La vérité révélée
Qui a bien pu m’envoyer cette carte de Saint-Valentin ?
Sur la carte, un angelot blond jongle avec des petits cœurs rouge vif sous l’œil fripon d’un second qui l’accompagne à la flûte. A ses couleurs passées et son format, je dirais qu’elle doit dater des années 1950, on n’en fait plus de telles en 1988.
Je n’ai pas d’amoureux. En tout cas, pas à ma connaissance. Cette carte ne m’est pas adressée. D’ailleurs, nous sommes en juin, la Saint-Valentin est passée depuis longtemps. Le cachet de la Poste n’est pas très lisible. Je me déplace jusqu’à la fenêtre et j’ajuste les lunettes sur mon nez… Maudite cinquantaine qui m’a rendue bigleuse ! Je déchiffre le tampon de la poste : 1958. J’en étais sûre !
Je connais bien ce genre de carte : mon grand-père maternel, Richard, menuisier de son état, aimait aussi les « belles images », comme il disait. Il en avait toute une collection. J’adorais y fourrer mon nez quand j’étais gosse. Cartes postales, cartes de vœux, cartes de naissance… Elles étaient bien classées, par année et par genre, dans des boîtes en carton qu’il rangeait dans un tiroir de la commode. Ma grand-mère, de mauvaise grâce, avait fini par lui céder un peu de place !
La pauvre femme n’avait appris qu’à la mort de son mari que, sans le savoir, il lui avait constitué un petit héritage. En revendant la collection, elle a pu payer les obsèques de mon grand-père – à l’époque elle n’avait pas un sou. Je suis certaine qu’elle aurait pu en tirer bien plus que ça, mais elle n’avait pas eu le cœur de négocier avec le brocanteur. Les outils de menuiserie ont aussi été vendus une bouchée de pain. Que dis-je ? Une miette de pain !
C’est fou : il se trouve toujours des gens que l’on connaît depuis des années, en qui on a toute confiance et qui pourtant n’hésitent pas à abuser de notre faiblesse dès que l’occasion se présente. Le type qui a acheté les outils de mon grand-père était pourtant
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