Les Déterminants de L'orientation Yield Management
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Imen Zrelli
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Les déterminants
de l’orientation
Yield Management
Une approche exploratoire
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M
algré l’abondance actuelle des d’un ensemble de techniques d’optimisa-
travaux relatifs au Yield Manage- tion des flux et de management des capaci-
ment (YM), on admet l’absence tés mais d’une gestion globale de res-
d’une définition unanime et universelle du sources, dont notamment humaines,
terme. Le YM est considéré tantôt comme devenues partenaires partageant avec les
une simple technique tarifaire tantôt comme clients production et bénéfice du service
une démarche stratégique d’optimisation. (Marion et al., 2003).
Appuyé sur des techniques de prévision, Prenant la forme d’un système cohérent,
d’analyse de la clientèle et de gestion de articulé, obéissant à une vision nouvelle de
remplissage, le YM permet d’optimiser le client, l’application du YM s’oppose à l’at-
revenu global dans le temps et d’ajuster une titude réactive d’une application simple de
capacité contrainte à une demande segmen- modulation tarifaire. La nature globale de
tée. Là où il s’est trouvé appliqué, il a été à cette approche, et sa position systémique en
l’origine d’innovations. Le recours au YM a feraient un moyen proactif, étendant
même permis aux entreprises de service l’orientation client actuellement recom-
d’être compétitives. Celles qui l’ont appliqué mandée dans le secteur des services et
ont répondu non pas à un bloc de demandes ouvrant des perspectives larges à des rela-
d’une offre standardisée mais à une grande tions de coproduction des prestations et à
variété de clients ayant des caractères dis- un partenariat effectif. Le YM devient ainsi
tinctifs. Une échelle de services tarifés adap- une stratégie d’orientation des évolutions
tée aux contraintes de chaque segment de du marché d’une entreprise de service,
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Traductions du YM
Traductions Références
Gestion des capacités Daudel et Vialle (1989)
Gestion du rendement Autissier (2000)
Management de la recette Capiez (2003)
Optimisation du rendement global Dubois et Frendo (1995)
Optimisation de la recette Sinsou (1999)
Mécanisme de tarification dynamique Pigneur (2001)
Tarification en temps réel Capiez (2003)
Définitions du YM
Définitions Références
Ensemble de techniques Daudel et Vialle (1989)
Technique de revenu Donaghy et al. (1995)
Technique de gestion LeGall (1998)
Pratique Autissier (2000)
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par chambre disponible (Revenue Per Avai- une même classe tarifaire. Le refus des unités
lable Room : RevPAR). En vue de gérer ce à tarif plein alors que les unités à tarif réduit
dernier, une infrastructure hôtelière devrait sont encore disponibles est une décision non
fixer le nombre de chambres à répartir dans optimisée (Kimes, 1994). La décision d’ac-
chaque classe tarifaire et par catégorie de ceptation ou de refus des clients tient compte
clientèle. Le RevPAR exprime la perfor- de plusieurs éléments dont notamment la
mance de la politique tarifaire en relation réservation et la prévision des go-shows,
avec le remplissage (Capiez, 2003). Cette des no-shows, des annulations, de la durée du
valeur permet de montrer la couverture des séjour et du problème des groupes. L’encadré
recettes des chambres vendues du reste de ci-après présente une expérience d’applica-
la capacité. Le raisonnement du YM n’est tion du YM, ses objectifs et les concepts asso-
pas réduit à l’appréciation du prix de vente ciés à sa mise en œuvre.
moyen ni du chiffre d’affaires réalisé, il
couvre aussi un calcul de rentabilité global 3. Problématique du YM
relatif à la totalité de la capacité. La gestion Dans une perspective YM, la performance
dynamique des réservations, la prévision et organisationnelle est centrale. Elle s’obtient
l’étude de l’historique du comportement en travaillant les compétences organisation-
des clients représentent d’autres objectifs nelles et individuelles. La recherche de ren-
attendus du YM. Le système de prévision tabilité est un souci central de profitabilité
permet de faire un diagnostic des événe- des entreprises de service. Vu les charges
ments critiques sur lesquels il faut agir en énormes d’investissements engagés par ces
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Avant l’ouverture du Royal Plaza en 2004, nous avons défini la politique de pricing. La
conjoncture économique internationale de l’après 11 septembre, le Sras et les conflits armés
dans le monde ne favorisaient pas l’activité touristique ni le développement de la clientèle
d’affaires. Nous avons choisi de pratiquer un pricing incisif de pénétration du marché et de
lancer l’établissement au moyen de prix d’appel nous positionnant de manière ultra compé-
titive par rapport à nos concurrents directs et aux destinations internationales travaillant sur
les mêmes segments de clientèle que ceux que nous souhaitions capter. Il aurait sans doute
été plus intéressant pour le prix moyen de privilégier une tarification élevée, tout en valori-
sant le produit et ses prestations haut de gamme, mais nous avons pensé avant tout à faire
connaître l’établissement et à rentabiliser sa première année d’exploitation en nous assurant
un volume d’occupation permettant un RevPAR suffisant pour maintenir la qualité, la renta-
bilité et le développement commercial de l’établissement. Il est probable que notre stratégie
de pricing aurait été différente si l’établissement avait ouvert ses portes en 2000/2001 ou
même l’année prochaine en 2007.
Nous avons choisi de travailler sur les bases d’une tarification différenciée, par segments de
clientèle que nous avons définies en regroupant des familles de clients ayant des niveaux
tarifaires et des comportements d’achat similaires. La tarification a également été différen-
ciée en fonction de classes de chambres et de périodes. Nous avons ainsi créé une modula-
tion tarifaire entre les classes de chambre standard et supérieure et les tarifs haute et basse
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MÉTHODOLOGIE DE TRAVAIL
L’objectif de cette recherche est d’explorer l’orientation YM. Étant donné qu’il s’agit d’un
concept en cours de construction et la non existence d’études antérieures relatives à ses
déterminants, une recherche exploratoire de nature qualitative semble être appropriée. Il a été
intéressant de procéder en deux étapes, d’abord, consulter et analyser les propos des spécia-
listes en YM dans un forum spécialisé et ciblé, puis, réaliser des entretiens individuels en
profondeurs avec les yield managers.
Les méthodes d’analyse des forums spécialisés et ciblés font partie de l’évolution des études
qualitatives en marketing. Ces forums de qualité échangent des messages textuels asyn-
chrones et utilisent des environnements technologiques afin de soutenir un travail de
recherche, de retrouver une collaboration et de former un apprentissage des expériences des
spécialistes.
L’avantage principal de la méthode d’analyse des forums spécialisés et ciblés est la trace des
questions et des réponses. Elle présente une source d’aide pour les chercheurs dans toutes les
spécialités (Light et Light, 1999). Le recours à cette méthode s’explique aussi par la répli-
cabilité permettant de garantir la validité des analyses (Henri et Charlier, 2005). Nous avons
choisi de consulter le forum spécialisé en YM développé par le bureau « Revenue Develop-
ment Consultants ». Étant spécialisé et ciblé, ce forum présente des réponses structurées et
très riches en informations pratiques relatives au YM.
On a eu l’occasion de rencontrer des yield managers à l’échelle internationale et de consul-
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établissements qui utilisent des automa- cadré ci-après présente l’avis d’un Yield
tismes sans tenir compte de l’aspect cultu- Manager d’une chaîne hôtelière par rapport
rel perdent beaucoup lorsqu’ils pensent à l’acquisition du RMS (Revenue Manage-
qu’il suffit d’appuyer sur un bouton. L’en- ment System).
74 Revue française de gestion – N° 207/2010
« … Nous n’envisageons pas à l’heure actuelle l’acquisition d’un RMS (Revenue Manage-
ment System – logiciel de Yield Management informatisé) et ceci pour plusieurs raisons. Tout
d’abord, le coût de tels systèmes est important et nous préférons consacrer en priorité nos
budgets au développement physique de notre produit (création de la classe de chambre
deluxe/nouveaux services et prestations pour la clientèle d’affaires/développement du bud-
get commercial/mise en place d’outils de fidélisation client, etc.). Ensuite, nous avons,
depuis l’ouverture de l’hôtel, mis en place une responsable et des procédures nous permet-
tant de pratiquer le Yield Management de manière manuelle, sans passer par les déforma-
tions que peuvent générer un RMS, tant au niveau de la segmentation que des prix. Enfin, le
Yield Management étant avant tout une méthode de gestion des capacités/prix, qui s’inscrit
dans une démarche commerciale et marketing tout en nécessitant une étroite collaboration
inter-service, nous avons choisi de privilégier le facteur humain, la réflexion et l’analyse,
plutôt que des solutions informatiques trop rigides ou automatisées. »
Le succès de tels projets est généralement tation de la tarification au client en lui pro-
lié à la capacité d’intégrer une nouvelle curant une offre ciblée qui tient compte du
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tudes et les valeurs du personnel travaillant tionnelle dans toute la démarche YM. Le
dans une même organisation. L’implanta- personnel en contact avec les clients est
tion de ces changements dans l’organisation incité à adopter un comportement qui
interne des entreprises produit effective- reflète la culture prescrite par la structure
ment des pratiques nécessaires à la création interne à l’entreprise. Une telle culture se
d’une valeur spécifique perçue par la clien- situe dans un échange actif sur le long
tèle et réalise ainsi une performance conti- terme visant à rompre avec la démarche
nue de l’entreprise. standard et mettre en valeur des dimensions
La création de la valeur se manifeste à trois nouvelles d’échange en relation avec la
niveaux de la démarche du YM à savoir lors continuité et le fonctionnement en temps
du recueil de l’information et l’analyse de réel.
la demande (système d’information), de La culture YM prône en fait une philosophie
l’intégration des données recueillies et leur d’actions dynamiques de conduite de chan-
mise en forme exploitable et de la prise des gement faisant de la satisfaction et du main-
décisions opérationnelles et stratégiques et tien des clients l’objet souverain de l’activité
de leur contrôle (système de décision) (voir de l’entreprise. Cette généralisation contri-
la figure 5). bue à la définition des règles et des conven-
La réussite de la stratégie de l’entreprise tions de prise de décision individuelle et col-
dépend de la mise en place de l’idée rela- lective, favorise des interactions sociales et,
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des clients est la détermination, à partir des pouvons alors mesurer objectivement si le
données stockées, leur valeur économique client est à privilégier, qu’il soit fidèle ou
et leur contribution à la marge bénéficiaire. pas. Nous analysons de cette manière les
Le calcul du poids du client peut se faire segments de clients auxquels nous pou-
de manière annuelle selon la fréquenta- vons porter une attention particulière et
tion, la consommation, le tarif, etc. Nous des efforts de fidélisation.
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