive-t-il si on
change A en A'= A+ Vlfl? En général, Echangerait si nous ne prenions pas de précau-
tions spéciales. Cependant, nous pouvons encore changer A de cette manière sans
affecter E et B - c'est-à-dire sans rien changer au point de vue physique - si nous chan-
geons toujours A et </>en même temps par les formules
323
Heureusement, nous pouvons utiliser maintenant notre liberté de choix de la diver-
gence de A. Ce que nous allons faire, c'est employer ce choix pour arranger les choses
de· façon à ce que les équations donnant A et </> soient séparées, mais aient la même
forme. Nous pouvons le faire en prenant*
\.A=
1 Jrf>
~:~ ·sï. (18.2.1)
Si nous faisons cela, les deux termes du milieu en A et </>dans l'Eq. (18.22) se com-
pensent, et cette équation devient beaucoup plus simple:
v2 A - _!_a2 A = - _)_ .
(18.24)
c2 a12 €0C2
P.. . (18.25)
€0
Quel bel ensemble d'équations! D'abord, elles sont belles, parce qu'elles sont bien
séparées - </>va avec la densité de charge; A va avec le courant. De plus, bien que le
premier membre semble un peu bizarre - un Laplacien avec un (à/àt)2 - quand nous le
développons, nous trouvons
(18.26)
Il possède une jolie symétrie en x, y, z, t - le - l/c 2 est nécessaire parce que, naturelle-
ment, le temps et l'espace sont différents; ils s'expriment en unités différentes.
Les équations de Maxwell nous ont conduits à une nouvelle sorte d'équation pour
les potentiels ri> et A mais à la même forme mathématique pour les quatre fonctions
</>, Av Ay et A,. Quand nous aurons appris à résoudre ces équations nous pourrons
obtenir B et E en calculant V x A et -Vcf>- àA/àt. Nous avons une autre forme des
lois électromagnétiques exactement équivalentes aux équations de Maxwell, et en
maintes circonstances elles sont beaucoup plus simples à manier.
Nous avons effectivement déjà résolu une équation très semblable à l'Eq. (18.26).
Quand nous avons étudié le son au chapitre 47 du Vol. 1, nous avons obtenu une
équation de la forme
• Choisir V. A s'appelle «choisir une jauge». Changer A en ajoutant VÇ s'appelle faire une
«transformation de jauge». L'équation (18.23) est appelée la «jauge de Lorentz».
324
en fonction du temps mais se propagent toujours à la vitesse c. Les champs avancent à
travers l'espace libre, comme dans notre exemple du début de ce chapitre.
Avec le nouveau terme de Maxwell dans l'Eq. IV, nous avons été en mesure d'écrire
les équations des champs en fonction de A et <P sous une forme qui est simple et qui rend
immédiatement apparent le fait qu'il existe des ondes électromagnétiques. Dans de
nombreuses applications, il sera encore pratique d'utiliser les équations originales en
fonction de E et B. Mais elles se trouvent de l'autre côté de la montagne dont nous
avons déjà fait l'ascension. Nous sommes maintenant capables de passer de l'autre côté
du pic. Les choses vont paraître différentes - nous sommes parés pour de nouveaux et
beaux spectacles.
325
Le principe de nwindre action
• Les chapitres suivants ne dépendent pas du contenu de ce cours spécial - qui doit être
considéré comme une« récréation».
326
«M. Bader me dit ceci: i.maginez que vous avez une particule (dans un champ de
gravitation, par exemple) qui part d'un certain point et se déplace librement vers un
autre point - vous la lancez, elle monte, puis elle descend.
Elle parcourt le trajet compris entre le point initial et le point final en un certain temps.
Maintenant, essayez donc un autre mouvement. Imaginez que pour aller d'ici à là, elle
fasse comme ceci
mais arrive là exactement au bout du même temps. Puis il ajouta: si vous calculez
l'énergie cinétique à chaque instant sur le trajet, retranchez l'énergie potentielle, et
intégrez sur la durée de tout le parcours, vous verrez que le nombre que vous obtenez
est plus grand que celui relatif au mouvement réel.
«En d'autres termes, la loi de Newton pourrait s'énoncer, non plus sous la forme
F =ma, mais sous la forme: l'énergie cinétique moyenne, moins l'énergie potentielle
moyenne, est aussi petite que possible le long du trajet d'un mobile allant d'un point
à un autre.
«Je vais illustrer un peu mieux ce que cela signifie. Si vous prenez le cas du champ de
gravitation, alors si une particule suit un parcours x(t) (pour le moment nous considére-
rons une seule dimension; nous prenons une trajectoire qui s'élève puis redescend, sans
aller de côté), où x est la hauteur au-dessus du sol, l'énergie cinétique est !m (dx/dt) 2, et
l'énergie potentielle à chaque instant est mgx. Puis je prends l'énergie cinétique moins
l'énergie potentielle à chaque instant sur le trajet et j'intègre par rapport au temps,
entre l'instant initial et l'instant final. Supposons qu'à l'instant
327
initial t 1 nous sommes partis d'une certaine hauteur et qu'à la fin du temps t2 nous
aboutissons précisément à un autre endroit.
f, [l2 m (dx)
12 2
1, dt J
mgx dt.
Le mouvement réel est décrit suivant une certaine courbe - c'est une parabole si nous
le représentons par rapport au temps - et nous donne une certaine valeur de l'intégrale.
Mais nous pourrions très bien imaginer un autre mouvement qui monterait, descendrait,
remonterait de façon bizarre.
Nous pouvons calculer l'énergie cinétique, moins l'énergie potentielle, puis intégrer
sur un tel trajet... ou sur tout autre. Le miracle, c'est que le véritable trajet est celui sur
lequel l'intégrale est minimum.
«Vérifions-le. Prenons d'abord le cas d'une particule libre qui ne possède aucune
énergie potentielle. Selon la règle, quand elle va d'un point à un autre, en un temps
donné, l'intégrale de son énergie cinétique est minimum, donc elle doit être
328
animée d'une vitesse uniforme. (Nous savons que telle est la réponse exacte - être
ammee d'une vitesse uniforme.) Pourquoi en est-il ainsi? Parce que si la particule
devait avoir un tout autre mouvement, les vitesses seraient parfois plus grandes, parfois
plus petites que la vitesse moyenne. La vitesse moyenne est la même dans tous les cas,
car la particule doit aller de «ici» à «là» en un temps donné.
«Par exemple, disons que vous ayez à aller en voiture de la maison à l'école en un
temps donné. Vous pouvez le faire de différentes façons: vous pouvez accélérer comme
un fou au début, puis ralentir en freinant vers la fin, ou bien vous pouvez aller à une
vitesse uniforme, ou bien vous pouvez reculer pendant un certain temps, puis avancer,
et ainsi de suite. Le fait est que la vitesse moyenne doit être, évidemment, la distance
totale parcourue divisée par le temps. Or, si vous faites n'importe quoi, sauf aller à une
vitesse uniforme, alors parfois vous allez trop vite, et parfois vous allez trop lentement.
Or, le carré moyen de quelque chose qui s'écarte d'une valeur moyenne, comme vous le
savez, est toujours plus grand que la moyenne élevée au carré. Donc l'intégrale de l'énergie
cinétique serait toujours plus grande avec une vitesse oscillante qu'avec une vitesse uni-
forme. Donc, nous voyons que l'intégrale est minimum si la vitesse est constante (quand
il n'y a pas de forces). Le trajet correct est comme ceci.
329
More - P.E. =Plus de - P.E.
More + P.E. =Plus de + P.E.
«D'autre part vous ne pouvez pas monter trop vite ou trop loin, car alors vous aurez
mis en jeu trop d'énergie cinétique - vous devez aller très vite pour monter puis redes-
cendre dans le temps fixé dont vous disposez. Donc, vous ne voulez pas monter trop
haut, mais vous voulez quand même monter assez haut. Il s'ensuit que la solution se
trouve dans la recherche d'un compromis pour essayer d'acquérir une plus grande
énergie potentielle avec le minimum d'énergie cinétique supplémentaire - essayer que la
différence, cinétique moins potentielle, soit aussi petite que possible.
«Voici tout ce que me dit mon professeur, parce qu'il était un excellent professeur et
qu'il savait s'arrêter de parler à temps. Mais moi, je ne sais pas m'arrêter. Donc au
lieu de laisser cela comme une remarque intéressante, je vais vous scandaliser et vous
dégoûter par les complexités de la vie, en vous prouvant qu'il en est bien ainsi. Le genre
de problème mathématique que nous traiterons est très difficile et nouveau. Nous
partons d'une certaine grandeur que nous appelons l'action, S. C'est l'énergie cinétique
KE, moins l'énergie potentielle PE, le tout intégré sur le temps.
.
Act10n = S = 112 (KE - PE) dt.
f.1
330
un nombre - ce qui est assez différent - et nous devons trouver le trajet de Tespace
pour lequel ce nombre est minimum. Voici une branche des mathématiques tout à fait
différente. Ce n'est plus le calcul différentiel ordinaire. En fait, c'est ce qu'on appelle le
calcul variationnel.
«Il y a de nombreux problèmes faisant appel à ce type de mathématiques. Par exemple,
le cercle est en général défini comme le lieu de tous les points situés à distance constante
d'un point fixe, mais une autre façon de définir le cercle est la suivante: le cercle est
celle des courbes de longueur donnée qui entoure la plus grande surface. Toute autre
courbe que le cercle entoure une surface moindre pour un périmètre donné. Donc si
nous énonçons le problème: trouver la courbe qui entoure la plus grande surface pour
un périmètre donné, nous aurons un problème de calcul variationnel - un type de calcul
différent de celui dont vous avez l'habitude.
«Donc nous faisons le calcul du trajet d'un mobile. Voici comment nous allons faire.
L'idée directrice est la suivante: nous imaginons qu'il existe un trajet vrai, et que toute
autre courbe que nous traçons, est un trajet faux, donc si nous calculons l'action le long
de ce faux trajet, nous obtiendrons une valeur plus grande que si nous calculons l'action
le long du trajet vrai.
331
«C'est ce que nous allons appliquer pour calculer le vrai trajet. Si nous connaissons
le vrai trajet, une courbe qui s'en écartera un tout petit peu, n'entraînera en première
approximation aucune différence sur l'action. La différence aura lieu en seconde ap-
proximation, si nous partons vraiment du minimum.
«Il est facile de le montrer. Si la différence est du premier ordre quand je m'écarte
de la courbe d'une certaine façon, la variation de l'action est proportionnelle à l'écart.
Cette variation, a priori, entraîne une augmentation de l'action, sinon nous ne partirions
pas du minimum. Mais alors, si la variation est proportionnelle à l'écart, en inversant le
signe de cet écart, la variation entraînera une diminution de l'action. L'action augmente-
rait ou diminuerait suivant le sens de l'écart. La seule possibilité, pour que l'action soit
vraiment minimum, est qu'elle ne varie pas en première approximation, que les variations
soient proportionnelles au carré ae l'écart par rapport au vrai trajet.
«Nous le calculons donc ainsi: appelons x(t) (souligné) le vrai trajet - celui que nous
recherchons. Prenons un trajet d'essai x(t) qui diffère du premier d'une petite quantité
t/(t) (êta de t).
«L'idée est la suivante: si nous calculons l'action S le long du trajet x(t), puis la diffé-
rence entre ce S et l'action que nous avons calculée le long du trajet x(t) - pour
332
simplifier l'écriture, nous l'appellerons §_ -, la différence de §__ et de S doit être nulle
au premier ordre d'approximation en t/ petit. Cette différence peut être différente de
zéro, au second ordre près, mais au premier ordre, elle doit être nulle.
«Et ceci doit être vrai quel que soit t/· Enfin, pas tout à fait. La méthode n'a aucun
sens à moins de considérer des trajets qui partent tous et qui finissent tous aux deux
mêmes points - chaque trajet part d'un certain point à l'instant t 1 et s'achève en un autre
point à t 2 et ces points et ces temps sont maintenus fixes. Donc les écarts en t/ doivent
être nuls aux deux extrémités, f1(t 1) = 0 et t/(t 2) =O. Compte tenu de cette condition,
nous venons de préciser notre problème mathématique.
« Si vous ne connaissiez rien en calcul différentiel, vous pourriez opérer de la même
façon pour déterminer le minimum d'une fonction ordinaire.flx). Vous pourriez discuter
de ce qui se passe en considérant.flx) et en ajoutant à x, une petite quantité h, et imposer
que la correction sur .flx) au premier ordre en h soit nulle, au minimum. Vous substi-
tueriez x + h à x et développeriez jusqu'au premier terme en h ... exactement comme nous
allons faire pour fi.
«L'idée est donc de porter x(t) = x(t) + t/(t) dans la formule de l'action:
où j'appelle V(x) l'énergie potentielle. La dérivée dx/dt est bien sûr, la dérivée de x(t)
plus la dérivée de t/(t) si bien que j'obtiens pour l'action cette expression: -
S= ft,
t2 [ m ( dJ.
-
2 dt
-- -dt )2 -
+ dri Vü + ri)Jdt.
«Puis, je développe les calculs. Le terme carré me donne
(cj_~)
2
+ 2d:s. dri + (dri)
2
•
dt dt dt dt
Mais, attendez. Je ne m'intéresse pas aux ordres plus élevés que le premier, de sorte que
je vais mettre tous les termes qui concernent f/ 2 et les puissances plus élevées dans une
petite boîte que j'appellerai« second ordre et au-delà». A partir de ce terme je n'obtiens
que le second ordre, mais il y en aura d'autres provenant d'ailleurs. Donc, de l'énergie
cinétique, on tire
«Puis il nous faut le potentiel V pour J.. + t/· Je considère t/ petit et ainsi, je peux
développer V(x) en série de Taylor. Cela donne approximativement V(x); à l'approxima-
tion suivante -
333
(d'après les propriétés ôn:linaires des dérivées) le terme correctif est tJ fois la dérivée de
V par rapport à x, et ainsi de suite:
2
V(:!+ 11) = V(~)+ 11V'(:!) + ~ V"(:!) + · · ·
J'écris V' pour la dérivée de V par rapport à x par économie d'écriture. Le terme en t1 2
et les suivants tombent dans la catégorie «second ordre et au-delà», et nous ne nous y
intéressons pas. Groupant tout cela,
s = f
11
t2 [!!!. (d:;s,)2 -
2 dt
V(x)
-
dx d71
+ m -= -
dt dt
- 11 V'(~) + (second ordre et au-delà) J dt.
Or, en regardant de près, nous voyons que les deux premiers termes que j'ai arrangés
ici, correspondent à l'action Ji. que j'aurais calculée le long du vrai trajet ± Je vais
porter toute mon attention sur la variation de S - la différence entre Set le_,l_ qu'on
obtiendrait suivant le vrai trajet. Nous écrirons cette différence ôS, et nous l'appellerons
la variation de S. Je laisse de côté les termes du« second ordre et au-delà», et j'obtiens
pour ôS
12
ôS =
1
,t,
[ m d?S. _!.1
d -
dt dt
J
11V'(x) dt.
-
«Alors, le problème est le suivant: voici une certaine intégrale. Je ne sais pas encore
ce qu'est_±, mais ce que je sais, c'est que, quel que soit tJ, cette intégrale doit être nulle.
Eh bien, penserez-vous, la seule façon pour que cela puisse se produire est que ce qui
est en facteur devant tJ soit nul. Mais qu'advient-il du premier terme en dt1/dt? Eh bien,
après tout, si tJ peut être quelconque, sa dérivée aussi, et vous en concluez que le coefficient
de dt1/dt doit aussi être nul. Ce n'est pas tout à fait vrai. Ce n'est pas tout à fait vrai
parce qu'il y a un lien entre tJ et sa dérivée; ils ne sont pas absolument indépendants,
parce que tJ{t) doit être nul, à la fois à t 1 et à 12 .
«La méthode pour résoudre tous les problèmes de calcul variationnel s'appuie tou-
jours sur le même principe général. Vous opérez un déplacement de ce que vous voulez
faire varier (ce que nous avons fait en ajoutant tJ); vous vous intéressez aux termes du
premier ordre; puis vous arrangez les termes de manière à avoir l'intégrale sous la forme
«d'un certain truc en facteur avec le déplacement (tJ) », sans aucune autre dérivée (sans
dt1/dt). On réarrange donc les termes de façon à toujours avoir le produit de «quelque
chose» par tJ. Vous allez voir la grande importance de cela dans un instant. (Il existe
des formules qui vous indiquent comment opérer dans certains cas sans expliciter les
calculs, mais elles ne sont pas assez générales pour que cela vaille la peine de s'en
préoccuper; le mieux est d'expliciter les calculs comme je viens de vous le dire.)
«Comment vais-je réarranger le terme en dt1/dt pour y introduire t1? Je peux y arriver
en intégrant par parties. Il se trouve que la grande astuce de tout le calcul variationnel
334
consiste à écrire la variation de S puis à intégrer par parties, pour que les dérivées de 17
disparaissent. C'est toujours la même chose dans tous les problèmes où figurent des
dérivées.
«Vous vous rappelez le principe général de l'intégration par parties. Si vous avez
une fonction/ multipliée par d17/dt, à intégrer par rapport à t, vous écrivez la dérivée de
rzf:
f f -d11 dt = 11/ -
dt
f 11 -df dt.
dt
«Dans notre formule de JS, la fonction/ est m fois dx/dt; par conséquent, j'obtiens
pour JS la formule suivante.
8S = m dd::! 11(t) 12 -
t 111
f 12
11
_dd ( m dd::!) 11(1) dt -
t t
f '•
1,
V'(,!) 11(t) dt.
Le premier terme doit être évalué entre les deux limites t 1 et t 2 • Puis je dois calculer
l'intégrale de ce qui reste de l'intégration par parties. Le dernier terme se conserve
sans changement.
« Maintenant arrive ce qui doit toujours arriver - la partie intégrée disparaît. (En fait,
si la partie intégrée ne disparaît pas, vous reposez le principe de base en ajoutant
certaines conditions, pour être sûr qu'elle disparaisse bien!) Nous avons déjà dit que 17
devait être nulle aux deux extrémités du trajet en accord avec le principe que l'action soit
minimum à condition que la courbe variée commence et se termine aux deux points
choisis. La condition est que 17(t1) = 0 et 17(t 2 ) = O. Donc le terme intégré est nul.
Nous groupons les autres termes et nous obtenons ceci:
as = 1: [-m ~:~ -
2
J'ai une certaine fonction de t; je la multiplie par 17(t); et je l'intègre entre deux limites.
Et, quel que soit 17, j'obtiens toujours zéro. Ceci signifie que la fonction F(J) est nulle.
Cela est évident, mais néanmoins je vais vous en fournir une espèce de preuve.
« Supposez que je prenne pour 17(t) quelque chose qui soit nul pour tout t sauf au voi-
sinage immédiat d'une valeur particulière. Il reste nul jusqu'à cette valeur de t,
335
puis accuse un pic pendant un moment et redevient nul. Quand nous intégrons ce l'f multi-
plié par n'importe quelle fonction F le seul endroit où l'on obtienne quelque chose
différent de zéro c'est là où f!(t) accuse un pic, et donc on obtient la valeur de Fen cet
endroit multipliée par l'intégrale sur le pic. L'intégrale sur le pic seul n'est pas nulle,
mais quand elle est multipliée par F elle doit l'être; donc la fonction F doit être nulle là
où il y avait le pic. Mais le pic pouvait être partout où je voulais, donc F doit être nulle
partout.
« Nous voyons que si notre intégrale doit être nulle quel que soit l'f, le coefficient de l'f
doit être nul. L'intégrale action sera minimum sur le trajet qui satisfait cette équation
différentielle compliquée:
2
d x - V'(x) ] =O.
[ -m-=2dt -
En réalité elle n'est pas si compliqué; vous l'avez déjà rencontrée. C'est tout simplement
F = ma. Le premier terme est la masse par l'accélération, et le second est la dérivée de
l'énergie potentielle, ce qui est bien la force.
« Donc, au moins pour un système conservatif, nous venons de montrer que le
principe de moindre action donne la réponse exacte; il indique que le trajet suivant
lequel l'action est minimum est celui qui satisfait la loi de Newton.
«Une remarque: je n'ai pas démontré que c'était un minimum - c'est peut-être un
maximum. En fait, il n'est pas réellement nécessaire que ce soit un minimum. C'est tout
à fait analogue au « principe du moindre temps » que nous avons discuté en optique.
Là aussi, nous avons déjà parlé du moindre temps. Cependant il est apparu des cas où
ce n'était pas le moindre temps. Le principe fondamental voulait que pour toute
variation du premier ordre le long du trajet optique. la variation du temps soit nulle; c'est
la même histoire. Par« moindre» nous voulons dire en réalité que toute variation de S,
au premier ordre, lorsqu'on change de trajet, est nulle. Ce n'est pas nécessairement un
«minimum».
« Maintenant, je vais faire quelques remarques au sujet de certaines généralisations.
D'abord, tout ce qui précède peut se faire à trois dimensions. Au lieu d'avoir seulement x,
j'aurais x, y, et z, fonctions de t; l'action est plus compliquée. Pour un mouvement à trois
dimensions, vous devez utiliser l'énergie cinétique complète - (m/2) fois la vitesse totale
au carré. Soit,
336
De plus, l'énergie potentielle est une fonction de x, y, et z. Et en ce qui concerne le trajet?
Le trajet est une certaine courbe générale de l'espace, qu'il n'est pas si facile de tracer,
mais l'idée reste la même. Et en ce qui concerne 'f? Eh bien, 'l peut avoir trois
composantes. Vous pourriez déplacer le trajet suivant x, y, ou z - ou vous pourriez le
déplacer suivant les trois directions simultanément. Donc 'l serait un vecteur. Cependant,
ceci ne complique pas trop les choses. Puisque c'est seulement la variation du premier
ordre qui doit être nulle, nous pouvons faire les calculs par trois déplacements successifs.
Nous pouvons déplacer 'l dans la direction des x et écrire que le coefficient doit être nul.
Nous obtenons une équation. Puis nous déplaçons 'l dans la direction des y et en obtenons
une autre. Enfin, dans la direction des z et en obtenons une autre. Ou bien, évidemment,
dans tout autre ordre. De toutes façons, vous avez trois équations. Et, bien sûr, à trois
dimensions la loi de Newton se compose réellement de trois équations - une pour chaque
composante. Je pense que vous pouvez pratiquement voir que ça doit marcher, nous vous
laisserons le démontrer pour vous-mêmes, dans le cas à trois dimensions. D'ailleurs,
vous pourriez considérer un autre système de coordonnées de votre choix, polaires ou tout
autre, et obtenir directement la loi de Newton corre.spondant à ce système en regardant
ce qui se passe quand on se donne un déplacement 'l suivant le rayon ou suivant l'angle,
etc.
« De même, la méthode se généralise à un nombre quelconque de particules. Si vous
avez, disons, deux particules entre lesquelles s'exerce une certaine force, de sorte qu'il y ait
une énergie potentielle mutuelle, alors vous additionnez l'énergie cinétique des deux
particules, et prenez l'énergie potentielle de leur interaction mutuelle. Et que faites-vous
varier? Vous faites varier le trajet des deux particules. Or, avec deux particules se déplaçant
dans les trois dimensions, il y a six équations. Vous pouvez faire varier la position de la
particule 1 dans la direction des x, des y, et des z, et de même pour la particule 2; donc il y a
bien six équations. Et c'est bien ainsi que cela doit être. Il y a les trois équations qui
déterminent l'accélération de la particule 1 en fonction de la force agissant sur elle,
et trois pour l'accélération de la particule 2, due à la force qui agit sur elle. Puis, vous
suivez le même petit jeu et vous obtenez la loi de Newton, dans les trois dimensions,
pour un nombre quelconque de particules.
«Je viens de dire que nous obtenons la loi de Newton. Ce n'est pas tout à fait vrai, car la
loi de Newton comprend le cas des forces non conservatives, comme le frottement.
Newton dit que ma est égale à toute force F. Mais le principe de moindre action ne
s'applique qu'aux systèmes conservatifs, - dans lesquels toutes les forces peuvent être
calculées à partir d'une fonction potentiel. Vous savez cependant, qu'au niveau micro-
scopique - au niveau le plus profond de la physique - il n'y a pas de forces non conserva-
tives. Les forces non conservatives, comme les frottements, apparaissent seulement
parce que nous négligeons certaines complications microscopiques - il y a bien trop de
particules à analyser. Mais les lois fondamentales peuvmt s'écrire sous la forme d'un
principe de moindre action.
«Je vais généraliser encore plus loin. Imaginez qu'on se demande ce qui se passe si le
mouvement de la particule est relatiriste. Nous n'avons pas obtenu l'équation relativiste
du mouvement; F ~-ma n'est vraie que dans le cas non relativiste. La question est la
suivante: existe+il un principe de moindre action correspondant au cas relativiste?
Il y en a un. La formule dans le cas de la relativité est la suivante:
s = -moc2
f.12
11
vl - v2 /c2 dt - q J.'• [q,(x, y, z, t) -
11
V . A(x, y, z, t)] dt.
337
La première partie de l'intégrale de l'action est le produit de la masse au repos m0 par c2 et
par l'intégrale d'une fonction de la vitesse, v'l - v2/c 2• Puis, à la place de l'énergie
potentielle seulement, nous avons une intégrale sur le potentiel scalaire</> et sur le produit
par v du potentiel-vecteur A. Bien sûr, nous ne tenons compte là, que des forces électro-
magnétiques. Tous les champs électriques et magnétiques s'expriment en fonction de</>
et A. Cette fonction action conduit à la théorie complète du mouvement relativiste d'une
particule unique dans un champ électromagnétique.
« Évidemment, partout où j'ai écrit v, vous avez compris qu'avant d'effectuer quoi que
ce soit, vous devez substituer dx/dt à vx et ainsi de suite, pour toutes les composantes.
De même vous notez x(t), y(t), z(t), le point sur le trajet, à l'instant t, là où j'ai simplement
écrit x, y, z. A vrai dire, ce n'est qu'après avoir fait ces substitutions sur v que vous avez
la formule de l'action pour une particule relativiste. Je laisserai aux plus astucieux d'entre
vous le soin de montrer que cette formule de l'action conduit bien, en fait, aux équations
exactes du mouvement relativiste. Puis-je· vous suggérer de le faire d'abord sans tenir
compte de A, c'est-à-dire en l'absence d'un champ magnétique? Vous devriez alors obtenir
les composantes de l'équation du mouvement dp/dt - q'V</>, où, vous vous en souve-
nez, p = mv/ yl - v2/c 2 •
« Il est beaucoup plus difficile de considérer le cas où il y a aussi un potentiel-vecteur.
Les variations deviennent beaucoup plus compliquées. Mais en fin de compte,
le terme de la force se réduit bien à q (E + v x B), comme il le faut. Mais je vous laisserai
vous amuser avec cela.
«J'aimerais insister sur le fait que dans le cas général, par exemple dans la formule
relativiste, l'intégrant de l'action ne s'écrit plus sous la forme de la différence de l'énergie
cinétique et de l'énergie potentielle. Ceci n'est vrai que dans l'approximation non
relativiste. Par exemple, le terme m0 c2 v'l - v2 /c 2 n'est pas ce que nous avons appelé
l'énergie cinétique. La question de savoir ce que doit être l'action, dans chaque cas particu-
lier, doit être résolue par tâtonnements. C'est exactement le même problème que la
détermination des lois du mouvement en premier lieu. Vous devez bricoler les équations
que vous connaissez pour essayer de les mettre sous la forme du principe de moindre
action.
«Une dernière remarque sur la terminologie. La fonction qu'on intègre par rapport
au temps pour avoir l'action S s'appelle le Lagrangien, fi', qui est une fonction des seules
vitesses et coordonnées de position des particules. Donc le principe de moindre action peut
encore s'écrire t2
S =
li.C(Xi, V;) dt,
11
où x; et v; sont les composantes des positions et des vitesses. Donc si vous entendez parler
de « Lagrangien », vous saurez qu'il s'agit de la fonction utilisée pour trouver S. Dans
le cas d'un mouvement relativiste, dans un champ électromagnétique
«Je voudrais ajouter aussi, que S n'est pas vraiment appelée l'« action» par les plus
précis et les plus pédants. Ils l'appellent «la première fonction principale de Hamilton ».
Or je déteste faire un cours sur « le principe-du-moindre-de-la-première-fonction-
principale-de-Hamilton ».
338
Donc, je l'appelle 1'« action». D'ailleurs, de plus en plus de gens l'appellent l'action.
Vous voyez, historiquement quelque chose d'autre qui n'est pas tout à fait aussi utile
était appelé l'action, mais je pense qu'il est plus sensé de changer en faveur d'une
définition plus nouvelle. Donc maintenant, vous aussi vous appellerez cette nouvelle
fonction l'action, et très vite tout le monde l'appellera par ce nom simple.
« Je veux maintenant tenir certains propos sur ce sujet, qui sont tout à fait semblables
à ceux que j'avais développés à propos du prii;i.cipe du moindre temps. Il existe une assez
grande différence sur le caractère d'une loi selon laquelle une certaine intégrale d'un point
à un autre est minimum - qui concerne tout un trajet - et une loi selon laquelle, tandis que
vous avancez, il existe une force qui produit une accélération. La seconde indique
comment vous décrivez le trajet, point par point, et l'autre est une proposition générale
sur le trajet tout entier. Dans le cas de la lumière, nous avons parlé du lien entre ces deux
points de vue. Maintenant, je voudrais vous expliquer pourquoi il est vrai que des lois
différentielles existent quand existe aussi un principe de moindre action. La raison est la
suivante: considérez le trajet réel dans l'espace et le temps. Comme plus haut, considérons
une seule dimension, de sorte que nous puissions tracer le graphe de x en fonction de t.
Le long du vrai trajet, S est minimum. Imaginons que le vrai trajet soit connu et qu'il passe
par un certain point a, dans l'espace et le temps, et un certain point b voisin.
Or, si l'intégrale totale entre t 1 et t 2 est minimum, l'intégrale le long du petit segment ab
est nécessairement minimum. Il est impossible que la partie relative à ab soit un peu plus
grande. Sinon, vous pourriez jouer sur cet élément-là du trajet et rendre l'intégrale totale
un peu plus petite. ·
« Donc, chaque subdivision du trajet doit aussi être minimum. Et ceci reste vrai, aussi
petite que soit la subdivision. Par conséquent, le principe suivant lequel le trajet tout
entier conduit à un minimum peut aussi s'énoncer en disant qu'une section infinitésimale
du trajet est une courbe telle que son action est minimum. Si nous considérons une section
assez courte du trajet - entre deux points a et b très rapprochés l'un de l'autre - savoir
comment varie le potentiel d'un point à un autre au loin n'est pas d'importance, car vous
restez presque toujours au même point sur toute la petite section du trajet. La seule
chose que vous avez à discuter est la variation, au premier ordre, du potentiel. La réponse
ne peut dépendre que de la dérivée du potentiel, et non du potentiel en tout point. Donc
la proposition relative à la propriété générale du trajet tout entier, devient une proposition
relative à ce qui se passe sur une petite section du trajet - une proposition différentielle.
339
Et cette proposition différentielle implique seulement les dérivées du potentiel, c'est-à-dire
la force en tout point. Telle est l'explication qualitative du lien qui existe entre la loi globale
et la loi différentielle.
« Dans le cas de la lumière nous avons aussi abordé la question: comment la particule
peut-elle trouver le vrai trajet? Du point de vue différentiel, cela se comprend facilement.
A chaque instant elle subit une accélération, et elle ne sait que ce qu'elle a à faire à cet
instant. Mais tout votre instinct de la cause et de l'effet se révolte quand vous dites que
la particule décide de suivre le trajet suivant lequel l'action est minimum. Est-ce qu'elle
«sent» les trajets voisins pour savoir si oui ou non leur action est plus grande? Dans le
cas de la lumière, quand nous avons mis des diaphragmes afin que les photons ne
puissent plus essayer tous les trajets, nous avons trouvé qu'ils ne pouvaient pas décider
lequel des trajets suivre, et nous avons obtenu le phénomène de diffraction.
«Est-ce qu'il en est de même en mécanique? Est-il vrai que la particule n'emprunte
pas seulement «le vrai trajet» mais qu'elle examine tous les autres trajets possibles?
Et si nous plaçons des obstacles sur son chemin pour l'empêcher de choisir, obtiendrons-
nous un phénomène analogue à la diffraction? Le miracle dans tout cela c'est que, bien
sûr, tout se passe bien ainsi. C'est ce que nous disent les lois de la mécanique quantique.
Donc, l'énoncé de notre principe de moindre action est incomplet. Ce n'est pas qu'une
particule emprunte le trajet de moindre action, mais qu'elle « sent » tous les trajets du
voisinage et qu'elle choisit celui de moindre action d'une façon analogue à celle par
laquelle la lumière choisit le temps le plus court. Vous vous rappelez que la façon dont
la lumière choisissait le temp~ le plus court était la suivante: si elle empruntait un trajet
qui lui prenait un temps différent, elle arrivait avec une phase différente. Et l'amplitude
en un certain point est la somme des contributions des amplitudes correspondant à
tous les trajets différents que peut suivre la lumière. Tous les trajets qui donnent des
phases très différentes n'arrivent à rien en s'additionnant. Mais si vous pouvez trouver
.tout un groupe de trajets qui donnent tous presque la même phase, alors les petites
contributions s'additionnent et vous obtiendrez une amplitude résultante raisonnable
à l'arrivée. Le trajet important devient celui qui est entouré de nombreux trajets voisins
et qui donnent tous la même phase.
«C'est exactement ce qui se passe en mécanique quantique. La mécanique quantique
(dans un cas non relativiste et en négligeant le spin de l'électron) marche ainsi: la proba-
bilité pour qu'une particule partant du point 1 à l'instant t1 arrive au point 2 à l'instant t2
est le carré d'une amplitude de probabilité. L'amplitude totale peut être écrite comme la
somme des amplitudes relatives à chaque trajet possible - à chaque chemin d'arrivée.
Pour chaque x(t) que nous pourrions avoir - pour chaque trajectoire imaginée possible -
nous devons calculer une amplitude. Puis nous les additionnons toutes ensemble. Que
prenons-nous pour l'amplitude relative â chaque trajet? C'est notre intégrale d'action
qui nous indique ce que doit être l'amplitude relative à un trajet unique. L'amplitude
est proportionnelle au produit d'une certaine constante paré~'", où S est l'action le long
de ce trajet. C'est•à-dire que,si nous représentons la phase de l'amplitude par un nombre
complexe, l'angle de la phase est S/tz. L'action Sa les dimensions d'une énergie multipliée
par un temps, et la constante de Planck tz a les mêmes dimensiORs. C'est la constante
qui détermine quand la mécanique quantique est importante.
«Voici comment on opère: supposez que suivant tous les trajets, S est très grande
comparée à tz. Un certain trajet fournit une certaine contribution à l'amplitude. Pour
un trajet voisin, la phase est assez différente, car avec un très grand S même une toute_
petite variation S entraîne une phase tout à fait
340
différente, parce que li est tout petit. Donc, suivant des trajets voisins, normalement les
effets s'annuleront par addition - sauf dans une région, et c'est celle dans laquelle un
trajet et un trajet voisin donnent la même phase en première approximation (plus
précisément, la même action à li près). Ceux-ci seront les seuls trajets importants. Donc
dans le cas limite où la constante de Planck 11 tend vers zéro, les lois correctes de la
mécanique quantique peuvent se résumer simplement en disant: « oubliez tout ce qui con-
cerne ces amplitudes de probabilité. La particule parcourt bien un trajet particulier, à
savoir celui suivant lequel S ne varie pas en première approximation.» Telle est la relation
qui existe entre le principe de moindre action et la mécanique quantique. C'est en 1942
qu'un élève de ce même professeur, Bader, dont je vous ai parlé au début de ce cours,
découvrit que la mécanique quantique pouvait être formulée de cette façon. [A l'origine,
la mécanique quantique fut formulée sous forme d'une équation différentielle pour
l'amplitude (Schrodinger) et aussi sous forme de calculs matriciels (Heisenberg).]
V2</> = -p/Eo.
Mais une autre façon de dire la même chose est la suivante: calculez l'intégrale U*, où
ce qui est une intégrale de volume étendue à tout l'espace. Elle doit être minimum pour
la distribution de potentiel exacte </> (x, y, z).
«Nous pouvons montrer que ces deux façons d'exposer l'électrostatique sont
équivalentes. Imaginons que nous choisissions une fonction if> quelconque. Nous
voulons montrer qu'en prenant pour .p le potentiel exact if> plus une petite déviation f,
alors la variation de U*, au premier ordre, est nulle. Noüs écrivons donc
"'= "'+f.
Le P. est celui que nous cherchons, mais nous le faisons varier pour trouver ce qu'il doit
être afin que la variation de U* soit nulle au premier ordre. Pour le premier terme de U*
nous avons besoin de
341
Dans le second terme de U*, l'intégrant est
pq, = P! + pf,
dont la partie variable est pf Donc en ne gardant que les parties variables, nous avons
besoin de l'intégrale
1:..u* = f (EoVP.. V/- pf)dV.
«Or, suivant la vieille règle générale, nous devons débarrasser cette expression remaniée
des dérivées de f Examinons ces dérivées. Le produit scalaire est
aq, af aq, af aq, af
a; ax + ay ay + a; az '
que nous devons intégrer par rapport à x, y, et z. Voici le truc: pour nous débarrasser de
àf/àx, nous intégrons par parties par rapport à x. Ceci nous conduira à des dérivées deq,.
C'est à partir de cette même idée générale que nous avons éliminé les dérivées par rapport
à t. Nous appliquons l'égalité
f ap_ af dx
ax ax
= f aq, -
ax
Ji a2p_
éJx2
dx.
Le terme intégré est nul, puisque f doit être nul à l'infini. (Ceci correspond à prendre 17
nul à t 1 et t2 • Donc notre principe peut être posé avec plus de précision: U* calculé avec
le vrai </>.est inférieur à U* calculé avec tout autre </> (x, y, z) ayant les mêmes valeurs à
l'infini.) Puis nous opérons de même avec y et z. Donc notre intégrale L1U* devient
Afin que cette variation soit nulle pour tout/, quel qu'il soit, le coefficient de/doit être nul,
et par conséquent,
Nous retrouvons notre vieille équation. Donc notre proposition du « minimum » est
correcte.
« Nous pouvons généraliser notre proposition en conduisant nos calculs un peu
différemment. Reprenons l'intégration par parties sans passer par les composantes.
Commençons par examiner l'égafüé suivante:
V· (/V'!!)= Vf"V'P_ + /V 2cf!:
Si je différencie le membre de gauche, je peux montrer qu'il est exactement égal au
membre de droite. Or, nous pouvons appliquer cette relation pour intégrer par parties.
Dans notre intégrale L1 U*, nous remplaçons - V!P ·Vf par f'V2<P. - V · <ft<P.) que nous
f
intégrons sur un volume. On peut remplacer l'intégrale de volume de la divergence, par
une intégrale de surface:
f V. (/V<f.) dV = f vp_. n da.
Puisque nous intégrons sur tout l'espace, la surface sur laquelle nous intégrons est à
l'infini. Mais là,/ est nulle, et nous arrivons bien à la même réponse que précédemment.
342
« C'est seulement maintenant que nous voyons comment résoudre un problème
quand nous ne savons pas où sont toutes les charges. Imaginez des conducteurs sur
lesquels sont réparties des charges d'une certaine façon. Nous pouvons encore appliquer
notre principe du minimum si les potentiels de tous les conducteurs sont donnés. Pour
avoir U* nous intégrons seulement sur l'espace extérieur aux conducteurs. Puis, comme
nous ne pouvons faire varier <f> sur le conducteur, f est nulle sur toutes ces surfaces, et
l'intégrale de surface -
doit seulement être étendue à l'espace compris entre les conducteurs. Bien sûr, nous obte-
nons de nouveau l'équation de Poisson,
V 2tf> = -p/Eo.
Nous venons donc de montrer que notre première intégrale U* est aussi minimum si
nous la calculons sur l'espace extérieur aux conducteurs portés à des potentiels donnés
(c'est-à-dire tels que toute fonction d'essai tf>(x, y, z) soit égale au potentiel donné des
conducteurs quand x, y, z est un point de la surface d'un conducteur).
« Un cas intéressant est celui où les charges n'existent que sur les conducteurs. Alors
U* = ~ f 2
(Vtf>) dV.
Selon notre principe du minimum, dans le cas où les conducteurs sont portés à des poten-
tiels donnés, le potentiel entre eux s'ajuste pour que l'intégrale U* soit minimum.
Quelle est cette intégrale? Le terme V tfi est le champ électrique, donc l'intégrale est l'éner-
gie électrostatique. Le vrai champ est celui qui, parmi tous ceux qui dérivent d'un poten-
tiel, possède l'énergie totale minimum.
«J'aimerais appliquer ce résultat à un calcul particulier, pour vous montrer que
tout ceci est réellement utilisable en pratique. Je vais prendre deux conducteurs en forme
de condensateur cylindrique.
343
Le conducteur intérieur est porté au potentiel V, et l'extérieur au potentiel zéro. Soit a le
rayon du conducteur intérieur, et b celui de l'extérieur. Entre les deux nous pouvons
admettre un~ distribution du potentiel quelconque. Si nous prenons le <f> correct pour cal-
culer E0/2f (Vl/>) 2 dV, nous devons obtenir l'énergie du système, 1CV2. Nous pouvons donc
calculer C par application de ce principe. Mais si nous prenons une mauvaise distribution
de potentiel pour calculer la capacité C par cette méthode, nous obtiendrons une valeur
de la capacité trop grande, puisque V est donné. Tout potentiel <f> proposé qui n'est pas
tout à fait le potentiel exact conduira à une valeur fausse de C plus grande que la valeur
correcte. Mais si mon <f> inexact est une approximation grossière quelconque, la valeur
de C obtenue sera une bonne approximation parce que l'erreur sur C est du second ordre
par rapport à l'erreur sur<f>.
«Imaginez que je ne connaisse pas la capacité d'un condensateur cylindrique. Je peux
appliquer ce principe pour la calculer. J'essaye de deviner la fonction potentiel </>
jusqu'à ce que j'obtienne la plus petite valeur de C. Imaginez, par exemple, que je choisisse
un potentiel qui corresponde à un champ constant. (Vous savez, bien sûr, que le champ
n'est pas réellement constant ici; il varie comme l/r.) Un champ constant entraîne un
potentiel qui varie linéairement avec la distance. Pour que les conditions sur les deux
conducteurs soient satisfaites, il faut que
q, = 1- ;v( =:) .
Cette fonction est égale à V pour r = a, à zéro pour r = b, et entre les deux a une pente
constante et égale à V/(b - a). Donc, ce qu'il faut faire pour trouver l'intégrale U*,
c'est multiplier le carré de ce gradient par E0/2 et intégrer sur tout le volume. Faisons ce
calcul pour un cylindre de longueur unité. Un élément de volume de rayon r est
2nrdr. J'intègre et je trouve que ce premier essai me donne pour la capacité
1 C'n ( . ') Eo (b v2 2 ,J
2 r- premier essai = 2}a -,-(b,---a"'"")""2 'IT'f ur.
J'obtiens donc une formule pour la capacité qui n'est pas la bonne, mais est le résultat
d'un travail approché:
C b +a
27rEo = 2(b - a)
Elle est, évidemment, différente de la réponse exacte C = 2nE0/ln(b/a), mais elle n'est pas
si mauvaise. Comparons-la à la réponse exacte, pour différentes valeurs de b/a. J'ai
rassemblé les résultats dans ce tableau:
2 1,4423 1,500
4 0,721 0,833
IO 0,434 0,612
100 0,267 0,51
344
b Cvraie C (première approximation)
a 2ne 0 2ne0
Même quand b/a est aussi grand que 2 - ce qui donne une assez grande variation du
champ comparé à un champ linéaire - j'obtiens une approximation très valable. La
réponse est évidemment un peu trop élevée! comme prévu. Les choses deviennent bien
pires avec un fil fin à l'intérieur d'un grand cylindre. Le champ présente alors des varia-
tions énormes et si vous le représentez par une constante, vous ne réussissez pas telle-
ment bien. Avec b/a = 1OO, nous nous trompons d'un facteur voisin de 2. Les résultats
sont bien meilleurs pour b/a retit. Prenons le cas opposé extrême, où les conducteurs ne
sont pas très éloignés - diso1" b/a = 1.1 - le champ constant est alors une assez bonne
approximation, et nous obtenons pour C une valeur correcte à mieux que un dixième
pour cent.
«J'aimerais ma111tenant vous montrer comment améliorer ce calcul. (Évidemment,
vous connaissez dèjà la réponse exacte rour le cylindre, mais la méthode reste la même
pour des formes curieuses autre,. pour lesquelles vous pouvez ignorer la réponse
exacte.) L'étape suivante consiste à essayer une meilleure approximation pour le</> vrai
inconnu. Par exemple, nous pourrions essayer pour </> une constante plus une exponen-
tielle, etc. Mais comment savoir quelle est la meilleure approximation à moins de con-
naître le vrai q, ? Réponse: vous calculez C; la plus faible valeur de C est la valeur la
plus proche de la vérité. Développons cette idée. Imaginons que le potentiel ne soit
pas linéaire, mais quadratique en r - que le champ électrique n'est pas constant, mais
linéaire. La forme quadratique la plus générale qui Yérifie </> = 0 pour r = b et q, = V
pour r =a est
où a est un nombre constant. Cette formule est un peu plus compliquée. Elle fait
intervenir un terme quadratique dans le potentiel, aussi bien qu'un terme linéaire. Il
est très facile d'en déduire le champ. Le champ est simplement
Il nous faut maintenant l'élever au carré et l'intégrer sur un volume. Mais attendez un
instant. Quelle valeur donner à a? Je peux prendre une parabole pour q,; mais quelle
parabole? Voici ce que je fais: je calcule la capacité avec un a arbitraire. Voici ce que
j'obtiens
_5____ = _a_ [~
27rEo b - a a <?
2
(°' +
2a
3
+
1)
6
+!
a2
3
+ !] .
Cela paraît un peu compliqué, mais cela résulte de l'intégration du carré du champ.
Maintenant je peux choisir mon a. Je sais que la vérité se place en dessous de tout ce
que je vais calculer, donc quelle que soit la valeur que je donne à a, elle me donnera
une réponse trop grande. Mais si je continue à jouer sur a et que j'obtienne la plus
petite valeur, cette plus petite valeur est plus pr4che de la vérité que toute autre. Donc ce
que je fais ensuite, c'est choisir la valeur
345
de a qui rende C minimum. En effectuant ceci par des calculs classiques, je trouve que le
minimum de C a lieu pour a= - 2b/(b +a). En portant cette valeur dans la formule,
j'obtiens pour la capacité minimum
b + 4ab + a 2
2
C
27rEo = 3(b2 - a2)
«J'ai calculé C par cette formule, pour différentes valeurs de b/a. J'appelle ces
nombres C (quadratique). Voici un tableau de comparaison de C (quadratique) à C vrai.
b Cvraie C (quadratique)
a 2nE0 2itEo
2 1,4423 1,444
4 0,721 0,733
10 0,434 0,475
100 0,267 0,346
«Par exemple, quand le rapport des rayons est de 2 à 1, j'obtiens 1,444, ce qui est
une très bonne approximation de la réponse exacte, 1,4423. Même pour de plus grands
b/a, cela se maintient assez bien - c'est bien bien meilleur que la première approximation.
C'est même assez bon - un écart de 10 pour cent seulement - alors que b/a est dans le
rapport de 10 à l. Mais quand il devient de 100 à l - alors rien ne va plus. J'obtiens
pour C, 0,346 au lieu de 0,267. D'un autre côté, pour un rapport des rayons de 1,5, la
réponse est excellente; et pour un b/a égal à 1,1 la réponse est 10,492065 au lieu de
10,492070; là où la réponse doit être bonne, elle est très, très bonne.
«J'ai donné ces exemples, premièrement pour montrer la valeur théorique des prin-
cipes de moindre action et des principes du minimum en général, et deuxièmement pour
montrer leur utilité pratique - pas seulement pour calculer une capacité quand nous
connaissons déjà la réponse. Pour toute autre forme, vous pouvez vous figurer un champ
approximatif avec certains paramètres inconnus tels que a, puis les déterminer pour
obtenir un minimum. Vous obtiendrez d'excellents résultats numériques pour des pro-
blèmes intraitables autrement.»
346
à laquelle la chaleur est engendrée soit minimum. Nous pouvons dire aussi (si tout est
maintenu isotherme) que la vitesse à laquelle l'énergie est engendrée est minimum. Or,
ce principe est aussi valable, d'après la théorie classique, pour déterminer même la
distribution des vitesses des électrons à l'intérieur d'un métal parcouru par un courant.
La distribution des vitesses n'est pas exactement la distribution d'équilibre [chapitre 40,
Vol. I; Eq. (40.6)] parce qu'il y a un mouvement d'ensemble. On peut trouver la nouvelle
distribution à partir du principe suivant: c'est pour un courant donné la distribution
pour laquelle l'entropie dégagée par seconde par les collisions est aussi petite que pos-
sible. Cependant, la véritable description du comportement des électrons devrait se
faire par la mécanique quantique. La question est la suivante: est-ce que ce même principe
du minimum de l'entropie s'applique encore quand on décrit cette situation par la
mécanique quantique? Je n'ai pas encore trouvé.
«Cette question est d'un intérêt académique, évidemment. De tels principes sont
captivants et il vaut toujours la peine d'essayer de voir jusqu'où leur généralité s'étend.
Mais aussi d'un point de vue plus pratique, je veux savoir. Moi-même, avec quelques
collègues, nous avons publié un article où nous avons calculé approximativement par la
mécanique quantique, la résistance électrique subie par un électron qui se déplace dans
un cristal ionique de NaCI. [Feynman, Hellworth, Iddings, and Platzman, «Mobilité
des électrons lents dans un cristal polaire», Phys. Rev. 127, 1004 (1962).] Mais si un
principe du minimum existait, nous pourrions l'appliquer pour obtenir des résultats
beaucoup plus précis, tout comme le principe du minimum pour la capacité d'un con-
densateur nous avait permis d'obtenir une telle précision pour la capacité bien que nous
n'ayons eu que des connaissances grossières sur le champ électrique.»
347
20
aB
1. V·E=p_ Il. VXE= - aï
Eo
(20.1)
2 j aE
III. V·B = 0 IV. cVXB=-+-
Eo ot
En regroupant ces équations, un phénomène nouveau remarquable nous est apparu:
des champs engendrés par des charges mobiles peuvent quitter les sources et se propager
tout seuls dans l'espace. Nous avons considéré un exemple particulier dans lequel
on établit soudainement une nappe de courant infinie. Après l'établissement du courant
pendant un temps t, il existe des champs électriques et magnétiques uniformes qui se
sont propagés à la distance et de la source. Supposons que la nappe de courant soit
dans le plan des yz avec une densité superficielle de courant J dans le sens positif des y.
Le champ électrique n'aura qu'une composante suivant les y, et le champ magnétique,
suivant les z. L'intensité des composantes des champs est alors
J
E11 = cB = - - - • (20.2)
• 2EoC
pour les valeurs positives de x inférieures à et. Pour de plus grands x les champs sont
nuls. Il existe évidemment des champs analogues qui se propagent à la même distance
à partir de la couche de courant du côté des x négatifs. Sur la Fig. 20-1 nous avons tracé
le graphe de l'intensité des champs
348
IEI = elBI
en fonction de x à l'instant t. Quand le temps passe, le« front d'onde» en et s'éloigne dans
la direction des x à la vitesse constante c.
Considérons maintenant la suite des événements. Nous établissons un courant unité
pendant un certain temps, puis soudainement nous en augmentons l'intensité à trois
unités, et le maintenons constant à cette valeur. Quelle est alors l'allure des champs?
Nous pouvons en avoir une idée de la façon suivante. D'abord, imaginons un courant
unité établi à l'instant t = 0 et maintenu toujours constant. Les champs dans la direction
positive des x sont représentés par le graphe (a) de la Fig. 20-2. Ensuite, nous nous
demandons ce qui se passerait si l'on établissait un courant constant de deux unités à
l'instant t1 •
'I (0)
1
et
':l (b)
l
C(f- fi)
~
':t (e)
e(t - t1)
1
et •
nappe de courant. (a) Un courant unité
établi à t=O; (b) un courant de deux unités
établi à t=t,; (c) superposition de (a) et
(b).
Les champs dans ce cas seront deux fois plus intenses que précédemment mais se pro-
pageront suivant les x seulement jusqu'à la distance c (t - 11), tomme on le voit sur la
partie (b) de la figure. En additionnant ces deux solutions, d'après le principe de super-
position, nous trouvons que la somme des deux sources est un courant d'une unité de
l'instant zéro à t,, et un courant de trois unités à des instants supérieurs à 11• A l'instant
t, les champs varieront avec x comme l'indique la partie (c) de la Fig. 20-2.
Considérons alors un problème plus compliqué. Soit un courant unité établi pendant
un certain temps, puis augmentant à trois unités, puis coupé. Quels sont les champs dus
à ce courant? Nous pouvons trouver la solution de la même manière - en additionnant
les solutions des trois problèmes séparés. D'abord, nous trouvons
349
les champs dus à un courant en forme de marche d'une unité. (Nous avons déjà résolu
ce problème.) Ensuite nous trouvons les champs dus à une marche de courant de deux
unités. Enfin, nous résolvons le cas des champs dus à une marche de courant de moins
trois unités. En ajoutant les trois solutions, nous obtiendrons un courant unité entre
t = 0 et un certain temps, soit ti. puis de trois unités jusqu'à un certain temps t 2 , et
enfin, coupé- c'est-à-dire nul. Un graphe de l'intensité du courant en fonction du temps
est donné sur la Fig. 20-3 (a). En additionnant les trois solutions du champ électrique,
nous trouvons que sa variation en fonction de x à un instant donné t est donnée par la
Fig. 20-3 (b). Le champ est une représentation exacte du courant. La distribution du
champ dans l'espace est un joli graphe des variations de l'intensité du courant en fonction
du temps - simplement tracé à l'envers. Quand le temps évolue la figure entière s'éloigne,
à la vitesse c, de sorte qu'il existe une bouffée de champ qui se propage suivant les x
positifs et qui contient une mémoire complète et détaillée de l'histoire de toutes les varia-
tions du courant. Si nous devions nous trouver à des kilomètres de là, nous pourrions dire
exactement comment a varié le courant dans la source, à partir des variations du champ
électrique ou magnétique.
Fig. 20--3. Si l'intensité du courant de la source varie comme l'indique (a), alors,
à l'instant t marqué par la flèche, le champ électrique est une fonction de x représentée en (b).
Vous noterez que longtemps après que toute activité de la source ait cessé, et que
toutes les charges et courants soient nuls, le champ continue à se propager à travers
l'espace. Nous avons une distribution des champs électriques et magnétiques qui existe
indépendamment de toutes charges ou courants. C'est le nouvel effet qui résulte de
l'ensemble des équations de Maxwell. Si nous voulons, nous pouvons dortner une
représentation mathématique complète de l'analyse que nous venons de faire, 'en écri-
vant que le champ électrique en un point donné et à un instant donné est proportionnel
au courant de la source, non pas au même instant cependant, mais à l'instant antérieur
t- x/c. Nous pouvons écrire
J(t - x/c)
E11(t) = (20.3)
2EoC
Croyez-le ou non, nous avons déjà établi cette même équation à partir d'un autre
point de vue dans le Vol. I, en traitant la théorie de l'indice de réfraction. Là, il nous
fallait représenter les champs dus à une mince couche de dipôles oscillants d'une couche
diélectrique, dont les dipôles étaient mis en mouvement par le champ électrique d'une
onde électromagnétique incidente. Notre problème consistait à calculer les champs
résultants de l'onde incidente et des ondes rayonnées par les
350
dipôles oscillants. Comment avons-nous pu calculer les champs engendrés par des
charges en mouvemel).t, alors que nous ne disposions pas des équations de Maxwell? A
ce moment-là, nous avons pris comme point de départ (sans aucune démonstration)
une formule pour les champs rayonnés créés à grande distance par une charge ponctuelle
accélérée. Si vous regardez au chapitre 31 du Vol. 1, vous verrez que l'Eq. (31.10) est
exactement la même que l'Eq. (20.3) que nous venons d'écrire. Bien que notre démon-
stration primitive ne soit valable qu'aux grandes distances de la source, nous voyons
que ce même résultat reste vrai, même tout près de la source.
Nous allons maintenant examiner d'un point de vue tout à fait général le comporte-
ment des champs électriques et magnétiques dans le vide loin des sources, c'est-à-dire
loin des courants et des charges. Très près des sources - assez près pour que pendant
la durée de propagation, la source n'ait pas eu le temps de varier notablement - les
champs sont pratiquement ceux que nous avons trouvés dans ce que nous avons appelé
les cas de l'électrostatique et de la magnétostatique. Si cependant nous nous éloignons
à des distances assez grandes pour que ces durées deviennent importantes, la nature des
champs peut être radicalement différente des solutions que nous avons trouvées. En un
certain sens, les champs commencent à acquérir un caractère propre quand ils se sont
beaucoup éloignés de toutes les sources. Nous pouvons donc commencer par l'étude
du comportement des champs dans une région où il n'y a ni courants, ni charges.
Imaginez qu'on pose la question: quel genre de champs peut-il y avoir dans des
régions où p et j sont tous les deux nuls? Dans le chapitre 18 nous avons vu que le
contenu physique des équations de Maxwell pouvait s'exprimer sous forme d'équations
différentielles auxquelles obéissent les potentiels scalaire et vectoriel:
--· p
Eo
(20.4)
(20.5)
(20.7)
Ainsi, dans le vide le potentiel scalaire </> et chacune des composantes du potentiel
vectoriel A, satisfont tous à la même équation mathématique. Soit 'Il (psi) l'une quel-
conque des quatre grandeurs</>, Ax, Ay, A,: nous cherchons les solutions générales de
l'équation suivante:
(20.8)
Cette équation est appelée l'équation d'onde à trois dimensions, parce que la fonction
'Il peut, en général, dépendre de x, y, et z, et nous devons tenir compte
351
des variations de toutes les coordonnées. Ceci apparaît clairement quand on explicite
les trois termes de l'opérateur Laplacien:
(20.11)
Tous nos champs électromagnétiques satisfont à la même équation d'onde, Eq. (20.8).
Nous pouvons donc bien nous demander: quelle est la solution la plus générale de cette
équation? Cependant, plutôt que de nous attaquer directement à cette question difficile,
nous allons examiner ce que l'on peut dire en général, des solutions où rien n'est
fonction de y et z. (Considérez toujours d'abord, un cas simple, afin de voir ce qui va
se passer, puis abordez les cas plus compliqués.) Supposons que les grandeurs des
champs ne dépendent que de x - qu'il n'y a aucune rariation des champs avec y et z.
Nous considérons donc, de nouveau, des ondes planes. Nous devons nous attendre à
des résultats semblables à ceux du paragraphe précédent. En fait, nous trouverons
précisément les mêmes réponses. Vous allez vous demander: «pourquoi tout recom-
mencer?» Il est important de recommencer, d'abord, parce que nous n'avons pas montré
que les ondes que nous avons trouvées, sont les solutions les plus générales pour les
ondes planes, et ensuite, parce que nous avons trouvé les champs dus seulement à une
source de courant très particulière. Nous aimerions maintenant poser la question
suivante: quelle est l'onde à une dimension la plus générale qui peut exister dans le
vide? Nous ne pouvons pas y répondre en regardant ce qui se passe pour telle ou telle
source particulière, mais nous devons traiter la question sur un plan plus général. Nous
allons opérér cette fois-ci sur les équations différentielles au lieu d'opérer sur les équa-
tions prises sous leur forme intégrale. Bien que nous trouvions les mêmes résultats,
c'est là un exercice de va-et-vient que de montrer qu'il n'y a aucune
352
différence quelle que soit la méthode choisie. Vous devriez savoir comment traiter les
questions de toutes les façons possibles, parce que, en face d'un problème difficile, vous
verrez souvent qu'il n'y a qu'une seule de ces façons qui soit utilisable.
Nous pourrions considérer directement la solution de l'équation d'onde pour une
certaine grandeur électromagnétique. Nous préférons partir directement des équations
de Maxwell dans le vide afin que vous puissiez apprécier leur relation étroite avec les
ondes électromagnétiques. Donc, nous partons des équations (20.1) en posant que
charges et courants sont nuls. Elles deviennent
I. V ·E = 0
âB
II. VXE=
ât (20.12)
III. V· B = 0
IV. c 2 v X B = âE
ât
Nous admettons qu'il n'y a pas de variations avec y et z, de sorte que les deux derniers
termes sont nuls. Cette équation nous indique alors que
âEx = O (20.14)
ÔX •
Sa solution est telle que Ex, composante du champ électrique suivant les x, est constante
dans l'espace. Si vous regardez l'équation IV de (20.12), en admettant qu'il n'y a pas de
variations de B avec y et z, vous pouvez voir que Ex est aussi constante dans le temps.
Un tel champ pourrait bien être le champ constant créé par les plateaux d'un condensa-
teur chargé, à grande distance. Pour l'instant, nous ne nous intéressons pas à ce champ
statique sans intérêt; nous ne nous intéressons qu'aux champs dynamiques variables.
Pour des champs dynamiques, Ex = O.
Nous obtenons donc ce résultat important pour la propagation des ondes planes
dans une ·direction quelconque, que le champ électrique doit être normal à la direction
de propagation. Il peut, évidemment, varier de façon compliquée avec la coordonnée x.
Le champ transversal E peut toujours être décomposé en deux cqmposantes, disons
la composante y et la composante - z. Donc, traitons d'abord le cas où le champ
électrique a une seule composante transversale. Prenons d'abord un champ électrique
toujours orienté suivant l'axe des y, et dont la composante - z est nulle. Il est évident
que si nous résolvons ce problème, nous pouvons aussi résoudre celui où le champ
électrique est toujours orienté suivant l'axe des z. La solution générale peut toujours
s'exprimer comme la superposition de ces deux champs.
353
Comme nos équations deviennent alors faciles! La seule composante du champ
électrique non nulle est Ey, et toutes les dérivées - sauf celles par rapport à x - sont
nulles. Les autres équations de Maxwell deviennent alors très simples.
Examinons maintenant la seconde équation de Maxwell (Ilde l'Eq. (20.12)]. Écrivant
les composantes du rotationnel de E, nous obtenons
(20.16)
354
Nous sommes maintenant prêts à utiliser la dernière des équations de Maxwell dans
le vide [IV de l'Eq. (20.12)]. Explicitons les composantes,
àB, à Ex
c 2 (V X B)x = c2 - - c2 -àBu
ày 1
àz Tt'
2 àBx 2 àB,
c 2 (V X B)u = c - - c - = àE11 ,
(20.17)
àz àx àt
àBv à!Jx àE,
c 2 (V X B), = c2 - - c2 - =
àx ày Tt'
Parmi les six dérivées des composantes de B, seul Je terme àB,/àx n'est pas nul. Les trois
équations se réduisent donc simplement à
Il résulte de tout ce travail qu'une seule des composantes de chacun des champs
électriques et magnétiques n'est pas nulle, et que ces composantes doivent satisfaire aux
Eq. (20.16) et (20.18). Les deux équations peuvent être réduites à une seule en dérivant
la première par rapport à x et la seconde par rapport à t; les membres de gauche des
deux équations seront alors les mêmes (au facteur e2 près). Nous trouvons donc que
Ey satisfait à l'équation
O. (20.19)
Nous avons déjà rencontré cette même équation différentielle en étudiant la propagation
du son. C'est l'équation d'onde pour des ondes à une dimension.
Remarquez bien qu'en dérivant, nous avons trouvé quelque chose de plus que ce qu'il
y a dans J'Eq. (20.11). Les équations de Maxwell nous ont donné le renseignement sup-
plémentaire que les ondes électromagnétiques ne comportent que les composantes du
champ normales à la direction de propagation de l'onde.
Revoyons ce que nous savons des solutions de l'équation d'onde à une dimension.
Si une grandeur 1f1 satisfait à une équation d'onde à une dimension
(20.20)
alors, une solution possible est une fonction If! (x, 1) de la forme
soit, une fonction de la variable unique (x - et). La fonction fix - et) représente une
structure «rigide» en x qui se propage vers les x positifs à la vitesse e (voir Fig. 20-4).
Par exemple, si la fonction fa un maximum quand son argument est nul, alors, pour
t = 0, le maximum de If/ a lieu en x =O. Plus tard, disons quand t = 10, If/ aura son
maximum en x =!Oc. Quand le temps s'écoule, le maximum se déplace vers les x positifs
à la vitesse c.
355
Il est quelquefois plus commode de dire qu'une solution de l'équation d'onde à une
dimension est une fonction de (t - x/c). Mais ceci revient au même,
1
ct-
1
Montrons que j(x - et) est réellement une solution de l'équation d'onde. Puisqu'elle
est une fonction d'une seule variable - la variable (x - et)- nous appellerons/ la dérivée
de f par rapport à cette variable, et f' la dérivée seconde de f Dérivant l'Eq. (20.21)
par rapport à x, nous obtenons
~ = f'(x - et),
puisque la dérivée de (x - et) par rapport à x est 1. La dérivée seconde de 1/1 par rapport
à x est évidemment
a2y,·
7ii2 = +c 2 f"(x - et). (20.23)
Nous voyons que 1/1 satisfait bien à l'équation d'onde à une dimension.
Vous pouvez vous demander: «ayant l'équation d'onde, comment puis-je savoir que
j(t - x/c) en est une solution? Je n'aime pas cette méthode à rebours. N'y a-t-il pas une
méthode directe pour trouver la solution?» Eh bien, une bonne méthode directe est de
connaître la solution. Il est possible de «cuisiner» une démonstration mathématique
apparemment directe, justement parce que nous savons quelle doit être la solution, mais
avec une équation aussi simple que celle-ci, nous n'avons pas à jouer à ce jeu. Bientôt
vous serez si bien habitué qu'en voyant l'Eq. (20.20), vous verrez presque simultanément
sa solution 1/1 =.f(x - et). (Tout comme maintenant quand vous voyez l'intégrale de
x 2 dx, vous savez tout de suite que la réponse est x 3/3.)
En fait, vous devriez aller encore un peu plus loin. Non seulement toute fonction de
(x - et) est une solution, mais aussi toute fonction de (x +et) est une solution. Puisque
l'équation d'onde contient seulement c2 , changer le signe de c ne change rien. En fait,
la solution la plus générale de l'équation d'onde à une dimension est la somme de
deux fonctions
356
arbitraires, l'une de (x - et) et l'autre de (x +et):
1/t = f(x - et) + g(x + et). (20.i4)
Le premier terme représente une onde qui se propage vers les x positifs, et le second
terme une onde arbitraire qui se propage vers les x négatifs. La solution générale est la
superposition de ces deux ondes, existant toutes deux au même instant.
Nous vous laisserons réfléchir sur la question amusante que voici. Prenez une fonction
If/ de la forme suivante:
1/t = cos kx cos kct.
Cette équation n'est pas écrite sous la forme d'une fonction de (x - et) ou de (x +et).
Cependant vous pouvez vérifier facilement que cette fonction est une solution de
l'équation d'onde, par substitution directe dans l'Eq. (20.20). Comment pouvons-nous
dire alors que la solution générale est de la forme de l'Eq. (20.24)?
357
De telles ondes électromagnétiques portent un vecteur E dont la direction n'est pas
constante, mais qui tourne de façon quelconque dans le plan des y-z. En tout point, le
champ magnétique est toujours perpendiculaire au champ électrique et à la direction
de propagation.
S'il n'existe que des ondes qui se propagent dans un seul sens, disons, le sens positif
des x, une règle simple nous donne l'orientation relative des champs électriques et
magnétiques. Cette règle est que le produit vectoriel E x B - qui est évidemment un
vecteur perpendiculaire à la fois à E et à B - est orienté suivant le sens de propagation
de l'onde. Si E est amené sur B par la rotation d'un tire-bouchon dans le sens direct,
celui-ci progresse dans le sens de la vitesse de l'onde. (Nous verrons plus tard que le
vecteur Ex Ba un sens physique particulier: c'est un vecteur qui décrit le flux d'énergie
dans un champ électromagnétique.)
VXE=
aB
at
et qu'on prenne le rotationnel des deux membres:
V X (V X E) = - ~ (V X B). (20.26)
Rappelez-vous alors, que le rotationnel du rotationnel d'un vecteur peut s'écrire sous
la forme d'une somme de deux termes, l'un concernant la divergence, l'autre le Lapla-
cien,
V X (V X E) =· V(V · E) - V 2 E.
Dans le vide cependant, la divergence de E est nulle, donc seul reste le Laplacien. D'autre
part, d'après la quatrième des équations de Maxwell dans le vide [Eq. (20.12)], la dérivée
par rapport au temps de c2 V x B est la dérivée seconde de E par rapport au temps t:
2 a
c -(V X B)
a2E
= -·
at a12
L'équation (20.26) devient alors
ce qui constitue l'équation d'onde à trois dimensions. Développée dans toute sa gloire,
cette équation est, évidemment,
a2E a2E a2E 1 a2E
ax2 + ay 2 + az 2 - c 2 ai2 = O. (20.27)
358
Comment allons-nous trouver la solution ondulatoire générale? Voici la réponse:
toutes les solutions de l'équation d'onde à trois dimensions peuvent être représentées
par la superposition des solutions à une dimension que nous venons d'établir. Nous
avons obtenu l'équation des ondes qui se propagent dans la direction des x en suppo-
sant que le champ ne dépend pas de y et z. Manifestement, il y a d'autres solutions dans
lesquelles les champs ne dépendent pas de x et z, représentant des ondes qui se propagent
dans la direction des y. Puis il y a les solutions qui ne dépendent pas de x et y, représentant
des ondes qui se propagent dans la direction des z. Ou, dans le cas général, puisque nous
avons écrit nos équations sous forme vectorielle, l'équation d'onde à trois dimensions
peut avoir comme solutions des ondes planes qui se propagent dans une direction quel-
conque. Encore une fois, comme les équations sont linéaires, nous pouvons avoir simul-
tanément autant d'ondes planes que nous ouhaitons, se propageant dans autant de
directions différentes. Ainsi la solution la plus générale de l'équation d'onde à trois
dimensions est une superposition d'ondes planes de toutes sortes se propageant dans
toutes sortes de directions.
Essayez de vous imaginer' ce que peuvent être à présent les champs électriques et
magnétiques dans l'espace de cette salle de cours. Tout d'abord, il y a un champ
magnétique permanent; il provient des courants intérieurs· de la terre - c'est le champ
magnétique terrestre permanent. Puis il y a certains champs électriques irréguliers et
presque statiques, sans doute produits par des charges électriques engendrées par
frottement, à cause du mouvement des gens sur leurs chaises et du frottement des
manches de leurs vêtements sur les bras des fauteuils. Puis il y a d'autres champs
magnétiques produits par les courants oscillants transportés par les fils électriques -
champs qui varient à la fréquence de 60 cycles par seconde, synchronisés sur le généra-
teur de Boulder Dam. Mais les champs électriques et magnétiques qui varient à des
fréquences beaucoup plus élevées sont plus intéressants. Par exemple quand la lumière
se propage de la fenêtre au sol, et d'un mur à un autre, il y a de petites ondulations des
champs électriques et magnétiques qui se propagent à 300.000 kilomètres par seconde.
Puis il y a encore les ondes infrarouges qui se propagent de vos fronts chauds vers le
tableau froid. Et nous avons oublié la lumière ultraviolette, les rayons X et les ondes
radio qui se propagent à travers la pièce.
A travers la pièce, il y a des ondes électromagnétiques qui transportent la musique
d'un orchestre de jazz. Il y a des ondes modulées par une série d'impulsions représentant
les images d'événements qui ont lieu dans d'autres parties du monde, ou bien d'aspi-
rines imaginaires qui se dissolvent dans des estomacs imaginaires. Pour prouver la
réalité de ces ondes, il est simplement nécessaire de brancher un dispositif électronique
convenable, qui convertisse ces ondes en images et en sons.
Si nous poussons encore plus loin cette analyse, même pour les plus petites ondula-
tions, nous verrons des ondes électromagnétiques minuscules qui sont arrivées dans la
pièce après avoir parcouru des distances énormes. Il y a maintenant de minuscules
oscillations du champ électrique, dont les crêtes sont séparées par une distance de trente
centimètres, qui proviennent de millions et de millions de kilomètres, et qui sont trans-
mises à la terre par le vaisseau spatial Mariner II qui vient juste de passer devant Vénus.
Ses signaux transportent des résumés d'informations captées sur les planètes (informa-
tions obtenues par des ondes électromagnétiques qui se sont propagées de la planète
au vaisseau spatial).
Il y a de multiples petites ondulations des champs électriques et magnétiques, qui sont
des ondes ayant pris naissance à des millions d'années-lumière - dans les galaxies les plus
reculées de l'univers. On a prouvé que tout ceci était vrai en «remplissant la pièce de
fils» - en construisant des antennes aussi grandes que cette pièce. Ces ondes radio ont
été détectées en des endroits de l'espace qui se situent au-delà de la portée des plus grands
télescopes optiques. Même eux,
359
les télescopes optiques, sont simplement des collecteurs d'ondes electromagnétiques. Ce
que nous appelons les étoiles, ne sont en réalité que des inférences, inférences obtenues
à partir de la seule réalité physique que nous ayons pu déceler jusqu'à présent - à partir
d'une étude précise des ondulations, d'une complexité sans fin, des champs électriques
et magnétiques qui nous parviennent sur terre.
Il y en a encore davantage: les champs produits par des éclairs à des kilomètres de
distance, les champs dus aux particules des rayons cosmiques qui traversent la pièce, et
bien d'autres, et bien d'autres. Que le champ électrique de l'espace qui nous environne
est compliqué! Et cependant il satisfait toujours à l'équation d'onde à trois dimensions.
360
vus tracés. Je ne vois pas courir des faisceaux de lignes de champ, car cela m'inquiète de
penser que si je courais à une vitesse différente, ces faisceaux disparaîtraient. Je ne vois
d'ailleurs même pas toujours les champs électriques et magnétiques car je pense quelque-
fois que j'aurais dû me figurer le potentiel-vecteur et le potentiel scalaire, qui sont peut-
être les choses les plus physiques qui ondulent.
Le seul espoir est peut-être, direz-vous, d'adopter une vue mathématique. Or,
qu\!st-ce qu'une vue mathématique? Du point de vue mathématique, il y a un vecteur
champ électrique, et un vecteur champ magnétique, en tout point de l'espace; c'est-à-dire
qu'il y a six nombres associés à chaque point. Pouvez-vous imaginer six nombres asso-
ciés à chaque point de l'espace? C'est trop difficile. Pouvez-vous même imaginer un seul
nombre associé à chaque point? Moi, je ne le peux pas! Je peux m'imaginer quelque
chose comme la température en chaque point de l'espace. Cela semble compréhensible.
Il y a une certaine chaleur ou un certain froid qui varie d'un point à un autre. Mais très
sincèrement, je ne comprends pas l'idée d'un nombre en tout point.
361
de quelque chose de neuf, mais compatible avec tout ce qui est déjà connu, est d'une
extrême difficulté.
Pendant que je suis sur ce sujet, je me demande s'il sera ou non jamais possible d'ima-
giner une beauté que nous ne pouvons voir. C'est une question intéressante. Quand nous
regardons un arc-en-ciel, nous le trouvons beau. Tout le monde s'écrie, «Oh! un arc-
en-ciel ».(Vous voyez comme je suis scientifique. Je n'ose pas dire que quelque chose est
beau à moins de l'avoir défini à l'aide d'un moyen expérimental.) Mais comment
pourrions-nous décrire un arc-en-ciel si nous étions aveugles? Nous sommes aveugles
quand nous mesurons dans l'infrarouge le coefficient de réflexion d'un cristal de
chlorure de sodium, ou quand nous parlons de la fréquence des ondes en provenance
d'une galaxie que nous ne pouvons voir - nous traçons un diagramme, nous traçons une
courbe. Par exemple, pour l'arc-en-ciel, une telle courbe serait l'intensité de la radiation
en fonction de la longueur d'onde mesurée avec un spectrophotomètre dans chaque
direction du ciel. En général, ces mesures donneraient une courbe qui serait plutôt
plate. Puis un jour quelqu'un découvrirait que dans certaines conditions atmosphé-
riques, et sous certains angles dans le ciel, le spectre de l'intensité en fonction de la
longueur d'onde se comporterait curieusement; il aurait une bosse. En faisant varier un
tant soit peu l'angle de l'instrument, la bosse se déplacerait d'une longueur d'onde à une
autre. Puis un jour, la revue de la physique des aveugles publierait un article technique
portant le titre « L'intensité du rayonnement en fonction de l'angle dans certaines
conditions atmosphériques ». On pourrait voir dans cet article un graphe comme celui
de la Fig. 20-5. L'auteur ferait sans doute remarquer que sous les plus grands angles,
l'intensité du rayonnement est plus forte vers les grandes longueurs d'onde, tandis que
sous les plus petits angles, le maximum du rayonnement se déplace vers les plus courtes
longueurs d'onde. (Suivant notre point de vue, nous dirions que la lumière à 40° est à
dominante verte, et la lumière à 42° est à dominante rouge.)
Fig. 20-5. L'intensité des ondes élec-
tromagnétiques en fonction de la longueur
d'onde pour trois angles (mesurés à partir
de la direction opposée du soleil). observée
seulement dans certaines conditions météo-
rologiques.
Longueur d'onde
Or, trouvons-nous beau le graphe de la Fig. 20-5? Il contient bien plus de détails que
nous ne pouvons en capter en regardant un arc-en-ciel, parce que nos yeux ne peuvent
voir les détails exacts de la forme d'un spectre. L'œil, cependant, trouve que l'arc-en-ciel
est beau. Avons nous assez d'imagination pour voir, dans les courbes spectrales, la même
beauté que nous percevons en regardant directement l'arc-en-ciel? Je ne sais pas.
Mais supposez que je possède un graphe du coefficient de réflexion d'un cristal de chlo-
rure de sodium, en fonction de la longueur d'onde dans l'infrarouge, et aussi en fonction
de l'angle. J'aurais une représentation de ce qu'il serait à mes yeux, si ceux-ci pouvaient
voir
362
dans l'infrarouge - peut-être serait-il d'un « vert » rutilant et brillant mélangé à des
réflexions à la surface d'un « rouge métallique ». Ce serait magnifique, mais je ne sais
pas si je pourrais jamais regarder un graphe du coefficient de réflexion de NaCI mesuré
à l'aide d'un instrument, et dire qu'il possède la même beauté.
D'autre part, même si nous ne pouvons voir de la beauté dans les résultats de mesures
particuliers, nous pouvons déjà revendiquer une certaine beauté pour les équations
qui décrivent les lois générales de la physique. Par exemple, dans l'équation d'onde (20.9),
il y a quelque chose de joli dans l'équivalence de x, de y, de z, et de t. Et cette jolie
symétrie de la forme en x, y, z, et t suggère à l'esprit une beauté encore plus grande en
rapport avec les quatre dimensions, la possibilité pour l'espace de posséder une symétrie
à quatre dimensions, la possibilité d'analyser cela et les développements de la théorie
de la relativité restreinte. Ainsi, il existe une vive beauté intellectuelle associée aux
équations.
Avant de commencer à décrire les ondes sphériques, il nous faut un peu de mathé-
matiques. Supposons qu'une fonction dépende seulement de la distance radiale r à une
certaine origine - en d'autres mots, que ce soit une fonction qui admet une symétrie
sphérique. Appelons l/f (r), cette fonction où r
r = V xz + yz + z2'
est la distance radiale depuis l'origine. Pour trouver quelles sont les fonctions l/f(r) qui
a2y,
ax2
= Y," (a'ax)2 + Y,' axaz,2.
363
Nous pouvons calculer les dérivées partielles de r par rapport à x à partir de
or X
éJx = r.
Donc, la dérivée seconde de 1f1 par rapport à x est
a2y,
éJx2
= x2 1/t"
,2 + !r (1
- x2)
,2 Y,'. (20.28)
De même,
a2y, = y2 1/t" + ! (1 - l) VI, (20.29)
ay2 ,2 r ,2
a2y, =
éJz2
~Y," + !r (1 - z2)
,2 ,2
Y,'. (20.30)
Il est souvent plus commode d'écrire cette équation sous la forme suivante:
(20.32)
Si vous effectuez la dérivation formulée dans l;Eq. (20.32), vous verrez que le membre
de droite est le même que dans l'Eq. (20.31).
Si nous voulons considérer des champs à symétrie sphérique qui peuvent se propager
par ondes sphériques, notre grandeur de champ doit être une fonction à la fois de r et t.
Imaginons alors que nous nous demandions quelles sont les fonctions lf!(r, t) qui sont
solutions de l'équation d'onde à trois dimensions
2
éJ
v2Y,(r, t) - C21 012 Y,(r, t) = O. (20.33)
Puisque lfl(r, t) dépend seulement des coordonnées d'espace, par r nous pouvons
appliquer l'équation du Laplacien établie plus haut, Eq. (20.32). Cependant, pour être
précis, et comme 1f1 est aussi une fonction de t, nous devrons écrire les dérivées de 1f1
par rapport à r comme des dérivées partielles. L'équation d'onde devient alors
Nous devons alors résoudre cette équation, qui semble beaucoup plus compliquée
que dans le cas des ondes planes. Mais remarquez qu'en multipliant cette équation par r,
nous obtenons
a2 1 a2
(20.34)
Br2 (,Y,) - c2 éJt2 (,Y,) = O.
364
Cette équation nous montre que la fonction nff satisfait à une équation d'onde à une
dimension en la variable r. Appliquons le principe général sur lequel nous avons si
souvent insisté, les mêmes équations admettent toujours les mêmes solutions; nous
savons que si Ylfl est fonction seulement de (r - et) elle sera solution de l'Eq. (20.34).
Nous savons donc que les ondes sphériques doivent être de la forme
Ou, comme nous l'avons déjà vu, nous pouvons également dire que r!ff peut être de la
forme
ri/; = f(t - r/c).
Divisant par r, nous trouvons que la grandeur de champ 1f1 (quelle qu'elle soit) est de la
forme:
f(t r/c) (20.35)
r "'=
Une telle fonction représente une onde sphérique générale s'éloignant de l'origine la a
vitesse c. Oublions pour un moment le r du dénominateur; l'amplitude de l'onde,
fonction de la distance à l'origine à un instant donné, possède une certaine forme, qui
s'éloigne à la vitesse c. Cependant, le facteur r du dénominateur indique que l'amplitude
de l'onde décroît proportionnellement à l/r à mesure que l'onde se propage. En d'autres
termes, contrairement à l'onde plane dont l'amplitude demeure constante au cours de
la propagation, l'amplitude de l'onde sphérique décroît constamment, comme on le voit
sur la Fig. 20-6. On le comprendra facilement grâce à un raisonnement physique simple.
Nous savons que la densité d'énergie d'une onde dépend du carré de l'amplitude de
l'onde. Quand l'onde se propage, son énergie se répand sur des surfaces de plus en plus
étendues, proportionnelles au carré de la distance radiale. Si l'énergie totale se conserve, la
\
\
\
\
llr
o·'----'-~--'-r,~~~~--"-~~r~2~~-
f--c( t2 - l 1l --1.
(al (b)
Fig. 20-6. Une onde sphérique l/f=f(t-r/c)Jr. (a) l/f fonction der à t=t,, et la même
onde plus tard à t 2 . (b) l/f fonction de t, en r=r, et la même onde vue en '2·
365
jensité d'énergie décroître comme l/r2 et l'amplitude de l'onde doit décroître comme
I/r. Donc, l'Eq. (20.35) est la forme« raisonnable» pour une onde sphérique.
Nous avons laissé de côté la seconde solution possible de l'équation d'onde à une
dimension:
nf; = g(t + r/c),
ou
f = g(t + r/c).
r
Celle-ci aussi représente une onde sphérique, mais qui se propage vers l'intérieur, des
grandes distances r vers l'origine.
Faisons l'hypothèse particulière suivante. Nous disons, sans aucune démonstration,
que les ondes émises par une source, sont seulement celles qui s'en éloignent. Puisque
nous savons que les ondes sont dues au mouvement des charges, nous pensons volontiers
que les ondes évoluent vers l'extérieur à partir des charges. Ce serait plutôt curieux d'ima-
giner qu'avant que les charges ne soient mises en mouvement, une onde sphérique est
partie de l'infini et arrive sur les charges à l'instant même où elles se mettent en mouve-
ment. C'est là une solution possible, mais l'expérience montre que lorsque des charges
sont accélérées les ondes s'éloignent à partir des charges. Bien que les équations de
Maxwell admettent l'une ou l'autre des deux possibilités, nous introduirons un fait
supplémentaire fondé sur l'expérience à savoir que seule l'onde qui s'éloigne a un
« sens physique ».
Remarquons cependant qu'on peut tirer une conséquence intéressante de cette
hypothèse supplémentaire: nous supprimons la symétrie par rapport au temps qui figure
dans les équations de Maxwell. Les équations de départ en E et B, ainsi que les
équations d'onde que nous en avons déduites, ont la propriété de rester inchangées par
un changement de signe du temps. Ces équations nous indiquent qu'à toute solution
relative à une onde qui se propage dans une direction, correspond une solution tout aussi
valable relative à une onde qui se propage dans la direction opposée. Poser que nous ne
considérons que les ondes sphériques qui s'éloignent constitue donc une hypothèse
supplémentaire importante. (On a étudié avec soin une formulation de l'électro-
dynamique où cette hypothèse supplémentaire n'a pas été introduite. Il est surprenant
de constater que dans de nombreuses circonstances cela ne conduit pas à des conclusions
physiquement absurdes, mais cela nous entraînerait trop loin d'en discuter ici. Nous en
parlerons un peu plus au chapitre 28.)
Notons encore ceci. Dans notre solution de l'onde qui s'éloigne, Eq. (20.35), la fonction
'I' est infinie à l'origine. Ce qui est assez étrange. Nous aimerions avoir comme solution
une onde partout finie. Notre solution doit représenter physiquement une situation où
il y a une source à l'origine. En d'autres termes, nous avons fait une erreur par inadver-
tance. Nous n'avons pas résolu partout l'équation d'onde dans le vide (20.33); nous avons
résolu l'Eq. (20.33) avec zéro à droite, partout sauf à l'origine. Notre erreur s'était glissée
parce que certaines étapes dans notre raisonnement ne sont pas « légales » quand r = O.
Montrons qu'il est facile de faire le même genre d'erreur dans un problème d'électro-
statique. Imaginons que l'on cherche une solution de l'équation du potentiel électro-
statique dans le vide, 'i/ 2q, O. Le Laplacien est égal à zéro, parce que nous posons qu'il
n'y a aucune charge nulle part. Mais que dire d'une solution à symétrie sphérique
366
de cette équation - c'est-à-dire une fonction <P qui dépend seulement de r? Appliquant
la formule de l'Eq. (20.32) pour le Laplacien, nous avons
1 d2
r dr2 (r<P) = O.
- -
Multipliant cette équation par r, nous obtenons une équation qu'on intègre immédiate-
ment:
d2
dr2 (r<P) = O.
Si nous intégrons une fois par rapport à r. nous trouvons que la dérivée première de rq,
est une constante; soit a cette constante:
d
dr (r<P) = a.
r<P = ar + b,
où b est une autre constante d'intégration. Nous avons ainsi trouvé que la fonction tf>
suivante est une solution pour le potentiel électrostatique dans le vide:
b
<P=a+-·
r
Il y a là évidemment quelque chose de faux. Dans la région où il n'y a pas de charges
électriques, nous connaissons la solution pour le potentiel électrostatique: le potentiel
est partout constant. Ceci correspond au premier terme de notre solution. Mais nous
avons aussi le second terme, selon lequel il y a une contribution au potentiel qui varie
comme un sur la distance à l'origine. Nous savons cependant qu'un tel potentiel est celui
une charge ponctuelle à l'origine. Est-ce que vous voyez la similitude entre ce qui s'est passé
la solution du potentiel dans le vide, notre solution nous donne aussi le champ créé par
une charge ponctuelle à l'origine. Est-ce que vous voyez la similitude entre s'est passé
maintenant et ce qui s'est passé quand nous avons trouvé la solution à symétrie sphérique
de l'équation d'onde? S'il n'y avait vraiment pas de charges ou de courants à l'origine il ne
devrait pas y avoir d'ondes sphériques qui s'en éloignent. Les ondes sphériques doivent,
bien sûr, être créées par des sources à l'origine. Dans le chapitre suivant nous établirons
les relations entre les ondes électromagnétiques et les courants et tensions qui les créent.
367
21
21-1 Lumière et ondes électro- 21-5 Les potentiels d'une charge en mou-
magnétiques vement; solution générale de Liénard
et Wiechert
21-2 Ondes sphériques issues d'une source
ponctuelle 21-6 Les potentiels d'une charge se
déplaçant à vitesse constante, formule
21-3 La solution générale des équations de de Lorentz
Maxwell
21-4 Champs d'un dipôle oscillant
cB = e,· X E.
[Voir l'Eq. (28.3), Vol. 1.]
Si une charge se déplace de façon arbitraire quelconque, le champ électrique que nous
allons trouver maintenant en un point ne dépend que de la position et du mouvement
de la charge non pas maintenant, mais plus tôt - à un instant qui précède l'instant actuel
du temps qu'a mis la lumière,
368
se déplaçant à la vitesse c, pour parcourir la distance r' qui sépare la charge du point où
l'on calcule le champ. En d'autres termes, si nous voulons le champ électrique au point (1)
au temps t, il faut calculer la position (2') de la charge et son mouvement au temps
(! - r' /c), où r' est la distance entre le point (1) et la position de la charge (2') au temps
(t - r'/c). L'exposant prime est mis pour vous rappeler que r' est ce qu'on appelle la
«distance retardée» du point (2') au point (1), et non la distance actuelle entre le point (2),
position de la charge au temps t, et le point(!) (voir Fig. 21-1). Notez que nous utilisons
maintenant une convention différente pour la direction du vecteur unité e,. Aux chapitres
28 et 36 du Vol. 1, il était pratique de prendre r (et donc e,) dirigés vers la source. Nous
suivons maintenant la définition que nous avons prise pour la loi de Coulomb, dans
laquelle r est dirigé à partir de la charge, en (2), vers le point(!). La seule différence est
évidemment que nos nouveaux r (et er) sont les opposés des anciens.
Nous avons vu également que si la vitesse v d'une charge est toujours beaucoup plus
petite que c, et si nous ne considérons que les points à grande distance de la charge de
sorte que seul le dernier terme de l'Eq. (21.l) soit important, les champs peuvent aussi
s'écrire
E = _ q
47rE 0 c 2 r'
[ accélération de la charge à (t - r'/c)
projetée orthogonalement à r'
J, (21.l')
et
cB = er' XE.
Regardons ce que dit l'équation complète, l'Eq. (21.1 ), un peu plus en détail. Le
vecteur e,, est Je vecteur unitaire de la direction qui va de la position retardée (2') au
point(!). Le premier terme est alors celui que nous attendons comme champ coulombien
de la charge à sa position retardée - nous pouvons l'appeler « le champ coulombien
retardé». Le champ électrique dépend·de l'inverse du carré de la distance et est dirigé en
partant de la position retardée de la charge (c'est-à-dire dans la direction de e,,).
(I}
(2)q
Fig. 21-1. Les champs en (1) au temps
rositlon
!
rr 1
t dépendent de la position (2') occupée par
la charge q au temps (t-r'/ c).
Mais ce n'est que le premier terme. Les autres termes nous apprennent que les lois de
l'électricité ne disent pas que tous les champs sont les mêmes que les champs statiques,
simplement retardés (ce que les gens se plaisent parfois à dire). Au« champ coulombien
retardé», il faut ajouter les deux autres termes. Le second terme dit qu'il y a une
« correction » au champ coulombien retardé qui est la dérivée par rapport au temps du
champ coulombien retardé multipliée par r', le retard. Pour ainsi dire, ce terme tend à
compenser le retard du premier terme. Les deux premiers termes correspondent au
369
calcul du « champ coulombien retardé» puis à son extrapolation vers l'avenir d'un
temps r'/c, c'est-à-dire exactement au temps t! L'extrapolation est linéaire, comme si
nous supposions que« le champ coulombien retardé» allait continuer à varier à l'allure
calculée pour la charge au point (2'). Si le champ varie lentement, l'effet de retard est pres-
que complètement compensé p&r le terme correctif et les deux termes ensemble nous
donnent un champ électrique qui est le« champ coulombien instantané» - c'est-à-dire le
champ coulombien de la charge au point (2) - avec une très bonne approximation ..
Il y a, enfin, un troisième terme dans l'Eq. (21.1) qui est la dérivée seconde du vecteur
unitaire er'· Pour notre étude des phénomènes lumineux, nous avons fait usage du fait
que loin de la charge les deux premiers termes varient comme l'inverse du carré de la
distance et, qu'à grande distance, ils deviennent très petits comparés au dernier terme,
qui décroît comme !fr. Nous nous sommes donc concentrés sur le dernier terme et nous
avons montré qu'il est (toujours, pour de grandes distances) proportionnel à la com-
posante de l'accélération de la charge à angle droit de la ligne de visée. (De plus, dans la
majeure partie de notre étude dans le Vol. I, nous avons considéré le cas où les charges
se déplacent de façon non relativiste. Nous n'avons envisagé les effets relativistes que dans
un chapitre, le chapitre 36.)
Nous voudrions maintenant relier les deux sujets. Nous avons les équations de
Maxwell, et nous avons l'Eq. (21.1) pour le champ d'une charge ponctuelle. Nous
devrions certainement nous demander si ces deux formulations sont équivalentes. Si
nous pouvons déduire l'Eq. (21.1) des équations de Maxwell, nous pouvons certainement
comprendre la connexion entre la lumière et l'électromagnétisme. Réaliser cette connexion
est le but principal de ce chapitre.
11 se trouve que nous n'allons pas le faire complètement- que les détails mathématiques
deviennent trop compliqués pour que nous nous embarquions dans tous leurs sanglants
détails. Mais nous en approcherons assez pour que vous puissiez facilement voir comment
cette connexion pourrait être faite. Les seules pièces manquantes ne seront que des détails
mathématiques. Certains d'entre vous peuvent trouver que les mathématiques de ce
chapitre sont assez compliquées, et vous pouvez ne pas avoir envie de suivre le raisonne-
ment de très près. Nous pensons cependant qu'il est important de faire la connexion
entre ce que vous avez appris plus tôt et ce que vous apprenez maintenant, ou au moins
d'indiquer comment une telle connexion peut se faire. Vous noterez, si vous parcourez les
chapitres précédents, que toutes les fois que nous avons pris une certaine proposition
comme point de départ pour une discussion, nous avons soigneusement expliqué si c'était
une nouvelle « hypothèse », c'est-à-dire une « loi fondamentale », ou si elle pouvait en
dernière analyse se déduire d'autres lois. Nous vous devons, dans l'esprit de ces cours,
de faire la connexion entre la lumière et les équations de Maxwell. Si par endroits cela
devient difficile, eh bien, c'est la vie - il n'y a pas moyen de faire autrement.
Au chapitre 18, nous avons trouvé que les équations de Maxwell peuvent se résoudre
en posant
E=-Vcf>--
aA (21.2)
at
et
B =V X A, (21.3)
370
où <f> et A doivent alors être les solutions des équations
(21.4)
et
2
V' A - -- aA
1 --- 2
j
(21.5)
c2 2 a1 - eoc2,
Nous allons maintenant chercher la solution des Eq. (21.4) et (21.5). Pour cela, nous
avons à trouver la solution If/ de l'équation
2
\/if; - -
I a2f
- = -s (21. 7)
c2 at2 '
où s, que nous appelons la source, est connue. Bien entendu, s correspond à p/e 0 et If/ à <f>
pour l'Eq. (21.4), ou s = jx/e0 c2 si If/ = Ax etc., mais nous voulons résoudre l'Eq. (21.7)
comme un problème de mathématiques quels que soient physiquement If/ et s.
Là où pet j sont nuls - dans ce que nous avons appelé l'espace« libre» - les potentiels
rp et A, et les champs E et B, satisfont tous à l'équation d'onde à trois dimensions sans les
sources, dont la forme mathématique est
(On peut écrire les solutions de bien d'autres manières encore, par exemple des ondes
cylindriques qui partent d'un axe.)
Nous avons remarqué aussi que, physiquement, l'Eq. (21.9) ne représente pas une onde
dans l'espace libre - qu'il doit y avoir des charges à l'origine pour faire démarrer l'onde
qui s'éloigne. En d'autres termes, l'Eq. (21.9) est une solution de l'Eq. (21.8) partout
sauf près der = 0, où elle doit être une solution de l'équation complète (21.7) incluant
des sources. Regardons comment cela marche. Quelle sorte de sources dans l'Eq. (21.7)
donnerait naissance à une onde telle que l'Eq. (21.9)?
Supposons que nous ayons l'onde sphérique de l'Eq. (21.9) et regardons ce qui arrive
pour r très petit. Le retard - r/c dans/ (t - r/c) peut alors être négligé - pourvu que/
soit une fonction lentement variable - et If/ devient
(r ~ 0). (21.10)
371
Ainsi If/ est exactement semblable à un champ coulombien pour une charge à l'origine
qui varie avec le temps. C'est-à-dire que si nous ajoutons une petite quantité de charge,
limitée à une très petite région voisine de l'origine, avec une densité p, nous savons que
Q/4'11"Eo
cf>= --r-·
f = s
4'11",
avec
S = f sdV.
La seule différence est que dans le cas général, s et par conséquent S, peut être fonction
du temps.
L'important maintenant est que si If/ satisfait l'Eq. (21.11) pour r petit, elle satisfait
aussi l'Eq. (21.7). Comme nous allons très près de l'origine, la dépendance avec 1/r de If!
entraîne que les dérivées par rapport aux coordonnées d'espace deviennent très
grandes. Mais les dérivées par rapport au temps gardent les mêmes valeurs. [Elles
sont exactement les dérivées de j{t) par rapport au temps.] Ainsi quand r tend
vers zéro, le terme a21f1/at 2 dans l'Eq. (21.7) peut· êtri: négligé par rapport à V2 1f1 et
J'Eq. (21.7) devient équivalente à l'Eq. (21.11).
Donc, pour résumer, si la fonction source s(t) de l'Eq. (21.7) est localisée à l'origine
et a pour force totale
Le seul effet du terme a2 1f1/a1 2 dans l'Eq. (21.7) est d'introduire le retard (t - r/c) dans le
potentiel quasi coulombien.
372
Comme l'Eq. (21.7) est linéaire, le champ résultant est la superposition des champs dus
à chacun de ces éléments de source.
En utilisant les résultats du paragraphe précédent [Eq. (21.13)], nous savons que le
champ dl/f au point (x 1, y 1, z1) - soit (1) pour simplifier - au temps t, dû à un élément de
source s dV au point (x 2, y 2, z2) soit (2) - est donné par
où r12 est la distance entre (2) et (1). Ajouter les contributions dues à tous les éléments de
source, signifie, évidemment, qu'on intègre sur toutes les régions où s t O; n.ous avons
donc
if;(!, t) = J
s(2, t - r 12 /c) dVz.
47rr12
(21.14)
C'est-à-dire que le champ en(!) au temps test la somme de toutes les ondes sphériques qui
quittent les éléments de source située à (2) aux temps (t - r12 /c). Ceci est la solution de
notre équation d'onde pour un ensemble de sources quelconque.
Nous voyons maintenant comment obtenir une solution générale pour les équations
de Maxwell. Si par If! nous désignons le potentiel scalaire</>, la fonction source s devient
p/q,. Ou bien If/ peut représenter n'importe laquelle des trois composantes du potentiel
vecteur A, en remplaçant s par la composante correspondante de j/E0c2. Donc, si nous
connaissons la densité de charge p (x, y, z, t) et la densité de courant j (x, y, z, t) partout,
nous pouvons écrire immédiatement les solutions des Eq. (21.4) et (21.5). Ce sont
et
q,(I, t)
r
.
p(2, t - r12/c) dVz
471"Eor12
(21.15)
(21.16)
Les champs E et B peuvent être obtenus en dérivant les potentiels, en utilisant les
Eq. (21.2) et (21.3). [Soit dit en passant, il est possible de vérifier que les <Pet A obtenus
à partir des Eq. (21.15) et (21.16) satisfont bien l'égalité (21.6).]
Nous avons résolu les équations de Maxwell. Étant donné. les courants et les charges
en n'importe quelle circonstance, nous pouvons trouver directement les potentiels à partir
de ces intégrales puis les dériver et en déduire ainsi les champs. Nous en avons ainsi fini
avec la théorie de Maxwell. Ceci nous permet aussi de fermer le cercle qui nous ramène
à notre théorie de la lumière, parce que pour faire la connexion avec notre étude précédente
de la lumière, nous n'avons qu'à calculer le champ électrique dû à une charge en mouve-
ment. Tout ce qui reste à faire est de prendre une charge en mouvement, de calculer
les poten.tiels à partir de ces intégrales, puis de dériver pour trouver E à partir de
- V<f> - aA/at. Nous devons obtenir l'Eq. (21.1). Il se trouve que cela représente un gros
travail, mais tel en est le principe.
Voici donc le centre de l'univers de l'électromagnétisme la théorie complète de l'élec-
tricité et du magnétisme, et celle de la lumière; une description complète des champs
produits par des charges en mouvement; et plus. Tout y est. Telle est la construction
réalisée par Maxwell, complète dans toute sa puissance et toute sa beauté. C'est certaine-
ment l'une des
373
plus grandes performances de la physique. Pour vous rappeler son importance, nous
allons tout réunir dans un beau tableau.
Équations de Maxwell:
V·B 0
aB j_ aE
vxE
ar tu + at
Leurs solutions:
E = -V<j> -
aA
-
ar
B=vXA
<j>(I, t)
A(l, t)
*Cette formule a été établie par R. P. Feynman, aux environs de 1950, et présentée dans quel-
ques cours comme un bon moyen de raisonner sur le rayonnement synchroton.
374
des objets neutres tels que des atomes, nous considérerons que notre charge oscillante q
se trouve près d'une charge égale et de signe opposé, au repos. Si la distance entre les
centres des charges est d, les charges auront un moment dipolaire p = qd, que nous
considérerons comme fonction du temps. Maintenant, nous devons nous attendre à ce
que si nous regardons les champs au voisinage des charges, nous n'ayons pas à nous
occuper du retard; le champ électrique sera exactement le même que celui que nous avons
calculé plus tôt pour un dipôle électrostatique - en utilisant, évidemment, le moment
instantané p(t) du dipôle. Mais si nous nous éloignons beaucoup, nous devons trouver
un terme dans le champ qui varie comme !fr et dépend de l'accélération de la charge
perpendiculairement à la ligne de visée. Voyons si nous obtenons un tel résultat.
(1)
f j(2, t - r12/c) dV
r12
2
• (21.17)
Si maintenant la taille de notre globule de charge est vraiment très petite devant r 12 , nous
pouvons dans notre dénominateur remplacer r 12 par r, distance au centre du globule et
sortir r de l'intégrale. Ensuite, nous allons aussi poser r 12 = r. au numérateur, bien que
cela ne soit pas tout à fait correct. Ce n'est pas correct parce que nous devrions prendre j,
disons, au sommet du globule à un instant légèrement différent de celui où nous prenons j
en bas du globule. Quand nous posons r12 = r dans j (1 - r 12 /c), nous prenons la densité
du courant pour tout le globule au même instant (1 -· r/c). C'est une approximation
qui ne sera bonne que si la vitesse v de la charge est beaucoup plus petite que c. Nous
faisons donc un calcul non relativiste. En remplaçant j par pv, l'intégrale (21.17) devient
375
Comme toute la charge a la même vitesse, cette intégrale n'est que v/r fois la charge
totale q. Mais qv n'est queéJp/éJt, la vitesse à laquelle varie le moment dipolaire-qu'il faut,
naturellement, calculer au temps retardé (- r/c). Nous l'écrirons p (t - r/c). Nous
obtenons donc pour le potentiel-vecteur
Notre résultat exprime que le courant d'un dipôle variable produit un potentiel-
vecteur sous la forme d'ondes sphériques dont la force de la source est Pf4rrEoc 2 •
Nous pouvons obtenir maintenant le champ magnétique à partir de B = 'If x A.
Comme j> est entièrement dans la direction des z, A n'a qu'une composante suivant z;
il n'y a que deux dérivées non nulles dans le rotationnel. Ainsi Bx = éJA,/éJy et
By = -éJA,/éJX' Voyons d'abord Bx:
B = éJA. = éJ p(t - r/c) (21.19)
x éJy 4n 0 c2 éJy r
Pour effectuer la dérivation, nous devons nous rappeler que r = 2
+ y 2 + z 2 de vx
sorte que
l éJ
Bx = 47rEoC2 p(t - r/c) éJy
l
47rEoC2
éJ (1)r +
éJy p(t - r/c). (21.20)rl
En se rappelant que éJr/éJy = y/r, le premier terme donne
yp(t - r/c)
(21.21)
- 47rE 0c2 r3
qui décroît en l/r 2 comme pour les champs d'un dipôle statique (parce que y/r est constant
dans une direction donnée).
Le second terme dans l'Eq. (21.20) nous donne les effets nouveaux. En effectuant
les dérivations, nous obtenons
-- l y "( !)
----,pt-rc, (21.22)
47rE 0c 2 cr·
p = P• = p 0 sin wt
376
Fig. 21-3. La grandeur de A en fonc-
tion der à l'instant t pour l'onde sphérique
I d'un dipôle oscillant.
I
B
11
= _l_ [xp(t - r/c) + xji(t - r/c)].
47re 0 c2 ra cr2
Regardons maintenant cette formule. Avant tout, si on est très loin, pour r très grand,-
seul compte le terme en p. La direction de Best donnée par p x r, qui est perpendiculaire
au rayon r et également à l'accélération comme le montre la Fig. 21-4. Tout va bien;
c'est également le résultat que nous avons obtenu à partir de l'Eq. (21.1').
377
8
(1)
Voyons maintenant la chose à laquelle nous ne sommes pas habitués - ce qui se passe
plus près. Au paragraphe 14-9, nous avons étudié la loi de Biot et Savart pour le
champ magnétique d'un élément de courant. Nous avons trouvé que la contribution
de l'élément de courant jdV au champ magnétique est
dB = - 1- j X r dV.
4m: 0 c2 r3
(21.24)
Vous voyez que cette formule ressemble beaucoup au premier terme de l'Eq. (21.23),
si on se rappelle que p est le courant. Mais il y a une différence. Dans l'Eq. (21.23),
le courant doit être évalué au temps (t - r/c), qui n'apparaît pas dans l'Eq. (21.24).
Cependant, l'Eq. (21.24) est en fait encore très bonne pour les petits r, parce que le second
ensemble donnent un résultat très proche de l'Eq. (21.24) quand r est petit.
On peut le voir de la façon suivante: quand r est petit, (t- r/c) n'est pas très différent
de t, on peut donc développer le crochet de l'Eq. (21.23) en série de Taylor. Pour le
premier terme,
p(t - r/c) = p(t) - ~ ji(t)
c
+
etc.,
Quand on fait la somme, les deux termes en p s'annulent, et il nous reste le courant non
retardé p: c'est-à-dire p(t) - plus des termes d'ordre (r/c) 2 ou d'ordre supérieur
[par exemple, ! (r/c) 2 p] qui seront très petits pour r suffisamment petit pour que p ne
varie pas trop pel;ldant le temps r/c.
L'Eq. (21.23) donne donc des champs très semblables à ceux de la théorie instantanée
- bien plus qu'à ceux de la théorie instantanée plus un retard; les effets du premier
ordre dus au retard sont annulés par le second terme. Les formules de la statique sont
très précises, bien plus précises que vous pourriez le penser. La compensation n'agit
évidemment que pour des points voisins. Pour des points éloignés la correction devient
très mauvaise parce que les retards produisent un effet très important, et on obtient le
terme important en l/r du rayonnement.
Nous avons encore à calculer le champ électrique et à démontrer qu'il est le même
que l'Eq. (21.1 '). Pour de grandes distances nous pouvons voir que la réponse va sortir
correctement. Nous savons que loin des sources, là où une onde se propage, E est
perpendiculaire à B (et aussi à r), comme sur la Fig. (21-4), et
378
que cB = E. Donc E est proportionnel à l'accélération ji, comme prévu d'après
l'Eq. (21.1 ').
Pour obtenir le champ électrique pour toutes les distances, nous avons besoin de
résoudre pour trouver le potentiel électrostatique. Quand nous avons calculé l'intégrale
du courant pour A, pour obtenir l'Eq. (21.18), nous avons fait une approximation en
négligeant la faible variation de r dans les termes de retard. Cela ne marchera pas pour
le potentiel électrostatique, parce que nous aurions 1/r fois l'intégrale de la densité de
charge, qui est constante. Cette approximation est trop grossière. Il faut que nous
poussions jusqu'à l'ordre supérieur. Au lieu de nous embarquer dans ce calcul d'ordre
supérieur, nous pouvons faire quelque chose d'autre - nous pouvons déterminer le
potentiel scalaire à partir de l'Eq. (21.6), en utilisant le potentiel-vecteur que nous
avons déjà trouvé. La divergence de A, dans notre cas, se réduit à aA ,/a z - car Ax et
Ay sont identiquement nuls. En dérivant de la même façon que précédemment pour
trouver B,
E(r, t) = -1 [ *
4 m:or 3 - p -
· r)r
(p*, -
3- 2 - + ë21 {jj(t - r/c) X r} X r J(21.26)
avec
p* = p(t - r/c) + !:.c p(t - r/c). (21.27)
379
Bien que cela paraisse plutôt compliqué, le résultat peut s'interpréter facilement. Le
vecteur p* est le moment dipolaire retardé puis «corrigé» pour le retard, de sorte que les
deux termes en p* donnent exactement le champ dipolaire statique quand r est petit.
[Voir chapitre 6, Eq. (6.14).] Quand r est grand, le terme en p domine, et le champ
électrique est proportionnel à l'accélération des charges, perpendiculairement à r, et,
en fait, est dirigé le long de la projection de p sur un plan perpendiculaire à r.
Ce résultat est en accord avec ce que nous aurions obtenu en utilisant l'Eq. (21.1).
L'Eq. (21.1) est évidemment plus générale; elle convient à n'importe quel mouvement,
tandis que l'Eq. (21.26) n'est valable que pour les petits mouvements pour lesquels on
peut prendre le retard r/c constant sur toute la source. De toute façon, nous avons
maintenant donné les fondements de toute notre discussion précédente de la lumière
(excepté certains sujets discutés dans le chapitre 36 du Vol. 1), car tout dépend du
dernier terme de l'Eq. (21.26). Nous allons maintenant discuter comment les champs
peuvent s'obtenir pour des charges se déplaçant plus rapidement (ce qui nous conduira
aux effets relativistes du chapitre 36 du Vol. 1).
21-5 Les potentiels d'une charge en mouvement; solution générale de Liénard et Wiechert
Dans le dernier paragraphe, nous avons fait une simplification en calculant notre
intégrale pour A en ne considérant que de faibles vitesses. Mais en agissant ainsi, nous
avons laissé étjiapper un point important et un point aussi où il est facile de se tromper.
Nous allons pat conséquent entreprendre maintenant un calcul des potentiels pour
une charge ponctuelle se déplaçant de n'importe quelle façon - même à une vitesse
relativiste. Une fols que nous aurons ce résultat, nous aurons l'électromagnétisme
complet des charges'électriques. Même l'Eq. {21.1) peut être alors déduite en faisant
des dérivations. L'hist'oire sera complète. Soyez.donc patients.
Essayons de calculer le potentiel scalaire <f> (1 }'au point (x 1, y 1, z1) produit par une
charge ponctuelle, telle qu'un électron, se déplaçant cje n'importe quelle manière. Par
charge «ponctuelle» nous entendons une très petite boule de charge, rétrécie autant
que vous le voudrez, ayant une densité de charge p (x, y, z). On peut trouver <f> à l'aide
de l'Eq. (21.15):
</>{l, t) = -.t_ / p(2, t - r12/c) dV2. (21.28)
47rEo r12
Par r' 12 nous désignons le rayon vecteur issu de la charge au point (2) vers le point (1)
au temps retardé (t- ru/c). C'est faux.
La réponse correcte est
1 q
.p(I, t) = 47rEo r'12 · 1 - vr/c' (21.29)
380
ra--j
T F • '
l \
Charge «ponctuelle»
r12 ..
(1)
(a)
Fig. 21-5. (a) Une charge «ponctuelle» - considérée comme une petite distribution
cubique de charge - se déplaçant à la vitesse v vers le point (1 ). (b) L'élément de volume
~V, utilisé pour calculer les potentiels.
suivre, nous allons d'abord faire le calcul pour une charge« ponctuelle» qui a la forme
d'un petit cube de charge se déplaçant vers le point (1) à la vitesse v, comme le montre
la Fig. 21-5 (a). - Soit a l'arête du cube, que nous supposons beaucoup, beaucoup plus
petite que r 12 , distance du centre de la charge au point (1).
Maintenant, pour évaluer l'intégrale de l'Eq. (21.28), nous allons revenir aux principes
de base; nous allons l'écrire comme la somme
""polV;,
L.J (21.30)
. r;
•
où ri est la distance du point (1) au ième élément de volume LIVi et Pi la densité de
charge dans LI Vi au temps ti = t - ri/c. Comme ri >>a, toujours, il sera pratique de
prendre nos LI V; en forme de fines tranches rectangulaires perpendiculaires à r12 ,
comme le montre la Fig. 21-5 (b).
Supposons que nous commencions par prendre les éléments de volume LI V; avec une
épaisseur w bien inférieure à a. Les éléments individuels vont apparaître comme ceux de
la Fig. 21-6 (a), où nous en avons placé plus qu'assez pour couvrir la charge. Mais
nous n'avons pas montré la charge, et cela pour une bonne raison. Où l'aurions-nous
dessinée? Pour chaque élément de volume L1 V;, nous allons prendre p au temps
t; = (1 - r;f c), mais comme la charge se déplace, elle occupe une place différente pour
chaque élément de volume LI V;!
Disons que nous commençons par l'élément de volume désigné par « 1» dans la
Fig. 21-6(a), choisi de telle sorte qu'au temps t 1 -~(t-rifc) le bord «arrière» de la
charge occupe L1 Vi. comme le montre la Fig. 21-6 (b ). Alors quand nous évaluons
p 2LI V 2 , nous devons prendre la position de la charge au temps légèrement ultérieur
t 2 = (1- r2 /c), où la charge sera dans la position représentée sur la Fig. 21-6 (c). Et
ainsi de suite, pour LI V3, L1 V4 , etc. Nous pouvons maintenant évaluer la somme.
Comme l'épaisseur de chaque L1 V; est zw, son volume est wa 2 • Donc chaque élément
de volume qui recouvre la distribution de charge contient la quantité de charge wa 2p,
où p est la densité de charge à l'intérieur du cube --que nous avons supposée uniforme.
Quand la distance de la charge au point (!) est grande, nous faisons une erreur négli-
geable en remplaçant tous les r; aux dénominateurs par une valeur mpyenne quelconque,
par exemple la position retardée r' au centre de la charge. La somme (21.30) est alors
N pwa2
2:-·
r'
i=l
381
.•,rn11] 111111111 ~
(1)
r (1)
\l1-_ __,_1 ___......
Or pa3 est exactement la charge totale q et Nw est la longueur b indiquée dans la partie
(e) de la figure. Nous avons donc
(21.3 l)
Comme la vitesse de la charge est v, la distance parcourue est vLI t = vb/c. Mais la
longueur b est cette distance ajoutée à a:
b =a+!'.. b.
c
382
En résolvant par rapport à b, on obtient
a
b = 1 - (v/c)
q
<t>(l, t) = 41!"Eor' [l - (v/c)]ret
Ce résultat est en accord avec notre assertion, l'Eq. (21.29). Il y a un terme correctif
qui vient du fait que la charge se déplace pendant que notre intégrale «balaye la
charge». Quand la charge se déplace vers Je point (1), sa contribution à l'intégrale est
multipliée par le rapport b/a. L'intégrale correcte est par conséquent q/r' multiplié par
b/a, c'est-à-dire l/[l - v/c] ret.
Si la vitesse de la charge n'est pas dirigée vers le point d'observation (1), vous
pouvez voir que ce qui compte est la composante de sa vitesse vers Je point (1 ). Appelant
v, cette composante de la vitesse, le facteur de correction est 1/(1- vr/c] ree D'autre
part, l'analyse que nous avons donnée se fait exactement de la même façon pour une
distribution de charge de forme quelconque - il n'est pas nécessaire que ce soit un cube.
Enfin, comme la «taille» de la charge a n'intervient pas dans Je résultat final, Je même
résultat est valable quand on rétrécit la charge jusqu'à n'importe quelle taille - même
jusqu'à être ponctuelle. Le résultat général est que le potentiel scalaire pour une charge
ponctuelle se déplaçant à n'importe quelle vitesse est
q,(l t) = q (21.33)
' 41!"Eo{r - (v · r/c)]ret'
où r est le vecteur issu de la charge et allant jusqu'au point (1) où l'on évalue .p, et
toutes les quantités entre crochets doivent avoir leurs valeurs prises au temps retardé
t'=t-r'/c.
Il arrive la même chose quand on calcule A pour une charge ponctuelle, -à partir de
l'Eq. (21.16). La densité de courant est pv et l'intégrale sur p est la même que celle que
nous avons trouvée pour q,. Le potentiel-vecteur est
A(I t) = qv (21.34)
' 41!"e 0 c2 [r - (v · r/c)]rc·t
Les potentiels pour une charge ponctuelle furent déduits sous cette forme pour la
première fois par Liénard et Wiechert et sont appelés les potentiels de Liénard-
Wiechert.
Pour fermer le cercle jusqu'à l'Eq. (21.1) il n'y a plus qu'à calculer E et B à partir de
ces potentiels (en utilisant B = Vx A et E = -v.p- aA/at). Ce n'est
383
plus que de l'arithmétique. L'arithmétique est cependant assez compliquée, de sorte
que nous n'allons pas écrire tous les détails. Vous nous croirez sur parole, peut-être,
si nous vous disons que l'Eq. (21.1) est équivalente aux potentiels de Liénard-Wiechert
que nous avons déduits*.
21---6 Les potentiels d'une charge se déplaçant à vitesse constante, formule de Lorentz
Nous allons utiliser les potentiels de Liénard-Wiechert dans un cas particulier - pour
trouver les champs d'une charge se déplaçant en ligne droite avec une vitesse uniforme.
Nous referons ce calcul plus tard, en utilisant le principe de relativité. Nous connaissons
déjà les potentiels quand on se place dans le référentiel lié à une charge. Quand la
charge se déplace, on peut tout calculer grâce à une transformation relativiste d'un
système dans l'autre. Mais la relativité est née de la théorie de l'~lectricité et du magné-
tisme. Les formules de la transformation de Lorentz (chapitre 15, Vol. I) sont des
découvertes faites par Lorentz quand il étudiait les équations de l'électricité et du magné-
tisme. Pou~ vous faire apprécier d'où viennent ces choses, nous aimerions vous montrer
que les équations de Maxwell conduisent effectivement à la transformation de Lorentz.
Nous commençons en calculant directement les potentiels pour une charge se déplaçant
à vitesse uniforme, directement à partir de l'électrodynamique des équations de Maxwell.
Nous avons montré que les équations de Maxwell conduisent aux potentiels d'une
charge mobile que nous avons obtenus au paragraphe précédent. Donc en utilisant ces
potentiels, nous utilisons la théorie de Maxwell.
y
p
(X,Y,Z)
1
Position «retardée» 1
t'• t-r'/cl
r:i[2v),
CA
1
1
vt'
X
Supposons qu'on ait une charge se déplaçant le long de l'axe des x à la vitesse v.
Nous voulons les potentiels au point P (x, y, z), comme le montre la Fig. 21-7. Si t = 0 est
l'instant
* Si vous avez beaucoup de papier et de temps, vous pouvez essayer de le faire vous-mêmes
complètement. Nous pouvons alors faire deux suggestions: d'abord n'oubliez pas que les
dérivées de r' sont compliquées parce que c'est une fonction de t'. Ensuite, n'essayez pas de
déduire (21.1), mais prenez toutes les dérivées qu'elle comporte, et comparez alors avec E obtenu
à partir des potentiels (21.33) et (21.34).
384
où la charge se trouve à l'origine; au temps t la charge est à x = vt, y= z =O. Cependant
ce que nous avons besoin de connaître, c'est sa position à l'instant retardé
r'
t' = t - -c ' (21.35)
où r' est la distance de la charge au point P à I'instant retardé. Plus tôt, au temps t',
la charge se trouvait à x = vt', et
Pour trouver r' ou t', il faut combiner cette équation avec l'Eq. (21.35). Nous élimi-
nons d'abord r' en résolvant l'Eq. (21.35) par rapport à r' et en le portant dans
l'Ec1• (21.36). En élevant les deux membres au carré on obtient
équation quadratique en t'. En développant les carrés des binômes et en groupant les
termes en t', on obtient
(l - ~)
c2
t' = t - ~c2 - Ic -\j/(x - vt) 2 + (1 - ~)(y2 +
c2
z 2) • (21.37)
Nous sommes alors prêts à trouver</> à partir de l'Eq. (21.33), qui devient, puisque v
est constante,
1
<P(xyzt)=-q- (21.38)
' ' ' 47rEo r' - (v · r'/c)
La composante de v dans la direction de r' est v x (x - vt')/r', donc v · r' est égal à
v x (x - vt'), et le dénominateur est
q 1
q,(x, y, z, t) = -4 -
7rEo J
--;============
(x - vt)2 + ( 1 - ~:)(y2 + z2)
385
On comprend mieux cette équation si on la récrit sous la forme
q
</>(X, y, z, t) = 47rE
0
R [(
1
J - -V X - Vt
1
)2 + y 2 + z2 ]1/2 .
(21.39)
c2 v'I - v2/c2
Le potentiel-vecteur A a la même expression avec le facteur supplémentaire v/c 2 :
V
A= C2 q,.
Dans l'Eq. (21.39) vous pouvez facilement voir le début de la transformation de
Lorentz. Si la charge était à l'origine dans son référentiel propre, son potentiel serait
q 1
q,(x, y, z) = 47reo [x2 + y2 + z2)1/2
Nous l'observons dans un système de coordonnées mobile, et on s'aperçoit que les
coordonnées doivent être transformées par
X - Vt
X->--:====
v'I - v2/c2
y-> y,
z -> z.
C'est exactement la transformation de Lorentz et ce que nous venons de faire, c'est
essentiellement la façon dont Lorentz l'a découverte. ·
Mais qu'est-ce que ce facteur supplémentaire 1/ v'l - v2 /c 2 qui apparaît devant
l'Eq. (21.39)? Et comment est apparu le potentiel-vecteur A, alors qu'il est partout nul
dans le référentiel propre de la particule? Nous montrerons bientôt que A et <f> ensemble
constituent un quadri-vecteur, comme la quantité de mouvement p et l'énergie totale
U d'une particule. Le facteur supplémentaire !/ v'l - v2/c 2 dans l'Eq. (21.39) est le
même qui apparaît toujours quand on transforme les composantes d'un quadri-vecteur
- exactement comme la densité de charge p se transforme en p/ v'l - v2 /c 2 • En fait,
il est presque évident d'après les Eq. (21.4) et (21.5) que A et tp sont les composantes
d'un quadri-vecteur, parce que nous avons déjà montré au chapitre 13 que j et p sont
les composantes d'un quadri-vecteur.
Nous reprendrons plus tard la relativité de l'électrodynamique plus en détail; nous
voulions seulement montrer ici comment les équations de Maxwell conduisent tout
naturellement à la transformation de Lorentz. Vous ne serez pas étonnés de voir alors
que les lois de l'électricité et du magnétisme sont déjà correctes vis-à-vis de la relativité
d'Einstein. Nous n'aurons pas à les «aménager» comme nous avons dû le faire pour
les lois de Newton de la mécanique.
386
lndeœ alphabétique
387
Dipolaire, moléculaire, 178 Farad (unité), 107
moment, 92 Faraday, loi d'induction, 288
moment d'une distribution de Ferroélectricité, 191
charges, 97 Flux, 6, 38, 63
potentiel, 92 d'un fluide, 208
Dipôle, électrique, 89 électrique, 8
magnétisme, 243 règles du, 287
oscillant, 374 Fondamental, état, 137
Dirac, 18 Force, de Lorentz, 215, 270
Divergence, opérateur, 27 électrique, 1
Divergence nulle, champ à, 50 électromotrice, 274
magnétique, 3, 215
Electrets, 190 Foucault, courants de, 277
Electrique, champ, 4, 5, 111 Foudre, 161
courant, 217 Fourier, théorème de, 121
courant, dans l'atmosphère, 148 Franklin, B., 81
énergie, 253 Fréquence de plasma, 120
flux, 7
force, 1, 215 Galvanomètre, 272
potentiel, 58 Gauss, 273
susceptibilité, 170 surface de, 165
Electrodynamique, 4 théorème de, 165
Electromagnétisme, 1 Geiger, 75
loi del', 8 Générateur, de courant alternatif, 295
Electromotrice, force, 274 électrique, 271
Electronique, polarisation, 179 Van de Graaff, 87, 137
Electrostatique, équation del', 172 Goutte brisée, théorie de la, 154
équation du potentiel, 89 Gradient, opérateur, 22, 35
Electrostatique, énergie, 127 de potentiel dans l'atmosphère, 146
dans les noyaux, 136
d'une charge ponctuelle, 144 Hamilton, première fonction
d'un cristal ironique, 133 principale d', 344
d'un ensemble de charges, 127 Hess, 148
Emissivité, 109
Energie, du champ électrostatique, 141 Image électrique, 1OO
d'un condensateur, 129 Inductance, 274
électrique, 253 auto-, 277, 303
électrostatique, 127 mutuelle, 299
magnétique, 304 self-, 277, 303
mécanique, 253 Induction, auto-, 277, 303
Equation de diffusion des neutrons, lois del', 287
215 self-, 277, 303
Equipotentielles, surfaces, 63 Induits, courants, 272
Etat excité, 137 Intégral, calcul, 35
388
Intégrale curviligne, 35 dans le vide, 348
Interaction nucléaires, 137 en présence de courants et
Ionique, polarisabilité, 191 de charges, 368
Ionosphère, 118 Mécanique, énergie, 253
Isolants, 3, 165 Moindre action, principe de, 326
Isothermes, 19 Molécules, non polaires, 178
surface, 19 polaires, 178, 181
Moment dipôlaire, 92
Jeans, J ., 26 Moteurs électriques, 271
Mutuelle inductance, 299
Kilocalorie (unité), 131
Neumann, J. von, 208
Lamb, 138 Neutrons, diffusion des, 205
Laplace, équation de, 88, 111 Newton, 1., 68
Laplacien, opérateur, 32 Newton, loi de, 118
Laughton, 82 Non polaires, molécules, 178
Lenz, loi de, 277 Nuages, électrisation des, 157
Liénard-Wiechert, potentiels de, 303 Nucléaires, interactions, 137
Lignes de champ, 63
Limites, problèmes de, 111 Ondes, à trois dimensions, 358
Lodestone, 16 électromagnétique, 368
Lois , de l'électromagnétisme, 8 plane, 348
de l'induction, 287 sphérique, 363, 370
Lorentz, force de, 215 Ondes, équations d', 322
formule de, 386 Opérateur, divergence, 33
jauge de, 324 gradient, 22
Lumière, 368 Laplacien, 17
vitesse de la, 320 rotationnel, 28
vectoriel, 26
McCullogh, 14 Orbites atomiques, 12
Magnétisme, champ, 4, 5, 215 Orientation, polarisation d', 18 2
233
de courants stationnaires, 219 Particules étranges, 13 7
relativité du, 225 Piézoélectricité, 190
Magnétique, dipôle, 243 Pines, 121
énergie, 304 Plane, onde, 348
force, 215 Plans chargés, 77
force, sur le courant, 218 Plasma, fréquences de, 120
Magnétie, 16 oscillation de, 118
Magnétostatique, 54, 215 Plimpton, 82
Marsden, 75 Poisson, équation de, 89
Maxwell, J.C., 12, 16, 311 Polarisation
Maxwell, équations de, 18, 28, Polarisabilité, ionique, 191
88, 309 d'orientation, 169
389
Polarisation, charges de , 169 produit, 23
d'orientation, 185 Schrôdinger, équation de, 265
électronique, 178 Solenoide, 223
vecteur, 168 Sphère de charges, 79
Potentiel, des vitesses, 209 Sphérique, onde, 363, 370
électrique, 58 Spin-orbitale, force, 136
électrostatique, 88 Stokes, théorème de, 47
gradient de, dans l'atmosphère, 146 Superficielle, tension, 202
scalaire, 323 Supreconducteurs, 279
vecteur, 257 Susceptibilité électrique, 170
Priestly, J., 82 Synchrotron, 295
Principe, de moindre action, 326
de superposition, 4, 55
Propagation des champs, 315 Taylor, développement de, 98
Proton, spin du, 136 Thermique, conductivité, 29, 198
Pyroélectricité, 190 Thompson, 7 5
Thompson, modèle atomique de, 75
Quadrupolaire, lentille, 115 Transformateurs, 276
potentiel, 99
Van de Graaff, générateur, 87, 137
Rayons cosmiques, 91
Vecteur, flux d'un, 38
Relativité, du champ électrique, 225
potentiel, 233, 257
du champ magnétique, 225
Vectoriel, produit, 28
Rotationnel, nul, champ à, 50
Vitesse, de la lumière, 320
opérateur, 28, 35
potentiel de, 209
Rupture d'un isolant, 107
Voltmètre, 272
Rutherford, 83
Rutherford-Bohr, modèle de, 75
Weber, 273
Scalaire, champ, 18 Weber (unité), 216
potentiel, 322 Wilson, C.T.R., 160
LE COURS DE PHYSIQUE DE FEYNMAN
Mécanique, 2e partie
416 pages : Optique : le principe du moindre temps. Optique géométrique. Rayonne-
ment électromagnétique. Interférence. Diffraction. L'origine de l'indice de réfraction.
Amortissement du rayonnement; diffusion de la lumière. Polarisation. Effets relativistes
dans le rayonnement. La vision de la couleur. Mécanismes de la vision. Comportement
quantique. La relation entre les points de vue ondulatoire et corspusculaire. La théorie
cinétique des gaz. Les principes de mécanique statistique. Le mouvement Brownien.
Applications de la théorie cinétique. Diffusion. Les lois de la thermodynamique. lllus-
tration de la thermodynamique. L'encliquetage à rochet. Le son; l'équation d'onde.
Battements. Modes. Harmoniques. Ondes. Symétrie dans les lois physiques. Index.
Électromagnétisme, 2e partie
432 pages : Circuits en courant alternatif. Cavités résonnantes. Guides d'ondes. L'élec-
trodynamique en notation relativiste. Transformation Lorentz des champs. L'énergie du
champ et l'impulsion du champ. La masse électromagnétique. Mouvement des charges
dans les champs électriques et magnétiques. La géométrie interne des cristaux. Tenseurs.
L'indice de réfraction des matériaux denses. Réflexion par les surfaces. Le magnétisme
de la matière. Paramagnétisme et résonance magnétique. Ferromagnétisme. Milieux
magnétiques. Elasticité. Milieux élastiques. L'écoulement de l'eau sèche. L'écoulement de
l'eau mouillante. Index.
Mécanique quantique
528 pages : Le comportement quantique. La relation entre les points de vue ondulatoire
et corpusculaire. Amplitude de probabilité. Particules identiques. Spin un. Spin un demi.
La dépendance des amplitudes en fonction du temps. La matrice hamiltonienne. Le maser
à ammoniac. Autres systèmes à deux états. La structure hyperfine de l'hydrogène. Pro-
pagation dans un réseau cristallin. Les semi-conducteurs. L'approximation des particules
indépendantes. Variation des amplitudes dans la position. Symétrie et lois de conserva-
tion. Le moment cinétique. L'atome d'hydrogène et la table périodique. Les opérateurs.
L'équation de Schrôdinger dans un contexte classique : un séminaire sur la supra-conduc-
tivité. Epilogue. Appendice. Index.
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