L'affaire de la lettre: Série policière
Par Pascal Demeure
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À propos de ce livre électronique
Saint-Genix-sur-Guiers, petit village Savoyard endormi dans la froideur de l’hiver. Pourquoi Josselin a-t-il disparu ? Où est passé ce gosse du village ? Quel effroyable secret cache sa famille ? Voilà qu’un mauvais plaisantin a accroché une boîte aux lettres aux grilles du cimetière. Pour qui ? Pourquoi ?
Deux insupportables villageoises, rivales et loufoques, tenteront à leur manière d’apporter leur aide au privé. Tom Anquette, ex flic de la PJ de Marseille, bourru et solitaire, en aura bien besoin pour élucider tous ces mystères.
Un improbable trio est né !
Le premier volet des investigations du détective privé Tom Anquette, à lire sans hésitation !
EXTRAIT
Quel était le plaisantin qui s’était amusé à faire une telle blague ? Le curé ressortit à cet instant de la chapelle. Crépin l’appela et lui demanda de s’approcher.
— Qu’y a-t-il pour ton service ? questionna-t-il.
— Regardez, monsieur le curé, c’est incroyable, non ?
Quatre yeux étaient fixés sur une banale boîte aux lettres en fer qui allait devenir rapidement la vedette locale du moment. Crépin voulut l’ouvrir, le curé l’en dissuada.
— Allons voir le maire, il saura dire ce que nous devons faire !
Ils se précipitèrent tous deux jusqu’au bureau du premier magistrat de la ville qui ne sembla pas s’inquiéter outre mesure et demanda à Crépin de vérifier les prochains jours si les farceurs ne poussaient pas la plaisanterie jusqu’à mettre du courrier à l’intérieur.
— Rien de bien méchant, les rassura-t-il, pas de très bon goût, j’en conviens, mais pas très grave, croyez-moi !
CE QU'EN PENSE LA CRITIQUE
Une écriture agréable, une trame qui tient le lecteur, des anecdotes qui s'entremêlent et dévoilent leur importance au fil du roman, d'autres qui ne sont là que pour faire rire, bref un livre sympathique et un auteur qui se fait une place. - Le Régional.fr
À PROPOS DE L'AUTEUR
Originaire du Dauphiné, Pascal Demeure, chef d'entreprise, vit en Provence. L'affaire de la lettre est son cinquième roman et le premier de la série Tom Anquette.
En savoir plus sur Pascal Demeure
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Aperçu du livre
L'affaire de la lettre - Pascal Demeure
1
C’était quelques jours seulement après Noël. Le village semblait être en hibernation constante sous une neige abondante. Crépin semblait encore plus vieux et plus voûté que d’habitude. Il avait du mal à monter la route verglacée qui le menait au cimetière. Là, comme chaque jour depuis près de trente ans, il arpentait les allées les unes après les autres afin de vérifier que tout était propre et bien rangé. L’été, les fleurs devaient être bien arrosées et les mauvaises herbes arrachées sur les tombes où il ne venait jamais plus personne. Des amis, il en avait vu des tas se laisser glisser au fond du trou et il avait la conviction de ne jamais les avoir réellement quittés. Il parlait à certains d’entre eux, leur disant que bientôt, il viendrait les rejoindre. Mais ce jour-là n’arrivait pas et la fatigue continuait de s’amonceler sur ses épaules qui semblaient porter dorénavant tout le poids du monde. Il faisait froid ce matin-là, un vent glacial passait à travers les mailles de son vieux gilet. Il arrangea ici et là quelques pots, rattrapa un arrosoir qui s’envolait sous les rafales et décida de ne pas trop s’attarder. Il n’y aurait pas d’enterrement aujourd’hui et il n’aurait donc pas à remonter ici ce soir. Crépin habitait le cœur du village, juste à côté de la place de l’église, dans une petite ruelle mal ensoleillée. Il n’avait jamais été marié, s’était intéressé à des tas de choses mais n’avait jamais eu le courage de quitter St-Genix pour tenter sa chance ailleurs. Il n’était pas malheureux, avait toujours mangé à sa faim même pendant la guerre et n’enviait rien ni personne. Il voulait simplement vivre paisiblement et qu’on lui foute la paix. Il remonta jusqu’à la grille et aperçut le curé qui se rendait à la chapelle de Pigneux. Les deux hommes se saluèrent d’un hochement de tête, le curé pénétra rapidement à l’intérieur de la petite église. Crépin, quant à lui, tira énergiquement sur le portail afin qu’il ne se rouvre pas au premier coup de vent. Il n’y fit d’abord pas attention et commença sa descente vers le village en veillant à ne pas poser le pied sur une plaque de verglas. Ce n’est qu’au bout de quelques mètres qu’il s’arrêta net et, lentement se retourna. Non, il n’avait pas rêvé ! Avec une agilité dont il ne se serait pas cru encore capable, il rebroussa chemin et écarquilla davantage les yeux. Elle n’y était pas hier, il en aurait mis sa main à couper. Quel était le plaisantin qui s’était amusé à faire une telle blague ? Le curé ressortit à cet instant de la chapelle. Crépin l’appela et lui demanda de s’approcher.
— Qu’y a-t-il pour ton service ? questionna-t-il.
— Regardez, monsieur le curé, c’est incroyable, non ?
Quatre yeux étaient fixés sur une banale boîte aux lettres en fer qui allait devenir rapidement la vedette locale du moment. Crépin voulut l’ouvrir, le curé l’en dissuada.
— Allons voir le maire, il saura dire ce que nous devons faire !
Ils se précipitèrent tous deux jusqu’au bureau du premier magistrat de la ville qui ne sembla pas s’inquiéter outre mesure et demanda à Crépin de vérifier les prochains jours si les farceurs ne poussaient pas la plaisanterie jusqu’à mettre du courrier à l’intérieur.
— Rien de bien méchant, les rassura-t-il, pas de très bon goût, j’en conviens, mais pas très grave, croyez-moi !
Crépin voulut croire le maire mais une impression bizarre commençait à l’habiter. De tels faits ne sont jamais anodins, c’était étrange tout de même ! Et c’est le cœur haletant qu’il se retrouva le lendemain matin aux grilles du cimetière. Sans réfléchir un quart de seconde supplémentaire, il ouvrit la boîte et constata presque avec déception que rien ne se trouvait à l’intérieur. Ses pensées restèrent fixées sur elle durant tout son travail. Les quelques personnes qui s’étaient décidées à affronter le froid toujours persistant afin de rendre visite à leur mort ne parvinrent pas à le distraire de cet objet insignifiant qui envahissait son esprit. Faut-il être con, songeait-il, sans pour autant parvenir à chasser ses idées farfelues. Parce qu’il était persuadé que quelque chose allait se produire, il trouvait cela presque amusant, en tout cas excitant, ne doutant pas un seul instant que cette plaisanterie ne se voulait pas méchante et n’était que le fruit de l’imagination de gamins oisifs cherchant à s’occuper pendant leurs vacances de Noël. Au fond, l’idée qu’un cimetière ait un endroit afin d’y déposer des lettres destinées à ses occupants lui plaisait. Son caractère inventif certainement ! Lorsqu’il tira le portail derrière lui en fin d’après-midi, c’est presque naturellement qu’il ouvrit la boîte, comme s’il vérifiait, chez lui, son propre courrier. Rien ! Toujours rien, peut-être demain. La même scène se reproduisit plusieurs jours, jusqu’au samedi suivant. Il y avait un enterrement ce matin-là. Une cérémonie émouvante puisqu’un enfant de treize ans rejoignait ses grands-parents dans le caveau familial, sous les pleurs de sa mère qui se débattait dans les bras de son époux pour embrasser, une dernière fois, le cercueil de son fils. Crépin assista à la scène, le cœur chamboulé. Des larmes lui vinrent aux yeux, il les essuya d’un geste maladroit, il n’avait pas l’habitude de pleurer. Une heure après leur arrivée au cimetière, chaque membre de la famille endeuillée remontait lentement les allées, suivi des amis et connaissances ayant désiré partager le chagrin de ces parents complètement perdus. Lorsque les dernières intonations de voix se firent entendre, Crépin se trouva, seul, à côté de la tombe du jeune homme. Son travail commençait. Il devait rendre au lieu son apparence calme d’une éternelle sérénité. Il arrangea la pierre tombale, déposa dessus toutes les fleurs apportées par le fleuriste qui devait encore remercier le ciel d’une journée si lucrative. Un dernier coup de balai, puis de râteau pour effacer les mouvements de pas sur le gravier, l’allée était redevenue propre, nette, silencieuse. Le froid pinçait, le vent sifflait, il devait rentrer pour se réchauffer s’il ne voulait pas attraper la mort. Là où il se trouvait, c’était plutôt facile ! Les grilles grincèrent une nouvelle fois, il ouvrit la boîte aux lettres presque machinalement lorsqu’un bruit sourd sortit de sa gorge sans qu’il ne s’en rende compte. Une lettre ! Il y avait un courrier à l’intérieur du petit caisson. Les doigts tremblants, il attrapa l’enveloppe fébrilement, la retourna et faillit s’évanouir à la lecture des mots qui y étaient écrits. Deux simples mots, un nom et un prénom : Léo Gérand. Ceux du jeune homme qui venait d’être enterré aujourd’hui même ! Crépin fourra la lettre à l’intérieur de son veston défraîchi et descendit en trombe au village. Ses articulations ne lui faisaient plus mal, il semblait porté par une force venue d’ailleurs. Arrivé à l’hôtel de ville, il se rendit directement devant la porte du maire et frappa. Sans en attendre l’autorisation, il pénétra à l’intérieur du bureau. Son occupant était au téléphone ; il invita d’un geste de la main son visiteur à s’avancer.
— Tu pourrais attendre qu’on te dise d’entrer, dit-il en raccrochant. Qu’y avait-il de si urgent ?
— Ça ! rétorqua Crépin en déposant le courrier sur la table de travail.
— Qu’est-ce que c’est ?
— Une lettre.
— Je vois bien, tu me prends pour un imbécile ?
— Je l’ai trouvée dans la boîte du cimetière.
— Nom de Dieu !
— Vous pouvez le dire ! Regardez à qui elle est destinée.
Le maire parcourut le recto de l’enveloppe.
— C’est…
— C’est le gamin qui a été enterré aujourd’hui.
— Il… il reçoit déjà du courrier ! ironisa le maire.
— C’est intelligent… venant de vous, vraiment !
— Excuse-moi, je ne sais pas ce qui m’a pris !
— Vous ne l’ouvrez pas ?
— Non, enfin… j’en sais rien… le mieux serait peut-être qu’on la remette à ses parents, à la famille, enfin je ne sais pas moi !
— Si la personne qui l’a écrite avait voulu l’adresser à la famille du petit, il ne l’aurait pas déposée dans la boîte du cimetière.
— Tu as raison.
— Alors ouvrez-la, ordonna Crépin.
— Écoute, je ne sais pas. Laisse-la moi, je vais réfléchir et je te dirai, tu es d’accord ?
— C’est vous qui décidez…
— Je… je te tiens au courant, conclut le maire, hésitant et visiblement gêné.
Lorsque son visiteur prit congé, il enfila son manteau et se précipita hors de son bureau. La secrétaire de mairie, en conversation avec un administré, n’eut pas le temps de lui demander l’heure de son retour. Il avait disparu en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Dehors, le vent raviva la circulation de son sang et ses pommettes prirent rapidement une couleur pourpre. Des petits vaisseaux s’illuminèrent sur son nez, lui donnant l’aspect d’un alcoolique presque en rémission. Ses pas énergiques le conduisirent rapidement jusqu’à la toute nouvelle boutique qui venait d’ouvrir au village. Il poussa la porte et aperçut Tom Anquette en train de vérifier si une tonalité s’échappait bien de son combiné lorsqu’il le décrochait. À l’arrivée du maire, il se leva.
— Quel bon vent vous amène, monsieur le maire ? Je suis heureux de vous voir !
— Moi aussi, mais pas de mondanité… c’est au flic que je suis venu parler.
— Au détective, s’il vous plaît, terminé le flic… Tom Anquette, détective privé, pour vous servir.
Tom avait répété cette phrase à maintes reprises. Il commençait à désespérer de pouvoir la prononcer un jour. Il était toutefois surpris que son premier client, enfin la première personne qui réclamait son aide, soit le maire du village. Ce dernier, sans y avoir été invité, approcha une chaise du bureau de Tom, s’y installa et jeta l’enveloppe sur le bureau du privé.
— C’est une lettre…
— Je vois, merci !
— Je vous explique…
— … S’il vous plaît.
Le maire raconta en détail l’installation de la boîte aux lettres sur le portail du cimetière jusqu’à la trouvaille de Crépin, aujourd’hui même.
— Je voudrais un conseil de spécialiste, demanda-t-il. Pensez-vous que nous devrions la porter à la famille, cette missive ?
— Je ne crois pas, répondit Tom. Si son expéditeur avait voulu l’envoyer à la famille, il l’aurait fait !
— D’accord… alors nous, qu’est-ce qu’on fait avec ?
— Eh ben on va l’ouvrir, monsieur le maire.
— Arrêtez de m’appeler ainsi, j’ai un prénom comme tout le monde, c’est Gabriel.
— Je savais.
— Vous l’ouvrez ?
— Immédiatement, rétorqua Tom, heureux d’utiliser pour la première fois le coupe-papier flambant neuf qui scintillait dans son pot à crayons. Vous connaissez la famille de ce garçon ? demanda-t-il au maire qui fixait du regard l’enveloppe qui s’ouvrait lentement.
— Oui, bien entendu, c’est une vieille famille du village.
Tom retira le papier qui se trouvait à l’intérieur, le déplia et le tendit au maire.
— Non, vous… allez-y.
Le détective parcourut les trois lignes écrites à la machine, retira ses lunettes qu’il déposa sur son bureau et soupira.
— On n’est pas dans la merde ! dit-il en guise de fatalité.
Le maire s’empara de la feuille de papier, chaussa lui aussi ses lunettes et lut le courrier. Il semblait décontenancé, dégoûté, lorsqu’il leva ses yeux sur Tom.
— Que comptez-vous faire ?
— Ça dépend de vous.
— C’est-à-dire ?
— Soit vous prévenez la gendarmerie et je fais rien, répondit Anquette, soit vous ne dites rien… enfin rien pour le moment et j’essaie de comprendre ce qui se passe, de fouiller un peu, de faire mon métier quoi !
— Et qu’allez-vous trouver ?
— Ça, monsieur le maire… heu, Gabriel, j’en sais rien. C’est toujours en cherchant qu’on trouve, il faut que je cherche… alors je pourrai répondre à votre question. Combien de temps vous me donnez ?
— On va tenir cette histoire secrète, il faut d’ailleurs que je prévienne Crépin. Si personne n’est au courant, on a le temps. Prenez le temps qu’il vous faut… mais faites vite tout de même !
Le maire prit congé. Tom promit de le tenir rapidement au courant de ses investigations et, une fois seul, relut une nouvelle fois les lignes qui défilaient sous ses yeux… Il en avait vu dans sa carrière de flic marseillais, mais cette histoire avait quelque chose d’inhabituel qu’il ne parvenait pas encore à cerner. Peut-être ne détenait-il encore que la première pièce d’un puzzle morbide et infernal ? Il n’en savait rien. Il avancerait dans cette affaire comme dans toutes les autres, pas à pas, étape après étape, jusqu’à la découverte de la vérité, quelle qu’elle soit ! Il le devait, ne serait-ce que pour ce gamin qui voulait simplement vivre mais pour qui le destin en avait décidé autrement.
2
Le dimanche avait été calme, trop calme pour Tom qui trépignait de ne pouvoir commencer à enquêter sur l’affaire de la lettre du cimetière. Il ne sortit pas de la journée qu’il passa à bricoler, terminant, une bonne fois pour toutes, son placard d’entrée commencé il y a plus d’un mois maintenant. Son agence se trouvait juste en dessous de son petit trois-pièces, une chambre, un séjour et une cuisine, le tout ne représentant pas plus de soixante mètres carrés, mais il ne lui en fallait pas plus pour qu’il soit satisfait de son sort. Lorsqu’il y réfléchissait, seul, au seuil d’une soirée qui allait être plus longue que d’habitude, il se revoyait alors à Marseille avec sa femme et son fils, ses deux êtres chers qui lui manquaient terriblement. Là-bas, ils habitaient un grand appartement situé à la Viste, juste au-dessus de l’Estaque. De sa terrasse continuellement fleurie, il avait une vue superbe sur le château d’If et sur l’île du Frioul. Combien de pastis avait-il bus à cet endroit, admirant sans s’en lasser ce paysage paradisiaque ! C’était le temps du bonheur, un bonheur à trois que rien ne semblait pouvoir détruire. Il était si heureux, si fier de son fils, de la réussite de son boulot, de son amour partagé avec Virginie… Lorsqu’ils se rencontrèrent la première fois, jamais Tom n’aurait pu imaginer qu’elle deviendrait sa femme. Comment un mec comme lui avait-il pu lui plaire ? À trente ans déjà, un certain embonpoint l’enveloppait. Du haut de son mètre soixante, il devait lever la tête pour regarder sa princesse dans les yeux. C’était une très belle femme sur laquelle le temps ne semblait pas laisser de trace. Optimiste, souriante, elle donnait confiance à son entourage et plus particulièrement à son mari qui tirait de leur union toute l’énergie nécessaire pour mener à bien ses enquêtes. Tom n’aimait pas son propre corps, il ne se trouvait pas beau et débordait d’humour et de gentillesse pour compenser ses carences physiques. Un visage rond, le nez pointu mais l’œil lumineux, il se trouvait beaucoup trop petit et pataud, se refusait à faire le moindre sport collectif et préférait les balades solitaires en vélo ou à pied même si de récents problèmes d’articulations l’obligeaient à en espacer la cadence. Il était par contre incollable en musique classique et avait eu à ce sujet d’intéressantes discussions avec Virginie dont la