Comprendre Par La Sociologie D Intervention Bernardeau
Comprendre Par La Sociologie D Intervention Bernardeau
Comprendre Par La Sociologie D Intervention Bernardeau
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Denis Bernardeau Moreau
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Du même auteur :
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A Valérie et Marie-Paule
Pour leurs lectures attentionnées.
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REMERCIEMENTS
1
Institut national du sport, de l’expertise et de la performance.
11
sociologie à Perpignan et Bertrand Ravon, Professeur de sociologie
à l’université de Lyon 2. Je remercie aussi tous les acteurs,
managers, moniteurs, bénévoles, élus et salariés, qui m’ont permis
d’avancer dans ma démarche intellectuelle. Mes remerciements
vont enfin à tous ceux qui, par les entrées qu’ils m’ont autorisées,
les soutiens qu’ils m’ont apportés, les interviews et conseils qu’ils
m’ont accordés, ont considérablement facilité mes travaux et guidé
mes investigations. J’espère qu’ils pourront trouver, dans cet
ouvrage, quelque utilité pour mieux vivre leur quotidien au sein de
leur organisation professionnelle publique ou privée.
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PREFACE
2
J’entends déjà les cris d’orfraie de quelques universitaires au parcours
académique classique tout entier conduit par et dans l’Université « On ne
compte pas la qualité d’une recherche ou d’un chercheur aux nombres de
côtes qu’il se sera cassées sur le terrain… ». Certes ! Pour autant, je crois que
pour s’employer à décrire certaines activités, et notamment dans le domaine
du sport, il est sans doute préférable d’avoir déjà ressenti physiquement,
émotionnellement ce que sont des longs et répétitifs entraînements, la pression
d’une compétition, ce que suppose un record, ce que signifie un collectif de
jeu… Sans prémunir contre tout, ce genre d’expériences permet probablement
d’éviter quelques doctes considérations sur un objet n’ayant jamais été
éprouvé en tant que sujet.
14
tennis, de hand-ball, ou bien encore des instances fédérales de
l’équitation, l’auteur nous montre que derrière les façades du
ludique, sous les dorures du succès obtenu en compétition,
enfouis sous les mouvements visibles de la généreuse
coopération sportive, ou encore sous les vernis de « l’école de
vie » que constitue le sport, surgissent des jeux, des stratégies,
des situations dont la complexité et le caractère tortueux n’ont
rien à envier aux formes les plus sinueuses qu’il est commun de
rencontrer dans les milieux ordinairement marqués par
l’importance du profit, de la concurrence, en un mot du marché.
Le ludique que recèle le jeu sportif ne fait en rien disparaître le
stratégique qui marque toutes formes de relations, seraient-elles
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sportives.
Pour ce qui est du second niveau qu’appréhende l’auteur, à
savoir la question associative qui fournit le cadre et les supports
les plus fréquents des activités sportives, l’auteur nous montre,
en appui sur les travaux classiques de la sociologie des
associations, que développe par exemple Jean Louis Laville,
combien elle relève à la fois de problématiques très spécifiques
et en même temps combien elle peut être rattachée à la réflexion
générale et ordinaire des organisations. Au plan des dimensions
très spécifiques j’ai par exemple été frappé de constater
comment le milieu associatif sportif constituait un indispensable
relais des politiques des collectivités territoriales et comment au
bout du compte, les politiques publiques territoriales utilisaient
fortement et prenaient durablement appui sur ce « secteur
alternatif » qu’est le milieu associatif. Instrumentalisation via
une para-municipalisation ou voie de développement privatif
des politiques publiques ? A la lecture du texte cette question se
pose. Parallèlement, D. Bernardeau Moreau nous montre que la
structure juridique associative qui sert d’enveloppe aux activités
sportives, pour différente qu’elle soit, dans ses formes, des
contours juridiques ordinaires que revêtent les organisations
productives classiques dont la vocation est d’abord la
profitabilité, celle-ci n’en reste pas moins le théâtre de jeux et
de régulations qui puisent aux mêmes sources que ceux et celles
qui se rencontrent dans n’importe quelle entité
organisationnelle : pouvoir, symboles, rituels, stratégies… .
15
Le troisième niveau qu’approche l’auteur, celui de la sociologie
des organisations, est central dans son travail. L’option
théorique qu’il retient est celle que nous avions désignée, il y
déjà 20 ans avec mes collègues Amblard, Bernoux et Livian,
sous le vocable de sociologie des logiques d’action. Cette
orientation, devenue assez commune depuis, consiste à attacher
entre eux des modèles théoriques, qui se pensent généralement
dans des exclusions réciproques, non par goût pour l’éclectisme
mais bien plutôt par conviction qu’à une prétendue pureté
théorique, définie par des axiomes pensés comme des
fondements à mobiliser et à respecter, il faut préférer un
bricolage métisse. Celui-ci n’a pas pour souci d’afficher des
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« Il ne s’agit pas de faire de la philosophie, mais d’être
philosophe : quelle absurdité que de méditer sur le bien et le
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E. Morin, La voie
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INTRODUCTION. UNE QUESTION DE POSTURE
3
Notons également la classification proposée par Jean Dubost en fonction de
la sensibilité du sociologue. Selon que le sociologue est plutôt sensible à la
recherche, il tend à adopter une posture d’indépendance en donnant la priorité
à la méthode. S’il est sensible aux acteurs, sa position est davantage celle du
tiers visant à répondre en priorité aux problèmes internes. Si sa sensibilité va
aux décideurs, il se fait opérateur soucieux de respecter le cahier des charges
des commanditaires. Enfin, si le sociologue est davantage sensible au système,
il se fait critique en donnant priorité à l’action militante (J. Dubost, 2006,
p.146).
21
définition que propose Pierre Bourdieu4, la finalité de la
sociologie n’est pas tant de servir à quelque chose ou à
quelqu’un. Elle est simplement de comprendre le monde social5.
Il s’agit, pour le sociologue attaché à la neutralité axiologique6,
d’établir une rupture avec le sens commun (doxa)7 et de se
démarquer du langage ordinaire et des discours spontanés.
Notons toutefois que Pierre Bourdieu reviendra, vers la fin de sa
vie, sur cette prise de position. Notamment dans « La misère du
monde » (ouvrage publié en 1993), sa volonté « d’aller voir les
choses en personne et de près » (1993, p.337) se traduira par
une succession d’entretiens faisant une large place à la parole
des personnes souffrantes. Fort de sa capacité de distanciation
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Selon l’enquête conduite par Odile Piriou auprès de jeunes diplômés de
sociologie, Pierre Bourdieu est l’auteur le plus cité quand il s’agit de définir le
métier de sociologue (O. Piriou, 1999, p.103).
5
Cette vision très spinoziste consiste au fond à ne rien chercher d’autre que la
compréhension du monde. « Tout ce à quoi nous nous efforçons selon la
raison n’est rien d’autre que comprendre ; et l’esprit en tant qu’il se sert de la
raison, ne juge pas qu’autre chose lui soit utile, sinon ce qui le conduit à
comprendre » (B. Spinoza, 1993, p.290).
6
Pour Weber, le scientifique doit s’astreindre à une vigilance épistémologique
constante afin de toujours faire la distinction entre les jugements de faits et les
jugements de valeur, considérant que « chaque fois qu’un homme de science
fait intervenir son propre jugement de valeur, il n’y a plus compréhension
intégrale des faits » (Weber, 1963, p.104).
7
Notons que cette rupture, dans l’approche sociologique d’intervention, est à
nuancer dans la mesure où le sens commun est considéré comme révélateur de
sens et porteur de connaissances. Je reviendrai sur ce point plus loin.
22
les acteurs à mieux comprendre leurs actions8. Il est un praticien
ayant acquis une très bonne maîtrise des outils et connaissances
sociologiques et psychosociologiques. Le sociologue intervient
comme « révélateur » des difficultés relationnelles entre les
acteurs et comme « animateur » des moyens d’y remédier
(N. Alter in M. Legrand, J.-F. Guillaume et D. Vrancken, 1995,
p.143-144)9. C’est là une conception de l’utilité de la sociologie
qui « officialise une hybridation entre des savoirs théoriques
sur la société et leur mise en application sur des problèmes
concrets » (M. Uhalde, 2001, p.463). Pour d’autres enfin
(A. Caillé, R. Lourau, M. Tripier), la figure du sociologue est
celle du militant engagé dans la défense d’une cause au nom de
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8
Pour différencier ces deux postures sociologiques, certains ont pu proposer
de séparer le travail de recherche de l’étude professionnelle.
9
Ces deux rôles conjugués de révélateur et d’animateur autorisent, explique
l’auteur, une « élévation de la conscience supérieure » par « la permanence
d’un espace de réflexion à caractère sociologique (N. Alter, 1995, p.143-
144).
23
se nourrit pour décrire le métier de sociologue, deux registres
sont souvent mis en opposition. Les sociologues académiques
exerceraient dans le champ de la recherche publique (université,
CNRS, INED etc.), tandis que les sociologues praticiens
travailleraient en entreprise. Même si des tentatives réelles de
rapprochement ont été proposées notamment par Renaud
Sainsaulieu et Monique Legrand10), les clivages perdurent. A la
différence du sociologue académique11 qui, lui, « fait référence
à la communauté savante » (O. Piriou, 2006, p.15) et exerce
dans le milieu de la recherche, le praticien de la sociologie12 est
« le diplômé de haut niveau en sociologie qui utilise les
connaissances de sociologie, en dehors de l’université et de la
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Renaud Sainsaulieu évoque une « conception élargie du métier de
sociologue » (1995, p.24). Monique Legrand et al. parlent
« d’interfécondation » pour caractériser le rapprochement entre science et
intervention (1995, p.422).
11
Pour Odile Piriou, le sociologue académique est classiquement un
« scientifique pur » qui, contrairement au converti disposant d’expériences
universitaires mais aussi professionnelles multiples, n’a validé que des études
supérieures en sociologie.
12
Remarquons, selon Odile Piriou (1999), que 10% seulement des répondants
se réclament de cette conception opérationnelle. Pour ceux-ci, le sociologue
qu’ils citent le plus est Michel Crozier (l’auteur explique ce choix par le fait
que les relations entre acteurs stratégiques et jeux de pouvoirs sont souvent les
aspects les plus faciles à mesurer sur le terrain).
13
Pour distinguer ces deux sociologies, Hess compare les deux ouvrages de
Montesquieu : « L’esprit des lois » qui relève, écrit-il, de la « sociologie
abstraite » et « Les lettres persanes » qu’il attribue à une « sociologie de
terrain » (R. Hess, 1981, p.59-60).
14
Remarquons, à ce propos, que Dominique Felder distingue deux types de
praxis : La « praxis de projet » signifie que le sociologue choisit librement et
en toute indépendance son terrain d’analyse. Dans la « praxis liée à la
demande », le sociologue est sollicité directement par l’organisation. Pour
l’auteur, ces deux praxis distinguent respectivement le sociologue académique
et le sociologue professionnel (2011, p.47-48).
24
l’universitaire tendait à incarner la culture scientifique du
chercheur vigoureusement attaché à son indépendance et
analysant les pratiques quotidiennes des individus en société,
tandis que le praticien était l’expert15 et l’homme de terrain
utilisant à des fins professionnelles les outils de mesure de
l’activité sociale. Or, depuis une bonne décennie, l’université
connaît une évolution importante qui l’oblige à reconsidérer
cette dichotomie.
Certes, l’institution universitaire n’est pas en crise mais elle
est en pleine réflexion sur son utilité et sa capacité à répondre
aux attentes de ses publics dont les effectifs, en progression
pourtant régulière depuis les évènements de 68, connaissent une
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15
L’expert est celui qui maîtrise un savoir spécifique dans un secteur
professionnel. Cela étant, ce savoir est l’objet de nombreuses critiques
aujourd’hui. Ou bien, l’expert est jugé trop spécialisé et donc incapable de
restituer la réalité d’une situation globale. Ou bien, il est instrumentalisé par le
pouvoir politique qui s’appuie sur des expertises pour justifier son action
politique. Quand un expert analyse une situation, souligne Enriquez (2002),
c’est toujours en fonction de son propre prisme. A l’action d’expertise du
sociologue, mieux vaut lui préférer celle de conseil.
25
capacité à optimiser les chances d’insertion professionnelle de
ses étudiants. Comme le rappellent Beaud et al., la
professionnalisation des cursus universitaires est inévitable. Elle
est « une obligation sociale pour une université de masse »
(2010, p.183). Mais elle doit se faire en s’appuyant sur son
capital intellectuel, c’est-à-dire sur ses enseignants chercheurs.
S’il s’agit de se préserver d’un « repli académique marqué par
l’organisation corporatiste des disciplines » (Ibid.), il s’agit
aussi de ne pas tomber dans une logique de marchandisation
contraire aux valeurs de service public. Certes, « les
préoccupations des milieux universitaires, note Renaud
Sainsaulieu, restent centrées sur la transmission d’une
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16
S. Faure, C. Soulié et M. Millet, Enquête exploratoire sur le travail des
enseignants chercheurs. Vers un bouleversement de la table des valeurs
académiques, rapport d’enquête 2005. Les auteurs ont interrogé, par voie de
questionnaires auto-administrés, 507 enseignants-chercheurs de toutes les
disciplines.
17
Le nombre de DESS a fortement augmenté entre les années 80 et 90 passant
d’une dizaine à plus de cinquante dix ans plus tard (M. Legrand, 2001, p.84).
26
divisant les enseignants chercheurs, disciplines, établissements,
dans leurs visions et surtout leurs manières effectives de
travailler » (S. Faure, C. Soulié et M. Millet, 2005, p.44).
18
Sur le site de l’AFS, on peut lire à propos des formations en sciences
sociales : « Depuis les années 1990, un large processus de réforme conduit à
développer les Masters professionnels dans le domaine du développement
(urbain, socioéconomique), des politiques (publiques, culturelles, de
migration, d’insertion…), du travail et des organisations, des GRH,
d’ingénierie, de la médiation, de l’évaluation, de la sécurité et des risques, de
la concertation, etc. Ceux-ci forment aujourd’hui la majorité des diplômes de
sociologie (70%) » (Feuille d’infos rapides de l’AFS du 18/06/2011, données
extraites des enquêtes « génération 2004 » et « génération 2007 » du
CEREQ).
19
D’après le rapport précédemment cité, on est passé entre 1992 et 2002 de
400 à 3134 postes de PAST (les profils correspondants de ces professeurs
27
Le « capitalisme scientifique » selon Bruno Latour
20
Le profane est celui qui n’est pas initié, celui qui n’appartient pas à la
sphère du savoir, c’est-à-dire aux institutions dûment consacrées.
29
de son âme » et de son indépendance d’esprit dans la dilution
du projet scientifique ?
30
2. Pour une sociologie utile à l’acteur
21
Durkheim n’écrivait-il pas que la sociologie doit être une « science de
réalités » ? (1999a, p.15).
22
Pour l’auteur, c’est dans la dispute et l’épreuve que l’acteur s’éprouve et
trouve les moyens de construire les compromis nécessaires à sa vie collective.
31
monde déjà là » (Ibid., p.48). Pour ma part, j’ai très tôt ressenti
cette nécessité de recourir à l’immersion en situation pour
expliquer et légitimer mon travail de sociologue. Je percevais
cette nécessité comme porteuse de sens mais aussi, d’une
certaine manière, comme le moyen de maintenir un ancrage
durable dans le réel.
Quand Norbert Alter et Christian Dubonnet (1994) ou Eric
Delavallée et Pierre Morin (2000) choisissent de traiter des
rapports entre le sociologue et le manager, quand Alain
Touraine (1984) préconise le retour de l’acteur, n’est-ce pas
parce qu’ils considèrent comme légitime cette proximité entre
le chercheur et l’acteur de terrain, tous deux s’enrichissant
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23
Raymond Boudon note que si certaines disciplines scientifiques, telles les
mathématiques, restent orientées vers un public averti, les sciences sociales en
général ont vocation à s’ouvrir à un large public.
33
concept et la pratique, il n’y a pas deux logiques inconciliables.
Le sociologue peut être un scientifique et aussi un praticien. Il
doit savoir adopter une démarche empirique en s’immergeant
régulièrement dans le milieu qu’il étudie, pour répondre,
comme le rappelle Robert Castel, à la demande sociale
« entendue comme le système d’attentes de la société à l’égard
des problèmes quotidiens qui la sollicitent aujourd’hui » (2004,
p.70)24. Ce lien entre sociologie et demande sociale est essentiel
pour l’avenir de la sociologie. Plus ce lien sera fort, note Claude
Dubar, plus la sociologie sera reconnue et efficace (2006, p.11).
Bien entendu, la volonté de répondre à la demande sociale ne
doit pas pour autant signifier l’absence d’un regard distancié et
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24
Répondre à la demande sociale ne veut pas dire, précisons-le, faire le jeu de
la demande sociale. La nuance a ici toute son importance.
25
Notons toutefois que je ne cherche pas à opposer l’induction et la déduction
car les deux approches vont souvent de pair. Inscrite en réaction à une
philosophie spéculative et positiviste, l’induction a été trop longtemps
opposée à la déduction, comme s’il s’agissait de deux modes et de deux
méthodes de raisonnement nécessairement dissociés, radicalement différents.
En fait, induction et déduction sont comme « deux phases coopératives des
34
appel aux modèles configurationnels de Mintzberg, tantôt c’est
l’analyse stratégique qui apparaît la plus appropriée. Ainsi,
successivement et parfois simultanément, les modèles wébérien,
reynaldien, crozérien ou encore conventionnaliste sont
convoqués. Sur un plan empirique, il m’est impossible d’éviter
ce mélange théorique. Au choix d’une seule méthode, j’opte
naturellement pour une posture pluri-méthodologique. Ce
choix, je l’assume : « l’homme d’un seul livre est un esclave »
dit un proverbe. Ma réticence, quant à la tendance à ne recourir
qu’à un seul auteur, une seule théorie, une seule école de
pensée, une seule méthode, s’est renforcée avec le temps. Plus
que jamais, ce n’est pas une mais plusieurs ressources
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mêmes opérations ultimes » (J. Dewey, 1993, p.523). Comme l’écrit aussi
Merton, théorie et pratique réagissent l’une sur l’autre (1957).
26
Le sujet de la transdisciplinarité n’est pas récent. Dans les années 80, des
auteurs comme Hess (1981) préconisent déjà le rapprochement des sciences
en mettant côte à côte la sociologie d’intervention, la psychanalyse, la
psychosociologie ou encore l’ethnologie. On peut, avec Dominique Vinck,
distinguer la pluridisciplinarité, où il s'agit simplement de juxtaposer les
35
métisse »27 pour produire des connaissances devant être
mobilisables par tous les acteurs en situation. Elle vise le
« pluralisme théorique » et le « non-enfermement » dans un
modèle particulier qui relèverait davantage d’une approche
purement mécanique (Pichault, 2006). Elle souligne l’intérêt
d’une interaction chercheurs/acteurs porteuse d’enrichissement
mutuel. Elle cultive également un intérêt marqué pour une
approche maïeutique envers des acteurs nécessairement
porteurs de savoirs à découvrir et désireux d’exposer leurs
propres « théories spontanées » (F. Dubet, 1994) sur les
situations qu’ils vivent.
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« Nous sommes nés pour le bien commun. La société est
l'image exacte d'une voûte qui croulerait avec toutes ses
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PREMIERE PARTIE. LA SOCIOLOGIE DES
ORGANISATIONS ASSOCIATIVES, SPORTIVES ET DE
LOISIRS A L’EPREUVE DES FAITS
29
Merton évoque le « serendipity » pour décrire la découverte fortuite et non
prévue d’un concept explicatif à partir d’une recherche empirique. La
représentation du dirigeant bénévole professionnel s’est soudainement
imposée à moi comme un critère explicatif majeur des tensions agitant les
grandes organisations associatives.
30
Lors d’un entretien avec un ancien dirigeant de la fédération équestre, celui-
ci m’avait déclaré à propos de ces deux chefs d’entreprise : « Comment
voulez-vous qu’un chef d’entreprise s’entende avec un chef d’écurie ? ». C’est
là mettre côte à côte et à égalité deux catégories d’individus n’ayant pas le
même statut ni la même position dans l’espace social.
45
champ associatif, mobilise des compétences acquises dans son
milieu professionnel31. A travers ce phénomène, qui sera décrit
plus en détail dans le chapitre 3 consacré à l’analyse
stratégique, je voulais montrer comment une génération de
dirigeants bénévoles professionnalisés prenait progressivement
le pouvoir dans les fédérations dirigeantes s’érigeant pourtant
comme la « pierre angulaire de l’ordre sportif » (B. Barbusse,
2009). Dans ma thèse, je soulignais ainsi la particularité de ces
dirigeants bénévoles élus à des postes importants dans les
structures associatives tout en étant ou ayant été en parallèle des
professionnels dans ces mêmes secteurs d’activités. « Selon le
milieu où ils se trouvent, ils sont tantôt des bénévoles, tantôt des
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31
On pensera aussi aux travaux de Maud Simonet qui, dans son
rapprochement entre bénévolat et travail, montre qu’en certaines
circonstances, l’engagement bénévole constitue une composante du travail
(M. Simonet, 2010).
32
Par cette expression employée à l’époque, il s’agissait de dénoncer un
pseudo amateurisme dans la mesure où les joueurs, certes ne touchaient pas de
salaires, mais percevaient des primes et des défraiements très conséquents.
L’amateurisme était de façade.
33
Y. Matho et R. Janvier (2006) ont identifié trois figures de dirigeants
associatifs : la figure paternaliste, la figure charismatique et la figure
managériale. Ici, c’est bien la dernière figure qui tend à devenir prédominante.
46
supplémentaire dans la professionnalisation des organisations
associatives34.
La nécessité de clarifier mon sujet justifiait que soient
rapidement différenciés les acteurs en présence. Pour cela, deux
critères distinctifs étaient privilégiés : Tout d’abord, les
rémunérations distinguaient les bénévoles des salariés dans la
mesure où seuls les seconds en percevaient (ce qui n’exclut pas
que le bénévole bénéficie d’une rétribution symbolique ou
sociale). Je considérais d’autre part que le niveau de
compétence et d’expertise distinguait les amateurs des
professionnels.
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34
Remarquons qu’à ce stade de mes travaux, je tendais à lire le processus de
professionnalisation comme une « succession d’étapes ordonnées » dont le
risque, souligne à juste titre Valérie Boussard (2008, p.180) était de
m’enfermer dans un raisonnement trop mécanique. Cela explique mon choix,
par la suite, pour une définition plus ouverte de la professionnalisation.
35
Pour Robert Dahl, un système politique est « n’importe quel ensemble
constant de rapports humains qui impliquent, dans une mesure significative,
des relations de pouvoir, de gouvernement ou d’autorité » (R. Dahl, 1970,
p.28).
36
En référence au Baron Pierre De Coubertin, rénovateur des jeux olympiques
modernes.
47
Peu à peu, l’étude des bénévoles allait m’amener
légitimement à m’intéresser aux autres acteurs associatifs et aux
différentes organisations sportives et de loisirs dans lesquelles
ils évoluaient.
37
Réseau « Sociologie de l'engagement, de la vie associative et du
bénévolat ».
49
l’acteur, nous avons vu précédemment comment le bénévole
tendait à mobiliser ses compétences professionnelles pour gérer
son association38. Mes investigations portèrent par la suite sur
les salariés dont le niveau de formation et la culture
managériale remodelaient le paysage sportif associatif. Dotés de
statuts conventionnés et développant de réelles compétences
managériales, ces salariés étaient des joueurs professionnels,
des entraîneurs, mais aussi des éducateurs sportifs, des
managers territoriaux ou encore des maîtres nageurs sauveteurs.
Au niveau de l’organisation, des recherches menées sur les
diverses formes instituées à vocation sportive (si l’organisation
permet la coordination des actions collectives, l’institution
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38
Comme le soulignent très justement Philippe Avare et Samuel Sponem, la
professionnalisation des organisations associatives n’est pas une simple
transposition des formes de gestion propres au monde des entreprises. Il
s’opère en réalité une certaine « acclimatation » du processus en raison des
particularités du milieu associatif (2008, p.114). L’émergence des bénévoles
professionnels en est un exemple fort.
50
fastes de grandes publications suivent des moments de
« creux » qui interpellent le chercheur en quête de sens et
parfois d’inspiration. Sentant qu’il a épuisé temporairement son
sujet, il se met à prospecter d’autres pistes, d’autres sujets
d’investigation. Aux termes de cette période qui s’est étalée de
2003 à 2010 et a été consacrée pour l’essentiel à la
professionnalisation des organisations sportives et associatives,
je sentais qu’il me fallait renouveler mes thèmes de recherche.
Peu à peu, mes questionnements allaient porter sur les
apports concrets de la sociologie des organisations et les
conditions de son renouvellement. Mais, au préalable, un petit
détour par la sociologie du travail et des professions s’impose
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51
Chapitre 2. A propos de la professionnalisation et des
compétences : Ce que nous dit la sociologie du travail
52
compléter mes travaux antérieurs et préparer ceux qui seront
exposés par la suite.
39
C’est là d’ailleurs le sujet de leur ouvrage publié en 2010. Le
professionnalisme relève d’une double injonction ; celle des professionnels
eux-mêmes réclamant une meilleure reconnaissance de leur « art » et de leur
expertise. Mais cette injonction au professionnalisme est aussi le fait des
acteurs extérieurs avec lesquels les travailleurs interagissent dans
l’accomplissement de leurs activités. Cette injonction est dialogique mais
aussi dualiste car elle commande aux travailleurs, responsables de leurs actes,
d’être toujours plus performants (2010, p.17).
53
d’intégration. Bourdoncle (2000) identifie cinq objets sur
lesquels s’applique la professionnalisation : De bénévole,
l’activité devient rémunérée. Le groupe professionnel définit les
conditions d’accès à la profession. Les savoirs deviennent
organisés selon des critères d’efficacité et de légitimité. Les
personnes acquièrent ces savoirs scientifiques et s’approprient
l’identité professionnelle sous-jacente. Enfin, la formation est
construite, ordonnée selon un programme prédéfini et
strictement suivi. Pour Didier Demazière (2009), la
professionnalisation relève de plusieurs catégories d’analyse.
Celle culturelle ou identitaire est mobilisée par les salariés,
individuellement ou collectivement (voir encadré). A travers
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54
La catégorie identitaire de la professionnalisation :
L’exemple des agents de la filière sportive territoriale (enquête
2009) (1)
Contexte général
Avec la décentralisation et le développement du sport local, les
agents des services territoriaux voient leurs secteurs
d’intervention s’élargir considérablement. De nombreux
travaux soulignent la rationalisation et l’orientation gestionnaire
des services sportifs territoriaux. A travers cette réflexion, ce
sont surtout les identités professionnelles des agents que j’ai
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Dispositif méthodologique
Pour éclairer ma réflexion, je me suis appuyé sur une
quarantaine d’entretiens effectués auprès d’agents de la filière
sportive territoriale. Des agents (conseillers et éducateurs de
catégories A et B) de communes et de départements de tailles
diverses (24 au total) et des responsables du CNFPT ont été
interrogés entre février 2008 et janvier 2009. L’échantillon a été
constitué par réseau jusqu’à atteindre son point de saturation au-
delà duquel aucune information nouvelle n’est recueillie.
55
questionnements et rendre compte de ces processus de
(re)construction identitaire des agents territoriaux, j’ai choisi de
mobiliser le modèle de l’identité proposé par Claude Dubar
(2000). « L’identité pour soi » est celle (interne) revendiquée
par l’individu lui-même. « L’identité pour autrui » est celle
(externe) attribuée par les autres. Celle qui a retenu mon
attention est essentiellement liée au regard que l’agent porte sur
lui-même, sur son métier et sur son utilité sociale. Pour Dubar,
l’identité relève d’un double processus de généralisation et de
différenciation (2000, p.3). Pour l’individu, c’est à la fois une
recherche de conformité avec un groupe et une recherche de
différence avec les autres. Me référant à ces travaux mais aussi
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Principaux résultats
Mes travaux confirment qu’une identité professionnelle de
manager territorial a émergé à l’échelle des territoires. Une
partie de ces agents revendique un rôle d’acteurs professionnels
responsables et compétents dont les missions sont de manager
le sport local mais aussi de conseiller les élus dans un espace
territorial plus complexe qu’auparavant. Par ces processus de
construction identitaire où identité pour autrui et identité pour
soi se mêlent, ce sont ainsi des profils d’agents différents qui se
dessinent. Deux trajectoires sportives et scolaires s’affirment,
plutôt technicienne pour certains, davantage managériale pour
d’autres. L’identité technicienne correspond à des agents
souvent jeunes et titulaires pour l’essentiel de diplômes
technico-sportifs (brevets fédéraux, brevets d’Etat). Les agents
se réclamant d’une identité managériale sont plus âgés et
diplômés de l’université (bac + 4 et plus). Entre ces deux
catégories d’agents, on voit se dessiner deux manières de vivre
son identité professionnelle au service du territoire. L’identité
du technicien est en prise directe avec le terrain mobilisant le
registre pédagogique et sécuritaire. Le langage se veut concret,
simple parce que l’agent « n’est pas dans un bureau » mais
nécessairement proche de son public. « On doit être des bons
pédagogues car il faut être capable de s’adapter à tous les
56
publics. Donc, on doit être très polyvalent. On a besoin de
personnes qui savent écrire un projet pédagogique, qui savent
parler en public. (…) Entre l’élu et le technicien, il faut trouver
le juste équilibre » (Philippe P). Pour le gestionnaire, son métier
consiste à gérer des équipements, conseiller les élus et garantir
une bonne maîtrise des coûts dans l’intérêt d’un service public
efficace et responsable. « Les collectivités ont dû se structurer
et faire appel à des compétences autres notamment
managériales. Elles ont été obligées de planifier des critères et
des degrés d’exigences qui ont permis justement l’évolution de
cette filière. Elles ont eu besoin de compétences autres que
celles de terrain pour encadrer les services des sports et piloter
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
2. Qualification et compétence
De la qualification à la compétence
40
On emploie souvent, dans le monde du management sensible, il est vrai,
aux effets de mode, le terme d’ « empowerment ». Cette méthode managériale
préconise la décentralisation et le transfert de la prise de décision du manager
vers ses subordonnés. Elle prône l’autoentrepreneuriat et l’autoréalisation qui
masquent, bien souvent, une forme non avouée de contrôle et de pression sur
le résultat. Contre toute tentative d’injonction, des auteurs tels Argyris ou Le
Goff rappellent que l’empowerment n’est pas inné ni se décrète, il s’apprend.
61
le modèle de la compétence plus individualisé, plus localisé,
plus conjoncturel. Ce modèle « ne prend sens qu’au plus près
du travail concret », notent Paradeise et Lichtenberger (2001,
p.37), préférant l’autonomie à la subordination, la confiance au
contrôle, la personnalisation à l’impersonnalité des règles. Si le
modèle de la qualification organise l’échange entre prestation et
rétribution selon des règles générales prédéfinies
(titre + ancienneté = poste et rémunération), le modèle de la
compétence base cet échange sur des règles locales, et sur une
évaluation en situation. « Ces rétributions ne s’appuient plus
sur des critères impersonnels exogènes à la situation concrète
de travail comme dans le modèle de la qualification, mais sur
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Dispositif méthodologique
62
Contexte général
Principaux résultats
63
Figure 1 : La fonction publique territoriale : Quand la compétence définit le statut
(tiré de la revue Télescope, 2011, p.184)
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
64
Si on prend l’exemple du référentiel management/encadrement
élaboré par le CNFPT, on constate que trois niveaux de
management sont identifiés. Ces niveaux confondent les filières
pour ne retenir que les compétences et les responsabilités
requises. Le management supérieur comprend les niveaux de
direction en relation directe avec les élus. Il s’agit d’un
management stratégique définissant les grandes orientations
politiques des services telles que définies par les politiques
locales. Au niveau du management intermédiaire, sont situés les
postes de direction de services fonctionnels et opérationnels,
chaque collectivité élaborant son propre organigramme. Enfin,
le management de proximité consiste à conduire et à contrôler
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
66
Au fond, la compétence devient indissociable des
représentations que chaque acteur porte sur la compétence elle-
même (Stroobants, 1993). Elle est indissociable des positions et
des histoires personnelles des individus. En fonction de leur
biographie, de leurs croyances, de leur culture, les compétences
demandées vont varier. La compétence est donc une affaire de
représentation individuelle. Son évaluation est nécessairement
aléatoire. La compétence est tout à la fois une catégorie de
pratique permettant aux salariés de mettre en mot leurs activités
et une catégorie de jugement pour le dirigeant évaluant la
qualité du travail réalisé. Au fond, c’est l’accès à un double
niveau de réflexivité (Giddens, 1994) qu’autorise le modèle de
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
67
et Pierre, 2008, p.54)41. Les auteurs voient, dans ces rapports au
travail, l’émergence d’un nouveau régime de subordination. Si
faire du sport apparaît comme la condition sine qua non
d’embauche chez Décathlon, constatent Hidri et Bohuon, il
s’agit, en fait, de privilégier la représentation associée à la
pratique plus que la pratique elle-même. L’apparence physique
doit donc être conforme aux représentations et attentes des
recruteurs mais aussi des clients. A chaque sport particulier doit
correspondre dans l’imaginaire un corps particulier. Entre les
deux, il faut une concordance. Ce qui compte, c’est de « porter
sur son corps les marques du travail sportif » (Hidri Neys et
Bohuon, 2011, p.219). In fine, le critère de recrutement porte
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41
Le « capital corpo-sportif » se présente sous un double état, incorporé
quand il mobilise les représentations collectives et individuelles, objectivé
quand il impose la possession de sésames que sont les diplômes et autres titres
sportifs (Gasparini et Pichot, 2011, p.18).
42
Sur le contexte de la délégation de service public (DSP) et le détail de cette
enquête, voir le chapitre 3 de la deuxième partie.
43
Cette étude est parue dans la revue Management international en 2012.
68
définissant le « bon » professionnel de la natation. La
collaboration entre ces deux acteurs, MNS et managers, dans le
centre aquatique est loin d’être acquise. Plusieurs éléments
contribuent à structurer un fort conflit de valeurs et de
représentations entre le travail prescrit et le travail effectif.
71
Tableau 1 : Qu’est-ce qu’un bon maître nageur ? Divergence de représentations entre MNS et manager
Le bon professionnel est un technicien qui Le bon professionnel est un salarié qui sait
sait se gérer tout seul répondre aux attentes de sa direction et de la
clientèle
72
Typologie des managers et compétences professionnelles
attendues chez les MNS
managers professionnelles des managers Attendus du métier attendues chez les MNS Extraits d’entretiens
Le manager - Bac/DESS management - Etre polyvalent et réactif - Polyvalents et motivés - « Ma fierté, c’est de voir
participatif sportif/beesan/ BE divers - Garantir le service public - Montrer qu’ils en veulent mes MNS évoluer et
- Directeurs de nombreux sites de - Conseiller les élus locaux - Avoir un esprit sportif prendre des
la société responsabilités »
- Bac/BE divers - Avoir de la rigueur - Etre professionnel et bien - Il faut savoir « aller au
Le déménageur - Sportifs de haut niveau ou - Avoir le souci de faire son travail charbon » pour « trancher
ancien parachutiste. performance - Exigeants avec eux-mêmes dans le vif »
- Directeurs de nombreux sites - Etre directif tout en étant comme avec les autres - « Je me sens proche de
notamment à l’ouverture proche de son personnel mes troupes comme à
l’armée »
74
- Bac + 3 et plus
- Salariés à l’étranger, - Curiosité et innovation - Accepter de travailler - « Dans mon
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
75
sont soit d’anciens sportifs de haut niveau connaissant
parfaitement le monde de la natation, soit un ancien militaire
parachutiste qui se dit aussi « proche de ses hommes comme à
l’armée ». Ils exigent de la rigueur et de la discipline. Ils
n’hésitent pas à « aller au charbon » chaque fois que nécessaire
pour « trancher dans le vif ». L’expérimentateur est davantage
un manager présentant une trajectoire atypique, souvent sans
rapport avec le milieu aquatique, voire sportif. Arrivé là par
hasard, il se montre curieux, innovant et intéressé par tout ce
qu’il ne connaît pas. Esprit peu conventionnel et indépendant, il
attend de ses MNS qu’ils acceptent de remettre régulièrement
en cause leur manière de travailler et se montrent à l’affût des
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
76
Ainsi, entre les compétences du manager et celles attendues
du salarié, il semble se dessiner une sorte d’homologie. Le bon
maître nageur est celui qui possède les compétences requises
telles que définies par le manager dans sa structure. Aux
exigences sportives car il s’agit d’être (ou de paraître) un bon
nageur et aux exigences sécuritaires qui supposent parfois un
rapport directif, s’ajoute une volonté du manager de privilégier
aussi et avant tout la relation et la satisfaction du client. Ces
compétences sont des constructions sociales. Les aborder
suppose de considérer un enchevêtrement d’enjeux et de
rapports de forces entre une multitude d’acteurs aux intérêts et
aux représentations bien souvent divergents. La perception des
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78
Approche microsociologique et réflexivité de l’acteur
44
Ce que Erhard Friedberg appelle l’école française de sociologie des
organisations (1993, p.97).
80
occupe une place centrale. Voie intermédiaire entre les
conceptions psychosociologiques et les conceptions
sociotechniques, cette théorie perçoit l’individu comme un
acteur stratégique et rationnel (même si cette rationalité, comme
le montrent March et Simon, reste bien souvent limitée) qui
pense et agit librement pour servir son propre intérêt. Sur un
plan plus culturel, l’approche identitaire de Renaud Sainsaulieu
(1987) décrit l’organisation comme un système social
producteur de modèles culturels internes et externes donnant
sens à l’action des hommes. Dans « la logique de l’honneur »,
Philippe D’Iribane (1989) tente de se démarquer de la logique
des intérêts développée notamment par l’analyse stratégique, en
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81
Les cadres théoriques et leur portée dans les organisations
associatives, sportives et de loisirs
Contexte général
85
nombreuses questions, beaucoup d’interlocuteurs se retranchant
derrière leur « devoir de réserve ».
Dispositif méthodologique
Principaux résultats
87
centre opérationnel est le moteur qui fait tourner l’organisation.
Reste enfin que l’ensemble de l’organisation fédérale véhicule
des valeurs culturelles. Ces valeurs sont fédératrices
lorsqu’elles sont portées par une idéologie commune à tous :
l’idéologie coubertinienne mais peuvent aussi alimenter de
nombreux conflits lorsqu’elles opposent les acteurs portés par
des idéologies et des identités divergentes, soit associatives, soit
entrepreneuriales. Ce champ idéologique particulier à chaque
fédération est lié à son histoire et « insuffle une certaine
existence à travers le squelette de sa structure » (Ibid., 1989,
p.154).
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
45
L’auteur propose en abondance des catégorisations : les coalitions internes
sont dites divisées, dominées ou passives, les coalitions externes sont
bureaucratiques, personnalisées, idéologiques, professionnelles ou politiquées
(2003, p.155 et suivantes).
88
de tennis), tirant la fédération vers une configuration résolument
professionnelle. Au bout du compte, Henry Mintzberg identifie
plusieurs forces correspondantes chacune à une forme de
configuration organisationnelle et propose un cycle de vie
présentant différents scénarios possibles d’évolution des
organisations. Conscient que ces configurations dérivées sont
des idéal-types, l’auteur explique toutefois que la plupart des
organisations présentent en réalité des formes hybrides, sorte de
mixage entre plusieurs configurations pures. Jean Nizet et
François Pichault (1995) distinguent ainsi les configurations
hybrides par juxtaposition (configurations différentes selon le
département ou le service observé dans l’organisation) et les
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46
Pour Michels (1970), toute organisation comprend des rapports de
domination où les dirigeants tendent progressivement à se couper de ceux
qu’ils dirigent pour former une oligarchie tournée sur elle-même (voir aussi
les travaux de Pareto et Mosca).
89
les tenants de l’analyse stratégique). En voulant trouver la
meilleure adéquation possible entre les « paramètres de
conceptions » organisationnels47 et les facteurs de contingence
environnementaux, en proposant des configurations du pouvoir
à partir des formes de coalitions internes et externes (2003,
p.416), l’auteur aborde successivement l’organisation par son
aspect formel (configurations, structures, rapports
hiérarchiques) mais aussi par son aspect informel quand il traite
des buts divergents et des jeux de pouvoirs entre les détenteurs
d’influence (H. Mintzberg, 2003). Une question demeure
toutefois : Ces conceptions théoriques sont-elles exploitables en
situation ?
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
47
Les paramètres de conception de l’organisation sont notamment la
spécialisation du travail, la taille des unités de travail, les systèmes de
planification et de contrôle, la centralisation/décentralisation du pouvoir de
prise de décision, l’idéologie ou encore la formation interne.
90
la coopération entre ses membres fondateurs portés par une
idéologie forte et partagée par tous. A l’état 2, l’organisation
fédérale prend la forme d’une configuration de type
bureaucratique centralisée qui augmente de volume et multiplie
ses règles de fonctionnement pour coordonner ses milliers de
clubs locaux. Dans cette phase de développement,
l’organisation devient une bureaucratie dont la force dominante
privilégie la centralisation des pouvoirs au sommet. Puis, une
progressive décentralisation aux niveaux de ses composantes
intermédiaires régionales se réalise. Les ligues régionales
(certains les appellent les « baronnies ») prennent de
l’autonomie vis-à-vis du siège fédéral au fur et à mesure que
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
48
Il est à remarquer que la conception du pouvoir chez Mintzberg est à
l’image de l’analyse stratégique, c’est-à-dire le plus souvent conflictuelle et
duelliste.
49
L’auteur identifie ainsi les jeux de l’insoumission visant à contrer l’autorité,
les jeux de la soumission et de construction des assises de pouvoir, les jeux
d’alliances (parrainage, construction d’empire), les jeux de rivalité ou encore
ceux visant à favoriser le changement.
92
Dans le champ d’investigation des organisations
associatives, sportives et de loisirs, je conclus, comme
l’ensemble des auteurs cités plus haut, à la prise de pouvoir des
salariés sur les bénévoles, des professionnels sur les amateurs,
annonçant la prédominance prochaine de l’organisation
professionnelle au détriment du modèle associatif traditionnel.
Pour autant, la lecture de ces différents cycles de vie impose un
constat : Il me semble évident que cette approche évolutionniste
ne peut suffire à restituer réellement la nature des changements
qui touchent l’ensemble des grandes associations sportives et de
loisirs. Une analyse holiste ne peut faire abstraction d’un regard
de l’intérieur. L’observation de l’organisation nécessite, de fait,
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
93
Figure 2 : Les configurations dérivées appliquées aux organisations associatives, sportives et de loisirs
Structure Configuration Configuration Configuration Configuration
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94
anticipatrices fragmentée
Pouvoirs
Force principale Centralisation Tirer tous ensemble Professionnalisation Balkanisation
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Durand ; Gasparini
Configurations
dominantes selon les
auteurs Zintz et Vailleau ; Koski et Heikala ;
Bernardeau Moreau
95
De même, Christophe Durand (1994), dans son étude des clubs
professionnels de football balançant entre autocratie et
méritocratie, ne prend que très peu en compte les acteurs, peu
interrogés sur leur club et ses changements. Ces derniers n’étant
pas convoqués pour étayer son analyse du football
professionnel, l’auteur reste à un niveau général et techniciste.
Bien que prétextant confronter « la réalité du statut des acteurs
(…) au concret de leur fonction » (p.85), Thierry Zintz (2008)
travaillant sur les fédérations sportives belges, fait également
peu cas des acteurs, qui restent transparents, rendant plus
difficilement crédibles ses conclusions, notamment sa
nomenclature des fonctions stratégiques, managériales et
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
50
Il convient toutefois de relativiser mes propos dans la mesure où leur
analyse s’appuie sur une série d’entretiens (11 présidents de fédérations, 11
secrétaires généraux et 11 dirigeants salariés). Cela étant, le peu de références
à ces derniers tend à confirmer cette vision trop surplombante du changement
dans les organisations sportives.
96
Le déterminisme structurel mintzbergien
Contexte général
Dispositif méthodologique
51
Le « gatekeeper », dont parle François Pichault (2006, p.67), était, en ce qui
me concerne, un acteur influent et politiquement marqué au sein de
l’organisation.
52
Bien souvent, il est vrai, ce sont les jeux d’opportunité qui guident le choix
du sociologue pour telle ou telle organisation. Sauf à être directement sollicité
par l’organisation, comme ce fut le cas ici, pour la société Carreras ou encore
pour les cadres territoriaux, j’ai été aussi amené à contacter moi-même les
dirigeants d’entreprises. Régulièrement, j’ai essuyé le refus de ces derniers qui
ne souhaitaient pas ma présence potentiellement perturbante (c’est le cas
notamment de l’UCPA). Je reviendrai sur ce point plus loin.
101
entretien durait en moyenne 45 minutes et était réalisé à la
fédération, par téléphone ou au domicile des personnes.
L’enquête, quant à elle, s’est déroulée durant toute l’année
2002.
Principaux résultats
102
La prise de pouvoir de la FFE par les dirigeants du Poney club
53
En effet, il existe depuis 1969 un groupement professionnel composé
d’employeurs, de personnels de l’enseignement et de cadres gestionnaires. Le
Groupement Hippique National (GHN) a pour mission de représenter les
établissements équestres, quel que soit leur statut juridique.
103
loisir les amenait à accélérer cette fusion et saisir cette
opportunité pour mieux canaliser des courants jugés dissidents.
La suite montrera que ce jeu stratégique se retournera contre
eux. Face à eux se trouvaient les dirigeants du poney dont le
poids économique, lié à un fort engouement du public, allait
contrebalancer le pouvoir équestre traditionnel. Le
développement du loisir constituait pour eux une opportunité
qu’il fallait saisir pour prendre le contrôle de la fédération.
Quelque peu pris au piège, les dirigeants traditionnels les plus
contestataires devaient par la suite quitter la fédération dont la
professionnalisation se poursuivait inexorablement.
Aujourd’hui comme hier, ce sont ces mêmes dirigeants
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
105
Quand sport et pouvoir font bon ménage
54
C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, les auteurs de l’analyse stratégique
préfèrent parler en général de coordination entre les acteurs plutôt que de
coopération, ce dernier mode de communication étant considéré comme trop
consensuel.
106
Mais, en occultant toute la dimension socialisatrice et
coubertinienne qui constitue pourtant le berceau des sports
modernes, le regard de l’observateur n’est plus nécessairement
complaisant, tant le monde du sport lui semble loin du modèle
social et humaniste qu’il prétend incarner.
55
Rappelons que le secteur associatif représente aujourd’hui plus de 800 000
associations. Celles à vocation sportive sont les plus représentées avec 22%
(d’après l’enquête de V. Tchernonog, Logiques associatives et financement du
secteur associatif, Matisse-LES-CNRS, Université de Paris I-Panthéon
Sorbonne, Paris, 2000). Si on dénombre plus de 10 millions de bénévoles, le
secteur sportif en compte un million pour 14 millions de licenciés sportifs.
109
contrats56. Alors peu présente dans les grands rendez-vous
internationaux, l’équipe de France va remporter la médaille de
bronze aux jeux olympiques de Barcelone en 1992. L’année
suivante, elle est vice championne du monde et gravit la plus
haute marche lors des championnats du monde de 1995.
Progressivement, les clubs de D1, encore majoritairement
associatifs, adoptent les nouveaux statuts de sociétés anonymes
sportives professionnelles (SASP). Rapidement, les
investisseurs privés entrent dans le capital des clubs
professionnels. Pourtant, dans un mode de fonctionnement
inédit cultivant la performance managériale, où le dirigeant
bénévole agit comme un chef d’entreprise, où le joueur devient
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
56
Avec toutefois une différence non négligeable par rapport à la plupart des
autres entreprises : Ici, la pyramide des salaires est quelque peu inversée. Les
joueurs sont mieux payés que leurs dirigeants.
110
adeptes, à préserver sa cohésion d’ensemble. On le voit,
l’analyse stratégique ne permet pas de rendre compte de cette
solidarité organisationnelle.
Contexte général
Dispositif méthodologique
111
Cadre théorique de référence
Principaux résultats
113
collective. L’organisation sportive et de loisirs est façonnée par
ses propres cultures (culture sportive mais aussi cultures
associative, bénévole, professionnelle et corporatiste) qui font
sa singularité. En étudiant ce champ, le chercheur, qui a recours
à l’analyse stratégique, doit aussi mobiliser les connaissances
que lui offrent la sociologie des associations (J.-L. Laville),
celle des identités (R. Sainsaulieu), celle de la justification (L.
Boltanski et L. Thévenot) ou encore la logique de l’honneur
développée par P. D’Iribane. Il ne peut non plus faire fi des
apports des théories systémiques et des analyses macrosociales.
L’acteur est stratégique, il est aussi culturel.
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
57
Pour Jean-Daniel Reynaud, le système social n’existe pas. Il préfère parler
de contraintes sociales élaborées par les individus durant leurs actions
collectives.
115
appliquées à la lettre au risque de provoquer des
dysfonctionnements de l’ensemble social, elles sont, dès leur
entrée en vigueur, sujettes à des régulations. Dès lors, les règles
apparaissent comme des contraintes collectivement pensées et
sans cesse négociées par les acteurs afin de garantir une action
collective ou un ordre social. C’est pour cette raison que Jean-
Daniel Reynaud préfère parler de régulations plutôt que de
règles (qui ne sont que le résultat de ces régulations). Il
distingue ainsi les régulations de contrôle qui émanent de la
direction pour descendre vers la base et les régulations
autonomes produites par les groupes exécutants. Ces
régulations sont rationnelles et « visent non seulement à
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58
Soulignons que si l’affiliation à la fédération confère à l’association locale
une réelle labellisation à faire valoir, elle n’est obligatoire que si cette dernière
veut participer aux compétitions officielles.
116
Luc Scheeck (1999). Ces derniers décrivent comment, à
l’occasion d’une nouvelle politique municipale, les services se
trouvent confrontés à la nécessité du changement
organisationnel. Dans le cadre d’une recherche empirique
conduite dans un service des piscines d’une communauté
urbaine importante, les auteurs tentent de mettre en évidence les
deux types de règles permettant le fonctionnement de
l’organisation. Se référant à Jean-Daniel Reynaud, mais aussi à
Crozier qui montre que l’abondance des règles facilite le
développement de zones d’incertitude utiles aux stratégies des
acteurs, les auteurs décrivent les règles formelles définies par la
direction municipale et les règles informelles créées de manière
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
117
La caisse noire des maîtres nageurs
59
Le concept de régulation « conjointe » est fondamental chez Reynaud car il
renvoie à l’idée d’une co-construction des règles par les protagonistes.
60
C’est dans les années 60/70 que l’Etat a décidé de financer la construction
de piscines « clé en main » pour toutes les villes volontaires. A ces dernières
d’en assumer les coûts de fonctionnement devenus très importants deux
décennies plus tard. Parmi ces piscines, on distingue le type rond dit
« tournesol » en forme de soucoupe volante et le type rectangulaire dit
« caneton ».
118
la règle officielle interdisait formellement ce genre de pratiques,
la règle négociée les tolérait, voire même les approuvait car la
souplesse du dispositif permettait de s’adapter aux flux des
demandes qui grossissaient à l’approche de la période estivale.
L’administration fermait les yeux sur des pratiques qui devaient
nécessairement rester discrètes. Tout le monde jouait le jeu. En
échange de ces avantages conséquents, les agents de la piscine
devaient toutefois accepter des horaires flexibles et des heures
supplémentaires parfois non rémunérées. Le projet pédagogique
de l’établissement servait, en définitive, l’intérêt général du
service public car il permettait au plus grand nombre de savoir
nager et de pratiquer des activités aquatiques bénéfiques pour la
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
santé.
119
3.2. De l’amateurisme au professionnalisme, le projet
organisationnel est un problème
120
Une régulation d’ensemble contrariée par les multiples
régulations locales
122
comme le souligne très justement Bernoux, peuvent devenir très
vite violents s’ils touchent au sens projeté sur l’association
(2008, p.66). Dans le domaine qui me concerne, la
professionnalisation a fortement contribué à brouiller les
repères d’un modèle resté longtemps monolithique. Le projet
associatif ne peut éviter les fréquentes « turbulences sociales »
(F. Eymard-Duvernay, 1990, p.653) qui le secouent
régulièrement à son plus haut niveau. Dans un article paru en
2009, je portais une réflexion sur la difficile transition des
valeurs fédérales, entre tradition et modernité. Ce « passage
forcé » vers la professionnalisation des fédérations remet en
cause bon nombre de projets organisationnels. C’est là un
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
61
Comme l’écrit George Cantecor, « le pragmatisme est moins une doctrine
qu’une méthode et moins une méthode qu’un esprit, une certaine façon
concrète, vivante et libre d’aborder et de traiter les problèmes
philosophiques » (1907, p.355).
62
Les auteurs identifient six mondes qui sont en réalité des types purs (la
posture est celle de Weber à propos des types de légitimité) : Ces mondes,
expliquent Amblard et al., doivent se comprendre « comme des formes
idéales-typiques » (1996, p. 78).
63
L’approche conventionnaliste, comme la sociologie pragmatique, développe
l’idée d’une continuité plutôt que d’une rupture de la science avec le sens
commun. Contre la sociologie critique de Pierre Bourdieu, ces courants
préfèrent parler d’une sociologie de la critique. Dans son ouvrage sur la
sociologie de la critique et de l’émancipation, Luc Boltanski explique bien la
125
l’importance du chercheur, juste susceptible de comprendre ce
que les acteurs sont déjà capables de comprendre par eux-
mêmes64. Passer d’un état à l’autre, changer de monde ou
construire un bien commun, c’est accepter, pour les individus,
de s’engager dans une épreuve en vue de « frayer » le
compromis nécessaire pour sortir de l’impasse. Cela nécessite
un effort à consentir et souvent un prix à payer (la notoriété
dans le monde de l’opinion conduit à la confusion entre vie
publique et vie privée. L’entrée dans le monde industriel est le
prix que doit payer une entreprise familiale pour ne pas déposer
le bilan). Dans la théorie conventionnaliste, l’organisation
sociale est une agrégation de « montages composites »
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
65
Je reviendrai plus en détail sur le thème de la délégation de service public
dans le chapitre 3 de la seconde partie.
127
survient, « c’est choisir des objets, des sujets qui seront ou non
en équivalence, se déplaçant ou non dans les mêmes
grandeurs » (Y.-F. Livian et G. Herreros, 1994, p.48). En
affirmant leur appartenance à un « service public marchand »
(expression utilisée par plusieurs directeurs de site), les
managers du privé font ainsi un amalgame, par un jeu
d’équivalence, qui leur permet de dépasser les clivages
idéologiques entre public et privé. Ils appartiennent au secteur
privé mais oeuvrent « naturellement » pour le service public
qu’ils remodèlent pour améliorer la qualité des prestations
offertes aux usagers. Il n’est pas anodin d’ailleurs de remarquer
que le terme « usager » est préféré à celui de « public » trop lié
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Contexte général
128
tout en démontrant sa légitimé à servir l’intérêt général. Entre
secteur public et secteur privé, la cohabitation s’organise.
Dispositif méthodologique
Principaux résultats
130
n’atteignons le bien commun, écrit Paul Ricœur, que par le
compromis » (1991, p.3)66. Ainsi, les parties en présence
s’engagent à dépasser leurs oppositions d’interprétation pour
faire émerger un bien commun pouvant se définir comme un
objet générique, un procédé voire une personne hybride qui
apparaît comme légitime à l’intérieur des différents mondes
impliqués dans le conflit. Pour Y.-F. Livian et G. Herreros, le
compromis est possible car les individus extraient les objets
relevant de leurs différents mondes pour les associer en vue de
constituer un bien commun (1994, p.52). Cette approche est
également celle de la sociologie de la traduction. Dans cette
théorie, l’effort de simplification vise à rapprocher les acteurs
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
autour d’un même cadre d’analyse. Cet effort est appelé par les
auteurs un « investissement de forme ». Il suppose un travail de
traduction effectué par l’ensemble des acteurs « enrôlés » afin
que chacun exprime dans son propre langage ce que les autres
disent et veulent (M. Callon, 1986, p.202). Ainsi, en
introduisant les notions de justification, de mondes, de
grandeurs et de compromis, il s’agit de proposer une grille de
lecture différente de celles plus classiques opposant approche
individualiste et approche systémique. Les personnes, selon les
mondes où elles évoluent, doivent faire preuve de flexibilité et
comparer les éléments de grandeurs qui constituent et
organisent les mondes en présence. A l’opposé de l’analyse
stratégique, les tenants de la théorie conventionnaliste
relativisent les effets du pouvoir dans les organisations, tant la
capacité des hommes à s’accorder est, à leurs yeux,
prépondérante.
137
Tableau 3 : Synthèse des intérêts et des limites des théories des organisations appliquées aux organisations associatives, sportives et de loisirs
- L’analyse permet de rendre compte des pressions - L’analyse ne rend pas suffisamment compte des
environnementales exercées par les détenteurs sous-cultures internes (culture sportive des athlètes,
d’influence externes (pouvoirs publics, supporters, culture associative des bénévoles, culture
clubs professionnels, collectivités territoriales, coubertinienne des dirigeants, culture managériale
associations locales, média, sportif de haut niveau des cadres, culture professionnelle et corporatiste des
Théorie etc.) et par les détenteurs d’influence internes salariés).
mintzbergienne (actionnaires, dirigeants, salariés).
- Les acteurs sont essentiellement perçus comme des
- Les configurations organisationnelles et les forces organisations et des institutions. Sous prétexte
en action permettent d’appréhender les tensions de la d’autorégulation des organisations (tendance au
professionnalisation dans les organisations sportives déterminisme organisationnel), l’analyse omet de
et de loisirs (force de centralisation au sommet, force considérer l’acteur comme un individu au sein de
de professionnalisation à la base opérationnelle) et groupes d’intérêts rendant l’approche trop holiste et
l’émergence d’un possible cycle de vie des l’analyse trop décontextualisée. La perception
organisations fédérales. organisationnelle reste très agentique.
138
de pouvoirs et des logiques d’intérêts (économiques, vision trop utilitariste, qui gomme les passions et
symboliques, sociaux) entre les acteurs dénature la réalité associative animée par les valeurs
Analyse stratégique (bénévoles/salariés) partageant des responsabilités de solidarité et de dévouement à la cause sociale.
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
importantes.
- Par son approche inductive du particulier, l’analyse
- L’analyse permet de démystifier le champ sportif présente des difficultés à restituer des régularités
associatif et fédéral dont le discours idéalisé et empiriques autorisant une portée explicative globale.
enjolivé tend à nier les réels enjeux politiques et L’analyse reste cantonnée à un niveau empirique
économiques. sans autoriser réellement une montée en généralité.
- En pensant l’organisation comme une régulation - La théorie adopte une vision unitaire tendant à
entre dirigeants (régulation de contrôle) et groupes gommer l’idée de régulations locales entre groupes
professionnels (régulation autonome), la théorie de la d’acteurs multiples (bénévoles / salariés, dirigeants /
Théorie de la régulation sociale permet de rendre compte des joueurs, professionnels / amateurs, cadres/employés).
régulation négociations qui ont lieu pour adapter les Pourtant, les régulations sont multiples et parfois
organisations associatives, sportives et de loisirs à un incohérentes voire inexistantes.
monde pénétré par les enjeux économiques et
politiques. - Les régulations s’organisent autour d’un projet
d’action commune. Or, dans une société changeante,
- Cette théorie permet de comprendre pourquoi quel projet faut-il penser ? Le projet organisationnel
certaines règles sont jugées légitimes (règles du jeu) est un problème, il n’est pas une solution.
et d’autres non (tricherie, dopage enfreignant la loi
139
du milieu), selon que le projet associatif est clair ou
confus, rassemble ou désuni.
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- La recherche de compromis entre mondes et - Une lecture difficile et complexe de la théorie des
échelles des grandeurs permet de mieux appréhender conventions rend peu aisée son application et son
la professionnalisation des organisations associatives, utilisation dans les organisations associatives,
sportives et de loisirs. Le principe de justification des sportives et de loisirs.
Théorie des bénévoles (mondes domestique et civique) trouve
conventions écho dans celui des salariés et professionnels
(mondes marchand et industriel). - Le manque de précision sur les processus de
construction des compromis entre les mondes
(ressources, stratégies, supports de négociation,
- La vision constructive de l’analyse est une force de modalités de déroulement des épreuves) limite la
proposition pour accompagner et optimiser le portée scientifique de la théorie.
changement organisationnel.
140
Les deux raisons au fondement de la sociologie des logiques
d’action
69
Bruno Latour parle du rôle assembleur de « l’oecuménique sociologue »
(2006, p.85).
142
n’en faire plus qu’une ? (R. Boudon, 2003, p.135). Contre la
compartimentation disciplinaire et sous disciplinaire, Edgar
Morin en appelle au « remembrement systémique » (1994, p.10)
afin que soit privilégiée la multidimensionnalité scientifique et
restituée toute la complexité des réalités sociales (Ibid., p.9). Si
Gilles Herreros préconise le recours à une « anthropologie
d’intervention », n’est-ce pas pour que les sciences de l’homme
soient un jour « débarrassées de leurs découpages
disciplinaires » (G. Herreros, 2008, p.166) ? « La priorité des
sciences sociales ne nous semble pas résider dans un effort de
distinctions réciproques entre disciplines, pour donner à
chacune plus de chance d’exister. L’heure nous semble plutôt,
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143
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
144
« Tous les membres de notre société (…) s’appliquent à
examiner les expériences des autres et cherchent la façon d’en
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
145
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146
DEUXIEME PARTIE. DE LA SOCIOLOGIE DES
ORGANISATIONS A LA SOCIOLOGIE
D’INTERVENTION
70
Cette posture n’est pas partagée par tous. Max Weber et beaucoup d’autres
après lui ont souligné la nécessité d’une séparation nette entre le savant et le
politique, entre l’homme de réflexion qui porte un regard objectif sur une
situation et l’homme d’action qui s’engage et prend position.
147
et Christian Dubonnet, c’est la sociologie appliquée, celle qui
permet une plus grande compréhension du système social qu’ils
doivent diriger dans un environnement plus diffus et plus
complexe » (1994, p.132). Les demandes formulées, note pour
sa part Odile Piriou, sont souvent des demandes sociales
opératoires et instrumentales (O. Piriou, 2000, p.62). Comme
l’écrit aussi Anthony Giddens, « en général, les acteurs
« ordinaires » se préoccupent de l’utilité pratique du « savoir »
dont ils se servent dans leurs activités quotidiennes » (1987,
p.400-401). Lors de mes échanges informels avec les
professionnels que j’ai pu côtoyer durant mes enquêtes, lors des
conclusions et propositions que j’ai exposées devant les
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
71
Dans sa volonté de rapprocher théorie et pratique, Bourdieu explique
qu’une théorie doit produire des effets que les agents puissent percevoir
clairement, afin qu’ils soient en mesure de se les approprier.
148
2. Sociologie et management au quotidien
150
hommes désireux de maîtriser leur historicité72. Dans une
dimension plus clinique, il y a l’analyse stratégique de Michel
Crozier et Erhard Friedberg déjà évoquée. Il y a également
l’analyse institutionnelle de Rémi Hess, George Lapassade,
René Lourau et Gérard Mendel qui exprime une volonté de
rupture avec un certain conformisme scientifique. Sociologie
engagée, elle suggère de dénoncer l’aliénation exercée par les
institutions sur les individus. Rangés dans un courant plus
psychosociologique et clinique, on trouve également les travaux
d’Eugène Enriquez, Vincent De Gaulejac et Nicole Aubert73.
Outre-atlantique, la sociologie des organisations a connu, là
aussi, de multiples ramifications. Il est possible, comme le
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
72
L’intervention sociologique est la méthode développée par Alain Touraine
pour étudier les mouvements sociaux. Elle invite le sociologue à « aller dans
les zones d’ombre et de silence au lieu de regarder s’allumer les lumières de
la ville » (Touraine, 1990, p.526). Sorte d’autoanalyse, elle se donne pour
objectif d’étudier prioritairement les mouvements sociaux, plutôt que les
acteurs individuels (comme le préconise la sociologie d’intervention) ou les
sujets (comme le préconise la psychosociologie).
73
Dans sa très large taxinomie des modèles sociologiques d’intervention, Guy
Minguet (2001) propose une dizaine de modèles. Dans ce catalogue très
hétéroclite, figurent en plus des théories déjà citées, l’école des relations
humaines, l’approche sociotechnique ou encore le modèle de la contingence
structurelle. Notons que ces courants ne se réclament pas tous de
l’interventionnisme.
151
par la multiplicité des définitions, des méthodes, des
paradigmes et des intérêts des chercheurs. Les origines
disciplinaires variées des chercheurs (sociologie, anthropologie,
ethnométhodologie, sciences politiques, gestion,
communication, économie, phénoménologie etc …) démontrent
que « l’analyse des organisations apparaît bel et bien comme
une science pluriparadigmatique » (Ibid., p.397). Cette
diversité des approches organisationnelles ne facilité pas, à
l’évidence, le rapprochement des théories et des approches.
74
L’idée de client, de commande ou de commanditaire évoquée par divers
auteurs n’est pas, de mon point de vue, centrale dans la sociologie
d’intervention. A la notion de commande, je lui préfère celle de demande. Je
reviendrais sur cette nuance plus loin.
75
Felder compare l’immersion à l’acte de se laisser imprégner par les
impressions (2007, p.242).
152
derniers. Ce qui doit in fine la caractériser, c’est une posture qui
consiste à favoriser la « réflexivité de l’analyse, c’est-à-dire son
mode d’appropriation par les acteurs » (G. Herreros, 1997,
p.87). Je reviendrai sur ce point dans le chapitre 4.
153
La demande comme préalable à l’intervention
redéfinir la demande qui lui est faite, soit que celle-ci est mal
formulée, soit qu’elle cache des objectifs non avoués76. Comme
le soulignent également Monique Legrand et Didier Vrancken
(2004, p.155), la demande d’une étude peut être recevable dans
son principe mais pas nécessairement dans sa formulation. Un
travail de recentrage est donc bien souvent indispensable en
amont. Quand j’ai abordé l’étude de l’entreprise Carreras
spécialisée dans la délégation de service public, la volonté de
celle-ci était de mieux connaître les attentes des collectivités
territoriales en vue de cibler les appels d’offre. Rapidement, je
me suis rendu compte qu’il était beaucoup plus intéressant de
montrer comment les entreprises du secteur privé parvenaient à
légitimer leurs actions de service public et les choix politiques
des élus sensibles au jugement de leurs administrés. Une autre
fois, une commande émise par l’UCPA portait en apparence sur
les choix politiques de la délégation de service public. En
réalité, il s’agissait d’une étude de marché et d’une veille
concurrentielle sur la région Ile-De-France. L’intervention est
un processus opérationnel (Friedberg, 1993, p.322) qui s’inscrit
nécessairement dans le temps en impliquant l’ensemble des
protagonistes. Elle n’est pas une action ponctuelle mais un
cheminement.
76
A propos de la résistance à la demande, voir aussi les travaux de Guy Jobert
sur les consultants (1992, « Position sociale et travail de consultation »,
Education permanente, n°113).
154
Posture maïeutique et réhabilitation du sens commun comme
philosophie de vie
77
Pour Bourdieu, Chamboredon et Passeron, le sens commun relève d’une
« sociologie spontanée » (1983, p.27) dont la vertu explicative n’est que
« vœu naïf » et « illusion » (Ibid., p.32-33).
78
Maïa, fille aînée des Pléiades et mère d’Hermès, était considérée par les
grecs comme la déesse de l’accouchement et des sages femmes. Par analogie,
le mot maïeutique renvoie à l’idée que tout homme peut, avec de la volonté et
une prédisposition intellectuelle, accoucher de ses savoirs cachés.
79
Pour Felder (2007, p.221), les vrais experts sont les acteurs du terrain et le
rôle du sociologue est de faire émerger ces savoirs qu’ils ont en eux mais dont
ils n’ont pas conscience.
155
prenant en compte la subjectivité des uns et des autres. En ce
sens et contrairement au courant bourdieusien, l’approche
maïeutique accorde donc une importance toute particulière au
sens commun. Elle refuse toute « asymétrie » instaurant une
supériorité systématique des savoirs scientifiques sur les savoirs
profanes (Boltanski et Thévenot, 1990, p.63). Pour Yves
Gilbert, « l’essence même de la sociologie est dans la
combinaison des deux champs [champ scientifique et champ
profane] » (2009, p. 255-256). Cette intelligence humaine, note
François Dupuy, est « la capacité modeste de l’acteur, dans le
contexte précis dans lequel il se trouve, ici et maintenant, à
identifier une solution qui est pour lui la moins mauvaise ou la
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
80
Si un individu doit recoudre un bouton de sa chemise parce qu’il a un
rendez-vous important et qu’il dispose de peu de temps, il choisira non pas
l’aiguille la plus fine qui conviendra le mieux, mais l’aiguille suffisamment
fine pour lui permettre de recoudre rapidement son bouton. A travers cet
exemple, March et Simon veulent différencier la rationalité absolue de la
rationalité limitée (Dupuy F., 2004, p.122).
156
de toutes les méthodes et toujours garder à l’esprit que séparer
la science de la non science est une opération artificielle et
dommageable (1979, p.346). Contre toute forme de
« méthodolâtrie » (Herreros, 2009, p.147), je revendique avec
Gilles Herreros ma préférence pour une posture
transdisciplinaire privilégiant le « relativisme méthodologique »
et la « pensée métisse » (G. Herreros, 2004, p.9081). Il faut se
garder de toute tendance au « cloisonnement académico-
disciplinaire », écrivent Gaulejac et Roy (1993). Pour Olivier
Beaud et al., le cloisonnement disciplinaire traduit une
« balkanisation du savoir » qui s’est accentuée ces trente
dernières années et « a fait éclater l’université en une multitude
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
81
« Ce qui est métis n’est pas perdu ou dilué, mais redécliné » (Herreros,
2008, p.269).
82
Voir notamment la proposition n°4 de leur ouvrage.
83
Pour cet auteur, entre sociologie, ethnologie et psychologie sociale, il y a un
« espace épistémique commun, c’est-à-dire un espace de connaissances
capable de révéler des mouvements et des processus similaires »
(J.-M. Berthelot, 2001, p.204).
157
propres connaissances, à la « déambulation théorique nomade »
(G. Herreros, 2008, p.185) pour éclairer la situation qu’il
analyse.
84
Bourdieu, Chamboredon et Passeron n’écrivent-ils pas que « la sociologie
est une science comme les autres qui rencontre seulement une difficulté à être
une science comme les autres […] en raison du rapport particulier qui
s’établit entre l’expérience savante et l’expérience naïve du monde social »
(1983, p.36) ?
85
Dans ses réflexions multiples sur l’utilité de la sociologie, Boudon propose
ainsi de différencier quatre objectifs idéal-typiques de la sociologie. Ces types
idéaux sont notamment explicités dans un article paru en 2002. Par son type
159
quand il s’agit de rendre visibles des phénomènes sociaux plus
ou moins bien connus par les acteurs et les décideurs. Mais elle
est aussi cognitive car elle aspire à produire des connaissances
plus générales et transversales, susceptibles d’aider les hommes
à mieux vivre en société. Comme l’affirme avec force
Friedberg, la nature de l’intervention est nécessairement
cognitive (2001, p.128). Il ne peut donc y avoir de rupture entre
sociologie et intervention. « Entre sociologie académique et
sociologie opérationnelle, écrit Monique Legrand, le lien de
parenté est réel » (2001, p.78). Sainsaulieu le rappelle aussi. Le
métier de sociologue se définit par le croisement de deux axes :
l’axe des compétences scientifiques et l’axe des compétences et
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86
Pour Giddens, le sociologue est plus proche de l’« acceptation
pragmatique » que de l’« optimisme obstiné ».
161
communes et les EPCI (Etablissement public à coopération
intercommunale) en forte croissance, connaissent une
managérisation importante de leurs politiques et de leurs cadres
(directeurs territoriaux et directeurs des services des sports). Les
associations locales ne peuvent plus vivre avec les seules
cotisations et les subsides publics et doivent rechercher d’autres
moyens de financement dans un espace où la pratique s’est
fortement individualisée (on compte aujourd’hui 4 pratiquants
libres pour un licencié fédéral). Les grandes fédérations
sportives nationales (FSN) se professionnalisent elles aussi,
avec des dirigeants bénévoles plus professionnels
qu’auparavant (et rémunérés pour certains depuis 2000). Malgré
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87
Le rôle de la ligue professionnelle est d’encadrer les clubs professionnels
engagés dans les grandes compétitions nationales, européennes et
internationales. Excroissance des fédérations, la ligue tend peu à peu à se
détacher de la logique associative fédérale et à revendiquer son indépendance.
88
C’est en 1992 que l’Etat crée, pour les clubs professionnels, le statut
particulier des sociétés commerciales sportives. Les sociétés à objet sportif
(SOS), qui deviendront par la suite les sociétés anonymes sportives
professionnelles (SASP), autorisent l’entrée d’actionnaires privés
commerciaux dans le capital des clubs (au début minoritaires, les actionnaires
privés détiennent désormais la plupart des clubs professionnels). Très proches
des sociétés anonymes classiques, ces sociétés peuvent redistribuer les
dividendes à leurs actionnaires et rémunérer leurs dirigeants sans qu’aucun
capital minimum ne soit imposé à l'association support. Dans ce genre de
société où l’association est sensée contrôler les décisions (ce qu’elle ne fait
plus en réalité), l’actionnaire majoritaire est l’acteur commercial dont la
motivation est de rentabiliser ses investissements. Croire que les clubs
professionnels fonctionnent encore comme des associations est donc un
leurre.
162
S’il est possible d’identifier, dans mon champ
d’investigation, six types d’organisations selon qu’elles relèvent
d’une culture publique ou d’une culture marchande, de l’intérêt
général ou de l’intérêt individuel, quatre d’entre elles ont déjà
fait l’objet d’études précédemment exposées entre 2000 et 2009
(fédérations sportives en 2000 et 2002, clubs professionnels en
2007, société gestionnaire en 2009, collectivités territoriales en
2009). En 2011, mon choix s’est porté sur une ville de la région
parisienne dont le complexe aquatique est géré en délégation de
service public par la société Aquaform. Durant quatre mois, j’ai
analysé cette organisation avec le regard du sociologue
d’intervention.
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INTERET
Individuel
Professionnalisation
Enquête 2009
Sur les managers de
la société Carreras
30 entretiens
Enquête 2006
Analyse quantitative Sociétés
secondaire sur sportives
données de l’INSEE Logique privée
8000 ménages marchande
Enquête 2002
Sur les dirigeants bénévoles Enquête 2007
de la FFE Clubs Sur les clubs pros de
12 entretiens et 110 Pros handball
questionnaires 28 entretiens
AS Logique privée
Enquête 2011
non marchande
Sur un complexe
Enquête 2000 nautique de la société
Sur les dirigeants FSN Aquaform
bénévoles de la FFT 20 entretiens
12 entretiens et 110 40 questionnaires
questionnaires
Logique publique
Collectivités
ETAT Territoriales
Enquête 2009
Sur les managers
Général territoriaux
37 entretiens
Publique Managériale
CULTURE
163
Le contexte de la délégation de service public (DSP)
89
La gestion est dite déléguée sous forme d’affermage si le délégataire se
contente d’exploiter la structure, ou sous forme de concession s’il supporte
aussi le coût de sa construction.
164
est donc permis et nous verrons que chaque collectivité
territoriale tend à définir son propre champ d’extension du
service public local. Les premières formes de contractualisation
d’un partenariat public/privé ont commencé dans le domaine
des voiries, des eaux usées ou du traitement des déchets.
Aujourd’hui, ce sont tous les secteurs qui sont concernés,
culturel quand il s’agit des salles de spectacles ou de concerts,
des musées, des monuments historiques, sportif quand il s’agit
des parcs de loisirs, des golfs, des centres équestres, des
complexes aquatiques, et également scolaire avec la délégation
de prestations dans les crèches ou les cantines. Longtemps
entourée de scepticisme et de méfiance, la gestion déléguée
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
90
Plus précisément, il s’agit de marchés publics. La rémunération du
délégataire est fixe et ne dépend pas directement des résultats de l’exploitation
de la structure.
91
Certes, le rapport de 2002 intitulé « Le point sur la gestion déléguée des
équipements sportifs » de l’association AIRES (Association pour
l’information et la recherche sur les équipements de sports et de loisirs) pointe
du doigt le manque de compétences des délégataires privés. Mais, on peut
imaginer que ces entreprises se sont spécialisées depuis et se sont dotées de
réelles compétences dans ce domaine.
166
l’UFRSTAPS de Toulouse sur la base d’une étude comparative
de 24 piscines publiques et 25 piscines privées) souligne
notamment quelques points intéressants : Si le volume horaire
d’ouverture au public est similaire entre gestion publique et
gestion privée, le nombre d’activités en revanche est bien plus
élevé dans les piscines déléguées (on passe de 4 à 7 activités
différentes dans la semaine). Le temps consacré à ces activités
occupe 26% du planning dans le privé contre 17% dans le public.
Cela se fait le plus souvent au détriment des clubs qui voient
leurs plages horaires passer de 16,5% à 5,5%. Le prix d’entrée,
quasiment inchangé pour le public92, varie fortement pour les
activités collectives (cela va du simple au double pour
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
92
Il faut dire que le prix d’entrée est souvent considéré par les élus comme
une vitrine de leur politique. C’est pour cela qu’ils sont très souvent réticents
à son augmentation lors du passage à la DSP.
167
n’hésite plus désormais à se désengager d’une gestion directe
qu’il juge de plus en plus problématique
93
Le public ne fait souvent aucune différence et ne se soucie pas de savoir qui
gère le centre. Nos entretiens montrent bien que sa vraie préoccupation est la
qualité du service.
170
parfois par la manière forte, ils contribuent à générer des
tensions, notamment chez les maîtres nageurs sauveteurs. C’est
ce que notre étude de cas va nous montrer maintenant.
94
Quelques précisions sur cette organisation s’imposent. L’UCPA est une
association créée en 1965 par Maurice Herzog, qui gère près de 140 sites et
emploie 4000 salariés dont 730 permanents pour un chiffre d’affaires estimé à
154 millions d’euros. Bien qu’associative par essence, l’organisation est
entrée dans un processus de réformes profondes qui se sont traduites par une
partition très récente entre l’association historique et une entité nouvelle
adoptant un statut commercial pour ses activités lucratives. Si « l’UCPA
association » incarne les valeurs traditionnelles de ses origines, « l’UCPA
loisirs » prend la forme d’une société par actions (SAS) où la première reste
toutefois l’actionnaire unique. Ce basculement dans l’ère commerciale revêt
un caractère très symbolique et perturbant pour ses membres conscients de
vivre une époque nouvelle. Ce choix, quelque peu forcé en réalité, est justifié
afin de permettre à « l’UCPA loisirs » de poursuivre ses activités dans le
marché très concurrentiel de la DSP. Chaque site, géré par l’UCPA en tant
que délégataire, se voit ainsi constitué sous la forme d’une entreprise
unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL). Chacune de ces EURL est
une filiale de la SAS de « l’UCPA loisirs » qui la contrôle et nomme ses
dirigeants (c’est le cas par exemple de l’EURL Loisirs Sport Urbain LSU
19ème chargée de gérer la piscine Pailleron implantée dans le 19ème
arrondissement de Paris). Cette mutation historique, génératrice de tensions
qui plongent l’UCPA dans le doute et l’incertitude, n’est guère propice en
définitive à une étude sociologique potentiellement risquée. Cette situation
peut expliquer les refus répétés que j’ai essuyés malgré mon insistance.
171
investigations, la pleine collaboration des acteurs politiques et
décisionnaires des structures concernées. Mon choix s’est donc
porté sur un des nombreux complexes aquatiques gérés par la
société Aquaform.
95
Le diplôme du brevet d'Etat d'éducateur sportif aux activités de la natation
(BEESAN) permet à son titulaire d'enseigner ou d'animer toutes les activités
aquatiques (apprentissage de la natation mais aussi aquagym ou bébés nageurs
par exemple), d'entraîner des nageurs aux compétitions et d'assurer la sécurité
et la surveillance de l'ensemble des piscines d'accès payant ou non. Le
diplôme du brevet national de surveillance et de sauvetage aquatique
(BNSSA) permet à son titulaire d’assurer des missions de surveillance des
baignades ouvertes gratuitement au public (exemple : plage) ou d'accès payant
(dans ce cas, le BNSSA doit être assisté par un BEESAN). En aucun cas, ce
diplôme ne permet une activité d'enseignement ou d'entraînement contre
rémunération. Les prérogatives reconnues à ces deux brevets génèrent, de ce
fait, une hiérarchie entre eux, le titulaire du BEESAN ayant pour rôle de
chapeauter le titulaire du BNSSA. Dans la réalité, notons que cette hiérarchie
n’est pas toujours respectée.
173
d’arriver et prenait encore ses marques. Je l’ai donc rencontré,
puis progressivement l’ensemble de l’équipe de la piscine. Par
la suite, je me suis entretenu avec les coachs et la référente de
l’espace fitness puis le personnel de l’accueil et du spa. Puis,
j’ai élargi mes investigations en rencontrant quelques acteurs de
la commune (directeur de service et élu). Au total, vingt-trois
entretiens ont été effectués entre janvier et avril 201196. Selon
un rythme d’environ deux journées d’immersion par semaine
(je m’étais procuré les emplois du temps des salariés afin de
pouvoir les rencontrer tous), je partageais la vie du personnel,
ses moments d’enseignement, ses relations avec le public, ses
moments de présence, ses moments de pause. Après chaque
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
96
Ma présence sur place a favorisé de très nombreux échanges informels qui
sont venus aussi compléter mes recueils de données.
97
Cette stratégie managériale devient assez courante dans les structures
publiques ou privées associatives. Pour équilibrer les activités
traditionnellement déficitaires sur le plan financier (mais « rentables » sur un
plan social), les dirigeants prennent l’habitude de développer en parallèle des
174
personnel, la situation, en revanche, est plus complexe qu’il n’y
paraît. Rapidement, la direction me décrit une entreprise plutôt
en bonne santé mais présentant l’inconvénient d’être
compartimentée, avec des espaces distincts et des professions
qui ne se mélangent pas. Chacun évolue dans son espace de
travail avec ses préoccupations et ses contraintes. Certes, les
agents se parlent entre eux et l’ambiance est assez bonne mais
les échanges réels ne se font guère que pendant la pause
déjeuner dans la salle commune. Reconstituer cet « anneau »,
décrit par Gérard Pavy98, se révèle nécessaire, à plus forte
raison quand ces professionnels présentent des expériences et
des personnalités très diverses : « Gérer les MNS et les gens du
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
176
direction99. Ils se jugent mal payés et n’acceptent pas d’être
rémunérés de la même manière, qu’ils fassent de la surveillance
ou qu’ils donnent des cours collectifs. Ces cours, beaucoup plus
rentables pour la société, ont été fortement augmentés depuis le
début de la DSP. L’ancien directeur du site, rencontré au siège
de la société, le reconnaît, cela a généré des tensions avec le
personnel : « Ici, tout est open. Il y a une quarantaine de cours
par semaine et entre 15 et 40 personnes par cours. C’est sûr, au
début, il a fallu ruser et j’ai dû me faire accepter. On m’a
accusé de surbooking, beaucoup de MNS sont partis »100. Cela
conduit chaque maître nageur à dispenser deux cours par jour,
nombre que ces derniers jugent excessif compte tenu de leur
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
99
Durant les vacances de février 2011, les maîtres nageurs ont appris, par leur
chef de bassin, que la direction allait modifier la fréquence de leurs astreintes
de week-end passant d’un week-end sur cinq à un week-end sur trois. Quant
aux horaires, des matinales et des nocturnes allaient être programmées,
élargissant plus encore la plage horaire des ouvertures au public.
100
Pour 2009, la répartition des heures d’ouverture sur l’année est la
suivante : scolaires 26%, publics 35%, activités de forme 24%, clubs 13%,
divers 2%.
101
Les cours particuliers constituent une activité habituelle dans la profession.
Seuls habilités à les dispenser, les maîtres nageurs ont pris l’habitude de
percevoir directement les revenus de ces cours sans demander l’autorisation
aux collectivités et sans que cette activité soit déclarée. Cela généra en bien
des circonstances des conflits qui expliquent aussi le choix des élus pour la
gestion déléguée, seul moyen de mettre un terme à ces pratiques illégales.
177
l’image du maître-nageur a changé. Aujourd’hui, il doit être
« plus dynamique et plus attentif au client ».
178
De là-haut, les maîtres nageurs sont comme des « poissons
dans un aquarium »
Directeur
Management stratégique et délégatif
Rôle de
filtre
Directeur adjoint
Management
intermédiaire
Référent Chef de bassin Référent Référent
Accueil SPA Fitness
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Management opérationnel
MNS MNS
du du Axe horizontal : Tensions entre MNS du public et du privé
secteur secteur
public privé
102
Avec l’apparition du BPJEPS (brevet professionnel de la jeunesse, de
l'éducation populaire et du sport spécialité les activités aquatiques et de la
natation) en 2010, c’est une petite révolution qui agite l’ensemble de la
profession. Par rapport au diplôme du BEESAN jusque-là en vigueur, celui-ci
est beaucoup plus ouvert aux pratiques commerciales et lucratives du monde
aquatique. Le maître nageur doit concevoir et conduire des activités d’éveil et
de découverte, communiquer et connaître ses différents publics, participer au
fonctionnement de la structure. C’est un diplôme qui attribue à son titulaire
des fonctions d’animateur et de concepteur de projets d'animation dans le
milieu aquatique et de la natation. Des sociétés telles que Récréa sont
habilitées aujourd’hui à organiser ces formations qui leur servent aussi de
réservoir de recrutement pour pourvoir aux besoins de leurs sites. Dans la
mesure où les besoins sont ceux définis par le marché de la demande, il est
évident que la formation, proposée par ces entreprises (même si l’aspect
sécuritaire reste essentiel), tend davantage à privilégier l’ensemble des
activités aquatiques visant à satisfaire un public large désirant bénéficier de
cours collectifs nombreux et diversifiés.
185
faire de la compétition mais les activités qui tournent autour de
la natation, ils ne les ont que survolées alors qu’on va leur
demander partout ces choses là » (propos d’un cadre de
Aquaform). Les salariés du secteur privé ont désormais des
primes d’intéressement à la vente de produits périphériques
(maillots, bonnets, lunettes). Leur évaluation dépend aussi de
leur capacité à fidéliser leur clientèle et à organiser des
évènements.
187
Tableau 4 : Les différents mondes sociaux des maîtres nageurs sauveteurs
Monde domestique et civique Monde marchand et industriel
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Le principe supérieur commun du monde domestique et civique Le principe supérieur commun du monde marchand et
est défini par la tradition et la fidélité aux anciens. Il privilégie industriel est l’intérêt individuel, la performance et la
aussi l’intérêt général et la préférence à la collectivité plutôt que rentabilité
l’individualité
Maîtres nageurs fonctionnaires, titulaires Maîtres nageurs du privé, titulaires du Maîtres nageurs du privé, titulaires du
du BEESAN et n’ayant des expériences BEESAN et ayant eu des expériences BPJEPS et n’ayant des expériences que
que dans le secteur public dans le secteur public dans le secteur privé
188
Ils se réfèrent aux grandeurs du monde
civique pour appuyer leurs
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
189
Les anciens MNS constituent une
génération qu’ils ne connaissent pas.
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Le compromis semble possible autour de l’idée qu’un bon service public est celui qui répond convenablement à la demande des
publics. La prise en compte du public doit primer sur les divergences d’intérêts. La personnalisation des relations avec le public,
sa sécurité et sa satisfaction sont des critères qui rassemblent la profession.
190
Ainsi, entre le monde domestique et le monde marchand, les
conceptions sont très différentes et ne facilitent pas de réel
rapprochement. La spécificité de ce terrain est de mettre en
présence, autour des bassins, des professionnels issus de
mondes différents mais devant cohabiter pour que la piscine
fonctionne et garantisse le niveau de sécurité et de service
nécessaire. Sur l’idée du service rendu, la convergence des
points de vue semble possible. Tous les acteurs parviennent à
s’entendre à minima car ils trouvent une entente acceptable
autour de l’idée qu’un bon service public est un service qui
contente l’usager. Cette satisfaction contribue à la fidélisation
de ce dernier. Dans ce rapprochement des professionnels autour
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
193
La carte des pouvoirs informels des maîtres nageurs
ENTREPRISE
Directeur
Pression
directe par le
pouvoir de la
règle Chef de bassin Pression indirecte
par le pouvoir de
position
Maîtres nageurs
« Amis Public de la
juristes » piscine
195
5. Mettre des mots sur les choses et tenter de créer les
conditions d’un discours réflexif
103
L’enquête épidémiologique des noyades de l’INVS rendue publique en
2009 atteste d’une hausse sensible des noyades accidentelles notamment en
mer entre 2003 et 2009.
197
s’ils le trouvent peu rémunérateur et répétitif. « Apprendre à
nager, rendre service aux gens, leur faire plaisir en ayant des
résultats, c’est un véritable métier je pense (…). Un bon
éducateur est quelqu’un qui doit assurer la sécurité des
différents publics dont il a la charge ». Leurs savoirs sont
opérationnels et se résument à la dimension sécuritaire et
pédagogique de leur travail. Les plus jeunes sont conscients que
la profession a évolué mais ils n’ont pas assez d’expérience et
de recul, disent-ils, pour analyser le contexte global. « Mon
évolution professionnelle ? Je ne sais pas, je suis trop jeune.
Pour le moment, je suis sur une trajectoire ». Ensuite, il y a
ceux qui ne se posent jamais vraiment de questions. Ils
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
En fait, le regard que tous ces MNS portent sur leur métier
n’est pas dénué de sens ni de contenu. De la première catégorie
de MNS à la troisième, on voit se dérouler différentes formes de
réflexivité. A des niveaux différents, mes observations attestent
de leur compétence à pouvoir analyser leurs activités, leurs
situations. A des degrés de réflexion plus ou moins élevés, les
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
104
Le cercle d’appartenance permet à chaque individu, expliquent les auteurs
(2004, p.129-131), de se reconnaître dans un groupe (dont la tendance,
explique Simmel, est la fermeture sur lui-même). L’appartenance au groupe,
qui nécessite l’adhésion à ses règles et à ses valeurs, peut conduire aussi au
rejet des autres groupes.
105
En réalité, ces entrées se résumaient à rendre compte de mes observations
et à engager des discussions informelles avec la direction.
200
mieux comprendre leur situation. Ils voulaient aussi savoir
comment ils étaient perçus par leurs collègues « d’en haut »,
s’ils étaient soutenus et entendus. Mon point de vue
« d’expert », que conférait mon statut d’universitaire, les
intéressait particulièrement et très souvent, ils me demandaient
mon avis et attendaient de moi des conseils sur l’attitude à
adopter face à leur direction. Ma présence était l’occasion de
regroupements pendant lesquels ils semblaient chercher la
meilleure stratégie pour agir. Je cherchais avec eux le moyen de
sortir de l’impasse dans laquelle ils se sentaient enfermés. Le
jugement qu’ils portaient sur leur direction était sévère et
tendait à la caricature. Ne connaissant pas leur directeur, ils
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
106
Le transfert est la tendance du patient à projeter sur l’analyste ses
représentations inconscientes. Le contre-transfert désigne la réaction
inconsciente de l’analyste en réaction à ce transfert. Il est l’ensemble des
réactions éprouvées par l’analyste au cours de son écoute, ce qui le touche,
l’émeut, l’énerve, l’agace, le déséquilibre. Il est, explique Devereux (1980,
p.75), l’ensemble des déformations qui affectent la perception du sociologue
lui-même sur les individus et sujets qu’il analyse.
202
trouverait nécessairement perturbée. En prévision de cette
réunion, la direction souhaita me rencontrer plus longuement.
Dans la discussion qui s’engagea, celle-ci fit des commentaires,
relativisa certaines de mes conclusions sans les désapprouver et
tendit à justifier ses choix de management. Sa position restait
ferme, laissant entrevoir une marge de négociation assez faible.
Elle reconnaissait que certains maîtres nageurs méritaient d’être
mieux rémunérés, tandis que d’autres « n’ont pas leur place
ici ». Consciente qu’il lui fallait recréer un collectif et une
atmosphère sereine au sein de sa structure, elle retenait toutefois
certaines de mes propositions consistant à privilégier davantage
un management de proximité, en raccourcissant la ligne
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Durant une période s’étalant de janvier à avril 2011, j’ai conduit avec votre
accord une étude au sein de votre établissement. J’ai multiplié les situations
d’immersion et suscité questionnements et discussions avec l’ensemble de
votre personnel et vous-même. A l’issue de cette étude, j’ai rencontré la
totalité de votre personnel. Je me suis entretenu avec tous vos maîtres nageurs,
une partie de vos enseignants de fitness, le personnel du SPA, de l’accueil et
du pôle administratif. Tous ces entretiens se sont déroulés sur le lieu de travail
avec le réel souci de ne pas perturber le bon fonctionnement de vos services.
Je vous propose d’en faire un bilan et de proposer quelques pistes de
réflexion.
Ils considèrent que la direction est loin d’eux. Soit elle méconnaît, soit elle a
oublié la nature et les contraintes notamment sécuritaires liées à leur
profession. Les maîtres nageurs regrettent de ne pas être consultés sur les
évolutions de leur travail. Certains se voient comme de simples « bouche-
trous ». On leur demande d’animer des cours collectifs sans avoir reçu de
formation au préalable. Ils disent ne pas connaître la direction et rester dans un
« monologue ». Le gros turnover des maîtres nageurs sauveteurs est, à leurs
yeux, la conséquence de ce manque de considération.
5. Une relation entre maîtres nageurs du public et du privé plutôt bonne dans
un espace bien compartimenté
204
Les relations entre maîtres nageurs du public et maîtres nageurs du privé
apparaissent plutôt bonnes. Le rapport, d’ordre générationnel, favorise un
certain « paternalisme » entre les anciens et les jeunes. Ces relations sont
apaisées parce que fondées sur une organisation immuable (et bien négociée à
l’origine) attribuant aux maîtres nageurs du public la prérogative exclusive de
l’enseignement de la natation aux scolaires. La remise en cause de cet
ordonnancement par la ville serait potentiellement génératrice de conflits. On
sent toutefois une petite frustration des maîtres nageurs du privé de ne pouvoir
enseigner aux scolaires.
Les maîtres nageurs ayant eu une expérience dans le public apparaissent plus
contestataires que ceux n’ayant que l’expérience du privé. Ils se réfèrent
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
Bien que les échanges paraissent plutôt bons et réguliers entre les différents
personnels de l’entreprise, une séparation semble exister entre la piscine d’un
côté et le fitness et le spa de l’autre. L’accueil, par définition, reste un lieu de
convergence. Le cloisonnement est lié aux professions, mais aussi à la
configuration géographique des espaces de travail. Certains maîtres nageurs se
sentent un peu seuls et isolés dans leur piscine (mais c’est un peu le métier qui
veut cela, la piscine n’étant pas d’un accès direct). Pour les professionnels
« d’en haut » (ceux du fitness et du spa), les maîtres nageurs sont un peu
comme des « poissons dans un aquarium ». Les relations entre le personnel
du spa et celui du fitness sont bonnes, la porte entre les deux services restant
ouverte. Le milieu de la piscine leur paraît en revanche un peu éloigné.
(Ce sentiment est celui donné par le personnel, je n’ai pas interrogé le public
directement). Le public ne semble pas faire une grande différence entre la
mairie et l’entreprise gestionnaire. Sa préoccupation est avant tout la qualité
des prestations. Il ne semble pas trop perturbé par le turnover du personnel,
s’attachant comme se détachant facilement de « ses » professeurs. Une étude
205
sur le fort taux de non réabonnement serait toutefois utile pour mieux orienter
la stratégie de fidélisation.
9. Une collectivité exigeante et qui ne veut pas s’occuper des problèmes avec
le personnel
Remédier à l’incompréhension
entre les MNS et la direction
Pour créer
une synergie
206
- Mettre en place un système plus juste de primes (à la qualité des prestations,
à l’innovation dans les cours et à l’investissement personnel, lequel ne se
mesure pas qu’au nombre d’adhérents dans l’eau).
- Réfléchir à une politique managériale « plus flexible » et motivante
concernant les cours particuliers (ceux-ci constituant un avantage financier
réel permettant de compenser les salaires peu élevés des MNS).
- Rendre les MNS plus acteurs dans leur milieu professionnel en développant
une politique de responsabilisation et de valorisation (gestion interne des
emplois du temps, rôle de conseil sur la santé et la sécurité auprès du public).
107
Notons que pour Giddens, une théorie est un ensemble de généralisations
ou de lois obtenues déductivement et liées entre elles (1987, p.28).
210
Certes, la sociologie a pour objet l’étude de la vie sociale,
mais ce qu’elle produit en connaissance a des effets sur le
terrain qui, en retour, agit aussi sur elle. La sociologie et les
sciences sociales en général ne sont pas isolées de leur monde,
bien au contraire. En écho, « le sociologue finit tôt ou tard par
recevoir un reflet en provenance du terrain étudié » (Vrancken,
2001, p.12). La discussion, que je souhaite ouvrir ci-après, se
situe à ce double niveau cognitif et praxéologique. Elle vient
questionner l’action (praxis) de l’individu dans ce qu’elle a de
rationnel, de stratégique mais aussi d’agentique, de
psychologique et de psychique. Elle vient questionner le rôle de
l’acteur/agent/sujet et sa manière d’interpréter et de modifier le
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
111
Notons qu’il y a aussi les décisions absurdes. « J’appelle décision absurde
d’un individu ou d’un groupe son action radicale et persistante contre le but
qu’il veut atteindre » (Morel, 2002, p.65). Cette absurdité vient d’une
contradiction manifeste ou d’un décalage persistant entre l’action de
l’individu et le but qu’il poursuit. L’absurdité de certaines décisions ne vient
pas tant du mauvais choix fait par ses auteurs que du caractère récurrent et
répétitif de ces décisions alors qu’elles sont, de toute évidence, inappropriées.
L’absurdité n’est pas dans le fait de se tromper mais dans celui de persévérer
dans ces erreurs.
214
davantage dans un champ concurrentiel où l’individu (rationnel)
mobilise des capitaux (au sens bourdieusien) pour évoluer dans
un monde de rivalités, de pouvoirs et d’intérêts. L’engagement
du sujet caractérise enfin la logique de subjectivation quand il
« interdit l’adhésion totale au Moi, au Nous et aux intérêts »
(Ibid., p.129). Le « Je » exprime une mise à distance et un
dégagement du Moi, empêchant l’individu d’être complètement
dans le personnage social qu’on attend de lui (c’est ce que
Ricœur veut évoquer quand il parle d’« ipséité »). Pour Dubet,
le lien entre l’individu et le milieu social se construit par
l’expérience sociale. Contrairement aux logiques d’action
proposées à l’individu par le système social, cette expérience
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
112
Les autres modèles proposés par Michel Callon sont le modèle
concurrentiel qui découle du modèle rationnel et le modèle de la traduction
qui prolonge le modèle socioculturel.
216
mettre en évidence les caractéristiques qui distinguent la
science des autres formes de savoir. La science cherche à
produire des énoncés théoriques rendant compte de la réalité
visible et invisible. Elle cherche à établir différentes régularités
susceptibles d’expliquer les phénomènes observés. Elle
construit des connexions entre les énoncés, les éprouve, les
adapte, élabore des « mises en intrigue » (Ibid., p.206) pour
donner du sens et de la cohérence. Le modèle rationnel,
lorsqu’il est réduit à la seule activité des chercheurs qui
questionnent la nature et se questionnent entre eux - les
techniciens, les enseignants et autres vulgarisateurs ont ici un
rôle secondaire - incarne « l’ascèse intellectuelle » (Ibid.,
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
219
D’autres difficultés se présentent à la sociologie
d’intervention. D’autres critiques et dilemmes viennent rendre
plus complexe encore sa pratique.
113
Pour neutraliser le subjectivisme de l’enquêteur, à plus forte raison quand
il s’adresse à des individus peu cultivés, Bourdieu a pu préconiser, à une
époque, de recourir au système de la proximité (ou géométrie) sociale (1993,
p.1395). L’idée est de mettre en face à face (mais au risque, note Hamel
(2007, p.52), de créer entre eux une trop forte familiarité nuisible à la
production de connaissances) deux individus disposant a priori du même
capital social et culturel. Les deux individus, supposés se situer sur un même
pied d’égalité, s’apporteraient mutuellement des connaissances en lisant chez
l’autre, par le jeu réciproque du miroir réflexif, ce qui se passe en eux.
222
l’expérience et la capacité, contrairement aux acteurs du terrain,
de mobiliser tout l’arsenal des méthodes scientifiques et des
règles de procédure qui ont fait leur preuve. N’ayant pas
« d’ici » à l’intérieur du monde social qu’il explore, il pourrait
plus facilement, explique Schütz, rester en périphérie
contrairement aux individus qu’il rencontre et qui évoluent au
centre de leur petit monde social. En décidant d’adopter
l’attitude désintéressée d’un observateur scientifique, en
délimitant la tranche de vie consacrée au travail scientifique, le
chercheur, pense Schütz, parviendrait à se couper de sa situation
biographique à l’intérieur du monde social (2008, p.49).
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114
Dans son étude sur le comportement des clients dans un Mac Donald,
Tiffon montre bien comment il met en scène sa propre subjectivité pour mieux
comprendre les règles tacites de fonctionnement dans les files d’attentes. En
jouant de sa propre expérience et en adoptant lui même des comportements
non conformes à ceux adoptés par les clients, il valide son hypothèse de
travail : si les gens se pressent lors de la commande, c’est parce que la
pression qu’ils exercent sur ceux qui les précèdent s’exerce ensuite sur eux par
ceux qui les suivent. En se mettant en scène, l’auteur souligne que
« l’autoanalyse s’avère heuristiquement féconde » (2007, p.88).
224
partir de ses connaissances réelles, d’amener les autres à
développer les leurs afin de construire ensemble les conditions
d’une amélioration tangible de la situation.
115
Par cette expression mobilisant tout à la fois les notions sociologiques,
mais aussi psychologiques, voire philosophiques et psychanalytiques, il s’agit,
pour le sociologue, non pas de créer le sujet mais plutôt d’apporter tous les
éléments à sa mise à jour, à son éclosion et son déploiement (Herreros, 2008,
p.114). Gilbert et Baldelli (2011), pour leur part, parlent de « surrection de
l’acteur ». Dans le champ de l’intervention sociale, il s’agit de considérer que
toute personne est capable d’être actrice de sa propre insertion dans la société.
116
La figure d’Hermès le messager, proposée par Michel Serres et Gilles
Herreros, symbolise cette communication entre les sciences et les savoirs, ce
passage entre les champs disciplinaires et les domaines d’activités.
230
permanente de l’acteur, le sociologue se veut pragmatique en
interrogeant à tout moment son utilité sociale.
232
« La plus universelle qualité, c’est la diversité. »
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E. Durkheim, Le suicide
233
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
234
CONCLUSION GENERALE. LE SOCIOLOGUE A
L’ECOUTE DE L’ACTEUR REFLEXIF
L’inéluctabilité du changement
118
Les valeurs traditionnelles exacerbant le sport d’élite issu du sport de
masse, la finalité compétitive et élitiste, le modèle associatif, les valeurs
d’effort et de méritocratie, l’apolitisme, l’amateurisme et le désintérêt
bénévole s’opposent aux valeurs préconisant les pratiques de loisirs, la
finaliste hédoniste et consumériste, le modèle libéral et les valeurs de détente
et de plaisir.
236
rationalisation et de professionnalisation. Entre les institutions
et les acteurs, il y a une forme de dialectique où tous
interagissent. L’institution fédérale, par le poids de son histoire,
façonne les acteurs du sport qui, ne restant pas passifs,
contribuent à redessiner le champ des sports et des loisirs. Toute
action historique, explique Bourdieu (1982, p.38), met en
présence deux états de l’histoire : un état objectivé que l’auteur
dénomme une histoire « faite chose » par les institutions
instituées et un état incorporé qui relève d’une histoire « faite
corps » travaillée par les habitus. « L’histoire au sens de res
gestae est de l’histoire faite chose qui est portée, agie, réactivée
par de l’histoire faite corps et qui agit et porte en retour ce qui
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
119
L’impuissance de l’homme à se gouverner est appelée, par Spinoza, la
servitude.
239
prendre en compte la dimension psychique et psychologique
des individus. Pourtant, explique Vincent De Gaulejac, « aller
au plus près du vécu des acteurs conduit à remettre en question
les frontières entre psychologie et sociologie, extériorité et
intériorité, objectivité et subjectivité, réalité et représentation »
(V. De Gaulejac, F. Hanique et P. Roche, 2007, p.54). La
sociologie clinique propose de réintégrer le sujet et la
subjectivité dans l’objet même de la sociologie. Elle invite à
tenir compte en particulier de la présence irréductible de la
subjectivité. De ce fait, elle « constitue une modalité
particulière de faire de la recherche et de l’intervention »
(Ibid., p.25). Cette dimension psychologique peu considérée
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
240
un cheminement de la partie vers le tout, de l’individu vers la
collectivité, de l’intériorité vers l’extériorité120. Mauss (1924) en
appelle pour sa part à une « sociologie psychologique » qui doit
analyser le rapport des faits psychiques et des faits matériels
dans la société, ce rapport constituant, aux yeux du neveu de
Durkheim, une partie essentielle de la sociologie. Dans sa
typologie des acteurs, Weber intègre lui aussi la dimension
« affectuelle » et émotionnelle pour expliquer le comportement
humain121. Gurvitch gomme toute distinction entre conscience
individuelle et conscience collective : « Les consciences
collectives sont en chacun de nous et chacun de nous est dans
les consciences collectives » (1957). Pour Devereux, l’être est
hal-00827911, version 1 - 10 Jun 2013
120
Si le lien existe intrinsèquement, notons toutefois que Durkheim établit un
rapport de supériorité de la société sur l’individu. « Une culture
psychologique […] constitue pour la sociologie une propédeutique nécessaire
[…] à la condition qu’il s’en affranchisse après l’avoir reçue et qu’il la
dépasse en la complétant par une culture spécialement sociologique » (1999a,
p.110). Il ajoute : « la conscience collective est la forme la plus haute de la vie
psychique puisque c’est une conscience de consciences » (2008, p.633),
justifiant de ce fait l’institutionnalisation d’une science nouvelle : la
sociologie (ou psychologie sociale).
121
Raymond Boudon précise d’ailleurs que Weber avait une large préférence
pour la psychologie dite rationnelle qu’il opposait à la psychologie des
profondeurs trop obscure et, à ses yeux, insuffisamment compréhensive
(R. Boudon, 2011, p.229).
241
sciences sociales » (V. De Gaulejac et al., 2007, p.13). Ce
cloisonnement, qui consisterait à partager strictement
l’intériorité de l’être, ne relevant que de la psychologie, et
l’extériorité que la sociologie serait seule capable d’approcher,
paraît difficilement tenable. Il faut se méfier de toute forme de
sociologisme comme de psychologisme.
122
Pour les sociologues cliniques, il existe trois formes de savoirs qui sont à
tort hiérarchisés. Le savoir académique du scientifique côtoie celui plus
pragmatique du professionnel et celui essentiellement expérientiel de
l’individu. Le sociologue clinique considère que ces trois formes de savoirs
sont égales, leurs rapports étant nécessairement dialectiques et partagés.
« L’approche clinique intervient dans l’institution même du savoir par un
souci de décloisonner horizontalement (multidisciplinarité académique) et
verticalement (les diverses formes de savoirs scientifiques, pratiques et
d’expérience) dans la compréhension de l’action » (Rhéaume, 2007, P.73).
242
par les individus. Le sociologue est aussi un homme d’intuition
qui doit laisser parler ses sentiments et ses ressentis.
123
C’est d’ailleurs par ce recours à l’étude clinique comme méthode
qualitative que Friedberg entend se détacher de la standardisation des
méthodes d’enquêtes quantitatives (1993, p.312).
124
La dualité structurelle vient que la contrainte sociale qui s’exerce sur
l’individu lui confère aussi des compétences. Entre contraintes et
compétences, il y a interaction et action réciproque.
243
par l’argumentation, par le raisonnement, par la hiérarchisation
des faits, les situations sociales qu’ils rencontrent. « Nous
sommes tous des sociologues à l’état pratique » écrivait Schütz
(cité par Coulon, 2002, p.4). Comme le souligne aussi Molénat,
les individus possèdent l’intelligence de leur action (2006,
p.51). Ils sont des acteurs réflexifs, c’est-à-dire des acteurs en
général compétents pour porter un regard sur leurs actions, pour
en mesurer les conditions d’émergence et en partie les
conséquences.
Pour Giddens (1987), cette réflexivité revêt même un usage
systématique car indispensable pour orienter et maintenir les
systèmes sociaux. « Tous les êtres humains sont des agents
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125
Remarquons que, chez Bourdieu, la réflexivité de l’individu s’arrête à ce
niveau pratique d’ajustements routiniers. Ne pouvant que difficilement
s’extraire du sens commun, les individus, pense l’auteur, ne peuvent, la
plupart du temps, accéder au principe de leur action, de leur malaise ou de leur
mécontentement (1993, p.1413). En apportant une connaissance théorique à la
connaissance pratique de l’individu (Bourdieu parle de « connaissance de
connaissance »), le sociologue joue ainsi pleinement son rôle explicatif de la
société.
244
et causales des enchaînements de leurs actions permettent aux
individus d’orienter de manière relativement efficiente leurs
comportements (Dubet, 1994, p.225). A un niveau supérieur, la
réflexivité, explique Giddens, renvoie à la « conscience
discursive ». Cette conscience s’exerce quand l’individu
parvient à exposer de manière cohérente les raisons de son
action, quand il peut « mettre en mots des choses » (Ibid., 1987,
p.93). Dans la mesure où cette forme de réflexivité supérieure
est accessible essentiellement à travers le discours interactif, il
importe au sociologue se susciter la conversation, de la
maintenir et d’amener, par la parole, les individus à développer
leur capacité à se situer par rapport à l’action126.
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126
La notion de conscience pratique développée par Giddens peut être
rapprochée de celle d’ « indexicalité » forgée par l’ethnométhodologie. Pour
Garfinkel, le sens de toute action est indissociable de sa situation locale. En
d’autres termes, on ne peut comprendre une action qu’en la situant dans son
contexte de production. De la même manière, la conscience discursive trouve
quelques affinités avec la notion d’ « accountability » de Garfinkel. Par ce
mot, il s’agit d’affirmer que tout groupe, tout individu doit être capable de
rapporter les raisons de ses actes, de les mesurer et de les expliquer.
245
situation nouvelle ou inhabituelle, face à l’obligation
impérieuse de changer ses habitudes. Jean-Claude Kaufmann
(2001) insiste sur la dimension éclatée et multiforme de la
réflexivité qui lui apparaît incertaine et peu unifiée. Bernard
Lahire (2001) dit la même chose. Pour lui, la réflexivité n’a
aucunement un caractère d’unicité. L’homme a recours à une
multitude de petites réflexivités qui surviennent en permanence
dans la vie quotidienne, dans les déplacements d’un champ
social à un autre, lorsqu’il est confronté à des désajustements
culturels (l’entrée dans une école), sociaux (hospitalisation) ou
encore individuels (licenciement, vexation). Relativisant l’hyper
réflexivité de Giddens, Alain Ehrenberg y voit davantage une
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127
Dans le raisonnement récursif, produit et producteur sont indissociables
dans la mesure où « le produit est producteur de ce qui le produit » (E. Morin,
2005, p.115). La récursivité implique qu’il n’existe pas de relations univoques
ou unilatérales où à chaque effet correspondrait une cause. La récursivité
suppose bien davantage des relations circulaires, en boucle, entre
l’environnement et l’individu, entre les causes et les conséquences, entre les
règles et les ressources (Giddens). Entre la macro et le microsocial, il y a une
production incessante générée par des interactions permanentes.
247
vie, ces personnes vont profiter de l’occasion que leur offre
l’enquêteur, pour raconter leur quotidien et s’interroger sur
elles-mêmes. En se livrant à des « commentaires continuels sur
leurs activités » (Molénat, 2006, p.53), elles réalisent par là
même un travail d’explicitation utile, voire salvateur. Le simple
fait d’avoir un interlocuteur attentif conduit les individus à
s’exprimer et trouver les mots pour exposer leurs souffrances et
leurs malaises. Dans une certaine mesure, le sociologue
contribue à créer les conditions favorables à cette auto-analyse
réflexive. Certes, bien souvent les capacités créatrices et
réflexives des acteurs, tout à la fois agents et sujets, sont
masquées « par la banalité du moi et la nature routinière de
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249
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250
INDEX THEMATIQUE
Analyse stratégique : 35, 46, 80, 81, 82, 89, 99, 100, 102, 104,
106, 107, 108, 111, 113, 114, 120, 124, 131, 134, 135,
139,151, 182, 194, 208.
Demande sociale : 22, 34, 154, 155.
Engagement et distanciation : 22, 23, 149, 202, 212, 225, 226.
Ethique sociologique : 33, 38, 104, 212, 220, 227, 228, 229,
230, 235.
Indiscipline théorique et méthodologique : 34, 156, 157.
Maïeutique : 36, 38, 155, 156.
Réalisme professionnel : 51, 66, 77, 78.
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251
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274
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS ………………………………….……….. 11
PREFACE……………………………………………………… 13
275
- Le paraître sportif comme compétence professionnelle ….…. 67
4. L’exemple du « reformatage » des maîtres nageurs
sauveteurs dans une entreprise délégataire ………………..….. 68
- Les compétences sécuritaires et techniques du maître nageur .. 69
- Le choix du « reformatage » professionnel par le manager … 69
- Typologie des managers et compétences professionnelles
attendues chez les MNS ……...…………………………………. 73
5. Le réalisme professionnel de l’acteur réflexif ……………… 77
- Les caractéristiques du réalisme professionnel ………......... 77
- Approche microsociologique et réflexivité de l’acteur ……….. 79
organisations ………………………………………………........ 80
- Les cadres théoriques et leur portée dans les organisations
associatives, sportives et de loisirs ……………………………… 82
276
3. Critique de la théorie des régulations appliquée aux
organisations associatives, sportives et de loisirs ……….……. 114
3.1. La régulation conjointe dans un service municipal …….. 116
- Régulations et sous-cultures de groupes ………………………... 116
- La caisse noire des maîtres nageurs …………………………….. 118
- Le réalisme de la concession réciproque ………………………... 119
3.2. De l’amateurisme au professionnalisme, le projet
organisationnel est un problème ……………………………. 120
- Une régulation d’ensemble contrariée par les multiples
régulations locales …………………………………..…………... 121
- Le projet d’entreprise est un problème ………………………... 122
4. Critique de la théorie des conventions appliquée aux
organisations associatives, sportives et de loisirs …………….. 124
4.1. Affrontement entre les mondes : le cas des managers
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277
- Posture maïeutique et réhabilitation du sens commun comme
philosophie de vie ………………………………...…………...... 155
- Pour le métissage méthodologique et l’indiscipline
transdisciplinaire ………………………………...……………… 156
- Confrontation, blessure narcissique et recherche de
significations communes ………………………………………... 158
3. Pour une sociologie d’intervention cognitive ET caméraliste 159
278
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